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Angela Wilde
JOHNNY DEPP L’histoire d’un pirate romantique
GREMESE
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Titre original : Johnny Depp – La storia di un pirata romantico 2011 © E.G.E. s.r.l. – Rome Traduction de l’italien : Mélanie Fusaro Couverture : www.lamelaverde.it Photographies : Matériel promotionnel distribué par Sony Pictures (première de couverture et p. 1 du dossier), Miramax Films (p. 2 en bas et 3 du dossier), Columbia Pictures (p. 4 en haut du dossier), 20th Century Fox (p. 4 en bas du dossier), Universal Pictures (p. 5 en haut du dossier), Infinitum Nihil/GK Films (p. 5 en bas et 15 en haut du dossier), Walt Disney Pictures (quatrième de couverture et p. 6, 8, 11, 12 en bas, 14, 16 du dossier), Warner Bros. Pictures (p. 7 en haut, 10 du dossier), Moviemax (p. 7 en bas du dossier), New Line Cinema (p. 9 du dossier), Forward Pass/Misher Films/Tribeca Productions (rabat de quatrième de couverture et p. 13 du dossier), Media Film (p. 12 en haut du dossier), 01 Distribution (p. 15 en bas du dossier). L’Éditeur prie d’excuser les éventuelles erreurs, lacunes ou omissions dans l’indication des copyrights, et est disposé à effectuer des révisions dans le cas d’éventuelles réimpressions et pour la reconnaissance des droits relatifs à l’art. 70 de la loi n. 633 de 1941 et modifications ultérieures. Impression : La Moderna – Rome Copyright de l’édition française (ayant pour titre Johnny Depp – L’histoire d’un pirate romantique) GREMESE 2011 © E.G.E. s.r.l. – Rome www.gremese.com Tous droits réservés. Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite, enregistrée, ou transmise, de quelque manière ou par quelque moyen que ce soit, sans le consentement préalable de l’Éditeur. ISBN 978-88-7301-748-6
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Sommaire Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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1 Un jeune rebelle passionné de musique . . 2 Acteur par hasard . . . . . . . . . . . . . . 3 De l’idole des adolescents à l’interprète polyvalent . . . . . . . . . . . . . . . . 4 Ses débuts comme réalisateur et son incursion dans le thriller . . . . . . . . . 5 Un Américain à Paris . . . . . . . . . . . . 6 La consécration internationale . . . . . . . 7 Sérénité personnelle et maturité artistique . 8 Entre film musical noir et fables modernes 9 Vers de nouveaux objectifs . . . . . . . . .
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Annexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Filmographie . . . . . . . . . . . . . . . . Bibliographie et sitographie . . . . . . . .
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Introduction Quand on parle de Johnny Depp, les mots qui viennent aussitôt à l’esprit sont : talent, charme et éclectisme. Né dans une petite ville du Kentucky, élevé en Floride, il vit une enfance et une adolescence turbulente, qui fait naître en lui le rêve de devenir une rockstar. Sa carrière d’acteur commence par hasard, comme un moyen de financer son activité musicale et non suite à un choix conscient. Et pourtant, ses premières expériences à la télévision et au cinéma révèlent déjà ses dons et son charisme, faisant de lui une idole des adolescents. Johnny fuit cependant le succès facile, préférant se dédier à des films comme Edward aux mains d’argent, Ed Wood et Donnie Brasco, qui l’imposent comme l’interprète le plus polyvalent et le plus anticonformiste d’Hollywood. Au fil des ans, il continue à évoluer d’un genre à l’autre, passant du drame au thriller et à la comédie sentimentale, jusqu’à ce que la saga de Pirates des Caraïbes le consacre comme star internationale. 7
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Parallèlement à ses rôles sur grand écran, la vie sentimentale orageuse de Johnny fait la une des magazines, alimentant la presse people de ses relations avec des femmes célèbres comme Winona Ryder et Kate Moss, jusqu’à sa rencontre avec la chanteuse et actrice française Vanessa Paradis, qui fait apparaître au grand jour un visage inédit : celui d’un pirate romantique, dont voici l’histoire.
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Un jeune rebelle passionné de musique « Il n’y a rien de tel que la musique. Rien qui ne nous touche aussi profondément. La musique réussit à nous révéler tant d’émotions que nous ne soupçonnions pas. » Johnny Depp
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ohn Christopher Depp junior naît le 9 juin 1963 à Owensboro, chef-lieu du comté de Daviess dans le Kentucky. Son père, John Christopher Depp senior, âgé de 25 ans, diplômé en ingénierie civile, est employé au sein de l’entreprise familiale. Sa mère, Betty Sue Wells, a 28 ans et travaille comme serveuse dans une cafétéria. « Johnny » est le benjamin de quatre enfants : Elisa Christine (appelée Christi) est plus âgée que lui de trois ans, tandis que Deborah et Daniel, âgés de 7 et 10 ans, sont nés du précédent mariage de sa mère. Les grands-parents paternels, Oren et Violet (appelée « Mattie ») viennent d’une famille bourgeoise ; les 9
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grands-parents maternels, Walter (dit « Pawpaw ») et Bessie, se consacrent à la culture du tabac. Plus tard, lors d’interviews, quand on lui demandera ses origines, Johnny déclarera avoir du sang irlandais, allemand et cherokee, avec une ascendance navajo. Et en 2002, lors du talk-show Inside the Actors Studio présenté par James Lipton, il affirmera ironiquement que son nom de famille signifie « idiot » en allemand. Néanmoins, selon son biographe Denis Meikle, la branche américaine des Depp commença avec Pierre Deppe (le « e » fut supprimé par la suite), fils de huguenots français qui s’établirent en Virginie autour de 1697 pour fuir la persécution dans leur pays d’origine. Johnny restera toujours très lié à sa mère – dont il louera souvent les sacrifices faits pour soutenir sa famille – et à ses frères et sœurs. Son grand-père Walter joua également un rôle fondamental dans son enfance : il avait créé avec lui un rapport spécial (« Je me rappelle que je cueillais le tabac dans les champs avec lui, en écoutant les histoires qu’il me racontait », déclarera l’acteur), interrompu, hélas, par la mort de Walter, quand Johnny n’avait alors que 7 ans. Peu après, la famille Depp déménage à Miramar, en Floride, un endroit que Johnny décrira ainsi : « C’était comme Endora, la ville qui apparaît dans Gilbert Grape. Il y avait deux magasins d’alimentation identiques, l’un en face de l’autre, et il ne se passait jamais rien. » Jusqu’à ses 15 ans, il suivra sa famille dans une série de déménagements continus, qui l’empêchera de se constituer un cercle d’amis 10
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stable, et le rendra fermé et revêche. « On se déplaçait comme des gitans. De mes 5 ans jusqu’à mon adolescence, nous avons habité dans trente ou quarante maisons différentes. Ça a certainement beaucoup à voir avec la vie vagabonde que je mène maintenant. Mais c’est ainsi qu’on m’a élevé, donc je pensais qu’il n’y avait là rien d’anormal. Là où se trouve notre famille, c’est là qu’est notre maison. Nous avons vécu dans des appartements, dans une ferme, dans un motel. Puis nous avons loué une maison, et un soir, nous avons déménagé dans celle d’à-côté. Je me rappelle avoir porté mes vêtements à travers le jardin, en pensant « C’est un déménagement étrange, mais facile », déclarera-t-il à la revue Playboy en 1996. En grandissant, Johnny s’intéresse à la musique, grâce surtout à un oncle pasteur presbytérien, qui dirige un groupe de gospel qui chante à l’église, et à son frère Danny, un passionné de rock qui lui fait découvrir des artistes comme Bob Dylan, Van Morrison et les Kiss. À 12 ans, Johnny reçoit en cadeau de la part de sa mère son instrument de musique préféré, une guitare électrique d’occasion. Pendant un an, il y consacre tout son temps libre, en faisant preuve d’un talent naturel. Il forme donc son premier groupe, les Flame, avec lequel il commence à faire la tournée des clubs locaux, exhibant une fausse carte d’identité pour pouvoir jouer. « J’avais un oncle prêcheur qui jouait. Je le regardais souvent. C’était un vrai prêcheur-prêcheur : flammes de l’enfer, damnation, et tout le reste. Puis j’ai commencé à écouter les Doors, les Stones, les Beatles, 11
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Aerosmith… le hit des Clash, en pensant : « Okay. » Ma première guitare était petite et pas chère. Ma mère me l’a achetée pour vingt-cinq dollars. Depuis, je ne me souviens pas de la puberté, je ne faisais que jouer de la guitare », confiera Depp des années plus tard au cours d’une interview pour Rolling Stone. En 1978, Johnny doit affronter une autre dure épreuve : la séparation de ses parents. « Je me rappelle que mes parents se disputaient, et que nous, les enfants, on se demandait avec qui on resterait s’ils divorçaient », déclarera-t-il en repensant à cette époque. Il s’inquiète avant tout pour sa mère : « Elle a plutôt mal encaissé le coup et j’ai senti qu’il était de mon devoir de m’occuper d’elle émotionnellement. » « J’ai grandi dans un milieu familial très différent, même si je ne me rendais pas compte que je vivais de manière étrange avant d’aller chez d’autres enfants et de voir comment eux vivaient. En plus, je me sentais aliéné et isolé à l’école, et certains petits garçons et un professeur aimaient s’en prendre à moi. Ça m’a rendu plutôt méfiant et, d’une certaine manière, enragé. On est prêt à faire n’importe quoi pour fuir ce type d’agression. » À 16 ans, il quitte donc l’école, qu’il déteste et où il a fini par se lier avec des types peu recommandables : « J’avais de mauvaises fréquentations. On débarquait dans des endroits, par exemple des écoles, où on détruisait une salle ou autre chose. En plus, je volais, dans les magasins. » « Je n’apprenais rien. Il me semblait que les enseignants étaient là pour tuer le temps et toucher leur salaire. Je m’amusais 12
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davantage en jouant de la guitare. J’ai joué avec un groupe dans des night-clubs depuis tout jeune : ce fut un bon enseignement. » Et en 1989, Johnny accordera à la revue US cette déclaration désormais célèbre : « J’ai commencé à fumer à 12 ans, j’ai perdu ma virginité à 13 ans [avec une jeune fille à peine plus âgée que lui, qui suivait les Flame] et à 14 ans j’avais déjà essayé tous les types de drogues… Je ne dirais pas que j’étais un mauvais garçon, j’étais seulement curieux. » Pendant quelque temps, il part vivre avec son meilleur ami, Sal Jenco, dans une voiture, une Chevrolet Impala de 1967, caressant, en y croyant de plus en plus, le rêve de devenir une rockstar : « Il n’y a rien de tel que la musique. Rien qui ne nous touche aussi profondément. La musique réussit à nous révéler des tas d’émotions que nous ne soupçonnions pas… elle nous touche, du point de vue émotionnel, là où les mots seuls ne peuvent arriver. » « Comme tous ceux qui apprennent à jouer leur première chanson, à ce moment-là on travaille sur un accord. Ma première chanson a été 25 or 6 to 4 des Chicago, ou Smoke on the Water. Je suis arrivé à Stairway to Heaven. À 16, 17 ans, on était en tournée. » « Ma mère était d’accord. J’avais abandonné les études… comme un idiot. La musique était très importante pour moi, c’était un refuge, un salut, contrairement à l’école. » Le rêve de Johnny semble se réaliser avec le groupe The Kids : il commence à jouer dans les boîtes de Floride, remportant un modeste succès en jouant en première partie des concerts de stars comme les B52s, les Talking Heads, les Pretenders et Iggy Pop. 13
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Entre-temps, Johnny avait commencé à fréquenter Lori Anne Allison, la sœur aînée de l’un des membres du groupe. En 1983, Depp et ses compagnons s’installent à Los Angeles, en quête d’un contrat avec une maison de disques, et du grand succès qui, cependant, tardait à arriver. Le groupe prend le nom de Six Gun Method et Johnny exerce toutes sortes de petits boulots – mécanicien, maçon, pompiste, imprimeur, et même vendeur par téléphone de stylos et d’espaces publicitaires – pour pouvoir gagner sa vie. En décembre de la même année, à 20 ans seulement, il épouse Lori Anne. « J’étais en quête de stabilité », confiera-t-il par la suite, sans jamais toutefois révéler grand-chose sur cette phase de sa vie. Le couple ne fonctionne pas et le mariage se solde par un divorce, mais Lori Anne présente à Johnny une personne qui va changer sa vie : Nicolas Cage, le neveu de Francis Ford Coppola. L’acteur le pousse à essayer le métier d’acteur, ce que Depp, au début sceptique, commence à envisager comme un moyen possible de gagner de l’argent pour pouvoir poursuivre sa carrière musicale. Il rencontre donc l’agent de Nicolas, qui le fait participer au casting des Griffes de la nuit de Wes Craven. Dans le film, une jeune fille appelée Nancy (Heather Langenkamp) fait des cauchemars effrayants. Ses camarades de lycée, en proie aux mêmes rêves, sont massacrés dans leur sommeil par l’horrible monstre qui peuple ces cauchemars, et que seule Nancy sera en mesure de combattre. « À ce qu’il paraît, Nick a senti qu’il y avait quelque chose d’intéres14
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sant en moi et que je devais essayer de devenir acteur. J’ai dit à l’agent que j’étais sans expérience, pas même une leçon au lycée, que je n’avais rien fait et que je ne savais rien. Mais il a répondu : « Très bien, je te présenterai quelques producteurs. » Bien qu’il n’ait eu aucune expérience et qu’il soit très différent du personnage qu’il aurait dû interpréter – grand, blond et musclé –, Johnny frappe le réalisateur par son grand charisme et est alors choisi pour interpréter le rôle de Glen Lantz, le jeune homme qui, s’étant endormi dans sa chambre, est avalé par son lit puis recraché dans une mare de sang. « Il avait une personnalité très forte, mais subtile », rappelle Wes Craven. « Il dégageait un certain charisme. Ma fille adolescente et son amie étaient présentes au casting, et elles sont devenues totalement folles. Il est doté d’un grand sex-appeal. » « J’étais terrorisé et perdu, révélera Depp. Heureusement, Wes a été très patient et gentil. Il ne s’offusquait pas si je lui posais des questions du type « Qu’est-ce que ça veut dire action ? » En 1991, Johnny, désormais célèbre, acceptera d’apparaître dans un caméo, sous le pseudonyme d’Oprah Noodlemantra, dans La Fin de Freddy – L’Ultime cauchemar de Rachel Talalay, en hommage à ce premier film qui lui a ouvert les portes du cinéma.
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Acteur par hasard « J’ai toujours été attiré par les perdants. Je n’ai jamais participé au jeu hollywoodien uniquement pour gagner. » Johnny Depp
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près sa première expérience sur un plateau de cinéma, Johnny participe à Dummies, un court-métrage expérimental de Laurie Frank pour l’American Film Institute, qui lui permet de rencontrer l’actrice Sherilyn Fenn (future protagoniste de Twin Peaks), dont il tombe amoureux. Entre-temps, les Kids/Six Gun Method s’étant séparés, il entre dans un nouveau groupe appelé The Rock City Angels. À cette époque-là, il est aussi choisi pour deux films très différents l’un de l’autre : Private Resort de George Bowers, et Slow Burn de Matthew Chapman. Le premier est une comédie sexy typique des années quatre-vingt, dans laquelle deux jeunes gens, Jack et Ben, interprétés par Johnny et Rob Morrow, vivent des aventures croustillantes 17
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avec de très belles jeunes filles en bikini dans une villégiature idyllique. Tourné, ironie du sort, justement dans cette Floride que Depp vient de quitter. Ce film fera un flop autant pour la critique que pour le public, et c’est surtout parce Depp y apparaît nu qu’il deviendra plus tard un titre de collection. Slow Burn est, en revanche, un film noir pour la télévision câblée, tiré du roman d’Arthur Lyons Castles Burning, dans lequel Depp interprète Donnie Fleischer, le fils présumé d’un millionnaire, recherché par son père. « Au début de ma carrière, j’ai interprété des films qui faisaient vraiment pitié, mais ça ne me posait pas de problème, surtout parce que je ne pensais pas que j’allais devenir acteur. J’essayais seulement de gagner de l’argent. J’étais encore un musicien. Je veux dire que je continuais à essayer de financer mes vrais rêves » : c’est ainsi que Johnny commentera plus tard ses premiers rôles. À ses interprétations cinématographiques s’ajoutent les participations à des séries télévisées comme Lady Blue et Hôtel, puis une première grande opportunité pour le grand écran se présente en 1986, quand Johnny est choisi pour un petit rôle – l’interprète Gator Lerner – dans Platoon d’Oliver Stone, un film qui raconte les horreurs de la guerre du Viêt Nam, et s’inspire des expériences réellement vécues par le réalisateur. Les acteurs sont soumis à un entraînement dans des conditions extrêmes pendant deux semaines aux Philippines, de façon à ce qu’ils s’identifient mieux aux soldats qui ont combattu lors de ce conflit. Mais la plupart des scènes 18
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dans lesquelles Depp apparaît seront coupées en phase de montage, réduisant drastiquement une interprétation qui aurait pu constituer son exploit. « Bien que mon rôle dans Platoon ait été relativement peu important, ce fut évidemment une énorme opportunité. » « On savait qu’on était en train de faire quelque chose qui allait être acclamé par la critique, mais personne ne pouvait en prévoir l’importance. » Et pourtant, Johnny ne se laisse pas démoraliser par ces premiers essais peu exaltants. Au contraire, il décide de se préparer plus sérieusement au métier d’acteur, en étudiant au Loft Studio de Beverly Hills. Et en 1987, c’est la télévision qui lui offre une grande opportunité : il est embauché par la production de la série de la Fox, 21 Jump Street, pour interpréter l’agent Tom Hanson, membre d’un groupe de jeunes détectives chargés d’agir infiltrés dans les écoles, pour combattre le problème de la drogue et de la violence. Ce rôle, qu’il refusa au début, craignant de rester piégé trop longtemps dans le même personnage (et pour lequel il est obligé de quitter les Rock City Angels, juste au moment où le groupe va signer un contrat de plus de six millions de dollars avec une maison de disques), lui offre une immense popularité parmi les adolescents américains (surtout les jeunes filles) recevant des milliers de lettres chaque semaine. « Je reçois aussi des lettres étranges, de suicide, de jeunes filles qui menacent de se jeter du haut d’un toit si je ne les contacte pas. Alors je me dis : « Foutaises », mais après je me demande : « Et si c’était 19
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vrai ? » Qui veut prendre le risque ? Je réponds en leur disant de tenir bon. Si les choses vont aussi mal, elles vont forcément s’arranger. Mais je ne suis pas tout à fait équilibré moi non plus, donc comment puis-je leur donner des conseils ? » Bien que située à Los Angeles, la série est tournée à Vancouver, au Canada, et Johnny est loin de Sherilyn Fenn pendant une grande partie de l’année. Leur relation finit par s’en ressentir : ils se séparent et Johnny commence à fréquenter Jennifer Grey, la star du film Dirty Dancing. Son succès et l’argent ne suffisent pas néanmoins à faire taire son insatisfaction pour un personnage dans lequel, le temps passant, Depp se reconnaît de moins en moins : « La seule chose qu’on avait en commun, c’est qu’on se ressemblait. » « Pour être honnête, j’ai accepté de jouer dans 21 Jump Street parce que je pensais que ça ne durerait qu’un an. J’ai aimé l’épisode-pilote et je voulais travailler avec Frederic Forrest, donc j’ai dit oui », avait-il déclaré à Rolling Stone en décembre 1988. « Je ne ferai pas une autre série télévisée, mais du moins celle-ci signifie quelque chose. Ce n’est pas une sitcom de plus sur trois petits garçons assis dans les toilettes. Les scénarios aident les gens. Mais lorsqu’ils feront de Jump Street un plateau-repas, je m’en irai. » « La terre était envahie d’images horripilantes qui me montraient dans le rôle de Tom Hanson. Ils avaient inventé ce produit qui en quelque sorte me ressemblait, et que je ne contrôlais pas. J’étais obligé de travailler quelque chose deux cent quatre-vingt-dix jours par an. On finit par parler plus comme le personnage que 20
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comme soi-même. Et ce ne sont pas des mots particulièrement beaux, il y a quelque chose de bouffon et de laid dans l’intrigue. Ça fait mal. Vraiment. Ça a été horrible », rappellera Johnny quelques années plus tard. Il quitte donc la série en 1990, une année marquée par sa rencontre avec le réalisateur John Waters, qui le veut comme protagoniste de son film Cry-Baby – une sorte de comédie rockabilly à michemin entre la parodie et la comédie musicale de style Grease –, présenté hors compétition au 43e festival de Cannes. Depp interprète le rôle de Wade Walker, dit Cry-Baby à cause d’une larme qui sillonne souvent son visage, signe d’une grande douleur qui a marqué sa vie : la perte de ses parents, des criminels morts sur la chaise électrique. Sur le plateau, Johnny retrouve le chanteur Iggy Pop, cette fois lui aussi en qualité d’acteur : « Quand j’étais petit, à 12, 13, 14 ans, mes héros, ce n’était pas les joueurs de base-ball ou de football. C’était Alice Cooper, Iggy Pop, Aerosmith, les Kiss, et toute cette espèce de rock and roll étrange à la mode à cette époque-là. Travailler avec Iggy dans Cry-Baby, ce fut comme travailler avec un héros de mon enfance. Il a interprété mon grand-père adoptif, donc c’était splendide de l’avoir comme figure paternelle. Une chose vraiment fantastique, c’est qu’Iggy et moi étions au même étage de l’hôtel, on se retrouvait et on jouait de la guitare tout le temps. C’est vraiment un type bien. » « Depp est bon dans le rôle du jeune délinquant : il dit ses répliques mélodramatiques avec 21
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une conviction sérieuse et il ajoute à ses mouvements des élans et des tortillements à la Elvis » souligne la revue américaine Variety. Chef d’une bande de « rebelles » dans le Baltimore des années cinquante, redouté par les garçons et adoré par les filles, mais avec un seul amour – Allison, une étudiante bien comme il faut qui quitte son monde pour le suivre –, Cry-Baby inaugure la série de personnages outsiders qui permettra au talent de Johnny de s’exprimer enfin. « J’ai toujours été attiré par les perdants. Je n’ai jamais participé au jeu hollywoodien uniquement pour gagner. Je fais ce que je veux et, si ça marche dans le cadre de ma carrière, tant mieux. Sinon, au diable. Je ne serai pas esclave du succès » : ces mots résument à la perfection le parcours artistique qui l’amènera dans les années suivantes à devenir une star sans jamais accepter de compromis.
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