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Revue Africaine de Santé et de Productions Animales © 2005 E.I.S.M.V. de Dakar
A RTICLE ORIGINAL Intérêt et limites de l’utilisation des fourrages ligneux dans l’alimentation des petits ruminants nourris à l’auge M. SANGARE* CIRDES 01 BP 454 Bobo-Dioulasso 01- Burkina Faso * Correspondance et tirés à part , e-mail : mamadousangare@hotmail.com
Résumé Cet article fait la synthèse de données issues d’expériences effectuées sur l’utilisation des fourrages ligneux dans l’affouragement des petits ruminants, principalement en Afrique tropicale. Il en ressort que les fourrages ligneux ont une contribution essentielle dans la nutrition des petits ruminants élevés dans les zones tropicales subhumides et semi-arides d’Afrique. Leur teneur en protéines brutes varie de 95 à 280 g kg1 MS, rivalisant avec celle des concentrés classiques utilisés comme suppléments énergétiques et azotés. Cependant, la plupart renferme également des taux élevés de parois cellulaires (140 à 620 g NDF kg-1 MS), de lignocellulose (50 à 576 g ADF kg-1 MS) et surtout de composés phénoliques variés tels que les tannins (5 à 190 proanthocyanidins A550 nm g-1 NDF). Les espèces autochtones des pâturages des zones tropicales d’Afrique ont des teneurs en Ca (3,8 – 61,3 g kg-1 MS) et en Cu (5.1 – 21.4 mg kg-1 MS) généralement suffisantes pour couvrir les besoins des petits ruminants, mais des taux moyens de P (0,7 – 3,7 g kg-1 MS) et de Na (0,03 – 0,26 g kg-1 MS) à quelques exceptions près en dessous du seuil de carence. Les fourrages ligneux sont généralement offerts aux petits ruminants en complément des fourrages grossiers à des taux variant entre 15 et 45 % de la MSI et apportent en moyenne 70 % de l’azote de la ration quotidienne. Selon sa nature, le tannin peut avoir un effet stimulant ou dépressif sur l’ingestion (59 à 82 g MS kg-1 P0.75 chez les ovins et 59 à 72 g MS kg-1 P0.75 chez les caprins), la digestibilité de la matière organique (410-620 g kg-1), de l’azote (10-906 g kg-1) et des parois cellulaires (5-592 g kg-1). Les traitements physiques comme le trempage dans l’eau ordinaire, le trempage dans une solution de polyethylene glycol (PEG), la supplémentation énergétique ou en ionophore (monésin) permettent d’améliorer la valeur alimentaire (MSI et CUD) des rations contenant des fourrages ligneux et d’augmenter les performances zootechniques (GMQ, production de laine, IC) des petits ruminants. (RASPA, 3 (3-4) : 190-199).
Mots-clés : Fourrage ligneux - Petits ruminants - Fourrage grossier - Tannins - Valeur alimentaire - Atténuation des effets néfastes Abstract Interests and limits of browse in nutrition of stall fed small ruminant The document synthesises data from experiments carried out on the use of browses in small ruminant feeding, mainly in tropical Africa. It shows that browses greatly contribute to the nutrition of small ruminant raised in tropical subhumid and semi-arid Africa. Their protein contents varies between 95 and 280 g kg-1 dry matter (DM), competing that of traditional feed concentrate used as energy and protein complement. However, most of them contain high proportion of cell wall or neutral detergent fiber (140 to 620 g NDF kg-1 DM), acid detergent fiber (50 to 576 g ADF kg-1 DM) and specially, phenolic compounds such as tannins (5 to 190 proanthocyanidins A550 nm g-1 NDF). Mostly, Ca (3.8 – 61.3 g kg-1 DM) and Cu (5.1 – 21.4 mg kg-1 DM) contents of natives browses from tropical African rangelands cover small ruminant requirement. Although, P (0.7 – 3.7 g kg-1 DM ) and Na (0.03 – 0.26 g kg-1 DM) rates are on average below the deficiency threshold. Browses are mainly offered in the proportion of 15 to 45 % DM ingested by small ruminants fed roughage, and may provide up to 70 % of daily diet protein. Depending on its nature, tannins may enhance or depress intake in sheep (59 to 82 g DM kg-1 P0.75) and goats (59 to 72 g DM kg-1 P0.75), diet organic matter (OM) digestibility (410 to 620 g kg-1), protein digestibility (10 to 906 g kg-1) and NDF digestibility (5 to 592 g kg-1). Physical processing like soaking in water or in polyethylene glycol (PEG), boiling, energy or ionophore (monesin) supplementation, could improve feeding valour (DM intake and digestibility) of diet containing browses and enhance small ruminants production performances (weigh gain, wool production, feed conversion ratio).
Key-Words : Browse - Small ruminant - Roughage - Tannins - Feeding value - Mitigate detrimental effects.
Introduction Les fourrages ligneux sont souvent considérés comme d’importantes ressources alimentaires pour le bétail dans les zones tropicales arides et semi-arides, particulièrement pendant la saison sèche. En effet, la plupart des espèces ligneuses conservent des feuilles vertes pendant une bonne partie ou toute la saison sèche [15]. De plus, ces feuilles vertes et d’autres organes comme les jeunes rameaux, les inflorescences et les fruits également prélevés par le bétail ont des teneurs en nutriments, particulièrement en azote (N) qui restent élevées durant la saison sèche. Pendant cette période, la plupart des pailles de graminées des pâturages tropicaux et certains résidus de céréales renferment moins de 3.75% PB et des taux en P, Na et d’autres minéraux en dessous du seuil de carence [9], [30]. RASPA Vol.3 N°3-4, 2005
Certaines espèces ligneuses locales utilisées en agroforesterie comme brise-vent ou dans les dispositifs anti-érosifs ont été vulgarisées également pour qu’elles contribuent à la supplémentation azotée du bétail pendant la saison sèche. Cependant, des études ont montré que plusieurs d’entre elles renferment des substances antinutritionnelles telles que les tannins (métabolites phénoliques) [46], qui affectent l’ingestion et la dégradabilité des fourrages grossiers [47], [56], la digestibilité des protéines et le métabolisme de N chez les ruminants [58], [8], et par conséquent leurs productions. La présente étude fait la synthèse des données sur : - l’effet des fourrages ligneux introduits ou autochtones sur la nutrition des petits ruminants ;
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les procédés utilisés pour atténuer les effets néfastes des tannins et des autres constituants des fourrages ligneux sur la nutrition et la production des petits ruminants principalement de race locale.
Matériel et Méthodes
1. COMPOSITION CHIMIQUE DES FOURRAGES LIGNEUX
Tout comme sur pâturage naturel, les fourrages ligneux introduits ou autochtones offerts à l’auge, sont des composantes essentielles dans l’alimentation des petits ruminants en zone tropicale d’Afrique. Le principal atout des fourrages ligneux est leur teneur élevée en protéines et le peu de variation de cette teneur au cours de l’année contrairement aux autres ressources fourragères cultivées ou naturelles. Les analyses bromatologiques [46], [12], [57], [27], [20] montrent que les fourrages ligneux notamment les légumineuses, ont des teneurs en protéines qui approchent parfois celles des concentrés classiques utilisés comme suppléments énergétiques et / ou azotés (Tableau I-1 et I-2). Par conséquent, leur apport aux ruminants vise à apporter principalement de l’azote dans le rumen pour une stimulation de la fermentation microbienne et une augmentation subséquente de la digestion et de l’ingestion des fourrages grossiers. Cependant, ces mêmes études et bien d’autres [23], [19] ont montré que beaucoup d’espèces ligneuses contiennent souvent des substances anti-nutritionnelles telles les tannins et divers autres composés secondaires. La définition classique du terme tannins s’adresse aux substances ayant la propriété de tanner la peau. Ils ne représentent qu’une fraction des métabolites phénoliques (hydroxyls, carboxyls…) des plantes. Ils sont de poids moléculaire très élevé (≥ 500) et ont la propriété de précipiter la gélatine, d’autres protéines [32] et macro molécules (amidon, cellulose). Le degré de précipitation est fonction de la nature et de la concentration du composé phénolique et des protéines présents dans la plante et de l’environnement chimique (pH) [28]. Ils sont subdivisés en deux
groupes: les tannins hydrolysables qui sont rapidement hydrolysés en fragments plus simples en milieu acide, basique ou en présence de certaines enzymes, et les tannins condensés appelés proanthocyanidines (PAs). Les PAs forment avec les protéines des liaisons hydrogènes complexes stables et insolubles entre pH 3.5 et 7, mais qui se dissocient et deviennent solubles aux pH < 3.5 notamment dans le compartiment distal du tube digestif. Ces deux groupes de tannins peuvent être présents dans les fourrages et ne peuvent pas être extraits séparément à 100 %. Ces substances peuvent affecter négativement l’ingestion et la digestibilité de la ration de base [46], [56], [57], la digestibilité et le métabolisme des protéines [47], [8], [58]. Dans certains cas, elles peuvent être toxiques pour les micro-organismes du rumen [8], [39] et / ou pour l’animal hôte lui même [39], et par conséquent, réduire les performances animales [25]. Par ailleurs le complexe formé par les tannins de certaines plantes avec les protéines, bien que réduisant la digestibilité de ces nutriments et la concentration de N ammoniacal dans le rumen, peut en se dissociant en milieu très acide (abomasum par exemple) augmenter le flux de protéines digestibles dans l’intestin. La réponse des animaux varie très largement en fonction de l’espèce fourragère et de la quantité offerte [46], [13], [20], du mode d’apport à savoir offert seul ou comme complément [14], [21], de la forme de présentation et des traitements éventuels [4], [41], [7]; [2], et des autres ingrédients de la ration [48], [36], [57]. Les parois cellulaires (NDF) et les lignocelluloses (ADF) sont aussi bien des constituants majeurs des fourrages ligneux (tableaux I-1 et I-2), que des facteurs déterminants de leur valeur nutritive. Il existe une grande différence inter- et intra-spécifique des taux de NDF et d’ADF dans les fourrages ligneux. Certains peuvent avoir des taux similaires et d’autres des taux supérieurs à ceux des pailles de graminées et de légumineuses herbacées des pâturages naturels des zones tropicales. La plupart des fourrages ligneux des zones soudano-sahéliennes ont des teneurs en P, en Na et en Zn inférieures au seuil de carence respectivement de 2 g kg-1 MSI, 0.6 g kg-1 MSI et 45 mg kg-1MSI ; [16], [30] tandis que leurs teneurs en Ca, K, Mg, Cu, Fe et Mn sont généralement suffisantes pour couvrir les besoins des petits ruminants [9]. Les faibles teneurs en P et le taux de Ca souvent élevé, consignés au tableau I-2 peuvent conduire à des rapports Ca/P défavorables chez les animaux nourris exclusivement de fourrages ligneux. [Tableau I-1 et Tableau I-2].
Tableau I-1: Composition de quelques fourrages ligneux introduits ou disponibles sur pâturage naturel des zones tropicales sub-humides ou sahéliennes d’Afrique
Espèce fourragère
Acacia cyanophylla (G) Acacia sieberiana (G) Acacia seyal (f) Sesbania sesban (f) Acacia tortilis (G) Acacia albida (G) Acacia nilotica (G) A.sieberiana (G) Acacia adansonii (f) Acacia adansonii (G) A. albida (G) A. albida (f) A. ataxacantha (f) A. senegal (f) A. seyal (f) A.sieberiana (f) A. tortilis (G) Bauhinia rufescens (f ) Piliostgma reticulata (f) Pterocarpus erinaceus (f) Adansonia digitata (f) Bombax costatum (f) Boscia senegalensis (f) Calotropis procera (f) Calotropis procera (G) Anogeissus leiocarpus (f) Combretum nigricans (f) C. glutinosum (f) Azadirachta indica Balanites aegyptiaca C. procera C. aculeatum Gliricidia sepium Faidherbia albida Carissa edulis Dichrostachys cinera L. leucocephala S. sesban
PB 143.8 131.3 206.3 281.3 135.6 142.5 130.0 126.9 137 125 128 114 108 263 176 137 171 175 115 185 165 149 204 174 125 140 95 195 192 195 159 162 206 201.3 111.3 141.3 261.9 251.2
g kg-1MS NDF 455 344 228 244 324 374 316 370 393 346 290 502 394 318 413 498 252 186
ADF 315 304 172 167 242 279 225 282 299 219 217 337 292 107 183 210 60 48
g kg-1MS
Ca P Na - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
mgkg-1MS Cu -
Fe -
PAs A550nm (g-1 NDF) 45 12 14 6 31.4 26.8 89.2 37.4 29 187 22 16 10
Sources / Observation Reed et al. [46] PB, NDF, ADF en g kg–1 MO Tanner et al. [47] Fall ST [12]
Fall et al. [13]
Wiegand et al. [57]
MO = matière organique ; PB = protéines brutes (N*6.25); NDF = neutral detergent fiber; ADF = acid detergent fiber; Pas = proanthocyanidines insolubles;f= feuille; G= gousse/fruit; sans précision= f ou plante entière
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Iintérêts et limites de l’utilisation de fourrages ligneux dans l’alimentation des petits ruminants Tableau I-2 : Composition de quelques fourrages ligneux introduits ou disponibles sur pâturage naturel des zones tropicales sub-humides ou sahéliennes d’Afrique
Espèce fourragère
Acacia angustissima Afzelia bella Albizia lebbeck Dactyledania barterii Ficus exasperata Gliricidia sepium L. leucocephala L. diversifolia Lonchocarpus sericeus Miltetia thonningii Parkia biglobosa Peltophorum pterocarpum Pterocarpus santalinoides Senna nodosa S. siamea
Chamaecytisus palmensis L. leucocephala S. sesban (cultivar 1190) S. sesban (cultivar 1198) S. sesban (cultivar 10865) S. sesban (cultivar 15019) S. sesban (cultivar 15036) S. sesban (cultivar 2024) S goetzei Acacia albida (G) Acacia albida (f) Acacia nilotica (f) A. senegal (f) A. seyal (f) Bauhinia rufescens (f ) Bauhinia rufescens (G) Pterocarpus lucens (f) Piliostgma reticulata (f) Adansonia digitata (f) Adansonia digitata (f) Anogeissaus leiocarpa(f) Balanites aegyptiaca (f) Boscia angustifolia (f) Boscia senegalensis (f) Cadaba farinosa (f) C. aculeatum (f) Guiera senegalensis (f) Ziziphus mauritiana (f)
PB
274 228 257 117,5 172,5 254 270 231,5 192,5 216,5 162,5 118,5 195 180,5 172,5 202 266 239 267 239 209 208 279 204 -
g kg-1MS NDF
553 422,5 457 542 569,5 381 414 413,5 620 590,5 538,5 589 531 428 443,5 343 208 140 144 125 162 153 146 223 -
ADF
454 274 351 400,5 576 305 307,5 337,5 492,5 426 397,5 503 391 366,5 284,5
231 178 131 123 106 157 193 196 288 -
g kg-1MS
Ca P
4,5 1,6 29,1 0,9 15,5 1,4 39,9 1,5 20,8 1,5 32,4 1,5 4,5 1,6 5,6 2,4 13,1 1 24,1 2,5 30,9 3,7 10 2,1 61,3 0,7 9,8 0,7 9,9 0,9 17,4 1,6 3,8 2,8 8,3 1,5 13,6 2,5
Na
0,07 0,07 0,03 0,07 0,04 0,12 0,07 0,26 0,03 0,15 0,14 0,18 0,03 0,05 0,01 0,06 0,30 0,03 0,10
mgkg-1MS
Cu
7,5 11,9 16,3 8,1 11 11,1 7,5 17,5 6,4 11,3 13,5 6,2 5,1 9,6 7,8 6,8 21,6 15,3 7,1
Fe
183 396 274 452 426 616 183 169 212 319 291 406 211 273 130 320 376 480 250
PAs A550nm (g-1 NDF) 22,5 9,1 4,6 185,7 193,3 18,8 25,5 22,6 31,4 6,5 41,8 27,9 12,7 22,1 6,2
7,3 35,1 16,4 23,1 6,6 30,5 71,9 71,8 103,4 -
Sources/ Observation
Larbi et al. [27]
Kaitho et al. [20]
Diagayété et Schenkel [9]
MO= matière organique ; PB= protéines brutes (N*6.25); NDF= neutral detergent fiber; ADF= acid detergent fiber; Pas= proanthocyanidines insolubles;f= feuille; G= gousse/fruit; sans précision= f ou plante entière
Résultats - Discussion 1. EFFET DES FOURRAGES LIGNEUX SUR LA NUTRITION DES PETITS RUMINANTS
1.1. Effet des fourrages ligneux sur l’ingestion des petits ruminants Les fourrages ligneux sont rarement utilisés comme seul aliment dans les rations. S’ils le sont, leur ingestion peut varier avec la nature et la concentration du tannin dans la plante et la durée de consommation (quantité ingérée). Selon DONNELLY et ANTHONY [10], une teneur de 20 mg de tannin g-1 MS suffit pour qu’un fourrage soit rejeté par les animaux sur pâturage. Avec les feuilles de Ficus religiosa (0,7% de tannins) et d’Eugenia jambolona (6,5% de tannins) offertes seules à l’auge, les chèvres ingèrent respectivement 5,19 kg MS 100 kg-1 PV contre 0,81 kg MS 100 kg-1 PV [42]. Les études de GIRDHAR et al. [14] montrent que l’ingestion de L. leucocephala (31 g de mimosine kg-1 MS) utilisé comme seul aliment chez les chèvres diminue de 35.4%, passant en deux semaines de RASPA Vol.3 N° 3-4 2005
2,29 kg MS 100 kg-1 PV à 1,48 kg MS 100 kg-1 PV, pour ensuite augmenter graduellement et se stabiliser à 2,4 kg MS 100 kg-1 PV. Au cours de la même expérience, l’ingestion du lot témoin nourri avec du fourrage grossier et un concentré énergétique et azoté classique est restée constante (3 kg MS 100 kg-1 PV) pendant les 300 jours d’observation ; ce qui fait supposer à Van HOVEN [49] l’existence d’une corrélation inverse entre la concentration en tannin total de certaines plantes et leur ingestion par les animaux. Les fourrages ligneux sont généralement introduits comme suppléments dans la ration des petits ruminants à des taux variant entre 15 et 45% (moyenne 30%). A ces taux, l’ingestion totale varie entre 59 et 82 g MS kg-1 P0.75 (moyenne 71,33) chez les moutons et entre 59 et 72 g MS kg-1 P0.75 (moyenne 63,6) chez les chèvres. Les rations titrent entre 5.88 et 12.13% de protéines brutes (moyenne 8,55% de la MS) dont les 50% à 75% (moyenne 70%) sont apportées par les fourrages ligneux. Ces taux de protéines sont largement suffisants pour stimuler l’ingestion des fourrages grossiers dans les rations classiques, mais tel ne semble pas être le cas avec les rations complémentées avec
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les fourrages ligneux riches en tannins. En comparant entre eux les effets de différents fourrages ligneux sur l’ingestion de fourrages grossiers ou avec les effets des suppléments standards (concentrés), les résultats ne sont pas toujours cohérents (Tableau II). Les résultats rapportés par BONSI et al. [7], et NSAHLAI et UMUNNA [37] montrent que la stimulation de l’ingestion de fourrage grossier est fonction du taux et de la vitesse de dégradabilité (taux de disparition du rumen) du fourrage ligneux apporté comme supplément. La dégradabilité de la MS et celle de N étant négativement corrélées au taux de PAs [36], [26], le taux élevé de PAs inhibe de ce fait l’effet des protéines sur la dégradabilité de N et de la MS, donc l’ingestion du fourrage grossier. Les résultats du tableau II montrent que la supplémentation des moutons de race locale avec les feuilles de fourrages riches en tannins comme Acacia cyanophylla, A. seyal et les fruits d’A. sieberiana réduit significativement l’ingestion du fourrage grossier (paille d’Eragrostis abyssinica) et celle de la ration totale, comparativement à la supplémentation avec des fourrages à faible teneur en tannins comme Sesbania sesban, ou dépourvus de tannins comme le tourteau de Guizotia abyssinica, le foin Viscia dasycarpa et l’urée [46]. Parmi les trois espèces d’Acacia, A. cyanophylla ayant la plus forte teneur en tannins et en parois cellulaires a été le plus faiblement ingéré. Au cours de cette expérience, les auteurs rapportent que l’ingestion d’A. seyal qui était faible au départ, a graduellement augmenté avec l’adaptation des animaux. KAITHO et al. [22] ont observé l’effet négatif des cultivars de S. sesban (15036) et de S. goetzei (15007) riches en tannins sur l’ingestion de chaume de maïs et l’ingestion MS totale par des béliers Menz par rapport aux cultivars (15019 et 10865) ayant des teneurs en tannins modérées à faibles. WIEGAND et al. [57] ont enregistré les mêmes effets négatifs de Carissa edulis et Dichrostachys cinera à teneur en tannins élevée sur l’ingestion d’E. abyssinica et l’ingestion de MS totale par des béliers Menz par rapport au foin de luzerne, L. leucocephala, S. sesban à faible teneur en tannins. Cependant, en dépit de sa teneur élevée en tannins Faidherbia albiba a eu des effets similaires à ceux du foin de luzerne, L. leucocephala et S. sesban sur l’ingestion. TANNER et al. [47] également ont enregistré un effet dépressif des tannins sur l’ingestion de fourrage grossier. Au cours d’un essai où A. brevispica et S. sesban étaient offerts en combinaison avec différents niveaux de V. dasycarpa aux béliers et aux boucs, WOODWARD et REED [58] ont observé une réduction de l’ingestion avec l’augmentation de la proportion d’A. brevispica riche en tannins et l’inverse avec S. sesban moins riche en tannins et rapidement dégradable dans le rumen. Les béliers ont laissé moins de refus de fourrage ligneux et ingéré plus de MS que les boucs. KAITHO et al. [22] par contre ont observé une faible ingestion du fourrage de base chez les ovins supplémentés avec les légumineuses comme Dolichos lablab, les cultivars S. sesban (S1, S2 et S3) à faible teneur en tannins condensés par rapport au témoin. Tandis que l’ingestion du fourrage de base était plus élevée chez les ovins supplémentés avec les cultivars de S. sesban les plus riches en tannins condensés. La stimulation de l’ingestion de fourrage grossier par Sesbania Spp par rapport à D. lablab s’explique par la plus forte vitesse de disparition (dégradabilité de la MS) de Sesbania du rumen par rapport à lablab. La différence entre les cultivars de Sesbania pourrait être due au fait que les cultivars riches
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en tannins accélèrent le transit digestif en apportant plus de protéines digestibles dans l’intestin. Ainsi, bien que la présence de tannins dans les fourrages est supposée affecter l’ingestion volontaire, les mécanismes précis de leur action n’est pas bien élucidé. D’autres facteurs que les tannins, notamment le degré de lignification et la dégradabilité des parois végétales des plantes et même la présence de glucosides pourraient intervenir. Dans toutes ces expériences, l’apport de fourrages ligneux notamment les légumineuses, se traduit constamment par une augmentation de l’ingestion totale et de l’ingestion d’azote. [Tableau II-1 et Tableau II-2]
1.2. Effet des fourrages ligneux sur la digestibilité des rations offertes aux pétits ruminants Il a été démontré d’une part que les activités de plusieurs systèmes enzymatiques digestifs sont inhibées par les tannins [31], et d’autre part que la plupart des microorganismes du rumen sont sensibles à l’effet inhibiteur des tannins à divers degrés [28], [31], [35]. Le degré d’inhibition dépend aussi bien du type de tannins que des micro-organismes impliqués [28]. Les tannins condensés ont un pouvoir inhibiteur plus élevé aussi bien sur les enzymes que sur les micro-organismes que les tannins hydrolysables et les phénols à faibles poids moléculaires [31]. Ainsi, la consommation de fourrages ligneux affecte la digestibilité des parois cellulaires des rations ingérées à cause de leurs tannins qui exercent des actions bactériostatiques et bactéricides sur les microorganismes fibrolytiques du rumen [11], [28], [38]. Ils peuvent également interférer sur l’action des enzymes digestives en formant soit des complexes protéines-tannins insolubles, soit des complexes indigestibles avec les hydrates de carbone des parois cellulaires [3]. ODENYO et al. [39] ont observé un effet négatif d’ Acacia angustissima sur la production de gaz et d’acide gras volatils. L’existence de corrélations négatives entre la concentration en PAs, les taux de dégradation de la MS et de N et la production de gaz In vitro [21], [27], indiquent l’effet négatif des tannins sur ces paramètres de la digestion. En effet, une augmentation graduelle (0, 25, 50 et 75 %) de la quantité d’Acacia berlandieri riche en tannin dans la ration des chèvres, réduit significativement la digestibilité de la MS, MO, N, de l’énergie, NDF et ADF [34] (Tableau III). Des observations similaires ont été rapportées par REED et al. [46], TANNER et al. [47], WIEGAND et al. [56], [57] (Tableau III). Selon KAITHO et al. [20], la teneur élevée en tannin réduit la digestibilité des NDF par rapport au témoin, mais n’affecte pas significativement la digestibilité de la MS. Par ailleurs, certains auteurs ont observé une augmentation significative des activités de plusieurs groupes enzymatiques en éliminant les tannins à l’aide de polyvinylpyrrolidone (PVP) [28], [31] ou en le précipitant avec le PEG [43].
1.3. Effet des fourrages ligneux sur l’utilisation de l’azote de la ration Les fourrages ligneux à travers leur teneur en tannins affectent toutes les étapes du métabolisme des protéines. L’effet le plus évident est la formation de complexes tannins-protéines qui abaissent la digestibilité et la protéolyse dans le rumen. Ceci a pour conséquences un faible taux d’azote ammoniacal (N-NH3) du jus de rumen, une réduction de la fermentation microbienne et de la production de protéines microbiennes. RASPA Vol.3 N°3-4, 2005
Iintérêts et limites de l’utilisation de fourrages ligneux dans l’alimentation des petits ruminants
En fonction de la nature des tannins, de la nature des protéines et de l’environnement chimique (pH < 3.5), le complexe tannin-protéine peut se dissocier et libérer les protéines dans l’intestin. Il en résulte une augmentation du flux et de l’absorption des aminoacides alimentaires ou microbiens dans l’intestin [50] ; [51]. C’est le cas de fourrages à forte teneur en azote non dégradé dans le rumen mais digestible dans l’intestin comme A. sieberiana, Chamaecytisus palmensis, Erythrina spp., Gliricidia sepium, Samanea saman, et Enterlobium cyclocarpum [19]. Dans le cas des fourrages comme A. brevispica, A. saligna et les fruits de Acacia cyanophylla, ayant des taux élevés d’azote non dégradable dans le rumen et demeurant indigestibles dans l’intestin, le complexe tannin-protéine se maintient et est excrété dans les fèces sous forme de NNDF fécal [45]. Avec les fourrages ligneux à faible teneur en tannin et en parois cellulaires comme Sesbania spp. ou A. nilotica, l’azote se dégrade vite et la concentration du jus de rumen en N-NH3 est élevée. A défaut d’énergie, l’excès de N transformé en urée passe dans le plasma et esten partie recyclée et en partie excrétée dans l’urine (Tableau III).
Supplément ou traitement
1.4. Effet des fourrages ligneux sur les productions des pétits ruminants Les productions animales reflètent la quantité totale et la disponibilité de nutriments ingérés. Comme discuté cidessus, les fourrages ligneux peuvent réduire l’ingestion et l’utilisation des nutriments à cause du tannin qu’ils contiennent, et de l’interaction de ces derniers avec les autres constituants de la ration ou au contraire augmenter le flux de nutriments digestibles dans l’intestin selon la nature du tannin qu’ils contiennent et l’environnement chimique. Donc, selon le cas, à teneurs similaires en protéines, l’apport des fourrages ligneux peut résulter d’une augmentation ou d’une réduction des performances par rapport aux rations classiques (Tableau IV). Les petits ruminants nourris de fourrages grossiers complémentés avec des fourrages ligneux riches en tannins ou nourris exclusivement avec ces derniers, ont dans la plupart des cas, des gains moyens quotidiens (GMQ) généralement modestes.
Tableau II-1: Effet des fourrages ligneux sur l’ingestion du fourrage de base et de la ration totale
Acacia cyanophylla Acacia sieberiana Acacia seyal Sesbania sesban Viscia dasycarpa Tourteau de noug Urée Acacia tortilis Acacia albida Acacia nilotica Acacia sieberiana Tourteau de noug
Témoin S. sesban: 200 g S. sesban: 300 g S. sesban: 400 g Leucaena: 200 g Leucaena: 300 g Leucaena: 400 g Témoin vs. S Témoin vs. L
Acacia brevispica A. brevispica 2/3 A. brevispica 1/3 V. dasycarpa S.sesban 1/3 S. sesban 2/3 S. sesban Acacia brevispica A. brevispica 2/3 A. brevispica 1/3 V. dasycarpa S.sesban 1/3 S. sesban 2/3 S. sesban
Medicago sativa Faiderbia albida Carissa edulis Dichrostachys cinera L. leucocephala S. sesban
PB = Protéines brutes (N*6.25)
RASPA Vol.3 N° 3-4, 2005
Ingestion (g MSI j-1)
Grossier
Totale
430b 401b 347c 320c 483a
636 595 551 531 563
318a 269a 285a 473c 407b 444bc 480c
PB
PB % MSI
Source / Observation
488a 464a 478a 630c 602bc 562b 480a
34a 34a 49b 59c 62c 58c 30a
6.97 6.97 10.25 9.37 10.30 10.32 6.25
Reed et al. [46]. 35 béliers d’Afrique de l’Est à queue grasse d’un an; PV 15.8 ±1.7 kg. Ration de base= paille d’E. abyssinica pendant 91 jours. Noug= Guizotia abyssinica
516 544 487 526 543 525 466
516 663 665 763 660 700 698 ** **
16.9 42.6 59.3 74.8 48.0 62.0 72.6
3.27 6.43 8.91 9.80 7.27 8.86 10.40
416b 437b 402b 357a 426b 477c 476c
647bc 660bc 631ab 602a 647bc 670c 679c
70.0c 72.5d 65.6b 61.3a 70.0c 76.9e 82.5f
10.82 10.98 10.40 10.17 10.82 11.47 12.15
Bonsi et al. [6]. Bélier Menz de 20.7 kg (19-22.8 kg), en croissance. Ration témoin= paille d’E. abyssinica h** = significatif à P<0.05. h1ère exp.: pas d’effet des suppléments sur l’ingestion du fourrage grossier. h2ème exp.: Augmentation significative de l’ingestion du fourrage grossier avec l’apport graduel de S. sesban (S); mais pas d’effet de L. leucocephala (L)
Woodward et Reed [58]. Béliers de 20.9 kg PV Ration témoin= paille E. abissinica + 265 g de V. dasycarpa. Autres rations= remplacement de V. dasycarpa par 1/3, 2/3 ou 100 % A. brevispica ou S.sesban
572c 590c 405b 329b 578c 625c
51c 53c 16b 13a 54c 54c
8.92 8.98 3.95 3.95 9.34 8.64
Wiegand et al. [57]. 48 béliers Menz (16-19 kg) âgés de 14 à 18 mois, pendant 10 semaines
364ab 373ab 351ab 334a 385a 395ab 425a
369b 378b 319a 285a 417bc 459bc
612a 623a 597a 583a 616a 623a 652a
38.1 36.9 34.4 34.4 39.4
67.5cd 68.1cd 61.3ab 56.9a 63.1bc 71.3d 80.0e
6.0 6.20 6.25 6.47 6.99
11.03 10.94 10.26 9.76 9.23 11.44 12.27
Tanner et al. [47]. 40 béliers Menz de 20-22 kg; ages de 13-18 mois. Ration de base= chaume de maïs, 70 jours. Noug= G. abyssinica
Woodward et Reed [58]. Boucs de 21.5 kg PV Ration témoin= paille d’E. abissinica + 265 g de V. dasycarpa. Autres rations= remplacement de V. dasycarpa par 1/3, 2/3 ou 100 % A. brevispica ou S.sesban
194
M. SANGARE
Supplément ou traitement Témoins Dolichos lablab Tagasaste L. leucocephala S. seban 1 S. seban 2 S. seban 3 S. seban 4 S. seban 5 S. seban 6 S. goetzei
*PB = Protéines brutes (N*6.25)
Espèce / traitement
Acacia cyanophylla
Tableau II-2 : Effet des fourrages ligneux sur l’ingestion du fourrage de base et de la ration totale Ingestion (g MSI j-1)
Grossier
536ab 515ab 541ab 521ab 494a 517ab 530ab 559b 548ab 555ab 563b
MOA
410a 540bc 540bc 540bc 531bc 573c 507b
Témoin S.Sesban L. leucocephala
454a 540.7b 508.3ab
Sativa medicago Faidherba albida Carissa edulis Dichrostachys cinera L. leucocephala S. sesban
Témoins Dolichos lablab Tagasaste L. leucocephala S. seban 1* S. seban 2 S. seban 3 S. seban 4 S. seban 5 S. seban 6 S. goetzei
Acacia berlandieri 0 % A. berlandieri 25 % A. berlandieri 50 % A. berlandieri 75 %
536a 698bc 722bc 703bc 673b 692bc 707bc 742c 731bc 738c 745c
PB
20.3 47.6 56.9 67.9 61.8 66.9 59.3 59.5 58.9 72.1 58.8
Digestibilité (g kg-1)
MOR
544a 640c 701d 664cd 636c 671dc 608b
N
520a 735b 835c 895d 902d 906d 856cd
290a 370b 419b 517cd 490c 571d 528cd
460b 300a 290a 320a 290a
596c 575c 491a 502ab 552bc 561c
699c 698c 593b 621b 682c 691c
895c 873c 710b 741b 950c 900c
592c 561bc 493b 561bc 552bc 559bc
-
734d 639c 543b 428a
465c 320b 204a 5a
556ab 550ab 532ab 559ab 579a 540ab 544ab 525b 554ab 575ab 555ab
619d 563c 503b 438a
-
-
550c 510bc 450b 490bc 390a
NDF
610bc 610bc 570ab 610bc 550a
MOA= digestibilité apparente matière organique; MOR = Digestibilité réelle MO
10a 501.7b 469.3b
573a 558ab 514ab 557ab 553ab 524ab 520ab 508b 509b 527ab 504b
Au cours des expériences résumées au tableau IV, les GMQ ont varié entre -72 g avec C. edulis et 48 g avec Sesbania sp. Contrairement à ce constat général, WANG et al. [54], [55] rapportent un effet nettement positif des fourrages riches en tannins respectivement sur la production de lait, la croissance pondérale et la production de laine. Ces résultats pourraient s’expliquer par l’augmentation du flux de protéines alimentaires (dont les acides aminés essentiels) absorbées dans l’intestin [51], suite à la formation de complexes tannin-protéines stables et insolubles dans le rumen, et la dissociation de ces liaisons à pH ≤ 3.5 dans la partie distale du tractus gastrointestinal [18]. La concentration idéale en tannins des rations destinées aux ruminants varierait entre 20 et 40 g kg-1 MS [4], [52], [55] (Tableau IV).
195
3.79 6.81 7.88 9.60 9.18 9.66 8.39 8.01 8.05 9.77 7.89
Source / Observation
Kaitho et al. [22] 66 béliers Menz de 19.4 kg PV âgés de 14 mois, pendant 90 jours. hFourrage grossier= paille d’E. abyssinica. hSuppléments: -à faible taux de tannins= D. lablab, Tagasaste (Chamaecytisis palmensis); - à taux modéré de tannin= Feuille de S. sesban 1, 2, 3. - à taux élevé de tannin= Feuille de L. leucocephala, S. sesban 5, 6 et S. goetzei ** 1, 2, 3, 4, 5 et 6= différents cultivars de S. sesban
Tableau III : Effet de la supplémentation en fourrage ligneux sur la digestibilité des rations
Acacia sieberiana Acacia seyal Sesbania sesban Viscia dasycarpa Tourteau de noug Urée
Tourteau de noug A.tortilis (fruit) A. albida (fruit) A. nilotica (fruit) A. sieberiana (fruit)
Totale
PB* % MSI
-
-
514 526.7 498
-
ADF
- 611a - 358b - 37c 154c 6e 149c 95c
549 549.7 493.7
-
431 237 67 0
Source / Observation
Reed et al. [46] (ovin)
Tanner et al. [47] (ovin)
Bonsi et al. [6] (Ovin) Wiegand et al. [57] (ovin)
Kaitho et al. [20] *1, 2, 3, 4, 5, et 6= différents cultivars de S. sesban (ovin) Nantoumé et al. [34] (caprin) -
1.5. Atténuation des effets néfastes des tannins sur la nutrition et la production des pétits ruminants L’atténuation des effets négatifs des fourrages ligneux riches en tannins sur la nutrition et la production animale dans les zones tropicales d’Afrique a fait l’objet de très peu de publications. La raison majeure peut être l’adaptation des races locales de petits ruminants aux espèces fourragères autochtones. Dans d’autres zones, différentes méthodes (traitements physiques et/ou chimiques, adjonction d’agents chimiques, supplémentation, adaptation, etc.) ont été utilisées pour atténuer ou anéantir d’éventuels effets néfastes des fourrages ligneux riches en tannins sur la nutrition et les productions des petits ruminants. RASPA Vol.3 N° 3-4, 2005
Iintérêts et limites de l’utilisation de fourrages ligneux dans l’alimentation des petits ruminants
Traitement
Tableau IV : Effet des fourrages ligneux sur les performances pondérales des petits ruminants GMQ (g j-1)
Ingestion (g kg-1 P0.75)
A.cyanophylla A. sieberiana A.seyal S. sesban V. dasycarpa Tourteau de noug Urée
-11a 20b 21b 48c 39c 22b 10b
23.27 27.28 28.03 35.06 33.55 34.93 27.02
M. sativa F. albida C. edulis D. cinera L. leucocephala S. sesban
19c 23c - 72a - 53b 28c 21c
Tourteau de noug A. tortilis A. albida A. nilotica A. sieberiana
Témoin D. lablab C. palmense L. leucocephala S. sesban 1 S. sesban 2 S. sesban 3 S. sesban 4 S. sesban 5 S. sesban 6 S. goetzei
Son de blé L. palida 200 g L. palida 400 g S. sesban 200 g S. sesban 400g
Son de blé L. palida 200 g L. palida 400 g S. sesban 200 g S. sesban 400g Traitement Niveau supplément
32a 32a 21ab 16b 4c
-17.5c 28.9b 36.4ab 43.8a 31.4b 33.8ab 34.5ab 39.9ab 33.3ab 36.5ab 31.3b
19.9 20.9 39.1 16.5 26.2
4.9 11.7 32.3 - 0.3 - 1.0 *** **
MOD
PBD
Source / Observation
0.43 1.12 1.67 3.39 4.06 4.33 1.36
Reed et al. [46] sur ovins. *Les GMQ affectés de lettres différentes sont significativement différentes.
38.75 38.33 26.11 20.99 35.80 39.59
1.18 5.23 1.49 1.22 5.75 5.51
Wiegand et al. [57] sur ovins * Les GMQ affectés de lettres différentes sont significativement différentes.
28.4 30.2 40.0 31.3 37.6
1.47 3.10 5.60 2.95 6.04
Kaitho et al. [22] sur béliers *** seuil de P<0.001; ** seuil de P< 0.01
29.84 35.65 32.19 33.28 27.97
30.1 35.8 35.3 36.6 35.5 35.2 35.3 35.7 38.1 40.0 39.5
26.5 28.8 37.3 31.2 36.8 -
1.79 1.10 1.13 1.15 1.00
Tanner et al. [47] sur ovins * Les GMQ affectés de lettres différentes sont significativement différentes.
2.25 4.80 5.38 7.11 6.21 6.78 6.34 5.95 6.00 7.45 6.03
1.64 3.56 6.24 4.19 7.75 -
Kaitho et al. [20] sur béliers * PB au lieu de PBD * Les GMQ affectés de lettres différentes sont significativement différentes.
Kaitho et al. [22] sur boucs *** seuil de P<0.001 ** seuil de P< 0.01
GMQ = gain moyen quotidien ; PBD = protéines brutes digestibles ; MOD = matière organique digestible.
1.5.1. Méthode physiques et/ou chimiques Le simple trempage ou la cuisson avec de l’eau peuvent éliminer jusqu’à 80% des tannins contenus dans les fourrages ligneux [24]. Le principe est l’élimination des composés solubles dans l’eau au cours du trempage ou de la cuisson. Leur inconvénient est la perte de 18% à 23% de MS et par conséquent d’une grande quantité d’éléments nutritifs solubles dans l’eau [7], [24]. Ces méthodes n’ont certainement pas dépassé le stade expérimental, à cause du faible gain d’amélioration du fourrage traité par rapport à l’investissement et le travail qu’elles demandent. Le séchage est sans doute la méthode la plus facile à mettre en œuvre dans les zones tropicales. Les résultats montrent ce traitement augmente significativement la teneur en parois cellulaire et en lignine du fourrage ligneux et réduit sa teneur en tannin [1], [35], mais son effet sur l’ingestion du fourrage grossier et sur la digestibilité de la ration totale est mitigé. En effet, selon NORTON et AHN [35] et AHN et al. [2], l’apport des feuilles séchées (à 60°C pendant 48h) de Calliandra calothyrsus comme supplément aux ovins, augmente l’ingestion de la ration de base, la digestibilité de la MO et RASPA Vol.3 N° 3-4, 2005
de l’azote de la ration totale par rapport à l’apport de feuilles fraîches. Par contre, quand les feuilles de C. calothyrsus sont offertes aux ovins comme seul aliment, le séchage (25°C ou 65°C) réduit significativement leur ingestion de 37% ainsi que leur digestibilité in sacco par rapport aux feuilles fraîches [41]. Les traitements à la soude (NaOH), à la chaux éteinte (Ca(OH)2), au carbonate de sodium (Na2CO3, NaHCO3), à l’ammoniac (NH3, NH4OH) ou avec d’autres alcalins entraînent, non seulement, une réduction (74-100 %) de la teneur en tannins des aliments du bétail, mais aussi une augmentation de la digestibilité de la MS et de l’azote [24]. Cependant, à part NH3 et NH4OH qui apportent de l’azote non protéique, le traitement avec les autres alcalins peut entraîner des pertes de MS plus élevées (20% - 70%) que le trempage ou la cuisson dans l’eau.
1.5.2. Supplémentation Le fait que les liaisons formées entre les tannins et le PEG sont plus solides que les liaisons tannins-protéines [17], [40], montre que les tannins contenus dans les rations peuvent être inactivés par l’ajout de PEG.
196
M. SANGARE
En effet, JONES et MANGAN [18] ont observé la libération des protéines en ajoutant du PEG à un complexe tannin-protéine. Par la suite, plusieurs auteurs [5], [35], [43], [44], [53] ont rapporté que l’apport de PEG sous forme de bloc à lécher ou dans l’eau de boisson à des ovins recevant des rations contenant des fourrages riches en tannins augmente la protéolyse dans le rumen, l’ingestion et la digestibilité de la MS et de N, entraînant une amélioration des productions, (Tableau V). Cette amélioration s’explique par la neutralisation des tannins par le PEG, la libération de l’azote du complexe tanninprotéine et l’augmentation de l’absorption des protéines (synthèse de protéines microbiennes et alimentaires). Les résultats de KUMAR et SINGH [24], montrent que l’apport d’urée permet également d’obtenir des résultats similaires. L’effet de l’urée pourrait s’expliquer par la saturation de la capacité de complexation des tannins contenu dans la ration. L’apport d’un concentré énergétique et azoté (30% PB et 3.3 Mcal ED kg-1 MS, à raison de 1% MS kg-1 PV) seul ou associé au Monésin (22 mg kg-1 MS), à des boucs (Tableau VI), permet d’augmenter les gains de poids respectivement de 57,6% et de les tripler par rapport à la ration témoin (50% foin d’A. berlandieri et 50% foin de luzerne ad libitum). Les indices de consommation ont été de 42,85, 27,51 et 12,44 kg MSI kg-1 gain de poids [33]. L’auteur explique cette augmentation du gain de poids et de
l’efficacité de la conversion alimentaire par une amélioration de la digestibilité des protéines et les effets biologiques du monésin qui sont entre autre l’augmentation de la concentration des propionates, la diminution de la concentration des acétates, des butyrates, des lactates et du méthane dans le rumen, l’augmentation du CUD de la MS et des protéines, etc.
1.5.3. Méthodes biologiques L’adaptation atténue les effets néfastes des tannins et d’autres facteurs anti-nutritionnels sur la valeur alimentaire des ligneux. En effet, l’introduction graduelle de fourrages riches en tannins ou autres composés secondaires dans les rations développe dans le rumen de l’animal une microflore adaptée à ces substances. Aussi, le transfert du jus de rumen d’animaux habitués à consommer des plantes contenant de telles substances dans le rumen d’animaux non autochtones, développe chez ces derniers les mêmes aptitudes en quelques heures [28], [39] (Tableau V et Tableau VI).
Conclusion Les fourrages ligneux représentent une source importante d’aliment pour le bétail, particulièrement à cause de leur teneur élevée en protéines.
Tableau V : Effet des traitements et/ou de la supplémentation sur la matière sèche ingérée (MSI) et le coefficient d’utilisation digestive (CUD) de rations riches en tannins Traitement
1. Fourrage non traité 2. Fourrage humecté avec l’eau et séché 3. Fourrage humecté avec solution à 2 % PEG-4000
1. Témoin: fourrage seul 2. PEG 12 3. PEG 24 4. NPS 5. NPS + PEG 12 6. NPS + PEG 24
MSI (g)
CUD MS (g kg-1 MSI)
CUD N (g kg-1 N)
975.2b
463.5b
256.3b
368a 575bc 655c 502ab 587bc 944d
497 488 531
366a 584b 622b
-
-
617.2a 628.9a
1. Fourrage frais seul 2. Fourrage frais + PEG Erreur standard
1236 1311 14.9
1. Témoin: Pâturage seul 2. Pâturage + PEG Erreur standard
1190 1200 0.056
1. Fourrage séché 2. Fourrage séché + 50 g PEG 3. Fourrage congelé 4. Fourrage congelé + 50 g PEG Erreur standard
910 932 804 941 22.3
419.3a 433.7a
658 684 0.44
441 453 399 395 2.6
Cependant, la plupart des espèces locales renferment du tannin et d’autres composés secondaires dont l’effet sur la nutrition du bétail varie beaucoup en fonction de leur concentration et de leur nature. En fonction de sa concentration dans les fourrages ligneux, et de son interaction avec d’autres constituants tels les NDF et les ADF, le tannin peut réduire la consommation et l’utilisation des nutriments de la ration. Il peut aussi réduire la solubilité de l’azote dans le rumen et augmenter le flux d’acides aminés essentiels absorbés dans l’intestin grêle ou vis versa.
197
224.7a 215.7a
488 625 0.90
316 434 207 392 2.65
N-NH3 Jus rumen (mg l-1) -
-
Source / Observation
Bhatia et al. [5] Feuille de Z. nummilaria (5.3 % tannin) offert A.L aux ovins 90 j
-
Pritchard et al. [44] feuille d’A. aneura (96.7 g de tannin kg-1 MS) offert A.Laux ovins 70 J, - PEG12= apport de 12 g PEG j-1 ; - PEG24= apport de 24 g de PEG j-1; - NPS= apport de 1.5 g N, 1.5 g P et 1.5 g S j-1. -Témoin=non supplémenté
-
Wang et al. [54] 28 béliers, PV 50.9 kg. L. corniculatus (34 g de tannin kg-1 MS) offert par pâture pendant 22 semaines. PEG augmente N-NH3 dans le rumen, n’a pas d’effet sur la fermentation des carbohydrates en AGV.
15.8* 18.2* 0.48*
60 103 66 102 5.7
Waghorn and Shelton [53] mélange (18 g tannin kg-1 MS) de 1/3 de Lolium perene et 2/3 de Lotus corniculatus pendant 42 j. * En mmol l-1
Norton et Ahn [35] Supplément de 200 g MS de C. calothyrsus offert aux ovins de 18-24 mois, PV 35 kg pendant 84 j.
La quantité idéale de tannin sera donc le minimum nécessaire pour protéger les protéines de l’hydrolyse dans le rumen et les rendre disponibles dans l’intestin grêle. Apparemment, la consommation de fourrage autochtone ne semble pas poser de problèmes pathologiques aux petits ruminants de race locale, à cause certainement de leur adaptation. Cependant, en associant d’autres méthodes à l’accoutumance des races autochtones, on pourrait augmenter l’efficacité nutritionnelle des rations renfermant les fourrages ligneux riches en tannins.
RASPA Vol.3 N° 3-4, 2005
Iintérêts et limites de l’utilisation de fourrages ligneux dans l’alimentation des petits ruminants Tableau VI : Effet des traitements et/ou de la supplémentation sur les performances des petits ruminants recevant des rations riches en tannins
Traitement
1. Pâturage seul
2. Pâturage + 75-100 g PEG-3350 1. Fourrage non traité 2. Fourrage humecté avec une solution à 2 % PEG-4000 (12 g j-1) 1. Pâturage seul offert aux animaux après adaptation 2. Pâturage + 75-100 g PEG-3350 offert aux animaux après adaptation 3. Pâturage seul aux animaux adaptation 4. Pâturage + 75-100 g PEG-3350 aux animaux sans adaptation 1. Fourrage seul 2. Fourrage + PEG Erreur standard
1.Témoin: Pâturage seul 2. Pâturage + PEG Erreur standard
1. A. berlandieri + Luzerne (1/1) 2. (1) + concentré (1 % PV) 3.(2)+ monésin (22 mg kg-1 MS (2)
Gain de poids (g j-1)
Production de laine (g j-1)
8.1
8.9
125
166
37.11 69.77
0.375* 0.627*
59
8.3
68
45
7.4
164 150 9.0
2.55 2.45 0.010
70
203 188 5.8
18.46 29.10 62.36
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RASPA Vol.3 N° 3-4, 2005
8.7
8.6
12.1 10.9 0.39
42.85* 27.51* 12.44*
Source / Observation
Barry T. N. [4] Pâturage à Lotus pedunculatus (70-90 g tannin kg-1 MS) offert par pâture aux ovins; 42 j de mesure de croissance et 102 j de mesure de la production de laine
Bhatia et al. [5] Feuille de Z. nummilaria (5.3 % tannin) offert ad libitum aux ovins 90 j * Production de laine en g / inch carré
Barry T. N. [4] Pâturage à L. pedunculatus (70-90 g tannin kg-1 MS) offert par pâture aux ovins pendant 63 j. Les animaux des traitements 1 et 2 ont subi une période d’adaptation de 8 semaines. Ceux des lots 3 et 4 ont été introduits dans le sans pâturage à L. pedunculatus directement sans adaptation. Waghorn et Shelton [53] mélange (18 g tannin kg-1 MS) de 1/3 de Lolium perene et 2/3 de L. corniculatus pendant 42 j.
Wang et al. [54]. Lotus corniculatus (34 g de tannin kg-1 MS) offert aux antenais par pâture pendant 22 semaines.
Nantoumé et al. [33] bouc (5 mois, 22.8 kg). * Indice de consommation (kg MS kg-1 gain de poids)
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