Endodontie
L’Hypnose Médicale en Odontologie Bernard DELZANGLES Doctorat d’université MCU-PH Université Paris Diderot Paris 7 Responsable de la Formation Continue Post universitaire Hypnose Médicale et Odontologie Université Paris Diderot Paris 7
L’exercice au quotidien de la chirurgie dentaire est génératrice de stress, aussi bien pour le praticien que pour le patient. Le praticien doit faire face aux contraintes socio-économiques et à la complexité variable, mais très souvent présente des actes opératoires. De son côté, le patient ne vient jamais consulter, « le sourire aux lèvres».Du stress à la phobie, il est fréquent de rencontrer des situations plus ou moins conflictuelles dont la gestion demande un investissement certain de la part du praticien. Et enfin n’oublions pas une habituée de nos consultations, à savoir madame la Douleur. Pour toutes ces raisons, le praticien, le patient, sans oublier l’assistante doivent s’armer au mieux afin de faire face avec efficacité. L’hypnose et plus exactement l’hypnose médicale peut s’avérer être d’une aide précieuse à tous les acteurs de l’intervention odontologique. L’hypnose au cours des temps a été plus ou moins malmenée ; tantôt magie, tantôt croyances, allant jusqu’au mystique pour évoluer aujourd’hui vers une approche médicale, plus humaine, plus communicative ; elle a ainsi toujours été présente au cours des civilisations. Aujourd’hui l’hypnose, que nous appelons donc hypnose médicale puisqu’elle se veut thérapeutique, fait partie intégrante de l’arsenal médical. Elle est de plus en plus présente en milieu hospitalier en particulier dans les centres antidouleurs.
Etat hypnotique à l’école : l’enfant rêveur – l’enfant attentif ..….
En Odontologie, l’hypnose médicale vient en aide à la fois au pra-
………Lequel est lequel ?
ticien et au patient, facilitant ainsi la relation praticien-patient. L’hypnose peut être considérée comme un état naturel, que chacun
L’état hypnotique est induit par des suggestions variées, plus ou
d’entre nous peut ressentir plusieurs fois par jour. Etat naturel qui
moins élaborées et ce, afin de nous dissocier de nos émotions, de
équivaut à un état de conscience modifiée, à des instants d’ab-
notre esprit cartésien, de notre sensibilité habituelle. L’objectif étant
sence, d’éloignement par rapport aux aléas quotidiens. Quand
de permettre une gestion efficace de situations anxiogènes, en l’oc-
nous sommes absorbés dans la lecture d’un livre passionnant, cap-
currence une intervention odontologique associée à un contexte
tivés par un film palpitant, concentrés au volant ou dans une acti-
douloureux. Nous évoluons dans la vie quotidienne en mettant à
vité sportive et la liste n’est pas exhaustive, nous pouvons considé-
profit nos cinq sens : l’odorat-le goût- l’audition- le toucher- la
rer être dans un certain état hypnotique.
vision. Ces cinq sens nous ouvrent toutes les portes des émotions
Cet état hypnotique peut être plus ou moins intense et aller jusqu’au
qui peuvent être agréables mais parfois aussi désagréables voire
stade de la transe profonde, état pendant lequel le sujet est dispo-
source de séquelles psychologiques, souvent à l’origine d’angoisse,
nible pour recevoir et intégrer diverses propositions du thérapeute.
de peur et de phobies lourdes de conséquences.
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La pratique de l’hypnose aide à contrôler ces émotions, apprend à (...)
gérer positivement en laissant de côté les « pourquoi » et les « com-
Proposer l’hypnose médicale aux patients, ne présente pas de
ment »et ce, en ne se laissant pas diriger par ses émotions. Il ne
contre- indications ; un bénéfice se fait toujours ressentir à un
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s’agit pas de les supprimer mais de les dompter en douceur.
moment ou à un autre : il faut savoir laisser venir, laisser du temps au temps.
Toutes les techniques d’absorption, comme visualiser un point fixe, saisir des bruits environnants, des odeurs, redéguster le souvenir
L’expérience du praticien est indispensable afin de pouvoir s’adap-
d’un goût apprécié, jouer avec le toucher, sont des moyens très effi-
ter aux diverses situations cliniques (patient anxieux, stressé, pho-
caces pour cheminer vers l’état hypnotique.
bique, nauséeux, acte thérapeutique complexe....), l’objectif étant de transmettre l’état hypnotique au patient afin qu’il puisse à son tour pratiquer l’auto- hypnose et peut être aller vers la «façon de vivre».
M. H. Erikson en « action » - attentif – Concentré – réceptif …. Il accompagne …. …….La patiente découvre ses ressources … Au fauteuil, quelques instants de « voyage » avant l’intervention
Tout le paradoxe est là ; nous utilisons nos sens pour mieux les oublier, un peu comme le samouraï qui utilise la force de son adverPour la plupart des situations cliniques, le travail sur le souvenir
saire pour mieux le maîtriser….
agréable rend de réels services, tout en étant aisément accessible
L’état hypnotique, la transe hypnotique, ne s’obtiennent pas sur com-
aussi bien au patient qu’au praticien.
mande, il faut savoir attendre, laisser venir : le ressenti viendra
Sous des apparences de simplicité, l’hypnose médicale et en parti-
quand il viendra, quand les conditions seront favorables.
culier l’auto-hypnose demandent beaucoup de travail ; la théorie et
Nous avons tous, à notre disposition, un élément de vie inestimable,
la pratique sont intimement liées.
habituel, conscient et inconscient, à savoir la respiration. Elle est omniprésente dans le travail hypnotique, en particulier afin de facili-
« Déplacer la douleur » est facile à dire mais pas toujours facile à
ter le phénomène de dissociation très utile dans la gestion de la dou-
faire. Il faut apprendre, se former, s’entraîner, pratiquer et s’entraî-
leur. La respiration peut être bénéfiquement associée aux techniques
ner encore..............
d’absorption utilisant les cinq sens.
L ECTURES
La botte à outils hypnotiques est donc bien remplie et chacun peut y trouver les moyens de progresser efficacement.
CONSEILLÉES
JM. BENHAIEM : L’hypnose médicale – Editions Med-Line 2003
Bien évidemment, l’hypnose médicale ne remplace pas l’acte théra-
F. ROUSTANG : Qu’est- ce que l’hypnose- Editions de Minuit -
peutique, elle l’accompagne et assure un comportement bénéfique
2003
pour le patient en pré, per et post- opératoire.
G. SALEM- E.BONVIN : Soigner par l’hypnose- Editions Masson
Le praticien qui désire associer l’hypnose médicale à son exercice
2007
quotidien doit bien évidemment pratiquer lui même, en l’occurrence en travaillant et en s’étant formé sérieusement à cette discipline. La pratique régulière de l’auto-hypnose peut devenir , si affinité, une «façon de vivre».
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