Les arnaques des garagistes | P. 11
bakchich
N° 24 | du sameDI 15 au vendredi 21 mai 2010 | informations, enquêtes et mauvais esprit
monaco le prince poursuivi
par son ancien barbouze page 5
tremblay
Sarko caillasse les chauffeurs de bus | P. 2 Pichon, un flic contre hortefeux | P. 3 Le policier qui avait dénoncé le Stic dans Bakchich, en 2008, traîne le ministre de l’Intérieur devant le tribunal, le 18 mai. Entretien.
bédéreportage
Grenoble vent debout contre la rocade | P. 6-7 agriculteurs
Bruxelles engraisse les gros | P. 9
L 13723 - 24 - F: 1,50
cannes
Bel : 2€ - CH : 2,90FS
Sexe, drogue et parfois … des films | P. 14 Et sur Internet
Apéro partie de campagne
le charme est rompu S
dsk le sauveur trop annonce
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n 2012, Dominique Strauss-Kahn dirigera la France. Du moins, les sondages le proclament, notamment ceux qui sont publiés dans la presse de son ami Arnaud Lagardère. Dans la foulée, nos confrères prédisent à l’ancien responsable de la Mnef un bel avenir. Son programme ? Il existe désormais, les Grecs l’ont découvert. C’est celui que le patron du FMI vient de concocter avec son camarade Papandréou : du sang, des larmes et rien qui ressemble, de près ou de loin, à une vision social-démocrate et redistributive de l’avenir de nos sociétés européennes. Mais DSK le présidentiable s’appuie aussi sur des experts parisiens. L’un d’eux, qui mérite d’être connu, s’appelle Olivier Ferrand. Ce technocrate « de gauche », forcément de gauche, préside Terra Nova, un machin autoproclamé comme une « boîte à idées du PS », où Michel Roccard, entre deux missions pour l’Élysée, est hébergé. En réalité, Terra Nova est la clé à molette de DSK. Pour « sauver la dette française », ce think-tank propose de taxer les retraités. C’est dans les maisons de retraite, entre les fauteuils roulants et les déambulateurs, que se cache l’argent de la France. Et pas dans les paradis fiscaux ou dans les poches de son ami Lagardère. Les commensaux de Strauss-Kahn sont déjà en campagne. Un brûlot anonyme sur la vraie nature de DSK est publié chez Plon ? Les poids lourds d’Euro RSCG se procurent le manuscrit, réputé scandaleux, et rédigent un mode d’emploi destiné aux journalistes. Pour incarner une France fracassée par la crise, il faudra à notre DSK plus qu’un vade mecum ✹ la rédaction
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les trophéEs Le (re)virement de la semaine
Pour récupérer son prêt, le Premier ministre grec Georges Papandréou a compris la leçon : austérité d’abord ! Ce serait oublier que ce grand manitou de l’Internationale socialiste, au plus fort de la crise de 2008, tapait sur les prêteurs : « La facilité en matière de liquidités… devrait être fournie sans les sévères conditions si souvent imposées dans le passé. » Une idéologie peu en phase avec son nouveau discours.
L’oublié de la semaine
L’État va se réengager pour aider les collectivités à construire des voies de bus... et à les sécuriser.
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Nicolas Sarkozy, lors de la présentation de son plan espoir banlieue, le 8 février 2008.
Depuis l’attentat manqué du 1er mai à New York, chacun sait que Faisal Shahzad, le terroriste présumé, est musulman. Mais le citoyen qui a permis d’éviter le massacre était un immigré sénégalais, musulman aussi. Le Times rapporte que le vendeur de rue, Aliou Niasse, a demandé à Lance Orton, un autre marchand qui se tenait à proximité, de prévenir un agent du danger imminent, car il ne parlait pas bien l’anglais. Le policier et Orton ont été chaleureusement félicités par le maire de New York, Michael Bloomberg. Qui a oublié Niasse. Un héros musulman, ça doit faire tache.
Le business de la semaine
coup de boule
tremblay, chauffeurs ! S
i, si, Sarkozy donne de la hauteur à la fonction présidentielle. De premier flic de France, stature acquise à l’Intérieur, le squatteur de l’Élysée a évolué vers chef des armées. Et s’échine à motiver les conducteurs de bus qui naviguent dans les banlieues hautement chauffées par les descentes de police ces derniers temps. Façon poilu dans les tranchées en 1914.
chemin des dames
Lors de son passage dans les dépôts du CIF (Courriers d’Ile-deFrance), le 20 avril dernier, loin des caméras et des journalistes, Sarko Ier leur a gentiment exposé sa vision des choses. « Je ne suis pas là pour faire du social », a tonné le président en guerre contre les petits trafiquants de banlieue. Et tant pis pour la piétaille des conducteurs de bus. Des tirs de flash ball frappent les bus ? « Ce doit être des balles de tennis », a souri le nouveau préfet de SeineSaint-Denis, Christian Lambert. Et tant pis pour les guets-apens
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qui s’enchaînent : le 1er mai sur la ligne 39 du CIF ; le 5 mai sur le trajet 31 ; le 9 mai, une conductrice agressée à Aulnay-sous-bois ; le 10 mai un autre caillassage sur la ligne 39 après l’affrontement entre une soixantaine de jeunes et la police dans le quartier des Mousseaux, à Villepinte et le 11 mai, un conducteur de la ligne 15 attaqué et hospitalisé. Les banlieues comme un nouveau Chemin des dames. Et gare aux déserteurs ! La direction des bus d’Ile-deFrance chouine dès lors que les conducteurs aménagent les trajets pour éviter les coins chauds. En l’occurrence les gares de Sevran, Tremblay ou Aulnay. Quant au préfet de Seine-Saint-Denis, son discours est martial. « Si on ne respecte pas les trajets normaux, Christian Lambert menace de ne pas sécuriser les itinéraires », décrit un syndicaliste du CIF. Des sacrifiés qui ont fait gagner la Grande Guerre à Pétain. Et les élections de 2012 à Sarko ?✹ alceste
Bakchich Hebdo N°24 | du vendredi 14 au vendredi 21 mai 2010
coulisses
Les facétieux volcans islandais comme Eyjafjöll font le bonheur des bookmakers qui spéculent sur les explosions. Le pari en vogue porte sur l’éruption de son voisin Katla, cinq fois plus grand. En faillite, mais pas fous, les Islandais se sont mis à vendre des cendres censées provenir de l’Eyjafjöll. Des givrés payent 50 euros les 160 grammes sur Ebay. Livraison par avion ?
La gaffe de la semaine
Rédacteur en chef de l’Express, Renaud Revel publie sur son site une lettre envoyée par Zahia D. au sélectionneur. La célèbre prostituée demande à Raymond D. de laisser les joueurs qu’elle aurait côtoyés tâter les gazons sud-africains. Enthousiaste, le plaisant rédacteur de l’Express a d’abord omis de retirer l’en-tête de la lettre. Chacun a pu, pendant un temps, noter l’adresse de Zahia D. Ses voisins vont entendre des bruits de porte ✹
Mot à Mot
Vous voulez savoir ce que c’est qu’un hedge fund ? Eh bien voici, tirée d’un lexique de la finance, une définition lumineuse : « “To hedge“ signifie “couvrir une position en prenant une autre position symétrique“. » Donc, dans le Kamasutra de la finance internationale, le hedge fund est un système qui vous permet de vous faire avoir des deux côtés à la fois, puisqu’il autorise à jouer gagnant, à la baisse et à la hausse en même temps. Comment il fait ? Demandez au fiston,
il a des cours d’éco à l’école, où on lui apprend que le marché se régule tout seul, et autres conneries. Vous savez maintenant pourquoi vous avez mal et envie de gerber comme tout le monde sur les spéculateurs, ces salopards qui veulent niquer la Grèce (des deux côtés, évidemment) et ont fait fort puisque, en trayant les Européens, ils empochent notre flouse. Mais c’est quoi, un spéculateur ? Eh bien, c’est comme l’enfer chez Sartre : les spéculateurs, c’est les autres. C’est ce que disait à la télé un cador de chez Montségur Finances, boîte qui, avec un nom pareil, doit rassembler des Cathares, des purs de chez pursoupe qui honnissent les spéculateurs et vivent eux-mêmes d’on ne sait quoi, peut-être du commerce équitable des râpes à fromage pour aveugles (en jargon boursier
téphane Richard traîne une réputation de séducteur dans le milieu politico-patronal parisien. Même Christine Lagarde, dont il a dirigé le cabinet à Bercy, le surnommait « le beau Stéphane ». Mais notre ami, qui a travaillé avec DSK et qui est « à tu et à toi » avec Super Sarko, n’a apparemment pas réussi à séduire France Télécom. Propulsé à la tête de l’opérateur en remplacement de Didier Lombard, il s’est fait fort de ramener la paix sociale en supprimant tous les programmes qui pouvaient mettre le personnel sous pression et en mettant en place des primes. Toujours soucieux de son image, il n’a pas non plus viré les proches de Lombard, attendant tout dernièrement pour annoncer que le secrétaire général, Jean-Yves Larrouturou, partirait dans les prochains mois. Mieux, il a fait entrer au comité exécutif trois personnalités politiques et médiatiques (Christine Albanel, Pierre Louette et Bruno Mettling), alors qu’on attendait plutôt des prises du côté du mobile et d’Internet. Inutile de dire que Stéphane Richard n’a pas convaincu. Depuis son arrivée comme numéro deux, mais numéro un de fait, le 1er septembre dernier, le cours de Bourse est en baisse de plus de 7 %. Le chiffre d’affaires auprès des particuliers est en baisse de 3 % au premier trimestre et la part de marché dans l’Internet est en recul. Pis, les suicides continuent. Après les trente-cinq recensés en 2008 et 2009, les syndicats en avancent au moins douze depuis le début de l’année. Certains proches de l’Élysée s’inquiètent et se demandent si Super Sarko ne va pas encourir le reproche de nommer des amis sans même se soucier de savoir s’ils sont capables de gérer. Un procès qui n’a pas lieu d’être car notre vibrionnant président a toujours privilégié la compétence à l’amitié ✹ gari john
honnête, « finances » veut dire : « râpe à fromage ») ? Certes, tout cela était clairement exprimé dans les prospectus de vente du traité de Maastricht et de la tombola de Lisbonne, et on doit conclure que ceux qui ont voté « non » savaient lire (les autres savaient gober), même si on les a traités d’infâmes blaireaux sans burnes qui spéculaient sur l’échec de l’usine à gaz à 27 tuyaux de pipe. Résultat : si, telle Jeanne d’Arc, l’Europe est paniquée, c’est bien la seule, avec tous ses membres qui s’agitent dans notre dos… Bon, arrêtons de spéculer sur la spéculation des spéculateurs, et percolons sur la percolation des percolateurs. ça ne veut rien dire non plus mais, au moins, ça fait le café ✹
jacques gaillard
Apéro
Le commandant pichon contre hortefeux
interview Viré pour avoir livré à Bakchich deux fiches Stic, puis réintégré, le commandant Pichon a porté plainte contre l’Intérieur, qui l’a laissé sans affectation. Verdict le 18 mai. Bakchich Hebdo : Cher Philippe, on se tutoie ? Philippe Pichon : Difficile de faire autrement après tant d’années de combats communs, notamment lors de notre croisade, en octobre 2008, pour la transparence du Stic, ce fichier policier qui recense, sans réel contrôle, 34 millions de Français victimes ou supposés délinquants. B. H. : Nicolas Sarkozy, qui s’inquiétait déjà de ta médiatisation lors de la publication de ton livre, le Journal d’un flic (lire cidessous), est servi. Te voilà à nouveau sous les feux de la rampe médiatique. Le 18 mai, le tribunal de grande instance rend un jugement après ta plainte contre Brice Hortefeux. P. P. : Avec l’aide d ’ u n avo c a t talentueux et tenace, William Bourdon, nous avons réussi à casser la décision du ministère de l’Intérieur, qui m’avait mis à la retraite d’office. à mon g rand re g ret, l’ensemble des représentants syndicaux présents avaient vo t é p o u r mon exclusion de la police, lors du conseil de discipline. J’ai été réintégré, malgré eux, au printemps 2009. Mais depuis, rien. Je ne suis affecté nulle part, condamné à ne rien faire.
B. H. : Quel effet cela fait-il de se grave, un certain nombre de mes retrouver en garde à vue ? collègues, en lien avec des boîtes P. P. : Les quarante-huit heures de de renseignements privées, vengarde à vue, plus les dix heures dent quotidiennement ces fiches. passées dans la « souricière » au C’est ce que, dans notre jargon, on appelle « la Palais de jus« Servir l’intérêt public et tricoche ». Surtice, sont faites pour humilier tout, des responnon la hiérarchie », et casser : deux sables policiers déclare Philippe Pichon. fouilles au corps, distillent des convocation de renseignements ma compagne et pressions sur elle, à leurs interlocuteurs politiques fuites du parquet à l’AFP laissant pour se faire valoir. Quand ils entendre que j’avais touché des n’inscrivent pas les opposants sur bakchichs… de Bakchich. le Stic, comme je l’ai vu faire à CouEt encore, j’ai eu la chance qu’un lommiers lorsque l’UMP Guy Drut gardien de la paix m’ait reconnu était maire de la ville. et placé dans la cellule avec B. H. : Dans quelles conditions douche réservée aux avez-vous livré les fiches Stic à VIP, celle qu’avait Bakchich ? occupée Bernard P. P. : (Sourire) Il valait mieux Tapie. Bakchich que Gala, non ? Mais je B. H. : La brutan’ai averti la presse qu’après avoir lité de la réaction tout tenté en interne. Dès 2007, j’ai de la hiérarchie pondu un rapport à la demande policière paraît de ma hiérarchie, inquiète des surprenante, au vu enquêtes à venir de la Cnil [Comde l’usage indélicat qui mission nationale de l’informaest fait, chaque jour, des tique et des libertés, ndlr], sur la situation du Stic. Le 24 avril 2008, fiches Stic. P. P. : « Indélicat », c’est peu j’alerte ma hiérarchie, qui répond : dire. Rien que pour les « Votre obligation de réserve ne fiches de Johnny Hallyday laisse pas entièrement intacte votre liberté d’expression. » et de Djamel Debbouze, ils ont été respectivement 543 B. H. : Cette fois, en tout cas, tout et 617 policiers à y jeter un prouve que tu n’as pas obéi à ton œil. Ce sont des dizaines chef. de consultations, du P.P. : Le fonctionnaire de police fichier de Vanessa doit servir l’intérêt public, même Paradis à celui s’il doit enfreindre des consignes de Jean-Paul hiérarchiques qui desservent Belmondo, l’ordre républicain ✹ q u i f u re n t Propos recueillis par Nicolas Beau même constatées sur l’ordinateur d’une collègue www.bakchich.info d’Angoulême. « Je Tous fichés dans le Stic, même cherchais à tuer les copains de Super Sarko : l’ennui », a-t-elle expliqué aux http://minu.me/2csh enquêteurs. Plus
Dans le collimateur de Sarko j Avant l’affaire du Stic, le comman-
dant Philippe Pichon s’était déjà fait remarquer par la hiérarchie policière. En effet, cet officier a publié, en mars 2007, soit peu de temps avant l’élection présidentielle, un livre, le Journal d’un flic, qui fait le bilan de la politique sécuritaire menée par le ministre de l’Intérieur de l’époque, un certain Nicolas Sarkozy, candidat à la présidentielle. Dès le 4 décembre 2006, ce dernier fait procéder à l’examen approfondi du dossier du commandant Pichon et s’inquiète, dans une lettre à l’attention du directeur central de la sécurité publique, du projet de cet « officier atypique », qui verra tout de même le jour ✹
chef scoop Le mauvais procès fait à Sarko
Dans un livre très médiatisé, relayé dans Libération par le journaliste Guillaume Dasquié, qui fut payé dans une vie antérieure par les barbouzes de la direction des constructions navales (DCN), deux confrères de Mediapart, Fabrice Arfi et Fabrice Lhomme, prétendent que l’attentat de Karachi de 2002, qui a coûté la vie à onze Français, mettrait en cause la campagne d’Édouard Balladur… en 1994. Le scénario qu’ils mettent grossièrement en scène fait un amalgame grave entre le financement de la présidentielle de 1995 et l’attentat sept ans après. « Une fable », avait pourtant déclaré à Bakchich l’ancien patron du parquet antiterroriste, le magistrat socialiste Michel Debacq, en charge du dossier de l’attentat en 2002. Certes, tous les politiques français ont puisé dans les caisses noires de la DCN pour financer leurs campagnes. Qu’il s’agisse des chiraquiens, des socialistes et, il est vrai, des balladuriens. Dès l’été 2008, Bakchich exhumait le contrat liant, en 1994, la DCN et un intermédiaire très sarkozyste, Ziad Takkiedine. Mais c’est Chirac, élu en 1995, qui récupère le reliquat des commissions de Takkiedine, à qui il envoie un émissaire musclé. Lui encore qui décide, en 2001, de mettre fin aux commissions versées dans le cadre de la vente des sous-marins au Pakistan. Durant la cohabitation, et en plein accord avec le ministre socialiste de la Défense, Alain Richard, Chirac pilote d’autres dossiers sensibles de la DCN, comme celui de la vente d’autres sous-marins à l’Indonésie ou au Chili ✹ n. B.
HSBC, cherchez la femme
Procédure pénible
La réforme de la procédure pénale ne remue plus. Enterrée en raison du gros temps social qui s’annonce ? « Non, repoussée, promet le cabinet de la ministre Michèle Alliot-Marie, cette réforme est nécessaire. » Mais guère urgente, donc. Même la commission justice du Parti socialiste ne se réunit plus pour parler du sujet. C’est dire…
Bompard-tenaire
TF1, la première chaîne d’Europe, attend la nomination d’Alexandre Bompard à France Télévisions avec amusement… et envie. « Carolis s’est cru investi d’une mission divine et snobait tous les patrons de chaîne privée, raille un ponte de la tour Bouygues. Au moins, Alexandre Bompard vient du privé. » Il est toujours plus aisé de discuter entre familiers…
Les bons comptes des Sages
La validation des comptes de campagne de Balladur en 1995 fait encore se bidonner ses anciens gros bras. « 800 000 euros en liquide pour le meeting du Bourget et le Conseil constitutionnel n’a pas moufté », rigole encore une vieille barbouze. Dommage que nombres d’anciennes « connaissances » de Ballamou soient passées de vie à trépas… dont Hubert Bassot, ancienne figure d’extrême droite. Tant de secrets emportés avant que les enquêtes soient déclenchées. Et que les soupçons de rétro-commissions resurgissent…
Bussereau se réveille
Au prochain nuage de cendres volcaniques, tous les avions seront cloués au sol. Même ceux des riches. Le 27 avril, notre sous-ministre des Transports Dominique Bussereau a pondu une consigne « pour les aéronefs ayant volé dans des zones suspectées de contamination par des cendres volcaniques », transmise à la direction générale de l’aviation civile (DGAC). Le ministre a du lire Bakchich...qui révélait le 24 avril que nombre de jets privés avaient volé malgré le nuage islandais.
Georgina Mikhael, complice présumée d’Hervé Falciani, l’informaticien de la banque HSBC, a enfin répondu à la convocation de la justice suisse. En chargeant particulièrement son comparse, affirmant qu’elle n’était pas au courant que ce dernier avait obtenu illégalement 127 000 noms de titulaires de comptes de la banque à Genève. Un butin qui fait trembler bien des services de renseignements…
Plainte sauce turquoise
Une nouvelle information judiciaire pour « viols, tentatives de viol et violence et enlèvement de personne suivi de disparition » a été ouverte à la demande de Rwandais, le 2 avril au tribunal des armées de Paris, à l’encontre de soldats français de l’opération Turquoise, envoyés au pays des mille collines en 1994. Les bidasses tricolores ont-ils porté trop haut les couleurs ?
Droit de réponse
À la suite de la publication dans le numéro du 24 au 29 avril 2010, page 16, d’un portrait de Gérard Lhéritier, nous avons reçu de celui-ci la lettre suivante : « Concernant l’affaire que vous évoquez sous l’intertitre “Escroc”, le tribunal correctionnel de Nice m’a non seulement relaxé le 24 juin 2005 des fins de la poursuite pour abus de confiance (et non pas pour escroquerie, comme indiqué par erreur dans votre article), mais a aussi brocardé l’ordonnance de renvoi prise après une instruction de près de dix ans dont il a déploré la lenteur excessive, tout en reconnaissant, fait particulièrement inhabituel, qu’un “tel dossier ne [pouvait] que générer de nombreux regrets”. L’activité de la société Aristophil est précisément l’achat, l’expertise et la vente de lettres, livres et manuscrits, et ses comptes sont publiés chaque année depuis 2004, après contrôle d’un cabinet de commissaires aux comptes. Ses acquisitions, dont celle du Manifeste du surréalisme, en 2008, que vous évoquez, sont réalisées grâce aux concours de banques et à une gestion rigoureuse de ses fonds propres. » Décidément amateur de lettres, Gérard Lhéritier, mis en examen pour « escroquerie » en 1996, a effectivement vu les faits requalifiés et a été blanchi. Il était donc malvenu de qualifier d’ « escroc » ce défenseur du patrimoine français ✹
du vendredi 14 au vendredi 21 mai 2010 | Bakchich Hebdo N°24
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Apéro dommage collatéral
grèce
le fisc s’agenouille devant les pères
E
n Grèce, les monastères et églises métropolites regorgent d’or, souvent bien mal acquis. Mont Athos, curiosité institutionnelle abritant 20 monastères autogérés, est placé sous la juridiction du ministère des Affaires étrangères grec et du patriarcat œcuménique de Constantinople. Rien que dans la ville d’Athènes, ils sont propriétaires de 350 biens, des murs du ministère de l’Éducation à des parkings sous-terrains. Résultat : 19 millions d’euros engrangés en 2008, immédiatement réinvestis en Bourse. En 2004, l’État grec avait
fait don au monastère du mont deux biens n’étaient pas de même Athos de plusieurs pavillons du valeur. Le père Ephraïm, chef de village olympique. Pour mémoire, Vatopedi, roula ses interlocuteurs les JO avaient coûté cinq points dans la farine, aidé de quelques de PIB à la Grèce en 2004 et sont à chers amis dans la place : l’ancien l’origine du dérapage des comptes porte-parole du gouvernement publics. Peu Theodore Rouspatriotes, les sopoulos ou 700 millions d’euros de m o i n e s, q u i encore l’épouse avaient promis cash disponibles : l’Église de l’ex-ministre de faire de ces de la Marine grecque est richissime. pavillons des marchande. monastères, les Résultat des courses : l’Église grecque est simrevendirent illico à un consortium américain. plement richissime. Des dizaines de milliers d’hectares, 700 milQuant au monastère de Vatopedi, l’un des plus célèbres, il est lions d’euros de cash disponibles dans les caisses de son « service impliqué dans plusieurs scanéconomique », 6 200 comptes dales immobiliers, le dernier concernant un échange de terouverts partout dans le monde, rains avec l’État. Petit souci, les qui abritent des montants gardés bien secrets… Mais voilà, les braves popes rechignent à payer l’impôt. Acculé, le gouvernement s’était, en mars dernier, résolu à les imposer. Bien mal lui en a pris. Hiéronyme II d’Athènes, primat chargé de présider le saint-synode de l’Église de Grèce (77 évêchés), a opposé une fin de non-recevoir à sa « feuille d’impôts » envoyée par le gouvernement. Et le gouvernement a dû reculer. Jusqu’à renoncer même à taxer les cierges. Dieu est audessus du fisc ✹ Renaud Chenu
bab’ el web
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spécial canne Le cinéma d’Hadopi
Le festival de Cannes est toujours l’occasion de pousser un cri sur « l’industrie du cinéma en péril », et de vanter la loi antipiratage. Manque de bol, selon une nouvelle étude de Médiamétrie, les Français qui téléchargent illégalement des films se rendraient plus souvent au cinéma qu’avant. Pour la première fois depuis vingt-huit ans, plus de 200 millions de personnes se sont déplacées dans les salles obscures, l’an dernier. Ce qui n’empêche pas Hadopi de taper l’amende à 1 500 euros.
Orwell come
Loin des flonflons de la Croisette, les Big Brother Awards fêtent leurs dix ans en créant un prix spécial pour « récompenser » les atteintes à la vie privée d’Internet. Parmi les nommés, on retrouve évidemment Google et sa « vision très personnelle du droit à la vie privée », selon les organisateurs, ou encore Facebook… et vous ! Explication : « Plus ça va, plus Facebook (…) partage à tout-va les données qui y sont postées… avec la collaboration active de ses utilisateurs, son principal carburant. » Enfin un prix qui sauve la face.
À la question sur le mot tabou « rigueur », quelle réponse n’a pas été formulée par un responsable de l’UMP ? A. « Vous avez dit rigueur ? » B. « En langage économique, ça veut dire (…) une augmentation généralisée des impôts. » C. « Je m’en contrefous. » D. « Appelons ça la cueillette des olives. » Réponse : Aucune. La première vient d’Alain Juppé, la seconde de Frédéric Lefebvre, la troisième de François Fillon et la dernière de Jean-François Coppé.
Les popes multimillionnaires pourraient soulager la dette grecque. À condition de payer leurs impôts.
moment de flottement
Jack a dit
Mécontent de la projection de Draquila, un documentaire consacré aux folies de Berlusconi, le ministre de la Culture italien, Sandro Bondi, boude Cannes. Ce petit vexé nous donne l’occasion de tester l’image du grand expansif Jack Lang. En citant sa réaction à ce boycott italien, une « position puérile, infantile et capricieuse », plusieurs sites étrangers, dont celui de Liberazione ou le prestigieux Artinfo.com, présentent Jack comme le ministre de la Culture français. D’autres, comme the Telegraph, lui décernent le titre d’« envoyé spécial de Sarkozy en outre-mer ». Nicolas est un Jack pote ✹
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Bakchich Hebdo N°24 | du vendredi 14 au vendredi 21 mai 2010
Les yeux de Drucker
Vie privée, vie publique
L’info. « La vie privée ne nous intéresse plus », Bernard Squarcini, patron de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), Envoyé spécial, 6 mai. Le décryptage. À l’occasion d’un reportage au cœur de la DCRI, les équipes de France 2 ont pu pénétrer dans l’une des enceintes les plus secrètes de la République : le contre-espionnage. Pour l’occasion, Bernard Squarcini, le patron, s’est fendu de quelques déclarations aux micros des journalistes, comme celle-ci, sur la vie privée. Envoyé spécial n’a rien trouvé à redire. Au hasard, que « la vie privée n’intéresse plus les services », sauf quand il s’agit de celle de Nicolas Sarkozy. Ce dernier, quand monte la rumeur, n’hésitant pas à diligenter des enquêtes, aux frais de l’État, pour en connaître l’origine.
Villepin au Château
L’info. « Dominique de Villepin salue le plan d’urgence », AFP, 11 mai. Le décryptage. L’information n’a pas fait la une, mais le flamboyant Dominique de Villepin s’est rendu en banlieue le 10 mai dernier… À Vincennes, dans le Val-de-Marne. Pas franchement une bourgade où l’on caillasse des bus. Tout à son affaire de relance du club qui porte son nom, Dominique de Villepin s’est fendu d’une petite visite auprès de quelques élèves du lycée HectorBerlioz. Un tour à l’initiative d’un professeur de l’établissement, lui-même membre du Club Villepin. L’occasion aussi, pour l’ancien Premier ministre, de venir chasser sur les terres de Laurent Lafon, maire Nouveau centre de la ville. Tayaut !
L’info. « Les premiers grands prix des quotidiens nationaux ont récompensé l’Actu et l’IHT », AFP, 9 mai. Le décryptage. Ce nouveau prix, dont la corporation des journalistes a le secret, présidé par Michel Drucker (il est interdit de rire), a aussi récompensé le Parisien pour son « grand reportage » sur « Les autres visages de la banlieue ». « Ces prix avaient pour objectif de mettre en avant ce que la presse quotidienne nationale apporte à l’information », explique l’AFP. Un reportage positif sur les banlieues, voilà qui ne devait pas échapper à la vigilance de l’animateur de Vivement dimanche. Pourtant, dès le 11 mai, les garnements du Parisien, une fois la récompense posée sur leur cheminée, reprenaient leurs vilaines habitudes et titraient, dans la nuance : « Agressions dans les cités : ils travaillent la peur au ventre ». Michel remets ta capuche !
Le canoë Khayat de « l’Obs »
L’info. « Le vrai régime anticancer », le Nouvel Observateur, 6 mai. Le décryptage. L’hebdo consacre sa une aux « révélations » sanitaires contenues dans le dernier ouvrage du cancérologue David Khayat. Il fallait lire l’Express sorti le 6 mai pour lire un portrait plus nuancé de cet homme de réseaux, plus porté sur la politique que sur la médecine. On apprenait, par exemple, dans la bouche du professeur Philippe Even, responsable des enquêtes de l’Institut Necker sur les chercheurs français, que sur les vingt dernières années seuls 36 articles scientifiques ont été signés de Khayat. « Et aucun n’a changé l’approche thérapeutique ou le traitement d’un cancer. » Métastase qui relativise la portée du message délivré par le cancérologue star. Bien aidé en cela par le Nouvel Observateur qui, ces cinq dernières années, a consacré pas moins de 19 articles le mentionnant positivement. étonnamment, ce dernier n’a pas souhaité rencontrer les journalistes de l’Express lors de leur enquête ✹
Filouteries caillou Albert II refuse de payer l’ardoise de 40 000 euros que lui réclame son ex-barbouze. Résultat, un procès prévu le 14 juin qui risque de lui coûter très cher en révélations scandaleuses, de la mafia italienne à sa fille cachée… Du lourd en perspective.
Monaco, grand prix du scandale
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âle ambiance sur le Robert Eringer. Recruté en 2002 manipuler afin d’aider le crime Rocher. Le Grand par l’Altesse monégasque qui vouorganisé italien à importer clanPrix de Monaco va lait y voir un peu plus clair dans destinement à Monaco des fonds et des œuvres d’art. » Pour ne bien faire ronronner les affaires des courtisans qui grales rues du Caillou, vitaient autour de la famille prinpas griller sa source à Moscou, ce week-end d’Ascière, l’ancien employé du FBI se l’aimable espion indique au juge cension. Mais la principauté ne plaint d’une ardoise laissée par qu’il ne souhaite pas communisoulève plus les foules. Oubliées le Sérénissime. Et s’est résolu à quer son rapport russe… mais les soirées glam’ et les scandales assigner la principauté. À lire les qu’il le tient bien sûr à disposiétalés en une des journaux pipoles. conclusions de son avocat, adrestion du magistrat, si nécessaire. sées le 30 avril au juge, ce brave Pourtant, peu auraient misé un Au passage, il taille tout de même louis sur le déclin de la ville. SurAméricain a l’air fort chafouin. un smoking neuf au gentil Albert tout avec l’accession au trône, en Cent quatre pages délicieuses en indiquant : « Le rapport russe 2005, d’Albert dont il ressort conclut que le prince Albert souffre Grimaldi. Aussi asse z clairede multiples complexes d’inférioL’ex-barbouze d’Albert II coutumier des ment qu’il prérité, et recense les Russes de son prépare un grand balades en yacht pare un grand entourage en expliquant comment que des couverdéballage pour ils pourraient le manipuler en exerdéballage pour le procès. tures de magale jour J… çant sur lui des chantages… » zine, Albert II Ering er rap Au cas où le souverain du Caillou de Monaco, la cinquantaine galopelle d’abord qu’Albert lui avait n’aurait pas bien compris la déterpante, allait redonner un peu de initialement demandé de l’aider mination d’Eringer à voir ses peps au royaume endormi. Mais à débarrasser Monaco de toute factures honorées, le baveux du après d’encourageants débuts trace de corruption et de crimibarbouze se presse de décrire les (deux révélations de paternité), nalité. Une mission qui a nécescoulisses de négociations ardues la machine s’est grippée. Heusité des enquêtes portant sur le concernant la reconnaissance du reusement se profile un procès crime organisé, le blanchiment, deuxième enfant illégitime d’Alaux humeurs de grand déballage. la corruption gouvernementale bert, une Américaine répondant Ouverture des écoutilles prévue et sur les pedigrees des princiau doux nom de Jazmin. La mèrele 14 juin, salle 740 du palais de paux collaborateurs du prince célibataire comptant assigner le justice de Los Angeles. (lire ci-contre). Malheureusement, prince devant une juridiction Le juge Gary Feess a en effet la majeure partie de son travail a française – et vendre les photos et prévu d’examiner un litige assez vite évolué vers des corvées moins l’histoire de la princesse, née en singulier : un minable différend réjouissantes : « Une bonne part 1992 –, « le prince demanda donc à de 40 000 euros entre Albert de Eringer de régler le problème ». À du travail d’Eringer s’est rapiMonaco et son ex-maître espion dement concentrée sur le prince sa façon. Tandis que des négocialui-même, ses craintes, son ego et tions sont engagées dès 2005 « par le désordre de sa vie personnelle. » l’intermédiaire de son avocat newBien entendu, Eringer illustre ses yorkais Bobby Marx », Eringer se affirmations, et les choses prenvoit demander par le prince s’il nent tout de suite une tournure peut « arranger un accident ». plus salace. Commentaire sobre de l’homme À l’époque en affaires avec l’Italie de l’ombre du Rocher : « Même s’il et la Russie, Bébert second se s’agissait d’une plaisanterie, elle était de très mauvais goût. » Tout demandait ce que les gouvernements de ces pays connaiscomme l’entêtement du prince saient de sa vie personnelle et à ne vouloir reconnaître sa fille comment ils le que lors de son considéraient. 18 e printemps. En 2005, le prince aurait Le barbouz e Las, la souvejoint donc à ses raine paternité demandé à son espion conclusions le dû s’incliner. d’«arranger un accident ». aPeut-être rapport produit les par son contact menaces de italien en précisant au juge, des révélations au show de Larry King ou d’Oprah Winfrey ? Et fois que l’honorable magistrat rencontrerait quelques Jazmin de faire la une de Paris difficultés avec la qualité Match en juin 2006. Une que tous des photocopies produites : ont oublié ou presque.` « Le rapport italien traite Au moins l’audience du 14 juin des orientations sexuelles servira-t-elle à dépoussiérer les du prince et des stratagèmes mémoires. Voire quelques cadaqu’il mettait en œuvre pour se vres du placard princier. Quoi procurer secrètement des parde mieux que Los Angeles pour tenaires sexuels ; il traite égaleentendre chanter les anges ? ✹ ment de la famille princière et de xavier monnier la manière dont elle s’est laissé et woodward et newton
les méfaits du prince
L
e palais garde le silence sur le dossier Eringer depuis que le maître espion s’est dévoilé dans Paris Match, en novembre 2009. Un communiqué de presse, une menace de plainte à l’époque… puis plus rien. Un mutisme qui a même gagné son service de presse et son avocat (et ami) Thierry Lacoste, tous deux contactés par Bakchich.
nom de code « floater»
Gênés aux entournures, peutêtre… ou du moins engoncés. Selon son ancien maître espion, le prince monégasque a commis le coupable péché de vouloir enquêter sur les proches camarades de son entourage. De Stig Carl-Magnus Carlsson, un homme d’affaires suédois controversé, à Bruno Philipponnat, son aide de camp qu’il soupçonnait d’accepter des pots-de-vin en échange d’audiences avec le prince, en passant par Samy Maroun, un Libanais impliqué dans le scandale irakien « pétrole contre nourriture » ou encore son propre conseil, Thierry Lacoste… Les dires d’Eringer devraient animer un peu les dîners entre amis. Voire les
relations d’Albert avec les médias. D’une curiosité qui frise la paranoïa, le dadais du Rocher a goûté avec appétit l’idée d’Eringer baptisée « projet Floater ». Ou comment, en se faisant passer pour un biographe non officiel du prince, aller tamponner les journalistes pour identifier leurs sources… Et, si possible, aller débriefer les auteurs de fuites. Une opération de salubrité princière qui ravissait Albert, « son projet préféré », décrit même Eringer. Le pseudojournaliste « Floater » a eu tout loisir de tailler une bavette avec Roger-Louis Bianchini et Romain Clergeat de Paris Match, Michaela Aurti du magazine italien Oggi, ou encore… Thierry Lacoste (encore lui) ou un autre proche d’Albert, Steven Saltzman. Autant de rencontres qui ont fait l’objet de notes destinées à un prince fort attentionné avec ses proches…✹ x. m. www.bakchich.info
Son Altesse Sérénissime Albert II de Monaco et l’espion qui bêlait : http://minu.me/1hcj
du vendredi 14 au vendredi 21 mai 2010 | Bakchich Hebdo N°24
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Filouteries fond de tiroir
confidences Royal à vendre
Forte de ses 70 % de voix aux régionales de mars dernier, Ségolène Royal vogue vers d’autres cieux électoraux avec 2012 comme horizon. La dame du Poitou a eu une riche idée pour voler de ses propres ailes. « En vue des prochaines échéances, nous devons continuer à nous rassembler grâce à Désirs d’avenir. Ceci est possible en ligne à partir de 5 euros », précise le mail d’un militant envoyé aux sphères ségolénistes. Un paquet de chips en cadeau ?
Glavany contre les barbus
À la loi sur le voile intégral débattue depuis mardi, le PS semblait avoir trouvé la parade : une contre-proposition qui restreindrait l’interdiction « aux services publics et aux commerces ». Et porter un recours devant le conseil constitutionnel sur le texte de l’UMP. Une idée qui n’enchante pas franchement Jean Glavany, qui, devant ses camarades députés, a asséné : « Nous n’allons tout de même pas associer notre recours à ceux des juristes extrémistes et islamistes qui planchent déjà dessus ! »
colombes
yade la révolte dans l’air
R
ama Yade essaie de ne pas c’est là que Philippe Candeloro se faire oublier. Grâce à s’est entraîné avant de devenir Michel Drucker, la secréune star de la glace. Mais voilà : le taire d’État aux Sports a occupé patin à glace est un sport qui coûte les écrans de France 2, le 9 mai, cher : 19,39 euros aux frais de la dans Vivement dimanche et Vivecommune pour chaque entrée, ment dimanche prochain, où on selon les édiles, qui s’interrogent l’a vue rire de bon cœur (ou alors sérieusement sur l’intérêt d’un elle fait bien semblant) aux imitel investissement. Rama Yade tations de Nicolas Sarkozy par a donc pris la tête de la révolte, Laurent Gerra, et apprécier la accusant le maire de s’attaquer soupe préparée par Jean-Pierre à « un symbole » et appelant la Coffe, lequel lui population à a conseillé d’ap« résister ». Ni Rama Yade appelle à prendre à « tâter plus ni moins. la résistance contre la les radis ». Un Elle s’étonne joli programme fermeture de la patinoire. d’ailleurs que à développer la municipalité sur les marchés de Colombes de Colombes (Hauts-de-Seine), n’ait jamais demandé l’aide du la commune où la belle Rama a secrétariat d’État aux Sports. grandi et sur laquelle elle semble Autre terrain d’affrontement avec la majorité municipale : le mettre tous ses espoirs et toute son énergie. départ de Colombes de Thales (3 500 emplois), qui va s’installer Il faut dire qu’au gouvernement la jeune secrétaire d’État a fort à non loin de là, à Gennevilliers. Rama Yade accuse : « incompéfaire avec sa ministre de tutelle, Roselyne Bachelot. Entre elles tence », « erreur majeure », « faute deux, c’est à qui se mettra le plus morale », « politique économique hasardeuse car inexistante ». en valeur. On n’ose imaginer la bagarre à laquelle se livreront les Après avoir refusé d’aller aux élecdeux femmes en Afrique du Sud tions européennes, après s’être si, par le plus grand des hasards finalement fait élire conseillère (on ne sait jamais), l’équipe de régionale UMP et sachant que France de football brille lors de David Douillet lorgne son minisla Coupe du monde, qui débute le tère, Rama Yade semble en passe 12 juin. d’aborder, déjà, la campagne des À Colombes, au moins, celle qui municipales ✹ fut d’abord secrétaire d’État aux amédée sonpipet Droits de l’homme, trouve des combats à sa mesure. Elle vient www.bakchich.info ainsi de partir en guerre contre la décision (pas encore prise, pas “Rama Yade, la gêne à l’UMP” démentie non plus) du maire sociaet tous nos articles illustrés sur la liste Philippe Sarre de fermer prochainement la patinoire. Et dame : http://minu.me/2csn pas n’importe quelle patinoire :
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Douillet chez la pucelle
C’est le député des Yvelines David Douillet qui a eu l’insigne honneur d’être, cette année, l’invité vedette des fêtes célébrant Jeanne d’Arc, le 8 mai à Orléans. Sous la pluie, l’ancien champion olympique a totalement éclipsé la pucelle, ne cessant de serrer des mains pendant les heures que dure le défilé annuel de ces fêtes johanniques.
de bien petites fourmis humaines L’HUMEUR DE PROBST Jean-François Probst, ex-conseiller de Jacques Chirac, de Charles Pasqua ou de Jean Tiberi, commente l’actualité. « Pas de souci, tu trouves tout sur Internet. » Et bien, cela n’est pas vrai. Les techniciens du groupe BP paralysés par l’immense marée noire qui s’est abattue sur la Louisiane n’y ont pas trouvé de solution. Ce drame avait été précédé par le nuage et quelques tempêtes dévastatrices. Dame Nature nous rappelle notre sort de petites fourmis humaines. Ce qu’il faudrait, c’est une grosse et belle vague sur les buffets du festival de Cannes. Histoire de nous éviter une de ces polémiques stériles, dont nous avons le secret, à propos du film du cinéaste Rachid Bouchareb sur les massacres de Sétif. Tournons le dos à ces crispations d’un autre âge ! Je me souviens d’une charmante cardiologue algérienne de la Pitié-Salpêtrière qui, lors d’un test d’effort, m’avait donné une furieuse envie de relancer les relations franco-algériennes. Notre prospérité ne dépend pas du Brésil et notre avenir de l’Inde, nous ne sortirons de la crise qu’en renforçant nos liens avec les cinquantetrois pays d’Afrique. Hélas, ce n’est pas la brochette Levitte-Kouchner-Lellouche qui remettra la relation franco-algérienne sur les rails. Ni un débat vaseux chez Laurence Ferrari sur la guerre d’Algérie. Et signons enfin, avec nos amis algériens, un traité d’amitié. Une piteuse mission d’information sur l’attentat de Karachi vient de se tenir à l’Assemblée nationale. Ce drame, dans lequel onze ingénieurs français ont péri, valait mieux que cette pantalonnade. À quand une véritable commission d’enquête où les Rondot, Villepin,
Tous les coups seront permis
La présidentielle n’a lieu que dans deux ans mais, dans l’entourage de Nicolas Sarkozy et au gouvernement, certains commencent à faire des allusions graveleuses sur la vie privée de Dominique Strauss-Kahn. Frédéric Lefebvre avait déjà dit : « On a les photos. » Ça va voler bas.
UMP-PS même combat ?
Branle-bas de combat chez les députés socialistes. Jean-Marc Ayrault, président du groupe PS à l’Assemblée, qui a déposé une proposition de loi pour « abroger le bouclier fiscal », le 20 mai, sonne le tocsin de la mobilisation dans une lettre interne. « La majorité a prévu d’être fortement présente. Certains de ses députés déposeront des amendements qui mettront en difficulté le gouvernement sur ce sujet. Nous devons être très mobilisés. » C’est Sarko qui va être content ✹
Balladur, Léotard seraient tous interrogés sur les carambouilles financières qui ont pu être à l’origine d’une telle tragédie. Et là, pas question de se dérober. Je me souviens de feu le vice-président du Sénat, Étienne Dailly, convoquant mon ministre d’alors, Jean-François Poncet, titulaire des Affaires étrangères. « S’il ne vient pas, j’envoie les gendarmes. » Et pourtant, Étienne Dailly était du genre accommodant… La sagesse viendra des Hautsde-Seine. L’UMP a annoncé qu’elle reconduirait Charles Pasqua, après sa brillante non-condamnation. Le PS, lui, envisage une candidature de Robert Badinter, qui, depuis son appartement rue Guynemer, vit assez préservé de l’agitation du quartier de la Défense. Pasqua et Badinter, le vice et la vertu. Ainsi va la République ! À lire absolument, le livre de l’excellente Raphaëlle Bacqué, le Dernier mort de Mitterrand. Du pipole supérieur et la fin de règne de François 1er, vécue à travers le destin tragique de Grossouvre, le grognard trahi et abandonné. À signaler également, l’ouvrage de Philippe Reinhard, l’énarque devenu journaliste : Christian Estrosi, la trajectoire d’un motodidacte. Bac plus 100 face à Bac moins 5, cela fait une belle salade niçoise. Les livres, ultime refuge du vrai journalisme ✹ www.bakchich.info
Jean-François Probst vous stimule ? Dégustez ses chroniques vidéo : http://minu.me/1vbh
frêche pense à la présidentielle Depuis son succès aux élections régionales en Languedoc-Roussillon, Georges Frêche, 72 ans, n’a plus les pieds qui touchent terre. Il envisage, ni plus ni moins, de se présenter à l’élection présidentielle de 2012. « C’est d’abord pour emmerder Martine Aubry. En revanche, si c’est StraussKahn le candidat du parti, je le soutiendrai. À condition qu’il m’offre un poste de ministre, de préférence ministre de l’Intérieur », a-t-il glissé cette semaine à quelques confidents. Georges Frêche, qui a obtenu 34,2 % des voix au premier tour des régionales, contre seulement 7,7 % pour Hélène Mandroux, maire socialiste de Montpellier, projette aussi de reprendre cette ville, qu’il a administrée de 1977 à 2004. À ceux qui lui font remarquer ses problèmes de santé (il est actuellement en cure et doit subir une lourde opération de la hanche le 17 mai), Georges Frêche, ancien professeur d’histoire du droit romain, répond : « Je mourrai sur mon trône » ✹ a. s.
Bazar subventions Les 11 milliards d’euros versés à la France au titre de la PAC n’ont pas profité à tout le monde. Les multinationales du sucre se sont gavées comme jamais et, chez les exploitants métropolitains, la production de tabac a été largement récompensée. Revue d’absurdités.
l’agriculture sacré
A
lors que la crise agricole met à genoux une partie des exploitants français, voilà un palmarès qui laisse pantois. Conformément aux nouvelles obligations européennes, le ministère de l’Agriculture vient de rendre publiques ses données concernant les bénéficiaires de la politique agricole commune (PAC). Tandis que le débat sur une remise à plat à l’horizon 2 013 commence, l’examen des grands gagnants laisse entrevoir un système à bout de souffle. Où ce ne sont pas ceux qui sont dans le besoin qui perçoivent le plus de subsides, loin s’en faut. Comme l’an dernier, La France a attendu
Les poids lourds du palmarès Les aides de la PAC se répartissent en trois catégories : les aides directes aux agriculteurs, les aides indirectes et l’aide au développement rural, plus marginale. L’essentiel du budget de la PAC, soit 9,8 milliards d’euros, concerne en effet les aides directes, qui ont bénéficié cette année à près de 500 000 exploitants. Ces aides sont versées indépendamment de leur choix de production et les critères pour les percevoir sont généralement liés à la taille de l’exploitation. La SA Bois debout en Guadeloupe obtient la première place, avec cette année 4,2 millions d’aides, talonnée par Petit morne SARL en Martinique avec 3,9 millions perçus, lui-même suivi de Caféière SAS à Saint-Joseph. À noter que le propriétaire de cette dernière – pourquoi se priver ? – touche aussi 1, 2 millions d’euros via une autre société, Rivière Lezarde SARL… Bingo ! Les aides indirectes, essentiellement des aides à l’exportation, sont, elles, attribuées en fonction du nombre de tonnes exportées vers des pays tiers. De fait, ce sont quelques agroindustriels qui se partagent l’enveloppe tels que le sucrier Tereos, avec 177,8 millions d’euros, SaintLouis Sucre (143,7 millions d’euros) ou le volailler Doux, avec 56,3 millions d’euros. Des multinationales qui ne sont pas vraiment dans le besoin ✹ L. D.
pactole
a touché 2,6 millions d’euros. Un la dernière minute pour publier, sur le site Telepac.fr, les informajoli pactole qui vise sans doute à tions concernant la répartition récompenser sa participation à la des 11 milliards d’euros versés sécurité alimentaire européenne, par l’Europe à la France. Comme un des objectifs de la PAC de 1962, à si elle ne tenait pas à ce que soient moins – qui sait – qu’il ne s’agisse exposées au grand jour les aberde soutenir sa contribution à la rations criantes de l’utilisation du politique de santé publique… plus gros budget européen, dont La suite du classement des milelle est aussi le lionnaires de plus important la PAC – ceux Parmi les 38 premiers bénéficiaire (la qui ont touché France perçoit plus d’1 million bénéficiaires de la PAC, un cinquième du – est 35 produisent des bananes. d’euros budget total). tout aussi folkÉgalement pulorique. Parmi bliées à contrecœur, les inforles 38 exploitations concernées, 35 produisent de la banane. mations sur les gagnants de la PAC le sont sous une forme qui Stratégique, sans aucun doute, rend extrêmement difficile toute puisque le critère retenu pour exploitation systématique des l’attribution des aides est la taille de l’exploitation : les énormes données, comme le note le chercheur Pierre Boulanger, membre propriétés de Guadeloupe et de du groupe d’économie mondiale Martinique remportent donc une de Sciences po. « Le moteur de bonne part du magot. Les producrecherche du site du ministère ne teurs de riz de Guyane sont eux peut, par exemple, fournir plus de aussi très largement aidés. cent réponses à la fois, ce qui n’a « Il est légitime de s’interroger d’autre but que de nous mettre des sur l’efficacité de cette politique qui conduit à verser une rente bâtons dans les roues », peste celui aux grands propriétaires terriens qui milite depuis des années pour békés, ce qui revient à subvenune plus grande transparence de tionner le maintien d’un système la PAC. Et pourtant, en cherchant un peu, néocolonial », souligne le chercheur, qui montre que 80 % des les données fournies recèlent quelques perles. Ainsi, le plus aides versées en Martinique et gros bénéficiaire d’aides directes en Guadeloupe bénéficient respectivement à 2 % et 15 % des en France métropolitaine n’est autre que l’entreprise Poitou exploitations. Derrière les montabac, qui, comme son nom l’intants faramineux perçus par certaines fermes – près de 4 mildique, est un gros producteur de tabac de Poitou-Charentes. lions d’euros pour la SARL Petit Pour l’année 2009, l’exploitation morne en Martinique – « se trou-
vent arfois les mêmes familles, qui touchent plusieurs subventions au travers de différentes sociétés. Ce sont des gens qui savent très bien monter leurs dossiers dans des stratégies qui visent souvent à cacher de vrais enrichissements personnels », affirme de son côté José Bové, porte-parole de la Confédération paysanne. Malgré leur récente démonstration de force, lors de leur marche sur Paris à bord de tracteurs rutilants pour contester une légère réorientation de la PAC vers les éleveurs, les grands céréaliers continuent à capter près de deux tiers des aides directes. Si, il est
vrai, les cours mondiaux des céréales ont récemment plongé, il n’y a pas de quoi trop s’alarmer pour ces éternels grands bénéficiaires de la manne européenne. « Ils se sont goinfrés en jouant sur les deux tableaux ces dernières années en percevant des aides énormes au moment où les prix flambaient, s’agace José Bové. Si certains rencontrent des difficultés, leur situation n’a rien à voir avec celle des producteurs de lait, qui sont littéralement fracassés. » La nouvelle PAC post 2 013 devrat-elle subventionner les clopes ou les biberons ? Affaire à suivre ✹ lucie delaporte
La grosse industrie du sucre se porte bien, merci !
T
ereos, un groupe agro-industriel de transformation de betteraves, de cannes et de céréales en sucres et en alcools, fort connu par sa marque Beghin-Say, a tout d’une multinationale qui marche. 3,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2009, 13 000 emplois permanents dans le monde. Trente établissements industriels en France, au Mozambique, au Brésil, à La Réunion, en République tchèque, en Angleterre, en Espagne, en Italie et en Belgique. Malgré la crise économique – « qu’on ne voit pas passer », confie une attachée de direction –, Tereos se développe. Ces derniers jours encore, l’entreprise a conclu un partenariat avec le géant public pétrolier brésilien Petrobras.
délocalisations
Pourtant, le groupe agro-industriel a été le principal bénéficiaire français de la politique agricole commune (PAC). 177,9 millions d’euros de subventions à l’exportation douces et sucrées (lire ci-contre) ! Mais, en 2007 et 2008, malgré sa bonne santé financière, Tereos a fait fermer trois usines : les sucreries d’Abbeville (Somme), de Vic (Aisne) et de
Marconnelle (Pas-de-Calais). Le pôle raffinage du site de Rennes a été délocalisé en Espagne, et l’autre pôle clé de l’usine, le conditionnement, est en sursis. 110 emplois sont menacés. Comble, la direction de l’entreprise a demandé à ses salariés d’enseigner aux Espagnols leurs méthodes de travail. « Les aides de la PAC auront servi à nous licencier, s’indigne Patrick Janin, élu CGT du site. La fermeture programmée de notre usine, c’est une volonté politique de Tereos, qui ne songe qu’à faire du profit. En matière agricole, c’est aussi la politique de l’Europe. » Pourtant, les ouvriers de Tereos Nantes, qui tournent sur les troishuit, ne coûtent pas si cher. En moyenne 1 600 euros brut par mois, avec, par jour, deux fois dix minutes de pause plus vingt minutes pour avaler un casse-croûte. Les gros coups de pouce de la PAC s’expliquent en partie par la baisse de 35 % du prix du sucre, imposée en 2006 par l’Union européenne et étalée sur quatre ans. Une mesure qui étrangle les petites entreprises. Mais qui reprocherait à la PAC d’être friande de grosses sucreries… ✹
anaëlle verzaux
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Bazar entreprise
Les citizen cannes en bas des marches
espionnage et gaz à tous les étages charge des contrôles de routine. Les ordinateurs font quotidiennement le tri parmi les milliers d’e-mails et de sites consultés par les employés – une surveillance inscrite dans le règlement intérieur et déclarée à la Commission nationale de l’informatique et des l était une fois Messer, une libertés (Cnil). Les SMS envoyés société internationale de fabriet reçus via les Blackberry de cation et de distribution de fonction des salariés sont aussi gaz allemande fondée par un cerpotentiellement surveillés. Le sertain Adolf – un autre. En 2004, le vice informatique a ainsi une vue groupe devient l’un des premiers d’ensemble sur les données brasgaziers en Europe à capital 100 % sées par les employés. Grâce à un familial, et les quelque 300 salariés système de mots-clés, une alarme peut se déclencher et dire : « Monde la filiale française, domiciliée à sieur Untel du service commercial Puteaux dans les Hauts-de-Seine, consulte des sites à caractère porvivent des jours heureux. L’amnographique, pédophile ou même biance est qualifiée de « familiale », la direction de « juste et terroriste. » économe », le directeur de « symQuand une telle alar me se pathique paternaliste allemand ». déclenche à plusieurs reprises, Arrive à Puteaux, en mai 2008, c’est à l’informaticien de vérifier un nouveau patron issu de la s’il s’agit là d’une habitude – à lui concurrence : Richard Perrayon, alors d’en référer à la police si les ingénieur en génie chimique et contenus sont clairement illégaux, titulaire d’un MBA en managesinon au patron, qui jugera nécesment. Une belle promotion pour saire ou non de taper sur les doigts ce jeune homme dudit salarié. tout juste âgé de Or, il va se proPour se débarasser d’eux, 36 ans. Sauf que duire un surle jeune patron accuse ses prenant chance cadre brillant doit faire le sale salariés d’espionnite aiguë. gement de rôles boulot : rapatrier au sein de la le service inforfiliale française matique en Allemagne et écarter le du groupe allemand. À la fin 2009, personnel français travaillant sur ce sont justement les salariés du ces dossiers – soit cinq personnes service qui sont inquiétés par en tout. Comment procéder ? C’est le patron… pour l’avoir écouté. là que Big Brother Richard PerUn brin parano, ce dernier est rayon trouve une idée lumineuse : persuadé qu’une partie de son accuser les informaticiens d’espersonnel s’intéresse de trop pionnite aiguë, un reproche qui près à sa vie privée. Le résultat est généralement plus fait aux ne se fait pas attendre. Les cinq patrons qu’aux simples cadres. salariés sautent, dont deux pour Comme dans toute entreprise faute grave. Le motif invoqué est ou presque, le service informad’avoir détourné le système de tique est en messagerie pour mieux surveiller les faits et gestes de Sa Majesté. Les intéressés s’offusquent. Avec
Internet, téléphone, e-mails… comme beaucoup d’entreprises, Messer France, filiale d’une boîte de gaz allemande, s’est donné les moyens de surveiller de près son personnel. Sauf que, ici, c’est le patron qui se plaint d’être fliqué par les employés. Complot ou prétexte ?
les petites fables d’angelina Angelina chronique les grandes et les petites histoires du quotidien entre militance, humour et informations sérieuses. e sont leurs lunettes noires qui C renvoient la lumière de Cannes. Ce sont leurs sourires ultrabrightés qui
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Marathon
dix, quinze, voire trente-six ans d’ancienneté, ils ont la nette impression d’être floués. La plupart acceptent de partir moyennant des indemnités. Les deux responsables de service licenciés pour faute grave attaquent quant à eux leur ancien boss en diffamation, le jeudi 22 avril – moyen presque désespéré pour tenter de porter l’affaire devant les tribunaux. Étrangement, France Télécom a confirmé par une lettre présentée au tribunal qu’il existait une fonction « écoute discrète » sur les commutateurs téléphoniques (PABX) de Messer France, permettant d’espionner les conversations privées. Cette procédure, théoriquement très encadrée par la Cnil, est évidemment beaucoup plus attentatoire aux libertés que les contrôles de routine sur les SMS et autres e-mails déjà évoqués. Le système d’écoute a donc bel et bien été programmé au sein de Messer France. Par qui ? Mystère. Pour que la procédure soit effective, encore faut-il commander une « clé » – l’ultime verrouillage – auprès de France Télécom, acte dont se seraient rendus coupables, d’après la direction, les informaticiens licenciés. En fait, et toujours dans son courrier officiel, France Télécom assure que les deux salariés n’ont pas déverrouillé le système à l’aide de la fameuse clé. Sans en dire davantage sur le véritable initiateur des écoutes au sein de l’entreprise… Contacté par Bakchich, le patron de Messer France n’a pas voulu s’expliquer, arguant qu’il s’agit là d’une affaire « privée ». Une panne d’écoute ? ✹ anne steiger www.bakchich.info
a Le patron de Messer France croit
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que ses salariés l’espionnent.
exportent l’inexplicable aura du festival. Tous les ans, le monde sait qu’ils seront là. Sans eux, pas de tapis rouge, pas de photographes aux objectifs turgescents. Chaque année, ils ne sont ni tout à fait les mêmes, ni tout à fait différents. Boussoles envacancées pour étoiles filantes, toises de notoriété, instruments de mesure du glamour, du in et du it. Pour eux, les stars se mettent sur leur trente et un. Passent le corps tendu, aux aguets, s’arrêtent, hésitent, prennent la pose, espérant que quelqu’un dans cet euphorisant parterre criera leur nom. S’approcher de la barrière, frontière explicite et infranchissable entre deux plèbes. Tendre la main dans l’inconnu jusqu’à ce que des doigts capturent, qu’une paume se referme sur la main
indifférente, tout en plongeant les yeux dans l’ailleurs, dans d’autres yeux, pour faire fructifier ce temps si court. Si à Hollywood on achève bien les chevaux, à Cannes le marathon des marches se fait dans la bonne humeur et le consentement. Tapis dans la nuit la veille ou l’avant-veille, ils guettent la mise en place des marches. Silencieusement, ils enchaînent chaises et escabeaux à la barrière et élisent domicile pour une douzaine de jours sur un coin de tapis rouge, un bout de rêve, un semblant d’éternité, une pause dans le cours du quotidien et de l’ordinaire. Sans ce public patient, convaincu, déterminé, silencieux le jour, braillard à 19 heures chaque soir, certainement conscient de la gratuité de l’attente, ce festival onaniste aurait du mal à exister. Ils soulignent de rouge criard le règne du jeu, de la fatuité et de l’éphémère ✹
Quand les espions de la DST flirtaient avec les barbouzes privées : http://minu.me/2ctf
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Bazar
Le nouveau coup de la panne
échos des cabas
ARNAQUES Fléau pour les automobilistes, les pannes électroniques, de plus en plus nombreuses, sont devenues la nouvelle manne des garagistes. Qui n’hésitent pas à se faire du fric sur le dos des conducteurs mal informés.
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ans les années 2000, arrive sous les capots le nouveau jackpot des garagistes… l’électronique embarquée. Sur la Laguna 2, par exemple, pas moins de dix-huit innovations, dont le gadget de la carte qui fait démarrer l’auto. Pas utile mais, question frime, vous pourrez toujours faire croire à votre bellemère que c’est réservé aux agents secrets… En vingt ans, la composition des bagnoles est passée de 5 % d’électronique à 30 %. « Par un effet mécanique, l’augmentation du nombre des mini-ordinateurs à bord a entraîné une augmentation du nombre de pannes », analyse Khalid Zarrougui, chef
de rubrique Guide à l’Automobile la concession, explique un ancien magazine. Et l’expert de pointer mécano. Les ventes neuves se font à marge zéro, alors on se rattrape du doigt les constructeurs qui ont joué aux apprentis sorciers, sur les réparations. » Et avec l’élecfaisant tester les innovations tronique, facile ! Notre « exfiltré » nous livre quelques « trucs » parpar les nouveaux clients. Chaud devant : le régulateur se bloque à ticulièrement lucratifs : « Face à des problèmes 150 km/h sur d’injection, on l’autoroute, vos Un calculateur changé change toute la portes coulispour 1 000 euros au lieu santes s’ouvrent rampe des quatre en marche… ou d’une simple clé à refaire. injecteurs sans se préoccuper de vous laissent savoir lesquels prisonnier du sont vraiment HS, avec la pompe véhicule (on n’a pas l’air bête sur en prime. » Facture autour de le parking du supermarché). Une manne pour les garagistes, 3 000 euros. « On pourra aussi vous qui en profitent pour faire exploser proposer le changement du faisceau électrique pour 1 500 euros », les chiffres du service après-vente. « Le chef d’atelier est la gagneuse de argumente le mécano. Certains
musée
guéguerre de joysticks à la défense
L
e premier musée du jeu vidéo (MJV) en France avait ouvert ses portes le 14 avril à la Défense. Né d’une initiative de l’agence de com Alerte orange, en coproduction avec le musée de l’Informatique et l’exploitant de la Grande Arche, le MJV a vu le jour à la suite d’une expo sur place, l’été dernier. À cette occasion, Alerte orange s’était alliée avec l’association historique MO5.com, qui possède le fonds vidéoludique le plus complet de France. Mais, en décembre, un appel à projets de « services innovants » du ministère de la Culture met les deux partenaires en concurrence. Alerte orange dépose son dossier pour un musée sur le toit de l’Arche de la Défense, tandis que MO5 promeut un projet en ligne, première étape vers un musée avec des jeux jouables.
coup de com
Au retour des dossiers, MO5 apprend que, à son insu, Alerte orange a utilisé pour sa candidature une lettre d’intention qui datait de leur partenariat. Et que, parallèlement, l’agence a acheté sur eBay une partie de ses futurs objets exposés. MO5, qui réfléchit à un projet de musée national depuis des années, se sent flouée. Et de flinguer le musée de l’Arche, un coup de com qui ne serait que la présentation de la collection privée du
directeur d’Alerte orange. De fait, le MJV, avec ses 200 m 2, est plus proche d’une expo que d’un musée. Pour Philippe Nieuwbourg, coproducteur du MJV, le lieu est toutefois destiné à s’agrandir. Mais le développement attendra : une panne d’ascenseur survenue peu après l’ouverture empêche l’accès à la Grande Arche pendant quatre mois… MO5 tient sa revanche ! Le MJV est fermé, et voilà l’association partenaire d’une nouvelle expo au musée des Arts et métiers, qui se tiendra sur 600 m2 de juin à septembre. Philippe Dubois, le président de MO5, se targue même d’avoir l’oreille favorable d’un conseiller de Frédéric Mitterrand pour faire espérer un « vrai » musée d’ici à deux à cinq ans. Budget estimé : 5 millions d’euros. Please insert coins ✹ cyril da
vont même jusqu’à proposer le changement d’un calculateur à 1 000 euros pour une simple clé à refaire, qui ne coûte que 120 euros. Et si la voiture broute, d’autres ne vérifient pas le filtre à gazole, peu coûteux, et propose le remplacement de la pompe, opération à environ 2 000 euros. « Le problème est que le garagiste est à la fois médecin et pharmacien. La relation avec le client est donc forcément tendue, analyse Khalid Zarrougui. Mais le scandale réside dans le fait que les concessionnaires ont un quota de pièces à vendre. L’après-vente devient ainsi un centre de profit. Le chef d’atelier qui vend ses 100 démarreurs dans le trimestre a une prime. » « Où est la sincérité du diagnostic ? », se demande à juste titre le spécialiste, dont le bureau croule sous les cas de nombreux automobilistes délestés à tort de plusieurs milliers d’euros. « Lorsque la voiture n’est pas en panne, emmenez-la dans un autre garage et faites établir un devis, conseille-t-il, même si vous devez le payer 30 euros. Faites deux ou trois ateliers, vous aurez ainsi des certitudes sur les pièces à remplacer réellement. » Avec un petit tour de vice, la concurrence a du bon ✹ François Nénin www.bakchich.info
Pour faire briller son capot, rien ne vaut Nénette, la lustreuse imprégnée : http://minu.me/2cta
Pavé dans le yaourt
La multinationale Danone renonce à sa pub santé pour ses deux produits phares, Activia et Actimel. La marque retire ses demandes de labellisation « santé » à l’Efsa (l’Autorité européenne de sécurité des aliments) par peur d’être recalée : en un an et demi, les avis rendus ont été négatifs pour les trois quarts. Grosse claque pour la marque, qui faisait un quart de son chiffre d’affaires avec ses allégations santé.
Quick, nous c’est le dégoût
Après les hamburgers dits « halal », Quick se lance en septembre dans les burgers bio ! Il sera désormais possible de s’engraisser en toute bonne conscience avec un steak carré (pour le différencier). Les plus courageux peuvent depuis avril sacrifier les frites-coca pour le jus de pommes-yaourt. En attendant avec impatience le steak de soja et ses poireaux à l’eau ? Miam !
L’ardoise qui fait mal
Alléluia ! L’iPad arrive enfin en France ! Depuis le 10 mai, la tablette qui doit révolutionner la presse et le mode de consommation des livres est disponible sur le site d’Apple, pour un prix qui oscille entre 499 et 799 euros. Et les opérateurs Internet n’ont pas tardé à suivre. Orange propose l’offre 2 Go à 39 euros et SFR vend le tout illimité pour 29,29 euros. Avis aux fans, le plan d’austérité budgétaire pour pouvoir frimer dans les bars bobos avec son ardoise high-tech commence maintenant.
Jus de chaussette
Les nanomatériaux sont partout ! Dans vos assiettes, vos vêtements, vos produits de beauté : en tout, sur le marché français, 246 produits sont composés de ces particules invisibles à l’œil nu. En mars 2009, l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail a présenté un rapport rempli d’incertitudes préconisant un principe de précaution, sans que personne semble s’en émouvoir. Exemple : les chaussettes antibactériennes rejettent au lavage leurs nanoparticules d’argent dans l’eau. Pas très écolo ✹
du vendredi 14 au vendredi 21 mai 2010 | Bakchich Hebdo N°24
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Bazar bruits de la ville
israël
l’art de surfer casher
les na’vi indiens face aux bulldozers écolo façon nicolino Auteur, entre autres, d’un ouvrage sur les pesticides, Fabrice Nicolino tient un blog sans concessions sur l’environnement, Planète sans visa. out le monde se fout de l’Inde, et T ne venez pas me dire le contraire. On s’en tape. On a grand tort. L’Inde,
De TF1 à la Ligue 1
A
ucune photo de femmes et bang ! Une photo du rabbin Louou d’écrans de télévision. bavitch, figure majeure du monde Un nouveau moteur de orthodoxe, venait remplacer les recherche « moralement pur » a poses coquines. Depuis, les hafait son entrée, l’été dernier, sur redim (« craignant Dieu ») ont le Net israélien : Koogle, un savouopté pour des techniques plus reux mariage entre Google et le professionnelles. kugel, un plat traditionnel juif Créé il y a trois ans, le fournisalsacien. On les voit fleurir un peu seur d’accès à Internet Rimon est partout, ces mini-moteurs comdevenu le leader incontesté sur munautaires qui passent Internet le marché. Il propose des filtres à la moulinette de la morale reliclassés de 1 à 6. Au dernier niveau, gieuse : I am Halal, Cathgoogle… le chef de famille n’est même Mais rien ne rivalise encore avec plus libre de changer… de filtre. Près de 40 000 familles ont adopté le clic casher. Chez les rabbins, on ne rigole la méthode. Estampillé casher pas avec le filtrage. Internet à la par les rabbins, Rimon gagne 1 000 utilisateurs chaque mois mode orthodoxe est devenu une véritable instijusqu’à éveiller tution en Israël. la jalousie des Les rabbins passent Et pour cause, autres locomoles chapeaux tives de l’InInternet à la moulinette noirs représenternet israélien. de la morale religieuse. tent 10 % de la Celles-ci ont population de bien tenté de l’État hébreu, et la communauté proposer leurs propres filtres sans possède déjà ses bus avec hommes l’aval des rabbins. Échec cuisant. à l’avant et femmes à l’arrière, ses Les experts en Torah décident cafés sans table ni chaise pour de tout. Le mobile casher en est empêcher les rendez-vous galants le parfait exemple. Pas de SMS, et ses lignes de vêtements tsniout d’appareils photos ni d’accès à (« pudique »). Internet, le téléphone ne sert… C’est en 2003 que la Toile éveille qu’à téléphoner. Israël compte aujourd’hui près de 300 000 lignes l’intérêt des rabbins, longtemps hostiles à cette fenêtre « laïque » de ce type et le téléphone casher sur le monde. Des orthodoxes de est devenu une obligation rabbila ville de Bnei mettent alors au nique. Repéré par un numéro difpoint le logiciel agressif Nativ, qui férenciable des non-casher, il fait bloque tous les sites non conformes figure de norme jusqu’à devenir à la morale. Et pour combattre la un instrument de terreur dans dérive du porno à portée de souris, certains quartiers orthodoxes. En deux mots : « Tu le prends, ou des hackers ultra-orthodoxes piratu nous quittes » ✹ tent, en octobre 2006, une quarantaine de sites X israéliens. Un clic gabrielle prudhon
Patrick le Lay, nouveau président du Stade Rennais, Charles Villeneuve, un temps boss du Paris Saint-Germain, Jean-Claude Dassier, sacré champion de France à la tête de l’OM, les anciens de TF1 ont la cote en Ligue 1. Au point qu’une nouvelle blague tourne à la machine à café de la tour Bouygues. « Nonce Paolini n’aurait pas eu un coup de fil du club de Bastia, par hasard ? » Boutade ou lueur d’espoir ?
Ribéry fâché
Étalées sur la place médiatique, les incartades de Ribéry avec la prostituée Zahia D. ont été relayées en mode mineur par l’Équipe, qui en essuie pourtant les plâtres, Ti’Franck refusant désormais de s’adresser à ses gratte-papier. « Pour ce qu’il a à dire », se gaussent les pontes du journal. Le plus important est qu’il réussisse ses passes…
Bleu tenu
Confession d’un ex-Bleu des années 90 sur le scandale sexuel qui frappe l’équipe de France ; « De notre temps, on était plus discrets et les informations, mieux tenues. » Et, en plus, la France gagnait des titres. Le foot, c’était mieux avant…
Achoui parmentier
Condamné à sept ans de prison pour complicité dans l’évasion d’Antonio Ferrara et en attendant son procès en appel, le toujours avocat Karim Achoui s’occupe… de son restaurant, le Zarma des prés, à Paris. De maître à maître d’hôtel, il suffit d’enlever la robe ✹
le village des irréductibles la mauvaise foi de monnier aquin, le Raymond Domenech T aime à faire des pirouettes. Comme pour préserver une âme de
saltimbanque dans le foot-business. Comme une revanche, aussi, sur le besogneux joueur de seconde zone qu’il fut. Passements de jambes, feintes de corps n’ont jamais fait partie de sa panoplie, endossée seulement avec les habits d’entraîneur. Alors quand médias, supporteurs et footix réunis glosent depuis des mois sur la liste des vingt-
trois joueurs français sélectionnés pour le mondial sud-africain, Raymond les dribble. Et sort trente noms du décolleté de Laurence Ferrari, en direct au JT de 20 heures. La France est scotchée. Oubliés les débats sur les recalés, place aux supputations sur les éventuels nommés de dernière minute. Sept joueurs vont quitter le loft bleu. Avec un suspens insoutenable… jusqu’au 1er juin. En voilà du gris à remplir pour les gratte-papier, des lignes à décrypter
Recalés
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Bakchich Hebdo N°24 | du vendredi 14 au vendredi 21 mai 2010
pour les fanatiques et un brin de parano pour les joueurs. Le tout alors que la période des transferts, véritable foire aux bestiaux, va déjà encombrer de rumeurs sites Internet, magazines spécialisés et quotidiens qui légendent le sport. En 2010 après JésusChrist, toute la Gaule du foot est ainsi occupée. Autant qu’une Zahia D. au Zaman Café. Toute ? Non ! Un petit village résiste. Marseille, loin des Bleus et près du cœur, célèbre ses vainqueurs. Son OM. Champion ✹
avec son 1,2 milliard d’habitants – au moins –, est l’une des colonnes vertébrales de notre monde devenu fou. Que cède la digue de cet univers rural – 600 000 villages, souvent laissés à l’abandon par le pouvoir central – et nous entendrons parler du pays, de ce pays lointain qui possède des villes et des ingénieurs, des bagnoles et des embouteillages, des Parlements et des engins nucléaires tournés vers le Pakistan voisin. Il y a chez nous des écologistes de pouvoir – un Pierre Radanne, pour ne pas le citer, ancien conseiller de Dominique Voynet – qui se félicitent par exemple de l’apparition de la Nano, une voiture individuelle fabriquée par la transnationale indienne Tata, au coût de 1 700 euros l’unité. Ainsi, disent-ils, l’industrie automobile poursuivra sa marche en avant, qui ressemble étrangement à une marche à l’abîme. Mais que savent-ils de l’Inde réelle ? Ont-ils un jour mis le pied dans l’ornière d’un chemin rural de là-bas ? L’écrivaine Arundathi Roy ne fait pas partie de cette triste tribu. Elle n’a cessé d’écrire en pensant aux peuples réels de l’Inde, ce qui suffirait à faire d’elle un cas. Elle n’a cessé de dénoncer ces projets délirants de développement qui obligent à déplacer des millions
de gens qui n’ont rien demandé à personne. Les barrages, par exemple, comme ceux édifiés sur la rivière Narmada, nécessaires à la gabegie urbaine mais criminels pour tous ceux qui dépendent si directement de l’eau vive. Roy vient d’effectuer un voyage en terre interdite pour le compte du magazine Outlook, de New Delhi. Chez les peuples oubliés, chez les 80 millions d’autochtones qui étaient là avant tout le monde et qui sont désormais confinés dans les forêts profondes. Dans ce trou du cul du monde, Arundathi Roy a rencontré des guérilleros maoïstes qu’on appelle là-bas des Naxalites. Plus ou moins bien intégrés à la population, ils mènent une guerre de l’ombre contre l’État et ses sbires locaux. Une guerre dont nul ne parle en France, mais qui est aussi terrible qu’a pu l’être notre guerre d’Algérie. Ont-ils raison ? Le maoïsme est un totalitarisme. Mais que dire de la destruction d’un pays et de ses peuples premiers ? Que dire des accords secrets passés entre le gouvernement central et des transnationales pour exploiter sans mesure ni contrôle des centaines de mines situées au cœur du monde ? Les maoïstes sont cons ? Sans doute. Mais les peuples de l’Inde sont comme les Na’vi, les indigènes menacés d’Avatar, le film de James Cameron. Et ils ont besoin de nous ✹
Guérilleros
charité ouzbek bien ordonnée Friand de paillettes, d’humanitaire et de com, le gouvernement ouzbek n’a pas son pareil pour fêter les anniversaires. Et pour donner aux dates les plus sordides l’apparat de la joie. Avec les sœurs Karimova, Lola et Gulnara, filles de leur Islam Karimov de dictateur de père, à la baguette. Voire à la trique. Le 13 mai dernier, plutôt qu’une funèbre cérémonie en souvenir de la répression d’Andjian – une ville où 500 à 1 000 Ouzbeks furent tués, il y a cinq ans, pour avoir osé manifester contre le régime de Karimov – Gulnara a organisé un joli marathon à Tachkent, la capitale, sous l’égide d’Europa Dona, le plus grand centre européen de lutte contre le cancer du sein. Pas en reste dès qu’il s’agit de belles et bonnes actions, Lola, elle, soigne les enfants victimes de maltraitances grâce à sa fondation Uzbekistan 2020. Et tant pis pour les 5 000 opposants politiques qui croupissent dans les prisons ouzbeks, ils n’avaient qu’à être mineurs, coureurs… ou stars ! Malgré les révélations de Bakchich sur les dons de Lola à la jet-set française – Monica Bellucci avait reçu de sa part la modique somme de 190 000 euros pour honorer de sa présence un gala parisien, le 8 avril 2009 –, les portes des plus honorables institutions lui sont toujours ouvertes. Le 30 avril, elle organisait un colloque à l’Institut du monde arabe, à Paris, sur le philosophe Avicenne. À peine orienté : « Le génie d’Avicenne n’aurait pu s’épanouir sans un milieu favorable à l’intelligence et au talent », décrivait la plaquette de présentation. « En effet, l’Ouzbékistan a été au Moyen âge un foyer culturel et scientifique majeur. » Peut-être une bonne raison de préserver le moyenâgeux régime de Karimov ? Et de l’encourager. Dès 2008, l’Union européenne avait allégé ses sanctions prises après les massacres de 2005. En février 2009, c’est le pacifique Barack Obama qui annonçait vouloir rouvrir la base américaine en Ouzbékistan. Qui, en plus d’être riche en gaz, est un point de passage vers l’Afghanistan ✹ a. v.
Un peu de culture LITTÉRATURE La biographie de l’auteur de Las Vegas Parano, inventeur du «nouveau journalisme» américain. De la prison à l’armée, en passant par une immersion chez les Hell’s Angels, Hunter S. Thompson a développé un style unique, à base de LSD et d’ultra-subjectivité.
Thompson, journaliste halluciné
H
unter S. Thompson, l ’ i nve n t e u r d u « nouveau journ a l i s m e » a m é ricain, fait une pige pour Rolling Stone, magazine et icône de la contre-culture, où, pour écrire, on trempe volontiers sa plume dans une fillette de LSD. La drogue ne dérange pas Hunter, son corps est une éprouvette où il teste les produits les plus durs et nouveaux. Même dans les vapeurs, pour Thompson, le journalisme est une affaire de vie et de mort, la sienne.
fusains
Il enquête sur le décès de Ruben Salazar, un journaliste du Los Angeles Times. Les flics jurent que Ruben a été victime d’une bavure. Hunter pense qu’il a été assassiné. Pour chercher la vérité, il se met à la place du mort. Les intellos de Rolling Stone, qui, jour et nuit, roulent sur la jante, sont satisfaits des notes envoyées par Hunter sur cette enquête. Mais il faut que le gugus vienne à San Francisco pour finir son papier. Les patrons du magazine ignorent sa méthode de travail, Hunter écrit en pièces détachées des scènes qui lui passent par la peau… Ensuite aux rédacteurs en chef de construire l’histoire, la « story ». À San Francisco, Thompson est « installé » dans la discothèque du magazine. Il a une machine, une rame de papier et un tas de tubes de drogue qui sont comme les fusains d’un peintre. Derrière la porte, on entend la musique crescendo de la machine. Charlie Perry, le moins irresponsable de
la bande de Rolling Stone, pousse cette porte. Et c’est une erreur. Hunter se met à gueuler : « J’avais l’élan ! J’avais l’élan ! Je suis sur des rails graissés. Il faut que je conserve cet élan ! » Le lendemain, un autre aventurier pénètre dans la discothèque, la machine de Hunter est muette : « J’ai perdu l’élan, je n’ai pas dormi, je n’ai pas changé de vêtements, mes pieds commencent à pourrir. »
contrebande
Ça peut vous sembler étonnant mais, même sans ingurgiter la chimie du « nouveau journalisme », au pire le vin rouge qui traîne dans le mini-frigo de la chambre d’hôtel, on est condamné à vivre selon la règle de saint Thompson. Quel est le devoir, comme on disait à l’école ? Tu as vécu dans le secret de ce qui est rare, à toi d’écrire pour que le lec-
teur lise par-dessus ton épaule. En ayant envie de pleurer, de rire ou de faire la révolution. Hunter S. Thompson, avant d’inventer cette manière de dire selon laquelle le journaliste écrit « Je », se met en scène puisqu’il intègre le spectacle de la société. Le dingo a été en prison, puis à l’armée, qui est une autre forme de la chose précédente. Trop planant, l’aviateur est viré pour indiscipline. Il vit de boulots qui sont moins que petits mais, de son passage chez les bidasses, où il a collaboré au Command Courier, il garde l’amour de taper sur une machine. Lors de journées qui, grâce à l’acide, durent quarante-huit heures, il recopie Gatsby le Magnifique. Pour voir « ce que ça fait d’écrire aussi bien ». Il a aussi une passion pour Hemingway, pour celui qui mouille sa chemise là où il va. À Porto Rico, il se lance dans la
bouquin
enquête sur un dragon très vorace
S
i les lecteurs du Figaro et des Échos ne peuvent ignorer la beauté de l’Exposition universelle de Shanghai, c’est parce que leurs actionnaires comptent parmi les soutiens du développement de la Chine. Dassault vend des Falcon comme les Allemands des Mercedes aux nouveaux exploiteurs chinois, dont les épouses se laissent séduire par les sacs de LVMH. C’est ce que nous apprend le Vampire du Milieu. Les informations s’empilent pour nous faire comprendre que le soft-power chinois, allié aux logiques court-termistes de nos patrons, nous promet des jours difficiles. Ainsi, dans un égoïsme tout libéral, les chambres de commerce européennes et américaines ont protesté contre l’application d’embryons de législation sur le travail, alors que les conditions de travail en Chine sont déjà « responsables de la destruction de
deux emplois industriels sur cinq en France », d’après la très sérieuse direction générale du Trésor et de la politique économique. Alléchées par ce marché de plus de un milliard de consommateurs potentiels, les entreprises occidentales sont prêtes à se faire piller leurs technologies. Alstom a ainsi appris à la Chine à construire des TGV. Dix ans après, l’empire du Milieu est devenu son premier concurrent à l’export. Mais qui pense aux ouvriers de Belfort ? Les Français ne sont pas les plus mal lotis. En Algérie, les 30 % de chômeurs n’ont aucune chance de trouver du travail dans les grands chantiers locaux gagnés par les entreprises chinoises. « Pour respecter les coûts et surtout les délais imbattables », les entreprises importent leur main-d’œuvre. Nous n’en sommes pas là, mais jusqu’à quand ? ✹ Bernard Lerouge Le Vampire du Milieu, comment la Chine nous dicte sa loi, par Philippe Cohen et Louis Richard, éd. Mille et une nuits, 280 pages, 18,50 euros.
contrebande pour se faire du fric en trouvant un sujet d’article. Il est publié dans l’Observer, une feuille locale qui lui donne envie de s’entêter. Prochaine expérience, devenir un Hell’s Angel, un diable à moto. La randonnée fait un bouquin. Il enchaîne avec Las Vegas
Parano, démontre que, dans cette ville faite de kitsch, de fric et d’âmes perdues, on peut aussi faire de la littérature. Après avoir inventé ce journalisme « total », ce turbulent tombe malade. Hunter se suicide. Son pote Johnny Depp organise les funérailles, ses cendres sont tassées dans un obus, puis tirées par un canon. En France, cette façon de faire du journalisme « à la vie à la mort » a été phagocytée par la bande d’Actuel. Qui, au prétexte que la coke remplissait les encriers, a cru que le monde lui appartenait. Hélas, le plus souvent, on avait droit à d’interminables histoires bidonnées. Après avoir été le nègre de Kouchner, Patrick Rambaud, ex-pape d’Actuel, écrit aujourd’hui des sagas sur Sarkozy, et personne ne nous a fait savoir qu’au jour de sa mort il entendait monter au ciel grâce au fût d’un canon ✹ jacques-marie bourget Hunter S. Thompson. Journaliste et hors-la-loi, par William Mackeen, éd. Tristram, 488 pages, 24 euros.
Bédé madeleine, c’est à pleurer j’envie le nom des Q ue« tourneurs-fraiseurs » et des « sous-diacres »,
dont le bonheur repose sur le fil de leur trait d’union. De quoi rendre jalouses ces dames. Elles pour qui l’époque n’est pas tendre. Femme-flic ? Julie Lescaut. Femme-trophée ? Carla Bruni. Femme-libérée ? Zahia D. Dernière venue, femme-BD : Madeleine Martin. Dans son dernier album, les Madeleines de Mady, aux éditions Delcourt, elle évoque son « prénom qui la prédestinait à être une bonne pâtissière ». à la lire, elle aurait fait de mauvais éclairs mais de bons flans nature. Ce qui est déjà ça quand on veut passer du four au moulin du dessin. Son bouquin décrit ses petits riens, loin de faire un tout, au rythme des saisons. L’été, elle a chaud. L’hiver, elle a froid. Au printemps, elle achète des fringues et drague le minet avec des coquelicots. Et à l’automne, elle se fait chier, comme tout le monde. Et nous avec. Là où ça devient plus inquiétant, c’est qu’elle doit son succès au Net, par son blog (non, vous n’aurez pas l’adresse), qui lui a permis d’être publiée. C’est coloré, ingénu sans génie et ça se lit comme on décore un sapin de Noël, sans les guirlandes mais avec les boules. D’autant que la mémère est franchement attachée au lampadaire de son ego qu’elle croit être un phare. Fini le temps des Lumières. Vive les néons-cons ! ✹
Louis cabanes Les Madeleines de Mady, par Madeleine Martin, éd. Delcourt, 80 pages, 13,95 euros.
du vendredi 14 au vendredi 21 mai 2010 | Bakchich Hebdo N°24
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Un peu de culture Musique This Is Happening LCD Soundsystem
Le troisième album de LCD devrait être le dernier. On n’y croit pas tellement ce serait con. Derrière ce nom, se cache James Murphy, boss du label DFA (The Rapture) et pape du dancepunk new-yorkais. Hommage assumé aux Talking Heads et à Bowie, This is Happening envoie du bois dans les synthés (Dance Yourself Clean), joue les romantiques éplorés (Somebody’s Calling Me), se perce les oreilles à coups d’agrafes (Drunk Girls) et groove à mort (Home). Une tuerie. Dust Ellen Allien
Pop glacée + électro concassée + techno à danser = Dust. Le dernier album de la fée des nuits berlinoises et fondatrice du précieux label BPitch Control (Sascha Funke, Modeselektor) nous balade du salon au dancefloor, du chaud au froid, comme si de rien n’était. Quand Ellen Allien ne chante pas l’amour noir sur fond de cordes new-wave (Sun the Rain, You), son timbre fragile confine au minimalisme (Our Utopie) et s’offre de jolies digressions afro (Huibuh). Bonheur. Dans Le Ventre du Crocodile Disiz Peter Punk
Révélé dans les années 2000 avec J’pète les plombs, Disiz la Peste évolue dans le circuit hip-hop français. On était alors bien loin d’imaginer que ce rappeur francosénégalais écoutait en scred Nirvana dans sa chambre. Il y a quatre ans, ce fan de Lou Reed se rebaptise Peter Punk. Un changement de cap radical qui génère aujourd’hui Dans le ventre du crocodile. Mêlant guitares et batterie rock, électro et envolées funk, cet album est une réussite inespérée. Spiritus Dei Les Prêtres
Après les petits chanteurs à la gueule de bois, des prêtres de Gap poussent la chansonnette. Le pire, c’est que ce trio marche d’enfer. Sorti fin mars à l’initiative de Mgr di Falco, son album atteint déjà les 200 000 ventes. Un vrai miracle… Mélange hérissant de chants religieux et de reprises horribles au synthés (Brel, Cabrel, Cohen), Spiritus Dei nous donne presque envie de ressortir un vieil Enigma de la cave. Mais on ne jettera pas la pierre : les bénéfices serviront à équiper une école à Madagascar. Amen. On trace la route Christophe Maé
Si seulement Christophe Maé pouvait prendre au pied de lettre le titre de son deuxième album et ne jamais revenir… Coécrit par un Boris Bergman en nanoforme, avec Diam’s au micro (Je me lâche, J’ai vu la vie) et Manu Katché à la batterie, On trace la route voudrait bien sonner comme Tracy Chapman. En vain. Amorcé par l’horripilant Dingue, dingue, dingue, ce n’est rien d’autre que de la variétoche vaguement groovy chantée par un fan de Bob Marley avec l’accent de Carpentras ✹
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Cannes sexe, drogue et films pas drôles
ciné Jusqu’au 23 mai, le grand barnum de Cannes vomit son lot de starlettes décaties, de fêtards mythomanes et de films d’auteur. Inventaire.
C
’est parti pour Cannes, le « plus grand festival de cinéma du monde », comme on dit. Mais si vous ne vous souvenez pas de la Palme d’or de l’année dernière, c’est normal. Cannes est un gros barnum, la foire aux vanités, le festival du mauvais goût, où des pauvres attendent pendant des heures, en plein cagnard, des milliardaires qui montent les marches habillés en pingouins, un bordel géant où tout le monde fait sa pub et tente – entre deux films serbo-croates projetés à 8 heures du mat’ – de rentrer dans la boîte de Canal et de s’envoyer en l’air. « C’est un endroit où t’as toute la psychose du show-biz, assure le réalisateur Gaspar Noé dans les Inrocks. Il y a tellement d’alcool, programmation sur la Croisette de soleil, de films, de crétinerie, de (JLG voulait que le visionnage défonce… C’est en France ce qui soit gratuit, le distributeur a fixé ressemble le plus à Sodome et Gole prix à 7 euros). Pas de Festival sans scandale ! Cette année, c’est morrhe. » Entre deux fêtes et trois beuveries, Hors-la-loi, de Rachid Bouchareb. le festivalier Lionnel Luca, pourra découdéputé UMP Pas de festival sans vrir les noudes Alpes-Mariscandale ! Cette année times, s’est proveaux films de Stephen Frears, le scénario c’est le film Hors-la-loi. curé Woody Allen, et a trouvé qu’il Alejandro Gony avait au début zalez Iñárritu, Bertrand Tavernier du film, lors des massacres de (je déconne !)… Jean-Luc Godard, Sétif, de « nombreux faits erronés et réinterprétés ». Il n’a pas vu le lui, arrive à faire le buzz avec Film Socialisme, qui sera mis en ligne film, mais ça ne l’a pas empêché sur le site de vidéo à la demande de saisir le secrétaire d’État aux Filmotv.com le 17 mai, jour de sa Anciens Combattants, Hubert
michel drucker et les soviet’ LA ZApPETTE de bourget ous sommes en 1980. Un corN respondant de presse français, après être passé à la beriochka de
l’Hôtel Rossia pour y acheter un peu de caviar, rentre chez lui partager un plateau télé avec une amie. Et que voitil sur l’écran, pas encore plat ? L’armée de l’air qui occupe toute la place, fait sa propagande en rouge. Le journaliste envoie un papier à son employeur, à Paris : « En URSS, l’armée est chez elle à la télé. » Mettre en scène des bidasses ailés, voilà bien un truc de Soviet’. Un mois plus tard, notre même œil, à Moscou, passe cette fois à la boutique du Métropole. Pour un autre plateau avec une autre amie, blonde aussi. Le même écran de télé est cette fois occupé par une autre forme de
l’armée : la gendarmerie. Pour parler local, la Milice. Le correspondant, estimant l’heure grave, regarde par la fenêtre pour voir si Lénine n’est pas ressorti de son mausolée. Nous sommes le 23 mars 2010, à Paris. Cette fois sans caviar, l’ancien correspondant à Moscou est rentré en France. Avec le temps, il a changé ses usages. Et c’est toujours avec la même blonde qu’il partage, maintenant, et son plateau et sa télé. Après le tiramisu, il se cale sur France 2. Pour voir quoi ? L’armée de l’air qui a installé ses avions et ses hangars dans la chaîne où « l’air est plus vif » ! Il téléphone à Moscou, à un copain de l’agence Novosti… Ce dernier lui assure que « à sa connaissance, aucun Soviet’ n’a pris le pouvoir à Paris ».
Araignée
Éléonore Colin
Bakchich Hebdo N°24 | du vendredi 14 au vendredi 21 mai 2010
en salles Les secrets de Raja Amari
« À travers les personnages, j’ai essayé d’explorer l’univers des femmes recluses qui vivent dans la négation de leurs désirs secrets », assure la réalisatrice tunisienne Raja Hamari, déjà auteur du film Satin rouge, en 2002. Une œuvre énigmatique et sensuelle avec la magnifique Hafsia Herzi, révélation de la Graine et le mulet. Les désaxés (reprise) de John Huston
Le tournage est un enfer (Marilyn se défonce aux somnifères et à l’alcool et sera hospitalisée pendant dix jours, Clark Gable, son partenaire, ne supporte plus ses retards et les multiples prises de vues). Gable meurt d’une crise cardiaque quelques jours après la fin du tournage, le 16 novembre 1960, et le film se plante gravement en salles. Cinquante ans plus tard, les Misfits est toujours aussi sublime, une œuvre crépusculaire sur la mort en marche. Du grand cinéma. freddy, les griffes de la nuit de Ridley Scott Falco. Des pressions auraient été exercées sur les chaînes télé pour ne pas coproduire le film et sur les responsables de la sélection du Festival. Bienvenue dans la France de Sarko ! Des groupuscules d’extrême droite menacent également de perturber Cannes. Donc, en plus des gogos et des alcoolos, on aura sur la Croisette les fachos ! ✹ marc godin www.bakchich.info
Les chroniques cinéphiliques de Bakchich, un festival toute l’année http://minu.me/2csk
Le 4 mai, drogué au Pujadas, le casanier journaliste est toujours fidèle au poste. Il est 20 h 30, Michel Drucker n’est plus déguisé en aviateur mais en commandant de gendarmerie. Homme-araignée, il pend sous un hélicoptère et par un fil. Même qu’on voit des gendarmes de montagne coiffés de bérets de chasseurs alpins, ce qui est incongru. Notre ami sait que Drucker n’est pas homme à faire un putsch, qu’il est bien devant la nouvelle télé publique. Après le journal du soir, le service d’État n’a plus le droit de faire de pub pour Lesieur, alors il en fait pour d’autres huiles, celles de l’armée. Le show monté par Drucker et France 2 « correspond à une stratégie en termes d’image et de recrutement. Une campagne de recrutement pendant une semaine coûte 700 000 euros. Là, on a 2 h 10 d’émission », avouent les képis. Si, pour le rayonnement de ses valeureux hommes, la gendarmerie a fait un chèque de 350 000 euros, on ignore combien l’armée de l’air a envoyé d’euros en l’air pour la même gâterie. ça y est, on vient d’inventer la double redevance ✹
Après les remakes plus ou moins ratés de Massacre à la tronçonneuse, Vendredi 13, Halloween ou La colline a des yeux, voici celui du classique gore et onirique de Wes Craven. Aidé par des effets spéciaux numériques, Freddy – le visage en steak tartare, le gant muni de lames de rasoir – se remet donc au turbin et découpe des ados libidineux à la chaîne. Usiné paresseusement par Samuel Bayer, auteur du clip de Smells Like Teen Spirit de Nirvana, ce Freddy 2.0 reprend plan par plan l’original de 1984, sans parvenir à effrayer une seule fois. Alors que l’on peut maintenant tout montrer, réaliser les scènes les plus démentes avec la 3D, comment est-il possible d’être si peu inspiré, si peu original ? ✹ m. g.
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Un peu de culture Enfumer nuit à votre entourage
Le pipole de la semaine un bien Pal sarkozy
le billet d’alain riou
Pal Sarkozy, publicitaire à la retraite, se veut écrivain et peintre. La publicité faite autour de son mauvais livre – à peine quelques milliers d’exemplaires vendus – est extravagante. Ainsi, l’Express a consacré sa une et pas moins de huit pages au père du Président, cet « homme à femmes ». Paris Match lui a offert deux pages d’interview, où il explique : « Je me suis marié chaque fois que je suis tombé amoureux. » Quant au Parisien, il lui aura accordé deux fois sa une. En fait, le volage Pal Sarkozy tente surtout de se justifier d’avoir abandonné sa première femme, Andrée, dite « Dadue », et ses trois premiers enfants, Guillaume, Nicolas et François. Ne versait-il pas toujours, en 2010, une pension alimentaire à Dadue ? Et d’ajouter : « La jeune mariée était déjà une femme quand elle devint la mienne, et je lui en voulais un peu. » Élégant ! Bakchich s’est farci l’exposition « Entente subtile » à l’espace Pierre-Cardin, où sont exposées les toiles de Pal. « Du digital fine art », paraît-il, entre une femme à demi nue poursuivie par un taureau et une autre, totalement nue, avec une jambe de bois ! Le Figaro parle de « néosurréalisme ». On découvre Carla BruniSarkozy jouant de la guitare, assise sur un piano, et Nicolas Sarkozy avachi dans un fauteuil. Et une rose pour symboliser l’ouverture à gauche. Nicolas Sarkozy a trouvé un prétexte pour échapper à l’inauguration de l’expo de papa. Notre Président serait-il un homme de goût ? ✹ a. S.
Journaliste au Nouvel Obs et invité du Masque et la plume, Alain Riou fait aussi du cinéma. Son cinéma. est cette femme en burqa Q uelle qui chemine devant moi par les rues, bravant scandaleusement
les interdits ? Je presse le pas pour la dépasser. Quelle gaffe ! C’est une religieuse de chez nous ! Mais de face, direzvous, aucune confusion n’est possible. Vous oubliez les religieuses apicultrices, comme il en existe plus qu’on ne croit, même à Paris (VIIe arrondissement). Comment se passer de ces masques illégaux, qui dissimulent les traits quand on tire son miel de ses propres ruches ? Les législateurs ont-ils songé qu’avec leur loi d’interdiction radicale, ils rendent mortellement périlleuse l’étape essentielle de l’élevage des abeilles, et compliquent l’existence d’un secteur déjà largement sinistré par l’insecticide Gaucho et autres frelons prédateurs. À propos d’enfumage, saluons le triomphe de ce mot, qui est aujourd’hui dans toutes les bouches. Il est vrai qu’il évoque parfaitement cette belle évolution de l’art politique qui suggère non plus d’agir, ce qui implique trop de choix, trop de risques, mais d’annoncer qu’on agit. C’est plus tranquille. « Savoir-faire ! » claironnaient depuis toujours les
candidats à nos suffrages. « Savoir-faire, et faire savoir », ajouta, vers la fin du siècle dernier, le subtil M. Sarkozy, qui avait des amis dans la publicité. Certes, un danger menaçait ce sage principe, en ce que la première partie du programme est beaucoup moins agréable à mettre en œuvre que la première. Mais Karl Rove, l’efficace conseiller de George W. Bush, a su rétablir l’équilibre en remarquant qu’un bon faire savoir, une bonne com, rend pratiquement inutile le reste du savoir-faire. Ainsi s’est installée mondialement cette remarquable génération de vantards modestes, dont notre Président, à la force de la langue, a su devenir un des leaders mondiaux. Avec cette brillante inflexion personnelle : « Vous m’avez élu, vous l’avez voulu. Je ne fais qu’appliquer votre programme. » Exemple : le bouclier fiscal. « En votant majoritairement pour moi, les Français m’ont donné mandat pour le mettre en place. », etc. La méthode est tellement efficace que tout le monde s’y met, y compris les volcans. Et on devient vite accroc : chacun sait qu’il est dur d’arrêter d’enfumer ✹
Abeilles
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culture
l’europe pose ses valises en géorgie
L
e Tout-Paris, donc médiacredit Bank, la Société générale, tique, s’est fixé rendez-vous mais aussi soutenue par l’agence à partir d’aujourd’hui et Magnum et Libération, la Maison jusqu’au 18 mai à Tbilissi, belle de l’Europe siège place de la capitale de la Géorgie. Ah, TbiLiberté, dans un bâtiment, prolissi, Tachkent, Samarcande, la priété du gouvernement géorgien, route de la soie… Mission de ces entièrement rénové avec les sous beaux pipoles, inaugurer la toute européens, bien sûr. La mission nouvelle Maison de l’Europe, prede la Maison, on s’en doute, sera mière « ambasd’abord, grâce s a d e » d e l a à une médiaObjectif de la Maison : culture eurothèque, de difpéenne, dans fuser « la culture mettre un peu d’Europe cette région du européenne » dans ce pré carré russe. sud du Caucase. (dont on ne Contrée plutôt sait pas trop ce agitée, comme l’a montré le derqu’elle est)… L’enseignement de nier raid qui a opposé l’armée nos jolies langues (disons l’anrusse aux présomptueux géorglais) et des expos photo feront le giens, même si, dans leurs gènes, reste pour assurer le bonheur du ces solides garçons, amateurs Géorgien. Le 25 mai, Magnum, qui de bons vins, ont un peu de Stane recule devant aucun challenge, line, un homme du cru. Cette « Maison » est née par la volonté de Natalia Kancheli, une proche collaboratrice de Mikheil Saakachvili, le président géorgien, qui est aussi, dans le coin, le grand ami des États-Unis. Natalia sera la directrice de cette Maison de l’Europe, également imaginée par Lionel Charrier, photographe, qui en sera le directeur artistique. Enfin, Raphaël Glucksmann jettera un œil dans cette « ambassade » qui lui est aussi chère qu’à son papa André, le vieux « nouveau philosophe ». La volonté de ces promoteurs est de mettre un peu d’Europe dans la petite République, un pré carré de la Fédération de Russie. De faire donc de la politique dans une région passablement dominée par des pétroétats et des mafiocraties. Financée par la très généreuse Commission européenne, la Pro-
décernera le prix du « jeune photographe caucasien ». Il y a donc du Cartier-Bresson qui traîne dans le coin. Dès le 15 mai est prévue une rafale de débats aux sujets évocateurs : « Une politique étrangère européenne commune est-elle possible ? », « La politique de l’UE envers ses voisins de l’Est est-elle adéquate ? » et, pour finir en toute simplicité, « La région se rapproche-t-elle de l’UE ? » Bigre ! À quinze jours des élections municipales, supervisées – quand même – par 300 observateurs européens, pour la première fois au suffrage direct, et à deux ans de l’élection présidentielle, la Géorgie embrassera-t-elle plus fort l’Europe que l’Amérique ? ✹ jo taboula
du vendredi 14 au vendredi 21 mai 2010 | Bakchich Hebdo N°24
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Ben la der
Michel Boyon
Garden-patée
à quoi CSA sert ? équilibriste Entre pressions et critiques, le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel a bien du mal à exister. Au point de voir son institution menacée ?
F
urieux ! Michel Boyon est furieux ! Depuis la sortie du livre d’Emmanuel Berretta, journaliste médias du Point, qui dévoile quelques savoureux couacs dans le fonctionnement du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), son président cherche à identifier les bavards. La diversité à la télé qui chute quand Audrey Pulvar est en arrêt maladie ? Les ratés sur le temps de parole des poli- tiques ? Les tensions avec France Télévisions ? « Tout est faux », clame-t-il dans les couloirs de l’institution. C’est que la charge est rude : en filigrane, la remise en question de l’existence même du CSA. L’ancien président de Radio France et ex-directeur de cabinet de Raffarin est habitué à plus d’égards. Arrivé à mi-mandat à 64 printemps, Michel Boyon, nommé en 2007 à la tête du CSA par le grand Jacquô, a le plus grand mal à faire évoluer l’institution, privée par Sarkozy de son droit historique de nomination des patrons de l’audiovisuel public.
assiduité contrastée
Beaucoup, à l’heure des nouveaux défis lancés par Internet (un média que Boyon n’aime guère), considèrent que la maison n’est pas tenue et s’interrogent sur son utilité. Le 28 avril, les chaînes privées sont montées au créneau pour s’indigner des décisions de l’instance restreignant la publicité pour les jeux en ligne. « Le CSA n’a jamais eu le commencement d’une velléité d’indépendance et joue les redresseurs de torts à contre temps », déplore un haut cadre d’une chaîne
privée. Ainsi, en juin dernier, Michel Boyon a fait basculer le vote des Sages afin de sanctionner TF1 pour son traitement du vote de la loi Hadopi, alors que, de son propre aveu, il était contre. L’apparence de conflits d’intérêts dans laquelle se trouvent deux des Sages n’arrange rien. Rachid Arhab et Françoise Laborde sont toujours sous contrat avec France Télévisions, leur ancien employeur. « Juridiquement c’est très risqué : désormais tout le monde est fondé à contester les décisions du CSA », analyse un observateur. « Le pire, c’est que Boyon les défend dans cette situation inédite, renchérit un autre, c’est catastrophique pour l’image du CSA ! » Pourtant, ce ne sont pas les chantiers qui manquent, mais les mauvaises langues préfèrent pointer l’assiduité contrastée des membres du CSA, qui gagnent chacun 9 000 euros net par mois avec chauffeur en prime, et les crispations d’un Boyon, qui ouvre chaque assemblée par une revue de presse pour savoir ce qui s’est dit sur l’institution. Mais attention, Image 7, la puissante boîte de com d’Anne Méaux, veille. Au premier rang, MarieLuce Skrabursky, membre de la direction de l’agence et…compagne de Michel Boyon. À huit mois de nouvelles nominations, les Sages sont bien gardés ✹ www.bakchich.info
Réforme de l’audiovisuel, le chaos : une web-émission à voir sur http://minu.me/2ctg
l’europe contre le citoyen
Tenue de rigueur
François Fillon, le porte-parole Luc Chatel et Sarko lui-même l’ont martelé : le gel des dépenses de l’État pour trois ans ne peut en aucun cas s’apparenter à de la « rigueur » ; dans le meilleur des cas, seulement à « une gestion rigoureuse » (sic). Dans le Figaro (8-9 mai), le « conseiller spécial » élyséen Henri Guaino en rajoute comme de juste : « Ceux qui hurlent à la rigueur aujourd’hui, ce sont les mêmes qui voulaient doubler le plan de relance, et qui après vociféraient contre les déficits. » Ouais, il se pourrait cependant que ceux qui aujourd’hui ordonnent la rigueur sans oser le reconnaître, ce sont les mêmes qui, voilà trois ans, nous juraient : « Ensemble, tout devient possible. »
Dissuasion passive
C’est reparti pour Carla (si ça s’était jamais arrêté) à qui Paris Match (6 mai) consacre sa couverture à propos de la visite du couple présidentiel en Chine. « C’est une guerrière », sous-titre même l’hebdo, mais, attention, une guerrière qui n’aurait que le charme pour armement dissuasif. Comme le précisait, paraît-il, le poème chinois calligraphié que des officiels lui ont offert à la Cité interdite de Pékin : « Un simple regard d’elle et toute une ville rend l’arme. Avec son deuxième regard, un peuple entier renonce à résister. » Incroyable, mais au fait, quel genre d’œillade Carla Bruni-Sarkozy a-telle bien pu lancer en mars dernier, quand toute la moitié d’« un peuple a renoncé à » voter ?
Poitou et son contraire
La Bourse est en baisse, mais la raffarinade est à la hausse. Un mini-festival offert par l’ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin sur quatre petites colonnes seulement du Journal du dimanche (9 mai). Et un aphorisme signé, dit-il, de son maître Edgar Morin : « Quand l’immédiat dévore, l’esprit dérive. » Et pas le contraire ? Et un truisme absolu : « En politique, il faut à la fois savoir aller vite et prendre son temps. » Et un proverbe, paraît-il, chinois : « La plus haute montagne ne craint que l’homme lent. » Vraiment ? Sans oublier cette historique sentence sur un Sarkozy selon lui assagi : « Un président qui court, c’est bien, mais il nous faut aussi un président piéton. » Surtout si, en bon piéton, il ne fait que passer.
La foultitude de conseillers com et d’experts de tout poil qui s’activent à propos d’une éventuelle candidature de Strauss-Kahn travaillent peut-être en pure perte (à ce jour, DSK n’a pris aucun engagement), mais ils développent apparemment tous une même conviction qu’un « vieux camarade » (anonyme) du patron du FMI expose ainsi au Nouvel Obs (6 mai) : « Les garden-parties, les dîners en ville, tout ça, c’est fini ! Il faut casser l’image d’un DSK mondain et faire en sorte que ses prochaines visites parlent davantage aux Français empêtrés dans leur quotidien. » D’autant qu’après tout, c’est sa vraie nature. Et peut-être même son aspiration fondamentale.
Tanger immédiat
Décidément inlassable, Paris Match (6 mai) a également escorté le ministre Besson – qui se voit déjà à l’Intérieur à l’automne – pour un bref voyage, « de travail » naturellement, dans son pays natal, le Maroc. Pour cet épicurien nonchalant, une véritable plongée au paradis : « Ici, au Maroc, j’aime tout : la gentillesse des habitants, la roche, le ciel, les orangers, les bougainvillées, la semoule (sic), le thé à la menthe et les cornes de gazelles. » Le si « gentil » Éric avait aussi l’étoffe d’un ministre de l’Identité marocaine.
Au quai qu’on râle
Si souvent ignoré par Sarko, malmené ou étouffé par les conseillers de l’Élysée, en proie aux turpitudes de la real politik, Nanard Kouchner ne s’éclate pas aux Affaires étrangères et il a la bonne grâce de le reconnaître, enfin, dans le Parisien (9 mai) : « Je ne vous dis pas que c’est facile, ce serait mentir, je ne vous dis pas que de temps en temps, je n’enrage pas, mais j’ai l’impression de faire mon travail correctement. Certaines décisions me conviennent, d’autres moins. (...) Nous avons retrouvé notre rang et notre rôle dans la politique internationale. Croyez-vous que j’y sois complètement étranger ? » C’est étrange : le confrère qui l’interrogeait ne lui a pas répondu « oui ».
Hulot monstre
Dans la « première » (sic) biographie qui lui est consacrée, Sain Nicolas, et dont le Point (6 mai) publie les bonnes feuilles, l’écolo audiovisuel Nicolas Hulot rapporte notamment ses relations passionnelles avec le chef de l’État : « Ce qui le met en colère, c’est que je ne dise pas suffisamment de bien de lui. Il me le dit tout le temps : “si Ségolène faisait le quart de ce que j’ai fait, tu dirais du bien d’elle”. » Mais il y a pire, infiniment pire, aux yeux de l’autre Nicolas : « Chaque fois que tu viens à l’Élysée, tu ne veux pas de caméras. » On entre en effet là dans le domaine de l’inexpiable…✹
patrice lestrohan
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Bakchich Hebdo N°24 | du vendredi 14 au vendredi 21 mai 2010