Aperçu du numéro 2016-5 de la REE (décembre 2016)

Page 1

2016

EDITORIAL La SEE 2.0 François Gerin

5 Numéro

ENTRETIEN AVEC Christian Pierret La politique énergétique : faire confiance au progrès et ne pas condamner la croissance

ÉNERGIE

TELECOMMUNICATIONS

DOSSIERS

SIGNAL

COMPOSANTS

AUTOMATIQUE

INFORMATIQUE

Cette aperçu gratuit permet aux lecteurs ou aux futurs lecteurs de la REE de découvrir le sommaire et les principaux articles du numéro 2016-5 de la revue, publié en décembre 2016. Pour acheter le numéro ou s'abonner, se rendre à la dernière page.

ISSN 1265-6534

L'ARTICLE INVITÉ

Le principe de précaution par Maurice Méda www.see.asso.fr


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FRANÇOIS GERIN

EDITORIAL

E

La SEE 2.0

n ce dernier numéro de l’année 2016, la REE me fait l’honneur de son éditorial. Je tiens tout d’abord à remercier son équipe de rédaction qui veille, au fil des numéros, au maintien d’une qualité de publication reconnue de tous, offrant à la SEE une vitrine exceptionnelle pour ses missions et ses activités. La REE est, auprès de ses lecteurs, le porteparole scientifique, technique et sociétal de notre association ; sa mise en ligne lui permet de coller à l’actualité et d’être ainsi un véritable outil 2.0 de diffusion et promotion des activités de la SEE. Le présent numéro comporte deux grands dossiers, l’un consacré à l’insertion des énergies renouvelables dans le réseau électrique européen, l’autre aux systèmes radioélectriques avancés. Il s’inscrit dans la lignée de dossiers tout aussi remarquables : le dernier dédié à la fusion thermonucléaire et au projet ITER, le précédent au stockage des déchets radioactifs, sans oublier la publication du Livre blanc sur la cybersécurité des réseaux électriques intelligents. Avec les articles sur le Wi-Fi et sur l’Internet des objets, ces publications accompagnent l’action de notre Société menée au travers de son Cercle des entreprises lancé il y a deux ans et qui a donné naissance aux groupes de travail sur la cybersécurité des réseaux électriques intelligents et sur l’Internet des objets. Ces groupes de travail rassemblent les parties prenantes – opérateurs, industriels ou fournisseurs de services, organismes publics, laboratoires, grandes écoles et universités – autour de thèmes d’intérêt commun, avec une vision transversale renforcée sous l’angle de la cybersécurité appliquée à ces thèmes et bénéficiant à ce titre du soutien apprécié de l’ANSSI1. Simultanément, notre association a engagé une vigoureuse relance des activités régionales et techniques, à travers ses clubs techniques (CT) dans 1

Agence nationale de sécurité des systèmes d’information.

les courants forts et dans les courants faibles, en créant notamment trois nouveaux clubs dans les domaines « cybersécurité et réseaux intelligents », « stockage et nouveaux moyens de production », et « écoconception en génie électrique » qui sont venus compléter les clubs techniques existants2. Les groupes régionaux redynamisés travaillent en synergie avec ces clubs techniques et avec les entreprises et établissements d’enseignement supérieur régionaux pour reproduire ou créer à leur échelle des manifestations d’intérêt commun. Ainsi, en région Rhône-Bourgogne, une journée d’étude a récemment été organisée sur le thème « réseaux électriques et supergrid ». En parallèle, nous avons signé des conventions avec des écoles d’ingénieurs telles que l’Institut Mines Télécom, ou l’ECAM-EPMI, dont la liste sera rapidement élargie ; en effet il est essentiel pour notre association d’assurer le développement de ses activités, en recrutant de jeunes diplômés de l’enseignement supérieur jusqu’à « bac + 5 » et au-delà ; il conviendra bien sûr de conserver le contact avec eux lors de leur entrée dans la vie active pour les retrouver dans les entreprises, notamment celles qui ont passé des conventions avec la SEE. Citons EDF, RTE, ENEDIS, ENGIE, ATOS, Continental, la SNCF, Siemens, Thales, le CEA, Orange… et une première PME de haute technologie, ITNI. Bien entendu nous visons à augmenter rapidement cette base, notamment avec le concours d’entreprises industrielles et de services dans les domaines couverts par la SEE. Ce renforcement est prioritaire pour assurer la pérennité des activités au plan économique et ainsi rendre durables les actions menées. Parmi elles, les congrès et les conférences organisés par la SEE avec des partenaires des métiers de l’électricité, de l’électronique, de l’aéronautique, de l’automobile et des technologies de l’information et de 2

CT existants : « Ingénierie des systèmes d’information et de communication », « Radars, sonars et systèmes radioélectriques » et « Systèmes électriques ».

REE N°5/2016 1


la communication, s’appuient sur une expertise reconnue. Nous pouvons citer, parmi les grandes manifestations en 2017, More Electric Aircraft, Icolim, European Test and Telemetry Conference et Jicable, qui attirent des spĂŠcialistes internationaux de leurs domaines. Ces grandes manifestations sont complĂŠtĂŠes par des ĂŠvènements organisĂŠs par les clubs techniques et les groupes rĂŠgionaux sous forme notamment de soirĂŠes d’Êtude fort apprĂŠciĂŠes. EnďŹ n je tiens Ă souligner les coopĂŠrations que nous dĂŠveloppons s AVEC LE #IGRĂ? ET SON COMITĂ? NATIONAL FRANÂĽAIS dans l’approche des jeunes dans l’enseignement supĂŠrieur et dans les entreprises, pour l’organisation de manifestations communes, ainsi que dans les domaines des clubs techniques ; s AVEC L )%%% POUR DES MANIFESTATIONS COMMUNES

s AVEC LES PARTENAIRES DE *ICABLE POUR LA RĂ?USSITE des ĂŠditions 2017 et 2019 ; s AVEC )3! &RANCE OU LES AUTRES SOCIĂ?TĂ?S SCIENTIlQUES FRANÂĽAISES AU SEIN DE LA & 3 A vous, lecteurs de la REE, je lance un appel aux bonnes volontĂŠs qui permettront de dĂŠmultiplier les activitĂŠs des ĂŠquipes de la SEE qu’en votre nom je remercie de leur engagement quotidien pour une meilleure comprĂŠhension des enjeux techniques, sociĂŠtaux, industriels et organisationnels du progrès technologique. En cette pĂŠriode il me revient de vous souhaiter chaleureusement une bonne et heureuse annĂŠe 2017 ainsi qu’à vos familles et Ă vos proches, en comptant sur votre ďŹ dĂŠlitĂŠ et vos suggestions pour que cette annĂŠe nouvelle rĂŠussisse Ă la SEE 2.0. François Gerin PrĂŠsident de la SEE

En haut, Ă gauche : Station connectĂŠe pour le pilotage des dĂŠpenses de chauffage et le maintien du confort (Š Sowee - ďŹ liale EDF). En haut, Ă droite : ContrĂ´le coordonnĂŠ de vĂŠhicules connectĂŠs (Š Embedded Systems Technology) – En bas, Ă gauche : Maison intelligente et connectĂŠe (Š Athemium) – En bas Ă droite : UnitĂŠ de stockage et de gestion d’ÊlectricitĂŠ domestique de 4,2 kWh (Š Nissan).

2 REE N°5/2016


sommaire Numéro 5

1

EDITORIAL La SEE 2.0 François Gerin

4 6 9 10

11

p. 1

SOMMAIRE FLASH INFOS Les attaques en déni de service redoublent sur l’internet et font peser une menace sur l’IoT Une nouvelle piste pour transformer le CO² en éthanol La décomposition de la paraffine par un flux micro-ondes assisté par un catalyseur au ruthénium pourrait faire de la paraffine un moyen de stocker l’hydrogène Rude tâche en perspective pour les parties signataires de l’Accord de Paris : selon l’OMM la teneur moyenne en CO² de l’atmosphère a dépassé en 2015 la barre des 400 ppm

15 ACTUALITÉS 16 19 22

Jean-Pierre Sauvage, prix Nobel de chimie 2016 Le prix Nobel de physique 2016 : les nouvelles voies d’exploration des transitions de phase dans la matière condensée De l’hélium 3 sur la Lune : pour quoi faire ? Les risques des géocroiseurs

26 A RETENIR Congrès et manifestations

28 VIENT DE PARAÎTRE La REE vous recommande p. 37

30 ARTICLE INVITÉ Le principe de précaution en question Maurice Méda

37 LES GRANDS DOSSSIERS

40

p. 87

Enjeux d’un développement massif des EnR dans le système électrique européen du futur Introduction de Régine Belhomme et Vera Silva Analyse technico-économique d’un système électrique européen avec 60 % d’énergies renouvelables Vera Silva, Miguel López-Botet Zulueta, Ye Wang, Paul Fourment, Timothee Hinchliffe, Alain Burtin

54

Intégration massive d’électronique de puissance : synchronisation et stabilité des grands systèmes électriques Marie-Sophie Debry, Guillaume Denis, Patrick Panciatici, Thibault Prévost, Florent Xavier, Xavier Guillaud, Xavier Kestelyn, Andreas Menze

60 p. 30

4 REE N°5/2016

p 130 p. 30

p. 155

Le TYNDP et le projet e-Highway2050 – Comment déterminer les investissements clés pour la transition énergétique Marie-Pierre Houry, Sébastien Lepy, Fabian Georges, Lucian Balea, Gerald Sanchis


68

Nouveaux enjeux à l’échelle locale de la distribution d’électricité Marion Delage, Florent Cadoux, Marc Petit

76

Renewables integration, flexibility measures and operational tools for the Ireland and Northern Ireland power system Damian Flynn, Michael Power, Mark O’Malley

84

The future has come: the 100 % RES driven power system is reality Antje Orths and Peter Børre Eriksen

87 90

URSI France 2016 Introduction de Yves Louët et Jacques Palicot Greening information and communication technologies Anne-Cécile Orgerie

96

Une architecture intelligente pour l’amélioration de l’efficacité énergétique du réseau cellulaire 5G Antonio De Domenico, Mouhcine Mendil, Vincent Heiries, Rémi Bonnefoi, Jacques Palicot, Christophe Moy, Catalin Gavriluta, Raphael Caire, Nouredine Hadjsaid

105 Récepteur de type “wake-up” radio à identification par empreinte fréquentielle Régis Rousseau, Florin Hutu et Guillaume Villemaud

112 Réalisation d’un rectenna dans la bande des 1,8 GHz fonctionnant à faibles niveaux de puissance RF et optimisé par des techniques source-pull Jérôme Tissier, Mohamed Latrach

119 Autonomous DC-DC converter for RF energy Harvesting Salah Adami, Christian Vollaire, François Costa, Bruno Allard

130 GROS PLAN SUR … L’Internet des objets. Deux technologies clés : les réseaux de communication et les protocoles Jean-Pierre Hauet

143 RETOUR SUR ... Claude Elwood Shannon, le jongleur de codes Marc Leconte

155 ENTRETIEN AVEC ... Christian Pierret

La politique énergétique : faire confiance au progrès et ne pas condamner la croissance

158 ENSEIGNEMENT & RECHERCHE ECAM-EPMI, une « école créée par et pour les entreprises » Moumen Darcherif

162 Echos de l’enseignement supérieur Alain Brenac

164 LIBRES PROPOS Plus de 40 ans depuis le premier choc pétrolier : quelles leçons pour l’avenir ? Philippe Chartier

168 SEE EN DIRECT

www.see.asso.fr/site-manifestation/16236_mea2017

La vie de l'association

REE N°5/2016 5


FLASHINFOS

perpétrées par des “script kiddies” c’est-à-dire des personnes

Les attaques en déni de service redoublent sur l’internet et font peser une menace sur l’IoT Après la spectaculaire attaque Stuxnet sur les cen-

sans connaissances profondes, souvent des jeunes et même des adolescents, qui passent leur temps à essayer d’infiltrer les systèmes en utilisant des outils développés par d’autres et facilement accessibles sur l’Internet.

trifugeuses iraniennes, en juillet 2010, l’attention s’est focalisée sur les risques de pénétration des systèmes

Comme fonctionne une attaque en DDoS ?

informatiques par des logiciels malveillants avec comme

Une attaque en DDoS est conçue par un chef d’orr

effet recherché la prise de contrôle d’installations ou le

chestre qui doit mobiliser une « armée » de « soldats » ou

vol de données sensibles. Plusieurs attaques spectacu-

« zombies » pour réaliser l’attaque. Ces zombies peuvent

laires, qualifiées de “Sons of Stuxnet” ont fait la Une des

être des équipements banalisés connectés à l’Internet,

journaux en 2011 et 2012 : Duqu (octobre 2011), Flame

tels que des caméras de vidéosurveillance, des impri-

(mai 2012), Gauss (août 2012). Puis sont venues les

mantes, des boxes d’accès à l’Internet, des objets connec-

attaques Dragonfly, utilisant plusieurs canaux de péné-

tés de toute nature… Des cybercriminels, que l’on peut

tration (envoi d’e-mails non sollicités, attaque du point

contacter par le Web sombre (dark Web) se chargent de

d’eau, corruption de packages logiciels) mais toutes fon-

constituer et de maintenir de telles armées, dénommées

dées sur le même principe : utilisation d’une vulnérabilité

botnets, à l’insu des soldats enrôlés, et peuvent les mettre

pour instiller un logiciel malveillant et développer ensuite

à la disposition des hackers moyennant rémunération, en

une attaque à part d’un centre de contrôle distant.

cryptomonnaie bien entendu.

Dans le numéro 2016-1 de la REE, nous avons relaté

A un moment donné, les zombies sur ordre de leur

l’attaque assez spectaculaire dont ont été victimes trois

maître vont déclencher l’attaque sous forme d’envoi si-

réseaux de distribution électriques ukrainiens dont le

multané d’instructions en direction de la cible. Ces ins-

contrôle a totalement échappé à leurs opérateurs. Plus

tructions utilisent des vulnérabilités des protocoles Interr

récemment, en septembre 2016, la presse s’est faite

net et dépendent de l’effet recherché. Un type d’attaque

l’écho du vol de quelques 500 millions de données de

classique utilise le protocole TCP au niveau de sa phase

comptes dont aurait été victime en 2014 le portail Yahoo,

d’initialisation. L’établissement d’une connexion TCP se

attaque dont les détails n’ont pas été révélés mais qui

fait en effet normalement en trois temps :

procède a priori du même cheminement.

s L ENVOI D UNE DEMANDE DE SYNCHRONISATION EN DIRECTION d’un serveur (message SYN) ;

Depuis le début de l’année 2016, une nouvelle forme d’attaque se répand sur l’Internet, l’attaque en déni de

s LE RETOUR PAR LE SERVEUR VERS L ÏMETTEUR DU 39. D UN accusé de réception SYN-ACK ;

service (Denial of Service : DoS) et plus spécifiquement l’attaque en déni de service distribuée (Distribued

s LA CONlRMATION DE LA CONNEXION PAR LE DEMANDEUR PAR l’envoi d’un ACK.

denial of Service : DDoS) utilisant la structure décentralisée de l’Internet des objets. Une attaque en DoS vise à

Cependant si le client demandeur a utilisé une

rendre un serveur, un service ou une infrastructure indis-

adresse IP dérobée (IP spoofing), le SYN ACK retourné

ponibles en surchargeant la bande passante du serveur

par le serveur va tomber dans le vide. Dans l’attente de

ou en accaparant ses ressources jusqu’à leur épuisement.

réception d’un ACK, il réitèrera l’envoi de SYN ACK jusqu’à

Dans le cas du DDoS, une telle attaque se développe à

épuisement. C’est l’attaque classique SYN FLOOD basée

partir d’une armée de « zombies » manipulés à distance

sur l’envoi massif de demandes de connexion TCP qui

par un attaquant qui vont au même moment concentrer

restent indéfiniment ouvertes. Le protocole UDP, qui ne nécessite pas l’établissement

leurs attaques sur la même cible. Les attaques en DDoS peuvent avoir pour objectif la ven-

préalable d’une connexion, ouvre de son côté la voie à de

geance, la rétorsion, les représailles, la volonté de nuire à un

nombreuses attaques en DoS (telle que l’UDP FLOOD),

concurrent ou d’étouffer un organe de presse ou le mas-

particulièrement préoccupantes pour l’IoT qui utilise pré-

quage d'actions illégales pernicieuses. Elles peuvent égale-

férentiellement UDP en raison de sa dynamique1.

ment viser à extorquer une rançon par exercice d’un chantage sur les victimes pour lesquelles la disponibilité de leur équipement Web est vitale. Enfin, elles sont aussi très souvent

6 REE N°5/2016

1

Pour plus de détail sur les protocoles TCP et UDP, le lecteur pourra se reporter au « Gros plan sur… » de ce numéro consacré aux protocoles de l’Internet des objets.


FLASHINFOS

Figure 1 : Schéma d’attaque en DDoS – Source : OVH. L’architecture distribuée de l’IoT se prête non seule-

Les attaques en DoS sont faciles à monter. Il est aisé

ment à l’envoi simultané d’un grand nombre de requêtes

d’accéder, sans aller sur le Web sombre, à des sites de

par les soldats du botnet, mais aussi à l’utilisation à leur

« booters » qui proposent de tester la résilience d’un ser-

insu de machines réfléchissant ou amplifiant les requêtes.

veur face à une attaque en DoS en utilisant des logiciels

On parvient ainsi au schéma d’attaque de la figure 1.

dénommés « stressers ». Certains (figure 2) permettent

Deux indicateurs permettent de quantifier les attaques

de lancer gratuitement un test en DoS d’une durée limi-

en DDoS :

tée vers une adresse IP quelconque. Entre le service ainsi

s LA DURÏE DE QUELQUES MINUTES Ì QUELQUES HEURES VOIRE

offert et l’utilisation frauduleuse qui peut en être faite, la

plus, avec des salves répétitives, en fonction du degré

frontière est mince et beaucoup de ces sites sont iden-

de résistance de la cible ;

tifiés comme sites d'hameçonnage par les logiciels de

s LE mUX DE TRAlC EXPÏDIÏ EN DIRECTION DE LA CIBLE UN mUX

protection des ordinateurs. En septembre 2016, le booter

supérieur à 1 Térabit/s est, dans l’état actuel des choses,

vDOS exploité par deux jeunes israéliens de 18 ans a

considéré comme la marque d’une attaque violente.

été mis hors service après avoir facilité le lancement de

Une fois déclenchée, l’attaque peut avoir deux effets

150 000 attaques en DoS en deux ans.

principaux qui peuvent se cumuler : s SATURER LA BANDE PASSANTE DES ACCÒS AU SERVEUR CIBLE QUI devient alors inaccessible ; s DÏCLENCHER AU NIVEAU DES COUCHES OU DU MODÒLE

Deux attaques spectaculaires récentes L’attaque OVH de septembre 2016 La première attaque que nous évoquerons est celle

OSI, des tentatives de réponse de la cible qui vont la

DÏVELOPPÏE ENTRE LE ET SEPTEMBRE CONTRE LES SER-

conduire à épuiser ses ressources système et en tout cas

veurs de l’hébergeur français OVH qui figure à présent

à la rendre incapable de répondre aux requêtes légitimes.

parmi les grands de la profession au niveau international. Cette attaque massive a généré un trafic malveillant de plus d’un Tbit/s et a bien évidemment ralenti les services offerts par l’hébergeur. Cependant l’infrastructure a résisté et OVH utilise à présent, à juste titre, cette résilience comme un témoignage de la robustesse de ses

Figure 2 : Vue partielle sur le portail Internet du booter Freeboot.

installations.

REE N°5/2016 7


FLASHINFOS

Figure 3 : Extension gÊographique de l’attaque du 21 octobre aux Etats-Unis – Source : WikipÊdia. Par ailleurs, OVH estime avoir apportÊ la preuve que

C’est donc ce qui s’est passÊ le 21 octobre 2016 entre

cette attaque a ĂŠtĂŠ menĂŠe par un botnet de 145 000

H ET H EN TROIS VAGUES SUCCESSIVES AVEC UN

camĂŠras ou systèmes d’enregistrements vidĂŠo connectĂŠs

dĂŠbit malveillant de 1,2 Tbit/s, occasionnant des pertes

Ă Internet.

de service dans de larges zones de l’Atlantique Nord lGURE

L’attaque du 21 octobre 2016 contre les serveurs DNS de DYN aux Etats-Unis

Dans ce cas, comme dans celui de l’OVH, on incrimine, pour la constitution du botnet à l’origine de l’at-

Une attaque d’encore plus grande ampleur a eu lieu

taque, le logiciel malveillant Mirai dont le code source

le 21 octobre 2016 contre les serveurs de la sociĂŠtĂŠ Dyn

a ĂŠtĂŠ rendu rĂŠcemment accessible sur Internet via les

qui offre des services de traduction d’adresses, selon le

Hackforums sous le surnom d’Anna-sempai.

protocole DNS (Domain Name System) utilisĂŠs, principalement aux Etats-Unis mais aussi en Europe, par un grand nombre de fournisseurs majeurs de services tels que Twitter, Spotify, Visa, Paypal, Amazon, etc.

Comme se protÊger ? Se protÊger contre les attaques en DDoS devient une condition première de survie pour tous ceux qui

Les serveurs DNS sont des ÊlÊments clÊs de l’archi-

dÊveloppent des activitÊs n’admettant pas d’être in-

tecture Internet puisqu’ils ont la mission de traduire en

terrompues. La brochure de l’ANSSI  Comprendre et

adresses IP les adresses ĂŠcrites en langage Web. Les

anticiper les attaques DDoS Âť propose des approches

fournisseurs d’accès renvoient leurs clients vers un serr

opĂŠrationnelles permettant de repousser de telles

veur DNS par dĂŠfaut qui, avec la collaboration ĂŠventuelle

attaques ou, à tout le moins, de les mitiger, c’est-à -dire

d’autres DNS, recherche quelle adresse IP correspond Ă

d’en attÊnuer les effets. Les hÊbergeurs, tels qu’OVH

une adresse Web donnĂŠe. Ce service de traduction est

ÊvoquÊ ci-dessus, proposent des solutions DDoS s’ap-

fondamental, il est rÊalisÊ sur le Web de façon centrali-

puyant sur ses moyens sĂŠcurisĂŠs.

sĂŠe, il est donc vulnĂŠrable et l’indisponibilitĂŠ d’un serveur DNS prive un grand nombre d’usagers de l’accès au Web.

8 REE N°5/2016

Les solutions associent plusieurs approches complĂŠmentaires :


ACTUALITÉS

Jean-Pierre Sauvage, prix Nobel de chimie 2016 son chimique classique (covalente ou électrostatique, via un pont hydrogène). En utilisant des métaux, le cuivre notamment, il a réussi à entrelacer des anneaux moléculaires et progressivement à les faire bouger les uns par rapport aux autres de manière contrôlée par un apport d’énergie, obtenu par chauffage ou par éclairage (figure 1). Le concept de « machines moléculaires » était né. A partir de cette avancée significative, la porte était ouverte pour convertir l’énergie en mouvement à l’échelle submicroscopique sur des structures de plus en plus sophistiquées. C’est ainsi qu’en 1991 Fraser Stoddart, deuxième lauréat primé cette année, développa une structure baptisée rotaxane. C’est une molécule en forme d’haltère (riche en élecJean-Pierre Sauvage

trons) sur laquelle se greffe une bague (pauvre en électrons) susceptible de glisser le long de l’axe de l’haltère (figure 2).

Le Français Jean-Pierre Sauvage, professeur à l’université de Strasbourg et directeur de recherche émérite du CNRS , le

(a)

Britannique Sir James Fraser Stoddard, professeur de chimie à l’université Northwestern dans l’Illinois (États-Unis) et le Néerlandais Bernard L. Feringa, professeur de chimie organique à l’université de Groningue (Pays-Bas) sont les lauréats du prix Nobel de chimie 2016. Cette prestigieuse distinction récompense cette année « la conception et la synthèse de machines moléculaires », selon les termes mêmes utilisés par le comité Nobel. Avant d’expliciter ce que recouvrent ces travaux, une parenthèse s’impose pour saluer la performance des chercheurs français dans cette discipline en rappelant que le dernier prix Nobel de chimie attribué à un français était Yves Chauvin en 2005 pour le décryptage de la métathèse des oléfines et que c’est la deuxième fois que l’université de Strasbourg est mise à l’honneur par la Fondation Nobel après le prix de chimie décerné à Jean-Marie Lehn en 1987 sur les clathrates. Parmi les travaux récompensés cette année, la contribu-

(b) Figure 2 : Représentation schématique (a) et vue éclatée (b) d’une structure moléculaire de type rotaxane utilisée dans la machine de Stoddard – Source : Wikipedia.

tion de Jean-Pierre Sauvage a été essentielle d’un point de vue historique puisque, dès 1983, il est parvenu à créer dans

Trois ans plus tard, après le succès obtenu par Jean-Pierre

certaines chaînes moléculaires (dénommées caténanes),

Sauvage dans le contrôle des mouvements des anneaux de

une liaison mécanique entre molécules différente d’une liai-

sa chaîne moléculaire, Fraser Stoddard réussit à contrôler ceux du rotaxane. Une avancée qui lui permit notamment de mettre en œuvre le premier « ascenseur moléculaire » qui s’éleva à quelque 0,7 nanomètre de hauteur. Il publia également l’élément de base constitutif d’un « muscle moléculaire », capable de se contracter à la demande. Il faudra ensuite attendre 1999 pour la mise au point d’un véritable moteur moléculaire grâce à Bernard Feringa, le troisième lauréat du prix 2016, à partir d’une molécule semblable

Figure 1 : Chaines moléculaires à base d’anneaux dont la position est commandée sous l’effet d’un apport d’énergie - ©Johan Jarnestad, The Royal Swedish Academy of Sciences.

aux deux pales d’un rotor reliées entre elles par une double liaison carbone. Rattachés aux pales, des groupes méthyle

REE N°5/2016 15


ACTUALITÉS

forcent la rotation de la molécule à s’effectuer toujours dans

luer les retombées exactes, comme le précise Jean-Pierre

le même sens. Sous rayonnement ultraviolet, la molécule

Nierengarten, élève et proche collaborateur de Jean-Pierre

effectue une rotation de 180° autour de la liaison carbone

Sauvage à Strasbourg, dans une interview donnée à l’Express.

centrale. Une deuxième impulsion lumineuse permet ensuite

Ce chercheur entrevoit toutefois plusieurs pistes possibles :

d’entretenir le mouvement de rotation. Le clou de cette in-

s l’ordinateur s l’ordinateur moléculaire : en faisant passer l’anneau mis

vention a été la démonstration en 2011 par Bernard Feringa

au point par Jean-Pierre Sauvage d’une position à une

de la première « nanovoiture électrique » (figure 3).

autre, on peut en effet obtenir un 0 ou un 1. Sous réserve de trouver le bon moyen de lire cette information, ses travaux pourraient permettre de déboucher sur du stockage d’informations à l’échelle moléculaire ; s la s la boîte moléculaire, vecteur de médicaments en nanomédecine. Celle-ci dûment programmée, délivrerait locar lement et sur commande des substances actives dans l’organisme à des fins thérapeutiques (tumeur cancéreuse) ; s le s le « muscle moléculaire » en tirant parti des réalisations déjà effectuées par Feringa et al. sur des chaines moléculaires qui peuvent se contracter ou s’étirer sous l’effet d’un stimulus.

Figure 3 : Représentation simplifiée du concept de nanovoiture électrique - © Johan Jarnestad, The Royal Swedish Academy of Sciences.

Le champ des applications de ces travaux reste donc très ouvert : machines programmables microscopiques, mir cro-capteurs et micro-robots, systèmes de stockage d’éner-

Quelles pourraient donc être les applications possibles de

gie, etc. Nous ne sommes qu’à l’aube d’une rupture techno-

ces machines moléculaires ? Le jury du comité Nobel n’hésite

logique dont les effets potentiels sur le grand public pourront

pas à les comparer aux premières machines électriques du

se faire sentir dans plusieurs décennies.

Alain Brenac

e

début du XIX siècle. Toutefois il est trop tôt pour en éva-

Le prix Nobel de physique 2016 : les nouvelles voies d’exploration des transitions de phase dans la matière condensée Le prix Nobel de physique 2016 a été d’une part attribué à David J. Thouless et d’autre part et conjointement à

tière condensée, y compris les supraconducteurs et les films minces magnétiques.

Duncan M. Haldane et John M. Kosterlitz pour « Les décou-

La topologie est le concept commun aux travaux de Hal-

vertes théoriques des transitions de phase topologiques et

dane, Kosterlitz et Thouless. Cette branche des mathéma-

phases topologiques de la matière ». Le comité Nobel a ainsi

tiques décrit les propriétés qui demeurent inchangées quand

déjoué les pronostics qui pensaient voir récompenser la dé-

r un objet est modifié ou déformé après une série de transfor-

tection des ondes gravitationnelles. Mais les recherches des

mations mathématiques. Le deuxième concept est celui de

trois chercheurs sont des travaux fondateurs qui apportent

transition de phase de la matière. Une transition de phase

une vision nouvelle de la matière condensée.

se produit lorsque la matière change d’une forme à une autre, comme l’eau liquide vers la glace. Aux très basses tem-

La science de la matière condensée

pératures, proches du zéro absolu, la matière présente de

Trois concepts en physique et en mathématiques sont

nouvelles phases étranges et à l’échelle atomique les effets

derrière les prix de cette année à savoir : la topologie, les

quantiques deviennent très prépondérants. Les modèles de

transitions de phase quantique et les états de la matière.

transition avaient comme paramètres dimensionnant la tem-

C’est ce que le comité Nobel décrit comme de « belles idées

pérature, la dimension et la maille du réseau. A partir d’une

physiques, mathématiques et profondes » et, de fait, les

certaine température, la transition dans la matière se carac-

recherches des lauréats ont jeté les bases théoriques perr

térise par des interactions à courte portée (entre atomes voi-

mettant d’expliquer une variété d’états de base de la ma-

sins) mais il apparaît aussi des interactions à longue portée.

16 REE REE N°5/2016


ACTUALITÉS

Les risques des géocroiseurs

Figure 1 : Dégâts causés par l’impact du 15 février 2015 en Sibérie – Source : Internet.

C’est arrivé hier ... En février 2013, deux astéroïdes se dirigeaient vers la Terre. Le plus gros, qui pesait 135 000 tonnes et mesu-

Il y a environ 50 000 ans un astéroïde métallique de 45 m de diamètre s’écrasa dans l’actuel Arizona où il laissa le célèbre Meteor Crater, de 1,2 km de diamètre (figure 2).

rait 45 mètres dans sa plus grande dimension avait été

Le 30 juin 1908, un astéroïde rocheux de 25 m explosa

détecté un an plus tôt. Il passa à 27 000 km de la Terre,

à 60 km d’altitude au-dessus de la région de la Toungouska,

ce qui représente une distance minuscule à l’échelle spa-

en Sibérie. L’explosion détruisit intégralement la forêt dans

tiale. Mais un second, trop petit pour pouvoir être observé

un rayon de plus de 20 km, abattant 60 millions d’arbres (fi-

bien à l’avance, percuta le sol le 15 février 2013 dans la

gure 3), le souffle fit des dégâts sur plus de 100 km et la dé-

région de Tcheliabinsk dans le sud de l’Oural en Russie. Il

flagration fut audible dans un rayon de 1 500 km. De nom-

pesait 7 000 tonnes et avait une dimension de l’ordre de

breux incendies se déclenchèrent, brûlant des zones fores-

17 mètres. Traversant l’atmosphère à la vitesse de 65 000

tières pendant plusieurs semaines. Un vortex de poussières

km/h, il provoqua en touchant le sol un effet de souffle

et de cendres se forma et fut entraîné jusqu’en Espagne par

équivalent en puissance à 20 fois celui de la bombe d’Hiro-

la circulation atmosphérique. L’onde de choc fut enregistrée

shima. La zone de Sibérie étant presque désertique, les dé-

en Europe occidentale et aux États-Unis.

gâts furent limités, mais il y eut quand même de nombreux immeubles effondrés et 1 600 blessés principalement dans

Un objet qui n’est pas passé loin

la ville de Tcheliabinsk, seule agglomération de la région. On

En 2004, un astéroïde de 250 mètres a été détecté, avec

imagine aisément ce qui aurait pu se produire si cette chute

une probabilité non négligeable de percuter le Terre. Des

s’était produite sur une ville importante ou sur une centrale

premiers calculs ont alors prévu que ce gros caillou, baptisé

nucléaire.

« Aphoris » avait une probabilité sur 37 de percuter la Terre le 13 avril 2029, qui se trouve être un vendredi de Pâques. Cette

…et avant-hier

nouvelle a réveillé les mages et autres prophètes de malheur

Il y a 65 millions d’années, un astéroïde de plus de 10 km

qui en ont fait leurs choux gras pendant plusieurs mois. Fort

de diamètre s’est écrasé dans l’actuel Yucatan (Mexique).

heureusement, les observations se multipliant, les calculs de

On est à peu près certain aujourd’hui qu’il accompagna

trajectoire se sont affinés pour réduire cette probabilité à zéro

ou fut à l’origine de la transition crétacé-tertiaire qui vit les

dans les 100 prochaines années. Mais nous avons senti le vent

dinosaures disparaître et les mammifères se diversifier.

du boulet. Et qu’en sera-t-il après cette période ?

Le panache de fumées et de poussières qui se répandit sur l’ensemble de la Terre, la priva des rayons du Soleil

D’où viennent ces objets ?

et mit un millier d’années à se disperser. Ce cratère n’est

Ce sont des comètes ou des astéroïdes dont les di-

observable aujourd’hui que par des dispositifs aéroportés

mensions peuvent aller de quelques mètres à quelques ki-

ou spatiaux.

lomètres. Leur orbite autour du Soleil les amène à croiser

22 REE N°5/2016


ACTUALITÉS

Figure 2 : Meteor Crater en Arizona – Source : NASA. jour, plus de 7 000 font plus de 140 mètres de diamètre et presque 900 plus d’un kilomètre. Cette particularité fait que leur trajectoire ne peut pas être calculée avec une extrême précision et qu’un impact avec la Terre se calcule en termes de probabilité comme nous l’avons indiqué pour Aphoris. Paradoxalement, ceux de plus d’un kilomètre, dont l’impact aurait des conséquences apocalyptiques, ne constituent pas le principal motif d’inquiétude des spécialistes car ce sont les plus visibles et l’on est certain de les avoir presque tous identifiés et de pouvoir les voir approcher avec suffisamment d’avance. Mais les géocroiseurs plus petits, qui sont aussi beaucoup plus nombreux, sont plus difficiles à détecter. D’autant qu’il existe dans le ciel, de jour comme de nuit, de nombreux cônes de non-visibilité dus aux positions relatives du géocroiseur et du Soleil : en ce cas, le bolide échappe aux Figure 3 : Dégâts causés par le souffle de l’impact du 13 juin 1908. Source : Luxorion.

télescopes comme aux radars. C’est ce qui s’est produit en février 2013 à Tcheliabinsk.

celle de la Terre. Et donc de façon statistique, à la percuter. Ils sont appelés « géocroiseurs » en français et “Neo” en an-

L’échelle de Turin

glais, acronyme de “Near Earth Objects”. Ces corps célestes

L’échelle de Turin quantifie la dangerosité des géocroi-

sont régulièrement observés, lorsque leur taille le permet, et

seurs ; elle est graduée de 0 à 10 (figure 4). Une valeur de 0

la NASA en publie une liste mise à jour en temps réel. Il ne

indique qu’un objet n’a qu’une chance négligeable d’entrer en

faut pas les confondre avec les Léonines et les Céphéides

collision avec la Terre ou qu’il est trop petit pour traverser intact

qui sont des nuages de cailloux que la Terre traverse une

l’atmosphère terrestre. Une valeur de 10 indique que le risque

fois par an. On dénombre ainsi près de 15 000 géocroiseurs,

de collision est certain et que l’objet est suffisamment grand

mais les scientifiques considèrent que ce chiffre ne repré-

pour provoquer un désastre à l’échelle planétaire comme une

sente que 10 à 20 % de leur nombre réel. Leur taille et leur

extinction massive. Seules des valeurs entières sont utilisées.

éloignement font qu’ils sont d’autant plus difficiles à détecter

Un objet se voit attribuer une valeur de 0 à 10 sur la base

qu’ils sont petits et éloignés. Parmi les 15 000 identifiés à ce

de calculs de sa probabilité de collision et de son énergie

REE N°5/2016 23


L'ARTICLE INVITÉ

MAURICE MÉDA Ancien Vice-président de la commission de régulation de l’énergie

Le principe de précaution en question

A

pparu dans les années 1970 pour mettre

Ainsi formulé, le principe de précaution concerne des

l’environnement au centre des politiques pu-

risques de dommages pour l’environnement « graves et irré-

bliques, le principe de précaution a connu un

versibles » qui, compte tenu des connaissances du moment,

grand succès, à la fois auprès des populations

ne peuvent être évalués avec certitude ; il impose aux auto-

et des autorités publiques. Considéré comme une garantie

rités publiques – et à elles seules – d’une part de mettre

absolue de sécurité contre tous les risques éventuels, il a été

en place des procédures d’évaluation des risques, c’est-à-

élevé au niveau constitutionnel en France dans le cadre de la

dire de préciser le risque – quant à son ampleur et quant

Charte de l’environnement adoptée en 2005. Il demeure ce-

à son occurrence –, d’autre part de prendre, sur la base de

pendant, 10 ans plus tard, discuté voire contesté. Si certains

ces évaluations, les « mesures provisoires et proportion-

en font un principe cardinal et absolu, décisif pour la sauve-

nées » permettant d’éviter le dommage.

garde de la planète et par suite pour la survie de l’Homme,

Ainsi présenté, le principe se distingue de deux notions

d’autres mettent en exergue sa transformation en un principe

caractérisant deux attitudes – la prudence et la prévention –

d’abstention, voire d’interdiction, qui en ferait un obstacle à

et les dépasse.

l’innovation et un facteur d’immobilisme. C’est d’ailleurs le

La prudence vise des risques avérés, dont la réalité est

« rapport Attali » qui, dès 2008, proposait à titre d’objectif de

établie et même certaine, quant à leur existence et même

« repenser le principe de précaution »1.

à leur occurrence ; les risques étant connus, la prudence

Le principe de précaution est historiquement d’abord un

permet de les éviter autant que possible (risques liés à la

principe philosophique qui a peu à peu évolué pour devenir

consommation d’alcool ou au tabac) et, s’ils ne peuvent être

une norme juridique. Et c’est en tant que norme juridique,

évités, de les assurer (risques liés à la manipulation de ma-

singulièrement en tant que norme constitutionnelle, qu’il fait

tières dangereuses).

l’objet aujourd’hui d’appréciations diverses et contradictoires qui conduisent certains à prôner son abrogation.

La prévention vise également des risques avérés, mais dont la réalisation est aléatoire et incertaine, l’occurrence

Il est utile, en premier lieu de présenter le principe tel qu’il

mal connue. La Charte de l’environnement impose, à son

a émergé, a été mis en œuvre puis hissé jusqu’au niveau

article 3, un devoir de prévention3. Sont concernés, à titre

constitutionnel ; et en second lieu de faire état des critiques

d’exemple, le risque d’inondation et le risque nucléaire : la

émises à son encontre avant d’en faire une appréciation.

simple prudence n’est pas pertinente, il faut une action pré-

Situation du principe de précaution Tel qu’il est formulé par l’article 5 de la Charte de l’environnement 2, le principe de précaution impose que : « Lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incer-

ventive et corrective (éviter l’inondation par le curage des cours d’eau) et une action permettant d’éviter ou de limiter les dommages qui résulteraient de la réalisation éventuelle du risque (éviter le risque nucléaire par un renforcement de la sûreté des centrales).

taine en l’état des connaissances scientifiques, pourrait

La précaution dépasse ces deux types de comportement.

affecter de manière grave et irréversible l’environne-

Il ne s’agit plus seulement d’être simplement prudent, pour

ment, les autorités publiques veillent, par application du

éviter ou assurer un risque évident, ou de se prémunir contre

principe de précaution et dans leurs domaines d’attribu-

un risque dont la réalisation est probable quoiqu’aléatoire. Il

tion, à la mise en œuvre de procédures d’évaluation des

s’agit d’anticiper sur des risques et des dommages qui sont

risques et à l’adoption de mesures provisoires et propor-

seulement « envisagés », « redoutés » ou « imaginés » et dont

tionnées afin de parer à la réalisation du dommage ».

la réalisation est considérée comme seulement possible, potentielle ou éventuelle, sans toutefois qu’existe sur ce point

1

Rapport de la commission pour la libération de la croissance française, sous la présidence de Jacques Attali : première partie « Participer pleinement à la croissance mondiale », Chapitre 3 « Les révolutions à ne pas manquer ». Cf. aussi infra. 2 Issue de la loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005.

30 REE N°5/2016

la moindre certitude scientifique ; et d’anticiper, en vertu de 3 Charte de l’environnement, article 3 : « Toute personne doit, dans des conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences ».


L'ARTICLE INVITÉ

l’article 5 de la Charte, par une évaluation des risques ainsi que des mesures de nature à éviter les dommages. Comme on le verra plus bas, c’est la mise en œuvre de cette anticipation qui suscite discussions et critiques.

Du principe philosophique au principe juridique Le principe de précaution est apparu en premier lieu en Allemagne, dans le courant des années 1970 et comme un

De nombreuses conventions internationales ont repris ce principe ; son statut en droit international est toutefois hésitant compte tenu de la réticence de la plupart des juridictions internationales à se prononcer sur son fondement4. A la même époque, le principe est adopté par le droit européen, dans le cadre du Traité de Maastricht de 1992. Il figure désormais à l’article 191 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) :

principe philosophique : le Vorsorgeprinzip – « principe de

« La politique de l’Union dans le domaine de l’environne-

prévoyance » ou « principe de souci » – popularisé par le

ment vise un niveau de protection élevé (…). Elle est fondée

philosophe Hans Jonas dans son ouvrage majeur Le principe

sur les principes de précaution et d’action préventive, sur

de responsabilité. Une éthique pour la civilisation technolo-

le principe de la correction, par priorité à la source, des at-

gique. Pour Jonas, la Terre ne doit pas être un objet d’expéri-

teintes à l’environnement et sur le principe pollueur-payeur ».

mentation, il convient au contraire d’empêcher toute mesure

Le principe de précaution s’impose particulièrement dans

susceptible de compromettre les conditions de la survie de

les textes de droit européen relatifs aux biotechnologies.

l’humanité sur Terre. Il s’agit d’une éthique des rapports de

La directive du Conseil des Communautés européennes n°

l’homme à l’environnement, au risque et à la vie.

90/220 du 23 avril 1990 relative à la dissémination volontaire des organismes génétiquement modifiés (OGM) dans

Sur le plan juridique, le principe de précaution apparaît dans les années 1980, d’abord dans le droit international.

l’environnement contraint les autorités compétentes des Etats membres à évaluer les risques pour la santé publique

A la suite de la convention-cadre sur la protection de la

et l’environnement que peuvent présenter les OGM avant

couche d’ozone signée à Vienne en 1985 dans le cadre de

de les disséminer dans le milieu naturel ; et la directive n°

la Conférence des Nations Unies pour l’environnement, le

2001/18/CE du 12 mars 2001 qui l’a remplacée mentionne,

protocole additionnel de Montréal signé en 1987 stipule que

de façon encore plus explicite dans un considérant, qu’il de-

les parties « sont déterminées à protéger la couche d’ozone

vra être tenu compte du principe de précaution dans sa mise

en prenant des mesures de précaution pour réglementer

en œuvre en raison des effets irréversibles sur l’environne-

équitablement le volume mondial des émissions qui l’appau-

ment de la dissémination des OGM.

vrissent » ; cet accord a débouché sur la suppression totale des

C’est sur l’interprétation de la première de ces deux direc-

chlorofluorocarbones, dont la responsabilité dans la formation

tives que la Cour de Justice des Communautés européennes

du trou de la couche d’ozone n’était pas certaine à l’époque.

a statué, dans le cadre de l’affaire du maïs transgénique, sur

De même, l’approche de précaution apparaît en matière

la question préjudicielle posée par le Conseil d’Etat français.

de lutte contre la pollution marine, plus précisément en ce

Dans son arrêt, la CJCE interprète la directive comme assu-

qui concerne la réglementation du déversement de subs-

rant le respect du principe de précaution dans la mesure où

tances dangereuses en mer du Nord : convention de Londres

elle impose une obligation d’information en cas d’éléments

sur la préparation, la lutte et la coopération en matière de

nouveaux associés à un OGM ; par suite, a contrario, dès lors

pollution par les hydrocarbures en 1990, convention de Paris

que la demande d’autorisation en France de trois variétés de

pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du nord-est

maïs génétiquement modifié avait fait l’objet d’un avis favo-

en 1992.

rable de la Commission européenne, et en l’absence d’élé-

Enfin, le principe de précaution accède au statut de prin-

ments nouveaux sur les risques, la France ne pouvait que

cipe général de la politique de l’environnement dans la Dé-

donner l’autorisation5. Dans ses conclusions sur cette affaire,

claration de la conférence de Bergen sur le développement

l’avocat général avait précisé sa conception du principe de

durable en 1990, et surtout dans la Déclaration de la conférence des Nations Unies sur l’environnement tenue à Rio de Janeiro en 1992 (« Sommet de la Terre ») : « Pour protéger l’environnement, des mesures de précaution doivent être largement appliquées par les Etats selon leurs capacités. En cas de dommages graves et irréversibles, l’absence de certitude absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l’adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l’environnement ».

4

Cour internationale de Justice : Nouvelle-Zélande c/France, affaire de la reprise des essais nucléaires par la France (1992) ; abandon de la construction d’un barrage pour des raisons environnementales par la Hongrie (1997) ; toutefois, le Tribunal international du droit de la mer a appliqué une démarche de précaution en condamnant un programme de pêche expérimental japonais au motif que l’incertitude scientifique sur les risques qu’il engendrait pour la survie du thon aux nageoires bleues imposait aux parties d’agir « avec prudence et précaution » (27 août 1999, Nouvelle-Zélande et Australie c/ Japon). 5 CJCE, 21 mars 2000, Association Greenpeace France et autres c/ Ministère de l’agriculture et de la pêche.

REE N°5/2016 31


L'ARTICLE INVITÉ

précaution : celui-ci impose de prendre toutes les mesures

de la diversité et des équilibres écologiques, « sont d’intérêt

nécessaires pour pallier la réalisation d’un risque, même si

général et concourent à l’objectif de développement durable

son existence n’est pas scientifiquement établie ; toutefois, il

qui vise à satisfaire les besoins de développement des géné-

n’exige pas que « chaque fois que l’absence totale du moindre

rations présentes sans compromettre la capacité des géné-

risque ne peut être démontrée scientifiquement, une activité

rations futures à répondre aux leurs. Elles s’inspirent, dans

soit interdite ou soumise à des restrictions draconiennes, car

le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes

tout le monde sait que la preuve négative n’est pas pour rien

suivants : 1° le principe de précaution (…), 2° le principe

qualifiée par les juristes de tout temps de probatio diabo-

d’action préventive et de correction (…), 3° le principe poll

lica » (on reviendra plus bas sur ce point essentiel).

lueur-payeur (…), 4° le principe de participation ».

La Cour de Justice a également précisé, ultérieurement, les conditions du recours à la procédure de suspension ou

Et selon l’article L. 110-1 du code de l’environnement, sous lequel figurent désormais ces dispositions :

d’interdiction provisoire d’un OGM. Dans sa décision6, la Cour

« Le principe de précaution, selon lequel l’absence de

exige, pour justifier la suspension ou l’interdiction provisoire,

certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et

non seulement l’urgence, mais aussi « l’existence d’une situa-

techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de

tion susceptible de présenter un risque important mettant en

mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un

péril de façon manifeste la santé humaine, la santé animale

risque de dommages graves et irréversibles à l’environne-

ou l’environnement ».

ment à un coût économiquement acceptable ».

Elle a également étendu à la santé et à la sécurité ali-

Ainsi, la simple éventualité, ou la simple hypothèse, d’un

mentaire le champ d’application du principe de précaution,

risque de dommages graves et irréversibles impose, en

cantonné par le TFUE à l’environnement : dans l’affaire de

l’absence de certitudes – ou plutôt malgré l’absence de cerr

la « vache folle », elle a admis l’interdiction d’exportation de

titudes –, de prendre des mesures « proportionnées » des-

bœuf anglais au nom du principe de précaution, en consi-

tinées à éviter le risque, sous réserve toutefois d’un « coût ac-

dérant que « Il doit être admis que, lorsque des incertitudes

ceptable ». A la vérité, le « coût acceptable » correspond à peu

subsistent quant à l’existence ou à la portée de risques pour

près au caractère proportionné des mesures, d’une manière

la santé des personnes, les institutions peuvent prendre des

probablement plus précise. Par suite, ces termes tendent a

mesures de protection sans avoir à attendre que la réalité

priori à tempérer le principe dans sa mise en œuvre, voire,

et la gravité de ces risques soient pleinement démontrés ».

pour certains, à en limiter la portée : s’agissant d’une opéra-

7

Enfin, le Tribunal de première instance de la Communau-

tion dont on estime qu’elle présente un risque de dommage

té européenne a fait du principe de précaution un principe

dont les conséquences sont susceptibles d’être « graves et

général du droit communautaire, l’étendant ainsi au-delà du

irréversibles », le principe de précaution n’impose pas a priori

seul domaine de l’environnement : « Bien qu’il soit mentionné

de renoncer ; il exige plutôt de « prendre des précautions » –

dans le traité en relation avec la politique de l’environnement,

pour utiliser un langage usuel – dans la mise en œuvre de

le principe de précaution (…) a vocation à s’appliquer, en

l’opération, en l’adaptant, en prenant des mesures de nature

vue d’assurer un niveau de protection élevé de la santé, de

à limiter les dommages éventuels, dans le cadre d’un équi-

la sécurité des consommateurs et de l’environnement, dans

libre entre coûts (de ces mesures) et avantages (moindres

l’ensemble des domaines d’action de la Communauté8 ».

dommages, et peut-être aussi avantages liés à l’intérêt de l’opération en cause).

En droit interne français, c’est la loi n° 95-101 du 2 février

Cette préoccupation de proportionnalité correspond as-

1995 relative au renforcement de la protection de l’environne-

sez bien à l’esprit de l’article 191 du TFUE mentionné supra,

ment, dite « loi Barnier »9, qui introduit le principe de précaution.

qui précise que :

En vertu des dispositions de son article 1 – qui com-

« 3. Dans l’élaboration de sa politique dans le domaine

plètent le code rural avant leur transfert dans le code de

de l’environnement, l’Union tient compte : - des données

l’environnement adopté en 2000 –, la protection, la mise

scientifiques et techniques disponibles ; (…) – des avan-

en valeur, la restauration, la remise en état et la gestion des

tages et des charges qui peuvent résulter de l’action ou

espaces, des ressources et milieux naturels, des sites et pay-

de l’absence d’action (…) ».

er

sages, de la qualité de l’air (depuis la loi de 1996 sur l’air),

Ces formulations de la loi française ne sont pas totalement satisfaisantes. L’ « absence de certitude » peut en ef-

6

CJCE, 8 septembre 2001, Monsanto et autres. 7 CJCE, 5 mai 1998, Royaume-Uni c/ Commission. 8 TPICE, 26 novembre 2002, Artegodan c/ Commission. 9 Michel Barnier, ministre de l’environnement dans le Gouvernement dirigé par Edouard Balladur (1993-1995).

32 REE N°5/2016

fet porter, selon l’interprétation qu’on en donne, soit sur le seul niveau d’un danger identifié, soit sur l’existence même du danger. L’appréciation de la proportionnalité n’est pas la même dans les deux cas : dans le second, où le risque de


Introduction

LE GRAND DOSSIER

Enjeux d’un développement massif des énergies renouvelables dans le système électrique européen du futur Le développement de la production

d’électricité

Les pays précurseurs dans le

dé-

domaine du développement de

carbonée à partir d’énergies

l’éolien et du PV (Allemagne,

renouvelables (EnR) constitue

un axe majeur de la stratégie énergétique

européenne

Espagne, Portugal, Danemark, Irlande…) ont dû résoudre un

:

certain nombre de difficultés

partant de 20 % en 2010, les

techniques, concernant en pre-

objectifs à l’horizon 2020 du paquet « énergie-climat » en

Europe visent une proportion

Régine Belhomme EDF R&D

mier lieu le raccordement et

Vera Silva EDF R&D

l’intégration de ces nouveaux

moyens de production dans le

d’origine renouvelable de 30 à 35 % pour l’électri-

système électrique, notamment en ayant recours à

cité avec une ambition affichée d’atteindre jusqu’à

l’électronique de puissance.

80 % à l’horizon 2050. Mais on constate aujourd’hui que le développeL’hydraulique, qui constitue la principale source

ment de l’éolien et du PV modifie en profondeur

de production d’électricité d’origine renouvelable

la gestion du système électrique qui se trouve

dans le monde, est aujourd’hui largement exploi-

confronté dans l’ensemble de ses composantes à

tée en Europe et son potentiel de développement

la question de la gestion de l’intermittence de ces

est à présent limité. L’atteinte des objectifs euro-

moyens de production. A plus long terme, l’inser-

péens suppose donc de développer massivement

tion massive de ce type de production va conduire

de nouvelles sources de production d’origine re-

à reconsidérer tout à la fois les règles de gestion

nouvelable : éolien, solaire photovoltaïque (PV),

du système électrique, le développement des in-

biomasse.

frastructures de réseaux et la structure du mix de production.

Partant de 10 % du mix électrique européen en 2014, la part des EnR intermittentes éolien et PV

Un système électrique avec une forte pro-

devrait représenter 20 % en 2020 et pourrait at-

portion d’EnR éolienne ou PV devra faire face à

teindre un taux de l’ordre de 30 % à l’horizon 2030.

une exposition plus importante de l’équilibre du

Figure 1 : Production d’énergie électrique d’origine renouvelable en Europe en 2014 - Source : EDF R&D.

REE N°5/2016 37


LE GRAND DOSSIER

Introduction

réseau aux conditions climatiques. Cette exposi-

à un déséquilibre offre-demande et donc fragilise

tion, actuellement liée à la thermo-sensibilité de

le système du point de vue de son fonctionnement

la consommation, augmente et est observée à

dynamique. Des solutions innovantes, pour per-

différentes échelles de temps. La gestion de la va-

mettre l’insertion de ces productions sans risque

riabilité entre différentes années climatiques im-

pour la sécurité du système électrique seront

pacte investissements en production, en support

nécessaires, si l’on veut atteindre des taux d’EnR

et en réseau. La variabilité saisonnière, hebdoma-

intermittentes très élevés. Cette question est trai-

daire, journalière et infra-journalière augmente les

tée par plusieurs articles dans ce dossier, avec des

besoins de flexibilité pour l’équilibrage du système

exemples apportés par le gestionnaire du réseau

à différentes échéances. Les progrès des outils de

de transport danois et le retour d’expérience sur

prévision, dans le domaine de l’éolien et du PV à

exploitation du système en août 2016.

différentes mailles du système, et l’utilisation des

prévisions dans les processus et décisions opéra-

Les défis liés à l’insertion massive de l’électro-

tionnelles jouent un rôle clé et facilitent la gestion

nique de puissance dans le système ne se limitent

de la variabilité. Cette gestion de la variabilité est

pas à la question d’inertie car l’électronique de

aussi facilitée par un équilibrage du système à des

puissance modifie également le fonctionnement

mailles géographiques plus larges qui permet de

des protections et la pollution harmonique. Sans

profiter des effets de foisonnement géographique

nouvelles solutions technologiques, il pourrait en

de la production EnR ainsi que du partage des

résulter des problèmes de sécurité pour les biens et

moyens de backup et de réserves. Les marchés

les personnes. Le projet européen H2020 MIGRATE,

d’électricité en Europe sont déjà intégrés et, même

décrit dans ce dossier, étudiera ces questions de

si les processus d’équilibre offre-demande restent

façon approfondie afin de proposer des solutions

encore pour l’essentiel nationaux, ces efforts d’in-

pour réduire ses impacts et utiliser l’électronique

tégration, basés sur des codes réseau nouveaux,

de puissance de façon bénéfique pour le système.

visent une intégration européenne allant jusqu’à l’équilibrage de la production et de la consomma-

Le raccordement des EnR, dans sa majorité au

tion proche du temps réel. Ces efforts sont sou-

réseau de distribution et en basse tension pour une

tenus par des renforcements des interconnexions

partie importante du PV, impacte aussi l’exploita-

entre pays.

tion du réseau de distribution. La transformation de ce réseau, rendue possible par les technologies de

Ces questions sont traitées de façon détaillée

réseaux électriques « intelligents » (REI ou smart

dans les différents articles de ce dossier, avec des

grids), permet une exploitation plus flexible du

résultats d’études prospectives et des exemples

réseau et facilite l’intégration des EnR. Ces tech-

issus du retour d’expérience dans des pays pré-

nologies permettent de mieux utiliser la capacité

curseurs du développement des EnR en Europe,

des réseaux et réduire le temps des coupures ; elles

l’Irlande et le Danemark.

créent une opportunité pour l’utilisation des flexibilités décentralisées pour la gestion des contraintes

L’intégration massive des productions éolienne

réseau. Les évolutions récentes autour des tech-

et PV conduit à une forte proportion de production

nologies des REI et de la production et stockage

interfacée par électronique de puissance. Mais cet

décentralisés ainsi que l’accès à un pilotage plus

interfaçage ne permet pas de créer un couplage

dynamique des charges diffuses facilitent cette évo-

direct entre les unités de production EnR et les

lution. Ces technologies créent aussi de nouvelles

besoins du système électrique. Aujourd’hui les

mailles de gestion de flexibilité. Cette question est

groupes de production « classiques » (thermiques

également traitée dans ce dossier.

et hydrauliques) contribuent par un lien physique au fonctionnement du système et leur fonctionne-

L’insertion massive des EnR intermittentes dans

ment synchrone crée la fréquence du système. L’in-

le système électrique devra être accompagnée par

terfaçage via l’électronique de puissance élimine ce

une adaptation du système électrique. Cette adap-

lien physique, ce qui réduit l’inertie du système et

tation couvre à la fois l’adaptation des infrastruc-

impacte le réglage dynamique de la fréquence suite

tures de production, de réseaux, des systèmes de

38 REE N°5/2016


Introduction

protection et des processus et outils utilisés pour l’exploitation du système électrique.

LE GRAND DOSSIER

La question de l’insertion massive des EnR intermittentes est une question de forte actualité et ce dossier apporte des éléments de réponse sur le

Ces adaptations ayant un coût et nécessitant

fond. Sa richesse réside dans le fait que les articles

du temps, le rythme de développement des EnR

traitent plusieurs questions qui se posent en par-

doit être maîtrisé afin d’avoir une transition sition qui ui

ralèle ett apportent ppo une vision globale depuis le

permette de respecter un équilibre entre ent ntre le coût,

systè systèm èm me électrique t ique e européen et le système français

la durabilité des choix et la sécurité écurité té du système. sy

jusqu’à jusqu’ usqu’à la maille mai le e locale. loca l Des contributions, d’origine

Cet équilibre constitue aujourd’hui j ui ce que la Com-

irlandaises rlandaises ais et danoises, complètent c ce dossier avec

mission européenne ap ppelle pelle elle le “ll’Ener En nergy rgy Trilemm Trilem ” qui ui

une vision on forte de leur l re expérie pér érience terrain et leurs

devra être au cœur du développement dével ement ment de l’U ll’Union Union on

a ambitio on ns de poursu suivre e ce développement déve d dé en dé -

de l’énergie.

ployantt d dess ssolu olutio onss innovantes o innovantes. ovant s.

Régine Belhomm mme me est rre responsable du “Challenge Chall Marke Market

Veraa SSilva est responsable ons du programme me de recherche rec

Design”, au programme mme management emennt d’énergies d’EDF R&D.

« sys systèmes électriques et marchés » à EDFF R

Après avoir travaillé illéé à Hydro-Québecc (Canada), elle e a rejointt

rrejoinddre EDF en 2009, 009, elle a éété assistante de recherche à

EDF en 1998 et a m mené des travaux tra sur l’ins l’insertion i de la pro -

l’Imperirial College London et à l’université l’Im l’universit l de Manchester Maanc

duction décentralisée ée et des énergies renouvelables dans les

et ense seignant chercheur eur à l’Institut l’In utt Polyt Po Polytechnique echnique de Porto.

réseaux électriques. s. Depuis 2007, 20 elle est en charge de projets

Elle eest st docteur en ingénierie ie de l’l’Imperial ial College London

sur le développement de la demande mande active et so son intégration

et titulaire d’un diplômé iplômé d’ingénieur d’ingé d’ingén et d’un ’un master mast en éco -

dans les systèmes électriques et dans les ma marchés marchés. march Elle est

nomie et régulation ation des systèm systèmes électriques électriques, é s, les le deux de

membre du bureau du club ub Sys Systèmes ystèmes èmes mes Electriques Electrique t triq dde la SEE.

l’université nive de Porto. P o.

Avvant de

Régine Belhomme est ingénieurr électricien (élect lectronique) ctroni et docteur en sciences appliquées uée ées (génie génie éle élect électrique) de l’université de Liège (Belgique).

LES ARTICLES

Analyse technico-économique d’un système électrique européen avec 60% d’énergies renouvelables Par Vera Silva, Miguel López-Botet tet et Zulueta Zulueta, Yee W Wang, Paul au Fourment, men Timothee Hinchliffe, Alain Burtin .......................................................................................................................... ............................ p. 40 Intégration massive d’électronique de puissance : synchronisation et stabilité des grands systèmes électriques Par Marie-Sophie Debry, Guillaume Denis, s, Patrick Panciatici, Thibault Thib Prévost, Florent Xavier, Xavier Guillaud, Xavier Kestelyn, Andreas M Menze .............................................................. p. 54 Le TYNDP et le projet e-Highway2050 Comment déterminer les investissements clés pour la transition énergétique Par Marie-Pierre Houry, Sébastien Lepy, Fabian ian Georg Georges, Lucian Balea, Gerald Sanchis .................................................................................................................................... p. 60 Nouveaux enjeux à l’échelle locale de la distribution d’électricité Par Marion Delage, Florent Cadoux, Marc Petit Renewables integration, flexibility measures and operational tools for the Ireland and Northern Ireland power system Par Damian Flynn, Michael Power, Mark O’Malley ......................................................................................... p. 68 The future has come: the 100% RES driven power system is reality Par Antje Orths, Peter Børre Eriksen .................................................................................................................. p. 76

REE N°5/2016 39


DOSSIER 1

ENJEUX D’UN DÉVELOPPEMENT MASSIF DES EnR DANS LE SYSTÈME ÉLECTRIQUE EUROPÉEN DU FUTUR

Figure 1 : Illustration du besoin d’adaptation des systèmes électriques pour faire face à l’intégration de productions EnR éolienne et PV.

Analyse technico-économique d’un système électrique européen avec 60 % d’énergies renouvelables Par Vera Silva, Miguel López-Botet Zulueta, Ye Wang, Paul Fourment, Timothee Hinchliffe, Alain Burtin EDF R&D In this study, EDF R&D used the EU “high RES” scenario of the 2011 European Energy Roadmap, reaching 60 % of generation by renewable by 2030, and analysed its implications on system operation and costs through the use of an EDF R&D chain of power systems optimisation and simulation tools. The study indicates that a strong development of RES generation would imply significant changes to the thermal back up fleet needed, with less base load power plant needed and more peaking units. The results also underline the strong interest of deploying a certain level of interconnections, especially around the North Sea and France, as a very efficient way to optimize the systems costs. Storage does not come out as the main flexibility provider, as its high costs tend to make this solution less interesting than fossil backup and curtailment. The need for additional storage will however depend on the country considered and on the possibility to deploy the other existing levers. Operational practices would also need to evolve, with an increasing need for margins in a high wind & solar electricity system. A high RES system would also present challenges in terms of dynamic stability, with frequency excursion potentially reaching security limit. This would imply some curtailment or the deployment of innovative solutions. Lastly, the economics of such a system would be a strong challenge, as the cost of integrating renewables grows along the share it represents in the system.

ABSTRACT

Introduction

L’insertion massive de ce type de pro-

tion concerne l’adaptation des règles et

Le développement de l’éolien et du

duction devra être accompagnée d’une

outils de gestion du système électrique,

photovoltaïque (PV) modifie en profon-

transformation du système électrique

le développement des infrastructures

deur la gestion du système électrique.

à plusieurs niveaux. Cette transforma-

de réseaux et l’évolution de la structure

40 REE N°5/2016


Analyse technico-économique d’un système électrique européen avec 60 % d’énergies renouvelables

Flexibilités pour compenser la variabilité

Robustesse du système électrique européen

ss #OMMENT DIMENSIONNER LE PARC #OMMENT DIMENSIONNER LE PARC s 1UEL IMPACT AURONT LES ERREURS s 1UEL IMPACT AURONT LES ERREURS pour réaliser l’équilibre offre-dede prévision de la production mande avec une production EnR sur la gestion des risques en grande partie variable ? physiques ? ss 1UELLE PLACE POUR LE STOCKAGE 1UELLE PLACE POUR LE STOCKAGE s ,A STABILITÏ DE LA FRÏQUENCE RESTE s ,A STABILITÏ DE LA FRÏQUENCE RESTE et le pilotage de la demande t-elle garantie malgré la baisse pour faire face à cette variabilité ? d’inertie côté production ?

Rôle des réseaux et des interconnexions

Valorisation dans le marché des EnR

s s 1UEL BESOIN DE RENFORCEMENT 1UEL BESOIN DE RENFORCEMENT et d’instrumentation des réseaux de transport et de distribution ? s s 1UEL INTÏRÐT Ì DÏVELOPPER LES 1UEL INTÏRÐT Ì DÏVELOPPER LES interconnexions pour gérer la variabilité en profitant du foisonnement géographique ?

s s 06 ET ÏOLIEN SERONT ILS RENTABLES 06 ET ÏOLIEN SERONT ILS RENTABLES dans le marché de l’électricité ?

Tableau 1 : Les grandes questions soulevées par une insertion massive des EnR dans le système électrique européen analysé dans cet article.

du mix de production et des systèmes de protection. Ce besoin d’adaptation dépend du système considéré comme illustré en figure 1.

Toile de fond de l’analyse. Un scénario européen avec 60 % d’EnR dans le mix

bio o les filières bas carbone : nucléaire, biomasse, hydraulique, éolien et PV. n Ces hypothèses correspondent à un e développement EnR plus important que

Nous nous intéressons dans cet ar-

Afin d’analyser finement ces ques-

orientaa celui attendu dans la ligne des orienta-

ticle aux questions posées par l’inser-

tions, EDF R&D a réalisé des études

“l’Enerr tions du Conseil européen dans “l’Ener-

tion des énergies renouvelables (EnR)

ayant comme toile de fond un scéna-

gy and Climate Framework” qui prévoi prévoiti

à l’échelle du système européen inter-

rio de développement futur des EnR

pro o 30 % d’éolien et PV à 2030. Un tel pro-

connecté. Nous cherchons à caractéri-

en Europe. Le scénario choisi est issu

e jet permet d’identifier les conditions de

ser les principaux impacts et besoins

de la Roadmap energyy 2011 de l’Union

développe e faisabilité des scénarios de développe-

d’adaptation du système électrique

européenne (UE) [1] et correspond

e ment massif de production éolienne et

européen en suivant la grille d’analyse

au scénario “High RES” à 2030, avec

PV en Europe.

du tableau 1.

60 % d’EnR dans la production élec-

e EDF R&D a construit sur cette base

L’insertion des EnR dans les réseaux

trique, dont 40 % d’éolien et de PV.

comple e un jeu de données européen complet

de distribution et de transport nationaux

Nous avons conservé les hypothèses du

et détaillé en respectant les volume volumess

constitue un champ d’étude en soi, et

scénario en termes de demande, de prix

globaux en énergie par filière de laa

reste en dehors du périmètre de cette

des énergies et du CO2, ainsi que pour la

n roadmap : l’hypothèse a été faite d’un

publication.

répartition globale en énergie de toutes

développement homogène de l’éolien n

Figure 2 : Hypothèses du scénario “High RES” de la “roadmap energy” de l’UE.

REE N°5/2016 41


Introduction

URSI FRANCE 2016

Energie et radio-sciences Sans énergie, rien n’est

services radio-mobiles laisse

possible. L’énergie est le

présager une augmentation

catalyseur de tous les phé-

continue de cette contri-

nomènes naturels et se pré-

bution à moins que des

sente sous une variété de

solutions à forte efficacité

formes. Une de ses proprié-

énergétique ne soient trou-

tés fondamentales est son

vées au niveau des réseaux.

caractère indestructible. Elle ne se crée pas, elle ne disparaît pas, mais se convertit d’une forme à une autre.

Yves Louët Professeur de CentraleSupélec Laboratoire IETR

Jacques Palicot Professeur de CentraleSupélec Laboratoire IETR

L’énergie électromagnétique

C’est la raison pour laquelle toutes les solutions visant à réduire la consommation des réseaux sans fil seront salutaires, d’autant plus que

est l’une de ses formes les plus remarquables car

le prix de l’énergie représente une part non négli-

elle se transmet sans fil et l’Univers en est rempli.

geable du coût global des infrastructures. Ces raisons ont poussé la communauté scientifique des

Dans nos sociétés modernes, l’énergie demeure

STIC à proposer des méthodes visant à en réduire

le moteur de nos applications et usages, même si

l’empreinte carbone et à concevoir des « radio

les méthodologies et technologies pour la collecter,

vertes », aussi bien dans un objectif de développe-

la stocker, la transporter, la convertir et l’exploiter

ment durable que de développement de l’indus-

ont connu des évolutions majeures au cours de

trie des télécommunications.

ces dernières décennies. Dans le domaine des radio-sciences et de la société de l’information, les

Les articles de ce numéro de la REE, présen-

nouvelles technologies tendent à être de moins en

tés lors des Journées scientifiques d’URSI France

moins gourmandes en énergie. Télé-alimentation

2016 de Rennes, abordent toutes ces probléma-

et récupération d’énergie complémentent batteries

tiques sous des angles variés. Ce numéro spécial

et piles comme sources d’énergie autonome voire

comporte cinq articles. Un article de synthèse,

s’y substituent. Pour autant, un bilan global de la

deux articles traitant d’éco-radiocommunications

consommation d’énergie du numérique est à dres-

et deux autres qui s’intéressent à la récupération

ser et à mettre en perspective avec des solutions

d’énergie.

innovantes. L’énergie ambiante sous ses différentes formes, solaire, ondes radio, thermique, cinétique,

L’article “Greening Information and Communi-

etc., est une source inépuisable et renouvelable qui

cation Technologies” par Anne-Cécile Orgerie fait

devrait permettre le développement des écotech-

un état de l’art de la situation actuelle et propose

nologies et de leurs nouveaux paradigmes.

quelques pistes pour réduire la consommation énergétique des TIC, notamment dans le domaine

Malgré tout, force est de constater que le sec-

des datacenters, par des approches de type slow

teur des sciences et technologies de l’information

down or sleeping techniques. Ces techniques im-

et des communications (STIC) reste aujourd’hui

pliquent de pouvoir réveiller les équipements mis

un des plus gros contributeurs en émissions de

en veille. D’autres pistes mettant en jeu le com-

gaz à effets de serre (CO2) (part estimée entre 2

portement des utilisateurs sont aussi décrites de

et 10 % associée à une consommation mondiale

façon à rendre ces derniers plus responsables,

d’énergie de l’ordre de 3 %). Cette part est, par

dans leur utilisation de terminaux et de smart-

exemple, comparable à celle de l’aviation civile et

phones en particulier. Ainsi, des logiciels embar-

représente environ un quart de celle de l’industrie

qués mesurant la consommation en temps réel

automobile. L’explosion du trafic Internet et des

d’énergie pourraient être une première solution

REE N°5/2016 87


URSI FRANCE 2016

Introduction

pour sensibiliser les utilisateurs à une meilleure

réalisées en numérique. Ce récepteur ne consom-

utilisation et donc une consommation réduite.

mera pas du tout d’énergie en mode veille.

Un autre aspect abordé est celui de la file d’attente :

En conclusion les auteurs soulignent que la solu-

un utilisateur accepterait volontiers d’attendre un

tion proposée demande à être étudiée plus en

peu avant de recevoir son information s’il était in-

profondeur afin de remplir les critères de sensibi-

formé que cela se fera au bénéfice d’une réduction

lité, latence et robustesse.

de la consommation. Une autre solution pour diminuer l’empreinte carLe premier article traitant d’écoradio s’intitule

bone des objets connectés est proposée dans l’ar-

« Une architecture Intelligente pour l’améliora-

ticle « Réalisation d’un rectenna dans la bande des

tion de l’efficacité énergétique du réseau cellu-

1,8 GHz, fonctionnant à faibles niveaux de puis-

laire 5G ». Il est proposé par Antonio De Domenico

sance RF et optimisé par des techniques source-

& al. Dans cet article les auteurs proposent un nou-

pull » par Jérôme Tissier et Mohamed Latrach.

veau réseau de télécommunications sobre en éner-

L’objectif est de rendre ces objets autonomes en

gie fossile. Pour ce faire, ce réseau est directement

énergie. En effet ceux-ci ont très peu d’information

connecté au réseau électrique intelligent. De l’intel-

à transmettre et doivent consommer très peu. Il est donc envisageable de récupérer

ligence répartie à tous les ni-

de l’énergie pour leur fonction-

veaux permet une intégration étroite entre les deux réseaux.

Jacques Palicot a obtenu son doctorat

nement. Dans le monde de la

La solution présentée utilise

de l’université de Rennes I, mention Trai-i

radio, une façon simple de ré-

une architecture hiérarchique et distribuée, associée à des mécanismes d’apprentissage. Elle permet d’obtenir des gains notables

en

consommation

énergétique.

tement du signal et de l’information en 1983. Il a ensuite travaillé, pendant 17 ans, comme ingénieur d’études TDF au CCETT (devenu Orange-Labs Rennes). De 2001 à 2003, il a été détaché à l’IRISA/INRIA

cupérer de l’énergie (certes en très faibles quantités), consiste à récupérer l’énergie électromagnétique à l’aide de rectennas.

comme spécialiste industriel. Il a intégré

Dans cet article, il a été montré

CentraleSupélec en 2003 et est responsable

que des techniques source-pull

de l’équipe de recherche Signal Communi-i

peuvent être un moyen efficace

Dans ce même domaine des

cations et Electronique Embarquée (SCEE).

pour maximiser le rendement

radiocommunications, l’article

Ses domaines d’activités portent sur le trai-i

de conversion RF-DC en puis-

« Récepteur de type “wake-

tement du signal pour les communications

sance d’un rectenna. Malgré

up” radio à identification par

numériques, la radio logicielle, la radio

tout, les auteurs soulignent que

empreinte fréquentielle » par

intelligente et l’écoradio. Jacques Palicot

les niveaux d’énergie à récupé-

Régis Rousseau, Florin Hutu et

est vice-président de l’URSI/France.

rer sur une seule bande sont

Guillaume Villemaud s’intéresse à l’Internet des objets. La multitude d’objets connectés prévue à l’horizon 2020

Yves Louët a obtenu son doctorat (2000) et son habilitation à diriger des recherches (2010) à l’université de Rennes 1, mention Traitement du signal et télécommunications. Il est professeur de CentraleSupélec

accroîtra de manière consi-

(campus de Rennes) et membre de

dérable l’énergie consommée

l’équipe SCEE du laboratoire IETR (Institut

relativement faibles et seraient insuffisants pour assurer l’alimentation directe d’un objet communicant. Le dernier article intitulé

et l’empreinte carbone des

d’électronique et de télécommunications de

“Autonomous DC-DC Conver-

radiocommunications.

Pour

Rennes), UMR CNRS 6164. Ses domaines

ter for RF energy Harvesting”

répondre à ce problème, les

de recherche portent sur les communica-

par Salah Adami, Christian Vol-

auteurs proposent un système

tions numériques et le traitement du signal

laire, François Costa et Bruno

de « réveil » du récepteur réa-

pour les systèmes de télécommunications.

Allard, traite aussi de la récupé-

lisé par un circuit analogique

Yves Louët est président de la commission

ration d’énergie électromagné-

passif, qui consomme moins

C d’URSI France.

tique. Il propose un système

que les solutions classiques

88 REE N°5/2016

complet de gestion de l’énergie


Introduction

URSI FRANCE 2016

récupérée basé sur un rectenna, un convertisseur

gie tant du point de vue du traitement du signal, de

“flyback” (adaptation d’impédance optimale vis-

l’électronique ou des réseaux. Malgré tout, il reste

à-vis du rectenna) et un convertisseur “start-up”

encore un long chemin à parcourir avant de réduire

(amélioration de la sensibilité de tension). Les solu-

de façon significative l’empreinte carbone des STIC

tions proposées permettent d’atteindre un niveau

et cela passera nécessairement par une modification

de sensibilité très bas (quelques microwatts) et des

de nos comportements qui devront être plus res-

rendements de conversion de tension de 50 à 84 %.

ponsables et plus respectueux de l’environnement

Ces cinq articles illustrent parfaitement la diversité

et impliquer conjointement les efforts des opéra-

et le potentiel des solutions pour économiser l’éner-

teurs, équipementiers, ingénieurs et utilisateurs.

LES ARTICLES

Greening Information and Communication Technologies Anne-Cecile Orgerie ................................................................................................................................................ p. 90 Une architecture intelligente pour l’amélioration de l'efficacité énergétique du réseau cellulaire 5G De Domenico, M. Mendil et V. Heiries, R. Bonnefoi, J. Palicot et C. Moy, C. Gavriluta, R. Caire et N. Hadjsaid ................................................................................................................ p. 96 Récepteur de type“wake-up” radio à identification par empreinte fréquentielle Régis Rousseau, Florin Hutu et Guillaume Villemaud ............................................................................. p. 105 Réalisation d’un rectenna dans la bande des 1,8 GHz fonctionnant à faibles niveaux de puissance RF et optimisé par des techniques source-pull Jerome Tissier Mohamed Latrach ........................................................................................................................ p. 112 Autonomous DC-DC Converter for RF energy Harvesting Salah Adami, Christian Vollaire, François Costa, Bruno Allard ......................................................... p. 119

REE N°5/2016 89


DOSSIER 2

URSI FRANCE 2016

Greening information and communication technologies Par Anne-Cécile Orgerie Chargée de recherche, docteur en informatique, CNRS, IRISA Rennes Les technologies de l'information et de la communication (TIC) sont devenues indispensables dans notre vie de tous les jours. Le nombre d'équipements connectés augmente rapidement, tout comme leur capacité. Cependant, cette croissance entraîne une consommation électrique inquiétante. L'informatique verte vise à réduire les impacts des TIC sur l'environnement. Comment quantifier les impacts des TIC ? Quelles sont, dans l’état actuel des connaissances, les techniques principales permettant de construire une informatique durable ?

ABSTRACT

Energy and information and communication technologies Information and communications technologies (ICT) are

CO2 emissions. However, one can notice that, firstly, aviation growth is slower than the increase of ICT industry, and secondly, aviation has never been considered as a “green” industry.

often cited as a major lever to reduce the energy consump-

The same complexity can be observed while looking for

tion and greenhouse gas emissions of other industry fields.

an evaluation of the global energy consumption of ICT. The

They are indeed able to optimize and automate industrial

consensus is around 5% according to the French Academy of

processes, but also to offer new innovative solutions. For ins-

Technologies (1). Currently, for this global energy consumption,

tance, the usage of ICT can limit transportation – which is a

the following breakdown is observed: approximately one third

huge greenhouse gas emitter – through videoconferencing,

for data centers, one third for communication networks and

reduce human travels and, through car-sharing websites,

one third for user equipment (computers, monitors, etc.) (Ibid.).

optimize them. From online journals to smart building, ICT is

Each portion is complex to compute due to the rapid adoption

progressively invading most of industries, often with an eco-

of new ICT devices, the blurred frontiers between these three

logical argument.

categories, and the diversity of technologies used in ICT, which

However, ICT themselves consume substantial amounts

do not have identical impacts in terms of electricity consump-

of electricity and are responsible for weighty greenhouse

tion – wireless and wired telecommunication technologies

gas emissions. Consequently, exploiting ICT capabilities to

for instance. As an example, in 2013, Coroama and Hilty (2)

come to the rescue of other industries’ sustainability leads

reviewed the literature to assess Internet energy intensity, and

to rebound effects that can lower – or even reverse – their

found that: “Estimates published over the last decade diverge by

benefits. The complexity of the connections between ICT

up to four orders of magnitude — from 0.0064 kilowatt-hours

and sustainability comes from the fact that ICT devices

per gigabyte (kWh/GB) to 136 kWh/GB”.

can be both actors and consumers at the same time, and

Around 2008, however, the emergence of cloud computing

thus, they also need to turn green. In this article, we explore

promised a massive mutualization of servers through isolation

this complex relation by first looking at the current energy

and co-location of multiple virtual machines on the same phy-

consumption of ICT. Then, we identify several state-of-the-art

sical server. In addition, advances in multicore architectures

approaches for greening ICT. Finally, we conclude by presen-

have improved the energy efficiency of servers: for the same

ting the arduous challenge of having an overall view of the

calculation, less energy is needed. However, ICT followed the

potential levers enabling a greener ICT.

Jevons paradox (rebound effect), formalized in 1865 about

Current situation: ICT energy consumption

coal: increasing the efficiency with which a resource is used leads to an increase of its total consumption because, in the

According to the abundant literature on the subject, ICT

same time, this improved efficiency reduces its relative cost,

industry would account for 2 to 10 % of global CO2 emissions.

thus accelerating its economic growth. Indeed, in spite of

The various studies dealing with this complex evaluation do

significant improvements in its energy efficiency, the energy

not agree on an exact number to measure ICT impact. As a

consumption of ICT has continued to increase from 3.3 % to

comparison, aviation is estimated to represent 2 % of global

4.7 % of global consumption between 2007 and 2012 (1).

90 REE N°5/2016


Greening information and communication technologies

Figure 1: Salle abritant les serveurs et le stockage informatique du laboratoire d’Annecy-le-Vieux de physique des particules (LAPP) et du mésocentre MUST (Méso infrastructure de calcul et de stockage) – Source : ©CNRS Photothèque. For the end-user, it is difficult to grasp the energy

hype cycle for emerging technologies shows this phenome-

consumption of the virtual Cloud resources he is using:

non: green IT first appeared in 2008, directly at the peak of

these resources seem invisible and are often free of charge

the wave; in 2009 it was on the declining side of the wave,

(Facebook, Twitter, Gmail, etc.). However, the information

r and surprisingly by 2010, it had disappeared. Reducing ener-

appetite of Big Data, big networks and big infrastructure una-

gy consumption of ICT devices is a challenging issue that

voidably leads to big power (Mills, 2013). In 2012, it was esti-

should be addressed at different levels: hardware, software

mated that, each day, 145 billion emails were exchanged, 4.5

and user levels.

billion searches were launched on Google, 104,000 hours of video were uploaded on Youtube and 40 000 gigabytes of

Improving energy efficiency In order to improve energy-efficiency, it is necessary to

data were produced at the Large Hadron Collider (3). Such widely used Cloud services are supported by gigan-

identify the biggest consumption items for each ICT field.

tic infrastructures. As an example, for 2010, Google used

For instance, in data centers, cooling systems are typically

900,000 servers and consumed 1.9 billion kWh of electri-

estimated to consume 33 % of the total value (7). A green

city (4), and the power demand of a single datacenter can

evolution consists in using free cooling: using outside air to

reach up to 100 MW. In 2012, the number of data centers

cool servers. This technique leads companies to locate their

worldwide was estimated at 509,147, consuming roughly the

facilities in regions and countries with cold climate, such as

output of 30 nuclear power plants (5). On the other side, it is

Sweden, Finland or Iceland.

estimated that in 2017, Internet users will rely on an average

Energy savings can be made at all hardware levels: from

of five connected devices per person, with more than 20 bil-

processor chips to data center infrastructures. The energy-

lion devices connected. All portions of ICT technologies seem

efficient design of low-power processors or the use of dedi-

concerned by this inexorable energy consumption growth.

cated hardware (e.g. Graphics Processing Unit) can reduce

The urgency of the situation calls for significant improvements

the energy cost per operation1.

and changes, in particular in user habits. While this last point

Energy efficiency indicators were defined to characterize

appears arduous, research in green computing has delivered

data centers. The most common is the PUE (Power Usage

interesting pathways to make ICT more sustainable.

Effectiveness) introduced by the Green Grid consortium

Towards greening ICT Energy has always been a matter of concern in certain

in 2006. It is determined by the ratio of the total energy consumed by the center and the part consumed only by the “useful” facilities: server, storage and network. However, this

domains of ICT, like sensor networks and battery-constrained devices. However, for other ICT systems, like data centers, it has only recently become an issue (6). The Gartner’s annual

1

NDLR : sur la question des data centers, le lecteur pourra se reporter à la REE 2015-4, pp. 54-65 – Les data centers – Jean-Pierre Hauet.

REE N°5/2016 91


GROS PLAN SUR

L’Internet des objets Deux technologies clés : les réseaux de communication et les protocoles Deuxième partie Introduction

D

teurs d’aiguiller convenablement lesdits paquets

ans un article précédent, publié dans

de façon qu’ils puissent parvenir à leurs desti-

la REE 2016-4, nous avons exposé le

nataires.

rôle clé que sont appelés à jouer les

Le protocole IP, de niveau 3 dans le modèle

nouveaux systèmes de communica-

OSI, est le facteur commun à toutes les suites

tion, et essentiellement de radiocommunication,

de protocoles Internet. Dans le modèle TCP/IP

dans le développement de l’Internet des objets (IoT). Cependant, établir des communications ne suffit pas. Il faut que les réseaux permettent des échanges de données et que ces données soient comprises par les entités qui les reçoivent.

de l’Internet, qui diffère quelque peu du modèle Jean-Pierre Hauet Membre émérite de la SEE. Rédacteur en chef de la REE

Le but de l’Internet des objets est en effet d’étendre à des « choses », c’est-à-dire à des entités maté-

OSI (figure 1), ces suites : s REPOSENT SUR UN NIVEAU INFÏRIEUR d’accès au réseau (correspondant aux couches 1 et 2 du modèle OSI), c’est-à-dire sur des solutions de communication, telles qu’Ethernet, le Wi-Fi ou les réseaux cellulaires, en utilisant un milieu de

rielles ou logicielles, les fonctionnalités offertes par l’Internet dans le domaine de la communication afin de leur permettre d’échanger entre elles ou avec des humains toutes sortes d’informations ou de données. Dans le succès de l’Internet, deux facteurs clés ont joué un rôle essentiel : l’adressage qui permet de repérer un utilisateur par son adresse IP (Internet Protocol) ou plus couramment par son adresse Web (l’URL ou Uniform Resource Locator) et l’interopérabilité qui permet, grâce à un ensemble de protocoles qui se sont progressivement imposés dans le monde Internet, à des usagers quelconques de communiquer et d’échanger des données et des services, où qu’ils soient dans le monde et quelle que soit l’origine des équipements qu’ils utilisent. On doit cette universalité de l’Internet au protocole IP qui est le principal composant de la suite de protocoles qu’utilise l’Internet. C’est lui qui permet d’encapsuler les données à transmettre dans des datagrammes (ou paquets) en y adjoignant les adresses IP des émetteurs et des destinataires, ce qui permet aux rou-

Figure 1 : Le modèle TCP/IP comparé au modèle OSI.

This article is a continuation of a first article devoted to new protocols used in the Internet of Things (IoT). It is dedicated to data transmission protocols that might be installed on top of the layers dealing with communications and more specifically radio communications. In the first part, the role played at the layer 3 by the IP protocol is discussed. Although many solutions today claiming to be compliant with the IoT, do not implement the IP protocol, the future seems open to a general use of IP and in particular of IPv6. In the second part, are discussed protocols aiming to adapt IPv6 to the lower layers of communication networks and in particular to local networks compliant with IEEE 802.15.4. The 6LoWPAN and TSCH protocols are presented. In the third part, we discuss high level protocols and particularly application layers. New protocols such as CoAP, MQTT and OPC UA are introduced. Finally an overview is given on cybersecurity issues and the need to use secure versions of Internet protocols, most of them having been developed at a time when the risks of cyber-attacks were negligible.

ABSTRACT

130 REE N°5/2016


L’Internet des objets

Figure 2 : Aperçu sur le diabolo des protocoles Internet. transmission qui peut être filaire, radio au satellitaire : c’était l’objet de la première partie de cet article ; s OFFRENT AU DESSUS D )0 UNE INTERFACE DE NIVEAU SUPÏRIEUR la couche application, qui permet d’accéder au travers du réseau à des services divers dont les plus connus sont le Web, la messagerie, l’échange de fichiers et la voix sur IP. Dans ce triptyque vient s’insérer la couche transport qui est en fait un complément au protocole IP (on parlait initialement de TCP/IP et l’appellation reste fréquemment usitée) pour assurer des services de communication de bout en bout (origine-destination) que le protocole IP n’assure pas. Le monde des protocoles Internet apparaît ainsi comme une sorte de diabolo dont les deux hémisphères seraient les couches d’accès réseau d’une part, les couches application d’autre part, cependant que l’axe central serait le protocole IP (figure 2). Cette description est cependant simplificatrice : il existe dans le monde Internet beaucoup de protocoles aux finalités très techniques qu’il est difficile de positionner dans une

Figure 3 : Pile simplifiée des protocoles du Web.

échelle à quatre niveaux. Parmi les plus connus, on peut mentionner ARP, DNS, DHCP.

Vouloir transposer au monde des objets les fonctionnalités

Par ailleurs, l’édifice construit en plus de trois décennies,

de l’Internet pose évidemment la question de l’adéquation de

s’est fissuré sous les attaques que lui ont portées les hackers

ces protocoles aux spécificités du monde des choses. Pour faire

et les cybercriminels. Des mesures d’adaptation ont dû être

simple, et puisque l’Internet des objets est souvent qualifié de

proposées, parfois à la hâte, pour rendre plus robustes des

Web 3.0, on doit se poser la question de savoir si la pile clas-

protocoles qui n’avaient pas été conçus pour faire face à

sique du Web classique (figure 3) reste adaptée au cas de l’IoT.

la menace de cyberattaques. On a vu ainsi apparaître des

On a vu dans la première partie de cet article que la diver-

variantes réputées sûres de protocoles largement répandus

sité des besoins à satisfaire conduisait à envisager l’utilisation

mais dont la vulnérabilité a été établie.

de réseaux de communication beaucoup plus variés que les

REE N°5/2016 131


GROS PLAN SUR

Figure 4 : Schéma minimal d’entête IPv4. solutions conventionnelles de l’Ethernet et du Wi-Fi. Pour ne

avoir été développée pour répondre aux besoins de l’IoT,

citer que les principales, on mentionnera les solutions LR

offre des avantages mais aussi des inconvénients.

WPAN (Low Rate Wireless Personal Area Network), basées

Ces questions sont abordées de façon synthétique

sur les standards IEEE 802.15.4, et les solutions LPWAN

dans les paragraphes qui suivent, en se plaçant dans

(Low-Power Wide-Area Network). L’interfaçage de ces ré-

une optique d’applications stationnaires ou faiblement

seaux avec l’Internet pose des problèmes difficiles qui ne

mobiles. Les applications de l’IoT à des domaines fortement

sont pas intégralement résolus à ce jour, notamment en ce

mobiles (véhicule connecté, transports ferroviaires) posent en

qui concerne les solutions LPWAN.

effet des problèmes spécifiques (hand over, disponibilité, fia-

Par ailleurs au niveau supérieur, le protocole HTTP et sa version sécurisée HTTPS ont été développés dans les années

bilité notamment) qui demandent des analyses particulières.

1990 sans tenir compte des contraintes de ressources (ca-

Le protocole IP

pacité de traitement, mémoire, débit des communications)

IP : jusqu’où ?

propres aux dispositifs constitutifs des systèmes Machine to

L’idée de doter tous les équipements de la capacité de

Machine (M2M) ou IoT1. Il faut donc recourir à des proto-

communiquer en mode IP est séduisante. C’est-elle qui est

coles dérivés voire à de nouveaux protocoles spécifiquement

à la base du concept d’IoT et qui est susceptible de perr

développés pour répondre aux besoins de l’IoT.

mettre, grâce à l’universalité du protocole, l’interopérabilité

Avant d’aborder ces problèmes d’interfaçage de la couche IP avec les niveaux inférieurs et supérieurs, il faut se poser la

des équipements connectés et la connectivité au monde de l’Internet.

question de l’adéquation du protocole IP aux finalités de l’IoT.

Cependant la connexion en IP jusqu’au niveau le plus

Il peut paraître curieux de poser la question de l’utilisation du

reculé des systèmes pose des problèmes pratiques. Outre

protocole IP dans l’Internet des objets dont on peut penser

la question de l’adressage sur laquelle nous reviendrons à

que l’essence même est le protocole IP. On constate cepen-

propos de l’IPv6, se pose la question de la lourdeur et de

dant que l’appellation IoT tend aujourd’hui à être employée

l’efficacité des protocoles IP. Une trame IP comporte au mini-

pour désigner toute architecture capable de rapatrier vers

mum 20 octets d’entête en IPv4 (figure 4) et 40 octets en

Internet des informations en provenance d’équipements de

IPv6, auxquels il faut ajouter les trames UDP (8 octets) ou

terrain sans que le protocole IP soit pour autant utilisé de

TCP (* 20 octets).

bout en bout. Les avantages et les inconvénients de l’implé-

Un tel « arsenal » est sans objet dès lors qu’il s’agit de

mentation “full IP” méritent d’être discutés, de même que

transmettre des données de format modeste, typiquement

les perspectives de la version 6 de l’Internet : l’IPv6 qui, sans

de quelques octets, telles que celles émises par la plupart des capteurs. Ceci explique que beaucoup de solutions se

1

La distinction entre les appellations M2M et IoT n’est pas toujours évidente. Notre perception est que le M2M se réfère davantage au monde professionnel alors que l’IoT englobe la mise en relation d’objets les plus divers (capteurs et actionneurs, mais aussi “wearables”, véhicules connectés, etc.)

132 REE N°5/2016

réclamant de l’IoT soient en fait des solutions offrant une connectivité Internet « de bordure », c’est-à-dire des solutions dans lesquelles les informations sont rapatriées par des protocoles non IP depuis les capteurs (de façon bidirectionnelle


RETOUR SUR ❱❱❱❱❱❱❱❱❱

Claude Elwood Shannon, le jongleur de codes Marc Leconte Membre émérite de la SEE

fer barbelé qu’il avait récupéré autour d’un pâturage à proximité. Il tapait des messages en morse et aimait l’idée de coder les mots avec des symboles qu’on

Le centenaire de la naissance de Claude Shannon

pouvait convertir en grandeurs électriques. Sa sœur

a donné lieu à un grand nombre de manifestations

ainée étudiait les mathématiques et s’amusait à lui

scientifiques autour de ses travaux. Mais la simple

poser des énigmes. Shannon lisait des livres et en

énumération de ces travaux montre de manière évi-

particulier aima beaucoup le « Scarabée d’or » d’Ed-

dente qu’il est difficile de les classer : mathématiques,

gard Poe dont le héros trouvait un trésor en déchif-

physique ou électronique ? Ce qui est sûr, c’est que

frant un cryptogramme. Il gagnait quelque argent en

quelques-uns des travaux de Claude Shannon ont

livrant des télégrammes pour le bureau local de la

acquis très rapidement une renommée internationale

Western Union et en réparant des postes de radios

qui a largement dépassé les seuls milieux scienti-

pour un magasin local.

fiques. On peut dire que Shannon a

Son héros d’enfance était Edison

été le père des sciences de la com-

dont il apprit qu’il était un cousin éloi-

munication et qu’il a oscillé entre les

gné. Plus tard, la liste de ses héros,

travaux théoriques et les applications

sans éliminer Edison, s’élargit à des sa-

pratiques qui ont marqué le début de

vants tels que Newton, Darwin, Eins-

l’informatique et de la numérisation

tein et Von Neumann. En 1932, il entra

des communications. En suivant le

à l’université du Michigan, à la suite

fil de sa biographie, nous allons voir

de sa sœur Catherine, qui venait de

comment se sont articulés tous ces

réussir la maîtrise de mathématiques.

éléments.

En 1936, il obtint le Bachelor1 degree en génie électrique et en mathéma-

L’enfance et les études Claude Elwood Shannon est né à

tiques. Il a poursuivi tout au long de Claude Shannon.

Petoskey dans l’état du Michigan, le 30 avril, 1916. Son père, Claude, descendant des premiers colons du New Jersey, était un homme d’affaires

sa carrière ce double intérêt pour les mathématiques et l’ingénierie.

Du MIT aux Bell Labs

et, pendant un certain temps, le juge des probations.

En 1936, Claude Shannon occupe le poste d’assis-

Sa mère, Mabel Loup Shannon, fille d’immigrants alle-

tant de recherche au département de génie électrique

mands, était professeur de langue et principale de la

au Massachusetts Institute of Technology (MIT). Ce

Gaylord High School, à Gaylord. Claude Shannon a

poste lui permet de continuer ses études supérieures

passé les 16 premières années de sa vie à Gaylord,

tout en travaillant à temps partiel pour le départe-

où il a fréquenté l’école publique et a été diplômé de

ment. Il avait en effet découvert une annonce pour un

la Gaylord High School en 1932. A l’instar de la plu-

travail d’été qui lui avait semblé parfaitement adapté

part des garçons, Shannon montra un goût particulier

à ses intérêts et ses capacités. Vannevar Bush, doyen

pour la mécanique. Ses matières préférées à l’école

de l’école d’ingénieur du MIT, cherchait un assistant

étaient les sciences et les mathématiques, et chez lui

de recherche pour manipuler (on dirait aujourd’hui

il construisait des modèles réduits d’avions. Fait pré-

programmer) et faire fonctionner l’analyseur différen-

monitoire, il mit au point un système télégraphique

tiel, la machine à calculer la plus avancée de cette

avec un ami qui habitait à un kilomètre de chez lui. Le télégraphe en question consistait à utiliser du fil de

1 Equivalent d’une licence.

REE N°5/2015 143


❱❱❱❱❱❱❱❱❱❱❱ RETOUR SUR

époque, qui permettait de résoudre par des moyens analogiques des équations différentielles allant jusqu’au sixième ordre. Le travail consistait à traduire les équations différentielles en mouvements mécaniques puis à effectuer la mise en place de la machine et en cours d’exécution à trouver les solutions pour les différentes valeurs initiales. Il fallait parfois quatre assistants pour actionner les leviers tout en suivant les courbes pendant l’évolution de la machine vers la solution. Un circuit complexe de relais associés à l’analyseur différentiel contrôlait son fonctionnement et impliquait plus d’une centaine de relais. En étudiant ces circuits, Shannon s’intéressa à la théorie et à la conception des circuits de relais et de commutation. Il avait étudié la logique symbolique et l’algèbre de Boole dans

Vannevar Bush penché sur l’analyseur différentiel du MIT. Source : MIT Museum.

les cours de mathématiques à l’université du Michigan et il réalisa que c’étaient les mathématiques appropriées pour

le sujet de sa thèse de doctorat en mathématiques. Il passa

l’étude de ces systèmes à deux valeurs. Il développa ces

l’été 1939 à Cold Spring Harbor travaillant sous la direction du

idées au cours de l’été 1937 qu’il passa aux Bell Telephone

généticien Barbara Burks. Il explora la possibilité d’élaborer

Laboratories célèbres sous le nom de Bell Labs à New York.

une théorie algébrique de la génétique et développa sa thèse

A son retour au MIT, dans son mémoire de maitrise, il montra

sous le titre « Une algèbre pour la génétique théorique ».

comment l’algèbre de Boole pourrait être utilisée dans l’ana-

Son superviseur pour le doctorat au MIT était le professeur

lyse et la synthèse de circuits informatiques. Son mémoire

Frank L. Hitchcock, un algébriste.

de maîtrise ainsi que son premier article [4], synthèse de son mémoire, suscita un intérêt considérable quand il fut publié

La lettre à Vannevar Bush

en 1938 dans les Transactions de AIEE. En 1940, pour cet

Le 16 février 1939, Shannon écrivit à Vannevar Bush une

article, il fut récompensé par le Prix Alfred Noble des sociétés

longue lettre programme déposée aujourd’hui à la Biblio-

d’ingénierie des États-Unis, un prix décerné chaque année

thèque des archives du Congrès [5]. Dans cette lettre Shannon

à une personne de moins de 30 ans pour un article publié

développe une idée qui lui tient à cœur. Il vient de terminer

dans une des revues des sociétés participantes (à ne pas

sa thèse sur la génétique et Il indique qu’il a travaillé à la fois

confondre avec le prix Nobel). Par la suite il écrira plusieurs

dans le cadre de son travail mais aussi « en off » sur quelques-

études à la fois théorique et pratique sur l’analyseur différen-

unes des propriétés générales des systèmes de transmission

tiel. Avec d’autres études sur les circuits, il pose les jalons de

de l’intelligence, incluant la téléphonie, la radio, la télévision et

la conception des circuits logiques qui seront les briques de

la télégraphie. Il faut noter ici l’utilisation par Shannon du mot

base des calculateurs, des ordinateurs et de l’électronique.

anglais « intelligence » qui signifie renseignement ou donnée

Pendant l’été 1938, il retourna au MIT pour faire un tra-

mais qui sera remplacé plus tard par communication. Shannon

vail de recherche sur la conception du sélecteur rapide de

propose pour les systèmes de transmission un schéma de la

la machine de Vannevar Bush et il fut principalement impli-

forme suivante :

qué dans les circuits à tubes sous vide utilisés dans ce dispositif. En septembre 1938, à la suite d’une suggestion de Vannevar Bush, Shannon passa du département de génie

T étant la transmission et R la réception, le signal (ou l’in-

électrique au département de mathématiques. Il devenait

telligence) à transmettre et la sortie finale. Shannon indique

assistant d’enseignement tout en travaillant à un doctorat en

que les systèmes réels sont affectés d’une distorsion dont

mathématiques. Bush venait d’être nommé président de la

il va donner une formulation mathématique. A ce stade, il

Carnegie Institution à Washington, dont l’une des branches, à

ne s’agit pas de théorie mais il suggère un théorème fonda-

Cold Spring Harbor, NY, traitait de la science de la génétique.

mental qui indique qu’une identité du signal d’entrée à celui

Vannevar Bush suggéra à Shannon que l’algèbre pourrait

de sortie nécessite une bande passante infinie. Dès cette

être aussi utile dans la compréhension de la connaissance

époque, il semble influencé par les travaux de Hartley et

génétique et présentait des analogies avec la commutation.

Nyquist publiés une dizaine d’années auparavant ; nous

Shannon décida de se pencher sur cette question et en fit

reviendrons sur ce point plus loin. Shannon évoque égale-

144 REE N°5/2016


Pas encore membre ? En 2017, adhĂŠrez Ă la SEE La SEE, sociĂŠtĂŠ savante française fondĂŠe en 1883, forte de 2 000 membres, couvre les secteurs de l’ElectricitĂŠ, de l’Electronique et des Technologies de l’Information et de la Communication. Sa vocation : contribuer aux enjeux majeurs du 21e siècle, en fĂŠdĂŠrant la communautĂŠ scientiďŹ ques, industriels et les opĂŠrateurs de l’ÊlectricitĂŠ et des tĂŠlĂŠcommunications notamment par le biais de son Cercle des entreprises qui identiďŹ e et traite de problĂŠmatiques sensibles et actuelles telles que la cybersĂŠcuritĂŠ des rĂŠseaux ĂŠlectriques intelligents. BULLETIN Ă€ COMPLÉTER ET RENVOYER : SEE - Service adhĂŠsions - 17 rue de l’Amiral Hamelin - 75783 Paris cedex 16 - France. 01 56 90 37 17 - adhesion@see.asso.fr

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EDITORIAL ED if : dĂŠchets radioactifs bilitĂŠ collective

EDITORIAL ITER: un projet extraordinaire, une aventure humaine unique Bernard Bigot

2016

ENTRETIEN

NS ATIIONS ATION TELECOMMUNICA

É RGIE ÉNERGIE

NumĂŠro

4 ENTRET

NumĂŠro

2016 NumĂŠro

ALL A NA GN IIGNA SIG S

IAL

2016

EDITOR

3

2

IEN

S

ENTRETIEN AVEC Alain Bugat PrÊsident de l’AcadÊmie des technologies

ÉNERGIE

TELECOMMUNICATIONS

SIGNAL

COMPOSANTS

AUTOMATIQUE

INFORMATIQUE

ICATIONS NICATIONS TELECOMMUN TELECOMMU ÉNERGIE

DOSSIERS

DOSSIER DOSSIER

e ce ence ĂŠren fĂŠren nfĂŠr 9e conf e alle al ale nale iona natio interrnat ess e es câbl sur les olĂŠs ol so iso ie isolĂŠ ergie nerg d’Ên INVIT É

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L'ARTIC ISSN 1265-6534

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& + ! ,-)) /)34 5 ! $ ! " s La Revue de l’ElectricitÊ et de l’Electronique (REE) se destine aux ingÊnieurs, chercheurs, enseignants, dÊcideurs techniques et Êconomiques intÊressÊs par les secteurs de l’ÊlectricitÊ, Êlectronique, de l’information et communication. Paraissant 5 fois par an, la revue s’articule autour de dossiers techniques, ash-infos, articles invitÊs, entretiens de personnalitÊs du monde de la recherche et de l’industrie. s La Revue 3EI est une publication trimestrielle destinÊe aux professeurs, universitaires et industriels concernÊs par l’enseignement de l’ÊlectricitÊ et de l’Êlectronique industrielle.

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ENTRETIEN AVEC CHRISTIAN PIERRET

Ancien ministre

La politique ĂŠnergĂŠtique : REE : M. le Ministre, vous avez accu-

Le mix ĂŠnergĂŠtique doit en permanence

certitudes que l’on peut avoir à un moment

mulÊ au cours de votre carrière une

s’adapter à l’Êvolution des techniques : j’ai

donnĂŠ. La politique ĂŠnergĂŠtique est un

expÊrience très vaste dans diffÊrents

mentionnĂŠ les hydroliennes et la biomasse,

dÊpassement incessant, elle vous amène

secteurs de la vie politique et ĂŠco-

mais il faudra à l’avenir compter sur l’hydro-

Ă avoir une autre vision, faite de prudence

nomique. Nous avons relevĂŠ trois

gène et sur les nouvelles formes de valori-

pour assurer la sĂťretĂŠ pour les habitants,

domaines que vous avez approfon-

sation de l’Ênergie nuclÊaire.

mais aussi de conďŹ ance dans le progrès.

dis : l’Ênergie, l’innovation et le rôle REE : Il me semble que nous sommes

des collectivitÊs territoriales. C’est sur ces trois axes que nous aimerions

La transition ĂŠnergĂŠtique Ă la française s’inscrit dans la continuitĂŠ et non dans la rupture

vous interroger. Commençons par l’Ênergie. La loi sur la transition ĂŠnergĂŠtique

ici assez loin du discours Êcologique classique C. P. : En effet, ma vision est très diffÊrente de celle de beaucoup d'Êcologistes qui condamnent la croissance. Ce que

a maintenant plus d’un an. Pensezvous qu’elle ait jetÊ les bases solides

REE : Nous avons notĂŠ cependant

nous recherchons, c’est une prise de

d’un approvisionnement ÊnergÊtique

que pour vous les ĂŠnergies renouve-

conscience et l’organisation d’une crois-

stable, compĂŠtitif et respectueux de

lables restaient un complĂŠment.

sance forte et raisonnÊe. Ce n’est pas un

l’environnement ?

C. P. : Aujourd’hui les Ênergies renouve-

pÊchÊ de consommer l’Ênergie si cela se

Christian Pierret : La loi sur la transition

lables viennent en appoint et l’association

fait de façon rationnelle au service d’un

ĂŠnergĂŠtique est plus une continuation et un

nuclĂŠaire-ĂŠnergies renouvelables est un

objectif de mieux vivre, en particulier pour

aboutissement qu’une rupture. Depuis 20

mariage de raison qu’il n’y a aucune raison de

les dĂŠfavorisĂŠs.

ans, c’est-à -dire depuis la loi Bataille, l'État

ne pas encourager. Toutes deux concourent

a ÊlaborÊ une doctrine qui a suivi l’Êvolution

à ce qui doit être l’objectif principal de toute

des techniques et qui aujourd’hui parvient Ă

politique ÊnergÊtique, c’est-à -dire  moins

un mix ĂŠnergĂŠtique dĂŠpassant la dichotomie

de carbone . C’est pourquoi les Ênergies

dogmatique ÂŤ pour ou contre le nuclĂŠaire Âť.

renouvelables revĂŞtent cette importance ;

Le mix retenu par ce texte traduit un bon

d’autant plus que des amÊliorations vont

ĂŠquilibre entre les diffĂŠrentes ressources

voir le jour. Les progrès considÊrables du

auxquelles on peut faire appel :

photovoltaïque sont l’illustration de cette

Prenons l’exemple des chauffe-eau Êlec-

s LE NUCLĂ?AIRE POUR LES USAGES EN BASE mutation technologique permanente, mĂŞme

triques que l’on prÊtend interdire au nom

et semi-base ;

s’il demeure qu’il vaut mieux promouvoir le

s UNE COMPOSANTE FOSSILE POUR LA POINTE QUI photovoltaĂŻque lĂ oĂš le soleil est abondant...

La politique ĂŠnergĂŠtique nous amène Ă avoir une vision faite d’humilitĂŠ mais aussi de confiance dans le progrès

d’une certaine idÊologie d’Êconomies d’Ênergie primaire. Or ces chauffe-eau sont utiles

Je crois beaucoup au progrès technique

car ils permettent de stocker Ă peu de frais

et la politique ÊnergÊtique doit s’appuyer

l’Ênergie Êlectrique et donc de mieux organi-

s UN COMPLĂ?MENT IMPORTANT APPORTĂ? PAR LES sur cette ĂŠvolution, et pas seulement dans

ser dans le temps la satisfaction des besoins.

ĂŠliminera le charbon pour se tourner vers le gaz ; ĂŠnergies renouvelables, avec des apports

le domaine des ĂŠnergies renouvelables. La

Prenons aussi l’exemple plus gÊnÊral

variables selon les donnĂŠes locales : ĂŠo-

fusion thermonuclĂŠaire sera sans doute, Ă

de la construction. Il y lĂ ĂŠgalement une

lien, photovoltaĂŻque (surtout au sud de

la suite du projet ITER, l’une des ressources

contradiction. On encourage Ă juste titre

la Loire), petites chutes, sans oublier les

fondamentales de la deuxième partie du

les constructions très sobres en Ênergie

hydroliennes qui se proďŹ lent et les tech-

XXI siècle. Quand on considère les mu-

voire Ă bilan ĂŠnergĂŠtique excĂŠdentaire :

niques nouvelles de conversion de la bio-

tations qu’elle peut entraÎner, cela nous

c’est ce qu’on appelle le BEPOS ou bâti-

masse, Ă base de bactĂŠries notamment.

conduit à beaucoup d’humilitÊ quant aux

ment Ă ĂŠnergie positive. Mais ce faisant,

e

REE N°5/2016 155


on refuse de faire la promotion de l’énerr

suivre. Le développement des énergies

gie électrique. Or on peut encore tirer de

renouvelables se fait grâce à des aides

l’électricité beaucoup d’avantages, « la fée

considérables qui sont financées par des

électricité » n’est pas morte et en particulier

prélèvements majeurs supportés par les

la combinaison électricité/technologies de

consommateurs domestiques qui arrivent

l’information et de la communication offre

à payer leur électricité deux fois plus cher

des perspectives de progrès considérables.

qu’en France. Dans le même temps, pour

Il faut se méfier, en matière énergé-

maintenir la compétitivité de l’industrie

tique, de l’air du temps et des courants

allemande, il faut subventionner le prix du

de pensée du moment pour inscrire notre

MWh qui lui est livré.

réflexion dans la durée.

Il faut aider les technologies nouvelles mais il faut savoir sortir des subventions

Ce n’est pas un péché de consommer l’énergie si cela se fait de façon rationnelle. La fée électricité n’est pas morte…

Il faut aider les technologies nouvelles mais il faut savoir sortir des subventions

et, à partir d’un certain moment, imposer aux parties prenantes de voler de leurs propres ailes. Une économie subventionnée ne peut pas durablement fonctionner. En

mix énergétique comme plus solide. En

France, le prix de l’électricité est favorable

Europe notre modèle de référence serait

à son développement et ne souffre pas

REE : Quel regard portez-vous

davantage le modèle suédois que le modèle

de distorsions comme on en rencontre en

sur la politique allemande ?

allemand.

Allemagne.

de son électricité à partir du charbon et

REE : Mais n’avons-nous pas tendance

REE : Comment jugez-vous la politique

du lignite. Elle a des mines à ciel ouvert

en France à vouloir en faire trop

européenne de l’énergie ?

au milieu de la Ruhr. Lorsque les vents

et trop vite ? Prenons l’exemple du

C. P. : C’est l’un des terrains où il faudrait

les poussent, les nanoparticules liées à la

véhicule électrique. Ne pensez-vous

donner un contenu plus politique mais

combustion se déversent sur la France. Il

pas que la priorité qui lui est donnée

où c’est le plus difficile compte tenu des

y a une contradiction fondamentale entre

est aujourd’hui surdimensionnée ?

attitudes nationalistes de beaucoup d'états

le discours officiel, très influencé par les

C. P. : Le véhicule électrique me semble

membres. Il n’y a donc pas aujourd’hui

écologistes, et la réalité. Cela commence

promis à un grand avenir comme Volkswagen

de convergences entre les politiques des

en outre à coûter très cher à nos amis

vient de le démontrer, surtout sous la

Etats, sauf sur les réseaux, si l’on excepte

allemands même si leur économie est au-

forme hybride rechargeable ou bien doté

le cas de la France, de la Suède et de la

jourd’hui plus prospère que la nôtre.

d’un range extenderr1 pouvant notamment

Grande-Bretagne. Il y a par contre beaucoup d’oppositions, souvent idéologiques.

C. P. : L’Allemagne produit encore 42 %

Lorsque j’étais au Gouvernement, le

fonctionner à l’hydrogène. L’hybride rechar-

chancelier Schröder nous avait demandé 10

geable est une bonne solution car elle cons-

Comme pour l’euro, l’adoption d’une

ans pour sortir du charbon tout en répondant

titue une marche à la fois pour les usagers,

politique énergétique commune serait un

aux manifestations des verts qui bloquaient

car elle les rassure, et pour les opérateurs :

acte politique majeur, un acte fondateur

le retour des déchets nucléaires après leur

le développement du véhicule électrique

permettant de redonner de la vigueur à

retraitement en France. Mais où en est-

implique une évolution majeure et coûteuse

l’Europe. Pratiquement, on pourrait re-

on aujourd’hui ? Sur les aspects pollution,

des infrastructures. Et donc la solution

lancer l’idée d’une Agence européenne

destruction des paysages, insuffisance des

hybride est un moyen d’organiser cette

de l’énergie, chargée de promouvoir la

réseaux électriques, coût économique…,

transition.

mutation vers une économie décarbonée

les Allemands semblent bien être dans

au travers de différents vecteurs dont

l’impasse. Bien sûr, ils pourront davantage

REE : Oui, mais tout cela coûte

la politique énergétique et la politique

faire appel au gaz qui n’est pas une énergie

très cher aux finances publiques

du logement. Il faudrait lancer des coo-

dépassée et permet de réduire considéra-

C. P. : il faut distinguer le coût et les

pérations renforcées dans le domaine de

blement les émissions de CO2 et de NOX.

subventions et surtout ne pas se laisser

l’énergie, toujours autour de cette notion

Mais ce sera aux dépens de concessions sur

enfermer dans un système qui s’éloigne

de décarbonation.

la sécurité de leurs approvisionnements.

trop de la logique économique. À nouveau

Bien sûr se pose le problème des

l’exemple allemand n’est pas celui qu’il faut

ressources et c’est un point difficile. Il

Notre loi sur la transition énergétique apparaît au regard de l’expérience allemande comme beaucoup plus équilibrée et notre

156 REE N°5/2016

1

NDLR : Range extender = prolongateur d’autonomie.

faudrait sans doute à nouveau partir d’une initiative franco-allemande.


ENSEIGNEMENT & RECHERCHE

ECAM-EPMI, une « école créée par et pour les entreprises » Entretien avec Moumen Darcherif - Directeur général, ECAM-EPMI REE : M. Darcherif, vous dirigez l’école ECAM-EPMI depuis 15 ans, pourriez-vous nous en faire une brève présentation ? Moumen Darcherif : ECAM-EPMI est un EEPSIG (établissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général), à but non lucratif, habilité à délivrer le titre d’ingénieur et le grade de master. L’école a été créée en juillet 1992 à l’initiative de quatre entreprises, d’abord EDF et PSA, puis Schneider Electric et Philips. Le constat initial était que la France manquait cruellement d’ingénieurs spécialisés dans les courants forts, ce constat allant de pair avec les besoins d’automatisation des systèmes industriels. Les quatre groupes fondateurs ont ensuite convaincu l’Institut catholique de Paris de se joindre à l’aventure et de créer une école au sein de son campus technologique de Cergy-Pontoise. Au départ EPMI signifiait « Ecole de physique et de mathématiques industrielles » puis la signification du sigle est vite devenue « Ecole d’électricité, de production et méthodes industrielles ». Cela marque bien notre volonté de former des ingénieurs de type « arts et métiers » à dorsale génie électrique. L’école a ensuite intégré le groupe des écoles catholiques d’arts et métiers, d’où notre appellation ECAM-EPMI. REE : Les membres fondateurs sont-ils encore impliqués au sein de l’école ? M. D. : Oui, ils sont toujours présents dans nos organes de gouvernance et/ou de conseil à l’exception de Philips qui aurait souhaité que nous développions des formations axées vers l’éclairage, ce qui à l’époque a semblé prématuré. D’autres groupes industriels nous ont depuis lors rejoints, no-

tamment VINCI, SUEZ et SPIE, sans doute parce que nous avons répondu à leurs attentes en matière d’apprentissage. C’est ainsi que, aujourd’hui, les promotions du cycle ingénieur se déclinent selon deux statuts : s CELUI D ÏTUDIANTS DÏBOUCHANT SUR LE TITRE D INGÏNIEUR GÏNÏRALISTE d’ECAM-EPMI (environ 150 par promotion), avec trois pôles, chacun d’entre eux offrant deux filières de dernière année : - pôle « Energie » avec ses filières « Ingénierie électrique » et « Energétique » ; - pôle « Industrie » avec ses filières « Mécatronique » et « Logistique et Achats » ; - pôle « IT » avec ses filières « Réseaux » et « Systèmes d’information » ; s CELUI D APPRENTIS DANS LE CADRE D UNE FORMATION EN GÏNIE ÏNERGÏtique et climatique (environ 50 par promotion). REE : Au total combien d’étudiants avez-vous ? M. D. : Nous avons environ 800 étudiants : (80 à 100) par année du cycle préparatoire et 200 dans chacune des trois années du cycle ingénieur. Un point notable pour nous : sur ces promotions, il y a environ 20 % d’étudiants étrangers. REE : Comment recrutez-vous vos élèves ? M. D. : Les élèves intègrent l’école sur concours : s CONCOURS 0OST BAC VIA LA PROCÏDURE !0" POUR CEUX QUI VEULENT FAIRE les cinq années chez nous ;

Figure 1 : L’ECAM-EPMI, une école d’ingénieurs au cœur du campus technologique de Cergy-Pontoise. © ECAM-EPMI.

158 REE N°5/2016


ENSEIGNEMENT & RECHERCHE

s QUATRE CONCOURS AU NIVEAU BAC DONT LE CONCOURS % ! ET LA banque PT1 pour les ĂŠlèves des CPGE (classes prĂŠparatoires aux grandes ĂŠcoles). REE : Est-ce que tous vont jusqu’au terme de leur formation d’ingĂŠnieurs, au bout de cinq ans ? M. D. : Aujourd’hui nous sommes engagĂŠs vis-Ă -vis de l’Etat Ă ce que plus de 94 % de nos ĂŠlèves obtiennent leur diplĂ´me d’ingĂŠnieur du premier coup, c’est-Ă -dire au bout de cinq ou trois ans selon leur annĂŠe d’intĂŠgration. Comment atteint-on cette performance ? s D ABORD NOS CONCOURS D ENTRĂ?E COMPORTENT EN PLUS DES Ă?PREUVES scientiďŹ ques, des entretiens individuels et collectifs permettant de mesurer la motivation des candidats ; s ENSUITE EN CYCLE PRĂ?PARATOIRE NOUS METTONS EN PLACE UN SOUTIEN scolaire dès le dĂŠbut de l’annĂŠe, Ă l’issue des premiers contrĂ´les de connaissances ; la formation est assurĂŠe par des ĂŠlèves de l’Êcole (par exemple de deuxième annĂŠe du cycle ingĂŠnieur) ; ce soutien est gratuit pour les ĂŠlèves en difďŹ cultĂŠ qui en bĂŠnĂŠďŹ cient, mais l’Êcole RĂ?MUNĂ’RE LES i Ă?LĂ’VES FORMATEURS w #ELA VA JUSQU ĂŒ H DE COURS DE SOUTIEN PAR SEMAINE EN PLUS DES HEURES DE COURS NORMAUX Ce système permet aussi d’apporter une petite aide ďŹ nancière Ă certains ĂŠlèves, dans une ĂŠcole dont on sait qu’elle est payante. REE : Cela amène une question : n’y a-t-il pas une sĂŠlection par l’argent ? M. D. : C’est aujourd’hui largement un mythe. Il est vrai que les familles de nos ĂŠlèves paient environ 55 % du coĂťt de la formation (soit 4 900 F par an en cycle prĂŠparatoire et 6 900 F en cycle ingĂŠnieur), mais nos ĂŠlèves peuvent bĂŠnĂŠďŹ cier : s DE BOURSES NATIONALES s D AIDES lNANCIĂ’RES DE LA PART DE LA &ONDATION %0-) s DE PRĂ?TS BANCAIRES ĂŒ DES TAUX AUJOURD HUI PRESQUE NULS s DE PETITS JOBS OFFERTS PAR L Ă?COLE ENTRETIENS DES LABOS FORMATION en interne) ou que l’Êcole les aide Ă trouver Ă Cergy. Et n’oublions pas la ďŹ lière en apprentissage, qui est non seulement gratuite, mais mĂŞme rĂŠmunĂŠratrice. REE : Vous dirigez une ĂŠcole dite Ă prĂŠpa intĂŠgrĂŠe ; quelles diffĂŠrences voyez-vous avec les formations d’ingĂŠnieurs après classe prĂŠparatoire ? M. D. : La distinction forte qui existait jadis entre les deux types d’Êcoles a tendance Ă s’estomper. Je ne veux pas entrer dans une logique de compĂŠtition avec les plus grandes ĂŠcoles ÂŤ traditionnelles Âť mais je suis persuadĂŠ que des ĂŠcoles Ă prĂŠpa intĂŠgrĂŠe, qui ont pignon sur rue au niveau national comme au niveau international, n’ont rien Ă envier Ă bon nombre d’Êcoles auxquelles on a accès Ă l’issue des classes prĂŠparatoires. REE : Qu’est-ce qui vous permet d’affirmer cela ? M. D. : D’abord le fait que la prĂŠparation au mĂŠtier d’ingĂŠnieur s’Êtale 1

La Banque PT est le concours organisĂŠ par l’ENSAM pour le recrutement des ĂŠlèves de MathĂŠmatiques SpĂŠciales, sĂŠrie Physique Technologie.

sur cinq ans. Dans les ĂŠcoles traditionnelles, les ĂŠtudiants passent ďŹ nalement assez peu de temps. En effet sur les trois annĂŠes, il est bien connu que le 1er semestre est un semestre de dĂŠcompression après le stress des concours et des deux (voire trois) annĂŠes de classes prĂŠparatoires. Ensuite, beaucoup d’Êtudiants passent une annĂŠe Ă l’Êtranger, et enďŹ n il y a le stage de ďŹ n d’Êtudes. Tout cela peut mettre Ă mal l’esprit d’appartenance Ă l’Êcole. Dans une ĂŠcole Ă prĂŠpa intĂŠgrĂŠe, on a davantage le temps. Et les ĂŠcoles telles que la nĂ´tre ont mis en place une pĂŠdagogie Ă forte valeur ajoutĂŠe, visant Ă transformer le jeune, qui arrive chez nous ĂŒ ANS ET QUI EN SORT ĂŒ ANS APRĂ’S Y AVOIR PASSĂ? CINQ DES PLUS belles annĂŠes de sa vie, Ă lui apprendre Ă travailler en groupe et Ă dĂŠvelopper ses expĂŠriences humaines. La question qui est au cĹ“ur de la rÊexion de tous les responsables de grandes ĂŠcoles, est la suivante : qu’est-ce que l’ingĂŠnieur FRANÂĽAIS DE DEMAIN HORIZON QUI SAURA SE PLACER ET Ă?VOLUER positivement lĂ oĂš il sera et faire face Ă une concurrence mondiale de plus en plus forte ? Un scientiďŹ que pur, un manager, un technologue, quelqu’un qui sait combiner connaissances et expĂŠrience du terrain ? PlutĂ´t que la compĂŠtition nous favorisons l’idĂŠe de la coopĂŠration au sens large. A ECAM-EPMI nous considĂŠrons que, au-delĂ du simple ĂŠtablissement d’enseignement, l’Êcole se doit d’être une famille ou chacun puisse s’Êpanouir pour donner le meilleur de luimĂŞme. Parmi les diffĂŠrences, mĂŞme si notre prĂŠpa a un contenu scientiďŹ que proche de celui d’une prĂŠpa classique de type Physique Sciences de l’IngĂŠnieur (PSI), la formation s’ouvre dĂŠjĂ sur l’entreprise en encourageant les ĂŠlèves Ă faire des stages en entreprises, dès la 1ère annĂŠe. On gagne aussi du temps par le fait qu’il n’y a pas d’heures de colles, remplacĂŠes par du travail sur des projets. De mĂŞme, le nombre d’heures de mathĂŠmatiques est un peu rĂŠduit, au bĂŠnĂŠďŹ ce d’expĂŠriences humaines, visant l’Êpanouissement des jeunes et le dĂŠveloppement de leur sens des responsabilitĂŠs. Les expĂŠriences associatives sont valorisĂŠes. Ce sont des activitĂŠs très importantes pour prĂŠparer Ă la vie en entreprise, et potentiellement discriminantes pour les recruteurs. Ces activitĂŠs (par exemple L ANIMATION DU "$% SONT CHEZ NOUS MISES AU C“UR DE LA FORMATION Et le droit Ă l’Êchec y est admis. Les stages ont aussi une place importante. Pendant le cycle prĂŠparatoire, nous incitons Ă des jobs d’ÊtĂŠ Ă l’Êtranger. En cycle d'ingĂŠnieur, l’expĂŠrience de terrain reprĂŠsente l’Êquivalent d’une annĂŠe, soit le tiers du temps de formation : s DEUX MOIS D IMMERSION EN ENTREPRISE EN DĂ?BUT DE PREMIĂ’RE ANnĂŠe, avec un rapport et une soutenance laissĂŠs Ă l’apprĂŠciation de l’entreprise ; s QUATRE MOIS EN DEUXIĂ’ME ANNĂ?E PERMETTANT SOUVENT ĂŒ L Ă?LĂ’VE DE dĂŠďŹ nir un futur projet Ă dĂŠvelopper Ă l’Êcole ; s SIX MOIS EN TROISIĂ’ME ANNĂ?E Avantage annexe pour l’Êcole : il n’y a, en permanence, que deux promotions du cycle ingĂŠnieur prĂŠsentes Ă l’Êcole, d’oĂš une ĂŠconomie d’espace et un meilleur encadrement de ceux qui sont prĂŠsents.

REE N°5/2016 159


ENSEIGNEMENT & RECHERCHE

Figure 2 : Les ĂŠtudiants disposent d’Êquipements modernes pour les travaux pratiques. Ici un banc de fabrication du laboratoire de productique - Š ECAM-EPMI. REE : Quid du niveau de vos ĂŠlèves, comparĂŠ Ă celui de la filière traditionnelle ? M. D. : Au dĂŠpart, nos ĂŠlèves ont un bon niveau scientiďŹ que (une moyenne de 14/20 au bac scientiďŹ que), mĂŞme s’il est sans doute infĂŠrieur Ă celui des ĂŠlèves se destinant aux plus grandes ĂŠcoles traditionnelles. Mais surtout, dans les prĂŠpas traditionnelles on travaille sous stress en dĂŠveloppant une ÂŤ intelligence ĂŠmotionnelle Âť et en cherchant des solutions rapides ; on apprend Ă apprendre et Ă dĂŠsapprendre. Chez nous on travaille plus en profondeur, en privilĂŠgiant l’expĂŠrience et le travail en ĂŠquipe. Les pĂŠdagogies sont donc diffĂŠrentes et, au ďŹ nal, cela ne donne pas tout Ă fait le mĂŞme type d’ingĂŠnieurs. Chez nous, ce ne sont pas nĂŠcessairement des ingĂŠnieurs de conception, avec un esprit algorithmique pur, mais des cadres de terrain, managers de process et de ressources. Autrefois, il ĂŠtait clairement moins prestigieux de faire une ĂŠcole Ă prĂŠpa intĂŠgrĂŠe. Aujourd’hui on a besoin Ă la fois d’ingĂŠnieurs de calcul et d’ingĂŠnieurs de production. Le marchĂŠ conďŹ rme cela : en France, plus de 60 % des ĂŠcoles forment des ingĂŠnieurs de calcul dans une approche ÂŤ R&D Âť, alors que ce secteur n’absorbe que 15 Ă 17 % des jeunes embauchĂŠs ; a contrario, le secteur de la production reprĂŠsente plus de 15 % des offres d’emplois, alors que 5 Ă 10 % seulement des ĂŠcoles assurent la formation correspondante. ConsĂŠquence : un ingĂŠnieur sortant d’ECAM-EPMI trouve plus facilement un emploi (plus de 85 % de nos ĂŠlèves sont embauchĂŠs avant l’obtention du diplĂ´me). Cela se retrouve dans les classements des ĂŠcoles. REE : Ce constat va-t-il vous conduire Ă accroĂŽtre votre effectif ? M. D. : Jusqu’à ce jour, nous avons limitĂŠ notre effectif pour cause de capacitĂŠ d’accueil de notre campus. Nous avons maintenant un projet de dĂŠveloppement visant Ă tripler notre surface et Ă passer Ă 1 500 ĂŠtudiants (ingĂŠnieurs et bachelors) ; cela passera par une relocalisation de l’Êcole. Il y aura de nouvelles options, Ă dĂŠcider

160 REE N°5/2016

après nous ĂŞtre assurĂŠs du marchĂŠ, Ă court et moyen termes ; c’est dans cet esprit que nous avons rĂŠpondu Ă la demande de VINCI et d’ENGIE concernant une formation par apprentissage dans le domaine du gĂŠnie climatique et ĂŠnergĂŠtique : nous formons des ingĂŠnieurs ÂŤ durables Âť et non pas ÂŤ jetables Âť, dans les domaines de l’Ênergie et, de l’industrie, domaines qui eux-mĂŞmes ĂŠvoluent (Cf. Industrie 4.0). Parfois c’est nous qui allons vers les opĂŠrateurs ; par exemple, c’est nous qui avons proposĂŠ une formation sur les drones transporteurs. REE : On sait que les classements internationaux (Shangai, QS, CWUR, etc.) privilĂŠgient les ĂŠtablissements Ă fort effectif. Etesvous, comme d’autres grandes ĂŠcoles, dans des projets de rapprochement ou de fusion ? M. D. : Les grandes ĂŠcoles françaises, malgrĂŠ la haute qualitĂŠ qui leur est reconnue (l’ingĂŠnieur français est apprĂŠciĂŠ) manquent de visibilitĂŠ Ă l’international : problème de taille, problème de dĂŠnomination du diplĂ´me (ingĂŠnieur, dans nombre de pays, c’est un mĂŠtier, pas un diplĂ´me), problème de langue (nous ne parlons couramment que le français). Plusieurs solutions sont envisageables : s LES FUSIONS OU RAPPROCHEMENTS NOUS Y RĂ?mĂ?CHISSONS IL Y A DES s LES FUSIONS OU RAPPROCHEMENTS NOUS Y RĂ?mĂ?CHISSONS IL Y A DES pistes locales ou nationales, mais il serait prĂŠmaturĂŠ d’en parler ; s LES #/-5% COMMUNAUTĂ?S D UNIVERSITĂ?S ET D Ă?TABLISSEMENTS D Ă?TABLISSEMENTS s LES nous sommes membre fondateur de la COMUE ÂŤ universitĂŠ Paris-Seine Âť, qui regroupe entre autres l’universitĂŠ de CergyPontoise et l’ESSEC, et compte aujourd’hui environ 28 000 ĂŠtudiants et environ 600 doctorants. Notre objectif 2025 est d’atteindre 40 000 ĂŠtudiants et 1 500 doctorants. Nous commencerons Ă exister‌ IL Y A AUSSI UNE FĂ?DĂ?RATION NATIONALE D Ă?COLES CATHOLIQUES &%3)# ss IL Y A AUSSI UNE FĂ?DĂ?RATION NATIONALE D Ă?COLES CATHOLIQUES &%3)#

avec des passerelles possibles, mais celle-ci n’a pas un statut qui lui permette de consolider nos diplômes. Au niveau international, on va plutôt jouer la carte ECAM, dans un rÊseau plus large qui est


PROPOS

LIBRES

Plus de 40 ans depuis le premier choc pétrolier : quelles leçons pour l’avenir ? Philippe Chartier

et évapotranspiration) justifiaient ma mobilisation au titre de la biomasse et m’avaient aussi préparé à com-

Le sens de l’action

Q

prendre certains fondamentaux du monde de l’énergie.

uelles leçons tirer de plus de 40 ans pas-

La dimension mondiale des questions d’alimentation et

sés dans le champ de l’énergie, entre le

de besoins en eau associés, le tout en liaison avec la

premier choc pétrolier des années 1973-

démographie et le développement, très présente dans

74 et la transition énergétique qui a enfin

mon activité passée, m’a conduit d’entrée à appréhen-

vraiment démarré ?

der sous cet angle les questions énergétiques. Le sens

Cet exercice revêt un intérêt tout particulier à l’heure

de l’action que j’ai développée depuis plus de 40 ans

où la Conférence Mondiale de l’Energie qui vient de se

repose sur une idée simple : si 10 milliards d’habitants

tenir à Istanbul a mis en exergue un aspect tout à fait

devaient accéder au développement au cours du XXIe

nouveau pour elle : l’avenir ne se dessine plus autour

siècle, cela pourrait nécessiter des ressources annuelles

d’un pic de production pétrolier appelant des alterna-

limitées à une vingtaine de milliards de tonnes d’équi-

tives en termes de production mais autour d’un plafond

valent pétrole si un effort suffisant de maîtrise de la

à venir de la demande mondiale fixé à environ deux tep

demande était mené à bien. Il importait donc de le

par habitant et par an. C’est reconnaître l’existence d’un

promouvoir dès que possible. L’analyse en compréhen-

point de convergence de la consommation par tête à

sion de la consommation finale et l’inévitable progrès

l’échelle de la planète en venant de plus haut pour les

technologique à ce niveau devaient rendre crédible

pays développés et de plus bas pour les pays émer-

une telle perspective. Le balancier entre les tensions

gents. Le facteur 2 de diminution de la consommation

sur les ressources et les tensions sur les rejets dans le

finale d’énergie en France d’ici 2050, inscrit dans la

champ de l’énergie n’a fait en outre que renforcer le

loi relative à la transition énergétique pour la croissance

bien-fondé de cette priorité à la maîtrise de la demande.

verte, traduit ce constat. Les fortes réticences exprimées

La contribution des énergies renouvelables, en général

par les producteurs d’énergie à cette occasion montrent

moins agressives côté rejets, bien réparties en terme

que ce changement de paradigme n’est pas encore

de ressources et ayant à couvrir une demande raison-

largement partagé. La COP 21, le gaz de schiste nord-

nablement limitée allait devenir par ailleurs de plus en

américain et l’amélioration constante des performances

plus attrayante. Les débats sur l’avenir énergétique de la

au niveau de l’utilisation finale de l’énergie sont passés

France et sur le rôle de la recherche en 1981 allaient

par là. L’énergie passe et repasse depuis 40 ans d’une

permettre de mettre en place un outil de promotion de

tension sur les ressources à une tension sur les rejets

cette orientation, l’AFME, qui s’est élargie au début des

(changement climatique, accidents nucléaires).

années 90 aux thèmes de l’environnement en devenant

Mon entrée dans le champ de l’énergie date du

l’ADEME. Le fait d’avoir confié à cette dernière la gestion

premier choc pétrolier. A l’époque la tension sur la res-

des investissements d’avenir dans le champ de l’éner-

source pétrolière s’imposait. Le nucléaire, les écono-

gie en 2010 témoigne encore aujourd’hui de la perti-

mies d’énergie, le solaire et plus largement les énergies

nence de cette orientation.

renouvelables étaient appelés à répondre au défi lancé

Ayant ainsi grossièrement cadré le sens de l’action

par l’OPEP. Mes travaux antérieurs au sein de l’INRA

conduite, j’ai choisi dans ces Libres propos de retenir

concernant les échanges de CO2 et d’H2O entre les cou-

de mon expérience dans le domaine de la R & D, trois

verts végétaux et les basses couches de l’atmosphère

aspects liés à la promotion de l’innovation techno-

sous l’influence du rayonnement solaire (photosynthèse

logique dans un cadre plus ou moins régulé par des

164 REE N°5/2016


LIBRES

PROPOS

considérations environnementales, de santé publique

tant plus importante que le nucléaire se situait aussi

ou de sécurité d’approvisionnement.

positivement que ces dernières en matière de pré-

L’angle sous lequel la dynamique de l’innovation a

vention du changement climatique. Le fait de gérer au

été observée est celui que pouvait avoir le directeur

mieux les périodes défavorables au cours desquelles

scientifique d’une agence d’objectif sans laboratoire

les enjeux stratégiques sont facilement effacés est un

propre mais avec une bonne expertise interne. Le tout

aspect important de la dynamique de l’innovation que

complété par une présence soutenue au niveau des

je souhaite aborder en revenant sommairement à titre

programmes de R & D de la Commission européenne

d’exemple sur des pratiques développées au cours de

tout au long des années 80 puis ultérieurement par une

cette période. L’objectif était de maintenir une activi-

activité de conseil auprès d’un syndicat professionnel,

té résiduelle significative tout au long du continuum

le SER, autour du solaire photovoltaïque et de la perfor-

Science – Technologie – Industrie – Marché ou Cité

mance énergétique et carbonée des bâtiments.

autour des filières les plus prometteuses.

Notons d’abord que partant des axes de programma-

L’investissement au niveau des programmes de

tion initiaux, les soutiens apportés aux entreprises et aux

recherche et de démonstration de la Commission eu-

laboratoires publics ont débouché pour certains sur des

ropéenne a permis d’abord de légitimer des attitudes

activités significatives, alors que pour d’autres ils se sont

nettement plus favorables aux orientations retenues

révélés être encore aujourd’hui assez loin du marché.

mais aussi de mobiliser des moyens permettant de faire

La performance énergétique des bâtiments neufs (pro-

vivre les acteurs les plus motivés et de développer leur

gramme H2E 85), celle de la motorisation automobile

compétitivité en les confrontant à leurs homologues

(véhicule 3 litres), l’éolien et le solaire photovoltaïque

dans des séminaires périodiques de contractants. En

relèvent de la première catégorie ; le solaire thermo-

complément, des relations particulières avec le Japon

dynamique (Themis), la production de biocarburants à

(MITI, NEDO) ont été développées et l’intérêt de par-

partir de produits lignocellulosiques (pilote de Soustons)

ticiper aux “Implementing Agreements” de l’interven-

relèvent de la seconde. C’est du vécu de cet ensemble

tion Recherche de l’Agence Internationale de l’énergie

que l’on tirera quelques leçons.

a été promu et ceci avant que la France n’en devienne membre au début des années 90. Bref, sortir concrète-

Assurer la continuité de l’effort face aux variations du prix du pétrole

ment d’un contexte national trop spécifique a été une première réponse.

Une vision glissante du potentiel des différentes fi-

Se transformer en passager clandestin d’autres poli-

lières à moyen terme (capacités de production, capacités

tiques est un autre axe qui a été suivi. Il est vrai que la

de maîtrise de la demande) est un préalable pour définir

transformation de l’AFME en ADEME a offert des oppor-

les actions à entreprendre, la vision au niveau de chaque

tunités de ce point de vue. Ce fut le cas au cours des

filière s’inscrivant bien entendu dans la vision d’ensemble

années 90 du volet « Qualité de l’air » dans le secteur

évoquée plus haut. Le caractère glissant tient compte de

des transports pour lequel la prévention de l’impact des

l’évolution des technologies (impact du numérique, des

pollutions automobiles sur la santé publique faisait appel

matériaux et des procédés de fabrication notamment), de

en grande partie (hors la question du diésel !) à des

l’ouverture de marchés quelque part dans le monde et de

solutions communes avec la maîtrise de la demande

l’émergence, en réponse à cette ouverture, d’un possible

d’énergie (performance des moteurs thermiques, véhi-

et puissant effet de série au niveau de la production.

cules électriques et hybrides, transferts modaux, poli-

Dans cet ensemble, le glissement de la vision ap-

tiques urbaines). D’autres exemples dans la politique

portée par les prix volatiles du pétrole doit être, lui,

des déchets, promue activement au cours de cette

particulièrement tempéré notamment pour ce qui

période, pourraient être cités.

concerne les pouvoirs publics en matière de recherche.

Sans détailler plus avant notons que d’autres pistes

Ce ne fut pas le cas de la France entre 1985 et 2000

ont été explorées pour gérer cette période de basses

où la tentation fut alors grande de baisser fortement

eaux, à savoir :

la garde en matière de maîtrise de la demande et de

s LA PROMOTION DE NICHES D ACTIVITÏ VOIR PLUS LOIN LE PAS-

promotion des énergies renouvelables ; tentation d’au-

sage sur le photovoltaïque) ;

REE N°5/2016 165


PROPOS

LIBRES

s UNE ATTENTION PORTÏE AUX SITUATIONS ET AUX PROPOSITIONS locales périphériques (DOM) ;

Des marchés de niches au marché de masse : le cas du photovoltaïque

s UNE PROMOTION DE LA QUALITÏ DES PRATIQUES DE SOUTIEN

Ce fut le cas du solaire photovoltaïque qui partait au

à l’innovation de l’agence depuis le premier choc pé-

moment des chocs pétroliers avec l’atout d’un très grand

trolier (action conduite par le Centre de Sociologie de

potentiel de marché mais avec des coûts beaucoup trop

l’Innovation de l’Ecole des Mines de Paris) ;

élevés pour pouvoir concurrencer rapidement les filières

s LES INTERVENTIONS ENlN EN FAVEUR DE TRANSPOSITIONS FA-

traditionnelles. Le tout dans un domaine où la dyna-

vorables en droit français des directives européennes

mique de la R & D était portée par des disciplines scien-

concernant la politique de l’environnement et celle de

tifiques particulièrement actives (physique du solide) et

la concurrence.

des produits appelés à occuper de vastes marchés (silicium pour l’électronique, écrans plats). Le solaire photo-

Le rôle central de la régulation

voltaïque occupait déjà une première niche stratégique

Le secteur de l’énergie, tant sous l’angle des res-

au moment des chocs pétroliers : le spatial pour lequel

sources (sécurité d’approvisionnement) que sous celui

la question du coût était secondaire mais par contre la

des rejets (changement climatique, sûreté nucléaire), est

question de la fiabilité essentielle. Cette dernière exi-

particulièrement concerné par les régulations publiques.

gence allait fortement influencer la dynamique qui sui-

Si les normes, prises au sens le plus large, sont parfois

vra : comment réduire les coûts et conserver l’essentiel

excessives et tatillonnes, la promotion des plus justifiées

de cette dernière qualité. Les niches suivantes en effet

d’entre elles est la condition d’une certaine harmonie

l’exigeaient : la fourniture d’électricité pour les relais de

entre le marché et la cité, le consommateur et le citoyen,

télécommunication et le service des phares et balises.

le court et le long terme. Elles s’inscrivent de plus dans

Ensuite ce fut le tour des sites isolés en France (refuges

des accords européens et internationaux que la France

de montagne) et surtout dans les pays en développe-

a signés et qu’il convient de respecter. L’action d’une

ment pour couvrir des besoins décentralisés dans un

agence d’objectif est par nature au cœur du dépasse-

contexte où l’électrification rurale était hors de portée

ment de potentielles contradictions entre le progrès et

(éclairage, irrigation, santé).

les inconvénients du progrès. Mais c’est un autre aspect

La production photovoltaïque raccordée au réseau,

que je voudrais souligner : la mise en place d’exigences

présente en Allemagne dès le début des années 1990,

croissantes de performance si elle est bien rythmée

apparaît en France d’abord dans les DOM puis progres-

(d’abord ambitieuses pour les meilleurs, bien calibrées

sivement en métropole à partir de 2000 avec les tarifs

à la suite pour une application massive), est un puissant

d’achat puis les appels d’offres, avant de connaître un

facteur d’innovations. Il suffit par exemple d’examiner le

niveau d’activité relativement élevé (près de 1 GW

poids des labels et de la réglementation thermique hier,

installé en France durant l’année 2016, 70 GW dans

des labels Energie-Carbone demain dans le secteur de

le monde). Une accélération brutale de la baisse des

l’habitat et du tertiaire pour s’en convaincre

coûts explique ce changement de rythme (de 30 cF/

Dans le domaine des émissions de CO2 et des pol-

kWh en 2006 à 7 cF/kWh en 2016 pour les centrales

luants automobile, là encore le durcissement progressif

au sol). Cette accélération n’est pas due à une rup-

des exigences, plus que la demande des clients, joue un

ture technologique particulière mais à un effet de série

rôle majeur dans l’amélioration des performances et l’évo-

massif introduit par l’industrie chinoise : les cinq pre-

lution vers les solutions hybrides et le véhicule électrique.

miers fournisseurs chinois ont chacun aujourd’hui des

Contrairement aux productions centralisées d’éner-

capacités supérieures à 5 GW par an, alors que le fran-

gie, la plupart des EnR et la presque totalité des actions

çais Photowatt était dans les cinq premiers mondiaux

de maîtrise de la demande ont un caractère modulaire.

encore en 2000 avec quelques dizaines de MW. La

La dynamique des courbes d’apprentissage – du type

cellule photovoltaïque en silicium poly ou monocristal-

coût de l’énergie produite ou économisée versus la taille

lin est en passe de devenir une commodité avec ses

du marché – se prête bien de ce fait à une stratégie de

attributs : l’essentiel de la valeur ajoutée des installa-

colonisation de niches successives avant d’atteindre la

tions se déplace vers l’aval surtout si l’on s’intéresse

compétitivité sur des marchés de masse.

aux bâtiments, la capacité de concurrencer ce type de

166 REE N°5/2016


PROPOS

LIBRES

fournisseurs est à la fois importante et très difficile (forte

rable », aujourd’hui dans les pays émergents et demain

standardisation du produit, faible valeur ajoutée pour un

dans les autres, est une opportunité pour des offres

fournisseur). Quelle leçon tirer de cette histoire pour la

de services sophistiqués pour lesquels l’Europe a plus

suite de l’action ?

de chances de garder la main. Pour l’amont, l’établis-

D’abord un constat : si la politique suivie n’a pas

sement d’un rapport de force avec les fournisseurs de

abouti à ce que l’Europe prenne la main sur l’amont

commodités repose sur un effort de R & D de nature à

de la filière, il reste que l’effort conduit, en France et

remettre en cause le caractère standard du produit. Un

en Allemagne notamment, avec l’appui de la Commis-

progrès significatif portant sur le rendement des cel-

sion européenne, fait que ces deux pays restent pré-

lules avec la réduction de surface qui en découle pour

sents sur l’ensemble du continuum

conserver la même production est

Science – Technologie – Industrie

Philippe Chartierr est ingénieur

à cet égard une piste à explorer. Là

– Marché et ceci pour tous les mail-

agronome et docteur ès sciences

encore un enchaînement de niches

lons de la chaîne de production.

physiques. Chercheur à l’Institut

pour

Pour l’aval, l’essentiel dorénavant

national de la recherche agronomique,

aurait un caractère critique pourrait

est l’intégration des installations photovoltaïques dans des quartiers à énergie positive avec toutes les innovations qu’imposera le numé-

il devient en 1982 directeur scientifique de l’AFME puis de l’ADEME. En 1999, il rejoint le Syndicat des énergies renouvelables comme conseiller BâtimentEnergie-Carbone. De 1985 à 1988, il a

lesquelles

l’encombrement

être alors recherché.

En conclusion Les innovations souvent proli-

rique, les stockages d’électricité, les

par ailleurs présidé le comité de gess

fèrent à la périphérie des systèmes et

contraintes des réseaux et les impé-

tion du programme de R&D « Energies

quelques-unes ont vocation à migrer

ratifs architecturaux (formes et cou-

non nucléaires » de la Commission

vers le centre. Entretenir la diversité

leurs). Cet aspect est d’autant plus

européenne.

périphérique est un puissant moyen

important qu’une urbanisation « du-

Philippe Chartier est officier de

de préparer l’avenir.

l’ordre de la Légion d’honneur.

REE N°5/2016 167


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CÉRÉMONIE DES GRANDS PRIX SEE 2016

L

e Président Prés de la SEE, Franç François Gerin, ett Fra François Le Chevalier, nouveau Président du Comité Pré té des Distinctio Distinctions et dess Grad Grades ont animé la cérémonie des Grands Prix SEE en cette soirée ddu 5 décembre décembr 2016. Les lauréats des

Prix ont o été invités à présenter leurs travaux et ce c fut l’occasion comme chaque année de sse retrouver entre adhérents et ssympathisan thisants dee l’association l’associat pour des échanges amicaux autant que professionnels. am s Les grades de Senior et d’Emérite mé ont été attribués attribuéés par François Fran Gerin et François Françoois GERI E N

Françoois LE CHEVALIER IER

L C Le Chevalier

L E S L A U R É AT S 2 016 LE GRADE SENIOR Le grrade d dde Senior est conféré par la l SEE en reconnaissance de d plus l de d 10 ans de d travaux et publications public bl ionss ma marquant uants dans d les lle domaines dom es de l’électricité, l’électtricité, dee l’électron l’électronique ue et des technologies technolo es de l’information et de la communication. mmunication. Les lau laur lauréats uréats 2016 sont :

Walter ARN W NA N AUD (DGA GA A)

Séba bastien en DENNETIERE (R RTE)

Monique LEE STUM Moni (RTE TE)

Cyrille ENDERLI (THALES Systèmes)

LLudovic LUPINSKI (THALES)

Alain FILIPOWICZ PO CZ (Continental Digital igital Se Services) es)

Pascal PAGANI (Mines - Télécom m)

Azed ddine dd dine GATI GAT (Ora Orange Oran nge Labs) Lab

Laure rent SAV VY (ON NERA) A)

LE GRADE D'EMERITE

Le grade d’Emérite est la plus haute distinction distinct conférée nférée par pa la SEE. L’Eméritat éritat est décerné à certa certai certains ains membres memb ayant ant obtenu la distinction de membre Sénior et dont l’œ l’œuvre, less créations et les travaux ont été remarqués dans less milieux concernés c cernés par les domaines d’activité té de la SEE SEE. En 2016, ce grade a été décerné à :

Yves BLANCHARD Yv HARD (ONERA, THALES et historien du Radar) « Pour ses contributions ns au ddéveloppement de nouveaux systèmes mes radar, et ses apports à la l recherche historique sur les origines et l’évolution ’é l ti de d la détection électromagnétique »

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SEE EN DIRECT

LE PRIX THÉVENIN Lee Prix Thévenin, créé en 2005 pour récompenser un président de Club techn technique ue ou dee Groupe Gr régional en fin de mandat, distingue ngue aujourd’hui aujourd’hu plus largeme largement les services méritoires rendus à laa SEE.

Jacques PALICOTT (CentraleSupelec, (CentraleSSupel Cognitive nitive Radio) Ra « Pour ses contributions butio décisives aaux ux nouveaux concep concepts de radiocommunications, nication en particulier rticu ticulier dans le domaine doma de la radio logicielle le »

Le prix 2016 a été décerné éc conjointemen conjointement nt à A André GROMIER ROMIER (General Electric Energyy Transmission Tran & Distribution) strib ) eet Patricck LECLERC (RTE) « pour leurs actio actions dynamiques miqu et réussies à la Présidence de la Région on Rhône-Bourg Rhône-Bourgogne ne ainsi a nsi que pour le Paul aul PENSERINI (RTE) (RT « Pour avoirir fortement contribué aux travaux vaux de rec rechher erche rc et à la mise en e œuvre de nouvelles technologies gies pour lee transport d’élec d’électricité, té, en particulier les câbles

Congrès Matpost » CONFÉRENCE FÉ NCE SPÉCIALE Conférence C fé spéciale é iale l dde YYves ves BLANCHA BLANC BLANCHAR CHARD ((ONERA RA, A

extrudés ex és »

THALES et historien duu Radar) sur s le thème thème : « Innova ovation LA A MEDAILLE AMPÈRE AM

et ruptures technologiques es : quelques es le leçonss d’histoire d’ oire »

La médaille eA Ampère est frap appée ée à l’effigie d’André-Marie Ampère. mpère. Elle réco récompense ompense et honore h ore tout to particulièrement un membre bre de la SE SEE EEE qui a par participé pé aux ggrandes orientations de l’association, on à lleur ur m mise en œuvre uvre et à leur développement, et qui a de surcroît con contribué à la mise een vale valeur et au rayonnement de lla SEE dans ns son s en ensemble.

PRIX CONJOINT OINT SE SEE-IEEE EE BRIL BRILLOUIN-GLAVIEUX I ILLOUIN-GLA IX LÉON NICOLAS LAS BRILLOU LA PRIX BRILLOUIN Le P Prix conjoint njoint SEE-IEEE SEE E-IEEE Brillouin-Glavieux – Prix Léon-Nicolas Brillouin Léon-N Brillouin, cette année paire – est attribué à un scientififique ou à un ingén ingénieur g nieur œuvrant dans les domaines de la Jean-Luc Leray l’a remise à Erich h SPITZ PITZ, membre mem e de l’Aca-démie des Sciences et de l’Académie l’Acadé des Technologies, chnologies, ologies, es, ancien aancie

physiqu que des es matéria matériauxx et des composants optiques, électroniques niq niqu ques et électrotechniques. électro éle ues.

Président du Comité des Grades et Distincti nctions « pour ll’enen

Il est décerné né cette année à Etienne PERRET, T Institut

semble de son apport scientifiquee et organisationnel à notre no

Polytechnique de Grenoble, Laboratoire de Conception et

société »

d’Intégration ntégration des Système Systèmes, Institut Universitaire de France,

172 REE N°5/2016


SEE EN DIRECT

Elle est décernée par le jury à Samson LASAULCE, Directeur ur de Recherche Recherch au CNRS, Laboratoire des Signaux et Systèmes, es, CentraleSupélec, CentraleSupéle « pour l’ensemble de ses travaux sur la théorie orie des jeux eux et leu leur application plicati aux réseaux de communication sans fil » TROPHÉE JEUNES ILE-DE-FRANCE ANDRÉ BLANC-LAPIERRE L Trophée Jeunes Ile-de-France André Blanc-Lapierre Le a été décern erné à Assia BENBIH NBIIHI, Telec ecom SudParis, udParis en stage à Thales Communication mmunication & Sec Security,pour ecurit son pro projet de fin « pour our ses ttravauxx remarquables rem marquables sur l’identification d’un objet dans un environnement en nnem nt inconn inconnu à l’aide d’une étiquette

d’études intitulé : « Conception d’un framework mework pour p la recherche sur données ées chiffrées c »

ou d’unn tag ta sans puce puce » GRAND PRIX DE L'ÉLECTRONIQUE GÉNÉRAL FERRIÉ Grand Prix de l’Électronique Général Ferrié. Cette distinction récompense ré m chaque année un(e) (e) technicien(ne) echnic ayant réalisé ddes travaux contribuant d’une importante ma manière aux progrès de la radioélectri tricité, de l’électronique et de ses aapplications. Elle est décernée à Lilia lian Bossuet os Laboratoire Hubert Curien, Cu n, UMR CNRS 5516, Telecom Saint-Etienne, aint-Etienn Université Jean Mon-

Mme Benbihi étant en mission mis à l’étranger, er, c’est son so maîtr aître de stage qui l’a représent ntée.

net, pour ses travaux sur « la lutte contre laa contrefaçon ont de composants électron oniques ues » MÉDAILLE ANDRÉ BLONDEL L Médaille André Blondel réc La écompense m des d scienti i ti-

Le Prix National André Blanc-Lapierre a été attribué à Guillaume PELLECUER R, Faculté F culté des science sciences es de Montpellie Montpellier, en stage à Institut d’Electronique ctron ue et des systèmes systè tèèmes de Montp Montpellier, pour son projet de fin d’études d’é s intituléé « M Mesure esure de durée de vie de modules de puissance à IGBT »

fique ques universitaires res ou industriels, ustriels, français fran ais ou étrangers, pour des travaux remarquables quab contribuant aux a x progrès pro de la science ett des industries électriques électriques et électroniques. électr iques.

Ces prix ont été remis mis pa par Jean-Marie Colin et François Le Chevalier, présidents du jury, j et François Gerin.

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SEE EN DIRECT

Aprèès la traditionnelle ditionnelle photo to de groupe upe rassemblant tous les acteeurs de laa soirée, le cocktail cockta de clôture termina dans la bonne hhumeur cette céré cérémonie émonie dans les salo salons de l’Espace Hamelinn.

174 REE N°5/2016


Entre science et vie sociĂŠtale,

les ĂŠlĂŠments du futur Une publication de la Edition/Administration : SEE - 17, rue de l’Amiral Hamelin - 75783 Paris cedex 16 TĂŠl. : 01 5690 3709/17 Site Web : www.see.asso.fr Directeur de la publication : François Gerin

La SEE, sociĂŠtĂŠ savante française fondĂŠe en 1883, forte de 2 000 membres, couvre les secteurs de l’ÉlectricitĂŠ, de l’Électronique et des Technologies de l’Information et de la Communication. Elle a pour vocation de favoriser et de promouvoir le progrès dans les domaines : Énergie, TĂŠlĂŠcom, Signal, Composants, Automatique, Informatique.

ComitĂŠ de rĂŠdaction ction tion : Bernard Ayrault Ayrault, Alain Brenac, Brenac Patrice Collet, AndrrĂŠ Deschamps, Jean-Pierre Hauet, Jacques Horvilleurr,, Marc Leconte, Bruno Meyer

La SEE fĂŠdère un vaste rĂŠseau rĂŠsea a d’experts universitaires et industriels en n faveur des

Vous voulez... Vous abonner Ă la REEs 6 ? CLUBS TECHNIQUES Partenariats Presssse & Annonces : Automatique, Informatique et Systèmes Mellyha Bahous - TTĂŠl. Acheter : 01 5690 3711 un numĂŠro ? Cliquer ICId’Information et de Coommunication IngĂŠnierie des Systèmes CybersĂŠcuritĂŠ et RĂŠseaux intelligents RĂŠgie publicitairre : FFE - Cyril Monod TĂŠl. : 01 5336 3787 Ou bien ettĂŠlĂŠphoner au 01 56et Systèmes 90 RadioĂŠlectriques 37 04 Radar, Sonar Port. : 06 7969 689992 cyril.monod@revue-ree.fr Lionel Bennegent SecrĂŠtariat de rĂŠĂŠd daction : Alain Brenac, AurĂŠlie Bazot-Courtoisier TĂŠl. : 01 5690 37177

TĂŠl. : 01 4357 9221 Port. : 06 7110 6305 lionel.bennegent@revue-ree.fr Promotion et abooonnements : 5 numĂŠros : mars, mai, juillet, ooctobre, dĂŠcembre. AurĂŠlie Bazot-Courtoisier rtoisier toisier - TĂŠl. TĂŠl : 01 5690 3717 - www www.see.asso.fr/ree see asso fr/ree Prix de l’abonnement 2016 : France & UE : 120 F - Etranger (hors UE) : 140 F Tarif spĂŠcial adhĂŠrent SEE : France & UE : 60 F - Etranger : 70 F Vente au numĂŠro : France & UE : 28 F - Etranger : 30 F Conception & rĂŠalisation graphique JC. Malaterre - TĂŠl. : 09 8326 0343 Impression : Jouve - 53100 Mayenne. Siège social : 11 Bd de SĂŠbastopol - 75027 Paris cedex 1 TĂŠl. : 01 4476 5440

Stockage et nouveaux Moyens de Production Systèmes Electriques

s 12 GROUPES RÉGIONAUX s 1 CERCLE DES ENTREPRISES

La SEE contribue Ă l’organisation et ses Groupes rĂŠgionaux s ConfĂŠrences nationales et internationales s JournĂŠes d’Êtudes thĂŠmatiques s ConfĂŠrences-DĂŠbat s Congrès internationaux, en partenariat ou non, avec d’autres sociĂŠtĂŠs scientiďŹ ques

CPPAP : 1017 G 82069 Copyright : Toute reproduction ou reprĂŠsentation intĂŠgrale ou partielle, par quelque procĂŠdĂŠ que ce soit, des prĂŠsentes pages publiĂŠes faite sans l’autorisation de l’Êditeur, est illicite et constitue une contrefaçon. Toutefois les copies peuvent ĂŞtre utilisĂŠes après autorisation obtenue auprès du CFC - 20 rue des Grands Augustins, 75006 Paris (TĂŠl. : 01 4404 4770) auquel la SEE a donnĂŠ mandat pour la reprĂŠsenter auprès des utilisateurs (loi du 11 mars 1957, art. 40 & 41 et Code PĂŠnal art. 425). La revue REE est lue par plus de 10 000 ingĂŠnieurs et cadres de l’industrie, dirigeants d’entreprises, directeurs des ressources humaines, formateurs... ProďŹ tez de ce lectorat ciblĂŠ et de qualitĂŠ pour publier vos annonces. RĂŠpertoire des annonceurs Abonnement REE ............................................................................... C2 SES Europe ........................................................................................ p. 3 IFTEC ............................................................................................... p. 14 URSI ................................................................................................ p. 89 AdhĂŠsion SEE ........................................................................ p. 153-154 MICROWA WAVE & RF ............................................................................. C3 GENERAL CABLE ............................................................................... C4 Prochains Grands Dossiers Dossier 1 : Le grand carĂŠnage Dossier 2 : Les grandes liaisons ĂŠlectriques Impression : Jouve - 53100 Mayenne

176 REE N°5/2016

DĂŠpĂ´t lĂŠgal : dĂŠcembre 2016

La SEE favorise le partage du savoir, et contribue aux dĂŠbats sur des problèmes de sociĂŠtĂŠ en ĂŠditant des revues s Revue de l’ÉlectricitĂŠ et de l’Électronique (REE) s Revue 3EI s Publications ĂŠlectroniques : SEE ActualitĂŠs

La SEE rÊcompense les contributeurs Êminents au progrès des sciences et technologies dans ses domaines s EmÊrite SEE s Prix : Brillouin-Glavieux, GÊnÊral FerriÊ, AndrÊ Blanc-Lapierre, ThÊvenin s MÊdailles : Ampère, Blondel

SOCIÉTÉ DE L’ÉLECTRICITÉ, DE L’ÉLECTRONIQUE ET DES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION 17, rue de l’Amiral Hamelin - 75783 Paris cedex 16 TÊl. : 01 56 90 37 09/17 - www.see.asso.fr


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