A’hat Chaalti 2
AUTEUR Rav Its’hak ZYLBERSTEIN • COMPILATION Rav Erez ‘HAZANI • TRADUCTION Joël BROWNSTEIN • RELECTURE Né’hama KOHN • ILLUSTRATIONS Yoni GERSTEIN • MISE EN PAGE Jérémie ARGAMAN • COORDINATION Moshé Haïm SEBBAH • DIRECTION Binyamin BENHAMOU Publié et distribué par les
EDITIONS TORAH-BOX France Tél.: 01.80.91.62.91 Israël Tél.: 077.466.03.32 contact@torah-box.com www.torah-box.com © Copyright 2018 / Torah-Box
• Imprimé en Israël Ce livre comporte des textes saints, veuillez ne pas le jeter n’importe où, ni le transporter d’un domaine public à un domaine privé pendant Chabbath.
Note de l’éditeur Après la sortie du tome 1 qui a connu un énorme succès, les Editions Torah-Box sont heureuses de vous présenter le livre « A’hat Chaalti 2 », véritable best-seller en Israël ! Comment donner goût à l’étude de la Torah lorsque les nouvelles technologies envahissent notre quotidien ? Pour Rav Zylberstein, la réponse est simple : soulever des problématiques passionnantes de la vie de tous les jours et les résoudre à l’aune des textes de nos Sages. Suivant l’ordre des Parachiot de la Torah, le Rav rapporte les questions halakhiques les plus captivantes qu’il ait eu à résoudre ; à l’appui de récits édifiants, il fournit des réponses actuelles et limpides : -E st-il permis de regarder les avions éteindre un incendie le Chabbath ? -U n animal ayant trouvé un objet, son Maître en devient-il propriétaire automatiquement ? -E st-on quitte de la Mitsva du Kiddouch réalisée sur une coupe de vin volée ? -E st-il permis d’écrire un Séfer Torah avec l’intention de l’envoyer sur la lune ? Rav Its’hak Zylberstein est le gendre du Rav Yossef Chalom Elyashiv et beau-frère du Rav ‘Haim Kanievsky. Il est Roch-Kollel, Président de Tribunal rabbinique et un grand décisionnaire en Halakha. Merci à Mme Joël Brownstein pour la qualité de sa traduction ainsi qu’à Mme Né’hama Kohn pour sa relecture. להגדיל תורה ולהאדירה L’équipe Torah-Box
Que ce livre contribue à la réussite du
Collel « Vayizra’ Itshak »
Centre d’étude de Torah pour Francophones à Jerusalem
sous l’enseignement du rav Eliezer FALK à la mémoire de M. & Mme Jacques-Itshak BENHAMOU au Roch-Collel : Rav Eliezer FALK aux Rabbanim : Rav Tséma’h ELBAZ Rav ‘Haïm BENMOCHÉ Rav Eliahou UZAN
et à leurs chers étudiants assidus et dévoués pour la Torah : Rabbi Yechiel ALLOUCHE
Rabbi Aaron DANA
Rabbi Moché AVIDAN
Rabbi Mickaël GUIGUI
Rabbi Binyamin BENHAMOU
Rabbi Amir MADAR
Rabbi Ylan BENHAMOU
Rabbi Isaac MARCIANO
Rabbi David BRAHAMI
Rabbi Raphael SABBAH
Rabbi Nathan CHEMLA
Rabbi Franck SAYADA
Rabbi Yossef COHEN
Rabbi Nethanel OUALID
Rabbi Anthony COOPMANS
Que ce livre contribue à la réussite du
Collel « Torat Yé’hia »
Centre d’étude de Halakha pour francophones à la mémoire de M. & Mme Yé’hia TEBOUL au Roch-Collel : Rav ‘Haïm BENMOCHÉ
et à leurs chers étudiants assidus et dévoués pour la Torah : Rabbi Shlomo AFLALO Rabbi Yaakov ORLIK Rabbi Lionel SELLEM Rabbi Haï ZBERO
TABLE DES MATIÈRES Avant-propos............................................................................................... p. 11
Beréchit Beréchit Des diamants dans le poisson .................................................................. p. 19 Le don des chaussures ............................................................................. p. 21 Noa’h Le chat et la souris ................................................................................... p. 24 La voiture envoyée à la casse .................................................................... p. 26 Lekh Lékha « Faire » des âmes .................................................................................... p. 29 La trouvaille du chien .............................................................................. p. 32 Vayéra Le cadeau du voleur ................................................................................. p. 34 Le repas de mariage dégusté par erreur ? ................................................. p. 37 ’Hayé Sarah Le vieillard solitaire ................................................................................. p. 40 A quoi sert-il que la sentinelle monte la garde ? ...................................... p. 42 Toledot Une bénédiction contre une friandise ?.................................................... p. 45 Le billet jordanien ................................................................................... p. 47 Vayétsé Dire des paroles de Torah à un employé ? ................................................ p. 50 Une pizza au fromage et à la saucisse dans une pizzéria Cachère ............... p. 52 Vayichla’h L’éclatement d’un lustre pendant la Tefila ................................................ p . 55 L’enfant qui a lu dans le Séfer Torah .......................................................... p. 57
Vayéchev La perte d’un manteau coûteux ............................................................... p. 59 Le « héros de la fête » prend la poudre d’escampette ............................... p. 61 Mikets - ‘Hanouka Même si vous vous exilez aux confins de la terre ..................................... p. 65 Embellir l’allumage avec de l’huile volée ? ............................................... p. 69 Vayigach Les chants de Chabbath du non-Juif ....................................................... p. 72 L’argent trouvé dans la poche du costume ............................................... p. 74 Vaye’hi Présent ou absent au cours de Guémara ? ................................................. p. 77 La lettre mouillée des larmes d’un cruel agresseur repenti ....................... p. 79
Chémot Chémot Les attablés fuient pour avoir la vie sauve ................................................ p. 85 L’ours prédateur ....................................................................................... p. 86 Vaéra Monter la garde devant un restaurant de viande non Cachère .................. p. 89 Dix poissons ont disparu ! ....................................................................... p. 91 Bo Les pneus crevés ...................................................................................... p. 93 Des Téfilines pour Chabbath .................................................................... p. 95 Béchala’h De la viande Glat Cachère au goût de viande de porc ................................ p. 98 Un Din Torah peu commun ..................................................................... p. 99 Yitro Des sons en échange de sons…............................................................... p. 103 Profiter du spectacle des avions extincteurs pendant Chabbath ............. p. 106
Michpatim Le parpaing lancé sur la voiture ............................................................. p. 108 Le coup monté ...................................................................................... p. 110 Térouma L’appareil d’enregistrement dissimulé .................................................... p. 113 L’encre magique ..................................................................................... p. 114 Tétsavé-Pourim Le pistolet avec le Michloa’h Manot ........................................................ p. 117 Le Michloa’h Manot dégusté en chemin ................................................. p. 119 Ki Tissa Le Brandy offert au « Grand Sage de la génération » ............................ p. 121 L’anniversaire surprise ........................................................................... p. 123 Vayakhel-Pékoudé La couronne de la Torah ........................................................................ p. 125 Le Tsaddik qui a mangé et bu sans faire de bénédiction ........................ p. 127
Vayikra Vayikra La cannette ‘chaude’ dissimulée au rayon des laitages ............................ p. 131 Une nuit sous bonne garde ? .................................................................. p. 133 Tsav Où est passé l’Afikoman ? ....................................................................... p. 135 Jusqu’au trône céleste ............................................................................. p. 137 Chémini « Le donneur de mérites » ..................................................................... p. 139 De la viande non Cachère en provenance des territoires .......................... p. 141 Tazria’-Métsora’ Le tricheur qui vous a doublés ............................................................... p. 144 La paume de la main couverte de poils .................................................. p. 145
A’haré Mot-Kédochim Un taxi pour Péta’h Tikva ...................................................................... p. 149 Le brouilleur d’ondes ............................................................................. p. 151 Emor Des travailleurs étrangers dans le cortège .............................................. p. 153 Lag Ba’omer Le chèque de Rabbi Chim’on bar Yo’haï ................................................ p. 155 Béhar-Bé’houkotaï Les portables indésirables ...................................................................... p. 158 Une tasse de café providentielle ............................................................. p. 160
Bamidbar Bamidbar La coupe de Kiddouch volée ................................................................... p. 165 Le projet de réhabilitation des quartiers ................................................ p. 167 Nasso Des Philippins à la synagogue ............................................................... p. 171 Des pas dans la neige pour dissuader les voleurs le Chabbath ................ p. 173 Béha’alotékha Un Séfer Torah à envoyer sur la lune ....................................................... p. 175 Un sauvetage au prix d’un dommage ..................................................... p. 177 Chéla’h Lékha La charrette ........................................................................................... p. 180 Il y a un jugement et il y a un juge ......................................................... p. 183 Kora’h Placébo .................................................................................................. p. 186 L’âne rueur ............................................................................................ p. 188
’Houkat La maison entourée de chats ................................................................. p. 191 Le chasseur de serpents ......................................................................... p. 193 Balak Le chat prédateur .................................................................................. p. 196 Une vente… de livres gratuits ................................................................ p. 197 Pin’has Le passager au grand cœur .................................................................... p. 200 Une idée géniale ! .................................................................................. p. 202 Mattot-Mass’é Le voyage dans les airs ........................................................................... p. 205 A qui appartient le cadeau ? .................................................................. p. 206
Dévarim Dévarim La nuée de ballons ................................................................................. p. 213 La pièce de monnaie coincée dans le distributeur .................................. p. 215 Vaet’hanane L’anniversaire de mon père .................................................................... p. 218 Un Taxi ou une Limousine ? ................................................................. p. 219 ‘Ekev Avec largesse et dignité ......................................................................... p. 222 Un repas pour la souris prise au piège ? ................................................. p. 226 Reé La morsure salutaire du serpent ............................................................. p. 228 Des dollars entre les pages d’une Guémara ............................................. p. 230 Chofetim Les merveilles de la Providence ............................................................. p. 233 La chaise d’Eliahou Hanavi ................................................................... p. 236
Ki Tetsé Le tirage au sort pour des fils de Tsitsit .................................................. p. 240 L’invité mis à la porte ............................................................................ p. 242 Ki Tavo « Venez plutôt voler la voiture de mon voisin ! » .................................... p. 244 Si les hommes ressentaient la douceur et l’agrément ............................. p. 246 Nitsavim-Vayélekh Smile ! Fais un sourire ! .......................................................................... p. 249 Le chauffeur d’autobus compatissant .................................................... p. 251 Haazinou Cela aussi, c’est pour le bien ! ................................................................. p. 255 Une Soucca, coûte que coûte ................................................................... p. 259 Vézot Habérakha Rex ........................................................................................................ p. 263 La question la plus difficile qui soit… ................................................... p. 266 Appendice ................................................................................................. p. 269 Glossaire.................................................................................................... p. 283
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Préface de l’auteur Veille de Roch Hachana, 5678 David Hamélekh a supplié son Créateur : « Je demande une seule chose à D.ieu, c’est elle que je recherche » Quelle est cette unique requête ? « Que je réside dans la maison de D.ieu tous les jours de ma vie. » Que seule cette demande demeure au centre de mes requêtes et de mes volontés et que la Torah enveloppe et emplisse toute ma personnalité et toute mon essence. La requête de David Hamélekh soulève une question : comment réaliser ce désir en pratique ? Est-il envisageable de pouvoir s’installer au Beth Hamidrach et y rester toute la journée ? Pour répondre à cette question, penchons-nous sur le commentaire du Or Ha’haïm Hakadoch (sur Michlé 1,20), rapporté dans son livre Richon Létsion : « On m’a raconté que lorsque Rav Moché Alchikh Hakadoch, un homme unique dans sa génération, s’occupait de son gagne-pain (il était orfèvre), il a composé un commentaire sur toute la Torah durant les heures où il se consacrait à son travail ! Pendant que ses mains travaillaient, ses pensées pleines de sagesse se concentraient sur la Torah ! Voilà l’homme qui est protégé du mauvais penchant. » Le Or Ha’haïm ajoute à cela que l’homme grand, où qu’il aille et quoi qu’il fasse, emporte le Beth Hamidrach avec lui et s’adonne régulièrement à la Torah. Même le Alchikh Hakadoch emportait le Beth Hamidrach partout où il allait. En cela, il a réalisé le verset : « Que je réside dans la Maison de D.ieu tous les jours de ma vie » ! Un homme qui porte le Beth Hamidrach avec lui tous les jours de sa vie, n’est pas un homme fragmenté dont une moitié se trouve à l’intérieur et une moitié à l’extérieur. Sa Torah n’est pas en pièces. C’est un homme qui ne quitte jamais la maison d’étude. Lorsqu’il mange, il est au Beth Hamidrach (car il continue à réfléchir et méditer à la Torah). Lorsqu’il dort, il est au Beth Hamidrach. Lorsqu’il sort pour vaquer à ses affaires, il prend le Beth Hamidrach avec lui (il s’efforce de ne pas laisser son esprit vagabonder hors du Limoud et, à chaque instant de libre, il prend un Séfer pour y étudier). Sa vie est différente, son comportement est différent. Chacun décèle en lui les caractéristiques de « l’homme du Beth Hamidrach ». Le Beth Hamidrach l’accompagne (selon l’expression du Or Ha’haïm). Il aura le privilège de goûter à la saveur particulière de l’étude, de voir combien la Torah de D.ieu est agréable (commentaire du Métsoudat David sur
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le verset « la’hazot beno’am Hachem ») et son esprit est concentré sur l’étude de la Torah en permanence ! Rabbi Israël de Roujin donne une explication allégorique extraordinaire sur notre verset : « A’hat-une » désigne l’âme (appelée Yé’hida-une). « Cha’alti Méêt Hachem » : j’ai emprunté mon âme à D.ieu. Du Ciel, on m’a prêté mon âme. « Otah Avakech » : je demande que cette âme me soit prêtée à l’avenir mais les lois de l’emprunteur sont très strictes. Celui qui emprunte est responsable des dommages qu’il cause à ce qu’il a emprunté, même c’était un cas de force majeure. Dans ce cas, comment trouverais-je la force de préserver mon âme ? Il existe une loi qui protège l’emprunteur : si le propriétaire de l’objet prêté se trouve avec l’emprunteur au cours du travail et qu’un dommage survient à l’objet, l’emprunteur est dispensé de payer le dommage. « Chivti Beveth Hachem Kol Yémé ’Hayaï » : je demande donc de résider dans la Maison de D.ieu tous les jours de ma vie, de me trouver avec le Prêteur en permanence au cours de mon « travail », de mon service. Si je n’ai pas réussi à garder convenablement l’âme qu’Il m’a prêtée, je n’aurai rien à payer car le Prêteur se trouvait avec moi.
Lorsqu’un homme, avec son épouse et ses enfants, cherche la réponse aux questions posées dans l‘ouvrage A’hat Cha’alti, son foyer et sa table de Chabbath en particulier, se transforment en un Beth Hamidrach dans lequel résonne la Voix de la Torah en permanence. Ainsi, on pourra mériter que se réalise la deuxième partie du verset : « Chivti Beveth Hachem Kol Yémé ’Hayaï – que je réside dans la Maison de D.ieu tous les jours de ma vie » – de se rapprocher de D.ieu, de la longévité et de la paix. Avec les qualités et les capacités dont D.ieu l’a doté et les efforts qu’il a investis dans la Torah, Rav Erez ’Hazani a mérité d’être de ceux qui réussissent à faire partager le goût suave de la Torah à ses prochains. Heureux est son sort ! De tout cœur, je lui adresse ma bénédiction et lui souhaite qu’aucun incident fâcheux ne vienne contrecarrer ses efforts. Qu’il mérite de continuer à sanctifier le Nom de D.ieu. Avec toute mon affection, Its’hak Zylberstein
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Avant-propos Il est rapporté dans le Midrach (Vayikra Rabba, Chémini 12) qu’un Juif alcoolique était tant habitué à boire qu’il avait vendu tous ses outils et objets pour acheter du vin. Ses fils se faisaient du souci : « Notre père gâche sa vie et son argent ! Il nous faut trouver un moyen pour le soustraire à sa consommation exagérée de vin » se disaient-ils. Une décision fut finalement prise : « Donnons à notre père une leçon. Demain, lorsqu’il s’enivrera de nouveau, nous le porterons jusqu’au cimetière ! » Les fils de l’ivrogne nourrissaient l’espoir que lorsque leur père se dessaoulerait et se trouverait au milieu des tombes, il serait si bouleversé qu’il se dirait : ’Comment puis-je gâcher ma vie à des sottises pareilles ?’ ’Il se débarrassera ainsi de cette mauvaise habitude !’ se disaient-ils.
Ainsi fut fait ! Alors que leur père était totalement ivre, ils l’ont pris et l’ont emmené au cimetière situé à l’extrémité de la ville. Le jour même, deux négociants en vins qui transportaient un grand chargement de tonneaux de vin de qualité sont passés près du portail du cimetière. Au lieu du calme habituel du cimetière, ils entendirent un tel tintamarre qu’ils craignirent pour leur vie « Peut-être des brigands sont-ils arrivés en ville et vont-ils voler notre vin ? Comment le cacher ? » se sont-ils dit. Après mûre réflexion, ils sont arrivés à la conclusion que l’endroit le plus sûr, où personne ne pourrait découvrir les tonneaux de vin fin, était le cimetière ! Les négociants se sont donc dépêchés de s’y rendre, ont déposé leurs tonneaux en ce qu’ils croyaient un lieu sûr, et ont quitté les lieux.
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Et voilà que notre ivrogne se réveille. Dès qu’il ouvre les yeux, que voit-il audessus de sa tête ? Un tonneau de vin dont le robinet se trouve juste à côté de sa bouche. Merveille de merveilles ! Il ne lui reste plus qu’à l’ouvrir et voilà qu’un vin de qualité se met à couler généreusement dans sa gorge ! Il boit à volonté, s’enivre de nouveau et s’endort profondément. Au bout de trois jours, les frères se disent : « Et si nous allions au cimetière voir ce qu’il est advenu de notre père ? » Une fois sur place, ils le voient couché au même endroit, entouré de tonneaux de vin et la bouche collée au robinet d’un des fûts comme à un tuyau l’abreuvant sans interruption. Impressionnés, les frères s’exclament : « Papa ! Même ici, ton Créateur ne t’abandonne pas ! » A’hat Chaalti – Ne vouloir qu’une chose : la Torah Que désirent nos Sages nous faire comprendre par ce récit ? Ont-ils voulu nous apprendre que même un ivrogne peut accomplir des miracles ? Notre Maître, le Rav de Poniewicz, explique : « De ce Midrach, nous apprenons un grand principe : pour que D.ieu accepte de combler nos manques et nos désirs, nous devons, de notre côté, montrer une volonté puissante, une volonté qui doit remplir tout notre être, comme cet ivrogne dont toute la volonté consistait en une seule et unique chose : le vin. Il le désirait au point de vendre tous les objets de sa maison pour l’obtenir. Telle doit être notre ambition : grandir dans la Torah (ne dit-on pas que le vin, c’est la Torah, comme il est écrit : « car Dodékha (Ta Torah orale) est meilleure que le vin » et ainsi que le dit David Hamélekh : « Je ne demande à D.ieu qu’une seule chose (A’hat Chaalti), et c’est elle que je recherche » Elle et rien d’autre ! Je n’ai qu’une seule et unique requête à Lui exprimer : « celle de résider dans la Maison de D.ieu tous les jours de ma vie. » Si c’est cela que tu veux, si cela t’enthousiasme au point de demander et d’absorber toujours plus de Torah, alors les portes du Ciel s’ouvriront pour toi, et tu seras rassasié de Torah au-delà de ce que tes forces t’auraient permis ! » J’adresse mes louanges au Maître du monde, Source de toutes les bénédictions, pour tout le bien qu’Il m’a accordé, pour la bonté et la miséricorde par lesquelles Il nous a élevés. Il m’a fait vivre jusqu’à ce précieux moment où j’ai le grand privilège de présenter le deuxième tome de la série « A’hat Chaalti » où
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s’entrelacent, dans les belles histoires des Grands Maitres des générations, des questions et des réponses passionnantes et instructives, venues tout droit du trésor de connaissances de notre Maitre Rav Its’hak Zylberstein dont toutes les paroles de Torah portent le sceau du goût suave de la Torah. C’est avec crainte et une immense gratitude que je remercie du fond du cœur notre Maître qui nous a dirigés vers la lumière de la Torah et nous y a fermement établis. Dans tous ses faits et gestes, notre Maître représente, pour nous et pour tout le peuple d’Israël, un exemple extraordinaire. Malgré mon peu de valeur, ce grand Talmid ‘Hakham dont le temps est précieux ne m’a pas oublié et a revu tout le livre. Que le Tout Puissant lui accorde force et santé pour lui permettre, pendant de longs jours et de nombreuses années, de continuer à abreuver de Torah et de crainte du Ciel ses disciples qui boivent ses paroles avec avidité. Le but du présent ouvrage est de transmettre les enseignements de Torah de façon distrayante et d’insuffler l’amour de la Torah ainsi que l’envie d’étudier et de clarifier la Halakha. A partir de récits, dont certains sont des faits de la vie de tous les jours, se posent des questions de Halakha comme autant de défis à relever. Les questions ont pour but de stimuler le lecteur afin que, d’amateur enthousiaste, il puisse devenir un Talmid ‘Hakham avisé dont l’ambition sera de se mesurer, par la suite, à des questions plus difficiles. Là, il investira tous ses sens et ses capacités pour analyser les situations sous tous leurs angles, imaginer des solutions et remonter aux sources pour trouver la réponse pertinente. Bien entendu, l’accent est mis sur le Da’at Torah de nos Maitres, les Grands de chaque génération, la lumière qui éclaire notre chemin et aplanit la route devant nous pour nous éviter de trébucher. Puisse la lumière de la Torah être notre phare à jamais ! * Notons que le but de ce recueil est, comme dit, de susciter des débats et de la joie autour des paroles de Torah, et de rappeler le lien intrinsèque soudant les incidents quotidiens de nos vies contemporaines et la Halakha, mais non, naturellement, d’enseigner la loi pratique. Il ne faudra donc pas déterminer la Halakha à partir de notre propos !
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En guise de conclusion, adressons au Tout-Puissant une prière pour qu’Il nous permette de concrétiser la supplique du Psalmiste d’Israël : « Mon unique requête à Hachem, celle que je réclame constamment, est de séjourner dans la maison de l’Eternel tous les jours de ma vie, de contempler la splendeur de l’Eternel et de fréquenter Son sanctuaire. » (Téhilim 27, 4)
BerĂŠchit
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Beréchit Taninim (Béréchit 1,21) : de grands poissons qui se trouvent dans la mer (Rachi)
Des diamants dans le poisson
Un homme entre dans une poissonnerie et demande au marchand de lui préparer un grand poisson qu’il achète en l’honneur du Chabbath.
Le poissonnier prend un poisson et le pèse. Lorsque le client entend le prix élevé qu’il coûte, il accepte de l’acheter. (Toutes les dépenses en l’honneur du Chabbath ne sont pas comprises dans le budget annuel que D.ieu accorde à chacun à Roch Hachana.) Le vendeur s’approche du comptoir… Il écaille le poisson, le coupe et s’apprête à le vider quand, tout à coup, son regard s’éclaire ! Dans les intestins, il découvre un magnifique collier en or serti de diamants (cet incident nous rappelle le récit « Yossef Mokir Chabbath » rapporté dans le Traité Chabbath, 119) ! Lorsque le collier sera évalué, sa valeur sera estimée à plusieurs dizaines de milliers d’euros ! Très ému, le client remercie mille fois Hachem pour le magnifique cadeau qu’Il lui a donné et dit au poissonnier : « Regardez comment le Ciel me récompense pour l’effort que j’ai fait en l’honneur du Chabbath ! » Le poissonnier, tenant toujours le collier en main, objecte :
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« Désolé, mon ami, mais je vous ai vendu le poisson, pas la rivière de diamants ! C’est moi qui ai trouvé le collier et il m’appartient. » L’acheteur, de son côté, n’abandonne pas la partie : « Mais vous avez pesé le poisson, nous nous sommes mis d’accord sur le prix et vous l’avez coupé pour moi. Ce poisson est à moi et ce qui est dans le poisson m’appartient de droit ! » Qu’en pensez-vous ? Qui a raison à votre avis ? A qui appartient le collier ? Au client ou au poissonnier ? Réponse : L’acheteur n’a aucun droit de propriété sur le collier puisque, jusqu’à présent, il n’a fait aucun acte par lequel il a acquis le poisson. (En effet, l’acte d’acquisition s’accomplit en soulevant – Hagbaha – l’objet que l’on désire acquérir ou en l’attirant à soi – Mechikha). S’il en est ainsi, comment l’acheteur peut-il devenir le propriétaire du collier trouvé à l’intérieur du poisson ? Il est vrai que le poissonnier a coupé le poisson sur l’ordre de l’acheteur et que l’acheteur s’est engagé à l’acheter mais dans cet engagement, il n’y a aucun acte montrant que le client a fait l’acquisition du poisson. De ce fait, le poisson est resté la propriété du vendeur. Certes, si l’acheteur avait changé d’avis et n’avait plus voulu acheter le poisson une fois celui-ci coupé pour lui, il aurait eu l’obligation de payer la valeur du poisson au vendeur (et, dans ce cas, on aurait pu avancer l’argument que le poisson appartenait à l’acheteur). Quoi qu’il en soit, l’obligation de payer le poisson relève du Din de « Garmeï », c’est-à-dire qu’en changeant d’avis, le client « a causé » une perte au vendeur (dans le cas où le vendeur n’aurait plus la possibilité de vendre le poisson coupé à un autre client). Ce cas ressemble à celui expliqué dans le Choul’han ‘Aroukh (‘Hochen Michpat 333, 8) : « Un homme dit à un artisan ‘fais-moi tel objet et je te l’achèterai’ L’artisan le fabrique et ensuite, le client ne veut plus l’acheter. Si l’artisan dit que si le client ne l’achète pas, l’artisan essuiera une perte, celui qui a commandé l’objet a l’obligation d’en payer le prix, non pas parce qu’il l’a acheté (n’ayant pas encore fait un acte d’acquisition) mais parce que, d’après ce que dit l’artisan, il s’est donné du mal pour réaliser l’objet et il n’a, pour l’instant, aucune possibilité de le vendre à quelqu’un d’autre. L’acheteur a causé une perte à l’artisan et il a donc l’obligation de payer à l’artisan la perte qu’il lui a causée.
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En conclusion : C’est au poissonnier qu’appartient le collier.1 « Et Il les a vêtus » (Béréchit 3,21) : grand est l’attribut de bonté car la Torah commence par un acte de bonté et se termine par un acte de bonté ! A son début, il est écrit : « Hachem Elokim fit à Adam et à sa femme des tuniques de peau et les en revêtit » et à la fin de la Torah, il est écrit : « Et Il l’enterra (Moché Rabbénou) dans la vallée… » (Sota 14a). Cela nous montre qu’un homme doit avoir pitié de son prochain et l’habiller, comme il est écrit (Yechaya 58, 7) : « Lorsque tu vois une personne dénudée, habille-la. ». (Torah Temima) ***
Le don des chaussures
Il est impressionnant de voir qu’il existe, dans notre génération, des enfants d’une bonté exceptionnelle, semblables à des anges… Voici une question émouvante adressée à Rav Zylberstein par l’enseignant d’un enfant âgé de 8 ans, élève de CE2 : « Daniel, un élève de ma classe, est arrivé un matin avec de belles chaussures neuves. Pour lui faire plaisir, je lui ai montré que j’avais remarqué les chaussures neuves qu’on lui a achetées. Le lendemain, j’ai remarqué qu’un autre élève, Binyamin, était lui aussi venu en classe avec des chaussures neuves identiques à celles de Daniel. Mais ce qui a le plus attiré mon attention, c’est que Daniel avait remis ses anciennes chaussures (soigneusement nettoyées et impeccablement cirées). J’ai demandé à Daniel comment Binyamin, son meilleur camarade, était venu en classe avec des chaussures semblables à celles qu’il portait la veille et pourquoi Ceci concerne le cas où l’acheteur n’a pas payé le poisson d’avance. Si l’acheteur a payé le poisson avant qu’il ait été coupé, se reporter à la fin de l’ouvrage, en page 271. 1
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lui-même avait remis ses vieilles chaussures. Au début, Daniel a essayé de se dérober mais il a fini par me raconter la vérité (un incident qui fait chaud au cœur, d’autant plus qu’il s’agit du geste exemplaire d’un jeune enfant de huit ans !) : « Voilà très longtemps que mon copain Binyamin arrive au Talmud Torah avec de vieilles chaussures rapiécées, ce qui lui cause une honte terrible chaque jour. J’ai remarqué que, depuis quelque temps déjà, ses chaussures ‘ouvrent grand la bouche’, comme on dit… Avec le mauvais temps qu’il fait, elles prennent l’eau et il a les pieds gelés. Je sais bien, poursuit l’enfant, qu’il vient d’une famille très pauvre mais je ne m’étais jamais imaginé qu’ils manquaient d’argent au point de ne pas pouvoir acheter une paire de chaussures ! Puisque j’ai une autre paire qui n’est pas en trop mauvais état, j’ai eu l’idée de lui donner mes nouvelles chaussures et, comme cela, on aurait tous les deux de bonnes chaussures aux pieds. Grâce à D.ieu, ajoute Daniel, nous avons exactement la même pointure ! » (Comme les enfants d’Israël sont généreux, cachers et purs !) « Et qu’as-tu dit à tes parents, lui ai-je demandé. N’ont-ils pas remarqué que tes chaussures neuves ont disparu ? J’ai réussi à me dérober en ‘rénovant’ vite mes anciennes chaussures. Je les ai cirées à fond ! » (En donnant à son camarade ses chaussures neuves et non les vieilles, Daniel a spontanément agi comme le prescrit le Rambam à la fin des Hilkhot Issouré Mizbéa’h : « Quiconque donne à manger à celui qui a faim, qu’il lui donne de la nourriture bonne et sucrée qui se trouve sur sa table ; quiconque habille le dénudé, qu’il l’habille de son plus bel habit à lui. » Il est dit aussi : « Tout morceau de choix, qu’il soit pour D.ieu ! » Quelle leçon extraordinaire !) A présent, poursuit l’enseignant, que dois-je faire ? Il est vrai que Daniel a fait un geste d’une générosité exceptionnelle et que son acte monte jusqu’au Trône de gloire mais, d’un autre côté, n’a-t-il pas commis un vol à l’égard de ses parents ? Ont-ils acheté des chaussures à leur fils pour qu’il les offre à un ami ? Ma question est donc la suivante : dois-je mettre les parents au courant ? Dois-je m’adresser à mes deux élèves en leur expliquant que nous nous trouvons dans le cas où un objet a été donné sans permission ou bien ne dois-je pas m’en mêler ?
Beréchit | 23
Réponse : Rav Zylberstein a posé cette question à Rav ‘Haïm Kanievsky qui lui a répondu en s’appuyant sur le Choul’han ‘Aroukh (Ora’h ‘Haïm 343) : « Si un enfant mineur (n’ayant pas atteint l’âge de la Bar/Bat-Mitsva) mange un aliment interdit à la consommation (ou transgresse d’autres interdits de la Torah), les membres du Beth-Din n’ont pas l’obligation de l’en empêcher. » Cela veut dire que si un enfant enfreint des interdictions, son père doit l’en empêcher mais les autres personnes n’ont pas cette obligation. C’est pourquoi, même si on disait que Daniel a enfreint l’interdiction de commettre un vol en donnant ses chaussures à son ami, de toutes les façons, les personnes (autres que son père) n’ont pas d’obligation de l’en empêcher. Il est donc permis à l’enseignant de garder le silence et d’ignorer la situation. Il est expliqué dans le Rema (idem) : certains disent que chacun a l’obligation de détourner un enfant des interdictions ; le Michna Broura (107) rapporte une décision du ‘Hayé Adam selon laquelle il faut se montrer rigoureux lorsqu’un enfant transgresse des interdictions de la Torah. Quoi qu’il en soit, dans le cas qui nous concerne, il n’y a pas vraiment de vol car il parait logique de penser que, si les parents avaient su ce que leur fils a accompli dans les cieux par son geste, ils auraient apprécié son acte. La question reste juste de savoir s’il faut apprendre à l’enfant de ne pas agir ainsi. Vu que, semble-t-il, l’acte de l’enfant provient de son bon cœur et de sa compassion, il n’y a pas lieu ici de penser qu’un vol proprement dit a été commis et, de plus, il n’y a pas à s’inquiéter que l’enfant prenne l’habitude de voler. Il n’est donc pas nécessaire de l’éloigner de cet acte. Il faut aussi signaler (Michna Broura 109), que le Beth-Din a l’obligation de gronder et de frapper un enfant qui vole. Dans le cas présent, cependant, le BethDin ne frapperait certainement pas Daniel pour son acte : il l’embrasserait même pour la Tsédaka extraordinaire qu’il a accomplie ! En conclusion : l’enseignant devra complimenter l’élève qui a donné ses chaussures neuves à son camarade (en privé et pas devant le camarade pour ne pas lui faire honte), et il n’a rien à raconter à ses parents. ***
24 | A’hat Chaalti
Noa’h « Noa’h était un homme juste, intègre, dans ses générations » (Béréchit 6,9)
Le chat et la souris
Pourquoi la souris est-elle pourchassée par le chat et pourquoi est-elle la nourriture la plus prisée des chats ? Pour le comprendre, prêtons l’oreille au récit extraordinaire rapporté dans le Midrach (Béréchit Rabba, parachat Noa’h). Au commencement, le chat et la souris vivaient dans la maison d’Adam Harichone ; ils s’aimaient l’un l’autre et étaient associés. Un jour, la jalousie et l’esprit de compétition à l’égard du chat se sont introduits dans le cœur de la souris. Qu’a-t-elle fait ? Elle est allée dire à Adam Harichone : « Mon maître, le chat et moi-même, nous faisions caisse commune pour la nourriture et voilà qu’il ne me reste plus rien à me mettre sous la dent… Donne-moi la permission de tuer le chat car c’est un voleur et un fourbe. » Adam lui a répondu : « Tu as dit du Lachone Hara sur ton ami pour pouvoir le manger, aussi maintenant, c’est lui qui te mangera. Désormais, tu seras sa nourriture ! » Aussitôt, le chat a bondi sur la souris et l’a tuée. Lorsque la femme et les enfants de la souris ont vu la scène, tous ont pris la fuite vers les crevasses des montagnes, les fentes des rochers et les trous dans la terre.
Noa’h | 25
Des années plus tard, peu avant le Déluge, Noa’h a fait entrer les animaux dans l’arche. Un jour où le chat et la chatte se trouvaient côte à côte à l’intérieur de l’arche, une souris est tout à coup passée devant eux. Le chat a dit à la chatte : « Je me rappelle que lorsque j’étais petit, mon père m’a donné [à manger un membre] de cette espèce, et je l’ai mangée. Quel mets délicieux ! Je vais me lancer à sa poursuite et l’attraper ? Nous la mangerons ensuite… » La souris a surpris les paroles du chat et a pris la fuite, le chat à ses trousses. Par miracle, un trou s’est présenté devant elle. Elle s’est faufilée dans l’orifice et s’y est cachée. Le chat a passé la bouche dans le trou pour en expulser la souris mais la souris a réussi à le mordre. D’un coup de griffe, le chat a fendu la lèvre inférieure de la souris sur une longueur d’un demi-auriculaire. Le chat a fait un somme d’une heure. Pendant ce temps, la souris est sortie de son trou et s’est précipitée chez Noa’h : « Homme juste, fais-moi un acte de bonté et recouds ce que le chat, mon ennemi, a déchiré. » Noa’h lui a dit : « Va chez le chat et rapporte-moi un poil de sa moustache. » Sans un bruit, la souris s’est dirigée vers le chat endormi, a saisi un long poil de sa moustache, l’a arraché puis est revenue auprès de Noa’h. Avec ce même poil, Noa’h a recousu la lèvre de la souris (les spécialistes disent que la moustache du chat est d’une stérilité parfaite). Le Midrach conclut : c’est à propos de cet incident que Noa’h est appelé un « homme juste », Ich Tsadik, parce qu’il accomplissait de bonnes actions, Tsédakot, envers les animaux qui se trouvaient dans l’arche. De ce récit extraordinaire, nous avons une leçon très profonde à tirer : voyez la punition de celui qui dit du Lachone Hara ! Parce que la souris a dit du mal du chat, non seulement elle-même mais toutes les générations après la sienne seront pourchassées par les chats ! Nous conclurons par une question que nous inspire cette histoire : comment la souris avait-elle le droit de prendre un poil de la moustache du chat sans sa permission ?