Bakchich N°14.4

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bakchich hebdo N°14 quater | du samedi 13 février au vendredi 19 févier 2010 | www.bakchich.info | bakchich hebdo Informations, enquêtes et mauvais esprit

Les traders se mettent à la philo | P. 4

bakchich

N° 14.4 | informations, enquêtes et mauvais esprit | nouvelle formule

h a ïti

grillage

La burqa étoilée | P. 4 La pommade du Conseil d’état

P. 6 - 7

Les juges administratifs suprêmes se piquent désormais de médecine. Et refourguent sur le marché une pommade jugée nocive par les spécialistes, le gel chauffant Ketum. Il fait si froid que ça au Conseil d’État ? | p. 5

photo

Canto shoote la misère | P. 13 concorde crashe les médias Le 25 juillet 2000, le bijou d’Air France s’envolait en fumée. Dix ans plus tard, le procès de l’accident se tient enfin. Mais la compagnie aérienne a déjà gagné la bataille médiatique. À coup de budgets pub et de câlinage de grattepapiers, et d’experts très orientés | p. 9

Et sur Internet


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| Apéro

sport au prince lathoud pour plaire

D

la rédaction

L

’olympisme ne connaît plus la trêve. Et s’ouvrent en ce joyeux 12 février, les Jeux de Vancouver. Seize jours pleins au pays du sirop d’érable à voir s’empiler médailles, trophées, gamelles de skieurs maladroits… Et quelques années pour la bonne province canadienne d’Alberta à éponger les dégâts de l’Olympiade. Bilan carbone désastreux, finances plombées, boom de la prostitution. Eh oui, plus vite, plus haut, plus fort, les gadins. L’important, c’est de participer, pas de gagner puisque, au final, ce sont les sponsors qui gagnent les JO (page 10). Heureusement, tout n’est pas noir pour les sportifs. Des hélicos ont largué de la neige sur leurs pas et, pour leurs muscles, ils pourront se réchauffer au Ketum. Une décision du Conseil d’État français a remis cette pommade bien connue, considérée comme un dangereuse, sur le marché (page 5). Vive le sport, et les rhumatismes ! Le rêve international olympique, en cet hiver rugueux, n’aura qu’à

déplorer quelques absences. Presque excusé. Un peu d’Africains, un peu de Sud-américains, un peu de Caribéens… Mais pas de Haïtiens, qui font leur curling sous les tropiques. En déblayant les gravats du dernier séisme. L’honneur de la France dans l’ancienne Hispaniola est sauf. Elle a préservé son trésor symbolique et extrait de son ambassade ses caisses de champagne. De quoi buller au soleil ! Vive la France éternelle… (dossier pages 6 et 7). Et le meilleur reste à venir. Après Vancouver 2010, viendra Sotchi 2014. Une petite station balnéaire des bords de la mer Noire, surtout connue pour accueillir les vacances du Premier ministre russe Vladimir Poutine. Jamais une compétition de ski organisée, aucune infrastructure. Seulement le géant Gazprom qui a promis de mettre la main à la poche. La flamme olympique gazer fort. D’ici là, Bakchich Hebdo aura retrouvé les kiosques. Une résurrection prévue pour le 13 mars. Le temps de récolter encore plus d’abonnés ✹

La référence historique de la semaine

Nadine Morano ressuscite les grands hommes sur RTL (9/02). « Georges Clemenceau a dit : “Si vous voulez créer une polémique, créez une commission “. Qu’en pensez-vous ? », lui a demandé Jean-Michel Aphatie. Réponse de la secrétaire d’État à la famille à l’ancien président du Conseil : « Clemenceau a le droit de dire ce qu’il souhaite ». Avant d’ajouter : « C’est son analyse, pas la mienne » ! On attend avec impatience la riposte du Tigre, décédé en 1929.

La bonne nouvelle de la semaine

À partir de 70 ans, les personnes en surcharge pondérale ont « 13 % de risque en moins de mourir dans les dix ans », selon une étude de l’American Geriatrics Society. D’autres experts cités par le quotidien anglais The Guardian (8/02) soutiennent que « la bière contient une source importante de silicium (…) qui aide à renforcer les os ». Non, les études scientifiques ne sont pas toujours destinées à nous gâcher la vie.

Le rapporteur de la semaine

Depuis lundi 8 février, les militants du PS peuvent ajouter sur le site du parti les couacs qu’ils ont repérés à droite en vue des régionales. « La droite est profondément divisée », a annoncé le porte-parole du parti, Benoît Hamon. La fameuse parabole de la paille et de la poutre… ✹

jacques prévert de rage Dor me z tranquilles, bonnes gens, la police veille ! À Paris, trois collégiennes de 14 ans ont été interpellées et placées en garde à vue, mardi 2 février, pour une « bagarre ». En 1934, déjà, alors que les pensionnaires d’une maison d’éducation s’en étaient échappés, Jacques Prévert dénonçait cette Chasse à l’enfant. « C’est la meute des honnêtes gens/ Qui fait la chasse à l’enfant Il avait dit j’en ai assez de la maison de redressement/Et les gardiens à coup de clefs lui avaient brisé les dents/Et puis ils l’avaient laissé étendu sur le ciment. Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan ! Maintenant il s’est sauvé/Et comme une bête traquée/Il galope

dans la nuit/Et tous galopent après lui/Les gendarmes les touristes les rentiers les artistes. Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan ! C’est la meute des honnêtes gens/ Qui fait la chasse à l’enfant. Pourchasser l’enfant, pas besoin de permis/Tous les braves gens s’y sont mis/Qu’est-ce qui nage dans la nuit/Quels sont ces éclairs ces bruits/C’est un enfant qui s’enfuit/On tire sur lui à coups de fusil. Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan ! Tous ces messieurs sur le rivage/ Sont bredouilles et verts de rage. Bandit ! Voyou ! Voleur ! Chenapan ! Rejoindras-tu le continent, rejoindras-tu le continent ! Au-dessus de l’île on voit des oiseaux/Tout autour de l’île il y a de l’eau » ✹ (Extrait de Paroles, 1945)

Bakchich Hebdo | du samedi 13 au vendredi 19 février 2010

ans sa quête intrépide de scoops, Bakchich s’est procuré le courrier adressé par le nouveau directeur de l’administration pénitentiaire française, Jean-Amédée Lathoud, à ses personnels, au moment où il entrait en fonction, le 11 janvier dernier. L’occasion pour lui de passer ses troupes en revue, de poser les bases de leur prochaine collaboration et de rendre des hommages aussi multiples qu’appuyés. Dans ce courier, Jean-Amédée prend soin de saluer le soutien de Michèle Alliot-Marie, ainsi que « le très fort engagement du préfet d’Harcourt ». Sans oublier le « courage », le « sens de l’humanité et de la solidarité » des « acteurs de l’administration pénitentiaire ». Il assure également les syndicats de « toute son écoute » et de sa « volonté de dialogue ». Hélas, dans ce concert de louanges, Lathoud oublie de s’adresser à une catégorie de personnes avec laquelle il devra pourtant compter : les détenus. Pas une seule fois, il ne prononce le mot « détenu », qui semble pourtant lui brûler les lèvres. Pas un mot non plus sur les suicides en prison, pas plus que sur la surpopulation carcérale, ou l’état déplorable des prisons françaises. Ça promet. On sait de ce monsieur qu’il est un brillant magistrat. Le Canard Enchaîné nous avait appris que Lathoud avait été procureur général à Douai, lors du premier procès Outreau : il avait participé, à ce titre, aux errances du juge Burgaud. Assurément, Jean-Amédée l’a tout compris ✹ simon piel

“ Dans ce cas, ça me fait toujours deux fois plus de neurones que lui ! „

La commissaire européenne à la Concurrence Neelie Kroes, répondant dans le quotidien allemand Handelsblatt (8/02) à Nicolas Sarkozy, qui aurait déclaré qu’elle n’avait que « deux neurones ».

mot pour mot

Le BHL, c’est le grand bazar de la philo. On trouve tout, au BHL. Témoin, son dernier opus au titre prétentieux à la Tocqueville, De la guerre en philosophie. Il n’a pas échappé à l’œil affûté d’Aude Lancelin du Nouvel Obs qu’en virtuose de l’essai « brillant » bâclé en douze jours, l’ex-nouveau philosophe, pour en finir avec Kant, s’appuie sur l’autorité d’un certain Jean-Baptiste Botul et évoque ses conférences devant les néo-kantiens au Paraguay. L’ennui, c’est que le fameux Botul, dont l’œuvre paraît aux éditions des Mille et une nuits, n’a

jamais rien écrit lui-même, puisqu’il est une créature dévoilée par Frédéric Pagès, agrégé de philo passé journaliste au Canard Enchaîné ! Comme l’écrit Aude Lancelin : « Renseignement pris, personne ne s’était encore jamais pris sans airbag cet énorme platane. C’est un peu comme si Michel Foucault s’était appuyé sur les travaux de Fernand Raynaud pour sa leçon inaugurale au Collège de France ». Ce qui est un peu sévère pour JBB (à chacun ses initiales !) : il est lu, commenté, traduit en plusieurs langues, et même cité, comme on le voit, ce qui le fait exister bien plus intensément que des tas d’autres auteurs, dont certains, déjà posthumes sans le savoir, font « amicalement » l’éloge

du dernier BHL. Ses opuscules philosophiques aux titres si alléchants, de La Vie sexuelle d’Emmanuel Kant à La Métaphysique du mou, en passant par sa correspondance avec Landru (Landru, précurseur du féminisme) et Nietzsche et le démon de midi, ont eu droit à plein de belles revues faites par de vrais critiques dans les meilleurs journaux. Ce qui prouve que, quand on travaille sérieusement, on est récompensé. Peut-être que, comme le suggérait Roger-Pol Droit dans le Monde, dans cinquante ans, ce seront ceux qui soutiendront l’inexistence de Botul qui seront traités d’imposteurs. Mais sera-ton encore certain de l’existence de BHL ? ✹ jacques gaillard


Apéro | 3 idôlatrie Se pâmer devant la puissance économique chinoise était un sport national. Mais le vent tourne : d’arrogances en agacements, Pékin n’a plus bonne presse.

scoop toujours

L’extase ne donne plus Chine de vie

Europe, le grand ballet

L

a France a toujours eu besoin de modèles extérieurs permettant de dénigrer sa situation. Après les Lettres anglaises de Voltaire, le « défi américain » de Jean-Jacques Servan-Schreiber, le « miracle allemand », et les Japonais vécus par Édith Cresson comme de redoutables fourmis à la conquête de l’univers, nous venons de vivre dix ans de sinobéatitude. Mais voilà, en ce début 2010, dans les milieux économiques, la sino-béatitude est en recul, au rythme de la montée de la « brésilâtrie »… Ce qui nuit à la sino-béatitude, c’est le comportement des dirigeants chinois. Ainsi, au lieu de se couler dans l’écologie politiquement correcte à Copenhague, ils ont fait dans l’ironique puis l’agressif quand ils ont réalisé que les pseudo-experts du GIEC et autres rentiers de l’apocalypse climatique stigmatisaient non seulement le charbon comme producteur de CO2, mais encore

le riz comme source de méthane. chaque dollar entré en Chine y Depuis, tout les irrite : la politireste, comme piégé par une régleque des Américains à Taiwan, les mentation tatillonne ; que les enpressions journalistiques et ditreprises qui y sont allées s’en plomatiques mordent les d o i g t s  ; q u e pour qu’ils ne se portent pas acl’ouvrier La «­sino-béatitude­», quéreurs de la chinois, souslaisse désormais place dette grecque, et payé, est assez contribuent ce intelligent pour à la «­brésilâtrie­». faisant à déstane donner qu’à biliser l’euro… hauteur de ce Ces irritations sèchement expriqu’on lui donne, ce qui maintient mées ont conduit à une révision une productivité basse ; que la de l’opinion sur la Chine. Dans corruption est devenue probléles milieux bien informés, on matique et que la population, rappelle que la Chine ne reprélasse de ne pas voir son pouvoir sente que 7 % de la production d’achat augmenter au rythme des mondiale pour 25 % de la popusuccès annoncés, est au bord de lation ; que ses fabuleula révolte. ses réserves de Des essayistes libéchange sont obteraux à la Guy Sornues par un man, naguère fasstrict contrôle cinés par le des changes, redressement qui fait que d’une économie ruinée par Mao, n’hésitent plus à pronostiquer une imminente explosion sociale. Si vous souhaitez être à la mode, passez donc à l’admiration aveugle du Brésil, le nouveau pays à encenser  ! ✹ Matthieu Adenil

cour des comptes

please don’t let migaud

P

résident de la commission des finances de l’Assemblée nationale depuis 2007, Didier Migaud, 57 ans, député PS de l’Isère, est l’homme qui monte. Élu « député de l’année » par le Trombinoscope, une revue du sérail, Migaud vient de se voir gratifier d’une pleine page de portrait dans le Monde (9 février). Titre du papier : « Expert en consensus ». Et le lecteur d’apprendre que le camarade Migaud est tout à la fois un socialiste aux « convictions fortes », doublé d’un « homme avec lequel on peut travailler », selon le

jugement d’Éric Woerth, ministre du Budget et trésorier de l’UMP. succéder à séguin Tant de qualités méritent d’être employées, d’autant que le fauteuil de feu Philippe Séguin à la présidence de la Cour des comptes est vacant. Discret candidat, Migaud, perspicace, observe que « cette nomination appartient au chef de l’État », que ses fonctions actuelles le rendent « très heureux », mais que si d’aventure on pensait à lui, « il y a plusieurs façons de servir son pays ».

Comme nul n’est prophète en son pays, et tandis que le Monde craque pour son « austérité protestante dans le sérieux et le travail » (sic !), ses amis politiques de la région grenobloise, et en particulier les écologistes, rappellent que la gestion de Migaud à la présidence de la communauté d’agglomération grenobloise vient d’être épinglée par la… Chambre régionale des comptes de RhôneAlpes ! Ce qui fait quelque peu désordre pour un candidat qui en brigue la présidence nationale. Didier Migaud l’a d’ailleurs fort bien compris en décidant d’exclure de toute alliance politique régionale ces félons d’écologistes, qui se sont cru autorisés à donner quelque publicité à ce rapport calomnieux. Migaud ? Un austère, certes, mais qui ne se marre pas toujours… ✹ Éric Laffitte

C’est le grand paradoxe du fameux traité de Lisbonne, vendu comme un moyen de simplifier le fonctionnement de l’Europe. Le président tournant jusqu’à la fin du semestre du Conseil européen – l’Espagnol Zapatero – est à présent doublé d’un président permanent – pour deux ans et demi –, le Belge Hermann Van Rompuy. S’ajoute la Britannique Catherine Ashton, sorte de ministre des Affaires étrangères. Tandis que le président de la Commission, le Portugais Barroso, reste l’un des représentants de l’Union européenne dans les sommets comme celui du G20. « Mais d’ici six mois à un an, on y verra beaucoup plus clair », a promis le nouveau président du Parlement européen, le Polonais Jerzy Buzek, en visite à Paris début février. Buzek, qui a détaillé son programme de visites officielles : la Russie, la Chine et sans doute l’Inde. L’Europe, de Brest à Bombay !

Panne d’aiguilleurs de train

Depuis des mois maintenant, l’industrie ferroviaire attend la nomination du futur patron du gendarme du ferroviaire, l’Araf, équivalent de l’autorité de régulation de l’énergie, la CRE, ou de l’Arcep, pour les télécoms « On s’est dépêché de voter la loi l’an passé pour ne pas se faire taper sur les doigts par Bruxelles et puis plus rien », explique ce haut fonctionnaire. Les candidats ne courent pas les rues. L’ex commissaire européen Jacques

Barrot s’est débiné et Bernard Bosson, ex maire UMP d’Annecy, est sur les rangs. On pourrait demander à Henri Proglio !

La banlieue laissée en plan

Nicolas Sarkozy avait annoncé un vrai « plan Marshall » des banlieues. Mais deux ans après son lancement, le plan mis en œuvre par Fadela Amara est un échec cuisant. Henri Guaino, le conseiller spécial de Sarkozy, et Yazid Sabeg, le commissaire à la diversité et à l’égalité des chances, eux-mêmes, l’ont déploré. La secrétaire d’État chargée de la politique de la Ville n’a peut-être pas mis ses œufs dans le bon panier. Exemple : l’éducation. Plutôt que de réserver son budget (800 millions d’euros) exclusivement aux lycées publics en difficulté, une partie a financé des établissements privés catholiques ! Ainsi, le lycée Jean Paul II, à Sartrouville (Yvelines), qui a ouvert ses portes en septembre dernier. Régi par une charte toute laïque : « La pastorale est au cœur de notre projet éducatif, c’est un chemin de Vie éclairé par l’Évangile à la suite du Christ et en son nom ». Jean Paul II peut rendre grâce à Fadela. Logique, en ces temps de débats sur l’identité nationale… ✹ sur www.bakchich.info

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Le plan stress avance… tranquillement Lancé en pleine polémique sur les suicides à France Télécom, le plan sur le stress au travail connaît un léger retard à l’allumage. Sommées par Xavier Darcos de signer des accords avec les syndicats pour réduire les risques psychosociaux, les entreprises de plus de mille salariés avaient jusqu’au 1er février pour s’exécuter. Une liste des bons et des mauvais élèves, symbolisés par des feux tricolores, devait être publiée. Et puis… rien. « Cette liste est en cours d’élaboration », répond-on au ministère du Travail. « C’est complexe et nous ne voulons surtout pas commettre d’erreurs. » En coulisse, les grandes entreprises ont longtemps mené campagne pour gommer les aspects les plus contraignants de ce plan et sont déjà parvenues à écarter l’option des pénalités financières. Malgré tout, très chatouilleuses sur leur communication, les 1 500 sociétés concernées traînent des pieds. Une semaine après l’échéance, un tiers d’entre elles n’avait toujours pas répondu à l’injonction ministérielle. Seront-elles classées en rouge d’office ? Pas du tout. « Elles font l’objet d’un rappel », explique-t-on au ministère… Houlà, trop de pression ! ✹ l. d.

le livre de la semaine Si la Suisse est réputée pour sa sympathie envers les banquiers, elle l’est moins pour sa susceptibilité démesurée. Le journaliste Ian Hamel peut en attester. Rédacteur économique au Matin Dimanche (journal suisse francophone) et au Point, il a taquiné l’Helvétie dans son livre Et si la Suisse ne servait plus à rien ? (Larousse, collection À dire vrai). Sollicité par sept de ses confrères suisses pour des interviews, il a eu le déplaisir de voir tous ces entretiens annulés. Sachant que deux groupes de presse contrôlent l’ensemble des médias du pays, combien de coups de fil auront suffi pour organiser le boycott du livre ? ✹ A.V.

du samedi 13 au vendredi 19 février 2010 | Bakchich Hebdo


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| Apéro

french bashing

Les chrétiens protestent

la burqa de conscience

L

e New York Times a sonné la m o b i l i s at i o n m o n d i a l e contre… la France. S’il y avait une loi interdisant le port de la burqa, le « reste du monde devrait marquer sa répugnance », a écrit, dans un éditorial très remarqué fin janvier, le grand quotidien américain. Que reprochet-on à la politique du président Sarkozy ? D’alimenter l’islamophobie pour de basses raisons électorales ! « Il est difficile de créer des emplois et facile d’attiser les préjugés anti-musulmans », lisait-on dans le New York Times. liberticide La charge n’est pas étonnante. La France et les États-Unis ont en effet un vieux (et très fort) contentieux à propos des libertés religieuses. Aux yeux de Washington, Paris a un comportement liberticide à l’égard des religions minoritaires, tout particulièrement vis-à-vis des Témoins de Jéhovah et de la Scientologie. Considérées comme des sectes de ce côté-ci de l’Atlantique, ces deux organisations ont

pignon sur rue aux États-Unis et des moyens puissants pour se faire entendre. Les diplomates américains en poste à Paris relaient leurs doléances. lobbying Plus récemment, l’islam est devenu un réel enjeu entre Paris et Washington. Dans son discours au monde musulman, prononcé au Caire le 4 juin 2009, Barack Obama s’en prenait clairement, mais sans la citer, à la France, dans une allusion à la loi de 2004 qui interdit le port du voile islamique à l’école. L’ambassade des États-Unis mène, elle, un vrai lobbying auprès de la communauté musulmane en France. Depuis quelques années, elle accueille ainsi un certain nombre de personnalités lors d’un repas de rupture du jeûne pendant le ramadan. Le feuilleton devrait rebondir en mars, après les élections régionales lorsqu’on saura s’il y a ou non une loi interdisant le port du voile intégral ✹ Louise Gabriel

Pas très catholique le débat sur la burqa ? Il n’est pourtant pas occulté par la presse chrétienne. Éditorialiste à ses heures pour Témoignage Chrétien (14/01), le porte-parole du gouvernement Luc Chatel profite de la polémique pour régler ses comptes avec ses camarades de l’UMP qui prônent l’interdiction par la loi. « On ne peut voir derrière cette fascination pour la burqa qu’un enjeu électoral », s’insurge-t-il dans l’hebdomadaire en visant « l’homme le plus décidé en la matière, le candidat Copé ». La Croix brandit la même bannière depuis des semaines. Dans un édito (25/01), le quotidien s’inquiète du sentiment pour les musulmans « d’être dans le collimateur de l’État ». La Croix verrait d’un bon œil « un jour férié accordé pour une fête musulmane » pour « compenser » cette mise au ban. Le même son de cloche résonne dans l’édito de La Vie (14/01) : « Intolérable, l’arrièreplan sur la burqa. Ce préjugé que tout musulman est un fanatique en puissance ». Les revues chrétiennes modérées ne se privent pas pour jeter la pierre au gouvernement de Nicolas Sarkozy. Non sans craindre une loi qui pourrait nuire par ricochets aux libertés religieuses. La bienveillance inter-confessionnelle n’empêche pas de prêcher pour sa paroisse ✹ L. M.

l’info à poil Elkabbachibouzouk

L’info « Est-ce que moi je me suis fait honte quelquefois ? Peutêtre pour une erreur que j’ai à la fois commise et assumée. » Jean-Pierre Elkabbach, dans le documentaire Huit Journalistes en colère, diffusé sur Arte le 9 février. Le décryptage En avril 2008, l’alors patron d’Europe 1, avait ordonné à sa rédaction d’annoncer la mort de Pascal Sevran. Une information erronée. Courageusement, Elkabbach avait dans un premier temps affirmé à sa rédaction « j’assume personnellement une erreur collective » avant de se rétracter et de reconnaître son seul et unique tort. Un passage douloureux qu’il n’aura pas souhaité rappeler aux téléspectateurs de Arte.

Acariès acariâtre

L’info « Jean-Claude Dassier est un président qui ne sert pas beaucoup. » Louis Acariès, ami de feu le propriétaire de l’OM Robert Louis-Dreyfus sur M6, le 7 février. Décryptage Appelé au chevet de l’OM pour remettre de l’ordre au club en 2005, le coach du boxeur Brahim Asloum n’a plus aucun rôle officiel dans l’organigramme phocéen depuis juin 2009. Et tente depuis des mois de réoccupper l’espace médiatique en critiquant le club. « Rien de neuf sous le soleil, il est parti par la porte, il essaie de revenir par la fenêtre », tempère-t-on à l’OM. La vie du club phocéen est un long fleuve en furie…

« Le Monde » a des pertes

L’info Une « femme utilise, en moyenne, 12 000 protections hygiéniques au cours de sa vie. » (le Monde, 9/02). Le décryptage 12 000 ! Le service investigation de Bakchich a sorti la machine à calculer. Soustrayons à l’âge moyen de la ménopause (51 ans) celui du début des règles (13 ans), et multiplions le total par le nombre de mois dans l’année (12). Les femmes ont leur règle en moyenne 456 fois dans leur vie. En divisant le nombre du total de serviettes amassées par le Monde par ce quotient, les femmes utiliseraient environ 26 protections par périodes, soit plus de cinq par jour. Mauvais calcul.

Idiot visuel public

L’info Auditionné par la commission des Affaires culturelles le 10 février, Alain de Pouzilhac, patron de l’Audiovisuel extérieur français (AEF) a assuré à propos de son salaire qu’il n’avait « pas l’impression de voler [son] argent ». Le décryptage 40 000 euros par mois pour provoquer à RFI la plus grande grève de l’histoire de l’audiovisuel depuis mai 1968, c’est en effet bien peu. Poupou, bien secondé par la reine Christine (Ockrent), a réussi à provoquer un nombre de départs volontaires supérieur à ce qui était attendu. 69 salariés en plus des 200 prévus par le plan de départ. Commentaire d’un député socialiste à la sortie de l’audition : « Le pire, c’est Ockrent : elle est âpre au gain ». La reine appréciera ✹

Où était Nicolas Sarkozy, le 8 février, lors de la synthèse du débat sur l’identité nationale présentée par François Fillon ? A. À la Cité de l’Immigration B. Au Disney Store des Champs-Élysées C. À la préfecture de Vichy D. Devant le mur de Berlin Réponse B. Il a été aperçu à 14h45, flanant au Disney Store, par un journaliste d’Europe 1 tandis que le Premier ministre animait le séminaire à Matignon.

Bakchich Hebdo | du samedi 13 au vendredi 19 février 2010

traders

les filous font de la philo

A

lors que Nicolas Sarkozy, au risque de l’oxymore, appelle à « moraliser le capitalisme », l’Institut d’analyse financière a décidé d’offrir à ses traders des « séminaires de philosophie » pour « renforcer la rationalité de leur décisions ». Moyennant la modique somme de 1950 euros par personne, les traders pourront s’initier deux jours durant à la spéculation… intellectuelle. Mettre un peu de plomb dans la cervelle des jeunes loups de la finance menacés par le syndrome Kerviel (« tiens, je viens de paumer cinq milliards, là… ») ne paraît, on en conviendra, pas complètement idiot. Au lendemain d’une crise financière qui a jeté une lumière crue sur les pratiques de ces jeunes prodiges du boursicotage, l’heure est peut-être venue de retrouver la raison. Et puis la philosophie, espère certainement l’Institut d’analyse financière, les aidera sans doute à répondre à leurs questions existentielles (pas facile de gagner des millions à 25 ans en jonglant avec les algorithmes). diogène en herbe À ceux qui s’étonnent de la rencontre entre raison et boursicotage, le philosophe débauché pour l’occasion Michel Eltchaninoff, rétorque du tac au tac que « L’argent et la philosophie sont apparus à peu près au même moment, au VIIe siècle avant Jésus-Christ ».

Ni totem, ni tabou, le séminaire abordera donc le concept de l’argent hors des sentiers battus et rebattus de la morale, explique celui qui exerce par ailleurs ses talents à Philosophie magazine. « Qu’un trader réfléchisse sur l’argent est intéressant, mais cela ne va pas le transformer en ange ou en moraliste », admet volontiers ce professionnel de la pensée. Et c’est heureux, car les banques seraient bien embêtées de se retrouver avec une armée de Diogène en herbe. Le programme des séminaires est donc assez léger. Comme le note benoîtement la plaquette de présentation « Leur durée est relativement courte afin de ne pas lasser le public ». Aristote, ça va deux minutes, j’ai les Bourses asiatiques sur le feu, moi ! ✹ lucie delaporte


Filouteries | 5 pharmacopée Le gel Ketum, crème anti-inflammatoire aux effets secondaires nocifs, a été retiré des rayons par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Décision cassée par le Conseil d’État. En vertu de quelles compétences, là est la question.

Un laborantin au Conseil d’État A près le sang contaminé, notre santé a connu d’autres cataclysmes, la vache folle, puis l’hormone de croissance. Pour faire court, dans l’horreur, nous n’allons pas remonter à la Thalidomine, qui donnait des bébés naissant sans bras, ou au Distilbène qui a flanqué des cancers aux filles des mères qui ont ingurgité ce médicament fou… Puis nous avons connu la rafale des grippes, aviaire puis porcine où, cette dernière fois, Roselyne a transformé la France en une chose qui évoluait entre la caserne et l’hôpital. De ces calamités en série est né le « principe de précaution » et un système de vigilance qui vise à éviter de nous faire crever en prenant une aspirine. Eh bien, tout ça, c’est fini. Ce ne sont plus les spécialistes de la santé qui nous disent ce qui est bon ou nocif, mais Jacques Arrighi de Casanova, patron de la première sous-section du Conseil d’État ! (co)labo Explication. Le 17 décembre 2009, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) décide de suspendre l’autorisation de mise sur le marché du Ketum 2,5 %, gel. La chose est une pommade que tout sportif ou rhumatisant a dans son placard à pharmacie pour guérir des chutes, entorses ou douleurs. Il se trouve que le laboratoire Menarini France fabrique cette

chose en abondance. Pas content, Menarini va pleurnicher devant le Conseil d’État, merveilleux corps qui réchauffe de précieux juristes comme Jacques Arrighi de Casanova.

effet pervers Et c’est ce maître Jacques-là, prenant son tablier de savant, qui, le 26 janvier 2010, nous dit le contraire de la Commission de sécurité, et qu’il y a urgence à remettre le Ketum dans les rayons des pharmacies. Ce qui est bien, avec ce Casanova et ses cornues, c’est qu’on économise des docteurs et des biologistes. L’argument de notre juriste, diplômé de l’ENA et ancien conseiller technique che z Chirac, est que le gel Ketum, qui peut vous flanquer à l’hosto, n’a touché qu’une « trentaine de personnes ». Mieux : « cet effet [pervers], connu depuis l’origine, semble pour une large part imputable au non-respect des précautions d’emploi ». Plus clairement dit, si le Ketum vous insupporte, c’est que vous êtes des cons. Casanova ajoute qu’aucun des vingt États consultés n’a ainsi maltraité ce traitement ! Qui ignorait que l’ENA donne un diplôme de médecine comme l’Assemblée nationale a fait de Copé un avocat. Donc, si vous croisez un énarque, avec votre carte Vitale en poche, il peut vous soigner. Plus loin dans son jugement, le sieur Casanova en arrive au

cœur du sujet. Le fric. « Considérant que le Ketum présente le deuxième chiffre d’affaires de la société Menarini… », l’interdiction décidée rendrait impossible, pour cette société, « de retrouver en 2010 un résultat positif ». Quand Casanova parle de « positif », il parle de sous. Bien sûr, auprès de Chirac, on apprend à bien compter. Mieux, l’État, vous

et moi, devrons verser 3 000 euros à Menarini et 500 euros par jour tant que le présent jugement n’est pas mis en ligne sur le site de l’Afssaps. fermez-la Résumons-nous. Les savants austères (« aimant des chats puissants et doux » précisait Baudelaire), les espiègles de

l’Afssaps, n’ont qu’à la fermer face à un Jacques Arrighi de Casanova qui sait bien mieux qu’eux ce qui est bon pour les Français. Le bonheur de la France, ne l’at-il pas piloté depuis le secrétariat général de l’Élysée, entre 1994 et 2002 ? Pourquoi s’arrêter ? ✹ jacques-marie bourget

a L’ordonnance du Conseil d’État explique que si le Ketum est nocif, c’est parce qu’il est mal utilisé ! du samedi 13 au vendredi 19 février 2010 | Bakchich Hebdo


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| Filouteries

port-au-prince Scène surréaliste en Haïti. Au beau milieu des décombres de l’ambassade de France, les secouristes dépêchés sur place ont mené à bien une mission périlleuse : sauver, goutte que goutte, le champagne du représentant de notre beau pays.

Des bulles pour l’ambassadeur « C Sarko en Haïti

Port-au-Prince n’est plus maudite, Haïti honni des dieux, Hispaniola va renaître. Et l’on connaît déjà la date de ce joyeux avènement. Ce sera le 17 février, puisqu’enfin la bonne parole française, l’Évangile des droits de l’homme va poser le pied sur le sol encore tremblant du pays, en l’auguste personne de son chef d’État, Sarkozy Nicolas. Sur la route de la Martinique et de la Guadeloupe, Sarko Ier va faire une petite halte… Jamais, malgré l’intime lien colonial et post-colonial qui unit la France aux Caraïbes, un premier personnage de l’Hexagone ne s’était rendu en ce doux pays. Et pourtant, le pouvoir français s’est jusque très récemment mêlé et agité l’histoire de ce pays francophone. Que ce soit en y faisant intervenir Régis Debray, ses bidasses voire même Dominique de Villepin. Dont le secrétaire d’État d’alors, Renaud Muselier, dit Lou ravi de la polique marseillaise, eut à essuyer quelques rafales de balles… Mais fi de ces mesquineries, l’oubli va être réparé. Toujours ça de pris et de montré. Et toujours plus simple que de trouver une solution pour reloger 1,4 million de sinistrés. Une chance, Sarko n’emmène pas dans ses bagages ses as du logement, Benoist Apparu ou le sieur Borloo. Sûr que le sauvetage du champagne de M. l’ambassadeur Le Bret aurait recueilli l’assentiment de l’ami Jean-Louis. Mais l’aide apportée par la France à Haïti n’a pas besoin de lui pour sombrer dans l’anarchie ✹

omment expliquerions-nous à des familles que leur fils ou époux est mort en sauvant du vin, du champagne ou du whisky ? » Le 29 janvier, devant le regard indigné des médecins et infirmiers du Samu 21 de

Dijon détachés à Port-au-Prince, une dizaine de sapeurs-pompiers « spéléos » spécialistes des décombres, ont mené une dernière opération de sauvetage avant de regagner leurs pénates. Objectif  : la cave de monsieur l’ambassadeur français !

a Sur les ruines de l’ambassade, deux secouristes donnent à leurs collègues les bouteilles intactes. Le séisme a eu la décence de préserver l’alcool du diplomate.

Les « unes » sur Haïti ne font plus recette

Un mois après le séisme, les malheurs des Haïtiens ont déserté les quotidiens. Et nos voisins membres du G8 ont eux aussi trouvé de nouveaux sujets de couverture. Ainsi, le Toronto Star (Canada) consacre ses dernières couvertures aux liaisons extra-conjugales d’un beau gosse de la politique locale. En Allemagne, c’est le calcul des allocations qui occupe la « une » de Die Zeit. Idem pour la Russie et la Noveya Gazetta qui se penche sur les élections ukrainiennes. Le Daily Telegraph anglais cause notes de frais des dépensiers cadres de la BBC. Mais les principaux quotidiens des trois autres pays du G8 rappellent Haïti à notre mauvais souvenir : les trafics de drogue en hausse à Port-au-Prince (USA Today), la création d’un fonds d’aides pour les victimes (Yomiuri Shimbun, Japon) et la découverte d’un nouveau rescapé (La Repubblica, Italie) ✹ anne-claire ducoudray

Bakchich Hebdo | du samedi 13 au vendredi 19 février 2010

Une opération risquée à cause de l’instabilité du bâtiment mais drôlement bien organisée : deux secouristes ont été envoyés dans les ruines, pendant qu’une dizaine réceptionnait le butin. Le « trésor » méritait bien cette attention particulière. La cave de l’ambassadeur Didier Bret abritait des dizaines de caisses de champagne, cognac, whisky et grands vins.

L’État français ne perd pas une occasion de choyer ses représentants. Dans son dernier numéro, Le Canard Enchaîné (10/02) décrit une autre mission de sauvetage réussie, cette fois par Arno Klarsfeld. chat perché Envoyé par Matignon en Haïti pour « identifier les problèmes prioritaires à résoudre », l’avocat est rentré au bout de quinze jours avec Voltaire, le chat du numéro deux de l’ambassade, Christophe Quentel. Le haut fonctionnaire et sa famille avaient dû quitter l’île à la hâte, en laissant le félin. D’après Klarsfeld, contacté par le Canard, « Voltaire manquait cruellement à sa petite fille de 5 ans ». Cette fois, c’est le pinard miraculé qui a pu être transporté, sous bonne escorte, dans les locaux de l’état-major de la cellule de crise… Ouf, les soirées de monsieur l’ambassadeur sont sauvées ✹ laurent macabies

a Les caisses de champagne Mumm et Charles Pougeoise sont délicatement installées avec les cartons de vodka Smirnoff sur le pick-up.

Aristide, chantre de l’islamisme rampant Le 29 février 2004, un commando des Forces spéciales américaines chasse Aristide, démocratiquement élu, du pouvoir à Port-au-Prince. Des bidasses venus des USA, de France, du Canada et du Chili débarquent. Installés dans leurs popotes, les soldats américains et français sont pris du syndrome Ben Laden : voilà qu’ils découvrent des barbus aux Caraïbes ! Dans un rapport, le capitaine Lagarde qui tient le rôle de

scribe au sein du « groupe d’évaluation ». Il écrit que « depuis 2000, suite à la venue d’anciens militaires pakistanais, l’islam radical a pris pied sur l’île ». Avec, même, « de l’argent né du trafic de drogue et d’armes »… Mieux, un imam très méchant traînerait aussi dans le coin. Et l’allié de ces djihadistes, c’est qui ? Aristide, bien sûr ! Une bonne raison pour le faire valser. Et depuis, nul n’a revu un islamiste au pays du vaudou ✹ j.-m. B.


Filouteries | 7 soutien humanitaire

Régis Debray, ambassadeur de l’impérialisme

Le philosophe Régis Debray a renoncé à la révolution mais pas à l’odeur du pouvoir. Après avoir joué les utilités chez Mitterrand, il a fait pote avec Kouchner, croyant ainsi mettre son grain de sel dans la soupe diplomatique. Il a aussi été l’ami de Villepin ce qui, politiquement, est une position aussi agitée que s’asseoir à l’arrière du scooter d’un livreur de pizzas. C’est ainsi, en 2003, Villepin étant ministre des Affaires étrangères, que Régis se trouve jeté dans le chaudron haïtien. Puisque Colin Powell, dans un coup d’État qui ne dit pas son nom, veut débarquer Aristide, le président d’Haïti bien capable de « gauchisme », Villepin est prêt, pour l’amour de Colin, à prêter la main à ce « golpe ». Et Régis aussi, lui par amour de Dominique. Ce n’est plus de la politique mais la confusion des sentiments. Chef de commando Debray saute sur Port-au-Prince, et conseille à Aristide de dégager. Le bon Régis, pour justifier la révolte de la « société civile haïtienne », accrédite l’idée que le Mouvement des 184, opposé à Aristide, est vraiment coulé dans du béton démocratique. Alors qu’il n’est que le faux nez de l’Amérique. Voir Debray servir la politique de Bush valait bien la peine d’être vécu ✹ j.-m.B

la déband’aide française Au lieu d’aller directement aux sinistrés de Port-au-Prince, l’aide française acheminée a été détournée vers un camp de refugiés, en dépit du bon sens.

L

e 29 janvier dernier, les 2 000 tonnes de fret à bord du Siroco, bâtiment de la marine nationale parti de Martinique quelques jours plus tôt à destination d’Haïti, étaient toujours immobilisées à l’aéroport de Portau-Prince. Faute de moyens pour les acheminer. Dans les ruines de la capitale, plus d’un million de personnes n’avait pas de quoi manger tous les jours… Pendant ce temps, en présence de madame Préval, Première dame du pays, monsieur Le Bret, ambassadeur de France en Haïti, inaugure le camp de Hinche, à une centaine de kilomètres au nord de la capitale. Où deux mille réfugiés seront logés, avec, pendant deux ans, un programme de professionnalisation en vue de les aider à s’implanter dans la nouvelle province. Projet fort louable en soi, s’il ne mobilisait pas des moyens disproportionnés au regard de la situation, et s’il n’était pas dicté par des considérations autres que strictement humanitaires. Un projet qui mobilise toute l’énergie de l’une des plus importantes ambassades du pays, à l’heure où la situation est critique. On estime à plus de 300 000 le nombre de réfugiés qui ont fui la capitale haïtienne. Autant de personnes qu’il faudra loger, nourrir, scolariser. Sans compter le million de sans-abri à Port-au-Prince. coup médiatique Malgré l’urgence et l’ampleur de la tache, il semble que l’ambassade de France ait décidé de se concentrer sur un seul et unique coup médiatique : inaugurer le camp de Hinche. La plupart des ressources de l’ambassade – logistiques, militaires diplomatiques – étaient mises à disposition de l’« opération Hinche ». Jusqu’aux camions du contingent de l’armée française qui devaient initialement assurer la distribution des vivres débarqués du Siroco. Mieux, dans les premières heures, l’ambassadeur, soucieux d’afficher sa générosité, a demandé à disposer d’une partie de ces provisions pour les acheminer vers le camp modèle de Hinche sous les yeux de la presse internationale. Rations alimentaires initialement destinées aux habitants de Port-au-Prince, dont certains n’avaient presque rien mangé depuis huit jours. En revanche, dans le plateau central d’Haïti, considéré comme le grenier du pays, où se situe le camp, il aurait été possible

putsch de 2004

villepin, parasol des usa d’acheter de quoi nourrir les réfugiés. Ce qui aurait eu pour autre avantage de soutenir l’économie locale. Curieuse démarche, donc, pour les services de coopération de l’ambassade de France, qui répètent à qui veut bien l’entendre que l’aide doit parvenir en priorité « aux populations qui en ont besoin ». grandes promesses Pourquoi, alors, ce projet pharaonique ? Il faut savoir que la région de Hinche est primordiale dans la communication de la coopération française en Haïti. La France finance un tronçon de la route qui doit relier la capitale Port-au-Prince au Cap Haïtien, dans le nord du pays… et qui passe par Hinche. En septembre 2009, lors de son passage en Haïti, Michel Barnier avait fait de grandes promesses pour le développement de la région… restées sans suite. C’est également le fief du MPP (Mouvement des paysans de papaye), présidé par Chavannes Jean-Baptiste, leader charismatique plusieurs fois

pressenti pour l’élection présidentielle. Outre l’excellent travail qu’il fournit dans la région auprès des agriculteurs, le MPP est connu pour ses positions antiaméricaines et anti-impérialistes (notamment au sein du réseau Via Camp). Or il se trouve que le

MPP est également partenaire du camp de réfugiés de Hinche. Interrogé sur la nécessité de mettre en œuvre rapidement les moyens permettant de distribuer les vivres du Siroco, le responsable de la cellule de crise du Quai d’Orsay répond par une boutade que « tout va bien ». En dépit des témoignages directs affirmant que le fret est bloqué et qu’une réunion des ONG avec les représentants français n’a pas su proposer une solution pour leur déstockage avant le 2 février, soit une semaine après l’arrivée du Siroco. De même, les conseillers de monsieur Duquesne, le diplomate chargé de la coordination pour la reconstruction en Haïti, avertis sur les besoins urgents de l’ambassade de France en moyens de communication interne et externe et de matériel, ont affirmé que celle-ci ne manquait de rien, quand elle manque de tout. « plus jamais ça ! » Une fois l’« opération Hinche » terminée, l’ambassade s’est finalement résolue, après de longues négociations, à transporter une partie du stock du Siroco vers les entrepôts d’organisations humanitaires. Mais une portion de ce stock alimentaire a malgré tout été « prélevée » sans autorisation par l’ambassade, pour être envoyée vers Hinche. « Le Siroco, plus jamais ça ! » tempête une responsable d’ONG sur place. Quand donc le gouvernement se décidera-t-il à se doter de moyens à la hauteur de l’élan massif de solidarité nationale et internationale, pour coordonner et soutenir l’aide française aux Haïtiens ? En attendant, réunies par l’ambassadeur Duquesne au ministère de la Coopération ce même vendredi 29 janvier, Alstom, GDF-Suez, Orange et Veolia sont d’ores et déjà sur les rangs pour « participer à la reconstruction du pays »… ✹ pierre toussaint

S

eul le poète sait sublimer les histoires d’amour aussi longues et belles que celle qui unit la France et son ancienne colonie, Haïti. Une chance, le Quai d’Orsay en a accueilli un à sa tête, de 2002 à 2005. Le sieur Dominique Galouzeau de Villepin, ministre des Affaires étrangères, qui a trouvé une bonne raison de s’amouracher de Portau-Prince pendant son magistère diplomatique : se réconcilier avec l’Oncle Sam. Petit flash-back. Tout auréolé de son discours contre la guerre en Irak à la tribune de l’ONU, le 20 janvier 2003, Villepin entend un cri de gargouille venu d’outreAtlantique. Colin Powell, secrétaire d’État de George W. Bush, lui en veut personnellement du camouflet infligé aux ÉtatsUnis. Dès le 21 janvier, le futur blanchi de Clearstream sent bien l’ampleur du malaise. Powell ne le prend plus au téléphone. Silence éloquent de la part d’un homme né en Jamaïque, avant d’émigrer à New York. Selon des proches de Villepin, l’année 2003 s’achève comme elle a commencé. « Dominique sent bien que Powell lui en veut. Toute occasion alors était bonne pour se rabibocher ». Et le larron s’appelle Aristide, président élu d’Haïti et jusque-là toujours soutenu par la France. Au point, en 1991, de voir sa vie et sa présidence sauvées par les bidasses français. Mais le pov’ président JeanBertrand a aussi ses petits défauts. Magouillant un poil, quelques entorses aux droits de l’hom-

me… Et surtout, il se trouve dans les petits papiers de Condoleeza Rice, conseillère à la Sécurité intérieure des États-Unis et rivale black de Powell dans le gouvernement Bush. Une inimitié suffisante pour justifier une petite guerre entre amis. poète fou Le dossier Haïti en sera une. Idéal. Powell vend à Bush la menace d’une arrivée massive d’immigrés haïtiens sur les côtes de Foride en cas de rébellion contre Aristide, et d’ailleurs, cet Aristide est un gaucho en puissance et l’ami secret de drôles de barbus assez islamistes. L’argument touche, George W. n’a aucune envie que des boatpeople déstabilisent le gouverneur de Floride, son propre frère Jeb. Cerise sur la banane flambée, l’ami Colin propose que la France réalise le sale boulot et s’occupe de détrôner Aristide. Vendu ! Un seul coup de fil suffira, en février 2004, à convaincre la France. « Dominique, here is Colin ». Bientôt, Aristide se voit raccompagné par l’ambassadeur de France, sur les chemins de l’exil, direction la Centrafrique. Et Villepin, pour se rapprocher du puissant allié américain, de s’asseoir alors sur tous les beaux préceptes énoncés pour ne pas participer à la guerre en Irak… et aide à destituer un président élu au nom des droits de l’homme. L’amour rend fou, surtout les poètes ✹ x. m. et M. A.

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| Filouteries au comptoir Lellouche juge Ashton

Pierre Lellouche, le secrétaire d’État chargé des Affaires européennes, juge qu’Hermann Van Rompuy pourra se révéler en président européen. En revanche, il n’attend rien de Catherine Ashton, ministre des Affaires étrangères de l’Europe depuis trois mois : « La moitié du temps, elle est à Londres dans les mains du Foreign office », lâche-t-il.

Jean-Louis Debré pour les nuls

Il avait déjà présenté en grande pompe La Ve République pour les Nuls de Laurent Guimier et Nicolas Charbonneau. Jean-Louis Debré récidive, cette fois avec L’instruction civique pour les Nuls de Frédéric Monera et Guillaume Bernard, à paraître aux éditions First. Le président du Conseil constitutionnel recevra le 5 mars les auteurs, l’éditeur et les journalistes dans les salons du Palais Royal. Une sacrée pub.

Villepin ministre ?

parti socialiste

petits comptes inamicaux

L

es « remerciements » à la fin rapport des fraudes de Royal ne des livres d’enquêtes journasera jamais rendu public, « trois listiques sont un précieux chemises en papier fin orangées indicateur. Surtout lorsqu’il titrées Bouches-du-Rhône, Guades’agit de politique et, de surcroît, loupe, Hérault », attirent l’attendu parti socialiste. Ils vous dontion. Le rapport « fait état de nent le calibre de la balle, son nombreux cas de votes suspects, origine et, souvent, sa cible. notamment dans l’Hérault et plus En septembre 2009, Hold-uPS, particulièrement à Montpellier arnaques et trahisons, d’Antonin […] Dans la section où cette derAndré et Karim nière a obtenu le Rissouli, visait plus de voix, 194, L’affaire des fraudes les fraudes Martine Aubry d’Aubry lors du en a récolté 11. lors du congrès de Reims congrès de Or les militants en 2008 est relancée. Reims en 2008 ont voté sans pour la désignapièce d’identité tion du premier secrétaire. Gâou sans avoir pu être reconnus chette ségolèniste en main. contradictoirement par les assesLe récent ouvrage de Françoisseurs de Martine Aubry », signale Xavier Bourmaud, PS la bataille le rapport. des egos, plumitif au Figaro, Au total, et rien que sur Montpelchange de fusil d’épaule. « Merci lier, le rapport émet « des réserves à Martine Aubry, Jean-Christophe sur plusieurs centaines de voix. Cambadélis, François Hollande, Quant à la Guadeloupe et aux Pierre Moscovici, qui ont accepté Bouches-du-Rhône, les éléments de faire partager leur regard sur du dossier sont moins probants. le parti socialiste ». Aucune signaSur la première, le rapport s’étonture de la garde rapprochée de la ne de l’évolution du score en favierge effarouchée du Poitou : veur de Ségolène Royal. 1 559 pour Jean-Louis Bianco, Najat BelkaRoyal contre 339 pour Aubry. Au cem ou Aurélie Filippetti. Mais regard des procès-verbaux reçus celle de quadras revenus de de Guadeloupe, le score passe à l’idylle royaliste, Vincent Peillon 1 510 voix contre 337. Quant aux et Manuel Valls, qui ont troqué Bouches-du-Rhône, “il y a tout de l’habit de mitron pour celui de même une section dont le rapport chef-cuistot du socialisme. demande le réexamen du Qu’apprend-on sur cette nuit des vote.” » longs couteaux ? « Trois jours à Fallait-il rendre les fraudes pudécortiquer les fraudes relevées bliques ? « Non, car le redresselors du scrutin […] Après avoir ment aurait alors accordé une étudié les fraudes supposées en avance plus importante à Martine faveur de Martine Aubry et reAubry », assure le journaliste. dressé les résultats, la maire de « On ne l’a pas fait, cela s’appelle Lille arrive toujours en tête du de la magnanimité », résume un scrutin. Et ce ne sont plus 42 voix membre de la direction du PS. d’avance qui donnent la victoire à Quel fair-play ✹ Martine Aubry, mais 102. » Si le louis cabanes

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Certains de ses amis le souhaitent, d’autres le redoutent : et si Dominique de Villepin acceptait un poste de Nicolas Sarkozy, par exemple un grand ministère ? Le scénario n’est pas totalement irréaliste, malgré les attaques du Président contre l’ancien Premier ministre, et vice versa.

La Bretagne, ça vous perd

Pour les régionales, en Bretagne, la bérézina est annoncée pour la droite. Apparemment, des journalistes trop bien élevés n’ont pas remarqué que sur la liste du Morbihan, François Guéant, le fils du numéro deux de la République, est en troisième position… Fâchés de ce « favoritisme », plusieurs maires ont décidé de démissionner. D’autant qu’en cinquième position, on trouve un autre emploi protégé, en la personne du directeur adjoint de cabinet de Fillon. Enfin, dans le Finistère, la liste est une sorte de pétaudière où rien n’est réglé. Claude Guéant, le père de son fils, doit venir la semaine prochaine pour calmer les esprits !

erratum

Deux bourdes explosives se sont glissées dans notre dossier « Corse » la semaine passée. Ce n’est pas le père de Paul Giaccobi qui a refusé les pleins pouvoirs à Pétain, mais son grandpère, Paul Joseph Marie Giacobbi. Quant à Émile Zuccarelli, il est bien entendu affilié au PRG et non à l’UMP. Le fautif a été condamné à vendre du brocciu sur le GR20 pour financer l’achat d’un Who’s Who ✹

« Il est temps d’envoyer Besson au musée Grévin » Georges Frêche n’a pas tenu des propos très orthodoxes, certes. Et son copain Louis Nicollin, le patron du club de foot et des ordures, qui traite Laurent Fabius de tête de con, il n’est pas particulièrement distingué non plus. Mais restons calmes, l’affaire Fabius n’est pas une nouvelle affaire Dreyfus. C’est un gladiateur, Frêche. Étudiant gauchiste, il se battait dans le Quartier latin contre la droite, quand Fabius roulait en Aston Martin. Martine Aubry, qui parle de perdre son âme avec les grosses balourdises de Frichounet, devrait y regarder à deux fois. Au doigt mouillé, le PS va perdre et l’autre gagner. Et quand Manuel Valls déclare qu’il n’y a pas assez de Blancs sur un marché, il fait bien pire. C’est un type complexe, Frêche. « Ils m’emmerdent, ces Catalans », proclamait-il après l’échec de son référendum pour rebaptiser sa région « Septimanie ». Il est grossier et cultivé à la fois. Et ce populisme, qui vit à coup de prébendes, d’emplois et d’appar tements, cela marche aujourd’hui. Les Français ont besoin de gueulards comme Frêche ! Les régionales seraient fantastiques si les têtes de liste parlaient d’autre chose que de la composition de leur liste ou des alliances de troisième tour. Les sujets régionaux, cela existe : les lycées, les transports. À Paris, Huchon et Pécresse devraient réquisitionner le Conseil économique et social pour en faire une grande université du commerce extérieur. À quand un débat sur le « Gross Paris » du Kaiser Sarkoko ? Et un autre sur la grande glissade des déficits et des gabegies ? En plus, pour empaqueter le tout,

le traître Besson parle, depuis des semaines, d’identité nationale. Quelle est la nature du débat ? Personne ne le sait. L’objectif de cette usine à gaz ringarde et nauséabonde s’est perdu dans les sables. Heureusement, Fillon a arrêté cette singerie. Il est temps d’envoyer Besson au Musée Grévin ! Michel Charasse devrait être nommé au Conseil constitutionnel par le président du Sénat, Gérard Larcher, à la demande de Sarkoko. Un sacré renvoi d’ascenseur qui ne serait ni très moral, ni très malin, même dans un monde de bandits. Et il n’est pas sûr que Gérard Larcher se prête à la manœuvre. Larcher est une grosse mariolle, un sanglier renifleur. Pour être réélu à la présidence du Sénat, il lui faut d’abord soigner sa droite. Des sénateurs, comme l’UMP Hubert Haenel, rèvent depuis toujours au Conseil constitutionnel. Et il ne faut pas sous-estimer la force de nuisance de Gérard Longuet, le patron de la droite au Sénat, qui n’a aucune envie de favoriser Charasse. Au passage, je salue le livre de Pierre Joxe sur le Conseil. Président du RPR au Sénat, je l’ai côtoyé quand lui dirigeait le groupe socialiste à l’Assemblée : ferré sur tous les dossiers, sérieux, dur, rigoureux. De Joxe à Charasse, on tombe dans le burlesque. Il y a un chiffre passé inaperçu : la baisse de 10 % de nos exportations agroalimentaires, pourtant un secteur fort. Madame Idrac devrait quitter le ministère du Commerce extérieur pour la Cour des comptes. Pourvu que Sarkoko ne nomme pas son factotum africain Patrick Balkany. Sinon, le commerce extérieur français risque de rester dans le noir. Sauf avec l’Afrique, bien sûr ! ✹ Jean-François Probst

À Marseille aussi, la rose est épineuse Les Marseillais n’ont pas fini de révolutionner le socialisme. Pressé de remettre de l’ordre dans « sa » fédération, et de réaffirmer son pouvoir, le patron du conseil général des Bouches-du-Rhône, Jean-Noël Guérini s’est auto-proclamé président de la fédération. Une désignation qui n’existe dans aucun statut du parti. Le conseil fédéral du 5 février dernier a élu « Nono » à l’unanimité… « En fait, il n’y a pas eu de vote, nuance l’un des témoins de la séance, il a pris tout le monde de court. Y compris le PS national, déjà bien assez emmerdé avec l’affaire Frêche ». La rose du sud est pleine d’épines… Autre surprise pour les connaisseurs des arcanes de la politique marseillaise. La présence en dix-huitième position sur la liste socialiste, de Marianne Moukabel… pourtant recalée par la commission des investitures. Petite explication, cette ex-Verte est une fidèle du tout frais « Président Guérini » qui a blanchi sa candidature. Et l’a imposée comme représentante de la société civile. Histoire de réaffirmer, une fois de plus, qui est le patron. Ça tourne à l’obsession le pouvoir, chez Nono ✹ x.M.


Au bazar des médias | 9 concorde Air France aime bien les journalistes, tant qu’ils le lui rendent bien. Ainsi, au sujet du crash du supersonique le 25 juillet 2000, en procès depuis le 3 février, la compagnie ne veut entendre qu’un son de cloche. Gare à celui qui oserait émettre un doute sur la version officielle.

Écrase-toi, et tout ira bien

A

ir France aime à choyer les gratte-papiers. Et avec l’ouverture du procès du crash du Concorde le 3 février, la compagnie aérienne constate que les plumitifs ne sont pas ingrats. Peu de contre-enquêtes ont vu le jour depuis l’accident. En novembre dernier, le Figaro Magazine a renoncé, sous d’étranges motifs, à la publication d’un papier très critique sur la sécurité des vols de la compagnie. Le très ré-

publicain Marianne avait lui aussi tergiversé tout l’été, puis renoncé. Seul VSD l’a publié et même mis en « une » dans son numéro du 2 décembre. Et à mesure que la date de l’audience a approché, le maillage des médias par la compagnie s’est resserré. Gare aux malandrins qui oseraient critiquer la thèse officielle – une lamelle métallique présente sur le tarmac aurait fait exploser un pneu, entraînant le crash du supersonique.

La scène se passe au Musée de l’Air et de l’Espace, situé à proximité de l’aéroport du Bourget (93), le 2 février dernier. L’auteur de ces lignes, qui a rédigé dans un livre sorti en 2007 une contreenquête remettant en cause la version tamponnée Air France, est interviewé par CNN International. Le décor a été choisi par la chaîne américaine. Dans le hangar du musée se trouvent deux Concorde. Un « comité d’accueil » composé de deux cadres

de l’aviation employés par le Mul’émission était trop occupée sée s’enquiert de ce qui va être pour répondre à nos questions dit. La discussion s’engage. « Air sur le sujet. France ne vous laissera pas dire « Je veux bien qu’il y ait des invescela, vous ne vous rendez pas tigations de journalistes et d’excompte », lâche l’un deux. Intimiperts ou de soi-disant experts, et dation ? En tout cas, une belle ilqu’on découvre maintenant des lustration de la peur que suscite choses qu’on ne connaissait pas la société. Appelée à la rescousse, avant, mais moi, personnellement, la directrice de la communicaje n’y crois pas », a glissé Gérard tion débarque, très embêtée, à la Feldzer au cours du même profin de l’interview : « Je ne peux gramme. Avec dans sa roue Mipas vous laisser diffuser ces imachel Polacco, spécialiste ès aviages, vous ne poution de France vez pas remettre « la théoPeu de contre-enquêtes Inter : en cause la verrie développée sion officielle par Continental ont vu le jour sur le avec en fond [le Concorde crash du Concorde. d’écran le était en feu Concorde qui avant la lamelle, nous est prêté par Air France. La ndlr] ne repose que sur des abercompagnie ne va pas être d’acrations ». Oubliés la surcharge au cord ». Et la fidèle employée d’apdécollage, la marche sur la piste, peler sur tous les postes le direcle témoignage des pompiers… teur du musée, Gérard Feldzer, Comme en écho, la chronique de un ancien commandant de bord Pierre Sparaco, un « journaliste » de la compagnie tricolore qui membre de l’Académie de l’air et parcourt les plateaux télévisés à de l’espace, une organisation loblongueur d’années, avec ses petibyiste en partie financée par Airtes maquettes d’avions. bus et Air France, expliquait sur Feldzer excelle dans la capacité son site d’actualités Aeromorà expliquer entre les lignes ning l’inutilité du procès… qu’Air France a toujours fait ce Comme le dit la réclame, « le ciel qu’il fallait pour la sécurité de est le plus bel endroit de la terses passagers, que Jean-Cyril re ». Pourquoi vouloir y mettre Spinetta a été un patron très hudes nuages judiciaires ? ✹ main. Question fayotage, on peut François Nénin difficilement faire mieux. Sauf à C dans l’air, le 3 février dersur www.bakchich.info nier : l’émission de France 5 Retrouvez tous les articles n’avait pas jugé opportun de consacrés à Air France convier des intervenants en désaccord avec la version officielhttp://minu.me/1omp le… Apparemment, l’équipe de

prêt-à-penser

bhl et ses amis de «­marianne­»

P

our « célébrer » la sortie des deux livres de BHL, Marianne lui consacre huit pages d’entretien. « BHL-Marianne : l’interview la plus choc de la saison », frémit le site officiel du philosophe. « Quoi de commun entre Bernard-Henri Lévy et Marianne ? Rien, ou presque », indique l’hebdomadaire. Rien… ou presque. 1999, première crise financière de Marianne. C’est au domicile de l’écrivain que le patron de l’époque, Jean-François Kahn, et François Pinault font connaissance. Une rencontre fructueuse puisque l’homme d’affaires accordera, en toute discrétion et sous forme de prêt non-remboursable, quelques millions d’euros aux dirigeants du journal. L’argent qui transitera par

la petite banque suisse Discount Bank à Genève permettra de sauver Marianne. gratitude Peut-être est-ce pourquoi Marianne ne manque pas une occasion de saluer chaque parution du prolixe Bernard-Henri. En donnant régulièrement l’impression de se justifier. Quand le philosophe sort Ce grand cadavre à la renverse, « Marianne réplique à BHL », claironne la couverture du 13 octobre 2007. À l’intérieur, huit pages d’entretien. Comme lorsque « BHL affronte Marianne » en devisant de son dernier opus. Entre les deux, pour Ennemis publics, deux pleines pages annoncent la sortie de ce livre qualifié de « salubre » (Marianne, 4/10/2008). Le journal n’oublie jamais son entremetteur philosophe✹ l. m.

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| Au bazar du sport

gît haut Les Jeux Olympiques, d’hiver et variés, ce sont des grands principes : « Plus vite, plus haut, plus fort ». Avec un paquet de fric gaspillé, des tonnes de CO2 libérées, de viles tractations… Et si l’important était de ne pas participer ?

bruits de vestiaire

Le Jeu en vaut-il la chandelle ?

C

’est surprenant : alors qu’Annecy s’entête à postuler pour organiser les Jeux Olympiques d’hiver de 2018, André Guélfi, plus connu sous l’élégant sobriquet poissonnier de « Dédé la sardine », n’a reçu aucun coup de téléphone de Savoie. Pourtant, avec son pote Juan Antonio Samaranch, ancien ministre de Franco et ex-patron du tout-puissant Comité international olympique (CIO), c’est lui qui fait les villes reines. Dédé explique l’origine de son pouvoir dans le monde du muscle : « Il y a quarante ans, je suis devenu l’ami de Horst Dassler, le patron d’Adidas. Nous avons fait des affaires, j’ai pris goût à ce monde de l’industrie du sport. Et j’y suis resté. » Mais il reste discret sur sa manière de rallier à son point de vue certains membres du CIO… Ces votes utiles sont sûrement une vieille histoire d’amitié. Inutile donc, comme Bertrand Delanoë, de passer des mois en survêt’ pour obtenir les Jeux.

pas davantage l’Ouzbek. Dans les JO, ce qui intéresse trop d’organisateurs, ce n’est pas le muscle, mais le gras. Pas les Jeux mais l’argent des Jeux. La distribution de ces budgets, si bénéfiques pour ces agences de com’ et autres stars, amies du sport-business. Dans le dossier d’Annecy, les élus ont voté une dépense « prévisionnelle » de 2,5 millions d’euros pour la propagande. Pour faire une image, cela représente quarante appartements HLM dans un département où le chômage vient d’augmenter de 8 %. gros david et son bouffon Comme le chat qui pisse contre le mur, la conquête des Jeux est aussi, pour les politiques, l’occasion de marquer leur territoire. Ainsi, Jean-Luc Rigaut, le maire

d’Annecy, pourtant de droite et champion olympique à la rame, vient-il d’être débarqué du projet par Sarkozy et son délicat ambassadeur David Douillet. D’un balayage, le gros David a viré pas mal de militants de la cause en or. Antoine Dénériaz, bien que champion olympique de descente à Turin et Jean-Paul Pierrat, ancien roi du fond, ont également été débarqués. Et JeanClaude Killy lui-même, ami de l’UMP, du pouvoir et de l’argent, s’est écarté avant qu’on ne le pousse. Edgar Grospiron, champion olympique en « ski de bosses », c’est-à-dire chez les bouffons, a pris le relais comme leader. Dans chaque interview, il déclare dicter ses pas sur ceux de Sarkozy. Ce qui ne va pas toujours bien loin.

Pendant que Grospiron s’amuse en Savoie, on défile dans les rues de Vancouver, pour protester contre l’ouverture de ces ruineux JO. Où, pour garnir les pistes on transporte la neige dans des camions. Alors que l’équivalent carbone des Olympiades est un désastre écologique. Sur le plan des fameuses « retombées économiques » des Jeux, dont on nous rebat les oreilles, elles existent bien. Mais à l’envers. Là où les JO passent, l’équilibre budgétaire trépasse. Allez donc faire un tour à Athènes, pour voir… Finalement, merci Dédé de ne pas avoir « facilité » l’organisation de JO de Paris. On va y vivre un peu moins pauvre et avec des poumons plus clairs ✹ jacques-marie bourget

propagande de com’ Si les Chinois, Anglais et Russes, pour obtenir les JO de Pékin, Londres et Sotchi, ont poussé la bonne porte, les Français, eux, continuent de chercher la clé. Nous, habiles frenchies, pour convaincre des électeurs qui sont aussi kazakhs ou turkmènes, nous tournons des films de propagande, ridicules et coûteux, avec Catherine Deneuve ou Johnny Hallyday sur l’écran. Ce qui, bizarrement, ne convainc

Petit clin d’œil du destin, le Comité d’organisation des Jeux de Vancouver tenterait d’interdire la traditionnelle parade célébrant le nouvel an chinois dans les rues de Vancouver pour ne pas entraver la circulation. Censurer les Chinois… si c’est pas scandaleux.

bataille judiciaire entre clubs de foot et bookmakers

O

Ouf  ! Pékin 2008, c’est bel et bien terminé. À Vancouver, moins de risque de voir débarquer les défenseurs des droits de l’homme. Il y aurait pourtant à redire, d’après un article du quotidien canadien The Globe and Mail, du 8 septembre 2008. Se moquant de l’attitude outrée de ses compatriotes à l’époque du grand raout chinois, le journaliste Mark Hume ironisait sur la situation pas si rose de son pays. Les médias « pourraient envoyer leurs reporters à Downtown Eastside » où, à deux pas du centre antidopage, « on peut acheter et consommer de l’héroïne ou du crack sans craindre de se faire arrêter ». Un quartier également très connu pour ses maisons closes, dans une ville où la prostitution est légalisée. Une chance, toutes les olympiades coïncident avec un boom de l’activité. Au moins une belle retombée pour l’économie…

Chinois censurés

paris sportifs

n croyait les sites de paris en ligne et les clubs européens de football les meilleurs amis du monde. Il n’en n’est rien, comme le démontre clairement la guerre judiciaire implacable qui les oppose ces derniers temps. Le différend porte sur l’usage par les bookmakers des noms des clubs dans la désignation des épreuves sur lesquelles ils invitent leurs clients à parier. Pour leur part, les clubs affirment que les «cyberbookmakers» se rendent coupables de contrefaçon et, subsidiairement, de parasitisme, en reproduisant sur leurs sites et sans leur accord, les marques qu’ils ont déposées. De leur côté, les sites rétorquent qu’ils emploient les noms des clubs, non

Boycottons Vancouver !

pas à titre de marque, mais seulement à titre descriptif et informatif. C’est la réponse à cette question existentielle qui donc a été demandée par la Juventus de Turin d’une part et le Paris SaintGermain d’autre part, aux troisième et première sections de la troisième chambre civile du tribunal de grande instance de Paris, en janvier et juin 2008. Le club parisien s’est fait étaler dès la première mi-temps…

Bakchich Hebdo | du samedi 13 au vendredi 19 février 2010

Le 17 juin 2008, les juges de la première section ont rendu leur copie sur une demande du club parisien formée sur le même fondement. Pas de chance pour les locataires du Parc des Princes : les juges avaient sous la robe l’article 713-6b du code de la propriété intellectuelle qui permet d’utiliser une marque comme référence nécessaire pour indiquer la destination d’un produit ou d’un service, à condition que n’existe aucune confusion dans leur origine. Ils ont donc renvoyé les joueurs de la Porte de SaintCloud au décrassage… Quant à la Juventus, elle a cédé dans les arrêts de jeu, après une première mi-temps plutôt favorable. Dans l’arrêt du 30 janvier 2008 sur la demande de la Juve contre les sociétés William Hill Credit et Unibet, devenues Global Entertainment Antigua, le tribu-

nal a condamné les deux exploitants des sites pour contrefaçon de marque, sans pour autant retenir l’action en parasitisme et en agissement parasitaire. Le 11 décembre 2009, la deuxième chambre civile de la cour d’appel de Paris a retenu l’argument des sites, selon lequel la dénomination litigieuse n’est pas utilisée pour identifier les produits ou services offerts par la Juventus de Turin, mais seulement pour désigner le club turinois. La cour a d’ailleurs retenu qu’il n’existe aucun autre terme permettant de nommer l’équipe engagée. Et a écarté le prétendu usage à titre de marque. Conclusion : tant à la Juventus de Turin qu’au Paris Saint-Germain, ce sont les sites de paris qui marquent des points. Un comble ✹ woodward et newton

Mascotte pédophile

Quatchi, Miga, Sumi, Mukmuk et Pedobear. Cherchez l’intrus ! En illustrant un article sur les mascottes des JO, le journal polonais The Gazeta Olsztynska a malencontreusement laissé l’ourson pédophile Pedobear se glisser aux côtés des quatre vrais animaux symboles de Vancouver. Cette peluche est ironiquement utilisée dans les forums où elle apparaît derrière de jeunes filles dans des photomontages.

Ça patine

Le couple russe Oksana Domnina et Maxim Shabalin a fini par renoncer à porter costumes et peintures aborigènes pendant l’épreuve de patinage artistique. Malgré la colère des associations, ils n’ont pas pour autant abandonné la danse aborigène qui leur a permis d’être champion d’Europe. Il se pourrait qu’on assiste, aux JO, à une boulette russe…✹


Rab de Bazar | 11 à la page

pour l’afp, twitter n’est pas jouer son, se concluant par les mots: “RIP, Michael” », explique ainsi, en forme de moonwalk, le règlement interne sur l’utilisation des réseaux sociaux. Pour l’agence, le constat est douloureux. Comme l’explique Frédéric Filloux dans son rapport sur l’AFP dévoilé sur Bakchich. info (voir encadré), elle ne détient plus le monopole des alertes sur l’information dite « chaude ». De plus en plus, les réseaux sociaux la devancent. Lentement, mais sûrement, l’agence se convertit à ces nouveaux supports.

T

oute tendue vers son objectif de modernisation, la direction de l’AFP prend peu à peu conscience de l’importance des réseaux sociaux et incite ses journalistes à y jeter un œil de plus en plus souvent. Une grande nouveauté pour l’agence. Le souvenir est frais, et l’enseignement riche de sens. Lors du délibéré du procès Clearstream, c’est un journaliste de France 2 qui, via son compte Twitter, a le premier rendu compte de la relaxe de Dominique de Villepin, devançant ainsi de quelques minutes la dépêche AFP. « rip, michael » Pour l’agence, le problème est le suivant : rester compétitive tout en utilisant à bon escient les nouveaux médias. C’est-à-dire sans relayer des « informations » piquées sur les réseaux sociaux

Delon en large

qui se révéleraient fausses quelque temps plus tard. Ce fut le cas, par exemple, lors de la mort de Michael Jackson. Après laquelle l’agence avait par erreur relayé la réaction du ministre anglais des Affaires étrangères. « Nous nous sommes laissés prendre dans le passé par un faux compte Twitter sur lequel le ministre britannique des Affaires étrangères était censé avoir envoyé un message de condoléances après la mort de Michael Jack-

le précédent kerviel Aussi encourage-t-elle ses journalistes à tenir une veille sur Facebook ou Twitter. Et rappelle le précédent Kerviel dans son règlement interne : « Lorsque l’affaire du trader français Jérôme Kerviel, accusé d’avoir fait perdre cinq milliards d’euros à la Société Générale, a éclaté, nous avons pu trouver des collègues sur sa page Facebook et les contacter pour recueillir leurs commentaires en recherchant leurs coordonnées. » De nouvelles perspectives pour l’AFP, donc, qui doit désormais compter avec ces nouveaux outils pour conserver une place de choix dans le nouveau paysage de l’information ✹ s. p.

sur www.bakchich.info

Mardi 9 février, Bakchich publiait sur son site Internet l’intégralité du rapport rendu par Frédéric Filloux, ancien patron du site 20minutes.fr, à Pierre Louette. Intitulé Pérenniser l’agence France Presse, le document livre une autopsie inquiétante de l’Agence. Pour l’auteur, celle-ci est aujourd’hui un « paquebot fixé dans l’espace-temps ». « Aujourd’hui l’AFP a le choix entre renoncer à toute rénovation et se paupériser, ou se réformer ». Le texte est consultable sur http://minu.me/1on7

Alain Delon s’engage. En Suisse. Une votation le 7 mars proposera aux citoyens helvètes la création d’avocats pour animaux. L’acteur a viré militant : « Il faut comprendre que si on est capable de torturer un chien, on est capable de torturer un être humain. J’espère aussi que la Suisse va servir de modèle, et que la France suivra » ✹

Un cœur d’or

Combien a coûté ce bijou qui vous sera offert pour la saint Valentin, madame, monsieur ? 57 euros ! C’est le prix moyen déboursé par les Français en 2009, selon une étude de Société 5. Crise oblige, la valeur des bijoux en or a chuté de 4 %, celle des montres de 5 %. Désormais, ce sont les bijoux en argent qui ont la cote ✹

chamakh, un attaquant modem Longtemps l’Aquitaine appartint à la perfide Albion, ce qui valut à la France une guerre de Cent ans, Jeanne d’Arc et un mythe pour la nation française. Dans un joli bégaiement de l’Histoire, le football français est souvent pillé par l’Angleterre, qui lorgne ses meilleurs joueurs. Mais le ballon rond n’est plus seul. Même les politiques se sentent épris d’une ten-

tation de Londres. Enfin, les footballeurs-politiques, prêts à se retrouver du bon côté de la Manche, où les livres font plus d’euros que dans l’Hexagone. dossard numéro 13 L’Aliénor des temps nouveaux se prénomme Marouane, s’appelle Chamakh et sait se servir de sa tête. Six buts dont sept de la caboche pour l’attaquant de Bordeaux depuis le début de la saison. Et le Franco-marocain de faire une apparition discrète,

à 26 ans, sur les listes du MoDem dans la région, avec le dossard numéro 13 (non-éligible). « Marouane, déclare la tête de liste Jean Lassalle, fait partie de ces forces dont l’Aquitaine a besoin ». Et dont elle ne profitera pas beaucoup. Dès juin, Chamakh rejoindra Londres. Il l’a clamé, déclamé, promis. Et l’Équipe l’envoie même à Arsenal, l’un des clubs phares de la brumeuse capitale anglaise. Il ne reste plus à Bayrou qu’à s’exiler à Londres… ✹ X. M.

Robin Williams, l’arnaqueur arnaqué L’acteur Robin Williams a perdu un rôle et six millions de dollars au passage. Le beurre, l’argent du beurre, et le sourire des juges ? Raté ! Robin Williams vient de perdre son procès contre Gold Circle Films, une boîte de production indépendante. L’acteur américain accusait la société de ne pas avoir tenu ses engagements. Selon l’ancienne Miss Doubtfire, le contrat signé stipulait que, pour son rôle dans le film A Couple of Dicks, il empocherait la somme de six millions de dollars, que le film soit tourné ou pas. Un gros bénéf’ assorti d’une assurance tout risque.

Travailler moins et gagner quand même… Mais à vouloir tout prendre, il a fini par tout perdre. La Gold Circle Films a laissé tomber le projet avant que le tournage soit mis sur les rails. Repris in extremis par la Warner Bros, le projet a finalement reposé sur les épaules des acteurs, Bruce Willis et Tracy Morgan. Exit Robin. Sans passer par le guichet. Jeudi 4 février, la juge Joanne O’Donnell a donné raison à la production, pour qui les demandes de Williams n’étaient pas conformes au deal de base ! ✹ anaëlle verzaux

conso

des cv sur les marchés

F

raise, dis-moi de quel pays viens-tu… On imagine déjà Éric Besson, en mal de charters ou de statistiques, renvoyer vers le Maroc des milliers de cageots de fruits et légumes pas bien de chez nous. Car depuis le 31 janvier, en effet, plus question de curriculum vitae anonyme pour les fruits et légumes ! La faute à un décret, paru au Journal officiel, qui rend l’affichage de l’origine obligatoire, « de façon visible et lisible, en caractères d’une taille égale à celle de l’indication du prix. » Il s’agit, explique le cabinet d’Hervé Novelli, secrétaire d’État au Commerce, de « favoriser une consommation responsable » et de « soutenir les producteurs français », confrontés à un « contexte sensible ». Ah ! cet amour pour les agriculteurs, la France, le terroir… C’est beau à en tirer des larmes. Des larmes, oui, mais d’avoir trop ri. Passons d’abord sur l’ambition, déjà aléatoire, qui veut qu’en lisant la mention « Maroc » sur une barquette de fraises, proposée à un prix imbattable, le chevaleresque consommateur français se dise : « rhalala, non, ces fraises viennent de trop loin, avec un bilan carbone tout pourri, je vais les reposer et acheter celles, beaucoup plus chères, qui viennent de France, notre beau pays, et vont ainsi faire vivre ce fier maraîcher qui a sué corps et âme pour me fournir ce beau produit ». Au mieux, c’est une bêtise : il n’est pas du tout évident que la fraise produite sous serre chez nous vaille mieux, « carboniquement parlant », que

sa copine marocaine élevée en plein air, même venue par voie maritime. Autre alternative, peut-être visée par cette politique de la traçabilité : laisser sous-entendre que la production étrangère est de moindre qualité. Mise en situation : mêmes fraises, même consommateur, et même mot, « Maroc », barrant l’étiquette. L’idée, cette fois, est de voir le

Désormais, les fruits et légumes devront montrer leurs papiers. Fraises marocaines ? Halte-là ! client s’exclamer : « rhalala, beurk, ça vient du Maroc, c’est pas bon, j’en prends pas. » Insultant, si ce n’est xénophobe. Mais le plus drôle, surtout, c’est que cette décision a été prise sans aucune concertation avec les principaux intéressés, les distributeurs, petits et gros. La Fédération des entreprises du commerce et de la distribution, pour la grande distribution, de même que l’Union nationale des détaillants en fruits et légumes, pour les petits commerçants, tombent littéralement des nues. Elles s’offusquent toutes deux d’être « mises devant le fait accompli », et se lamentent « du coût supplémentaire que cela va engendrer pour elles. » À deux doigts, en somme, de crier au fou. Mais Hervé Novelli, lui, « se félicite » de ce décret. Un grand rigolo, ce bon Hervé. Origine ? France, assurément✹ Hugo Hélette

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Informations, enquêtes et mauvais esprit également sur Internet Bakchich Hebdo | du samedi 13 au vendredi 19 février 2010


Un peu de culture | 13 iconoclasse Éric Cantona ne peut pas encadrer la misère. Alors, il la photographie. Notre ex-footballeur de génie, également peintre à ses heures, acteur honnête, poète qui s’ignore et philosophe en herbe, rajoute une corde à son arc. Au profit de la Fondation Abbé Pierre.

Cantona, déclics et des cloaques U n homme auquel Ken Loach a consacré un film (Looking for Éric) ne saurait être fondamentalement mauvais. Éric Cantona est bon comme le pain, le pote, le samaritain, le compte, le gré, le grain, le temps. Franc comme un coup. Bon comme l’eau claire quand on a soif. C’est Cervantès, ce qui est normal pour un espagnol au sang d’anar et pas d’Aznar. Pour vous situer la hauteur du garçon, une seule phrase de sa conférence de presse suffit, prononcée à l’occasion de la sortie de son livre de photos Elle, lui est les autres : « Étre français ? C’est d’abord être révolutionnaire… » Quoi dire de mieux ? C’est ainsi qu’Éric est grand.

grands-parents maternels ont quitté le régime de Franco après l’avoir combattu aux côtés des républicains. Comme beaucoup, ils se sont réfugiés dans le camp d’Argelès-sur-Mer. Ils ont vécu sous des tentes… » « Le monde dans lequel nous vivons est impitoyable. Il est très dur avec les plus fragiles. Il y a deux façons de se comporter face à ça : laisser faire ou se battre. Moi j’ai choisi… » Je vous entends ricaner « voilà Bakchich qui met les pieds dans le tintinnabulant bazar de la charité… » D’abord, Bakchich dans un bazar, c’est son endroit. Sachez aussi que Cantona n’est pas Madame Boucicaut donnant du

pain aux enfants, cette statue scellée au coin du square du Bon Marché, qui est aux dames patronnesses ce que Rodin est à Balzac. Cantona n’est pas une chaisière qui veut adoucir le monde. Le monde ? Il veut l’exploser. Cantona photographie comme il parle, en s’excusant d’être né, d’être là. Comme si, face à eux, les sujets ne voyaient pas ce colosse à la caméra d’argile. « Je ne voulais pas tomber dans le misérabilisme », dit-il. Il fallait donc que la misère soit debout : « Je sais que ces gens sont beaux. Cette beauté je la vois dans leurs yeux ». La beauté du diable, et le diable c’est lui, Canto. Dans le bénitier

de l’abbé Pierre où il plonge le sacrifice des Brigades internationales, le sabre de Durruti, les mélopées de la Pasionaria et L’Espoir de Malraux. Belzébuth mobilisé, lâchant un « viva la muerte », comme si sonnait l’heure d’une nouvelle Résistance. Cantona nous le dit : « on ne fait pas les choses pour qu’elles soient utiles ». Il ouvre sa chemise et le voilà héros du « dos de mayo », noyé dans la poudre de peloton, celui de Napoléon et de Goya. sans fard Cantona n’a pas loué les services d’un assistant, acheté une chambre Hasselbladt pour jouer les

debout les miséreux Pour aider la Fondation Abbé Pierre, cette fraternité de nés malchanceux pour lesquels la vie est un attentat quotidien, Éric aurait pu faire un chèque ou organiser un après-midi vin chaud… Pour montrer la misère des taudis, des bidonvilles, il a décidé de faire un bouquin de photos. Afin qu’en tournant les pages de noir et de blanc, on ait l’injustice bien calée sous le nez. Et qu’on ne puisse dire : « je ne savais pas que c’est ainsi que des hommes vivent ». Cantona, « The King », explique : « Mon engagement ne doit rien au hasard, mais est le fruit d’une histoire et d’une prise de conscience. Je suis un enfant d’immigrés. Mes

Elle, lui et les autres, un regard pour la Fondation Abbé Pierre, par Éric Cantona, éd. Lethielleux, 158 pages, 28 euros.

bédé

muzik

recoudre les blessures de l’enfance

E

lle peut être la pierre au cou du noyé, elle aura donné des ailes à l’art de David Small : l’enfance malheureuse. À Detroit, dans les années 50. Comme tant d’autres dessinateurs américains. Il Sutures (éditions Delcourt) ses plaies de gamin dans une autobiographie en noir et blanc. Point par point. Le crayon trempé dans la sève des souvenirs de l’âge. Sur 350 pages. Un huis clos familial dans l’Amérique de l’après-guerre. Avec le regard mûr d’un général à cheval qui se cabre en peinture sur ses fragiles petites années. De 7 à 15 ans. Il n’eut de cesse de mettre ses pas, sa carrière durant, dans les souliers du petit David. Il en a tiré sa notoriété. En tant qu’auteur et illustrateur de livres pour enfants. L’ouvrage se lit comme on pénètre un jardin secret où fleuris-

ethnologues esthétisants ; et nous coucher le dénuement en top argentique tiré au charbon. Il photographie avec ses yeux, sans flash, ni lumière qui ne soit celle qui perce les lucarnes des taudis. Éviter surtout que le laid ne devienne beau : les amis d’Éric ne s’expédient pas sur cartes postales. Les misères hexagonales, où les héros sont rarement français de souche, celles de La Réunion ou du Brésil ont la même gueule, Canto nous montre le désespoir mondialisé, bien avant que la Chine ne s’éveille. Un arrêt sur l’image de la page 34, intitulée : « France d’en bas et France d’en haut ». Les nuages sont lourds et noirs, l’eau de la Seine plate et veille la tour Eiffel, si chic. En haut, c’est l’immeuble du bonheur ou de sa comédie, béton post-moderne, verre fumé, bureau neuf et à louer, arbres jolis. Sous la trémie qui passe devant le bâtiment et fait balcon, de larges alvéoles, proches de l’eau, sont les abris de ceux qui n’en ont pas, sous les pieds des gens heureux. Joueur de championnat, le photographe Éric Cantona est aussi un homme de coupe, il nous taille la vie en tranches. Et ça fait mal ✹ j.-M. B.

Le nouvel album d’Emmanuelle Seigner avait tout pour faire un buzz : un titre efficace (Dingue), une compositrice talentueuse (Keren Ann), des arrangements sixties et deux duos improbables avec Iggy Pop (La dernière pluie) et son époux Roman Polanski (Qui êtes-vous ?). Manque de pot, on dirait du sousBardot chez du sous-Gainsbourg. Mené par une sur-voix de lolita, Dingue frise le futile, sinon l’inutile. N’est pas chanteuse qui veut.

sent des malédictions enracinées. Par les femmes d’abord. Grand-mère folle et revêche, mère lointaine et perdue. Par la maladie, ensuite, d’un corps fragile et d’un esprit habitué à la seule rumeur de sa solitude ; l’indifférence de ses parents face à cette fragilité. fiasco des débuts L’adulte qu’il est devenu jette un regard tendre et amèrement amusé du fiasco des débuts. Le ton est vif et rythmé. Les dialogues réduits au silence des murs quiets. On les connaît, ces gamins-là, qui ornent l’imaginaire du malheur d’être mal né : Oliver Twist, Peter Pan ou Le Petit Chose de Daudet. David Small allie cette intelligence, d’avoir porté sur le pessimisme de son enfance l’optimisme de l’art sur la vie. Cicatrisé ! ✹ l. c.

Dingue Emmanuelle Seigner

Scratch My Back Peter Gabriel

Sutures, par David Small, éditions Delcourt, 19,90 euros.

On n’attendait plus grand-chose de l’exleader de Genesis, reconverti dans la pop mainstream, puis aux musiques du monde. Grave erreur. Façon Sinatra, Peter Gabriel s’improvise crooner de charme sur Scratch My Back. Il revisite l’histoire

du rock en douze reprises magnifiques, du Heroes de Bowie au Street Spirit de Radiodead, du Philadelphia de Neil Young au My Body Is A Cage d’Arcade Fire… Mené par un orchestre classique, ce disque serait le premier d’une série en devenir. Acolyte Delphic

Fan de la première heure de New Order, tu te sens seul et vieux ? Écoute Delphic et ça ira mieux. Ce jeune trio n’est pas né à Manchester pour des prunes… Son premier album Acolyte compulse les références au must de l’électro-pop anglaise des années 80. Celle-là même qui traça le sillon des raves. Rythmiques électroniques, basse du diable, guitares cold, synthés dérangés et voix mélancolique, Delphic enchaîne les mélodies parfaites et nous propulse direct sur le dancefloor. Nostalgique et ultra-moderne à la fois ✹ éléonore Colin

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| Un peu de culture

ciné Réalisateur maniaque de La Famille Tenenbaum, le Texan Wes Anderson cisèle un film d’animation loufoque et touchant, peut-être son film le plus personnel. Rencontre avec un des meilleurs cinéastes US du moment.

Fantastic Mr. Fox : le génie 24 fois par seconde

Q

uelle est votre inspiration ? - Enfant, j’adorais inventer des spectacles et écrire des pièces. Plus tard, j’ai eu une caméra Super 8 et j’ai bricolé de petits films. Mon père écrivait des nouvelles et donc avec mes deux frères, nous avons commencé à en écrire, il nous a inspirés. Ma mère a fréquenté une école d’art et elle m’a constamment encouragé à dessiner. À 18 ans, je me suis aperçu que ce qui me plaisait le plus, c’était de tourner des films en Super 8. - Et Roald Dahl, l’auteur de Fan-

tastic Mr. Fox ? - Enfant, j’adorais Roald Dahl. Je crois que Fantastic Mr. Fox est le premier livre que j’ai possédé. C’est un livre simple et court, parfait pour les tout-petits, l’histoire d’un renard, père de famille, qui va retomber dans son ancienne vie de voleur de poules. - Pourquoi avoir adapté Fantastic Mr. Fox ? - J’y pense depuis dix ans. J’avais rencontré la veuve de Roald Dahl avant de tourner La Famille Tenenbaum. Elle nous a même invités, avec mon coscénariste Noah Baumbach, à écrire le

script dans leur maison du Buctoujours du pur Wes Anderkingshire. J’ai toujours voulu le son… réaliser sous la forme d’un film - Quand je réalise un nouveau d’animation traditionnel, en stop film, je veux toujours faire quelmotion (animation image par que chose de différent. Parfois, image, ndlr). J’aime l’énergie, le je m’éloigne de ce que je fais charme, le côté brut de cette techpour tourner des choses différennique. J’avais commencé à trates comme aujourd’hui Fantastic vailler avec Henry Selick, qui a Mr. Fox, ou Darjeeling Limited réalisé les séquences d’animation qui a été filmé en Inde, dans un sous-marine dans La Vie aquatitrain. Mais quoi que je fasse, au que. Je devais collaborer avec lui final, on me dit que cela ressemsur Fantastic ble beaucoup à Mr. Fox, mais il mes films précé« J’aime les films qui était déjà engadents. C’est gé sur Coraline. quelque chose peuvent être drôles - Vous réalisez que je ne peux et sérieux au même des comédies contrôler… dramatiques ou moment », W. Anderson. - Votre casting des drames covo c a l r é u n i t miques ? tous vos amis. - Je ne sais pas. J’aime les films - Il y a de nouveaux venus comqui peuvent être drôles et séme George Clooney ou Meryl rieux exactement au même moStreep. Mais pour moi, le cinéma ment. Moi ce que j’aime, c’est de est un moyen de jouer avec mes créer un moment qui ne ressemamis, Owen Wilson, Jason ble à aucun autre vu dans un Schwartzman, Willem Dafoe ou film. Comment l’interpréter, je encore Bill Murray, mon Marlon ne sais pas. Brando à moi. Ils sont ma fa- Vous êtes un styliste assez obmille de cinéma. J’aime trasessionnel, très maniaque. vailler avec eux, encore et en- Je suis intéressé par tout ce core. J’adore cela. C’est très qu’il y a dans le cadre. Le décor, touchant pour moi ✹ les vêtements, le ciel, les acces marc godin soires sont des opportunités pour inventer quelque chose, ou avoir Fantastic Mr. Fox, de Wes Anderson avec une idée : ce sont des valeurs les voix de George Clooney, Meryl streep, ajoutées au film. Bill Murray, Jason Schwartzman. - Même quand vous mettez en En salles le 17 février. scène un film d’animation, c’est

res. Qui de mieux avisés que certains assassins du journalisme pour nous indiquer comment commettre le crime ? Sur Arte, qui est souvent une grande chaîne, il y a aussi des boutiques, des « franchises » pas très franches. Ainsi, Daniel Leconte est étalagiste-démonstrateur sur la chaîne franco-allemande. Patron d’une boîte de production Doc en Stock, ce garçon semble avoir un bail à vie, qui l’autorise à nous saouler, à nos frais, de ses partisanes certitudes, entre autres contre le Net. vive internet !

Le problème de la harde, qui se bat pour se maintenir à la tête de la meute journalistique, c’est Internet. Avant le Web, ils étaient peinards. Mais voilà que, sur la Toile, des loustics viennent leur faire les cornes dans le dos en criant « Ouh ! Les menteurs ! » Ils n’aiment pas ça. Donc la doxa, comme dirait BHL, est de flinguer Internet. Sauf les sites qui sont le wagon

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Hors de contrôle de Martin Campbell

J’aime beaucoup Mel Gibson et son côté « Fuck you very much » (vous l’avez entendu lancer un « asshole ! » à un journaleux qui voulait lui arracher un énième mea culpa). Après pas mal de problèmes persos et un divorce à 500 millions, « Mad Mel » endosse une nouvelle fois l’uniforme du flic énervé et vengeur. Bon, ce n’est pas vraiment original, mais Mel a de beaux restes et un partenaire exceptionnel en la personne de Ray Winstone. White Lightnin’ de Dominic Murphy

Un biopic du troisième type sur un illustre inconnu, Jesco White, péquenot dégénéré et dieu du tap-dancing. Joué par un acteur dément, le film est un aller simple dans n cerveau malade, cramé par la drogue et la folie. Et la révélation du talent impressionnant du metteur en scène Dominic Murphy qui souligne le déséquilibre du narrateur avec une voix-off obsédante qui contredit l’image. Choc ! Le Mac de Pascal Bourdiaux

Pas de projo de presse pour la nouvelle comédie avec José Garcia. Ça cache quelque chose… From Paris with Love de Pierre Morel

Issu de l’écurie Besson (Luc, pas Éric), Pierre Morel est l’auteur de l’immortel Taken, nanar nauséabond où Liam Neeson tatanait les méchants basanés qui avaient enlevé sa fifille. Dans son nouveau chef-d’œuvre, John Travolta, qui arbore une rutilante boule à zéro, et Jonathan Rhys-Meyers débarquent en banlieue parisienne, cassent du Chinois, explosent des 4x4 au lance-roquettes… Au-delà de la nullité ! ✹

le pipole

les athées de l’info Voir et entendre Elkabbach, mardi 7 février, dans une émission, Main basse sur l’info, s’inquiéter de la crédibilité de la presse, c’est comme assister à une conférence de presse de Madoff sur l’honnêteté. Arte nous a régalés d’une rafale de témoignages, tous tenus par les réputées vertueuses stars de la profession. Sans un seul moment se poser la question : ne serait-il pas que, lassés par des Elkabbach, Leconte ou Jeambar, les consommateurs de médias vont chercher la vérité ailleurs ? Ou bien nulle part parce qu’ils ont perdu la foi, devenus des athées de l’info ? Cette soirée Thema m’a donné l’impression d’être recruteur chez les flics. Vous savez, quand la police engage un faux monnayeur afin de connaître ses secrets ou encore un cambrioleur pour partager son intimité des serru-

en salles

de queue accrochés aux « grands » journaux. Un exemple : osez imaginer, dans l’esprit de ceux-là, cette vraie offense qu’est Bakchich.info ? Elle les fait vomir. Un certain Ted Anspach, dont on ignore tout, a facilement débusqué les sottises d’Internet. Facile puisque la masse d’infos qu’on trouve sur le Web est tellement plus importante que ce que nous donne un édito du Figaro. Il y a donc du déchet, comme dans la patate. Et alors ? Rendu méfiant par la lecture de la « grande presse », le lecteur est mûr pour faire son tri tout seul, sur le Net. Sans plus jamais être guidé par des Elkabbach, Leconte ou Jeambar. Pour vous bien étalonner la vertu de ces deux derniers, sachez que ces grands amis des journalistes sont, depuis près de dix ans, les pionniers d’une campagne de désinformation qui vise à abattre Charles Enderlin, l’exemplaire correspondant de France 2 à Jérusalem… Ça vous donne tout de suite l’épaisseur de ces sépulcres blanchis ✹ J.-M. B.

de la semaine

Patrick Poivre d’Arvor co-signe un livreentretien à sa gloire, où fusent les questions impertinentes : « Qu’aimeriez-vous que l’on retienne de vous ? » « Si vous deviez faire un portrait de vous, quel serait-il ? » Une préface du frangin sert d’apéro au premier chapitre, modestement intitulé « L’audace de la liberté, le courage d’être soi ». L’opus s’appelle Tenir et se tenir, titre inspiré par la devise familiale. Un melon gros comme ça eût également convenu.


Un peu de culture | 15 lard de vivre

Squatte toujours, tu m’intéresses

S

ous la pluie fine qui tombe en silence sur un jardin du XVIIIe arrondissement de Paris, Sara Renaud raccroche son téléphone et esquisse un sourire satisfait. « Ça y est, on a l’accord de principe, ils vont signer ! » Ce coup de fil vient de sceller la survie de son squat d’artiste, le Jardin d’Alice. Installé sans autorisation depuis mars 2009 au 40, rue de la Chapelle, ce collectif de cinq peintres et plasticiens a redonné vie aux deux petites maisons et au jardin de 800 mètres carrés laissés vides depuis plusieurs années et propriété de Paris Habitat, le bailleur de loge-

ments sociaux de la Ville de Paris. En acceptant au dernier moment de signer une convention d’occupation précaire avec les squatteurs, Paris Habitat a retiré sa plainte pour « occupation sans droit ni titre », annulant le procès qui devait se tenir le lendemain matin. précaires Sara n’en est pas à son coup d’essai. Elle était membre de l’association Rivoli59, lorsque le très médiatique squat de l’immeuble du 59, rue de Rivoli a été régularisé. En 2001, en pleine campagne pour les municipales, le candidat Bertrand Delanoë avait apporté son soutien au collectif d’artistes et s’était engagé, s’il était élu, à pérenniser leur occupation. Ouvrant ainsi une nouvelle ère dans les relations entre squats et pouvoirs publics à Paris, qui a mené à la régularisation d’une quinzaine de squats d’artistes, via des conventions d’occupation précaires. Ce document permet aux squatteurs d’éviter l’expulsion en les autorisant à occuper un lieu public destiné à un autre projet, le temps que le dossier soit traité et que les travaux commencent. Mais la convention permet également à la mairie de garder un œil sur les

devenez actionnaire ! tttttttttttttttttttttttt tttttttttttttttttttttttt tttttttttttttttttttttttttttttt Adresse mail tttttttttttttttttttttttt Je soussigné demeurant à

souscris au capital de la SAS « Le Club des amis de Bakchich » constitué à l’effet de regrouper et porter les souscriptions à la SAS Groupe Bakchich. Montant de votre engagement :

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activités de ses locataires encombrants puisque sa signature est soumise à l’approbation d’un projet artistique. Elle sert ainsi à limiter l’implantation des squatteurs : dans la totalité des squats conventionnés, les artistes ont interdiction de loger sur place, et la plupart ne peuvent pas y accueillir de public. Officiellement, la majorité PS a acté au Conseil de Paris la nécessité de multiplier les conventions, mais dans les faits, la plupart des responsables de collectifs se plaignent toujours de l’absence d’un interlocuteur unique et demandent la création d’une structure officielle s’occupant de régulariser les squats. Jean Rolland, le fonctionnaire en charge des squats à la Direction des affaires culturelles de la mairie de Paris, tente, sans succès, de créer cette structure : « Pourquoi ne pas imaginer une association dépositaire de la gestion technique de l’ensemble des squats ? Elle ferait tourner la boutique, récupérerait les loyers et aurait un œil plus fin que nous sur les squats ». obstacles Pour Hervé Morel, secrétaire des Verts à Paris, « il ne doit pas y avoir un seul mètre carré public inutilisé. Il faut absolument que ces espaces soient occupés durant la période entre deux projets. Les conventions d’occupation précaires doivent se multiplier, comme nous l’avons proposé au conseil de Paris en avril 2009. Le Conseil a approuvé à la majorité notre vœu. Mais rien n’a été fait depuis. » Les freins viennent des responsables politiques de la mairie.

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l’humeur du vieux con Comme, dans son élan liber taire, Bakchich expose le drame des « squatteurs artistes », demain ce sera peut-être le si crucial problème des chômeurs qui n’arrivent pas à obtenir un stage de planche à voile à Bonifacio ? Ainsi va l’info. « Squat d’ar tistes », le concept me plaît. Il veut dire que si t’es squatteur, en gros SDF, mais pas « artiste », ton destin c’est les flics. Ah ! Artistes ! Voilà la distinction, comme dirait Bourdieu. Un type qui entasse des rouleaux de PQ, œuvre

majeure qui va nous faire éprouver la douleur du Darfour, c’est pas à négliger. Y a qui, dans ces squats d’artistes ? Des gosses de riches, qui s’emmerdent et veulent pas travailler au McDo pour se payer un loyer. Alors c’est ce démagogue de Delanoë, cet attrape-tout de la mode creuse, qui établit des règles pour que les tagueurs badigeonnent à l’abri. Est-ce que, en 1925, la bande du Bateaulavoir a demandé des sous à Gaston Doumergue ? Est-ce que Basquiat, ce demi-Haïtien, a pris du fric à la mairie de New York ? Eux sont dans les musées ✹ j.-m. B.

Gaspard Gantzer, responsable des squats au cabinet de Christophe Girard, adjoint à la culture au maire de Paris, serait celui qui permettrait la mise en place d’un interlocuteur unique pour les squats et la généralisation des conventions. Il rejette tout en

bloc : « Il n’y aura jamais aucune généralisation de quoi que ce soit. Il faut que ça reste fluide, car trop de structures tue la structure. C’est dans l’ordre des choses que les squats se plaignent du manque de dialogue »… ✹ Aurélien CULAT

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| Ben la Der

bandit(e) Sarah, l’épouse du Premier ministre israélien, défraie la chronique. Retour sur un parcours jalonné d’hystérie domestique, de jalousie et de chantage.

Culture | bakchich pillages confraternels

Sarah Nétanyahou, first lady gaga

L

gretter la douce Sonia Peres, la moitié de Shimon, remplacée par une virago autoritaire sujette à des « troubles du comportement ». Avec un tel pedigree, on imagine mal la présumée hystérique de 51 ans en psychologue pour enfants, à Jérusalem.

autoritaire Mais le véritable crime de cette « Elena Ceausescu », à cette époque, est de tout régenter. Elle détourne les convois officiels à sa guise, contrôle l’agenda de son mari (et de ses collaboratrices), fait et défait les ambassadeurs. Elle ne supporte pas non plus la « dame de fer » du Likoud, Limor Livnat, l’actuelle ministre de la Culture. Pour passer ses nerfs, elle aurait inauguré le lancer de chaussures sur ses assistantes… Et la presse de re-

ingérable Difficile aussi de l’imaginer charmante hôtesse de l’air. C’est pourtant dans cet uniforme qu’elle croise, en 1989, le regard de Nétanyahou alors vice-ministre des Affaires étrangères. Et que son destin prend de l’altitude. Elle se voit en Hillary Clinton israélienne : intelligente, forte, stoïque devant les incartades de son mari volage. Comme Bill, Bibi a fauté, en 1993. L’épouse trahie lui aurait fait signer un contrat : « Je passe l’éponge mais si tu gagnes les élections, je te suivrai comme ton ombre ». En mai 1996, Sarah savoure sa revanche : elle est partout. Mais se verrait bien dans le fauteuil de son mari. Des qualités de meneuse que le quotidien Haaretz lui concède : « Elle ferait une excellente députée si elle cessait d’harceler ses bonnes ». Et encore, s’il n’y avait que son personnel : en 1996, son exmari menace de tout déballer dans un brûlot. Un gros chèque le fera changer d’avis. Depuis la réélection de Benjamin Nétanyahou, en février dernier, l’épouse ingérable se faisait discrète. Finis, les excès… jusqu’à ce que cette nouvelle affaire de bonne lui saute à la figure ✹ Hélène Jaffiol

e 17 janvier 2010, tandis qu’Haïti compte ses morts, Israël examine les bleus de Liliane Peretz, l’ancienne domestique de la « tyrannique » Sarah Nétanyahou. Attaquée pour « harcèlement moral » devant la justice et en « une » des journaux, la « maniaque de la stérilité » aurait fait signer à son ex-bonne un véritable contrat de servage. Sauf que la malmenée s’occupait de la résidence secondaire du couple Nétanyahou, à Césarée… « Comment peut-on être harcelée dans une maison vide ? Le dossier ne tient pas », constate Michaël Blum, de l’AFP à Jérusalem. D’aucuns dénoncent une cabale de la presse de gauche. Pour les autres, pas de fumée sans feu. Toujours est-il que les soucis « domestiques » des Nétanyahou nourrissent le ventre médiatique israélien. En juillet 1996, déjà, c’est l’affaire de la soupe trop chaude. La troisième femme de Bibi jette à la rue sa baby-sitter – elle aurait raté le festin des deux petits héritiers.

Loppsi, la loi qui modernise la police

Tyranneau de Bergerac ?

Priorité à la culture présidentielle : en sus, notamment, d’un exemplaire de Belle du Seigneur « dédicacé par son auteur (Albert Cohen) à un médecin », Sarko, pour ses cinquante-cinq ans, a reçu de ses proches (famille et conseillers réunis), « une édition originale de Cyrano de Bergerac agrémentée d’une carte signée d’Edmond Rostand » (le Nouvel Obs, 4/11). Le Cyrano de Rostand, c’est bien celui qui dit : « Moi, c’est moralement que j’ai mes élégances » ?

Otan en emporte…

C’est pas donné-donné, cette petite guerre d’Afghanistan ! Jusqu’à une date très récente, rapporte le Monde ( 6/12), les 28 États membres – dont des représentants se sont réunis la semaine dernière à Istanbul – « attendaient (dans cette onéreuse – et sanglante – histoire) un dérapage financier de 545 millions d’euros sur les cinq prochaines années ». Il va être de « plus de 640 millions pour la seule année 2010 » ! Dans ces éprouvantes conditions, le commandant des forces de l’Alliance atlantique déployées sur le terrain, le général US Stanley McChrystal, manifeste un optimisme relatif : « Je pensais l’été dernier que la situation se détériorait en Afghanistan, mais je sens les choses différemment maintenant (...) Je crois que nous avons fait des progrès significatifs ». Et surtout des économies substantielles…

Comme une l’Yonne

C’est à Paron, commune des environs de Sens (Yonne) que l’infatigable et plus que jamais entreprenante Rachida Dati a animé un débat, un des derniers débats, sur l’identité nationale (350 participants). Notre amie l’a joué très mérite républicain (Libération, 9/02) : « On peut avoir des origines et des tempéraments différents, mais on est tous sur la ligne de départ et on vibre tous à la Marseillaise (...) C’est comme ça que j’ai pu aller à l’école, à l’université, et que je suis devenue Garde des Sceaux ». Rachida est devenue ministre de la Justice parce quelle avait gagné à un concours de chant national ?

Infos sur le revenu

Le nouveau patron d’EDF, Henri Proglio (1,6 million d’euros de salaire annuel) a donc renoncé, ou plutôt, a été amené à renoncer aux émoluments prévus en rab’ (450 000 euros sur la même période) pour la « présidence non-exécutive » – qu’il occupe toujours – de son ancien groupe Veolia Environnement. Une polémique qui a fait, comme on a remarqué, du bruit. « Un débat surréaliste par rapport à la réalité », s’attriste, dans le Parisien (8/02), son successeur à la direction générale de la maison « poubelles et assainissement », Antoine Frérot, lequel poursuit, et on en frémit : « Quand on déstabilise cette

Bakchich Hebdo | du samedi 13 au vendredi 19 février 2010

société, on inquiète 330 000 salariés, dont 110 000 en France ». La voilà, l’image que nous ont cachée les télés : celle de salariés déprimés de Veolia, la mine défaite, hagarde, le dos rond, inaptes à la production parce qu’on voulait empêcher leur ancien patron de toucher, au total, deux millions sur douze mois.

Tasse d’identité

Comme de juste, le ministre Besson a voulu faire bonne figure après le camouflet de Fillon et l’annonce de dérisoires mesurettes au rayon identité nationale. Éric l’a dit sur son blog ministériel, reproduit par Libération (9/02) : « À titre personnel (sic), je suis heureux et fier d’avoir porté ce débat public », aujourd’hui au moins « suspendu » donc. Pour le bonheur total de l’éminence, il faut espérer que tout ce mic-mac ne crée pas à ce transfuge socialiste devenu un sarkozyste malmené des problèmes… d’identité.

Grand Chambordement

Dit « le tonton flingueur » de l’Élysée pour sa langue très déliée, Pierre Charon, tout à la fois très proche conseiller et grand pote de Sarko, use de deux armes, raconte l‘Express (4/02), pour se faire des obligés et, disons, ménager des susceptibilités adverses : les décorations qu’il distribue à foison, mais, il l’espère en tout cas, judicieusement attribuées, et les invitations aux chasses du « domaine national de Chambord » (il en préside le conseil d’administration). « Autour d’une battue », détaille l’hebdo, peuvent se retrouver (...) Michel Charasse », « le sage », pour quelques jours encore, du Conseil constitutionnel, décidément fâché avec le devoir de réserve Pierre Joxe, et « des chiraquiens et même des villepinistes ». « Les Tutsi et les Hutus sont là », blague Charon. À ceci près qu’on ne les invite pas pour qu’ils se livrent ensuite à un sarkozycide…

Ouest transes

L’Express (4/02) brosse aussi le portrait de François-Régis Hutin, 80 ans, patron du premier quotidien (pour la diffusion) français, on a nommé Ouest-France (pratiquement 800 000 exemplaires journaliers). L’hebdomadaire remarque à cette occasion que, par le fait de son expansion ou à la suite de divers rachats de circonstance, ce journal se retrouve quasi sans concurrent – hormis les trois départements couverts par le Télégramme de Brest – dans sa zone d’influence du Grand Ouest : « En langage Hutin, cela s’appelle le pluralisme atténué ». C’est en effet une merveilleuse expression et qui vaut mieux que « quasi-monopole ». Sûr qu’à l’échelon national, question « médias », le si susceptible Sarko se satisferait très bien d’un « pluralisme atténué » ✹

aurélien donat


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