de s e r r e t FOY mars 2016 - N°30
Journal de la communauté catholique du pays foyen Quand l’étranger frappe à notre porte…
La photo du petit Syrien Aylan, ayant fui avec son père la guerre de son pays, a permis au monde entier de prendre une conscience plus aiguë du problème des migrants et des réfugiés. Les aînés ! Vous devez vous rappeler ce livre d’Alain Peyrefitte publié il y a environ 40 ans « Quand la Chine s’éveillera ». On parlait alors du « péril jaune ». Eh bien aujourd’hui nous voici pour ainsi dire au pied du mur. Oh ! Ce n’est pas l’hégémonie chinoise ou les Chinois eux-mêmes qui en 2016 nous font peur mais ces millions de personnes qui venant de Syrie, d’Irak, d’Afghanistan ou d’Afrique fuient la guerre, la faim ou encore la persécution et qui se retrouvent aux portes de l’Europe, chez nous, à notre porte. Faut-il avoir peur ? En dehors de quelques terroristes infiltrés, la majorité d’entre elles sont à la recherche de sécurité, de travail et bien entendu d’une vie plus digne. Deux solutions : soit s’ouvrir ou se replier sur nous-mêmes. Mais « migrant » ! Ne l’avons-nous pas été un jour ou l’autre – en quittant notre cher Périgord ou venus d’une autre région de France ou d’un autre pays pour travailler ? Comment nous sommes nous intégrés dans la nouvelle région ? Vous allez pouvoir lire quelques témoignages dans ce numéro de « Terres de Foy ». Oui les migrants comme les réfugiés d’aujourd’hui nous interpellent, ils peuvent nous déranger – il faut le dire – mais je ne vois pas comment rester indifférents ou silencieux. Tout le monde est appelé à réagir, à bouger, aussi bien la société civile que nos Églises et en pays foyen ça bouge, on s’organise ; ainsi s’est créé le « Collectif réfugiés ». Et je me permets de dire que dans ce travail les chrétiens ne sont pas les derniers à se mobiliser, loin de là ; en s’inspirant de la Parole du Christ et de notre pape François : « Tu étais un étranger et nous t’avons accueilli. »
Père Jean Torcel,
prêtre en pays foyen
Migrer pour survivre Le centre d’accueil pour les immigrés sans papiers de Sangatte a ouvert en 1999. Quelque 2 000 migrants s’y entassent aujourd’hui.
DOSSIER p.4-5
alain pinoges/ciric
ÉDITO
TROIS QUESTIONS À DES BOAT PEOPLE DU MARCHÉ ■ Douang et Bounmy sont laotiens. Ils ont fui le communisme et les persécutions ethniques. Sur le marché de Sainte-Foy, chacun a remarqué la qualité des produits et le sourire de ce couple qui propose des spécialités culinaires du Laos.
« L’avenir de nos enfants est ici » - Est-ce que vous souriez toujours ainsi à la vie ? - Comme tout le monde, nous avons nos humeurs et la fatigue des lève-tôt mais hors de question de le montrer au travail. J’ai connu les petits boulots durs en région parisienne. Je n’ai pas l’habitude de me plaindre. Les enfants sont en études, ça coûte. Le travail, c’est primordial. Et puis la sagesse bouddhiste nous aide.
- Et vous comment vivez-vous ce déracinement ? - Nous avons perdu pratiquement tous les membres de nos familles au Laos. La nostalgie du pays nous prend parfois mais la qualité de la vie et l’hospitalité de la France dépassent tout. On a ici une liberté impensable au Laos. L’avenir de nos enfants est ici, inutile de se retourner vers un passé d’épreuves inouïes.
- Justement, les enfants, parlons-en. - Aucun ne prendra notre suite. Ils marchent bien dans leurs études et ont d’autres ambitions. Ils apprécient de se retrouver en famille le dimanche et repartent vite sur Bordeaux, la grande ville. Ils aiment bien les réunions familiales mais s’intéressent peu au pays de leurs parents, aux traditions du Laos. On sent bien qu’ils ont tourné la page. La vie moderne c’est leur avenir.
Propos recueillis par A. Bertoni
HISTOIRE
En 1979, l’État français décide d’accueillir des réfugiés de la péninsule indochinoise. Il en arrive 128 531 répartis dans des foyers de transit où un séjour obligatoire de 3 mois leur permet d’apprendre la langue et de satisfaire aux formalités administratives.
Espérons que les mets rares et le sourire avenant de Douang et Bounmy continueront encore longtemps à éclairer notre marché.