journal d’ Emma
Le
ou comment rĂŠussir ses premiers pas dans le mariage
AUTEUR Joy Sim’ha GALAM • RELECTURE Philippe STEBOUN • COUVERTURE ET MISE EN PAGE Dafna UZAN • DIRECTION Binyamin BENHAMOU
Publié et distribué par les
EDITIONS TORAH-BOX France Tél.: 01.80.91.62.91 Israël Tél.: 077.466.03.32 contact@torah-box.com www.torah-box.com
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• Imprimé en Israël
Ce livre comporte des textes saints, veuillez ne pas le jeter n’importe où, ni le transporter d’un domaine public à un domaine privé pendant Chabbath.
Note de l’éditeur Emma, jeune parisienne active, vient juste de se fiancer avec Benjamin. Alors qu’elle s’affaire aux préparatifs, sa préoccupation essentielle est le choix du disc-jockey et le look de sa robe de mariée. Lors de la démarche d’inscription au Consistoire, elle découvre ‘Hanna, une femme rayonnante qui lui fait réaliser que la vie à deux requiert bien plus de préparation que l’organisation d’une soirée dansante. Ce qui aurait dû être une simple visite de formalité s’avère une rencontre décisive dans la vie d’Emma puisqu’elle va découvrir la magie du couple juif dans tous ses aspects. Par la suite, dès qu’elle fera face à des défis au sein de sa vie de couple, c’est vers ‘Hanna qu’elle va se tourner afin d’obtenir la voix de la Torah sur les problématiques quotidiennes qu’elle va rencontrer : la journée d’achat chez Ikéa qui se transforme en cauchemar, le meilleur ami Franck qui veut tenir la chandelle, la belle-mère qui veut imposer ses traditions, sans oublier les premières vacances à deux et l’intrusion des réseaux sociaux dans leur vie. Autant de problématiques qui touchent tous les couples compilées avec subtilité et humour par Joy Sim’ha Galam, dont le travail a été salué par la Rabbanite Jeanine Lemmel. C’est aussi un guide qui regroupe les principes clés permettant de connaître le bonheur et le véritable amour au sein du mariage. Torah-Box est heureux de vous offrir cet ouvrage dans lequel les femmes pourront s’identifier et trouveront des réponses aux problématiques rencontrées au quotidien. Nous espérons que cet ouvrage trouvera sa place auprès de chacune d’entre elles, et les assistera dans leur noble aspiration à être des femmes vertueuses dans toute leur splendeur.
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ISRAEL MEIR LAU
Grand-Rabbin de Tel Aviv-Yaffo Ancien Grand-Rabbin d’Israël
Tel Aviv, le 26 Tichri 5778
Lettre d’approbation C’est avec beaucoup de joie que j’ai entendu parler de la personnalité et des nombreuses activités de Mme Joy Sim’ha Galam. Elle œuvre à propager le principe fondamental de la pureté familiale et coopère, dans ce cadre, avec le Rabbinat de Tel Aviv à la satisfaction de tous. Dernièrement, sous les conseils de Mme Jeanine Lemmel, elle a écrit un livre portant tout particulièrement sur l’importance de la formation au mariage, comportant des conseils clairs et pratiques. Je précise que, ne parlant pas le français, je ne peux évidemment pas m’engager sur son contenu en tant que tel, mais sur la personnalité de celle qui l’a écrit : sa pureté d’esprit et la ferveur de ses actions viennent témoigner de la valeur de son livre qui traite d’un sujet essentiel touchant aux fondements de la foi juive : la pureté familiale. J’envoie, à ce titre, ma bénédiction à l’auteure du livre et à tous ceux qui participeront à son édition et sa publication. Puisse-telle mériter de voir réalisée son ambition de propager la pureté familiale au sein des foyers juifs à travers les générations. Avec toutes mes félicitations et mes plus grandes bénédictions, Israël Méïr Lau
Recommandation Dans un monde où le mariage va souvent à la dérive, Mme Joy Galam nous offre ici un magnifique outil de travail pour réussir sa vie de couple autour des enseignements de la tradition juive. Comment ne pas être interpellé à la lecture du Journal d’Emma ! Écrit avec spontanéité, justesse, finesse et souvent avec humour, il ne peut que donner le goût et l’envie de se lancer en toute confiance autour des valeurs fondatrices du peuple juif. Le Guide de ‘Hanna, tel que l’a écrit Mme Joy Galam, est le meilleur moyen pour atteindre le but vers lequel nous tendons : faire de notre foyer un havre de paix et d’amour. Merci à Joy pour cette magnifique initiative. Qu’Hachem la comble de bénédictions, ainsi que toute sa chère famille. Jeanine Lemmel
T able
Le
des matières
journal d ’E mma
Avant-propos
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Episode 1 : La révélation
7
Episode 2 : Une poule déguisée au Mikvé 10 Episode 3 : Un enterrement de vie de jeune fille pas comme les autres 14 Episode 4 : Le jour J
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Episode 5 : Des danses particulières
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Episode 6 : L’attente interminable
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Episode 7 : Le « meilleur ami »
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Episode 8 : Mon premier Chabbath chez monsieur le rabbin
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Episode 9 : Mon premier Chabbath à la maison
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Episode 10 : Pessa’h… chez les zoulous !
47
Episode 11 : Facebook : ne mets pas ton grain de sel dans mon couple ! 52 Episode 12 : Le mariage de ma meilleure amie
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Episode 13 : Ikea, le rêve qui se transforme en cauchemar !
62
Episode 14 : Des cadeaux maladroits !
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Episode 15 : L’anniversaire oublié
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Episode 16 : Premières vacances en amoureux !
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Episode 17 : Une rencontre fortuite
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Episode 18 : De l’huile sur le feu ou… de l’huile dans la pkaïla ??
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Episode 19 : Prière de ne pas rester silencieuse !
96
Episode 20 : la belle-mère et la tchouktchouka
102
Episode 21 : L’achat de la poussette
108
Episode 21 : La boucle est bouclée...
114
Epilogue 120 L e G uide
de
‘H anna
pour la jeune mariée
Préface 125
Chapitre 1 : S’habituer à être les deux parties d’un tout
129
Chapitre 2 : Comment connaître et respecter la nature de son conjoint? 135 Chapitre 3 : Travailler ses Middot (traits de caractères)
140
Chapitre 4 : Faire attention à son langage
144
Chapitre 5 : Ne pas avoir peur de concéder
148
Chapitre 6 : Voir et mettre en valeur les côtés positifs de son conjoint 151 Chapitre 7 : Exprimer ses encouragements et juger positivement
154
Chapitre 8 : Créer à travers le foyer un refuge plaisant et agréable
159
Chapitre 9 : Aider son conjoint à se réaliser pleinement
163
Chapitre 10 : La 1ère année de mariage : une base solide pour le couple 167 Chapitre 11 : Faire appel à Hachem dès que l’on en ressent le besoin 171 A nnexe Annexe 177
A vant - propos
J
’aimerais bien m’attribuer le mérite de ce livre, mais cela serait bien loin de la vérité. Tout d’abord, grâce à Torah-Box qui m’a fait confiance pour lancer le site Torah-Box entre Femmes, j’ai découvert le plaisir d’écrire sur les sujets qui me passionnent : le couple, les femmes de la Bible, la Paracha… C’est grâce à mon mari que le personnage d’Emma est né. Un jour, j’ai écrit un article sur une jeune fille qui découvre le concept de la formation au mariage, et qui en est très agréablement surprise. Lorsque je l’ai montré à mon mari pour avoir son avis, il m’encouragea à en faire une suite avec toute une série d’épisodes. Aussitôt dit, aussitôt fait. Le journal d’Emma est né et allait sortir sur le site Torah-Box entre Femmes une fois tous les quinze jours. Suite à cela, lors d’un rendez-vous avec la Rabbanite Jeanine Lemmel, je lui laissai les épisodes du journal d’Emma sur la table de sa salle à manger. Le lendemain, elle m’appelait pour me demander : « Puis-je le distribuer aux Madrikhot Kala qui suivent ma formation ? Car il faut en faire profiter les jeunes filles, c’est excellent ! » me dit-elle. Elle m’encouragea ainsi fortement à le publier. D’ailleurs, je dois avouer que sans son insistance, je n’aurais jamais eu l’aplomb de le publier. Je décidai de rajouter au journal d’Emma le livre que j’avais déjà partagé avec les jeunes femmes que j’ai eu le mérite de préparer au 3
Le journal d’Emma
mariage ces dernières années : Conduire son foyer vers le bonheur, avec la Torah comme GPS, que j’ai re-intitulé Le Guide de ‘Hanna pour des soucis de clarté et de cohérence. Les idées sont issues de deux années de formation que j’ai eu la chance et le bonheur de suivre : « Le foyer juif » avec la Rabbanite Ruth Chémech, ainsi que « Coaching de couple selon la ‘Hassidout », du Rav Its’hak Arad. Il a été revu et corrigé en profondeur par la Rabbanite Jeanine Lemmel. Je souhaite remercier mes parents de m’avoir transmis leur Emouna et de m’avoir formé à devenir une véritable Bat Israël. Qu’ils méritent une longue vie heureuse et en bonne santé. Ma gratitude va à mon mari, source inépuisable de Torah, et véritable coach personnel ! Je ne peux manquer de remercier également mes (belles) sœurs Sandie, Esther, Yael et Meytal qui me témoignent beaucoup d’affection par leurs encouragements quotidiens. Je remercie le Rav Lemmel et son épouse Esther qui nous ont fait confiance, mon mari et moi, et nous ont donné la grande chance de faire partie de leur équipe d’enseignants depuis plusieurs années. Toute ma gratitude va également à la Rabbanite Jeanine Lemmel, que D.ieu lui prête longue vie. Elle est un puits de sagesse et incarne la splendeur de la femme juive. Je remercie Rivka Hecht, la lumière qui repousse beaucoup d’obscurité à Tel Aviv, et qui fut celle qui m’a inspiré la notion de Chli’hout. Je remercie Léa Nabet et Mariacha Drai pour m’avoir encouragé l’une et l’autre à prendre confiance en moi pour pouvoir enseigner, ainsi que mon amie Jessica Philippe pour avoir lancé le premier cours qui a confirmé ma passion d’enseigner. Et enfin, toute ma gratitude revient à la soixantaine de jeunes femmes que j’ai eu le mérite de former ces trois dernières années. Chacune d’entre elle est un diamant précieux qui demande juste à être poli. J’ai sûrement 4
Avant-propos
beaucoup plus appris d’elles qu’elles ont appris de moi. Un merci tout particulier à deux d’entre elles, Camille Eisenberg et Esther Flak, pour leur laborieux travail de relecture et de correction. Toute ma gratitude va au Boré Olam pour tous les miracles dont Il me fait bénéficier chaque jour au quotidien. Yéhi Ratsone que j’ai le mérite de ne jamais Le décevoir et d’arborer avec fierté le drapeau de Sa Torah !
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Episode 1
La
révélation
Q
uelle n’a pas été ma joie lorsque Benjamin m’a demandé en mariage ! Nous nous connaissions depuis quelques mois et il s’était enfin décidé à sauter le pas. Quelle joie ! Je me suis rapidement affairée aux préparatifs, et je dois avouer que le choix de la décoration florale et du florilège musical était pour moi l’essentiel de la préparation au mariage. Je ne pensais pas que la vie à deux était quelque chose qui requérait bien plus de préparation que l’organisation d’une soirée dansante… Lorsque nous sommes allés au Consistoire pour régler ce qui n’était pour moi rien de plus que des « détails administratifs », le rabbin m’a dit : « Je serais très heureux d’officier lors de votre cérémonie, mais j’aimerais d’abord que vous compreniez qu’un mariage juif est bien plus qu’une affaire de décoration et de musique… » Avait-il lu dans mes pensées ?! Et il a poursuivi : « Un mariage juif, ce n’est pas que la cérémonie, j’aimerais que vous compreniez tout ce que cela implique et que vous vous prépariez vraiment à la vie à deux. » Oh non, je me préparais à un long discours... Je lance à Benjamin un regard dépité tout en m’inquiétant que cela empiète sur notre prochain rendez-vous avec le disc-jockey.
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Le journal d’Emma
« J’apprécie réellement les efforts que vous faites en vous déplaçant malgré vos emplois du temps chargés, sans compter la charge de travail que requiert la préparation du jour J… » « Vous voyez la bibliothèque là-bas ? » dit-il en pointant du doigt des grands livres écrits en hébreu, « tous ces livres parlent du couple, du mariage, et de la famille… » « Mademoiselle, je vous invite à vous entretenir avec ma femme qui se trouve dans le bureau d’à côté pendant que je m’entretiens avec votre merveilleux ‘Hatan. » Je m’attends donc à recevoir un cours de la femme du rabbin. Mais de quoi allait-elle me parler ? Peut-être de sa recette de couscousboulettes ? Ou bien de comment changer les couches d’un enfant ? Lorsque je rentre dans le bureau adjoint, à mon grand étonnement, je découvre une femme élégante et rayonnante. Elle se présenta à moi sous le nom de ‘Hanna (prononcez ‘Hanna comme dans Rabbi Jacob!). Je m’assis avec elle et j’avoue que c’était en vérité la première fois que j’entendais une rabanite parler du mariage dans tous ses aspects. ‘Hanna me parlait même de sujets que je pensais être tabous dans le monde religieux… Je lui demande alors naïvement si ces sujets-là sont vraiment écrits dans la Torah. Elle me répond : « Bien évidemment ! D.ieu a créé l’être humain avec une âme et un corps, et il a créé la possibilité pour le couple de s’apporter un bien-être mutuel… Pourquoi devrait-on ignorer cet aspect essentiel de la vie ? » Finalement, je désirais en apprendre plus avec elle. C’est ainsi que j’ai suivi cette formation que l’on appelle Hadrakhat Kala, la préparation au mariage. J’ai appris quelles étaient les règles de la pureté familiale. S’abstenir de tout contact physique durant la période des règles, plus 7 jours, à l’issue desquels je m’immergerai dans les eaux du Mikvé : cela fait 12 jours ! Au début, je me suis dit que seuls les religieux, tels des ascètes, étaient capables d’une telle retenue ! Mais petit à petit, l’idée faisait son chemin dans mon esprit. 8
La révélation
Mon oncle et ma tante étaient divorcés, et j’avais vu les répercussions terribles que leur divorce avait provoqué chez mes cousins qui, même à l’âge adulte, devaient encore panser leur plaie de cette expérience destructrice. Je m’étais promis de ne jamais faire la même erreur qu’eux et de faire en sorte que mon couple soit toujours solide. Mais je n’avais jamais encore su, ni même réfléchi à comment garantir la pérennité de mon couple… Et puis est venu cet argument irrésistible : la pureté familiale permettrait au couple de retrouver chaque mois la magie d’une nuit de noces et de maintenir la romance de la vie conjugale. De plus, comme l’aspect physique de la relation était mis entre parenthèses durant presque la moitié du mois, le couple devra échanger et approfondir leur relation. Lorsque j’ai découvert que les lois de pureté famille étaient de surcroît en parfaite adéquation avec le métabolisme physique de la femme, je me suis décidé à sauter le pas. ‘Hanna m’a rassuré en me disant que, même si je n’étais pas « religieuse », en revanche, dans le domaine intime, je pouvais garder les lois de pureté famille de la façon la plus entière possible. En effet, notre vie intime ne concerne que mon époux et moi. Ni les amis, ni la famille n’avaient leur mot à dire ou leur grain de sel à mettre ! C’est ainsi que Benjamin et moi, après ces échanges, avons décidé de faire le grand saut et d’accomplir cette Mitsva parfaitement ! Cela pourrait être le « happy end » de l’histoire, mais le récit ne s’arrête pas là, et je vous invite à me suivre dans ce qui a été pour moi la véritable initiation au mariage juif.
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Episode 2
U ne
poule déguisée au
M ikvé
A
près les cours et de longs entretiens avec le rabbin et son épouse ‘Hanna, nous avions donc décidé Benjamin et moi de prendre sur nous la Mitsva de la pureté familiale. J’étais donc tout excitée à l’idée de découvrir, la veille de mon mariage, ce fameux bassin divin qu’est le Mikvé, comme le veut la loi juive. Je souhaitais que cette expérience soit une expérience intime et profonde, et je décide donc d’y aller seule, avec pour unique accompagnatrice celle qui m’a mise au monde et à qui je dois tout : ma mère. J’appelle donc ma belle-mère pour lui expliquer qu’à l’occasion de mon premier Mikvé, je désire être en cercle restreint. Elle fait mine de comprendre et raccroche poliment. Quelle n’a pas été ma surprise lorsque, le soir, mon fiancé m’appelle et m’annonce que sa mère est très vexée que je ne l’invite pas au Mikvé ! Même plus que ça, elle aurait souhaité inviter toute la famille : les tantes, les grands-mères, les cousines, car c’est la coutume ! Elle avait même déjà préparé des corbeilles à distribuer aux jeunes filles et avait prévu de déguiser une poule, comme le veut la tradition… « Déguiser une poule », avais-je bien entendu ?! Je ne savais que répondre et j’étais assez perplexe, je trouvais qu’elle ne manquait pas d’aplomb ! Je raccroche et j’envoie donc un message Whatsapp à mon groupe de copines pour leur raconter l’affront auquel je faisais face. Je réclamais de l’intimité pour cette soirée que je considérais 10
Une poule déguisée au Mikvé
si spéciale, et on m’imposait d’inviter du beau monde et de faire du folklore ! Mes amies ont tout de suite répondu à mon message en me soutenant ardemment : « Ta belle-mère manque de délicatesse » ; « Ne te laisse pas marcher sur les pieds » ; « C’est ton moment et non pas le sien, tu ne lui dois rien », furent quelques-uns de tous les messages de soutien que je reçus ! Je me sentais enfin comprise : décidément, mes amies me comprenaient mieux que mon propre fiancé ! Enfin, c’est ce que je pensais… Car je ne me sentais pas parfaitement en accord avec ce que je venais de faire, et une petite voix en moi me soufflait que je n’avais pas complètement raison. Mais à qui demander ? Je ne souhaitais pas raconter cet épisode à ma mère car je risquais de créer de la rancœur entre elles. Je me décide donc à appeler ‘Hanna, la Rabbanite qui m’avait formée pour le mariage. Je sentais qu’elle aurait le recul et la sagesse nécessaires pour m’orienter de la façon la plus adéquate. - Allo ? C’est moi Emma, vous auriez quelques minutes ? - J’ai tout mon temps pour t’écouter… Je lui raconte toute l’histoire, elle m’écoute patiemment et me répond posément : - Emma, tu dis que tu souhaites n’inviter que ta maman car elle est la seule personne à qui tu dois tout. Mais n’y a-t-il pas une autre personne à qui tu dois tout ? - Euh… mon père ? - Effectivement, ton père aussi, mais je ne parle pas de lui. Je parle de celle qui a donné naissance à ton ‘Hatan, qui l’a nourri, vêtu, cajolé, lui a prodigué tous les bienfaits jusqu’à aujourd’hui. Celle qui s’est réveillé la nuit pour le rassurer lorsqu’il pleurait petit, qui plus tard lui a donné 11
Le journal d’Emma
un goûter à la sortie de l’école, qui lui a donné toute son estime de soi, et enfin l’a accompagné toute l’adolescence pour qu’il devienne un jeune homme équilibré et aimant, celui que tu connais aujourd’hui. Te rendstu compte que ta belle-mère a investi autant et t’a préparé le plus beau cadeau que tu n’aies jamais reçu ? Aujourd’hui, elle doit, certes, petit à petit apprendre à se mettre en retrait pour vous laisser créer votre petit nid familial à tous les deux, mais ce n’est pas pour autant que tu dois effacer toute ta reconnaissance ! Elle avait réussi à me mettre les larmes aux yeux : c’est vrai qu’après tout, c’était grâce à elle que Benjamin existait, et je n’avais jamais envisagé les choses sous cet angle-là. Lentement, l’idée de reconnaissance et de respect pour ma belle-mère faisait son chemin dans mon esprit. Et c’est ainsi que je me décide donc à l’appeler pour l’inviter, et je me résous même à accepter tout son folklore traditionnel… Je réalise également que mes amies avaient voulu bien faire en me soutenant, mais en vérité, elles avaient mis le feu aux poudres plutôt que de m’aider à relativiser. La prochaine fois que j’ai une question qui concerne mon couple, j’y réfléchirai à deux fois avant d’interroger mes amies par Whatsapp ! Le soir de mon Mikvé arrive, et j’arrive donc dans cet endroit qui s’apparentait à un spa digne des plus grands hôtels. Je suis accueillie par la Balanite, la responsable du Mikvé, avec le plus grand sourire et un regard bienveillant : « Bienvenue et Mazal Tov pour ta première immersion, la première étape en tant que femme juive au sein du peuple d’Israël ! » La veille, j’avais été assez nerveuse à l’idée qu’il y ait autant de monde, mais je me suis sentie apaisée par cet accueil, et au-delà de tout, je me sentais heureuse d’avoir mis un peu d’eau dans mon vin au nom du Chalom et de la reconnaissance qui s’imposait tout naturellement en moi pour ma belle-mère. Au final, je dois avouer que j’ai même ressenti du plaisir à voir toutes ces jeunes filles et femmes plus âgées de 7 à 77 ans se réjouir pour ce moment grandiose. Les sourires, les éclats de rire, et les youyous ont 12
Une poule déguisée au Mikvé
été les meilleurs souvenirs que j’en garde. Finalement, ce que j’appelais « folklore » n’était autre que l’expression de l’immense joie que toutes ces personnes ressentaient pour moi ! Et cette joie qu’elle me communiquait était indicible ! Le point d’orgue est lorsque je pénètre réellement dans la salle du Mikvé, seule cette fois-ci. Ou plutôt pas vraiment seule, puisque dès que j’entre dans le bassin, je ressens la Présence divine m’entourer... La responsable du Mikvé m’explique alors que je vis un moment hors du temps et même hors de l’espace. En effet, le Mikvé, qui rassemble les eaux du ciel sans intervention humaine ni même matérielle, est l’unique endroit au monde faisant la connexion directe entre le Ciel et la Terre, entre la femme et le Créateur. Pénétrer dans ces eaux chaudes me fait ressentir tel un fœtus dans le ventre de sa mère, et me donne l’impression de renaître à nouveau. Je récite la Brakha : « Baroukh Ata Ado-naï Elo-hénou Mélèkh Haolam Achèr Kidéchanou Bémitsvotav Vétsivanou Al Hatévila - Béni sois-Tu Eternel Roi de l’Univers qui nous a sanctifié par Ses commandements et nous a ordonné la Mitsva de l’immersion rituelle. » Je ressors en essuyant mes larmes, toute heureuse de goûter à ce moment si privilégié pour une femme : celui de l’immersion rituelle dans un Mikvé ou la sensation que D.ieu Lui-même me serre dans Ses bras...
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Episode 3
Un
enterrement de vie de jeune fille pas comme les autres
« Allez Emma, tu viens ? » A peine le Mikvé terminé, mes amies me pressent de les suivre pour faire mon « Enterrement de Vie de Jeune Fille », ou EVJF, pour celles qui connaissent le diminutif de cette fameuse soirée passée entre copines la veille de son mariage ! J’embrasse ma mère, ma belle-mère et toutes les femmes de la famille qui sont venues assistées au « bain de la mariée » et nous partons furtivement. Arrivée dans la voiture de mon amie Johanna, voilà que mes amies me bandent les yeux pour garder l’effet de surprise jusqu’au bout. Les yeux bandées, elles me posent des questions telles que : « Quel est le plat préféré de Benjamin ? » ; « Quelle est la date de votre première rencontre ? » Ou encore : « Où passait-il les vacances d’été lorsqu’il était petit ? » Elles avaient bien sûr au préalable récolté toutes les réponses auprès du principal sujet du quiz, qui était Benjamin ! Je pense n’avoir eu que de bonnes réponses, mais les questions donnaient quand même lieu à de sacrés plaisanteries ! De fous rires en blagues, nous voilà enfin arrivées à destination… Mes amies m’aident à descendre de la voiture, puisque j’ai toujours les yeux bandées, et me guident gentiment vers le lieu de notre soirée. Voilà qu’elles m’enlèvent le bandeau et : 14
Un enterrement de vie de jeune fille pas comme les autres
- Surpriiiiise ! - Surprise ? Quoi surprise ? Je ne vois rien, où sommes-nous ? - On est devant le Lion d’Or, c’est le dernier bar à la mode ! Mon D.ieu… Je sais que pour tout le monde, cette façon de vivre les derniers instants de sa vie de jeune fille est courante, mais tout à coup, cela sonne faux pour moi... Peut-être est-ce à cause de la dernière conversation que j’ai eue avec ‘Hanna lorsqu’elle m’avait donné des conseils concernant mon Mikvé : - Je te conseille, après ton Mikvé, de rentrer dormir afin de bien prendre des forces pour le jour de la ‘Houppa. - Ah oui… Enfin non… Je ne vais pas rentrer tout de suite car mes amies m’emmènent faire mon enterrement de vie de jeune fille… - Quoi ? Tu vas à un enterrement la veille de ton mariage ?! Mais quel enterrement ? Qui est mort mon D.ieu ? - Non, en fait c’est une soirée entre copines pour profiter des derniers instants de célibataires, tu comprends ? - Ah oui bien sûr ! Nous faisons ça aussi : c’est le Chabbath Kala ! La mariée est réunie avec ses amies pour son dernier Chabbath de jeune fille et elles passent du bon temps ensemble : elles bénissent la jeune fille de nombreuses bénédictions, elles jouent à quelques jeux et révisent ensemble certaines Halakhot. C’est vraiment super que vous fassiez ça aussi. C’est la meilleure façon de profiter de ses derniers instants en tant que jeune fille : en se renforçant et en se préparant à la plus belle étape de sa vie. D’ailleurs, en général, la grand-mère et la mère participent afin de donner les derniers conseils à la jeune mariée. Mais quelle idée d’appeler ça un enterrement ?? - Euh, oui tu as raison. La soirée ressemblera sûrement à ça... Je n’avais pas osé dire à ‘Hanna que dans le monde « moderne », l’ambiance n’est pas aussi bon enfant… Et d’ailleurs, si j’avais ramené 15
Le journal d’Emma
ma grand-mère à cette soirée, je ne pense pas du tout qu’elle se serait bien sentie à sa place... En tous cas, cette conversation résonnait en moi et j’étais pris d’un grand malaise devant cet endroit, cette queue, ces filles, ces garçons, cette musique… Je me sentais comme prise de nausées. Comme je ne voulais pas vexer mes amies ! Mais en même temps, je me demandais vraiment ce que je venais faire ici, la veille de mon mariage... Au bout de quelques minutes d’angoisse, le videur tourne la tête vers moi et me regarde droit dans les yeux : - Toi, là-bas ! Je lui demande, tout étonnée : - Moi ? Mais qu’est-ce que j’ai fait ? - Tu as ta carte d’identité ? Je doute que tu aies 18 ans ! L’entrée du bar est réservée aux adultes... Il me prend pour une enfant ? Alors là, il ne sait pas de quel bois je me chauffe… - Vous croyez que je suis une enfant ? Moi ?! Savez-vous à qui vous vous adressez ? J’ai eu mon bac il y a déjà plusieurs années, et avec mention ! J’ai terminé mes études haut la main, et figurez-vous que j’ai un poste à responsabilité dans une grande entreprise ! Et la meilleure, c’est que je me marie demain !! » Et là, j’étais sûre qu’il allait m’inviter à entrer dans le bar, mais il a eu une réplique tout à fait étonnante, et tellement juste : - Tu te maries demain ? Mais qu’est-ce que tu fais là alors ? C’est vrai ! Qu’est-ce que je fabriquais ici ?! Les larmes me montent aux yeux... Mes amies me disent :
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Un enterrement de vie de jeune fille pas comme les autres
- Oh, tu es déçue parce que tu ne peux pas entrer ? Ne t’en fais pas Emma, nous avons prévu un plan B ! - Ah oui ? C’est quoi ? dis-je en essuyant mes larmes. - Le Kangourou Enchaîné : c’est un autre bar ! - Ah non… Je vous en prie, ne vous vexez pas, mais la dernière chose que j’ai envie de faire la veille de mon mariage, c’est d’être ici dans cette ambiance malsaine ! Vous n’avez pas quelque chose d’autre à proposer ? Sinon, au lieu d’aller au Lion d’Or, je préfère aller « Au Lit - On Dort ! » Elles ont éclaté de rire ! A ce moment-là, Eva, mon amie d’enfance, prend la parole : - Emma, depuis le début de la soirée, je sens que tu as un malaise. Les filles te diront que j’avais essayé de les dissuader de t’emmener dans un bar, mais elles ont préféré suivre leur intuition... Les autres filles, un peu gênées, tournent leur regard vers le bas… - Du coup, poursuit-elle, j’avais prévu un vrai plan B. Les filles, je vous propose qu’on fasse ce que j’avais prévu : on ramène Emma chez elle et on lui chante son répertoire de chansons préférées ! - Oh, ce serait super sympa comme soirée ! J’adorerais !! ai-je répondu. - Allez, en voiture les filles ! a dit Eva aux autres copines. Sur le chemin en voiture, Eva me dit : - Tiens, un petit cadeau... Le cadeau qu’elle me tend a l’air d’un cahier tout griffonné… - Qu’est ce que c’est ? - Eh bien, pendant que les filles téléphonaient à Benjamin pour lui demander quelle était sa couleur préférée et toute sorte d’autres choses, j’ai appelé ta grand-mère et je lui ai posé des questions sur ce qu’elle 17
Le journal d’Emma
avait envie de transmettre comme conseils à sa petite-fille à la veille de son mariage. J’ai passé un moment très agréable avec elle ! Moi, je te dis que les femmes de cette génération savaient y faire… Elle m’a transmis des conseils qui valent vraiment de l’or ! Moi qui malheureusement n’ai plus de grand-mère qui soit de ce monde, je suis très heureuse d’avoir pu bénéficier de sa sagesse ! - Quelle délicatesse Eva, tu es incroyable ! Pendant que je lis tous les conseils de ma grand-mère, je passe des rires aux larmes. Je reconnais bien là le côté espiègle de ma grand-mère : « Les hommes n’aiment pas qu’on leur parle de sujets désagréables avant d’avoir mangé ! » « Tu dois être aussi belle et élégante chez toi que dehors ! » « Les hommes aiment qu’on leur donne autant d’attention qu’à des enfants, mais surtout pas qu’on leur parle comme à des enfants ! » « Le sourire est le meilleur secret de beauté ! » « Les hommes aiment avoir l’impression que ce sont eux qui décident. N’hésite pas à lui faire penser qu’il a pris certaines décisions, même si en réalité, c’est toi qui les lui as suggérées ! » « C’est vrai que les hommes aiment avoir une maison rangée et un bon repas, mais ce qu’ils préfèrent par-dessus tout, c’est une femme de bonne humeur ! » J’embrasse Eva et je serre le carnet précieux de toutes mes forces. ‘Hanna avait raison, les conseils d’une grand-mère ont bien plus leur place dans les derniers moments de la vie de jeune fille que tout autre chose. On a malheureusement tendance à ne pas valoriser à leur juste valeur les conseils précieux de nos chères mamies, qui ont pourtant beaucoup de sagesse à nous faire partager sur la vie de couple... Quelle histoire ! Si ce videur n’avait pas eu une telle réaction, j’aurais probablement été dans la situation la plus inconfortable qui soit, dans 18
Un enterrement de vie de jeune fille pas comme les autres
une ambiance sans aucune signification… Et au lieu de cela, j’ai vécu le moment le plus émouvant, le plus riche et le plus profond de toute ma vie. Merci mon D.ieu. Hâte d’être à demain...
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