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PHÉNOMÈNE
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L’art prend la clé des champs
BIENNALE À CIEL OUVERT, PARC DE SCULPTURES, FESTIVAL AU CŒUR DES VILLES OU AU BORD DE LA MER… CET ÉTÉ, PLUS QUE JAMAIS, LES ŒUVRES D’ART PRENNENT L’AIR !
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PAR SOLINE DELOS
Vignoble + art + architecture + hôtellerie ultraluxe. Le collectionneur Patrick McKillen, propriétaire irlandais du château La Coste, est passé maître dans ce quarté gagnant, organisant des expositions dans son centre d’art conçu par le maître de l’épure, l’architecte japonais Tadao Ando, mais aussi dans la galerie signée Jean-Michel Wilmotte et le pavillon de photographie réalisé par Renzo Piano. A l’extérieur, accueilli par l’“Araignée accroupie” en métal de Louise Bourgeois, lévitant au-dessus d’un plan d’eau, on découvre, lors d’un parcours de sculptures cheminant à flanc de colline, les lames d’acier de Richard Serra, la chapelle restaurée par Tadao Ando, la “House of air” du Coréen Lee Ufan, la grotte en bois du Britannique Andy Goldsworthy et, au bout d’une passerelle, une création secrète de l’artiste britannique renommée Tracey Emin. Au total, pas moins d’une quarantaine d’œuvres, la plupart d’entre elles en lien avec l’architecture. L’œuvre phare. La dernière création imaginée pour le lieu, au milieu du vignoble, et perchée à 18 mètres du sol dans le vide : une galerie (photo) réalisée par l’architecte américain Richard Rogers, parée d’un acier satiné pour refléter la nature environnante. Un bâtiment comme une sculpture dans le paysage avec, en prime, une vue éblouissante sur les montagnes du Luberon.
O2 750, route de la Cride. Rens. sur chateau-la-coste.com
PORQUEROLLES FONDATION CARMIGNAC
NATURE Il y a trois ans, le financier et collectionneur Edouard Carmignac créait l’évènement en ouvrant sa fondation d’art sur l’île de Porquerolles, dans l’ancienne maison de l’architecte Henri Vidal avec vue sur les vignes et la Méditerranée. Dans le jardin de cinq hectares aménagé par Louis Benech, douze artistes se sont imprégnés des lieux. Ici, un labyrinthe de miroirs de l’Allemand Jeppe Hein dans lequel on se perd à loisir (photo) ; au cœur de l’oliveraie, des têtes grotesques signées Ugo Rondinone ; nichée au milieu de la forêt, la couvée d’œufs géants en marbre de Nils-Udo ; là, un pliage d’avion en acier de Gonzalo Lebrija, les visages impassibles et méditatifs de Jaume Plensa, ou encore un tourbillon de bois flottés qui s’envolent vers le ciel tel un cyclone, exécuté par Cornelia Konrads. L’œuvre phare. Une ronde de requins argentés, comme sortis des profondeurs des mers, orchestrée par Jean-Marie Appriou, dans le cadre de l’exposition “Mer imaginaire”, jusqu’au 17 octobre.
ORens. au 04 65 65 25 50 et sur fondation-carmignac.com
FLASSANS-SUR-ISSOLE COMMANDERIE DE PEYRASSOL
PLÉTHORIQUE Un vignoble de 950 hectares, cinq chambres d’hôtes, une galerie d’exposition de 800 mètres carrés. Cette description du domaine de Peyrassol,propriété du collectionneur Philippe Austruy sur les contreforts du massif des Maures, ne serait pas complète sans évoquer l’art qui habite les moindres recoins du lieu, avec pas moins de cent œuvres que l’on découvre, à pied ou en voiturette, au détour d’un chemin ou d’une vigne. Parmi elles, le portail façon « monsieur muscles » du plasticien belge Wim Delvoye qui ouvre sur le vignoble, suivi par les créations de Niki de Saint Phalle, Dan Graham, Carsten Höller, Ugo Rondinone, Victor Vasarely, Joana Vasconcelos, Gavin Turk, Lee Ufan… Une collection foisonnante qui ne cesse de s’enrichir. Pour preuve, on y découvrira cette année “L’Arc-en-ciel ondulant” de Daniel Buren (photo 1), une succession de drapeaux plantés sur le chemin qui mène au sous-bois ou encore une fontaine hybride de Bertrand Lavier. L’œuvre phare. Les bons génies de verre du plasticien camerounais Pascale Marthine Tayou, qui distillent leurs facéties dans le potager (photo 2). A voir aussi. L’exposition consacrée à l’artiste indo-britannique Anish Kapoor en collaboration avec la Galleria Continua jusqu’à fin octobre.
ORens. au 04 94 69 71 02 et sur peyrassol.com
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PHÉNOMÈNE L’ART EN PLEIN AIR
LE MUY FONDATION BERNAR
VENET, INTIMISTE En 1989, l’artiste Bernar Venet et sa femme Diane, collectionneuse éclairée de bijoux de créateurs, jetaient leur dévolu sur un vaste domaine de 4 hectares au Muy, traversé par la rivière Nartuby. Depuis 2014, le lieu, transformé en fondation, dévoile – dans la maison, l’ancienne usine et les jardins – des expositions estivales ainsi que la très belle collection d’art du plasticien français construite au fil des ans et de ses amitiés américaines et françaises. Sur le domaine, on croise, savamment installés dans un paysage qui sublime chaque création, un enchevêtrement de chaînes d’ancre dressées vers le ciel – installation d’Arman – ; un “Skyspace” du maestro de la lumière James Turrell d’où, le regard levé vers le ciel, on contemple un morceau d’azur, tableau mouvant sur l’infini ; plus loin, la chapelle ouverte de Frank Stella ou encore les sculptures de Bernar Venet présentées au château de Versailles en 2011. L’occasion d’une séance de rattrapage bienvenue ! L’œuvre phare. La monumentale double sphère en acier Corten® d’Anish Kapoor (photo). A voir aussi. L’exposition “Robert Morris, Voice, 1974” et un hommage au galeriste Enrico Navarra, jusqu’au 1er octobre.
O365, chemin du Moulin-des-Serres, Le Muy. Venet Foundation, résa et rens. sur venetfoundation.org
DOMAINE DU MUY
HAUTE VOLÉE C’est entre les massifs des Maures et de l’Esterel que le galeriste Jean-Gabriel Mitterrand installait en 2015 son Domaine du Muy, immense parc de sculptures à ciel ouvert, imaginé avec son fils Edward. Cent hectares entourant une maison revisitée par l’architecte d’intérieur India Mahdavi et un parcours de deux kilomètres où l’on vagabonde entre garrigue et forêt, bercé par le chant des cigales, au milieu des grands noms de l’art d’hier et d’aujourd’hui : Sol LeWitt, Marta Pan, Carlos CruzDiez, Takis, Danh Vo et Gary Webb avec sa sculpture “Cat II” en fonte d’aluminium peinte (photo 2). Chaque année réserve son lot de nouveautés comme, cet été, une tour XXL composée de seaux en Inox de la star indienne Subodh Gupta ou “Lumping Figure”, un scaphandrier géant échoué au milieu des terres, pensé par une autre figure très en vue de l’art contemporain, Thomas Houseago. L’œuvre phare. Comble du chic, l’art se niche jusque dans le bassin cinétique et hypnotique signé Peter Kogler, promesse d’une immersion totale (photo 1). A voir aussi. L’exposition “Anne et Patrick Poirier, errances” jusqu’au 11 juillet.
ORéservation sur office@domainedu muy.com. Rens. sur domainedumuy.com
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SAINT-PAUL-DE-VENCE FONDATION CAB, CONFIDENTIELLE
En neuf ans, la Fondation CAB, créée par Hubert Bonnet à Bruxelles, est devenue un temple de l’art conceptuel et minimal. Bonne nouvelle, le collectionneur belge inaugure une antenne méridionale sur les hauteurs de SaintPaul-de-Vence. L’endroit ? Une maison des années 50, ex-galerie d’un marchand d’art, entièrement rénovée par l’architecte Charles Zana. A l’intérieur, un vrai lieu de vie avec une librairie boutique, un restaurant, quatre chambres d’hôtes et plusieurs espaces d’exposition. Celle qui ouvre le bal accueille des figures de l’art minimal, tels Sol LeWitt et François Morellet, ainsi que les créations récentes d’artistes comme la Canadienne Kapwani Kiwanga, lauréate du prix Marcel-Duchamp 2020. On y est accueilli par une anamorphose réalisée par Félice Varini. L’émerveillement se prolonge dans le jardin, avec quelques œuvres dont l’installation poétique de Richard Long, maître britannique du Land Art. L’œuvre phare. La maison démontable (photo) de Jean Prouvé conçue en 1944 à la suite des bombardements allemands en Alsace pour loger les sinistrés. A voir aussi. L’exposition “Structures of radical will” jusqu’au 31 octobre.
O5 766, chemin des Trious. Rens. sur fondationcab.com/fr
Jérôme Cavalière ; Jean-Christophe Lett ; Antoine Lippens ; Charles Le Hyaric BIENNALE INTERNATIONALE DE SAINT-PAUL-DE-VENCE, PROSPECTIVE
Place à la scène émergente pour cette deuxième édition qui se tient dans ce village carte postale, lieu de prédilection de nombre d’artistes, de Picasso à Chagall. Les réalisations d’une vingtaine de jeunes créateurs français et internationaux s’y déploient du bas des remparts au chemin de ronde, en passant par la cour de l’Espace Verdet. Au programme : “La Nébuleuse des dryades”, installation en bois, grillage et filasse, par le plasticien Charles Le Hyaric (photo) ;les colonnes sectionnées en marbre tels les vestiges d’un autre temps de Linda Sanchez ; la structure en métal dessinant dans l’espace l’architecture d’une chapelle byzantine que Juliette Minchin, fraîchement sortie des Beaux-Arts de Paris, nimbera de cire chaude couleur peau lors d’une performance ; ou encore un moucharabieh orné de coquilles d’escargots signé Pierre-Alexandre Savriacouty. L’occasion de découvrir de nouveaux talents en même temps qu’une partie méconnue du village. L’œuvre phare. Les panneaux monochromes de Kevin Rouillard, lauréat du prix Sam Art en 2018. Suspendus sur la façade de la tour à mâchicoulis du XIIIe siècle, ils télescopent joyeusement les époques.
PHÉNOMÈNE L’ART EN PLEIN AIR
CHAUMONT-SUR-LOIRE DOMAINE DE CHAUMONT
POÉTIQUE Chaque été est l’occasion de filer découvrir la nouvelle Saison d’Art du Domaine de Chaumont. Les œuvres sont dispersées dans le château et ses dépendances, mais aussi dans le parc à l’anglaise du XIXe planté de cèdres centenaires et dans les bucoliques Prés du Goualoup. Au total, 32 hectares avec une impression d’infini, habités d’une trentaine de pièces inspirées de Dame Nature : la “Folie” d’Eva Jospin, la cabane perchée dans les arbres de Tadashi Kawamata, l’arbre aux échelles de François Méchain… On s’arrête également devant les inattendus nids de barbelés suspendus aux arbres, réalisés par le Palestinien Abdul Rahman Katanani qui est né et a grandi dans un camp de réfugiés au Liban – connu également pour ses vagues de barbelés tressées à la main et ses silhouettes d’enfants en tôle découpée – ainsi que devant une grande tapisserie de fils chatoyants, toile de fond d’un jardin coloré dans la cour bien nommée Agnès Varda. L’œuvre phare. L’installation du Ghanéen El Anatsui, Lion d’or à la Biennale de Venise en 2015 : trois barques qui s’élèvent vers le ciel (photo), avec la Loire en toile de fond.
OJusqu’au 1er nov. Rens. au 02 54 20 99 22 et sur domaine-chaumont.fr
LÉMERÉ CHÂTEAU DU RIVAU
FÉERIQUE Dans ce château médiéval de la Loire, restauré par des collectionneurs d’art, les œuvres s’infiltrent dans les moindres recoins, des chambres d’hôtes abritées dans les anciennes écuries aux jardins classés, inspirés des légendes du Moyen Age et qui enchantent par leur surprenante diversité botanique. Chaque année, la propriétaire, Patricia Laigneau, y orchestre des expositions d’art contemporain où s’invite toujours le merveilleux. En témoigne le parc jalonné d’une trentaine de sculptures monumentales, dont certaines semblent tout droit sorties d’un conte, qu’il s’agisse de la taupe géante de Ghyslain Bertholon, de la drôle de chaussure aux allures de maison de l’Américaine Amy O’Neill, de “L’Echelle de Gulliver” créée pour le lieu par Fabien Verschaere, ou du carrousel décalé de Pierre Ardouvin. L’œuvre phare. Les “Bottes de sept lieues” de Lilian Bourgeat, comme oubliées par un géant imaginaire (photo). Le début d’une histoire à raconter… A voir aussi.L’exposition “Le Goût de l’art, acte II” jusqu’au 1er novembre.
Eric Sander ; Jean-François Jaussaud / Luxproductions
PHÉNOMÈNE L’ART EN PLEIN AIR
NANTES PARCOURS “LE VOYAGE À NANTES”
ORIGINAL Dixième édition pour ce parcours artistique organisé par l’inventif Jean Blaise. Sous sa houlette, l’art envahit la ville et se propage le long de l’estuaire de la Loire jusqu’à Saint-Nazaire. En prime des œuvres pérennes dont le mythique squelette de serpent de mer de Huang Yong Ping ou la maison affaissée dans l’eau de JeanLuc Courcoult, se dévoilent les nouveaux élus de cette année. A commencer par le plasticien Ugo Schiavi, qui imagine un bateau échoué sur la fontaine de la Place Royale, Laurent Le Deunff qui perche un castor à queue de poisson dans un arbre, Eva Jospin qui fait surgir six arbres tels des totems fantomatiques au cœur du domaine de la Garenne Lemot à Gétigné, près de Nantes. Ce parc de 13 hectares parsemé de folies et calqué sur les jardins à l’Antique est l’un des enchantements de la région. L’œuvre phare. Les trois sculptures XXL du duo Dewar & Gicquel échouées sur la plage près de la capitainerie dans l’avant-port de Saint-Nazaire : un pied, un pull-over et un tube digestif (photo), comme les reliques d’une civilisation disparue.
ODu 3 juillet au 12 septembre. Rens. sur levoyageanantes.fr
ANGLET BIENNALE “LA LITTORALE”
ÉCOLOGIQUE Aborder l’écologie par le prisme de l’imaginaire, c’est la proposition de la 8e édition de cette Biennale d’art contemporain qui laisse carte blanche à une douzaine d’artistes à la fibre engagée, dont Angelika Markul, Laurent Tixador et Jérémy Gobé qui œuvre à sauver le corail. Leurs œuvres s’exposent de La Barre, avec le parc écologique Izadia ravagé par un incendie en 2020, à la Chambre d’Amour et ses étendues de plage. Là, Elsa Guillaume s’approprie une douche de plage pour la transformer en fontaine baroque peuplée d’une pêche miraculeuse, le duo Feipel & Bechameil fait surgir du sol un haricot géant, Stéphane Thidet installe un phare dans la fameuse grotte de la Chambre d’Amour, qui, comme arraché par les flots et gisant sur le sable, continue à lancer ses signaux lumineux. Quand l’art donne à réfléchir… L’œuvre phare. “Le Rappel de l’océan” de Laurent Pernot : une voiture ensablée plantée à la verticale, au sommet de laquelle un enfant contemple l’infini (photo).
Franck Tomps ; Laurent Pernot