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ÉNERGIE
MOTEUR D’INNOVATIONS
HORS-SÉRIEccJUIN 2010 - 11
Hors-série
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EDITO
L’efficacité choisie
ccRIDHA LOUKIL RÉDACTEUR EN CHEF
rloukil@industrie-technologies.com
J.C. BERTINI POUR IT
La course à l’efficacité énergétique : une opprtunité d’innovation.
Et si vous réduisiez la consommation d’énergie de vos produits ? Montée des préoccupations environnementales, durcissement de la réglementation… la course à l’efficacité énergétique fait aujourd’hui figure de contrainte évidente. Mais vous gagnerez à la transformer en une opportunité d’innovation. Une efficacité choisie, en quelque sorte. L’exemple des technologies de l’information donne la mesure des enjeux. Depuis longtemps, les industriels de ce secteur font de la réduction de la consommation de leurs produits un axe naturel d’innovation. Mais avec l’explosion d’Internet, l’invasion des mobiles et le passage de la télévision aux écrans plats, ils sont contraints de passer à la vitesse supérieure. La consommation d’électricité liée à Internet s’envole. Selon l’université d’Harvard, si rien n’est fait pour limiter la voracité énergétique des datacenters, elle atteindrait, dans 25 ans, la consommation d’électricité de l’humanité tout entière en 2008… Inacceptable ! Mêmes perspectives, mêmes craintes dans la télévision. Selon Sharp, sans amélioration de l’efficacité énergétique, le remplacement du tube cathodique par des écrans plats bien plus grands rendrait au final le parc de téléviseurs quatre fois plus énergivore. Heureusement, la consommation des écrans plats fond comme neige au soleil. En trois ans, Panasonic a ainsi rendu ses dalles plasma quatre fois plus sobres. Du point de vue de la consommation, l’industrie est un bon élève. Selon l’Observatoire de l’énergie, sa part dans la consommation finale d’énergie en France a baissé de 16,5 % entre 1980 et 2006. Depuis 1990, elle s’est stabilisée autour de 15 %. Mais les marges de progrès sont loin d’être épuisées. Selon l’Ademe, l’industrie recèle encore un gisement d’économie de 30 %. À vous de transformer ce potentiel en gain de productivité. cm
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Immeuble Antony Parc II 10, place du général de Gaulle BP 20156 92186 Antony Cedex Tél. : 01-77-92-92-92 Fax Rédaction : 01-77-92-98-51 Fax Publicité : 01-77-92-98-50
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SOMMAIRE
Une publication de Pour joindre vos correspondants, composez 01-77-92, suivi des quatre chiffres entre parenthèses indiqués après chaque nom.
Président Directeur général Christophe Czajka Directeur général délégué Paul Boursier RÉDACTION Directeur des rédactions Laurent Guez (9423) Rédacteur en chef Ridha Loukil (9480) Conseil éditorial Fabrice Frossard (9452) Secrétaire générale de la rédaction Christine Bradu (9496) Rédactrice en chef Editing Anne Debray (9251) Assistante de la rédaction Marielle Flèche (9425) Rédacteur en chef adjoint Jean-François Prevéraud (9458) (Bureaux d’études, design, CAO, lettre Web) Rédacteurs Muriel de Véricourt (9482) (Matériaux, biotechnologies) Thomas Blosseville (9481) (Énergie, environnement) Charles Foucault (9443) (Technologies de la production) Didier Ragu (9435) (Nouveaux produits) A COLLABORÉ À CE NUMÉRO Philippe Pélaprat
PRODUCTION
LE BLOC-NOTES DE LA RÉDACTION cc PAGE 10
RÉALISATION Secrétariat de rédaction Nicole Torras (9493), première secrétaire de rédaction Directeur artistique Gérard Quévrin (9494) Service Photo Bernard Vidal (9490) Conception graphique Rampazzo & Associés
Un monde plein de ressources
COMMERCIAL Directeur des forces commerciales et marketing Pierre-Dominique Lucas (9403) Directrice commerciale du pôle Industrie Béatrice Allègre (9362) Directeur adjoint de la publicité Éric Talley (9578) Régions Thierry Borde, directeur (04-72-84-27-54) Est Clarisse Michel (03-88-84-36-06) Italie Jean-Pierre Bruel ([031]751-494) Allemagne/Suisse/Autriche Axelle Chrismann (9259) Benelux (Bruxelles) Anne Stuckens ([02]647-67-34) Grande-Bretagne François Krébel ([01-483]72-02-14 et 72-03-26) Etats-Unis Lawler Communications, Larry Lawler ([001]914-698-66-55) Espace Industrie - Contact Industrie - Service publicité Nathalie Chasles (9374) La direction se réserve le droit de refuser toute insertion sans avoir à justifier de sa décision.
cc page 12
ENQUÊTE
Les défis du réacteur nucléaire du futur Dans le labo, il y a des cactus Aïe aïe aïe, ouille, aïe aïe aïe I & T se pique de le savoir.
MARKETING Responsable du service Jean-Baptiste Alline (9781) Responsable marketing Damien Delhomme (9786) ANNONCES CLASSÉES Directeur général Pierre-Dominique Lucas (9403) Assistante Catherine Bénézit (9412)
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ADMINISTRATION-GESTION Directeur administratif et financier Stéphane Deplus (9402) Responsable juridique Mireille Monnier (9744) Directeur des affaires sociales Frédéric Sibille (9444) Directeur fabrication et achats Benoit Carlier (9314)
DIFFUSION-ABONNEMENTS-EDITIONS Directrice de la diffusion et de la promotion Bénédicte Hartog (9406) Directrice des abonnements Patricia Rosso (9788) Directrice des éditions Annie Zaratti (9774) Responsable de la promotion Isabelle de Goüyon Matignon (9811) Service Clients (9292) TARIFS ABONNEMENTS France (TVA 2,10 %) 1 an, 11 numéros + accès Web : 105 euros TTC Etudiants/Demandeurs d’emploi 55 euros TTC (sur justificatif) Etranger nous consulter Règlement à l’ordre d’Industrie et Technologies Pour l’UE, préciser le numéro de TVA intracommunautaire Librairie (vente des numéros déjà parus et des annuaires) 4288 Annuaires (TVA 5,5 % incluse) « L’Atlas des usines » : 95 euros TTC Numéro de commission paritaire : 0612T81775. Numéro ISSN : 1633-7107. Dépôt légal : à parution. Impression : Mordacq 62120 Aire-sur-LaLys. Industrie et Technologies est édité par Groupe Industrie Services Info (principal actionnaire : GISI Communications), SA au capital de 1 057 080 euros. RCS Nanterre 309.395.820. 10, place du général de Gaulle 92 160 Antony. Toute reproduction, représentation, traduction ou adaptation, qu’elle soit intégrale ou partielle, quels qu’en soient le procédé, le support ou le média, est strictement interdite sans l’autorisation de l’éditeur, sauf dans les cas prévus par l’article L.122-5 du code de la propriété intellectuelle. Seules sont autorisées les reproductions réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et les analyses et courtes citations justifiées par le caractère scientifique ou d’information de l’œuvre dans laquelle elles sont incorporées. (loi du 11 mars 1957, art. 40 et 41, et code pénal, art. 425). Copyright Groupe Industrie Services Info. Tous droits réservés Directeur de la publication Christophe Czajka
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ENTRETIEN
Jean Therme Directeur délégué aux énergies renouvelables du CEA «La révolution viendra des nanomatériaux»
CONFÉRENCES-EVÉNEMENTS Directrice Anne-Carole Barbarin (9290)
TECHNIQUE-PRODUCTION Informatique Philippe Bobo (01-46-99-24-37) Services généraux Jean-Pierre David (responsable) (9416)
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INNOVATIONS CE NUMÉRO COMPORTE : UN ENCART ABONNEMENT BROCHÉ DE 4 PAGES ENTRE LES PAGES 2 ET 51.
LA PHOTO-TECH Le nouvel empire de l’éolien La Chine est devenue le premier marché mondial de l’éolien. cc PAGE 6
La sélection d’Industrie et Technologies cc PAGE 22
SOMMAIRE
CONSOMMATION ÉMISSIONS
INDEX
Les entreprises et les établissements cités 3MW . . . . . . . . . . . . . . . . . .38
Chaque watt vaut de l’or
Le CO2 est l’ennemi
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ENQUÊTE
Chassez les gaspis dans vos usines cc PAGE 28
ENTRETIEN
Laurent Schmitt Vice-président d’Alstom Power Energy Management
ENQUÊTE
Le CO2 doit-il orienter l’innovation ? cc PAGE 42
ENTRETIEN
Jean Jouzel Climatologue, prix Nobel de la paix en 2007 avec le Giec
«Le réseau électrique intelligent, c’est un véritable écosystème»
«Le changement climatique est une rupture technologique»
cc PAGE 32
cc PAGE 46
INNOVATIONS
La sélection d’Industrie et Technologies cc PAGE 36
INNOVATIONS
La sélection d’Industrie et Technologies cc PAGE 49
CRÉDITS PHOTOS COUVERTURE ET SOMMAIRE : SNECMA ; LOOKATSCIENCES ; RÉA ; IMAGINE CHINA ; RENAULT ; D.R..
MISE À NU
LA VOITURE ÉLECTRIQUE SE DÉVOILE cc PAGE 51
ccA Académie des sciences .42 Actel . . . . . . . . . . . . . . . . . .38 Ademe . . . . . . . . . . . . . . .28 Agir pour l’environnement42 Alcore Brigantine . . . . . . .37 Alstom Power . . . . . . . . . .32 AMD . . . . . . . . . . . . . . . . . .37 Arkema . . . . . . . . . . . . . . .22 Arpa-E . . . . . . . . . . . . . . . .49 Atlas Copco . . . . . . . . . . . .28 ccB Barrault Recherche . . . . .28 Bosch . . . . . . . . . . . . . . . . .28 Bouygues Construction .32 BPR Technologie. . . . . . . .23 ccC Carrier . . . . . . . . . . . . . . . .42 CEA . . . . . . . . . . . . 14, 18, 23 Celeste . . . . . . . . . . . . . . . .36 Cemagref. . . . . . . . . . . . . .50 Centre belge d’études nucléaires . . . . . . . . . . . . .14 Cnist . . . . . . . . . . . . . . . . . .42 CCNRS. . . . . . . . . . 10, 14, 42 Cofely . . . . . . . . . . . . . . . . .28 Conserval Engineering . .38 Converteam . . . . . . . . . . .22 ccD-E Dalkia . . . . . . . . . . . . . . . . .28 DSM Food Specialities . .28 EcoAct . . . . . . . . . . . . . . . .42 EdF . . . . . . . . . . . . . . . . . . .28 Enfinity. . . . . . . . . . . . . . . .28 ENIA Architectes . . . . . . .36 Exprimm . . . . . . . . . . . . . .28 ccF-G Ford. . . . . . . . . . . . . . . . . . .49 Front Edge Technology . .38 General Atomics . . . . . . . . 6 Giec. . . . . . . . . . . . . . . 42, 46 Google . . . . . . . . . . . . 10, 36 ccH Harvard University. . . . . .10 Heat2Power . . . . . . . . . . .25 Honda . . . . . . . . . . . . . . . .23 Hydra Tidal . . . . . . . . . . . .10 ccI Iddri . . . . . . . . . . . . . . . . . .42 IHI. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .49 Imperial College. . . . . . . .49 Industelec . . . . . . . . . . . . .28 Ines. . . . . . . . . . . . . . . . . . .18 Inra. . . . . . . . . . . . . . . . . . .22 Institut français du pétrole 50 Institut Fraunhofer18, 24, 50 Institut Georgia Tech . . .24 IRSN . . . . . . . . . . . . . . . . . .14
ccK-L Kepler. . . . . . . . . . . . . . . . .42 L’Oréal . . . . . . . . . . . . . . . .28 Laiterie Collet . . . . . . . . . .28 Leanergie. . . . . . . . . . . . . .38 Levant Power . . . . . . . . . .10 Lyonnaise des eaux . . . .23 ccM Menippos . . . . . . . . . . . . . .24 Mercks . . . . . . . . . . . . . . . .28 Microchip Technology . . .36 Microsoft . . . . . . . . . . . . . .32 Minatec . . . . . . . . . . . . . . .18 MIT . . . . . . . . . . . . . . . . . . .36 Mobalpa. . . . . . . . . . . . . . .28 ccN Nasa . . . . . . . . . . . . . . . . . .46 Naskeo Environnement .28 Netcraft . . . . . . . . . . . . . . .10 Novaled . . . . . . . . . . . . . . .39 NP Pharm . . . . . . . . . . . . .28 NREL . . . . . . . . . . . . . . . . . .18 ccO-P Opteor . . . . . . . . . . . . . . . .28 Opus Light. . . . . . . . . . . . .28 Panasonic . . . . . . . . . . . . .36 Plastic Omnium . . . . . . . .28 Polytech Nantes. . . . . . . . . 6 ccQ-R Quantum Glass . . . . . . . .39 Renault . . . . . . . . . . . . . . .42 Rhodia . . . . . . . . . . . . . . . .42 Rolls-Royce . . . . . . . . . . . . . 6 ccS Saint-Gobain. . . . . . . . . . .39 Schneider Electric25, 28, 39 Senova . . . . . . . . . . . . . . . .38 Sharp . . . . . . . . . . . . . . . . .28 Siemens . . . . . . . . . . . . . . .22 SKF . . . . . . . . . . . . . . . . . . .28 Solarwall . . . . . . . . . . . . . .28 Splitted-Desktop Systems 37 STMicroelectronics. . . . . .38 Sustainable Dance Floor 10 ccT Thales. . . . . . . . . . . . . . . . .46 Thalgo Cosmetics . . . . . .28 Thermacore . . . . . . . . . . .37 Toshiba. . . . . . . . . . . . . . . .22 ccU United Technologies Corporation . . . . . . . . . . . .49 Université de Colombia .49 Université de Liverpool. .49 Université de technologie de Chemnitz . . . . . . . . . . .24 Université de Würzburg .39 ccV-W Veolia . . . . . . . . . . . . . . . . .46 Weidmüller . . . . . . . . . . . .37
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PHOTO-TECH
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PHOTO-TECH
Le nouvel empire de l’éolien
imagine china
Eole a trouvé son nouveau royaume. Avec le tiers de la puissance installée en 2009, la Chine est désormais le premier marché mondial de l’éolien. En un an, l’ex-empire du Milieu a doublé sa puissance installée à 25,8 GW. Pour y parvenir, il s’est bâti une filière industrielle complète… en seulement cinq ans. À l’image de cette usine de Shandong Changxing, les 80 fabricants chinois rêvent à présent d’essaimer leurs technologies sur la planète entière.
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PHOTO-TECH
Une technologie atomique
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Non, vous n’êtes pas dans un vaisseau spatial de la Guerre des étoiles. Mais dans un tokamak. Son nom de code : DIII-D. À l’image du français Iter, cette installation expérimentale internationale doit permettre de comprendre les processus à l’œuvre dans une fusion nucléaire. Situé en Californie, DIII-D est porté par l’américain General Atomics.
Diète énergétique Ce prototype allemand à l’allure improbable a été conçu avec une obsession : la sobriété. Il a participé à la course Shell Eco-Marathon Europe, qui départage les candidats selon leur efficacité énergétique. Avec ses cellules solaires, il a parcouru pas moins de 275,8 km/kWh consommé. Mais, dans sa catégorie, ce résultat le classe… quatrième et bon dernier. Loin derrière les 652 km/kWh de la voiture française du Lycée Louis Pasquet d’Arles. Cocorico!
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Pénétrez en vidéo dans les coulisses d’une course à l’efficacité énergétique Shell Eco Marathon
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Extrême mécanique
abaca
abaca
Cette chambre à vide est l’un des derniers appareils de torture de Rolls-Royce. Le motoriste britannique a ouvert en mai à Dahlewitz (Allemagne) un centre d’essais de 7 000 m2. Fatigue, vibrations, résistance… ses moteurs à gaz y subiront, à travers une quarantaine de tests, des conditions mécaniques extrêmes. Deux des soixante-dix experts du centre inspectent ici les pales d’un moteur.
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Dansez sur moi et éclairez la piste grâce au système de Sustainable Dance Floor.
LE BLOC-NOTES DE LA RÉDACTION tème expérimenté au centre de Toulouse. Selon la municipalité de la ville rose, il préfigure l’éclairage urbain de demain. Un éclairage écologique, sans émission de gaz à effet de serre, puisqu’il n’utilise que l’énergie du piétinement. En traversant le passage, les piétons provoquent des vibrations converties en électricité par une génératrice électrique. Il produit ainsi jusqu’à 50 W pour alimenter, sans aucune autre source d’énergie, un réverbère et une rampe d’éclairage à Led. Ce passage a été mis au point en partenariat avec la société néerlandaise Sustainable Dance Floor, dont la technologie équipe déjà une discothèÔ Toulouse ! Ton trottoir n’est que à Rotterdam pour l’aliplus éventré sur les tuyaux mentation de l’éclairage de du gaz mais produit du courant. la piste de dance. Le mètre carré produit jusqu’à 120 W et revient à 3 500 euros. Ce plancher récupérateur d’énergie pourrait trouver application dans les infrastructures urbaines (trottoirs, gares, aéroports, centres commerciaux…). Avec le potentiel de réduire de moitié la consommation d’électricité de l’éclairage public à l’horizon 2020, selon la municipalité toulousaine. cm
LE RÉSEAU ÉLECTRIQUE EN PANNE L’état du réseau d’électricité en France ne cesse de se dégrader. Telle est la conclusion du rapport d’étape de la Commission de régulation de l’énergie. Le temps de panne aurait ainsi augmenté de moitié en 10 ans. Les zones rurales sont particulièrement touchées. Responsable? La stratégie d’investissement d’EdF qui privilégie l’expansion à l’international sur l’entretien du réseau en France.
CARTON
ROUGE
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CARBONÉ. L’automobile vient au secours du climat.
Des chercheurs de l’université anglaise de Bath veulent convertir en carburant le CO2 de l’atmosphère. Pour y parvenir, leur projet consiste à trouver des matériaux poreux capables d’absorber le dioxyde de carbone. Et utiliser des micro-organismes pour produire de l’électricité ou de l’hydrogène. En avalant les kilomètres, les voitures offriraient ainsi une solution au changement climatique. Sauf que le procédé miracle reste entièrement à inventer. cm
SECOUSSES. Ne craignez pas les reliefs du macadam pour votre voiture.
Ils ont du bon. Avec la technologie développée par la société américaine Levant Power, les amortisseurs ne font pas que les absorber. Ils les transforment aussi en courant. De quoi réduire de 1,5 à 6 % la consommation de carburant. Et pas besoin de changer d’amortisseurs pour en profiter. Ce système de récupération d’énergie par génératrice électrique s’installe sur les amortisseurs actuels chez un garagiste. Il va être testé cet été sur des camions, bus et autres types de véhicules. cm
TRAIN-TRAIN. Et si le routinier métro-boulot-dodo permettait de produire de l’énergie ?
C’est une piste envisagée par la ville de Madrid. Systèmes de freinage, éclairage… Chaque jour, les rames et usagers du métro dissipent des calories, en partie captées par le sous-sol. Grâce à une pompe géothermique, l’idée est de les récupérer pour chauffer et climatiser les quais, bureaux et espaces commerciaux des stations madrilènes. Astucieux, non ? cm
FRANQUIN ; LOOKATSCIENCES ; GETTY ; D.R.
LUMINEUX. Un porche éclairé par le piétinement des passants ! Tel est le sys-
LA PENSÉE DU MOIS J’ai inventé une lampe de poche qui fonctionne à l’énergie solaire, elle n’a qu’un dernier défaut, elle ne marche qu’en plein soleil. Extrait de la bande dessinée Gaston Lagaffe d’André Franquin
WEB
REVUE FLOTTEURS. Composée de bois,
je flotte à la surface de l’eau. Qui suis-je ?
Il était un p’tit prototype qui n’avait ja, ja, jamais navigué ohé ! ohé !
Une barque ? Non, une hydrolienne. Exit l’acier et les composites : le norvégien Hydra Tidal développe une turbine flottante, à axe horizontal, dont les pales sont en bois de pin. Pour l’instant, cette technologie n’est pas aboutie. Hydra Tidal vient juste d’obtenir des fonds pour confronter sa machine aux éléments naturels. Et vérifier que ses pales en bois résistent aux courants marins. cm
PIQUANT.
Où recharger son téléphone portable en plein désert ?
Des chercheurs du CNRS ont une réponse : ils ont produit de l’électricité à partir d’un cactus. Une biopile, insérée dans la plante, a converti en courant électrique l’énergie chimique issue de la photosynthèse. Comme les molécules mises en œuvre, l’oxygène et le glucose, sont aussi naturellement présentes dans le corps humain, l’idée est à terme d’insérer ce type de biopile sous la peau. Par exemple pour des capteurs autonomes sous-cutanés mesurant la glycémie chez les diabétiques. cm
Dans le labo, il y a des cactus Aïe aïe aïe, ouille, aïe aïe aïe I & T se pique de le savoir.
cc FABRICE FROSSARD
Limiter la voracité du Web
Avec l’eau, l’énergie est le principal enjeu des années à venir. Si tout le monde en est conscient, pour autant notre consommation s’accroît quasiment chaque jour. Surtout si vous utilisez Internet extensivement. À titre d’exemple, une requête Google émet 14 g de CO2 selon les calculs d’un jeune physicien de Harvard University, Alex Wissner-Gross. Soit autant qu’une bouilloire à thé ou une ampoule électrique en une heure. Il a fondé http://www.co2stats.com/, un service qui se propose de vous aider à réduire l’empreinte carbone de votre site Web. Selon ses calculs, l’affichage d’une page classique émet environ 0,2 g de carbone. Sachant qu’en avril 2010 il y avait sur la toile 205368103 serveurs Web recensés par Netcraft (http://news.netcraft.com/), l’impact sur la planète est considérable. Pour finir, en juillet 2008, Google indexait 1 000 milliards de pages. Pour alimenter en énergie tous ces sites et serveurs, les ressources mobilisées sont énormes. Et, si rien n’est fait, dans 25 ans, Internet devrait consommer autant d’énergie que l’humanité tout entière en 2008. Pour les ingénieurs des fabricants de serveurs et de centres de données, l’enjeu est désormais de réduire le PUE (power usage effectiveness) : en moyenne, un datacenter normal affiche un PUE de 2, soit pour un watt consommé par le serveur, deux watts sont consommés car il faut alimenter aussi les systèmes de refroidissement et autres équipements techniques. Un datacenter moyen consomme en moyenne 4 MWh par an, autant que 3 000 foyers… Pour réduire la consommation d’Internet, les constructeurs ont créé le consortium green grid, et sa déclinaison, la green grid academy pour aider à bâtir un datacenter plus sobre, via un panel d’outils idoines : http://www. thegreengrid.org/academy.aspx. D’autres sites fournissent de l’information sur la question comme le site GreenIT.fr ou searchdatacenter.com. Une chose à garder à l’esprit : en multipliant les requêtes de recherche sur Google, vous contribuez au réchauffement de l’atmosphère. ffrossard@industrie-technologies.com
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enquête
Les défis du réacteur nucléaire du futur
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entretien
Jean Therme Directeur délégué aux énergies renouvelables du CEa «La révolution viendra des nanomatériaux»
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innovations
La sélection d’Industrie et Technologies
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PRODUCTION
Un monde plein de ressources Le pétrole n’a pas encore livré sa dernière goutte. Le soleil semble inépuisable et la biomasse sous-exploitée. Charbon, mer, éolien… L’étendue des sources d’énergie disponibles sur Terre reste insoupçonnée, tout comme les perspectives d’innovations dans un secteur – l’énergie – en pleine métamorphose. À l’heure de la diversification du mix énergétique, sources émergentes et traditionnelles gardent un point commun : une recherche et développement toujours plus active. Tandis que le nucléaire développe le réacteur du futur, le photovoltaïque prend des formes toujours plus variées. Dans ce florilège d’inventions, Industrie et Technologies a pioché des projets astucieux, prometteurs ou ambitieux. Cette sélection esquisse le panorama énergétique de demain. À explorer sans modération. cm DIVERSIFICATION La part du renouvelable dans la production électrique devrait atteindre 22,6 % en 2030 selon l’AIE.
Le pétrole n’a pas dit son dernier mot. La Libye compte, par exemple, porter sa production à 2,5 millions de barils par jour à l’horizon 2015. Pour les pays industrialisés, l’heure est toutefois à la diversification des sources d’énergie.
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PRODUCTION
Le fonctionnement, en vidéo, d’un incinérateur expérimental de déchets nucléaires
ENQUÊTE
Les défis du réacteur nucléaire du futur La filière nucléaire développe la prochaine génération de réacteurs qui succédera à l’ePr. L’enjeu est de taille : optimiser les ressources en uranium et recycler les combustibles usés. il faudra d’abord réaliser des innovations de rupture. Mise au point sur les obstacles à lever et les voies technologiques explorées en recherche.
PROTOTYPE Le CEA prévoit pour 2020 le démarrage d’un réacteur expérimental de nouvelle génération.
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Baptisé Astrid, le prototype français de réacteur de quatrième génération à neutrons rapides au sodium devrait voir le jour en 2020.
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l’atome : le stockage des matières radioactives et la pénurie annoncée de combustible. Industrie et Technologies a poussé la porte des laboratoires qui développent le nucléaire du futur. Notre constat : un saut technologique sera indispensable. Tour d’horizon des chantiers pour bâtir le réacteur de demain.
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Des neutrons rapides à dompter
Le constat est sans appel. De la mine d’uranium à la centrale nucléaire, « le rendement massique des réacteurs actuels n’est que de 0,5 % », calcule Christophe Béhar, directeur de l’énergie nucléaire au CEA. La faute au fluide caloporteur du réacteur, l’eau. En ralentissant les neutrons de la réaction nucléaire, elle limite drastiquement l’étendue des éléments fissibles, essentiellement à l’uranium 235. Pour étendre l’utilisation des ressources, notamment à l’uranium 238, qui compose plus de 95 % du combustible, le réacteur du futur devra maîtriser les neutrons rapides. Comprenez des neutrons un million de fois plus énergétiques qu’aujourd’hui. Pour y parvenir, il faudra trouver un nouveau caloporteur, capable de refroidir le réacteur sans freiner les neutrons. Quatre candidats sont en lice : le sodium, le plomb, l’hélium gazeux et les sels fondus. En France, le sodium possède une nette
longueur d’avance. C’est la seule technologie suffisamment mature pour que le CEA dispose de son prototype en 2020, échéance fixée par une loi de 2006. Ses propriétés d’échange thermique sont meilleures que l’hélium gazeux ou le plomb, sa densité voisine de l’eau, l’actuel caloporteur. Mais l’avance du sodium tient surtout à des raisons historiques. Il bénéficie des retours d’expérience des réacteurs expérimentaux, désormais à l’arrêt, Phenix et Superphenix.
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La sûreté du réacteur à garantir
Malgré sa relative maturité, la voie sodium n’est pas exempte de verrous technologiques. D’abord parce que le sodium est très réactif avec l’eau. Or, l’énergie produite par la réaction nucléaire est généralement transmise, via des échangeurs de chaleur, du caloporteur (ici le sodium) jusqu’à un circuit d’eau alimentant une turbine à vapeur. « Pour éviter toute réaction incontrôlable entre le sodium et l’eau, il faudra renforcer la tuyauterie ou remplacer l’eau par un gaz, comme l’hélium ou l’azote », prévoit François Gauché, chef du programme Réacteurs de quatrième génération au CEA. Le choix final sera un compromis entre sûreté et rendement énergétique. Le sodium réagit aussi violemment
D.r.
ous sommes en 2050 et les réacteurs nucléaires recyclent en boucle leurs déchets pour s’autoalimenter en combustible. Utopique ? Ce projet est pourtant réel. Le CEA prévoit le démarrage en 2020 d’un réacteur de quatrième génération, la technologie appelée à remplacer vers 2040 les EPR (réacteur pressurisé européen) aujourd’hui en construction. En recyclant ses déchets, ce réacteur du futur est censé résoudre les deux sempiternels casse-tête du monde de
Chargement du cœur du réacteur à la centrale Phenix de Marcoule dans le Gard.
ccGiovanni Bruna adjoint à la direction de la sûreté des réacteurs de l’irsn
« une exigence de sûreté accrue »
cea ; irsn
Quatre objectifs ont été donnés aux réacteurs du futur : des économies sur les combustibles ; la possibilité de produire de la chaleur industrielle et de l’hydrogène ; des coûts compétitifs ; une exigence de sûreté accrue par rapport aux réacteurs actuels et aux futurs ePr. aucune technologie ne répondra aux quatre points avec la même rigueur. Les réacteurs à neutrons rapides seront les plus économes en combustibles... à condition de garantir leur sûreté. en 1995, le réacteur japonais de Monjou a subi une fuite de sodium, entraînant une réaction exothermique avec l’air. après quinze ans d’arrêt, ce réacteur à neutrons rapides vient tout juste de redémarrer. sur le prototype français superphenix, un corps migrant avait obstrué l’alimentation en sodium, au démarrage donc sans gravité. Mais, en fonctionnement réel, un tel incident pourrait conduire, en une minute, à la fusion du réacteur.
avec l’air. « Contrairement aux réacteurs actuels, le combustible devra être chargé sous confinement et non à l’air libre », prévient Giovanni Bruna, adjoint à la direction de la sûreté des réacteurs à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Problème : quand il est chaud, le sodium est opaque. « Les manipulations auront donc lieu à l’aveugle. Il faudra s’assurer que le combustible est placé au bon endroit », ajoute-t-il. Et développer les automatismes adéquats. Dans le cœur du réacteur, chaque détail compte. Le combustible sera enfermé dans une enceinte, le sodium rentrant par le pied et sortant par le sommet. « En cas d’obstruction par un corps migrant, l’alimentation en réfrigérant risque d’être interrompue. Le combustible pourrait alors fondre en quelques secondes et le cœur du réacteur en moins d’une minute », poursuit Giovanni Bruna. Une solution serait par exemple de détecter la surchauffe en repérant, par acoustique, la formation des bulles de sodium… À condition d’isoler leur bruit dans une centrale nucléaire en fonctionnement. Pour sonder les pièces par ultrasons, dès la conception du réacteur, le nombre de parois devra
être réduit, car elles créent des échos. Un « détail » parmi d’autres sur la longue route du réacteur de demain. « Une réaction nucléaire délivre une énergie considérable, deux cent millions de fois supérieure à une réaction chimique ordinaire », rappelle Alex Mueller directeur scientifique adjoint de l’Institut de physique nucléaire et des particules du CNRS. Dans ces conditions, le choix des matériaux est crucial pour la sûreté. D’autant qu’avec les neutrons rapides, ils subiront un bombardement plus intense qu’aujourd’hui. Notamment les gaines, ces tubes qui contiennent les pastilles de combustible. L’alliage de zirconium qui, pour l’instant, les compose résistera-t-il aux nouvelles sollicitations neutroniques? Le risque serait que les gaz émis lors de la fission augmentent la pression jusqu’à briser les gaines. Plus généralement, « nous ajusterons la composition des assemblages combustibles pour éviter, en cas de fuite ou d’ébullition du sodium, des sauts de réactivité, qui pourraient mener à la fusion du réacteur », assure François Gauché, du CEA. Pour comprendre le comportement exact des matériaux et JUIN 2010ccHORS-SéRIE
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Le stockage des déchets reste incontournable
des combustibles, le CEA devrait disposer en 2014 du nouveau réacteur expérimental Jules Horowitz. Situé sur son site de Cadarache (Bouches-du-Rhône), il prendra le relais du réacteur Osiris du CEASaclay (Essonne) datant des années 1960. Le réacteur RJH reconstituera les conditions extrêmes des réacteurs actuels (à eau pressurisée) mais aussi futurs, quels que soient leurs fluide caloporteurs.
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Le recyclage à mettre au point
C’est « le » point noir de la filière nucléaire et un axe de recherche majeur. Pour réduire la radioactivité des combustibles usés, l’idée est de les recycler. Pour l’instant, le plutonium l’est en partie… mais une seule fois. Pour le réutiliser en boucle et exploiter d’autres déchets, comme les actinides mineurs (neptunium, curium, américium…), la technologie à neutrons rapides est indispensable. Elle permettrait, par réaction nucléaire, de transformer ces éléments hautement radiotoxiques en d’autres moins dangereux, comme le rubidium ou le césium. L’objectif est de réduire la durée de dangerosité de ces déchets du million d’années à seulement… trois siècles. Selon les spécialistes, une telle réaction est maîtrisée en laboratoire. Mais, pour passer à l’échelle industrielle, de multiples questions restent en suspens. Les appareillages existent-ils ? Jusqu’où auto-
ccEMPLOI
Pénuries d’ingénieurs Globalement, la filière nucléaire manque d’ingénieurs pour compenser les départs en retraite. Dans les technologies du futur, le risque de pénurie est particulièrement criant. Le cea s’est ainsi fixé 2020 comme date butoir. au-delà, il pourrait ne plus disposer d’experts dans les nouvelles générations de réacteurs. « Pour les neutrons rapides, nous disposons de 80 à 100 spécialistes. Mais seule une quinzaine maîtrise vraiment l’ensemble de la technologie », évalue christophe Béhar, directeur de l’énergie nucléaire du cea. De quoi susciter des vocations ?
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HORS-SéRIEccJUIN 2010
Les déchets nucléaires sont placés dans des fûts métalliques et entreposés mécaniquement dans des centres de stockage.
c Gare au mirage écologique. L’éventuel recyclage, aujourd’hui presque inexistant, des combustibles usés, ne résoudra pas l’épineuse question du stockage des matières radioactives. Les combustibles usés ne représentent qu’une infime partie, en volume, des déchets nucléaires. s’ils concentrent l’essentiel de la radioactivité, leur dangerosité ne pourra, après traitement, qu’être diminuée. Pas supprimée. Pour les plus radiotoxiques, la durée de confinement serait réduite du million d’années à quelques siècles. Le stockage s’en trouverait certes facilité, mais resterait indispensable. il faudra trouver comment confiner ces déchets, en attendant que leur radioactivité baisse, et concevoir la métrologie pour les surveiller.
matiser le procédé de recyclage ? Quel complément de neutrons nécessaire. Le projet européen Eurotrans prévoit serait son impact sur le prix du kilowatpour 2020 un prototype de cette technotheure électrique ? À l’échelle industrielle, le recyclage, en logie. Un modèle réduit vient d’ailleurs particulier des actinides mineurs, pose d’être inauguré par le CEA, le CNRS et le Centre belge d’étusurtout un risque de fusion du réacteur. « Cet POUR LE RÉUTILISER des nucléaires. Il perEN BOUCLE mettra de tester le couaccident surviendrait si la D’AUTRES DÉCHETS, plage entre un réacteur réaction produit beaucoup LA TECHNOLOGIE À plus d’énergie qu’elle n’en NEUTRONS RAPIDES et un accélérateur de consomme. Pour l’éviter, EST INDISPENSABLE. particules. Pour passer à l’échelle industrielle, la proportion d’actinides mineurs réintroduits dans le combustible il faudra toutefois assurer la stabilité de ne devra pas dépasser 2 à 3 % », préconise l’accélérateur. Son système de régulation devra éviter toute interruption du faisAlex Mueller, du CNRS. Pour atteindre une proportion de 50 %, ceau de neutrons. Dans la communauté les scientifiques envisagent, en parallèle, scientifique, le débat sur la pertinence un autre procédé de recyclage. Un réac- d’une telle technologie n’est pas encore teur à neutrons rapides dédié au traite- tranché. Le compte à rebours est pourtant ment des déchets, pas à la production enclenché : les réacteurs actuels accumud’électricité. Son dimensionnement l’em- lent déjà des déchets à recycler. cm pêcherait d’entretenir, à lui seul, la réaction nucléaire. Il serait assisté d’un accé- ccTHOMAS BLOSSEVILLE lérateur de particules, qui lui fournirait le tblosseville@industrie-technologies.com
aFP
PRODUCTION
Comment le CEA prépare les matériaux et combustibles nucléaires du futur
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cc SES 5 DATES
1990 Entre au CEA 1999 Prend la direction du CEA-Leti 20 0 0 Devient directeur du centre CEA de Grenoble et lance le projet Minatec 20 0 3 Devient, en plus, directeur de la recherche technologique du CEA 20 10 Est nommé directeur délégué aux énergies renouvelables ccCEA
Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives Avec 16 000 salariés et 10 centres de recherche, le CEA intervient dans les énergies décarbonées, la défense, les technologies pour l’information et pour la santé. En 2009, son budget a atteint 4 milliards d’euros, dont 2,4 pour les programmes civils.
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Les ambitions du CEA dans les énergies renouvelables par son administrateur général, Bernard Bigot
PRODUCTION
cc JEAN THERME DIRECTEUR DÉLÉGUÉ AUX ÉNERGIES RENOUVELABLES DU CEA
La révolution viendra des nanomatériaux Depuis janvier, Jean Therme est le « monsieur énergies renouvelables » du CEA, un poste créé pour porter les nouvelles ambitions de l’organisme public de recherche. L’objectif ? Contribuer au développement, en France, des nouvelles technologies de l’énergie. Alors que l’Asie monte en puissance, Jean Therme fixe la feuille de route pour combler le retard tricolore dans le renouvelable. Il décrypte les innovations de rupture incontournables.
T. GOGNY POUR INDUSTRIE ET TECHNIQUES
La France possède une industrie nucléaire de pointe. Dans le renouvelable, est-elle vouée aux seconds rôles ? Jean Therme : La France est clairement en
position de rattrapage. Dans les années 1980, elle était leader mondial dans le photovoltaïque avec les États-Unis. Mais, contrairement au Japon et à l’Allemagne, elle n’a pas cru au renouvelable. Elle peut encore combler son retard. Pas dans l’éolien, déjà trop mature. Plutôt dans le solaire, la biomasse ou la pile à combustible. Il faudra aller vite. Désormais, l’Asie impose son rythme et sa production en grande série à bas coût. Chine, Corée du Sud, Taïwan… Même si des doutes subsistent sur leurs standards de qualité, ces pays vont rapidement monter en gamme. Tout se jouera dans les deux prochaines années. Dans cette course mondiale, la France a-t-elle les moyens d’innover ? J. T. : La France manque de centres de
recherche de dimension mondiale. Pour rivaliser avec les Fraunhofer allemands ou le laboratoire américain NREL, il faut atteindre une taille critique de 400 chercheurs. L’Institut national de l’énergie
solaire, fondé à Chambéry en 2005, en compte déjà 200 et bientôt le double. La France devra créer des centres équivalents pour les autres technologies. Le grand emprunt national prévoit cinq à dix instituts d’excellence sur les énergies décarbonées. Le CEA sera candidat pour le solaire, la biomasse, le stockage de l’électricité, les véhicules électriques et hybrides. D’où viendront les sauts technologiques ? J. T. : Pour s’imposer, la France devra
industrialiser les composants cœurs, comme les batteries et les piles à combustibles. Mais, pour améliorer leurs performances, la révolution viendra des nanomatériaux : nanopoudres dans les batteries, nanofils dans les cellules solaires, nanocatalyseurs dans les piles à combustible, pour réduire la quantité de platine. Des innovations de rupture seront également incontournables au niveau système, en particulier dans l’habitat et les transports. C’est pourquoi le CEA aura des contributions depuis l’amont, les matériaux, jusqu’aux démonstrateurs, indispensables pour passer du prototype à l’usage grand public.
Le CEA, père du nucléaire français, se détourne-t-il de l’atome ? J. T. : Non, le CEA reste focalisé sur l’élec-
tricité sans émission de gaz à effet de serre. Mais cette année, sur décision de l’État, il a changé de nom. Il a été rebaptisé Commissariat à l’énergie atomique… et aux énergies alternatives. Aux côtés du nucléaire, les nouvelles technologies de l’énergie deviennent donc une mission officielle du CEA. Elles faisaient déjà l’objet de travaux de recherche. Mais cette métamorphose nous ouvre des perspectives de collaborations avec les industriels. Côté production d’électricité, le CEA explore deux voies, l’une centralisée avec le nucléaire et l’autre répartie avec le solaire. Nous n’irons pas dans l’éolien. Par contre, nous développerons des solutions pour adapter la production électrique à la demande. Les industriels, quel qu’ils soient, ont aussi souvent besoin d’améliorer l’efficacité énergétique de leurs produits ou de les alimenter en énergie décarbonée. Le CEA travaille, par exemple, sur l’utilisation de batteries lithium-ion dans les appareils nomades ou sur des volets automatiques communicants et autonomes en énergie. Les initiatives se multiplient aussi pour bâtir une industrie photovoltaïque française. Quelle technologie privilégier ? J. T. : Face au standard en silicium cris-
tallin, les couches minces émergent. JUIN 2010ccHORS-SÉRIE
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PRODUCTION
Biocarburants : cap sur la deuxième génération c À Bure-Saudron, dans la HauteMarne, le CEA lance cette année un projet pilote pour produire 23000 tonnes par an de biocarburants de deuxième génération. L’objectif sera de prouver la faisabilité technique et économique d’une chaîne complète: collecte puis conditionnement de la biomasse, gazéification, traitement des gaz et conversion en carburant. Après une phase d’étude en 2010,
la construction de l’installation débutera l’an prochain pour une exploitation à partir de 2015. Comme matière première, le démonstrateur utilisera les ressources forestières et agricoles locales. Pour améliorer le rendement du procédé, il expérimentera l’introduction d’hydrogène lors de la synthèse de carburant. Outre le CEA, plusieurs industriels participent au projet, dont le maître d’œuvre Cnim.
Mais le silicium a encore un grand avenir. Il ne manquera pas de matière première et bénéficiera des retours d’expérience de l’électronique. De leur côté, les couches minces ont tout à prouver. Le tellure de cadmium soulève des craintes pour son impact environnemental. Le cuivreindium-sélénium pour son approvisionnement. Ces différentes technologies n’auront de toute façon pas les mêmes débouchés. Les grandes toitures et les centrales au sol privilégieront les couches minces. Quant au silicium cristallin, il ira sur les habitations, où ses meilleurs ren-
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dements – entre 17 et 22 % – rentabiliseront des coûts d’installations plus élevés. Dans tous les cas, le principal défi sera de grappiller des pourcentages de rendement. En 30 ans, on a gagné seulement 5 %. Un sacré défi pour l’innovation ! Les solutions de stockage de l’électricité seront-elles prêtes à temps pour déployer des énergies intermittentes ? J. T. : Les batteries lithium-ion seront com-
pétitives dans les trois ans. Elles seront utilisées pour stocker l’électricité durant 24 heures. Au-delà, pour des durées de l’or-
L’avènement de la voiture électrique est annoncé. Après un siècle d’essais avortés, pourquoi percerait-elle enfin ? J. T. : La batterie lithium-ion est une vraie
rupture technologique. Elle offre enfin de l’autonomie à la voiture électrique. Les constructeurs automobiles promettent la sortie de vingt à trente modèles dans les deux ans. Historiquement, les premières voitures auraient déjà pu être électriques. Mais pendant 100 ans, on est resté aux batteries au plomb. Le renouveau est venu de l’électronique portable, même si l’échelle y est totalement différente : 70 g de batteries, contre 250 kg pour une voiture. Coût, sécurité, fiabilité... La vraie batterie pour automobile reste certes à inventer. Sa densité énergétique est encore cent fois inférieure à celle de l’essence. Mais nous n’en sommes qu’à la première génération de voiture électrique. Ensuite, viendront de nouveaux concepts. L’automobile basse consommation sera deux fois moins lourde. Plus compacte, elle sera truffée de capteurs pour anticiper et éviter les accidents, plutôt que de leur résister. L’hydrogène est aussi promis à un grand avenir. Reste à savoir à quelle échéance… cm cc PROPOS RECUEILLIS PAR THOMAS BLOSSEVILLE tblosseville@industrie-technologies.com
CNIM
En Haute-Marne, cette future unité pilote devrait fournir 23000 tonnes de biocarburants de deuxième génération. Son exploitation est prévue à partir de 2015.
dre de la semaine, il faudra développer d’autres technologies. Le CEA privilégie par exemple la production d’hydrogène à l’air comprimé. Nous considérons aussi la biomasse comme une solution de stockage. Qu’elle provienne d’une source renouvelable ou non, l’électricité pourra en effet être utilisée pour gazéifier la biomasse et produire du biocarburant. Mais le stockage passera en grande partie par une gestion efficace du réseau. En optimisant le parcours des électrons en temps réel, le smart grid, ou réseau électrique intelligent, sera une forme de stockage instantané. Lui ne verra pas le jour avant dix à vingt ans. À elle seule, la première phase – le changement des compteurs électriques – demandera au moins sept ans.
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production
Les priorités de Converteam pour alléger les éoliennes off-shore
INNOVATIONS Nomade La micropile à combustible
Toshiba a lancé une micropile à combustible au méthanol direct sous la forme d’un chargeur de poche: le Dynario. De la taille d’un paquet de cigarettes (150x21x74,5 mm) et d’un poids de 280 g, il ravitaille téléphones mobiles, baladeurs numériques et autres terminaux portables via un câble USB. Avec son réservoir de méthanol de 14 ml, il génère assez de puissance - près de 2000 mAh pour charger deux appareils. L’électricité est produite par réaction chimique entre l’hydrogène du méthanol et l’oxygène de l’air. cm
Éolien La plus grande ferme off-shore
Situées en mer du Nord, les 91 éoliennes de Siemens génèrent une puissance de 210 MW.
Une ferme d’éoliennes off-shore a été mise en service fin 2009 au large du Danemark, en mer du Nord. Composée de 91 éoliennes de Siemens, elle génère une puissance de 210 MW, suffisante pour alimenter en électricité 200 000 foyers. Chaque turbine pèse 300 tonnes et s’élève à 100 m au-dessus du niveau de la mer. cm
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HORS-SéRIEccJUIN 2010
Dans la biomasse, tout est bon ! À l’instar des raffineries de pétrole, les biocarburants auront leurs bioraffineries.
L’objectif est le même : valoriser toutes les fractions de la matière première pour fabriquer non seulement des biocarburants mais également des produits de valeur. Ce concept constitue l’objet du projet européen Biocore (Biocommodity Refinery). Lancé dans le cadre du 7 e programme-cadre de recherche et développement, il bénéficie d’un budget de 20,3 millions d’euros, dont un financement de 13,9 millions d’euros de la Commission européenne. Il rassemble dix entreprises, dont le chimiste Arkema, une ONG et treize organismes publics de recherche. Particularité : il se concentre sur la deuxième génération de biocarburants et sur les coproduits qui peuvent être associés à leur synthèse. Il s’appuie sur une expertise industrielle bien réelle, puisque c’est sur le site européen pionnier d’Arkema à Bazancourt (près de Reims), l’une des bioraffineries de première génération les plus avancées. « Le site de Bazancourt est pour l’instant centré sur le raffinage de l’amidon pour produire de l’éthanol. Biocore vise à passer à la génération suivante, en privilégiant la recherche de nouveaux itinéraires de transformation de la biomasse », précise, Michael O’Donohue, directeur de recherche à l’Inra et coordinateur du projet. Clé de cette nouvelle approche : le procédé Organosolv, qui permet de séparer efficacement les différentes familles physico-chimiques contenues dans les produits végétaux (lignine, cellulose et hémicelluloses). Il ouvre la voie à l’utilisation non seulement des graines comme dans les biocarburants de première génération mais également de la plante entière. cm
Le projet Biocore s’appuie sur l’expertise industrielle du site européen d’Arkema à Bazancourt (Marne).
Une station gazière au fin fond des océans Est-ce la fin des plates-formes gazières off-shore ? C’est, en tout cas, ce que laisse
penser un projet de station au large de la Norvège, car elle sera… sous-marine. Elle extraira le gaz directement au fond de l’eau, à mille mètres de profondeur. Puis l’acheminera par 120 kilomètres de tuyaux jusqu’à la terre ferme. Pour réaliser cette prouesse, le français Converteam fabriquera quattre compresseurs de 17 MW résistant à une pression ambiante de 100 bar et une température de 4 °C. Cha-
cun intégrera son propre moteur à haute vitesse (12 000 tours/min), avec couplage direct pour limiter les risques de casse mécanique. Davantage que la tenue à la pression, le principal défi porte en effet sur la fiabilité. L’installation devra fonctionner pendant cinq ans sans maintenance. L’électronique de puissance sera mise à l’abri dans un caisson en acier, qui contiendra un circuit d’eau désionisée pour la refroidir. Un premier exemplaire de la technologie est à l’essai, pour l’instant en piscine. cm
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cc EN BREF
production
De la chaleur à puiser dans les égouts Récupérer de la chaleur dans des zones inexploitées comme les égouts. C’est un objectif
atteint pour la société d’ingénierie BPR Technologie qui a développé une solution “degré bleu” à partir d’un brevet déposé par un certain Urs Studer. Les eaux usées sont naturellement chaudes. Entre 10 et 20 °C. Il suffit de placer dans les canalisations souterraines un échangeur thermique constitué d’un plancher et d’un circuit d’eau fermé. Ce circuit se réchauffe au contact des eaux usées. Il transporte les calories captées à une pompe à chaleur qui peut alimenter les bâtiments en chaleur. « Avec 200 mètres de canalisation, on peut chauffer l’équivalent de 400 logements » estime Bernard Saunier, le président de BPR Technologie. Une vingtaine de systèmes sont déjà installés en Suisse et en Allemagne. Selon la Lyonnaise des eaux chargée de commercialiser en France cette technologie, la mise de départ reste élevée mais les coûts d’exploitation sont plus faibles qu’avec un chauffage thermique classique. cm
cc EN BREF
Automobile Une pompe solaire à hydrogène
Alimentée par l’énergie solaire, cette station produit de l’hydrogène destiné au ravitaillement des voitures électriques.
Honda expérimente à Los Angeles une station pour la production d’hydrogène. Elle est destinée au ravitaillement à domicile des véhicules électriques à pile à combustible. Capable de produire 0,5 kg d’hydrogène en huit heures, elle est alimentée par l’énergie solaire grâce à ses panneaux photovoltaïques d’une puissance de 6 kW. cm
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Réacteur Le combustible nucléaire du futur
Un circuit d’eau fermé placé dans les égouts capte les calories des eaux usées.
Quel combustible alimentera les futurs réacteurs nucléaires? Pour remplacer l’oxyde d’uranium, le CEA teste le carbure et le nitrure d’uranium. Meilleurs conducteurs de chaleur, ils pourraient supporter des puissances plus élevées. Pour l’instant, le CEA les soumet à des sollicitations thermiques, mécaniques et neutroniques extrêmes. Puis les examine au micron près pour comprendre leur comportement sous irradiations. cm
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www.industrie-technologies.com I&T vous dévoile comment un virus du MIT décompose l’eau pour produire de l’hydrogène.
Des piles imprimables sur substrats souples
Cette pile souple (1 mm d’épaisseur et un poids de 1 g) fournit une tension de 1,5 V.
Imaginer une pile aussi mince qu’une feuille de papier, imprimable sur supports souples comme un motif sur un tissu ou un logo sur un T-shirt. En développement à l’insti-
tut Fraunhofer, en Allemagne, en coopération avec l’université de technologie de Chemnitz et la société Menippos, elle ouvre de nouvelles applications. Imprimée sur une carte bancaire, par exemple, elle permettrait de disposer d’un petit écran pour afficher le solde à chaque transaction. Basée sur une anode en zinc et une cathode en manganèse, la pile fournit une tension de 1,5 V. Elle mesure moins de 1 mm d’épaisseur et pèse moins de 1 g. Grâce à sa fabrication par impression, elle pourrait coûter moins de 10 centimes d’euro. Autre avantage: elle ne comporte pas de substances chimiques dangereuses comme le mercure. Les chercheurs affirment que la technologie est au point au niveau laboratoire et que les premiers modèles commerciaux seront prêts pour le bêta test à la fin de l’année. cm
cc EN BREF
Solaire Le photovoltaïque passe au 3D
Cette cellule photovoltaïque flexible est composée de nanofils et d’une fibre optique.
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L’institut Georgia Tech a conçu une cellule photovoltaïque captant la lumière dans toutes les directions. Elle peut même la transporter avec une fibre optique. D’où qu’elle vienne, la lumière entre en contact avec l’un des fils nanométriques d’oxyde de zinc, revêtus d’un film photosensible, qui recouvrent la fibre optique. Pour l’instant, le rendement de conversion électrique est limité à 3,3 %. Les chercheurs espèrent atteindre 7 %. cm
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Découvrez en vidéo comment Nanosolar imprime ses cellules photovoltaïques.
production
Le retour de la machine à vapeur
Un interrupteur qui génère sa propre énergie
En profitant de la chaleur générée par les gaz d’échappement, le français Heat2Power propose une autre source d’énergie pour le bon vieux moteur à explosion. Il veut relier méca-
Créer un interrupteur électrique sans fil et sans pile ! C’est fait ! Schneider Electric a réalisé un
niquement un moteur à air chaud au traditionnel moteur thermique. Le principe de fonctionnement consiste à exploiter les différences de pression entre l’air chaud (porté à 600 °C au contact de l’échappement) et l’air froid afin d’actionner un piston. La montée en température permet de porter la pression de l’air chaud à 40 bar, niveau suffisant pour qu’un monocylindre de 500 cm3 installé sous le capot d’une berline 1,8 l essence produise une puissance de 7 kW à 4 000 tours/min. Selon ses concepteurs, le coût de production d’un tel dispositif pourrait tourner autour de 300 à 400 euros. Avec cette source d’énergie, ils assurent pouvoir réduire de 12 % la consommation d’une voiture essence. cm
Mesurez… Analysez… ...pour Agir
Le moteur utilise les différences de pression entre l’air chaud (échappement) et l’air froid.
prototype qui communique sans fil grâce au protocole radio ZigBee mais ne nécessite aucune pile pour son alimentation électrique. Il génère luimême le courant nécessaire à son fonctionnement par un procédé électromagnétique. Le fait d’appuyer sur le bouton, pour commander un système d’éclairage et autres appareils électriques, déplace un aimant. Ce mouvement induit, dans une bobine, un courant électrique utilisé opportunément par le module de communication ZigBee pour transmettre l’ordre de commande. Il ne s’agit pas du premier produit autoalimenté en énergie. Mais c’est le premier à combiner à la fois l’autogénération d’énergie et la communication sans fil ZigBee. cm
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enquête
Chassez les gaspis dans vos usines
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Laurent Schmitt Vice-président d’alstom Power Energy Management «Le réseau électrique intelligent, c’est un véritable écosystème» ccPAGE 32
innovations
La sélection d’Industrie et Technologies
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CONSOMMATION
Chaque watt vaut de l’or Plus que jamais, l’heure est à la maîtrise de la consommation d’énergie. Depuis longtemps, les industriels réinventent leurs produits et leurs process pour les rendre toujours moins énergivores. Des puces électroniques aux gigantesques datacenters, en passant par les téléviseurs, l’éclairage, l’électroménager, les voitures ou les moteurs électriques, cette course à l’efficacité constitue d’ailleurs un axe majeur d’innovation. Le moment est venu de passer à la vitesse supérieure en mettant de l’intelligence dans le réseau électrique pour mieux réguler les consommations à tous les niveaux, depuis les centrales de production jusqu’aux postes de consommation. Mais la réalisation de ce smart grid pose de nombreux défis. Dans les usines, la chasse aux watts inutiles s’inscrit dans la stratégie globale de compétitivité. avec à la clé, de bonnes économies financières. cm POTENTIEL Selon l’Ademe, l’industrie recèle un gisement d’économie d’énergie de 30% par rapport à sa consommation actuelle.
Port autonome du Havre. Éclairage, alimentation des appareils de levage pour la mise en place des conteneurs : à tous les niveaux il est essentiel de bien gérer l’efficacité énergétique du site.
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CONSOMMATION
Suivez les conseils de Claude Conrard de Solvay pour booster l’efficacité énergétique de vos usines.
ENQUÊTE
Chassez les gaspis de vos usines
Depuis le début des années 2000, la réduction de la consommation d’énergie est à l’ordre du jour dans l’industrie. Plus qu’une prise de conscience écologique, ce sont la réglementation et la volatilité des prix, combinées à des incitations financières, qui ont persuadé les industriels de prendre le sujet au sérieux. Suivez notre démarche pour rendre votre usine plus sobre.
REPÈRE L’industrie absorbe 15 % de l’énergie consommée en France.
e premier choc pétrolier de 1973 a lancé le programme électronucléaire français et les forages en eau profonde, mais il n’a pas mobilisé les industriels en faveur des économies d’énergie. Il a fallu attendre la création de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), en 1990, pour que s’affirme l’implication des acteurs économiques. À son tour la loi de programmation des orientations de la politique énergétique (POPE) de 2005, a créé les premiers outils d’incitation et de contrainte,
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Consommation d’énergie par kilogramme de produit Matériaux Brique Parpaing Béton cellulaire acier de construction Bois agglo plaqué Bois lamellé-collé Laine de verre Polystyrène Placoplatre Verre laminé Ciment
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Énergie nécessaire à la fabrication 0,834 kWh 0,255 kWh 0,689 kW/h 11,954 kWh 11,676 kWh 14,734 kWh 7,350 kWh 29,19 kWh 0,341 kWh 41,080 kWh 15,210 kWh
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comme les certificats d’économie d’énergie (CEE). Finalement, la « chasse au ø » est devenue un vrai paramètre de réduction des coûts et la maîtrise énergétique, une réalité économique. Industrie et Technologies décline pour vous les principales pistes d’action.
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Établir un bilan des consommations d’énergie
Pour s’engager dans la réduction de la consommation énergétique, il est souhaitable de se rapprocher de l’Ademe ou de ses relais (Association technique énergie environnement, centres techniques industriels, etc.) car il est important de suivre un cheminement balisé. Les experts préconisent d’établir un diagnostic global puis d’évaluer chaque installation produisant ou consommant de l’énergie. « Nos missions se déroulent dans la durée, selon une certaine progressivité qui exclut de travailler en situation de crise, précise Olivier Barrault, président de Barrault Recherche ». Ces interventions ont un coût qui peut se chiffrer en dizaines de jours/ingénieur. « Les audits peuvent être cofinancés à hauteur de 50 à 70 %, selon la taille de l’entreprise, commente Roland Gérard, chef adjoint du service entreprise et écotechnologies de l’Ademe. Nous pouvons également aider à l’acquisition d’équipements pour cal-
culer les consommations ». L’Ademe cite en exemple le dispositif mis en place en 2003 dans l’usine SKF de Fontenay-leComte (Vendée) dans laquelle un réseau de 150 capteurs collectant 300 informations traitées par le logiciel BarExpert a permis d’analyser les flux. « Une opération très rentable, avec des économies supérieures à nos prévisions », déclarait à l’époque Jean-Paul Nieres, alors responsable méthodes chez SKF.
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Optimiser la gestion énergétique
L’écoresponsabilité peut se gérer au sein même de l’entreprise. Orchestré par Barrault Recherche, le programme excellence énergétique de l’usine Bosch de Rodez (Aveyron) a été lancé en 2005, sur un objectif de réduction du CO2 de 15 % à l’horizon 2009 et une programmation par étapes, pilotée en interne. Le chantier éclairage, mené avec le cabinet Opus Light, a vu l’installation de tubes fluorescents T5 à ballast électronique (+30 % de durée, + 40 % d’efficacité, – 65 % de consommation, amortis en moins de deux ans) pour économiser 2000 MWh/an. « Le diagnostic instrumenté (financé à 50 % par l’Ademe) a ciblé les autres postes énergivores », explique Vincent Lamic, responsable du programme. La température des eaux de refroidissement pour les
Un projet de chaufferie biomasse est en cours de finalisation sur ce site SKF. Il permettra de réduire les émissions de CO2 de 3000 t/an.
SKF, bille en tête dans les économies d’énergie c Le site SKF de Saint-Cyr-sur-Loire (Indre-et-Loire) est en
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partenariat de gestion énergétique depuis 1987 avec Industelec (EdF) aujourd’hui intégrée dans Dalkia. Le prestataire assure toujours, sous contrat d’objectif, la production ou la distribution centralisée d’air comprimé, de gaz et d’électricité aux différentes unités de production du site. Les services généraux gardent cependant la main sur les programmes majeurs comme l’installation de variateurs sur les pompes électriques fournissant à la demande les fluides aux lignes de production (économie de 1,5 GWh/an) ou la modernisation de l’éclairage des ateliers (ballasts électroniques et variateurs automatiques). Un projet de chaudière biomasse de 2,9 MW est lancé pour produire 70 % des besoins de chauffage, en complément de la récupération de chaleur des compresseurs et frigorifiques. De quoi tenir les objectifs d’éco-énergie (–5 % par au minimum) de cette usine certifiée Iso 14001 depuis 1998. Les unités de production de roulements à billes SKF de ce site fonctionnent avec des process qui ne nécessitent plus d’apport de chaleur. En revanche, les machines raccordées à la centrale des fluides de coupe doivent refroidir les outillages avec de l’eau glacée.
machines a été relevée de 6 à 8 °C sans perte d’efficacité. Puis, la recherche des fuites et l’installation d’un compresseur à vitesse variable ont réduit et régulé la production d’air comprimé (économie: 2700 MWh/an). « Nous avons terminé 2009 sur un gain annuel de 6 900 MWh et nous progressons encore sur la consommation électrique, l’isolation thermique des ateliers, le recyclage des eaux chaudes et un projet de chaudière biomasse pour produire la vapeur », détaille encore Vincent Lamic. Alternative à la gestion en interne, le
facility management (FM) prôné par Dalkia, Opteor, Cofely, Exprimm, ou d’autres, propose la prise en charge globale des énergies, incluant audit et financement d’installation. « Nous privilégions ce type d’engagement car il est plus clair à exécuter puisque nous accédons, site par site, à toutes les données du problème », commente Christophe Fievez, directeur des marchés industriels chez Cofely. Ainsi, le contrat de performance énergétique (CPE) qui lie Dalkia à Alcan Packaging pour son usine de Chalon-sur-
Saône (Saône-et-Loire) fixe des objectifs de réduction de consommation de 27 % d’air comprimé, 70 % d’électricité et 12 % de gaz, la rémunération du prestataire intégrant 50 % du montant des économies supplémentaires réalisées. EdF Optimal Solutions, intervient depuis 2005 sur le site de DSM Food Specialities à Seclin (Nord) sous un contrat d’objectif de – 20 % d’énergie à l’horizon 2020. « Dans ce cadre, nous avons modifié deux compresseurs pour abaisser la température de 140 à 60 °C, récupérer l’air chaud, et réduire la consommation de gaz de 2,8 GWh/an. Notre investissement de 400 000 euros induit une économie de 77 500 euros par an », détaille Alain Rigazio, directeur d’agence EdF OS.
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Équiper le bâtiment de panneaux solaires
L’éco-énergie des bâtiments repose notamment sur le solaire photovoltaïque, dont le prix d’achat par EdF, a baissé il y a peu, semble déjà modérer l’ardeur des investisseurs. Rien n’interdit en effet de profiter d’une rénovation de toiture, comme l’a fait la société 8’33 (8 minutes 33) sur l’usine varoise de Thalgo Cosmetics, pour installer 1 500 m2 de modules Centrosolar produisant 60 MWh par an, réinjectés sur le réseau. Mais, a contrario, le belge Enfinity finance des installations dont JUIN 2010ccHors-sérIe
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CONSOMMATION
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Utiliser les effluents et sous-produits
L’utilisation des déchets de production est une pratique répandue dans l’industrie agroalimentaire, la chimie ou le bois. On ne compte plus les menuiseries ou les fabriques de meubles qui brûlent leurs
cc DES TECHNOLOGIES PLUS EFFICACES
CHAUFFAGE/REFROIDISSEMENT c Des groupes de refroidissement, de chauffage ou mixtes conçus, non pas pour les périodes de pointe (3 % du temps sur l’année), mais pour les conditions les plus courantes (60 à 90 % d’une année). Économie : 20 % et plus. ÉCLAIRAGE c Dernière génération de tubes fluorescents à ballast électroniques et de lampes à décharge, associée à une gestion intelligente de l’éclairage. Économie : jusqu’à 40 %. RECYCLAGE c récupération des calories d’effluents issus de la production ou méthanisation des sous-produits. Économie : jusqu’à 100 % des besoins de chauffage. MOTEURS ÉLECTRIQUES c Introduction de la régulation électronique, des variateurs de vitesse et des moteurs de dernière génération. Économie : jusqu’à 30 %.
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Hors-sérIeccJUIN 2010
résidus pour produire vapeur ou air chaud. Ainsi l’usine Mobalpa de Thônes (HauteSavoie) exploite depuis 2003, trois puissantes chaudières Compte-R (10 MW au total) dans lesquelles sont brûlées 4 000 tonnes de chutes de bois. « Notre dispositif sert essentiellement à chauffer nos 14 hectares de bâtiments, commente Christian Farat, directeur qualité environnement de Fournier-Mobalpa. » La méthanisation des sous-produits est une autre voie, empruntée par NP Pharm à Bazainville (Yvelines), producteur de microgranules de sucre, support de médication. L’usine transforme en biogaz ses rejets liquides – eau gluco-amidonnée – grâce au procédé Provéo de Naskeo Environnement. « Réalisé en 2007, l’investissement – 160 000 euros – permet de répondre aux exigences réglementaires mais surtout de maintenir en température les cuves de préparation et les ateliers, commente Marc Bouzet, directeur général de Naskeo. Cette filière est aussi suivie par de nombreux fromagers comme la Laiterie Collet de Renaison (Loire) qui transforme son lactosérum en méthane pour chauffer ses bâtiments. Autre source « gratuite », la récupération de chaleur. L’usine CAP L’Oréal à Vichy (Allier) a reconfiguré en 2009 son unité d’air comprimé en installant des compresseurs à vitesse variable Atlas Copco Carbon Zero. « Ces machines incorporent un circuit d’eau parcourant tous les corps chauds et qui produit une eau à 70/90 °C, explique Patrice Paillet, en charge de l’environnement sur le site. Nous l’utilisons pour le lavage des machines, soit un tiers des 100 m3/jour nécessaires, le complément étant fourni par le recyclage des calories des effluents et de la cheminée des chaudières vapeur. L’économie en gaz réalisée est de l’ordre de 2 000 MWh/an, bilan que nous améliorerons bientôt avec de la méthanisation ».
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Réformer les process de production
L’évolution des process de production bénéficie des progrès réalisés dans la conception des moteurs et des automatismes. « L’introduction du variateur dans la motorisation d’une chaîne cinématique peut générer une économie
ccOLIVIER BARRAULT INGÉNIEUR ET PDG DE BARRAULT RECHERCHE
Il faut impliquer tout le monde en entreprise « L’approche globale des consommations d’énergie que nous préconisons doit s’inscrire impérativement dans la durée et hors de tout « stress » conjoncturel. Une fois les bilans par filières établis, il faut non seulement hiérarchiser les priorités dans un plan d’action mais aussi créer des indicateurs et un instrument de mesure. Tous les points à traiter trouveront nécessairement une solution si l’investissement est mobilisé, mais le programme d’économie ne sera fructueux à la longue que si toute l’entreprise s’implique, communique autour des résultats et surtout se forme aux nouvelles habitudes. »
d’énergie allant jusqu’à 30 % », affirme Jean-Pierre Ghérardi, porte-parole de Schneider Electric. Chez Plastic Omnium (PO), l’énergie représente également une part significative du coût d’un pare-chocs ou d’une calandre. Le groupe, en contrat d’objectif avec EdF, affiche déjà de belles performances (17 % d’électricité et 14 % de gaz économisés sur la période 2007/2008) mais poursuit son effort. « Nous avons installé en 2008 une nouvelle régulation Schneider Electric sur une trentaine de presses à injecter, pour obtenir entre 15 à 30 % d’économie d’énergie avec un amortissement inférieur à deux ans », commente François Tardif, vice président R&D chez PO. cm ccPHILIPPE PÉLAPRAT rédaction@industrie-technologies.com
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les entreprises « porteuses » consomment tout ou partie de la production, comme le chimiste brugeois Mercks qui utilise les 150 000 kW/an générés par ses 1030 panneaux Sharp. Autre technologie pour grandes surfaces murales orientées au sud, le Solarwall est un bardage métallique microperforé, formant un caisson collecteur d’air chaud raccordé au système de ventilation/chauffage de l’usine. « Notre solution est d’un coût modique (130 euros le m2) et produit l’équivalent de 500 à 600 W/m2, soit de 12 à 50 % d’une facture de chauffage, pour un amortissement sur deux à sept ans », détaille Anouck Colson, directrice déléguée de Solarwall France.
cc ses 4 DAtes
1996 Jeune diplômé de Supelec, il entre chez Alstom pour s’occuper, en Amérique du Nord, des applications de contrôle pour turbines hydrauliques et à gaz. 1998 Il rejoint la division transmission et distribution Alstom T&D, qui, racheté par Areva, deviendra Areva T&D. 2007 Il prend la responsabilité de la stratégie d’Areva T&D. 2008 Il est de retour chez Alstom Power, où il occupe aujourd’hui le poste de vice-président stratégie et innovation pour l’activité gestion de l’énergie. cc Alstom Power energy mAnAgement
Cette division d’Alstom est spécialisée dans l’efficacité énergétique. Elle offre des solutions de pilotage de centrales, thermique ou renouvelable, et de gestion d’un portefeuille de centrales.
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Découvrez les innovations du futur compteur électrique communicant français Linky.
CONSOMMATION
cc LAURENT SCHMITT VICE-PRÉSIDENT D’ALSTOM POWER ENERGY MANAGEMENT
Le réseau électrique intelligent, c’est un véritable écosystème Il est spécialiste de la gestion de l’énergie chez Alstom. Face à l’émergence du réseau « intelligent », Laurent Schmitt rappelle quelques vérités technologiques. La sobriété commencera par l’optimisation des centrales thermiques existantes. Et, dans la course à l’efficacité énergétique, les innovations de rupture ne s’imposeront que si elles sont économiquement viables. Il esquisse sa vision du déploiement d’un réseau électrique sobre.
T. GOGNY POUR INDUSTRIE ET TECHNOLOGIES
Communicant, le futur réseau électrique est annoncé plus « intelligent ». Est-ce une garantie de sobriété énergétique ? Laurent Schmitt : Demain, le réseau de
distribution sera certes équipé d’organes d’information et de communication pour traquer les consommations superflues. Mais concrètement, le smart grid, ou réseau intelligent, devra s’insérer dans le mix énergétique existant. On ne pourra pas, subitement, mettre de côté les centrales hydrauliques, nucléaires ou à charbon. Pour rendre le réseau sobre, il faudra d’abord optimiser le parc de production actuel. Puis, progressivement, déployer l’intelligence dans toutes les composantes de l’écosystème électrique. Éventuellement jusqu’à rendre l’électroménager des particuliers communicant… si cette opération est économiquement viable. Mais ce sera une étape ultérieure. Pourtant la France déploie déjà chez les particuliers des compteurs électriques communicants… L. S. : En France, ERdF a lancé le déploie-
ment de ses compteurs communicants Linky pour une phase pilote, avant leur généralisation au niveau national. Avec leur relevé quotidien, ces appareils per-
mettront d’affiner les factures d’électricité. Cette incitation financière est indispensable pour modifier les comportements des consommateurs. Mais pour déployer le smart grid, l’habitat domestique n’est pas la bonne échelle. A priori, les économies réalisées chez un particulier, grâce à des appareils communicants, ne suffiront pas à rentabiliser les investissements de départ. Quelle forme de smart grid préconisez-vous ? L. S. : Plutôt qu’un déploiement national
chez les particuliers, le smart grid doit être réfléchi au niveau des villes. La taille critique, économiquement viable, est une consommation d’un mégawatt, soit plusieurs bâtiments mis en réseau. Elle nous situe plutôt à l’échelle d’un quartier. Cette approche urbaine permettra d’expérimenter des innovations de rupture. L’efficacité énergétique passe par le développement de véritables écoquartiers, qui restent à inventer. Ils serviront de laboratoires en grandeur réelle pour concevoir les technologies du smart grid. Pour l’instant, les écoquartiers se cantonnent à des opérations de communication de leurs concepteurs. Demain, il faudra chiffrer leurs performances et les comparer. C’est
la seule solution pour identifier les technologies les plus efficaces et définir des standards. Quels enjeux technologiques se cachent derrière cette notion d’écoquartier ? L. S. : Les centrales électriques de demain
seront plus petites, disséminées et intégrées au quartier. On s’oriente naturellement vers l’énergie solaire. Mais il faudra aussi expérimenter le micro-éolien et la géothermie. Où qu’elle soit produite, l’énergie renouvelable est pour l’instant injectée dans le réseau. Cette solution, simple à mettre en œuvre, est la moins coûteuse. Mais elle atteindra vite sa limite. À terme, elle risque de créer des congestions aux nœuds du réseau électrique, au niveau des transformateurs de basse tension en moyenne tension. Produite localement, l’énergie renouvelable devra donc être consommée sur place. Cette solution réduira les allers-retours des électrons, les pertes en ligne associées et les investissements dans le réseau de distribution. Elle suppose de totalement revoir le pilotage énergétique du réseau. L’écosystème électrique doit être maîtrisé en temps réel. Pour y parvenir, les outils de contrôle existent-ils ? L. S. : Dans les centrales thermiques et
hydrauliques actuelles, les solutions de pilotage sont matures. Des algorithmes gèrent à la seconde près, voire moins, les quantités de gaz, d’eau et d’énergie. Ces JUIN 2010ccHORS-SÉRIE
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mal pour installer « l’intelligence » : dans le véhicule, dans la borne de recharge ou en amont ? Qui assurera la maîtrise énergétique de cet impressionnant écosystème électrique ? L. S. : Les producteurs d’électricité devront
Une vitrine technologique de la convergence habitat-énergie c A l’horizon 2014, Alstom Power prévoit de rénover le siège de Bouygues Construction à Guyancourt (Yvelines). Avec cette vitrine technologique, elle entend montrer, en grandeur réelle, sa nouvelle vision de la convergence habitat/énergie. L’objectif est de diviser par dix la consommation énergétique du site. Le projet prévoit aussi l’intégration de 25 000 m² de panneaux
photovoltaïques, 75 sondes verticales pour la géothermie, 440 places de parking adaptées aux voitures électriques… Ce projet est le fer de lance de la stratégie d’Alstom Power. Historiquement, l’entreprise était spécialiste de l’efficacité des centrales thermiques. Elle se prépare à la nouvelle donne énergétique : émergence des sources renouvelables, des voitures électriques, du smart grid…
outils doivent être étendus pour gérer un portefeuille de moyens de production décentralisé, incluant le renouvelable. Alstom préconise des plates-formes virtuelles rassemblant les données en provenance de chaque centrale et optimisant l’ensemble. Ces solutions sont-elles prêtes à intégrer le renouvelable à grande échelle ? L. S. : Pour ajuster à tout moment l’offre
électrique à la demande, il faut compenser l’intermittence des sources renouvelables. Leur essor obligera à assouplir les centrales nucléaires et celles à charbon,
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peu réactives mais qui assurent aujourd’hui l’essentiel de la production. Pour cela, il faudrait en revoir l’informatique et les procédés d’échanges thermiques. Mais le vrai défi technologique portera sur le stockage de l’électricité. Avec 80 % de rendement, le pompage hydraulique ne souffre encore d’aucune concurrence. Alstom se penche sur des solutions par air comprimé encore balbutiantes. Une autre voie de stockage émergente consiste à faire communiquer la voiture électrique avec le réseau. Selon les constructeurs, un tel scénario passera par le déploiement de flottes de véhicules. Reste à trouver l’emplacement opti-
Informatique, automobile, énergie… La révolution smart grid suppose des collaborations sans précédent… L. S. : Les profils des acteurs seront en effet
très variés. Pour gagner en efficacité énergétique avec l’essor du renouvelable, il faudra même inclure les météorologues ! Aujourd’hui, les prévisions ont d’abord lieu à la semaine. Puis à la journée pour gérer les consommations imprévues. On affine enfin au fur et à mesure que les minutes s’écoulent. Tout cela restera un défi considérable. Pour l’éolien, les prévisions ne sont précises que dans l’heure qui suit. Au-delà d’une journée, les erreurs de prévision atteignent même très vite 50 %. Quant au photovoltaïque, il est encore trop peu déployé pour bénéficier de vrais retours d’expériences. Seule certitude, le passage d’un nuage suffit à créer de l’intermittence. cm cc ProPos reCUeIllIs PAr tHomAs BlosseVIlle tblosseville@industrie-technologies.com
GERPHO
La réhabilitation du siège social de Bouygues sera achevée fin 2014. Elle sera une véritable référence en matière de développement durable.
pouvoir garder la main sur leur portefeuille de centrales. Mais des non-spécialistes interviendront aussi localement. La seule échelle pour gérer la multiplication des sources d’énergie est urbaine. Car le vrai smart grid ne se limitera pas à l’électricité. L’approche pertinente est une gestion globale des flux en intégrant les réseaux de chaleur, les transports, l’incinération des déchets… Les municipalités devront donc s’engager vis-à-vis de leurs habitants. Pour gérer tous ces flux, l’informatique va se multiplier. Avec l’explosion des échanges de données, pourquoi ne pas installer de mini datacenters dans les bâtiments ? Nous travaillons avec Microsoft sur la connectivité de l’information et les interfaces utilisateurs pour les novices.
ECONOMI ESD' ENERGI E: UNENGAGEMENTESSENTI ELPOURSMCPNEUMATI QUE Envi r on50% desdemandeséner gét i queseur opéennespr ovi ennentdel ' i ndust r i e.Pl usi eur sét udesconf i r ment quel esut i l i sat eur seur opéensdesyst èmesàai rcompr i mégaspi l l entpl usde2, 3mi l l i ar dsd' eur osdûàune i nef f i caci t éetunemai nt enancei nappr opr i éedel eur ssyst èmes. A vot r eavi s,quel l equant i t éd' ai r compr i mél ' Eur opegaspi l l et el l e danssessyst èmes? Sel onuneenquêt emenéer écemment pl usde320000usi nesdepr oduct i on enEur opeut i l i sentact uel l ementdes syst èmesàai rcompr i mé.
Dami enPel l et i er
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consommation
Pénétrez dans un centre de données d’IBM.
INNOVATIONS électronique Les écrans plasma deux fois plus efficaces
Après avoir doublé l’efficacité des ses écrans plasma en 2008, Panasonic vient d’obtenir un autre doublement en portant le rendement lumineux à près de 10 lm/W. De quoi abaisser la consommation électrique des téléviseurs plasma de 42 pouces à 95 W en pleine haute définition! Soit au niveau des téléviseurs LCD actuels les plus sobres. cm
énergie Vers une batterie trois fois plus performante
Les batteries Li-air offrent un gain de poids important pour une capacité énergétique égale aux batteries Li-ion.
Les chercheurs du MIT montrent qu’en utilisant de l’or ou du platine comme catalyseur sur les électrodes, il est possible de doper le rendement de la batterie lithium-air. De quoi tripler la densité d’énergie par rapport aux batteries les plus performantes disponibles aujourd’hui. Ils poursuivent leurs recherches afin de trouver d’autres alliages moins onéreux mais offrant des performances proches. Autre problème à l’étude: la sécurité, car le lithium des batteries lithium-air est plus réactif à l’eau que celui des batteries lithium-ion. cm
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Google suit votre consommation d’énergie Le moteur de recherche essaie d’être partout. Alors pourquoi pas dans les services
d’efficacité énergétique ? Avec le service Web, qu’il se prépare à lancer, chacun pourra optimiser sa consommation énergétique domestique. Ce service sera accessible via une page personnalisée de iGoogle. Pour le concrétiser, Google travaille avec le spécialiste de microcontrôleurs Microchip Technology, des distributeurs d’électricité, des fabricants de compteurs et des fournisseurs de modules communicants. Il met gratuitement à la disposition des partenaires le logiciel d’interface nécessaire pour faire remonter les informations des équipements Suivi de consommation électrique vers ses serveurs. Le service devrait également être gratuit proposé par Google aux particuliers. pour les utilisateurs. L’ensemble des données de consommation énergétique, transmises par les compteurs, seront stockées dans le réseau selon le principe du cloud computing. cm
Celeste réduit la voracité électrique des datacenters Le fournisseur d’accès Internet aux entreprises Celeste s’associe au cabinet Enia Architectes pour rendre les datacenters moins énergivores et plus écolos. Ensem-
ble, ils ont créé un concept qui promet une réduction de la consommation de 35 %. Ce concept, protégé par un brevet commun, devrait se concrétiser par un premier prototype de 1 800 m2 exploité par Celeste à Marne-La-Vallée (Seine-et-Marne) en juin 2011. L’innovation réside dans la construction verticale du bâtiment. Le refroidissent se fonde totalement sur le principe du «free-cooling» qui consiste à utiliser l’air extérieur pour rafraîchir les serveurs. Les salles informatiques sont aménagées sur cinq niveaux, au lieu de deux au maximum dans les datacenters actuels. Cette construction en hauteur permet de profiter d’un effet de tirage naturel et d’une optimisation des rendements aérauliques. L’économie d’énergie est estimée à 6 GWh par an ar rapport à un data-center traditionnel. cm
L’architecture consiste à positionner les serveurs au milieu d’une tour de refroidissement basée sur le « free-cooling », elle optimise l’organisation du datacenter.
CELESta / Enia arCHitECtE ; D.r.
cc EN BREF
consommation
Des ordinateurs sans ventilateur
cc EN BREF
électronique Des microcontrôleurs hypersobres
L. GranGuiLLot
Bruyants et consommateurs d’énergie, les ventilateurs d’ordinateurs ont mauvaise presse. La solu-
tion ? Les supprimer ! C’est la piste explorée par le jeune constructeur Splitted-Desktop Systems (SDS). Créé fin 2006, il a présenté en septembre 2009, à Boston, un PC complet sans ventilation forcée, basé sur un processeur AMD à 2,6 GHz. Développé en partenariat avec le concepteur de solutions thermiques Thermacore et le fabricant de composites en nids-d’abeilles métalliques Alcore Brigantine, ce système mise sur une structure innovante améliorant l’échange thermique entre le radiateur et l’air extérieur. « Le radiateur est constitué d’un matériau composite avec de fines lamelles de quelques dizaines de microns de cuivre assemblées en nids-d’abeilles », précise le président de SDS, Jean-Marie Verdun. Les trois sociétés, qui envisagent de démarrer la production en 2010, cherchent désormais à abaisser la taille des lamelles de cuivre à 10 micromètres pour alléger le radiateur et améliorer son efficacité. cm
Le processeurs x86 mis au point dispose d’un système de refroidissement à base de matériaux composites.
STMicroelectronics démarre la production en volume des microcontrôleurs 8 bits à ultrabasse consommation. Grâce à sa plate-forme technologique à 130 nm, il ne brûle que 150 A/MHz. Déclinée en 26 références et 3 gammes, cette famille de puces devrait aider les ingénieurs à améliorer les performances des appareils portables et à se conformer aux initiatives en faveur des économies d’énergie. cm
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cc EN BREF
énergie Des batteries ultraminces
STMicroelectronics se lance dans les microbatteries à couches minces. Exploitant sous licence la technologie du californien Front Edge Technology, l’industriel entend mettre ce dispositif à la disposition des étiquettes RFID, des cartes à puce ou des dispositifs médicaux miniatures. Basées sur un électrolyte solide en lithium, phosphore et oxyde d’azote, ces batteries sont présentées comme 10 à 20 fois plus puissantes que les piles bouton utilisées aujourd’hui. cm
Calcul thermique Senova ausculte l’énergie des bâtiments
Créée en juillet 2009 par deux centraliens, la société propose un diagnostic énergétique aux particuliers dans le cadre de projets de rénovation. Particularité ? Son service va plus loin que les diagnostics actuels en utilisant un logiciel spécialement développé à cet effet par les deux ingénieurs. Cet outil permet de réaliser un véritable calcul thermique. cm
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Photovoltaïque Weidmüller surveille le vieillissement des panneaux solaires
Le système Transclinic de Weidmüller permet de surveiller le vieillissement des panneaux photovoltaïques pour repérer les vols, pannes et baisses de rendement. Il est disponible en deux versions. L’une mesure la tension des panneaux et le courant des strings (chaînes de panneaux en série). L’autre ne donne pas d’information sur un panneau en particulier, mais par string (jusqu’à 14). cm
Solaire Le mur chauffe l’air dans le bâtiment La surface métallique est exposée au soleil. L’air des cavités ainsi chauffé est distribué par des ventilateurs.
Le système SolarWall, développé par le canadien Conserval Engineering, utilise l’énergie solaire pour réchauffer l’air des bâtiments industriels, tertiaires ou agricoles. Il se compose d’un absorbeur solaire (surface métallique microperforée de couleur foncée), d’une ossature créant une poche d’air de 10 à 20 cm à l’arrière, d’éléments de fermeture et d’un système de ventilation forcée. Il chauffe l’air entre 5 à 30 °C au-dessus de la température extérieure, fournissant ainsi une puissance en crête de 500 à 600 W/m².cm
Dessaler l’eau à domicile Le français 3MW développe une station de production d’eau potable à partir d’eau de mer ou d’eau saumâtre. Elle est destinée aux particuliers, hôtels,
dispensaires... pour des besoins de 1 à 1 000 m3/j. Cette technologie divise, selon le fabricant, par vingt la consommation d’énergie nécessaire au dessalement. Le procédé se déroule à 80 °C à pression ambiante, et non sous vide. L’eau salée, préchauffée par échange thermique, s’écoule à l’extérieur de plaques hydrophiles verticales. Le flux d’air montant se charge de vapeur, puis redescend sur la face interne en y déposant son humidité sous forme de buée. Cette technologie pourrait être Cette station étendue jusqu’à 100 000 m3/j de dessalement produit jusqu’à 1 000 m3 d’eau pour l’alimentation des villes potable par jour. et des usines. cm
Le lean au secours de l’efficacité énergétique On connaît le lean comme un puissant outil de l’efficacité industrielle. Il se pourrait qu’il devienne aussi un outil d’efficacité
énergétique dans l’industrie. C’est du moins l’objectif de la société Leanergie en cours de création à l’initiative d’Actel, un fournisseur de circuits logiques programmables à basse consommation. Le projet associe plusieurs partenaires, dont des spécialistes de l’audit énergétique et des industriels à la recherche d’économie d’énergie. L’objectif ultime est d’aboutir à des designs de référence de contrôle électronique basés sur SmartFusion, la toute nouvelle puce d’Actel. « Nous voulons aider les industriels à améliorer l’efficacité de leurs procédés sans changer d’équipement, juste en appliquant un contrôle électronique intelligent sur les installations existantes », explique Patrizio Piasentin, directeur d’Actel pour la France, la Belgique et l’Afrique. Où intervient le lean ? « Dans la compréhension des procédés et la réflexion sur les mécanismes de régulation à mettre en ouvre pour lisser les pics et réduire la consommation d’énergie. Et cela, seuls les industriels, par la connaissance qu’ils ont de leurs métiers, pourront nous le dire. En mettant en œuvre des chantier 5S, SMED, etc., ils sauront quand il faut délester ou ralentir l’équipement sans affecter la qualité ni la productivité. » L’un des équipements clés visés par Leanergie est le moteur électrique qui engloutit plus de 60 % de l’électricité consommée par l’industrie. cm
D.r.
consommation
Découvrez notre diaporama des vitrages de haute technologie.
consommation
Un verre qui se teinte à volonté Des vitres que l’on peut obscurcir grâce à un simple interrupteur : c’est ce que permet l’électro-chrome, grâce à de fines couches de tungstène déposées sur le verre. Elles changent de
couleur par un procédé d’oxydationréduction déclenché par le passage du courant, acheminé par de minuscules fils incorporés dans le vitrage. Testé dans ces bureaux situés au sud de Madrid, ce dispositif a permis un moindre recours à la climatisation et à l’éclairage, d’où une baisse de la consommation énergétique de 30 à 50 % (soit 150 kWh par m2 de verre et par an), selon des mesures effectuées pendant dix mois par Schneider Electric. « Pour moi, c’est le verre ultime, qui améliore le confort lumineux et thermique. Il devrait être largement répandu dans le bâtiment d’ici cinquante ans », estime Thomas Bertin Mourot, directeur de Quantum Glass, le label sous lequel Saint-Gobain a rassemblé ses technologies verrières innovantes. Prochaine étape : coupler ce vitrage à un système de contrôle automatique prenant en compte la luminosité extérieure. cm
Un courant électrique déclenche une réaction d’oxydo-réduction qui change la couleur du verre.
cc EN BREF Les Led organiques affichent 90 lm/W pour une luminance de 1000Cd/m2.
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éclairage Les Oled plus forts que les lampes fluorescentes
La société allemande Novaled, en coopération avec l’université technique de Dresde, a développé des diodes électroluminescentes organiques (Oled) blanches offrant un rendement lumineux record de 90 lm/W pour une luminance de 1000 Cd/m2. Pour la première fois, cette technologie dépasse les lampes fluorescentes, dont le rendement lumineux varie de 60 à 80 lm/W. Ce résultat marque un pas important vers l’utilisation des Oled dans l’éclairage général. Jusqu’ici, le rendement lumineux se limitait à 50 lm/W. cm
Recherche Un semi-conducteur sans perte de courant
Conduire le courant électrique sans émission de chaleur: c’est l’étonnante performance réalisée à basse température par un semi-conducteur innovant. Ce phénomène n’avait jusque-là jamais été observé en l’absence de champ magnétique. Obtenu par des physiciens de l’université de Würzburg en alternant de fines couches de quelques nanomètres d’épaisseur de tellurure de mercure et de tellurure de cadmium, le matériau capable de cette prouesse présente cette propriété à des températures inférieures à –170 °C. Les scientifiques cherchent le moyen de maintenir l’exploit à des températures plus élevées. cm
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enquête
Le CO2 doit-il orienter l’innovation ?
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entretien
Jean Jouzel Climatologue, prix Nobel de la paix en 2007 avec le Giec «Le changement climatique est une rupture technologique» ccPAGE 46
innovations
La sélection d’Industrie et Technologies
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ÉMISSIONS
Le CO2 est l’ennemi C’est la bête noire du secteur de l’énergie. Le CO2 est aujourd’hui indissociable de la menace que représente, selon les experts du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (Giec), le changement climatique. Mais le CO2 suscite également la polémique et le doute persiste : l’activité humaine et les émissions associées sont-elles vraiment responsables du réchauffement tant décrié ? Face à la complexité des phénomènes climatiques, le débat risque de perdurer. Quelle qu’en soit l’issue, le développement technologique sera désormais en partie jugé à l’aune de son bilan CO2. Cette nouvelle préoccupation n’est pas incompatible avec l’innovation. au contraire, elle pourrait même la stimuler. À condition d’intégrer l’indicateur CO2 à la conduite des usines et la conception des produits. Décryptage de cette tendance sans précédent. cm ÉCHÉANCE Le Giec préconise de stabiliser les émissions mondiales de CO2 dès 2015.
Les centrales électriques génèrent des émissions de CO2 différentes suivant le combustible utilisé. Les centrales au charbon détiennent le triste record en la matière.
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ÉMISSIONS
Les défis du CO2 pour l’ingénieur, expliqués par le Conseil national des ingénieurs et scientifiques de France.
ENQUÊTE
Le CO2 doit-il orienter l’innovation ? Le dioxyde de carbone est devenu le nouveau mètre étalon de l’industrie… Que ce soit en matière d’énergie, d’écoconception ou d’organisation industrielle, l’indicateur CO2 donne désormais le « la » des grands choix technologiques. Mais peut-on vraiment lui faire confiance ? Face à la complexité des phénomènes climatiques, il est à manier avec précaution.
PERSPECTIVE À l’horizon 2020-2030, c’est en jouant sur les émissions de méthane que l’on arrivera à influer sur le climat.
e sujet suscite la polémique. Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), au cours du XXe siècle, la température moyenne sur terre s’est élevée de 0,75 °C. Ces derniers mois, la percée climato-sceptique dans les médias a semé le doute sur la cause de ce réchauffement, sans toujours fournir d’arguments scientifiques. Dans le débat climatique, la responsabilité humaine reste donc privilégiée. Le développement technologique est mis en cause et, pour inverser la tendance, le CO2 dégagé par les activités industrielles ou de services est devenu l’indicateur de référence. Dans toutes les usines, dans tous les bureaux d’études, les choix technologiques dépendront désormais de leurs émissions de gaz à effet de serre. Face au défi climatique, le CO2 devient le juge de paix de l’innovation… Est-ce bien le meilleur candidat ?
L
ccENJEUX Depuis 2005, l’Europe a mis en place un marché d’échanges des quotas d’émissions. Il concerne 12 000 installations (celles ayant recours à la combustion à une puissance supérieure à 20 MW). Pour encourager les investissements dans les « technologies propres », le prix de la tonne de CO2 doit au moins atteindre 160 euros en 2030 et 350 euros en 2050, selon l’Iddri. En France, les transports sont le secteur le plus émetteur de gaz à effet de serre (+ 19,1 % d’émissions directes entre 1990 et 2007). Dans le reste du monde, où la part du nucléaire est plus basse dans le mix énergétique, la production d’énergie est le mauvais élève.
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Un inDicATeUr ForcÉmenT rÉDUcTeUr
Le Giec a deux certitudes. La température moyenne sur Terre augmente à un rythme sans précédent depuis huit cent mille ans ; la composition de l’atmosphère s’est considérablement modifiée sous l’influence humaine. Mais les mécanismes
en jeu dépassent le seul CO2. Le protocole de Kyoto a pointé du doigt six gaz à effet de serre. Outre le CO2, le méthane, le protoxyde d’azote (N2O), l’hexafluorure de soufre (SF6) et les gaz fluorés (PFC et HFC) sont sur la sellette. Même les traînées d’avion et la pollution urbaine (constituées de poussières) contribuent, sur de courtes durées, à bloquer une partie du rayonnement infrarouge terrestre. Pour toutes ces nuisances, l’usage impose d’exprimer les pouvoirs réchauffants de ces gaz par leur « équivalent CO2 ». C’està-dire d’évaluer l’effet qu’aurait la même quantité de CO2 émis au même instant. En suivant cette méthode, le méthane est 27 fois plus puissant que le CO2. Si elle a le mérite de simplifier les calculs, la démarche est réductrice. Elle masque la diversité des gaz à effet de serre et surtout leur durée de séjour dans l’atmosphère (délai au bout duquel leur concentration a diminué de moitié). Elle est de cent à cent cinquante ans pour le CO2 contre seulement huit à douze ans pour le méthane. Les spécialistes estiment qu’à l’horizon 2020-2030, c’est en jouant sur les émissions de méthane, qui compte pour 14 % dans la hausse de l’effet de serre, que nous arriverons à influer sur le climat. « L’indicateur CO 2 est également trompeur pour une autre raison, avertit Meike Fink, chargée de programme
En matière d’émissions de CO2 liées à la circulation automobile, aucune solution satisfaisante n’a encore été trouvée. Que ce soit le moteur Diesel ou la voiture électrique.
Le casse-tête automobile c La voiture est un exemple parfait de casse-tête posé
RéA
par le défi climatique. La traque aux émissions de CO2 pousse à l’utilisation de moteurs Diesel. Ils sont plus efficaces que leurs alter ego à essence. Problème: ils sont aussi plus polluants (oxyde d’azote, fines particules…). Ce constat a incité les fabricants à innover, avec notamment l’invention du filtre à particules. Aujourd’hui, en matière d’émissions, le diesel rattrape d’ailleurs son retard sur l’essence. Mais le problème n’a pas pour autant été résolu. Dans la filière automobile, le débat sur le CO2 resurgit avec la voiture électrique. Renault veut prouver que l’électricité peut lever le verrou du transport dans la lutte climatique. « Le tout électrique ne fait que reporter les émissions sur la production d’électricité », rétorque Joseph Beretta, délégué énergie, technologie et émissions chez PSA Peugeot Citroën. Seule certitude, personne n’a encore la solution à ce casse-tête.
climat/énergie au réseau Action climat. L’attention portée au seul critère du CO2 laisse croire que le nucléaire est une solution, en occultant le problème des déchets radioactifs. » Plus généralement, le tort du discours autour du seul dioxyde de carbone est de se concentrer sur le climat au détriment d’autres enjeux écologiques majeurs, comme la pollution, l’épuisement des ressources naturelles ou la biodiversité. Alors pourquoi l’indicateur CO2 a-t-il été retenu comme référence ?
cc
Un compromis Universel
Météorologie et climatologie sont deux choses différentes. « La météorologie consiste à suivre une perturbation océanique jusqu’à perdre sa trace. Au-delà d’un mois, on passe à une échelle climatique et l’on travaille en valeur moyenne, et non exacte », précise Jean Jouzel, climatologue et vice-président du Giec. Face à la complexité des phénomènes climatiques, l’indicateur CO2 fixe des tendances globales. Il s’est imposé de lui-même car
les émissions de dioxyde de carbone sont le principal responsable de la hausse de l’effet de serre. « Pour l’industrie, le choix de cet indicateur est d’autant plus pertinent que les ingénieurs sont rarement en présence d’un autre gaz à effet de serre », rappelle par ailleurs Michel Bruder, le président du comité environnement du Conseil national des ingénieurs et scientifiques de France (Cnist). L’indicateur CO2 est utile en première approche. Pour les autres gaz à effet de serre, un simple calcul permet d’obtenir le fameux « équivalent CO2 ». Le pouvoir réchauffant d’un gaz est la puissance infrarouge qu’il bloque dans l’atmosphère (en W/m2). Pour l’évaluer, les experts disposent de bases de données datant des années 1970 et 1980. À cette époque, toutes les molécules de l’atmosphère ont été caractérisées. Les longueurs d’onde qu’elles rayonnaient ont été mesurées selon la température. L’équivalent CO2 d’un gaz n’est alors que l’intégrale, au sens mathématique, de son pouvoir réchauffant sur cent ans. Cette durée arbitraire correspond à l’échelle de temps des préoccupations climatiques (le siècle). L’indicateur CO2 est avant tout le fruit de ce compromis international. C’est à cette échelle que se joue l’avenir du climat. Peu importe où les gaz à effet de serre sont émis. En un an, ils seront mélangés JUIN 2010ccHors-sérIe
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ÉMISSIONS
« Une taxe carbone stimulerait l’innovation » Bernard Bigot, administrateur général du CEA.
ccpHilippe scHUlZ RESPONSABLE ÉNERGIE ET ENVIRONNEMENT À LA DIRECTION DU PLAN ENVIRONNEMENT DE RENAULT
ccHervÉ le TreUT DIRECTEUR DE RECHERCHE EN CLIMATOLOGIE AU CNRS ET MEMBRE DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES
Un indicateur nécessaire, mais insuffisant
le co2 guidera l’évolution du climat dans cinquante ans
« L’indicateur CO2 est un excellent traceur de l’activité humaine. Il permet de suivre l’évolution dans le temps des émissions de gaz à effet de serre de l’industrie, directes et indirectes. Mais, même s’il est nécessaire, il n’est pas suffisant. Renault ne s’en contente jamais. Prenez les agrocarburants. Leur bilan carbone était meilleur que les carburants d’origine fossile. Pas leur impact écologique. Ils encourageaient notamment la déforestation. Pour concevoir nos voitures, nous utilisons d’autres critères, comme la pollution à l’ozone, l’eutrophisation ou l’épuisement des ressources fossiles. L’objectif est qu’un nouveau véhicule soit meilleur que la génération précédente selon tous les critères. »
« L’indicateur CO2 pose deux problèmes. Il sous-estime les processus à action rapide, comme l’effet du méthane, et ignore l’influence de la pollution sur l’effet de serre. Mais il donne une vision à long terme pour la gestion des émissions. Dans cinquante ans, ce sont les gaz à effet de serre, et surtout le CO2, qui guideront l’évolution du climat. Le méthane est la cible la plus facile pour infléchir rapidement la tendance. Mais il ne faut surtout pas oublier le CO2, qui s’accumule dans l’atmosphère et agira fortement en fin de siècle. De toute façon, CO2 ou autre indicateur, toutes les initiatives possibles doivent être soutenues. Si l’on n’agit pas, le réchauffement atteindra + 2 °C en 2050. »
dans l’atmosphère. Tout l’enjeu consiste alors à savoir comment décliner cet indicateur mondial au niveau local.
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Un oUTil À Apprivoiser
Pour l’industrie, la question n’est plus de savoir s’il faut utiliser l’indicateur CO2, mais comment. « À terme, il y aura trois indicateurs environnementaux. Le CO2 pour le climat, mais aussi deux autres pour l’eau et la biodiversité », prévoit Valérie de Robillard, consultante au cabinet Kepler. Alors autant apprivoiser, dès aujourd’hui, l’indicateur CO2. Seul, il n’est pertinent que pour évaluer l’effet global de l’activité d’une entreprise. Un bilan poste par poste des émissions de gaz à effet de serre permet d’identifier les
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principales sources, pas de les calculer exactement. « L’objectif est de lister les leviers d’action, puis de les hiérarchiser », conseille Thierry Format, président d’EcoAct, spécialiste de la stratégie carbone des entreprises. L’indicateur CO2 fixe les priorités à court terme (sensibilisation des salariés), à moyen terme (investissement dans des détecteurs de présence) et à long terme (choix des sources d’énergie). « L’intérêt de l’indicateur CO2 est d’être convertible en kilomètres parcourus en voiture. Il est compréhensible par tout le monde », témoigne Fabienne Coruble, responsable environnement, hygiène et sécurité chez Carrier. Le fabricant de climatiseurs a mis en place une réduction continue de sa consommation d’énergie basée sur la
participation de tous les salariés. L’indicateur CO2 joue alors un rôle pédagogique et mobilisateur. Pour la conduite d’un process, l’indicateur CO2 s’impose car il est la simple transcription de l’efficacité énergétique. Mais pour la conception d’un produit, il ne suffit pas. « Il faut utiliser d’autres indicateurs pour comprendre finement d’où viennent les émissions », préconise Sophie Galharret, chargée de recherche énergie/climat à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). Réduire les émissions de CO2 d’un produit n’est en effet pas toujours bénéfique pour le climat. « Depuis les années 1990, on ne cesse de baisser les émissions unitaires des voitures. Mais ces économies poussent à rouler plus », confirme Stephen Kerckhove, le délégué général de l’association Agir pour l’environnement. Dans ce cas, d’autres indicateurs, comme le taux moyen d’occupation d’un véhicule ou le nombre de kilomètres parcourus, semblent tout aussi pertinents. Pour la conception d’un produit, le CO2 est un indicateur parmi d’autres de l’analyse du cycle de vie. Cette méthode, qui intègre toutes les pollutions, est complète et donne de meilleurs résultats, car elle va chercher des informations plus précises sur l’usage du produit et la quantité des matériaux utilisés. « Nous utilisons la méthode Impact 2002 », témoigne Paul-Joël Derian, le directeur R&D de Rhodia. Elle repose sur quatre critères: l’empreinte CO2, la consommation de ressources naturelles, l’effet sur la santé humaine et sur les écosystèmes. Avant d’agir finement avec l’analyse de cycle de vie, l’indicateur CO2 offre une première radiographie. « Il permet de se poser les bonnes questions », avance Valérie de Robillard. Un exemple: la course aux délais les plus courts n’est pas toujours la plus pertinente. L’optimisation du taux de remplissage ou la vitesse d’un bateau peuvent faire varier les émissions de carbone pour une même tonne transportée. « Il est parfois plus intéressant de décaler d’une semaine une livraison », poursuit la consultante. Le principal atout de l’indicateur CO2 est finalement de rompre les habitudes. L’innovation commence par là. cm ccTHOMAS BLOSSEVILLE tblosseville@industrie-technologies.com
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cc SES 5 DATES
1968 Début d’une thèse sur les grêlons. 2001 Nommé directeur de l’Institut PierreSimon Laplace (IPSL), fédération de six laboratoires publics de recherche en sciences de l’environnement (climat, pollution et planétologie). Il effectue deux mandats de quatre ans. 2002 Médaille d’or du CNRS. 2007 Vice-président du Giec, il reçoit le prix Nobel de la paix. Il est notamment l’auteur de la synthèse à destination des décideurs politiques du quatrième rapport du Giec. 2012-2013 Le prochain rapport du Giec portera sur les phénomènes climatiques extrêmes régionaux. ccGIEC
Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat Fondé en 1988, le Giec est chargé de porter un diagnostic sur le changement climatique. Auteur de quatre rapports en vingt ans, il couvre les enjeux technologiques, économiques et sociaux. Le Giec est composé de plus d’un millier d’experts.
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ÉMISSIONS
cc JEAN JOUZEL CLIMATOLOGUE, PRIX NOBEL DE LA PAIX EN 2007 AVEC LE GIEC
Le changement climatique est une rupture technologique Chercheur sur l’évolution du climat depuis quarante ans, membre du Giec, Jean Jouzel a retracé l’histoire de l’atmosphère à partir des glaces polaires. Mais depuis six mois, rien ne va plus. La conférence de Copenhague ? Un flop. La taxe carbone ? Reportée. Pire, les climato-sceptiques gagnent du terrain dans le paysage médiatique. Dans ce contexte brumeux, Jean Jouzel décrypte la position du Giec et les conditions d’un développement technologique vertueux.
J.L. BERTINI POUR INDUSTRIE ET TECHNOLOGIES
Les préconisations du Giec dépassent l’entendement. Stabiliser le climat à l’échelle planétaire, ce n’est pas de la science-fiction ? Jean Jouzel. C’est un défi considérable
mais nous n’avons pas d’alternative. Peu de monde mesure d’ailleurs l’ampleur de l’effort à accomplir. Si nous ne faisons rien, à la fin du XXIe siècle, la température moyenne sur Terre aura augmenté de 2 à 4 °C par rapport au climat préindustriel. C’est presque l’équivalent du réchauffement de 5 à 6 °C intervenu sur des millénaires, entre les périodes glaciaires et interglaciaires. Pour limiter ce réchauffement à 2 °C – soit 1,5 °C de plus qu’aujourd’hui –, les émissions mondiales de gaz à effet de serre devront avoir chuté de 85 % en 2050. Elles devront même être stabilisées dès 2015. Ces objectifs sont techniquement réalisables à coût modeste, moins de 0,1 % du PIB mondial chaque année. À condition de faire dès maintenant les bons choix technologiques.
Face à la montée du climatoscepticisme, le Giec peut-il s’affranchir d’une totale remise en question ? J. J. : Nous avons deux certitudes, issues
de mesures incontestées. D’abord, la
composition de l’atmosphère s’est considérablement modifiée au cours des deux derniers siècles. Le taux de CO2 a grimpé de 35 %. Celui du méthane, de 150 %. Conséquence immédiate : la chaleur des rayons solaires est piégée dans les basses couches de l’atmosphère. Deuxième certitude, le réchauffement est sans équivoque au cours du XXe siècle. La température moyenne sur Terre a augmenté de 0,75 °C. La dilatation thermique des océans et la fonte des glaciers continentaux ont provoqué une hausse du niveau de la mer de 15 à 20 cm. Le processus de réchauffement a déjà démarré. Même si l’on stoppait instantanément l’intégralité des émissions mondiales de gaz à effet de serre, la Terre se réchaufferait de 0,5 °C d’ici à 2100, simplement par inertie climatique. Les climatologues vont-ils investir les bureaux d’études industriels ? J. J. : Industriels et climatologues doi-
vent effectivement se rapprocher. La recherche académique peut aider à comprendre les sources d’émissions de gaz à effet de serre et leurs interactions avec le climat. Mais c’est aux industriels de trouver les réponses technologiques adéquates. Nous n’allons pas mettre un cli-
matologue derrière chaque ingénieur. De plus en plus de grands groupes, comme Thales ou Veolia, s’impliquent et les start-up spécialisées se multiplient. Il y a de vraies opportunités à saisir dans le suivi satellitaire des émissions de gaz à effet de serre. Il faudra certes une volonté politique et une incitation au niveau mondial. Des mesures réglementaires, comme l’interdiction des ampoules à incandescence, seront indispensables. Mais, pour tendre vers une société sobre en carbone, changer les comportements passe par de nouvelles technologies. Et, dans les transports ou l’urbanisme, la sobriété individuelle ne suffira pas. L’innovation passera par des approches systémiques. À condition que l’activité humaine soit réellement la cause du réchauffement climatique… J. J. : En analysant la composition chimi-
que de l’atmosphère, nous remontons à l’origine des émissions en distinguant ressources fossiles, océans et végétation. Pour chaque élément chimique, il suffit de repérer quels isotopes sont présents. Le carbone, par exemple, est essentiellement constitué de carbone 12, avec un peu de carbone 13 et de carbone 14, ce qui correspond à la composition de ressources fossiles comme le charbon. Nous savons donc que sa combustion a modifié l’état de l’atmosphère. Là où il y a débat, c’est pour savoir si les effets de l’activité humaine sont d’ores et déjà visibles. JUIN 2010ccHORS-SÉRIE
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ÉMISSIONS
Les technologies de captage du CO2 privilégiées par Alstom
Quelles solutions reste-t-il ? J. J. : L’urgence climatique impose le
Voyage dans des temps immémoriaux c Les glaces polaires offrent des
voyages à des échelles de temps qui dépassent l’imagination. Les poches d’air qu’elles emprisonnent renseignent sur la composition passée de l’atmosphère terrestre. En étudiant les carottes polaires, les glaciologues remontent 800000 ans d’événements climatiques. Une durée toute relative en comparaison des 4,5 milliards d’années de l’histoire
de la Terre, mais largement suffisante pour observer près d’une dizaine de périodes glaciaires. Elles se sont succédé à un rythme d’une tous les 100000 ans. À la fin de ces glaciations, le réchauffement moyen de la Terre atteignait 5 à 6°C et se déroulait sur plusieurs millénaires. À comparer à la hausse de 2 à 4°C prédits par les climatologues entre le XIXe siècle et la fin du XXIe.
Pour certains, le réchauffement est plutôt dû à une modification de l’activité solaire… J. J. : Dans son premier rapport, en 1990,
le Giec était resté prudent. Mais dans le quatrième, en 2007, la preuve de la responsabilité humaine a été faite. Les simulations montrent que les phénomènes naturels – éruptions volcaniques et activité solaire – ne suffisent pas à expliquer le réchauffement des cinquante dernières années. En intégrant les émissions humaines aux modèles, les calculs sont conformes aux mesures. Si l’activité solaire était responsable, on observerait un réchauffement à la fois dans les basses et les hautes couches de l’atmos-
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HORS-SÉRIEccJUIN 2010
phère. Ce n’est pas le cas. La chaleur des rayons solaires est piégée uniquement sous les 5 km d’altitude. Le nucléaire, qui émet peu de CO2, est-il la solution miracle ? J. J. : Les deux grands défis du change-
ment climatique concernent l’agriculture, responsable de 20 à 25 % des émissions de gaz à effet de serre, et notre approvisionnement énergétique. Le nucléaire aura donc un rôle à jouer. Mais, en pratique, forcément limité. Les centrales sont trop longues à construire. En 2030, l’atome fournira tout au plus 20 % de l’électricité mondiale, soit 10 % des besoins énergétiques.
De quoi susciter des vocations… J. J. : Toute innovation doit désormais
intégrer la lutte contre le changement climatique pour être porteuse et conforme aux normes des vingt prochaines années. Il faut donc former les élèves ingénieurs aux enjeux environnementaux. En France, la moitié d’entre eux seraient sceptiques vis-à-vis du changement climatique. Les solutions technologiques sont multiples. Par quoi commencer ? J. J. : Attention à ne pas se focaliser uni-
quement sur le CO2. Hors déforestation, il est responsable de 60 % des 2,5 W/m2 de hausse de l’effet de serre. Mais il n’est pas le seul gaz en cause. Le CO2 reste durant des siècles dans l’atmosphère, contre seulement dix ans pour le méthane, qui est impliqué à hauteur de 14 %. Le valoriser énergétiquement, lors de la décomposition des matières organiques, permettrait de réduire rapidement les émissions de gaz à effet de serre. Sur le long terme, on ne pourra toutefois pas oublier le CO2. Certains pensent à son pompage dans l’atmosphère, couplé à l’énergie solaire pour fabriquer des minéraux. Mais là, ce n’est encore que de la science-fiction. cm cc PROPOS RECUEILLIS PAR THOMAS BLOSSEVILLE tblosseville@industrie-technologies.com
AFP.
L’ampleur de la fonte des glaces polaires est nettement visible sur cette image satellite de la Nasa (ancien tracé en jaune). Une route a été libérée entre l’Atlantique et le Pacifique.
déploiement des énergies renouvelables, non émettrices de gaz à effet de serre. Parmi les ressources fossiles, le gaz doit être privilégié. À émissions équivalentes, il produit deux fois plus d’énergie que le charbon, le pétrole se situant entre les deux. Pour avoir trop longtemps ignoré les défis et opportunités du changement climatique, l’industrie française a pris des années de retard dans l’automobile, l’éolien, le solaire… Désormais, le train à prendre est celui des énergies marines, de la séquestration du CO2 et du stockage à grande échelle de l’électricité, où tout reste à faire.
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Le Dr Greenhalgh, de l’Imperial College de Londres explique comment nos carrosseries pourraient jouer les batteries.
ÉMISSIONS
INNOVATIONS Une enzyme qui a le CO2 dans le sang
cc EN BREF
Transport Un premier ferry électrique en 2015
Mimer le fonctionnement du corps humain pourrait diminuer radicalement le coût de la capture du CO 2 en sortie de cheminée.
On sait en effet synthétiser une enzyme proche de l’anhydrase carbonique, qui élimine l’excès de CO2 dans le sang. L’entreprise United Technologies Corporation et l’université de Columbia (ÉtatsUnis) ont entamé un partenariat prometteur sur le sujet, pour étudier les retombées possibles de cette technologie. Une affaire à suivre, tant la réduction de la facture énergétique figure au rang des priorités des industriels du captage du CO2. Et pour cause : aujourd’hui, absorber le CO2 contenu par les fumées d’une centrale au charbon prend encore... un quart de l’énergie de la centrale ! Le projet a en tout cas séduit l’agence américaine Arpa-E (Advanced Research Project Agency- Energy), qui finance des programmes de recherche promettant de véritables percées technologiques et a annoncé il y a quelques mois son soutien. cm
Le japonais IHI prévoit de construire le premier ferry à propulsion électrique. D’une capacité de 800 passagers, ce bâtiment de 30 m de long devrait entrer en service en 2015. Ses deux moteurs électriques de 400 kW chacun seront alimentés par des batteries Li-ion d’une capacité de 5 000 kWh assurant une autonomie d’environ 120 km. cm
Matériau L’énergie est dans la carrosserie Structure de l’anhydrase carbonique.
Le laser enflamme les moteurs
D.R.
La bougie de nos bons vieux moteurs à combustion vit-elle ses derniers jours ? On pourrait le penser suite aux travaux menés par l’équipe de
recherche sur les lasers de l’université de Liverpool (Royaume-Uni). Ses ingénieurs viennent de mettre au point, avec la collaboration de Ford, une technique d’allumage par faisceau laser. Concrètement, ce rayon, généré grâce à l’énergie de la batterie, se démultiplie dans la chambre de combustion pour allumer de manière uniforme le carburant injecté, là où la bougie ne générait qu’une étincelle. Les tests menés sur des prototypes ont démontré, qu’à 3 000 tours/min, l’énergie consommée par le système d’allumage par laser était inférieure à sa concurrente. À ce régime, cinquante tirs de laser sont effectués chaque seconde pour enflammer le combustible. Une telle technique permet, selon ses promoteurs, de booster le rendement des moteurs et d’en limiter les émissions polluantes. Les rejets en oxydes de carbone et en oxyde d’azote seraient réduits de 50 % ! cm
Prototype de matériau qui stocke et restitue de l’énergie électrique tout en étant solide et léger. Un matériau ambitionne de mettre un coup de turbo au marché des voitures électriques et hybrides. Ce composite créé par l’Imperial College de Londres, est capable d’emmagasiner et de libérer de l’énergie électrique. Suffisamment solide et léger, il pourrait être utilisé dans certaines parties métalliques de la carrosserie. Les scientifiques imaginent aussi qu’il pourrait remplacer les batteries actuelles de téléphones et d’ordinateurs portables. cm
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Voiture électrique contre thermique : suivez le match avec l’animation de Renault.
Le gaz d’échappement redevient carburant !
levé le CO2 des gaz d’échappement, puis l’a transformé en CO avant de le renvoyer vers l’admission d’air du moteur. Ces résultats prometteurs, confirmés par des essais menés au Cemagref, intéressent des constructeurs d’automobiles et des fabricants de chaudières à gaz. Après captage d’environ 20 % du flux des gaz sur la ligne d’échappement, la séparation et la concentration du CO2 se font grâce à des membranes en céramique combinant des fibres creuses et des polyimides. Le CO2 est ensuite dirigé vers un catalyseur contenant un complexe métallique à base de nickel. C’est lui qui, avec la chaleur de l’échappement transforme le CO2 en CO, dirigé vers l’admission d’air du moteur. cm
Des voitures électriques rechargeables en station-service Les chercheurs de l’institut Fraunhofer de technologie chimique planchent sur une batterie pour voiture électrique… rechargeable à la pompe en quelques minutes. La solution du laboratoire allemand repose sur deux électrolytes liquides.
Contenant des ions métalliques, ils créent un courant circulant à travers des électrodes poreuses en graphite. Quand la batterie est déchargée, l’idée est de vider ses électrolytes liquides, puis de la remplir à la pompe d’une station-service. Jusqu’à présent, l’autonomie permise par une telle technologie était limitée à 25 km. Les chercheurs assurent aujourd’hui pouvoir dépasser les 100 km. Un premier prototype de voiture a été mis au point. Ce n’est encore qu’un modèle réduit à l’échelle 1/5. cm
D.R.
Jacques Benzaria, ancien chercheur de l’Institut français du pétrole (IFP) a obtenu une baisse de 25 % la consommation en carburant et de 30 % des émissions de CO2, avec une puissance du moteur minorée de seulement 3 %. Pour parvenir à ce résultat, il a pré-
Prototype de voiture véhicule électrique à l’échelle 1/5 développée par l’institut allemand Fraunhofer.
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La Kangoo ZE en images et en vidéo
MISE À NU
Les premières voitures électriques de grande série rouleront bientôt dans nos rues. Il s’agira dans un premier temps d’adaptations de véhicules thermiques. Examinons ce qui va changer, en prenant pour exemple le Kangoo ZE Concept qui sert de base à la future fourgonnette Kangoo Express électrique de Renault.
LA VOITURE ÉLECTRIQUE SE DÉVOILE ccFICHE TECHNIQUE
Modèle Renault Kangoo Express ZE (zéro-émission) Moteur synchrone à rotor bobiné de 44 kW (rendement 90 %), maximum 10 500 tr/min, couple 226 Nm Batterie lithium-ion de 22 kWh en position centrale sous le plancher
Vitesse maximale 130 km/h Autonomie 160 km Temps de recharge 6 à 8 heures sur une prise 220 V - 16 A Poids 1 410 kg à vide Capacités 2 places, 3 à 3,5 m3 et 650 kg Commercialisation au premier semestre 2011
L’intelligence Elle comprend le boîtier d’interconnexion, le chargeur de la batterie, l’onduleur qui alimente le moteur et adapte sa vitesse. Le tout sous contrôle du superviseur qui assure la communication entre l’électronique du moteur et les éléments extérieurs (batterie, véhicule, actions du conducteur). L’énergie de freinage est récupérée dans la batterie lors de la circulation. Les muscles La partie mécanique du motopropulseur se compose d’un moteur électrique synchrone à haut rendement d’une puissance de 50 à 70 kW, tournant jusqu’à 12 000 tr/min. Un réducteur à rapport fixe transmet le mouvement vers les arbres de roue.
RENAULT
Le cordon ombilical Prise de charge de la batterie L’énergie C’est le pack de batterie qui fait office de réservoir d’énergie. Il comporte deux rangées de 24 modules fournissant au total une capacité de 20 kWh. Chaque module contient quatre cellules lithium-ion de 3,7 V. Les réactions électrochimiques qui s’y produisent permettent de stocker le courant de recharge et de le restituer lors de l’utilisation. ccJEAN-FRANÇOIS PREVÉRAUD jfpreveraud@industrie-technologies.com
JUIN 2010ccHORS-SÉRIE
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