JUIN 2018 - N°39
Dépêche-toi de prendre du temps !
ÉDITO
Hugues Walser, prêtre en Pays foyen
MICRO-TROTTOIR ■ Sacha, Ewenn, Aline et Marie-Jo donnent leur définition du temps. Joueur, spirituel, ou philosophe, ils ont tous une vision bien à eux du temps qui passe.
C’est quoi le temps pour toi ? Sacha, 7 ans et Ewenn, 5 ans : « Eh ben, le temps c’est attendre être patient, il faut beaucoup attendre. Le temps, c’est que des fois il y a l’automne et des fois l’hiver ! Le temps c’est juste quelque chose… Les différentes années, il fait chaud puis froid. Les feuilles tombent pour se rouler dedans après il y a des fleurs. C’est pas très chouette l’hiver, l’été c’est mieux ! C’est tout ce que j’ai à dire ! » Aline, 50 ans : « Le temps est lié à tout. Pour moi il se définit bien dans la Bible : il y a un temps pour tout, un temps pour naître, un temps pour mourir, un temps pour planter, un temps pour la récolte, un temps pour pleurer, un temps pour rire… » Marie-Jo, 66 ans : « Il est donné en cadeau, chaque matin et on ne le sait pas. On l’a, on ne l’a plus ; on le perd mais on le trouve toujours ; on le prend, on en donne ; on en manque, on court après ; on en garde pour soi ou on le gaspille ; on le passe et même on le tue ; on l’arrête, on en profite ; on le vit pourvu qu’il soit présent. Mais quoi ? Cadeau insaisissable ! Le goûter, le savourer, se fondre en lui dans la merveille de l’instant présent, le temps ! » dr
Notre société a des problèmes avec le temps. D’un côté on veut à tout prix en gagner (le temps c’est de l’argent !) ce qui est souvent absurde au regard de la relativité de la valeur de la vie humaine. D’un autre côté, par compensation, on réduit le temps de travail : préretraite, rattrapages de vacances, 35 heures, RTT. De ces heures gagnées (sur quoi ? sur qui ? pour qui ? pour quoi ? etc.) certains font le meilleur usage possible, prenant du temps pour vivre ; d’autres semblent emportés dans un mouvement perpétuel dont d’ailleurs nous sommes tous atteints plus ou moins, car, horreur, c’est contagieux ! Alors que tous ne profitent pas de vacances (ou y sont hélas condamnés par le chômage) celles-ci offrent de prendre du temps, se reposer, se repositionner, se réapprivoiser : pour choisir, prendre une décision, mûrir une idée ou un projet. Mais aussi : pour discerner, admirer, voire contempler, avec un regard neuf la modernité, les merveilles de la nature ou le travail des hommes. Et encore : pour découvrir, s’enrichir l’esprit et le cœur, méditer, prier. Enfin : pour rencontrer. « On ne connaît bien que les choses qu’on apprivoise. Les hommes n’ont plus le temps de rien connaître. Ils achètent des choses toutes faites chez les marchands. Mais comme il n’existe pas de marchands d’amis, les hommes n’ont plus d’amis. Apprivoiser signifie : créer des liens » (le Petit Prince de A. de Saint-Exupéry). Bons mois d’été !.. Dépêche-toi de prendre du temps !
corinne mercier/bse-ciric
Le temps de se rencontrer
Propos recueillis par M.-F. Rossignol
Sacha et Ewenn philosophent sur le temps.