Lexique-les-mots-du-corps

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Par Eric Cobast


PRÉPARER LES GÉNÉRATIONS FUTURES À IMAGINER LE MONDE DE DEMAIN

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ÉDITO CHERS PRÉPARATIONNAIRES,

Ce lexique, intitulé « Les mots du corps », conçu à votre intention par Éric Cobast, Professeur agrégé, titulaire de la chaire de Philosophie à l’INSEEC Business School, vous permettra d’appréhender différemment et de façon ludique les notions acquises en cours. Ne doutant pas que vous saurez apprécier ce lexique, et souhaitant vivement que vous soyez récompensés des efforts consentis, nous vous donnons rendez-vous au mois de juin prochain sur l’un de nos trois campus.

Dans le monde ultra-connecté d’aujourd’hui, qui privilégie l’immédiateté et l’éphémère, où la forme l’emporte souvent sur le fond, le choix qui a été le vôtre d’intégrer une Classe Préparatoire aux Grandes Ecoles pourrait sembler s’inscrire à rebours de l’évolution de notre société. Et pourtant, choisir d’emprunter le chemin de la rigueur, de la réflexion et de la singularité, c’est croire encore en les vertus du temps long et vouloir les défendre. Ces deux années de « prépa » vous construisent ainsi pas à pas, lentement mais sûrement, car on ne bâtit pas d’édifices solides sur des fondations incertaines. Elles vous amèneront à passer nos concours - et je l’espère à les réussir - mais vous accompagneront bien au-delà : vision à long-terme, capacité d’analyse, goût de la connaissance... toutes ces qualités, développées sous la férule bienveillante de vos professeurs qui feront de vous des étudiants épanouis et des managers éclairés. Parce que l’INSEEC Business School croit profondément en ces valeurs et en la mission qui est aussi la sienne de préparer les générations futures à imaginer le monde de demain, nous accompagnons depuis de nombreuses années la réussite des préparationnaires en mettant à leur disposition des outils méthodologiques qui, en marge du thème de culture et de sciences humaines retenu pour l’année, leur offre des applications originales de la réflexion menée dans leur salle de classe.

Bien sincèrement, Rémy CHALLE, Directeur INSEEC Business School Paris, Bordeaux, Lyon

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AVA N T . P RO P O S

Définir, c’est toujours ce par quoi com-

correctement les énoncés des sujets proposés, cerner avec justesse les enjeux des textes dont la lecture et l’étude sont conseillées, pour argumenter enfin sans craindre l’imprécision. Cela passe nécessairement par une étude lexicale et notionnelle à l’occasion de laquelle on peut déjà suggérer une mise-en-problème, un début de questionnement, un commencement de réflexion.

mence le Socrate que Platon met en scène dans ses dialogues.

Sans délimiter avec précision le sens des mots, comment s’entendre ? Sans débuter par cet accord contractuel sur le langage, comment parvenir à penser ensemble ? À dialoguer enfin ?

INCITER DÉJÀ À LA RÉFLEXION... SURPRENDRE PARFOIS.

Or rien n’est moins simple. Circonscrire la surface sémantique d’une notion réclame souvent bien davantage qu’un simple dictionnaire. Il faut aller certes à l’usage mais aussi à la source même de la formation du terme. Or si l’étymologie ne dit pas nécessairement – et contrairement à ce qu’elle annonce – la vérité d’un mot, elle en indique la pente, elle en découvre l’arrière-goût souvent indispensable à l’appréciation connotative.

C’est dire que chacune des entrées proposées est conçue à la fois comme une définition précise de la notion citée et comme un premier exercice de problématisation. On trouvera souvent également en appui une citation qui amorce une première argumentation. L’ambition de ce petit lexique est donc de fournir des informations nécessaires mais aussi d’inciter déjà à la réflexion, d’apporter les définitions attendues mais également de surprendre parfois à l’occasion d’une entrée plus originale.

Bref, il est utile de maîtriser le sens des mots du champ notionnel dans lequel on travaille, ne serait-ce que pour analyser

Par Eric Cobast Professeur agrégé de l’Université, Professeur de Philosophie à INSEEC Business School. Directeur Académique du pôle Humanités et Sciences Politiques du groupe INSEEC. 4


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...cerner avec JUSTESSE...


L E C O R P S… D ’ U N M O T .

Nous vivons dans un monde paradoxal et contradictoire : ce monde où s’exalte la Culture Physique est pourtant un monde sans corps, c’est un monde où la peau s’exhibe d’autant plus qu’elle est recouverte de tatouages, un monde matérialiste où tout tend à sa dématérialisation… De quoi rendre perplexe quant à la définition même du corps :

Les expressions lexicalisées du type

faire corps, esprit de corps sont ainsi éloquentes. Et la métaphore du corps social

fait de la Cité un être vivant. On voit bien comment fonctionne cette métaphore dans le champ politique et social, elle souligne la dimension de la solidarité liée (pas seulement par l’étymon) à celle de la solidité. Néanmoins très rapidement la notion se révèle plus complexe :

… de même que nous ne savons pas ce que c’est qu’un esprit, nous ignorons ce qu’est un corps.

Tout d’abord ce corps est double : il y a le corps que l’on a et le corps que l’on est. Comme l’écrit Valéry : Je contemple ma

Voltaire, article « Corps » du Dictionnaire Philosophique.

main ; j’y suis et je n’y suis pas.

Ce que souligne bien Merleau-Ponty :

Il y a deux sens seulement du mot exister. On existe comme une chose et on existe comme une conscience. L’existence du corps propre nous révèle un monde d’existence ambigu.

Pourtant la définition est assez simple, de même que l’étymologie : le latin corpus luimême dérivé du sanskrit, kripita, le ventre. Le corps, lieu de la digestion, symbolise assez clairement les appétits matériels. Mais le corps, ce n’est pas simplement la matière. Cette matière est organisée, elle vit. Le corps est donc à la fois cohérent et vivant, c’est un ensemble dont toutes les parties sont solidaires.

Ensuite, il est intermédiaire :

Le corps propre se révèle être le médiateur entre l’intimité du moi et l’extériorité du monde. Paul Ricoeur.

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ON EXISTE COMME UNE CHOSE ET ON EXISTE COMME UNE CONSCIENCE.

Merleau-Ponty

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SOMMAIRE

PREMIÈRE PARTIE .

Science et connaissance du Corps

DEUXIÈME PARTIE .

Philosophies, Arts et religion : le souci du corps

TROISIÈME PARTIE .

Figures du Corps

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PREMIÈRE PARTIE . Science et connaissance du Corps

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AFFECT

ANATOMIE

(passion & sentiment)

Ce mot qui désigne la Science qui décrit la forme des organes et leur situation dans un organisme est construit sur le bas-latin anatomia, dissection : ana, en remontant et temno couper. La morphologie du mot reproduit le geste du savant qui « ouvre » de bas en haut le tronc humain qu’il examine.

La théorie des affects repose sur la définition de ceux-ci comme interactions du monde extérieur avec le monde intérieur ou pour être plus simple du corps et de l’âme. Elle détermine de quelle manière nous sommes « affectés », c’est-à-dire atteints, altérés par les sensations qu’impriment les objets du monde extérieur. Le corps sensible modifie en quelque sorte l’état de l’âme.

Les connaissances anatomiques sont anciennes. Elles furent indispensables aux égyptiens pour élaborer les techniques d’embaumement et jusqu’à ce que l’empereur Marc Aurèle interdise la pratique de la dissection, elles ne cessèrent de se perfectionner, notamment grâce à Galie (deuxième siècle après JC) qui disséquait les corps des gladiateurs tombés dans l’arène.

Je le vis : sensation, la vue. Je rougis : impres-

sion physique et altération que suscite la sensation. Je pâlis à sa vue : intériorisation de l’impression sensible, sentiment de frayeur. Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue : ce célèbre aveu de Phèdre, rythmé (c’est un tétramètre régulier) et en même temps que brusquent les asyndètes, illustre parfaitement la rapidité et la surprise. L’héroïne de Racine est saisie par la passion. Le corps agit sur l’âme. Cette interaction psychosomatique n’est pas toujours parfaitement symétrique. Si tel est le cas, on parle alors de « passion ». En revanche quand la force du somatique l’emporte sur celle de l’âme, on dira alors que l’on est « ému ». A l’émotion, toute « physique » s’oppose ainsi le sentiment, tout entier « psychique ».

Mais l’anatomie est une étape essentielle dans l’émergence des sciences : pour la première fois le corps est étudié pour luimême, du moins sa morphologie. C’est pourquoi d’ailleurs elle se distingue de la physiologie qui étudie le fonctionnement des organes. C’est l’étude de la morphologie du corps humain. On la distingue de la physiologie qui étudie le fonctionnement des organes.

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PREMIÈRE PARTIE . Science et connaissance du Corps

A partir de cet interdit impérial et pour une période de quasiment dix siècles, l’anatomie fut une science souvent prohibée et la dissection une transgression très violemment réprimée.


CADAVRE

CHAIR

C’est un corps sans vie. Mais un corps sans vie n’est plus vraiment un corps. Ce n’est plus que de la chair abandonnée aux vers, acronyme macabre : caro data vermibus, ca – da – ver.

Ce n’est pas un synonyme du mot « corps », même si le corps humain est charnel. C’est le corps en tant que vécu, ressenti. Le corps en tant qu’il est absolument mien. Cette appropriation affective par le sujet de son corps que pourtant ordinairement il perçoit comme un objet dramatise la relation. D’où l’emploi d’expressions emphatiques où le mot « chair » apparaît : « la chair de ma chair », « les faiblesses de la chair » etc. La chair est sous la peau, elle renvoie à cette intimité de l’organisme que l’organisation cosmétique du corps masque souvent. Le glissement sémantique vers la chair pour dire le sexe, la sexualité est de ce point de vue extrêmement révélateur. C’est d’ailleurs aussi pour cela que la chair est vulnérable, faible, sans la protection de la peau. Sous la pachydermique moralité, la chair est alors protégée, endormie, bien à l’abri, recouverte de ces conventions qui tiennent chaud.

CERVEAU

Longtemps considéré comme siège de la connaissance et de l’émotion, avec la découverte à la fin du XIXème siècle des « neurones » par Golgi et Cajal, le cerveau gagne en « consistance ». Le développement des neurosciences qu’annonce JP Changeux avec L’Homme neuronal conduit à réduire l’activité mentale à des propriétés physicochimiques. Mais nos comportements ne relèvent-ils que de l’organisation des neurones et à leurs synapses ?

CHAROGNE

Carcasse d’un animal mort récemment. Ne se dit que d’un animal.

CORRUPTION

Du latin rumpere, rompre. La corruption, c’est la rupture de cette cohésion, précédemment décrite, celle du corps précisément. La solidarité des organes est brisée, le corps s’altère, il se décompose. L’âme est donc aussi le principe de l’unité du corps.

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DÉPOUILLE

C’est à l’origine un vêtement qu’on laisse. Et dans l’usage classique de la langue, le désigne la peau enlevée à un animal, arrachée. Le terme implique la violence d’un retrait brusque. C’est au sens large le corps en tant que la vie lui a été retirée.

DISSECTION

Galien a diffusé la pratique de la dissection sous l’Antiquité. Il s’agit « d’ouvrir », de couper (secare en latin) le cadavre pour observer l’agencement des organes qui se situent dans le corps humain. Le médecin Vésale atteindra le nombre record de 1540 dissections publiques.

GORGE

Sur le plan médical, il s’agit d’une transplantation d’un organe dans un organisme (ce qui la différencie de la greffe végétale). En 1967, Christiaan Barnard réalise la première greffe du cœur. Le corps est bien un mécanisme, avec ses rouges et ses pièces qu’il est désormais envisageable de remplacer. C’est l’avènement de « L’hommeMachine » selon La Mettrie.

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PREMIÈRE PARTIE . Science et connaissance du Corps

GREFFE

Longtemps exposée aux balcons des robes, la gorge des femmes joue avec l’histoire du désir masculin. L’érotisation de cette partie du corps féminin est complexe puisque celleci restaure la fonction nourricière, maternelle. Généreuse, elle entraîne la représentation de la femme vers le pôle maternel, plus avare d’elle-même, elle laisse percevoir une androgynie plus troublante.


HUMEURS

Dans la théorie humorale, le corps est constitué de quatre humeurs fondamentales : le sang, la pituite ou phlegme, la bile jaune et la bile noire. De l’action de ces humeurs dépendent les phénomènes vitaux… G. Vigarello Histoire du corps T.1

Mais surtout cette théorie héritée d’Hippocrate porte l’intuition de l’interaction psychosomatique. A l’origine d’un état d’âme, un dérèglement physique, un mauvais mélange du sang et de la bile noire : voir « Mélancolie ».

MAIN

Grâce à la main, le corps est humain. Cette main, signature de l’homme mais aussi moyen du corps humain pour s’approprier le Monde. L’action des hommes sur la Nature qui les environne n’est que « manipulation », dans tous les sens du terme.

MALADIE

Dysfonctionnement du corps-objet : le corps malade perd en cohésion et en solidarité. La maladie porte ainsi toujours le risque de la décomposition et de la désagrégation : une partie prend le contrôle et dérègle le tout, faussant d’emblée la perception de la réalité, perception métonymique et partant mensongère.

MATIÈRE

Le sanskrit mâ, la main, va conduire à materia qui désigne le bois mais travaillé par la main de l’homme qui en fait des poutres et des planches destinées à la construction. Materia, du latin materia, le bois de la charpente. Il se distingue de lignum, le bois combustible qu’on ramasse pour faire du feu. La matière est ainsi matériau, nature touchée par l’homme, c’est-à-dire culture. Husserl s’intéresse à ces évènements somatiques spécifiques que l’on appelle des « impressions sensibles ». De tels évènements se définissent en tant qu’ils font défaut aux choses « simplement » matérielles.

MONSTRE

Il se laisse déterminer par cette forme sans aucune finalité, ce corps inachevé ou composite dont la Nature se désolidarise, la reléguant du côté du hasard, de l’inachevé et de l’imperfection. Le corps monstrueux échappe à la mesure du corps défini socialement : trop petit, trop gros surtout, ou même trop grand. Le glissement du « très » au « trop » a valeur de jugement d’exclusion.

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MUSCLE

PHYSIOGNOMONIE

Il est sous la peau, contractile et volumineux, il assure le mouvement. Longtemps relégué aux exercices de l’armée ou à la vie des champs par les contemplatifs, le muscle donne à la « vie active » son impulsion et lui assure sa résistance. Associé à la force mais aussi à la vie et à la tonicité sexuelle, le muscle aujourd’hui triomphe à travers le culte de soi. Hommes et femmes musclés redéfinissent une érotique des corps que le romantisme avait fini par perdre de vue. L’écuyère, la trapéziste et le dompteur dynamisent le désir de ces corps durs et minces avec le Cirque à la fin du XIXème siècle, ils ouvrent la voie aux joggers et autres adeptes des salles de musculation.

Le corps est la limite visible et physique d’un sujet spirituel et invisible, c’est le préjugé sur lequel est fondé cette fausse science du corps. Mais là encore, le corps a quelque chose à dire, il nous parle. Il s’agira de simplement se faire écouter par le confesseur puis le psychanalyste.

PEAU

C’est l’enveloppe corporelle mais pas seulement : la peau est une frontière entre le corps intérieur et le monde extérieur, par les pores de la peau s’échangent des fluides, la sueur s’échappe mais l’eau ou un certain nombre de crèmes nourrissent en retour l’épiderme.

ORGANISME

PIED

Système constitué par l’ensemble des organes d’un être vivant. C’est un tout unifié auquel sont subordonnées toutes les parties. Kant dans la Critique de la Faculté de Juger relève cinq critères qui définissent l’organisme : une causalité interne, des capacités reproductive, régénérative, compensatrice et réparatrice.

écrit Aristote. Comme la main, le pied désigne l’humain, du moins son apparence, suggère le philosophe. Car précisément le pied n’est pas aussi habile que la main. Sur lui repose le corps, il n’est pas l’instrument d’une emprise sur les choses.

PATHOLOGIE

Partie de la médecine qui a pour objet les maladies en elles-mêmes.

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PREMIÈRE PARTIE . Science et connaissance du Corps

Les barbares n’ont d’hommes que les pieds


PLAISIR

Satisfaction des tendances sensibles et / ou sensuelles. Temporel, il est partant temporaire.

POILS

Les poils sont-ils une partie du corps ? On dit qu’ils le recouvrent, ce qui implique donc une distinction. De fait, le poil dissimule le corps, il lui retire son apparence humaine et révèle l’animal. Quant à la barbe, elle n’est valorisée (je pense à l’Antiquité) que si elle est taillée et la chevelure évidemment coiffée.

PULSION

Du latin pulsio, action de pousser. C’est la poussée aveugle de tendances biologiques, l’expression incontrôlée du corps dans ce qu’il a de plus intime.

SANG

C’est la vie même du corps qui circule avec le sang. Les Anciens imputaient même à sa nature l’explication du caractère, des sentiments. L’homme est soucieux car son sang est mauvais, il se fait du « mauvais sang », ou encore « un sang d’encre ». C’était la théorie des humeurs, encore si présente dans la langue imagée de l’oral. Lorsque le sang ne coule plus d’un corps, celui-ci est devenu cadavre.

SCHÉMA CORPOREL

C’est la représentation de notre propre corps. L’étude par exemple du schéma corporel chez l’enfant révèle comment ce dernier perçoit son corps et comment il le situe dans l’espace. Quand apparaissent notamment les membres et les mains des « patates » que commencent par dessiner les enfants, on interprète cela comme une évolution très positive dans le processus de maturation.

SENSATION

La sensation suppose le contact, mais pas n’importe lequel.

Contact signifie ici un évènement physique ; deux choses inanimées se touchent aussi, mais le contact du corps détermine à même le corps ou en lui des sensations. Husserl

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SEXE

Il est le prétexte préféré des religieux extrêmes pour dénigrer le corps car on lui prête l’appétit charnel le plus puissant associé aux plaisir les plus forts. L’activité génitale et scatologique sont généralement associées dans une expression supposée tout dire : le « bas corporel ». C’est lui qui constitue, par exemple, le ressort comique principal dans l’œuvre de Rabelais, par exemple. Et ce rire associé au « bas corporel » s’inscrit dans un renversement insolent et carnavalesque de l’ordre social. En punissant le sexe, en commandant de le dissimuler, voire de le mutiler, les sociétés modernes en Occident notamment lui ont du même coup reconnu une importance majeure. Il est devenu la métonymie du corps, son alpha et son oméga. Ce que par provocation dévoile au sens propre le tableau de Courbet que le peintre intitule « L’Origine du Monde ».

VIANDE

Du latin « vivere », la viande désigne tout aliment qui permet au vivant de vivre et de croître. Ainsi par exemple, au moyen-âge désigne-t-on le pain avec ce mot. Aujourd’hui la viande, maigre ou riche, renvoie au corps d’un animal dont on se nourrit. Il fonctionne alors bien comme un euphémisme qui évite de dire « corps mort », ce que ne manquent pas de rappeler les végétariens.

SOMATISATION

PREMIÈRE PARTIE . Science et connaissance du Corps

Du grec « sômatikos », corporel. Il s’agit du phénomène par lequel des sentiments, des préoccupations, le plus souvent des inquiétudes et des appréhensions se traduisent sur et dans le corps. Celui-ci rend alors visible, sensible, ce que « l’âme » maintenait caché.

SQUELETTE

Du grec « skeletos », corps desséché, momie. Le terme est utilisé en anatomie pour désigner l’ensemble des os d’un organisme vertébré. Au sens large et par métaphore, il s’agit de la structure. 17


DEUXIÈME PARTIE . Philosophies, Arts et religion : le souci du corps

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formule extraite du Phèdre. Le corps y est représenté comme le tombeau de l’âme. Se met alors en place une antinomie qui va travailler la pensée du corps en Occident : celle du lourd et du léger, de la pesanteur et de la grâce. Le corps est pesant, l’âme est volatile mais c’est elle qui donne au corps sa vie. De fait en grec, la psychè, c’est la respiration qui maintient le corps en vie, le souffle. L’âme c’est ce qui anime le corps. Du latin anima, souffle, particulièrement le dernier, celui qui s’échappe à l’instant de la mort. Dans l’usage commun, l’âme fait avec le corps, la paire. Elle est le siège de la sensibilité et de la pensée. Mais rapidement, on distinguera l’âme de l’esprit (le souffle, également). L’âme deviendra le principe de la vie sensitive pour perdre toute dimension intellectuelle.

ANOREXIE

ANTHROPOMÉTRIE

Etude des proportions du corps humain, puis par extension technique de la mesure de ce corps à des fins d’identification. On parle alors d’anthropométrie judiciaire. Si le terme est forgé par le belge Adolphe Quételet en 1870, c’est au criminologue français Alphonse Bertillon que l’on doit son application à la police judiciaire (mesures de la taille, de poids etc.). Le corps est ainsi unique et révèle une identité singulière.

ASCÈSE

Du grec askèsis, exercice. L’ascèse est un exercice... mais de quelle nature ? L’ascète s’exerce à la pratique d’un art exigeant ; au sens plus étroit et philosophique ou religieux, au renoncement et à l’austérité, à la mortification du corps. Certains ascètes s’efforcent de fuir les hommes, on les nomme anachorètes (anachoresis, la fuite) quand ils partent dans le désert, ermites dans les bois.

C’est une pathologie qui conduit à se priver volontairement de nourriture. Elle est souvent associée à l’adolescence de sujets qui manifestent ainsi leur refus. Mais elle relève aussi de l’ascèse. C’est le choix de faire peu à peu disparaître son corps pour finir par vivre presque sans corps pour se rapprocher de Dieu.

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DEUXIÈME PARTIE . Philosophies, Arts et religion : le souci du corps

ÂME

Ce tombeau que sous le nom de corps nous promenons avec nous, attachés à lui comme l’huître à sa coquille. On reconnaît la fameuse


AUTOMATE

Du grec automatos, qui pense par soi-même. L’étymologie trouble plus qu’elle ne facilite la compréhension du mot, puisque, dans notre langue, automatique qualifie une action réalisée sans qu’on y pense ! C’est que, par glissements, le sens premier s’est converti : automatos signifiant rapidement « qui se meut soi-même ». L’usage spécialise alors le terme dans le registre de l’artifice. L’automate est une machine (voir ce mot) susceptible d’effectuer un programme et de donner l’illusion de l’autonomie. Les XVIIe et XVIIIe siècles vont raffoler de l’objet ! Mais notre époque lui préfère le robot, du tchèque robota, travail forcé. Le dramaturge Karel Capek invente en effet ce néologisme pour désigner un « ouvrier artificiel ».

BÉHAVIORISME

Science du comportement où l’observation des mouvements du corps est fondamentale.

BLASON

Poème qui célèbre une partie du corps de la femme aimée. Le genre est ancien, on repère des blasons déjà chez Villon, chez Marot mais il se poursuit jusqu’au surréalisme et ses retombées : Breton, Aragon le pratiquent volontiers. Le blason le plus connu des lycéens demeure « La chevelure » de Baudelaire. Bien évidemment, le Blason est très ambigu : il loue le corps certes mais un corps morcelé, un corps réduit à une de ses parties (quelquefois l’une des plus discrètes et secrètes ; le « doux tétin » dont s’enticha Marot…). Exercice de célébration mais en même temps de réduction fétichiste.

BODY ART

Il ne s’agit que de la manifestation « artistique » d’une pratique rituelle de modification du corps qui passe le plus souvent par l’automutilation. Mais le port des « boucles d’oreilles », c’est déjà d’une certaine façon une esquisse de « body art », de même que la chirurgie plastique relève d’une intention de modifier le corps pour l’esthétiser, le rendre conforme à des normes esthétiques (à l’instar des chinois atrophiant les pieds des femmes pour les rendre minuscules). Il y a toutefois aujourd’hui dans ce que l’on appelle le « body art » une dimension provocante, notamment lors de « performances » au cours desquelles « l’artiste » soumet son corps à des traitements extrêmes. Perçages, scarifications, cuttings, marquage au fer rouge (branding)… la liste des pratiques automutilantes est longue et inventive. Elle puise généralement au fond des cultures et des rituels primitifs. 20


CULTURISME

Le culturisme se distingue de la pratique de la musculation en ce qu’il recherche non la force mais une forme d’esthétisme du corps. Le culturiste prétend offrir davantage un spectacle qu’une performance physique. Cette pratique a été introduite en Europe à la fin du XIXème siècle par Eugen Sandow.

COSTUME

Il protège, dissimule ou révèle le corps. Mais il peut tout autant le modifier, le contraindre, voire le discipliner. On rappellera l’usage multiséculaire du corset, de la gaine mais aussi le « faux-cul » ou encore la crinoline, cette armature constituée de baleines de fer ou de jonc que portaient les femmes sous jupons et robes afin de leur donner du volume. De fait, le vêtement interdit ou autorise certains mouvements, il enferme ou libère. En 1906, le grand couturier Paul Poiret abandonne le corset et crée des robes droites, sans taille marquée. C’est alors une audacieuse révolution.

CORPORELS

(Châtiments)

Nietzsche explique dans la Généalogie de la Morale que la violence a forgé la mémoire des peuples, comme la douleur infligée par les châtiments corporels a contribué à éduquer des générations d’écoliers. De fait, il s’agit toujours de frapper le corps pour marquer l’âme. L’usage des châtiments corporels a été définitivement prohibé en Grande-Bretagne il y a quelques années seulement. A présent dans l’Union européenne, la gifle reçue par un enfant fait débat. Est-elle ou non un acte délictueux ?

DIÉTÉTIQUE

Ensemble des règles alimentaires permettant de conserver une bonne santé mais surtout un poids maîtrisé. La diète est une restriction alimentaire volontaire nécessaire à la santé. Nous sommes entrés aujourd’hui à l’ère du régime et de la traque de la surcharge pondérale. Le corps trop gros, naguère rassurant et recherché car signe d’opulence, est à présent inquiétant. L’obésité est une pathologie qui frappe de plus en plus jeune, un nombre de plus en plus grand d’occidentaux.

COSMÉTIQUES

Les poudres, pommades, huiles, et autres crèmes destinées à embellir l’apparence du visage et à rendre celui-ci aussi harmonieux et magnifique que le cosmos, constituent pour cette raison les cosmétiques.

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DEUXIÈME PARTIE . Philosophies, Arts et religion : le souci du corps

CHIROMANCIE

C’est encore le corps qui parle mais cette fois il dit l’avenir dans les lignes de la main. Elle apparaît au XIIème siècle en Europe.


GRANDS CORPS (LES)

DISCIPLINE

Du latin discipulus, celui qui apprend. La discipline est, au sens propre, synonyme d’enseignement. Par extension, le mot recouvre un ensemble de règles de conduite, pour signifier, enfin, dans une acception très étroite un instrument de flagellation. Ces trois significations font système. Elles évoquent une éducation/contrainte, une instruction/dressage qui font de l’enseignement une violence nécessaire.

GESTE

C’est un mouvement du corps qui vise à exprimer un sentiment, une émotion, voire une signification. Le geste est un élément signifiant qui « fait signe » évidemment.

GYMNASTIQUE

Il s’agit de la culture physique qui dans la Grèce Antique se pratiquait nu. C’est d’ailleurs ce que signifie le mot. Mouvements enchaînés et répétés, sauts, courses… cet ensemble de pratiques est destiné à entretenir la souplesse et la musculature du corps mais sans aucune visée esthétique, contrairement au culturisme.

Cette expression qui n’a aucune réalité juridique désigne par habitude certaines administrations prestigieuses de l’Etat : le Conseil d’Etat, la Cour des Comptes, l’Inspection des Finances, l’Inspection Générale des Affaires Sociales… Les membres de ces administrations ont acquis leur esprit de corps en passant par une même Grande Ecole pour y être formé, l’Ecole Nationale d’Administration.

HÉDONISME

Philosophie fondée sur la recherche du plaisir et le souci du corps. Elle fut représentée dans le monde antique par Aristippe de Cyrène (IVème siècle avant JC).

HYGIÈNE

Le terme en grec signifie « ce qui est sain ». Il s’agit de l’ensemble des dispositifs destinés à favoriser et à entretenir la bonne santé du corps. La diététique et la culture physique sont partie intégrante de cette hygiène. Davantage qu’une hygiène du corps, on parle aujourd’hui d’une hygiène de vie.

HYPOCONDRIE

Troubles imaginaires suggérant une santé constamment altérée (G. Vigarello).

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MACHINE

Je ne reconnais aucune différence entre les machines que font les artisans et les divers corps que la nature compose annonce Descartes. Du grec mèchanè, invention ingénieuse. La machine est un artifice et fait triompher le génie inventif des hommes (comme le souligne donc l’étymologie). Au sens étroit, la machine est une invention qui est destinée à transformer une énergie qu’elle reçoit. Elle vise à rendre inutile le recours à la force (humaine ou animale), ce grâce à quoi la production gagnera en efficacité (plus de fatigue ni d’interruption des travaux pénibles). Néanmoins, l’ambivalence de ce génie humain reste perceptible dans le mot composé sur machine : machination. On y entend certes la construction ingénieuse, mais cet artifice est un piège. Une machination est en effet destinée à tromper. « Le cheval de Troie » est-il une invention glorieuse ? Certes, la machination (et le cheval est, en même temps, machine et machination, selon qu’on envisage l’objet ou le piège) est efficace, habile. Mais quel contraste entre l’issue de la guerre de Troie et la noblesse des combats qui l’ont rythmée dans l’Iliade ! Ulysse n’est pas Achille ! Homère lui invente un qualificatif, « aux mille ruses » : polymechanos.

MÉLANCOLIE

Vestige d’une enfance de la médecine, la mélancolie résultait selon les Grecs d’un dysfonctionnement de la rate (spleen en anglais) et d’un mauvais mélange de la bile noire dans le sang. Le mélancolique connaissait alors une instabilité de caractère – on dit encore « humeur » ! – le conduisant à des états de tristesse profonde, d’abattement, voire d’hébétude (môrosis en grec, donnant morose en français). Au XIXe siècle le mot mélancolie est un moment en concurrence avec lypémanie (lupè, le chagrin en grec). Devenu le mal véritable du siècle, le terme se banalise sous la forme d’un topos poétique. Il faut attendre la psychanalyse pour rendre au mot une signification forte : le mélancolique, ce sera celui qui ne parvient pas à « faire son deuil », prendre conscience et accepter une perte, un manque. Raison fantaisiste des médecins antiques, cliché poétique, dans les cas de mélancolie fait connaître une grande intuition : l’âme et le corps vont ensemble. Nos « humeurs » ont assurément leur origine dans l’organique, la matière vivante et fluide du corps.

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DEUXIÈME PARTIE . Philosophies, Arts et religion : le souci du corps

HYSTÉRIE

Apparence d’affections organiques sans lésions organiques décelables, l’hystérie joue un rôle principal dans l’Histoire de la psychanalyse. En effet, c’et en étudiant ce phénomène « d’attaques hystériques » que le jeune Freud mesure l’empire de l’inconscient et la dimension psycho-somatique d’un certain nombre de comportements jusqu’alors demeurés incompréhensibles et inexplicables.


MÉTOPOSCOPIE

Il s’agit encore d’un art de « faire parler le corps », de lui faire dire ce que l’esprit dissimule, de rendre visible l’invisible. Le mot est construit à partir de meôpos, le front et de skopein, observer. On déduit la personnalité et l’avenir d’un homme en observant les lignes de son front. C’est le physicien Jérôme Cardan qui au XVIème met au point cette pseudo science.

MORTIFICATION

De façon significative, le mot dérive du latin d’Église, il caractérise les privations, les souffrances, les humiliations que l’on s’inflige pour se punir d’avoir fauté. Particulièrement, ce sont des pratiques qui visent à maltraiter le corps, non seulement pour le punir s’il est l’origine du mal, mais aussi pour signifier un détachement, un dédain à l’égard de ce corps qui ne mérite aucun soin. Le corps est ainsi laissé à l’abandon, mal nourri, sale, infect. La mortification est le moyen de manifester le mépris du corps.

OBSCÉNITÉ

Du latin obscenus, sinistre, indécent, de mauvais augure. Une obscénité offense la pudeur et heurte les convenances. Du fait que nombre d’interdits frappent le corps et son exhibition, nombre d’obscénités sont des manifestations sexuelles ou scatologiques.

PASSION

Du grec pathos, souffrance. Par passion, il faut entendre d’abord passivité (qui dérive du même étymon) : affection du sujet par ce qui l’environne. Le corps affecte à son tour l’âme : la passion vient perturber la sérénité de l’esprit. Elle est violence sensible. Cette affection devient alors attachement (on songera à l’image que développe Platon dans la République : ces prisonniers enchaînés par le cou au fond d’une caverne). Le sujet passionné est alors si attaché à cette dimension du sensible qui l’affecte qu’il n’entend rien d’autre, n’accorde aucune importance à autre chose. Une partie du monde a pris l’importance du monde, le passionné prend la partie pour le tout : il perd toute lucidité, avec délice. Car si la passion est considérée jusqu’à Kant comme une maladie de l’âme, elle est d’autant plus condamnée que nul n’ignore que le malade ne souhaite pas en être guéri :

Si l’émotion est une ivresse, la passion est une maladie qui exècre toute médication, et qui par là est bien pire que tous les mouvements passagers de l’âme. Plus loin il ajoute :

Nul ne souhaite par lui-même la passion. Qui aimerait, en effet, se laisser enchaîner alors qu’il peut être libre ?

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PHRÉNOLOGIE

Cette « science » imaginée par Le Gall étudie le caractère d’un individu d’après la forme de son crâne. C’est toujours et encore cette volonté de trouver un moyen de faire parler le corps.

PLAIES

Ce sont les cinq plaies du Christ qui fondent ainsi une mystique géométrique : les quatre clous pour les quatre membres et le coup de lance sur le flanc. Des lèvres de cette plaie sur le côté se laisse voir l’intérieur du corps : Une

PRESTANCE

Maintien, comportement qui en impose. Avoir de la prestance c’est avoir de l’allure. Une expression plus mystérieuse et réservée aux femmes dit une forme particulière de prestance : avoir du chien. Pour qu’une femme ait « du chien », il ne suffit pas qu’elle soit belle ; il lui faut ce petit « truc en plus », ce charme indescriptible qui la rend totalement irrésistible aux yeux des autres. Le mot « chien » ici est synonyme de « coquin », et ne s’emploie pas au sens littéral. La prestance suppose un code social qui règle la façon de porter son corps.

RELIQUES

Le culte des reliques adore le corps à travers ses restes, ce qu’il en reste ! Les « reliquae » en effet ce sont les restes des corps saints.

SCATOLOGIE

L’essentiel du Bas corporel, la scatologie se définit comme cet attrait régressif pour le fécal, l’excrément. Le monde de Gargantua, par exemple est volontiers scatologique. La scatologie ne s’intéresse au corps que par ses déjections.

bouche que tous les mystiques dans leurs embrassements du crucifix aspirent à baiser. G. Vigarello Histoire du corps

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DEUXIÈME PARTIE . Philosophies, Arts et religion : le souci du corps

Reste à constater que cet attachement excessif et qui ne manque pas de faire souffrir (pathos) est la cause d’un intérêt, d’une mobilisation extraordinaire. Bachelard montre ainsi ce que la formation de l’esprit scientifique doit à l’attachement du savant aux éléments (l’eau, l’air, la terre et le feu). Immobilisé par la fascination qu’exerce sur lui l’objet de sa passion, le passionné se trouve, par effet retour, mobilisé par cet objet même qu’il étudiera avec enthousiasme, auquel il consacrera l’essentiel de son énergie. La passion devient principe d’action, valeur, motif d’engagement.


STIGMATES

Stigma, en grec, dit la piqure, la marque au

fer rouge. Le terme désigne en particulier les marques que portent les mystiques pour évoquer les plaies du Christ. Le stigmatisé ramène du contact quasiment charnel avec l’Infini ces marques qui signent son expérience si intense qu’elle ne pourrait se dire autrement.

STRIP-TEASE

Autrefois appelé par les amateurs d’un poétique « effeuillage », le strip-tease passionne philosophes et sociologues des années 70 qui lui prêtent une portée intéressante en ce que ce type de spectacle réalise exactement l’inverse de ce qu’il promet et annonce. Barthes en fait une de ses « mythologies » et montre que le décor, la musique, les gestes excessifs soulignent l’artifice d’une danse qui à mesure que se déshabille la danseuse la revêt de signes qui en dérobent au final la nudité. Baudrillard dans L’échange symbolique et la mort va plus loin :

TATOUAGE

La modification profonde du statut du tatouage ou du piercing dans les années 1990 marque simultanément la promotion du corps comme instance première de la consommation et souci de s’individualiser même en parcourant les mêmes allées marchandes, phase rebelle ou excentrique. David Breton

Le tatouage a en effet une histoire. D’abord délinquant, le tatouage (celui du prisonnier ou de l’esclave) devient la marque des réprouvés, des marginaux. Il investit ensuite une autre marge, celle des comportements sexuels extrèmes (brandings, burnings, cutings, fétichismes) pour investir à présent une grande partie de la société. Puis dans les années 1990, le recrutement ne cesse de s’élargir à une population toutvenant. L’ampleur culturelle des modifications corporelles dit également cette volonté de signer son corps, de se l’approprier pour devenir enfin soi.

Le corps est libéré vis-à-vis d’un puritanisme qui vise à le dégrader, «libéré comme objet/ signe et censuré dans sa vérité subversive du désir car chaque pièce du vêtement qui tombe ne rapproche pas du nu. C’est pourquoi le strip-tease est lent : il devrait aller le plus vite possible, si sa fin était la dénudation sexuelle, mais il est lent parce qu’il est discours, construction de signes, élaboration minutieuse d’un sens différé.

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DEUXIÈME PARTIE . Philosophies, Arts et religion : le souci du corps


TROISIÈME PARTIE . Figures du corps

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EPICURE

Pour Epicure, ce philosophe athénien qui installe son séjour philosophique dans un jardin à la périphérie de la ville, tout est corps au sens où tout est matériel. Mais il ne faut évidemment pas confondre épicurisme et hédonisme. Le matérialisme d’Epicure est une sagesse qui cherche la mesure dans la sensation.

GALATÉE

C’est le nom que Pygmalion donne à sa statue, une statue dont la beauté du corps est si grande qu’il en tombe amoureux. Galatée, c’est le corps féminin par excellence, artifice inerte tant que la déesse Aphrodite ne lui a pas concédé la vie, une âme.

LAVATER

Johann Kasper Lavater, théologien suisse qui vécut à la fin du XVIIIème siècle invente un mot et du même coup une « science » qui va influencer le siècle qui commence. Auteur de L’art de connaître les hommes par la physionomie, il établit une série de correspondances entre la forme et l’apparence du corps et des traits de caractère. Lavater veut donner à la chiromancie et la métoposcopie une tenue scientifique. Il va influencer Goethe, Balzac et s’inscrire dans une plus vaste quête de décryptage du Monde.

MARILYN

Pas Marilyn Monroe, encore moins Norma Jeane Baker… simplement Marilyn pour nommer d’abord un corps, un corps sur lequel fantasment les années cinquante. C’est une Galatée moderne mais qui rappelle par l’attrait qu’elle suscita qu’un corps désiré, ce n’est pas seulement une plastique obéissant aux normes de la société, c’est aussi une « prestance », une manière singulière de s’animer, bref une âme. TROISIÈME PARTIE . Figures du corps

AMAZONES

Elles furent selon la légende et l’étymologie de leur nom (a, privatif suivi de mastos/ mazos, le sein, d’où « privée de sein ») les premières à s’imposer une automutilation du corps. Ces femmes guerrières coupaient ainsi leur sein droit pour tirer à l’arc plus efficacement.

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ORIGÈNE

Mortification suprême. Origène se mutile en tranchant son sexe pour se libérer du désir et se rapprocher des anges. Il meurt au Troisième siècle et son enseignement est jugé hérétique par le deuxième concile de Constantinople.

PILATES

Sans aucun rapport - même lointain - avec le procurateur de Judée qui condamne Jésus à mort, ce Pilates-là est allemand, il naît en 1880 et surtout invente une méthode de relaxation et de maîtrise de certains muscles, inspirée par le yoga et par l’observation de l’étirement des animaux. Le cours de Pilates… La métonymie rend l’expression mystérieuse et on oublie alors l’existence de ce Joseph Pilates, né en Allemagne en 1880, inventeur d’une méthode de relaxation et de maîtrise de certains muscles, inspirée par le yoga et l’observation des étirements des animaux. On cherchera à rééquilibrer les muscles du corps à partir de la colonne vertébrale et du caisson abdominal. Pour Joseph Pilates, « on améliore sa santé en améliorant sa posture. » Aujourd’hui la méthode de Joseph Pilates est devenue extrêmement populaire et son enseignement s’est très largement répandu.

SAINTE LYDWINE DE SCHIEDAM

Sainte patronne des patineurs, c’est une mystique qui vécut en Hollande de 1380 à 1433. A la suite d’une chute sur la glace, la toute jeune Lydwine se casse la jambe. A partir de cet accident son corps va devenir le théâtre de toutes les maladies et de toutes les souffrances possibles. Miraculeusement ses multiples plaies purulentes diffusaient un parfum exquis de rose. Elle incarne pour ses hagiographes le corps souffrant. Elle devient alors la sainte des handicapés.

VÉSALE

Né à Bruxelles en 1514, il meurt en 1564. Il vécut chez ses parents dans une maison proche du lieu des exécutions capitales, ce qui lui donna l’occasion d’observer les corps des suppliciés à loisir. Jamais loin des gibets ou des cimetières, que ce soit à Paris ou à Louvain, il pratiqua de nombreuses dissections pour publier en 1543 De humanis corporis fabrica et ses 300 planches qui donnent leurs lettres de noblesse à l’anatomie :

Je me suis occupé de l’anatomie et je l’ai enseignée de façon à ce que rien de ce que nous ont transmis les anciens ne restât dans l’ombre.

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V.

VITRUVE (L’HOMME DE)

La Nature a distribué les mesures du corps humain comme ceci… ces mots présentent le

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TROISIÈME PARTIE . Figures du corps

célèbre dessin que réalise vers 1490 Léonard de Vinci d’après l’étude des œuvres de l’architecte romain Vitruve. On y voit les proportions idéales du corps humain, inscrits dans un cercle et un carré. L’Homme s’y inscrit comme la nouvelle mesure de toute chose et le dessin de Vinci d’après Vitruve devient l’emblème de la Renaissance.


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270 PLACES OUVERTES MEMBRE DE LA BANQUE COMMUNE D’ÉPREUVES (BCE)

Au moment de leur inscription définitive, les étudiants peuvent choisir librement d’intégrer le campus de Paris, Bordeaux ou Lyon, quel que soit leur rang de classement.

ÉPREUVESÉCRITES Choix des épreuves écrites Option Scientifique Cœf. Contraction de texte Épreuve HEC 3 Résumé de texte Langue Vivante 1 IENA 8 Langue Vivante 2 IENA 5 Dissertation culture générale Épreuve EM Lyon 5 Mathématiques Épreuve EM Lyon 4 Histoire, Géographie et Géopolitique Épreuve ESCP Europe 5 Économie, Sociologie et Histoire Économie-Droit Gestion-Management Total coefficients Choix des épreuves écrites Contraction de texte Langue Vivante 1 Langue Vivante 2 Dissertation littéraire Dissertation philosophique Histoire Épreuve à options Épreuves ENS-BEL Total coefficients

Option Economique Épreuve HEC IENA IENA Épreuve EM Lyon Épreuve EM Lyon Épreuve ESCP Europe -

30 Option B/L Épreuve HEC IENA IENA Épreuve ESSEC Epreuve HEC Epreuve ESCP Europe Épreuve ESSEC -

Cœf. Option Technologique Cœf. 3 Épreuve ESC 4 7 IENA 3 6 IENA 2 5 Épreuve ESC 3 3 Épreuve ESC 3 6 Épreuve ESC 6 Épreuve ESC 9 30

Cœf. 3 7 5 4 4 3 4 30

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Option Littéraire (A/L et ENS Lyon) Épreuve HEC IENA IENA Moyenne des notes

30 Cœf. 6 8 6 10 30


ÉPREUVESORALES Entretien Coef. INSEEC Business School

Langue Vivante 1 IENA

20

Langue Vivante 2 IENA

6

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C O N TA C T S

ADMISSIONS & CONCOURS CAMPUS PARIS Arthur WALUS awalus@inseec.com 27, av. Claude Vellefaux 75010 PARIS T. +33 (0)1 53 38 11 98

CAMPUS BORDEAUX Nathalie METZ nmetz@inseec.com Hangar 19 - Quai de Bacalan 33070 BORDEAUX T. +33 (0)5 56 01 77 94

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CAMPUS LYON Carole FORTIER cfortier@inseec.com 25, rue l’Université 69007 LYON T. +33 (0)4 78 29 77 35

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