Kaktüm #4_Décembre 2014

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KAKTÜM la culture des potes décembre 2014

#4


Au menu 2 art

15 divagations

Poub’art

3 J’y étais pas

24 musique

4 a savoir ou non

26 projet d’étudiant

6 littérature

28 REGARD SUR

Suicide

Jack’o’lantern

E.l.e.a

Parler à des miurs

L’anglicisme :

Glory owl

fight back

30 CURIOSITés

8 peu chère

Trésors méconnus de la rue des 3 mages

Tout le monde veut devenir un cat

J’vais m’habiller sur mon 33 tours

32 ludique

10 entretien

Têteketa ! Retrouve le film !

Mick Ricciotti ou Rudy Jagger ?

Remerciements :

Participation :

KOPECK

ou

La fièvre de l’écriture vous prend soudainement ? La page blanche ne vous effraie plus du tout ? Un projet personnel vous tient à coeur ? Eh bien vous êtes des petits veinards car nous invitons quiconque le veut à participer à Kaktüm. Pour cela une seule adresse : kaktum.magazine@gmail.com


Moultes péripéties, folles aventures, tourbillons de faits se sont passés pour que nous puissions sortir ce numéro béni, qui clôture cette première année Kaktüm. C’est Rudy Ricciotti qui a commencé à semer le trouble en répondant à notre mail et, miracle, en acceptant de nous accorder une interview dans son bâtiment phare : le mucem. La gente féminine de la rédaction ne s’en remet pas, la gente masculine n’y croit pas, C’EST LA PANIQUE. Ensuite, le moment tant attendu de la rencontre arrive et nous nous rappelons que nous l’avions cité dans le numéro précédent. Sous quels termes ? Euuuh. MER...CREDI... Il nous précise donc qu’il ne pense pas être « un vieux con réactionnaire » comme nous le disions dans l’article ! La jeunesse a pour avantage d’être dénuée de toute stratégie carriériste n’est-ce pas ? Déjà que l’article coupable (regard sur l’anglicisme, par Hood) avait créé des tensions entre deux rédacteurs, donnant lieu à un houleux débat. Les deux personnes concernées étant séparées par 15 000 km, et jugeant que se disputer via Skype, revenait à insulter sa grand-mère à l’aide d’une carte de voeux Hello Kitty, ont décidé de garder le magazine comme moyen de communication et d’écrire un autre article qui contrarie le précédent. C’est dans ce climat hyperactif mais apaisé au Xanax, que de nouveaux rédacteurs font leur apparition. La crème de la crème, du rédacteur de compet’ formé a Poudlard, Yale, la Comédie Française et la Star Academy. Du sang neuf !! Nous nous prenons 5 minutes pour des rock star le temps de fêter notre première vraie interview ainsi que le premier article reportage en Amérique du sud. Nous voilà immortels. Et pour tout vous dire cela devenait urgent car, vu notre hygiène de vie, nous ne ferons pas de vieux os ! Les Potes


’ art b ou

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2 ART

Il y a quelques mois, par un dimanche soir, deux jeunes étudiants font les poubelles à la recherche d’objets insolites afin de nourrir un projet en arts appliqués. En rentrant chez eux, leur vient l’idée de scanner ces objets et des compositions se créent plus ou moins aléatoirement. Et là, c’est la révélation ! C’est alors qu’une nouvelle pratique artistique pointe le bout de son nez : le POUBART. Cette pratique serait accessible à une majorité de la population, désacralisant l’acte artistique et son support. De plus, aucun moyen financier n’est nécessaire, mis à part le fait de se procurer un scanner, bien souvent disponible gratuitement dans les bibliothèques municipales. La mémoire de l’œuvre serait donc numérique ou sous forme de tirage papier. Permettant une reproduction infinie, du moins, selon la demande ! Un acte tout à fait novateur, impliquant un principe de gratuité, ce qui à l’heure actuelle ne court plus tellement les rues. En effet, nombreuses sont les personnes qui se sont penchées sur ce phénomène de récupération, créant des objets d’art ou du mobilier de décoration afin de redonner une deuxième vie aux objets que nous jetons. Mais malheureusement en délaissant cette notion de gratuité, qui est une caractéristique clef

de cette nouvelle pratique. Afin de faire connaître ce concept, des manifestations publiques sont prévues. Ces jeunes étudiants envisagent alors de s’installer durant quelques heures dans des endroits fréquentés de Marseille où chacun amènerait des objets trouvés dans les poubelles qui – soit dit en passant – regorgent de trésors picturaux et pourrait les scanner.Le point de rendezvous et l’horaire seront alors définis au préalable via les réseaux sociaux et sous forme d’affichage public réunissant deux grandes conditions du Poubart : le numérique et le support papier. Ces événements permettront à chacun de pouvoir repartir avec ses créations stockées dans sa propre clé USB ou en tirage papier sur format A4. Confiant ainsi le devenir de l’œuvre à la convenance de chacun : agrandissement, tirage en petit format, papier photo, fond d’écran pour leur ordinateur, etc. Libre cours à leur imagination et leurs moyens ! Les artistes s’appuient donc sur un principe de liberté, qu’il soit créatif ou d’appropriation. Mais d’ailleurs qui sont ces deux jeunes artistes ? Les manifestations permettront de les rencontrer, mais pour le moment, c’est un secret, alors CHUTTTTT... Une chose est sûre, c’est que l’on n’a pas fini d’en entendre parler ! Affaire à suivre... e

on

Sim


J’y étais pas mais... ça s’est sûrement passé comme ça

!

jack o’lantern

Allo, Ween ? C’est Jack. Bien l’bonsoir, c’est Jack O’Lantern. Si mon nom ne vous dit rien, bande d’incultes, les gens disaient de moi qu’j’étais un vieil ivrogne, avare, méchant, mais avant tout ivrogne. En attendant, je suis une légende, eh ouais ! Le mythe qui m’entoure a débuté un soir, un peu plus alcoolisé que les autres, où j’ai rencontré le diable. Je l’ai fait tourner en bourrique plus d’une fois ce bougre, et j’crois bien qu’il a pas trop apprécié ! Pour me punir, quand la mort m’a emporté, il m’a refusé l’entrée en enfer – le paradis voulait pas d’moi non plus bizarrement –, et m’a refilé un bout de charbon embrasé. Malin qu’je suis, je l’ai fourré dans un navet pour m’en faire une lanterne, et j’m’en suis allé errer dans le noir pour l’éternité. J’reviens sur terre chaque année, le soir qui m’fût fatal, le 31 octobre. Mais cette année, avant d’venir vous rendre visite, j’aimerais toucher deux mots à ceux qui se réjouissent tant d’fêter mon dernier jour et, plus triste encore, celui de mon dernier verre ! Tout d’abord, j’vous l’ai dit, ma lanterne c’était un navet, pas une citrouille ! Qu’est ce qu’il vous a pris ? C’est facile à trouver un navet, et bien plus pratique qu’une citrouille, de dieu ! C’est aussi dur à confondre qu’un sapin d’Noël et un plug anal

nom de nom (sic). Le respect des traditions et des symboles se perd, moi j’vous le dis. Et puis toi, profiteur capitaliste, la date de ma mort t’arrange plutôt bien non ? En plein dans la « période creuse » avant les fêtes de Noël, tu dois t’en mettre plein les poches mon salaud ! Alors cette année pense à moi. Quelques coups à boire pour me remercier ça m’semble plus qu’normal. Il y a aussi l’attitude de tous ces minots qui m’irrite un peu. Chaque année, ils braquent de braves gens, chez eux, qui font semblant d’avoir peur et les gavent de bonbons ! C’est grâce à moi qu’ils peuvent se farcir toutes ces saloperies, et pas un remerciement. J’connais un type, un collègue de comptoir, il leur fait croire chaque année que c’est lui 3 qui leur amène des cadeaux à Noël. Sur J’y étais pas un traineau volant qu’il leur dit – celui là même qui lui sert à faire les poubelles – et ça leur fout des étoiles plein les yeux à ces niais ! Bon, c’est pas tout ça mais faut que j’me prépare pour mon jour de sortie. J’aurais pu m’inventer une autre vie moi aussi, mais bon, j’suis un vrai, moi, Jack’O Lantern ! On s’retrouve au comptoir, et qui sait, si vous y passez du temps et y mettez du cœur, p’têt’ bien qu’ça fera d’vous une légende ! rem’s


parler à des murs

D

ans la bande des Potes, nous sommes pour la plupart contaminés. Et tous volontaires. Seule consolation, nous ne sommes pas les seuls. Ultime colocataire, mauvais camarade, il connaît quasiment toute ta vie et ne se gêne pas pour la dévoiler aux autres. Vous avez compris de qui je parle ? Facebook bien sûr. Pourquoi s’eston volontairement asservi à divulguer une bonne partie de notre existence, si ce n’est sa totalité, sur ce site ? Loin de moi l’idée d’intenter un procès aux facebookéens que nous sommes, mais j’aimerais plutôt tenter de comprendre.

4 à savoir ou non

Parce qu’en y réfléchissant bien, nous avions plus de choses à perdre qu’à gagner en s’inscrivant sur ce site. Au final, quel est le véritable intérêt de Facebook ? Parler à des murs ? Observer et juger l’existence d’individus ? Rechercher notre quart d‘heure de célébrité si cher à notre vieux pote Andy ? Les pertes sont plus facilement identifiables : perte du contrôle de son identité, réutilisation des données à des fins commerciales, problème sur le marché de l’emploi, harcèlement moral, exposition de l’intimité, inscription irréversible des données, et une perte assez considérable de temps. Alors bien sûr, certains me diront que le fameux livre des visages leur permet de garder contact avec une partie de leurs connaissances. Mais soyons honnêtes, il existe déjà de nos jours une multitude d’outils qui per-

mettent de maintenir ce contact (courriel, téléphone, Skype, voire les lettres – oui oui, je vous assure, ça existe encore) sans avoir besoin de se coltiner les états d’âme de Brigitte ou les invitations à jouer à Candy Crush de Maurice. Soyons sincères, nous allons sur Facebook pour nous rassurer, nous prouver que notre vie ne vaut pas celle de Régine (qui est à St-Barth depuis deux semaines) mais qu’elle est quand même mieux que celle de Jacky (qui bosse au rayon poisson d’Auchan St-Loup). Nous postons des photos pour nous créer notre petit Closer à nous : Martine à la plage, Martine mange des sushis, Martine est charrette, Martine a une conscience politique alors Martine poste des vidéos de Taddei soutenant la Palestine … à quoi cela mène-t-il au final ? A-t-on vraiment besoin de se créer un micro-univers du « soi numérique », dédoublé et fantasmé ? Il ne faut pas non plus voir dans cette transformation sociale seulement du négatif : l’observation constante de sa propre personnalité au moyen du numérique permet peutêtre de se connaître et de s’accepter plus facilement, sorte de connais-toi, toi même 2.0. Nous pouvons mettre en avant tel aspect de notre personne, choisir ce que nous voulons montrer aux autres de notre identité, rencontrer des personnes qui ont les mêmes centres d’intérêts. Cependant, je reste persuadée que ces rencontres virtuelles peuvent se faire sans étaler l’intégralité de sa vie. Si une personne est passionnée comme moi, disons,


par l’ostréiculture, a-t-elle néanmoins besoin de savoir qu’en 2008, j’ai frétillé de tout mon corps durant un concert de Francky Vincent ? Info peu propice à la rencontre n’est-ce pas ? Petit retour sur une expérience menée récemment par l’entreprise : Facebook a subrepticement modifié les messages reçus par 700 000 de ses utilisateurs afin d’analyser si les bonnes ou mauvaises nouvelles lues sur le réseau social peuvent avoir un effet sur l’humeur des internautes. C’est à dire que le site a volontairement manipulé les émotions d’un milliard de personnes inscrites. Un peu choquant du point de vue éthique n’est-ce pas ? Unique défense de Facebook, somme toute un peu légère : l’entreprise a reçu le consentement de chacun de ses utilisateurs car ils ont tous accepté les conditions générales – vous savez, le truc que personne ne lit – lors de leurs inscriptions. Ainsi, du fin fond de la Californie, notre petit Marco dans son joli hamac, peut donc légalement, faire mumuse avec les données personnelles des citoyens du monde... Imaginez un peu les enjeux stratégiques d’une telle centralisation de données. Manipulatrice de données, hypocrite ET propagandiste, voici le tiercé gagnant bleu et blanc ! Mais malgré cette connaissance des faits, je suis moi-même accro à ce site. Pourquoi ? Parce qu’il est pensé pour. Premièrement, ce site joue sur le besoin naturel chez l’homme de reconnaissance, la peur universelle d’être oublié. Chaque photo aimée, chaque statut

partagé, nous rassure sur notre existence et notre personnalité, nous prouvant que nos idées ne sont pas si insignifiantes que ça puisque quelqu’un les aime. Deuxièmement, le site valorise les signes de présence. Ce que l’on voit d’une personne, c’est en premier lieu, son historique d’activité sur l’interface, pas ses informations personnelles : la vidéo captivante de trois chatons en train de s’empiffrer qu’elle vient de poster, sa position géographique actuelle, hautement signifiante dans votre vie à vous… Facebook encourage ce dispositif car c’est cela qui fait vivre le site. Sans cette activité quotidienne, l’entreprise ne se ferait pas 1,5 milliard de dollars par an et ça Marco n’en veut pas ! Nous sommes au final devenus de parfaits employés d’une boîte qui ne s’ennuie plus à payer ses travailleurs puisqu’ils le font naturellement et sans réclamer de salaire. En utilisant le service – peut-être ne nous ontils pas rendu si service que ça – que propose l’entreprise californienne, nous lui permettons de gagner un paquet de blé tout en lui servant sur un plateau nos données personnelles, pour qu’elle puisse les exploiter afin de gagner encore plus d’argent. Royal. Sur ce, après avoir longuement conversé avec un traitement de texte, le temps est venu pour moi de retourner parler à des murs, c’est quand même moins engageant qu’échanger quelques mots avec un être humain… chub

5 à savoir ou non


glory Commençons par un avertissement. Si, le concept de Glory Hole n’évoque rien en vous, passez à la page suivante dès la fin de cette phrase. Voilà. Maintenant. Merci. Rassurons tout de même les dernières âmes perverses restantes, nous ne parlerons bien heureusement pas de cette pratique dégénérescente, mais de Glory Owl, blog de bandesdessinées, animé par plusieurs auteurs. Avec un nom pareil, fleurant le dadaïsme pop et le génie absolu, vous pensez bien que ses têtes pensantes ne représentent pas l’archétype de l’enfant de chœur. Vous n’avez pas tort. Bite, merde, porno, enculé, pute, voici leur vocabulaire. Burlesque, cynisme, violence, voilà leur conjugaison. Quant à leur syntaxe, il n’y a pas plus radical : 3 cases, parfois 2, rarement 4. D’une concision et une efficacité extraordinaire. à chaque publication c’est un rire gras, qui s’empare impudiquement de tout votre être. Et vous ne pouvez pas le retenir. Il vous tort, vous retourne, puis finalement vous révèle une cruelle vérité : ces mecs sont des génies — bien meilleurs que vous ne le serez jamais


owl — mais comment font-ils ! La première chose venant à l’esprit, c’est qu’ils nous prennent par surprise pratiquement à chaque fois. Difficile de prévoir sur quoi l’on va bien pouvoir tomber. Giovanni Pescatore en parrain mafieux impitoyable mais au demeurant un virtuose des claquettes. Ou bien l’inspecteur Mac Kinky arrêtant sans ménagement un collègue portant un costume de mauvais goût. Ou encore faire connaissance avec le patron danseur de ballet de Peterson. La seconde, c’est qu’ils n’ont que peu de limites. Plus c’est dérangeant, incongru, absurde, mieux c’est. Et c’est justement cela que nous adorons. A l’heure où l’humour sur Internet se fait de plus en plus plat, morne, policé, bref qu’il n’arrive que péniblement à vous arracher un maigre sourire, ces auteurs là détonnent. Ils ne rentrent dans aucune cases, arrivent à se renouveler, ne se vautrent pas inlassablement dans les mêmes tics. Arriver à évoluer, à surprendre dans un format si contraint tient de la haute performance. Leurs passifs les aident aussi. Tous sont auteurs de bandes dessinées depuis quelques années maintenant et se sont entraînés sur

ce format avec d’autres projets dans le même ton, le même humour, voire encore plus trash ; comme peut allégrement l’être le héros de Gad, Ultimex. Un genre de dandy contemporain ayant un énorme globe oculaire en lieu et place de sa tête et flirtant régulièrement avec les plus infâmes rites sataniques, tels que la nécrophilie, le viol et le rapt d’enfant. Nous ne développerons pas plus, n’ayant pas un profond désir de perdre définitivement notre audience, nous laisserons les quelques braves s’y aventurer à leur risques et périls. Mais Glory Owl n’est pas qu’un blog, c’est avant tout une bande d’amis qui fait face à un succès croissant. Le blog vient de publier son 200ème billet, et publie les meilleurs dans une BD qui vient tout juste de paraître. Ils ont aussi collaboré avec l’excellent magazine marseillais de BD, AAARG, que l’on vous recommande au passage. Et le tout aussi succulent site Golden Moustache vient de les accueillir en tant que chroniqueurs réguliers. L’avenir est radieux pour eux et l’on en frétille d’avance. Hood

7 littérature


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Tangerine Voilà le rendez-vous des mélomanes qui aiment encore écouter la musique sur un support palpable. Ce disquaire propose des vinyles, CD’s et DVD’s de tous genres, neufs et d’occasions à des prix abordables. Un pied dans cette boutique et c’est un bond dans le passé, de vieux vinyles de Nirvana, des Wailers en passant par le King vous rappelleront vos soirées d’adolescents.

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8 peu chère

Le Point Bar./re. Petit bar-tabac qui fait l’angle entre la rue des Trois Mages et la rue Vian, c’est un véritable lieu de détente avec son patio lumineux insoupçonné depuis la rue, caché au fond du bar lui-même peut-être trop sombre pour attirer la foule en pleine journée. Vous pourrez y lire des bouquins mis à disposition, au soleil, avec un petit rhum sorti de la collection du patron.

trésors méconnus de la rue des trois mages

La Pause Envie d’un kebab ? Pour cela pas besoin de tergiverser avec les potes sur le sujet, une seule adresse pour un sandwich-galette de luxe : la Pause. Sauce concoctée par le patron, viande marinée, petits légumes soigneusement coupés, coriandre fraîche finement ciselée et le sandwich maison reprend tout son sens. Pour les végétariens pas de panique le sandwich fallafel est un vrai régal voire une référence. Pour couronner le tout vous pourrez accompagner votre mets d’une bonne bière fraîche. Voilà un patron qui ne profite pas de sa notoriété pour monter ses prix, imbattables pour la qualité (5€ le sandwich) ; l’attente est longue mais vous pourrez occuper le temps à lire les nombreuses citations, écrites à même les murs, et qui les recouvrent jusqu’aux toilettes.


Le Lièvre de Mars Cette librairie se spécialise dans le graphisme, le design, l’architecture, l’urbanisme et la photographie en mettant en avant les petits éditeurs. Les libraires, discrets, vous laisseront lire à votre guise et seront toujours disponibles pour vous conseiller. Quelques vendredis, et de façon quasihebdomadaire en hiver, le Lièvre organise, autour d’un verre, des rencontres, expositions et lectures en nocturne.

Marcel et Simone C’est LA friperie à ne pas manquer si vous aimez farfouiller et tomber sur des vêtements sortis tout droit des Sixties. L’accueil y est plus qu’agréable et les prix très abordables alors méfiez-vous mesdames et messieurs, car il y en a aussi pour vous, vous risquerez de ne pas voir les heures et les euros passer. 7

9 peu chère

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Au Vin sur Zinc L’heure d’aller boire un coup a sonné, je vous conseille une adresse : Au Vin sur Zinc. Il serait difficile de le qualifier comme un simple restaurant bien qu’à première vue c’est ce qu’on pourrait penser. Bien sûr vous pourrez y manger un bon repas entre amis, mais vous pouvez aussi simplement y boire un bon verre autour d’un plateau de fromages. Et pour vous redonner la patate quand Morphée vous guette optez pour le Petit Couillu, rhum arrangé à base de cannelle dont seul le patron a le secret, un délice addictif ! Les habitués se donnent rendezvous tous les week-ends ce qui apporte à ce lieu une ambiance inoubliable que vous aurez du mal à quitter surtout les jours de concert. welna


Rudy jagger

10 entretien

Vous l’aurez compris, ce numéro est un peu spécial. Tout est parti d’un fantasme : s’il suffisait parfois d’envoyer un mail pour rencontrer quelqu’un ? Et si, ce quelqu’un, c’était Rudy Ricciotti ? Ni une ni deux, outlook, signez « Les Potes », cliquez sur envoyer, emballez c’est plié. La réponse fut aussi surprenante et instantanée que la demande : oui. Au départ, nous voulions interroger Rudy Ricciotti dans son premier bâtiment iconique, le Stadium de Vitrolles. L’idée nous plaisait et nous paraissait plutôt originale, voire inédite. Puis le lieu nous intriguait, ce noir bunker sur une traînée rouge, inauguré par IAM puis laissé à l’abandon après une brève utilisation, squatté par des gitans, et maintes fois promis à une réhabilitation. Après avoir potassé la question du Stadium et posé les bases de l’entrevue, les exigences logistiques ont déplacé notre entretien sur la terrasse du MUCEM. Pas mal non plus, en terme de « bâtiment iconique ». Vient ensuite la question de l’entretien. Ce n’est pas aussi évident qu’il n’y paraît. Envoyer un mail était plutôt facile, essayer d’être pertinent et d’intéresser le bonhomme était une autre histoire. Il fallait conserver une certaine liberté dans les questions, une certaine audace, sans pour autant tomber dans la caricature, de toute façon, qui se verrait demander « slip ou caleçon ? » à Ricciotti ? Il fallait être pertinent. Nous avons donc dû lire ou relire, (HQE, L’architecture est un sport de combat et Conversations imaginaires… ou pas) revisionner, noter, recouper, scruter,

citer, imaginer, préparer le terrain. Il a fallu travailler les questions, les reformuler encore et encore, se demander si l’on n’allait pas trop loin, imaginer la réaction de l’homme, anticiper ce qui pourrait ou pas se passer. L’attente a été longue, nos nerfs éprouvés, se demandant si l’on était vraiment de taille, si nous ne serions pas ridicules, effrontés, à côté de la plaque, bref, une remise en question complète et totale. Cette prise de tête inter-galactique dura jusqu’au jour Z. Il fallait y aller, prêts à en découdre sur le ring. Rendez-vous pris à 13h30. Nous avions passé en revue tous les scénarios : viendra, viendra pas, à l’heure, en retard, par où… Nous étions trois, assis sur la terrasse, à l’heure convenue. Bien évidemment, il n’est pas encore là, a-til oublié oui ou non ? Un quart d’heure plus tard, le téléphone sonne, numéro inconnu, pas de doute c’est lui. Il arrive d’ici 10 minutes, le temps de finir son café. Plus de doute, nous y sommes. Le voilà. à peine le seuil de la porte franchi que le voici assaillit par une horde d’étudiants en architecture belges. Littéralement encerclé. Un de nous se lève pour aller le chercher. Mais il est trop tard, il ne passera pas incognito. Merde. Celuilà nous ne l’avions pas prévu de scénario : notre entretien « entre intimes » prend tout à coup des airs de représentation théâtrale ou de conférence publique. Tant pis, il faudra faire avec. Il s’installe, les présentations sont faites : poignées de mains, remise des magazines, tire ton siège et assieds toi,

« On sent les coups qu’on reçoit, jamais ceux que l’on donne. » André Malraux

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mick ricciotti ? nous devenons tout d’un coup le centre du monde entourés d’une cohorte d’yeux avides d’entendre la messe. 1er régiment de cavalerie, chargez ! Si vous avez bonne mémoire, dans le précédent numéro, nous disions de Rudy Ricciotti qu’il était un « vieux con réactionnaire » (cf. Regard sur l’anglicisme). Il s’est arrêté sur cette page, et nous avons eu la mauvaise idée de lui dire qu’on le cite. Non mais quelle connerie ! Devine ? On en prend pour notre grade : Rudy Ricciotti : Donc vous pensez que le fait de ne pas être colonisé c’est une réaction de vieux con réactionnaire ? Vous commencez fort, vous êtes déjà des collabos quoi. En général c’est comme ça, tous les militants dans les écoles, les gauchistes de service, c’est les premiers lorsqu’ils sont diplômés qui font des pipes aux promoteurs. Avant de reprendre sur Malaparte : R.R : Tu liras Malaparte, en 1923, alors qu’il a 27 ans, il reproche à ses collègues italiens d’être colonisés : « Par ces idées venues du Nord qui ne nous conviennent pas. » Et moi, elles ne me conviennent pas. Je ne pense pas être un vieux con, mais je pense être totalement réactionnaire. Ce qui est ma dignité et l’espace de mon territoire politique. Voilà comme ça c’est réglé. Bon, ça c’est fait. Remise en place immédiate, avant d’enchaîner sur un « Passe-moi une

cigarette », et de décider que l’arbitre n’avait pas encore sifflé la mi-temps : R.R : Alors vous m’avez envoyé un mail en me disant : Ricciotti ceci, Ricciotti cela, le personnage... Qu’est ce que vous imaginez ? Que je fais un personnage ? Je bosse – une taffe – j’invente, je transforme la matière, je transforme le réel. Vous croyez que j’ai le temps de faire du cinéma ? Parce que je ramène ma fraise ? Parce que je dis ce que je pense et que je fais ce que je dis ? Non, ce n’est pas une posture, c’est une attitude romantique et révolutionnaire, tu comprends la différence ? Voilà, c’est tout – fin de la cloppe – j’ai presque cru qu’il allait nous l’écraser sur le front avec un souffle de fumée méprisant. Merci au cendrier de nous avoir épargné cette douleur. Après cette remise au placard, il considère la question close. Dans cette trêve, nous y voyons une rédemption. On souffle. Et il annonce la transition : R.R : Alors, qu’est-ce que vous vouliez me demander ? Bien, nous pouvons débuter. Nous commençons par lui montrer une vidéo de 1993. C’est sa première apparition sur écran, il est tout jeune, tout sage, mais commence déjà à avoir une pensée critique sur l’architecture. Dans le film, on peut voir une architecture « balnéaire ». Ce qui nous à amené à poser une première question :

« On n’est jamais pressé quand il s’agit d’arriver en retard. » Curzio Malaparte

11 entretien


12 entretien

Kaktüm : Comment bascule-t-on d’une production « commune » dans les années 1980 à une figure aussi radicale que le Stadium en 1990 ?

au niveau des yeux devant les urinoirs. On pouvait donc pisser et se regarder, on ne voyait pas la bite mais les yeux, et les mecs se fendaient la poire.

L’interview venait de se lancer. Pour le meilleur ou pour le pire, nous avions enfin démarré. En ce qui concerne la suite, le discours de Ricciotti a été condensé, mais il l’a lui même relu et approuvé, nous nous approcherons donc le plus possible de ce qui a été véritablement raconté.

K : Et comment vit-on, en tant qu’architecte, la fermeture d’un bâtiment, qui plus est, a failli être rasé ?

R.R : à l’époque, dans le début 1980, le sud de la France est ravagé par le néo-provençal. C’est une époque terrible. à ce moment là, je faisais plutôt une architecture balnéaire : blanche, fluide... Et puis il y a eu Vitrolles : c’est un non-site, il y avait donc l’idée de réactiver un site mort. Le Stadium, c’est un carré noir sur fond rouge : c’est une icône, il marque un contraste. C’est une expérimentation, comme Malevitch avec son carré noir sur fond blanc, mais aussi une référence au Land art, avec la coulée d’asphalte de Smithson. Et quand j’ai fait ce projet, les architectes vomissaient dessus : on y voyait de la violence. C’était un projet polémique, parce qu’il était très codé : on m’a reproché de faire un bâtiment sans fenêtres au pays de Van Gogh, alors que je l’érigeais en référence dans le patio des tournesols. Il y a pleins de signes dans ce bâtiment : les garde-corps, la fleur d’Andy Warhol. Et je me rappelle dans les sanitaires, j’avais mis une bande miroir

R.R : C’est extrêmement triste ! Le bâtiment ouvre, il y a des concerts. Le premier c’était IAM. Et puis le Front National arrive au pouvoir, il s’énerve contre le bâtiment en disant : « Mais de qui se moque l’architecte ? C’est une décadence, un cataclysme de Tchernobyl... », enfin j’ai eu le droit à tout, et je n’étais pas soutenu par la population architecturale qui détestait ce bâtiment... Ce qui a amené l’intercommunalité à supprimer les maigres subventions qui faisaient vivre le Stadium, et qui a provoqué sa fermeture. Il ne faut pas croire que la salle survit avec les ventes des places de concert, la culture c’est aussi des subventions. L’intercommunalité est autant responsable que la municipalité de la fermeture du bâtiment, qui se retrouve abandonné et devient un squat... Mais c’est infâme ! K : Aujourd’hui, la réouverture du Stadium est en projet, pensez-vous que cela est dû à votre notoriété ? R.R : Ça j’en sais rien, mais c’est possible.

« Les choses ont une vie bien à elles ; il faut réveil er leur âme, toute la question est là. » Gabriel Garcia Marquez


J’ai un copain philosophe qui dit : « Ils ne prestigieuse, me dit : « J’ai rien appris à peuvent plus se taire. » Il y a le Pavillon noir l’école. À part des maths. » N’attendez pas à Aix, le MUCEM, mais l’histoire commence de l’enseignement qu’il vous éclaire toutes avec le Stadium. Et les pistes. C’est « Je ne sais plus ils ne peuvent pas aussi une démarche dessiner de mes continuer à être aussi personnelle. Ce n’est infamants à l’égard de pas un métier que mains.» ce bâtiment. Il peut l’on fait en dilettante : fonctionner, mais il faut le réhabiliter en si vous n’êtes pas prêt à y passer 10h tous tant que salle de rock. Il peut recevoir des les jours pendant toute votre vie, alors concerts, mais aussi des matchs de boxe, changez de métier immédiatement. Il faut un des matchs de handball, et tous types de engagement très puissant. concerts, peu importe. K : Pour vous, l’apprentissage se fait donc Mais il faut le restaurer, réparer le sur le terrain et dans la construction? vandalisme dont il a été victime ! Ils ont même imaginé trouver un budget pour le R.R : Totalement. Assez curieusement, la détruire, mais cela coûterait plus cher que seule chose que j’ai apprise à l’école de Gede le réhabiliter ! La faculté de haine et de nève, c’était des cours typiques à cette école, nuisance de la bureaucratie fasciste est telle les cours d’ordre de grandeur. Ça c’est inque la fabrication du négatif mobilise plus croyable, ça m’aide beaucoup : à calculer une d’énergie que celle du positif. surface, une masse, un volume, une quantité, et savoir où tu mets la virgule. Prendre la K : À la vue de votre parcours, quelque chose mesure des chiffres. Ils ne sont pas l’ombre nous a intrigué : pourquoi avoir commencé portée de la forme ou de la pensée, mais sont par une école d’ingénieur ? aussi des éléments structurants. C’est très important d’avoir une exigence mathémaR.R : J’ai fait un diplôme d’ingénieur tique : l’inspiration peut être adossée à une d’opérette. Je n’ai rien appris. De toute transfiguration du réel qui passe par la dicfaçon, je n’ai rien appris à l’école d’ingénieur tature des mathématiques, c’est à dire la dicde Genève, je n’ai rien appris à l’école tature du raisonnement. D’ailleurs je pense d’architecture de Marseille, j’ai tout appris que le dessin à main levé n’est plus du tout avec les entrepreneurs, les gens que j’ai adapté. Quand on est étudiant, il faut dessirencontré dans le métier. Tu n’apprends rien ner, mais quand vous serez professionnels à l’école. Même mon fils, qui est ingénieur vous n’aurez plus le temps. Je ne sais plus des Ponts, qui est quand même une école dessiner de mes mains.

« Quelquefois, c’est un vrai problème, de respirer. » Marilyn Monroe

13 entretien


K : Après l’école d’ingénieur donc, d’où vient le désir d’entrer dans l’architecture ?

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K : À l’image d’une production qui se singularise avec le temps, le personnage s’extirpe de la torpeur environnante – nous parlons d’un milieu architectural très attentiste – en se radicalisant et en refusant les concessions. Est-il nécessaire d’être radical en tant qu’architecte ?

R.R : Parce que je voulais être architecte. Et quand j’ai visité Luminy, j’étais émerveillé, par cette lumière, ce bâtiment blanc, ces marches en marbre... Y’avait une dimension déifiante, c’était un peu l’Acropole, le Parthénon, et j’ai dit « Je veux aller là. » J’idéalisais. Et puis R.R : Bon je vais faire très attention à ce évidement, j’ai découvert la médiocrité de que je vais dire, parce que vous êtes de la pédagogie à cette époque-là. C’était une jeunes architectes et que vous êtes exposés catastrophe. Mais pour à de nombreuses revenir à la question, « Admirez le travail difficultés. Je veux qu’il n’y ait pas de juste rappeler que le des autres. C’est malentendus : il n’est fond de ce métier, c’est beaucoup plus pas nécessaire d’être que l’architecture est, ingénieur pour être productif que d’être par sa nature, dans la dans la haine. » architecte. La réponse, difficulté existentielle. c’est de s’intéresser Et je ne veux pas aux autres disciplines. Et je voudrais vous encourager des étudiants à être radical délivrer un message : contrairement à ce sans mesures de protection. Il faut croûter. que l’on vous apprend à l’école, à haïr vos Demain, il va falloir trouver du job, il va falloir confrères, à les mépriser... Gardez votre en vivre de ce métier. La vraie noblesse, c’est énergie. Essayez de vous développer dans de vivre de son métier. Et l’aristocratie, c’est l’empathie, dans la bienveillance. Admirez le de vivre de ce métier sans se compromettre, travail des autres. or on arrive toujours à se compromettre, parce que l’architecture c’est un compromis. C’est beaucoup plus productif que d’être Mais la question du compromis doit toujours dans la haine. La haine ne produit rien, être réévaluée, pour savoir jusqu’où elle c’est la destruction de soi-même. Croisvous mène. Tous les coups sont permis pour moi, j’ai soixante-deux ans, je ne suis plus radicaliser votre position, mais là, il faut être tout jeune, j’ai compris. Si tu n’es pas dans mariol. Je me rappelle de la première maison la bienveillance, tu vas disparaître, tu vas contemporaine que j’ai faite. Elle était t’asexuer. Tu vois, c’est presque un message très longue, presque la copie de la maison christique : nous sommes là pour développer d’Eileen Grey. Le client m’avait dit : « Je veux du bien commun. une maison provençale. » Suite page 19

« Les grandes fureurs, comme les grands whiskies, requièrent une longue fermentation. » Truman Capote


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Et je lui présente le projet en disant : « Bon voilà, c’est une belle maison provençale, avec un hall d’entrée provençal, des fenêtres provençales qui cadraient la vue sur le paysage... » Bref, je lui ai dit ce qu’il voulait entendre, mais je lui ai fait une maison totalement contemporaine. Donc n’hésitez pas à être mariols, soyez rusés, sinon vous allez vous crasher. Tous les coups sont permis pour atteindre l’objectif, l’architecture, c’est du full-contact. Mais pour ça, il y deux mot magiques : s’il-vous-plaît et merci.

dans d’autres contextes. On a détruit des générations d’étudiants en architecture avec le procès en humilité, tu vois. Il fallait être humble à tout prix, parce qu’on avait des politicards protestants d’un courant de gauche dominant, et qui ont fini par porter leurs fantasmes déistes dans la pédagogie. Jusqu’à produire une confusion entre la pédagogie de l’architecture et l’architecture de la pédagogie. Soyez prudents avec ça. Après, sur la question de l’anxiété, je suis toujours très anxieux. C’est ma manière d’être et une façon de travailler. Je ne tire jamais en K : Après de longs et éprouvants chantiers, premier : je ne convoque pas mes assistants le MUCEM, Jean Bouin... On vous sent plus en disant : « Je veux ça, fais ça. », mais je leur modéré, moins anxieux, moins hargneux, dis : « Va voir, va fouiller, va mettre les mains vous portez un certain hommage à la dedans, va essayer de te faire piquer par une technique... Nous aurions presque peur que araignée, va... Et dis moi ce qui va pas dans le vous deveniez humble. Votre avis ? dossier. Dis moi où ça marche pas. » Ensuite je fais la synthèse. Je prends mes positions et R.R : Bon il y a plusieurs questions dans mes responsabilités de patron. On navigue à ta question. D’abord sur la question de vue, et on verra bien, on y arrivera toujours. l’humilité : le poète anglais William Blake On est plutôt dans la gestion de la paranoïa. dit : l’humilité n’est On ne peut pas, sans « L’humilité ce que le masque de la anxiété, aborder la n’est pas un projet, question de la création. vanité. Faites gaffe du commerce et du c’est même pas une Un économiste anglais négoce que vous allez attitude, c’est une a dit : « Tomorrow, faire de l’humilité. C’est only paranoiacs circonstance. » pas un projet. évitez will survive. » Un de tomber dans le piège de l’empalement économiste, c’est pas dans la finance, c’est calviniste, ce supplice dont Henry IV disait : un mathématicien, et le mec il arrive à « qui commence si bien et finit si mal ». cette conclusion. Mais il a aussi un coté L’humilité ce n’est pas un projet, c’est même psychopathe : à un moment donné, il faut pas une attitude, c’est une circonstance. Il passer à l’acte, couper un arbre, creuser un convient de l’être parfois, et de ne pas l’être trou et couler du béton. Tu mets ton nom

« L’amour peut naître d’une seule métaphore. » Milan Kundera

19 entretien


sur les choses, tu es responsable, et quand le processus est engagé, il est assez irréversible. Tu ne peux pas dire je me suis trompé, c’est trop tard. C’est la dimension psychopathe de ce métier : un processus irréversible. Comme un avion sur la piste : à une certaine vitesse, tu es obligé de décoller, tu ne peux plus t’arrêter en disant : « Merde, j’ai oublié un passager. » C’est pareil.

20 entretien

Marseille qu’ils soient généreux avec les étudiants. Je suis révolté quand j’apprends qu’au terme du premier trimestre de la première année, il y a un échec considérable. Je trouve ça atroce qu’on décourage comme ça des étudiants, qu’on les massacre. Ceci dit, j’ai tabassé les enseignants pendant des années. Puis un jour, j’ai arrêté. Quand j’ai eu le Grand prix national d’architecture en 2006, on m’a dit : « Arrête de taper sur à ce moment-là, les belges ont dû partir. La l’école d’architecture de Marseille. » Je l’avais salle se vide, et nous sommes enfin en backboycotté pendant 10 ans, j’ai refusé d’y faire stage, en face-to-face, des conférences. Et «marseille est la avec M. Il aurait pu puis j’en suis arrivé à partir avec eux, mais la conclusion que cette meilleure école peut-être avions-nous école est parmi les d’architecture de réussi à l’intéresser. meilleures en France. france. » Il lâcha donc « Tchao Peut-être même la professore ! » à l’encontre du professeur belge, meilleure. Parce qu’elle est très exigeante. Il y avant de se retourner vers nous en disant : « Bon a une disparité doctrinaire, un professeur ne je vais rester encore un peu avec vous. » Coolos. ressemble pas à un autre. C’est comme une biodiversité. Et il y a quand même un niveau K : Vous avez écrit que « la posture du sage » d’exigence très élevé dans le diplôme : sur ne vous intéressait pas, mais vous avez la question du projet, sur les recherches et formé beaucoup d’architectes marseillais. les résultats. En même temps, la ville est êtes-vous finalement un professeur malgré un véritable laboratoire. Elle a son tissu vous ? urbain, son propre paysage, sa topographie, ses formes architecturales... Dans son R.R : Je ne sais pas. Tous ceux qui sortent épopée stylistique aussi. C’est une richesse de chez moi ne font pas du Ricciotti, ne phénoménale. ressemblent pas à Ricciotti, ils ont leur autonomie, leur linguistique, leur identité K : Pasolini, Buzzati, Malaparte, Calvino... et leur expérience professionnelle. Je ne Vous citez beaucoup d’italiens. Seriez-vous fabrique pas des enseignants, je ne suis pas nostalgique de vos racines ? dans la doxa, je fabrique des pirates. Après, j’attends en revanche des enseignants de R.R : Je suis surtout nostalgique de ne

« Vous répliquerez que la réalité n’est pas forcée le moins du monde d’être intéressante. » Jorge Luis Borges


pas avoir leurs talents. J’aimerais avoir la perspicacité politique de Pasolini, cette capacité de décrire le réel propre à Malaparte, quand tu lis Malaparte tu vois comment il décrit des situations.. Ce sont des fresques, des peintures colossales. Quand je lis Malaparte, Pasolini, je me sens moins seul. Sinon t’as peur. C’est important de trouver des maîtres. En architecture c’est fini, il n’y a plus de maîtres. C’est plutôt la période des escrocs, des gangsters. Ne me demandez pas de citer des noms ! K : Une question peut-être un peu plus personnelle : êtes-vous croyant ? R.R : C’est une bonne question ça. Euh... Non, mais je me sens chrétien. C’est un truc particulier : je suis un chrétien agnostique. Je cite Pasolini : « Tous ces catholiques du Vatican qui ont oublié d’être chrétiens. » Je crois aux valeurs du christianisme : la bienveillance, le partage... C’est le b.a-ba pour être heureux ensemble. Je crois au principe de l’amour par exemple : on ne peut pas vivre sans amour, c’est pas possible, quelle souffrance, quelle douleur. Après je ne suis pas du tout mystique, mais alors pas du tout. Je suis plutôt quelqu’un de rationnel. Mais je me sens chrétien au sens des valeurs. Je ne suis pas athée, je suis agnostique, c’est-à-dire dans le doute. Et je précise un « agnostique chrétien », alors ça, dans cette catégorie on ne doit pas être nombreux sur la planète. On sait jamais, des fois que ça tourne mal, vaut mieux rester proche de l’église ! Un jour, je réparais

une église avec un artisan à Bandol, je sors de l’église, et je le vois qui se signe, mais il était communiste ! Et je lui dis : « Simon, vous êtes communiste, mais vous vous signez, depuis quand ? » et lui de me répondre : « Jamais en rentrant, mais toujours en sortant. Ça porte malheur les églises. ». C’est fabuleux non ? K: Comment se forge-t-on un point de vue critique ? Vous vous appuyez sur des lectures, des œuvres visuelles, sur une culture architecturale... Mais nous pensons qu’il y a plus que ça... R.R : D’abord, c’est pas possible d’avoir ça quand on est jeune. C’est un métier qui est atroce, tu n’as pas de maturité architecturale avant la quarantaine. à quarante ans tu es un jeune architecte, à cinquante tu commences à y voir clair, et à soixante si t’as la maîtrise du processus, c’est déjà pas mal. Bref, c’est un métier de vieux. C’est comme un chirurgien : tu ne peux pas être un chirurgien du cerveau en cinq ans de formation. De la même manière dans l’architecture, tu ne peux espérer t’accomplir qu’en t’appuyant sur l’expérience et sur des croyances. L’expérience, c’est le temps qui te la donne, et les croyances, ça vient ou ça vient pas. Tu peux être dans l’indifférence, mais l’indifférence c’est meurtrier. Il faut, pas à pas, construire cette croyance. K : Nous parlions de l’âge des architectes : vous avez maintenant 62 ans, comment envisagez-vous la suite ?

« Dans un monde sans mélancolie, les rossignols se mettraient à roter. » Emil Cioran

21 entretien


22 entretien

R.R : Je suis capable d’arrêter du jour au la peur, dans l’anxiété… Donc j’envisage de lendemain. Je ne vis pas de manière très ralentir progressivement, et d’avoir autour de heureuse le fait de vieillir, parce que je suis moi des assistants de plus en plus présents, nostalgique, je n’ai pas vu passer le temps. Je de plus en plus autonomes, de plus en plus me souviens, quand j’ai passé mon diplôme, solides. Je fais confiance à mes pirates. Tu sais en 1980. Je me vois rentrer dans la salle, je ce que c’est un pirate ? Un pirate obéit à des me rappelle des mots règles. Contrairement à que je disais... J’ai pas ce qu’on peut imaginer, « Sur le navire, le vu venir le coup. Trente capitaine des pirates le pirate n’est pas un quatre ans après, j’ai il était révocable de voleur. Sur le navire, le pas vu passer le temps. capitaine des pirates jour en jour. » Ça m’affecte, ça me il était révocable de met plein de nostalgie, jour en jour. Ils avaient de tristesse. C’est trop rapide. C’est pour ça des règles, mais ils ne rechignaient pas que je vous l’ai dit, ne perdez pas de temps, au combat. Ils ont été formés à la dure. Ils essayez de passer à l’acte le plus rapidement veulent en découdre. Putain il fait froid... possible. Gérez tous les temps disponibles. Il faut vivre au maximum. Après, pour l’agence, C’est vrai. Nous étions tous glacés et agacés par je ne sais pas ce que je vais faire. Peut être que ce mistral qui vous chatouille l’épiderme avec je passerais progressivement un peu la main fraîcheur. L’interview n’allait pas tarder à se à mes assistants, les plus méritants. De toute terminer. Nous avons donc posé notre dernière façon mon fils ne veut pas la reprendre, et question : c’est pas comme ça qu’on fait. Il faut faire son trou. Parfois quand on lui demande « C’est K : Nous savons que vous aimez beaucoup pas difficile de porter le même nom que son le rock, vous avez notamment dit : « Alan père ? », il répond : « C’est plus difficile de Vega me touche au cœur. » Nous avons été porter le même nom que son frère. » C’est surpris par cette référence : quelle relation marrant hein ? Parce que son frère, il est entretenez-vous avec cette musique ? costaud. Et puis sinon, je prends du temps avec les étudiants. C’est possible encore R.R : ça me fout un bourdon Alan Vega... Je quelques années, et en même temps je trouve ça émouvant. Je l’ai vu en concert à donne pas des rendez-vous à n’importe qui. Paris, c’était magnifique. C’est Elvis Presley... C’est le fruit de l’expérience que je transfère. J’aime le rock et la musique classique. Rien J’aurais bien aimé que des professionnels d’autre. Je supporte pas la musique de boîte, prennent du temps pour me parler, quand la techno, la house.. Pour moi ça ne veut rien j’étais étudiant, jeune architecte, j’étais dans dire. Il faut leur appliquer la charria aux DJs.

« Ceux qui songent les yeux ouverts sont dangereux parce qu’ils ne savent pas quand leur songe prend fin. » Hugo Pratt


Mais le rock est une bonne piste d’inspiration pour l’architecture. Pourquoi ? Parce que le rock est toujours esthétique, toujours politique et toujours positif. Et il finira par chantonner un air qui finalement, le caractérisait assez bien :

sympa. » Nous étions enchantés. Mais le vent nous avait vidé de notre énergie, et donnait de son air gris, un souffle tristounet à cet adieu d’octobre. Adieu ? Pas sûr... Samedi après-midi, deux jours après l’entretien, le téléphone sonne, numéro non-enregistré : « Ricciotti, à l’appareil. »

R.R : écoute rien que les paroles de Sympathy for the devil des Stones : « Est-ce que je peux me présenter, Je suis le diable, Ne croyez pas tout ce qu’on dit sur moi, Je suis tout à fait présentable, D’ailleurs j’habite dans les beaux quartiers. » Le dictaphone affiche 1h40 d’enregistrement. C’est déjà fini. Nous nous rappelons de l’entrée fracassante. Maintenant tout est différent. On serait presque tenté de se tutoyer. Une certaine complicité s’était établie. La cigarette ne prenait plus des airs menaçants, et nous étions tous les quatre, tout sourire, pour la simple raison que nous avions partagé quelque chose. Nous ne savons pas vraiment qui a raccompagné qui. Après être redescendus, avoir fait un bref passage à la librairie, une petite ballade sur l’esplanade et une tentative ratée pour visiter un chantier sous les voûtes de la major, au goût de chocolat à l’huile d’olive, nous avons dû nous séparer. Photo souvenir, poignées de mains, remerciements. On aurait presque fait l’accolade. En s’éloignant, il ne se retourna qu’une fois : « Merci les jeunes, c’était

Je sortais d’un repas arrosé, s’étant doucement terminé une heure auparavant, agrémenté de quelques volutes relaxantes. J’étais donc profondément ancré dans un canapé moelleux, entre douces divagations et ivresse prononcée. Il a lu les trois numéros de Kaktüm, et est retombé sur cette fameuse phrase où il se voit comparé à un vieux con réactionnaire. Il ressort le même couplet qu’en introduction de l’entretien. Ma répartie ne sera guère meilleure, mais à en juger par le temps de l’appel, mon bluff a du être plutôt convaincant. Mon oreille se fera plus attentive lorsque la discussion portera sur Kaktüm : « C’est un peu minot, minette» sera une des seules phrases que mon cerveau ralenti gardera intacte. Il s’interrogera sur l’absence de l’engagement politique au sein du magazine, le choix de prendre des pseudonymes, est-ce par peur, par manque de courage ? Il me laissera méditer sur ce qu’il a pu dire, et conclura par un : « Bon allez je te laisse, je veux pas te déranger plus » amical. J’aurais presque répondu : « T’inquiète gros, à plus. » Mais mon cortex reptilien était encore intact , et imposa un réflexe de survie bienvenu : « Au revoir Monsieur. » Zephyr & Hood

« Ça, vois-tu c’est le grave inconvénient du paradis : il n’y a plus d’espoir. » Dino Buzzati

23 entretien


24 musique

1977. Date importante dans l’histoire du rock. 10 ans après le « Summer of Love », la fête est finie. « Peace and Love » n’a plus droit de cité. Les rêves sont éteints. En réaction, un long cri. Porté par les Clashs, les Ramones, les Sex Pistols, etc. Le punk explose cette année là. Dans l’effervescence d’un nouveau courant, certains passent inaperçus dans le flot incessant de nouveauté. Mais l’histoire est là pour les réhabiliter. C’est le cas de Suicide. Groupe new-yorkais formé au début des années 70 par Alan Vega et Martin Rev, sort son premier album éponyme en 1977. 32 minutes d’une musique jamais entendue. Du rock, ils n’en gardent que les aspects les plus malsains : incantations, maelström, boucles hypnotiques. Ils le dépouillent à l’extrême, abandonnant les instruments conventionnels pour n’utiliser qu’un synthétiseur et une boîte à rythmes. Ce qui détonne à cette époque habituée à minima au sacro-saint trio guitare, basse, batterie. Leur musique, tenant plus du mantra que de chansons, est violente, dérangeante, colle à la peau, suinte la crasse, le mal-être, la folie. Elle est rock, sans qu’on s’y attende. Elle est peutêtre même la définition de l’essence même du rock : de l’énergie à l’état pur, sans fioritures, sans calcul. Il suffit de regarder un de leur concert pour s’en convaincre. Alan Vega est en transe, se mutile, harangue le public,

le provoque, tout en restant pratiquement immobile ; Martin Rev, bien campé derrière ses surréalistes lunettes de ski, est absorbé par son synthé, ne communique rien. Souvent programmés en première partie de plus grosses formations (The Clash, Elvis Costello) ; jouant pour un public qui n’est pas le leur, encore trop embrumé pour se trémousser véritablement, ni même préparé à endurer cette musique – trop ? – en avance sur son époque ; tous les éléments étaient réunis pour des carnages scéniques, dixit Lester Bangs. Les anecdotes qui courent autour constituent un authentique mythe rock’n’roll : émeutes, menaces envers le public avec une chaîne à vélo, envahissement de la scène après 30 minutes de concert, blocage de la sortie. Le chaos à l’état pur. Malheureusement, une attitude si extrême fait peut-être de vous une icône rock mais ne convoque pas nécessairement le succès.

«Quelqu’un a dit que Suicide était l’ultime groupe punk car même les punks nous haïssaient.»

Face à cette musique dont on ne sait plus quel qualificatif lui coller – punk, électro, industrielle, minimaliste – et qui au final a déboussolé plus d’un auditeur, l’album tombe en déshérence. En même temps, il fallait être sacrément barré pour se taper les 10 minutes de Frankie Teardrop, récit halluciné du massacre de sa famille par un vétéran du Vietnam avant son suicide,

« Si vous fermez la porte à toutes les erreurs, la vérité restera dehors. » Rabîndranâth Tagore


Joe Strummer The Clash

Alan Vega Suicide

Paul Simonon The Clash

avec un Alan Vega possédé à l’extrême, hurlant démoniaquement jusqu’à ce qu’on se demande s’il n’est pas en train de basculer du côté de la démence. Malgré son côté punk intransigeant, Suicide a su cultiver un versant plus pop, avec des chansons d’une beauté rare et inattendue de leur part, telle que Cheree ou Dream Baby Dream, figurant sur leur second album. Il ne sera d’ailleurs pas le seul à les reprendre, ni même à les citer : The Gories, Cassius, Joakim, Radiohead. Que du beau monde, et pas uniquement d’obscurs punk des bas-fonds. Preuve que Suicide a une influence indéniable dans l’histoire du rock. Ce sont les premiers à utiliser les machines dans une optique et une esthétique rock. Ils furent les pionniers qui essuyèrent les pots cassés. Sans eux, la musique électronique aurait sans doute un visage différent. Tout bon musicien qui veut paraître un tant soi peu crédible se doit de connaître leur musique. Après leur deuxième album sorti

en 1980, l’activité du groupe décroît, chacun entame une carrière solo. Ils se retrouvent occasionnellement et publieront trois albums postérieurement. Alan Vega, fasciné par Elvis Presley et le rockabilly, creusera son sillon dans cette direction ; avec une musique s’apparentant à un mélange entre punk et rockabilly. Il connaîtra un petit succès en France avec son tube Jukebox Babe sorti en 1980. En 1996, il collaborera avec deux grandes figures du rock, Alex Chilton, ancien chanteur/guitariste de Big Star, et Ben Vaughn, pour sortir Cubist Blues hommage à la musique fondatrice du rock’n’roll. Martin Rev, continuera ses expérimentations sonores avec ses machines, triturant sans fin ses boucles synthétiques. Pour finir, laissons la parole à Alan Vega, avec une citation qui résume l’esprit Suicide : « Quelqu’un a dit que Suicide était l’ultime groupe punk car même les punks nous haïssaient. » Hood

« Il ne sert de rien à l’homme de gagner la Lune s’il vient à perdre la Terre. » François Mauriac

25 musique


en Uruguay, Chili, Mexique ou Brésil. Et à l´autre bout du monde nous avons découvert quelque chose d´incroyable, c´est qu’en dépit de l´immensité de leurs

ncuentro territoires, malgré la distance qui les séparent, atinoamericano les étudiants

d´Amérique Latine sont beaucoup plus liés que nous autres européens. Et pour

de

studiantes

de

rquitectura sommes

vous

le

prouver, nous allés à E.L.E.A. !!

Bon j´avoue, pas que pour vous le prouver... Les Encuentro Latinoamericano de Estudiantes de Arquitectura, ce sont des énormes rencontres entre tous les étudiants d´architecture du « cône sud » comme ils l´appellent, c´est à dire Chili, Pérou, Uruguay, Paraguay, Argentine et Brésil. Ces manifestations prennent place pendant environ une semaine dans l´un des pays participants. Elles sont entièrement organisées par les étudiants et anciens étudiants, et rassemblent entre 2000 et 5000 personnes. Chaque année, la ville d´accueil est choisie pour ses problématiques urbaines, et cette année, c´est la ville d´Encarnación au Paraguay qui accueillait l´événement.

26 projet d’étudiant

Si vous avez été attentifs, dans l´édito du dernier numéro de Kaktüm nous vous donnions une information importante : « Effectivement la moitié de notre équipe s´en va dorloter son joli petit derrière sous d´autres latitudes ».

En effet, une grande partie de cette ville de presque 120 000 habitants a été reconstruite après la montée des eaux du fleuve Rio Paranà en 1989. C´est donc une ville qui a perdue un grand bout de son histoire et qui a du mal à gérer, à conserver et à mettre en avant, le peu de patrimoine architectural qui lui reste face aux nouvelles constructions.

Alors non nous n´allons pas seulement nous dorer la pilule sous un soleil harassant en buvant des cocktails et en dansant sur des rythmes de cumbia, en tout cas pas que ! Non, nous sommes en échange universitaire

Elle peine à s´homogénéiser, en particulier au niveau de son littoral, où une grande promenade construite récemment jouxte des parcelles complètement en friche et des anciens


bâtiments industriels laissés à l’abandon. Le but des E.L.E.A. c´est donc de faire des rencontres, des échanges, mais aussi de travailler. Sous forme d´ateliers d´ « action urbaine » et d´ « action sociale », on va visiter la ville puis parler de ses problèmes, et des améliorations qu´on pourrait lui apporter. Des intervenants de chaque pays viennent faire des conférences pour exposer leur vision de la ville d´accueil. On trouve aussi des ateliers « plurithématiques » plus récréatifs, comme des interventions de théâtre urbain, ou de la construction d´instruments de musique en matériaux recyclés. On dort dans des tentes, on prend des douches froides et on mange les repas préparés pour nous midis et soirs. Imaginez 2000 personnes sur le terrain d´un complexe sportif !! Chaque soir, un des pays organise la fête, avec un thème déterminé. On arbore un visage couvert de peinture aux couleurs de la nation du jour, on boit la boisson typique, et on a parfois même le droit à un petit spectacle de danses traditionnelles avant d´entamer une nuit déchaînée... Sous la tente « fiesta », ça commence vers 1h, et ça fini vers... jamais !! Bref E.L.E.A. c’est surtout un moyen de rencontrer des personnes de tout le continent, d’échanger et de partager, que ce soit sur la ville comme dans la fête. Pour nous, pauvres européens avec notre petit drapeau français planté au milieu de toutes ces tentes latino américaines, c´était la découverte d´une communauté étudiante de tout un continent soudé, une appréhension de la ville complètement nouvelle, l´apprentissage de la danse sur de la cumbia, mais surtout, on ne va pas vous mentir, 54 heures de bus et des gueules de bois mémorables !!

Ocheune


L’ANGLICISME :

28 REGARD SUR

J

e me devais d’écrire un article en réponse à « Regard sur l’anglicisme », de Hood. D’une part parce que les mots anglais sont récurrents dans mon vocabulaire (j’ai donc pris ça comme une attaque PERSONNELLE). Et d’autre part parce que ne pas être d’accord avec Hood, c’est un peu comme un sport de haut niveau que je pratique depuis un moment déjà (4 fois par semaine, en séances de 2 à 3 heures). Pourquoi introduit-on des mots anglais dans notre vocabulaire ? Parce que les équivalents français n’existent pas ! La langue anglaise est très efficace sur ce point, elle a inventé des mots pour décrire des nouvelles tendances que nous somme incapables de traduire dans « la langue de Molière ». Je pense notamment à « bromance », « brainstorming », « week-end » ou « story-

board ». Certains sont carrément dans le dictionnaire et d’autres très fréquemment utilisés. Essayes-toi à dire « je vais voir un spectacle d’un seul homme » au lieu de « one-man-show ». Parfois c’est inévitable. Il ne s’agit aucunement de paresse intellectuelle mais d’une utilisation judicieuse de la langue anglaise. évidemment que je rejoins mon ami Hood sur certains points. Il est vrai que dire « business school » au lieu d’école de commerce, est aberrant. De la même manière, introduire, out of nowhere, un ou deux mots anglais dans une conversation, juste pour suggérer subtilement que tu est bilingue (oh oui toi qui me lis tu as dû faire ça au moins une fois pour pécho, ou te donner l’air d’un

« La vie est trop courte pour qu’on soit pressé. » Henry David Thoreau


FIGHT BACK hypster, ou les deux) est très étrange, mais hype pour certains. Ce n’est pas l’anglicisme qui appauvrit notre langue mais le fait que la construction de phrases grammaticalement correctes devient de plus en plus rare. Do you know SUJET + VERBE + COMPLEMENT ? Car oui, selon moi le problème c’est le verbe. Chers camarades, quand on fait une phrase, on utilise des verbes français on n’essaie pas de franchiser des verbes anglais. Il n’est pas condamnable d’utiliser des termes anglais, mais d’essayer d’en faire des verbes français. Yeaaah, you know what I mean : « On a brainstormé et puis j’ai designé le nouveau packaging avant de e-mailer ma boss pour qu’elle le check. » « J’ai uploadé des photos et le process était hyper long. » Oui, là effectivement j’ai les oreilles qui saignent. « Quand un tel changement se produit, on ne peut que s’en alarmer, comme le font si bien Michel Serres ou Claude Hagège. » Et bien vous pouvez tous les trois vous rassurer et enfiler vos charentaises pépouze : notre ministre de la culture de 1993 à 1995, Jacques Toubon a fait voter une loi visant à « assurer la primauté de l’usage de termes francophones traditionnels face aux anglicismes ». Cette loi a notamment rendu obligatoire l’utilisation du français dans la publicité. C’est pourquoi lorsqu’un mot anglais apparaît dans les slogans ou les textes

publicitaires, il est impérativement traduit en bas de page à l’aide d’un joli astérisque. En plus de cela, l’Académie Française a pour rôle de trouver des termes français pour désigner les courants et les réalités nouvelles. Par ailleurs, l’ancien ministre avait proposé, pour promouvoir la francophonie, une liste complète de termes français à utiliser à la place des mots anglais comme « vacancelle » pour « week-end », par exemple, ce qui lui avait valu bien des moqueries (ah bon ? Étonnant). Le plus surprenant est qu’il se passe l’inverse outre-Manche : les anglais utilisent des mots français très souvent. Des « touché » par ci, des « voilà » par là : « This is a brand for the very petite people. » « It’s very avant garde. » « He is such a bon vivant. » Et j’en passe. Simuler l’intelligence outre manche s’apparente à utiliser des mots français un peu partout. A-MA-ZING ! Pour finir je vais utiliser une métaphore que Hood appréciera surement. Les mots anglais dans le vocabulaire, c’est un peu comme l’alcool : à consommer avec modération.

« Ecoutez la forêt qui pousse plutôt que l’arbre qui tombe. » Friedrich Hegel

Kirikou

29 REGARD SUR


Tout le monde veut devenir un cat

30 CURIOSITés

Qui n’a pas un jour voulu jouer d’un instrument comme un dieu ? Eh bien aujourd’hui, c’est ton tour. Tu le mérites. Pour le sexe, la drogue et le rock’n’roll. C’est le prestige qui t’attend ! On se voit déjà sous les projecteurs, trois millions de fans dans le stade, et toi, ta guitare. On te balance une cascade de sous-vêtements, certains sont coquins, d’autres classiques, d’autres encore sont masculins. Passant outre les dessous du public, la musique t’habite, et t’entames un solo qui fait le café. Tout le monde crie, on ne sait plus vraiment d’ailleurs qui joue, le public fait tellement de bruit que personne n’entend au final quoi que ce soit, mais tant pis, ils sont là pour le show. Petit clin d’œil ravageur, la gente féminine te dédie une ola pour l’occasion, et en réponse à cet acte d’amour, tu balances ton plus beau sourire. T’es une bête de scène coco. Mais y’a la fin du morceau qui approche, tu te retournes vers tes musiciens, regards entendus, trois, quatre... Break, stop. T’as encore fini sur les genoux. Tu vas trouer ton costume à force de te lancer comme ça. Relève toi, reprends ton souffle, revers de manche sur ton front qui rejette sous forme de sueur l ‘énergie dépensée. So sex. Miaulement de la foule. Du calme : final, rappel et on remballe. Tu te réjouis déjà à l’idée de retourner dans ta loge : il y a toujours un mystère sur ce qui peut se passer en back stage. Mais chaque chose en son temps. Tu te focalises sur la scène. Personne n’a raté ton regard rêveur,

mais tout le monde prendra tes pensées pornographiques pour un égarement artistique. Allez, on enchaîne. Doigt levé, le batteur comprend : 1,2, et 1,2,3 4. Vlan, c’est parti. La dernière déchire, pour laisser le public sur sa faim. Tu donnes tout : tous les instruments se déchainent, chorus qui veut.. Faut finir en beauté : spots, fumée, lasers et décor. ça monte, ça monte, ça monte : tu sautes tu cries et.... Les spots s’éteignent dans un ultime flash, le son est coupé net, il fait tout noir, seule reste la fumée, qui court, cotonneuse, se déversant en pelotes liquides sur les bords de la scène. Plus personne ne te voit. Tu souris largement : un ange passe, l’ange St-Silence. Il ne reste jamais bien longtemps, juste le temps que le public comprenne que tu ne reviendras pas, sauf s’ils se montrent à la hauteur. Le moment du rappel est toujours jouissif : tu abuses de ton pouvoir, tu les fais languir, attendre, espérer, tu mesures leur fidélité autant que ta côte de popularité. « Allez c’est bon les loulous, pour vous , juste une petite dernière. » - Vous dîtes ? Et merde, tout l’amphi t’as cramé. Retire ton casque, de toute façon tout le monde l’a vu, et d’après le regard de carnassier du prof, ça ne lui a sûrement pas échappé non plus. Je te laisse lui expliquer. Zephyr

« Garder un secret consiste à ne le répéter qu'à une seule personne à la fois. » Michel Audiard


J’vais m’habiller sur mon 33 tours Ce soir, petite soirée j’ai envie d’m’habiller, descendre dans la boîte de jazz en polo col relevé, danser sur mon 31, y faire 33 tours, boire comme gainsbarre, faut qu’j’me bourre comme gainsbourg. J’veux faire la java dans mes blue suede shoes, le fly me to the moon walk sur un C jam blues, un tee shirt noir ou blanc de peau, comme dit nougaro ; Smoke gets in your eyes depuis mon cigare chaud. Je prendrais le train A pour une night in tunisia, un pt’it bout d’summer time coktail marimba, et parcourant les Miles sous un ciel kind of blue, Je resterais steps ahead pour narguer mulatu. C’est pas mineur, j’serais d’ambiance festive, Dans ma benz benz benz datant du jurrassic 5, Je prendrais la strode rode, ampli sonny Rollin’ dans ma mustang, rendez vous ‘round midnight avec mingus big band, Fringué standard et bouton d’manchette, j’ai pas vu le platane, j’fais ma courbette, du jazz dans l’ravin, je veux pas mourir ici, J’finirais ma vie à st james infirmery.

Zephyr

« Il suivait son idée. C'était une idée fixe et il était surpris de ne pas avancer. » Jacques Prévert

31 CURIOSITés


têteketa

!

Par mona

Fille à patins :

Timidement beau :

Jolie :

Voyageur :

Fanatique quantique, livreuse de mensonges de midi à quatorze heures, n’ayez pas peur.

Maudit l’homme qui en vous, généra plus d’envie que de dégoût. Suivant !

Un parpaing sur le bras, la coupe en cascade, je penserai à vous le plus longtemps possible.

Lorsque l’union de vos univers restera hachurée, l’horreur n’existera plus. Seulement, n’exagérez pas les traits.

retrouve le film

!

Par kirikou & peri

A

D

1

4

J’voulais dire « Bande de chacals, vous allez crever comme des chacals ». Mais ça faisait deux fois « chacals »... Quoi, on dit des « chacaux » ?

On se shooterait à la vitamine C si cela avait été illégal...

2 - Mais, vous confondez les juifs et les musulmans. - Ne jouez pas sur les mots Dolores. B

E

3 - Vous voulez que je fasse le flic pendant un mois ? - Flic ou piéton, à toi de choisir. - Donc j’ai le choix entre la mort ou la honte ?

C

F

5

Je n’ai aucune confiance en quelqu’un qui porte à la fois une ceinture et des bretelles… en quelqu’un qui doute de son pantalon.

6 M. Treehorn n’est pas un homme convenable, il traite les objets comme des femmes... A.6 B.1 C.3 D.4 E.2 F.5

32 ludique




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