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FONDATION MARTIN BODMER DES GUERRES DE RELIGION AUX ÉDITS DE NANTES
Des guerres de religion aux édits de Nantes
par Nicolas Ducimetière Fondation Martin Bodmer
Avec l’appui de quelques humanistes et théologiens influents, réunis notamment dans le «Cénacle de Meaux» initié par le penseur et traducteur Jacques Lefevre d’Étaples, le protestantisme, sous sa forme luthérienne, essaima en France durant les années 1520, touchant les plus hautes couches de la société (dont la propre sœur du roi François I er, Marguerite d’Angoulême, reine de Navarre et femme de lettres). D’abord considérée avec une certaine bienveillance, la religion réformée s’attira la colère du pouvoir en 1534, lorsqu’une affiche contre la messe fut placardée à Paris et dans plusieurs villes du royaume. Un exemplaire se retrouva cloué sur la porte de la chambre royale au château d’Amboise et on en retrouva même, dit-on, dans la boîte à mouchoir du souverain! Avec la fin de la tolérance arriva en France la pensée calviniste, bientôt majoritaire vers 1560 chez les tenants de la nouvelle religion, qui représentaient alors 10% de la population française (et jusqu’à 30% dans les rangs de la noblesse): on les surnomma «huguenots» (terme dérivant sans doute de l’allemand Eidgenossen, confédérés, et de sa déformation genevoise, Eidgnots).
Devant l’exacerbation des tensions interreligieuses, la reine mère Catherine de Médicis tenta une réunion de conciliation de la dernière chance entre les deux camps, mais ce colloque de Poissy tenu en 1561 (avec la participation de Théodore de Bèze) s’acheva sur un échec. L’année suivante, le très catholique duc de Guise et son escorte, chahutés par des protestants réunis pour le culte dans une grange du petit village de Wassy, passent les fidèles au fil de l’épée: c’est le début de presque quatre décennies de conflits civils qui vont ensanglanter la France au cours de huit cruelles guerres de religion, symbolisées notamment par le massacre de la Saint-Barthélemy en août 1572. Après l’assassinat de son lointain cousin le roi Henri III en août 1589 et l’extinction de la dynastie des Valois, Henri de Bourbon, roi
de Navarre, se retrouva propulsé sur le trône. Problème: ce prince était le chef du parti protestant en France. Impossible pour la grande majorité des Français d’accepter un monarque huguenot! Durant les neuf ans de la huitième et dernière guerre de religion, Henri IV reconquit son royaume, mais aussi les cœurs, acceptant finalement d’abjurer sa religion: «Paris vaut bien une messe» (selon une phrase apocryphe). Enfin, dans les derniers jours d’avril 1598, l’édit de pacification dit «Édit de Nantes» marqua le retour de la paix civile. Conclu dans le dernier bastion rebelle de la Ligue ultra-catholique après sa reddition, le texte s’inspira des édits de tolérance antérieurs pour accorder aux protestants certains droits fondamentaux comme la liberté de culte et de conscience, des places de sûreté, le respect des droits légaux et des biens, l’accès aux charges publiques, tout en interdisant la Cène à Paris et dans d’autres villes (articles secrets). Garant de la paix religieuse et civile, le texte demeura en usage jusqu’à sa révocation en 1685.
HENRI IV (1553-1610), Edit du Roy, & Declaration sur les Edits de Pacification, faits à Nantes au Mois d’Avril 1598. «Jouxte la copie imprimee à Paris», s.n., 1599. Fondation Martin Bodmer, Cologny