Capital Dossier Spécial - Mon tour du monde, une vraie formation

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SPÉCIAL JEUNES

Mes premiers pas dans l’entreprise…

MON TOUR DU MONDE, UNE VRAIE FORMATION

Cette aventure ­apprend au moins une chose : à lire un plan…

Faire le tour du monde, un rêve de touriste ? Oui, mais pas seulement. En partant à l’aventure, on acquiert une expérience originale, qu’on peut valoriser sur son CV. enir tête à un douanier qui exige un bakchich au passage de la frontière entre la Thaïlande et le Laos, c’est une expérience qui apprend l’art de la négociation ! «Comme dans beaucoup d’endroits, les frontières sont corrompues, les douaniers font la loi et empochent des pots de vin», racontent Vanessa et Jean-Adrien, deux globetrotteurs rentrés en octobre 2013 de leur tour du monde. Tout juste sorti d’école de commerce en 2012, ce jeune couple avait décidé de faire une pause avant d’entrer dans la vie active et de compléter sa formation en partant à la découverte du monde. «Convaincus que le voyage forme la jeunesse, nous avons fait le choix de partir à la rencontre des réalités du monde. Cette école de la vie non reconnue est pourtant l’une des plus grandes sources d’enrichissement et d’apprentissage de toute notre scolarité. Nous aimons appeler ces treize mois de voyage notre MBA en adaptabilité culturelle et environne- JÉRÉMY mentale», racontent- ET CLÉMENT ils sur le blog qui "il n’y a pas plus retrace leur aventure enrichissant que (Letourdumonde- de se confronter desglobereveurs.fr). à d’autres Un diplôme qui n’a cultures, rien d’officiel mais qui, pourtant, inté- d’autres façons resse de plus en plus de faire et de penser" les DRH.

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PHOTO : STONE / GETTY IMAGES- DR

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Car, à part pour quelques aventuriers qui n’ont peur de rien, partir pour un tour du monde est une aventure qui se prépare, s’anticipe et se budgète. Pour certains, trouver le financement, planifier son trajet, organiser sa communication est au final presque aussi compliqué que de monter sa première boîte. Cela nécessite d’avoir des notions de gestion de projet, de communication, de négociation. Il faut aussi être rigoureux et autonome. De vraies qualités et compétences, qui peuvent ensuite être valorisées lors d’une recherche d’emploi. De plus, les employeurs préféreront toujours dans leurs équipes des gens heureux d’avoir réalisé leur rêve à des personnes frustrées et ruminant leurs regrets. D’autant qu’un tour du monde fait aussi gagner plusieurs ­années en maturité. Ancien DRH chez BMW France, Eric de Porcaro confirme que ce type d’expérience intéresse les recruteurs. «Cela dénote une capacité à partir, à s’engager, prendre des risques et s’ouvrir au monde.» Il nuance cependant en précisant qu’il ne s’agit «que d’un élément parmi d’autres sur un CV, cela n’apporte pas forcément quelque chose à l’entreprise». Halime Issad, DRH de l’ONG Solidarités International, est sur la même longueur d’ondes. Pour lui, «tout dépend des raisons qui ont amené la personne à le faire et ce qu’elle en ­retire comme enrichissement personnel. Une expérience de l’interculturalité, voire un perfectionnement des langues parlées sont utiles, mais le voyage pour le voyage est vain.» De son côté, Fabien, parti en 2012 avec sa petite amie, a noté

à son retour qu’avec «certains recruteurs la discussion tournait vite sur le voyage et pouvait durer une éternité. Cela ­permet parfois de casser les barrières et de rendre l’entretien moins formel et conventionnel». Et si tous ces globetrotteurs ont en commun d’avoir perfectionné leur pratique des langues étrangères, principalement de l’anglais, ils sont aussi unanimes sur un point : leur voyage leur a appris à relativiser. Fabien se «prend moins la tête» dans son quotidien comme au travail et «voit la vie ­autrement». Peggy, chanteuse, PEGGY et Fred, vidéaste, "avant même ont voyagé pendant de penser à notre une année scolaire itinéraire, nous avec leur fils Miles ans) à la renavons d’abord (5 contre des enfants de réfléchi au douze pays. Partis de financement et ­Colombes dans les surtout Hauts-de-Seine, ils anticipé notre avaient pris rendezretour" vous dans plusieurs écoles réparties sur les cinq continents. A chaque fois, Peggy a créé une chanson avec les élèves, en s’appuyant sur leur culture et les instruments de la région, puis Fred a filmé et monté un clip pour chaque œuvre réalisée. Peggy est revenue «avec une nouvelle énergie et l’envie de continuer à prendre des risques». Pour financer leur périple, le couple a fait appel à un sponsor et à des donateurs. «Nous avons payé la plus grande partie avec nos économies, et nous avons aussi été aidés par Deezer, dans le cadre d’un partenariat où nous leur fournissions du contenu» (www.deezer.com/app/alittlemusicworldtour). Peggy, Fred et Miles ayant organisé leur voyage autour de la musique, il leur semblait logique

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Mes premiers pas dans l’entreprise…

AUX YEUX DES EMPLOYEURS, TOUS LES PÉRIPLES NE SE VALENT PAS de s’associer avec la plate-forme de musique en ligne. Et pour boucler le budget, ils ont «eu recours à un site de financement participatif pour l’achat du matériel photo et vidéo». Avec une telle expérience et après avoir été «maître de son projet de A à Z», Peggy souhaite ­logiquement s’affirmer et poursuivre sur cette voie en montant sa propre activité. Autres voyageurs ne manquant pas de ressources, Jérémy et Clément, deux jeunes Bordelais qui font le tour du monde… à vélo. Actuellement à mi-parcours, ils prévoient trois années «de découvertes et de voyage» et estiment le compteur final à 60 000 kilomètres. Ils sont parfois rejoints par des amis qui les accompagnent pendant quelques ­semaines. Pour financer leur expédition, ils auraient pu faire appel à des équipementiers pour leurs vélos ou à des fabricants de vêtements techniques pour leur passage au cercle polaire arctique, mais ils ont préféré se débrouiller seuls et rester 100% indépendants. Ils ont en revanche très bien joué avec leurs employeurs respectifs. Clément a négocié une rupture conventionnelle avec son patron, qui lui «a promis de [l]’aider à trouver un emploi au retour». Jérémy, de son côté, n’a eu «aucun souci pour obtenir un congé sabbatique et compléter les années suivantes avec un congé sans solde». S’il le souhaite, à son ­retour, il est donc assuré de retrouver du travail dans la SSII qui l’emploie, une ­sécurité qui «rassure les mamans», ­selon ses propres mots. Les dirigeants de l’entreprise prennent même régulièrement de ses nouvelles par e-mail ou en lisant le blog sur lequel ils partagent leur périple ­(Attrapemaroue.com) ! Les deux amis, tout comme leurs patrons, ont bien

compris ce que cette expérience pourrait leur apporter d’un point de vue professionnel. «Ce que nous sommes en train de vivre nous apprend énormément au niveau organisationnel, logistique et relationnel. Ça nous aidera forcément dans notre travail, notamment pour gérer les relations humaines.» Si, comme eux, vous êtes tenté par l’aventure, n’oubliez donc pas d’associer votre employeur à votre projet. Il peut vous accorder un congé sabbatique de six à FABIEN onze mois (vous evez le prévenir au "Avant de partir, ­dmoins mois à j’avais prévenu l’avance)trois et/ou vous mon banquier proposer un congé pour qu’il sans solde, qui vous ne s’inquiète pas permettra de retrou­ de voir passer ver votre poste à des retraits à votre retour. Hong Kong Côté budget, Jérémy ou au Japon" et Clément ont prévu un budget de 20 000 euros chacun pour un voyage de trois ans. Peggy, Fred et leur fils ont eux ­dépensé environ 30 000 euros en dix mois, et Fabien et sa copine disposaient de 10 000 euros chacun pour un an. Dans tous les cas, l’avion reste une des ­enveloppes les plus importantes, même si certaines compagnies (SkyTeam, Star Alliance ou One World, par exemple) proposent des billets tour du monde. Une fois sur place, le poste des frais quotidiens n’est pas forcément le plus lourd, à condition de ne pas avoir des goûts de luxe. Nos deux cyclistes s’en sortent très bien avec 10 euros par jour et par personne, somme qui inclut la nourriture,

l’entretien et le ­remplacement de leur matériel. Ils sont aussi aidés par les gens qu’ils croisent, qui, séduits par leur aventure inhabituelle, leur proposent souvent un coup de main ou un lit au chaud. Si vous souhaitez vous aussi tenter la grande aventure et parcourir le monde, vous l’aurez compris, tout est possible à condition de bien se préparer et de prévoir son retour en amont. Si vous êtes locataire, n’oubliez pas de dénoncer votre bail suffisamment de temps à l’avance et de le faire dans les règles. Vous pourriez avoir besoin d’un propriétaire ou d’une agence qui vous fera confiance à votre retour, alors que vous n’aurez pas d’avis d’imposition récent à fournir. Si vous êtes propriétaire et souhaitez louer votre bien, choisissez avec soin un intermédiaire qui s’occupera de tout pour vous plutôt que d’avoir à gérer des loyers non réglés ou de répondre vous-même à des e-mails vous indiquant que la chaudière est en panne alors que vous campez sur une plage en Asie. Avant de partir, pensez aussi aux vaccins nécessaires et, si vous avez ­besoin de certains médicaments, renseignez-vous sur leur disponibilité dans les pays que vous traverserez. Certains sont interdits, d’autres disponibles uniquement sur ordonnance… et les prix ne sont pas les mêmes partout. Enfin, élément clé de votre tranquillité, prévenez votre banquier, vérifiez que les moyens de paiement qu’il met à votre disposition seront utilisables partout et n’hésitez pas à négocier au préalable les commissions et frais bancaires appliqués. Dans la mesure du possible, partez avec deux cartes bancaires, délivrées par deux banques différentes. Fabien avait eu beau prévenir son conseiller et ne pas être à découvert, il s’est quand même retrouvé avec une carte bloquée en Australie. Une occasion supplémentaire d’apprendre à négocier…

Frédéric Haffner

COMMENT BIEN PRÉPARER SON PÉRIPLE ?

V

otre tour du monde sera évidemment unique, mais l’expérience des autres vous fera gagner un temps précieux. Nombreux sont ceux qui racontent leur aventure étape par étape sur un blog dédié. Leurs récits regorgent d’infos et ils partagent souvent des liens 30 Capital Dossier spécial Septembre 2014

vers ceux qui les ont aidés. C’est le cas de François, infatigable voyageur, qui a dressé une check-list complète pour vous ­aider à choisir et à comparer, des assurances aux banques, en p ­ assant par les compagnies ­aériennes et l’équipement ­(Voyageautourdumonde.fr). Il est

r­ ecommandé de s’y prendre un an avant le départ, notamment pour faire des économies et attaquer les démarches administratives. Visitez la rubrique Conseils aux voyageurs du site du ministère des Affaires étrangères pour connaître les pays à éviter et les vaccins indispensables.


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