african Business Journal N°17

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N° 17 • janvier-février-mars 2016

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PRIX public : 3 500 F CFA | Zone europe : 4.0 € | Maroc : 45 dh

Ameenah Gurib-Fakim Présidente de la République de Maurice

«La bonne gouvernance est capitale pour l’émergence des pays africains» Stawi Industries. La transformation agricole, tremplin vers l’émergence Notation financière. Quand l’Afrique note l’Afrique Energies renouvelables. Le Togo se met au vert


Pensez à vos cadeaux d’entreprise de fin d’année !

Avec Managentsia, ID. manager diffuse une information synthétique de qualité avec des outils qui permettent aux chefs d’entreprise de réfléchir et d’agir autrement.


En ce début de l’année 2016, que pouvons-nous souhaiter à notre continent ?

Alioune GUEYE

Il y a urgence à introduire l’enseignement de l’entrepreneuriat à l’école, à former les formateurs, à encourager les vocations scientifiques clé de l’innovation.

De la croissance, du développement, la paix et la stabilité? Tout cela à la fois. Mais à bien y regarder, on comprend bien que la clef qui garantira croissance, développement, et stabilité dépendra de notre capacité à créer les 140 millions d’emplois dont notre jeunesse africaine a besoin. Pour y parvenir et en comptant «large» à raison de 10 emplois par entreprise, il nous faudra créer chaque année 14 millions de PME/PMI pérennes. Ce sont donc 14 millions d’entrepreneurs «transformacteurs» qu’il nous faut «fabriquer». On sait aussi que le taux de mortalité de création d’entreprises atteint les 90 %. Assurer la pérennité de 14 millions de PME signifie qu’il faut en créer 140 millions, dont 14 survivront aux cinq années fatidiques, la fameuse «vallée de la mort». Il faut ainsi 140 millions de créateurs d’entreprises, dont 14 passeront le cap des 5 années. Ces entrepreneurs sont les héros silencieux du Continent, à qui demain nous devrons notre salut. Point n’est besoin de rappeler que ce n’est pas l’État qui crée les emplois, mais les entreprises. Et ce sont les entrepreneurs qui créent ces entreprises. Il y a urgence à introduire l’enseignement de l’entrepreneuriat à l’école, à former les formateurs, à encourager les vocations scientifiques clé de l’innovation. Après, il faudra soutenir financièrement les PME, car compte tenu du taux de mortalité élevé, cette option est incontournable. C’est comme cela que nous fabriquerons une masse critique d’entrepreneurs dont notre Continent a besoin. Bien entendu, cela ne signifie pas que tous les écoliers seront des chefs d’entreprise, tout comme tous les soldats ne finiront pas généraux, mais au moins ils intégreront le «mindset» de l’entrepreneur et agiront comme intrapreneurs dans l’administration, les collectivités locales, les entreprises publiques ou privées et non comme des exécutants dociles. Voilà l’Afrique que nous voulons: entreprenante, innovante et audacieuse qui propose plus qu’elle ne subit; et qui est l’acteur de sa propre transformation.

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PUBLICATION TRIMESTRIELLE N°17 | Janvier-Février-Mars 2016

Le Magazine de l’Afrique en mouvement exclusif

u  le grand entretien

Directeur de la publication Alioune Gueye agueye@africanbusinessjournal.info Rédacteur en chef Elimane Sembène esembene@africanbusinessjournal.info Secrétaire de rédaction Saloua El Hachami Rédaction centrale (Maroc) Elimane Sembène, Baye Sakho, Babacar Seck, Moussa Sène. Correspondants Bachir Sylla (Guinée Conakry) Fortuné Sossa (Bénin) Mohamed Dagnoko (Mali) Sylvio Combey (Togo) Cathy Koum (Cameroun) Jean Bosco Nzosaba (Burundi) Boureima Balima (Niger) Carmen Soraya Merheb (Côte d'Ivoire) Albert-Baudouin Twizeyimana (Rwanda) Pamela Koumba (Afrique du Sud) Correctrice Narcisse Laamrani Maquette Tebiche Samir by Insolite tebiche@insolite.ma +212 665 24 05 48 Photos Laurent Laveille (ABJ) AFP Editeur Afrique Challenge 11, Cité Air France, Ouest Foire , Dakar Tél: +221 33 820 74 44 Fax: +221 33 820 74 46 abj@lafriquequiose.com Abonnement & Publicité Ibrahima Thiam Mob.: +212 668 69 73 19 Bur.: +212 522 36 04 18/20 it@regienordsud.com Périmètre de distribution Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo, Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée, Equatoriale, Tchad, RDC, Maroc, Tunisie, Algérie, Mauritanie, France, Belgique, Suisse

Ameenah Gurib-Fakim Présidente de la République de Maurice

Dans cet entretien exclusif accordé à African Business Journal, Ameenah Gurib-Fakim, la nouvelle Présidente de la République de Maurice, qui a entamé son mandat depuis plus de 6 mois, dévoile les facteurs clés de réussite de l’île Maurice, un des pays les plus dynamiques sur le plan économique en Afrique, en attestent son leadership sur les classements économiques majeurs, notamment le rapport Doing Business de la Banque mondiale, les grandes priorités de son programme pour renforcer cette croissance économique, la diplomatie économique de son pays, et l’importance de la bonne gouvernance en Afrique.

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u  Sur le fil 04 > Agriculture: Le Mali, 2e producteur de riz en Afrique de l’Ouest

>Transports : Sept pays africains connaitront une hausse de 7 à 8%     de leurs passagers aériens d’ici à 2034  > Coopération: L’Union du Maghreb arabe crée sa banque 06 > Green Business: Création d’une académie dédiée aux technologies solaires au Mali  > Financement: Le MCC octroie une subvention de 300 milliards de FCFA à la Côte d’Ivoire  > Investissement: La Chine veut former plus de 400.000 techniciens africains 07 > Business: Attijariwafa bank lance le "Club Afrique Développement"  > Risque-pays: Huit pays africains présentent un risque politique faible  > Santé: Projet de construction d’une chaîne d’hôpitaux privés en Afrique subsaharienne

u  Conjoncture

ISSN : 2230-1933 Impression Imprimerie OKAD EL JADIDA 5, avenue Hassan II. Quartier industriel Vita 10050 Rabat- Maroc Tél. : +212 537 79 69 70/71/73 Fax: +212 537 79 85 56 Email: okad@menara.ma Copyright © ABJ - La reproduction, même partielle, des articles et illustrations de ABJ est strictement interdite, sauf avec l’accord de l'éditeur. Ce numéro a été tiré à 20 000 exemplaires.

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08 > ALN 2015: Supprimer les visas pour stimuler le commerce intra-africain 10 > Industrie: Conakry se met aux Bluezones 12 > Ciment au Cameroun: une bataille en béton 14 > Consommation: Le café burundais séduit le marché mondial 16 > Cameroun: Le programme New Generation pour inciter les jeunes   à la culture du cacao

18 > Mali: Quand la baisse du coût du loyer enchante et déchante 20 > Afrique du Sud: Le chômage, une épine dans le pied du gouvernement


u  Perspectives

22 > Investissement: Vers la réduction des délais de passage des marchandises au port de Douala 24 > Microfinance: Jatropha joue dans la cour des grands 26 > Guinée: L'industrie du livre cherche lecteurs 28 >Cameroun: La Chambre d’agriculture crée une microfinance agricole 30 > Bénin: Développer le tourisme via la "Route des pêches" 32 > Afrique du Sud: Vers la gratuité des études dans les universités ? 34 > Burundi: Hausse de la production de poisson dans le lac Tanganyika u  les transformacteurs

44 > Entretien avec Thione Niang : «Nous privilégions les jeunes qui sauront être des leaders au sein de leur communauté, ville ou pays.» u  Focus

u Business Case

66 > Stawi Industries: La transformation agricole, moteur de la croissance durable 68 > Consommation: Proposer des aliments à valeur nutritive 69 > Ressources humaines: Le dévouement et la polyvalence, clés du succès 70 > Impact social: Accroitre les revenus des petits agriculteurs 73 > Perspectives: Exporter ses produits dans le marché sous-régional u african sectoral journal

74 > Énergies renouvelables: Le Togo veut se mettre au vert 76 > Entretien avec Kueku Banka Johnson : «Nous voulons faire de Lomé un centre d’énergie renouvelable» 78 > Innovation: Une pompe solaire made in Togo 80 > Entreprenariat durable: Quand les lobbies internationaux dérangent...

u african managementjournal

82 > La carte d’empathie pour mieux connaitre vos clients 86 > Comment faire face aux problèmes organisationels u african technology journal

46 > Notation financière: Quand l’Afrique note l’Afrique 48 > Notation financière: États-Unis le berceau, Moody le précurseur 50 > Rating: Que veut dire notation financière ? 52 > Agences de notation: L’hégémonie d’un oligopole 54 > Marché africain: Quand les agences africaines rivalisent avec les majors 56 > Entretien avec Seydina Tandian : «Nous voulons couvrir les marchés émergents et pré-émergents» 60 > Entretien avec Stanislas Zeze: «Bloomfield voulait combler un besoin existant» 64 > Entretien avec Philippe Clerc: «Envisager la création d’une agence continentale»

u african entrepreurshipjournal

94 > Investissement: L’Afrique du Sud, le pays où il faut entreprendre… 95 > Mentoring: Bientôt des incubateurs d’entreprises culturelles en Afrique 96 > Accompagnement: "Pitch Hub Africa" plébiscite les projets innovants en Afrique 97 > Concours: Le groupe Total lance «Startupper de l’ année» pour stimuler la créativité des entrepreneurs africains u african financial journal

98 > Assurances: Un secteur qui peine à décoller au Mali 100 > Banques: Ouverture de 8.000 nouvelles agences bancaires en Afrique subsaharienne d’ici 2020 101 > Banques: Afrique francophone, fief des groupes panafricains 102 > Export: BMCE Bank of Africa et Maroc Export créent "African Business Connect" u green business

104 > Côte d’Ivoire: Une "Caravane-Cacao" pour accompagner les producteurs u bloc-notes

106 > Amazing Ethiopia

u livres du trimestre

90 > Concours: Facebook veut stimuler la créativité africaine 91 > Ouganda: Google installe 120 zones Wi-Fi 92 > Audiovisuel: Lancement d’Africanews, la chaîne panafricaine d’Euronews 92 > Audiovisuel: Lancement d’Africanews, la chaîne panafricaine d’Euronews

108 > Made in Africa, Industrial Policy in Ethiopia de Arkebe Oqubay > L'intégration de l'Afrique dans l'économie mondiale de Arnaud Bourgain, Jean Brot et Hubert Gérardin u post-scriptum

110 > Indépendance: Commémorer oui, célébrer non… AFRIcan business journal | N°17 | 3


sur le fil

Agriculture Le Mali, 2e producteur de riz en Afrique de l’Ouest

Énergie La Belgique veut électrifier 6.873 ménages rwandais La Belgique prévoit d’accorder une subvention de 18 millions d’euros à au gouvernement rwandais pour améliorer l’accès de la population à l’électricité, suite à un accord signé entre les deux parties. Cette somme permettra de fournir de l’électricité à environ 6.873 ménages ainsi qu’à des entreprises et à des infrastructures communautaires telles que les hôpitaux et les écoles. Le coût du projet est estimé à 13,65 millions d’euros ; le Rwanda participera à hauteur de 1,65 million d’euros. La Coopération technique belge assurera sa mise en place sous la supervision du Rwanda Energy Group. 

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Le Mali devient le deuxième producteur de riz en Afrique de l’Ouest derrière le Nigéria. Il a réalisé une production de 2,451 millions de tonnes de riz à l’approche de la fin de la campagne rizicole 2015/2016 soit une hausse de 13% par rapport à la campagne précédente. D’après Balla Keita, responsable de la direction des statistiques du ministère malien du Développement rural, «la croissance est due à la bonne pluviométrie, à une croissance des terres cultivées, aux nouvelles variétés telles que le Nérica et à une plus grande utilisation des fertilisants encouragée par les subventions». 

Transports Sept pays africains connaitront une hausse de 7 à 8% de leurs passagers aériens d’ici à 2034 Sept pays africains verront leur nombre de passagers aériens augmenter de 7 à 8% en moyenne d’ici 2034, d’après des prévisions relatives au trafic aérien à l’échelle mondiale publiées le 26 novembre par l’Association internationale du transport aérien (IATA). Il s’agit plus précisément du Malawi, du Rwanda, de la Sierra Leone, de la République centrafricaine, de la Tanzanie, de l’Ouganda et de l’Éthiopie. À en croire l’IATA, ils figurent parmi les dix pays qui enregistreront les plus fortes croissances annuelles en pourcentage de leur nombre de passagers aériens. «Le nombre de passagers devrait atteindre 7 milliards d’ici 2034 avec une croissance annuelle moyenne de la demande de 3,8%. C’est exactement le double des 3,5 milliards attendus en 2015», révèle l’IATA.

Coopération

L’Union du Maghreb arabe crée sa banque L’Union du Maghreb arabe (UMA) a réalisé un pas de plus dans son processus d’intégration. L’organisation maghrébine a officiellement lancé la Banque maghrébine d'investissement et de commerce extérieur (BMICE) lors de son assemblée générale constitutive qui s’est déroulée le 21 décembre à Tunis. La nouvelle institution disposera d’un capital initial de 150 millions de dollars et assurera les financements dans le secteur des transports, des infrastructures, des télécommunications et de l’électricité, dans les cinq pays membres (Maroc, Algérie, Mauritanie, Tunisie, et Libye). Selon le Premier ministre tunisien, Habib Essid, «cette banque permettra la réalisation de l’intégration économique et sociale entre les pays maghrébins à travers le renforcement des flux de capitaux, des investissements et des échanges commerciaux». L’UMA représente un marché de 90 millions de consommateurs. Le commerce sous-régional entre les membres de l’organisation ne représente que 3% de l’ensemble des échanges commerciaux de ces États, soit l’un des taux d’intégration les plus faibles dans le monde. À en croire le Fonds monétaire international (FMI), la mise sur pied d’une intégration économique permettrait à ces quatre pays de gagner 2 à 3 points de croissance par an. 

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sur le fil

Green Business

Création d’une académie dédiée aux technologies solaires au Mali

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L’entreprise Solektra International a inauguré, le 19 décembre à Bamako, la Solekta Solar Academy, une institution de formation dédiée aux technologies solaires et qui formera chaque année 200 ouvriers qualifiés. L’école ouvrira ses portes ce mois de janvier. Ces ouvriers bénéficieront d’une formation théorique et pratique sur des thèmes tels que les systèmes d’électrification décentralisée en milieu rural ou la sensibilisation sur la dynamique du marché solaire, et des cours pratiques dispensés grâce à des équipements de simulation de pointe. Ce projet entre dans le cadre du programme Akon Lighting Africa initié par l’entreprise et qui vise l’électrification des villages en Afrique. Selon Samba Bathily, co-fondateur avec les Sénégalais Thione Niang et le chanteur Akon de la société Solektra, «il faut une main-d’œuvre suffisamment nombreuse et qualifiée pour endiguer la crise énergétique que traverse l’Afrique depuis plusieurs années». D’après Akon, «les technologies solaires sont aujourd’hui rentables et peuvent être déployées massivement pour accompagner le développement économique de toute l’Afrique. Notre continent aura bientôt les moyens de tirer la croissance mondiale».

Financement Le MCC octroie une subvention de 300 milliards de FCFA à la Côte d’Ivoire La Côte d’Ivoire va bénéficier d’une aide de 500 millions de dollars (300 milliards de FCFA) sur cinq ans, octroyés par l’agence américaine Millenium Challenge Corporation (MCC). C’est ce qu’a révélé le Premier ministre ivoirien, Daniel Kablan Duncan, le 17 décembre 2015. L’agence américaine a publié le 16 décembre la liste des pays bénéficiaires de ces subventions à compter de 2016. Outre la Côte d’Ivoire, on y retrouve le Sénégal (qui avait déjà reçu 540 millions de dollars entre 2009 et 2015) et le Togo. Le MCC, qui existe depuis 2004, a pour but de réduire la pauvreté et de promouvoir la croissance. 

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NEWS Investissement La Chine veut former plus de 400.000 techniciens africains Former 240.000 techniciens africains en Chine et 200.000 autres en Afrique, c’est l’engagement pris par le Président chinois, Xi Jingping, lors du Sommet Chine-Afrique qui s’est déroulé début décembre 2015 à Johannesburg. D’après lui, ces formations permettront au continent de disposer de l’expertise nécessaire pour son développement industriel. Il promet également une aide de 60 milliards de dollars à l’Afrique. «La Chine a décidé d’octroyer un total de 60 milliards de dollars d’aide financière, incluant 5 milliards de prêts à taux zéro et 35 milliards à taux préférentiels» a-t-il annoncé. 


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Business

Groupe à condition qu’ils répondent à des critères d’éligibilité bien précis», précise le groupe bancaire marocain. Les adhérents devront verser un abonnement annuel de 10.000 dirhams (600.000 FCFA) ou 900 euros (pour les adhérents hors d’Afrique) Concrètement, cette plateforme qui sera opérationnelle dès janvier mettra à la disposition des adhérents d’appels d’offres en Afrique, des études économiques et veilles sectorielles, et une base de données sur plus de 180 pays. Ils auront aussi l’opportunité de participer à des évènements et forums économiques, des forums internationaux, et des petits déjeuners thématiques. Ces derniers pourront aussi prendre part à des missions BtoB «sur mesure», des missions de découverte pays/ marché et à une Market Place «qui

Risque-pays Huit pays africains présentent un risque politique faible Huit  pays africains figurent dans la catégorie des pays qui présentent un risque politique faible, d’après la Carte mondiale des risques publiée le 14 décembre par le cabinet Control Risks spécialisé dans la gestion des risques globaux. Il s’agit du Maroc, du Sénégal, du Cap-Vert, des Seychelles, de la Namibie, de l’Île Maurice, du Botswana et du Ghana. Par contre, la majorité des pays du continent figure dans la catégorie des pays qui présente un risque politique moyen. Selon le document, 22 pays et territoires africains se classent, quant à eux, dans la catégorie risque élevé avec en tête l’Algérie, l’Égypte, et le Niger.  

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Le groupe Attijariwafa bank a lancé, le 17 décembre à Casablanca, le "Club Afrique Développement", une plateforme pour initier des débats et des rencontres d’affaires entre des dirigeants d’entreprises et les opérateurs économiques du continent. Selon le PDG du groupe, Mohamed El Kettani, le club offrira à ses adhérents «une plateforme d’informations riches et actualisées, qui leur permettra d’initier et d’entretenir de nouvelles sources de création de richesses. Il met aussi à la disposition de ses adhérents des services de mise en relation et un agenda riche en évènements portant sur des thématiques économiques». Ce club cible principalement les dirigeants et les chefs d’entreprises, les hauts commis de l’État, et les leaders d’opinion en Afrique et dans le monde «qu’ils soient clients ou non du

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Attijariwafa bank lance le "Club Afrique Développement"

donne accès à plus de 30.000 partenaires potentiels présents dans 17 pays». Attijariwafa bank prévoit aussi d’accompagner les investisseurs dans leur démarche de prospection et leur permettre de bénéficier de sessions de formation sur des thématiques liées au management et au leadership.

Santé Projet de construction d’une chaîne d’hôpitaux privés en Afrique subsaharienne Proparco, filiale de l’Agence française de développement dédiée au secteur privé, a noué une alliance avec le groupe mauricien CIEL pour construire une chaîne d’hôpitaux privés en Afrique subsaharienne, a annoncé l’entreprise dans un communiqué publié le 17 décembre. L’entreprise pourrait ainsi créer une centaine de lits supplémentaires d’ici à 2020, et accueillir 150.000 patients. En Afrique subsaharienne, les États consacrent seulement en moyenne 4% de leur Budget à la santé, contre 15% dans les pays développés, estime la Société financière internationale. 

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conjoncture

ALN 2015

Supprimer les visas pour stimuler le commerce intra-africain Le think tank African Leadership Network (ALN) a organisé, du 3 au 7 novembre, en partenariat avec le groupe OCP (Office chérifien des phosphates), sa sixième conférence annuelle sur le thème «Quelles sont les frontières à clarifier ? Lesquelles préserver et lesquelles abandonner pour faciliter une Afrique plus prospère ?» De jeunes leaders et entrepreneurs provenant de 35 pays africains ont pris part à cet évènement. Par Elimane Sembène

Marrakech a été début novembre 2015 le point de convergence des jeunes leaders du continent. La ville ocre a accueilli, du 3 au 7 novembre, la conférence annuelle de l'African Leadership Network (ALN). D’après les organisateurs, pas moins de 400 participants venus de 40 pays (80% d’Afrique et 20% hors Afrique) notamment des investisseurs, des entrepreneurs, des universitaires et des experts représentant différents domaines tels

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que la technologie et l’innovation, la finance, les médias et RP, le secteur public, le conseil, la comptabilité, l’énergie, les capitaux privés..., ont pris part à cette grand-messe. L’objectif était de permettre à ces futurs dirigeants d'échanger et de partager leurs idées, de tisser des partenariats et de discuter des stratégies à mettre en œuvre pour favoriser le développement socioéconomique et promouvoir la prospérité dans le continent.

Supprimer les visas pour stimuler le commerce intra-africain «Quelles sont les frontières à clarifier ? Lesquelles préserver et lesquelles abandonner pour faciliter une Afrique plus prospère?» Telle était le thème principal de cette édition. En clair, il s’agissait d’étudier les mécanismes à mettre sur pied pour développer le commerce intra-africain et stimuler la croissance régionale. Les échanges commerciaux entre les pays africains sont faibles


ALN, de quoi s’agit-il ?

A f r i c a n  L e a d e r s h i p Network est un réseau présent dans plus de 40 pays et qui regroupe plus de 1.500 leaders influents en Afrique, notamment des représentants du secteur privé, de gouvernements, et de la société civile. Son objectif est de promouvoir le leadership à l’échelle continentale, de favoriser l’esprit entrepreneurial et les relations d’affaires entre les jeunes leaders africains ainsi que d'encourager l’investissement et le commerce intra-africain.

L’objectif de la conférence annuelle de l'ALN est de permettre à des futurs dirigeants d'échanger et de partager leurs idées, de tisser des partenariats et de discuter des stratégies à mettre en œuvre pour favoriser le développement socioéconomique et promouvoir la prospérité dans le continent. contrairement à la réalité observée dans d’autres régions du monde. Aujourd’hui, les échanges commerciaux intra-africains représentent seulement 12%, loin derrière les 55% en Asie et les 70% en Europe. Pour renverser cette tendance, ALN propose notamment la suppression des visas et l’instauration de la libre circulation. Des ateliers pratiques joignant l’utile à l’agréable ont été organisés durant cette rencontre pour inciter davantage les participants à réfléchir sur les solutions à mettre sur pied pour stimuler le commerce intra-africain. Ce fut la première fois que cette grande manifestation se tient dans un pays francophone, en l’occurrence le Maroc. D’après l’ALN, ce

choix s’explique par l’implication notoire du Royaume dans le développement du commerce et de l’intégration panafricaine. Le Maroc s’illustre aussi le domaine entrepreneurial à travers un réseau très développé de jeunes leaders qui s’activent dans ce domaine. Promouvoir l’entrepreneuriat en Afrique ALN 2015 a été rehaussé par l’organisation de trois panels thématiques à savoir la «Mutation des exploitants agricoles en agro-entrepreneurs» modéré par le groupe OCP, l’«Atelier interactif sur le leadership» modéré par le cabinet McKinsey, et «L’entrepreneuriat africain au 21e siècle» modéré par Harvard Center for African Studies.

Outre ce volet commercial, le think tank promeut également la formation et l’entrepreneuriat avec la création en 2004 African Leadership Academy (ALA), un établissement d’enseignement secondaire qui a ouvert ses portes en septembre 2008 et qui accueille les élèves brillants issus des 54 pays africains. L’objectif est d'assurer à ces étudiants une formation de qualité, notamment dans le domaine de l’entrepreneuriat, pour leur permettre de rejoindre les meilleures universités de la planète, avant de revenir travailler en Afrique. Cette année, ALN a lancé sa première université en Île Maurice et prévoit de construire 25 universités sur tout le continent.

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conjoncture

Industrie

Conakry se met aux Bluezones Conakry, la capitale guinéenne, fait partie des villes africaines et même mondiales ayant été choisies pour abriter des Bluezones, ces espaces de vie que le groupe Bolloré déploie dans les pays où il opère pour faire profiter aux populations locales de ses avancées techniques et technologiques.

© plateformesolutionsclimat

Le jeudi 08 octobre, le Président de la République de Guinée Pr. Alpha Condé et le Groupe Bolloré ont inauguré la Bluezone de Dixinn, en plein cœur de la capitale Conakry.

Sur un total de sept prévus dans différents quartiers de Conakry et de sa banlieue, deux Bluezones ont déjà été réalisées à ce jour. La première Bluezone, de quatre hectares, est située au cœur de Kaloum, le quartier administratif et des affaires de la capitale guinéenne. Elle a été inaugurée, tambour battant, en juin 2014 par le Chef de l’État guinéen, Alpha Condé, en présence de Vincent Bolloré, PDG du groupe qui porte son nom. La deuxième, dans le quartier populaire de Dixinn, a été inaugurée en octobre 2015, en pleine campa-

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gne électorale pour l’élection présidentielle de l’année dernière qui a vu Alpha Condé rempiler pour un second mandat de cinq ans. D’une superficie de 1,4 hectare, la Bluezone de Dixinn, à l’image de celle de Kaloum, est dotée de nombreuses infrastructures sportives et culturelles. Sa particularité est sa proximité d’avec Madina, le plus grand marché du pays, mais aussi de l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry, entre autres. Elle comprend un incubateur d’entreprises destiné aux start-ups des secteurs des nouvelles technologies, de l’environnement et du développement durable.

© D.R.

Plusieurs avantages socio-économiques Ces différents espaces de vie disposent de batteries Lithium métal polymère (LMP), une nouvelle technologie créée par Blue Solutions, filiale du Groupe Bolloré, et de panneaux photovoltaïques fournis par Sunpower, filiale de Total, un autre groupe français très présent en Guinée. Ces technologies avancées permettent de produire, de stocker et de distribuer une électricité propre et gratuite dans des zones qui en ont tant besoin. Depuis leur inauguration, les deux Bluezones de Conakry suscitent un vif intérêt chez des populations environnantes, à cause des commodités qu’elles offrent au public : espaces éclairés, adductions d’eau potable, centres de santé, d’écoute et de prévention pour les jeunes, écoles, aires de jeu, ateliers pour artisans... Il faut cependant être adhérent pour profiter pleinement de ces espaces de vie, à travers une cotisation mensuelle d’environ 1 euro (10.000 GNF). La fréquentation de ces nouveaux pôles d’attraction de Conakry monte crescendo, si l’on en croit ceux qui les gèrent au quotidien. La Bluezone de Kaloum aurait enregistré en un peu plus d’une année d’existence quelque 10.000 adhérents, en majorité de jeunes. Le groupe Bolloré prévoit, en cas de succès des deux premières infrastructures, d’installer cinq

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Par Bachir Sylla


conjoncture

Blue zone de Kaloum.

© D.R.

Blue zone de Zongo dans les environs de Cotonou.

La Bluezone de Kaloum aurait enregistré en un peu plus d’une année d’existence quelque 10.000 adhérents, en majorité de jeunes.

autres Bluezones le long du vieux chemin de fer, qui va être rénové et baptisé Blueline, pour relier Kaloum à Kagbelen, dans la périphérie de Conakry, où il érigera un port sec à l’effet de réduire le temps d’attente de ses clients et de fluidifier le trafic au Port autonome de Conakry. Les Bluezones d’ailleurs La réalisation de ces Bluezones permet au groupe français d’améliorer son image aux yeux de la population. En effet, nombreux étaient les Guinéens à avoir des réserves par rapport à la présence du groupe du milliardaire français que l’on sait très ami au Président Condé dans leur pays. Ces réserves s’expliquent notamment par la manière rocambolesque avec laquelle Bolloré Africa Logistics s’est vu attribué, en 2011, la gestion du Terminal à Conteneurs du Port autonome de Conakry pour une durée de 25 ans.

Ce n’est pas seulement en Guinée que Bolloré installe ses Bluezones. Il en a déjà réalisé certains en Afrique. C’est le cas notamment des Bleuezones de Dosso (Niger), de Cacavéli (Togo) et de Zongo (Bénin). Lors de la dernière Coupe d’Afrique des nations de football, le groupe Bolloré avait noué un partenariat avec Canal+ qui avait permis aux adhérents des Bluezones d’Afrique de suivre en direct les matchs de la compétition sur écran géant. Avant l’Afrique, le groupe Bolloré avait auparavant expérimenté avec succès ses services d’auto-partage en France, à travers Autolib' à Paris, Bluecub à Bordeaux et Bluely à Lyon. Aux États-Unis d’Amérique également, il y a BlueIndy, à Indianapolis. Comme pour dire que ce n’est pas seulement Conakry qui se met aux Bluezones. 

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© Samson Hyri

conjoncture

Les premiers sacs de ciment sortent de la chaîne de production de Dangote Cement Cameroon.

Ciment au Cameroun

une bataille en béton Le marché de la construction de cimenteries au Cameroun est de plus en plus prisé du fait des grands projets à réaliser dans le pays. Les parts de marché de Cimencam, l’opérateur historique s’amenuisent et les populations escomptent une chute conséquente du prix de ce matériau de construction Par Cathy Koum

«Cimencam, les constructions qui dépassent le temps», «CPJ35 à 4.700 FCFA chez votre fournisseur». Sur les banderoles ou les affiches publicitaires, à travers le pays, les cimenteries du Cameroun – Cimencam –, filiale du groupe Lafarge communiquent sur leur produit. Une nouveauté dans les habitudes de cette société qui a géré le monopole dans le secteur de la production du ciment au Cameroun pendant 48 ans.

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L’entreprise qui s’installe au Cameroun en 1963 estime avoir une «présence équilibrée» sur le territoire national avec une station de broyage à Bonabéri dans le Littoral ; une cimenterie intégrée à Figuil dans le Nord et une centrale à béton à Yaoundé, dans le Centre. «Avec ce puissant outil industriel, l’entreprise (d’un chiffre d’affaires de 85milliards de FCFA et qui emploie 400 personnes) dispose aujourd’hui d’une capacité annuelle de production de

1.500.000 tonnes; et assure la disponibilité nationale des produits grâce à un réseau de 8 dépôts», laisse-t-on entendre au sein de la société. Depuis quelques mois, d’autres opérateurs se sont lancés dans la commercialisation de leur produit made in Cameroon, encouragés par un besoin issu des projets structurants lancés et annoncés par le gouvernement et qui sollicitent 8 millions de tonnes d’ici à 2018. Le


conjoncture

Nigeria Aliko Dangote, première fortune africaine, a investi 70 milliards FCFA pour la construction de son usine d’une superficie de 8 hectares au quartier Bonabéri à Douala, non loin de… Cimencam. L’usine inaugurée le 27 août 2015 est entrée en service au premier trimestre 2015 avec une capacité de production actuelle de 1,5 million de tonnes de ciment de type 42,5 et une capacité réelle de 3 millions de tonnes, selon son promoteur. Au compteur, près de 300 emplois directs et 1.000 autres connexes. L’usine Cimenteries d’Afrique – Cimaf –, du groupe marocain Addoha, construite sur 10 ha, également dans la zone industrielle de Douala, a été inaugurée le 27 octobre 2015. Sa capacité de production des ciments de type cpj35, Cem II, B32.5R est de 500.000 tonnes extensible à 1.000.000 de tonnes par an. Elle offre 300 emplois directs.

veaux opérateurs à rester chez nous, et nous encourageons aussi l’Afrique à émerger à travers eux», déclare Robert Madiba, architecte. Face à cette offensive d’autres opérateurs de la filière, qui sont rentrés sur le marché à des prix plus bas, et à l’exigence du ministère du Commerce de voir baisser les prix du matériau de construction, Cimencam est obligé de s’ajuster. À grand renfort de publicité. Désormais, le sac de 50 kg du ciment cpj 35 coûte 4.700 FCFA au lieu de 4.900 à Yaoundé, 4.350 à Douala contre 4.600 auparavant dans la capitale économique et site de fabrication. Medcem, le dernier né des cimenteries s’aligne sur les prix de Cimencam. Stratégique.

Mais pour les professionnels du BTP, ce n’est pas suffisant : «ces opérateurs doivent faire plus d’efforts. Il n’est inadmissible qu’avec quatre opérateurs sur le marché, les prix restent presqu’intacts, comme s’il y avait eu entente. Au Sénégal, le prix du ciment est de 3.000 FCFA, pourquoi chez nous reste-t-il si cher? Nous espérons que ça va continuer», déclare Théophile Yimgaing Moyo, architecte et président de l’Ordre national des urbanistes. Allant dans le même sens, le ministre du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, attend des opérateurs que la baisse se poursuive. Ils exigent en retour l’arrêt des importations. Les consommateurs sont en embuscade. 

Cimencam, filiale du groupe Lafarge.

© lafarge

Bras de fer Un quatrième opérateur turc, Medcem, filiale de la société Eren Holding, installé à Douala avec une capacité de 600.000 tonnes, livre ses premiers produits sur le marché depuis novembre 2015. En perspective, Dangote annonce une deuxième usine de grande capacité à Yaoundé, la capitale camerounaise ; le coréen Afko Cement et l’allemand G Power Cement sont également annoncés. En somme, un secteur convoité. Les prix pratiqués par ces opérateurs dès leur entrée sur le marché sont sensiblement en deçà des prix de Cimencam. À Yaoundé, le sac de 50 kg de Dangote Cement et Cimaf revient à 4.850 F, contre 4.900 FCFA pour Cimencam. Effet de nouveauté, les consommateurs s’intéressent aux nouveaux produits «nous voulons découvrir et encourager ces nou-

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conjoncture

Consommation

Le café burundais séduit le marché mondial Dans le souci d’accroître les recettes générées par le café, le Burundi a décidé, depuis déjà cinq ans, d’investir dans la production d’un café de qualité, hautement compétitif sur le marché mondial. Et la mayonnaise a pris. Aujourd’hui, le café burundais est bien coté dans la compétition internationale en matière de qualité de haut niveau. Par Jean Bosco Nzosaba

Depuis 2010, le pays prend régulièrement part au rituel annuel de compétition internationale en matière de café de qualité de haut niveau. Cette année, cette compétition s’est tenue le 7 août 2015 à Bujumbura, la capitale burundaise. «Parmi les lots alignés et dégustés séance tenante, 61 lots de café burundais ont été choisis pour entrer définitivement dans la phase finale de la compétition. Les 61 lots ont été à leur tour soumis à la dégustation et, au final, le premier lot était burundais et coté à 91,09%», explique Jacques Barikwindavya, cadre au ministère burundais de l’Agriculture et de l’élevage. Un lot de café est constitué par 320 sacs de café de 60 kg. En 2014, le premier lot a été acheté à 130 dollars. L’édition 2015 a été, pour le Burundi, la plus favorable avec 27 lots primés en compétition. La Fédération des caféiculteurs burundais se frotte les mains. «Cette année, vingt-sept lots sur 150 en compétition ont été choisis comme gagnants pour la compétition Cup of

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Excellence édition 2015. Le premier lot a été celui de la station de lavage de Nemba en province de Kayanza (nord du Burundi, ndlr). Il y a très peu de cafés qui atteignent ce résultat de par le monde», se félicite Joseph Ntirabampa, président de la Confédération nationale des associations des caféiculteurs – CNAC – Murima w’Isangi (jardin commun). «Ce qui est encore intéressant, c’est que le goût de pomme de terre qui avait toujours fait perdre des points au café burundais dans ce genre de compétitions a complètement disparu», ajoute-t-il encore.

progressive du goût de pomme de terre qui en affectait la qualité est aussi saluée par les opérateurs économiques burundais œuvrant dans la filière café. «Oui, nous avons eu la chance que les dégustateurs internationaux n’ont pas trouvé le goût de pomme de terre. L’année passée, nous sommes passés de 88% à 8% du goût de pomme de terre et cette année, nous sommes à 2% et cela montre que ce goût disparaît considérablement», renchérit Marc Nikobamye, de l’Association burundaise des exportateurs de café (ABEC).

Les efforts récompensés Ce goût de pomme de terre faisait toujours perdre des points à la majorité des lots en compétition. Pour les caféiculteurs et leurs encadreurs, ce sont des années d’efforts récompensés. «Cela est dû aux efforts concertés de tous les intervenants dans les travaux d’entretien du café et surtout lors de la pulvérisation», explique, de son côté, Jeanne Iradukunda, ingénieure agronome. La disparition

Bien plus, pour booster la production à travers la qualité, le gouvernement a initié, en mars dernier, une nouvelle stratégie qui s’articule autour de quatre programmes prioritaires à savoir l’augmentation de la productivité et l'extension du verger ; le renforcement de la mise en marche et la promotion de la marque ; le renforcement de la qualité du café ainsi que le renforcement de la gouvernance de la filière café.


conjoncture Pour ce qui est de l’amélioration de la qualité et de la productivité du café burundais, ce programme est évalué à 81 millions de dollars et s’étendra sur 6 ans (2015-2021). Grâce à ce projet, 30.000 tonnes de café par an seront produites, soit le double de la production actuelle. «Le café est notre principal produit agricole d’exportation, grâce à lui, le pays encaisse entre 40 et 50 millions de dollars par an», explique Marius Bucumi, président de l’équipe chargée du suivi de cette nouvelle stratégie.

© RFI

Au Burundi, la production du café est cyclique, vu l'alternance des bonnes et mauvaises saisons. Cette année (mauvaise saison), le taux est estimé à 10.000 tonnes contre 23.000 l'année dernière. Les Suisses sont les principaux investisseurs dans le secteur. Alors que les principaux importateurs sont les Allemands et les Américains. L’édition 2015 de la Cup of Excellence a été une occasion pour le Burundi d’approcher les acheteurs internationaux afin qu’ils s’intéressent davantage au café du Burundi. 

Les paysans burundais confrontés à la privatisation de la filière café

Le pays prend régulièrement part au rituel annuel de compétition internationale en matière de café de qualité de haut niveau. L’édition 2015 a été la plus favorable avec 27 lots primés en compétition.

600.000 ménages de caféiculteurs soit 1/3 de la population rurale Le pays est aussi au bout d’un processus de privatisation du secteur café recommandé par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international. Ce programme a démarré il y a 5 ans sur recommandation de la Banque mondiale. Ce processus n’était pas du goût des producteurs qui se battent au quotidien pour la préservation de leurs intérêts, se considérant comme un maillon principal de la chaîne. Ils estiment en effet qu'ils sont écartés du processus de privatisation engagé par l'État, sans pour autant garantir la préservation de leurs intérêts.

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conjoncture

Cameroun

Le programme New Generation pour inciter les jeunes à la culture du cacao

Par Cathy Koum

L’initiative du Conseil interprofessionnel du cacao et du café vise également à professionnaliser la filière et rajeunir le verger camerounais.

Le programme New Generation est né d’une enquête menée dans les sept bassins de production du Cameroun (Centre, Est, Littoral, NordOuest, Ouest, Sud, Sud-Ouest) par le Conseil interprofessionnel du cacao et du café (CICC), regroupement des organisations professionnelles de l’agriculture, du commerce de l’industrie et des services des filières cacao/café, qui voulait évaluer la force de production de cette filière. Il en ressort que la moyenne d’âge des producteurs de cacao au Cameroun était de 63 ans, et même 70 ans dans la région de l’Ouest.

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Pour changer la donne et être en harmonie avec la volonté du gouvernement camerounais de booster la production cacaoyère du pays de 232.000 tonnes au cours de la dernière campagne à 600.000 tonnes d’ici 2020, le Conseil interprofessionnel a trouvé la solution à travers la main d’œuvre jeune. Option choisie: offrir, chaque année, à au moins 100 jeunes sortis des écoles d’agriculture du pays l’encadrement et les moyens matériels nécessaires pour se lancer dans la culture et la production d’un cacao de qualité,

à condition qu’ils disposent d’une surface cultivable et s’engagent à créer 3 hectares de cacaoyères. Le programme New Generation est donc lancé en 2012. Après trois ans d’expérimentation, le résultat est éloquent. Plus de 1.000 jeunes agriculteurs encadrés. Avec notamment, 110 sessions de formation organisées, dont 62 en mise en place des pépinières, une trentaine en utilisation raisonnée des produits phytosanitaires, six en entrepreneuriat agricole, et une dizaine en introduction à la certification.


Par ailleurs, l’Union européenne pense que ce programme pourrait être un excellent palliatif à l’émigration vers l’Europe des jeunes Africains des pays producteurs de cacao et de café : «La Commission européenne a commencé à réfléchir avec nous sur un vaste programme continental qui ne concernerait pas que le Cameroun, car cela résoudrait un problème, celui de l'immigration, même l'immigration choisie, et pour nous cela résout un problème de développement», laisse entendre Omer Gatien Maledy. 

© D.R © D.R

À titre d’initiative isolée, le CICC travaille avec le Conseil du café et cacao (CCC) de Côte d'Ivoire sur le concept de New Generation ; le Ghana s'y intéresse aussi.

Récolte des grains de cacao.

Prépération traditionnelle du chocolat.

© D.R

Émulation Et ce n'est pas tout. Plus de quatre millions de sachets pour pépinières, 151 cabosses sélectionnées, un millier de petits équipements (pulvérisateurs, arrosoirs, gangs, bottes, etc.), 15.000 sachets d’engrais biologiques, 12.000 sachets de fongicide, 500 litres d’insecticides ont été distribués aux jeunes agriculteurs pour la création de leur exploitation. Pour 1.335 hectares de cacaoyères créées. Au bout du compte, le Conseil interprofession, qui ambitionne de franchir la barre de 3.000 jeunes encadrés chaque année, voudrait professionnaliser cette filière. Le programme présenté par certains experts comme le projet innovant dans la filière cacao au cours de ces dernières années en Afrique est si bien amené qu’il fait école. La World Cocoa Foundation (WCF) qui a octroyé un financement de 125.000 dollars (environ 62 millions de FCFA) au CICC en décembre 2014 pour soutenir ce programme envisage de l’étendre aux autres pays producteurs de cacao en Afrique, selon Omer Gatien Malédy , secrétaire exécutif du CICC.

Agriculteur tenant à la main le fruit de coco.

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conjoncture

Mali

Quand la baisse du coût du loyer enchante et déchante Par Mohamed Dagnoko

Une vue de la première phase des logements sociaux de N'Tabacoro.

© mali.com

Pour mettre fin à la boulimie financière de certains propriétaires au détriment des locataires, l’État malien va fixer les prix du loyer.

Après le Sénégal, le Mali décide d’intervenir entre les bailleurs et les locataires. Il est de notoriété que le logement au Mali est moins cher. Mais ça, c’était avant. Depuis quelques années, les prix du loyer flambent à Bamako et à l’intérieur du pays au vu et su de tous. Ainsi, se trouver un local, chambre et salon à 40.000 FCFA dans les quartiers moins huppés comme Baco-Djicoroni Golf en commune V du district relève du parcours du combattant. Face au diktat des bailleurs, les locataires étaient sans défense. Prenant la mesure de la situation, les autorités ont décidé de suivre les traces de leurs homologues du Sénégal en intervenant pour mettre de l’ordre. Ainsi, cette mesure ne s’appliquera qu’aux rapports entre bailleurs et

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locataires ou occupants des locaux à usage d’habitation. Les rapports entre les personnes morales de droit public et leurs agents ne sont pas concernés tout comme les rapports entre les entreprises commerciales ou industrielles et leur personnel, en ce qui concerne les locaux affectés au logement de ces agents. Exempts de défauts, les grands travaux sur les bâtiments en location incomberont aux bailleurs. Le prix maximum annuel du loyer est fixé à 5% de la valeur réelle de l’immeuble à usage d’habitation. En cas de location au mois, le montant ne peut excéder le douzième du loyer annuel. Fini le casse-tête de la caution Avec l’intervention des agences immobilières dans la location pour jouer les intermédiaires entre les véritables propriétaires et les locataires, les prix ont encore augmenté. Ainsi, avant d’occuper une maison, il était demandé au locataire de payer trois (3) mois de caution (la troisième tranche revenant à l’agence) et deux (2) mois d’avance. Pour prendre ses quartiers dans un appartement de 40.000 francs CFA, il fallait débourser 200.000. Pire, au moment de quitter les lieux c’était la croix et la bannière pour rentrer en possession de sa caution. Ceci ne sera qu'un mauvais souvenir. Car la nouvelle disposition prévoit que la caution à verser d’avance à titre de garantie ne peut excéder une somme correspondant à un mois de

loyer (Art 11). Au lieu de 200.000 pour un local de 40.000 FCFA, l’on devra désormais payer 80.000 FCFA. Pour le suivi, une Commission nationale de fixation des loyers sera mise en place au 1er janvier de chaque année pour rassurer sur le respect des mesures. Il ne sera désormais plus possible pour le bailleur de mettre à la rue de façon arbitraire un locataire. Il sera tenu de lui signifier cela par un préavis de six (6) mois qui indiquera avec précision le ou les motifs qui justifient l’exercice du droit de reprise. Approchées, les deux parties (bailleurs et locataires) n’apprécient logiquement pas de la même manière. Si les uns soutiennent l’État dans cette démarche volontariste en plus de sa politique des logements sociaux, les seconds s’en plaignent, car arguent-ils «les conditions dans lesquels les gens construisent leurs bâtiments où acquièrent le matériel ne sont pas les mêmes. Alors vouloir à partir d’une expertise qui peut s’avérer fausse fixer des prix est injuste». Il faut noter que la peur du risque fait aujourd’hui que les Maliens, au lieu de créer des entreprises, investissent plus dans le béton pour s’assurer une retraite «paisible» par les frais de loyers. Toute chose qui pèse sur les services de l’État qui peinent, en l’absence d’un secteur privé compétitif, à offrir un emploi aux milliers de chômeurs.


conjoncture

Microfinance

Vers une hausse de plus de 15% en Afrique subsaharienne en 2016 Le secteur de la microfinance devrait connaitre une hausse de 15 à 20% en Afrique subsaharienne en 2016, selon un rapport publié par le groupe suisse ResponsAbility. Par Baye Sakho

La technologie, un des facteurs clés de la croissance Pour établir ces statistiques, le groupe suisse a interrogé un échantillon représentatif d’experts d’agences de notations, d’instituts de microfinance (IMF), des inves-

71% des professionnels et experts pensent que la technologie constitue un facteur clé de cette croissance.

© D.R.

Les clignotants sont au vert pour les activités de microfinance en Afrique subsaharienne. À en croire le groupe suisse ResponsAbility, le plus grand investisseur privé dans ce domaine dans le monde (18% des investissements privés), le secteur devrait connaitre une croissance de 15 à 20% en 2016 en Afrique subsaharienne. Elle occupera ainsi la deuxième place en termes de croissance, derrière l’Asie-Pacifique dont la croissance devrait croitre de 30% en 2016 grâce notamment au dynamisme économique affiché par les marchés indien et cambodgien. Par contre, le rapport précise que la croissance oscillera entre 0 et 10% dans les régions du Caucase et de l’Asie Centrale, à cause du ralentissement de l’économie russe. Au niveau mondial, la croissance devrait connaitre une augmentation de 10 à 15% cette année contre 12% en 2015.

tisseurs et des conseillers. Quelque 40% parmi eux estiment que le développement de la microfinance dans le monde s’explique par la règlementation saine et prudente observée dans le secteur. 71% des professionnels et experts pensent que la technologie constitue un facteur clé de cette croissance, car elle permet d’entrer en contact avec les micro-entrepreneurs, qui

se trouvent dans des zones reculées, et pouvoir mettre en place de puissants outils d’évaluation des risques. Par ailleurs, les IMF élargissent leurs offres en proposant, outre l’accès au crédit, la possibilité de placer des dépôts, d’obtenir des assurances, et de louer des locaux, note ResponsAbility. 

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conjoncture

Afrique du Sud

Le chômage, une épine dans le pied du gouvernement

de chômage en Afrique du Sud a augmenté de 25,5% au troisième trimestre, en plein cœur d'un ralentissement de l'économie alimentée par les pénuries d'électricité et la baisse des prix des matières premières.

Par Pamela Koumba

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Le directeur général adjoint des statistiques, Kefiloe Masiteng, affirme que malgré des gains dans les secteurs du commerce et de la construction, d'autres industries ont subi de lourdes pertes. «Le commerce, la finance et les services ont continué à contribuer à hauteur de 50% dans l'emploi total, donc vous voyez que le transport a

également perdu des emplois. L'industrie minière est un peu restée stable, et nous voyons aussi des pertes d'emplois qui ont été observés dans le secteur privé ménages.» Donc, ces dynamiques indiquent que nous avons des secteurs de services qui créent des emplois et il y a un peu de difficultés dans les secteurs qui sont destinés à la productivité, a-t-il ajouté. Faible croissance de l’économie sud-africaine Un autre facteur clé dans cette augmentation du taux de chômage, c’est la faible croissance de l'Afrique du Sud qui a aussi affecté le nombre d'emplois. Les chiffres du troisième trimestre montrent tout simplement qu’il y a aujourd’hui plus de personnes en quête d’un travail que dans le deuxième trimestre. La deuxième plus grande économie du continent peine à créer suffisamment d'emplois et réaliser ainsi toutes les belles promesses du gouvernement de Jacob Zuma. À cela s’ajoute la chute des prix des matières premières forçant les sociétés minières, comme Anglo American Platinum Ltd, à licencier une bonne partie de leurs travailleurs. La crise énergétique d’Eskom, la Société nationale d’électricité a aussi joué un rôle majeur dans le départ de plusieurs investisseurs. Ces derniers ont dû plier bagage et mettre la clé sous le paillasson à cause des délestages, laissant der-

© Reuters/Rogan Ward

Le taux

Pour l’homme de la rue, lorsqu’on parle d’une augmentation de 5% cela ne signifie pas grand-chose, car, au deuxième trimestre courant, le taux de chômage était de 25%. Mais dans la réalité, l'Agence sudafricaine des statistiques a déclaré, dans un rapport publié récemment à Pretoria, que cette augmentation se traduisait par un nombre de personnes sans emploi qui passe de 188.000 à 5.400.000. C’est donc beaucoup plus énorme qu'on ne le pensait. L'estimation médiane de quelques économistes tablait sur un taux de chômage peu changé à 25,1%, mais il s’est avéré à 25,5%. Ce pourcentage a été établi à partir d'une enquête auprès des ménages couvrant les industries formelles et informelles. Le Bureau des statistiques sud-africaines a aussi expliqué que le déficit des compétences contribuait à un taux de chômage élevé. Au premier semestre de l’année, il était de 26,4% puis à 25% dans le second semestre et maintenant il est de 25,5%.


conjoncture rière eux des centaines de demandeurs d’emploi. Le ministre sud-africain des Finances, Nhlanhla Nene, a dû abaisser de 2 à 1,5% sa prévision de croissance pour cette année. Le gouvernement sud-africain se défend d’avoir tout de même pu créer certains emplois. Le secteur manufacturier, qui représente environ 13% de l'économie, a tout de même en-

beaucoup de personnes qui ne sont pas économiquement actives qui sont allées dans le marché du travail et ont commencé la recherche d'emplois, voilà pourquoi le taux de chômage a augmenté.» Le pays du feu Président Nelson Mandela compte près de 36,1 millions de personnes aptes au travail, mais seuls 21,2 millions font partie

Bombe à retardement : désamorcer la crise de chômage des jeunes

registré 18.000 nouveaux emplois, tandis que le secteur minier est demeuré plus ou moins stable, selon le Bureau sud-africain des statistiques. Il y a donc eu une hausse de l’emploi dans la plupart des industries et, par conséquent, plus de demandeurs d'emploi entrés dans le marché, mais contradictoirement le taux de chômage a augmenté. Dihlolelo Phoshoko, gestionnaire intérimaire à la Direction des statistiques du travail, l’explique : «Nous avons eu

de la population active. Près de 15 millions de personnes ne sont pas économiquement actives, et les raisons varient entre le manque d'éducation ou le découragement quant à la possibilité de trouver un emploi. Six provinces sur neuf touchées L'augmentation du taux de chômage officiel a été enregistrée dans six des neuf provinces d’Afrique du Sud. Et dans son rapport, le Bu-

reau national des statistiques relève que les plus fortes hausses ont été enregistrées dans la province du Northern Cape avec 2,1% et au Gauteng avec 1,8%. Le facteur race a aussi été pris en considération dans cette étude. Plus de la moitié des populations noires sont affectées, ainsi que les métis, soit 58% de chômeurs qui ont un niveau d'études inférieur a l’équivalent du Baccalauréat. La proportion de diplômés blancs chômeurs a aussi grimpé de 3,2 a 8,5% au troisième trimestre 2014 et 11,7% au troisième trimestre 2015. Pour le Bureau national des statistiques, il y a de grandes disparités dans le taux d'absorption de la main-d'œuvre par niveau de l'enseignement au sein de groupes de population – où les niveaux de scolarité plus élevés sont associés à des taux d'absorption plus importants. Le chômage doit être d'urgence nationale, selon Chris Hart, spécialiste dans la prospérité et l’investissement à la Standard Bank. «Nous devons être en mesure de générer des niveaux élevés de croissance. Je pense qu'il y a au moins un degré de résilience qui a été traduit dans les chiffres, parce que, avec la croissance économique à moins de 2% et le ralentissement dans les prix des matières premières, on aurait commencé à croire que peut-être l'économie commence à être à un point où elle ne produit pas d'emplois du tout. Ce serait encore plus désastreux. Mais le fait est qu'il y a encore quelques poches de résistance de l'économie», indique-t-il. Il estime que le secteur des services, en d'autres termes, le secteur manufacturier, l'exploitation minière et l'agriculture, devrait pouvoir mieux produire des emplois en dépit des difficultés financière du moment. 

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Les portiques de parc en construction sur Douala International Terminal (DIT)

Investissement

Vers la réduction des délais de passage des marchandises au port de Douala Un matériel informatique de dernière génération a été offert au Guichet unique pour les opérations du commerce extérieur à travers un appui du projet de Facilitation des transports et du transit en zone Cemac. Il devrait permettre de passer d’une dizaine de jours à quatre jours. Par Cathy Koum

Six serveurs, 70 ordinateurs, 50 imprimantes, 50 scanners, un robot de sauvegarde, 10 licences d’utilisation des logiciels et un important stock d’accessoires ont été rétrocédés au Guichet unique des opérations du commerce extérieur (Guce), plateforme d’échan-

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ges qui met en relation de manière virtuelle les différents acteurs du commerce extérieur. Le coût total de ce parc d’équipements, y compris celui du système d’information en cours de développement à installer, est évalué à 1,5 milliard de FCFA.

L’objectif de cette rétrocession faite par le ministère des Travaux publics, maître d’ouvrage du projet d’équipement du Guce, est de dématérialiser les procédures et donc d’accélérer le délai de passage des marchandises au Port autonome de Douala. D’après des

© Bolloré Africa Logistics

perspectives


perspectives

L’objectif de cette rétrocession faite par le maître d’ouvrage du projet d’équipement du Guce est de dématérialiser les procédures et d’accélérer le délai de passage des marchandises au Port autonome de Douala.

statistiques officielles, près 15% de chiffres d’affaires étaient consacrés à la gestion des documents papier ce qui constituait un frein pour le processus des opérations et une rallonge dans les délais de passage. Avec l’entrée en vigueur de la dématérialisation des procédures, on devrait passer d’une dizaine de jours à quatre jours pour le délai de passage des marchandises. Minette Libom li Likeng, directeur général des Douanes camerounaises et PCA du Guce, s’en réjouit : «les équipements acquis vont permettre de tripler la puissance de calcul des processeurs, de multiplier par 10 la capacité de mémoire et par 8 la capacité de stockage par serveur. Mais encore, grâce à la technologie de virtualisation incluse, notre salle de machines peut désormais contenir 100 fois plus de serveurs».

Gain de temps Une partie de ces équipements est destinée à plusieurs administrations publiques concernées par les opérations de commerce extérieur. En l’occurrence, les ministères dont ceux du Commerce, de l’Agriculture et du Développement rural, de l’Élevage, des Pêches et Industries animales, de la Santé publique, de l’Environnement, de la Protection de la nature et du Développement durable, des Mines, des Industries et du Développement technologique, des Forêts et de la faune, des Transports et des Finances. Des organismes tels le Bureau de gestion du fret Tterrestre, la Chambre de commerce, d’industrie, des mines et de l’artisanat et l’Office national du cacao et du café bénéficieront également de l’installation de ces équipements. Le projet d’équipement du Guichet unique des opérations du Commerce extérieur dont le ministère des Travaux publics assure la maîtrise d’ouvrage rentre dans le cadre du projet de Facilitation des transports et du transit en zone CEMAC, réalisé avec l’appui de la Banque mondiale. Financé à hauteur de 230 milliards de FCFA dont 9 milliards consacrés à la facilitation des échanges commerciaux, le projet couvre la République centrafricaine (RCA), le Tchad et le Cameroun. Il vise l’accroissement des échanges commerciaux entre ces trois pays, à travers l’amélioration de la traficabilité du réseau routier camerounais ainsi que la compétitivité de la place portuaire de Douala par laquelle transite 90% des importations en direction du Tchad et de la RCA. 

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perspectives

Microfinance

Jatropha joue dans la cour des grands Jatropha SA est une jeune institution guinéenne de la micro-finance aux dents longues. Avec ses deux années d’existence sur le terrain, cette société anonyme dotée d’un conseil d’administration bouscule l’ordre établi par les anciens de ce secteur porteur de croissance en misant sur les jeunes et les femmes. Par Bachir Sylla

Signature d’un accord de partenariat entre Jatropha et Guico Multiservices Internationales

Le succès de cette institution de micro-finance (IMF) est, en partie, à mettre à l’actif de son fondateur, Alpha Bacar Barry, un journaliste de formation qui s'est très tôt mué en entrepreneur avisé. «À mon retour en Guinée, après quelques années passées à l’International, plus précisément au sein du Système des Nations unies, une opératrice économique du nom de Oumoul Kirami Bah et moi avons décidé de mettre en place une institution de micro-finance destinée uniquement à financer les projets entrepreneuriaux des jeunes et des femmes», explique le PDG de Jatropha SA.

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© Aminata

quelques institutions onusiennes comme l'Organisation des Nations unies pour le développement industriel (ONUDI) et le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) nous faisons de l'intermédiation financière et avec le gouvernement nous avons co-développé le projet “Un étudiant, une tablette” qui permettra, à court et moyen termes, de doter chaque étudiant guinéen d'une tablette didactique dénommée “Sincery”», révèle le jeune entrepreneur.

Seulement voilà, quelques mois après la création juridique de l'entreprise, en 2013, Oumoul Kirami décède. Alpha Bacar se sent alors dans l’obligation de réussir le pari qu’il s’est fixé avec sa défunte partenaire. «Aujourd'hui, je suis fier de dire que l'objectif de mettre en place une structure de cette taille, qui offre divers services et produits est atteint. Nous sommes présents dans les universités et dans quelques communes de Conakry. Nous offrons des services qui vont de l'octroi du crédit à la collecte d'épargne, en passant par le transfert d'argent», se réjouit-il. «Avec

Interrogé sur la place qu’occupe son institution dans le monde de la micro-finance en Guinée et en Afrique, Alpha Bacar affirme sans détour : «Aujourd'hui, nous sommes fiers de dire que nous comptons pour l'une des rares IMF guinéennes à produire un bilan positif dans un secteur miné par plusieurs insuffisances, notamment par le manque de soutien et d'encadrement. Notre chiffre d'affaires dépassera certainement le million de dollars avec l'intégration du projet des tablettes dans nos états financiers. Et je suis d'autant plus fier de dire qu'à ce stade nous n'avons bénéficié d'aucun prêt bancaire, d'aucune assistance spécifique de quelque organe que ce soit. Ça a été le fruit de nouvelles orientations et du travail de qualité que les travailleurs de l'entreprise abattent.»


Être sollicité dans un projet gouvernemental qui va générer un flux financier de plus de 10 millions de dollars est un succès, quand on connait les capacités opérationnelles des IMF. Réussir à mobiliser une équipe qui tient le cap malgré toutes les difficultés, c'est aussi une autre réussite

© D.R.

perspectives

Alpha Bacar BARRY DG Jatropha

Une IMF pas comme les autres «De par son orientation, Jatropha SA est la première institution de microfinance en Guinée et même à travers le monde (selon Peace Child International et Youth and Child Finance International) à être uniquement destinée à l'entrepreneuriat des jeunes et des femmes», estime Alpha Bacar Barry. «Nous avons choisi également le pari de la jeunesse et des NTIC. Notre système d'exploitation, nos produits et très bientôt même nos opérations seront d'une technologie sans pareille dans le secteur. Notre souci c'est d’offrir un service rapide et proche du client que nous servons. Aussi, le fait que nous ayons choisi d'être présents dans les Universités rend notre touche unique, car les étudiants n'avaient jamais vu autant d'attention vis-à-vis de leur éducation financière», ajoute-t-il. Des difficultés et des réussites xx Malgré l’optimisme affiché par le patron de Jatropha, il n’en demeure pas moins que son IMF baigne dans des difficultés de toute sorte. Sur le plan structurel, il déplore que les taux d'emprunt dans les

banques commerciales ne permettent pas à son institution de disposer de guichets pour financer son développement. Il fustige, par ailleurs, l'environnement des affaires et la faiblesse du système judiciaire guinéen qui, à ses yeux, ne prend pas souvent en compte les questions de délinquances financières. Il y ajoute les coûts élevés de la formation des agents et la mauvaise perception que les citoyens et les pouvoirs publics ont de la micro-finance. «Tout cela combiné et comparé à nos résultats me dit que nous avons fait des miracles», déclare Alpha Bacar, qui se réjouit encore que son IMF ait pu exister et remplir un certain nombre d'exigences vis-à-vis de sa tutelle, la Banque centrale de la République de Guinée. «Être sollicité dans un projet gouvernemental qui va générer un flux financier de plus de 10 millions de dollars est un succès, quand on connait les capacités opérationnelles des IMF. Réussir à mobiliser une équipe qui tient le cap malgré toutes les difficultés, c'est aussi une autre réussite», conclut M. Barry. 

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Guinée

L'industrie du livre cherche lecteurs Au pays de Camara Laye (auteur de l’Enfant noir) et de Tierno Monènembo (Prix Renaudot 2008), l’industrie du livre est en souffrance, au point que certains la qualifient purement et simplement d’inexistante. La récente désignation de Conakry comme capitale mondiale du livre en 2017, par l’Unesco, est une bonne occasion pour les parties prenantes de la chaine du livre en Guinée de se mobiliser pour redorer le blason de ce secteur à la peine. Par Bachir Sylla

Sansy Kaba Diakité dans sa librairie l’Harmattan Guinée à Conakry

«Pour moi, il n’y a pas d’industrie du livre en Guinée. On a, certes, quelques maisons d’édition et des libraires, ici et là, mais toute la chaine n’est pas complète. Il n’y a pas une politique nationale efficace du livre. Il n’y a pas d’imprimerie digne de ce nom», a fait remarquer Sansy Kaba Diakité, directeur de la maison d’édition Harmattan Guinée, dans un entretien qu’il nous a accordé en octobre dernier. Pour ce jeune éditeur, il n’y a pas de fondement d’abord pour une véritable industrie du livre en Guinée. Toutefois,

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© SKD

fait qu’actuellement on ne puisse pas imprimer des livres de qualité en Guinée. «Nous imprimons ailleurs, en France ou dans certains pays de notre sous-région, pour faire venir en Guinée. Or, on devrait pouvoir imprimer localement pour donner la chance aux Guinéens d’avoir accès au livre à un prix abordable», estime-t-il.

il espère que l’élection de Conakry comme capitale mondiale du livre en 2017 permettra de jeter les bases d’une véritable industrie du livre dans le pays. «Aujourd’hui, les éditeurs se cherchent, tout comme les libraires et les bibliothécaires. Mais il y a de l’espoir que l’on sorte de cette situation, parce que les uns et les autres sont motivés à œuvrer ensemble pour qu’il y ait une industrie du livre en Guinée», estime celui qui fait office de commissaire général de «Conakry, capitale mondiale du livre». M. Kaba Diakité déplore le

Plusieurs obstacles Évoquant les principaux obstacles à l’industrie du livre en Guinée, Sansy Kaba souligne, entre autres, le manque de volonté politique et de moyens adéquats. Il dénonce notamment le manque de loi sur la politique nationale du livre et le fait que les éditeurs nationaux n’aient pas accès aux marchés publics de l’État dans le domaine. «On appauvrit les éditeurs locaux, car on ne leur donne pas la chance. Tout ce qu’on a comme budget pour les manuels scolaires et les livres universitaires, dans le système éducatif guinéen, ce sont d’autres éditeurs étrangers qui en profitent. Dans ces conditions, comment voulez-vous qu’il y ait une véritable industrie dans le pays ?» S’offusque le patron de Harmattan Guinée; lui qui s’estime pourtant mieux


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loti que les autres éditeurs locaux. «Nous, nous faisons de l’édition autrement. On fait du numérique et on a un partenaire stratégique qui nous a vraiment ouvert son réseau à l’international. Ce qui nous permet aujourd’hui de réaliser notre rêve. On a un partenariat avec une grande maison d’édition, qui a une imprimerie à sa disposition et qui nous facilite la tâche», se réjouit-il. Toutefois, il plaide pour la création d’une véritable industrie du livre en Guinée. Ce qui, selon lui, passe nécessairement par l’adoption d’une loi sur la politique nationale du livre dans ce pays qui a vu naitre des grands noms de la littérature africaine. Conakry, capitale africaine du livre ? «Il y a huit ans, quand on s’installait, on s’était posé la question de savoir qu’est-ce qui pouvait marquer Conakry, sachant que Ouagadougou est devenue la capitale africaine du cinéma, Bamako celle de la photo, Abidjan celle de la musique, Dakar celle de l’art contemporain et Niamey celle de la mode. À force de réfléchir, nous nous sommes dit que Conakry c’est quand même chez Camara Laye, Williams Sassine, Tierno Monènembo, Alioune Fantouré, Djibril Tamsir Niane, Ibrahima Baba Kaké et autres. Dès lors, nous avons pris l’engagement de nous battre pour faire de Conakry la capitale africaine du livre», révèle Sansy. Pour lui, «Conakry, capitale mondiale du livre sera une étape vers la concrétisation de ce rêve. L’évènement à venir permettra, dit-il, de mettre en place des espaces de lecture dans les quartiers et communes, de construire une véritable bibliothèque nationale et des bibliothèques thématiques dans les facultés des différentes universités. Ça va être l’occasion de professionnaliser les acteurs de la chaine du livre qui, pour la plupart, sont des amateurs.» 

Transport ferroviaire

La Chine va réhabiliter la ligne Dakar-Kidira La Chine a accordé fin décembre 2015 un prêt de 754 milliards de FCFA au gouvernement sénégalais pour la construction de la ligne ferroviaire Dakar-Kidira d’une longueur de 645 km. Une partie de la voie ferrée Dakar-Bamako. Réhabiliter la ligne Dakar-Kidira. C’est l’objectif de l’État du Sénégal. Dans la réalisation de ce projet, il peut compter sur le soutien financier de la Chine. En effet, le gouvernement sénégalais et l’entreprise publique chinoise China Railway Construction Corporation International (CRCCI) ont signé, le 24 décembre, un accord d’un montant de 754 milliards de FCFA pour la «réhabilitation complète» de cette liaison ferroviaire. Selon Mansour Elimane Kane, ministre sénégalais des Infrastructures, des transports terrestres et du désenclavement, «ce prêt a été octroyé à “un taux concessionnel maximum de 2% pour une durée de remboursement de 30 ans». Ce projet dont les travaux vont durer quatre ans devrait générer 20.000 emplois pour le Sénégal. Quelque 15% des travaux de réhabilitation prévus dans le contrat, soit 113 milliards de FCFA, seront exécutés par des entreprises sénégalaises. «Dans le même contrat commercial, nous avons introduit l’option de confier, par avenant, la construction de la ligne Tambacounda-Kédougou (ndlr, nord-est du pays), longue de 310 kilomètres, pour l’exploitation des mines de fer de la Falémé», indique le ministre. Réhabiliter la voie ferrée Dakar-Bamako pour accroitre le transport de marchandises La ligne ferroviaire Dakar-Kidira fait partie de la voie ferrée Dakar-Bamako d’une longueur de 1.286 km. Cet accord a été paraphé après l’annulation de la concession d’exploitation attribuée à la société Transrail qui appartient à l’homme d’affaires franco-sénégalais Abbas Jaber. Les autorités sénégalaises et maliennes avaient notamment dénoncé l’absence d’investissements du groupe français Advens (basé à Bamako) sur cette ligne, qui détenait une participation majoritaire dans Transrail et qui était chargé, depuis 2003, de l’exploitation de cette voie ferrée. Le trafic entre le Sénégal et le Mali a ainsi connu une chute à cause du mauvais état des rails couplé à la concurrence de la route. D’après Abdoulaye Lô, directeur général de l’Agence nationale des chemins de fer du Sénégal, cité par l’AFP, la quantité de marchandises transitant sur cette ligne représente 300.000 tonnes par an alors que le potentiel est de 3 à 4 millions de tonnes. Pour renverser cette tendance, encore faudrait-il que le gouvernement malien signe un accord avec l’entreprise chinoise. Mansour Elimane Kane croit «que le Mali, avec qui le Sénégal partage la ligne, fera de même avec l’entreprise chinoise». 

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Cameroun

La Chambre d’agriculture crée une microfinance agricole Par Cathy Koum

Biotropical, entreprise camerounaise exportatrice de fruits.

L’idée de la Chambre d’agriculture des pêches de l’élevage et des forêts (Capef) de créer un établissement de microfinance agricole part d’un constat au cours d’une rencontre de ses membres en décembre 2011 : la demande de crédit du monde rural est d’environ 50 milliards de FCFA. Sans solutions. Du fait de la quasi-inexistence de banques prêtes à financer les activités agricoles. Et aussi à cause

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de la non-implémentation de la Cameroon Rural Financial Corporation (Carfic), banque publique dédiée aux agriculteurs annoncée par le Chef de l’État en janvier 2011, au cours du dernier comice agropastoral tenu à Ebolowa dans le Sud. Pourtant, le pays migre progressivement vers l’agriculture de seconde génération, nouveau cap impulsé par le Chef de l’État pour

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Cet établissement financier devrait permettre aux agriculteurs de trouver les financements, actuellement rares, pour leurs activités et aussi s’arrimer à l’agriculture de seconde génération enclenchée par le Chef de l’État.

améliorer la production agricole. Et pour être de ce rendez-vous, il y a des préalables: une amélioration des pratiques culturales ; l’augmentation de la production par l’accroissement des superficies cultivables et de la main d’œuvre, le respect des itinéraires techniques, le développement de la chaîne des valeurs, etc. Toutes ces exigences nécessitent des fonds conséquents que les agriculteurs n’ont pas. Une


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perspectives

Cet établissement de micro-finance ne jouera qu’un rôle d’encadrement sans ingérence dans la gestion de l’établissement.

Janvier Mongui Sossomba, maire de la commune de Dimako et président de la Capef

solution s’impose donc, la création d’un établissement de microfinance avec pour objectif de permettre aux producteurs des secteurs agropastoraux, halieutiques et forestiers d’accéder facilement aux financements soit directement, soit indirectement. La campagne de souscription y afférant s’est déroulée du 19 octobre au 10 décembre 2015. S’en suivra une assemblée générale constitutive en vue de l’adoption des statuts élaborés avec l’appui des experts du ministère et ceux de la structure. «Cet établissement sera le relais de la Carfic sur le terrain. En même temps qu’il appartiendra aux promoteurs issus de toutes les conditions sociales, il aura surtout vocation à être implanté le plus près possible des producteurs», explique Janvier Mongui Sossomba, le président du Capef. Des crédits pour 300 organisations agropastorales La mise en place effective de l’établissement qui aura pour siège Yaoundé permettra l’accord des crédits pour 300 organisations des

secteurs agropastoral, halieutique et sylvicole ; le renforcement technique et managérial des organisations des producteurs ; la création de plus de 15.000 emplois directs, l’augmentation de la production rurale, la facilitation de la commercialisation des produits de groupe et l’augmentation des revenus des ménages, fait savoir Janvier Mongui Sossomba. Les activités à financer seront, entre autres, la transformation et la conservation des cultures ; la commercialisation ; la protection de la gestion durable des écosystèmes ; l’aménagement de l’espace rural et l’achat des outils de production. Le président de la Capef, qui précise que son organisme ne jouera qu’un rôle d’encadrement sans ingérence dans la gestion de l’établissement, souhaite voir «tous les paysans du Cameroun souscrire dans cette banque, qui est leur banque. On aurait franchi un très grand pas.» Parce qu’à terme, il est question de garantir au monde rural, qui représente 70% de la population camerounaise, une sécurité sociale de qualité.

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Cotounou, une ville en pleine expansion.

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Bénin

Développer le tourisme via la "Route des pêches" Située dans la région littorale de Cotonou à Ouidah, la Route des pêches est une longue route d’environ 40 km qui longe l’océan Atlantique et des eaux lagunaires, entrecoupée par de petits villages de pêcheurs. En faire une station balnéaire est la préoccupation majeure de l’État béninois. Par Fortuné Sossa

D’une superficie 5.000 hectares, l’espace «Route des pêches» est réparti comme suit : 1 500 hectares de surface à bâtir contre 3 500 hectares à aménager en sites de loisirs. Le gouvernement béninois a déjà financé des études de faisabilité en application à l’article 88 de la loi n° 98-030 portant Loi-cadre sur l’environnement adoptée en 1999 et du décret n° 2001-235 adopté en 2001 qui prévoient que des projets susceptibles d’entraîner des conséquences sur l’environnement et des projets réalisés dans des zones désignées «à risque» ou «écologiquement sensi-

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bles» dont font partie les aménagements touristiques doivent être soumis à la réalisation d’une étude d’impact. Ainsi, ces études conduites par des experts français et tunisiens ont permis de se rendre compte de la forte rentabilité de l’opération notamment en termes financiers et de création d’emplois durables. Elles révèlent que plus de 9 000 emplois directs seront créés avec des effets indus sur la filière BTP et l’économie locale. Du coup, 191 milliards de FCFA de recettes seront engrangés en 10 ans par l’État béninois avec 60 milliards de flux de trésorerie.

Construction d’infrastructures complémentaires Au regard de la fiche synthétique intitulée «Projet de développement touristique de la Route des pêches» et réalisée par le ministère béninois en charge du Tourisme, il sera bâti une «cité touristique de haut standing» de 2.000 à 3.000 places dans un environnement naturel et culturel très valorisant. Cette cité comportera 12 hôtels d’environ 50 chambres chacun, soit 6 hôtels de catégorie supérieure de type 3 étoiles contre 6 autres de catégorie standard de type 2 étoiles. En plus de ces infrastructures


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© Altahine

Les potentialités touristiques traditionnelles du site Le quartier de Fidjrossè et un bout de la route des pêches au-dessus de l’eau.

Ce projet est conçu sur la base de riches potentialités compétitives inexistantes nulle part ailleurs en Afrique et sur toute la côte atlantique, mais longtemps inexploitées telles que : • L’existence des vestiges (matériels et immatériels) du plus grand port négrier de l’histoire de l’humanité, témoin de la déportation massive du peuple noir.

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• Le vodoun dont le panthéon et la cosmogonie en font l’une des sources spirituelles les plus importantes que l’humanité ait inventées. Le village lacustre de Ganvié, au bord du lac Nokoué.

hôtelières, le site abritera 300 villas de catégorie supérieure pour une capacité totale d’environ 2.400 lits et 360 villas de catégorie standard pour environ 2.160 lits. Il y sera implanté, par ailleurs, une centaine de boutiques dont plusieurs supérettes, des restaurants, des aires de tennis, un casino, un parc-piscine aquatique, un complexe sportif, des espaces verts aménagés de 100.000 m◊, etc. «Il s’agit, souligne la fiche synthétique, de créer un cadre d’opportunités pour les investisseurs privés nationaux et étrangers intéressés par la promotion du tourisme et l’appui au développement économique du Bénin.» Ce qui permettra de diversifier l’économie nationale en faisant du tourisme une véritable filière et un produit d’exportation. Au fait, le tourisme est pour le Bénin la deuxième plus grande source de revenus. C’est pourquoi ce projet représente une alternative durable

pour en faire un pays émergent. Le Bénin deviendra ainsi la première destination écotouristique de l’Afrique et contribuera à faire du tourisme la première source de devises en 2025, reléguant ainsi l’agriculture au deuxième rang. Pour Georges Lanmafankpotin de l’Association béninoise des professionnels en évaluation environnementale, l’idée de faire de la Route des pêches une cité touristique se justifie par le fait que «le tourisme est le deuxième secteur pourvoyeur de devises au Bénin après le coton». Il occupe 6% de la population active et est le troisième secteur utilisateur de main-d’œuvre après l’agriculture et le commerce. «C’est aussi le secteur d’activité qui contribue le plus à l’intégration des communautés locales à l’économie nationale, puisque 71% de ses consommations intermédiaires sont d’origine locale», renchérit-il.

• L’existence sur 32 km d’une des plages les plus sauvages d’Afrique de l’Ouest couverte de cocoteraie qui stabilise les dunes bordières. • L’unique possibilité d’observation de populations de baleines sur les côtes d’Afrique subsaharienne. • La possibilité d’observation d’oiseaux migrateurs paléarctiques protégés. • Des terres fermes au milieu des eaux calmes et la présence d’habitats pittoresques de pêcheurs, pisciculteurs et maraîchers. • Un paysage de mangroves et de raphia, habitat de nombreuses espèces de faune et flore, associés au système lagunaire côtier de l’Afrique de l’Ouest potentiellement navigable d’Abidjan à Lagos !

Source : Fiche synthétique du ministère du Tourisme et de l’artisanat

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Afrique du Sud

Vers la gratuité des études dans les universités ? Par Pamela Koumba

L’Afrique du Sud est dotée d’un système éducatif qui impose aux étudiants et à leurs parents une augmentation des frais de scolarité tous les ans. Mais cette année, le cycle de l’augmentation a été coupé net alors qu’il avait déjà amorcé son pourcentage pour 2016. Les étudiants sud-africains se sont révoltés début novembre 2015 et ont exigé l’accès à l’éducation gratuite pour tous ainsi que plusieurs autres réformes au sein des universités du pays. Le mouvement est parti de la célèbre et prestigieuse Université de Witswatersand. Dans son campus de Braamfontein à Johannesburg, les étudiants ont bloqué les principaux points d’entrée. Ils accusaient tout simplement la direction d’avoir transformé l’accès à l’éducation en un business lucratif grâce à l’augmentation globale des frais de scolarités de 10,5%. Les frais d'inscription grimpent à 6%, le logement au campus 9,4% tandis que les étudiants internationaux auront a ajouter 10,7% sur des prix déjà très élevés. Pour le nouvellement élu président du Conseil représentatif des étudiants, Nompendulo Mkatshwa, le message est simple : «Pas d’augmentation de frais universitaires, surtout pas au-dessus du taux d’inflation.» Le mouvement a très vite gagné l’ensemble des autres universités du pays comme une trainée de poudre. En l’espace de deux semaines, l’Afrique du Sud était paralysée dans tout son secteur tertiaire à quelques jours de la période cruciale des examens. Cette grève générale était une première du genre depuis la fin de l’apartheid. Le Président Jacob Zuma a donc décidé 0% d’augmentation des frais universitaires

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en 2016. Une petite victoire pour les étudiants, mais un autre gros défi pour le gouvernement et son économie boiteuse. Un coût estimé à 2,4 milliards de rands La grande question est de savoir si le gouvernement a la capacité d’offrir une éducation gratuite aux Sud-Africains comme promis et comme dans certaines universités étatiques à travers le continent. Cette mesure a eu l’effet d’une bombe aussi bien pour les économistes que pour politiciens. Et pour cause, dire que l’économie sud-africaine n'est pas au mieux de sa forme et que les prévisions de croissances ne rehaussent pas la foi des populations est un secret de Polichinelle ! Plusieurs économistes à l’instar de Willy Muluku Linga s’accordent à dire que la mesure de 0% d'augmentation des frais universitaires coûterait près de 2,4 milliards de rands à l’État. Même son de cloche au ministère de l’Enseignement supérieur et de la formation où son directeur général Gwebi Nkundla Qonde a déclaré que «la ligne de base pour le financement des universités doit être augmentée d'un

minimum de 2,4 milliards en 2017 afin de compenser l'augmentation de 0% en 2016. Si la ligne de base de l'allocation du gouvernement aux universités n'a pas augmenté, le nombre d'admissions universitaires devrait être réduit.» Le ministre de l'Enseignement supérieur et de la formation, Blade Nzimande, n’a pas hésité à convoquer d’urgence un comité ad hoc pour revoir le budget. Il a déclaré devant le Parlement que «les ressources à la disposition du fisc, qui dépend directement des revenus générés par l’économie, évoluent trop lentement pour répondre aux besoins de développement du pays et encore moins au déficit dans l’enseignement tertiaire.» Selon les prévisions à moyen terme du budget présenté par le ministre Nhlanhla Nene, l'accord coûtera 63,9 milliards de rands de plus que prévu pour les trois prochaines années. L’État sud-africain aura difficilement accès aux moyens de sa politique de 0% d’augmentation des frais universitaires. Recourir aux réserves de Trésorerie est à peine une solution durable aux pressions croissantes de financement de l'enseignement


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supérieur. L’économiste Willy Mukulu Linga a expliqué que le trésor public était sous pression pour trouver des ressources supplémentaires. Il devra nécessairement avoir recours à des hausses des impôts d’autant plus que ce qui restait dans le budget a été largement absorbé par le règlement des augmentations des salaires démesurés pour les fonctionnaires comme convenu par le gouvernement et les syndicats au deuxième semestre courant. Vers la hausse des impôts ? Pour son collègue Peter Montalto, économiste à Nomura, l’État sera obligé d’utiliser jusqu'à 41 milliards de ses réserves d'urgence, ne laissant rien dans l'exercice en cours. Soit 2,5 milliards pour la période 2016/2017, quelque 9 milliards pour 2017/2018 et 15 milliards en 2018/2019. C’est donc 40 à 50 milliards qui seront utilisés, car les niveaux anormalement bas de réserves d'urgence autorisées ne permettent pas une grande marge de manœuvre. Toutefois, la solution résiderait dans la création d’un espace omettant de tenir pleinement compte des tranches d’imposition. Il s’agira aussi d’instituer de nouvelles sources d’impôts ou envisager une hausse des impôts existants. Le ministre sud-africain des Finances a notamment précisé que les taxes supplémentaires seraient, certes, nécessaires pour financer le programme du gouvernement de 0% d’augmentation des frais, mais elles seraient abordées avec prudence, compte tenu des conditions économiques faibles du pays. Le gouvernement pourrait donc envisager l'introduction de nouvelles taxes, comme la taxe carbone, l'impôt sur la fortune ou augmenter l’impôt sur les produits

Breakwater Campus, de l'Université de Cape Town.

tels que les cigarettes et les boissons alcoolisées. Le coût global pour l'impôt pourrait être aussi élevé que 100 milliards de rands par an. Aucune décision n'a été prise sur l'opportunité de relever le taux de TVA de 14%, qui demeure tout de même une option. Possible, mais sous conditions Aux dires des analystes économistes, le Trésor public peut survivre à cette mesure en s’appuyant sur les dépenses existantes à moyen terme. Cet engagement est renforcé par l'introduction d'une nouvelle ligne directrice budgétaire qui exige que les dépenses restent stables en proportion du PIB. En effet, pour atteindre cet objectif dans le contexte de faible croissance, les économistes misent sur un ralentissement abrupt de l'ensemble des dépenses hors intérêts du Budget. Les prévisions de croissance économique sud-africaine ont été réduites à 1,5% en 2015 et 1,7% l'année prochaine, mais à 2,6% en 2017 et 2,8% en 2018. Elles demeurent toutefois au-dessus de celles

de la Banque centrale d’Afrique du Sud, du Fonds monétaire international et du consensus national. La capacité de la Trésorerie sud-africaine à rebâtir sa croissance a été plusieurs fois remise en question. En effet, ses prévisions de croissance ont dû être revues à la baisse ces cinq dernières années. Et les experts pensent tout de même que si la croissance repart comme prévu, le déficit devrait se rétrécir autour de 3% du PIB. Pour l’heure, l’école gratuite pour tous les Sud-Africains apparait peut-être comme un mirage pour beaucoup d’économistes, mais c’est une réalité dans plusieurs pays africains tels que le Gabon, le Sénégal et la Côte d’Ivoire. Le gouvernement sud-africain aura la lourde mission de conjurer le mauvais sort des fluctuations monétaires sur le marché international du dollar et trouver des fonds pour financer aussi bien les étudiants démunis, à travers son programme d’attribution de bourses d’études, que les universités dans le bon déroulement de leur opération. Il en va de la qualité de l’éducation. 

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Burundi

Hausse de la production de poisson dans le lac Tanganyika

Par Jean Bosco Nzosaba

Au Burundi, la production du poisson dans le lac Tanganyika, un des plus profonds et poissonneux de la planète, s’accroît à vue d’œil après des années de vaches maigres. La production a passé de 10.000 tonnes à 17.000 tonnes par an au cours de ces trois dernières années. Cette nette embellie est due à toute une gamme d’initiatives à la fois locales et régionales.

Etalage du poisson.

À l’échelle nationale, le gouvernement a d’abord pris la décision de réviser la loi régissant la pêche sur le lac. «Alors que les pêcheurs recouraient, auparavant, aux filets prohibés tels que les moustiquaires, les filets maillant encerclant, les pêcheurs agissant sous l’empire de la nouvelle réglementation doivent uniquement se servir de bateaux à

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© CLIMFISH

nouvelle loi sur la pêche recommande aussi un repos de sept jours par mois pour permettre aux poissons de se régénérer», ajoute-t-elle. Du coup, la production va crescendo. En raison de cette bonne production de poisson, les prix chutent sur le marché local pour les deux grandes catégories de poissons du lac Tanganyika à savoir le Ndagala et le Mukeke. Aujourd’hui, un Kilo de Ndagala revient à 10 dollars, contre près du double il y a trois ans.

carrelets (filets) de type Appolo, les catamarans et les bateaux à filet maillant dormant. En plus la zone de reproduction techniquement appelée zone de frayères est désormais protégée», explique, contente, Léonie Nzeyimana, directrice du département de l’Eau, de la pêche et de l’aquaculture au ministère de l’Agriculture et de l’élevage. «La

Un secteur qui fait vivre plus de 300.000 personnes Aujourd’hui, la renommée du poisson appelé "Mukeke" dépasse les frontières burundaises : de grands hôtels et restaurants de la place et de l’extérieur du pays (Rwanda et l’est de la République démocratique du Congo viennent, aujourd’hui) s’approvisionner en poisson frais à Rumonge et à Nyanza – lac au sud de Bujumbura. D’autres commerçants prennent ce poisson pour aller le vendre dans d’autres régions du Burundi. Selon les données du ministère des Finances, la filière pêche présente un chiffre d'affaires de plus de 20 milliards de Francs burundais (près de 11 millions de dollars). On estime à plus


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perspectives

Le Lac Tanganyika et son bassin sont dotés d’un héritage particulièrement vaste et très diversifié de flore et de faune.

de 330.000 personnes qui vivent, directement ou indirectement, de l'activité de pêche dans le pays. Avec une superficie de 32.600 km², le lac Tanganyika est partagé par quatre pays qui en sont riverains en Afrique centrale à savoir la République démocratique du Congo (45%), la Tanzanie (41%), le Burundi (7%) et la Zambie (6%). La production potentielle est évaluée entre 16.000 et 20.000 tonnes/an. Près de 19.000 tonnes de poisson ont été pêchées en 2014 au Burundi dans le lac Tanganyika, un tonnage parmi les plus importants de ces 30 dernières années, selon le ministère burundais de l'Agriculture et de l'élevage. Selon les responsables en charge de la Pêche, la production de poisson du Burundi provient presque entièrement des pêcheries du lac Tanganyika qui présente les caractéristiques d'une mer et dont les principales ressources se trouvent dans la zone pélagique, contrairement à la plupart des autres lacs africains.

Ensuite, pour mieux tirer profit du lac Tanganyika, le Burundi a décidé, il y a plus de 5 ans, d’adhérer aux différentes initiatives régionales visant à la fois l’augmentation de la production de poisson et la protection des lacs communs. C’est précisément dans ce cadre que s’inscrivent deux programmes majeurs récemment initiés autour du lac Tanganyika à savoir l’Autorité du Lac Tanganyika (ALT) et SmartFish. «L’Autorité du lac Tanganyika a été initiée en 2011 par 4 pays riverains qui sont le Burundi, le Congo, la Tanzanie et la Zambie pour la mise en œuvre des interventions communes par ordre de priorité en prenant soin de la conservation de la biodiversité et l’utilisation durable du lac et des ressources naturelles», explique Anésie Nahayo, cadre à l’Autorité du lac Tanganyika. Quant au programme régional SmartFish que le Burundi a intégré en février 2014, il vise le même objectif tout en s’étendant sur un domaine géographique plus large. «SmartFish entend améliorer le

développement socio-économique et environnemental au sein de la région de l’Afrique orientale et australe/océan Indien (AfOA-OI), grâce, entre autres, à une meilleure gouvernance et à des approches plus fiables en matière de gestion de la pêche et de l'aquaculture», précise Anésie Nahayo. Ce vaste programme a été mis en œuvre par la Commission de l'océan Indien (COI) pour le compte du COMESA (Marché commun de l'Afrique orientale et australe), de l'IGAD (Autorité intergouvernementale sur le développement), de la COI (Commission de l’océan Indien) et de la CAE (Communauté de l’Afrique de l’Est), en collaboration avec l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Il bénéficie du soutien financier de l'Union européenne. Il a été mis en place pour aider les autorités compétentes à renforcer leur cadre de gestion et de réglementation dans les lacs partagés de la région, notamment les lacs Kariba, Tanganyika et Victoria.

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©Secrétariat Présidence

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si f cl u ex

le grand entretien

Ameenah Gurib-Fakim Présidente de la République de Maurice

«La bonne gouvernance est capitale pour l’émergence des pays africains» Entretien réalisé par Elimane Sembène

Dans cet entretien exclusif accordé à African Business Journal, Ameenah Gurib-Fakim, la nouvelle Présidente de la République de Maurice, qui a entamé son mandat depuis plus de 6 mois, dévoile les facteurs clés de réussite de l’île Maurice, un des pays les plus dynamiques sur le plan économique en Afrique, en attestent son leadership sur les classements économiques majeurs, notamment le rapport Doing Business de la Banque mondiale, les grandes priorités de son programme pour renforcer cette croissance économique, la diplomatie économique de son pays, et l’importance de la bonne gouvernance en Afrique.

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le grand entretien Vous êtes la première femme professeure d’Université de Maurice et première doyenne de la Faculté des sciences entre 2004 et 2010. Depuis juin 2015, vous êtes la première femme Présidente de l’Île. Est-ce une consécration de votre brillant parcours ? Je ne parlerai pas de consécration, mais disons que j’ai eu l’opportunité de servir mon pays à plusieurs niveaux, institutionnel, académique, et maintenant au sommet de l’État. On n’a pas droit à l’erreur.

« Maurice se trouve à un carrefour important dans son développement, on est devenu victime de notre succès économique. Du coup, on a perdu plusieurs avantages qui avaient agi dans le passé comme filet de protection notamment dans la production de sucre. Il faut se réinventer avec de nouveaux outils et aussi de nouvelles idées»

Votre accession à la magistrature suprême démontret-elle que la recherche et la politique ne sont pas incompatibles ?

Être la Présidente d’un des pays les plus dynamiques sur le plan économique en Afrique est-ce une tâche aisée ? Comment maintenir ce leadership  ? Comme vous dites, c’est plus compliqué pour plusieurs raisons. Maurice se trouve à un carrefour important dans son développement, on est devenu victime de notre succès économique. Du coup, on a perdu plusieurs avantages qui avaient agi dans le passé comme filet de protection no38 | AFRIcan business journal | N°17

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J’ai démontré que la science et la politique sont compatibles. Être scientifique implique la prise de décision de manière cartésienne et être politique implique aussi une prise de bonnes décisions qui impacteront cette fois de manière plus large la population dans son ensemble. La responsabilité est très grande et les défis aussi.

tamment dans la production de sucre. Il faut se réinventer avec de nouveaux outils et aussi de nouvelles idées. L'île Maurice n’est pas dotée de ressources naturelles, mais notre richesse reste le capital humain. Il faut être agile dans la prise de décision, avoir de bonnes idées et réunir les compétences. Ce sont les dé-

fis qui me guettaient quand j’étais entrepreneure et donc je suis à l’aise. Vous occupez la fonction de Chef d’État depuis plus de six mois. Quelles sont les grandes priorités de votre programme pour renforcer la croissance économique de l’île Maurice ?


le grand entretien Je crois et reste convaincue que la fracture entre le Nord et le Sud s’explique par le niveau de développement de la science, de la technologie et de l’innovation. Ce sont les ingrédients pour la création de la richesse. Plusieurs pays l’ont démontré à l’image de la Corée du Sud. Avec mon bagage scientifique, je préconise une meilleure réflexion et appréciation du potentiel de la science, mais surtout le développement de la biotechnologie pour la création d’opportunités pour nos jeunes. Il existe un réel besoin de changement sur le continent africain, sur la nécessité d’ajouter de la valeur aux ressources avant de les exporter. On doit exporter de moins en moins de matières premières, mais des produits au moins semi-finis. Maurice peut développer la biotechnologie qu’elle peut exploiter à travers la mer, la flore et la faune tropicale.

Les Services (TIC, banques, ports, etc.) ont grandement aidé à diversifier notre économie qui reposait dans le temps sur le sucre, après l’indépendance. L’économie mauricienne doit rester diversifiée au maximum et il faut mettre en place plusieurs piliers qui alimentent l’économie nationale. Le tou-

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Pendant longtemps, l’économie mauricienne reposait sur la culture de la canne à sucre, le textile et le tourisme. Aujourd’hui, le pays mise aussi sur l’externalisation informatique et le secteur des finances. Selon vous, qu’estce qui explique cette diversification des sources de revenus ?

«Les Services (TIC, banques, ports, etc.) ont grandement aidé à diversifier notre économie qui reposait dans le temps sur le sucre, après l’indépendance. L’économie mauricienne doit rester diversifiée au maximum et il faut mettre en place plusieurs piliers qui alimentent l’économie nationale »

risme ajoute entre 7-8 points de croissance dans notre économie avec les services qui y contribuent. Le produit touristique est un produit fort qui doit être diversifié. Nous avons déjà commencé à ouvrir l’espace mauricien à plusieurs compagnies aériennes comme Turkish Airlines récemment, Austrian Air et

Lufthansa qui assurent un vol direct entre notre pays et les capitales du monde. Encore une fois, le fait de ne pas disposer de ressources naturelles (minières, entre autres) doit nous pousser à réinventer de nouvelles stratégies qui augmenteraient notre PIB et qui créeraient des emplois. AFRIcan business journal | N°17 | 39


le grand entretien L’île Maurice est le pays le plus compétitif en Afrique, selon le Rapport mondial sur la compétitivité 2015-2016 établi par le Forum économique mondial. Pourquoi Maurice attire-t-elle tant les investisseurs? Quels sont les facteurs qui expliquent cette attractivité économique?

© Secrétariat Présidence

À Maurice, nous misons sur l’amélioration continue de nos performances. Ces indicateurs réconfortent les investisseurs. Plus de 90% de la population est instruite et cela représente un avantage pour les investisseurs et les opérateurs économiques.

BIO EXPRESS Ameenah Gurib-Fakim, née le 17 octobre 1959 à Surinam (Maurice), présidente de la République de Maurice de puis le 5 juin 2015. Elle effectue ses études supérieures au Royaume-Uni, au sein des universités de Surrey et d'Exeter ; elle obtient un doctorat en chimie organique en 1987. Titulaire d’une chaire universitaire en chimie organique à l'université de Maurice depuis 2001, elle en est la doyenne de la faculté des sciences entre 2004 et 2010 et travaille comme consultante pour des institutions internationales, dont la Banque mondiale. Fin 2014, le gouvernement promet de la faire élire présidente l'année suivante, à la suite d'un accord politique. Le 29 mai 2015, le président Kailash Purryag démissionne conformément à cet accord2. Le 4 juin 2015, Ameenah Gurib-Fakim est élue à l'unanimité par l'Assemblée nationale. Elle a pris fonction le 5 juin. La fonction étant essentiellement honorifique, elle déclare : « la présidence est un poste apolitique et je compte demeurer apolitique ». Elle est la première femme présidente de plein exercice. Elle a obtenu à 2007 le Prix L'Oréal-Unesco pour les femmes et la science, avant de recevoir, en 2010, la distinction de chevalier dans l'ordre des Palmes académiques décerné par la France.

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En 2015, votre pays a occupé, pour la neuvième année consécutive, la première place dans le classement sur la bonne gouvernance en Afrique, publié par la Fondation Mo Ibrahim. Sur quels leviers vous appuyez-vous pour vous distinguer en termes de gouvernance en Afrique ? Le levier principal est sans doute l’éducation. Nous avons aussi mis en place des institutions pour traquer les corrupteurs et corrompues. La loi a été endurcie pour contrecarrer ces délits et abus. Il ne faut pas perdre de vue que chaque décision corrompue appauvrit un pays. À votre avis, quels devraient être les piliers pour instaurer la bonne gouvernance en Afrique? Pourquoi est-ce important ? La bonne gouvernance est capitale pour l’émergence des pays africains et d’ailleurs. Il faut une éducation solide et de la transparence dans les actions. Le concept de «Responsibility and Accountability» est tellement important pour l’émergence de notre pays et du continent.


le grand entretien villes intelligentes, surtout dans un contexte marqué par une démographie galopante.

«La bonne gouvernance est capitale pour l’émergence des pays africains et d’ailleurs. Il faut une éducation solide et de la transparence dans les actions. Le concept de "Responsibility and Accountability" est tellement important pour l’émergence de notre pays et du continent»

Comme vous l’avez souligné plus haut, le taux d’alphabétisation s’élève à 90% dans l’Île, une situation qui contraste avec les taux élevés d’analphabétisme observés dans plusieurs pays du continent. Quels sont les facteurs clés de succès de votre modèle éducatif ? L’accès à l’éducation et surtout à une éducation gratuite pour tout le monde instaurée en 1976 a donné une très grande impulsion à notre économie. Cela nous a permis d’avoir accès à une maind’œuvre qualifiée lors de notre première phase de développement. L’île Maurice, de par sa position géographique, constitue une zone tampon entre l’Asie et l’Afrique. Que faire pour lui permettre de jouer pleinement ce rôle de hub économique entre ces deux continents ? À travers l’histoire, l’île Maurice a été décrite comme étant l’étoile et la clé de l’océan Indien. Nous sommes très bien placés pour agir comme une sorte de pont entre l’Asie et l’Afrique et nous comptons bien utiliser ce positionnement stratégique pour notre développement économi-

que. Les pays asiatiques seront encouragés à utiliser notre plateforme pour pénétrer l’Afrique. De notre côté, nous œuvrons pour le renforcement de nos institutions pour nous mettre à la disposition des pays et institutions. La construction de villes intelligentes figure parmi les objectifs majeurs de l’État mauricien à travers le projet «Smart Mauritius» qui prévoit la construction de cinq technopoles en collaboration avec Singapour. De quoi s’agit-il concrètement? Où en êtes-vous par rapport à ce projet? Maurice, tout comme l’Afrique en général, s’urbanise. D’ici 2050, plus de 50% de la population africaine résidera en ville. Dans le sillage de la globalisation, du changement climatique, entre autres, il faut commencer à réfléchir différemment sur les stratégies à mettre en œuvre pour affronter ce défi, pour nourrir cette population, pour mieux gérer les déchets, de l’eau, de l’énergie, etc. Ces «Smart Cities» seront des lieux où toute la dimension du développement durable sera prise en compte. Il va sans dire qu’une discipline de fer est aussi nécessaire dans la gestion de ces

La société mauricienne est cosmopolite. On y retrouve notamment des ressortissants indiens, pakistanais, et chinois. En quoi ce métissage représente-t-il un atout de taille pour l’Île ? Que faites-vous pour maintenir cette coexistence harmonieuse ? Nous sommes un pays qui a un peuplement béni ; Maurice est un carrefour des civilisations de par sa population venue de différentes contrées. Je vois dans cette diversité une vraie force. On a pu au fil des années développer notre diplomatie économique à travers cette diversité. Maintenir la cohésion sociale entre les différents groupes sociaux est très important. Pour ce faire, nous privilégions le dialogue inter-religieux et inter-culturel pour puiser dans cette différence afin de nous ressourcer et d'avancer ensemble. Votre pays est membre du COMESA, de la SADC, de l’OIF, du Commonwealth et de l’Union africaine. Votre compatriote Jean-Claude de l'Estrac, ancien candidat malheureux à la présidence de l’OIF est, depuis juillet 2012, le secrétaire exécutif de la Commission de l’océan Indien (CIO). Cette diplomatie économique est-elle un outil de promotion de votre modèle économique au plan régional et international ? Comment se déploie-t-elle ? Notre diplomatie économique se fait sur plusieurs fronts : à travers notre diaspora (indienne, chinoise, européenne…), à travers notre vision et stratégie de développement, et la volonté de diversifier au maximum notre économie. AFRIcan business journal | N°17 | 41


les transform@cteurs Entretien

Thione Niang

Président de Give1Project

Propos recueillis par E.S

«Nous privilégions les jeunes qui sauront être des leaders au sein de leur communauté»

Barack Obama & Thione Niang

En 2009, au lendemain de l’élection du Président Barack Obama à la MaisonBlanche, dont vous faisiez partie du directoire de campagne, vous avez lancé l’initiative Give1Project. Qu’est-ce qui

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l’honneur de soutenir et qui a invité, lors de sa campagne, tous ses collaborateurs à réfléchir chacun de son côté à ce qu’ils pouvaient faire pour leurs communautés. Nous travaillons avec les jeunes, pour les jeunes. Nous les invitons à prendre la parole, à agir pour ce qui leur semble juste, et à créer aussi des opportunités économiques pour eux-mêmes et pour ceux qui les entourent. L’entrepreneuriat, c’est la suite logique du leadership, c’est le leadership en action, c’est le leadership qui rayonne. Les porteurs de projet nous contactent, nous les écoutons, nous leur donnons des conseils, nous challengeons leurs projets, nous leur apportons un soutien technique et financier… pour qu’au final ces projets aient un plus grand impact. Aujourd’hui, nous développons un réseau international dans 30 pays en connectant ces jeunes les uns aux autres, afin qu’ils s’enrichissent de leurs expériences mutuelles.

vous a poussé à mettre sur pied un tel programme ? Le Give1Project est un engagement personnel transformé en succès collectif. Il a été inspiré par les propos du Président Obama que j’ai eu

Concrètement quels sont vos différents programmes ? Nous avons mis en place de nombreux programmes qui ont pour objectifs communs de favoriser l’émergence de jeunes leaders engagés dans leurs communautés et de soutenir les jeunes entrepreneurs. Une attention particulière portée à l’émergence des jeunes femmes, avec le programme


les transform@cteurs

Peut-on avoir une idée sur les projets majeurs mis en œuvre par votre organisation ? Quels sont les résultats obtenus à ce jour ? Nous avons lancé le premier incubateur au Sénégal. Le concept : trois mois de formation intensive pour donner aux jeunes tous les outils et compétences nécessaires à la gestion d’entreprise. Nous sommes en train d’étudier la mise sur pied d’autres incubateurs au Maroc, et dans d’autres pays du continent comme le Bénin, la Guinée, la Côte d’Ivoire, la Gambie, la Mauritanie, etc. Les incubateurs sont une suite logique de notre projet, il s’agit de continuer à donner à de jeunes entrepreneurs les moyens de réaliser leurs rêves. Nous avons pu accompagner des entreprises dans le secteur des TIC, l’agriculture, l’aviculture, la mode, le cosmétique/la communication digitale, l'import et l'export. Parmi les compagnies créées, nous avons deux qui se développent aujourd'hui à l'échelle internationale. Nous avons une jeune créatrice de mode qui produit ses tenues au Sénégal et qui est parvenue par le biais du réseau Give1Project à les écouler aux USA. Un autre incubé a vu son projet sélectionné pour son originalité et son côté innovant pour le Global Entrepreneur Summit au Kenya en juillet 2015, en présence du Président Obama.

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«Women Empowerment Network». Les «Give1Talks» sont des conférences/débats sur des sujets de société avec des personnalités politiques, médiatiques, des entrepreneurs, des leaders associatifs, etc., qui viennent partager leur expérience avec les jeunes leaders. Il y a aussi «Give1Farm» un programme entièrement dédié à l’agriculture, «Give1Arts» pour la valorisation et l’émergence des jeunes artistes. Chaque année, durant le mois de septembre, nous organisons «Le Global Leadership Program» à Washington DC aux États-Unis. Cette rencontre annuelle représente l’évènement incontournable de Give1Project ; tous les leaders des quatre coins du monde s’y retrouvent : porteurs de projets, entrepreneurs, politiciens, cadres d’entreprise, artistes, sportifs… Durant ce rendez-vous annuel, plusieurs visites de haut niveau sont organisées, notamment au département d’État et à la Maison-Blanche. M. Thione Niang, Prédent de Give1Project

Actuellement, Give1Project déploie ses programmes dans 20 pays africains. Existe-t-il au préalable des critères de choix de ces localités ? Nous privilégions les jeunes qui sauront être des leaders au sein de leur communauté, ville ou pays. Ces jeunes doivent avoir un projet de vie ou de société, être créatifs, et avoir la volonté de contribuer à rendre la société meilleure à travers des actions comme l’entrepreneuriat, l’engagement civique et politique. Vous développez également des projets en dehors de l’Afrique, notamment en Arabie saoudite, en France et au Japon. Pourquoi avoir décidé d’externaliser vos interventions? Give1Project est une organisation mondiale, elle s’adresse principalement à la jeunesse. La jeunesse du monde sans distinction d’origine, de pays, de sexe, et classe sociale ; elle s’adresse aux jeunes leaders qui veulent participer au développement de leur communauté, de leur pays ou du monde en général. Financer des projets de cette ampleur nécessite forcément de gros moyens. Quelles sont vos sources de financement ? Des financements principalement issus du secteur privé par le biais de nos partenaires.

«Nous avons lancé le premier incubateur au Sénégal. Le concept : trois mois de formation intensive pour donner aux jeunes tous les outils et compétences nécessaires à la gestion d’entreprise. Nous sommes en train d’étudier la mise sur pied d’autres incubateurs au Maroc, et dans d’autres pays du continent comme le Bénin, la Guinée, la Côte d’Ivoire, la Gambie, la Mauritanie, etc»

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engouement manifeste pour l’entrepreneuriat ? Cela me rend encore plus optimiste pour le continent ; sans l’entrepreneuriat et l’autonomisation de la jeunesse, il sera difficile de faire avancer le continent. De nombreux pays, comme les États-Unis se sont basés sur l’entrepreneuriat pour faire avancer la société. Ces jeunes qui ont des projets innovants, nous devons les encourager et les inciter à prendre le risque de les concrétiser, pour qu’ils servent leur continent et le monde. Quelle est votre vision du leadership ? Oser rêver et suivre ses rêves, être résilient, croire en la force du travail, être soi-même, être patient, être optimiste.

Thione Niang et des jeunes entreprenneurs.

Vous avez récemment publié, aux éditions Washington Publishing, un ouvrage bilingue intitulé «Mémoire d’un éternel optimiste» dans lequel vous racontez les difficultés que vous aviez vécues avant votre départ pour les États-Unis, vos premiers mois au pays de l’Oncle Sam, votre ascension sociale, votre rencontre avec l’ancien sénateur et actuel Président Barack Obama, etc. Quel est l’objectif escompté à travers ces mémoires ? En effet, dans ce livre je raconte mon parcours depuis mon enfance jusqu’à ma vie d’adulte. Je partage mes doutes, mes faiblesses, mes difficultés, mes peines ; mais aussi mes forces, mes rêves, mes espoirs, mes joies. Balloté entre deux mondes, j’essaie de tirer davantage de la richesse de ma double culture : africaine et américaine. J’aimerais que mes mémoires puissent servir d’exemple à ceux qui sont pleins de rêves et qui désirent construire un monde meilleur. En octobre 2015, vous aviez signé une convention avec la Chambre de com-

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Vous avez été nommé ambassadeur au ministère américain de l’Énergie pour être le porte-voix des minorités. Quelle est votre mission au sein de ce département ? Je suis le représentant des minorités au ministère de l’Énergie. Mon rôle consiste à les sensibiliser sur les questions liées à l’accès à l’énergie aux États-Unis.

merce, d’industrie et des services de Casablanca et l’association CISE. Quels sont les grands axes de ce partenariat ? Il s'agit d’un Centre de recherche sur l’entrepreneuriat des jeunes en Afrique. Grâce à ses partenariats avec les universités au Maroc, CISE pourra mobiliser des chercheurs et des étudiants qui travaillent sur des mémoires pour étudier et approfondir les mécanismes et les outils à mettre à la disposition des jeunes. Grâce à sa présence sur le continent, Give1Project pourra recenser les différentes expériences et constituer une base de données accessible aux chercheurs et aux étudiants. Ce Centre de recherche produira des «Livres blancs» et des rapports où il communiquera sur les différentes expériences. De nombreux jeunes du continent rivalisent d’ingéniosité en mettant sur pied des projets innovants dans plusieurs secteurs et qui ont de réels impacts socio-économiques. Que vous inspire cet

Parallèlement, vous avez co-fondé avec la star d’origine sénégalaise Akon et Samba Bathily le projet «Akon Lighting Africa» pour électrifier les villages africains. Estce une manière pour démontrer que le continent ne peut pas émerger dans le noir ? L’Afrique ne peut se développer sans énergie, sans électricité. L’énergie est préalable au développement, elle est le moteur du développement. Sans électricité, l’accès aux soins est difficile, car nos postes de santé manquent d’équipements, les hôpitaux ne peuvent pas fonctionner correctement. Sans énergie les commerçants ne peuvent pas vendre leurs produits à la tombée de la nuit, les ateliers de couture ne fonctionnent pas, toutes les petites entreprises locales cessent leurs activités. En réalité, sans l’électricité courante, il n’y a pas de future dans ce monde globalisé. C’est pourquoi tous les pays développés ont déjà réglé les questions relatives à l’énergie dans leur pays dans un premier temps, avant même de parler de développement. Une nuit éclairée, c’est un futur éclairé. 


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Notation

Quand l’Afriq La notation financière occupe une place prépondérante dans l’écosystème économique et financier. Véritables instruments d’influence, les notes émises par les agences de notation peuvent avoir un impact positif et négatif sur les émetteurs. Il ne se passe quasiment pas un mois sans que la presse ne relate ces «ratings». Concrètement, la notation financière est un processus mis en place par une agence de notation pour évaluer le risque de non-remboursement de la dette d’un État, d’une entreprise ou d’une collectivité locale, dans les court, moyen et long termes. À l’issue de ce processus, l’agence octroie une note de crédit exprimée en symbole composé d’un ou de plusieurs lettres. Les méthodologies de notations diffèrent d’une agence à l’autre. Cette note n’est pas souvent définitive; l’agence pourrait la placer sous surveillance avant de la changer. Dans ce cas, on parle d’une note «avec implication positive» si l’agence prévoit de l’augmenter, ou d’une note «avec implication négative» si elle envisage de la dégrader. En outre, la note publiée pourrait être aussi complétée dans un intervalle de temps précis.

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La notation permet aux émetteurs, autrement dit les États, entreprises et collectivités locales, de se financer directement sur le marché des capitaux, auprès d’investisseurs, plutôt que de souscrire à des prêts auprès des banques. Elle permet aux investisseurs de déterminer le coût et le suivi du risque avant de s’engager dans un projet. Elle permet également à l’emprunteur de bénéficier d’une réduction du coût de l’emprunt si la note est positive.

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Réalisé par Elimane Sembène

financière

affrontements post-électoraux meurtriers (3.000 morts) entre 2010 et 2012, la Côte d'Ivoire sous le nationale, avec l’ambition de devenir une économie qui émerge à l’horizon 2020. Retour sur 60 ans que ivoirien", la crise du modèle économique (Capitalisme d’Etat) dans les années 80 et 90, sur la crise rités gouvernementales ivoiriennes, le Plan National de Développement 2012-2015.

ue note l’Afrique

Toutefois, le mécanisme d’évaluation des agences de notation financière en tant que leviers de l’intelligence économique est méconnu du grand public. On connait plus les noms de Standards & Poor’s, Moody’s et Ficth Ratings, qui détiennent 95% des parts de marché mondiales, que leurs véritables fonctions et impacts. L’Afrique ne souhaite pas être en rade dans ce jeu d’influences. De plus en plus, on constate la création d’agences de notation financière à vocation africaine à l’image de Bloomfield Investment Corporation, West African Rating Agency (WARA), Agusto (Nigéria) et Global Crédit Rating (Afrique du Sud) spécialisées dans la notation financière des États et entreprises du continent qui étaient jusqu’ici évaluées par les trois «majors» cités plus haut. De l’avis de spécialistes, ces agences bénéficient de plusieurs avantages pour concurrencer le «Big three» dans le continent ; elles maîtrisent mieux l’écosystème économique, attribuent des notations sur la base de la monnaie locale et ont une meilleure appréciation du risque. Les agences africaines parviendront-elles à gagner la confiance des émetteurs africains ? Quelles sont leurs méthodologies d’évaluation du risque-crédit ? Sont-elles différentes de celles du «big three» ? Qu’en est-il de leur crédibilité ? Quels sont les obstacles à franchir pour s’imposer sur le marché africain ? Autant d’interrogations évoquées, dans le cadre de ce focus, avec Seydina Tandian, PDG de WARA, Stanislas Zeze, PDG de Bloomfield Investment Corporation, et Philippe Clerc, président de l’Association internationale francophone d’intelligence économique (AIFIE) et conseiller expert en intelligence économique internationale à CCI France. 

Réalisé par Elimane Sembène

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FOCUS

Notation financière

États-Unis le berceau, Moody le précurseur

Affichage des notations Moody's.

L’aventure a véritablement commencé en 1909, sous l’impulsion de l’analyste financier John Moody à travers on entreprise Moody’s Investors Services Corporation. Il rédigeait et vendait aux investisseurs des études statistiques sur les activités des compagnies ferroviaires qui envisageaient de consentir d’importants investissements dans le cadre de leur développement. Inspirée par ce modèle, trois nouvelles agences, Standard Statistics, Poor’s et Fitch, naissent au milieu des années 1910. Huit ans plus

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tard, l’agence Moody’s innove en notant les emprunts effectués par les États communément appelée «Notation souveraine». Très rapidement, la notation financière prend de l’ampleur. Elle connait un développement soutenu au cours des années 1920 grâce notamment à la croissance des marchés obligataires et d’actions, et l’explosion du nombre de fonds de pension et d’investisseurs individuels. La célèbre dépression économique de 1929 constitue

L’aventure a véritablement commencé en 1909, sous l’impulsion de l’analyste financier John Moody.

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Les agences de notation financière ont vu le jour au début du 20e siècle. Depuis, elles ne cessent de se développer et acquièrent de plus en plus une influence grandissante.


FOCUS

La règlementaire bancaire de Bâle II légitime le secteur de la notation en consacrant les agences de notation comme acteurs économiques financiers.

également un tournant décisif dans son éclosion. Au lendemain de cette crise, plus précisément entre 1929-1932, les autorités financières américaines mettent en place deux règlementations contraignant les banques à vendre les titres considérés comme spéculatifs par les agences de notation et à ne conserver que ceux notés. Diversification des services Depuis les années 1980, les agences proposent différents services à leurs clients notamment l’évaluation des dettes souveraines émises par les municipalités, régions et provinces, les obligations des entreprises des banques, des compagnies d’assurance, des dépôts bancaires et les Organismes de placement collectif en valeurs et obligataires (OPCVM) Après s’être imposées dans le marché américain, les agences Standard & Poor’s et Moody’s s’invitent sur le marché international. En 2004, la règlementaire bancaire de Bâle II légitime le secteur de la notation en consacrant les agences de notation (avec un certain nombre de critères) comme acteurs économiques financiers. Elles définissent aussi les différentes catégories d’exposition au risque crédit en fonction des notes attribuées par ces agences. 

Critères définis dans la réglementation bancaire Bâle II u L’objectivité: elle doit être démontrée empiriquement. Les méthodes de notation doivent être rigoureuses, systématiques et pertinentes. v L’indépendance: les agences de cotation ne doivent pas être des institutions publiques, ni compter des banques dans leur actionnariat. Cela amènerait des conflits d’intérêt nuisible à un jugement indépendant et objectif. w La transparence: les notes doivent être accessibles à tous. Cela ne veut pas dire pour autant que l’accès est gratuit. x L’information du public: cette exigence va de pair avec le devoir de transparence. y Un niveau de ressources suffisant: les agences d'évaluation de solvabilité indépendantes (External Credit Assessment Institutions) doivent disposer des ressources financières et humaines pour mener à bien leurs missions. Il leur faut des experts des secteurs dans lesquels elles interviennent pour attribuer une note bien fondée. z La crédibilité: la crédibilité est le résultat du respect de tous les critères précédents. C’est le niveau de confiance que font les tiers aux agences de notation.

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FOCUS

Rating

Que veut dire notation financière ?

La notation financière obéit à des règles, respecte des procédures et impacte la croissance des États, entreprises et collectivités locales. En clair, la notation financière est un processus mis en place par une agence de notation pour évaluer le risque de non-remboursement de la dette d’un État, d’une entreprise ou d’une collectivité locale, dans le court, moyen et long terme. À l’issue de ce processus, l’agence octroie une note de crédit exprimée en symbole composé d’un ou de plusieurs lettres. Les méthodologies de notations diffèrent d’une agence à l’autre. Cette note n’est pas souvent définitive ; l’agence pourrait la placer sous surveillance avant de la changer. Dans ce cas, on parle d’une note «avec

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implication positive» si l’agence prévoit de l’augmenter, ou d’une note «avec implication négative» si elle envisage de la dégrader. En outre, la note publiée pourrait être aussi complétée dans un intervalle de temps précis. C’est la raison pour laquelle certaines agences de notations financières mentionnent souvent dans leurs rapports l’expression telle note avec une perspective stable, négative ou positive. Trois types de notation Concrètement, il existe trois types de notations. D’abord la notation volontairement sollicitée où une

entité contacte une agence pour qu’elle évalue la qualité de son emprunt, soit pour respecter les exigences imposées par le régulateur du marché financier, ou pour dévoiler sa gestion transparente ou sa bonne gouvernance. Ensuite, nous avons la notation obligatoire imposée par la réglementaire en vigueur dans tel ou tel marché, par les autorités de régulation des marchés de capitaux, c’est le cas notamment de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) dans le marché financier. L’Union économique et monétaire ouest-africaine.


FOCUS

Enfin, la notation publique non sollicitée. Dans ce cas de figure, c’est l’agence de notation qui réalise, de son propre chef, une notation sans demander au préalable l’avis de l’entité évaluée. Toutefois, elle précise dans son rapport cette procédure particulière. Les agences peuvent vendre ses rapports à des investisseurs. Une note, plusieurs effets Au sein des agences de notation, les notes de crédit, c’est l’affaire des analystes de crédit. Pour établir une note quelconque, ils exploitent notamment des informations publiques telles que les comptes publiés d’un État ou d’une entreprise, les ressources financières, la stabilité politique d’un État, la qualité de la stratégie d’une entreprise. Ils prennent aussi en compte des données macroéconomiques comme l’évolution du secteur d’activité pour une entreprise, ainsi que la démographie et l’évolution des finances publiques d’un pays. Les notes sont-elles utiles ? Oui. Pourquoi ? Parce qu’elles permettent eux États, entreprises et collectivités locales de se financer directement sur le marché des capitaux, auprès d’investisseurs, plutôt que de souscrire à des prêts auprès des banques. Elle permet aux investisseurs de déterminer le coût et le suivi du risque avant de s’engager dans un projet. La note permet aussi à l’emprunteur de bénéficier d’une réduction du coût de l’emprunt si la note est positive. Le cas échéant, l’investisseur lui imposera une hausse des taux d’intérêt de son crédit pour bien assurer son investissement. 

La notation financière est un processus mis en place par une agence de notation pour évaluer le risque de non-remboursement de la dette d’un État, d’une entreprise ou d’une collectivité locale, dans le court, moyen et long terme.

Bon à savoir • Les notes sont des opinions sur un risque de crédit relatif. Par exemple, une CCC signifie un risque de défaut plus élevé qu’une note BBB. • La notation n’est pas un conseil, ni une recommandation d’acheter ou de vendre un titre de dette. La note n’est qu’un repère parmi d’autres, que les investisseurs peuvent prendre en compte dans leur processus de décision. • La notation n’est ni une mesure de la qualité d’un titre de dette ni une indication de son prix sur le marché secondaire. • La notation est une mesure de la qualité du crédit d’un émetteur ou d’une émission. Elle n’est ni une garantie ni une prédiction de cette qualité de crédit future. Source : «Guide de la notation de crédit» de Standard & Poor’s»

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FOCUS

Agences de notation

L’hégémonie d’un oligopole

En outre, leurs services sont fortement rémunérés. S&P révèle dans son baromètre 2009 pour les États-Unis qu’une entreprise

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Les agences de notation ont mis en place un système de notation avec deux échelles : une échelle de notation à long terme qui classe l’endettement dont la durée initiale est supérieure à un an, et l’échelle de notation à court terme qui concerne l’endettement qui a moins d’un an. Chaque échelle est divisée en deux branches ; la catégorie «Investment Grade», qui désigne les investisseurs qui courent un risque de crédit acceptable, et la catégorie «Speculative Grade» qui concerne les valeurs qui ont un risque de défaut significatif. 

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doit verser au minimum 70.000 dollars au début du processus de notation, ensuite un abonnement de «surveillance» qui correspond à la moitié de la somme initiale. Et chaque fois que l’entreprise émettra de la dette sur les marchés, elle s'acquittera en plus d'une commission de 0,045% de la transaction.

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S&P et Moody’s se partagent 80% des parts du marché contre 14% pour Fitch. Le chiffre d’affaires des trois agences a connu d’importantes hausses depuis 1998. Entre 1998 et 2006, il a augmenté de 250% pour S&P, 280% pour Fitch et 450% pour Moody’s. Leurs effectifs ont sensiblement augmenté entre 1995 et 2006, en passant de 123 à 1.960 (Fitch), 1.700 à 3.350 (Moody’s), et de 1.200 à 8.500 pour S&P. En 2007, leur chiffre d’affaires était respectivement évalué à 2,4 milliards de dollars pour S&P, 1,7 milliard de dollars pour Moody’s et 771,5 millions de livres sterling pour Fitch. Par ailleurs, il existe une quatrième agence chinoise dans le marché international (Dagong) qui est plus influente en Asie.

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Le secteur de la notation est dominé par trois ténors : Standard & Poor’s (S&P), Moody’s et Fitch Ratings. Ces trois agences, dénommées «Big three», dominent le marché européen et mondial ; elles détiennent, à elles seules, 95% des parts de marché mondiales.


FOCUS

Quatre principaux reproches aux agences de notation

À qui appartiennent ces agences ? • Standard & Poor’s appartient au groupe américain Mc Grax-Hill. • Moody’s est détenue à 13% par le fonds d’investissement Berkshine Hathaway qui appartient à un milliardaire américain (Warren Buffet). • Fitch Rating est détenue à hauteur de 60% par Fimalac (groupe français) et à 40% par Hearst (groupe de média américain).

• Après la crise asiatique de 1997-1998, leur incapacité à anticiper les crises a tout d’abord été stigmatisée. N’ayant pas détecté les risques d’insolvabilité qui menaçaient certains acteurs économiques, les trois plus grandes agences n’auraient abaissé la note que de très peu d’États et d’entreprises menacées de faillite. • Leur action pro-cyclique a également été pointée du doigt. En effet, aussi bien à l’occasion des crises asiatique et russe que des faillites d’Enron et d’Andersen, les agences ont eu tendance à abaisser massivement les ratings des émetteurs souverains et privés dont la situation financière était déjà largement fragilisée. Ces downgrades ont ainsi contribué à aggraver la crise. • Les agences de notation ont, en outre, été mises en cause de façon récurrente en raison du manque de transparence de leurs méthodologies. Néanmoins, les publications croissantes des agences et les communications fréquentes entre, d’une part, les analystes de Moody’s, Fitch et Standard & Poor’s et, d’autre part, les investisseurs ont largement permis de remédier à cette opacité supposée. • Enfin, les agences sont accusées d’être au centre de conflits d’intérêts. Il est important de rappeler que le mode de rémunération des agences a profondément évolué depuis les origines. Ce sont les investisseurs qui ont rémunéré les agences, via l’achat des manuels et bulletins contenant les analyses et les notes des entreprises et des États, durant près de soixante ans. Mais, à partir du début des années 1970, l’usage extensif des photocopies menace l’activité des agences de notation. Au même moment, la crise qui touche les États-Unis incite de nombreuses entreprises à obtenir un rating afin de rassurer les investisseurs sur leur solvabilité. Ces deux facteurs ont contribué à modifier radicalement le business model des agences de notation, puisque ce sont les émetteurs obligataires qui, depuis trente-cinq ans, rémunèrent les agences afin d’obtenir une note en contrepartie. Ce mode de rémunération a été régulièrement dénoncé au motif que les agences manquent d’objectivité et sont inévitablement tentées de «surnoter» les émetteurs. Source : Norbert Gaillard, «Questions internationales», n° 34 -novembre-décembre 2008

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FOCUS

Marché africain

Quand les agences africaines rivalisent avec les majors

Meilleure connaissance du marché local, notation en monnaie locale, meilleure appréciation du risque de remboursement des émetteurs… Autant d’avantages des agences de notations africaines sur leurs homologues internationales.

Les agences de notation à vocation africaine ont une belle carte à jouer sur le marché régional. Car bénéficiant de plusieurs avantages pour concurrencer les ténors du secteur dans le continent. Elles ont une meilleure connaissance de l’environnement local contrairement aux agences du «Big three» qui se focalisent plus sur des concepts macro-économiques. «Les agences de notation financière africaines ont un avantage significatif. Les marchés de capitaux en Afrique sont

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particuliers, non sophistiqués donc pas standardisés et fortement liés à l'environnement politico-économique et culturel. Les agences africaines comprennent mieux cet environnement particulier et ont de ce fait une meilleure appréciation du risque sur le continent que les agences internationales», constate Stanislas Zeze, PDG de l’agence Bloomfield Investment Corporation. Seydina Tandian, PDG de West Africa Rating Agency (WARA), abonde dans le même sens. «La particularité de

Emerging Markets Ratings (holding qui regroupe d’autres entreprises, dont WARA, ndlr) réside dans le fait qu’elle est proche de la réalité économique des entités notées et fonde là-dessus son appréciation du risque auquel sont exposées les entreprises de sa zone», indique-t-il. À en croire Stanislas Zeze, ces majors de la notation «ont d'ailleurs commencé à suivre le travail fait par les agences continentales pour consolider ou revoir leur position sur leurs interventions sur le continent.»


FOCUS

«Les marchés de capitaux en Afrique sont particuliers, non sophistiqués donc pas standardisés et fortement liés à l'environnement politico-économique et culturel. Les agences africaines comprennent mieux cet environnement particulier et ont de ce fait une meilleure appréciation du risque sur le continent que les agences internationales.»

La monnaie locale comme paramètre de notation L’autre avantage comparatif, et pas des moindres, c’est la possibilité pour ces agences d’attribuer des notations sur la base de la monnaie locale. «Les agences de notation africaines déterminent leurs qualités de crédit en monnaies locales ou régionales africaines, tandis que les agences de notation internationale déterminent leurs notes dans la devise internationale de référence qui est le dollar», observe Stanislas Zeze. Selon lui, «désormais les pays africains ont tendance à emprunter plus en monnaie locale d’où la nécessité aujourd'hui de se faire noter par des agences de notation financière africaines. Bloomfield a commencé la démarche pour la notation financière de certains pays africains en monnaie locale». En se basant sur le dollar pour attribuer leurs notations, les agences internationales pourraient défavoriser leurs clients africains par rap-

port aux autres emprunteurs sur le marché international, estime Seydina Tandian. «Ces agences attribuent des notations sur une échelle internationale. C’est-à-dire qu’elles notent une entité en la comparant à des pairs qui empruntent en dollars. Ce qui défavorise considérablement la qualité de crédit intrinsèque de ces entités. Les agences internationales parlent à Wall Street ; nous, nous parlons aux Africains», souligne-t-il. Toutefois, d’après lui, pour rassurer ses clients, WARA établit une correspondance de ses notations sur l’échelle internationale. Par exemple, «Emerging Markets Ratings, par le biais de son entité régionale NARA (Ndlr, North Africa Rating Agency), attribue au Maroc ses notations en dirham, c’est-à-dire que toutes les notes sont libellées en monnaie locale, le dirham. Cependant, elle établit une correspondance de ses notations sur l’échelle internationale», précise-t-il. 

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FOCUS

Entretien

Seydina Tandian PDG de Emerging Markets Ratings West Africa Rating Agency

«Nous voulons couvrir les marchés émergents et pré-émergents» West Africa Rating Agency (WARA) est l’une des agences de notation à vocation africaine. Dans cet entretien, son PDG, Seydina Tandian, revient sur la création de l’entité et ses réalisations et fournit des analyses sur le secteur de la notation financière en général.

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FOCUS Quelles sont les raisons qui ont motivé la création de Emerging Markets Ratings – WARA ? West Africa Rating Agency (WARA) a été fondée en juin 2005, sous le nom de FIMAS - Finances Investments Management & Ratings Solutions - propriétaire de WARA. Elle est aujourd’hui membre d’Emerging Markets Ratings Limited (EMR) incorporée aux Émirats arabes unis. Elle a trois autres sœurs CARA, NARA et GARA (en projet). Un réseau d’agences de notation, à vocation régionale et spécialisées dans le rating (ndlr, notation) des émetteurs et émissions issus des pays émergents. Après une expérience dans l’enseignement en France, puis dans la banque d’investissement du Groupe Crédit Agricole Indosuez à Luxembourg comme directeur aux Services financiers, j’ai travaillé pour la direction des Participations

l’étude Lovells, qui aboutit ensuite à la révision du règlement général, puis des instructions qui rendent aujourd’hui la notation obligatoire sur le marché financier régional de l’UEMOA et permet aux émetteurs de lever des financements sans garanties. En 2012, pour faire face aux exigences de la nouvelle réglementation, WARA connut une profonde mutation avec l’accueil de nouveaux actionnaires de référence internationale pour renforcer ses compétences et une augmentation de capital pour adapter son nom à ses ambitions : couvrir les marchés émergents et pré-émergents. WARA, membre d’EMR, qui couvre toute l’UEMOA à ce jour, et agrée par le régulateur ouest-africain, dispose en plus de son siège à Dakar, d'une succursale créée en mars 2012 à Abidjan et d'une représentation au Burkina.

Depuis janvier 2013, les sociétés cotées à la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) d’Afrique de l’Ouest sont tenues de se faire noter par deux agences agréées. Mais on constate que, présentement, seul un tiers d’entre elles respectent cette règle. Qui est-ce qui pourrait expliquer une telle réticence ? Elles le savent peut-être mieux que nous (rires). La Société africaine de production d’hévéa (SAPH), leader dans la production d’hévéa en Afrique, qui est une filiale de l’entreprise ivoirienne SIFCA (ndlr, Société immobilière et financière de la côte africaine), est la première entreprise que nous avons notée dans la zone UEMOA et elle est cotée sur la BRVM. SIFCA nous avait demandé de la noter parce qu’elle voulait faire un emprunt de 70 millions de dollars sur le marché et voulait y aller avec la notation. Ces 70 millions de dollars ont été

«En 2012, pour faire face aux exigences de la nouvelle réglementation, WARA connut une profonde mutation avec l’accueil de nouveaux actionnaires de référence internationale pour renforcer ses compétences et une augmentation de capital pour adapter son nom à ses ambitions : couvrir les marchés émergents et pré-émergents.» internationales du siège à Paris pour procéder à la cession des participations du Groupe dans la perspective d’une réorganisation. C’est en voulant faire évaluer de façon indépendante les participations que je devais céder que je me suis aperçu que bien que disposant d’un marché financier régional, d’un marché obligataire, il n’y avait pas d’agences de notation dans la zone UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine). Ayant achevé ma mission avec succès et voulant rester en Afrique, j’ai alors créé FIMAS pour développer la notation financière. Nous eûmes ainsi l’honneur de présenter lors du premier séminaire tenu en 2006 à Dakar, à la convocation du régulateur le CREPMF (ndlr, le Conseil régional de l'épargne publique et des marchés financiers) l’intervention intitulée : «Notations et garanties : Substituts ou compléments ?» Cette intervention permit au régulateur de fixer les termes de référence de

Au total, combien d’entreprises avez-vous notées en Afrique ? Depuis notre création, nous avons une cinquantaine d’avis de crédit, dont une partie confidentielle. À ce jour, WARA a émis sur l’UEMOA près d’une vingtaine d’avis de crédit publiés. Il faut ajouter à ce nombre plusieurs notations financières non sollicitées qui, de par leur caractère confidentiel, ne font pas l’objet de publication. Dans cette catégorie de notation, nous notons des souverains et aussi des banques multinationales de développement pour les besoins de nos bases de données, et, parce qu’ils sont nécessaires à la notation d’entités qu’ils garantissent ou bien qu’ils constituent ce qu’on appelle le plafond souverain dans un pays donné ou pour l’UEMOA. Quelque 99% de nos clients sont des filiales de grands groupes internationaux, exigeants et soucieux de la qualité pour l’évaluation de leur risque.

sursouscrits et elle est en train de mener son plan d’investissement. SIFCA est la plus grande entreprise d’Afrique de l’Ouest. D’autres entreprises ont suivi par la suite. La notion de risque crédit apparait en filigrane dans les rapports d’évaluations des agences de notation. De quoi s’agit-il concrètement ? La situation actuelle du marché marocain permet de mieux comprendre la notion du risque crédit. Au Maroc, une crise de confiance s’est installée après le défaut de grandes entreprises sur leur dette. Aujourd’hui, les investisseurs demandent même des garanties pour pouvoir souscrire à certains emprunts. C’est un grave retour en arrière ! Je signale que l’UEMOA était au même niveau en 2005 après le défaut des ICS (Ndlr, Industries chimiques du Sénégal), qui

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«L’évaluation du risque de crédit permet de bâtir cette confiance entre emprunteurs et investisseurs en exprimant, à travers une analyse retraitée d’informations confidentielles, quelles sont la capacité et la volonté d’une entité à répondre à l’ensemble de ses obligations financières en temps et en heure. C’est cela la notation tout simplement.» était pourtant un emprunt garanti ! Le régulateur a eu le courage de conduire les réformes en introduisant la notation financière et depuis le marché a repris des couleurs. L’évaluation du risque de crédit permet justement de bâtir cette confiance en exprimant à travers une analyse retraitée d’informations confidentielles quelles sont la capacité et la volonté d’une entité à répondre à l’ensemble de ses obligations financières en temps et en heure. C’est cela la notation tout simplement. D’habitude, les entreprises sont les commanditaires de leurs notations. Et qui paie commande, comme dit l’adage. La crédibilité de l’agence ne risque-t-elle pas d’être entachée dans ce cas ? Les émetteurs nous paient, en revanche les investisseurs sont nos patrons, c’est eux qui

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Plusieurs paramètres sont à considérer lors de l'évaluation du risque .

donnent ou pas de la crédibilité à notre travail. Cette question est souvent revenue sur le tapis. Nous sommes preneurs d’une meilleure solution si elle existe. La notation est devenue aussi un service de communication financière. Quand une entreprise veut émettre un emprunt, elle se préoccupe de deux choses : la qualité des données qu’elle va envoyer aux investisseurs et la possibilité d’atteindre les volumes qu’elle s’est fixés. Ce sont ces services que rémunère l’émetteur. La crédibilité des agences de notation a été remise en cause suite à la crise des Subprimes aux États-Unis et à la dernière crise grecque. Beaucoup de spécialistes préconisent notamment qu’elles soient rémunérées par les investisseurs et non par les entités évaluées et le renforcement de la règlementation juridique du secteur. Qu’en pensez-vous ? Concernant la crise grecque, l’Office européen des statistiques, basé à Luxembourg et qui regroupe une vingtaine de pays pour faire passer la Grèce dans la zone euro, a admis les chiffres qui lui ont été transmis par Athènes. C’est un organisme international public qui a admis ce pays dans la zone euro, pas les agences de notation. Il faut situer les responsabilités ; nous ne sommes pas des

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FOCUS

organismes d’audit. Pour les Subprimes, les agences de notation pour certaines d’entre elles ont carrément reconnu leur responsabilité. L’appât du gain a certainement joué, mais notons toutefois que plus personne ne lisait les méthodologies des agences, il y avait une ambiance d’argent facile avec les structures titrisées, sachant que les agences de notation ne captent pas le risque de liquidité lorsqu’il s’agit d’entités titrisées, mais le risque de défaut. Pour aller vite, disons qu’une entité donnée peut être solvable et ne pas avoir immédiatement de la trésorerie pour répondre à des obligations immédiates surtout lorsqu’il y a des tensions dans le marché. La crise des Subprimes a justement été occasionnée par des tensions. Au lendemain du 11 septembre 2001, l’exPrésident Bush est allé en guerre, les taux américains, qui étaient historiquement bas et favorisaient l’éclosion des Subprimes pour financer les ninjas, entre autres, ont continué à monter et des entités ont commencé à faire défaut parce qu’en finançant cette guerre, intérieurement cette situation devenait intenable pour des montages assez périlleux. Et cela a créé une tension de liquidité sur le marché. Tout ou presque a été abordé sur cette question, il y a aussi des «Big Three», comme vous dites, qui ont reconnu avoir fraudé et qui ont payé des amendes aux USA.


FOCUS

L’offre de notation de WARA

ECHELLE RÉGIONALE

DÉFINITIONS

AAA

WARA estime que l’émetteur ou l’émission notés dans la catégorie AAA disposent de la qualité de crédit la plus élévée, et donc d’un risque de crédit minimal

AA+ , AA, AA-

WARA estime que l’émetteur ou l’émission notés dans la catégorie AA disposent d’une qualité de crédit élevée, et donc d’un risque de crédit très faible

A+, A, A-

WARA estime que l’émetteur ou l’émission notés dans la catégories A disposent d’une qualité de crédit moyene à élevée, et donc d’un risque de crédit faible

BBB+, BBB, BBB-

WARA estime que l’émetteur ou l’émission notés dans la catégorie BBB disposent d’une qualité de crédit moyenne, et que leur risque de crédit présente quelques caractéristiques de nature spéculative

BB+, BB, BB-

WARA estime que l’émetteur ou l’émission notés dans la catégorie BB disposent d’une qualité de crédit médiocre, et donc d’un risque de crédit significatif

B+, B, B-

WARA estime que l’émetteur ou l’émission notés dans la catégorie B disposent d’une qualité de crédit faible, et donc d’un risque de crédit élevé

CCC+, CCC, CCC-

WARA estime que l’émetteur ou l’émission notés dans la catégorie CCC disposent d’une qualité de crédit très faible, et donc d’un risque de crédit tres élevé

CC+, C

WARA estime que l’émetteur ou l’émission notés dans la categorie CC et C disposent d’une qualité de crédit très hautement spéculative, et en situation de défaut imminent

D

WARA estime que l’émetteur ou l’émission notés dans la catégorie D sont en situation de défaut manifeste source : http://www.bloomfield-investment.com

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FOCUS

Entretien

Stanislas Zeze

PDG de de Bloomfield Investment Corporation

Stanislas Zeze est le PDG de l’agence Bloomfield Investment Corporation, basée en Côte d’Ivoire et au Cameroun. Les facteurs ayant motivé la naissance de la société, la crédibilité des agences de notation, la notation des collectivités locales en Afrique… Autant d’aspects évoqués dans cette interview.

«Bloomfield voulait combler un besoin existant» En 2007, vous avez créé la société Bloomfield Investment Corporation. Quelles sont les raisons qui ont motivé sa création ? Comme tout projet de création d'entreprises, l'objectif escompté devrait être de combler un besoin existant de l'environnement dans lequel évolue l'entrepreneur ou le porteur de projet. La création de Bloomfield Investment Corporation suit la même logique. Le constat a été que nous évoluons dans un environnement (Union économique et monétaire ouest-africaine - UEMOA) où il existait une asymétrie importante d'informations entre les demandeurs de capitaux (les emprunteurs) et les pourvoyeurs de capitaux (les investisseurs). Cela avait pour conséquence un manque de fluidité et de rationnel dans la circulation des capitaux entre ces deux acteurs du marché et un renchérissement du coût. Les investisseurs estimaient qu'ils n'avaient pas en général une bonne visibilité à court, moyen et long terme sur les emprunteurs qui arguaient que les investisseurs ne comprenaient pas leur business, l'environnement dans lequel ils évoluent. De fait, des garanties systématiques étaient apportées par les emprunteurs. L’agence de notation, dont le rôle est d'établir la qualité de crédit de l'emprunteur, sa capacité à faire face à ses obligations financières à court moyen et long terme, va donc permettre d'avoir un marché des capitaux où il existe une vraie discri-

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mination des emprunteurs basée sur le risque et une transparence totale. Par conséquent, les investisseurs ont désormais un outil leur permettant d'apprécier l'opportunité d'investir, le retour sur investissement et le risque pris. Pour les emprunteurs, la notation financière leur permet de diversifier leur portefeuille d'investisseurs et réduire le coût de l'emprunt.

en Afrique en toute impunité. Le régulateur a reporté deux fois la mise en application de la réglementation afin de donner le temps à ces entreprises de se mettre à jour sans succès. Il me semble qu'il serait temps que le régulateur se penche sérieusement sur cette question qui fragilise le système de réglementation de ce marché financier.

Depuis janvier 2013, les sociétés cotées à la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) d’Afrique de l’Ouest sont tenues de se faire noter par deux agences agréées. Mais on constate que, présentement, seul un tiers d’entre elles respecte cette règle. Qu’est-ce qui pourrait expliquer une telle réticence ? Ne faudrait-il pas prévoir des mesures coercitives pour dissuader les récalcitrants ?

La qualité et la véracité des données communiquées par certaines institutions africaines sont souvent sujettes à controverses. Comment faites-vous pour séparer le bon gré de l’ivraie ?

Effectivement, nous constatons aussi avec regret que les deux tiers des sociétés cotées à la BRVM ne respectent pas la réglementation qui les oblige à se faire noter par l'une des agences agréées par le CREPMF. C'est curieux quand même que la majorité de ces réfractaires soient des entreprises occidentales qui sont habituées à ce genre d'exercice sur leurs marchés d'origine et ont du mal à se conformer à la réglementation sur les marchés africains. Je suis tenté de penser que ces entreprises estiment qu'elles peuvent ne pas respecter les règles

À Bloomfield, nous avons un système de vérification des informations qui s'est avéré très efficace jusqu'à maintenant. Quand nous recevons les informations, nous faisons en premier lieu une contre-expertise basée sur les informations sectorielles et les pays dans notre base de données. Nous allons ensuite procéder aux analyses et organiser des entretiens avec les dirigeants de l'entité notée. Nous avons des techniques d'interview qui nous permettent de savoir si les informations produites par l'entité notée sont cohérentes avec le discours des dirigeants et si nos croisements d'informations font sens. L'expérience a montré que nous ne sommes jamais trompés sur la détermination de la fiabilité des données reçues des clients.


M. Stanislas Zeze.

D’habitude, les entreprises sont les commanditaires de leurs notations. Et qui paie commande comme dit l’adage. La crédibilité de l’agence ne risque-t-elle pas d’être entachée dans ce cas ? Dans le cas de la notation financière, il est difficile de tricher, car la qualité du crédit établie par l'agence de notation sera très rapidement vérifiée sur le marché. Si Bloomfield dit, par exemple, que la société X est AAA (meilleure note possible à long terme) et A1+ (meilleure note à court terme) sur notre échelle de notation et qu'en réalité la note intrinsèque de cette entité est de C (très mauvaise note a long terme) et B (mauvaise note à court terme), l'entité notée va se comporter sur le marché en C, car elle n'a pas la capacité de se comporter en AAA. Il va s'en suivre qu'elle fera certainement défaut alors que la probabilité de défaut d'un client AAA est quasiment nulle. Le marché découvrira forcément que la note attribuée est une note complaisante et l'agence risque de perdre sa crédibilité, alors que la crédibilité d'une agence de notation est son actif le plus important. Cependant, pour rassurer davantage le marché, Bloomfield a mis en place une méthode de paiement qui oblige le client à faire un

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FOCUS

acompte de 50% des honoraires au démarrage de la notation et 50% à la réception du rapport provisoire qui ne contient ni note ni perspective. Le client ne reçoit sa note finale qu'après s'être acquitté des honoraires de l'agence. Donc aucune possibilité d'influencer les résultats ou de tenter même de les influencer. La seconde précaution est que les analystes qui sont chargés de l'évaluation et qui sont en relation avec le client ne délivrent pas la note, elle est octroyée par un comité de notation dont les membres décisionnaires ne participent pas à l'évaluation. On était plus habitué aux notations octroyées aux entreprises ou multinationales. Mais vous avez apporté une grande innovation avec les notations des villes de Dakar et d’Abidjan respectivement en 2013 et 2015. Un mode opératoire pour se distinguer de la concurrence ou une réelle volonté de promouvoir la bonne gouvernance de nos collectivités locales ? En plus d'être une entreprise commerciale en recherche de profit et succès comme toutes les autres, Bloomfield a un objectif de développement qui nous tient fortement à cœur. Nous estimons que le développement de l'Afrique

«Nous évoluons dans un environnement (UEMOA) où il existait une asymétrie importante d'informations entre les demandeurs de capitaux (les emprunteurs) et les pourvoyeurs de capitaux (les investisseurs). Cela avait pour conséquence un manque de fluidité et de rationnel dans la circulation des capitaux entre ces deux acteurs du marché et un renchérissement du coût. Les investisseurs estimaient qu'ils n'avaient pas, en général, une bonne visibilité à court, moyen et long terme sur les emprunteurs. Ces derniers arguaient que les investisseurs ne comprenaient pas leur business, l'environnement dans lequel ils évoluent».

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FOCUS passera par une approche «bottom up» (du bas vers le haut), d’où l'importance des collectivités locales dans sa cette stratégie. Nous avons remarqué que nos collectivités locales en Afrique subsaharienne, en particulier dans l'UEMOA et la CEMAC, sont infantilisées et pas du tout responsabilisées. Elles sont toutes, ou presque, entièrement subventionnées et sous perfusion du gouvernement national. Cet état des choses crée une totale inertie et un manque extraordinaire de vraies initiatives de développement durable. Nous pensons que la notation financière va jouer un très grand rôle dans l'établissement de la capacité des collectivités locales à absorber des fonds et à bien les gérer selon les principes de la bonne gouvernance.

dépendance en respectant le cadre général de la politique de développement du pays, lui permettre de lever des fonds sur le marché régional, auprès de bailleurs de fonds régionaux et internationaux, sans obtenir sa garantie. Cela lui permettrait donc de diversifier ses sources de revenu afin de renforcer ses capacités financières pour répondre aux besoins et nombreux défis de la cité. Nous avons signé une convention avec l'association qui regroupe toutes les régions de la Côte d'Ivoire pour faire leur notation financière. Nous encourageons fortement les pays africains à faire de même pour que leurs collectivités locales adhèrent à ce processus extraordinaire qui va changer complètement et positivement l'approche du développement durable et inclusif.

financier et les autorités rwandaises mettent tout en place pour faciliter l'installation des entreprises spécialisées dans les services financiers, car il y a une forte volonté de faire du Rwanda un hub financier pour l'Afrique de l'Est. Le pays est sur la bonne voie pour atteindre cet objectif. Votre installation à Kigali ne constituet-elle pas un tremplin pour acquérir des parts de marché en Afrique de l’Est, une zone qui connait un réel dynamisme économique ? En effet, le bureau du Rwanda sera notre bureau régional, car nous avons l'intention d'intervenir dans tous les pays de l'Afrique de l'Est. Le potentiel économique de cette région est juste extraordinaire et représente

«Nous pensons que la notation financière va jouer un très grand rôle dans l'établissement de la capacité des collectivités locales à absorber des fonds et à bien les gérer selon les principes de la bonne gouvernance. Cela permettra aux États de les classer en deux catégories essentielles, les collectivités locales prêtes à bénéficier d'une indépendance dans la gestion de la cité et de ses revenus et celles qui ont besoin d'un renforcement de capacité afin de rejoindre le premier groupe.»

Cela permettra aux États de les classer en deux catégories essentielles, les collectivités locales prêtes à bénéficier d'une indépendance dans la gestion de la cité et de ses revenus et celles qui ont besoin d'un renforcement de capacités afin de rejoindre le premier groupe. La notation financière permet d'avoir ce tableau de bord très clair. L'exemple de Dakar a bien montré la capacité de cette ville à bien gérer et la compétence de ses dirigeants. L'État peut facilement créer un cadre qui permettrait à la ville de retenir directement les revenus fiscaux qui lui sont conférés par la loi, lui permettre de les gérer en toute in-

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Bloomfield Investment Corporation a obtenu l’autorisation pour s’installer au Rwanda. Qu'est-ce qui explique ce choix ? Le Rwanda a été reconnu par la Banque mondiale dans un rapport récent comme étant le septième pays le mieux géré au monde. Il me semble que ce classement, à lui seul, peut justifier notre choix. Nous avons visité le Rwanda à plusieurs reprises avant de faire ce choix et nous avons été impressionnés par le très bon niveau d’organisation et d’efficacité de l'administration ainsi que la discipline des Rwandais. Nous avons pensé que ce pays regorge d'un grand potentiel en termes de service

une vraie niche pour la notation financière. D’après nos informations, vous prévoyez également de vous installer au Maroc et en Afrique du Sud. Est-ce le cas ? Où en êtes-vous ? Nous sommes déjà au Cameroun et au Rwanda. Nous avons décidé d'ouvrir des bureaux au Maroc, au Nigeria et en Afrique du Sud. Ces pays représentent de gros marchés et sont suffisamment avancés et connaissent déjà la notation financière. Donc notre expansion devrait se faire plus facilement, comparée au début de nos opérations dans l'UEMOA où la notation financière n'était pas du tout connue. 


FOCUS

Echelle de notation Bloomfield Investment Corporation Notes de catégorie d’investissement

Notes de catégorie spéculative

AAA AA+ AA AAA+ A ABBB+ BBB BBB-

BB+ BB BBB+ B BCCC CC C D

Risque extrêmement faible Risque très faible

Risque faible

Risque modéré

Risque assez élevé

Risque élevé

Défaut probable Défaut avéré source : http://www.bloomfield-investment.com

Notes Bloomfield Investment Corporation et notes agences internationales : Tableau de correspondance indicatif Echelle Bloomfield Investment Corporation

Echelles agences internationales (Fitch/Moody’s/Standard & Poor’s)

AAA AA+ à AA- (classe AA) A+ à A- (classe A) BBB+ à BBB- (classe BBB) BB+ à BB- (classe BB) B+ à B- (classe B) CCC à C (Classe C) D

BBB-/Baa3/BBB- et au dessus BBB-/Baa3/BBB- à BB/Ba2/BB BB/Ba2/BB à B+/B1/B+ B+/B1/B+ à B/B2/B B/B2/B+ à B-/B3/BCCC/Caa1/CCC à CC/Caa2/CC C/Caa3/C à RD/Ca/SD D/C/D source : http://www.bloomfield-investment.com

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FOCUS

Entretien

Philippe Clerc

Président de l’Association internationale francophone d’intelligence économique (AIFIE), Conseiller expert en intelligence économique internationale à CCI France.

«Envisager la création d’une agence continentale» De plus en plus, on constate la création d’agences africaines comme Bloomfield Investment Corporation et West African Rating Agency (WARA), spécialisées dans la notation financière des États et entreprises du continent qui étaient jusqu’ici évaluées par le «Big three» à savoir Fitch Rating, Standard and Poor’s et Moody’s. Que vous inspire cette «révolution» ? C’est une avancée tout à fait importante et essentielle. Les fameuses agences Standard & Poor’s, Moody’s et Fitch Ratings détiennent 97% du marché mondial ; elles créent un oligopole et imposent des critères dominants d’analyses financières des économies qui ne correspondent pas aux réalités africaines. Il faut absolument qu’en Afrique et dans les pays émergents se développe une approche diversifiée qui intègre à la fois les réalités culturelles et surtout économiques de ces pays. La mise en place d’agences africaines est donc essentielle. Elle est même indispensable. Au moment où l’Afrique construit son avenir, il convient qu’elle se dote d’instruments adaptés à ses spécificités, notamment en matière de sécurité économique contre les risques financiers, la corruption, plus largement contre les dépendances, mais aussi en matière de sécurité juridique dans la mouvance du traité OHADA. Les agences de notation africaines ont ici un rôle essentiel à jouer. Cependant se pose le problème de leur taille critique. Les premières agences sont de dimension locale, par rapport au «Big three».

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Pour exister, elles devront atteindre une taille importante. En même temps, pour ces agences, c’est un véritable avantage : à la différence des grandes agences internationales, elles vont pouvoir analyser des informations tout à fait précieuses relatives au contexte local, ce que ne proposent pas «les ténors» qui prennent en compte les ensembles macroéconomiques. Ces agences locales vont promouvoir aussi la transparence dans la gestion des émetteurs. Mais, il me semble important d’envisager la création d’une agence continentale qui puisse répondre à ce nouveau rapport de force qui s’instaure entre les pays du Nord, qui dictent les règles et les standards de l’économie mondiale depuis longtemps, et les pays émergents qui se dotent d’agences «indépendantes», aujourd’hui de dimension locale. Quels modèles devraient adopter ces agences africaines ? Les agences africaines ne doivent pas reproduire le modèle de notation des «Big three». Il est essentiel qu’elles intègrent d’autres indicateurs pour lire les réalités financières africaines et sécuriser la dynamique d’investissement, afin d’éviter que les intérêts des États, des entreprises, voire des collectivités territoriales africaines ne soient mis à mal par des taux d’intérêt trop élevés si la note vient à être dégradée. Ainsi, convient-il d’intégrer les fonds qui émanent de la diaspora africaine, comme le propose l’expert en intelligence économique Guy Gweth, et, pourquoi pas, d’innover en in-

tégrant les actifs immatériels tels que l’Indice de développement humain (IDH), l’éducation, la sécurité et la santé. L’Université ouverte de Dakhla (Ndlr, Maroc) a consacré une rencontre sur ce thème en décembre 2015. Les agences oublient aussi souvent de mesurer également la part de la richesse redistribuée. Pour l’heure, ces agences africaines n’ont pas encore publié de notations souveraines sur des dettes émises par des États africains. Que devraient-elles faire pour gagner leur confiance ? C’est un vrai défi pour les agences africaines. Leur priorité, me semble-t-il, sera de se doter des meilleures compétences et de mettre en place des règles d’éthique pour que les États puissent petit à petit leur faire confiance. Elles devront développer à partir de ces deux orientations une véritable stratégie d’influence et de promotion de leur savoir-faire. Elles pourront utilement s’appuyer sur les réseaux d’entrepreneurs tels que Hub Africa et sur le réseau des Chambres de commerce et d’industrie, tiers de confiance structurants des économies africaines, notamment francophones. Il convient surtout d’accumuler des expériences pour arriver à concrétiser un contrat avec un État et noter sa dette souveraine. Les agences, en dépit de la concurrence, pourraient aussi coopérer pour produire conjointement des analyses et démontrer ainsi leurs compétences en la matière sur la base d’un modèle de notation d’essence africaine.


© P.C. / CCI France

FOCUS

«La priorité des agences africaines, sera de se doter des meilleures compétences et de mettre en place des règles d’éthique pour que les États puissent petit à petit leur faire confiance.»

Certains spécialistes de la finance ont remis en cause la crédibilité, voire l’utilité des agences de notation après la crise des subprimes, la crise grecque, etc. Selon vous, sont-elles utiles finalement ? Il est indéniable que les agences de notation, celles qui ont pignon sur rue, n’ont pas anticipé ces crises. Pourtant, à mon avis, elles sont indispensables. Cependant, il faut que la société civile, les patronats locaux, et les ONG interrogent réellement la compétence des agences. Comme toujours, il est néfaste d’avoir une source univoque dans le secteur de la notation financière, surtout quand elle est celle du seul marché. Instaurer un débat contradictoire, valoriser la diversité de points de vue permettrait d’éviter «ce monopole» des grandes agences. Peut-on considérer les agences de notation comme un instrument de l’intelligence économique ? Absolument, c’est un instrument de l’intelligence économique : l’agence de nota-

tion permet de comprendre pour décider en connaissance de cause, d’anticiper les risques financiers, de promouvoir les valeurs et les standards de telle économie. C’est un instrument d’influence et de guerre économique : des États utilisent souvent le résultat des notations émises par les agences pour affaiblir l’image et la réputation d’autres États. Il en va de même pour les entreprises. Avec les agences de notation financière, nous sommes au cœur des métiers fondamentaux de l’intelligence économique : je pense aux dispositifs de veille, aux enquêtes et aux analyses financières réalisées pour aboutir à une connaissance approfondie des situations, à plus de transparence à travers l’éthique appliquée (due diligence). Nous pouvons effectivement dire que la notation financière représente aujourd’hui un véritable outil d’influence dans le rapport de force entre les économies au cœur de la mondialisation. D’où l’urgence pour le continent africain de se doter de tels instruments. 

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business case Stawi Industries

Réalisé par Elimane Sembène

La transformation agricole, moteur de la croissance durable Stawi Industries a vu le jour en 2011, sur l’initiative de son fondateur et actuel PDG, Eric Muthomi. L’entreprise transforme et commercialise des farines de bananes pour éviter leur gaspillage et permettre aux agriculteurs kenyans de tirer profit de leur production.

«L’idée de créer l’entreprise Stawi est partie du constat selon lequel l’économie kenyane peine à décoller à cause de nombreux obstacles et problèmes qui l’empêchent de tirer profit des grandes potentialités dont regorge le pays», dixit Eric Muthomi qui a fondé cette PME à l’âge de 25 ans. C’est pour faire face à ces contraintes qu’il a décidé de matérialiser ses idées dans

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le champ agricole. Il observe que des agriculteurs de la province de Meru, située, au centre du Kenya, rencontraient d’énormes difficultés pour vendre les importantes quantités de bananes récoltées. L’abondance de cette production sur le marché impactait négativement les prix ; certains intermédiaires en profitaient pour proposer aux petits agriculteurs des prix

très faibles. Face à cette situation, ils étaient obligés de vendre à perte. «Les petits exploitants agricoles du Kenya n’ont généralement pas un revenu stable pour certaines raisons. Les intermédiaires achètent les bananes aux petits agriculteurs à des prix faibles», indique Eric Muthomi. Outre ses difficultés, ces petits exploitants étaient également


business case confrontés à d’autres obstacles comme la mauvaise qualité des routes qui ne facilitait pas l’écoulement de leurs produits dans le marché local et le manque d’unités de stockage. «Ces agriculteurs ont besoin de marchés pour écouler

mettre à ces agriculteurs d’avoir une rente financière en rachetant leur production. «Stawi est une entreprise de transformation et commercialisation de farine de banane qui ambitionne d’aider les petits agriculteurs du pays,

«Les petits exploitants agricoles du Kenya n’ont généralement pas un revenu stable pour certaines raisons. Les intermédiaires achètent les bananes aux petits agriculteurs à des prix faibles»

BioExpress

© Stawi Industries

leurs marchandises et de revenus stables pour améliorer leur vie. Ils ne disposaient pas d’installations et d’infrastructures de conservation et de stockage appropriées, ces produits étant fragiles et périssables sans oublier que durant la haute saison, il y a une surproduction ce qui pose avec acuité le problème de stockage», observe-t-il. Soutenir financièrement les agriculteurs C’est dans ce contexte qu’est né Stawi Industries avec comme objectif la transformation et la commercialisation de la farine de banane pour éviter ces éventuels gaspillages, mais aussi per-

à la prospérité de notre pays en aidant les petits exploitants agricoles à avoir accès aux marchés et à rentabiliser leur travail. Le but est aussi de générer des opportunités d’emploi pour les jeunes et les femmes tout en proposant

c’est là notre objectif premier. Le terme “Ustawi” est inspiré de notre hymne national dans lequel nous prions pour la prospérité de notre pays. Nous voudrions que le Kenya soit prospère et développé, nous nous y attelons du mieux que nous pouvons», précise Muthomi. Ces farines, écoulées dans des supermarchés kenyans, sont destinées aux enfants et adultes (voir photos). Stawi aurait réalisé un chiffre d’affaires de 6.000 euros en 2014. Outre le volet transformation, Stawi promeut la création d’emplois auprès des paysans kenyans. «Notre objectif est de participer

Eric Muthomi est titulaire d'un baccalauréat en Droit de l'Université catholique de l'Afrique de l'Est. Il a également obtenu un certificat en «Gestion et innovations pour l'agro-entrepreneuriat» à la prestigieuse Université internationale de Nairobi. Il dispose également d'un certificat en «Gestion d'entreprise».

aux consommateurs des produits à grande valeur nutritive et sanitaire, pour une alimentation saine et équilibrée», déclare le PDG de Stawi. La banane est très consommée en Afrique. D’après des statistiques, les Africains consomment chaque année 40% des bananes produites dans le monde.

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business case

Consommation

Proposer des aliments à valeur nutritive Stawi commercialise des farines de gruau et d’amidon dans le marché kenyan en transformant des composants naturels.

Développer l’industrie agroalimentaire au Kenya Actuellement, ces produits sont vendus dans plusieurs supermarchés du pays. «Nous proposons des aliments pour petit-déjeuner destinés aux enfants et aux adultes ainsi que de la farine de banane sans gluten. Nous fournissons aussi aux supermarchés et commerces kenyans des ingrédients nutritionnels dont ils ont besoin», confirme-t-il. Mais tout n’a pas été facile au début, révèle Éric. L’évolution de Stawi Industries a été jalonnée d’épines. D’abord, les problèmes de financement qui sont inhérents à tout jeune entrepreneur «nous avions effectivement eu des difficultés de financement pour créer notre société», ensuite, la

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concurrence et la législation, de fait «nous avions dû faire face à une rude compétition et aux lois et réglementations gouvernementales régissant le secteur». Enfin, l’accès à des ressources humaines qualifiées pour démarrer nos activités parce qu'«il n’a pas été aisé pour Stawi d’avoir accès au marché et de trouver les compétences nécessaires pour se lancer dans le domaine de la transformation agroalimentaire». L’industrie agroalimentaire représente une alternative efficace pour lutter contre le gaspillage des produits agricoles et contribuer à l’autonomie financière des agriculteurs. Plusieurs pays du continent l’ont compris et développent des programmes dans

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La PME présente sur le marché kenyan des farines de gruau et d’amidon pour les petits et les adultes. «Nos produits ont une grande valeur nutritive vu qu’ils sont réalisés à partir de composants naturels précuits et dont le temps de préparation est de 5 minutes seulement», souligne Éric Muthomi. D’après lui, ces produits renferment plusieurs avantages pour les familles kenyanes. «Ceci ne représente pas seulement un gain de temps et d’énergie pour les familles kenyanes, mais aussi l’occasion de s’offrir des préparations délicieuses et tirer profit d’une nutrition bénéfique pour la santé», renchérit-il.

ce sens. Qu’en est-il réellement au Kenya ? «Je crois qu’il reste encore des zones inexploitées dans la chaine de valeur de l’industrie agroalimentaire. Par exemple, la noix de coco ne fait pas l’objet de transformation agroalimentaire. Ce fruit représente un grand potentiel industriel et on a besoin d’investissement pour le booster et en stimuler la croissance dans les zones côtières où il est sous-exploité», explique le PDG de Stawi.


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Ressources humaines

Le dévouement et la polyvalence,

clés du succès

Si Stawi Industries a pu s’imposer comme une des PME leaders dans le marché kenyan, c’est en partie, grâce à l’implication et dévouement de son personnel. Stawi Industries ne compte pas moins de dix employés, dont cinq à temps plein et d’autres travailleurs à mi-temps. Une jeune équipe qui constitue la locomotive du succès de la PME kenyane. Éric Muthomi n’en est pas peu fier. Selon lui, leur secret, c’est la cohésion et la polyvalence. «Au sein de Stawi, nous nous sentons comme les membres d’une même famille, nous formons un groupe dédié et fortement impliqué qui évolue dans un environnement qui exige des compétences confirmées et à multiples talents pouvant remplir plusieurs rôles». Autre attitude positive bien appréciée par le manager, leur dévouement. «Nous avons la chance

d’avoir des employés impliqués qui adhèrent pleinement à notre vision. Les débuts ont été très difficiles pour nous», observe-t-il. Favoriser l’emploi des femmes L’entreprise favorise les candidats féminins dans sa stratégie de recrutement. Une manière pour lutter contre les disparités hommes-femmes, et surtout permettre à la gent féminine d’avoir des revenus pour bien gérer leur foyer. «En Afrique subsaharienne, les femmes sont des contributeurs essentiels au travail agricole, mais du fait de leur inaccessibilité aux semences améliorées, aux meilleures techniques et tech-

nologies et aux marchés, les rendements sur leurs parcelles sont de 20 à 40% inférieurs à celui des parcelles cultivées par les hommes. Combler cette lacune peut aider les ménages à devenir plus productifs et augmenter les revenus des familles pauvres», remarque-t-il. À en croire le fondateur et PDG de Stawi Industries, son entreprise souhaite apporter sa contribution dans le développement social de son pays. «Nous sommes concentrés sur nos objectifs, déterminés et avons une forte conviction que notre entreprise peut opérer un réel changement social», indique-t-il. 

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Impact social

Accroitre les revenus des petits agriculteurs Depuis son lancement en 2011, la start-up a permis aux agriculteurs kenyans de tirer profit de leur production notamment à travers la création d’emplois indirects. Elle a également mis en place une stratégie pour éviter le gaspillage dans la chaîne de production des bananes.

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riser davantage leur production. «Les petits exploitants agricoles veulent avoir de la valeur ajoutée pour optimiser la durabilité de leur produit, en stimuler la demande sur le marché pour plus de rentabilité et, partant, améliorer leurs conditions de vie. C’est pour quoi il faut adopter des techniques de transformation agroalimentaire appropriées pour pouvoir être en mesure d’assurer la sécurité alimentaire du Kenya dont la population est en constante augmentation», suggère Eric Muthomi.

Grâce à la mise en place de son industrie agroalimentaire, depuis maintenant quatre ans, Stawi a permis aux petits exploitants de récolter les fruits de leur labeur. D’abord, en transformant les bananes en farine, elle allonge la du-

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rée de leur conservation qui passe ainsi d’une semaine à un an. Ces agriculteurs qui ne disposent pas d’infrastructures adéquates pour stocker, voire transformer leurs produits, ont à travers Stawi un partenaire privilégié pour valo-

Le Kenya compterait plus de 400.000 petits agriculteurs. L'agriculture fait vivre 75% de la population et génère plus de 50% du PIB ; Stawi collabore avec plus de 100 groupes d’agriculteurs. Plus de 60% des agriculteurs, la plupart exerçant dans des zones rurales reculées, vivent grâce aux revenus générés par la commercialisation des bananes. «L'idée d'entreprise de transformer des bananes en farine était unique, car elle intègre plus de valeur, la viabilité commerciale en raison de son évolutivité, la promotion de la sécurité alimentaire, la fourniture de l'emploi pour les Kenyans et les marchés pour les produits agricoles excédentaires», constate-t-il.


business case Créer 1.000 emplois d’ici 5 ans Cette collaboration avec la PME leur permet d’avoir un acheteur garanti sur le marché et ne pas subir la pression des intermédiaires qui leur proposaient des prix faibles pour acheter leurs bananes. Concrètement, ces petits exploitants gagnent plus de 30% sur la vente des bananes grâce à ce partenariat. «Notre souci majeur est lié au fait que les revenus des petits exploitants de banane dans les zones rurales du comté de Meru au Kenya sont très faibles. Ceux-ci avaient positivement réagi face au concept de transformation de banane en farine proposé par la société Stawi comme alternative pour ne plus être à la merci des intermédiaires», affirme-t-il. Aujourd’hui, l’entreprise revendique la création de 300 emplois indirects aux agriculteurs qui interviennent dans sa chaine d’approvisionnement, et vise la barre des 1.000 emplois indirects dans les cinq prochaines années.

Quelques statistiques • Effectif : 10 employés, dont 5 à temps plein. • Plus de 100 groupes d’agriculteurs comme partenaires. • Plus de 60% des agriculteurs kenyans vivent grâce aux revenus générés par la commercialisation des bananes. • Création de 300 emplois indirects. Objectif : 1.000 emplois  dans les cinq prochaines années. • Hausse de 30% sur les revenus des agriculteurs. • 400.000 petits agriculteurs au Kenya. • L'agriculture fait vivre 75% de la population et génère plus de 50% du PIB. © D.R.

Stawi Industries se veut aussi une entreprise responsable, elle a mis en place une stratégie pour éviter le gaspillage dans la chaîne de production des bananes. Ces efforts lui ont permis de recevoir en décembre 2011 le prix du Fonds mondial pour la Nature (WWF) qui récompense les sociétés engagées dans le développement durable. «Cette récompense traduit les efforts consentis par Stawi dans l’utilisation de ressources naturelles de façon à réduire le gaspillage enregistré dans la chaine de valeur de la production de bananes. Nous projetons de dupliquer notre succès dans la transformation d’autres fruits qui font aussi face au problème de gaspillage, lequel a pour conséquence de plonger les petits exploitants agricoles dans un cycle de pauvreté sans fin, les condamnant à la précarité des revenus», se réjouit-il.

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Prix et distinctions Octobre 2011

• Vainqueur de l’édition 2011 du concours «Enablis Business Plan Competition» organisé par le bureau Enablis en Afrique de l’Est. Éric Muthomi a été le grand gagnant dans la catégorie «Agro-industrie» parce que son idée d'entreprise pour transformer les bananes en farine permettrait d'améliorer la sécurité alimentaire, de réduire les pertes post-récoltes, de créer des revenus pour les agriculteurs et des emplois, et de soutenir le Kenya dans la réalisation de son programme «Vision 2030».

Décembre 2011

• Lauréat du concours national «Challenge Nature pour l'Afrique» organisé par Fonds mondial pour la nature, pour l'impact environnemental positif de Stawi Foods et de son potentiel pour créer des opportunités d'emploi pour les Kenyans tout en réduisant les pertes post-récoltes.

Juin 2012

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• Lauréat du Prix «Jitihada (deux)» lors du concours national «Business Plan Competition», organisé par le Kenya Institute of Management. La société Stawi Foods a remporté ce prix parce qu'elle avait permis à plusieurs producteurs de bananes dans le Kenya rural d’éviter que leur production abondante soit jetée ou vendue à un bas prix à des courtiers.

Février 2013

• Top 30 des jeunes de moins de 30 ans dans le classement des «Meilleurs jeunes entrepreneurs d’Afrique» établi par le magazine Forbes Afrique. Fondateur et PDG Stawi, Éric Muthomi a été honoré en février 2014 par Forbes Magazine en figurant dans le Top 30 de jeunes entrepreneurs de moins de 30 ayant opéré un grand impact en Afrique.

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Novembre 2015

• Prix de la Meilleure PME en Afrique en 2015, à l’occasion de la deuxième édition du Forum Africa SME Champions à Nairobi. «C’est un honneur pour moi d’être choisi pour recevoir une telle distinction. Je me réjouis d’avoir reçu le prix de la Meilleure startup d’Afrique en 2015 lors de la deuxième édition du Forum Africa SME Champions qui s’est déroulée les 17 et 18 novembre à Nairobi. Et comme dirait Nelson Mandela : “Cela semble toujours impossible, jusqu'à ce qu'on le fasse”. L’Afrique est capable de réaliser des miracles et c’est un privilège de faire partie du développement remarquable qui est en train de s’opérer sur son sol.» Éric Muthomi

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Avec stawindustries.com


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Perspectives

Exporter ses produits dans le marché sous-régional Fort de son succès au Kenya, Stawi Industries vise désormais le marché sous-régional.

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En Afrique, chaque année, de grandes quantités de fruits et légumes sont gaspillées soit dans les champs ou durant le stockage. Selon lui, le secteur privé doit investir dans l’industrie de la transformation pour éviter ces énormes pertes. «Le secteur privé doit investir dans le domaine de la conservation des fruits et légumes qui sont facilement périssables et fragiles pour en réduire les gaspillages. Nous devons aider les sociétés spécialisées dans la conservation de denrées alimentaires de ce genre pour qu’elles soient en mesure de faire face aux défis qui se posent à elles et au secteur tout entier», suggère Muthomi.  «Nous projetons d’exporter notre production dans la région dans les jours qui viennent, mais notre objectif premier reste le marché local». Eric Muthomi ne cache pas les ambitions de sa structure. Après s’être imposée au niveau local, son entreprise lorgne désormais le marché sous-régional pour y exporter ses produits. L’on pourrait dire que cette volonté n’est pas due au hasard, si l’on jette un coup d’œil sur les statistiques relatives à la consommation de bananes en Afrique de l’Est. La banane est l’un des produits les plus prisés dans ce marché à l’instar du maïs, du riz, et du blé. Le Kenya, le Rwanda, la Tanzanie, l’Ouganda et le Burundi figurent parmi les plus grands producteurs de bananes au niveau mondial. Les

habitants de ces pays en consomment pas moins de 400 kilogrammes par an. Miser davantage sur l’industrie alimentaire En optant pour le pari de la transformation, Stawi pourrait ainsi toucher un grand pourcentage d’amateurs du fruit jaune, surtout les classes moyennes qui privilégient de plus en plus les produits industriels. «L'industrie de la transformation alimentaire est cruciale; elle fournit un marché pour les produits agricoles, favorise la création d'emplois et freine l'exode rural. Sa valeur ajoutée favorise l'exportation de produits finis plutôt que des matières premières et permet au pays de recevoir plus de devises étrangères», estime-t-il.

«L'industrie de la transformation alimentaire est cruciale; elle fournit un marché pour les produits agricoles, favorise la création d'emplois et freine l'exode rural.»

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african sectoral Journal Énergies renouvelables

Le Togo veut se met au vert

Dossier réalisé par Sylvio Combey

Le continent africain, lentement mais sûrement, a commencé à s’approprier des technologies en matière d’énergies renouvelables. Disposant en majorité et en quantité de lumière solaire, le plus vieux continent a compris qu’il peut capitaliser sur cette ressource non tarissable. Le Togo, petit pays d’Afrique de l’Ouest, un peu effacé certes, essaie de suivre la cadence.

L’Afrique dans le «noir» Selon un rapport dénommé «Remap 2030» rendu public par l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA), l’Afrique satisfera d’ici 2030, quelque 22% de son besoin énergétique grâce aux énergies renouvelables. Cette proportion, peut-on lire dans le rapport, pourrait être portée à 50% si les recommandations sont mises en œuvre. Cette étude est partie du constat selon lequel le continent africain a un faible taux de couverture en matière d’énergie électrique. Près de 600 millions d’habitants d’Afrique subsaharienne sont privés d’électricité. Alors que le taux de couverture dans la région est de

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Du côté du privé, on se bouscule pour se frayer un petit chemin. Les initiatives se multiplient dans ce sens. L’économie verte se fait de plus en plus désirer dans le monde. L’Afrique ne veut pas être sur la touche. Du Cap à Rabat, les initiatives tournées vers les énergies renouvelables ne sont plus comme de l’aiguille à chercher dans du foin. Elles sont légion, chacune avec sa spécificité. Et, c’est de bonne guerre.

Lampe solaire.

43%, il avoisine les 99% en Afrique du Nord. Et pourtant, l'Afrique détient quelques-unes des meilleures ressources en énergie renouvelable au monde sous la forme de biomasse, d'énergie géothermique, hydraulique, solaire et éolienne.

Au Togo, c'est à peine 27% en termes de couverture, selon une étude réalisée en 2014 par l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Le pays éprouve de plus en plus de difficultés à avoir de l’électricité de manière constante avec la Compa-


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La 12e foire internationale de Lomé a pour principal centre d’intérêt les énergies renouvelables. D’ailleurs, un salon consacré à ce type d’énergies se tient en marge de cette fête foraine de Lomé. "Développement des énergies renouvelables au Togo", c’est le thème retenu par le CETEF le mercredi 25 Novembre 2015, pour marquer la journée des Energies renouvelables.

Les ménages adoptent les énergies vertes À l’image de certains pays de l’Afrique subsaharienne, le Togo est en train de sortir la tête malgré les difficultés qui amoncellent le chemin. Et ceci, sous la pression forte de la demande. «Les ménages sont assez intéressés et en ce qui concerne l’éclairage, nous en installons beaucoup», confie Banla Amah-Telou, directeur d’Africa Digi Bio Tech. Les ménages à revenu moyen se bousculent de plus en plus pour se doter de cette source d’énergie. Si, selon certains, la Compagnie d’énergie électrique du Togo fait du «vol» lors des prélèvements de compteur grossissant ainsi la facture, d’autres estiment que c’est pour faire véritablement de l’économie. «Autant investir gros aujourd’hui et éviter demain de payer des factures lourdes à la fin de chaque mois», confie Raoul Assogba, fonctionnaire d’État, rencontré devant un étalage de vente de panneaux solaires. Pour ce père d’une famille de quatre enfants, l’essentiel est d’arriver à couvrir les besoins élémentaires à la maison.

© africardv

gnie d’énergie électrique du Togo (CEET) qui s’approvisionne, en partie, au Ghana. Les responsables de cette compagnie disent vouloir pallier ce problème avec de nouveaux produits ou compteur à prépaiement afin que les clients puissent eux-mêmes mieux gérer et contrôler leur consommation, selon les explications du chef section Prépayé, Adjété Wilson. «Notre vision est d’arriver, en 2028, à assurer 75% en termes de couverture électrique», confie le directeur-général adjoint Kpeto Amoussou. Mais en 2028, qu’en sera-t-il des 25% restants ?

Pour les besoins basiques des ménages, le génie togolais est en marche. Que ce soit pour la recharge des téléphones portables, la fourniture de l'eau potable comestible ou encore de la cuisson à l’énergie solaire, les inventions se multiplient. Certes, l’assemblage se fait à Lomé, mais les commandes des composantes se font à l’extérieur du pays sur une distance estimée à 56.600 km². Pour l’heure, on se contente du peu qui est en train d’être fait et on espère bien surprendre dans les prochaines années. Et pour y arriver, le réseau des professionnels en énergie renouvelable dispose d’ateliers de formation où il forme régulièrement des jeunes et enseignants de lycées techniques et scientifiques.

Les ménages à revenu moyen se bousculent de plus en plus pour se doter de cette source d’énergie.

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© CETEF

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Entretien

Kueku Banka Johnson

Directeur du Centre togolais des expositions et foires (CETEF)

«Nous voulons faire de Lomé un centre d’énergie renouvelable» Du 20 novembre au 7 décembre 2015, le Togo a abrité la douzième édition de la Foire internationale de Lomé. Une fête foraine orientée vers les énergies renouvelables. Une première au Togo, à l’initiative du Centre togolais des expositions et foires (CETEF). Éclairage de Kueku Banka Johnson, directeur du CETEF.

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african sectorial journal

Nous avons placé le thème de la foire de cette année sous le signe des énergies renouvelables tout simplement parce qu’on a constaté, à travers nos voyages, qu’elles sont très utilisées aujourd’hui, surtout celles solaires. Lorsque vous allez dans d’autres pays, vous remarquerez qu’il y a des panneaux sur presque tous les toits, dans les rues également sont installées des lampes solaires pour l’éclairage public. Ce qui n’est pas le cas au Togo. Mais nous savons qu’il y a quand même des initiatives dans ce sens. Nous avons donc voulu permettre aux opérateurs de faire découvrir au public ce qu’ils font et leur permettre d’en bénéficier. Comment êtes-vous parvenus à fédérer les entreprises du secteur ? Cela n’a pas été facile. Nous avons lancé la publicité via des médias, mais cela avait du mal à aboutir et nous avons donc renforcé cette communication par du porte-à-porte. Nous avons demandé à connaitre les entreprises qui travaillent dans le domaine au Togo. Et nous avons réussi à avoir leur liste, ils sont une vingtaine. Ensuite s’en est suivie la phase des entretiens individuels avec chaque opérateur afin de les sensibiliser et les motiver surtout en ce qui concerne le bien-fondé de l’insertion de cette thématique. Ils ont très vite compris que c’était dans leur intérêt et cela a beaucoup facilité le reste des travaux. Les visiteurs ont-ils apprécié les projets exposés ? Nous sommes tout à fait satisfaits. Nous avons pu échanger avec eux de manière individuelle et ils sont très contents d’y avoir participé, et ceci pour plusieurs raisons. C’était l’occasion pour eux de présenter au grand public les produits qu’ils ont mis en place. Il y a également des initiatives privées de jeunes togolais qui arrivent à produire des appareils et machines assez intéressants. Ils ont réalisé d’importantes ventes et certains nous ont confié avoir conquérir de nouveaux marchés d’instal-

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Pourquoi la Foire internationale de Lomé a-t-elle choisi cette année de mettre en exergue les énergies renouvelables ?

M. Johnson Banka, Directeur du CETEF

lation de système d’énergie solaire. J’ai vu moi-même bon nombre de visiteurs qui ne désemplissaient pas dans leur stand. En bref, ils ont été bien satisfaits. C’était d’ailleurs notre objectif fondamental ; permettre aux Togolais de mieux découvrir les énergies renouvelables et d’en profiter suffisamment. Nous avons régulièrement des délestages et la CEET (Compagnie d’énergie électrique du Togo, ndlr) a compris la nécessité de s’approprier ces sources d’énergie. Contrairement à ce qui se dit, le recours aux énergies renouvelables, surtout le solaire, revient même moins cher que l’utilisation de l’énergie électrique. Concrètement comment comptez-vous développer le secteur des énergies renouvelables au Togo ? L’organisation de cette foire axée sur les énergies renouvelables n’est pas un coup du hasard. Dans nos tournées dans les pays africains et en Europe, nous avons pu cerner l’impact de l’utilisation de ces types d’énergie sur le quotidien des populations. Je vous fais une confidence, je me prépare moi aussi à le faire installer chez moi à la maison ! Nous voulons faire de Lomé un centre dédié à cette source d’énergie. Nous avons

Nous avons placé le thème de la foire de cette année sous le signe des énergies renouvelables tout simplement parce qu’on a constaté, à travers nos voyages, qu’elles sont très utilisées aujourd’hui, surtout celles solaires. des partenariats avec des entreprises et envisageons d'organiser le Salon de l’énergie renouvelable au Togo et cela pourrait être une biennale pour faire découvrir aux Togolais ce qui se fait sous d’autres cieux, mais aussi faire la lumière sur les innovations au pays et les recherches effectuées dans le domaine. Nous projetons de le lancer dès 2016 à Lomé. 

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Innovation

Une pompe solaire made in Togo

De ces nombreux exposants en énergie renouvelable à la douzième Foire internationale de Lomé, Jean Kossivi Baga aura retenu l’attention de plus d’un. Il a mis en place une pompe à eau alimentée par l’énergie solaire et une autre pompe à eau solaire avec un relai assuré par des batteries. Découverte.

Des visiteurs à la foire ne se font pas prier pour faire une pause devant son stand et poser quelques questions. Depuis 2009, Kossivi, comme l’appellent affectueusement ses amis, est arrivé à se faire une place dans le monde de l’électronique. Par faute de moyens financiers, le jeune togolais s’est contenté tout d’abord de se payer des cours en ligne, après sa licence en électronique, dans une université privée à Ouagadougou au Burkina Faso. Ce premier diplôme universitaire va le propulser loin. Au bout de six mois de stage dans une entreprise privée, il va très vite gagner la confiance de ses supérieurs et gravir les bons échelons. De simple stagiaire, il est embauché en tant que technicien puis promu chef technicien et directeur technique en moins de quatre (4) ans. Un parcours que le concerné qualifie d’exceptionnel. Cette promotion va l’encourager à démarrer lui-même sa propre entreprise en 2013 sous le nom de VESO (Village de l’énergie solaire). C’est donc via VESO que Jean Kossivi Baga va commencer à faire mieux extérioriser son génie créatif. Très vite, il met sur place la

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pompe à eau alimentée par l’énergie solaire. «C’est une pompe qui permet de fournir de l’eau par une source d’énergie qui n’est autre que la plaque solaire», confie-t-il. Dès que le soleil apparait, la pompe tourne et commence par débiter de l’eau jusqu’au coucher du soleil. Et c’est justement ce qui impressionne beaucoup de visiteurs à la Foire internationale de Lomé. Durant toute la journée, ils voient tourner cette pompe qui n’est pourtant pas alimentée par le courant comme ils ont l’habitude de voir. Une pompe solaire made in Togo Mais, ce n’est pas tout. Il a également mis sur pied, une autre pompe à eau solaire, mais avec un relai assuré par des batteries. «Dès qu’il y a du soleil et que la batterie est chargée, la pompe peut tourner», rassure-t-il. Ces batteries ont une capacité de 200 A/h (Ampère/heure ndlr) et peuvent tourner au double quand la demande en eau est importante. Par le biais des plaques, une source de courant est imposée aux batteries qui sont chargées et par l’intermédiaire des convertisseurs, l’énergie est débitée pour nourrir la pompe et faire sortir de l’eau. Une invention qui pourrait


Exporter ces machines Selon les explications de Jean Kossivi Baga, la pompe peut débiter jusqu’à 0,5 m3 d’eau par heure en plein ensoleillement, puiser jusqu’à 40 mètres de profondeur et refouler l’eau jusqu’à 20 mètres de hauteur. L’un des grands espoirs de Kossivi est que le Togo soit bien loti en matière d’ensoleillement. Les 4,5 kWh (kilowatts heure, ndlr) d’ensoleillement sont largement suffisants pour faire tourner les pompes solaires. Les ambitions sont grandes et avec une bonne dose d’optimisme, Kossivi entend exporter ses «made in Togo» malgré la concurrence forte avec les machines importées du Japon, mais aussi de l’Hexagone. «Ces machines et autres appareils sont bien fabriqués, je l’avoue, avec une technologie bien avancée, mais ce n’est pas pour autant que nous allons nous décourager. Nous avons nos réalités sur le terrain et nous, nous travaillons à répondre à ces besoins. Les préoccupations des populations rurales nous tiennent vraiment à cœur», indique le jeune entrepreneur qui vend la machine à 900.000 FCFA. Cet espoir, il le nourrit au fil des années surtout qu’il est arrivé à faire déjà ses preuves dans beaucoup de coins reculés du pays que ce soit à Aného (50 km à l’est de Lomé) ; à Kpalimé (120 km au nord du pays) ou encore à Atakpamé (161 km de Lomé). 

© 2015 IAS

paraître sous d’autres cieux plus ou moins anodine d'autant que l’assemblage de la pompe est exclusivement fait au Togo et les plaques solaires importées. Mais, cela vaut le coup au vu des tracasseries et supplices auxquels les populations rurales doivent faire face d'autant plus qu’elles utilisent souvent de l’eau de barrages et de rivières généralement impropre à la consommation.

Petit château provisoire alimenté par les panneaux solaires.

Les pompes solaires • De quoi s’agit-il ? De pomper de l’eau, même en grand volume, sans dépenses d’énergie avec une pompe fonctionnant grâce à l’énergie solaire. • Qui utilise surtout ce moyen et depuis quand ? Ce n’est que dans les années 1970 que les cellules photovoltaïques qui permettent de transformer l’énergie solaire en énergie électrique, ont été utilisées avec succès. • Pourquoi ? Cette technologie ne nécesite que de faibles coûts de maintenance (généralement limités au nettoyage de la pompe) et n’a besoin d’aucun apport en combustible extérieur (pétrole, électricité). La durée de vie du système photovoltaïque est aussi relativement longue (20 ans), plus longue que celle de la pompe à proprement parler (souvent inférieure à 10 ans). • Qui est surtout concerné ? Lieux ou contextes dans lesquels ce moyen parait le mieux adapté? Cette technologie est particulièrement adaptée aux milieux ruraux de l’Afrique subsaharienne. En effet l’ensoleillement y est abondant (plus de 5 heures d’ensoleillement maximal), les ressources en eaux souterraines sont importantes, l’isolement des villages ruraux rend parfois difficile leur approvisionnement en énergies traditionnelles (pétrole, électricité) et les besoins en eau sont suffisamment faibles pour être couverts par un pompage solaire.

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african sectoral journal

Entreprenariat durable

Quand les lobbies internationaux dérangent...

Depuis quelques années, le débat sur les énergies renouvelables fait bien couler encre et salive. Des initiatives privées se multiplient dans ce sens, mais leur travail est menacé par des lobbies internationaux.

© D.R.

La situation s’explique aussi, d’une part, par le fait que le pays ne dispose pas encore de laboratoire de qualité. «Il est difficile pour un jeune technicien de certifier la qualité de son produit. Si nous importons de l’extérieur et qu’on nous dit que cela fait 100 W, nous ne disposons d’aucune ressource pour mieux apprécier. Et cela arrange les importateurs», déplore Banla Amah-Telou. Et d’ajouter : «nous devons aller vers une certaine autonomie pour qu’ils n’abusent pas de notre ignorance». Banla Amah-Telou, Directeur d'Africa Digi Bio Tech.

La phobie pour tout entrepreneur togolais, ce sont les lobbies extérieurs. Ils semblent être les maîtres du jeu. Dans les couloirs de grandes entreprises, leurs traces se font remarquer et très vite, le découragement prend le corps des autochtones dépourvus de moyens forts pour faire face à la concurrence. «C’est clair que les lobbies extérieurs auraient souhaité qu’il n’y ait pas assez de

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techniciens togolais», confie Banla Amah-Telou, directeur d’Africa Digi Bio-Tech et président du Réseau des professionnels en énergie renouvelable. Selon ses explications, l’on s’achemine vers une course sans issue pour les Togolais d'autant que la tendance qui se dessine à l’horizon, dit-il, est que les lobbies monopolisent le marché, importent tout leur matériel et l’installent eux-mêmes.

Encourager la production locale Le son de cloche est tout autre chez l’entreprise RebornX qui y voit juste un risque commercial qui peut toujours être maitrisé le jour où les Togolais auront totalement maîtrisé tous les rouages en la matière. «Des entreprises devraient se battre pour une politique nationale qui va jouer un rôle de régulateur», recommande le Guy Ahossoude, directeur général de RebornX. Selon lui, une bonne politique nationale mise en


À se hasarder dans de petits calculs, il soutient que pour monter une usine de fabrication de panneaux, le pays ne va pas dépasser les 200 millions de FCFA comparativement à ce que cela pourrait engendrer comme coût s’il faut passer des commandes à l’extérieur du pays. Quand le facteur prix décourage Ils sont nombreux ceux qui trouvent exorbitants les prix de ces machines et appareils commercialisés sur le marché togolais. «En tout cas, ce n’est pas pour nous qui avons comme revenu mensuel juste le Smig (35.000 FCFA, ndlr)», ironise Yawovi Kokouda, agent commercial dans une petite entreprise, installée il y a à peine six

Guy Ahossoude, directeur général de RebornX.

mois. Mais la situation n’étonne pas à RebornX. «Tout ce qui est dérivé des énergies solaires a un coût certes, il faut prendre en compte le prix de la qualité, de l’efficacité et de l’efficience», rétorque Guy Ahossoude. À se fier à ses propos, il y a plusieurs paramètres qui entrent en jeu et quand on en tient compte, c’est normal que les gens soient découragés. La situation s’explique par un environnement peu encourageant surtout avec la non-défiscalisation sur les composantes. Pour exemple, un panneau de 100.000 FCFA peut

© Flickr/Solar Electric Light Fund (SELF)

Techncien togolais montant des panneaux soliares .

© D.R.

place et qui encourage les énergies renouvelables devrait également permettre qu’il y ait plus de souscriptions. La situation pourrait donc permettre d’augmenter la capacité d’absorption et induire, de facto, une décroissance des prix. «Nous allons quitter le stade d’importation pour entrer dans le stade de production. À ce niveau, le pari sera gagné. La demande sera grande, beaucoup d’entreprises vont s’y intéresser et les prix vont chuter», analyse-t-il. Pour cette entreprise de droit togolais œuvrant dans l’assemblage de générateurs alimentés avec de l’énergie solaire, le financement des PME doit être aussi une des priorités en Afrique, au Togo. «Nous avons déjà les compétences avec des techniciens aguerris de plus de 10 ans d’expérience», rassure Banla Amah-Telou. «Si l’État togolais veut exécuter un projet de 5 MW, il sera obligé d’importer plus de 1.000 panneaux. Or, si on avait eu une petite fabrique de ces panneaux, on aurait pu tirer nos marrons du feu. Il faudra vraiment qu’on en arrive là», préconise-t-il.

être retrouvé à un prix nettement très bas sur les marchés voisins après la soustraction des 50% de la douane et des 18% des impôts. Pour l’heure, les entreprises privées doivent d’abord arriver à contrecarrer le diktat de la Compagnie d’énergie électrique du Togo. Elle est souvent accusée d’intimider les opérateurs qui s’y aventurent. «Des projets pour la transformation via les énergies renouvelables ont été arrêtés parce que la CEET n’a pas donné son accord», nous confie-t-on sous couvert d’anonymat. 

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Modèle & Outils de management Réalisé par Khalid Limamy

La carte d’empathie pour mieux connaitre vos clients Comment peut-on faire évoluer notre proposition de valeur en vue d’augmenter notre performance ou tout simplement pour continuer à exister ? Une question qui hante l'esprit de la plupart des dirigeants d’entreprise.

Il faut dire que le défi est de taille. Offrir une valeur perçue comme supérieure à celle de la concurrence est en effet un sacré challenge qui commence par une connaissance approfondie des clients. C’est ce facteur clé de succès qui a permis à Apple de dominer le

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marché de la musique en ligne en créant de la valeur client basée sur la combinaison trois offres : l’iPod, le logiciel et le magasin iTunes. Une proposition tout à fait en ligne avec les attentes des consommateurs qui voulaient une expérience musicale fluide : trouver, télé-

charger et écouter rapidement le contenu musical souhaité. Toutefois, obtenir une meilleure connaissance des clients n’est pas aussi évident qu’on pourrait croire. C’est rarement acquis par les études de marché classiques qui consistent à administrer un question-


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naire à un échantillon de clients. Et pour cause, les clients sont rarement très engagés dans l’affaire. Et même ceux qui le sont auront du mal à s’exprimer par rapport à des pratiques qu’ils ne connaissent pas encore. Henry Ford avait dit : «si j’avais demandé à mes clients ce qu’ils voulaient, ils m’auraient répondu “un cheval plus rapide˝.» Il ne s’agit pas seulement de demander aux clients ce qu’ils veulent. Le défi consiste à acquérir une parfaite connaissance des consommateurs/clients. La carte d’empathie peut vous y aider. Elle a été développée par XPlane, une société spécialisée dans la pensée visuelle. C’est un outil collaboratif simple conçu pour permettre d’acquérir une bonne connaissance des profils, des besoins et attentes d’un segment de clientèle particulier. Comme son nom l’indique, l’outil repose sur le concept de l’empathie. Une notion qui renvoie à la capacité de se mettre à la place d’autrui et de comprendre ses émotions, ses motivations, ses sentiments, ses attentes… et ses différents états mentaux. Concrètement, la carte d’empathie est organisée autour de 6 axes domaines de connaissances (voir figure 1) : 1. L’environnement 2. Les principales influences de l’environnement 3. Les pensées et les émotions 4. Les attitudes et les comportements 5. Les craintes et les appréhensions 6. Les désirs et les aspirations

Fig 1 : Carte d'empathie

Pour exploiter au mieux l’outil, il est recommandé de procéder selon une démarche structurée en plusieurs étapes : Étape 1 : définir le segment de client Précisez d’abord le segment de clientèle auquel vous vous intéressez particulièrement. Si vous n’avez pas encore segmenté votre clientèle, commencez par le faire. Et identifier des groupes homogènes par rapport à des critères bien choisis : Besoins spécifiques, types de relation, perception de l’offre, niveau de rentabilité… Étape 2 : identifier le client type Une fois le segment défini, identifier la personne (ou l’organisation) qui représente le mieux les clients ce seg-

ment de clientèle. Nommez-le alors et présentez ses caractéristiques : Mamadou est cadre manager dans une grande entreprise, il est âgé de 40 ans, marié à Fatou qui a 30 ans et travaille en tant que secrétaire-assistante dans une administration publique. Mamadou et Fatou viennent d’avoir leur deuxième enfant. Mamadou gagne 1.600 dollars/mois et aspire à des postes de responsabilité pour améliorer sa situation… Il est l’aîné de sa famille et doit prendre en charge en partie ses parents et son frère qui n’a pas encore de revenu stable. Étape 3 : Acquérir une bonne connaissance du profil type et remplir la carte Mettez-vous maintenant à la place du client et répondez à ces questions.

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Modèle & Outils de management

1. Que voit Mamadou dans son environnement ? • Qui fait partie de son entourage ? • Qui sont ses amis ? • À quels types d’offres est-il exposé quotidiennement ? • Quels problèmes rencontre-t-il ? • Etc. 2. Comment l’environnement de Mamadou l’influence-t-il ? • Qu’est-ce qu’il entend dans son environnement ? • Que disent ses amis ? Sa conjointe ? Sa famille ? • Que disent les autres personnes qui comptent pour lui ? • Qui l’influence réellement et comment ? • À quel média fait-il confiance ? • Etc. 3. Que pense Mamadou et que ressent-il réellement ? • Qu’est-ce qui est réellement important pour lui ? • Quelles sont ses principales préoccupations ? • Quelles sont ses principales inquiétudes ? • Quelles sont ses principales aspirations ? • Imaginez ces émotions. Par quoi est-il ému ? • Qu’est-ce qui pourrait l’empêcher de dormir ? • Essayer de décrire ses rêves et ses aspirations. • Etc. 4. Que dit Mamadou et que fait-il ? • Comment se comporte-t-il en public ? • De quoi parle-t-il ? Que racontet-il ? • Comment se comporte-t-il avec les autres ? Attention : ce qu’il dit ne correspond

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pas nécessairement à ce qu’il éprouve ou pense réellement. Observez et soyez à l’affût de ses contradictions. 5. Que craint Mamadou ? • Quelles sont ses plus grandes peurs ? • Quelles sont ses plus grandes frustrations ? • Quels obstacles se dressent entre lui et ce qu’il veut ou ce qu’il a besoin d’accomplir ? • Quel risque pourrait-il avoir peur de prendre ? • Etc. 6. Qu’espère Mamadou ? • Que désire-t-il ou qu’a-t-il réellement besoin d’accomplir ? • Quels sont ses critères de réussite ? • Quelles stratégies pourrait-il utiliser pour atteindre ses buts et objectifs ? • Quels obstacles se dressent entre lui et ce qu’il désire ou ce qu’il a besoin d’accomplir ? • Etc. Une carte d’empathie est un outil visuel et collaboratif qui se prati-

que en équipe de préférence pluridisciplinaire. Il est conseillé pour une meilleure efficacité de recopier la carte sur une grande feuille bien visible et d’utiliser des cartes ou des Post-it pour remplir individuellement chaque bloc (voir figure 2). Les membres de l’équipe, coachée par un animateur, vont par la suite «échanger à propos des cartes, reformulez si besoin avant de valider le travail. Alors, prêts pour développer votre empathie client ?

Fig. 2 : Carte d'empathie et Post-it


african UN FORUM 2015 QUI A TENU TOUTES SES PROMESSES management journal

APRÈS LE SUCCÈS DE NAIROBI, CAP SUR ABIDJAN 2016 Guide pratique du manager

2 JOURS D’OPPORTUNITÉS D’AFFAIRES ET DE FINANCEMENT 17 - 18 NOVEMBRE 2015

NAIROBI - KENYA - SAFARI PARK HOTEL

UN FORUM DÉDIÉ AUX CHAMPIONS AFRICAINS PRÉSENTATION DU FORUM UNE PLATEFORME POUR CÉLÉBRER LES CHAMPIONS DU SECTEUR PRIVÉ EN AFRIQUE.

300 ENTREPRISES PARTICIPANTES PME : 39 % - 155 START-UP : 10 % - 41

UN ESPACE PERMETTANT AUX INSTITUTIONS FINANCIÈRES, UN ACCÈS PRIVILÉGIÉ AUX PME À FORTE CROISSANCE.

CONSEIL : 6 % - 24 GRANDES ENTREPRISES : 1 % - 3

DES TABLES RONDES DE HAUT NIVEAU AXÉES SUR LES INNOVATIONS FACILITANT LE DÉVELOPPEMENT DES PME.

EXPERTS : 7 % - 29

DES EXPERTS DE HAUT NIVEAU EN DÉVELOPPEMENT DE PME.

ASSURANCES : 1 % - 3

INST. FINANCIÈRES : 27 % - 109 GOUVERNEMENT : 2 % - 9 ONG : 1 % - 3

DES MASTER CLASSES THÉMATIQUES POUR UN PARTAGE D’EXPERTISES ET DE BEST PRACTICES. DES POSSIBILITÉS DE RÉSEAUTAGE PERMETTANT L’ACCÈS À DE NOUVEAUX MARCHÉS.

PRESSE : 6 % - 24

41 PAYS PRÉSENTS

LES INNOVATIONS DE CETTE ÉDITION : LE SME SOLUTION CENTER ET LE « 10 MINUTES TO CONVINCE ».

300 PME et START-UP qualifiées dans 20 secteurs d’activités, en provenance de 41 pays, 8 régions, 100 dirigeants d’Institutions Financières, experts en développement de PME et décideurs publics ont pris part à ce rendez-vous de Nairobi qui a tenu toutes ses promesses.

20 SECTEURS D’ACTIVITÉS REPRÉSENTÉS AGROALIMENTAIRE ; BANQUE ET ASSURANCE ; BÂTIMENTS, TRAVAUX PUBLIQUES ET CONSTRUCTION ; COMMERCE, D I S T R I B U T I O N E T N É G O C E ; C O M M U N I C AT I O N E T MÉDIA ; ÉDUCATION ET FORMATION ; ÉLECTRONIQUE ET ÉLECTRICITÉ ; ENVIRONNEMENT ET DÉCHETS ; ÉTUDES ET CONSEIL ; FINANCEMENT ; INFORMATIQUE ; MÉTALLURGIE ET MÉTAL ; PAPIER ; PARACHIMIE ; PÉTROLE, GAZ, MINES ET ÉNERGIE ; PLASTIQUE ET CAOUTCHOUC ; SERVICES ; TEXTILE, HABILLEMENT ET CHAUSSURES ; TOURISME, LOISIRS ET HÔTELS ; TRANSPORT ET LOGISTIQUE.

BILAN DE SATISFACTION SATISFACTION DES ATTENTES DES PARTICIPANTS

AVEZ-VOUS FAIT DES RENCONTRES INTÉRESSANTES POUR VOTRE ACTIVITÉ

OUI : 84 %

OUI : 74 %

MITIGÉ : 6 %

NON : 26 %

NON : 10 %

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Comment faire face aux problèmes organisationnels Très présent dans notre répertoire, le terme «problème» reste toutefois difficile à définir. Et pour cause, comme nous rappellent Daniel Crépin et René Robin (1) , dans la vie réelle, il n’existe pas à proprement parler de «problèmes»: il n’y a que des situations lesquelles peuvent être vécues ou non comme «posant problème». Ces auteurs définissent le problème comme étant «un écart entre ce qui est et ce qui devrait ou pourrait être». Ils distinguent ainsi deux types de problèmes : • Le problème comme dysfonctionnement : une situation non conforme à la norme ou à ce qui est désiré. • Le problème comme besoin d’amélioration ou opportunité de progrès : chercher à faire progresser un niveau de performance. Qu’ils soient dysfonctionnement ou opportunité de progrès, la capacité de l’entreprise à faire face aux problèmes conditionne son destin. Développer un état d’esprit constructif Dépasser les problèmes suppose des comportements productifs prônant une recherche constante de pistes de progrès et une réelle volonté de les exploiter. Or, les comportements classiques obéissent plutôt à une logique défensive et peu constructive : Nous avons tendance à culpabiliser les autres, à mettre en avant des contraintes qui nous dépassent ou

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encore à tout mettre sur le compte de la fatalité. Nous nous enfermons alors dans un cercle vicieux : moins nous agissons et plus les situations insatisfaisantes se compliquent et se pérennisent et plus nous adoptons des réflexes défensifs et des comportements passifs. Or, «il y a toujours un levier à actionner pour faire évoluer une situation insatisfaisante ou pour exploiter une opportunité de progrès». Pourvu qu’on arrive à contourner ces mécanismes défensifs. Et à développer un état d’esprit constructif. Pour y arriver, plusieurs conditions (2) doivent être respectées : 1. Refuser de se positionner en victime : aborder les problèmes de façon constructive commence par rejeter cette posture réflexe de victime. Il s’agit de la remplacer par une autre attitude réflexe : identifier les leviers et les marges à exploiter pour améliorer la situation. 2. Aborder ouvertement les problèmes : oser aborder directement le vrai problème même si cela risque de créer des situations d’inconfort. 3. Identifier ses contradictions : admettre qu’il nous arrive à faillir à notre idéal permet de développer une attitude responsable

Adopter une démarche de résolution de problème Les problèmes organisationnels sont de plus en complexes. Pour les dépasser, le bon sens, s’il est nécessaire, il est loin d’être suffisant. L’entreprise doit adopter une véritable démarche de résolution de problèmes. En effet, une méthode commune et bien appropriée permet aux collaborateurs de : • Éviter les pièges liés aux mécanismes défensifs. • Adopter un langage commun favorisant le travail en équipe et la réflexion collective. • Développer un esprit solidaire nécessaire pour affronter les problèmes. • Se concentrer sur le vrai problème. S’il existe plusieurs méthodes de résolution de problèmes, il est fortement conseillé de choisir, comme le recommande un manager du pôle Prévoyance CDG Maroc (PP CDG), «une méthode simple, facile à appréhender par l’ensemble des collaborateurs.» Le PP CDG a ainsi opté par un modèle de résolution de problème (MRP) inspiré de la démarche qualité. Il est conçu selon la démarche d’amélioration continue symbolisée par la roue de Deming (voir figure 01).


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Guide pratique du manager

Interviewer les clients

Développer les solutions

Sélectionner un problème et développer mesures de performances

Benchmark

Schématiser le processus

Schématiser les causes et effet

Collectionner et analyser les données sur les cause

Planifier Sélectionner et implémenter les solutions

Agir

Mesurer les résultats et affiner les mesures de performance

Faire

Vérifier

L'équipe sélectionne le problème suivant

Figure 01 : Le modèle de résolution de problème (MRP) du pôle prévoyance CDG

De fait, le MRP est devenu une partie intégrante de l’amélioration des processus. Une démarche qui se déroule comme suit : • Définition des indicateurs de performance • Mesure périodique • Analyse des mesures et identification des non-conformités • Lancement du MRP • Gestion des actions d’amélioration et de prévention en mode projet Privilégier des outils visuels Il existe une multitude d’outils appropriés aux différentes étapes de de la démarche qualité de résolution de problèmes (voir tableau). On peut citer à titre d’exemple : • Le QQOQCP (Quoi ? Qui ? Où ? Quand ? Comment ? Pourquoi ?) qui vise à explorer un problème dans ses différentes facettes. • Le diagramme de Pareto, souvent utilisé pour mettre en évidence les éléments les plus importants d’un

problème sur lesquels devront être concentrés en priorité les efforts d’amélioration. • Le diagramme d’Ishikawa qui sert à associer des causes multiples à Étape de la démarche

un effet et les classer par famille. • La matrice de compatibilité utilisée pour faciliter le choix, parmi plusieurs propositions, en fonction de critères préétablis.

Principaux outils utilisés

Poser le problème

QQOQCP

Analyser les causes

Diagramme causes/effet ou diagramme d’Ishikawa

Identifier majeures

les

causes

Diagramme de Pareto Vote pondéré

Rechercher les solutions

Brainstorming Outils de créativité

Choisir une solution

Matrice de compatibilité

Mettre en œuvre la solution

Plan d’action

Évaluer les résultats – Généraliser la solution

Bilan des réalisations

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© D.R.

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La plupart de ces outils peuvent être utilisés selon le mode de réflexion visuelle très conseillé dans la résolution de problèmes. Les outils visuels permettent, en particulier de : • Matérialiser chaque étape dans la résolution de problèmes empêchant ainsi le groupe de «tourner en rond». • Apprécier les avancements réalisés par l’équipe. • Rompre avec les modalités de travail habituelles : ce qui favorise la créativité et la coopération. Réévaluer les croyances à l’origine des problèmes «Je croyais qu’on s’était bel et bien débarrassé de ce problème et voilà qu’il réapparait…» Citation d’un manager qui vous rappelle certainement des situations vécues au sein de votre organisation.

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Car, comme une mauvaise plante coupée qui repousse, le problème traité de façon superficielle ne tardera pas à réapparaître. En fait, tant que des freins culturels subsistent, le changement induit par la nouvelle solution ne peut être durable. Une solution durable suppose s’attaquer aux causes profondes qui ont engendré le problème et pas uniquement aux comportements sous-jacents. Il s’agit donc de mettre l’accent non seulement sur les comportements, mais également, sur les attitudes, les croyances, les normes et les valeurs affectées par le changement. Ce qui renvoie au modèle des niveaux logiques de Robert Dilts, un des experts dans le domaine de la PNL.

Selon ce modèle, la vie des personnes dans n’importe quel système et d’ailleurs la vie du système luimême peut être décrite et comprise à partir de niveaux suivants : • L’environnement • Le comportement • Les capacités • Les valeurs et croyances • L’identité et le spirituel Une de conséquence du modèle est qu’on ne peut résoudre efficacement et durablement un problème que si on agit sur le niveau supérieur à celui où il a été engendré.

(1) Daniel Crépin & René Robin «Résolution de problèmes Méthodes – Outils de première et deuxième (2) Synthèse Manageris n ° 210 b «Créer une culture de responsabilité»


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african technology journal Concours

Facebook veut stimuler la créativité africaine Facebook a lancé mi-décembre un concours d’innovation dédié aux développeurs du continent. Objectif : mettre l’innovation au service du développement.

«Le défi pour l’innovation Internet. org en Afrique soutient la vision d’un monde connecté en reconnaissant ceux qui mettent au point des solutions dont le but est d’améliorer la santé économique et l’éducation au sein des communautés africaines»,

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Par Babacar Seck

indique Ime Archibong, directeur des partenariats stratégiques au sein de Facebook, avant de renchérir. Selon elle, l’entreprise américaine est impatiente «de voir la façon dont les développeurs africains apportent une réelle valeur ajoutée à leurs communautés. En mettant les gens en relation et en améliorant leur accès aux services et à l’information, nous pouvons les aider à réaliser des cho-

ses extraordinaires et à améliorer leurs conditions de vie.» Les développeurs qui souhaitent y participer doivent s’inscrire au plus tard le 1er mai 2016. Facebook dévoilera les noms des vainqueurs en août/septembre de la même année. Pour rappel, le plus grand réseau social avait déjà déployé ce programme en Inde avant d’annoncer les heureux gagnants en octobre 2015. 

© Chandan Khanna/AFP/Getty Images

«Internet.org Innovative Challenge». C’est le nom du Concours du réseau social Facebook qui souhaite stimuler la créativité des développeurs africains. Cette compétition intellectuelle plébiscitera les meilleurs sites web ou autres services spécialisés dans deux catégories : l’autonomisation au niveau éducatif et l’apprentissage et au niveau économique. Le meilleur projet recevra la rondelette somme de 150.000 dollars américains (environ 137.000 euros). Chaque lauréat recevra un ensemble d’outils et de services d’une valeur de 60.000 dollars (environ 55.000 euros) qui seront octroyés par le programme FbStart de Facebook. Deux applications, sites Internet ou services de chaque catégorie recevront une récompense financière d’un montant de 50.000 dollars (environ 46.000 euros) dans le cadre du prix «Impact».

xx

Le PDG de Facebook Mark Zuckerberg sur scène pour annoncer l'Innovation Challenge Internet.org


© Isafmedia / CC BY 2.0

L'équipe de Google entrain d'installer une Wifi Blimps afin créer des réseaux sans fil Plus Afrique.

Ouganda

Google installe 120 zones Wi-Fi Google a installé 120 zones Wi-Fi à Kampala, en Ouganda. Ce dispositif permettra notamment aux populations locales d’avoir accès à l’internet gratuitement et à faible coût.

Selon Ela Bers, directrice du projet Links chez Google, ce dispositif soulagera les fournisseurs

de services Internet et les opérateurs de réseaux mobiles qui n’auront plus à se préoccuper de lourds investissements dans des infrastructures. Mieux, d’après elle, ils pourront utiliser la fibre optique urbaine et des réseaux Wi-Fi de Google pour fournir aux populations un accès au très haut débit. Google indique que 1,2 million d’habitants du quartier principal d’affaires de Kampala bénéficieront de ce service. L’entreprise américaine prévoit d’étendre ce projet avec comme objectif l’installation de 300 zones Wi-Fi sur l’ensemble du pays. Elle envisage aussi de déployer ce programme au Ghana, plus précisément dans les villes d’Accra, de Tema et de Kumasi.

Quartier d'affaires à Kampala

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© Tim E Lumala

En 2013, Google avait annoncé l’installation de zones Wi-Fi en Afrique, dans le cadre de son projet baptisé «Link». C’est désormais chose faite. Le géant américain vient d’expérimenter ce programme à Kampala en collaboration avec l’entreprise Roke Telekom. Kampala avait déjà été choisi comme zone pilote. La ville dispose désormais de 120 zones Wi-Fi, dénommées «hortzones», qui permettront à ses citadins d’avoir accès à une connexion de qualité, gratuitement, et à faible coût. Parallèlement, Google a installé plusieurs kilomètres de fibre optique dans la capitale ougandaise.


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Audiovisuel

Lancement d’Africanews, la chaîne panafricaine d’Euronews Euronews prévoit de lancer le 4 janvier 2016 Africanews. Une chaîne panafricaine qui proposera des contenus locaux aux téléspectateurs du continent.

Le paysage médiatique africain s’enrichit. À partir du 4 janvier 2016, les téléspectateurs pourront suivre les programmes de la nouvelle chaîne Africanews qui sera lancée par Euronews. Michael Peters, directeur général d’Euronews et président d’Africanews, a fait l’annonce lors de l’édition 2015 du «Discop Africa», le marché du développement de l’industrie, de la création et de la vente de contenus qui s’est déroulée début novembre 2015 à Johannesburg. D’après lui, ce démarrage se fera en trois étapes. D’abord, les initiateurs du projet vont créer un site web, ensuite elle lancera une plateforme dénommée «Story Hunter» pour recevoir des contributions sous forme d’images. «En Afrique, il y a peu d’images disponibles en dehors des grandes agences comme AP, AFP ou Reuters. Quand nous en aurons collecté suffisamment, la chaîne pourra démarrer. La date n’est pas arrêtée, ce sera entre fin janvier et début mars», indique-t-il. Enfin, «en mars ou avril 2016», Africanews lancera une radio et sera présente sur YouTube. Toucher 235 millions de téléspectateurs La nouvelle chaîne panafricaine, dont le siège est basé au CongoBrazzaville, comptera, à son dé-

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Michael Peters, PDG d'Euronews S.A., et Jean Obambi, Manager Directeur de la télévision congolaise.

marrage, 85 salariés, dont 41 journalistes et 30 techniciens. Elle sera diffusée en français et en anglais et prévoit d’intégrer d’autres langues comme le portugais et le Yoruba. Elle aura des bureaux régionaux à Abidjan, Johannesburg, Nairobi et N’Djamena. Les téléspectateurs du continent pourront la capter gratuitement au cours de ses six premiers mois, via les satellites SES 4 et 5, des technologies qui permettront à la chaîne de toucher 235 millions de personnes. «L’Afrique est une terre d’opportunités. Un continent en pleine croissance. Pourquoi ne pourrions-nous pas entendre ce que les

Les initiateurs du projet vont créer un site web ensuite elle lancera une plateforme pour recevoir des contributions sous forme d’images.

© D.R.

Par Moussa Sène


Tanzanie

african technologie journal

On déclare les naissances par SMS

Africanews adoptera sa propre ligne éditoriale différente de celle d’Euronews. Elle devra aussi faire face à la rude concurrence audiovisuelle en Afrique avec la présence de chaînes internationales.

Africains ont à dire pas uniquement sur les affaires africaines, mais sur les affaires mondiales également? La demande pour de l’information impartiale n’est pas satisfaite», souligne Michael Peters. D’après les promoteurs, Africanews adoptera sa propre ligne éditoriale différente de celle d’Euronews. Les deux stations pourront toutefois s’échanger des idées et des contenus. Elle assurera son financement grâce à la publicité, la distribution, la production et les partenariats. Le nouveau bébé d’Euronews devra proposer des programmes de qualité pour séduire son public. Elle devra surtout faire face à la rude concurrence audiovisuelle en Afrique avec la présence de chaînes internationales comme Al Jazeera, BBC, CNN, France 24, CCTV (Chine) et d’autres chaînes panafricaines comme Vox Africa (VOA), Africa 24, etc. Autant dire que la tâche ne sera pas aisée. 

En Tanzanie, les naissances sont désormais déclarées par SMS. En effet, les agents de santé doivent envoyer un SMS à une base de données gérée par la Rita, une agence gouvernementale de recensement. Ce SMS doit renseigner sur le nom complet du nouveau-né, ceux de ses parents, sa date de naissance et tous autres détails nécessaires. Une réponse automatique leur permettra de délivrer le document juste après. Le gouvernement a pris cette décision après avoir constaté que les populations rurales délaissaient de plus en plus la procédure à cause du mauvais état des routes et des longues distances à parcourir pour atteindre les organismes habilités. Pis, 90% des enfants tanzaniens n’ont pas de certificat d’identité. Ce service, lancé en 2013 par l’opérateur de téléphonie de Tigo et Unicef, était seulement disponible dans 10 régions sur les 26 que compte la Tanzanie. L’État prévoir de l’étendre sur l’ensemble du territoire.

Nigéria

Lagos abrite un terrain de football éclairé par les mouvements des joueurs

Un terrain de football éclairé par les mouvements des joueurs ? Oui, cela existe, plus précisément à Lagos au Nigéria. La première puissance économique du continent le Nigeria est le premier pays africain à héberger une telle pelouse grâce à la technologie Pavegen, développée par Laurence Kemball-Cook, un ingénieur anglais de 30 ans. Le procédé magique : produire de l’électricité à partir de dalles électroniques installées sous la pelouse. Lorsque les joueurs marchent ou courent sur le terrain, ces dalles reçoivent l’énergie cinétique qu’elles dégagent et la convertissent en électricité, produisant ainsi pas moins de 7 watts chacune. Parallèlement, des panneaux solaires installés autour du terrain complètent, pendant la journée, l’énergie produite par ces dalles. Par la suite, cette électricité est stockée par une batterie qui permet d’alimenter six lampadaires LED à faible consommation qui illuminent le terrain comme en plein jour. Ce dispositif est déployé dans 150 endroits à travers le monde, notamment au niveau des gares, des aéroports et des centres commerciaux.

E-commerce

Partenariat entre Comesa et Microsoft pour développer le commerce transfrontalier

Le Marché commun d’Afrique de l’Est et austral (Comesa) souhaite développer les échanges commerciaux transfrontaliers. Il a signé dans ce sens un mémorandum d’entente avec Microsoft avec comme objectif: la promotion des TIC et de l’innovation technologique pour accélérer le développement de l’e-commerce transfrontalier et une meilleure fourniture de services. Selon Sindiso Ngwenya, secrétaire général de l’organisation, «le protocole d'accord encouragera l'utilisation des technologies de Cloud Computing à travers l'adoption de politiques importantes dans les domaines de la cybersécurité, la confidentialité et la protection des données (...) La technologie d'affaires a révolutionné la façon dont les pays et les entreprises font des affaires». 

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african Entrepreneurship journal

Investissement

L’Afrique du Sud, le pays où il faut entreprendre…

Par Baye Sakho

© Africatopsuccess

L’Afrique du Sud est le premier pays africain qui figure en tête de la liste des pays africains où il fait bon entreprendre. C’est l’une des révélations du rapport 2015 du Global Entrepreneurship and Development Institute. © D.R.

Un centre commercial à Soweto.

Un entrepreneur qui souhaite développer des projets en Afrique doit privilégier l’Afrique du Sud dans ses investissements. C’est en substance le message du Global Entrepreneurship and Development Institute 2015 (GEDI) qui classe la nation arc-en-ciel en tête de la liste des pays africains où il fait bon entreprendre. Ce pays, membre du groupe des pays émergents (BRICS) qui arrive à la 52e place au niveau international, devance les quatre autres nations à savoir le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine. Le pays de Mandela devance la Tunisie (62e au niveau mondial) et le Botswana (66e). Au total, 132 pays figurent sur ce classement. À l’échelle internationale, les cinq premières places sont

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occupées respectivement par les États-Unis, le Canada et l’Australie, le Danemark et la Suède. Pour établir ce classement, le Global Entrepreneurship and Development Institute se base sur plusieurs critères notamment la perception de l'entrepreneuriat par la société, les compétences en matière de création de startup, le niveau d’usage d’Internet, le niveau de corruption, la liberté économique et la profondeur du marché des capitaux. «Notre indice donne aux décideurs un outil pour comprendre les forces et les faiblesses entrepreneuriales de leur pays, leur permettant ainsi de mettre en œuvre des politiques qui favorisent l'esprit de l'entreprise productive», explique le GEDI. 

Top 10 de pays africains u Afrique du Sud (52e rang mondial) : xx vSource Tunisie

(62e)

w Botswana

(66e)

x  Namibie

(73e)

y  Algérie

(75e)

z  Maroc

(78e)

{  Libye

(79e)

|  Nigeria

(85e)

}  Gabon

(86e)

~  Égypte

(89e)


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Mentoring

Bientôt des incubateurs d’entreprises culturelles en Afrique

Par B.S

L’Afrique devrait abriter prochainement des incubateurs d’entreprises. Ce projet est initié par le holding français Scintillo en partenariat avec la Fondation Zinsou, l'Institut du monde arabe (IMA) et l’opérateur de téléphonie Orange. Bonne nouvelle pour les acteurs culturels du continent. Ils pourront bientôt bénéficier des services d’incubateurs qui leur permettront de développer leurs projets. En effet, le holding français Scintillo, en partenariat avec la Fondation Zinsou, l’Institut du monde arabe (IMA) et l’opérateur de téléphonie Orange, envisage de lancer bientôt des incubateurs d’entreprises culturelles à Dakar, Conakry et Cotonou, avant d’étendre le projet à Niamey et Bamako.

La création et la production d’événements culturels, la gestion de nouveaux équipements, le développement de labels et la relance des salles de cinéma seront les secteurs visés. «L’ambition est de faire émerger une génération d’entrepreneurs culturels à même de créer, en marge des institutions, une économie de la culture vertueuse et indépendante avec des externalités positives, en termes d’emploi, de tourisme et d’éducation», a déclaré l’un des promoteurs du projet au site jeuneafrique.com. D’après le

portail panafricain, l’annonce officielle devra être faite en janvier 2016. Pour rappel, les entrepreneurs culturels africains ont mis sur pied, en 2007 à Ouagadougou, le Réseau africain des promoteurs et entrepreneurs culturels (Rapec). Sa mission : «contribuer à réduire la pauvreté, l'exclusion, mieux, le sous-développement dans lesquels vivent les acteurs et entrepreneurs culturels africains.» Le Rapec a lancé en 2012, les «Trophées des entrepreneurs culturels d'Afrique».

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african entrepre'ship journal

Accompagnement

"Pitch Hub Africa" plébiscite les projets innovants en Afrique La société NGE Impact, initiatrice du salon Hub Africa, a organisé le 13 novembre 2015 à Dakar le premier «Pitch Hub Africa». Par Moussa Sène

gue» (Plateforme de rappel des jours de vaccination pour la lutte contre la mortalité infantile).

Assises de HUB AFRICA.

L’objectif du premier «Pitch Hub Africa» organisé dans la capitale sénégalaise était de choisir les meilleurs projets de jeunes entrepreneurs sénégalais qui seront publiés sur le site de l’entreprise «Afineety», une plateforme de financement participatif. Quelque «150 projets ont été déposés sur notre plateforme électronique, 8 entrepreneurs ont pu défendre leurs projets face à un jury composé de personnalités marocaines et sénégalaises de l’écosystème de l’entreprise», précisent les organisateurs.

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© D.R.

La deuxième édition du «Pitch Hub Africa» est prévue pour février 2016 à Abidjan. Ces évènements entrent dans le cadre de la préparation de la quatrième édition du «Hub Africa», premier salon des investisseurs et des entrepreneurs en Afrique, qui se déroulera les 7 et 8 avril 2016 à Casablanca. 

Au final, quatre entrepreneurs se sont distingués. Il s’agit de Oumar Yam pour le projet «Oui Carry» (Service de commande d’articles disponibles  à  l’international et de livraison à la clientèle au Sénégal), Yaye Souadou Fall et Claude Madjidabaye pour le projet «Ecover» (Transformation et revalorisation des déchets de pneu), Ahmadou Kane pour le projet «Espace Ndugu» (Plateforme de distribution, transformation et commercialisation de produits maraichers), et Mamadou Sall pour le projet «Karan-

Les meilleurs projets de jeunes entrepreneurs sénégalais qui seront publiés sur le site de l’entreprise «Afineety» une plateforme de financement participatif.


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african Entrepreneurship journal

Intervenant lors du lancement de la campagne.

Concours

Le groupe Total lance «Startupper de l’ année» pour stimuler la créativité des entrepreneurs africains

Par M.S.

Le groupe pétrolier Total a annoncé, début novembre 2015, le lancement du concours «Startupper de l’année» pour soutenir les start-ups prometteuses dans 34 pays du continent. La compagnie prévoit d'allouer 3,7 milliards de FCFA dans le cadre de son initiative «Startupper de l’année» qui souhaite encourager les projets innovants développés par des entrepreneurs du continent. Les candidats désireux d’y participer doivent avoir 35 ans au plus, avoir un projet de création d’entreprises dans leur pays d’origine et qui sera fonctionnel dans un délai de six mois, ou avoir un plan de développement pour une entreprise déjà existante depuis moins de deux ans. Les vainqueurs recevront le label «Stratupper de l’année 2016» par Total, une aide financière, et seront épaulés par le groupe fran-

çais dans le cadre de leur développement. Philippe Boisseau, le directeur marketing, services et énergies renouvelables de l’entreprise, déclare que «par cette initiative, Total envisage d'apporter un financement aux jeunes entrepreneurs dont les idées et plans d’affaires meurent par faute de financements». Les entrepreneurs ont jusqu’au 31 janvier 2016 pour déposer leurs dossiers de candidature. Total dévoilera les noms des gagnants début mai 2016. À en croire le site pourlentrepreneur.com, une startup africaine sur trois tombe en faillite à cause de l’insuffisance et l’inexistence des financements. 

Total souhaite encourager les projets innovants développés par des entrepreneurs du continent.

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african financialjournal Assurances

Un secteur qui peine à décoller au Mali Avec ses 11 sociétés et les 32 milliards 966,1 millions de chiffres de FCFA contre 29 milliards 603,8 millions en 2013, le secteur des assurances au Mali reste méconnu du grand public et loin derrière ses voisins de la Côte d’Ivoire et du Sénégal. Par Mohamed Dagnoko

Dans le classement de la Fédération des sociétés d’assurances de droit national africaine (FANAF), qui regroupe 16 États francophones, le Mali est mal loti. Son taux de pénétration en pourcentage du Produit intérieur brut (PIB) est de 0,52% en 2013, tandis que la moyenne des pays du FANAF se situe à 0,77%. La Côte d’Ivoire est à 1,68%. Les pays d’Europe et d’Asie, eux, réalisent un taux de 5 voire 6%. Ainsi, ce secteur contribue faiblement à l’économie nationale. Œuvrant essentiellement dans deux volets à savoir : l’assurance vie et l’incendie, accidents et risques divers (IARD), les assurances peinent à faire venir vers elles la population et les entreprises. Les goulets d’étranglement La branche de l’assurance vie au Mali c’est 24% des 32 milliards du chiffre d’affaires global en 2014, contre 18% en 2013. Mieux, elle

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a fait un bond de 50% en une année en passant de 5,2 milliards de chiffre d’affaires à plus de 7% en 2014. Ce bond est dû à la venue de sociétés internationales qui, en faisant la promotion des produits assurance-retraite et prévoyance, ont boosté la branche. Cette embellie ne saurait cacher la difficulté pour les assurances à intéresser la population à cette offre. Le 7 novembre 2015, au cours d’une rencontre avec les gestionnaires des ressources humaines, Constant Yao Djeket, directeur général du groupe ivoirien NSIA et NSIA-Vie au Mali, expliquait qu’en plus de la méconnaissance de l’assurance par la population, il existe des blocages culturels et religieux. «(…) Certaines personnes ont des difficultés à faire un contrat dont l’exécution dépend de la durée de leur vie», a-t-il déclaré. Le même constat est partagé par Alou Tall, directeur technique et commercial de Saham. «En

En plus de la méconnaissance de l’assurance par la population, il existe des blocages culturels et religieux.


african financial journal © D.R.

Olivier Picard (DG): Lorsque, en 1996, la SONAVIE (Société Nouvelle d’Assurance Vie du Mali) fut portée sur les fonds baptismaux, l’équipe que j’ai l’honneur de diriger était convaincue du caractère sacerdocal de sa mission : faire progressivement rentrer l’assurance-vie dans les mœurs du Malien.

plus du manque de culture d’assurance, le facteur religieux empêche beaucoup de personnes de souscrire pensant ainsi prévoir la mort». Bancassurance, innover pour séduire Face à la difficulté de persuader les particuliers à souscrire à l’assurance, qui pourtant génère plus de 7 milliards de FCFA que se partagent trois (3) sociétés, NSIA-Vie Mali, SONAVIE et Saham, les autres se tournent vers l’IARD, qui n’est pas aussi sans difficulté. Si en Côte d’Ivoire et au Sénégal ce sont respectivement 21 et 16 entreprises qui rivalisent pour s’arracher les parts de l’IARD, au Mali ils ne sont que huit (8). Avec une faible bancarisation du pays, 11%, la majorité des entreprises œuvrant dans l’informel, l’intervention de l’État s’impose. En rendant obligatoires certaines assurances, ce secteur à son tour pourra se porter mieux. La preuve, l’IARD est dominée par l’assurance des véhicules qui est

obligatoire. En 2013, ils ont représenté, à eux seuls, 37% des primes perçues. Le faible revenu et la peur de ne pas se voir rembourser en cas d’accidents freinent la souscription à cette branche qu’est l’IARD. En vue de limiter les risques pour les banques, d’une part, et faire adhérer le maximum de personnes et sociétés, d’autre part, les deux se donnent la main. Il en existe deux formes pour les deux branches. Il s’agit d’une assurance vie qui est associée à un prêt bancaire. Même après le décès du débiteur, l’assurance paie. Plusieurs offres concernant les IARD sont mises en place en vue de protéger les assurés des dégâts et autres tragédies. Malgré leur caractère innovant, ces mesures ne semblent pas encore s’installer dans les mœurs des Maliens. Confrontées à une fiscalité, qui est la plus lourde de l’espace UEMOA, les compagnies d’assurance espèrent un allègement pour mieux assurer.

Liste des assurances présentes au Mali Entreprises locales • SONAVIE • Assurances Lafia • Les assurances Bleues • Sabunyuma • Nallias Entreprises étrangères • NSIA (Côte d’Ivoire) • Saham (Maroc) • Sunu Assurances (Sénégal) • Allianz (Allemagne)

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Banques

Ouverture de 8.000 nouvelles agences bancaires en Afrique subsaharienne d’ici 2020 Par Babacar Seck

D’après l’Observatoire bancaire des pays émergents, environ 8.000 nouvelles agences bancaires seront ouvertes en Afrique subsaharienne d’ici 2020. Soit une hausse de plus de 42%.

© Nicolas Guyot

Le faible taux de bancarisation, un facteur majeur de cette hausse Selon l’Observatoire, deux principaux facteurs expliquent cette hausse en perspective : le faible taux de bancarisation en Afrique, un taux estimé à 34% par la Banque mondiale, et une faible densité d’agences avec seulement 3,2 agences pour 100.000 habitants contre 69 en France. Pour rappel, dans un rapport publié en février, le cabinet Boston Consulting Group dénombrait 98 millions d’usagers de services bancaires en Afrique.

Une agence bancaire en Afrique subsaharienne.

Entre 2007 et 2013, le nombre d’agences bancaires en Afrique subsaharienne a augmenté de 50%. Cette tendance devrait s’accroitre dans les quinze prochaines années, à en croire les conclusions de l’Observatoire bancaire des pays émergents dévoilées par le cabinet Nouvelles Donnes. D’après ce rapport, d’ici 2020, pas moins de 8.000 nouvelles agences seront ouvertes en Afrique subsa-

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harienne, soit une hausse de plus de 42% par rapport à 2014. Il révèle, en outre, qu’en 2014, le continent disposait au total de 33.500 agences bancaires, soit une progression de 47,57% par rapport à 2007 où on en dénombrait 22.700. Concrètement, l’Afrique subsaharienne en accueillait 22.900 (soit une hausse de plus de 52,5%), et 12.600 pour l’Afrique du Nord (soit une progression de 40%).

De plus en plus, des projets de banques mobiles foisonnent un peu partout en Afrique. Le modèle M-pesa au Kenya en est une parfaite illustration. De l’avis de plusieurs spécialistes, ces solutions de mobile banking pourraient permettre d’augmenter le taux de bancarisation dans le continent. Selon le cabinet Nouvelles Donnes, les entreprises de télécommunications africaines également, à travers leurs services de banques à distance, pourraient améliorer ce taux. Ce qui permettra à long terme aux agences bancaires d’en profiter en apportant une qualité dans la relation client, pour se distinguer des promoteurs de mobile banking qui n’offrent pas ce service. 


Afrique francophone, fief des groupes panafricains

Par B.S.

Les banques panafricaines devancent les groupes bancaires français en Afrique francophone. C’est ce que révèle une étude publiée par le cabinet Nouvelles Donnes, spécialisé dans les problématiques de développement dans les secteurs de la banque et de l’assurance.

Les banques françaises en perte de vitesse Cette situation contraste avec la perte de vitesse observée chez les légendaires entités françaises comme BNP Paribas, Société Générale, Crédit Lyonnais et Crédit Agricole. D’ailleurs, seules les deux premières sont toujours présentes en Afrique francophone. Pis, dans le top 10 des banques présentes dans cette région, les groupes français sont les seuls à avoir perdu des parts de marché. Les parts de la Société Générale et BNP Paribas sont respectivement descendues à 8 et 5%. Leur situation n’est guère meilleure en Afrique du Nord où ces deux groupes français pèsent à peine l’équivalent d’Attijariwafa bank.

© Gabriel Adonou

Nul n’est prophète chez soi, dit-on. Les groupes bancaires panafricains remettent en cause cet adage, du moins en Afrique francophone. Dans son étude «Banking SurveyEmerging Markets» (BSEM 2015) publiée le 1er décembre 2015, le cabinet Nouvelles Donnes, spécialisé dans les problématiques de développement dans les secteurs de la banque et de l’assurance, révèle leur prédominance sur les groupes bancaires français. Concrètement, deux groupes arrivent en tête, il s’agit respectivement de Ecobank avec 14% des parts de marché, et du groupe marocain Attijariwa bank (13%).

Gilbert Fossou HOUNGBO, Premier Ministre Togolais lors de la cérémonie d'ouverture du nouveau siège à Lomé du Groupe Ecobank.

Comment comprendre alors cette courbe ascendante des banques françaises ? «Auprès des banques françaises, l’ouverture de comptes se limitait aux expatriés et aux rares nationaux à haut revenu», explique Paul Derremaux, économiste et président d’honneur de Bank of Africa. Selon lui, leur départ précipité du continent durant les années 90, qui étaient particulièrement difficiles économiquement et politiquement pour les pays

africains, pour développer leurs activités dans les marchés d’Europe de l’Est et d’Asie, a constitué une grande erreur de leur part. «Vu ce qu’on attendait en Europe de l’Est, les belles années qui commençaient en Chine et en Amérique du Sud, les états-majors des banques françaises ont dit “stop” en Afrique», constate-t-il. Et à l’en croire, les perspectives ne sont pas bonnes, car «le terrain perdu ne sera pas repris». 

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Banques


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Export

BMCE Bank of Africa et Maroc Export créent "African Business Connect"

Par Baye Sakho

Le groupe BMCE Bank of Africa et le centre marocain des exportations «Maroc Export» ont lancé le concept "African Business Connect". Objectif : développer les exportations des entreprises marocaines dans le continent.

Les deux entités ont déjà organisé trois rendez-vous dans ce sens, une mission BtoB les 12 et 13 novembre 2015 à Dakar qui a ciblé une cinquantaine d’entreprises marocaines qui s’activent dans les secteurs de l’agro-industrie et du textile technique. Des centaines de rencontres avec des entreprises sénégalaises étaient prévues. Parallèlement, ils ont organisé pendant deux semaines (avant l’organisation de la mission), un évènement dénommé "Festival du Maroc à Dakar" pour exposer des produits made in Maroc au Sea Plazza, le plus grand centre commercial du Sénégal.

Le groupe BMCE Bank of Africa et le centre marocain des exportations "Maroc Export" ont lancé l’initiative "African Business Connect". À travers ce nouveau concept, les deux entités souhaitent développer les exportations des entreprises marocaines à l’étranger. D’après la BMCE Bank, tout un programme sera mis en place : série de missions BtoB, voyages d’affaires, des rencontres commerciales, ainsi que

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© D.R.

African Business Connect au Sea Plaza à Dakar.

des missions BtoC. «L’originalité de ce concept réside dans son caractère sur-mesure en choisissant minutieusement les secteurs par pays, en réalisant au préalable des études macroéconomiques et sectorielles, en établissant des programmes étudiés et personnalisés de rencontres, et en assurant un accompagnement de proximité tout au long de la démarche», indique un communiqué de la banque.

Une seconde mission a été initiée les 16 et 17 novembre à Bamako avec la participation d’une cinquantaine d’entreprises marocaines qui interviennent dans les secteurs du BTP et des industries métallurgiques, mécaniques, et électromécaniques (IMME). Au total, cette deuxième phase a enregistré la participation «de plus de 400 participants maliens et marocains», selon BMCE Bank of Africa qui indique que d’autres rencontres seront organisées en 2016 dans d’autres pays africains. 


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Barclays sur le marché africain ?

Selon le «Financial Times» (FT), Barclays prévoit de réduire sa présence en Afrique. D’après FT, James Staley, le nouveau patron du groupe britannique depuis le 1er décembre 2015, se serait interrogé sur «l’alignement stratégique des larges activités africaines du groupe britannique par rapport au reste du monde, sans qu’aucune décision n’ait encore été prise à ce stade». Barclays envisagerait de vendre 62,3% des parts détenues dans Barclays Africa Group, société cotée à la Bourse de Johannesburg et qui contrôle directement la plupart de ses activités africaines – dont la banque sud-africaine «Absa» – à l’exception de l’Égypte et le Zimbabwe. La valeur de ces actions est estimée à environ 4,4 milliards d’euros. Toujours selon FT, le groupe britannique aurait prévu en outre une cession de ces activités de banque de détail dans le continent.

Assurances L’assureur sénégalais Sonam

s’installe au Cameroun

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L’assureur sénégalais Société nationale d’assurances mutuelles (Sonam) aurait signé un partenariat avec le groupe camerounais Zenith Assurances pour la création d’une nouvelle filiale vie au Cameroun, selon le magazine «Jeune Afrique» (J.A.). Sonam détiendrait même 51% des parts dans cette nouvelle entité. J.A. révèle que le processus de création a été déjà bouclé, reste juste la validation par la Conférence interafricaine des marchés d’assurances (Cima). Ce serait donc la deuxième acquisition de l’entreprise sénégalaise qui a pris en septembre 2015 le contrôle de la société ivoirienne Alliance africaine d’assurance (3A).

Banques La BAD émet 500 millions de dollars

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d’obligations pour financer la croissance verte en Afrique La Banque africaine de développement (BAD) a émis avec succès 500 millions de dollars d’obligations vertes d’une maturité de 3 ans à Londres, indique un communiqué de l’institution publié le 14 décembre 2015. À travers ces obligations, la BAD envisage de financer des projets d’atténuation et d'adaptation au changement climatique en Afrique tels que la production des énergies renouvelables, l’efficacité énergétique et le transport à faible teneur en carbone. Cette émission a été placée auprès de 32 investisseurs, notamment les Fonds AP2, BlackRock, Raiffeisen Capital Management et Zürcher Kantonalbank Asset Management. Selon le groupe bancaire, 53% des obligations ont été placées auprès d’investisseurs originaires des Amériques, 24% pour la région Europe, 14% pour l’Asie et 10% pour l’Afrique. Pour rappel, la BAD est notée triple «A» par les agences Standard & Poor’s, Moody’s et Fitch, avec des perspectives stables.

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african financial journal

Finance Vers un retrait partiel des activités de


Côte d’Ivoire

Une "Caravane-Cacao" pour accompagner les producteurs

Par Baye Sakho

La Fondation OCP et le Conseil Café-Cacao ont organisé au mois d’octobre la «Caravane Cacao» en Côte d’Ivoire. À travers ce programme, les deux entités souhaitent accompagner les producteurs de cacao et leur permettre d’adopter les bonnes pratiques agricoles. Du 1er au 5 octobre 2015, quelque 1.200 producteurs de cacao issus de 13 régions de production cacaoyère de la Côte d’Ivoire ont participé à la "Caravane Cacao" organisée par la Fondation OCP (Of-

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fice chérifien des phosphates) et le Conseil Café-Cacao (CCC), dans le cadre de la deuxième édition de la Journée nationale du cacao et du chocolat (JNCC). D’après un communiqué conjoint, ce programme

entre dans le cadre du protocole d’accord signé en juin 2015 par les deux entités à l’occasion de la visite du Roi Mohammed VI en Côte d’Ivoire, pour l’accompagnement durable des acteurs de la filière.

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Toréfaction du cacao à Abidjan .


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Activités diverses lors de la Caravane - Cacao.

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Le Conseil du Café-Cacao et OCP envisagent de nouer un partenariat fort et ambitieux sur le long terme fondé sur le partage d’expériences et la recherche de synergies.

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green business

Plus précisément, cette caravane avait pour but d’assurer un encadrement de proximité aux producteurs, de leur dispenser un programme de formation et de sensibilisation à l’adoption des bonnes pratiques agricoles, et l’utilisation "raisonnée" des engrais. «Avec près de douze éditions organisées à ce jour, OCP a acquis un savoir-faire dans l’accompagnement des agriculteurs et des producteurs. Le groupe phosphatier partage cette expertise avec ses partenaires africains, dans la continuité de son engagement pour le développement agricole durable en Afrique. Ainsi, la "Caravane Cacao", a été adaptée aux spécificités locales et lancée en partenariat avec Le Conseil du Café-Cacao à l’occasion du début de la campagne cacaoyère 2015-2016. Il s’agit de la première édition d’une

initiative innovante qui a vocation à être renouvelée», indique l’Office chérifien des phosphates. 800.000 producteurs de cacao en Côte d’Ivoire Les producteurs ont pu visiter un laboratoire mobile d’analyse des sols installé dans le village de la caravane. Ils ont aussi bénéficié des conseils d’experts sur l'intérêt des analyses du sol ainsi que les principales techniques de prélèvement et d’analyse des échantillons. «La "Caravane Cacao" permettra ainsi de promouvoir l’utilisation d’engrais adaptés aux besoins des sols, appliqués dans les bonnes proportions et au bon moment, et par conséquent contribuera à une croissance soutenue des rendements et des revenus des producteurs», souligne l’OCP.

La Côte d’Ivoire est le premier producteur de cacao au monde, elle réalise plus de 40% de la production mondiale. La filière cacaoyère représente un tiers aux recettes d’exportation et 15% du PIB. Le secteur polarise 800.000 producteurs qui détiennent généralement de petites exploitations estimées entre 2 et 3 hectares. Les deux parties comptent poursuivre cette collaboration pour renforcer le développement de cette filière. «Le Conseil du Café-Cacao et OCP envisagent ainsi de nouer un partenariat fort et ambitieux, sur le long terme, fondé sur le partage d’expériences et la recherche de synergies. Cette coopération ambitionne ainsi de créer de la valeur ajoutée au niveau local et d’accompagner la filière cacaoyère en vue d’atteindre son plein potentiel», annoncent-ils.

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d’Alioune GUEYE bloc-notes

Amazing Ethiopia Ce qui frappe quand on arrive à Addis Abeba, c'est d'abord le dynamisme du secteur de la construction, la vétusté du parc automobile contrastant avec le métro ultra moderne, l'absence totale de marques étrangères, signe d'un patriotisme économique exacerbé. En effet, toute la ville est en chantier où des immeubles en construction pullulent en dépit de moyens rudimentaires, mais qui ont l'avantage d'utiliser un maximum de main d'œuvre. Quand le bâtiment va, tout va... L'Éthiopie forte de ses 96 millions d'habitants connaît depuis une bonne quinzaine d'années un taux de croissance à deux chiffres ininterrompu, qui la place sur la voie de l'émergence économique. L'Éthiopie s'essaie depuis peu à une ouverture économique contrôlée, en s’appuyant sur une politique industrielle volontariste et qui rencontre un certain succès. Signe de cette réussite, le tout nouveau parc industriel, Eastern Industrial Zone, aux portes d’Addis Abeba, va générer 60.000 emplois à court terme dans les métiers du cuir et du textile et positionne l’Ethiopie comme la prochaine usine du monde. Le train Addis Abeba –Djibouti, et l’autoroute à six voies Addis -Adama assureront le désenclavement de l’Ethiopie via Djibouti en la reliant aux grandes routes commerciales. Une énergie abondante (ouverture l'année prochaine du barrage hydroélectrique, le Barrage de la Renaissance, de 6.500 mégawatts) et bon marché (10 FCFA le kilowatt), des coûts de main-d'œuvre inférieurs à ceux de la Chine, les coûts de transport faibles en dépit d'infrastructure et de logistique, encore insuffisants, sont des facteurs à même d'accélérer l'industrialisation de l'Éthiopie. C'est avec le même pragmatisme que l'Éthiopie a parié sur l'horticulture il y a 8 ans, sans aucun préalable, secteur qui lui a rapporté 1 milliard de dollars US, et qui a encouragé Ethiopian Airlines à renforcer sa flotte d'avions cargo. L’Ethiopie a quadruplé son PNB et arraché plus de la moitié de la population à la pauvreté en moins de 15 ans. Mais cette ouverture a ses spécificités : aucune banque étrangère, aucun opérateur de télécoms étranger n'y est admis malgré des offres alléchantes, et les recommandations du FMI à plus d’ouverture. L'Éthiopie garde le contrôle de son économie, de ses terres qui sont propriété d'État, et est en passe de démontrer que le capitalisme à tout va, accentué par le désengagement accéléré de l'État de tous les secteurs régaliens eau, électricité, télécommunications, n'est peut-être pas la «Solution», et que d'autres voies sont possibles. En cela, elle offre une alternative vivante que l'extraversion qui consiste à trop dépendre de son environnement pour ses investissements, sa consommation et sa production sont parfois un handicap. Il est sans doute trop tôt pour affirmer que le cas éthiopien est un modèle de développement ; mais a le mérite d'offrir une alternative qui mérite toute l'attention de nos décideurs. 

*Livre ''Made in Africa, Industrial Policy in Ethiopia'', de Arkebe Oqubay, Oxford University Press, 2015

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destination Malaisie et Singapour

African Business International ABI vous invite à prendre part à ses Voyages d’Etudes MultiSectoriels qu’il organise en Malaisie et à Singapour. Ces deux pays sont sans conteste la plate forme incontournable des investissements en Asie du Sud-Est ont su transformer ces flux financiers en infrastructures avec tous les effets d’entraînement sur les autres secteurs (construction, banque et finance, énergie, automobile...). La clairvoyance de ses dirigeants, des politiques fiscales avisées, un capital humain de qualité, des hôtels de classe mondiale, des infrastructures de standard international, un taux de corruption en régression constante, font de la Malaise et de Singapour des champions en matière d’attraction des investissements étrangers et ce, dans les secteurs traditionnels de l’agri-business tout comme dans les secteurs de pointe. Avec un programme sur mesure de conférences, de rencontres professionnelles, de visites, vous allez décrypter les facteurs clés de succès de la stratégie malaisienne et singapourienne en matière de promotion des investissements étrangers. Nous vous ouvrirons les portes du plus grand parc d’activités en technologies de l’information, Cyberjaya où vous pourrez rencontrer des entrepreneurs. Des rendez vous pourront être pris pour vous avec des entreprises présentes. Nous sommes convaincus que ces voyages renouvelleront votre vision de l’Asie et vous ouvrira de nouveaux horizons.

agenda 2016

Voyage d’étude Des Ports performants au service de la transformation et de l’émergence économique du 25 au 30 Janvier 2016 - Malaisie / Singapour Voyage d’étude Développement territorial et intelligence urbaine du 28 mars au 02 Avril 2016 - Malaisie / Singapour Master class Les douze leviers de la diplomatie économique du 25 au 30 Juillet 2016 - Singapour Voyage d’étude Malaisie pionnière de la finance islamique : benchmarking et retour d’expérience du 12 au 17 Décembre 2016 – Malaisie Voyage d’étude Singapour au cœur de la finance asiatique du 05 au 10 Décembre 2016 – Singapour


livres du trimestre Made in Africa, Industrial Policy in Ethiopia de Arkebe Oqubay

Made in Africa présente les résultats de recherches sur le terrain original dans la conception, la pratique et les résultats variés de la politique industrielle dans le ciment, cuir et produits, et des secteurs de la floriculture en Ethiopie. Il explore comment et pourquoi les résultats de la politique industrielle sont façonnés par des facteurs particuliers dans ces industries. Il examine également les structures industrielles et des chaînes de valeurs mondiales associées pour démontrer les difficultés rencontrées par les entreprises africaines sur les marchés internationaux. Les résultats sont discutés dans le contexte de la «politique industrielle», qui a récemment trouvé une nouvelle faveur parmi les économistes et les organisations internationales, et de l'histoire de la pensée et de la pratique à propos de l'industrialisation. Le livre cherche à tirer les leçons des échecs et des succès dans les trois secteurs, chacun d'eux fonctionne sous l'égide d'une stratégie industrielle unique. Il fait valoir qu'une politique industrielle efficace nécessite un état plus interventionniste que la plupart des économistes du développement accepteraient, y compris ceux qui prétendent récemment pour le champion d'une «nouvelle politique industrielle». En outre, il fait valoir que le succès réside dans les interactions entre la politique, les structures industrielles spécifiques, et les institutions. 

L'intégration de l'Afrique dans l'économie mondiale de Arnaud Bourgain, Jean Brot et Hubert Gérardin

Migrations et développement dans les Afrique de l’Ouest et du Centre de Pierre Kamdem

Rwanda, Regard d’avenir de Philippe Mpayimana

L’intégration de l’Afrique dans une économie-monde multipolaire est ambivalente. S’inscrivant dans des mouvements centrifuges et centripètes, dans le temps et dans l’espace, l’insertion de ce continent dans les relations économiques et financières internationales se caractérise par une diversité des situations nationales. Dans le cadre d’une mondialisation multidimensionnelle, l’Afrique a longtemps été considérée comme marginalisée et contrainte de s’y adapter. Elle apparaît, désormais, comme un de ses acteurs. L’ouvrage interroge le sens et la portée de cette intégration. Quelles formes prend-elle ? Dans quelles dynamiques s’inscrit-elle ? La place de chaque pays et leur évolution y demeurent-elles contrastées, tant au plan quantitatif que qualitatif ? Dans ce contexte, l’ouvrage présente quatre thématiques se rapportant à des mutations qui contribuent à renforcer, sous diverses formes, les composantes de l’intégration des pays africains dans l’économie mondiale : les liaisons Afrique-Asie, les modalités de l’exploitation des matières premières, les partenariats renouvelés avec l’Union européenne et les mouvements migratoires.

Les migrations font débat dans les sociétés de départ, de transit et d'arrivée. Elles sont soit intimement liées à l'amélioration des conditions de vie des uns et aux profits de quelques autres, soit aux déplacements forcés, aux drames humains et aux exploitations issues d'un temps que l'on pouvait espérer révolu. Ces ambivalences lient les migrations internationales à la question du développement. Ce volume explore les rapports que les migrants entretiennent à l'ordre institutionnel et les dynamiques socio spatiales qu'ils incorporent ou modifient.

Le Rwanda cherche à être le cœur de l'Afrique qui bat, ce point névralgique capable d'ébranler le reste du corps. La société rwandaise, en cours de transformation et malgré la réussite économique de ces 20 dernières années, est exposée à de nombreux virages à ne pas rater. L'auteur, dans cet essai, porte un regard libre et neuf sur le Rwanda, son pays qu'il a rejoint en 2012, après 18 ans d'exil. "Only forward looking" est une citation de Paul Kagamé à Paris (en septembre 2011).

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 rendez-vous Du 26 au 27 janvier 2016 à Kinshasa (RDC) 1e forum international d’affaires à Kinshasa La République Démocratique du Congo abritera du 26 au 27 janvier 2016, le 1er forum international d’affaires à Kinshasa (KINFOR16) dont l’objectif est de présenter aux entrepreneurs africains et européens des opportunités réelles d’investissements en RDC. D’après Christian Liongo président de Africa Rise co-organisateur de l’évènement, KINFOR16 est non seulement un rendez-vous incontournable en RDC mais également un business forum de référence, un lieu d’échanges au profit des entrepreneurs africains et européens, mais également une opportunité de rencontre intra-tissus économiques de plusieurs secteurs et une branche d’activités économique. Des ateliers thématiques, des séances de BtoB, et des rencontres informelles pour nouer des contacts d'affaires fructueux sont prévus.

Du 14 au 17 mars 2016 à Abuja (Nigéria) 6e édition Congrès africain du Pétrole La capitale fédérale du Nigéria accueillera du 14 au 17 mars 2016 la 6e édition du Congrès africain sur le pétrole. Cet évènement est organisé par l’Association des producteurs de pétrole africains (APPA, le ministère nigérian des ressources pétrolières et l’entreprise Ame Trade basée à Londres. Selon les organisateurs, ce congrès sur l’ « or noir » verra notamment la participation de Chef d’Etats, de ministres, de directeurs généraux, de directeurs des relations gouvernementales, etc.

Du 15 au 18 mars 2016 à Dakar (Sénégal) Salon international des industries et techniques-agroalimentaires Le « SIAGRO 2016 » s’articule autour du thème « Produire plus et mieux en Afrique, pour une sécurité alimentaire énergétique et une offre compétitive ». A cet effet, il s’est fixé comme objectif de contribuer au développement de la production locale et des ressources financières en insistant d’avantage sur la promotion et le développement de l’agriculture, la pêche, la pisciculture et la l’aquaculture, le rendement de la production des pays, l’autosuffisance alimentaire, la transformation, le conditionnement et l’emballage des produits, le développement de partenariats financiers et techniques, la formation, les échanges commerciaux, les investissements, la protection de l’environnement, la promotion et l’utilisation des biocarburants, des énergies nouvelles et renouvelables, l’information et la formation, etc.

Du 19 au 22 octobre 2016 à Casablanca (Maroc) 8e édition du Salon Pollutec Maroc La 7e édition du Salon Pollutec Maroc Salon International des équipements, des technologies et des services de l'environnement se déroulera du 21 au 24 octobre 2015 à Casablanca. Pollutec Maroc est un salon qui s’adresse aux professionnels de l’environnement et du développement durable en général. Le salon propose des conférences et des ateliers techniques, en collaboration avec ses partenaires experts du marché de l’environnement et les organismes professionnels du Maroc et d’Europe, et livre des informations sur des sujets d’actualité en phase avec les besoins et priorités du royaume.

La Revue

C ’est pour vous et avec vous...

Des idées, des expériences et des réflexions à partager.

Merci d’envoyer votre texte à : esembene@africanbusinessjournal.info AFRIcan business journal | N°17 | 109


Post-scriptum

Elimane Sembène

© D.R.

esembene@africanbusinessjournal.info

Indépendance. Commémorer oui, célébrer non… Le 9 décembre 2015, les Tanzaniens n’ont pas fêté l’indépendance comme à l’accoutumée. Ils n’ont pas assisté aux danses traditionnelles et défilés militaires qui devaient rythmer le 54e anniversaire de l’accession du pays à la souveraineté. Faute de moyens? Non. La raison ? Une décision étatique émanant du Président John Magufuli, élu depuis octobre 2015. D’après le Président tanzanien, c’est «honteux» de dépenser autant d’argent pour ces festivités alors que son peuple meurt de choléra. En effet, durant cette période, on dénombrait 5.000 cas de choléra qui ont fait au moins 74 victimes, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). En lieu et place, il a initié une campagne de nettoyage des marchés, écoles et autres espaces publics de la capitale Dar Es Salam. Sur des photos postées sur les réseaux sociaux, on voit le Chef d’État himself ramasser des ordures sous le regard de ses concitoyens. Ces économies, dont le montant n’a pas été dévoilé, seront utilisées pour le bien-être social et l’approvisionnement des hôpitaux. Cette mesure inédite de John Magufuli n’est juste que le prolongement de plusieurs actions de lutte contre le gaspillage qu’il a enclenché depuis son avènement à la magistrature suprême. Ainsi, les dépenses d’une fête prévue pour l’inauguration du nouveau parlement tanzanien sont pas-

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sées de 100.000 à 7.000 dollars. Les sommes économisées, annonce-t-il, serviront à l’achat de lits pour l’hôpital public de la capitale. Lors d’une visite surprise sur les lieux, il avait retrouvé des patients allongés sur le sol, sans surveillance, et pis, dans un environnement qu’il estime insalubre. Au-delà de leur caractère inédit, ces décisions salutaires interpellent au premier plan nos Chefs d’État, notamment sur deux points essentiels : repenser la manière avec laquelle nous fêtons nos indépendances, et l’impérieuse nécessité d’optimiser nos dépenses publiques. Est-il utile et opportun pour nos États de consacrer des sommes exorbitantes à ces festivités alors qu’une cohorte d’urgences les «assaille» ? Non. Une prise d’armes ne suffirait-elle pas pour symboliser l’anniversaire de notre souveraineté ? Oui. L’émergence maintes fois ressassée et tant voulue par bon nombre de pays africains ne rime-telle pas avec dépenses efficientes ? Probablement. L’Afrique cultive le paradoxe à bien des égards ; elle dispose d’énormes ressources naturelles et minières, alors qu’une bonne partie de sa population baigne dans la pauvreté. Plusieurs États africains émargent la liste des pays sous-développés, mais leurs Présidents n’hésitent pas à effectuer des dépenses de prestige pour l’achat de véhicules et d’appartements de

luxe. Plus grave, d’énormes budgets sont alloués à des évènements qui n’ont souvent qu’un cachet symbolique. Prenons l’exemple de la Sierra Leone qui a dépensé la rondelette somme de 19 millions d’euros pour fêter, le 27 avril 2011, son cinquantième anniversaire, alors que 52,3% de la population vivait, en 2011, en dessous du seuil de pauvreté, selon la Banque mondiale. En 2015, elle a été classée 18e pays le plus pauvre au monde avec 652,2 dollars de PIB par habitant. Au Gabon, les charges cumulées de la Présidence de la République, de la primature, de l’Assemblée nationale, du Sénat et de la Cour constitutionnelle ont atteint en 2014, quelque 255 milliards de FCFA, soit 10% du Budget général, au moment où la pauvreté toucherait pas moins 30% de la population. Selon une étude du cabinet McKinsey publiée début 2014, un total de 95.000 familles vivent avec moins de 80.000 FCFA par mois. La liste des paradoxes est marathonienne… Les discours d’intention doivent être matérialisés par des actions concrètes. L’on ne saurait vouloir le développement et ramer à contre-courant. Nos États doivent réduire leurs budgets dispendieux et optimiser leurs dépenses publiques. Deux conditions sine qua non pour (espérer) accéder à l’émergence.


AGENDA 2016 FORUM FIJE : Forum Interafricain des Juristes d’Entreprise La direction juridique de demain: Vers un nouveau paradigme du droit dans l’entreprise Du 19 au 23 janvier 2016 à Dakar FIASGA : Forum Interafricain des Achats, Services Généraux et Approvisionnement Performance et création de valeur dans la fonction achats: Maîtrise des risques, pilotage financier et SI Achat Du 23 au 27 février 2016 à Casablanca FIRH : Forum Interafricain des Ressources Humaines Marketing RH et Marque employeur: les nouveaux enjeux RH Du 29 mars au 02 avril 2016 à Paris FISAD : Forum Interafricain des Secrétaires et Assistant(e)s de Direction Faciliter au quotidien la prise de décision de votre Manager : Outils de Gestion Intégrée du Secrétariat Du 26 au 30 avril 2016 à Casablanca FICOM : Forum Interafricain de la Communication Les nouveaux canaux alternatifs de communication au service de l'entreprise africaine Du 24 au 28 mai 2016 à Dakar

FISI : Forum Interafricain des Systèmes d’Information Les tableaux de bord de la DSI: Pilotage, performance et benchmarking du système d'information Du 26 au 30 juçillet 2016 à Casablanca

CIF : Congrès Interafricain de la Finance L'audit interne et contrôle de gestion dans le management des risques Du 06 au 10 septembre 2016 à Casablanca


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L e m a g a z i n e d e l ’A f r i q u e e n m o u v e m e n t A c o m p l é t e r e t r e t o u r n e r a v e c v o t r e r é g l e m e n t s o u s e n v e l o p p e a f f ra n c h i e o u p a r f a x : Abonnement & Publicité

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Académie de Sherbrooke Plus de 12 années d’expérience internationale dans l’enseignement supérieur et professionnel


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