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Imagerie Cone Beam Computed Tomography (CBCT) Vers une autonomie complète de l’imagerie odonto-stomatologique ? Auteurs : Benjamin SALMON, AHU, Département de Médecine Buccale Chirurgie Buccale, Université Paris Descartes Dominique LEDENMAT, Laboratoire de Radiologie Imagerie et Biophysique, Université Paris Descartes

Résumé De nombreux fabricants proposent aujourd’hui une imagerie « 3D » dédiée à la sphère odonto-stomatologique. Ces dispositifs font appel à la technologie « Cone Beam Computed Tomography » (CBCT) alias « tomographie volumique » et répondent aux besoins d’une imagerie de coupes vestibulo-linguales ou vestibulo-palatines dans de petits volumes. D’un encombrement proche de celui d’un appareil panoramique classique et implantables au sein même des cabinets libéraux, les dispositifs de dernière génération se révèlent être, pour des indications justifiées, des alternatives intéressantes, efficaces et fiables à la tomodensitométrie (scanner à rayons X). La plupart des appareils panoramiques proposeront à court

effectuent, selon un axe fixe, une seule rotation complète,

terme une fonction « 3D » à champs réduit assurant une

simultanée et couplée autour de la tête du patient. Pour

exploration radiologique limitée des arcades dentaires. Cette

chaque angle de cette rotation, le détecteur enregistre l’ at-

généralisation risque néanmoins de conduire à une multiplica-

ténuation du rayonnement X sous la forme d’ une matrice

tion des expositions à but diagnostique, catalysée par une

selon une image comparable à celle d’ une radioscopie

argumentation commerciale prônant la substitution à

numérisée. Le traitement informatique par des algorithmes de

d’ autres radiographies intra-orales et de l’ appareil « tout en un »... La CBCT doit demeurer un examen de seconde intention qui ne remplacera pas l’ incidence rétro-alvéolaire mieux résolue et moins « invasive ». Si la dosimétrie des appareils CBCT semble, d’ après les premières données de

reconstruction des données brutes numériques permettra des

la littérature, plus avantageuse par rapport au scanner à

reconstructions d’ images dans tous les plans de l’ espace.

rayon X, la prescription de cet examen doit être justifiée comme toute imagerie faisant appel aux rayonnements ioni-

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sants. Cette graduation des outils radiologiques en fonction

DIFFÉRENTS DISPOSITIFS

:

Plusieurs catégories de dispositifs se distinguent en fonction

des informations attendues doit être respectée et l’ exploration tridimensionnelle ne doit pas être banalisée.

de la tension du tube radiogène (supérieure ou inférieure à

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éditées par l’ ASN (classe E4 ou E5 pour le CBCT). Les

PRINCIPES D ’ ACQUISITION

100 kV), ce qui conditionne les modalités d’ implantation

(F IG 1):

appareils se présentent sous la forme d’ un « mini scanner »,

Les appareils CBCT réalisent l’ acquisition radiologique

le patient étant installé en décubitus dorsal (NewTom 3G®,

d’ un volume plus ou moins restreint et selon un concept dif-

QR, skyview®, Myray Dental Imaging), ou d’ un appareil de

férent de la tomodensitométrie (TDM). Un faisceau conique

type panoramique (3D Accuitomo®, Morita ; i-CAT®,

de rayons X pulsé et un détecteur bidimensionnel opposé

Imaging Sciences ; Galileos®, Sirona ; ProMax 3D®,

(intensificateur couplé à une caméra CCD ou capteur plan)

Planmeca, 9000 3D®; Kodak, Pro3D®; Vatech/E-woo, …) moins volumineux. Les détecteurs utilisent un amplificateur de brillance ou plus généralement un capteur plan. Les champs d’ acquisition sont variables : 4x4, 6x6, 8x8 mm (petits champs), 15x15 mm (grands champs) et conditionnent les volumes explorés. Les dispositifs grands champs seront plus adaptés à l’ orthodontie, à la traumatologie ou à la pathologie tumorale bénigne, tandis que les appareils petits champs, moins chers et parfois mieux résolus, sont suffisants pour la chirurgie buccale et l’ implantologie sectorielle. Certaines machines offrent la double modularité panoramique et tomographie volumique, combinaison qui semble devenir la norme. Le temps de reconstruction des images, en constante amélioration, est de l’ ordre de quelques minutes. Les softs

Figure 1 : Principes d’acquisitions CBCT et TDM

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de visualisation adoptent des présentations de coupes simi-

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(...)


implantologie

laires au Dentascan® et s’ enrichissent de fonctions de

tionnelles en implantologie et réservent la tomodensitométrie

mesures, de planifications implantaires ou de rendus 3D tou-

aux édentements complets maxillaires et mandibulaires, une

jours plus flatteurs.

imagerie de coupe reste souhaitable lorsque les risques de lésion irréversible ou de complication majeure existent (sec-

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PRINCIPALES INDICATIONS

:

teurs postérieurs mandibulaires et sous sinusiens, détermina-

Ces techniques 3D ne remplacent pas les techniques intra

tion de l’ épaisseur des greffons cortico-spongieux en cas de

orales conventionnelles en projections coniques (rétro-alvéo-

prélèvement mandibulaire postérieur, obstacles anato-

laires, rétro-coronaires, mordus occlusaux) mais trouvent

miques). Cependant, prescrire un examen pour conforter le

aujourd’ hui simplement de nouvelles applications. De nom-

geste chirurgical sans apporter d’ éléments complémentaires

breuses indications justifient une imagerie de coupe

est injustifié. Selon certains auteurs, une radiographie pano-

moderne, performante, de qualité et optimisée en termes de

ramique assure une évaluation verticale suffisante en implan-

doses délivrées aux patients :

tologie à condition de respecter une marge de 2 mm par rapport au nerf dentaire inférieur. Néanmoins, rappelons que le

E N IMPLANTOLOGIE (F IG 2,3,4 I CONOGRAPHIES R. CAVEZIAN ET G. PASQUET):

principe même de l’ orthopantomogramme implique un coef-

L’ évaluation pré-implantaire qualitative et quantitative des

Figure 5 : Agrandissement de radiographie panoramique montrant la proximité de la racine mésiale de 48 enclavée avec le canal mandibulaire (cliché R. CAVEZIAN et G. PASQUET)

ficient d’ agrandissement variable dans l’ espace (vertical

volumes osseux disponibles, la visualisation des rapports anatomiques et des axes implantaires matérialisés par un guide radiologique, nécessitent une imagerie vestibulo-linguale à l’ échelle 1 pour des mesures directes ou la superposition des calques de répliques implantaires. Si les recommandations

de

l’ EAO

(European

Academy

of

Osseointegration) modulent les indications d’ imageries sec-

Figure 2 : Panoramique pré-implantaire avec guide d’imagerie (secteur 1 et 3).

Figure 3 : Coupes CBCT vestibulo-palatines maxillaires avec mesures du volume osseux sous sinusien (même patient) Figure 6 : Planche de reconstructions CBCT avec coupe axiale de référence indexée, reconstructions curvilignes panoramiques et coupes vestibulo-linguales permettant l’analyse des rapports anatomiques et de la morphologie apicale. Noter le surlignage du canal mandibulaire réalisé par le radiologue (R. CAVEZIAN et G. PASQUET)

et horizontal) lié au profil de coupe, à la morphologie du Figure 7 : 48 extraites après séparation corono-radiculaire en tenant compte des données anatomiques (même patient)

Figure 4 : Reconstructions CBCT vestibulo-linguales mandibulaires en site 36 (même patient)

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patient et exclut toute mesure linéaire de précision millimé-

(...)


Figure 8 : Panoramique objectivant 13 retenue (cliché R. CAVEZIAN et G. PASQUET)

EN

trique. En outre, un mauvais positionnement du patient

CHIRURGIE BUCCALE

(F IG 5,6,7):

entraî ne une distorsion de l’ image non négligeable contrairement aux acquisitions volumiques réalisées par CBCT ou TDM.

Figure 9 : Coupes axiales positionnant 13 dans la dimension vestibulo-palatine (cliché R. CAVEZIAN et G. PASQUET) Figure 12 : Dépassement d’obturation canalaire dans les tissus mous en regard du vestibule d’une prémolaire maxillaire

Figure 13 : Pièce opératoire d’éxérèse

Figure 10 : Reconstructions vestibulo-palatines permettant l’analyse anatomique de 13 et les rapports avec 12 et la cloison sinuso-nasale (cliché R. CAVEZIAN et G. PASQUET)

Etude des rapports anatomiques entre nerf alvéolaire inférieur et dents de sagesse mandibulaires, désinclusions orthochirurgicales de dents retenues (Fig 8,9,10,11), pathologies tumorales et kystiques…

-E N

PA R O D O N T O L O G I E E T E N E N D O D O N T I E

(F I G 12,13)

afin de s’ affranchir des superpositions et lorsque l’ analyse individuelle des racines est nécessaire.

-E N

ORTHODONTIE : les CBCT grands champs reconstruisent des profils en occlusion permettant des tracés céphalométriques fiables.

Figure 11 : Désinclusion ortho-chirurgicale avec abord vestibulaire (même patient)

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-Recherches de FOYERS INFECTIEUX en cas de doute sur les

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(...)


incidences conventionnelles et demandées en fonction de terrains pathologiques à risque (prévention de l’ endocardite infectieuse…).

tions pédiatriques (dents incluses et orthodontie). Exprimé en mGy.cm et calculé à partir du Computed Tomographic Dose Index volumique (CTDIvol), le produit dose-longueur (PDL), affiché par le scanographe à rayon X,

-Etude des ATM ,…

donne directement accès à la dose efficace de l’ examen L’ imagerie n’ est plus aujourd’ hui seulement un outil d’ exploration anatomique, mais fournit les informations radiologiques indispensables aux thérapeutiques assistées par ordinateur et aux voies de recherches travaillant à partir de données scannées :

-P LANIFICATION

tomodensitométrique en le multipliant par le coefficient E PDL de la région explorée (0,0021 pour les maxillaires). Moins clairement définie en CBCT, la dosimétrie serait déterminée à partir du produit dose-surface. L’ exposition des patients en termes de dose efficace apparaî t être d’ un

DES TRAITEMENTS IMPLANTAIRES et transfert

du plan de traitement chirurgico-prothétique en bouche par guide de forage ou navigation chirurgicale. -Orthodontie et logiciels D ’ ÉTUDES CÉPHALOMÉTRIQUES TRIDI MENSIONNELLES .

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ASPECTS DOSIMÉTRIQUES

Les directives européennes Euratom 96/29 et 97/43 transposées dans le droit français, introduisent les principes de justification et de limitation correspondant à l’ obtention de l’ information avec le minimum de dose (principe ALARA : As low as reasonably achievable). Toutefois, rappelons que le radiodiagnostic utilise des rayonnements ionisants de faibles énergies et travaille à des niveaux de doses largement en dessous du seuil où des effets cancérigènes ont pu être rapportés (100 mSv). Les courbes « effet-dose » supposées ont en effet été extrapolées à partir de données statistiques (incomplètes) issues d’ expositions à de fortes doses lors d’ accidents nucléaires ou des bombardements de Hiroshima tiques à faibles doses font encore débat en fonction des

Figures 14 et 15 (même patient) : Image radio-claire en regard de l’apex d’une dent de sagesse mandibulaire asymptomatique présentée à un niveau de coupe similaire sur une acquisition CBCT (Kodak 9000 3D“ fig 14) et tomodensitométrique (Siemens Somatom 16“ fig15)

capacités de réparation cellulaire…Retenons que le principe

ordre de grandeur plus fort que celle délivrée par un panora-

de précaution prime, mais que la dose efficace, qui tient

mique numérique en conditions optimales. Une collimation

compte de la radiosensibilité des tissus irradiés et permet la

adéquate doit limiter l’ exposition des organes radiosen-

et Nagasaki. Les probabilités de survenue d’ effets stochas-

sibles, notamment l’ œ il (risque de cataracte) et surtout la thyroï de chez l’ enfant. Le champ d’ acquisition en CBCT doit donc être strictement ajusté à la région d’ intérêt. Mais, la technique à faisceau conique est, par principe, beaucoup

comparaison des procédures d’ imagerie, devrait systémati-

moins collimatée que la TDM …

quement être rapportée à l’ exposition naturelle qui est en moyenne de 6,5 mSv par jour en France (2,4 mSv par an).

TDM

Une très belle qualité d’ image est malheureusement obte-

VERSUS

CBCT…(F IG 14,15)

Comparativement à la TDM, les images CBCT de dernière

nue au prix d’ une exposition généralement majorée. La

génération présentent une meilleure résolution spatiale pour

dose, la qualité des images et donc la précision des mesures

un contraste satisfaisant au niveau des tissus durs. Les

sont interdépendantes. Un compromis doit être trouvé entre

mesures géométriques s’ avèrent fiables et précises. Les deux

une image suffisamment informative et une dose réduite

modalités d’ imagerie divisent le volume exploré en voxels isométriques inférieurs à 0,5 mm3. L’ irradiation comparative

autant que possible. L’ optimisation des constantes et des

entre TDM et CBCT serait favorable à la tomographie volu-

volumes explorés en scannographie (protocole « low dose »)

mique mais dépend des modes de calculs (coefficients de

ont ainsi permis de réduire la dosimétrie des examens à

pondération tissulaire de la dose efficace), des protocoles

visées odonto-stomatologiques, notamment lors des explora-

d’ expositions appliqués lors des examens (constantes…), et

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30

(...)


des dispositifs. En fait, retenons que l’ examen doit être justi-

doit cependant pas amener à multiplier les examens radiolo-

fié et correctement optimisé.

giques et à systématiser le recours à l’ imagerie CBCT sur des arguments dosimétriques.

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PLUS DE LA

-

-

L ES

CBCT :

Résolution spatiale et qualité de l’ image satisfaisante en odonto-stomatologie Dosimétrie en baisse (a priori) ; intéressante chez l’ enfant Softs et logiciels de reconstruction adaptés à l’ imagerie dentaire (mêmes présentations que la TDM) Exportation des données d’ acquisition vers les systèmes de planifications implantaires, de céphalométrie 3D et de navigation chirurgicale possible Implantable au sein du cabinet libéral et encombrement réduit Coût en baisse pour les petits champs d’ exploration Possibilité de combinaison panoramique/CBCT dans la même machine

MOINS DE LA

-

P OUR

-

odontostomatologie de la tomographie au scanner RX et au Cone Beam ». Réalités Clin. Tome 19 - N°2 - 01/06/2008 pp 151/165. Cavezian R, Pasquet G, Bel G, Baller G. « Imagerie dentomaxillaire : Approche radio-clinique » 3ème édition MASSON.

CBCT :

Recul scientifique récent, données dosimétriques Artéfacts métalliques partiellement corrigés Artéfacts cinétiques (temps de rotation tube-détecteur) > TDM pouvant être accentués par le positionnement debout moins stable du patient

-

Résolution en contraste / niveau de densité < TDM (dynamique inadaptée à la caractérisation des tissus mous)

-

Champs d’ acquisition +/- limité

-

Choix technologiques non codifiés, dosimétrie et qualité des images variables selon les constructeurs

-

Risque de multiplication des irradiations à but diagnostique lié à l’ élargissement des indications (endodontie, parodontie…), à l’ accès facilité aux

Les auteurs tiennent à remercier les docteurs R. CAVEZIAN ET G. PASQUET (CABINET D’IMAGERIE DENTAIRE 179-183 RUE SAINT HONORE PARIS 01) pour la qualité des clichés radiographiques illustrant les cas cliniques présentés. dispositifs radiologiques et à une banalisation des examens « 3D » -

Modalité d’ imagerie dédiée uniquement à la sphère oro-faciale

C ONCLUSIONS Le bilan radiographique complète l’ examen clinique. La qualité de l’ imagerie et son interprétation conditionnent le plan de traitement et donc finalement la qualité des actes. Semblant répondre aux principes de radioprotection en terme d’ optimisation de dose et fournissant des informations fiables et de bonne qualité, l’ imagerie CBCT assure une unité de lieu et un parcours de soin simplifié en évitant d’ adresser nos patients à des services de radiologie générale extérieurs, souvent saturés ou non familiarisés avec les spécificités de l’ imagerie dentaire. Cette facilité d’ accès ne

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:

Cavezian R, Pasquet G,Batard J. « Imagerie sectionnelle en

incomplètes -

EN SAVOIR PLUS

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