…UN TEMPS POUR RÉCOLTER (1946-1957)
« A time to be sowing, a time to be reaping… » Il est un temps pour semer et un temps pour récolter, dit la belle chanson de Mahalia Jackson. Avec la fin de la guerre s’annonce en effet pour Jean Walter le temps de toutes les récoltes, ou presque. C’est au Maroc qu’aura mûri sa moisson la plus fructueuse. Car, en très peu d’années, la mine de Bou Beker va accroître sa production dans des proportions que son “inventeur”, pourtant d’emblée persuadé de sa bonne étoile, n’aurait sans doute jamais imaginées. Et les revenus qu’il va en tirer dans la dernière décennie de sa vie sont sans commune mesure avec tout ce qui a précédé pour lui. “Cette réussite peut s’analyser, dit Jean-Jacques Walter, petit-fils de Jean, qui a fait l’École des Mines de Paris, et préside aujourd’hui la Fondation Zellidja pour les bourses de voyage. D’abord une certaine expérience est venue avec temps. En matière de concentration du minerai, par exemple, il y a eu, pour la méthode dite de “flottation au savon”, le classique processus essais/ échec/ essais à nouveau/ succès. Mais la réussite de Jean est aussi le produit d’une volonté d’airain : durant plus de vingt ans, de 1926 à 1947, il a investi et réinvesti à Bou Beker sans en tirer un sou – et les quelques amis qu’il avait convaincu de mettre au pot non plus. Il fallait donc y croire !”
“Certes, poursuit Jean-Jacques Walter, ce n’est pas une industrie globalement très complexe. Mais au départ il fallait y arriver à Bou Beker : le coin était à l’écart de tout ! Et puis il faut admettre que Jean a eu de la chance. D’abord il était voisin d’une compagnie minière, l’Asturienne, et il a pu jouer un peu sur les histoires de permis – à l’époque la connaissance que les Services géologiques avaient du terrain marocain était encore floue. Mais surtout, il est tombé d’emblée sur le gros lot !” Jean-Jacques Walter nous rapporte encore ceci : “Henry Pagézy, directeuradministrateur de la considérable société Peñarroya, qui a été à partir de 1942 un innébranlable partenaire de Jean Walter (à qui il s’est associé pour construire une fonderie de plomb à Oued el-Himmer, sous le djebel Mohceur) aimait à dire, que 80 à 90 mines sur les quelque 130 que sa compagnie a exploitées en Espagne, en France et ailleurs) leur avaient fait perdre de l’argent, 30 avaient 1