MARS 2021 // L'INDICE BOHÉMIEN // VOL. 12 - NO. 06

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JOURNAL CULTUREL DE L’ABITIBI-TÉMIS C AMINGUE - MARS 2021 - VOL 12 - NO 06

GRATUIT

NATHALIE FAUCHER

SENS DESSUS DESSOUS

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RICHARD KISTABISH : À L A DÉFENSE DE L’ANICINABEMOWIN

+ Spécial Femmes

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LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES : L’AUTRE PANDÉMIE

22

L AURANE GAGNON : CRÉATRICE DE TERRITOIRES À DANSER

24

ALINE LECLERC : LIRE L’HISTOIRE DANS LES ROCHES

29

ROUYN-NORANDA ET VAL-D’OR : DES MÈRES AU FRONT


L’indice bohémien est un indice qui permet de mesurer la qualité de vie, la tolérance et la créativité culturelle d’une ville et d’une région. 150, avenue du Lac, Rouyn-Noranda (Québec) J9X 4N5

DISTRIBUTION

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CHRONIQUES

ISSN 1920-6488 L’Indice bohémien

Martinez à direction@indicebohemien.org.

Publié 10 fois l’an et distribué gratui­ tement par la Coopérative de

Merci à l’ensemble de nos collaboratrices et collaborateurs bénévoles pour

solidarité du journal culturel de l’Abitibi-­ Témiscamingue, fondée en

leur soutien et leur engagement.

novembre 2006, L’Indice bohémien est un journal socioculturel régional et

CULTURAT 8

indépendant qui a pour mission d’informer les gens sur la vie culturelle et

ENVIRONNEMENT 29

les enjeux sociaux et politiques de l’Abitibi-Témiscamingue.

HISTOIRE 12

Voici nos collaborateurs bénévoles pour ce numéro : MRC D’ABITIBI

L’ANACHRONIQUE 6

CONSEIL D’ADMINISTRATION

Jocelyne Bilodeau, Stéphanie Brousseau, Jocelyne Cossette, Paul Gagné,

MA RÉGION, J’EN MANGE

Marie-France Beaudry, présidente | Ville de Rouyn-Noranda

Gaston Lacroix, Jocelyne Lemay-Baulne et Sylvie Tremblay.

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MÉDIAS ET SOCIÉTÉ 27

SOMMAIRE

Anne-Laure Bourdaleix-Manin, vice-présidente | MRC de La Vallée-de-l’Or Marie-Déelle Séguin-Carrier, trésorière | Ville de Rouyn-Noranda

MRC D’ABITIBI-OUEST

Joanie Harnois, secrétaire | MRC de Témiscamingue

Colette Langlois, Raphaël Morand, Sophie Ouellet et Mario Tremblay.

Lyne Garneau | Ville de Rouyn-Noranda Pascal Lemercier | Ville de Rouyn-Noranda

À LA UNE

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ARTS VISUELS

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DIRECTION GÉNÉRALE ET VENTES PUBLICITAIRES

PREMIÈRES NATIONS

9

Valérie Martinez

VILLE DE ROUYN-NORANDA Gilles Beaulieu, Anne-Marie Lemieux, Valérie Martinez, Suzanne Ménard, Annette St-Onge et Denis Trudel.

LITTÉRATURE 10 et 11

direction@indicebohemien.org

MRC DE TÉMISCAMINGUE

THÉÂTRE 13 et 15

819 763-2677

Émilie B. Côté, Véronic Beaulé, Carole Marcoux et Lise Millette.

RÉDACTION ET COMMUNICATIONS

MRC DE LA VALLÉE-DE-L’OR

Jade Bourgeois, coordonnatrice

Nicole Garceau, Rachelle Gilbert, Caroline Leblanc, Renaud Martel,

redaction@indicebohemien.org

Brigitte Richard, Sophie Richard-Ferderber et Ginette Vézina.

FEMMES 18 à 26 MUSIQUE 28

819 277-8738 Mariane Ménard, éditorialiste invitée

CONCEPTION GRAPHIQUE

Lise Millette, collaboratrice à la une

Feu follet

RÉDACTION DES ARTICLES ET DES CHRONIQUES

CORRECTION

Camille Barbotteau, Lydia Blouin, Jade Bourgeois, Pascale Charlebois,

Geneviève Blais

Gabrielle Demers, Louis-Eric Gagnon, Isabelle Gilbert, Chantale Girard, Joanie Harnois, Régis Henlin, Gabrielle Izaguirré-Falardeau, Hélène Jager,

IMPRESSION

Philippe Marquis, Béatriz Mediavilla, Mariane Ménard, Lise Millette,

Imprimeries Transcontinental

Yves Moreau, Mélodie Rheault, Geneviève Rouleau Lafrance, Dominique Roy, Rodrigue Turgeon et Louis-Paul Willis.

TYPOGRAPHIE Carouge et Migration par André SImard

COORDINATION RÉGIONALE Valérie Castonguay | MRC d’Abitibi Louise Magny | MRC d’Abitibi Danaë Ouellet | MRC d’Abitibi Sophie Ouellet | MRC d’Abitibi-Ouest Alex Turpin-Kirouac | Ville de Rouyn-Noranda

EN COUVERTURE

Véronic Beaulé | MRC de Témiscamingue

Nathalie Faucher, passée maître dans l’art de l’origami, réalise

Stéphanie Poitras | MRC de la Vallée-de-l’Or

maintenant une courtepointe de papier. Photo : Nathalie Faucher Certifié PEFC Ce produit est issu de forêts gérées durablement et de sources contrôlées

PEFC/01-31-106

2 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN

www.pefc.org


– ÉDITORIAL –

NOMMER ET DÉNONCER POUR PROVOQUER LE CHANGEMENT MARIANE MÉNARD

Qu’y a-t-il encore à dire à propos des luttes féministes ? Installée devant l’écran près duquel je passe le plus clair de mon temps, c’est la question que je me pose. Car année après année, mois après mois, ce sont toujours les mêmes constats qui reviennent quand on pense à la situation des femmes dans notre société : des questions de parité ou d’équité, des statistiques sur la violence domestique, sur la précarité ou encore sur les réalités particulières que vivent les femmes racisées, autochtones et les personnes minorisées dans le genre. L’expression « plafond de verre », qu’on utilise souvent pour désigner la difficulté pour les femmes d’atteindre des emplois haut placés, me semble tout aussi bien caractériser certaines situations que vivent les femmes de tous horizons à notre époque. J’ai l’impression qu’on stagne. Pire, dans la dernière année, j’ai le sentiment que les choses se sont dégradées. Alors, qu’y a-t-il à dire ? Même si les initiatives portées par des femmes sont soulignées et célébrées dans pratiquement chaque numéro de L’Indice bohémien, la pertinence de mettre en lumière leurs projets et leurs singularités dans un cahier thématique se réaffirme continuellement. J’en étais convaincue bien avant qu’on me propose de rédiger cet éditorial. Mais l’exercice qui m’a poussée à formuler la question posée tout en haut de la page a réaffirmé ma conviction. Parce qu’il ne s’agit pas seulement de souligner la contribution des femmes à la société et de présenter les initiatives qu’elles portent, mais aussi (et surtout) de réfléchir à des dynamiques sociales solidement ancrées et qui, pour cette raison, passent souvent inaperçues. Voilà pourquoi j’aimerais profiter de cette tribune pour mettre en lumière ces phénomènes qui me semblent trop souvent banalisés. La fragilité des acquis résultant des luttes féministes passées est rarement apparue avec autant de prégnance qu’au cours de la dernière année. Justement, le Conseil du statut de la femme, dès mai 2020, a fait remarquer que la charge mentale des femmes s’est accrue avec la pandémie en raison du partage inégal des tâches domestiques. Des femmes qui s’occupaient déjà d’une proportion importante de ces responsabilités se sont retrouvées avec une tâche décuplée avec la fermeture des garderies et des écoles. Cette augmentation de la responsabilité familiale des femmes a des conséquences sur la vie professionnelle de celles-ci. Prenons l’exemple du milieu universitaire et notamment de la recherche scientifique, où l’on a remarqué que les femmes ont moins de temps à consacrer à leurs recherches depuis le début de la pandémie. De fait, une étude menée par la Chaire de recherche du Canada sur les transformations de la communication savante et l’Université d’Indiana rend compte d’une baisse de la contribution des femmes, particulièrement de celles qui sont en début de carrière, à la recherche scientifique – autant dans les sciences naturelles que dans les sciences sociales, précisons-le. Comme quoi même le milieu universitaire n’est pas exempté des préconstruits sociaux qui déterminent les rôles traditionnels des hommes et des femmes. Dans ce milieu caractérisé par une forte

pression de performance, des femmes qui publient moins parce qu’elles ont moins de temps à consacrer à leurs recherches risquent d’avoir du mal à compenser les mois pendant lesquels elles ont publié peu de travaux. Si ce dommage collatéral de la COVID-19 semble temporaire, voire anecdotique, ses conséquences, elles, se feront assurément sentir pendant de nombreuses années. Car le « retard » accumulé par celles qui auront moins produit et publié de recherches pendant quelques mois risque de défavoriser longtemps les principales concernées. Les grands médias nous rappellent par ailleurs ponctuellement que les conséquences de la situation sociosanitaire sont plus importantes pour les femmes. On parle alors de l’augmentation de la charge mentale et de ses conséquences financières et psychologiques, mais aussi de la hausse des violences conjugale, domestique et genrée. Même devant un virus qui ne fait théoriquement pas de distinction entre hommes et femmes, nous ne sommes pas tous égaux. Si je laisse de côté les phénomènes que met en relief la pandémie, différents événements récents laissent transparaître une intolérance assortie de privilèges qui me laisse un goût amer. Cette intolérance est dirigée vers certaines catégories de femmes qui refusent de céder aux attentes de la société : être « belle », mince, dire oui, vous voyez le portrait. Vous avez peut-être lu comme moi la lettre ouverte parue dans certains médias critiquant le traitement médiatique de l’artiste Safia Nolin depuis qu’elle a dénoncé le harcèlement que lui a fait subir l’animatrice Maripier Morin. Les pairs de l’autrice-compositrice-interprète y signalent une couverture médiatique qui a contribué à renforcer « le culte de la beauté et de la culture du viol, contribuant ainsi à l’expression décomplexée de la haine misogyne, lesbophobe, grossophobe, classiste et raciste ». Ce faisant, les signataires ont mis le doigt sur ce que la situation vécue par Safia Nolin a de plus troublant à mes yeux : que des gens qui n’ont probablement aucune idée de qui elle est et de ce qu’elle a vécu se sentent autorisés à insulter publiquement cette femme. Car depuis sa prise de parole l’été dernier, l’artiste reçoit des messages odieux dans sa messagerie privée en plus d’être la cible de commentaires haineux proférés parfois sans modération sur les plateformes numériques, notamment sous les articles de grands médias qui abordent le sujet. Les manifestations de la haine dirigée envers les femmes prennent une proportion exponentielle lorsqu’elles concernent des personnes qui vivent simultanément plusieurs formes d’oppression ou qui sont marginalisées par leur apparence ou leur condition socioéconomique. J’espère que les événements comme celui-ci nous font prendre conscience de cette dynamique pour mieux la combattre. Plus simplement, je nous souhaite collectivement plus de compassion, d’empathie et de respect. Quand on parle de la situation des femmes, les mêmes sujets reviennent toujours. À première vue, les choses ne semblent peut-être pas beaucoup changer. Malgré tout, je pense que recenser, nommer et dénoncer, c’est précisément ce qui provoque le changement.

L’INDICE BOHÉMIEN MARS 2021 3


YAN LAPOINTE 4 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN


– À LA UNE –

SENS DESSUS DESSOUS LISE MILLETTE

Réunir en une pièce unique autant de fragments fragiles de chacun et chacune, ainsi pourraiton résumer le projet de Nathalie Faucher, artiste du papier, passée maître de l’origami qui s’attaque cette fois à l’idée de réaliser une courtepointe de papier.

NATHALIE FAUCHER

Pour ce projet, qui a reçu l’aval du Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ), la Valdorienne propose de rassembler des bouts de papier, toutes sortes de papiers, qui auraient le pouvoir d’invoquer d’une manière ou d’une autre la pandémie et le confinement. « Je ne sais pas encore quelle forme exactement prendra le projet. Est-ce que ce sera tressé, plié ? Ce sera un grand format et j’ai déjà une entente avec le Carrefour du Nord-Ouest pour l’exposer ensuite. » Le flou repose aussi sur l’imprévu et de ce qu’elle aura en main. Un appel à tous sera lancé sous peu pour les citoyens de Val-d’Or, mais elle n’est pas fermée non plus à l’idée de recevoir des pièces d’un peu partout puisque pour une rare fois, dans cette période trouble qui a commencé en 2020, tous autant que nous soyons, avons été à un moment ou un autre au même endroit, conclut-elle. « Nous étions seuls avec nous-mêmes, mais en même temps proches de tout le monde parce que pour une fois, nous étions tous à la même place en même temps, dans une même réalité. C’est quelque chose qui est assez exceptionnel », mentionne-t-elle.

Le résultat laisse une impression un peu mystérieuse. Un objet de papier, mais avec une image d’une autre époque. Des œuvres de Nathalie Faucher se sont retrouvées aux Rendez-vous de la photographie de Val-d’Or avec VD’CLIC, où des archives de la Société d’histoire y étaient intégrées. On la retrouve également dans une murale apposée sur le mur du Prospecteur. UN HOMMAGE AUX FEMMES

Nathalie Faucher est prête à se laisser émouvoir et déstabiliser par ce qu’elle recevra. « Tous ces morceaux de papier seront comme autant de morceaux de soi. Pour certains, ce sera certainement un souvenir heureux, d’autres non. Ça pourrait être une page de mots croisés, un extrait d’un roman, un billet d’un spectacle qui a été annulé, un sac de farine. L’idée est de réunir tout ça, d’en faire une courtepointe de papier », explique l’artiste qui s’attend à recevoir des choses inusitées et, souhaite-t-elle aussi, des envois de toutes les générations.

Opter pour la courtepointe est aussi une manière pour Nathalie Faucher d’honorer le savoir traditionnel des artisanes et des femmes en général. Un savoir qui, sans se perdre, n’a pas toujours laissé de traces. « On retrouve peu d’images de femmes dans les archives, du moins dans le visuel. On entend aussi très peu parler de ces arts très féminins que sont la broderie, le tissage et la courtepointe. C’était pourtant la forme d’art exercée par plusieurs femmes », témoigne l’archiviste, déçue de voir qu’il subsiste peu de choses de ce savoir transmis de génération en génération.

DES PIÈCES DE MÉMOIRE Derrière ces bouts de papier partagés, Nathalie Faucher souhaite réaliser une œuvre qui viendra révéler une part du quotidien de chacun. Il s’agit aussi de réunir ce qui était isolé. Ramener ensemble le sentiment d’avoir vécu un peu à part. Ce concept rend d’autant plus intéressante cette idée d’une courtepointe réunissant autant de moments où il a fallu, par la force des choses, ralentir. Des traces qui ont été laissées derrière et qui témoignent de ce que ces moments ont été. Ces éléments qui viennent attester du temps et de l’expérience prennent tout leur sens quand on apprend que Nathalie Faucher est aussi archiviste de métier avec une formation en histoire. Le temps, figé, est une source d’information et un chapitre qui vient camper la réalité, ou ici, plusieurs réalités. « Depuis deux ans, je travaille beaucoup avec les archives. Je prends par exemple des photos, je les imprime, et je réalise une œuvre en origami avec ce papier. On y voit les photos dans les plis », précise Nathalie Faucher.

Pour Nathalie Faucher, il y a lieu de réhabiliter ces pratiques d’antan sur lesquelles, sans être muettes, les archives sont minces. « La Société d’histoire travaille à un livre sur l’histoire des femmes. Dans les journaux, il est très peu question des femmes avant les années 1950. Et avant ça, lorsqu’on en parle, c’est avec le nom de leur mari », ajoute-t-elle. Pour son projet, elle se promet d’aller quérir ce savoir auprès de membres du Cercle des fermières de Val-d’Or. « J’aurai des rencontres afin de me familiariser avec les motifs. Des membres du cercle me fourniront de la documentation et des heures de discussion à propos de l’historique, des modèles de base pour me familiariser avec les schémas aussi », explique-t-elle. Une fois que les rudiments de la courtepointe lui auront été enseignés, elle se replongera en solo avec ses bouts de papier pour créer son œuvre, qui devrait être livrée quelque part à l’automne 2021. L’INDICE BOHÉMIEN MARS 2021 5


– L’ANACHRONIQUE –

NOS ENFANTS D’ABORD ! PHILIPPE MARQUIS

Je connais des enseignantes (parce que ce sont surtout des femmes) de tous les niveaux : des centres de la petite enfance à l’université. Lorsqu’elles parlent de leur travail, mis à part l’attachement aux élèves, les nouvelles sont rarement bonnes. En résumé, nous avons trente ans de retard à rattraper. Allons-y de quelques faits…

L’actuel gouvernement du Québec a aboli les commissions scolaires pour les remplacer par ces centres de services, malgré une opposition généralisée. Il a aussi instauré les maternelles quatre ans, en empiétant sur le réseau des centres de la petite enfance. Mais, pour ce faire, on a besoin de nouvelles enseignantes. Or, celles-ci désertent le primaire et le secondaire. Les conditions de travail sont telles que nombre de jeunes enseignantes sont forcées d’abandonner. Dans nos écoles, les bibliothécaires, psychologues, orthopédagogues et autres spécialistes manquent cruellement. Les classes débordent d’élèves en difficulté, et la coupe est pleine. Tout ça avec un gouvernement dont le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, s’est fait élire en promettant de valoriser la profession enseignante. Un gouvernement dont le premier ministre a été ministre de l’Éducation de 1998 à 2002. Pourtant, aux dernières nouvelles, les offres faites au personnel enseignant du primaire et du secondaire étaient tout sauf valorisantes. Et les conventions collectives sont échues depuis presque un an. La réforme du système d’éducation a servi de levier pour faire sortir notre province et notre région de l’ignorance dans les années 1960 et 1970. Toutes les personnes qui servent

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6 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN

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UNSPLASH

Il manque tant de places en garderies que la Chambre de commerce de Rouyn-Noranda a accordé la priorité à ce dossier pour la prochaine année. Pour demeurer poli, disons que le développement du réseau se fait au ralenti. Par ailleurs, les revenus tirés des subventions pour la garde en milieu familial n’accordent pas un salaire décent aux travailleuses. C’est pourquoi il y a des fermetures en série.

présentement la société québécoise, des ingénieurs aux préposés aux bénéficiaires, ont été formées dans nos écoles. L’éducation est malmenée, négligée, mal entretenue depuis au moins trente ans. Il en va ainsi du personnel comme des bâtiments. À ce chapitre, il est fou de se demander si l’aération d’une polyvalente est efficace en temps de pandémie, de voir des parents faire des campagnes de financement pour réparer une cour d’école ou encore un cégep faire des pieds et des mains pour rénover sa piscine… La pandémie a mis tout ça en lumière. L’idéologie du moins d’État s’est attaquée à notre système d’éducation, tel un virus. On peut mettre fin à la destruction de ce formidable outil collectif en s’y mettant toutes et tous, comme on le fait avec la COVID. Il ne manque que la volonté politique que nous devrons forcer pour servir notre avenir, celui de nos enfants d’abord.

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– ARTS VISUELS –

L’UNIVERS FANTASTIQUE DE TANYA BÉLANGER GABRIELLE IZAGUIRRÉ-FALARDEAU

Dans le cadre du partenariat territorial de l’Abitibi-Témiscamingue, on apprenait le 26 janvier dernier que neuf artistes de la région bénéficieront du soutien financier du Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) pour la réalisation d’un projet artistique. C’est entre autres le cas de l’artiste en arts visuels Tanya Bélanger.

dispersées dans le parc Dagenais de Palmarolle cet été. Pour l’élaboration du projet, Tanya dit s’être basée sur ce qu’elle aimait vraiment. Elle a souhaité créer un univers fantastique, inspiré de légendes ou encore de l’univers d’Alice au pays des merveilles. Passionnée de fleurs et de mosaïculture, l’artiste souhaite également inclure des plantes vivantes à travers son œuvre. Tanya dit avoir été réellement surprise d’obtenir ce soutien et cette reconnaissance du CALQ, n’y croyant pas vraiment, alors que Jacques Baril l’avait grandement encouragée à entreprendre cette démarche. Elle se réjouit cependant de l’annonce qui lui permet de développer son premier projet solo : « Ça m’ouvre beaucoup de portes, c’est un peu le départ de ma carrière artistique. Je suis souvent associée à Jacques, qui est plus connu dans la région. Ça va me permettre de démarquer comme individu et comme artiste », soutient-elle.

TANYA BÉLANGER

Alors qu’elle travaillait comme costumière à Montréal, Tanya est revenue dans la région un peu par hasard, il y a un an, lorsqu’elle a perdu son emploi à cause de la COVID. Cela dit, elle se montre très heureuse de ce retour aux sources et souhaite demeurer ici pour développer sa carrière artistique en prenant un projet à la fois et en voyant où cela la mènera.

Originaire de La Sarre et résidant présentement à Palmarolle, Tanya Bélanger a commencé à pratiquer les arts visuels au secondaire, pour ensuite obtenir un diplôme d’études collégiales dans ce domaine, au Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue. Celle qui se dit principalement sculptrice a également suivi un cours professionnel en soudure afin de pouvoir mieux exploiter le travail du métal dans sa pratique artistique. Au fil des ans, Tanya a pu parfaire sa technique en travaillant comme assistante aux côtés de Jacques Baril, artiste bien établi dans la région. Celui qu’elle a rencontré dans le cadre d’un projet commun de sculpture sur neige agit pour elle à titre de véritable mentor, partageant avec générosité son atelier, son savoir et divers projets. Ensemble, Jacques et Tanya ont entre autres réalisé des décors pour le Festival de musique émergente (FME) et, au moment de l’entrevue, ils travaillaient ensemble sur des lanternes de neige construites sur le lac Kiwanis dans le cadre de la Fête d’hiver. LE JARDIN DES MAL-AIMÉS Avec la bourse qu’elle a obtenue de la part du CALQ, Tanya travaillera cet hiver et ce printemps sur Le jardin des mal-aimés, un ensemble d’une dizaine de sculptures qui seront L’INDICE BOHÉMIEN MARS 2021 7


– CULTURAT –

L’HISTOIRE DE VAL-D’OR AU FÉMININ PASCALE CHARLEBOIS

Lorsque l’on parle de l’histoire de l’Abitibi-Témiscamingue, c’est souvent à la version masculine que l’on fait référence : le trajet difficile dans la forêt dense, jusqu’à l’arrivée sur le lot réservé. La déception de trouver une terre de roches et d’arbres collés les uns sur les autres. La descente sous terre dans les mines et le travail harassant. L’oubli dans l’alcool et les jeux… et tout le reste qu’on connaît déjà. Du côté féminin, on connaît surtout l’histoire des femmes qui arrivaient une fois le campement construit, avec les enfants, la plupart du temps, et qui aidaient leur mari à poursuivre l’établissement et le travail de la terre. Par contre, on parle peu de l’arrivée des femmes dans les villages miniers. Il y a bien le livre d’Alexandre Faucher, De l’or et des putes (Éditions du Quartz), qui raconte l’histoire des filles de joie qui débarquaient du train la veille du jour de paie et qui poursuivaient leur route dans d’autres établissements miniers après quelques jours. Mais qu’en est-il des femmes qui sont restées ? Qu’en était-il de nos pionnières ? Dans un mémoire de maîtrise réalisé en 1998, Louise Bryce, qui habite aujourd’hui Val-d’Or, s’est penchée sur l’histoire des femmes dans ce qui n’était à l’époque qu’une agglomération minière. Selon elle, ce serait les femmes qui auraient fait en sorte que les camps miniers passent graduellement de temporaires à permanents. « C’est là où l’apport des femmes est devenu essentiel à l’établissement, explique-t-elle, parce que qui dit femme dans une communauté minière, dit nécessairement école, soins hospitaliers, église, etc. Ça a consolidé les services à la communauté et fait en sorte que c’est devenu plus qu’un camp minier fait de baraquements voués à être démolis ensuite. Ça a permis aussi la création de petits clubs comme les Filles d’Isabelle, l’arrivée et le déploiement des religieuses, et toute l’animation paroissiale requise. Un meilleur équilibre s’est graduellement implanté. » Toutefois, dans les années 1930, ce n’est pas seulement la présence des femmes qui a stimulé l’établissement permanent des camps miniers de la faille de Cadillac, mais également leur participation active à la création d’activités économiques. En effet, la désorganisation sociale entraînait une certaine forme de liberté à l’extérieur du foyer, qui était difficile dans des villages où le clergé, l’administration publique et les services policiers étaient les porte-paroles

Vous avez un projet Culturat? Contactez-nous à info@culturat.org

8 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN

Thérèse Lapointe, fille du premier maire de Val-d’Or et institutrice. Photo prise sur la 3e Avenue, hiver 1937-1938. Société d’histoire et de généalogie de Val-d’Or, fonds Thérèse Saint-Onge-Ross.

des normes de la société. De plus, l’époque de la Grande Crise poussait les femmes et les ainées de la famille à faire preuve d’inventivité et de détermination pour participer au revenu familial. « Elles n’étaient pas fortunées et devaient faire preuve d’énormément de débrouillardise, raconte Mme Bryce. Certaines tenaient des maisons de chambre de nuit et de jour, c’était une façon d’arrondir leurs fins de mois. Il y avait des dépanneurs, des petits magasins de coupons, des salons de coiffure, certaines femmes effectuaient aussi la lessive des travailleurs célibataires. Le quotidien, dans les conditions de frontière de l’époque, était ardu et exigeant pour arriver à réaliser l’ensemble de leur besogne de ménagère. » Les personnes qui aimeraient en apprendre davantage peuvent consulter la version PDF du mémoire de Louise Bryce, Les femmes et la quotidienneté à la frontière minière en Abitibi : Val-d’Or 1933-1950, qui est disponible sur le site Recherche uO, le dépôt numérique de l’Université d’Ottawa.


– PREMIÈRES NATIONS –

RICHARD KISTABISH : À LA DÉFENSE DE L’ANICINABEMOWIN HÉLÈNE JAGER

Voilà une occasion pour Richard Kistabish de défendre l’anicinabemowin, la langue ancestrale qui a bercé son enfance et dont il se fait le diplomate. Il souhaite ainsi défendre et revitaliser cette clef qu’est la langue pour un peuple. Cet outil de connexion et de communication doit reprendre sa place pour restaurer l’harmonie collective, explique-til, même si le sujet de l’accessibilité aux ressources et du territoire reste entier. Pour lui, s’engager dans cette mission a été un parcours : en plus d’assumer des responsabilités auprès de sa communauté d’Abitibiwinni et de son engagement politique en tant que grand chef du Conseil tribal de la nation algonquine Anishinabeg, il a travaillé pendant 19 ans à la Fondation autochtone de l’espoir afin de recueillir des témoignages de survivants des pensionnats dont il fait partie. Il a milité auprès de différentes provinces, parfois ouvertes, parfois réticentes, pour que, grâce à l’instruction et la pédagogie, l’héritage anicinabe demeure vivant en étant enseigné dans les écoles.

Il a finalement choisi de porter la voie de la langue et de la culture en cofondant Minwashin, qui signifie beau en anicinabemowin. Avec cet organisme qui a pour mandat de promouvoir la culture et la langue, M. Kistabish veut faire « petit et beau ». Il n’est pas toujours nécessaire d’utiliser de gros moyens pour promouvoir la langue. Depuis le calendrier en anicinabemowin jusqu’aux étiquettes à placer sur les objets du quotidien en passant par le réseau des radios communautaires, beaucoup de gestes portent déjà leurs fruits. Minwashin fait aussi grand et beau comme avec l’événement Miaja, un rassemblement autour de la culture anicinabe dont la première a été un vrai succès en septembre 2019. Toutes les communautés anicinabek du Québec se sont rassemblées avec des experts autour de la revitalisation, de la valorisation et de la transmission du patrimoine, des arts et de la culture anicinabe. Aujourd’hui, c’est une magnifique occasion qui fait rejaillir la fierté et la reconnaissance bien au-delà du local : en portant haut et fort à une échelle internationale ses couleurs et celles de tous ceux envers qui il s’engage, M. Kistabish s’autorise même à imaginer cette revitalisation dont il rêve pour sa langue natale. Selon ses mots, la langue n’est pas un projet ou une destination c’est une marche, une perpétuelle démarche quotidienne et aussi un processus. Et une partie d’un tout qui appelle à être réparé.

SERGE GOSSELIN

Richard Kistabish, ce grand homme modeste, vient d’être nommé comme l’un des trois experts du continent nordaméricain d’un groupe formé par l’UNESCO. Proclamée Décennie des langues autochtones en 2019 par l’ONU, 2022-2032 sera employée à «  appeler l’attention sur la catastrophe que représente la disparition des langues autochtones ».

Richard Kistabish ne manque pas de courage et sait que trouver les ressources humaines et financières est toujours un défi, mais qu’une fois le cercle formé, la possibilité de répartir tâches, responsabilités et devoirs devient réelle. Il appelle aujourd’hui tous ceux qui se sentent concernés à se rassembler autour de cette mission de sauver l’anicinabemowin et à l’accompagner dans l’effort.

(Re)bienvenue au Centre d’exposition d’Amos… Jusqu’au 21 mars…

LA COULEUR ÉCRITE Renée Carrier PEINTURE

Comment peut-on transposer en nuances « Un coucher de soleil plus rose, plus durable et plus humain » ou encore « Un lointain transparent »? HORAIRE - ENTRÉE LIBRE Mardi – Mercredi : 13 h à 17 h 30 Jeudi – Vendredi : 13 h à 17 h 30 - 18 h 30 à 20 h 30 Samedi : 10 h à 12 h - 13 h à 17 h Dimanche : 13 h à 17 h Prendre note que l’exposition jeunesse COLORER, COLORIER, COULEURER du Centre d’exposition Raymond Lasnier – Culture Trois-Rivières sera reportée à 2022

L’INDICE BOHÉMIEN MARS 2021 9


– L I T T É R A T U R E –

LE KAMISHIBAÏ : POUR DES HISTOIRES PRESQUE MAGIQUES

COURTOISIE RBATNQ

LYDIA BLOUIN

Enseignants, parents, enfants et amateurs d’histoires en tous genres croient peut-être tout connaître des aventures qui peuvent les attendre au tournant d’une page. Mais qu’ils se détrompent : place au kamishibaï! « Kami-chi-quoi? » demanderez-vous. Kamishibaï! C’est un terme japonais signifiant « théâtre de papier ». Il s’agit d’une grande histoire illustrée d’un côté et comportant le texte de l’autre. On glisse les différentes planches (l’équivalant des pages d’un livre) dans un grand cadre en bois, le butaï. Ce type de lecture ludique et interactive permet une immersion totale du lecteur dans le conte ou la légende en plus de lui laisser plus de liberté : ayant les mains libres, il est plus facile pour lui de faire des signes, d’utiliser une marionnette, de se lever, de se promener, de jouer d’un instrument de musique pendant la lecture… Des tout-petits aux aînés, tous peuvent trouver leur compte avec cette formule venue de l’autre bout du monde. Avec les plus jeunes, on

ÉCRIS DANS L’IB!

peut même se permettre un peu de magie et demander leur aide pour ouvrir le butaï avec la formule : « 1, 2, 3, kamishibaï, ouvre-toi! ». Les kamishibaïs sont de plus en plus présents dans les bibliothèques de notre région, alors que le Réseau Biblio de l’Abitibi-Témiscamingue et du Nord-du-Québec offre une vaste sélection de kamishibaïs et de butaïs à louer ou à vendre. Les personnes intéressées peuvent se procurer des kamishibaïs et un butaï auprès de certaines bibliothèques scolaires ou municipales : on peut s’informer auprès de Rosianne Avoine par courriel ou par téléphone. Pour ceux qui aiment voir grand, la Bibliothèque municipale de Rouyn-Noranda organise occasionnellement des heures du conte avec un kamishibaï géant, annoncées sur sa page Facebook. Pour ceux qui aimeraient savoir comment animer une histoire avec cet outil, Salat-Animation offre une formation en ligne que l’on peut suivre en quelques heures seulement au moment qui nous convient. Que le spectacle commence!

Tu te passionnes pour la culture de manière amateur ou professionnelle?

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10 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN


– LITTÉRATURE –

UN DEUXIÈME ROMAN POUR

16 ― 20 MARS 2021 Théâtre

ANDRÉE-ANNE BRUNET : EMBRASSER LE CHAOS DOMINIQUE ROY

Le chaos, c’est celui qui se bouscule dans la tête, le cœur et l’âme de Malorie à la suite du décès de son frère Arnaud. À 29 ans, il avait encore peu vécu. Un bête accident est venu mettre fin à son existence et faire basculer celle de sa sœur. En se rendant à l’appartement d’Arnaud, pour récupérer des effets personnels appartenant à ce dernier, Malorie met la main sur un carnet de voyage dans lequel il relatait son plus récent périple en Islande. Sur un coup de tête, elle décide de suivre les traces de son frère pour revivre la même aventure que lui. C’est à travers le roadtrip de cette jeune femme solitaire et peu habile socialement que l’on apprend à connaître Arnaud et le vide que son départ laisse derrière lui. Cette semaine au pays des glaces permet à Malorie de sortir de sa zone de confort et d’entamer son deuil. Tout au long de ce voyage, l’auteure fait découvrir la puissance, les beautés et les défis de l’Islande. Le trajet du personnage principal est un véritable pèlerinage rendant hommage à un lieu hors du commun et à un être cher parti trop rapidement. Les thèmes du deuil et du voyage s’amalgament si bien qu’on ne sait plus lequel d’entre eux est le prétexte de l’autre pour tisser cette intrigue axée principalement sur l’évolution psychologique. L’écriture de ce dialogue intérieur est d’une grande fluidité et d’un tel réalisme qu’elle donne l’impression que le mort est plus vivant que jamais. Cette lecture transforme notre façon d’affronter les épreuves. On comprend qu’il n’est pas nécessairement profitable de contourner la tempête; il faut parfois foncer la tête première vers celle-ci pour en ressortir grandi.

bermudes (DÉRIVE) Une coproduction du Théâtre du Tandem et de Système Kangourou 26 MARS ― 16 MAI 2021 Deux expositions du Musée d’art de Joliette

LES OUVRAGES ET LES HEURES Monique Régimbald-Zeiber

L’INSPIRATION L’Abitibienne Andrée-Anne Brunet avoue que l’idée de ce roman lui est venue de façon plutôt macabre. « Il y a quelques années, mon chum est allé seul en Irlande. Il a fait un voyage incroyable dont il m’a longuement parlé à son retour en me disant, “J’ai hâte de t’amener en Irlande pour que tu voies et que tu vives ce que j’ai vécu”. Va savoir pourquoi, je me suis dit que si mon homme mourait demain, j’irais en Irlande seule pour tenter “d’être avec lui” une dernière fois, sachant que ce voyage a été aussi précieux pour lui. À partir de cette idée plutôt macabre, j’ai pensé transposer ça dans une histoire entre frère et sœur. » Le personnage de Malorie s’est défini au fur et à mesure qu’elle écrivait l’histoire, puisqu’il est rare pour l’auteure d’entreprendre son processus d’écriture avec un personnage déjà très clair dans sa tête. « On dirait que mes personnages se dévoilent à moi au fil des pages. » Toutefois, dès le départ, elle souhaitait que ce voyage donne de l’espace à Malorie pour qu’elle puisse vivre, se découvrir comme femme, comme humain. « Les voyages ont cet effet transformateur sur moi et je voulais transmettre ça à Malorie. Être ailleurs, c’est comme si ça nous donnait la permission d’être 100 % soi-même, sans filtre, sans jugement. »

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instagram.com/indice_bohemien L’INDICE BOHÉMIEN MARS 2021 11


– HISTOIRE –

DES DAMES SAINTE-ANNE VERS LE MOUVEMENT DES FEMMES CHRÉTIENNES GENEVIÈVE ROULEAU LAFRANCE, SOCIÉTÉ D’HISTOIRE ET DE GÉNÉALOGIE DE VAL-D’OR

MICROBRASSERIE NOUVELLE BOUTIQUE 217 Route 101, Nédélec

Congrès diocésain du Mouvement des femmes chrétiennes à Val-d’Or, le 15 septembre 1970 Fonds Armand Beaudoin, La Société d’histoire et de généalogie de Val-d’Or

De tout temps, les femmes se sont investies dans l’action communautaire. De nombreux mouvements voient le jour dans la région de l’Abitibi-Témiscamingue, comme partout ailleurs au Québec. Il va de soi que la plupart de ces groupes ont une nature religieuse. Les Dames de Sainte-Anne, dont les origines sont canadiennes-françaises, est l’un de ces groupes. Il est composé de mères de familles catholiques qui se regroupent par paroisse dans le but d’amasser des fonds pour soutenir la paroisse ou d’autres œuvres caritatives pour le bien de leur communauté. À Val-d’Or, dans les années 1950, il y avait un groupe rattaché à la paroisse Saint-Sauveur et un à la paroisse Notre-Damede-Fatima. Il y avait aussi un groupe à Sullivan, associé à la paroisse Saint-Bernard. Ceux-ci organisaient principalement des parties de cartes pour amasser des fonds servant à la prospérité de leur paroisse, mais aussi à l’Œuvre des terrains de jeux (OTJ) pour les enfants et à l’Œuvre des Vocations (aide spirituelle et financière à des séminaristes). D’autres types d’activités de financement étaient organisés comme des Tag-Day ou la vente de vêtements usagés. En plus d’assister à des assemblées et des activités de financement, les femmes membres pouvaient participer à des pèlerinages à Sainte-Anne, la mère de la Vierge-Marie. En Abitibi, le lieu de pèlerinage qui lui est consacré était l’église de Sainte-Anne de Roquemaure. Naturellement, on se rendait aussi à Sainte-Anne-de-Beaupré, principal lieu de dévotion de Sainte-Anne au Québec. Progressivement, les Dames de Sainte-Anne laisseront leur place à un nouveau mouvement, le Mouvement des femmes chrétiennes. Il a été créé en 1962 pour moderniser le précédent groupe. C’est à la demande des évêques canadiens que ce groupe est formé pour que ses membres « soient l’élite qui transforme le milieu par la prière, le témoignage de vie et l’action directe », selon les dires de Mgr Lionel Audet. On adopte une méthode de travail rationnel basé sur le « voir – juger – agir » pour diriger les actions du groupe. Officiellement, c’est en 1966 que leur nom est adopté.

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12 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN

Le Mouvement des femmes chrétiennes (MFC) s’appuie sur la devise « Servir la famille, le milieu social et la communauté de foi » dont les actions du groupe démontrent bien l’application. Les membres de ce mouvement travaillent principalement à contribuer aux besoins de leur communauté. Ainsi, dans la région valdorienne, diverses activités sont organisées pour favoriser le bien-être des plus démunis (souvent au profit du Service d’entraide familiale). Il semble que la principale activité de financement ait été la vente de pâtisseries « maison » dans les années 1960, 1970 et 1980. Le MFC est soutenu par des femmes désireuses de redonner à leur communauté. Ce travail souvent accompli dans l’ombre est nécessaire pour maintenir une bonne cohésion sociale. Les groupes de femmes contribuent au bien-être de tous et leurs actions sont importantes et essentielles.


– THÉÂTRE –

LA PIÈCE BERMUDES (DÉRIVES) : UN ESPACE DE RENCONTRE NÉCESSAIRE GABRIELLE DEMERS

Claire Legendre est l’artiste à l’origine du projet, car ce spectacle est l’œuvre qui termine son triptyque (il y a eu le film, disponible sur Vimeo, et le livre Bermudes, publié chez Leméac Éditeur). Fascinée par les naufrages, cette artiste multidisciplinaire offre un univers envoûtant, enveloppant, hypnotique. Dans un décor polymorphe, Dérives vous entrainera tour à tour dans l’espace intime et personnel de Bob, chasseur de trésors de l’île d’Anticosti, et de Mika, jeune homme de Montréal à l’avenir insaisissable. Leurs univers vont s’entrechoquer, s’imbriquer au gré des mouvements annoncés par un chœur inattendu. En effet, de jeunes adultes de la région seront sélectionnés pour participer au spectacle (et le procédé se répète dans chaque ville où le spectacle sera présenté). C’est une façon unique et novatrice d’ouvrir le théâtre au citoyen, quel qu’il soit. En créant ainsi un environnement immersif et malléable, le groupe d’artistes tente une rencontre improbable dans et par cet art vivant.

sur et par la scène. L’évolution narrative de la pièce apporte des récits du réel, fruits des échanges avec des artistes « non professionnels ». Cette proximité citoyenne est primordiale pour Anne-Marie Guilmaine, de Système Kangourou. L’immersion culturelle, qui permet de faire jaillir le côté militant, brut et authentique des « apprentis acteurs », est un terreau des plus fertiles. C’est dans ce travail qui allie recherche d’émancipation et de résilience que les personnages de Bob et de Mika vont cheminer, voire échouer tranquillement sur la berge du Musée en nous prenant comme témoins silencieux de leurs avancées personnelles et croisées. La situation mondiale que l’on connaît aura mis en péril la première du spectacle à Montréal. Rouyn-Noranda est ainsi doublement chanceuse, car elle est la ville où la première

« en chair et en os » aura lieu. Si le choix s’est arrêté sur notre cité, c’est que les créatrices connaissaient déjà la région par le Théâtre du Tandem et leurs relations avec Hélène Bacquet, l’ancienne directrice du théâtre. Aujourd’hui remplacée par Julie Renault, Hélène Bacquet aura tout de même pris le temps de choisir ce spectacle avant de passer le flambeau. Point d’amorce pour Julie Renault, cette pièce permettra de plus d’unir les deux femmes par leur talent et leur sensibilité théâtrale. Les jeunes sélectionnés à Rouyn-Noranda sont invités à participer à un atelier de création et à un échange dialogale autour de l’œuvre, avec les créatrices. Cette expérience unique est une magnifique occasion.

THÉÂTRE TANDEM ET SYSTÈME KANGOUROU

C’est du 16 au 20 mars prochain que sera présentée, au MA Musée d’art de Rouyn-Noranda, une coproduction extraordinaire : Bermudes (dérives). Le groupe le Système Kangourou s’unit au Théâtre du Tandem et au MA pour offrir un spectacle unique qui sera viscéral pour vous tous et vous toutes. Vous ne le savez pas encore, simplement!

Comment trouver sa voie au travers des traces laissées par d’autres? Comment effectuer une recherche de l’inachèvement? Comment orchestrer sa propre dérive? Autant de questions philosophiques et poétiques seront abordées durant le spectacle. Il vous appartiendra de les recevoir et de partager l’intimité des acteurs, qui retourneront d’ailleurs derrière le quatrième mur pour l’occasion. C’est une expérience contemplative, soutenue par une ambiance sonore et des projections, qui veut offrir un art relationnel

Le leadership des femmes est plus présent que jamais et il en faut encore plus.

SOYONS FIÈRES DE NOS IMPLICATIONS

DANS TOUTES LES SPHÈRES DE LA SOCIÉTÉ. SUZANNE BLAIS DÉPUTÉE D’ABITIBI-OUEST

Bureau Amos :

259, 1re Avenue Ouest, Amos QC J9T 1V1

819 444-5007

Bureau La Sarre :

29, 8e Avenue Est, La Sarre QC J9Z 1N5

819 339-7707

L’INDICE BOHÉMIEN MARS 2021 13


– EN BREF –

– E N B R E F –

PRIX LITTÉRAIRE

PASSAGE, DE SARAH BARIL-GAUDET

JEUNESSE TÉLÉ-QUÉBEC :

ACCESSIBLE PARTOUT AU CANADA

HOMMAGE À ANNE-

LA RÉDACTION

MICHÈLE LÉVESQUE

Pour sa 21e édition, le Prix littéraire jeunesse Télé-Québec a choisi de rendre hommage à sa fondatrice, l’autrice valdorienne Anne-Michèle Lévesque. Disparue dans la dernière année, l’amoureuse des mots et de la littérature jeunesse a marqué le paysage culturel de la région. Elle a toujours cru en l’importance d’encourager la relève et de stimuler le goût de l’écriture. C’est sa fille, Annie Bourret, qui a l’honneur de présider le jury du concours. Née à Val-d’Or, mais résidant en Colombie-Britannique, Annie Bourret est autrice et rassembleuse comme sa mère : elle est notamment la première à avoir publié des romans jeunesse en français dans sa province d’adoption! Cette année, le Prix invite les jeunes auteurs de 13 à 17 ans de l’Abitibi-Témiscamingue et du Nord-du-Québec à soumettre de courtes nouvelles sous le thème « La forêt abitibienne et témiscamienne ». Retour aux sources pour le concours, qui a ramené le thème de la toute première édition en hommage à sa fondatrice. Le comité de sélection remettra à la personne gagnante la bourse Anne-Michèle Lévesque, d’une valeur de 400 $. La date limite pour remettre les œuvres est le 12 mars.

LOUIS JALBERT

LA RÉDACTION

Réalisé par la Témiscamienne d’origine Sarah Baril-Gaudet, le long métrage Passage sera disponible à partir du 19 mars, partout au Canada, sur les plateformes en ligne des Cinémas Beaubien, du Parc et du Musée, ainsi que du Cinéma Moderne. Passage raconte l’histoire de Yoan et de Gabrielle, deux jeunes Témiscamiens âgés de 18 ans s’interrogeant sur leur avenir et leur rapport au territoire. « Même s’ils ont tous les deux grandi au Témiscamingue, leurs aspirations sont opposées. Alors que Yoan souhaite quitter la région afin de briser sa solitude et d’explorer son homosexualité, Gabrielle est déchirée à l’idée de poursuivre ses études à plus d’une centaine de kilomètres de chez elle », peut-on lire dans le synopsis.

Présenté en première mondiale au Festival international du cinéma en Abitibi-Témiscamingue, le film pourrait être présenté en salle dès le mois de mars ou à une date ultérieure, selon l’évolution de la situation sanitaire au Québec. Le film a également été projeté dans le cadre des Rencontres internationales du documentaire de Montréal, ainsi qu’au Festival Cinema on the Bayou, en Louisiane. Passage est le premier long métrage de Sarah Baril-Gaudet, diplômée de l’Université du Québec à Montréal en cinéma, dont le court métrage documentaire Là où je vis s’était démarqué dans plus d’une vingtaine de festivals nationaux et internationaux.

PAS BESOIN D’ALLER BIEN LOIN POUR CONSOMMER LA CULTURE!

2

musées

12

bibliothèques Exposition Le Noir de l’encre au MA Musée d’Art Crédit : Donald Trépanier

14 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN

5

salles de spectacles

1

5

galeries ou centres d’artistes

disquaire

4

librairies

3

circuits historiques

1

journal culturel

1

circuit d’art public


– THÉÂTRE –

SOLÈNE BERNIER : CRÉER MALGRÉ TOUT JOANIE HARNOIS

Moins appelée sur les scènes de la région, « en vieillissant, on devient moins intéressante », ose-telle dire, elle se consacre depuis 2010 au théâtre pour enfants. « J’aime leur émerveillement, leur spontanéité, ça a toujours cliqué entre nous! ». Elle a présenté son spectacle de marionnettes Titotu près de 300 fois à travers le Québec. En 2018, elle reçoit une bourse, première en carrière, pour faire de l’exploration avec des enfants de Témiscaming. De leurs interactions naît Luminuciole et les bas perdus, mini-théâtre interactif pour les 3 à 6 ans, fable sur la force de la créativité. Les décors, en matériaux recyclés, ont été créés avec l’artiste Sophie Lessard. Après deux représentations fin 2019, une autre était prévue au festival Petits bonheurs en 2020, suivie d’une tournée. La COVID-19 a changé les choses. Autre coup de cœur de l’artiste : les personnes âgées vivant avec des troubles neurocognitifs auprès de qui elle travaille depuis deux ans. « C’est leur créativité qui les sauve ». Elle voudrait faire de l’exploration avec les personnes atteintes et leurs proches, créer un personnage avec Sophie Lessard « qui leur ressemble, leur plaît, leur fait du bien ». Elle nommerait ce projet Fragments d’étoiles. Mais financer du théâtre social en région n’est pas simple. Pour le programme territorial du CALQ, l’artiste doit s’associer avec un organisme local qui correspond à son processus créatif. Pas une mince affaire au Témiscamingue. Les partenaires recensés par Solène n’ont pas été jugés suffisamment en lien avec son processus. Retour à la case départ. « J’ai toujours créé

COURTOISIE

Comédienne, metteure en scène, formatrice, femme engagée, la Témiscamienne Solène Bernier se nourrit de la créativité qu’elle fait jaillir des êtres qu’elle rencontre pour créer à son tour. Elle décrit sa démarche comme du théâtre social « par et pour » qui émerge d’ateliers de créativité qu’elle anime et d’exploration à partir de matériaux recyclés. « Mon inspiration c’est l’observation du processus créatif ».

par plaisir et pour donner la parole aux personnes qui ne l’ont pas souvent. Mais à 47 ans, je ne paye plus tout de ma poche. » « J’ai le sentiment de revenir à la base, quand je faisais des mises en scène avec les moyens du bord […] ça devient problématique ». Pour adapter Luminuciole à la pandémie, alors que la demande est là, il ne lui manquerait que quelques centaines de dollars. De son propre aveu, Fragments d’étoiles n’était pas assez « théâtral » pour cadrer avec le programme. « Il faudrait que je travaille davantage avec le numérique qui est en vogue », croit-elle, « le théâtre social n’est plus très à la mode, mais c’est ce qui me parle ». Solène Bernier a tout de même des alliés dans son milieu, notamment le Centre de femmes du Témiscamingue, le Musée de la Gare et l’atelier Cent Pressions. En répétition, elle espère présenter Titotu, « qui coûte moins cher et se déplace bien », dans le cadre du festival Petits bonheurs en mai, et continuera de créer malgré tout.

L’INDICE BOHÉMIEN MARS 2021 15


On a tous de bonnes questions sur la vaccination Au Québec, la vaccination contre la COVID-19 s’est amorcée en décembre 2020. Cette opération massive vise à prévenir les complications graves et les décès liés à la COVID-19 ainsi qu’à freiner la circulation du virus de façon durable. Par la vaccination, on cherche à protéger la population vulnérable et notre système de santé, ainsi qu’à permettre un retour à une vie plus normale.

LA VACCINATION EN GÉNÉRAL Pourquoi doit-on se faire vacciner? Les raisons de se faire vacciner sont nombreuses. On le fait entre autres pour se protéger des complications et des risques liés à plusieurs maladies infectieuses, mais aussi pour empêcher la réapparition de ces maladies.

À quel point la vaccination est-elle efficace? La vaccination est l’un des plus grands succès de la médecine. Elle est l’une des interventions les plus efficaces dans le domaine de la santé. Cela dit, comme tout autre médicament, aucun vaccin n’est efficace à 100 %. L’efficacité d’un vaccin dépend de plusieurs facteurs, dont :

l’âge de la personne vaccinée ; sa condition ou son état de santé (ex. : système immunitaire affaibli).

L’EFFET DES VACCINS EN UN COUP D’ŒIL L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que la vaccination permet d’éviter plus de deux millions de décès dans le monde chaque année. Depuis l’introduction des programmes de vaccination au Canada en 1920,

la poliomyélite a disparu du pays et plusieurs maladies (comme la diphtérie,

le tétanos ou la rubéole) sont presque éliminées. La variole a été éradiquée à l’échelle planétaire.

La principale bactérie responsable de la méningite bactérienne chez les enfants (Hæmophilus influenzæ de type b) est maintenant beaucoup plus rare. L’hépatite B a pratiquement disparu chez les plus jeunes, car ils ont été vaccinés en bas âge.

16 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN


LA VACCINATION CONTRE LA COVID-19 Le vaccin est-il sécuritaire? Oui. Les vaccins contre la COVID-19 ont fait l’objet d’études de qualité portant sur un grand nombre de personnes et ont franchi toutes les étapes nécessaires avant d’être approuvés.

Toutes les étapes menant à l’homologation d’un vaccin ont été respectées. Certaines ont été réalisées de façon simultanée, ce qui explique la rapidité du processus. Santé Canada procède toujours à un examen approfondi des vaccins avant de les autoriser, en accordant une attention particulière à l’évaluation de leur sécurité et de leur efficacité.

Quelles sont les personnes ciblées pour la vaccination contre la COVID-19? On vise à vacciner contre la COVID-19 l’ensemble de la population. Cependant, le vaccin est disponible en quantité limitée pour le moment. C’est pourquoi certains groupes plus à risque de développer des complications de la maladie sont vaccinés en priorité.

Peut-on cesser d’appliquer les mesures sanitaires recommandées lorsqu’on a reçu le vaccin? Non. Plusieurs mois seront nécessaires pour protéger une part suffisamment importante de la population. Le début de la vaccination ne signifie pas la fin des mesures sanitaires. La distanciation physique de deux mètres, le port du masque ou du couvre-visage et le lavage fréquent des mains sont des habitudes à conserver jusqu’à nouvel ordre.

Comment les groupes prioritaires ont-ils été déterminés?

Est-ce que je peux développer la maladie même si j’ai reçu le vaccin?

La vaccination est recommandée en priorité aux personnes qui courent un risque plus élevé de complications liées à la COVID-19, notamment les personnes vulnérables et en perte d’autonomie résidant dans les CHSLD, les travailleurs de la santé œuvrant auprès de cette clientèle, les personnes vivant en résidence privée pour aînés et les personnes âgées de 70 ans et plus. À mesure que les vaccins seront disponibles au Canada, la vaccination sera élargie à de plus en plus de personnes.

Les vaccins ne peuvent pas causer la COVID-19, car ils ne contiennent pas le virus SRAS-CoV-2 responsable de la maladie. Par contre, une personne qui a été en contact avec le virus durant les jours précédant sa vaccination ou dans les 14 jours suivant sa vaccination pourrait quand même faire la COVID-19.

Ordre de priorité des groupes à vacciner 1

Les personnes vulnérables et en grande perte d’autonomie qui résident dans les centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) ou dans les ressources intermédiaires et de type familial (RI-RTF).

2

Les travailleurs du réseau de la santé et des services sociaux en contact avec des usagers.

3

Les personnes autonomes ou en perte d’autonomie qui vivent en résidence privée pour aînés (RPA) ou dans certains milieux fermés hébergeant des personnes âgées.

4

Les communautés isolées et éloignées.

5

Les personnes âgées de 80 ans ou plus.

6

Les personnes âgées de 70 à 79 ans.

7

Les personnes âgées de 60 à 69 ans.

8

Les personnes adultes de moins de 60 ans qui ont une maladie chronique ou un problème de santé augmentant le risque de complications de la COVID-19.

9

Les adultes de moins de 60 ans sans maladie chronique ni problème de santé augmentant le risque de complications, mais qui assurent des services essentiels et qui sont en contact avec des usagers.

10

Le reste de la population de 16 ans et plus.

La vaccination contre la COVID-19 est-elle obligatoire? Non. Aucun vaccin n’est obligatoire au Québec. Il est toutefois fortement recommandé de vous faire vacciner contre la COVID-19.

Est-ce que le vaccin est gratuit? Le vaccin contre la COVID-19 est gratuit. Il est distribué uniquement par le Programme québécois d’immunisation. Il n’est pas possible de se procurer des doses sur le marché privé.

Si j’ai déjà eu la COVID-19, dois-je me faire vacciner? Oui. Le vaccin est indiqué pour les personnes ayant eu un diagnostic de COVID-19 afin d’assurer une protection à long terme. Toutefois, compte tenu du nombre limité de doses de vaccin, les personnes ayant eu la COVID-19 pourraient attendre 90 jours après la maladie pour être vaccinées.

Québec.ca/vaccinCOVID 1 877 644-4545

L’INDICE BOHÉMIEN MARS 2021 17


SPÉCIAL FEMMES

– FEMMES –

UN PROJET PRÉCIEUX POUR LES FEMMES DE L’ABITIBI-OUEST : L’ÉMERAUDE ISABELLE GILBERT

L’Émeraude c’est quoi? C’est un projet piloté par L’Érige qui consiste en un centre d’hébergement pour femmes victimes de violence conjugale, ainsi que leurs enfants, en Abitibi-Ouest. L’Érige de La Sarre est un centre de femmes dont la mission féministe se décline en trois volets : les services, l’éducation populaire et les actions populaires. Par exemple, le centre offre un service d’achat en vrac avec son projet du Cœur au ventre, il présente des ateliers de cuisine et il publie un journal destiné aux membres qui propose des articles sur la condition féminine, des statistiques, etc. L’Érige fait aussi partie d’une multitude de tables de concertation pour véhiculer le point de vue des femmes. Le projet de maison d’hébergement fait partie de ses actions collectives à la suite d’une consultation des membres et de la communauté. IMPACTS DE L’ABSENCE DE MAISON D’HÉBERGEMENT La MRC d’Abitibi-Ouest est le seul territoire de la région à ne pas compter sur une telle ressource. D’après Thalya Thibault,

18 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN

stagiaire en travail social et membre de l’équipe chargée du projet de centre d’hébergement, L’Érige reçoit une centaine de demandes d’aide par année. La situation s’est dégradée à la suite de la pandémie alors que les gens sont confinés. L’Érige est ouvert du lundi au jeudi et ne peut que diriger les femmes vers d’autres centres d’hébergement qui sont souvent à plus de 80 km de La Sarre. Souvent, les victimes de violence conjugale n’ont pas de moyen de transport, ne veulent pas éloigner leurs enfants de leur milieu scolaire et de leurs amis. L’autre problématique est qu’au sortir d’une ressource d’hébergement, des femmes avec très peu de ressources doivent se trouver un logement abordable, ce qui ne court pas les rues avec un taux d’inoccupation de 2,3 en Abitibi-Témiscamingue en 2020 (Observatoire de L’AT) combiné à une hausse vertigineuse du prix des loyers. Actuellement, les femmes se dirigent à l’urgence et le seul endroit où de l’hébergement peut être offert à court terme est au service de psychiatrie du Centre hospitalier de La Sarre. C’est loin d’être un endroit approprié pour ces

femmes, même si elles en viennent à développer certains problèmes de santé mentale comme l’hyper vigilance. ÉTAPES À FRANCHIR Jusqu’à maintenant, L’Émeraude est enregistrée officiellement et une graphiste bénévole travaille actuellement sur le logo. L’équipe de L’Érige est présentement en recherche de financement. En temps de pandémie, les activités de financement possibles sont plutôt limitées, mais avec l’aide de la députée Suzanne Blais, il a été possible d’obtenir 500 $ de la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation Andrée Laforest et 5 000 $ du budget discrétionnaire du premier ministre François Legault. Les prochaines étapes seront l’assemblée de fondation, l’achat d’une maison et l’inscription à l’Association des maisons d’hébergement du Québec. Au fil de ses démarches, l’équipe a pu bénéficier du soutien de la maison d’aide et d’hébergement Alternative pour Elles de Rouyn-Noranda.


SPÉCIAL FEMMES

– FEMMES –

LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES : L’AUTRE PANDÉMIE MÉLODIE RHEAULT, INTERVENANTE AU POINT D’APPUI (ROUYN-NORANDA)

« La crise sanitaire actuelle agit comme un puissant révélateur des inégalités existantes. » Voilà le constat d’un rapport sur les impacts de la pandémie sur la santé et la qualité de vie des Québécoises, paru en novembre dernier. Prédominance des femmes dans les professions dites essentielles et dans le rôle de proche aidant, surexposition au risque d’infections, charge accrue des tâches familiales et domestiques, pertes de revenus et isolement sont des facteurs jouant un rôle important dans la détresse psychologique des femmes. En ce sens, trois femmes sur cinq ressentent que leur stress est plus important depuis le début de la crise sanitaire. Un sondage mené par Statistique Canada en début de pandémie révélait qu’une femme sur dix craignait de vivre de la violence familiale en contexte de confinement. En effet, plusieurs études démontrent qu’à grande échelle, une baisse de revenu et l’isolement social contribuent à une hausse de la violence conjugale. Parmi les femmes qui vivaient déjà de la violence, la moitié d’entre elles ont indiqué que la fréquence et la gravité se sont intensifiées depuis mars 2020 et que pour 43 % de ces ménages, la violence visait aussi les enfants. LA SITUATION TÉMISCABITIBIENNE En septembre 2020, l’Observatoire de l’Abitibi-Témiscamingue publiait des données alarmantes sur la violence conjugale et sexuelle dans la région, le nombre de victimes étant nettement supérieur à celui de l’ensemble du Québec. Malgré cela, la MRC d’AbitibiOuest n’est pas desservie en matière d’hébergement. L’implantation du projet de maison d’hébergement l’Émeraude permettrait aux femmes d’Abitibi-Ouest de recevoir du soutien localement plutôt que de devoir se déplacer sur plus de 70 km. En 2019-2020 seulement, l’organisme Alternative pour elles, situé à Rouyn-Noranda, a recensé 161 demandes d’aide en provenance de ce secteur. Aussi, le centre de femmes lasarrois l’Érige, qui n’est pas en mesure d’offrir d’hébergement, a offert du soutien à 81 femmes victimes de violence conjugale.

L’AIDE DEMEURE DISPONIBLE Bien que certains organismes de la région aient eu à adapter leurs services, le soutien demeure disponible. Afin que nous puissions aplanir cette autre courbe qu’est la violence faite aux femmes, transmettez l’information autour de vous. Pour trouver la ressource la plus près de chez vous, contactez ces numéros 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 et sans frais : SOS Violence conjugale 1 800 363-9010 Ligne-ressource pour les victimes d’agression sexuelle 1 888 933-9007 Info-Social 811

En ce qui concerne les femmes autochtones, comme la plupart des femmes vivant de multiples oppressions, elles sont plus vulnérables à la détresse et sont surreprésentées dans les statistiques concernant la violence genrée. Alors que 23 % des femmes allochtones déclarent avoir un état de santé mentale précaire en raison de la pandémie, ce chiffre grimpe à 38 % chez les femmes autochtones. Malheureusement, le Regroupement des centres d’amitié autochtone du Québec signale que les femmes des Premières Nations sont réticentes à se tourner vers les services sociaux lorsqu’elles sont en détresse étant donné la méconnaissance de l’aide disponible, l’absence de services culturellement adaptés, la barrière de la langue et la crainte de vivre de la discrimination et du racisme. Cette réalité est préoccupante étant donné qu’une femme autochtone sur cinq a déclaré subir de la violence dans son foyer durant la première période de confinement. En matière de violence sexuelle, le Point d’appui de Rouyn-Noranda a vu la demande d’aide baisser en début de pandémie, même si les besoins étaient encore présents. Plusieurs femmes ont déclaré avoir écarté leur besoin de soutien pour mieux répondre à l’augmentation de la charge familiale et domestique. L’incapacité de recevoir du soutien virtuel, expliqué d’une part par la couverture numérique déficiente en région rurale et d’autre part, par le manque de littératie informatique de plusieurs femmes, représente un défi de taille pour les survivantes de la MRC. La version intégrale de cet article est disponible au indicebohemien.org. L’INDICE BOHÉMIEN MARS 2021 19


SPÉCIAL FEMMES

– FEMMES –

FEMMES AUTOCHTONES : REPRENDRE LES RÊNES DE SA DESTINÉE LISE MILLETTE

Par la force des lois et de diverses politiques, dont ont fait foi d’ailleurs les commissions d’enquêtes récentes, les femmes ont été écartées de la vie publique, résume la professeure Basile. Cela inclut la vie politique, ce qui comprend aussi la direction de leurs propres communautés. « Jusqu’en 1951, il leur était interdit de participer à tout rassemblement public, de se présenter aux élections et d’y voter. Cela laisse des traces indélébiles dans le parcours de vie des femmes autochtones », assure Suzy Basile. Même si la Loi sur les Indiens a été modifiée, il a fallu attendre 1977 pour voir une première femme autochtone être élue

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20 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN

conseillère. « Au lendemain de la modification de la Loi sur les Indiens, les femmes ne se sont pas précipitées en politique. Il a fallu plusieurs décennies pour que certaines d’entre elles se manifestent. Il y a eu un décalage entre la possibilité de le faire et la concrétisation de le faire », illustre Suzy Basile. SAGES-FEMMES ET VIOLENCES INTIMES Une partie du savoir des femmes n’a pu être transmis, là encore en raison de décisions politiques. Pour Suzy Basile, une partie du savoir a été compromis parce qu’il était impossible de le faire. Elle cite ici les pensionnats autochtones. « Ces femmes ont vu de leur premier à leur dernier enfant partir de manière forcée. Parfois sous la contrainte ou la menace. La transmission d’un savoir exceptionnel a été compromise, notamment en ce qui concerne la pratique des sages-femmes. » Ironiquement, alors que plusieurs femmes, autochtones ou non, demandent la création de maisons de naissance et davantage de sages-femmes, la pratique des femmes autochtones a été écartée, voire interrompue. La Chaire

de l’UQAT s’intéresse d’ailleurs aux questions relatives aux accouchements. « À partir des années 1970, les femmes autochtones ont cessé d’accoucher chez elles ou dans la communauté avec des sages-femmes et ont été redirigées vers le réseau de santé du Québec. Elles se sont retrouvées en milieux hospitaliers, parfois seules, loin de chez elle, souvent dans une autre langue que la leur. Elles ont commencé à donner naissance à leurs enfants de manière très différentes de ce qu’elles avaient appris », a expliqué Suzy Basile. « Nous sommes à documenter les témoignages des dernières femmes qui ont connu cette époque-là, qui ont connu la transition vers le système de santé. ». Ces témoignages pourraient également ouvrir la porte à une autre réalité, plus sombre celle-là, celles des violences obstétricales et de la stérilisation forcée de plusieurs femmes autochtones. « Des données existent sur ces pratiques ailleurs au Canada, nous souhaitons obtenir un portrait de la situation ici au Québec », conclut Mme Basile.

Photo : Adobe Stock

Titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les enjeux relatifs aux femmes autochtone de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT), Suzy Basile est à la tête d’un chantier à la fois vaste et lourd. Les angles de recherche ne manquent pas, tout comme les traces d’un passé qui a laissé des sillages lourds et profonds dans la destinée des femmes autochtones. « Les femmes autochtones ont été écartées de toutes les sphères les concernant depuis l’établissement d’un État colonial au Canada », commence-t-elle.


SPÉCIAL FEMMES

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CHANGEMENT DE GARDE À L’ÉCART CHANTALE GIRARD

Le 11 janvier dernier entrait en fonction une nouvelle directrice au centre d’artistes autogéré L’Écart, lieu d’art actuel. Audrée Juteau a en effet été embauchée à la suite des départs planifiés de Geneviève Crépeau et de Mattieu Dumont. Elle sera simultanément directrice générale et directrice artistique. Native de Val-d’Or, Audrée Juteau fait partie des artistes de la région qui, après une formation à l’extérieur (maîtrise en danse à l’UQAM), reviennent à leurs origines. « Sans la présence de L’Écart, affirme la nouvelle directrice, je ne serais jamais revenue. Le Centre, par sa puissance d’attraction, a créé un milieu stimulant qui m’attirait grandement. »

Outre l’interdisciplinarité, la nouvelle directrice veut envisager son action à la direction de L’Écart dans une perspective écologique (au sens large) et dans le parti pris d’installer de nouveaux rapports entre les pratiques et les artistes de manière positive. La principale motivation d’Audrée Juteau est toutefois le soutien que son action peut apporter, tant par son travail à L’Écart que par celui à son atelier de danse, à la pratique artistique hors des grands centres. La présence de L’Écart dans le paysage abitibien (le centre d’artiste a pignon sur rue depuis 1993) représente pour elle la possibilité d’avoir un milieu artistique contemporain et actuel vivant dans la région. Ainsi, les artistes fréquentent la galerie, mais une bonne partie du public du centre vient aussi de la population en général. L’Écart a éduqué et amené le public dans ses murs et ça, c’est une valeur précieuse pour la nouvelle directrice. Comme la programmation du centre est déjà confirmée jusqu’en janvier 2022, ce n’est qu’en 2022 qu’elle pourra imprimer sa marque sur les nouveaux projets.

COURTOISIE

Il faut noter que Mattieu Dumont reste en place afin d’épauler Audrée Juteau jusqu’en juin. Celle-ci volera de ses propres ailes à compter de l’automne 2021. De plus, Mattieu Dumont et Geneviève Crépeau restent dans la région : ils quittent L’Écart dans une volonté de se consacrer entièrement à leur travail artistique. Nous ne les perdrons pas, soyons rassurés.

De retour en Abitibi-Témiscamingue depuis trois ans, Audrée Juteau a fondé un lieu de résidence en danse à Bellecombe, surtout actif l’été. Dès le début, elle s’est impliquée à L’Écart comme commissaire ainsi que comme membre du conseil d’administration et de jury de sélection. Elle a également été commissaire de l’exposition Face au corps qui s’est tenue au Centre d’exposition de Val-d’Or en 2019.

16>20 MARS

billetterie : theatretandem.com / museema.org

Son intérêt pour la mission de L’Écart fait écho à ses propres vues artistiques. « J’ai ma place à L’Écart; je m’y retrouve dans son interdisciplinarité. » Pour Audrée Juteau, ce n’est pas la discipline d’un artiste qui compte, mais l’intention de recherche. Elle compte poursuivre cette forte propension du centre d’artistes à privilégier les pratiques décloisonnées. L’INDICE BOHÉMIEN MARS 2021 21


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LAURANE GAGNON, CRÉATRICE DE TERRITOIRES À DANSER RODRIGUE TURGEON

LA NATURE

Suite au départ de sa professeure et amie Marie-Andrée Thibault pour Québec, Laurane Gagnon transforme rapidement son dilemme en vocation. « J’étais consciente que si je ne poursuivais pas la Classe de danse, les jeunes n’auraient plus la chance de danser à Amos et dans les environs. » La Classe de danse, comme son nom l’indique, est une école de danse. Laurane Gagnon en assume avec brio la direction artistique, avec l’appui des enseignants de qualité qu’elle a su recruter pour en diversifier l’offre. À l’instar de sa mentore, elle n’hésite jamais à encourager ses élèves à suivre leurs instincts créatifs et elle les pousse – doucement et avec son rire aussi constant que cristallin – à donner vie à leurs idées prometteuses.

L’histoire du territoire et la nécessité de le protéger font office de thèmes de prédilection pour ses mises en scène. « Faire et voir danser des adolescents sur du Richard Desjardins, je trouve ça vraiment beau », affirme celle qui rêve d’ailleurs d’orchestrer des prestations en plein air. Sans pousser la note, elle use de cette sensibilité pour amorcer un partage avec ses élèves sur l’importance de préserver nos milieux de vie. Il leur revient dès lors la mission d’interpréter, d’incarner, ces nobles et vitales valeurs à travers leurs chorégraphies.

DU VILLAGE Pour se consacrer pleinement à son amour pour la danse, Laurane a fait le choix réfléchi de céder son poste d’agente de développement au sein de la municipalité de Saint-Mathieud’Harricana qu’elle occupait depuis près d’un an et demi. Sa communauté natale peut attester de la marque laissée dans son sillage. La serre de l’école primaire, conçue dans la joie à partir de matériaux recyclés à la sueur des dizaines de bras villageois qu’elle a rassemblés, en est la meilleure démonstration.

22 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN

MIGUEL BARRETTE

AUX ORIGINES

POUR TOUJOURS Et demain? « J’aimerais que les élèves participent de plus en plus à la création », nous glisse-t-elle. Sa façon bien à elle de poursuivre l’œuvre de sa prédécesseure qui ne manquait jamais une occasion de la valoriser et de l’encourager à transformer ses initiatives instinctives en accomplissements spectaculaires.


SPÉCIAL FEMMES

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FEMMESSOR : SOUTENIR L’ENTREPRENEURIAT AU FÉMININ JADE BOURGEOIS

Lorsque l’on se lance en entrepreneuriat pour la première fois, la recherche de financement et le processus de démarrage peuvent décourager plus d’une personne. L’organisme Femmessor offre du financement accompagné aux Québécoises souhaitant se lancer en affaires. Depuis son arrivée en Abitibi-Témiscamingue, 15 entreprises réparties dans les 5 MRC ont fait appel à son expertise. Les femmes entrepreneures reçoivent un coup de pouce financier dès le départ tout en profitant de précieux conseils. En effet, des professionnels de tous les domaines des affaires sont disponibles pour répondre aux questions et soutenir les entrepreneures. Des ateliers et des activités de réseautage sont aussi organisés dans le but de favoriser les échanges et l’intégration des femmes dans le milieu entrepreneurial. LA PASSION COMME MOTEUR

et un désir de gérer sa propre affaire, Mme Boily a toujours eu la fibre entrepreneuriale en elle. En seulement deux ans, elle a fait grandir la compagnie de façon exponentielle et continue de travailler sans compter les heures pour offrir toujours plus de services à ses clients. Une autre entrepreneure témiscabitibienne, Chantal St-Amour, a aussi décidé de réaliser ses rêves en ouvrant La Perle dort, une maison de répit pour les parents ayant des horaires atypiques ou des enfants avec des besoins spéciaux. Déjà propriétaire du Jardin des trois, une garderie éducative, la Valdorienne s’est entourée des bonnes personnes pour aller au bout de ses projets : sa famille et Femmessor, entre autres. Les deux entrepreneures ne comptent pas les heures investies dans leurs entreprises tant elles sont passionnées par ce qu’elles font et stimulées par les défis qui s’offrent à elles.

Geneviève Boily a repris la boutique lasarroise L’Univers du compagnon en 2018. Motivée par sa passion pour les animaux

UN APPRENTISSAGE CONSTANT Les deux femmes sont catégoriques : bien que le démarrage d’une entreprise représente tout un défi, il ne faut pas avoir peur de se lancer et d’aller au bout de ses rêves. Pour Chantal StAmour, l’échec n’existe pas : « Dans la vie, soit tu apprends, soit tu réussis. » Lancer sa propre entreprise lui permet de cheminer professionnellement et personnellement à plusieurs niveaux. Même réalisation du côté de Geneviève Boily, qui en apprend tous les jours grâce au métier qu’elle s’est créée elle-même. Dans les deux cas, Femmessor a été d’une grande aide pour mener leurs projets à terme. Josée Gagné, responsable du développement des affaires pour l’organisme dans la région – et elle-même entrepreneure – note qu’il est toujours impressionnant de voir les clientes ne partir de rien pour créer du succès en seulement quelques années. L’important pour réussir selon ces trois femmes entrepreneures? Bien s’entourer, foncer et trouver le financement!

Travaillons ensemble! Que vous soyez un entrepreneur bien établi ou un petit nouveau aux idées de grandeur, on a hâte de faire votre connaissance! feufollet.ca | hello@feufollet.ca | Val-d’Or 819 825-5286 | Rouyn-Noranda 819 763-8366

L’INDICE BOHÉMIEN MARS 2021 23


SPÉCIAL FEMMES

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ALINE LECLERC : CELLE QUI LIT L’HISTOIRE DANS LES ROCHES ISABELLE GILBERT

Émélie Rivard-Boudreau, recherchiste et rédactrice, a déniché la perle rare en interrogeant des gens travaillant dans le secteur minier. Le nom d’Aline Leclerc, incontournable en géologie et en prospection, était sur toutes les lèvres. Émélie Rivard-Boudreau a ainsi rencontré l’une des premières femmes géologues et prospectrices sur le terrain. Parmi les trois femmes de la promotion de 1974 de l’UQAM, seule Aline Leclerc a vraiment travaillé au coude à coude avec les hommes dans la forêt. Sa carrière l’a menée dans le nord du Québec et du Canada, mais la septuagénaire a fini par prendre racine à Val-d’Or dans les années 1980. Elle aimait par-dessus tout être dans la forêt, près de la nature. Sa capacité à s’adapter à la vie en plein air l’a grandement aidée à gagner le respect des autres prospecteurs masculins. Elle a d’ailleurs vécu plusieurs années dans un camp dans le bois, sans eau courante. Même si elle n’a jamais fait de découvertes ayant donné lieu au développement d’une mine, elle a persévéré malgré les difficultés, à cause de sa passion pour l’or. Au début de sa carrière, en dépit de ses qualifications,

Aline Leclerc ne pouvait pas descendre dans une mine parce qu’elle était une femme! On peut donc constater une évolution si l’on compare avec aujourd’hui. Aline Leclerc est aujourd’hui respectée par ses pairs. En octobre 2020, elle a même remporté le prix HectorAuthier de l’Association minière du Québec (AEMQ) pour sa contribution significative au développement de l’entrepreneuriat minier au Québec (Le Citoyen, 2 octobre 2020). Elle a donc été celle qui a défriché le terrain pour les géologues des deux sexes. Les femmes d’aujourd’hui lui doivent beaucoup même s’il reste encore du chemin à faire dans le domaine minier. Le microsite Web, offert en complément au documentaire Cailloux au début du mois de mars, offre une présentation léchée et dynamique grâce à quelques animations et des photos. Il est possible d’y visionner Cailloux dans une version qui ne requiert pas d’équipement pour la réalité virtuelle. Le microsite permet également d’en apprendre plus à propos d’Aline Leclerc.

Un projet d’entreprise à financer ? E n t re p r e n e u r e s , n o u s s o m m e s l à .

24 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN

ÉMÉLIE RIVARD-BOUDREAU

Pour ceux qui sont familiers avec le projet documentaire en réalité virtuelle Abitibi 360 de Serge Bordeleau (Nagadam Films), vous aurez certainement vu le documentaire Cailloux et fait la connaissance d’Aline Leclerc, géologue et prospectrice. Dans un désir d’approfondir ce personnage haut en couleur, Serge Bordeleau et Émélie Rivard-Boudreau ont travaillé sur un complément Web à Cailloux qui rend hommage à cette pionnière qui a travaillé dans un monde minier longtemps dominé par les hommes.


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ARIANE GIROUX-DALLAIRE : L’ART DE FAIRE DÉCOUVRIR DES FILMS AU PUBLIC BÉATRIZ MEDIAVILLA

C’est l’histoire d’une jeune fille de Rouyn-Noranda, Ariane Giroux-Dallaire, qui découvre le cinéma toute petite parce que son père, Louis Dallaire (cofondateur du FCIAT), lui transmet sa passion. C’est aussi l’histoire d’une jeune femme qui étudie en publicité et qui fait un stage un peu par hasard chez Remstar. Elle y apprend un métier qui ne s’enseigne pas sur les bancs d’école : la distribution. Elle touche à tout, des exemplaires que l’on prépare en laboratoire aux tendances des goûts du public à travers les époques; de la mise en marché des films en salle en passant par la vidéo.

À travers un parcours qui l’amène à être tantôt coordonnatrice à la programmation pour le Festival du Nouveau Cinéma, tantôt responsable de la distribution à l’international de films comme Un crabe dans la tête et La Moitié gauche du frigo, ou directrice des communications chez Les Films Séville, elle développe son réseau de contacts, ses compétences et son talent. Dans un univers cinématographique sans cesse en mutation, où le travail pour amener le cinéma québécois, canadien et international en salle avec un public pour le voir demande flexibilité, sensibilité et esprit visionnaire, Ariane travaille sans relâche à la promotion de ce cinéma qui nous connecte aux autres et ouvre nos esprits. C’est ce qui, depuis 2017, l’a menée à suivre Charles Tremblay pour démarrer la boîte MK2 MILE END. Leur but : acheter des films en français et en anglais, d’ici et d’ailleurs, pour les distribuer partout à travers le Canada, sans partenariat avec des intermédiaires de Toronto; une norme qui ne fonctionne pas complètement, selon eux. Un pari réussi! Un des premiers projets québécois arrivés entre leurs mains est Il pleuvait des oiseaux, qui obtient le succès qu’on connaît. Depuis quatre ans, Ariane et Charles distribuent environ 20 films par année, dont Parasite, lauréat de quatre Oscars et qui obtient un succès qui n’arrive qu’une fois dans la vie d’un distributeur (6,4 millions de recettes à travers le Canada). Puis, dernièrement, Portrait de la jeune fille en feu qui avait une très belle lancée avant la pandémie… Ariane explique : « Ce qui est très intéressant en distribution, c’est que les gens sont passionnés. Il y a de la place et tout est possible. On se forme et on apprend à travers le travail. […] Il faut être curieux. Ce n’est pas un métier ennuyant, mon spectre d’intervention est très large. On travaille dans un milieu où il y a, aujourd’hui, une bonne diversité hommes-femmes. Et on retrouve des femmes dans des postes décisionnels. Je n’ai jamais eu à me battre parce que j’étais une femme. Comme quoi les choses changent! » Ça devient l’histoire d’une femme qui reçoit, en décembre 2020, le prix du gala Femmes du cinéma, de la télévision et des médias numériques, une reconnaissance des pairs. Recevoir ce prix permet à Ariane de constater tout ce qu’elle a appris depuis ses débuts. Elle est très reconnaissante du temps que les gens ont pris pour l’accompagner dans son apprentissage. À son tour, elle prend le temps qu’il faut avec les stagiaires, pour transmettre son savoir. « On forme une famille internationale avec des agents de ventes qui sont partout et avec qui on partage au moins une passion : le cinéma. C’est toujours intéressant de voir évoluer nos anciens stagiaires. »

SÉBASTIEN RAYMOND

Difficile de se prononcer sur l’avenir de cette histoire en ce moment, vu tous les chambardements que l’on vit. Mais Ariane demeure convaincue que les gens continueront d’aller au cinéma. L’expérience de voir un film en salle est unique. Est-ce que cela augmentera la qualité des films en salle? Est-ce que l’on aura plus de diversité? Elle l’espère. Une chose demeure cependant : son amour pour le septième art et particulièrement le cinéma pour les enfants! C’est aussi son père qui lui a fait découvrir le cinéma d’animation et c’est important pour elle que le public d’ici ait accès à une grande diversité de genre sur les écrans. C’est une priorité pour elle et ses collègues : montrer plus d’œuvres québécoises et étrangères sur les écrans, petits et grands, de nos enfants.

L’INDICE BOHÉMIEN MARS 2021 25


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– FEMMES –

UNE NOUVELLE PLACE POUR LES FEMMES DANS LES TECHNOLOGIES CAMILLE BARBOTTEAU

Cette journée du 8 mars souligne l’apport des femmes dans le monde et particulièrement en cette crise sanitaire. Les femmes sont en première ligne dans cette lutte contre la pandémie. Par nos actions, nos innovations, notre volonté, nous persévérons pour affronter les obstacles sociaux et systémiques. Le droit des femmes allochtones et autochtones doit être respecté par la mise en œuvre de politiques et de programmes diversifiés. Unissons nos voix pour nos droits et assurez l’égalité dans tous les processus décisionnels au niveau politique, social, économique, et juridique.

C E N T R E D ’A R T BOUTIQUE

25 FÉVRIER AU 22 AVRIL 2021 INTERLOCUTION

ANNIE CANTIN ARTISTE DU VERRE

195, rue Principale, La Sarre (Québec) J9Z 1Y3 819 333-2282

Heures d’ouverture

Lundi : Mardi au vendredi : Samedi : Dimanche :

Fermé 12 h à 16 h 30 10 h à 15 h Fermé

Consultez régulièrement notre page Ville de La Sarre

26 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN

VERNISSAGE VIRTUEL

JEUDI 11 MARS 2021

à 17 h en présence de l’artiste diffusion en direct sur la page facebook de la Ville de La Sarre

Aujourd’hui, la place des femmes dans les domaines numériques n’est pas aussi visible et reconnue que celle des hommes. Pourtant, depuis toujours, plusieurs femmes, souvent évincées de l’histoire officielle, ont participé à la création et à l’élaboration de ces technologies numériques. Pionnières dans leur domaine, on ne leur rend tout simplement pas hommage. À titre d’exemple, au dix-neuvième siècle, Ada Lovelace invente les notions de variables et de boucles conditionnelles dans un algorithme de calcul des nombres de Bernouilli. À l’époque, elle ne publie pas son mémoire sous son vrai nom pour dissimuler le fait qu’elle est une femme, mais sous les initiales A.A.L. Aussi, pendant la Seconde Guerre mondiale, Jean Jenning Bartik, Marlyn Wescoff Meltzer, Ruth Lichterman Teitelbaum, Betty Snyder Holberton, Frances Bilas Spence et Kay Mauchly Antonelli, surnommées les programmeuses de l’ENIAC (Electronic Numerical Integrator And Computer), dirigent l’équipe de programmation de ce premier ordinateur électronique. Elles inventent des techniques de programmation, ainsi que de réparation et de correction de bogues informatiques. Ces femmes ne sont que quelques exemples parmi tant d’autres. Si on fait un état des lieux de la place qu’occupent les femmes dans les nouvelles technologies aujourd’hui, les chiffres sont explicites : celles-ci sont sous-représentées au Québec et ailleurs dans le monde. Selon Cassie Rhéaume, ambassadrice de la division montréalaise de Ladies Learning Code et responsable de la formation chez LightHouse Labs, en 2018, seulement 13 % des femmes s’inscrivent dans des filières techniques. Toujours au Québec, dans les équipes de production, 80 % des postes sont occupés par des hommes. Malgré ces données, les femmes ont beaucoup de choses à apporter dans cet univers masculin. Sachant que les équipes de développeurs sont principalement composées d’hommes blancs hétérosexuels, on devine que ce qu’ils créent peut ne pas convenir à tout le monde. Une présence accrue de femmes dans les équipes de création permettrait d’éviter les biais de genre sur les objets technologiques. Certains se souviennent peut-être de l’agent vocal Alexa, qui disait merci lorsque quelqu’un la traitait de « salope ». On se rappelle aussi qu’en 2014, Amazon utilisait l’intelligence artificielle (AI) pour sélectionner les CV des candidats au recrutement. Après un an, le projet a été interrompu lorsqu’on a constaté que l’IA avait une prédisposition à écarter les CV des femmes. Il ne faudrait pas accuser l’IA, mais plutôt la culture d’entreprise qu’elle reflète. On observe une transmission des préceptes et des mœurs de la masculinité hégémonique dans le monde des nouvelles technologies. Il serait dommage de passer à côté de produits en adéquation avec les besoins de la population québécoise, sachant qu’en 2016, selon Statistique Canada, les femmes représentaient 50,3 % de la population. Voici donc quelques initiatives pour favoriser leur apport et leur présence dans les technologies numériques. Il existe plusieurs associations ou organismes qui permettent de démocratiser les nouvelles technologies auprès des jeunes filles et qui encouragent celles-ci vers des études ou des carrières technologiques : Les filles et le code, Les Scientifines, etc. Les programmes de mentorat, les bourses ou les prix qui s’adressent aux femmes ainsi que les réseaux féminins comme le groupe Facebook Les filles du web au Québec sont des moyens de faire valoir le travail de ces femmes. Au Québec, certains organismes promeuvent la place des femmes dans ces domaines comme Pixelles pour l’univers des jeux vidéo. Au-delà de ces mesures d’équité, il ne faut pas oublier que le problème est plus profond, c’est un problème de société. Il faut donc changer le système et les institutions qui le composent pour en finir avec la division sexuée du travail.


– MÉDIAS ET SOCIÉTÉ –

SI L’ÉGALITÉ ÉTAIT IMPORTANTE LOUIS-PAUL WILLIS

Le titre de cette chronique s’inspire de la série de textes intitulée « Si l’école était importante », écrite par Patrick Lagacé dans La Presse. Il y effectue un recensement continu des nombreux facteurs faisant la démonstration que dans les faits, l’éducation ne s’avère aucunement être une priorité au Québec. J’aurais tout aussi bien pu intituler cette chronique « Si la féminité était importante », ou encore, « Si les femmes étaient importantes »; l’idée demeure la même : on a beau se targuer d’être une société égalitaire, on a beau défendre une « laïcité » érigée sur le regard colonialiste que nous posons sur le traitement des femmes au sein d’autres cultures, notre paysage médiatique a beau être tapissé de panels de chroniqueurs masculins blancs répétant ad nauseam que le privilège blanc masculin n’existe pas, tout cela ne change rien au fait qu’une inégalité insidieuse persiste entre les sexes et entre les genres. Au fil des ans, j’ai eu la chance d’exprimer et de critiquer sur ces pages différents aspects de l’inégalité persistante au sein même de nos productions culturelles et de nos échanges socionumériques, entre autres. Malheureusement, il ne passe jamais beaucoup de temps avant qu’une énième manifestation de cette inégalité n’attire notre attention. Mais au fil des derniers mois, j’ai été particulièrement happé par ce qu’on peut désormais qualifier d’« affaire Pornhub », qui a marqué l’actualité à la fin de l’automne dernier. Pour rappel, à la suite d’un reportage percutant du New York Times au début décembre, la présence importante pédopornographie et de vidéos d’agressions sexuelles diverses sur la très populaire plateforme Pornhub était révélée au grand jour : vidéos de viols, d’agressions, vidéos de pornodivulgation (communément appelée revenge porn), vidéos misogynes et racistes, vidéos voyeuristes non consenties, le tout mettant souvent en scène des mineures… Et comme la plateforme appartient à un conglomérat montréalais, le journaliste Nicholas Kristof se demandait comment il était possible qu’un gouvernement se voulant féministe tel que celui du Canada puisse laisser aller une telle situation sans légiférer. Je vais laisser de côté l’aspect politique ici pour me centrer sur les paradoxes visuels et imaginaires propres à notre culture. Aussi, dans un contexte où certains mouvements au sein du féminisme sont ouvertement contre la pornographie, je crois essentiel de préciser que ce n’est pas mon cas. Je me revendique d’un féminisme anti-censure, et cette chronique n’est donc pas un discours anti-pornographique. Par contre, il importe de comprendre le rôle fantasmatique de la porno dans nos cultures. Dans cette veine, l’affaire Pornhub met en relief de puissants paradoxes culturels qui perdurent : comment une société comme la nôtre, qui défend (à juste titre!) les tabous posés contre l’inceste et la pédophilie, peut-elle produire autant de contenu pédopornographique? L’affaire Pornhub révèle que ces contenus ne sont pas de rares occurrences confinées dans les plus sombres racoins du Web; ce sont des contenus pour lesquels il y a clairement une

demande. Ce phénomène inquiétant a des sources et des ramifications qui dépassent largement la portée de cette chronique, certes, mais qu’on peut essentialiser autour des deux pôles : le culte de la jeunesse perpétuelle qui est imposée à la féminité, et l’objectivation de la féminité qui traverse une très large part de nos productions culturelles, des films populaires à la porno. Récemment, La Presse a publié un article détaillant le témoignage devant la Chambre des communes d’une victime de pédopornographie sur Pornhub. Ce témoignage met en relief des problématiques persistantes au sein de notre société. La jeune femme a envoyé une vidéo explicite d’elle-même à son copain alors qu’elle était en 7e année (ce qui est l’équivalent de la 1re secondaire!!!), et ce dernier l’a ensuite téléversée sur Pornhub. Malgré les demandes répétées de la part de la victime, chaque fois que la vidéo était retirée, elle reparaissait peu de temps après. Cet exemple illustre en lui-même plusieurs problèmes : si la vidéo (d’une jeune fille de 12-13 ans, rappelons-le) reparaissait sans cesse, c’est qu’il y a une demande pour ce genre de contenu, demande qui va au-delà de quelques pédophiles terrés dans leurs sous-sols. Ça, c’est non négligeable, et ça atteste d’une problématique majeure en lien avec les fantasmes culturels qui entourent la féminité. Mais au-delà de la dimension pédopornographique de cette anecdote (détail difficile à contourner, d’ailleurs), il y a un autre problème majeur : la notion de pornodivulgation. Cette pratique extrêmement répugnante consiste à diffuser des contenus visuels intimes sans l’accord de la personne mise en scène, souvent dans un esprit de revanche. Cette pratique en dit long sur le rapport que notre société entretient envers les femmes, puisqu’on a tendance à critiquer la victime qui s’est mise en scène plutôt que de critiquer le comportement extrêmement violent de la personne qui diffuse le contenu. Même si la pornodivulgation est un crime selon le Code criminel canadien, les sentences sont risibles – comme c’est souvent le cas pour les crimes sexuels. On fait porter aux femmes le fardeau du crime les visant, et tant que cela ne changera pas, il demeurera fort naïf de croire que nos sociétés occidentales sont égalitaires. Dans mon champ d’études (les études cinématographiques et médiatiques), le féminisme demeure pleinement pertinent précisément en raison du déséquilibre dans la représentation visuelle des rôles sexués et genrés. Cette inégalité se répercute directement dans notre rapport avec la représentation sexuelle. Devant cet état des lieux, on peut aisément se demander où est l’estime des femmes, ainsi que les valeurs d’égalité, dans notre société.

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– MUSIQUE –

TREES EP DE MR. SANTÉ LOUIS-ERIC GAGNON

Carl-Éric Simard-Descôteaux est un amant de la nature estivale et de la forêt. En novembre, il voulait recréer cette bulle et cette chaleur à l’aube de l’hiver qui approchait. Il explique que l’aspect visuel est important pour l’inspiration. « J’ai regardé des photos d’arbres et des encyclopédies. On a chacun un petit film en écoutant ces tounes-là. Je pourrais marcher dans le bois et écouter ça. Ce sont des boucles, c’est immersif. » Mr. Santé a découvert le lo-fi vers 2012 alors qu’il écoutait les artistes de Vinyl Digital, étiquette avec laquelle il a récemment signé un contrat. Il cite Wun Two, Mujo et Jinsang comme des artistes qui l’ont influencé. Il s’est intéressé à la production des beats dans le hip-hop des années 1980 et 1990. Il produit donc son échantillonnage à partir de vinyles et c’est à partir

28 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN

de ce découpage qu’il jamme et qu’il expérimente. Il tente de rester fidèle aux techniques old school et de se tenir loin des ordinateurs qu’il n’utilise que pour le peaufinage. « Ça fait un son qui est plus analogue. Je passe aussi par un tapedeck pour le pousser un peu plus. » L’évolution des thématiques dans l’univers musical de Mr. Santé est fascinante. Alors que les trois derniers albums parlent de nature et de bien-être, le beatmaker se dirige vers de quoi de plus urbain : « Pour mon prochain album complet, je veux une vingtaine de beats. C’est un peu nature, mais je veux faire une transition plus urbaine. Comme si Trees EP est l’intro plus sauvage. » De bons rythmes qui nous permettent de patienter avant l’arrivée de la saison des roadtrips et qui donnent envie de découvrir la discographie complète de cet artiste rouynorandien.

ROGER-ALEXANDRE VILLENEUVE

Se promener en nature de la Californie aux Indes entre les figuiers et les prosopis. C’est ce qu’offre Trees EP de Mr. Santé, un court album de six pièces lo-fi hip-hop. Avec notre désir grandissant de voyage, ce onzième album tombe à point.


– E N V I R O N N E M E N T –

MÈRES AU FRONT : ÇA VA PRENDRE PLUS QUE DES BROSSES À DENTS DE BAMBOU GENEVIÈVE BÉLAND

L’ampleur du déni collectif face à l’urgence climatique n’a d’égal que sa débilité. Pourtant, il n’y a AUCUNE ambiguïté : pour reprendre les mots d’Hugo Latulippe, « une croissance économique infinie sur une planète finie est une absurdité ». L’évidence ayant été nommée, le texte aurait pu s’arrêter là. En fait, on ne devrait pas avoir à en dire plus. C’est une vérité accessible et difficile à contester, à moins d’être de très mauvaise foi.

GENEVIÈVE LAGROIS

Mais dans ces quelques mots, qui expriment en toute simplicité la plus grande problématique de notre époque, pointe l’élément qui nous fait caler au fond : la crise climatique n’est rien d’autre qu’une crise économique. On le voit avec l’actuelle crise sanitaire, c’est lorsque ça touche l’économie que ça devient compliqué! Dans son essai, Guérir du mal de l’infini (éditions Écosociété), Yves-Marie Abraham expose que « le Canadien moyen a une empreinte écolo d’environ 8 hectares globaux alors que la biocapacité planétaire est évaluée à 1,68 hectare global par être humain ». Il souligne également que les principaux intéressés dorment sur leurs deux oreilles parce qu’ils vivent séparément des conséquences. En effet, il y a une séparation entre nos gestes quotidiens et leurs effets ultimes : quand on met de l’essence dans le réservoir, quand on jette nos cossins de plastique dans la poubelle ou qu’on achète nos morceaux de vêtements fast fashion, il se passe… rien! Ainsi, personne ne se sent directement responsable de la perte de biodiversité ou du réchauffement climatique. Dans l’essai La philosophie à l’abattoir (éditions Atelier 10), les auteurs établissent que « les arguments moraux s’avèrent notoirement peu convaincants lorsqu’ils vont à l’encontre de nos intérêts personnels, particulièrement s’ils commandent de transformer profondément nos comportements et modes de vie ». Ils ajoutent même que « les gens qui appuient le mouvement écologiste tout en prenant l’avion, c’est la norme plus que l’exception ».

On vous annonce aujourd’hui qu’on ne sauvera pas la planète en troquant le plastique de nos brosses à dents pour du bambou ou en achetant tous les produits avec-un-arbre-dessiné-dessus. On mentionnait plus haut que le Canadien moyen a une empreinte de 8 hectares globaux. Eh bien, sachez que les gens vivant dans la plus grande simplicité présentent

Envie de contribuer à la protec�on de l’environnement? Devenez membre !

en moyenne une empreinte écologique de 5 hectares globaux! C’est beaucoup mieux, mais encore bien au-dessus de la limite planétaire. Dans nos sociétés occidentales dont les modes de production sont basés sur de très lourdes infrastructures, il n’y a pas de réelle consommation responsable possible. Ce qu’il y a de profondément injuste dans tout ça, comme l’exprime Laure Waridel dans son ouvrage La transition, c’est maintenant (éditions Écosociété) : « Les plus jeunes d’entre nous subiront de manière disproportionnée les coûts humains, économiques et sociaux des changements climatiques comparativement à leurs aînés, à l’origine des sévices. » Laure Waridel, à la fois profondément renseignée et optimiste (ce qui a le mérite d’être rassurant), croit qu’aucune lutte n’est trop grande pour être affrontée collectivement. Elle fait d’ailleurs partie, avec Anaïs Barbeau-Lavalette, des fondatrices du mouvement Mères au front qui a pris racine en Abitibi-Témiscamingue en 2020. On le constate, pour éviter la dégradation catastrophique de notre climat, ça prendra des changements courageux et majeurs. Ainsi, le mouvement Mères au front s’adresse directement aux élus pour exiger l’adoption de mesures concrètes et audacieuses afin de protéger nos enfants et la vie sur terre. Le carburant de Mères au front est la puissance de la force maternelle (doublée de la colère face à l’inaction vis-à-vis l’imminente atteinte des limites planétaires), mais c’est somme toute un mouvement inclusif, comme le précise Anaïs Barbeau-Lavalette : « L’appel est fait à tous ceux qui se sentent mères de façon universelle, et pères, à tous ceux qui ont une lien avec l’enfance, tous ceux qui ont envie de protéger la suite du monde et la vie sur Terre qui nous suivra. » L’amour de nos enfants est notre arme de construction massive, pour la suite du monde. Pour suivre le mouvement, rendez-vous sur le site Web de Mères au front et sur les pages Facebook respectives des mouvements Mères au front de Rouyn-Noranda et Val-d’Or.

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– M A R É G I O N , J ’ E N M A N G E –

SAUCE BÉCHAMEL AU LAIT BORÉALAIT CHEF RÉGIS HENLIN, LES BECS SUCRÉS-SALÉS (VAL-D’OR)

INGRÉDIENTS 120 ml (½ tasse) 120 ml (½ tasse) 120 ml (½ tasse) 1 litre (4 tasses) 1 un. (120 gr.) 1 pincée 1 pincée Au goût

Déglacer avec le vin blanc et laisser réduire de moitié. Beurre Farine tout usage Vin blanc Lait Boréalait 5 % Oignon haché fin Muscade moulue Piment de Cayenne Sel et poivre blanc

Saupoudrer la farine sur le beurre, l’oignon et le vin blanc, et bien mélanger à l’aide d’un fouet 1 minute sans arrêter de brasser.

MÉTHODE

Ajouter la moitié du lait et laisser cuire 2 minutes, tout en continuant de fouetter sans arrêt (lire le conseil important ci-contre) ajouter la deuxième moitié de lait et laisser cuire de 4 à 5 minutes sans arrêter de fouetter pour donner la chance à la farine de cuire et épaissir dans le but d’obtenir une sauce veloutée.

Dans une casserole, faire fondre le beurre à feu moyen et faire suer les oignons jusqu’à ce qu’ils soient translucides.

Retirer le chaudron du feu et ajouter la muscade, le piment de Cayenne, le sel et le poivre blanc.

30 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN

Conseil important : Afin de s’assurer d’un bon résultat de la sauce béchamel, il est important de brasser continuellement pour éviter que la sauce fasse des grumeaux et qu’elle ne colle au fond du chaudron. Si la fatigue se fait sentir, retirer le chaudron du feu pour un petit repos et par la suite, continuer les étapes. Idée gourmande : À cette sauce de base, ajouter du fromage râpé (cheddar, parmesan ou autres), de l’ail, des herbes fraîches et des œufs cuits. Accompagne très bien les pâtes alimentaires, les poissons ou les plats à gratin.


CALENDRIER CULTUREL CONSEIL DE LA CULTURE DE L’ABITIBI-TÉMISCAMINGUE

En raison des mesures annoncées par le gouvernement concernant le COVID-19, il se peut que certains des spectacles en présentiel du calendrier soient annulés. Veuillez vous référer directement aux diffuseurs pour les informations les plus à jour.

CONTE

HUMOUR

Raton Lover et Pierre Guitard 27 mars, Salle Dottori (Témiscaming)

Demain – Mehdi Bousaidan 29 mars, Le Rift (Ville-Marie) 30 mars, Théâtre du cuivre (RN) 31 mars, Théâtre Télébec (VD) MUSIQUE Nostalgia – Marc Hervieux 26 févr., Théâtre Télébec (VD) 27 févr., Le Rift (Ville-Marie) 28 févr., Théâtre du cuivre (RN) 1er mars, Théâtre des Eskers (Amos) 2 mars, Salle de spectacle Desjardins (La Sarre) Matt Holubowski 4 mars, Théâtre Télébec (VD) 5 mars, Théâtre des Eskers (Amos) Que sera ma vie – Ludovick Bourgeois 9 mars, Le Rift (Ville-Marie) 10 mars, Théâtre du cuivre (RN) 11 mars, Théâtre Télébec (VD) 12 mars, Théâtre des Eskers (Amos) 13 mars, Salle de spectacle Desjardins (La Sarre) Opus 7 – Alain Lefèvre 21 mars, Théâtre Télébec (VD) 28 mars, Théâtre du cuivre (RN)

Comme une bouteille à la mer Guillaume Beaulieu 11 mars, Théâtre des Eskers (Amos) 25 mars, Le Rift (Ville-Marie)

La couleur écrite – Renée Carrier Jusqu’au 21 mars, Centre d’exposition d’Amos Interlocution – Annie Cantin 25 févr. au 22 avr., Centre d’art de La Sarre

DANSE CINÉMA Brotipo – Foutoukours 6 mars, Théâtre des Eskers (Amos) 7 mars, Théâtre Télébec (VD) 8 mars, Le Rift (Ville-Marie) THÉÂTRE Bermudes (Dérives) – Théâtre du Tandem/Système Kangourou 16 févr. au 20 mars, MA Musée d’art (RN) Le poids des fourmis – Théâtre Bluff 26 févr., Théâtre des Eskers (Amos) Le curieux destin d’Marcel Monarque Productions 16 mars, Théâtre du cuivre (RN) 17 mars, Théâtre Télébec (VD) Dans la tête de Proust Théâtre Omnibus 30 mars, Théâtre des Eskers (Amos) 31 mars, Théâtre du cuivre (RN) 1er avril, Théâtre Télébec (VD) EXPOSITIONS

Manu Militari & Dramatik 27 mars, Brasserie La Brute du coin (La Sarre)

Le noir de l’encre – Collectif Jusqu’au 14 mars, MA Musée d’art (RN)

C’est ça le paradis? D’Elia Suleima 7 mars, Théâtre du cuivre (RN) Îles Canaries– Aventurier voyageur 24 mars, Cinéma Amos DIVERS Atelier d’initiation à l’acrylique 10 févr. au 31 mars, MA Musée d’art (RN) Atelier libre 12 févr. au 11 juin, MA Musée d’art (RN) Dessin de modèle vivant 13 févr. au 5 juin, MA Musée d’art (RN) La traversée du lac Abitibi 25 févr., Petit Théâtre du Vieux Noranda Salon d’écoute, une activité spéciale 25 févr., Théâtre des Eskers (Amos) Caravane Supernova 26 mars, Théâtre du cuivre (RN)

Le bestiaire de Mibo – Micheline Plante Jusqu’au 6 mars, Atelier Les Mille Feuilles (RN) Ourse bleue – Piciskanâw Mask Iskew – Virginia Pesemapeo Bordeleau Jusqu’au 7 mars, MA Musée d’art (RN)

Pour qu’il soit fait mention de votre événement dans la prochaine édition de L’Indice bohémien, vous devez l’inscrire vous-même, avant le 20 de chaque mois, à partir du site Web du CCAT au ccat.qc.ca/soumettre-evenement.php. L’Indice bohémien n’est pas responsable des erreurs ou des omissions d’inscription.

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S’isoler, c’est sérieux. Pour lutter contre la propagation de la COVID-19, on doit s’isoler quand : • on a des symptômes • on a passé un test • le résultat est positif • on revient de voyage • on a été en contact avec un cas confirmé

Québec.ca/isolement 1 877 644-4545

32 MARS 2021 L’INDICE BOHÉMIEN


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