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372 communes marnaises déjà en vigilance

La préfecture de la Marne a placé, dès la fin du mois de mars, les trois bassins hydrogéologiques du département en vigilance sécheresse. Aucune mesure de restriction n'est prise pour l'heure, mais la précocité du phénomène se révèle inquiétante.

Il faudra désormais vivre avec. En raison du changement climatique, sécheresse ne rime plus avec été, en Europe, comme dans l’Hexagone. Et ce ne sont pas les pluies prévues dans les jours à venir, dans la Marne et ailleurs, qui permettront d'éloigner ce spectre.

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Météo-France explique ainsi que depuis l’été 2021, la France subit une sécheresse météorologique « préoccupante » qui s’est poursuivie en début d’année 2023. Depuis août 2021, seuls trois mois ont été excédentaires en pluie. Tous les autres ont été déficitaires et ce manque de précipitations ne permet pas de recharger suffisamment les nappes phréatiques, en automne comme en hiver. Ces réserves d’eau souterraines, alimentées par les infiltrations de pluies, sont cruciales pour l’homme : en France, 62 % de l’eau potable provient des eaux souterraines et 38 % des eaux de surfaces (torrents, rivières, lacs…), selon le Centre d’information sur l’eau. On comprend mieux pourquoi les services de l’État sont préoccupés par la sécheresse actuelle, qui a poussé la préfecture de la Marne à placer trois bassins du département, où le niveau des nappes est en dessous des normales saisonnières, en situation de vigilance séche- resse, le 23 mars dernier. Cet arrêté préfectoral concerne les bassins de craie de Champagne Nord, craie de Champagne Sud et Centre et calcaires de Brie et de Champigny, soit 372 communes du département, dont Reims. Pour le moment, ce premier niveau d’alerte ne s’accompagne d’aucune mesure de restriction. « Le préfet de la Marne appelle chacun à faire preuve de civisme et rappelle aux usagers (particuliers, collectivités, industriels et agriculteurs), la nécessité de proscrire tout gaspillage d’eau, en évitant les usages non indispensables et plus généralement en adoptant un comportement responsable et économe en eau. »

Appel au civisme

Près de chez nous, l’Aube fait également l’objet d’une vigilance, alors que certains secteurs de l’Oise sont déjà placés en alerte renforcée, ce qui signifie une réduction d’au moins 50 % des prélèvements à des fins agricoles et une forte limitation des prélèvements pour l’arrosage des jardins, des espaces verts et des golfs ou encore le lavage des voitures. Dans les Bouches-du-Rhône, dix-neuf communes et huit arrondissements de Marseille sont déjà passés au stade de crise, ce qui implique toute une série d’interdictions. Pire, dans quatre communes proches de Perpignan (Pyrénées-Orientales), l’eau du robinet est interdite à la consommation en raison de la sécheresse et d’un niveau de forage d’eau potable arrivé à son seuil de prélèvement, ce qui oblige les mairies à distribuer un pack d'eau par personne et par semaine. Et nous ne sommes qu’en avril…

La situation n’est pas encore aussi critique dans la Marne et la préfecture se veut rassurante. Elle met en avant trois points : des pluies excédentaires fin mars et début avril qui ont amélioré les niveaux des nappes souterraines (même si ceux-ci restent bas), un indice d’humidité des sols repassé au-dessus des normales saisonnières qui devrait combler les besoins de la végétation et un remplissage satisfaisant du lac du Der qui doit permettre de garantir l’alimentation en eau dans la vallée de Marne « jusqu'à la fin de l’automne 2023 ».

Agriculteur et président de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles, Hervé Lapie milite pour plus de pragmatisme autour de la ressource en eau.

Quel impact la sécheresse a-t-elle sur la profession agricole ?

On a la chance d'avoir des mois de mars et avril assez humides. Tout le monde prédit un été chaud et très sec, alors même que les météorologues nous disent qu'il est compliqué d'avoir une visibilité au-delà de 6 jours. Par contre, on sait que les périodes de sécheresse comme de pluie sont de plus en plus intenses. L'an passé, les coups de chaleur ont engendré une perte de production d'herbe de 35 à 50 %. Les éleveurs restent les plus impactés par la sécheresse et ne sont plus que 500 dans la Marne. L'agriculture et l'alimentation sont un bien commun. Il faut qu'on partage la ressource en eau avec les citoyens, les industriels ou les centrales nucléaires, qui en ont aussi besoin pour leur refroidissement.

Quelles solutions sont mises en place par les agriculteurs face au réchauffement climatique ?

Les pratiques ont énormément évolué en 15 ans. A l'époque, on n'aurait jamais semé d'orge entre le printemps et novembre. Aujourd'hui, ça se fait plus facilement, car les hivers sont relativement doux. Certains éleveurs optent pour la

Situation des nappes au 1er avril 2023

Sources : Banques ADES, IGN, BD Carthage. © BRGM.

fauche tardive. L'agronomie propose des techniques pour travailler autrement les sols et les couvrir de façon permanente, de sorte à ce qu'ils captent mieux l'eau. Il existe aussi des outils capables d'analyser en temps réel l'état d'humidité du sol.

L'aménagement de grandes réserves pour irriguer les cultures pourrait-il voir le jour dans notre département ? Je ne dis pas qu'il ne faudra pas y songer un jour, mais pour l'instant, aucun projet de ce genre n'est à l'étude. En revanche, depuis plus de dix ans déjà, on mène une réflexion autour des grands lacs, notamment celui du Der. Quand il ne peut plus être régulé, on inonde les parcelles agricoles. Notre profession accepte cette règle du jeu. Mais on se demande si on pourrait avoir accès, nous aussi, à ces réserves. Certains endroits se

Malgré tout, les services de l’État indiquent qu’il est « nécessaire de rester vigilant ». Le prochain comité de la ressource en eau, prévu le 23 mai, permettra de faire un point sur l’évolution de la situation et, le cas échéant, d’adapter les mesures. En attendant l’été. Simon

Ksiazenicki

prêtent à l'aménagement de très petites réserves près des ruisseaux alimentés par les eaux hivernales. Mais les prairies se situent souvent en zone Natura 2000, dont la réglementation interdit les moindres travaux. L'irrigation ne concerne que 3 ou 4 % des surfaces agricoles dans la Marne, contre 7 % en moyenne au niveau national, et uniquement des cultures spécifiques, comme la pomme de terre de consommation. On prélève 18 millions de m3 par an. Le canal est devenu une véritable passoire à cause des fuites non réparées et une grande partie des eaux de pluie repart à la mer. En période de crue, si l'on prélevait de l'eau dans la rivière Marne pendant une vingtaine d'heures, on atteindrait ces 18 millions de m3

Propos recueillis par Sonia Legendre

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