Bakchich N°14bis

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Les nouveaux barbus d’Haïti | P. 6

bakchich

N° 14 bis | du samedi 30 janvier au vendredi 5 février 2010 | x euros

Tiens,

revoilà rachida Loin de Vendôme, son ministère et ses bijouteries, dame Dati se multiplie. De Bruxelles à Paris, du barreau à sa mairie, l’égérie du bling bling trime pour revenir en grâce en Sarkozie. Mais la cour est un monde sans pitié... tf1 séquestre l’inspection du travail | P. 9 Les Franc-mac’ du Grand Orient en transe | P. 4

bédéreportage : Total contrôle ses pipes | P. 12 et 13


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| Apéro

Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

à quand la retraite à 55 ans ?

même pas mort

apprentis exploités

U

n projet d’arrêté scélérat, et qui concerne le sort des apprentis, va être étudié, nous apprend Force ouvrière, afin de modifier la durée de référence lors du calcul des cotisations de Sécurité sociale des apprentis. Croyez-vous que Copé et ses amis, qui piquent déjà l’impôt sur les indemnisations journalières des accidents du travail, vont améliorer le sort de ces travailleurs en herbe ? Non.

la rédaction

Q

ue la justice est douce en ce froid janvier. Au moins pour l’enquête, l’info et le mauvais esprit. Dans sa grande clairvoyance, le tribunal de commerce de Paris a décidé, le 18 du mois, de prolonger la période d’observation du groupe Bakchich, qui édite les sites Bakchich.info et Bakchich.tv et Bakchich hebdo. «Et pourtant, je n’ai pas touché de bakchich», s’est esclaffé le procureur. Ça peut s’arranger… Au moins, le port du costard et le rasage de près, si peu habituel qu’ils ont provoqué les gentilles railleries de l’administrateur de la société, n’auront pas été vains. Ni l’apport du tout frais club des amis de Bakchich (bénis soient leurs noms), des actionnaires historiques de Bakchich, du soutien de nos fidèles lecteurs, et de nos adulés abonnés. Même pas mort! Douzième acte! Même si le gouffre n’a jamais été aussi proche! Et rendez-vous pour le treizième (ça porte chance) chez le juge le 31 mars.

D’ici là, chers et tendres abonnés1 privés d’hebdo depuis le 13 janvier, Bakchich fourbit ses armes pour ressortir le plus rapidement en kiosques. Sans doute dès la mi-février. Avec une maquette relookée dont vous pouvez admirer les premiers balbutiements dans ce numéro collector. Un nouveau jour de sortie le samedi pour faire passer un agréable week-end à nos chers lecteurs. Un nouveau prix encore à déterminer2 afin que le plus grand nombre puisse profiter de la satire! Que l’équilibre économique tant souhaité, ce Graal de l’indépendance, soit enfin atteint. Et qu’accessoirement les montées d’adrénaline au tribunal du commerce, ne soient que de lointains et plaisants souvenirs à raconter aux descendants de nos premiers fans ✹

(1) les abonnements seront bien entendu prolongés. (2) les archives du site, payantes dès la fin-février, seront accessibles gratuitement aux abonnés.

retraites volées

Le héros de la semaine

Éric Besson est un grand humaniste. Après le ramdam provoqué par Bakchich sur les deux ressortissants haïtiens qui risquaient une reconduite à la frontière, le ministre de l’Immigration a précisé sur France Info que ces personnes étaient « en sursis ». Les chanceux ont donc leur place réservée sur le jet de Bolloré dès que Bouygues aura reconstruit l’île.

L’énormité de la semaine

Abus sur les obèses. Air France a annoncé que les passagers les plus dodus devraient désormais payer deux places sur leur vol. Une nouvelle réjouissante pour le patron de l’Express, Christophe Barbier, qui a expliqué – en gros – que certains obèses n’ont que ce qu’ils méritent. D’autres rires gras ont résonné au siège de Weight Watchers, en Suède, où une vingtaine de joufflus avaient rendez-vous pour évaluer leur poids. Le plancher n’a pas tenu. Semaine vraiment lourde pour les gros.

Le boursicoteur de la semaine

Quand Obama gronde les banquiers, Wall Street plonge dans le rouge. Une semaine après (28/01), Nicolas Sarkozy a recyclé à Davos son sempiternel couplet sur la moralisation du système financier. Résultat : comme si de rien n’était, les marchés mondiaux sont repartis à la hausse. Pour gonfler les bourses, Sarko reste le meilleur.

La presse française en plein imProglio

tout le monde au « courant» Durant ces trois derniers mois, Proglio a martelé son refus de quitter Veolia, au cours d’entretiens au Monde (27/11), au Figaro Économie (18/09), aux Échos (23/11) et sur Europe 1 (26/11). Ajoutez à cela L’Express (19/11), qui a publié deux mois avant les « révélations » du Point, les rémunérations détaillées de Proglio (avec retraite-chapeau, pension et tout le toutim). Seule différence : l’hebdo estimait le

salaire chez Veolia entre 500 000 et 700 000 euros au lieu de 400 000. Et, à l’époque, ça ne choquait personne. Pour L’Express, comme pour Challenges, Valeurs Actuelles ou les sites du Point et du Nouvel Obs, ce « pur produit de la méritocratie », « surnommé le Buster Keaton des affaires » était un « adepte du dialogue social » qui « bouscule les conventions ». Le JDD nous contait même, des trémolos dans la plume, comment le sensible patron était « capable de s’émouvoir devant les scènes du film indien Slumdog Millionaire » dans les bidonvilles de Mumbai… Seuls L’Humanité (30/10) et Libération (qui saluait quand même « la reconnaissance de la CGT ») s’étonnaient vraiment de l’atonie des réactions. Sans commune mesure avec les cris d’orfraie entendus en ce mois de janvier ✹ laurent macabies

jacques-marie bourget

mot pour mot

coup de boule Haro sur Henri Proglio ! Depuis les révélations du Point (19/01) sur sa double rémunération, le patron d’EDF et administrateur de Veolia est devenu la bête noire d’une presse qui l’encensait pourtant voilà à peine deux mois.

FO nous explique que le projet d’arrêté prévoit que « la base mensuelle de cotisations doit désormais être calculée sur 151,67 fois le Smic horaire, au lieu de 169 fois aujourd’hui ». Minuscule détail : pour valider tout trimestre de retraite, chaque salarié doit cotiser sur la base minimale de 200 heures de Smic. Avec leur nouvelle règle, nos amis qui nous gouvernent vont donc voler deux trimestres à la carrière de chaque apprenti ! Tout ça pour « gratter » 72 millions d’euros sur le dos de ces gamins qui se lèvent à 6 heures pour aller rejoindre un chantier où ils ne seront ni nourris ni payés, ou avec des nèfles, et vont travailler jusqu’à 60 heures par semaine. Ils n’ont pas encore de contrat de travail qu’on leur pique du temps sur leur hypothétique retraite. Fiscaliste débutant, je me permets de conseiller à Copé de frapper durement les revenus d’autres privilégiés comme les Restos du Cœur, Emmaüs, le Secours Populaire, SOS Quart-Monde et d’instaurer une taxe de trottoir pour les SDF ✹

Cela se murmure, entre branchés : apprenant l’explosion de sa taxe carbone par les neuf sages, Sarko aurait réagi par un simple petit haussement d’épaules, en marmonnant : « … m’en fous! » D’où, aussitôt, l’application des « plumes » à lui faire répéter inlassablement: « je ne suis pas homme à... », pour qu’on croie qu’il n’a pas changé. Et si, justement, il avait changé ? Le vibrion de la bataille électorale, le zappeur fou de l’an I, le trapéziste mégalo qui balançait de l’Edgar Morin comme s’il le

lisait chaque soir, le chaudbouillant qui, au débotté, rayait la pub sur trois chaînes, bref, l’hyperprésident, pfuit ! Les tics de De Funès sous le regard de Derrick. Des vœux de 31 décembre plats comme notre amie la limande. Des bafouillages ridicules dès qu’il sort du prompteur – et il sort du prompteur à chaque virage. La tête de celui qui veut rentrer se mettre au lit. Et si Nico en avait plein les bottes ? Notez bien, on le comprend. Lui qui veut tant être aimé, il récolte le désamour. Sa taxe carbone carbonisée, Copenhague no comment, le débat foireux de Besson, le clip des Petits UMP à la Gueule de Bois, les délires à deux grammes (par litre) de Mo-

rano, la facture vaccins de Mamy Santé, Rama qui le nargue à donf, le fiston qui se sent plus pisser, les sondages pourris, tous ces maires qui vont, aux régionales, lui faire payer cher la taxe professionnelle perdue, Villepin qui refait le coq… Et si, après avoir bagarré vingt ans pour, par caprice, être président, il nous faisait, par caprice, le coup du j’y-reviens-pas ? Et si sa longiligne aristocrate l’avait convaincu que cinq ans de célébrité pour un plouc, c’est déjà bien plus gras que le quart d’heure d’Andy Warhol ? Et si on jouait 2012 sans lui ? Eh bien, pour le coup, ça ne serait pas la fin du monde ✹ jacques gaillard

Dire qu’il y a quelques années, cet homme nous aurait servi le café

L’ancien président américain Bill Clinton à propos de Barack Obama (propos rapportés dans le livre scandale sur la dernière élection présidentielle aux États-Unis, Game Change).


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Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

BELLE AMIE En 2009, l’ex-ministre de la Justice a mangé son pain noir. Ses multiples mandats et un regain d’entregent augurent-ils d’un meilleur cru pour 2010 ?

Tiens, revoilà Rachida

L

’année 2010 va-t-elle signer le grand retour de Rachida Dati ? En apparence, l’année a démarré en trombe pour l’ex-garde des Sceaux qui, dès les premiers jours de janvier, fait la « une » de Closer. Prétexte ? La première bougie de sa fille, Zohra. Un anniversaire qui vient clore une année de descente aux enfers pour Rachida : chassée de la place Vendôme sous les lazzi du monde judiciaire, puis contrainte à un exil d’« eurodépité » à Bruxelles. Bien loin de ses deux principaux bienfaiteurs, Nicolas Sarkozy et… Christian Dior. Elle a même paru frôler l’abîme en allant, dans son désarroi, jusqu’à s’afficher en juillet dernier à déjeuner avec Jacques Chirac ! Quelques semaines plus tôt, en petit comité, Sarko lâchait un verdict assassin : « cette fille me déçoit énormément ».

prétendre à percevoir des honoraires, en accédant au statut d’avocat. Député, maire, avocate au barreau de Paris : la chute de Belle amie apparaît donc toute relative. De quoi nourrir bien des espoirs, jusqu’à l’ambition de concurrencer le Premier ministre, François Fillon, dans la course à la succession de Bertrand Delanoë à la mairie de Paris en 2014. rupture consommée Cerise sur le gâteau, Rachida est reçue par Sarkozy début janvier. Un entretien immédiatement recyclé par un florilège d’indiscrétions dans la presse, sur le thème du « retour en grâce » de Rachida à l’Élysée. Pour assurer sa promo, Rachida ne lésine pas sur les moyens, embauchant comme « échotier » un exconseiller d’Albanel, dont le zèle à s’acquitter de sa mission est parvenu à mettre en fureur… Nicolas Sarkozy. Car la rupture est bien consommée entre l’Élysée et Rachida et, s’il en fallait une preuve, on la trouverait dans les colonnes du Parisien (25/01), où Rachida a salué « le courage » de Jean-François Copé sur la burqa, alors que les sarkozystes s’emploient à dénoncer le jeu personnel de l’ennemi intime du Président. Autant dire que l’hypothèse d’une candidature de Rachida soutenue par l’UMP contre celle de Fillon en 2014 relève de la science-fiction. « Elle n’est pas dans le casting », confirme un élu parisien, qui révèle qu’une partie du VIIe arrondissement a été rattachée électoralement au XVe. Sans qu’on ait demandé son avis à dame Dati✹ éric laffitte

maire, eurodéputé, avocate Depuis, Rachida, avec l’énergie qu’on lui connaît, rame pour remonter la pente. Non sans quelques succès d’estime. C’est ainsi qu’Anne Méaux et son agence Image 7 se sont portées charitablement et « gracieusement » au secours de la com’ de la petite fille de Chalon-sur-Saône. Financièrement, Rachida n’est pas à plaindre. Sa fonction d’eurodéputé assure l’ordinaire (environ 15 000 euros mensuels) et nourrit les gazettes d’incidents picaresques, le dernier en date étant le plantage d’un journaliste de Libé après deux minutes d’entretien. Son fauteuil de maire du VIIe arrondissement, qui lui vaut de siéger au Conseil de Paris, ajoute quelques milliers d’euros à sa cagnotte. Bientôt, l’exministre de la Justice pourra aussi

clearstream

A

C’est dire si le sort des autres prévenus, Gergorin, Lahoud et autres, pèse peu à côté du match qui oppose l’aristocrate au monarque. hypothèse fragile

Des mois durant, une partie de l’appareil d’État, la fine fleur de nos services secrets (le général Rondot) mais aussi ses génies industriels (Gergorin « stratège » d’EADS) et encore la crème de nos juges d’instruction (Renaud Van Ruymbeke), ou de la presse (le Point) et donc jusqu’au Premier ministre de la

Le successeur de Jean-David Levitte déjà sur orbite

Jean-David Levitte, le conseiller diplomatique de Nicolas Sarkozy, est sur le départ. En désaccord sur à peu près tous les sujets (Afrique, Iran, Syrie…) avec Claude Guéant, le secrétaire général de l’Élysée, la succession de Levitte paraît bien se préciser. Le nom le plus couramment cité est celui de Jean-Marie Guéhenno, un énarque doublé d’un normalien, qui fut secrétaire général adjoint au Département des opérations de maintien de la paix de l’ONU de 2000 à 2008. Peu marqué politiquement, Guéhenno n’a fait jusqu’à présent qu’un bref passage dans un cabinet ministériel, au lendemain du 10 mai 1981. Dans celui de Maurice Faure, éphémère ministre de la Justice de François Mitterrand ✹

Un Lahoud sinon rien

Directeur de la stratégie et du marketing d’EADS, Marwan Lahoud s’est récemment rendu en Syrie pour tenter d’y négocier la vente de quelques Airbus. Pour impressionner ses interlocuteurs, notre fin négociateur s’est présenté comme le neveu d’un Lahoud ancien ministre libanais de la Défense. Insuffisant pour impressionner ses hôtes parfaitement renseignés et qui savent qu’en réalité Marwan Lahoud est le neveu, par sa mère, de Victor Khoury, un ex-chef de l’armée libanaise. Mais avec ce petit mensonge, l’homme d’EADS paraît observer une sorte de rite familial. Impliqué dans l’affaire Clearstream, son frère, Imad, s’est, lui, longtemps présenté comme apparenté au général Émile Lahoud, président de la République du Liban ✹

des gestions et recouvrement des biens saisis. En somme, la gestion du grisbi confisqué aux gros bonnets pendant les procédures. « C’est vrai qu’il a le profil », confesset-on à la chancellerie. « Mais cela lui suffira-t-il à lâcher ses dossiers ? » s’interroge un flic marseillais. Las, le texte qui doit mettre sur pied ce pôle ne sera pas adopté avant le printemps. Le temps de faire le ménage ✹

Roselyne mobilise les vétérinaires pour la H1N1

Frantz Cappé, un vétérinaire parisien, est aussi l’auteur d’un roman félin, Maan. Il est, accessoirement, un très bon écrivain. Est-ce pour les qualités de sa plume qu’il a été élu par les services de Roselyne Bachelot ? Toujours est-il qu’il a été bien surpris en recevant un courrier du ministère de la Santé lui donnant l’autorisation de pratiquer la vaccination H1N1. Cappé ne vaccine de la rage (à dose unique), que des chats et des chiens totalement insensibles à notre grippe. Il faut croire qu’en lisant « docteur Cappé », les ronds de cuir du ministère ne sont pas allés au bout de l’intitulé indiquant « vétérinaire»… ✹

IN-DIS-PEN-SA-BLE AFP

Duduch’ au Panier ?

Le juge marseillais Charles Duchaine croule sous les dossiers politiquement sensibles, tant pour la droite (corruption d’élus sur la Côte d’Azur) que pour la gauche (marchés publics des ordures phocéennes). Pas étonnant, donc, que bien du monde lui souhaite des vacances, si possible loin des procédures. Au point que la bienveillante rumeur du Vieux Port a même fait état de son dessaisissement. Raté. Mais le salut pourrait venir de Paris. Et la création d’un poste sur mesure pour le médiatique et kamikaze magistrat : patron de la future agence

« Pour que l’AFP redevienne indispensable », tel est le titre que Frédéric Filloux a donné au rapport de mission commandé par Pierre Louette – PDG de l’AFP – qui met fin à plus de sept mois d’expertise. Alors que le débat sur la réforme du statut n’est toujours pas tranché, Filloux a rendu son rapport au mois de décembre et celui-ci ne devrait pas tarder à être rendu public par Pierre Louette. Mais qui a jamais prétendu que l’AFP n’était plus indispensable ?✹

la photo de la semaine

ceux qui aiment le villepin perdu u moment où nous écrivons ces lignes, le sort de Villepin dans le procès Clearstream ne nous est pas connu. Un procès hors norme où un président de la République est partie civile contre un ex-Premier ministre, Dominique Galouzeau de Villepin, piteusement poursuivi du chef de « complicité de dénonciation calomnieuse ». Au premier jour du procès, Villepin rappelle qu’il comparaît « par la volonté d’un homme, Nicolas Sarkozy » et qu’il en sortira « libre et blanchi au nom du peuple français ».

le coin des n’infos

cinquième puissance mondiale allaient déployer une énergie considérable, enquêter pour vérifier l’hypothèse terriblement fragile selon laquelle une part des faramineuses commissions des frégates de Taiwan aurait atterri sur un compte ouvert à la Banca popolare di Sondrio, par Nicolas Sarkozy. Et sous le nom de Stéphane Bocsa et Paul de Nagy, patronyme familial qui figure dans le Who’s who… Une information que n’importe quel flic moyennement doué devrait être capable de vérifier dans la semaine ✹ é. l.

Serge Gainsbourg, dont la vie est à l’affiche avec Gainsbourg (vie héroïque), n’était pas qu’un grand musicien. Il était aussi un dessinateur et un peintre de talent. Hélas, se jugeant trop médiocre en la matière, il renonça à cet art (majeur), allant même jusqu’à détruire ses œuvres. Parmi les rares tableaux qui nous restent de Gainsbourg, figure un Portrait de Madame Franckhauser (huile sur toile, vers 1951), acquis par un particulier en 2007 et donc introuvable. Heureusement, le photographe Pascal Cotelle a eu la délicieuse idée d’immortaliser la peinture avant qu’elle n’échappe à tout jamais aux yeux du public ✹


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Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

l’info à poil La voix de son maître

L’info Pour Philippe Val, « France Inter coûte cher à l’actionnaire, qui n’est pourtant pas très bien traité par la station » Le décryptage Il arrive souvent à Jean-Luc Hees de parler avec ironie de Sarkozy comme de son actionnaire. Val, qui n’a pas le sens de la nuance, a voulu singer son patron et a parlé de son nouvel ami comme de l’actionnaire de France Inter✹

Joyandet, régional de l’étape

L’info Fin décembre, Alain Joyandet, sous-ministre à la Coopération, se vantait d’avoir obtenu la libération de deux Françaises détenues en République Dominicaine pour trafic de drogue. Le décryptage Si Joyandet a mis tant de cœur à l’ouvrage, c’est qu’il est Franc-Comtois, comme les deux jeunes femmes, et qu’il s’y présente en tête de liste UMP pour les régionales. Qui aurait craché sur une si belle pub ? ✹

Tacles dans la course à la présidence

Copé privé de dîner

Immortel hommage

L’info Éric Fottorino, patron du Monde, est un mauvais lecteur. Le 13 janvier dernier, dans son édito du Monde, la plume trempée dans le cirage de pompe, il n’a pas hésité à rendre hommage à la secrétaire perpétuelle de l’Académie française, Hélène Carrère d’Encausse. Au motif qu’elle « avait pressenti » l’éclatement de l’URSS. Le décryptage Depuis L’Empire éclaté, paru en 1978, l’Histoire a donné tort à l’académicienne. L’URSS ne s’est pas effondrée en raison de la hausse de la natalité des républiques asiatiques comme elle l’écrivait. Mais lorsqu’on est romancier, comme Fottorino, et qu’on a déjà un très bon ami à l’Académie en la personne d’Érik Orsenna, il faut penser à la suite. Et ne pas hésiter à appuyer ses hommages là où ça fait du bien ✹

ans cette bio consacrée au meilleur ennemi de Sarkozy, on trouve une foule d’anecdotes sur la détestation qui unit les deux hommes.

Paraître ou ne pas paraître, telle est la question

L’info Simone Harari, candidate à la présidence de France Télévisions, propose, dans Capital, de faire appel à des pros de la télé plutôt qu’à des personnalités « d’un bord politique opposé, pour leur supposée indépendance ». Le décryptage Une attaque à peine voilée contre ses concurrents, parmi lesquels Denis Olivennes, patron du Nouvel Observateur ou encore Emmanuel Hoog, président de l’Ina et ancien du cabinet de Fabius, tous deux marqués à gauche ✹

L’info Début janvier, le syndicat du livre, jamais avare quand il s’agit d’enquiquiner les patrons de presse, a empêché la parution de nombreux quotidiens. France Soir, par la voix de sa directrice générale Christiane Vulvert, a protesté et refusé de paraître le 8 janvier, au lendemain de la grève. Le décryptage Une position unique et pour le moins surprenante, prise « comme un geste pour la liberté de la presse », assure Vulvert. Un geste pour la trésorerie du journal, diront les mauvaises langues ✹

Internet démasque les « vraies gens » de TF1 Le « débat » entre Sarko et les « vraies gens » sur TF1 a donné lieu, sur Internet, à un exercice inédit de révélations. Ainsi, Élodie Lepont-Jubin, créatrice d’entreprise, a vite été démasquée comme militante UMP. Son projet avait été récompensé par les services de Matignon où elle avait été reçue en décembre dernier. L’émission n’était pas terminée qu’une photo d’elle tout sourire aux côtés de François Fillon, dénichée par un internaute, circulait sur un Web hilare.

D

Autre invité, Jimmy Bils représentait les PME. Or Bils-Deroo compte 800 salariés, soit plus de trois fois la norme. Petit secret encore, Jimmy est administrateur du Medef, à Douai. Enfin, Rex Kazadi, le banlieusard infographiste à Villiers-leBel, s’était fait connaître du gouvernement en 2007 en participant à un rapport sur les violences en banlieues. Sur Twitter, de méchantes langues ont relevé que Rex était aussi le nom du chien d’Henri Guaino, le conseiller du Président ✹ c. d.

Ainsi à Marseille, en 2007, lors de l’ultime meeting de la campagne présidentielle, Copé croise Raffarin. « Raffarin : Tu viens dîner au Sofitel, Nicolas nous attend. Copé : Je ne suis pas invité… - Qu’est-ce que c’est que cette histoire ? (...) Avec tout ce que tu as fait ? - Oh, tu sais, cette campagne a été une longue succession d’humiliations (...) - Inadmissible ! Tu viens avec moi, s’excite Raffarin. Arrivés sur place, le responsable vient vers eux : « M. le Premier ministre, vous êtes attendu. M. Copé, une voiture de police va vous reconduire. » Humilié, Copé s’exécute. À une heure du matin, il reçoit un SMS de Raffarin : “Tu n’as rien perdu, c’était nul.“ » Quand Raffarin trouve inadmissible quelque chose, ça ne va pas jusqu’à lui couper l’appétit ✹

Copé, l’homme pressé, éd. l’Archipel

L’info sociale à la sauce élyséenne Joyeux anniversaire, Raymond ! Il y a un an, Raymond Soubie, le conseiller social de Sarkozy, prenait, avec sa femme, le contrôle de l’Agence éducation formation (AEF), qui publie une lettre professionnelle de référence en matière d’information sociale (enseignement, formation, emploi, protection…). Une influente – et prospère – agence de presse détenue par un conseiller présidentiel, voilà de quoi susciter quelques interrogations. À la fin du mois de novembre dernier, les représentants du personnel s’en sont fait l’écho, évoquant à raison le « possible mélange des genres entre journalisme, communication et conseil ». Quant à l’indépendance de l’AEF vis-à-vis de l’Élysée, on assure que Soubie n’interviendra en rien auprès de la rédaction. On demande à voir ✹

olivier richet

parité

le grand orient en trans’

diplomatie

centrafrique, la france ferme les yeux

E

st-ce le doux air de Bangui la coquette ? Ou la volonté de cajoler un pays où le géant français Areva se goinfre d’uranium ? À quelques mois des élections présidentielles centrafricaines pudiquement prévues pour printemps 2010, l’ambassadeur de France JeanPierre Vidon roule des yeux de Chimène pour l’actuel général-président François Bozizé. Quitte à dresser, dans un télégramme diplomatique transmis le 14 janvier dernier, un tableau un brin idyllique du bilan de Bozizé. Sans doute fâché avec les chiffres, Vidon évoque le quinquennat du président. Quand Bozizé trône depuis sept ans. Quinquennat, septennat ? Peu importe. Quand on aime, on

ne compte pas… Encore plus sirupeuse se veut la description de son putsch en 2003, date où l’alors « chef d’état-major des armées se résout à prendre le pouvoir par les armes ». Bien entendu, il « promet de rendre le pouvoir aux ci-

vils ». Seules des manifestations massives « encore jamais vues à Bangui » ont convaincu le satrape « de revenir sur sa promesse initiale de ne pas se présenter ». Ô bonheur, le bonhomme est élu en 2005. Et le mandat, évidemment s’est bien passé. « La situation politique s’est apaisée (…) tandis que la situation sociale et sécuritaire considérablement améliorée à Bangui. » Seuls bémols, les rébellions du nord du pays qui ont obligé la France à apporter un soutien militaire en 2006 et 2007 ; ou les « affres d’une trésorerie perpétuellement exsangue »… imputée aux précédents régimes. En revanche, pas un mot sur les éventuels crimes du putschiste légalement élu. Sur les bords de l’Oubangui, on ne charrie pas pour si peu ✹ xavier monnier

P

our la première fois de son histoire, le Grand Orient de France (GODF) compte une femme dans ses rangs. Lui qui, jusqu’alors, ne tolérait pas la mixité. Une révolution pour les frères du GODF ? Pas si sûr. Car Olivia Chaumont, initiée dans les temples dès 1992, était encore un homme il y a peu. Un transsexuel au Grand Orient ! Voilà une situation cocasse pour l’obédience, qui l’année dernière lors de son assemblée générale, avait renouvelé son opposition à la féminisation de l’entre-soi. Dans un communiqué interne que Bakchich s’est procuré, Pier-

re Lambicchi, Grand Maître du GODF explique cette nouvelle tolérance : « Nous ne pouvons que manifester toute notre fraternité et toute notre compréhension face à cette épreuve. » Un bel exemple d’ouverture d’esprit tempérée par le même Lambicchi dans l’Express : « Pour nous, même si elle est juridiquement devenue femme, il a été initié comme frère et reste génétiquement un homme. » De la tolérance, mais pas trop. Il ne s’agirait pas de rouvrir tout de suite le débat pénible sur la misogynie, présumée bien sûr, des francs-maçons ✹ s. p.


Filouteries | 5

Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

miracle La ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, va fermer les centres de vaccination pour la grippe A, le 1er février. Que va donc faire le gouvernement des 5 000 personnes qu’il a embauchées d’urgence, en décembre, pour réguler l’afflux dans ces fameux centres ? Mystère…

La grippe A soigne le chômage L e gymnase est silencieux, désert. Au bout d’une heure, une femme se présente pour se faire vacciner. Le centre de la rue Mathis, dans le XIXe arrondissement à Paris, tourne à vide depuis des jours. « On nous fait venir pour rien. Je n’ai pratiquement piqué personne. En attendant, ça désorganise l’hôpital », râle une interne, réquisitionnée ce jour-là pour quatre heures. À l’entrée, le personnel d’accueil se tourne gentiment les pouces. Employées en CDD pour « orienter », et « rassurer en cas de mouvement de foule », ces personnes paraissent bien désœuvrées. « Bah, ça fait baisser les chiffres du chômage », philosophe Aïcha*, la quarantaine. L’ennui ne durera guère : au 1er février, tous les centres de vaccination seront fermés, ainsi que l’a annoncé Roselyne Bachelot le 22 janvier.

Zèle préfectoral Prise en urgence dans le climat fiévreux des dernières semaines de 2009, la décision de recruter 5 000 personnes en renfort dans les centres de vaccination avait été communiquée par Laurent Wauquiez, le 3 décembre. Quelques jours plus tôt, Sarkozy avait piqué sa crise, furieux de voir, dans sa belle ville de Neuilly, les files d’attente s’allonger devant les centres. En Conseil des ministres, il avait même suggéré à Hor-

tefeux qu’il serait bon de faire tomber quelques têtes dans le corps préfectoral, pour l’exemple. Effrayées par la menace élyséenne, les préfectures zélées se sont donc employées à lancer la vaste opération de recrutement.

Six mois de contrat L’association Aurore a ainsi reçu, fin décembre, l’ordre de la préfecture d’Ile-de-France de procéder à près d’une centaine d’embauches. Paris profession sport et jeunesse (PPSJ) a reçu le même courrier et a donc recruté début janvier en urgence quatre-vingtquinze personnes. Idem à l’association SOS Habitat et soin, qui a dû engager fissa soixante-cinq personnes sur Paris. Le mot d’ordre : branle-bas de combat, les recrutements devant être faits « sous les dix jours ». « C’est la preuve que quand on veut, on peut », persifle Éric Pliez, le président d’Aurore, soulignant la difficulté d’obtenir de tels financements habituellement. Car, question financement, une fois de plus dans ce dossier de la grippe A, le gouvernement n’a pas regardé à la dépense : non seulement ces « emplois » sont des CAE, des Contrats aidés entièrement financés par l’État, mais ils ont été contractés pour une durée de… six mois ! Si Bachelot espère réduire la facture de son méga plan de vaccination en négociant avec les labos l’an-

nulation d’une commande de 50 millions de doses de vaccin, ce ne sera donc pas grâce à ces milliers d’embauches. pas de chiffres A-t-on seulement atteint ce chiffre de 5 000 contrats ? L’a-t-on dépassé ? Mystère. Au gouvernement, chacun se renvoie la

lES MéDIAS en ONT EU LEUR DOSE

com’ stérile

Que Roselyne Bachelot semblait heureuse, le 21 septembre dernier. « Merci aux médias ! Ils m’ont considérablement aidée, ils ont relayé gratuitement ces campagnes », s’enchantait la ministre de la Santé à Bakchich. Quatre mois plus tard, elle était moins guillerette: « En temps de crise sanitaire, le rôle de l’information est de restaurer la liberté – liberté de comprendre, liberté de choisir –, et non pas d’attiser les peurs », pestait-elle lors de ses vœux à la presse le 20 janvier. Dire qu’on pensait que le rôle de la presse était de relayer gratuitement la campagne… ✹

L’info en temps réel en cas de crise sanitaire attendra. Sur le site du ministère de la Santé, dans la rubrique dédiée à la grippe destinée à la presse, le dernier communiqué date du 10 septembre et la rubrique « Bulletins quotidiens », datée d’août, est… vide. Apparemment, certains responsables de site ont été vaccinés contre les mises à jour ✹

A COMME ARNAQUE

Au plus fort de la pandémie, les journaux se sont rués sur les mêmes experts. Ainsi, depuis avril, Le Figaro, Le Monde, Libération et Le Parisien ont interviewé une quarantaine de fois l’épidémiologiste Antoine Flahault. L’expert a même été cité par Bachelot pour avoir « décrit un des scénarios tout à fait possibles ». Ce Nostradamus en herbe avait annoncé pas moins de «30 000 morts en France ». Avec 300 décès dans l’Hexagone, ses prévisions font tousser ✹ PAS SI BÊTE

Et si le fiasco de la campagne de vaccination venait du nom du virus ? Grippe aviaire ou vache folle, c’est plus causant. Quand les médias l’ont baptisée « porcine », les éleveurs ont grouiné. Quand les journalistes l’ont dite « mexicaine », le pays n’a pas aimé. Finalement, la France a été une des seules à choisir « grippe A » au lieu de «porcine». Parmi tous ces noms, un cochon n’aurait pas trouvé ses petits ✹

EMPOISONNANT

« Le vaccin contre la grippe A est un poison ! » Une thèse partagée par les nombreux amateurs de complot, dont les messages envahissent les boîtes mail. La star en l’espèce s’appelle Russell Blaylock, un « neurochirurgien réputé ». Ce docteur américain à la retraite assure que le vaccin contient un adjuvant meurtrier. Il jure aussi qu’Obama a hypnotisé les électeurs pour se faire élire. Le jour où l’on trouvera un vaccin contre la bêtise, il faudra envisager de le rendre obligatoire ✹ aïe, carambar !

En allant faire vacciner son fils de 8 ans, une lectrice de Bakchich s’est montrée fort surprise par la sollicitude du personnel de santé. Une poignée de Carambar dans les poches, le chanceux bambin a reçu un « diplôme du courage » et la promesse de l’infirmière d’autres confiseries et diplômes pour ses camarades s’il parvenait à les faire vacciner. On n’attire pas les mouches avec du vinaigre, mais les enfants avec des sucreries. En temps de grippe A, le plan Bachelot sur l’obésité infantile reçoit le diplôme de l’amnésie ✹

seringue. Au ministère de la Santé, on conseille de s’adresser aux collègues de l’Intérieur qui euxmêmes se défaussent : « Cela dépend des préfectures, nous n’avons pas de chiffres globaux à communiquer ». Si même les calculettes sont grippées… Autre question embarrassante pour le gouvernement : que va-t-il

advenir de ces 5 000 CDD ? « Nous n’avons aucune information et on sent une certaine inquiétude », observe le directeur de PPSJ, Julien Pourre. Bachelot devra peut-être songer à ouvrir des centres antistress… ✹ lucie delaporte * le prénom a été changé

tradition


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Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

ti

haï spécial

promo

exclusif Un rapport secret révèle que le putsch américain de 2004 contre le président Aristide visait en fait l’inquiétante présence d’intégristes musulmans en Haïti.

Les barbus à la plage

F

lash-back. Le 29 février 2004, un commando des forces spéciales américaines investit la résidence du président haïtien, JeanBertrand Aristide, démocratiquement élu. Sous la menace, celuici démissionne et est embarqué dans un avion. Le Conseil de sécurité de l’ONU autorise alors le déploiement de la Force multinationale d’intérim en Haïti (FMIH) à laquelle collaborent les ÉtatsUnis et la France, qui a envoyé mille hommes. Pour les bidasses français commence l’opération Carbet, officiellement pour « sécuriser » le pays. Mais un rapport émanant du renseignement militaire français, que Bakchich s’est procuré, révèle que notre troupe d’élite luttait aussi contre le terrorisme islamiste ! Rédigé le 13 mai 2004 par le capitaine Lagarde, membre de la cellule Évaluation de l’opération Carbet, ce document se base sur des infos américaines (recoupées par nous, disent les Français) pour affirmer qu’une menace terroriste réelle pèse sur Haïti depuis 2000.

Le capitaine Lagarde n’hésite pas à écrire qu’avec le soutien du président Aristide et de son entourage proche, Haïti est rapidement devenu une base arrière opérationnelle pour des éléments « terroristes », et une « base financière » grâce au trafic de drogue et d’armes. Toujours selon le militaire, ces réseaux auraient eu

Leur volonté : instaurer un islam radical pour préparer le djihad. l’ambition d’« utiliser le pays comme plateforme pour introduire illégalement aux États-Unis des éléments terroristes, ou de l’armement ». En clair, « soutenir l’infiltration et l’exfiltration des ÉtatsUnis d’éléments islamistes (par avion ou par bateau) ». Décidément, les États-Unis n’ont pas de chance avec les Caribéens portant la barbe ! Pour cette « islamisation » d’Haïti, tout commence en 1994 avec l’arrivée d’anciens militaires venus du Pakistan et du Bangladesh. Un par un, ces

drôles de missionnaires viennent construire des lieux de culte musulmans dans les quartiers défavorisés de Port-au-Prince. La deuxième vague de fondamentalistes débarque en 2000 avec, pour stars, trois missionnaires issus du Pakistan et d’Afghanistan, d’après le capitaine Lagarde. Le but de ces prosélytes, instaurer un islam radical et majoritairement sunnite et préparer le terrain pour le djihad… En 2001, la phase opérationnelle de cette infiltration s’engage. « Un moudjahidin, dénommé Aziz (…) vient à Haïti, en tant que représentant des talibans », écrit notre capitaine. Grâce à des fonds provenant de Floride et d’Arabie Saoudite, ce taliban « verse 20 000 dollars US au gouvernement Aristide pour l’obtention de passeports, au profit de chaque étudiant taliban ». Si le rapport du militaire français ne prouve pas l’existence de liens entre Aristide et les islamistes radicaux qui, affirme-t-il, prospèrent sur son territoire, il mentionne néanmoins que des membres du premier cercle de l’ex-chef d’État – notamment deux femmes – étaient « proches des milieux fondamentalistes ». Hélas pour notre feuilleton, la FMIH ayant été remplacée par la Mission des Nations unies pour la stabilisation d’Haïti, et le capitaine Lagarde a cessé d’écrire de cruelles choses sur les musulmans. Dans les trois mois passés main dans la main en Haïti, bidasses français et américains ont eu le temps, disentils, de mettre en fuite ou d’arrêter les réseaux de ces nouveaux barbus. Si jamais il en reste, nul doute que l’humaniste pax americana qui règne désormais sur l’île saura faire taire les derniers barbudos ✹ jacques-marie bourget

lES AGITÉS du TREMBLEment

LE DON DE LA FARCE

Oubliez la tectonique des plaques et autres failles géologiques. Deux fâcheux venus des États-Unis ont livré de foireuses théories sur l’origine du séisme haïtien. L’acteur Danny Glover a expliqué sérieusement que le tremblement de terre était dû au réchauffement climatique. « Ce qui est arrivé, c’est la réponse à ce que nous n’avons pas pu faire au sommet de Copenhague », a cru bon d’ajouter cet activiste écolo. Chassez le surnaturel, il revient au galop. Un autre sismologue américain s’est illustré. Pour le télévangéliste Pat Robertson, qui sévit depuis plusieurs décennies sur la chaîne CBN, Dieu se venge sur la population depuis qu’elle a signé un pacte avec le diable pour se débarrasser des Français ! Le triste sire traite régulièrement les féministes de « sorcières » ou les musulmans de « sataniques » et accuse les homosexuels de projeter de détruire le monde. Ne cherchez pas plus loin : Satan l’habite ✹

Jean-Claude Duvalier, dit « Bébé Doc », a proposé de transférer les 8 millions de dollars de son compte en Suisse pour financer les secours aux victimes du séisme en Haïti. « Bébé Doc » ? C’est bien le dictateur qui succéda en 1971 à son père, François Duvalier (« Papa Doc »), lui-même dictateur et créateur des tristement célèbres Tontons Macoute, miliciens sanguinaires. Chassé par des révoltes populaires quinze ans plus tard, Bébé Doc a quitté l’île en détournant une fortune évaluée à quelque 120 millions de dollars. Or ces 8 millions sont bloqués par la justice helvétique… Duvalier, qui ne doute vraiment de rien, a dernièrement tenté de retourner en Haïti. Mais les autorités lui ont annoncé qu’il serait jugé pour les crimes perpétrés par son régime s’il revenait. L’ex-dictateur vit tranquillement à Paris depuis vingt-cinq ans, sans être menacé d’expulsion. On a connu Éric Besson plus tatillon ✹

histoire

la mainmise de l’oncle sam

L

a tragédie d’Haïti est étiquetée made in USA car, depuis un siècle, son peuple subit un colonialisme politico-économique dicté par Washington et le patronat américain. En 1910, le Département d’État, en partenariat avec la future Citibank, prend le contrôle de la Banque nationale d’Haïti. Sa trésorerie est transférée en 1914 dans les coffres de la banque new-yorkaise et les revenus de la douane haïtienne sont saisis. L’économie nationale reste sous autorité américaine pendant quatre décennies. Adviennent les trente années sanglantes des dictateurs Duvalier, « Papa Doc » et « Bébé Doc », soutenus par Washington comme un rempart anti-communiste contre Castro. Sous les Duvalier, la dette haïtienne atteint 40 % du PNB. agriculture sapée Durant cette période, l’autosuffisance de l’agriculture est sapée par le plan de Wa s h i n g t o n , d e connivence avec la Banque mondiale et le FMI. Ce plan visait à faire de Haïti le « Taiwan des Caraïbes », une économie d’export basée sur une maind’œuvre souspayée, accompagnée du dumping des produits agricoles en surplus. Les mirages de l’emploi attirent des millions d’Haïtiens

vers Port-au-Prince où ils s’entassent dans des baraques de fortune. Quand ces logements se sont écroulés lors du séisme du 12 janvier, la mort emporte des centaines de milliers de Haïtiens pauvres. «reconstruction» En décidant de militariser la réponse « humanitaire » au tremblement de terre, Obama a permis à ses généraux d’établir une « zone verte » à l’aéroport de Port-au-Prince. Le contrôle du trafic aérien local a été confié à une base militaire en Floride, qui a donné priorité à ses propres pilotes pour envoyer 10 000 soldats assurer le contrôle des indigènes. Et les Américains ont refoulé les avions de la CroixRouge et de Médecins sans frontières, tout en autorisant l’atterrissage de l’équipe de Scientologie menée par John Travolta ! Aujourd’hui, les influents think tank de droite à Washington, comme la Fondation Héritage, multiplient les études pour la « reconstruction » de l’île sur une base néolibérale. Pour assurer aux multinationales un avenir radieux. Les Haïtiens, eux, continuent de mourir de faim, de maladie, et de désespoir. Pauvre Haïti – si loin de Dieu, si proche des États-Unis… ✹ doug ireland


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Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

les mirages immobiliers expliqués à mon beauf Bruno, mon étude du réseau Century 21, beauf, jubile. Il pour la première fois en 2009, la v a « i n v e s t i r c a t é g o r i e « e m p l o y é s e t dans l’immobiouvriers » (2 000 euros de revelier ». Pas pour nus mensuels par ménage) est se loger, avec son passée devant celle des cadres salaire qui n’a sup dans la population des propas bougé d’un pouce depuis priétaires bailleurs, les cadres dix ans, c’est un peu juste. Il moyens restant légèrement aucompte « acheter un petit studio dessus. Héritage, prime de lipour faire un placement ». Rien cenciement… tout y passe ! que de prononcer la formule, il Un fructueux business s’est dése sent déjà gagnant. veloppé pour démarcher cette Évidemment, Bruno, vu la crise clientèle novice par des offres financière qu’on vient de se alléchantes avec des simulapayer, l’idée d’aller placer en tions de revenus pour le moins Bourse l’héritage de tante Maoptimistes. Voire carrément thilde, ça ne mensongères. t’emballe pas Malgré les téLes primo-accédants trop. Mais au moignages de sont de plus en plus risque de pasplus en plus appauvris par leur achat. n o m b r e u x ser pour la rabat-joie en chef, d’acquéreurs tu devrais quand même y regarqui se sont retrouvés avec des der à deux fois avant de t’engastudios situés au milieu de ger. Bien sûr, tu l’as lu partout : nulle part, souvent en périphél’immobilier, c’est du béton. À rie de petites villes et impossivoir. bles à louer au prix qu’on leur Pour doper le secteur, les inciavait indiqué, les candidats tations fiscales pour accéder à continuent à affluer. la propriété se sont multipliées « On voit de plus en plus de proces dernières années. La loi priétaires bailleurs appauvris Scellier, dans le prolongement par leur investissement », recondes précédents dispositifs Ronaît Sylvain Jutteau, analyste bien et Borloo, propose ainsi de du réseau Century 21. Pour profiter d’une réduction d’imJe a n - P i e r re A s t r u c, q u i pôt d’un quart du prix du logeconseille les victimes des proment neuf acheté, à condition fessionnels de la défiscalisation, de le louer pour neuf ans au « ces marchands de soupe préfèminimum. rent avoir affaire à des gens qui Du coup, alors que l’accession gagnent deux francs six sous, endettés, coincés avec un logeà la propriété – 56 % des Franment inlouable puisqu’ils çais sont propriétaires – était réservée aux classes moyennes n’auront jamais les moyens de et supérieures, de plus en plus les poursuivre ». de petits revenus veulent Transmis à Bruno et à ceux qui aujourd’hui devenir proprio – avaient placé toutes leurs écocoûte que coûte – pour sécurinomies avec un espoir de revenus stables ✹ ser l’avenir. Au point que, comme le notait début janvier une lucie delaporte

au comptoir recherche activement gardés à vue

MADAME IRMA sarkozy

I

l e s t t ro p chou, votre Kaïser Sarkoco, en direct sur votre BouyguesTV et face à de vrais (sic) Français, vos compatriotes, à l’identité nationale avérée, en prédisant, telle la cartomancienne madame Irma, que le chômage va baisser en France. Que le dieu de l’économie l’entende car la petite jeune fille bac+5 marketing-communication, sans emploi, est repartie sans illusions. Cela va très

bien pour Proglio ! Tout va très bien, madame la Marquise, chers Gaulois, vous connaissez la chanson : demain on rase gratis. Ça ira mieux après-demain ! Le Kaïser Sarkoco vous prend pour des billes. C’est à vous, Françaouis, de décider si vous voulez continuer avec lui et son orchestre ou bien opter enfin pour la rupture. Comme dit Lagarde « ils m’ont prise pour une conne », en attendant la croissance, et les emplois qui iraient peut-être avec ✹ s.a.r. le prince pokou

travail

passez par la case prison La course au chiffre des gardes à vue atteint des sommets. Tandis que le ministère de l’Intérieur annonçait un score faramineux de 580 000 « GAV » en 2009, un livre paru jeudi révèle que ce record est en deçà de la réalité. Dans Gardés à vue (éditions Les Arènes), Mathieu Aron, journaliste à France Info, explique qu’il y aurait eu près de… 900 000 GAV l’an passé ! Un écart qui excède légèrement les marges d’erreur statistiques, imputables selon lui à l’omission malheureuse des gardes à vue pour des délits routiers (250 000, une paille), et des gardes à vue outre-mer (50 000). Pris sur le fait, le ministère a reconnu qu’une fois ces derniers cas inclus, la police affichait en réalité 800 000 GAV au compteur de 2009. Champagne et prime de rendement ! ✹

L

Régis Debray embrasse la vidéospère

’administration pénitentiaire ne manque pas d’humour. Pour inciter les entreprises à faire travailler les détenus, la Direction interrégionale des services pénitentiaires de Lyon a imaginé un chouette jeu de société. Intitulé Pour être gagnant à l’arrivée, pensez à la prison, dès le départ, cet aimable divertissement publicitaire inverse les règles du Monopoly. « Ici, la prison n’est pas une punition, mais un eldorado. (…) Quelle que soit la case du plateau, le joueur-entrepreneur gagne à tous les coups. Une belle allégorie de la délocalisation carcérale », notent les auteurs d’un livre choc sur le travail en prison (1).

Balladur ne veut pas faire la cour à Debré

compétitivité inégalée Éloquentes, les cases cardinales du plateau expliquent les avantages du travail carcéral : « Effectifs insuffisants. Ne manquez pas une commande, rendez visite à la prison » ; « Travaux urgents. Ne vous laissez pas déborder, avancez vite jusqu’à la prison » ; « Commande imprévue. Pour livrer à temps, passez en priorité par la prison » ; « Budget serré. Ne bloquez pas vos projets, passez plutôt par la prison ». Convainquant. Payé trois euros de l’heure, sans contrat de travail, obligé de sui-

Qui a vu, ou lu, Régis Debray a forcément été touché par les embruns qu’il agite à tout bout de champ contre les médias, en particulier la télé, par lui baptisée « vidéosphère ». Pendant longtemps, pour l’ancien ami de Che Guevara, un journaliste de télé était un type à qui vous deviez expliquer l’existence de Dieu et qui n’en tirait que quinze secondes, noyées dans une heure de son baratin. Mais c’est fini, Régis a fait la paix avec le saint cathodique puisqu’il a refusé de parler d’Haïti sur Bakchich TV, au prétexte qu’il est « sous contrat avec une chaîne du PAF ». Qu’arrive-t-il à Régis ? A-t-il besoin de refaire sa piscine ? ✹

Tandis que Brice Hortefeux soutient la candidature de l’ex-ministre socialiste Michel Charasse au Conseil constitutionnel, Sarkozy aimerait bien expédier Édouard Balladur à l’un des sièges qui vont se libérer. Mais sa courtoise Suffisance fait le difficile. Ballamou ne dit pas non mais exprime son horreur à la perspective d’avoir à frayer avec Jean-Louis Debré, actuel président du Conseil et surtout ex-porte flingue en chef de Chirac lors de la fratricide présidentielle de 1995 ✹

vre des cadences infernales pour décrocher des remises de peine, le taulard français est aussi compétitif qu’un ouvrier d’Europe de l’Est. Au point que certains entreprises se demandent s’il vaut mieux délocaliser en Chine ou sous-traiter en prison… La carte pleine d’à-propos de ce jeu débordant de malice en rajoute une couche : « Une disponibilité totale. (…) 12 mois sur 12, des personnes toutes volontaires sont prêtes à travailler pour vous : souplesse de recrutement ; adaptation (…) à vos besoins ; mise à disposition gratuite des locaux. » Une autre souhaite la « bienvenue aux entreprises citoyennes ». Des entreprises aussi désintéressées que discrètes. Le 12 février 2009, Bakchich tressait des lauriers à Webhelp (2), un opérateur téléphonique qui sous-traite pour le compte de grands groupes. Lesquels refusent d’associer leur image au travail en prison. Parmi les mystérieux donneurs d’ordre dévoilés par les auteurs, Bouygues Télécom✹ olivier richet (1) Le travail en prison, enquête sur le business carcéral, G. Rambaud et N. Rohmer, Autrement, 19 euros. (2) « Emploi : allô ici la taule » http://minu.me/1ku2


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Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

fatal picard

potins politiques

bertrand en prend pour son grade

D

ans Xavier Bertrand, les coulisses d’une ambition, une biographie non autorisée (l’Archipel), Ian Hamel, journaliste à l’hebdo de Lausanne Matin dimanche, a obtenu les confidences d’un ancien lieutenant du patron de l’UMP. Intox 1998. Un tract intitulé « Halte à la jeunesse immorale ! » atterrit dans quelques boîtes aux lettres de Saint-Quentin (Aisne), ville où Bertrand est adjoint au maire. En pleine campagne pour les cantonales, le document met en cause sa vie privée. Selon un témoin anonyme, le tract sort d’une imprimerie tenue par un proche de Bertrand. Personne ne saura qui se cachait derrière cette distribution et l’intéressé se défend de toute manip’. Au même moment, des colleurs d’affiches du RPR auraient été chargés de couvrir ses portraits de slogans hostiles, pour discréditer l’adversaire socialiste.

ses prestations télévisées), il a confié son image à l’agence Euro RSCG depuis 2004. Intermittence « “Maçon”, je savais, mais “franc”, je l’ignorais! » La saillie est de François Fillon, lorsque lui fut révélé que Xavier Bertrand était franc-maçon. Contrairement à ce que l’intéressé affirme, il n’a

girouette La fidélité de Xavier Bertrand est variable. En 1992, il revêt les couleurs de Philippe Séguin pour le non à Maastricht. En 2002, il suit Juppé, qui lui confie une mission sur les retraites à l’UMP. En 2005, il rallie le blanc panache de Dominique de Villepin, dont il est le ministre de la Santé. En 2006, il devient l’indéfectible porte-étendard de Sarko, dont il est ministre de l’Emploi puis concierge en chef de l’UMP. Silence Bertrand n’a pas protesté lorsque Charles Baur, conseiller municipal de Saint-Quentin, a été réélu à la présidence de la région Picardie grâce aux voix du FN en 1998. Proche de Séguin et membre du Grand Orient de France, Bertrand était pourtant très hostile à la droite extrême. Au même moment, d’autres (Millon, Soisson…) étaient durement sanctionnés ✹

Médias Un temps, Xavier Bertrand a caressé l’idée d’être jour naliste. Aujourd’hui, il est le roi de la com’. Habitué des « media-trainings » (pour améliorer

devenez actionnaire ! tttttttttttttttttttttttt tttttttttttttttttttttttt tttttttttttttttttttttttttttttt Adresse mail tttttttttttttttttttttttt Je soussigné demeurant à

souscris au capital de la SAS « Le Club des amis de Bakchich » constitué à l’effet de regrouper et porter les souscriptions à la SAS Groupe Bakchich. Montant de votre engagement :

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pas attendu 2004 et son entrée au gouvernement pour ne plus fréquenter la loge des Fils d’Isis, à Tergnier (Aisne). D’après ses « frères », son assiduité n’a duré que trois ans, le temps de devenir maître, en 1998. « Il ne vient plus jamais nous voir, alors qu’il ne rate jamais une foire aux boudins dans la région », raillait un frère des Fils d’Isis.

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la bakchich team Directeur de la rédaction : Nicolas Beau • Conseiller éditorial : Jacques-Marie Bourget • Chroniqueurs : Matthieu Adenil, Daniel Carton, Jacques Gaillard, Marc Godin, Doug Ireland, Éric Laurent • Rédacteur en chef édition : Cyril Da • Maquette : Rampazzo et associés (conception), Émilie Parrod • Secrétaire de rédaction : PierreGeorges Grunenwald • Rédaction : Monsieur B, Sacha Bignon, Émile Borne, Émilie Buono, Louis Cabanes, Renaud Chenu, Éric de Saint-Léger, Lucie Delaporte, Catherine Graciet, Éric Laffitte, Anthony Lesme, Laurent Macabies, Simon Piel, Enrico Porsia, Bertrand Rothé, Grégory Salomonovitch, Anaëlle Verzaux• Dessinateurs : Bar, Baroug, Goubelle, Lasserpe, Ray Clid, Khalid, Kerleroux, Mor, Morvandiau, Nardo, Oliv’, Pakman, PieR Gajewski • Directeur de la publication : Xavier Monnier. Groupe Bakchich, SAS au capital de 56 980 euros • Siège social : 121 rue de Charonne 75011 Paris. CPPAP : 1114 C 90017 • ISSN : 2104-7979 • Dépôt légal : à parution • Impression : Print France Offset

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L’Obama de Bayrou est modeste

Il paraît que c’est un ou une stagiaire qui a voulu trop bien faire. Il y a quelques jours, les rédactions ont reçu une invitation pour le lancement de la campagne d’Alain Dolium, tête de liste du MoDem en Ile-de-France. « Alain Dolium est-il le nouvel Obama français ? Venez en juger par vousmême ! », proclamait le mail. Le 27 janvier, Dolium a voulu rétablir les choses : « Bien évidemment, je ne suis pas le nouvel Obama français. Je m’appelle Alain Dolium. Et si d’aventure il y a un point commun, c’est que nous sommes démocrates tous les deux. » Il n’empêche : en parlant de lui aux journalistes, François Bayrou, qui n’est pourtant pas stagiaire au MoDem, avait bien juré qu’il avait trouvé « un Obama pour l’Ile-de-France ». Lui aussi veut envoyer des troupes en Afghanistan ? ✹

Un casse-tête pour Sarkozy

« J’ai ouvert la boîte de Pandore », a confié mardi, au lendemain de l’émission de TF1 avec Nicolas Sarkozy, Samir Abbas, l’enseignant qui travaille depuis six ans en Seine-Saint-Denis sans être titularisé. Car le Président a promis la « titularisation progressive des contractuels ». L’ennui, c’est qu’ils sont 334 000 pour les contractuels de l’État, 143 000 dans les hôpitaux et 363 000 dans les collectivités locales soit 840 000 personnes. Et il est question de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite… « Je crois que j’ai fait avancer le débat », se félicite Samir Abbas. Sur la gestion des promesses en l’air sans doute… ✹

la qualité de l’air dans sa ville. L’opposition accuse Dédé les gros cigares de « casser le thermomètre » qui permet, notamment, de pointer l e s so u c i s q u e créent pour l’environnement la départementale 7, qualifiée par le PS « d’autoroute urbaine sur les berges de la Seine ». Un parcours de moins en moins champêtre ✹

Ségolène Royal et le démon de la plume

Encore un livre de Ségolène Royal ! Le 15 avril sortira, chez Plon, Mon dictionnaire de la politique, signé de l’ancienne candidate socialiste à la présidentielle. Avec « B » pour bravitude, « F » pour fraternité… Et « S » pour socialiste, sarkozyste ou scélérat ? ✹

Santini ne manque pas d’air

Les écolos des Hauts-de-Seine ne sont pas contents : André Santini, maire d’Issy-les-Moulineaux, a décidé de supprimer les instruments de mesure d’AirParif qui permettent de mesurer

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Au bazar des médias | 9

Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

ressources inhumaines La première chaîne est épinglée par l’Inspection du travail pour sa gestion du personnel. Irritée, la direction de TF1 réfute les accusations dont elle est la cible. Loin de se laisser impressionner, l’inspectrice en charge du dossier ne lâche pas le morceau.

TF1 zappe l’Inspection T

F1 est une entreprise généreuse. Dans un communiqué interne du 13 janvier 2010 que Bakchich s’est procuré, la direction générale adjointe assure à ses ouailles que « 2008 et 2009 ont été pour TF1 SA les années les plus difficiles depuis sa privatisation. » Après la mauvaise nouvelle, la bonne, car « la Direction générale a décidé de maintenir une politique salariale dynamique », explique le DRH adjoint. Le cœur sur la main, on vous dit. Faut-il voir là un moyen utilisé pour calmer le malaise des salariés ? Le 25 novembre dernier, Bakchich Hebdo révélait un courrier que l’Inspection du travail avait envoyé au patron de TF1, Nonce Paolini. Évoquant les « risques psychosociaux » que la direction de la chaîne faisait courir à ses salariés, l’Inspection s’était fendu d’un rappel au code du travail en bonne et due forme

(voir encadré). Selon la lettre, ces risques sont la conséquence directe d’importantes réductions d’effectifs : près de 300 emplois supprimés. échanges d’amabilités De quoi agacer les mandarins de la Une, qui ont répondu illico à l’inspection, contestant toutes les accusations dont ils faisaient l’objet. Ces « affirmations » sont « totalement fausses » et les « griefs énoncés par écrit, sans vérification » sont « dénués de tout fondement », s’est insurgée la direction de TF1. Qui est même allée jusqu’à ajouter que les chiffres relatifs à la baisse du nombre de salariés avancés par l’Inspection étaient tout simplement faux, là encore. Les échanges d’amabilités auraient pu en rester là, mais il semble que TF1 soit tombée sur une inspectrice coriace : « Je suis très surprise d’apprendre par ce

a Dans un courrier daté du 29 octobre et adressé à Tanguy Descamps, directeur des affaires sociales du groupe TF1, l’inspectrice du travail assure qu’à plusieurs reprises TF1 n’a pas respecté son droit d’entrée dans les locaux de la société et que « cela constitue un délit ». Implacable, l’inspectrice ne laisse rien passer à la direction de TF1. courrier du 23 novembre de la Direction de TF1 que les informations que celle-ci donne au Comité d’Entreprise (…) sont sensiblement différentes de celles qui figurent dans les DMMO* transmises à la Direction Départementale du Travail », s’interroge-t-elle. La direction de TF1 mentirait-elle à ses salariés ? Une chose est sûre : l’Inspection du travail est décidée à ne pas en rester là. Les salariés de la première chaîne ont donc eu la –

nouvel os

prime à la casse pour airy routier

L

e 31 décembre dernier, Airy Routier a quitté le Nouvel Observateur, hebdomadaire dont il était l’un des rédacteurs en chef. Officiellement, c’est un départ à la retraite… Départ quelque peu précipité par la publication, en février 2008, d’un article de Routier sur le site du Nouvel Obs, selon lequel Nicolas Sarkozy aurait adressé à Cécilia, quelques heures avant son mariage avec Carla, un SMS lui assurant : « Si tu reviens, j’annule tout ». un sms, beaucoup de bruit Un SMS qui avait fait grand bruit et contraint la direction de l’hebdo à désavouer son rédacteur. Dans les colonnes du Monde, le PDG du Nouvel Observateur, Claude Perdriel, estimait, dans une formule digne d’un contorsionniste : « L’Obs a fait une erreur, car c’était un SMS d’ordre privé qui, à mon avis, n’a pas existé effectivement. En tout cas, pas à ce momentlà. » Comprenne qui pourra. Bien que cette « erreur » ait incité un temps Sarkozy à déposer plainte pour « faux, usage de faux et

recel » – une première en France pour un Président –, Perdriel ne devait guère en tenir rigueur à Routier. Ainsi, quelques mois plus tard, Perdriel, qui est aussi propriétaire du club de jazz et restaurant Le petit journal Montparnasse, accueillait personnellement Airy lors de la fête que ce dernier y donnait pour l’anniversaire de son épouse, la journaliste Valérie Lecasble. la promesse faite à carla De bonnes relations qui perdurent puisque, malgré son départ à la retraite, Airy Routier va maintenir une collaboration professionnelle conséquente avec le groupe de presse dirigée par Perdriel (Challenges, Sciences et Avenir, etc.). Seule consigne, l’Obs devra rester impérativement exclu de ce périmètre d’activité. Ceci en vertu de la promesse qu’aurait personnellement faite le directeur du Nouvel Obs, Denis Olivennes, à sa grande copine : madame Carla Bruni-Sarkozy ✹ fred lonah

bonne – surprise de la voir débarquer à nouveau les 30 et 31 décembre derniers dans les locaux de TF1. L’occasion de rencontrer du monde et de récolter quelques informations… salariés rincés Car, apparemment, être journaliste à TF1 n’est pas de tout repos. Fin 2009, une pétition lancée anonymement, mais signée par toutes les organisations syndicales, avait recueilli près de 280 signatures de journalistes maison (sur environ 300). Pointant les dérives du management à la TF1, elle ne sera donc pas restée lettre morte. Pour mémoire, la pétition dénon-

çait que « Pour tous ceux qui fabriquent les journaux au quotidien, la règle de la rentabilité s’est substituée à celle de la qualité, au détriment des salariés ! » Plus loin : « La direction semble se désintéresser totalement du ressenti de ses salariés qui désirent au minimum avoir les moyens techniques et humains pour travailler correctement. » En attendant, l’inspectrice, c’est son droit, a tout loisir de rédiger des PV et de les transmettre à la justice ✹ simon piel

* DMMO : Déclarations mensuelles obligatoires des mouvements de maind’œuvre

Le social, maillon faible de la Une Voici ce que l’Inspection du travail entend quand elle dénonce les «risques pyschosociaux» encourus par les salariés de TF1 suite aux importantes réductions d’effectifs. Dans sa lettre, l’inspectrice pointe une «dégradation sensible des conditions de travail des salariés dans l’entreprise» et craint que «les réorganisations

mises en œuvre» engendrent des «effets négatifs», «notamment une augmentation du stress dans la plupart des services de TF1 et ses filiales». D’après les informations recueillies par Bakchich, depuis ce courrier, au moins deux employés ont connu les joies du «burn out» : l’épuisement par le travail ✹ S. P.

Nonce Paolini le récidiviste Ce n’est pas la première fois que la direction de TF1 est au prise avec l’inspection du travail. En 2000 déjà, Nonce Paolini, alors « directeur des relations humaines » (sic) s’était fait réprimander par un inspecteur tatillon. Ce dernier s’étonnait que Paolini présente lui-même la candidature d’un membre d’une organisation syn-

dicale, en l’occurrence FO, et regrettait les conséquences que cela avait eu sur le vote qui s’en suivit. Et de rappeler à Paolini que « le chef d’entreprise ou ses représentants ne doivent employer aucun moyen de pression en faveur ou à l’encontre d’une organisation syndicale quelconque » ✹ S. P.


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| Au bazar de la conso

Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

marseille En cas d’impayé, la Société des Eaux de Marseille ne fait pas de cadeaux aux habitants de la Cayolle, quartier défavorisé. D’aucuns voient là une basse manœuvre pour chasser ces habitants pauvres de la ville.

échos des cabas

La cité perd ses eaux C

ité aussi populaire que portuaire, la plus belle ville du monde connaît aussi de petites misères, pas franchement moins pénibles au soleil. Poussé aux bords du cossu IXe arrondissement, à l’extrême sud de Marseille, l’ancien bidonville la Cayolle, devenu quartier, est rarement visité. Quelques promeneurs en direction des calanques, des petits jeunes qui veulent enfumer leur journée, voire des visteurs en route pour la prison des Baumettes toute proche… et c’est tout. Enfin, c’était. Depuis quelques années, les locataires de la Logirem, l’un des importants bailleurs sociaux de la ville, ont vu accoler sur leurs portes d’étranges avis de coupure d’eau. Comme des appels,

sinon à la délation, du moins à déjà paraphé, comme a pu le un coup de pression (voir docuconstater Bakchich en fouillant ment). les archives de quelques résiUn numéro de contrat qui n’a dents. Pas de quoi inciter à gueupas honoré sa facture et la meler contre des méthodes un brin nace de couper l’eau tombe… baroque. « Ils veulent créer des sur tout l’immeuble ! Tout pour tensions pour que les gens s’en mettre une bonne ambiance aillent et transformer la Cayolle dans un quartier et renforcer un en quartier moins populaire. Ils tant soit peu le ont même parlien social. enlevé des Les habitants du quartier fois Pas bégueule, la compteurs ! » dénoncent des méthodes Autant d’arguSociété des Eaux de Marments que la qui incitent à la délation seille (SEM) Société des et à créer des tensions. avise les locataiEaux réfute, res que « la mequelque peu sure peut encore être évitée si la embarrassée. « On ne peut pas redevance est payée sous 48 heuvous assurer que ça n’a jamais res ». Miséricorde ! été fait, assure la com’ du groupe. « En fait, le souci est que la LogiMais c’était sans doute des initiarem a délégué la gestion et la factives isolées, incontrôlables et turation au groupe des Eaux de sans arrière-pensée. » Marseille, qui a triQuatrième groupe français de mestrialisé les chargestion de l’eau, détenu à parts ges, détaille à Bakégales par la Lyonnaise des Eaux chich un habitant de et Veolia, réalisant 500 millions la Cayolle qui a préd’euros de chiffre d’affaires et féré témoigner de avec un Forum mondial de l’eau façon anonyme. Cela à organiser en 2012, la SEM ne a pesé sur les budgets se mouille pas dans de tels prodes foyers car certaijets. Et puis, avant d’être à tu et nes factures étaient à toi avec le maire Jean-Claude des estimations fanGaudin, Loïc Fauchon, le puistaisistes. » sant boss de la SEM, n’était-il D’autant que la délépas à contre-courant, maire sogation s’est faite au cialiste de Trets ? forceps. Un contrat Mais, c’est bien connu, un homa L’avis envoyé par la SEM menace l’immeuble pré-rempli et à sime de gauche n’a pas d’arrièregner par les habipensée… ✹ entier alors qu’il n’y a qu’un mauvais payeur. tants, mais parfois xavier monnier

pleine lucarne

canal+ gonfle l’audience d’i-télé… et ses clients

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remière semaine de janvier, un changement de décodeur fait couiner l’abonnement à Canal +. Sur les canaux 4 et de 40 à 45, une pub pour la chaîne tourne en boucle et conseille de s’abonner. À la hotline de la chaîne, aucune surprise : « Ça arrive lorsqu’on change de carte, il faut réactualiser l’abonnement », nous explique une conseillère. « Mais je n’ai pas changé de carte ! », doiton lui répéter trois fois. Une seule solution : « Allez sur le canal 16 (i-Télé, ndlr) et restez-y une heure pour qu’on vous rétablisse les droits. » Tant pis pour le match de Premier League anglaise… Une sieste plus tard, et deux heures passées sur i-Télé depuis le coup de fil, toujours pas de Canal+. Re-coup de téléphone et cette fois, plus de conseiller. Il est 19 heures, il faut rappeler lundi,

mais une boîte vocale nous conseille de rester une heure sur le canal 16. La télé reste donc bloquée sur la 16, pendant une soirée chez des amis. résolu en cinq secondes Lendemain matin, 13 heures d’iTélé plus tard, toujours rien. Le lundi, un conseiller clientèle décroche enfin. « Restez sur le canal 16, un conseiller technique de niveau 2 va vous dépanner. C’est ce que vous auriez dû faire dès le départ. » Le client mécontent prononce alors le mot magique : « Passez-moi le service commercial, je veux me désabonner. » Rassurant, le conseiller commercial propose d’offrir le mois de février. Avant de laisser la parole à un technicien, qui rétablit l’accès en cinq secondes. Toujours ça de gagné en audimat pour i-Télé ✹ MARTIN KIRSCH

Votre sandwich de midi est-il trop cher ? Si vous le payez plus de 3,23 euros, vous êtes au-dessus de la moyenne. Selon une étude du cabinet spécialisé Gira Conseil, près de deux milliards de sandwichs ont été engloutis en France en 2009 ! On les achète surtout dans les enseignes de restauration rapide et les cafésbars-brasseries (55 %) mais aussi dans les hypers et supermarchés (22 %). Et la nouveauté, dans la pause déjeuner, c’est le regain de tendance de la « gamelle » au bureau : le petit plat préparé à la maison séduirait près d’un actif sur huit ✹ Le ski est la première cause de fracture… médiatique. Le sujet ne manque pas d’envahir JT et hebdos chaque année, quand bien même 92 % des Français ne partent pas aux sports d’hiver. Une proportion qui n’a guère évolué depuis vingt ans. Si les classes moyennes et inférieures rechignent à dépenser 1 500 euros la semaine pour chausser des planches, c’est grâce à la clientèle fortunée étrangère que les professionnels de l’or blanc gardent le sourire. Britanniques, Belges et Allemands raffolent des stations françaises ✹ Cdiscount, le site de vente en ligne du groupe Casino, qui fête ses dix ans, a enregistré en 2009 un chiffre d’affaires de plus d’un milliard d’euros, une première dans le secteur en France. L’année passée a vu s’ouvrir 80 points de retrait pour permettre aux clients de récupérer les produits pesant plus de 30 kg. D’autres points de retrait devraient voir le jour en 2010. À quand les magasins d’e-commerce avec des chariots, des rayons et des caissières ? ✹ Dave Arnold, c’est le nom de ce monsieur qui travaille au French Culinary Institute de New York. Il est l’heureux inventeur du chocolat au ketchup, si l’on ose écrire. Ça ressemble au chocolat, ça a le fondant du chocolat, mais ça a le goût du ketchup. Les ingrédients sont à la portée du premier apprenti cuistot : beurre de cacao désodorisé, tomates en poudre, vinaigre de malt, sel, épices. Recette sur Internet : http://minu.me/1l1z (en anglais) ✹


Au bazar du Bazar | 11

Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

conso

maraîchers, la crise en pleine poire

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ntendez-vous, dans les campagnes, les cris des pauvres salades, gelées et enneigées ? Peut-être celui des maraîchers, alors, qui se lamentent de la catastrophe annoncée ? À cause de la récente vague de froid, la production va être mauvaise, et les prix des fruits et légumes, encore, vont grimper. Avec, à la clé, à la caisse finale, ce terrible cortège de clients râleurs, sur le mode du « c’est trop cher, c’était mieux avant ». Comment leur en vouloir ? Personne ne sait quel est le bon prix, celui qui permettra à tous les acteurs de la filière de vivre convenablement. On touche là au délicat problème de la répartition des marges : Leclerc et consorts savent en effet se rendre incontournables. Selon le CTIFL (Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes), près de 70 % des fruits et

légumes en France sont achetés en grandes et moyennes surfaces. Pas besoin, alors, d’épiloguer sur le niveau du rapport de force entre les sept grands groupes français (Leclerc, Carrefour, Auchan, Casino, Intermarché, Système U, Cora) et les centaines d’organisations de producteurs. Dans la guerre économique, ce n’est pas le nombre qui compte. C’est le poids. En euros, s’entend.

Et si les distributeurs prenaient des marges raisonnables ? « Le schéma classique, témoigne Maarten de Moor, secrétaire général de Lava, une organisation de producteurs belges, c’est une enseigne qui te met le couteau sous la gorge, en disant, pour telle pé-

riode, j’ai besoin de fruits et légumes à 1 euro. Peu importe, pour elle, si le producteur peut suivre ou non. Elle a sa campagne de communication à mener, et elle va la faire, avec ou sans nous. » « La grande distribution, engagée dans une guerre frontale entre enseignes, est en train de tirer le point d’équilibre vers le bas, au détriment des agriculteurs », assène, pessimiste, Tomas Garcia Azcarate, directeur général Agriculture au sein de la nouvelle Commission européenne. Pierre Bergougnoux, de l’agence de conseil PB Conseil, spécialiste de la filière agro-alimentaire, reconnaît que le rayon fruits et légumes s’avère stratégique pour les enseignes, représentant de 7 à 12 % des marges brutes. Mais il refuse pour autant de voir la grande distribution désignée bouc émissaire, seule responsable de tous les maux de la filière agricole. « Personne, parmi les producteurs, ne vient voir les acheteurs des grandes surfaces avec des propositions innovantes », constate-t-il. Et d’alimenter des pistes de « tempête dans le cerveau » (brainstorming en bon français) afin d’innover. Emballer leurs produits, pour les rendre moins fragiles, développer le bio, la qualité. Cela leur permettrait, un peu, de renverser le rapport de force. Restera ensuite à la grande distribution de faire preuve de souplesse. En clair, de prélever des marges raisonnables. Une sacrée gageure, en réalité. En attendant, on trouve de très bons fruits et légumes au marché du coin… ✹ Hugo Hélette

MONNAIE DE SINGE

Un journal signé Carla

L’expérience fait s’esclaffer les Russes depuis quinze jours. La télé moscovite a demandé à un chimpanzé de choisir des investissements financiers parmi 30 entreprises, symbolisées par des cubes… Il en a sélectionné huit qui lui ont rapporté le triple de sa mise. Soit un gain supérieur à 94 % des investisseurs russes ! Et les bonus : des bananes ✹

Retour aux sources pour Mme Sarkozy. Propulsée rédac chef intérimaire d’un Figaro Madame prévu en mars, elle a invité à poser ses amies ex-modèles Marine Delterme et Farida Khelfa. La logistique fond de teint est assurée par la styliste et les coiffeurs maquilleurs de Carla, sous l’objectif de la photographe de mode Ellen Von Unwerth ✹

foot

l’om dans une Roulotte russe

U

ne Russe détient un club de foot français, sans que personne ne crie à l’argent sale. L’équipe visée n’est pas la moins médiatique : l’Olympique de Marseille, plus brillant depuis dix-sept ans sur la scène judiciaire que sur le rectangle vert. En voilà une info propice à gros titres, coco! Pourtant, pas une ligne dans la presse… Margarita Bogdanova, veuve de feu Robert Louis-Dreyfus, a su

manier le cocktail avec doigté. Photo en «une» de l’Équipe, et en fourrure, le 30 novembre dernier. Pour une interview sous l’œil attentif de Vincent Labrune, président du conseil de surveillance de l’OM et homme de confiance de RLD. l’aventure bleu azur Rendre hommage à son mari en continuant l’aventure avec le club… Ou en réservant une

soixantaine de places pour un concert de l’orchestre du théâtre Mariinski, mardi 26 janvier, salle Pleyel à Paris, pour elle, ses proches et l’équipe. Même les joueurs de l’OM se mettent au diapason, alignant les résultats en dents de scie. Des travées du Vélodrome aux sièges de Pleyel, l’âme russe souffle sur Marseille. Pas sûr que les résultats suivent... ✹ X.M.

Le manège enchanté d’un ex du PSG Pierre Frelot, l’ancien directeur financier du Paris Saint-Germain, devenu agent de joueur, a décidé d’endosser les habits de… forain ! Au moins l’un des 17 prévenus de l’affaire des transferts frauduleux du PSG a-t-il pris soin d’entamer sa reconversion, bien avant le procès, qui se tiendra en juin 2010. carrousel 1900

C’est en tout cas la conclusion que l’on peut tirer de son surprenant succès à l’appel d’offres lancé par la Ville de Paris au cours de la première quinzaine de mars 2009, par une insertion de la direction des Espaces verts et de l’Environnement de la ville dans le journal professionnel L’Inter-Forain. De la documentation qu’on ne s’attend pas à trouver sur le bureau d’un agent de joueurs, renvoyé en correctionnelle pour complicité de faux et usage de faux et travail dissimulé. Mais après tout, pourquoi pas… Face à ses onze redoutables concurrents issus du monde forain, Pierre Frelot l’a enlevé haut la main. Le voilà à la tête d’un joli carrousel style 1900,

associé à un kiosque de vente de confiseries sur le Quai Branly, côté port de Suffren, face à la tour Eiffel. gros gâteau

Les perspectives du business sont alléchantes : il s’est en effet engagé, moyennant une concession de dix ans, à s’acquitter d’une redevance annuelle de 20 % de sa recette hors taxes, et d’une redevance additionnelle par tranche de chiffre d’affaires supérieur à 1,7 million d’euros. Friandise sur le gâteau du budget municipal, Frelot paiera 5 % sur ses recettes excédant 2 millions d’euros annuellement, sans limitation de montant. Rien à voir avec des montants exorbitants de transferts de joueurs, bien sûr. Mais la fenêtre ouverte par Frelot n’a pas de prix, au moment où Pape Diouf, l’ex-boss de l’OM qui lui avait vendu pour zéro euro son écurie de joueurs, semble revenir dans le milieu du ballon rond. Sans doute les manèges rappellerontils à Frelot le passage des tourniquets de la Justice… ✹ X. M.

pisse-copie

pour FOG, la prose se tâte

L

e nouveau livre de Franz-Olivier Giesbert, Un très grand amour (Gallimard) est unanimement encensé par la presse. À commencer par Elle, qui a dégainé début janvier. Normal, la patronne de ce magazine n’est autre que Valérie Toranian, la compagne de FOG ! Ainsi va la vie du petit monde médiatico-littéraire parisien, prompt à laisser croire au directeur du Point, 61 ans, qu’il est un grand écrivain. Or la prose prétentieuse de son sixième roman prouve largement le contraire. Ce récit à la première personne met en scène un certain Antoine Bradscok qui ressemble singulièrement à l’auteur : la soixantaine, il raconte son coup de foudre pour la belle Isabella et son combat, peu après, contre un cancer de la prostate. Entre-temps, il nous livre dans le détail tous ses déboires conjugaux, sentimentaux, familiaux et les outrages que le cancer inflige à ce qu’il a de plus précieux : son sexe, devenu son « escargot » (sic). Le problème n’est pas tant que FOG se flagelle à tout va et détaille son priapisme, ses séances à quatre pattes chez le proctologue, ses éjaculations sanguinolentes, sa libido en berne – tout fait ventre en littérature. Le problème, c’est qu’il écrit à la truelle, et sur un tel sujet, ça n e p a rd o n n e

pas. Son style est vulgaire (monsieur va aux « ouas-ouas », évoque ses « pissous nocturnes », son « engin » et ses « olives » etc.), pédant (« Je ne peux m’empêcher de m’en ramentevoir », « Ayant la fruition facile, je connaissais déjà tous les affres de la volupté », « peu me chaut que je le sentisse réellement ou non », « mes déifiques éjaculats »). Son livre est plein de métaphores niaises

Le style de Franz-Olivier Giesbert est tour à tour vulgaire, pédant, niais. (« Nos bouches avaient tant communié qu’il me semblait avoir plein d’hosties dans la mienne », « s’ébroue à l’horizon un soleil au teint de bébé »), de clichés (« souvent la haine n’est que de l’amour qui n’ose pas dire son nom ») et autres formules à deux balles (« Que reste-t-il de l’amour quand on a fait l’amour ? »). Un très grand amour oscille entre un digest du dictionnaire des citations et un cours sur la prostate pour carabins, à la sauce Harlequin. Quand Philip Roth aborde ses problèmes de fuites, c’est vraiment de la littérature. Quand Franz-Olivier Giesbert s’y colle, c’est du pipi de chat ✹ gari john


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| Bédéreportage

Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

tuyauterie Entre Grenoble et Martigues, un pipeline enfoui et géré par une filiale de Total transporte de l’éthylène. Une installation qui n’est pas sans danger, et pour laquelle le groupe pétrolier verse un loyer dérisoire.


Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

BĂŠdĂŠreportage | 3


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| Un peu de culture

Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

idées Le philosophe français Serge Audier s’est attaqué à ceux qui critiquent l’héritage de Mai 68. Si l’intention de l’auteur est louable, hélas l’intellectuel rate son but, passant à côté de ce qu’était la révolte du printemps 1968 : une somme de contradictions indéfinissables.

L’insaisissable esprit de Mai 68 S ouvent des mouches, peu sartriennes, piquent Nicolas Sarkozy. La question est alors : « Mais quelle mouche le pique ? » Celle de Mai 68 par exemple quand, au cœur de sa campagne pour l’élection présidentielle, il s’est mis à faire du karaté contre ce si joli printemps. Serge Audier a bien raison de publier à nouveau, revu et augmenté, son livre sorti en 2008, La Pensée anti-68. Après tout, soyons grégaire, et disons-nous, quand Sarkozy dit du mal de quelque chose ou de quelqu’un, l’objet de sa colère est sans doute intéressant. Les cibles de notre néocons’ à la française ne sont jamais flinguées au hasard. D’où l’opération de salubrité d’Audier en éboueur des idées. Ce jeune philosophe, Marianne l’écrit, est un génie. Diplômé de tous les possibles, il écrit aussi des critiques pour le Monde, ce qui devrait l’aider à tourner plus rond.

te conduite selon les prescriptions d’un manuel du bricoleur de révolutions, écrit par des philosophes contradictoires comme Derrida, Foucault, Althusser ou Marcuse. Autrement dit, Audier qui, généreusement et à juste titre, veut défendre le mouvement de Mai, ignore ce qu’il a été. Ce qui est une faute pour un docteur agrégé, membre de l’Institut universitaire de France. Et montre qu’il n’est jamais bon d’être momifié trop jeune. Un garçon comme moi, qui pourrait être vous, même si je ne le vous souhaite pas, qui n’a étudié la philo qu’à la louche, est vite perdu dans le labyrinthe édité

par la Découverte. Tricotage de concepts comparés, que l’on pèse, approuve ou réfute…

masturbation mentale Dommage, ce ping-pong avec soimême, cet onanisme neuronal, fait pour montrer combien on est intelligent… Car les parties compréhensibles et non emmerdantes du livre sont pas mal. Ce qui prescrit aux amis de Régis Debray et de Marcel Gauchet, ces chrétiens sans Dieu, de ne pas acheter cet ouvrage qui leur ferait trop de peine. Ainsi, pour vous parler de l’inanité de la chose, Audier consacre des dizaines de pages – et autant d’arbres

coupés pour imprimer son livre – pour dézinguer l’excellent Luc Ferry, alors qu’il suffit de l’entendre sur LCI où lors des conférences qu’il délivre à grand prix lors de croisières sur des paquebots, comme une madone des steamers. Personnellement, je préférais son père qui faisait des pipes. Des tubulures d’admission pour faire rouler les 4 CV plus vite (ah, alors, que le kit Ferry me botte). Alors que pour Luc, ouvrir la bouche est un moyen de se suicider. Audier est trop jeune, trop intello, trop enfermé dans sa camisole de philosophe pour écrire sur Mai. Et fait penser à ce savant qui coupe les pattes de sa

oubli de définition J’ai attaqué la lecture de son livre d’un cœur léger, croyant, avant même d’ouvrir les yeux, y lire ce que j’avais envie d’entendre. Finalement, les bouquins on devrait les écrire soi-même, on serait moins déçu. Ici parce que notre savant a oublié de définir ce qu’était Mai 68. C’est là qu’on tombe de l’échafaudage, celui de ses idées : 68 n’est pas la plus grande grève ouvrière de notre histoire, mais rien qu’une révol-

muzik

un poil d’absurde ne fait pas de mal

T

épopée délirante Mais puisque la toile les laisse faire, les deux dessinateurs dégénérés en profitent ! Ils se lâchent donc sur des pages gribouillées à quatre mains en noir et blanc et racontent l’épopée délirante de deux dessinateurs, Seb et Mathieu, invités à un festival de blogueurs dans la capitale portugaise. Entre deux indigestions de morue, il découvre le méga-kravmaga, sport pratiqué par plu-

et la cause du peuple ? La cause de Mai, ou son « idée », on ne la trouve compressée ni chez Sartre, Derrida, Althusser ou Castoriadis et j’en passe (et Audier oublie Debord dans sa rafle). Cette cause du peuple, on la lit dans la lassitude et la misère d’un pays vivant sous la tyrannie démocratique du gaullisme symbolisée par les sigles SAC, CFT et ORTF. Les idées, on les trouvait dans les rues de l’histoire, celle du Surréalisme, celle de Louise Michel, de Rosa Luxembourg, du Che, de Makno, ou dans son potager, « Marx, faisnous la terre moins basse ». Et nous sommes loin de la pendule de Foucault, de l’horloge parlante, ou du Lénine Renault. Dernier oubli d’Audier, dans sa description de ceux qui sont passés du col Mao au Rotary, il oublie leur passage par les pâturages de Mitterrand, bon moyen pour passer du rouge au rose, puis au vert. Il n’existe donc pas d’huissiers pour saisir la liberté de Mai, et, jusqu’à présent, pas d’avantage de philosophes ✹ jacques-marie bourget

La Pensée anti-68, par Serge Audier, éditions Gallimard, 320 pages, 21,50 euros.

bédé

out bon pervers sait qu’à Lisbonne, les meilleurs sexshops vendent des morues en plastique destinées à satisfaire les appétits sexuels les plus débridés. Et tout bon lecteur de BD sait reconnaître ici une anecdote parfaite pour un début d’histoire de Frantico et Mathieu Sapin, aidés par Lewis Trondheim, l’hyperactif de la BD.

grenouille dressée pour constater que l’opération la rend sourde, puisqu’elle ne répond plus quand il lui commande de « sauter ». Il prend l’effet pour la cause.

sieurs clans auxquels il leur faudra échapper. Le pitch est idiot et les situations absurdes : un mélange idéal pour faire apparaître des cadavres chinois, des chiens écrasés, un chauffeur de taxi unijambiste de Calcutta et des crises paranoïaques entrecoupées de blagues scatologiques. Les coups de crayon sont rapides et les blagues souvent vaseuses, comme autant de coups portés aux zygomatiques des lecteurs finalement désintéressés par le récit construit au fil des pages. Ce qu’ils préfèrent, c’est l’antipoésie libidineuse et déjantée des auteurs, aussi libres que leurs personnages. Pour eux, les rayons porno-zoophiles de Lisbonne prouvent que « les Portugais ont une vraie prédilection pour les poils ». Qui dit mieux ? ✹ louis cabanes

La Reproduction Arnaud Fleurent-Didier

S’il ne fallait retenir qu’un seul nom en ce début 2010, ce serait Arnaud Fleurent-Didier. Après deux disques confidentiels, le Versaillais au timbre androgyne signe un petit chef-d’œuvre de pop intemporelle. La Reproduction puise ses orchestrations luxuriantes chez Michel Legrand, François de Roubaix ou Polnareff, avec une modernité désarmante. AFD bouleverse la chanson française dans tous les sens du terme. Contra Vampire Weekend

MKM, Méga-krav-maga, vol. 1, par Lewis Trondheim, Mathieu Sapin et Frantico, éd. Delcourt, 8,95 euros.

Bâtir des ponts entre l’Amérique et l’Afrique, tel est le leitmotiv des Vampire Weekend depuis 2008. Ces quatre blancs-becs issus des beaux quartiers new-yorkais offrent avec Contra une collection de pop songs montées sur ressorts électroniques et

truffées de réminiscences tribales. Percussions brésiliennes, guitares d’inspiration congolaise, rythmiques sud-africaines… Résultat ? Un second album jubilatoire qui fusionne, façon Paul Simon époque Graceland, le meilleur du rock et de la world. Falling Down A Mountain Tindersticks

Deux décennies déjà que les mélodies à pleurer heureux des Tindersticks éblouissent la scène indie britannique et font chavirer nos petits tympans contrits. Bonne nouvelle : Falling Down A Mountain ne déroge pas à la règle d’or du groupe de Nottingham. Envoûté par le timbre viril de Stuart Staple, serti d’arrangements classiques (cordes, cuivres, piano), ce huitième album chancelle de pop romantique en ballades sépulcrales teintées de soul. Exquis ✹ éléonore Colin


Bakchich Hebdo | samedi 30 janvier 2010

Un peu de culture | 15 on s’fait une toile ?

Anvil, le film rock sur un groupe du même métal heavy Un fabuleux docu sur un groupe de rockers de seconde zone, une histoire d’amitié entre deux ados de 50 balais. Rencontre avec le metteur en scène, Sacha Gervasi, et les deux fondateurs d’Anvil, Lips et Robb Reiner.

J

’ai adoré votre documentaire, je pense que c’est un des meilleurs films sur le rock. Sacha Gervasi Cool, mec, répète-le encore, le groupe a besoin de l’entendre. (rires) Robb Reiner Un grand merci, Haschich ! Bakchich Naaan, c’est Bakchich ! (Tout le monde se marre) Sacha, comment avez-vous rencontré les membres d’Anvil ? Sacha Gervasi En 1982, je suis allé les voir au Marquee, à Londres. Habillé intégralement en cuir, Lips jouait de la guitare

avec un vibromasseur, puis après il la découpait à la tronçonneuse. Je me suis dit: « Je dois faire la connaissance de ces mecs immédiatement ». (rires) J’avais 15 ans et j’étais totalement dingue du groupe. Je me suis rué backstage, ils ont dû me trouver marrant et le lendemain, je leur ai servi de guide dans la ville. Et l’année suivante, ils m’ont proposé de faire roadie durant l’été. Ce que j’ai fait pendant plusieurs étés de suite. Robb Reiner Puis on s’est perdu de vue pendant vingt ans.

Sacha Gervasi Et il y a quatre tranche de vie, la nôtre, tout est ans, j’ai découvert sur le Net vrai. que le groupe existait toujours ! Lips Nous avons découvert qui Je les ai contactés et après avoir nous étions à 15 ans et nous y passé un peu de temps avec eux, sommes restés fidèles. C’est noil m’a semblé évident que je detre identité. Jamais nous ne vais faire un film sur eux, car pourrons changer. Nous aimons leur histoire est tout simplele rock, nous aimons rocker! ment extraordiSacha Gervasi naire. Ce n’est pas du «J’ai financé ce film. Je tout un film sur Bakchich Comment avez-vous n’ai pas eu à écouter les le heavy metal. trouvé le finanC’est un film conseils à la con d’un cement ? sur la persévéSacha Gervasi producteur. » S. Gervasi rance, l’amitié Je l’ai financé et l’amour. C’est tout seul. Je pour cela que suis scénariste, j’ai bossé pour tout le monde est touché au Spielberg, j’avais un peu de pocœur. gnon et je me suis dit « Putain, Bakchich Et la suite ? je veux vraiment le faire ». Ce Lips Nous venons de sortir un n’est pas grave si je perds de nouvel album. Malgré mon boul’argent. Et comme c’est mon lot de merde, les galères de fric, argent, je n’ai pas eu à écouter j’ai Anvil dans ma vie. Je me dis les conseils à la con d’un protoujours que ça ne pourra jaducteur exécutif. mais être pire, que ça ne peut Bakchich Le film est en train qu’aller mieux. de devenir culte. Comment exJ’aime divertir les gens. Il n’y a pliquez-vous la réaction du purien de mieux que se trouver en blic ? face de ses fans, à jouer notre Sacha Gervasi Depuis Sundanmusique. C’est ma vie, mec ✹ ce, c’est la même chose dans recueilli par marc godin tous les festivals et nous avons des standing ovations à chaque Anvil, de Sacha Gervasi. projection. En salles le 3 février. Robb Reiner Ce film, c’est une

zappette

chez taddeï, y a débat et y a des bas

A

u risque de radoter, le Ce soir ou jamais de Frédéric Taddeï sur France 3, l’une des rares émissions regardables à la télé, se gâte vraiment. Frédéric s’entête à inviter des types qui tuent son émission. Ainsi, le juste et le vrai, le fort, qui peuvent être dits chez lui sont dilués dans de la daube. Un jour, c’est Frigide Barjot en rôle de pure catholique – alors que son seul vrai emploi est celui d’idiote. Un autre soir, un abyssal facho aux yeux bleus qui fait penser à un serial killer et qui trouve que tout va bien en Irak et que Bush est un peu gauchiste. Mardi soir, le tour du con était assuré par Philippe Manière. Si vous n’avez jamais vu cette engeance, mettez-vous en embuscade sur BFM Radio, il va surgir à un moment ou un autre. C’est le type qui, quoi qu’il arrive, veut être sur la photo. L’existence de Manière, « fils de cadre dijonnais » dit sa fiche Wikipedia, est une bonne chose : elle démontre que l’enseignement

de qualité existe. Un passage à l’Essec et une maîtrise de droit des affaires lui ont suffi pour tout savoir de tout. Le problème est qu’il récite ses leçons, chez Taddeï, en continu. Manière devrait être en vente chez Darty, comme moulin à paroles. Ce serait utile pour les gens seuls, et qui ont aussi du mal à s’endormir sans bruit de fond. le meilleur du pire

Dites « 1515 », et Manière, en relevant légèrement la tête et en jetant son coude sur le dossier du canapé, répond « Marignan ». Incroyable, non ? En plus, ce garçon, au choix, peut être utilisé comme chausse-pied ou comme entonnoir. Il aide à faire pénétrer toute idée dans l’étroite godasse ultralibérale, ou toute idée ultralibérale dans la panse du moindre quidam. Manière vous explique le monde comme une évidence. S’il y a des riches et des pauvres, c’est bien regrettable, mais c’est la faute à pas de chance. Une certitude,

à la fac d’Assas et à l’Essec, on apprend tout, sauf le doute. Moi, je n’avais pas allumé la télé pour voir Charasse faire son numéro de petit élu rural alors que personne ne lui parle des 20 000 euros, qu’avec sa femme qui est aussi son attachée parlementaire, il empoche chaque mois. On ne crame pas de l’électricité pour regarder les minauderies de MarieFrance Pisier qui n’ont qu’une vertu, démontrer qu’on peut habiter la rue la plus chère de Paris, avoir un mari qui fout les gens à la porte du Groupe Lagardère tout en souhaitant bonne chance aux sans papiers. Non, on regarde encore Taddéï pour Jean-Didier Vincent, ce neurobiologiste qui, à la question « que faire de Sarkozy ? » a répondu, « le flinguer » ! On regarde aussi pour Cédric Legendre, un philosophe qui se préoccupe de la souffrance des autres alors que les Manière et compagnie ne se préoccupent que des gens heureux ✹ J.-M. B.

Lebanon de Samuel Maoz

1982, Tsahal pénètre au Liban. Quatre soldats israéliens avancent en territoire ennemi, murés dans leur char. Pour ce film-choc, Lion d’or à Venise, Samuel Maoz s’accroche à une bonne idée : la guerre vue d’un tank. Le vacarme, la chaleur, la folie, le carnage. Le film est également la métaphore d’un minuscule pays assiégé de toutes parts, et je serais complètement enthousiaste si le sublime Bête de guerre, sur un tank russe poursuivi par des moudjahiddin afghans, n’avait pas été tourné il y a plus de vingt ans. In the Air de Jason Reitman

George Clooney a une belle gueule, mais il fait un métier de salaud : il est « licencieur » itinérant, chargé d’annoncer la bonne nouvelle aux quatre coins des USA à des salariés éplorés. Notre homme n’a aucun état d’âme et son but dans la vie est d’accumuler les miles d’avion. In the Air est une comédie noire, absolument jouissive. Mais comme s’il avait peur de son sujet, Jason Reitman (Juno) y greffe une histoire d’amour convenue et nous assène quelques banalités du style la famille c’est bien, rien ne vaut la vie à deux… Cabaret (reprise) de Bob Fosse

Huit Oscars pour la comédie musicale de Bob Fosse et le meilleur rôle de Liza Minnelli. Sherlock Holmes de Guy Ritchie

Sherlock Holmes est un film-pitch. Guy Ritchie, le Tarantino du pauvre, se révèle incapable d’en torcher convenablement une seule scène. C’est nul, d’une laideur et d’une bêtise insoutenables ✹


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| Ben la Der

Culture | bakchich

portrait André Gerin, député communiste du Rhône, enfin sous le feu des médias grâce à la mission parlementaire sur la burqa, sait entretenir sa part d’ombre.

pillages confraternels

La burqa lève le voile sur André Gerin «

I

l n’admettait plus d’être relégué aux coulisses de la politique et des médias, il a décidé de finir en beauté ! » lance ironiquement Azouz Begag, ancien ministre délégué à l’Égalité des chances, qui connaît bien le personnage. Car si le communiste André Gerin, maire de Vénissieux plus de vingt-cinq ans et député à l’origine de la mission parlementaire sur la burqa, est une figure bien connue à Lyon et aux alentours, il souffrait, ailleurs, d’un certain déficit de notoriété.

tutoie sarkozy Fraiseur à 17 ans chez Berliet, adhérent à la CGT, puis au PCF, Gerin « monte » au Comité central en 1979. Sans jamais toutefois atteindre le Graal du parti place Colonel-Fabien, le bureau politique. Il n’a jamais été dans les petits papiers des secrétaires nationaux successifs : Marchais d’abord, dont il rejette le « bilan globalement positif »; Marie-George Buffet, ensuite, à qui il reproche les stratégies d’alliances avec le PS. Fidel Castro garde, lui, toute son estime. Le lider massimo, en pleine convalescence, reçut du député une improbable lettre d’amour. Il tutoie le ministre de la Police de Chirac et réciproquement, Nicolas Sarkozy. En imposant ce débat sur la burqa, essentiel à la démocratie, à la « une » de tous les journaux, Gerin a bien réussi son coup. Consécration suprême, le Monde lui accorde

même, à la veille de la remise de son rapport, un long portrait croisé avec son nouvel ami Éric Raoult avec qui il partage une verve populiste dès lors qu’on parle nation, immigration ou islam. Dommage que le portrait élude une partie de son parcours. Car avant de s’insurger, comme il l’a fait lors des auditions de la mission burqa, contre « la talibanisation de la société », André Gerin a longtemps été plus que bienveillant à l’égard des islamistes montants de Vénissieux. Il a notamment aidé les frères Ramadan, via l’Union des jeunes musulmans, une association influente de Vénissieux à obtenir de grandes salles pour prêcher le retour à l’ordre moral musulman. « imam rouge » « Après les événements des années 80 (la cité des Minguettes à Vénissieux est la première à s’enflammer, ndlr), tout le monde était à la recherche de solutions pour encadrer les jeunes. Il a, c’est vrai, aidé les associations de quartier mais qui n’étaient pas cultuelles à l’origine », indique Serge Truscello, secrétaire du PC à Vénissieux. Si l’asso s’appelle Union des jeunes musulmans, c’est pas cultuel ? « C’est quand même le premier maire qui a fait venir des étrangers (Ramadan est citoyen suisse) pour leur parler d’eux, de leurs problèmes » s’amuse Azouz Begag. Et tant pis si ses adversaires surnommaient alors André Gerin « l’imam rouge de Vénissieux » ✹ l. d. et l. c.

clearstream, villepin innocenté

FEMME DE BIEN

Carla l’a confié le 14 janvier à un magazine de son pays natal, Sette, le supplément hebdo du Corriere delle Sera, mais l’Express (21/01), qui a des références, a retrouvé cette ébouriffante profession de foi : « Grâce au nom de Sarkozy, je peux faire du bien ! » Est-ce à dire qu’avec le seul patronyme de Bruni, la Première dame était tragiquement vouée à répandre le mal ? En tout cas, on tient une info, mais certains peut-être ont un remords : les malveillants qui ont empêché monsieur fils, Jean Sarkozy, de présider l’EPAD, lui ont aussi interdit de dispenser le bien. Immobilier…

À SARAJEVO-L’EAU

Ça ne va pas fort en Bosnie-Herzégovine, indépendante depuis 1992, où le taux de chômage atteint les 40 %. Un péril qui ne menace pas la classe politique d’un pays partagé entre une République de Serbie et une Fédération croato-musulmane qui chapeaute elle-même dix cantons autonomes : « Si l’on additionne les différents niveaux de gouvernement, la Bosnie ne compte pas moins de 170 ministres » (Le Figaro, 25/01). Inflation qui n’a pas incité à un rien de rationalisation des coûts, pour parler techno : « Aussi grotesque que cela puisse paraître, chacune (des trois communautés : serbe, croate et musulmane donc) a tenu à disposer de ses propres réseaux de téléphones cellulaires et de distribution d’électricité. » Watt a pity !

COMME IL VOUS BLAIRA

Incessamment consultant, à temps partiel (non, mais !) du numéro un du luxe mondial, Bernard Arnault, Tony Blair, à titre personnel, a empoché pas moins de huit millions d’euros depuis qu’il a quitté Downing Street, voilà deux ans et demi (en sus de 7,5 millions d’euros de droits d’auteur, pour ses Mémoires). Ce petit pactole (le Nouvel Obs, 21/01) se répartit entre rémunérations de conférences, honoraires de conseils variés, et rarement à des indigents, etc. Dans le détail, les chiffres donnent le t o u r n i s o u c o n s t e r n e n t  : 260 000 euros pour un pia-pia en Chine que le Shanghaï Times a qualifié de « tas de clichés », 120 000 euros pour le discours inaugural (et seule-

ment le discours ?) de l’usine d’un milliardaire azeri. Un anglophile, certainement : la BBC est interdite en Azerbaidjan… Voici quelques semaines encore, l’ancien Premier ministre britannique, travailliste de surcroît, passait pour le très possible premier président de l’Union européenne. Il avait sûrement un modèle social à proposer.

NAîTRE CHANTEUR

On ne reprendra plus Faudel à jouer « l’Arabe de service » pour Sarko, qu’il n’a d’ailleurs pas vu depuis la triomphante soirée de la victoire présidentielle. Le chanteur, que son public avait sifflé une fois au moins pour ce soutien de campagne électorale, le dit dans le Parisien (25/01) : pour lui, le débat sur l’identité nationale a été le faux pas de trop : « Ce débat semble dire à ces gens venus travailler (dans l’Hexagone), s’intégrer, qu’ils n’aiment pas la France. C’est inadmissible ». Titre de l’interview : « J’ai cru au père Noël ». Lequel en effet n’était pas un cadeau.

COMORES, OÙ EST TA VICTOIRE ?

La sécurité de Sarko exige le meilleur. Sa (bonne) image sur les petits écrans, encore plus. Et plus que jamais, dirait-on. On le lit dans le Monde (26/1) : « La police, pesante, empêche toute manifestation d’opinion divergente [dans ses déplacements]. À Mayotte, le 18 janvier, débordée par l’affluence, elle n’était pas certaine d’avoir saisi toute banderole ou hautparleur. ‘Il faudra patrouiller dans la foule’, s’inquiétait un policier”. Pour plus de spontanéité encore, sûrement…

SARKO EN PLEINE CONTRATS-DICTION

Sarkozy a-t-il, oui ou non, lundi 25 janvier au soir, sur TF1, parlé d’une possible « titularisation progressive des contractuels » (du secteur public, s’entend) ? Tout le monde l’avait bien entendu ainsi, sauf… l’Élysée, qui, selon le Figaro (27/01), a tenu à rectifier : « Le Président voulait dire qu’il était favorable à la diversification des voies d’accès à la fonction publique ». Ce langage aussi limpide, c’est signé du Château, ou du Kremlin ? ✹ aurélien donat


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