42 minute read

Premium

Next Article
Sport

Sport

Entretien exclusif ÉLISABETH MORENO

ITINÉRAIRE D’UNE SUPER WOMAN

Advertisement

Il est de ces personnes qui forcent le destin et, de facto, le respect. Rencontre avec Madame Elisabeth Moreno, Ministre en charge de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances. Un moment d’authenticité où cette femme d’exception revient sur son parcours, d’enfant d’immigrés Cap-Verdiens à sa carrière de dirigeante de multinationales dans le domaine de la Tech jusqu’à son insertion dans la vie politique. Elle nous decrypte sa mission au sein de l’équipe gouvernementale et nous fait part de sa vision d’une France riche de sa diversité. Un message plein d’espoirs, d’ambition et sans aucun pathos. Merci madame La Ministre. Un entretien réalisé par Michael Kamdem, directeur de publication.

“ J’ai une intime conviction : La diversité est un atout. [...] Qu’on le veuille ou non, le monde est globalisé et la France est plurielle.”

Contrôle d’identité, s’il vous plaît ? Elisabeth Moreno, je suis ministre en charge de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances dans le gouvernement de Jean Castex, depuis juillet 2020. Je suis née aux îles du Cap-Vert et suis maman de 2 enfants. J’ai passé 30 ans de ma vie dans le monde de l’entreprise et je suis tombée dans la politique il y a tout juste 1 an.

Peut-on revenir sur votre parcours ? Atterrir dans l’univers de la politique, était-ce une évidence ou une heureuse surprise ? Pour ma famille et mes amis, c’était une évidence parce que j’ai toujours été très engagée dans la vie associative. J’ai toujours voulu aider et accompagner. Quand on a la chance d’être enfant d’immigrés et qu’on parvient à faire son trou dans un pays qui, au départ, n’est pas le sien, on connaît les batailles qu’il faut mener, on connaît les difficultés, les humiliations, tous les désagréments que cela peut sous-entendre. Et cela m’a toujours tenu à cœur de rendre ce que j’avais pu recevoir. Dès que j’ai quitté la Fac avec mon diplôme de droit sous le bras, j’ai filé à l’ambassade du Cap-Vert pour leur dire que je voulais aider. Aider les jeunes, aider ceux qui ne savent pas lire ou écrire, aider ceux qui ne savent pas évoluer dans les méandres de l’administration française. Et je n’ai pas quitté le monde de l’associatif jusqu’à ma nomination. Du coup, pour ma famille et mes amis, c’était une évidence. Pas forcément pour moi car j’ai adoré le monde du business. J’avais à peine 20 ans quand j’ai créé ma première entreprise. Je ne trouvais pas l’entreprise dans laquelle je voulais travailler, j’avais fait du droit, j’avais des connaissances assez développées... À l’époque, mon conjoint était expert dans le domaine de l’isolation thermique, et on a donc décidé de créer notre propre entreprise. Cela a très bien fonctionné puisqu’on a travaillé avec des mastodontes comme Alstom, Bouygues ou Cegelec. Une dizaine d’années plus tard, j’ai basculé dans le monde des grands groupes. J’ai beaucoup aimé travailler pour France Télécom, Dell, Lenovo et ce qui a véritablement consacré ma carrière dans le domaine de la Tech, c’est lorsque HP (Hewlett-Packard) m’a confiée la direction de toute la structure du continent africain et des territoires ultra-marins. Retourner en Afrique, 40 ans après, être utile aux femmes, utile à la jeunesse et contribuer à développer un continent qui a tellement de potentialités, ce fut pour moi un véritable accomplissement ! Je ne pensais donc pas que la politique serait une consécration.

Aujourd’hui, vous faites partie d’un gouvernement qui a choisi comme cheval de bataille l’égalité femmes/hommes. Nous sommes dans l’ère du « women’s empowerment » et c’est ce que met d’ailleurs en exergue notre cover. Que cela vous inspire-t-il ? Tout d’abord, je voudrais féliciter ROOTS pour ces 10 années. Je pense qu’il y a beaucoup de choses dont la diaspora peut être fière. Porter un magazine d’excellence comme vous le faites et célébrer 10 ans, je vous dis : « Bravo ! » Ensuite, je voudrais vous remercier de m’avoir invitée à participer à cette cover avec des femmes absolument remarquables, admirables. Quand je pense au magnifique film de Maïmouna Doucouré (Les Mignonnnes), à Imany qui est une de mes artistes préférées, à miss France 2014 Flora Coquerel… J’ai eu un plaisir extraordinaire à passer ce moment avec ces 11 femmes. Il y avait de l’intelligence, de la beauté, de l’élégance, il y avait tout ce qui peut représenter les femmes dans toute leur splendeur.

Le Président de la République a décidé de faire de l’égalité entre les femmes et les hommes la grande cause de son quinquennat. Il aura fallu que l’on attende 2017, dans notre pays, pour qu’un président mette sur la table le sujet de l’égalité entre les femmes et les hommes. Et l’on a décidé de se saisir de cette question par le spectre des violences. Car il n’y a aucune femme qui puisse être « empowered » si elle est victime de violences, notamment dans le lieu où elle est censée être le plus en sécurité, à savoir son foyer. Les femmes ne sont pas toujours en sécurité chez elles, ni dans l’espace public puisqu’il y a plus de 90 000 femmes qui sont violées dans notre pays chaque année. Soyez en possession pleine et entière de vos pouvoirs ! Mais pour que vous puissiez exercer pleinement vos pouvoirs, il faut que vous vous sentiez, a minima, en sécurité. On s’est donc saisi de manière très volontariste des sujets de cette violence faite aux femmes et nous avons aussi décidé de travailler sur l’empowerment professionnel. J’ai fait toute ma carrière dans le monde de l’entreprise. Pour autant, je ne fais pas partie de ces gens qui pensent que la réussite se limite à la réussite professionnelle. Pour moi, cela passe par la réussite personnelle en tant qu’individu, en tant qu’être humain. Est-ce que vous êtes bien dans votre peau ? Est-ce que vous vivez pleinement votre vie ? Parce que je connais énormément de gens qui ont réussi professionnellement et qui sont profondément malheureux, d’autres qui sont riches à millions mais qui sont profondément seuls. Moi, j’ai décidé de tout réussir. Je voulais avoir une famille, je voulais avoir des enfants, je voulais réussir dans ma vie professionnelle. Pour moi, l’empowerment féminin, c’est cela. Ne pas avoir à choisir entre sa vie personnelle et sa carrière professionnelle. C’est de ne pas être limitée pour votre couleur de peau, votre origine sociale ou votre orientation sexuelle. C’est de ne pas voir dans le regard de l’autre du mépris, de la défiance, du rejet, de l’humiliation. Pour moi, c’est cela, une femme en pleine possession de ses capacités, de ses compétences et qui ose ! Je rencontre beaucoup de femmes qui ont réussi et, quand je leur demande leur recette, elles me disent : « Mon père m’a dit que j’étais capable de tout faire. Ma mère m’a dit que je ferai des choses extraordinaires dans ma vie ». L’empowerment féminin peut aller beaucoup plus vite si, dès le plus jeune âge, à la maison, à l’école, au lycée, à l’université, on dit aux femmes : « Vous êtes capables, vous pouvez ». Parce que j’ai l’intime conviction que tous les êtres humains ont un don, un talent, il faut juste leur donner la capacité de l’exercer. Quel état des lieux faites-vous en 2021 sur la place de la diversité en France ? Quel parallèle possible avec les Etats-Unis quand on a tendance à dire que la France se “communautarise” ? C’est un sujet éminemment important et qui peut créer des tensions. J’ai une intime conviction : la diversité est un atout. Tant qu’on verra la diversité comme un obstacle, comme un problème, on n’arrivera pas à en tirer le meilleur. Qu’on le veuille ou non, le monde est globalisé et la France est plurielle. N’en déplaisent à ces Cassandre qui rêvent de renvoyer les étrangers chez eux, qui rêvent de bannir certains prénoms qui ne sonnent pas comme ils souhaiteraient qu’ils sonnent. Je suis intimement convaincue que la France est grande et riche grâce à sa diversité. C’est un sujet qui me tient extrêmement à cœur. Le fait d’être mis de côté parce que vous êtes une femme ou parce que vous êtes issus de la diversité, il s’agit de lutter contre toutes les formes de discrimination. Donner à tous ces êtres humains - du moment qu’ils ont l’envie, la motivation et les compétences - la capacité de se réaliser, cela rayonne sur notre pays. Quand Omar Sy apparaît dans des films Marvel, c’est la France qui rayonne. Quand Teddy Rinner ou Clarisse Agbegnenou reviennent avec des médailles de Tokyo, c’est la Marseillaise qui retentit grâce à sa diversité. Où est le problème ? Si ce n’est dans la tête de personnes qui, de toute façon, ne changeront pas d’avis parce qu’elles rejettent ce qui ne leur ressemble pas. Tant qu’il y aura des êtres humains, vous aurez de la haine, vous aurez du rejet, vous aurez du racisme, vous aurez de l’antisémitisme, vous aurez de la misogynie, etc. Tout cela fait partie des êtres humains. C’est pour cela que je crois énormément au travail de l’éducation sur ces sujets. Le monde est divers. Ne pas l’accepter, c’est refuser le progrès, c’est refuser une chose qui existe. Le Président de la République a compris que cette diversité était importante. Sinon, il n’aurait pas décidé de « panthéoniser » la première femme noire dans notre pays. Je suis ravie que Joséphine Baker rentre au Panthéon, c’est un symbole fort, mais on ne peut pas s’arrêter uniquement au symbole.

016

“ Une cover avec des femmes absolument remarquables, admirables. [...] Il y avait de l’intelligence, de la beauté, de l’élégance, tout ce qui peut représenter les femmes dans toute leur splendeur.”

Il faut permettre à la diversité de trouver sa place dans notre pays. Elle doit pouvoir trouver sa place dans le monde professionnel, dans le monde culturel, dans le monde politique. Pourquoi, lorsque notre équipe de France gagne une coupe du monde, elle est saluée par le monde entier ? Et pourquoi, lorsqu’elle perd, elle est conspuée par les racistes ? C’est absolument absurde. De par ce que je suis, je me sens pleinement responsable de lutter contre les discriminations qui sont faites aux personnes issues ou considérées comme issues de la diversité. Parce que beaucoup de ces personnes sont nées dans ce pays, ont la culture française chevillée au corps. Beaucoup plus que celles de l’origine de leurs parents et on leur refuse de se sentir Français parce qu’on va les renvoyer aux origines de leurs parents. J’élève mes enfants dans ce pays et ils sont pleinement Français. Mais parce qu’ils sont Français, ils ne devraient plus avoir le droit d’aimer le manioc ou le couscous ? N’est-ce pas totalement absurde ? J’ai donc choisi de travailler sur 2 axes qui viennent compléter beaucoup de choses qui existent déjà. Car il faut savoir que la France est le pays qui a l’arsenal juridique législatif le plus ample pour lutter contre les discriminations. Il y a 25 critères de discrimination prohibés par la loi. Mais, trop souvent, les gens ne connaissent pas leurs droits, trop souvent les gens pensent qu’il y a une forme d’impunité. Savez-vous que la France a mis en place un label diversité qui est aujourd’hui repris par certains pays européens ? Savez-vous que l’on a plus de 4000 entreprises en France qui ont signé ce label ? Cela signifie bien que la majorité des gens acceptent la diversité dans notre pays. C’est une minorité qui fait le plus de bruit et la rejette, mais j’ai envie de leur dire qu’ils ont déjà perdu. Ma responsabilité est de faire en sorte que, lorsque vous vous sentez discriminé(e)s dans le travail, le logement, l’accès aux services publics, que ce soit parce que vous êtes une femme, que ce soit parce que vous habitez dans une zone rurale, quelque soit les formes de discriminations, mon objectif est que vous ne restiez pas seul(e)s avec cette discrimination. Que vous ayez accès à des juristes, à des avocats, à des associations, à des services publics de l’état pour vous sentir défendu(e)s. Parce qu’un pays qui ne lutte pas contre ces discriminations est un pays dans lequel les tensions s’exacerbent et les fractures se créent. Et on ne peut pas se permettre de voir notre pays se fracturer. Tout le monde contribue à la grandeur et à la richesse de la France. Nous devons faire en sorte que tout le monde trouve sa place, se sente respecté et considéré en tant qu’individu. Et une fois qu’on a lutté contre les discriminations, il faut qu’on s’attaque au monde de l’emploi. J’ai évolué dans un secteur de la technologie où on manquait encore de diversité. Et ces entreprises me disent : « Elisabeth, on a un mal fou à recruter » et pourtant les talents sont là. Il faut recruter différemment, il faut former les ressources humaines, il faut former les managers et les dirigeants. Nous avons envie de créer un index diversité qui va prendre une photographie à l’instant T de la diversité dans une entreprise. Diversité d’origine et diversité sociale. L’idée est que ces entreprises mettent en place des actions pour différencier leurs recrutements et favoriser la mobilité de carrière dans les entreprises. Parce que l’émancipation passe aussi par votre accomplissement professionnel. Si vous faites un BAC+18 et que, du fait de votre couleur de peau, vous ne trouvez pas d’emploi, ce n’est pas normal. Ce sont les sujets sur lesquels je suis en train de travailler. Je veux aussi mentionner le label GEEIS (Gender Equality European & International Standard). Créé en 2010 par une association française, Arborus, il a depuis été repris par plusieurs pays européens. Les lignes sont en train de bouger.Il faut que vous sachiez que cette question de la diversité a pris une place très importante dans la société.

“ J’ai décidé de tout réussir. Je voulais avoir une famille, avoir des enfants, réussir dans ma vie professionnelle. Pour moi, l’empowerment féminin, c’est cela. Ne pas avoir à choisir entre sa vie personnelle et sa carrière professionnelle. ”

Pensez-vous que l’affaire George Floyd a créé un changement de paradigme ? Très clairement oui, cela a été un électrochoc mondial. À cette époque, j’étais dirigeante chez HP, basée en Afrique du Sud. Après le drame George Floyd, le patron monde de HP, Enrique Lores, a réuni tous les managers et a dit : « Il faut qu’on bouge, il faut qu’on réagisse ». Je pense que la barbarie de ce meurtre a éveillé les consciences sur un sujet qui a trop souvent été tu. Et j’ai vu beaucoup d’entreprises se remettre en question parce que cela a été une grande claque. Et, au niveau Européen, Ursula von der Leyen a demandé à tous les états membres de se saisir de cette problématique du racisme. Je ne dis pas que ce n’est qu’à partir de George Floyd que les choses ont été faites, beaucoup a été entrepris bien avant cela. D’ailleurs, comme je vous le disais auparavant, nous avons énormément de lois en France pour lutter contre cela. Mais je crois que le fait que cet assassinat ait été filmé en direct, avec la désinvolture de ce policier qui, pendant plus de 9 minutes, met son genou sur la gorge d’un être humain qui vous dit : « Je n’arrive plus à respirer »... À chaque fois que j’en parle, cela me crée une émotion extrêmement vive. Parce que, au delà de l’inhumanité de cet acte, cela montre combien il est temps que les choses bougent. Et enfin, pour répondre à votre question sur les Etats-Unis… Vous savez, j’ai travaillé pendant de nombreuses années avec des entreprises américaines et j’ai passé énormément de temps aux Etats-Unis. On ne peut pas comparer l’histoire française et l’histoire américaine. Nous n’avons pas eu la ségrégation raciale telle qu’elle a été institutionnalisée, nous n’avons pas eu la violence que les Noirs Américains ont subi. Pour autant, cela ne veut pas dire que, dans notre pays, il n’y ait pas de discrimination. Copier-coller ce qui se passe là-bas en France est une erreur. Ne pas prendre conscience des discriminations que les personnes subissent dans notre pays seraient aussi une erreur. C’est pour cela que je travaille d’arrachepied. Que, dans notre pays, toute personne qui discrimine soit sanctionnée parce que ce sentiment d’impunité ne peut pas être toléré. Eric Dupond-Moretti, notre Garde des Sceaux, a décidé de se saisir de cette question et de faire en sorte que tous les actes de racisme, d’antisémitisme, de xénophobie, qui prospèrent si grandement, notamment du fait des réseaux sociaux, soient punis. Il faut que les gens discriminés connaissent leurs droits et puissent se sentir protégés.

Exhorteriez-vous les personnes issues de la diversité ayant eu un parcours d’excellence à se montrer davantage et devenir des role models ? Vous touchez là une question extrêmement importante. Vous êtes vous-même un magnifique role model ! J’imagine combien vous avez dû vous battre pour arriver là où vous êtes aujourd’hui. De manière générale, le succès est quelque chose qui se construit, mais je crois énormément en la force des role models. Aujourd’hui, les choses ont bien évolué. Quand vous voyez Fatoumata Kébé encensée par Vanity Fair parce que c’est une astrophysicienne francaise de renom, les petites filles peuvent se dire : « Je peux faire des sciences et réussir ». Quand vous voyez à la tête de l’une des plus grandes banques du monde, l’Ivoirien Tidjane Thiam, vous vous dites : « Moi aussi je peux devenir banquier ». Pour pouvoir vous projeter et vous dire que vous pouvez aussi le faire, il faut parfois que quelqu’un l’ait fait avant vous. Moi, je me souviens avoir pleuré quand Barack Obama a été élu parce que je me suis dit que je pourrais désormais dire à mes enfants : « Si vous travaillez bien, vous pourrez un jour devenir Président de la République ». Pendant longtemps, je faisais partie de ces gens qui avaient réussi mais qui n’osaient pas parler. Qui se disaient : « Je veux rester dans mon coin parce que… Parce que plein de choses ». Il y a beaucoup de choses qui vous empêchent de parler. Parfois parce que les gens qui sont autour de vous n’ont pas réussi autant que vous. Parfois parce que vous avez une forme d’auto-censure car vous culpabilisez d’avoir réussi. Parfois aussi pour vous protéger. Il y a mille et une raisons qui peuvent faire que vous décidiez de ne pas prendre la lumière. Pendant longtemps, j’ai décidé de rester dans mon coin parce que je n’avais pas envie qu’on dise : « Regarde la, elle se la pète ! C’est tout bête ». Quand j’ai été nommée PDG de Lenovo, ce fut « Waouuw ». J’ai reçu des messages de femmes et d’hommes issus de la diversité ou non qui m’ont dit : « Madame, merci de nous montrer que c’est possible ». Et cela m’a fait peur car j’ai eu l’impression d’endosser sans le vouloir une responsabilité qui me dépassait. Quand j’étais chef d’entreprise, je me déplaçais dans des écoles en banlieue pour parler aux jeunes et leur dire vous pouvez y arriver. Un jour, je suis dans une école à La Courneuve et je raconte à ces jeunes filles qu’elles peuvent s’orienter vers la Tech, qu’on a besoin d’elles. Le numérique, ce n’est pas uniquement pour les geeks, on en a besoin dans l’éducation, dans la santé, dans l’information, etc. Une jeune fille lève la main et me dit : « Madame, c’est facile pour vous de dire cela, vous avez tout réussi. Vous êtes patronne d’une grande entreprise. Si vous croyez que c’est facile pour nous... ».

Comme si c’était tombé du ciel ? Je ne pense même pas qu’elle se disait cela. Je pense surtout qu’elle se disait : « Cette femme est trop loin de moi, je ne peux pas m’identifier à elle car elle est sur une autre planète. » Et à ce moment-là, j’ai compris l’importance des role models. Je lui ai alors demandé : « Comment pensez-vous que j’en suis arrivée là ? » Parce qu’on ne voit que le sommet immergé de l’iceberg mais jamais tout ce qu’il faut faire avant pour y arriver. Et je leur ai raconté ma vie, je leur ai dit où je suis née, je leur ai parlé du drame qui nous a déraciné et emmené en Europe, je leur ai parlé de ma sœur qui a failli mourir, je leur ai parlé des humiliations, je leur ai parlé des ménages que j’ai fait, des porte-à-porte que j’ai dû réaliser, les soirs où je me suis couchée sans manger. Je leur ai parlé de tout ce qui fait le suc de la vie mais dont on ne parle jamais quand on a réussi. Je leur ai parlé de l’éclat de rire de mon père quand je lui ai dit que je voulais devenir avocate et qu’il m’a dit que ce n’était pas pour nous ce genre de choses. Et pendant 15 minutes, dans cette pièce, il y a eu un silence de mort. On aurait pu entendre les mouches voler. Et ces gamins, l’espace d’un instant, m’ont vue

comme l’une des leurs et m’ont remerciée. Et c’est à ce moment précis que j’ai réalisé que j’étais devenue, que je le veuille ou non, un role model. Et que si, grâce à moi, des petites filles et des petits garçons noirs peuvent se dire : « Ça ne va pas être facile mais on peut y arriver », cela vaut la peine que je me mette un peu en danger et que je prenne un peu de lumière.

Si je vous dis le mot « Roots », vous me répondez ? Je pense que la meilleure chose que les parents peuvent transmettre à leurs enfants, ce sont des racines et des ailes. Des racines pour savoir d’où ils viennent et des ailes pour aller le plus loin qu’ils peuvent.

MAKING OF ROOTS

SPÉCIAL 10 ANS IG : @rootsmagazine

Maëlys Kada Lady Ponce

Colin Dagba

SDM 100-8 Marie-Aline Méliyi

Naomi Dado & Purple Street Kwenda, l’épicerie africaine

Elisabeth Moreno Diandra Tchatchouang

Colin Dagba

Diya Golden Hair Hapsatou Sy & Audran Sarzier

Maître Mariame Touré

Jaiye - Enjoy Good Music Backstage Cover

Tara’s Body

Danièle Sassou Nguesso

Ferré Gola

Premium

They Inspire Elles sont douze, mais auraient pu être le centuple ! Alors il a fallu choisir. Douze femmes qui peuvent inspirer de par l’éclectisme de leurs trajectoires respectives. Originaires des 4 coins de l’Afrique et des Antilles, elles représentent le génie français. Qui n’a pas été transporté lorsque la Marseillaise se mit à retentir, un certain 19 août 2016, après qu’Estelle Mossely se soit emparée de la médaille d’or de Boxe aux J.O de Rio ? Estelle a cassé les stéréotypes et montré que l’on pouvait exceller dans une discipline prétendument masculine, tout en assumant parfaitement sa féminité. Quel Afro-descendant n’a pas été rempli d’orgueil après le sacre de Flora Coquerel, Miss France 2014 ? La reine de beauté, FrancoBéninoise, apportait avec elle un vent de fraîcheur inégalé depuis Sonia Rolland, élue 14 ans plus tôt. Reine de beauté, mais aussi reine de cœur, puisqu’elle n’aura eu de cesse de mettre à l’honneur son association Kelina, oeuvrant pour soutenir les secteurs de la santé et de l’éducation au Bénin, avec en point d’orgue l’ouverture d’une maternité prévue pour 2022. Pour inspirer, il faut être visible. Et quoi de mieux que la télévision ? Kareen Guiock, Marie-Aline Méliyi et Rokhaya Diallo représentent chacune à leur manière, la femme noire 2.0. Celle que l’on veut voir devant nos écrans. Présentant le journal de l’une des premières chaînes françaises avec meastra (M6), Kareen Guiock se tourne aujourd’hui vers son amour secret : le jazz. Et tandis que la rayonnante Marie-Aline Méliyi nous enchante par sa prestance et sa verve en animant les débats sur LCI, Rokhaya nous rappelle combien il est important d’avoir des porte-voix audibles et crédibles. Journaliste, écrivaine et activiste, elle est la fierté des nôtres. S’il est un secteur qui a souvent été pointé du doigt pour son absence de diversité, c’est bien le cinéma français. En témoigne le livre « Noire n’est pas mon métier », co-écrit par une dizaine d’actrices noires qui avaient fait sensation lors de la montée des marches à Cannes, en 2018, en mode Balmain Army. La sublime actrice Karidja Touré, découverte dans Bande de Filles, en plus de continuer sa carrière au cinéma et au théâtre, est devenue une icône de la mode. Front row des plus grandes maisons de couture, elle est désormais l’égérie de Tommy Hilfiger Eyewear. Quant à Fadily Camara, humoriste et comédienne, première standuppeuse française à faire son spectacle intégral sur Netflix, sa carrière ne cesse de grimper et l’avenir s’annonce radieux. Et puis, il y a la diversité devant la caméra, mais aussi derrière. Les Américains ont Denzel et Will, mais aussi Tyler Perry et Spike Lee. En France, nous avons Maïmouna Doucouré. Après avoir reçu de nombreux prix pour différents court-métrages, la jeune prodige a prouvé que chaque rêve pouvait se réaliser, en présentant son premier long-métrage, Les Mignonnes, sorti sur les écrans à la fin de l’été 2020. La diversité, voici un enjeu que maîtrise à la perfection l’une de nos étoiles les plus scintillantes, Elisabeth Moreno, Ministre de la diversité, de l’égalité des chances et de l’égalité Femmes/Hommes. Ancienne dirigeante d’une multinationale, la présence d’une ministre en fonction dans cet éditorial devrait suffire à démontrer que les barrières que certains s’infligent ne sont que mentales. Alors oui, il faudra faire 2 fois plus. Oui, il faudra se battre encore et encore, mais tout est possible. Immigrée jeune depuis le Cap-Vert, voici le parcours d’une femme qui a tout réussi, dans l’entreprise comme dans la vie publique. Autre femme dont la vie est un conte de fées : Kelly Massol. Elle est la C.J. Walker française. Started from the bottom. La fondatrice des Secrets de Loly, qui a commencé à confectionner ses premiers produits capillaires en 2010, dans sa salle de bain, est devenue 10 ans plus tard l’une des leaders du marché, générant un chiffre d’affaire exponentiel de plusieurs millions d’euros. Une femme en or, une amie et un modèle ! Et ce n’est certainement pas Fatou N’Diaye qui vous dira le contraire. Elle qui a vu débuter quasiment tous les acteurs du marché de la beauté noire en France. Elle est la pionnière du blogging afro français. Elle fait partie de celles qui ont porté haut le mouvement « Nappy », arborant une chevelure éblouissante et drainant derrière elle toute une communauté de femmes acquises à sa cause. Fatou fut la première représentante 2.0 du « black don’t crack », tant le temps ne semblait avoir aucune emprise sur elle. Si, dans la diaspora, influenceuse est désormais un métier à la mode, que chacune sache que c’est bien Fatou qui a ouvert la voie. Quant à Imany... Wow. Elle est sans doute sur le podium des femmes les plus belles et charismatiques que j’ai rencontrées en 10 ans de ROOTS. Ancienne mannequin, la belle Comorienne est une artiste musicale accomplie. Et son nouvel album Voodoo Cello, sorti à la rentrée 2021, devrait en ensorceler plus d’un ! Coup de foudre garanti. Par Michael Kamdem

Kelly Massol Robe Smain Boutamtam Bijoux Smain Boutamtam Fadily Camara Combinaison Gregory Assad Bijoux Hélène Zubeldia Marie-Aline Méliyi Robe Balmain - BO Helene Zubeldia Fatou N’Diaye Robe Gregory Assad - BO Philippe Audibert Imany Veste Marciano by Guess Bijoux Philippe Audibert Kareen Guiock Top Didit Pantalon Balmain Bijoux Philippe Audiber Elisabeth Moreno Robe Didit Veste Smain Boutamtam Bijoux Philipe Audibert Karidja Toure Body Mugler Pantalon Mugler BO Philippe Audibert Estelle Mossely Costume Kasaï Couture Corset Smain Boutamtam BO Helene Zubeldia Chaussures Christian Louboutin Flora Coquerel Pantalon Toucoulor Veste & Corset Smain Boutamtam BO Helene Zubeldia Chaussures Christian Louboutin Rokhaya Diallo Chemise Gregory Assad Maïmouna Doucouré Ensemble Gregory Assad

Elisabeth Moreno Jupe & Corset On aura Tout vu Veste Sanquanz BO Helene Zubeldia Manchette Smain Boutamtam Kareen Guiock Jupe On aura tout vu Top On aura tout vu Bijoux Jean-Paul Gaultier Marie-Aline Méliyi Jupe Dice Kayek Chemise Dice Kayek Bottes Jonak Bijoux Jean-Paul Gaultier Estelle Mossely Robes Mes demoiselles Ensemble Toucoulor Chaussures Dice Kayek Bijoux Jean-Paul Gaultier Imany Veste Sanquanz Pantalon Li-Ning Bijoux Jean-Paul Gaultier Kelly Massol Robes Mes demoiselles Corset On aura tout vu Bijoux Jean-Paul Gaultier

025

Fadily Camara Ensemble La Fée Marabout Crop top Nisse Fourrure jaune Imprévu Fourrure marron Parosh Chaussures Carel BO Smain Boutamtam Karidja Touré Veste Sanquanz Jeans Jeanerica Ceinture Mirela Cerica Talons Gregory Assad Bracelets Jean-Paul Gaultier Rokhaya Diallo Veste Giambattista Jeans PASSARO Bob Anthony PETO Collier Gregory Assad Chaussures Bocage Flora Coquerel Chemise Guess Robe Hamah Couture Bracelet JPG Sac à main Guess Fatou N’Diaye Top Balmain Body Mugler Pantalon Natan Chaussures Balmain Bijoux Philippe Audibert Maïmouna Doucouré Robe Issey Miyake Jupe Guess Chaussures Christian Louboutin Bijoux Hélène Zubeldia

027

Tanieu Couture, La fondatrice

TANIEU COUTURE

L’ÉLÉGANCE MADE IN GENÈVE

Une obsession du travail bien fait, un regard pointu sur l’univers du chic, autant d’emphases qui collent à la peau de Tanieu Couture. Rencontre avec Tanieu, créatrice de sa marque éponyme, une femme d’ambition qui aspire à briller au-delà même des frontières suisses.

Contrôle d’identité, s’il vous plaît ? Je suis Tanieu, la créatrice de Tanieu couture. Je suis Française d’origine Ivoirienne. Je vis et travaille à Genève, en Suisse.

Revenons à la genèse de votre marque... Depuis toute petite, j’ai toujours eu du mal à trouver des vêtements dans lesquels je me sentais bien. Ce besoin m’a naturellement dirigée vers le métier de créatrice de mode.

Pouvez-vous nous décrire l’ADN de Tanieu Couture ? Tanieu Couture a été créé pour offrir un service de créations de vêtements sur-mesure à toutes les personnes qui ont du mal à s’habiller dans les commerces classiques. Tanieu Couture s’adresse aussi à toutes les personnes qui aiment les belles pièces, qui souhaitent se démarquer et avoir des tenues parfaitement adaptées à leurs morphologies. Avec un accent mis sur le souci du détail bien fait.

Décrivez en 3 mots la femme Tanieu... Discrète, rigoureuse et déterminée.

Vous faites la promotion du made in Geneva. Comment décririez-vous la touche suisse dans la mode ? Je me suis installée à Genève. J’ai une grande partie de ma vie là. En plus, Genève est géographiquement bien centré, entre Paris et Milan. C’est une ville cosmopolitaine. J’y trouve une clientèle qui apprécie le travail bien fait. Il y a un savoir-faire mondialement reconnu dans le domaine du textile en Suisse. Dans quelle gamme vous situez-vous ? Je propose des créations milieu à haut de gamme. Avec des pièces uniques et des collections capsules, pour femme et pour homme également.

Quelles sont vos perspectives de développement de la marque ? Le besoin de s’habiller et de se sentir bien dans sa peau touche plus de personnes qu’on ne l’imagine. Tanieu couture projette de se faire connaître par le plus grand nombre, afin d’offrir ses services à plus grande échelle.

Une édition spéciale 10 ans qui met en avant les Boss Ladies. Si vous aviez un message à adresser aux femmes ? Mon message aux femmes est le suivant : Il faut absolument avoir un fil conducteur pour le déroulement de sa vie. Et ne jamais se laisser distraire par toutes les tentations qui vont venir vous détourner du chemin que vous avez tracé pour vous-même. Surtout aller jusqu’au bout des choix qu’on fait sans jamais rien lâcher.

Que représente la Côte d’Ivoire pour vous ? Y avez-vous des projets à termes ? La Côte d’Ivoire est mon point de repère. J’y trouve toutes les ressources pour reprendre des forces. Et effectivement, j’ai plusieurs projets qui sont en étude pour la Côte d’Ivoire.

Si je vous dis « Roots », vous me répondez ? Merci à ROOTS magazine pour cette belle vitrine. Joyeux anniversaire ! Et que du succès pour l’avenir.

Instagram : tanieucouture.geneve

031

JUSTINE NOKAM PIONNÈRE DE LA MODE À PARIS

Par Michael Kamdem

De Nina Ricci à Courrèges, en passant par Lanvin, découvrez l’itinéraire de l’une des premières modélistes africaines à avoir séduit les maisons de haute couture parisiennes.

Fin des années 70, cette jeune femme de la bourgeoisie camerounaise rejoint Paris pour ses études, des rêves plein la tête. Amoureuse du vêtement depuis sa tendre enfance, c’est tout naturellement que Justine Nokam oriente son cursus vers cette voie. Elle se retrouve diplômée du lycée technique Albert De Mun dans le 7e arrondissement de Paris après avoir enchaîné un BEP Couture Flou (le « flou » désignant la haute couture), un CAP Habillement Fabrication Industrielle et un BT Industrie de l’Habillement. Après un court passage à la faculté d’Assas, en Droit, Justine Nokam revient à ses premiers amours : la couture. Et, en 1985, s’achève sa vie d’étudiante avec une formation en décoration d’intérieur spécialisée textile.

Il est désormais temps de se lancer dans le grand bain. Et, après quelques expériences en tant que modéliste dans le prêt-àporter, les choses sérieuses se mettent à prendre forme à la fin des années 80, début des années 90. C’est ainsi qu’elle s’épanouira dans l’univers très parisien de la haute couture. Des maisons de prestige telles que Nina Ricci, Lanvin, Guy Laroche et Olga Rabenada, où elle officiera en qualité de première main, patronnière et modéliste. Elle fera d’ailleurs partie de l’équipe ayant travaillé sur la collection Dé d’Or de Guy Laroche (Prix décerné deux fois par an, en France, à des créateurs de haute couture et qui a lieu de 1976 à 1990). En cette période, Paris n’a aucun égal en matière de luxe et de raffinement. C’est aussi l’âge d’or du modeling avec l’explosion des supermodels : Naomi Campbell, Linda Evangelista, Claudia Schiffer, Cindy Crawford... Forte de ces années d’expérience au sein du fleuron de la mode française, Justine Nokam décide de se lancer en indépendante. Elle crée sa maison de couture, Mony Mamga, du nom de sa défunte mère, elle-même couturière en son temps. Nichée sur le boulevard Simon Bolivar, dans le 19ème arrondissement (quartier Buttes Chaumont), la belle Camerounaise se fait rapidement un nom et une clientèle fidèle. De 1996 à 2013, elle proposera du luxe à portée de bourse. Des pièces coutures, réalisées sur mesure, avec des process quasi similaires à ceux utilisés dans les maisons où elle évoluait auparavant. Après une aventure entrepreneuriale de 17 années, notre protagoniste se tourne vers une activité moins stressante et devient formatrice, de 2015 à 2016, spécialisée en couture et patronage. Depuis 5 ans désormais, Justine Nokam officie chez Courrèges. Une sorte de retour à ses grandes années. Une maison française de renom, pour boucler la boucle d’une carrière bien remplie. Devenue l’une des chouchous de ce géant du textile, honneur lui sera fait, à l’automne 2021, de travailler à la confection d’une robe Courrèges, sur mesure, pour Kim Kardashian. Rien que ça.

Et si cette édition des 10 ans de ROOTS existe, c’est aussi un peu grâce à elle, puisqu’elle n’est autre que la femme qui m’a donné la vie, moi le fondateur du magazine. Elle m’aura transmis, entre autres, 4 valeurs dont je me suis servi tout au long de cette aventure : le travail acharné, le goût du beau, la quête de l’excellence et l’amour de mes racines. Love you mum.

TOUCOULOR

UNE MARQUE ENGAGÉE, ENTRE PARIS ET L’AFRIQUE

HUMAINE “À la recherche de mes origines, j’ai appelé l’Afrique. Je l’ai foulée de mes pieds, je me suis reconnue dans tant de femmes qui m’ont bousculée, heurtée, chamboulée. J’ai compris que si je n’étais pas d’ici, je ne serais jamais de là-bas. J’ai compris que l’être humain était un mouvement, une vague, une poussière dans le vent. J’ai compris que les frontières n’existaient pas, que les continents étaient éphémères, que ceux qui étaient là seraient un jour ailleurs, et avaient un jour été autre part. J’ai compris que la femme était universelle, qu’elle portait partout le même fardeau, et que je devais lui rendre hommage, où qu’elle soit, qui qu’elle soit, simplement humaine.”

Amoureuse des défilés de mode, des coupes travaillées et des détails depuis toujours, elle fait du stylisme son moyen d’expression.

Amy Lee Djougari n’en est pas à son coup d’essai. Toucoulor est sa deuxième marque, et pendant des années, elle a su se forger une expérience riche, ainsi qu’un solide réseau d’artisans au cœur du milieu textile parisien. En 2019, après des épreuves personnelles qui ont coïncidé avec la redécouverte de ses origines et la recherche de modèles de femmes inspirants qui lui correspondent vraiment, elle décide de faire table rase du passé et crée Toucoulor. Amoureuse des défilés de mode, des coupes travaillées et des détails depuis toujours, elle fait du stylisme son moyen d’expression. Elle s’inspire de Paris, des grands créateurs, de la femme citadine, mais aussi de sa double culture et de femmes fortes comme sa grand-mère Peule, indépendante et résiliente. Depuis la création de la marque, elle navigue entre Paris et l’Afrique, notamment le Mali et le Sénégal, pour être au plus près de toutes les étapes du projet, et réhabiliter des savoirfaire en perdition, ainsi que des tissus traditionnels qui ont été supplantés sur le marché international par le wax, comme les tissus teints à l’indigo ou le bazin. Elle accompagne également depuis plusieurs années une nouvelle génération de créateurs parisiens dans le montage et la réalisation de leur collection, en collaboration avec son réseau d’artisans.

VALEURS Engagée pour une mode éthique et inclusive, la marque Toucoulor défend des valeurs de transmission, de solidarité, d’authenticité et d’inclusion. Elle a à coeur l’idée d’une femme universelle qui sait voir au delà des différences pour explorer la sororité. Si Amy Lee a découvert en la femme africaine une force et une résilience à toute épreuve, elle est persuadée que cette force lie toutes les femmes entre elles, où qu’elles soient et d’où qu’elle viennent.

HAMAH NEBKA ELIJAH UN CRÉATEUR MULTI-FACETTES

“Ma marque évoque le royaume Kongo [...] Ma source d’inspiration vient de l’art en général, la période de la France des Lumières, des grands artistes et peintres d’antan, mes présentations sont très tabloïd et sont un rappel aux mondanités et à la cour.”

Contrôle d’identité, s’il vous plaît ? Mon nom est Elijah, Nebka Elijah. Je suis un Congolais, originaire de la République démocratique du Congo, âgé de 35 ans, issu de la diaspora francophone parisienne. Je suis un artiste chanteur et entrepreneur passionné d’art, créateur de bijoux et de vêtements ornementaux.

Vous êtes un artiste avec un grand « A », mêlant musique et mode avec aisance. Comment conjuguez-vous ces deux passions et quel pont faites-vous entre ces deux univers ? Selon moi, ces deux passions sont complémentaires. La musique est mon premier amour, elle exprime l’expression interne de mon être et la mode est un amour génétique. La pratique de ces arts m’a poussé à ma propre découverte. C’est pour moi le moyen de partager avec le monde.

Il se dégage une image de noblesse, voire de royauté dans vos visuels. Quelles sont vos sources d’inspiration ? Ma marque évoque le royaume Kongo et symbolise la diaspora qui renoue avec sa culture. Ma source d’inspiration vient de l’art en général, la période de la France des Lumières, des grands artistes et peintres d’antan, mes présentations sont très tabloïd et sont un rappel aux mondanités et à la cour.

Vous êtes donc ancré sur un positionnement plutôt haut de gamme ? Quelle est la tranche des prix ? La tranche de prix se situe entre 90 et 500 euros. Quels sont vos projets de développement de la marque à court et moyen termes ? L’ouverture d’un magasin.

Comment se procurer vos pièces ? Nous sommes actuellement sur le développement de notre boutique en ligne qui verra le jour très prochainement. En attendant, vous pouvez nous retrouver sur nos réseaux sociaux où nous vous tiendrons informés.

@HamaHcouture/Instagram @Nebkaelijah/Instagram

Vous êtes originaire du Kongo et voulez mettre un point d’honneur sur le « K ». Que cela représentet-il pour vous ? Cela représente un passé avec lequel il faut s’atteler car le “C“ n’était pas un choix.

Si vous aviez un message à adresser à la diaspora qui va vous lire ? Renouez avec votre culture et n’hésitez pas à entreprendre car une nouvelle Afrique va naître de vos mains.

Si je vous dis le mot « Roots », que cela vous évoquet-il ? Cela m’évoque l’authenticité, le retour aux origines ainsi que la connection de la diaspora.

Contrôle d’identité, s’il vous plaît ? Je m’appelle Marie-Michelle Legrand, la quarantaine passée, originaire du Sud d’Haïti mais je suis arrivée en France à mes 4 ans. Je suis Juriste en SIRH, diplômé d’un Master 2 droit social de l’université Panthéon-Sorbonne (Paris 1). Je suis aussi naturopathe par passion pour la nature et maman de deux enfants. Je suis co-fondatrice et désigner de l’association-marque de bijoux et accessoires d’inspiration solidaire, éthique et afro-caribéenne, KISQUEYA NATURE BIJOUX en faveur des mineures des rues d’Haïti.

Pourquoi cette envie de créer une association-marque ? En 2009, lors d’une promenade en vacances en Haïti avec mon mari et ma fille, nous rencontrons une jeune fille orpheline de 14 ans, à la capitale de Port-au-Prince. Après s’être disputée avec la dame qui l’hébergeait, elle est jetée à la rue. Le motif de dispute est simple : l’adolescente refusait de continuer la prostitution. Il s’agissait en faite de prostitution pour payer son loyer et manger. Ainsi, encore mineure, elle fut contrainte de coucher avec des personnes pour participer économiquement à la vie de la maison. De ce fait, nous avons voulu l’aider et c’est ainsi, qu’elle va nous apprendre qu’elles sont plusieurs dans cette situation à Cité Soleil. Ma fille Amandine de 4 ans va nous proposer de lui apprendre à faire des bijoux pour vivre. Je créais mes bijoux en autodidacte depuis mes 15 ans. C’est ainsi que va démarrer l’aventure KISQUEYA, un bijou pour sauver une jeune fille de la prostitution en Haïti. Haïti est un si beau pays qu’on le décrit comme « l’enfer au paradis » à cause de ses très dures conditions de vie.

Que signifie « Kisqueya » ? Je cherchais un nom qui puisse à la fois représenter mon association, mes origines franco-taïno-haitienne et ma source d’inspiration. Le mot Kisqueya vient de la contraction du mot créole Kiskeya et du mot français Quisqueya qui est l’ancien nom Taïno (Arawak) d’authenticité originelle d’Haïti et de la République Dominicaine au temps des «Paradis des Indiens». Ayiti, Kiskeya Boyo signifie, en langue Arawak, Haïti terre montagneuse. Kisqueya Nature Bijoux est donc un mix de cultures et d’imaginaires, une synergie entre créateurs, artisans, et mission humanitaire.

Décrivez-nous votre offre produit. Kisqueya Nature Bijoux est une boutique associative à caractère social, éthique et solidaire qui propose des accessoires de mode, des objets de décoration et des produits de beauté fabriqués par des créateurs en collaboration avec des artisans et nos jeunes filles d’Haïti. Nos collections se composent de bijoux de style roots, bohème, de haute fantaisie. Nous nous adressons aux femmes qui recherchent des bijoux de qualité, uniques, qu’elles pourront porter au quotidien pendant de nombreuses années.

038

KISQUEYA

DES CRÉATEURS ENGAGÉS POUR HAÏTI

“Issues de matières naturelles ou recyclées, chaque pièce est unique et entièrement réalisée à la main et en faveur des jeunes filles dans la prostitution en Haïti.”

Entre mes racines africaines et mon feuillage français, se dresse mon tronc haïtien”

Nos créations de créateurs sont issues de matières naturelles ou recyclées, chaque pièce est unique et entièrement réalisée à la main et en faveur des jeunes filles dans la prostitution en Haïti. Kisqueya participe au développement économique et social des artisans en Haïti en transformant localement les matières premières dans le respect de l’environnement.

Comment se procurer vos créations ? Nos créations sont disponibles sur notre site :

www.kisqueya.com

Ou à la boutique Ethniks concept store,18 rue Pierre Lescot 75001 Paris (Les Halles). Des nouvelles créations sont mises en ligne régulièrement. Suivez-nous sur les réseaux sociaux pour rester informés des réassorts, des soldes et des ventes privées. De plus, nous vous offrons la livraison de vos bijoux. Et si vous vivez à Paris, nous serons ravies de vous rencontrer en boutique ! Originaire d’Haïti, qu’est-ce que ça représente pour vous ? Haïti, deux siècles de création artistique, soit un foisonnement créatif, un brassage culturel que l’Histoire a imposé à ma petite île d’Haïti. Le génocide des indiens Taïnos par les colons espagnols, l’occupation française et l’arrivée des esclaves africains dans les plantations, son indépendance en 1804 qui fait d’Haïti la première république noire libre du monde, et jusqu’à l’occupation américaine puis la dictature des Duvalier, sont autant de cicatrices – mais aussi d’influences artistiques… Mon île est ma principale source d’inspiration, je me définis toujours ainsi “Entre mes racines africaines et mon feuillage français, se dresse mon tronc haïtien”.

Si je vous dis le mot ROOTS, cela vous évoque quoi ? Kisqueya. « Roots », pour ma part, c’est être proche de la nature, être en alignement avec soi, ses ancêtres, un retour aux racines…

Danièle

Sassou Nguesso

UNE ENTREPRENEURE SOCIALE DÉVOUÉE À :

La cause des femmes

Sensible à la condition de la femme africaine, Danièle Sassou Nguesso a créé en 2015 la Fondation Sounga (qui signifie « aide » en lingala). Elle a pour ambition d’aller à la rencontre de ces femmes qui connaissent tous les jours des entraves à leur épanouissement, de les écouter, de leur donner la parole et de les aider à acquérir plus d’autonomie en leur offrant les moyens d’entreprendre grâce à des actions portant sur la formation et le microcrédit. Elle a aussi pour vocation de mettre en lumière ces femmes qui ont réussi à dépasser les entraves sociétales et qui contribuent au développement du Congo par leurs efforts. Elles doivent devenir des modèles pour toutes les jeunes filles afin de porter la communauté féminine vers une émancipation effective. Pour se faire, la Fondation Sounga a fixé son développement autour de grands objectifs, qu’elle s’attèle à concrétiser autour de projets phares : Promouvoir l’autonomisation des femmes : Communiquer sur les modèles de réussite féminins (modélisation), au travers de la mise en place du premier incubateur d’entreprenariat féminin, « Sounga Nga », en République du Congo. La création d’un Label Genre Sounga : Des Focus groupes annuels : dont la tenue permet de faire un état des lieux annuel en terme de parité et de représentativité des femmes en République du Congo. Introduction et vulgarisation de la question des genres : grâce à la mise en place d’un ABCD de l’égalité pour éduquer et sensibiliser dès le plus jeune âge, à l’école primaire. Renforcer la corrélation entre la Société civile et l’Etat : Afin de susciter un véritable élan sur la question de la parité et les droits des femmes. Légiférer en faveur des femmes, porter leurs voix auprès des différentes institutions nationales et internationales, afin que leurs droits et leur rôle soient reconnus et protégés. Libérer le potentiel des femmes, au travers d’une Académie du Leadership Féminin, qui a pour objectif de développer le talent des femmes pour en faire des leaders au sein d’un réseau actif (la seconde édition a eu lieu à Pointe-Noire du 25 au 28 novembre 2021)

La cause des enfants

Préalablement à sa fervente implication dans la cause de la femme et de la fille congolaise, Danièle Sassou Nguesso s’est impliquée auprès d’orphelins et d’enfants défavorisés du Congo, dans l’objectif d’améliorer leur quotidien. Ce combat, qu’elle mène depuis 2008 se matérialise au travers des actions réalisées par l’association caritative Le Petit Samaritain qui leur vient en aide à travers des dons de fournitures scolaires, de matériel médical, de vivres, de vêtements, de jouets, d’adduction en eau potable et de produits de première nécessité.

Femme de vision, Danièle se dévoile sous un nouveau jour devant notre appareil, pour un shooting mode 100% Dolce & Gabbana. Editorial d’une femme moderne, engagée et sachant allier féminisime et féminité.

GLOWING, SHINING, EMPOWERING. 041

Glowing

This article is from: