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REPOUSSER LES LIMITESPROMOUVOIR LES NOUVEAUX TALENTS

Le prix Edward Steichen Luxembourg est un hommage à la vie et à l’œuvre de l’artiste américain Edward Steichen qui est né au Luxembourg. Ce prix rend hommage aux réalisations artistiques de Steichen en tant que photographe et conservateur, ainsi qu’à son inlassable engagement pour la défense des arts et l’encouragement de nouveaux talents. Il s’agit d’un prix d’encouragement créée en 2004 lequel, tous les deux ans, donnera l’occasion à de jeunes artistes de moins de 35 ans de s’immerger dans le contexte culturel bouillonnant de la ville de New York, qui s’est avéré si fertile pour Steichen lui-même.

Le prix comporte deux catégories, la première à vocation résolument européenne, la seconde plus spécifiquement destinée aux artistes luxembourgeois. Les deux prix consistent en une résidence à New York au sein de l’International Studio and Curatorial Program (ISCP), un centre d’art contemporain renommé basé sur la résidence pour les artistes et les conservateurs, situé à Brooklyn. Le premier prix, le Edward Steichen Award Laureate, consiste en une résidence de six mois. Le second, le

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Edward Steichen Luxembourg Resident in New York, sponsorisé par le fonds-stART up, Œuvre Nationale de Secours Grande-Duchesse Charlotte, est accordé sous forme d’un séjour de quatre mois à l’ISCP. Les artistes sont nommés par des conservateurs et des experts du Luxembourg et de la grande région dans le domaine de l’art contemporain. Les lauréats sont ensuite sélectionnés par un jury composé de trois membres: un Luxembourgeois, les deux autres européens et américains respectivement. De plus, un représentant de l’Œuvre Nationale de Secours Grande-Duchesse Charlotte, fonds-stART up, participe au processus de délibération et de sélection. Comme les artistes contemporains ont de plus en plus souvent recours à des techniques variées qui dépassent les approches traditionnelles et brouillent les distinctions entre les genres artistiques, le prix Edward Steichen est ouvert à un vaste éventail de pratiques dans le domaine des arts visuels.

En 2022, l’artiste belge Eva L’Hoest a été désignée lauréate du prix Edward Steichen en reconnaissance de son utilisation pertinente des technologies contemporaines pour relier la mythologie à l’actualité contemporaine. Eva L’Hoest travaille avec des scans 3D, la modélisation, la capture directe et les générateurs d’effets spéciaux, entre autres, pour atteindre une compréhension plus profonde de notre époque actuelle. «Entre ruines fictives et réelles, les images en mouvement de ses films et installations explorent les méandres de la mémoire - humaine et non humaine - qui rappellent des questions économiques et environnementales plus vastes», explique Antoinette Jattiot, commissaire d’exposition et écrivain. «Son approche de l’image photographique, qu’elle soit sculpturale, numérique ou conceptuelle, révèle et déconstruit des écosystèmes qui nous alertent sur notre relation à l’espace et à l’ère numérique. Poétiquement, elle explore l’état du monde, notre capacité à habiter le temps et le pouvoir de la contemplation». Eva L’Hoest séjournera à l’ISCP de juillet à décembre 2023.

Le prix Edward Steichen Luxembourg Resident in New York 2022 a été attribué à l’artiste Nika Schmitt pour ses systèmes mécaniques élaborés fonctionnant à partir de données, de rythmes et de motifs collectés. «Nika Schmitt montre comment les données se forment au contact d’autres données et comment cette relation interactive est liée à nos propres expériences sensorielles», écrivent Sandra Schwender et Carl Rethmann à propos de son travail. Elle commencera sa résidence à l’ISCP en septembre 2023. Malgré le large éventail de pratiques artistiques prises en considération, les approches innovantes de la photographie restent intéressantes pour le prix Edward Steichen. En 2015, l’artiste belge Max Pinckers a été désigné lauréat du prix Edward Steichen pour son interprétation contemporaine de la photographie documentaire, explorant les limites de celle-ci et révélant la nature manipulatrice du médium. Sa résidence aux États-Unis a donné lieu à un ensemble d’œuvres, Margins of Excess, sur la construction des faits et de la fiction. Il a fait partie de Double Bind (2021), la première exposition monographique de son travail au Fotomuseum d’Anvers, présentant ce qu’il appelle un «documentaire spéculatif». Plus récemment, Max Pinckers s’est attaché, pour le magazine The New Yorker, à «trouver les angles morts de la photographie documentaire lors du plus grand événement sportif du monde», la Coupe du monde de football au Qatar.

Il convient également de souligner le talent prolifique de l’artiste et graphiste Daniel Wagener, résident Edward Steichen Luxembourg à New York en 2018. Dans ses photographies subtilement humoristiques, Daniel Wagener capte la bizarrerie des décors du quotidien, souvent mise en valeur, dans ses œuvres d’art, par des techniques d’impression ou d’édition expérimentales et peu coûteuses. La même année, l’artiste néerlandaise Esther Hovers avait poursuivi ses explorations de la manière dont les humains naviguent dans les géographies urbaines en tant que lauréate du prix Edward Steichen, pendant sa résidence de six mois à l’ISCP. Son travail photographique examine plus généralement les relations de pouvoir et de contrôle dans les espaces publics, et New York était le cadre idéal pour étendre ses recherches. Dans son récent travail intitulé Le Droit à l’Oubli, Hovers reproduit un portrait trouvé sur Google du premier homme à revendiquer avec succès son «Droit à l’Oubli» auprès de la Cour de justice de l’Union européenne. Comme il a gagné son procès, sa quête d’oubli est entré dans les annales. Hovers recherche des techniques de reproduction qui montrent et modifient simultanément son portrait. Internet n’oublie pas et nous sommes confrontés à des archives personnelles en ligne qui ne cessent de croître. Pour cette série d’œuvres, elle utilise la reproduction photographique comme moyen de réfléchir à la circulation sans fin, à la résilience de l’image.

Expérimenter les nouvelles technologies, remettre en question, brouiller ou repousser les limites, telles étaient les caractéristiques de la vie et de l’œuvre d’Edward Steichen lui-même. Il continue d’être une source d’inspiration aujourd’hui, pour notre association et pour nos lauréats qui cherchent à perfectionner leur art tout en élargissant le dialogue entre les cultures et les peuples, plus important aujourd’hui que jamais.

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