La Voix - Juin 2011

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SANTÉ AU TRAVAIL

l’ÉCHEC

des collectivités ?

et aussi... | Événement PFR : LA PRIME QUI VA RÉFORMER LES RÉGIMES INDEMNITAIRES p 7 | Territorial RETRAITES : LES MESURES QUI SE METTENT PLACE p 14 | Carrière POLICIERS, ANIMATEURS, ÉDUCATEURS : LES NOUVELLES CARRIÈRES... p 25


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| Édito

es dernières années ont été synonymes de grands changements pour les agents de la fonction publique territoriale, et ces changements ne sont malheureusement pas positifs. L’année 2010 a été très marquante sur ce plan avec la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites. 2011 et le gel du point d’indice s’inscrit dans cette triste ligne. Si un édito reflète traditionnellement l’orientation générale du journal qu’il amorce, je vais me permettre de faire une entorse à cette règle en cette veille de grandes vacances pour m’adresser directement à vous, en tant qu’adhérent(e)s ou militant(e)s Fnact-CFTC. Au fur et à mesure des dernières réformes, la Fnact-CFTC a remarqué que le gouvernement a de plus en plus de mépris pour ses interlocuteurs syndicaux. Pourtant, dans de réelles négociations, Il devrait prendre en compte vos intérêts, vos besoins, les dangers que représentent pour vous certains projets et vos attentes, que nous lui remontons. Au lieu de cela - et cette attitude se durcit - nous avons affaire à un gouvernement sourd, qui ne fait que détériorer et bloquer tout dialogue, jouant ainsi le jeu des syndicats radicaux. Je ne crois pas à l’avancée sociale par l’opposition systématique et sans raison. Nous devons certes nous opposer quand les intérêts des agents sont en danger mais lorsqu’une réforme est annoncée, au lieu du « non » doctrinaire et sans issue, nous, à la Fnact-CFTC, préférons arriver devant le gouvernement (et nos collectivités) avec des arguments et des propositions qui vous apporteront de réels avantages. Malheureusement, le gouvernement, qui prétend vouloir améliorer le dialogue entre employeurs et syndicats, semble s’attacher à faire le contraire et à vouloir notre mort lors des prochaines élections en 2014. Mais le syndicaliste convaincu de nos valeurs que je suis ne l’entend pas de cette oreille… Nous avons une place privilégiée à occuper sur l’échiquier du dialogue social, et l’équipe dirigeante de la Fnact-CFTC a décidé de se mettre en ordre de bataille dès à présent en se mettant à disposition de tous ceux qui se battent au quotidien pour le bien des agents territoriaux. Nous faisons déjà parvenir à notre conseil les comptes -rendus et positionnements tenus par la Fnact-CFTC au cours des réunions et négociations : cette démarche, accueillie favorablement et qui permet à nos troupes de connaître notre activité et de s’en servir, va prochainement être étendue à un éventail plus large de destinataires ; des « kits » de démarrage avec des affiches, drapeaux, clefs USB contenant des informations syndicales (...) vont prochainement être mis à disposition de nos équipes pour les aider dans leur travail syndical ; nous irons à la rencontre du terrain et décentraliserons nos réunions afin de participer à des réunions d’information dans vos collectivités ; les actions de celles et ceux d’entre vous qui vous ont permis d’être reconnus par les agents seront prises en exemple pour être démultipliées ; et d’ici la fin de l’année, la Fnact-CFTC se dotera d’un nouveau site internet, plus proche de vous et plus interactif. La prochaine rentrée s’annonce animée pour nous tous et pour l’avenir de la FnactCFTC. Je vous souhaite donc de passer d’excellentes vacances d’été et vous laisse à la lecture estivale de votre magazine.

C Gilles Debiais, président de la FNACT-CFTC

CFTC : UNE PLACE PRIVILÉGIÉE SUR L’ÉCHIQUIER DU DIALOGUE SOCIAL

© Sylvie Thenard

LA VOIX n°316 Avril, mai, juin 2011 Une_pé nibilité _© Lisa F. Young

RESPONSABLE DES ÉDITIONS LA VOIX, DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Gilles DEBIAIS, Président de la FNACT-CFTC / Siège social 85, rue Charlot 75140 Paris Cedex 03 / CPPAP n°0311 S 06795 / ISSN n°07619235 / 2ème trimestre - Mai 2011 / FONDATEUR DE LA VOIX : Louis BRETECHER / RÉDACTEUR EN CHEF : Francis COUDIN Tél. : 01 44 54 52 16 mag-lavoix@orange.fr / PHOTO : FOTOLIA / ÉDITION - PUBLICITÉ - COORDINATIONRÉALISATION : CAP - Centre Administratif Publicitaire, 49, av. Georges Clémenceau- BP 2110106002 Nice CEDEX 1- Tél. : 04 93 44 55 08 Fax : 04 93 44 88 85 cap-fab@orange.fr / IMPRIMERIE : RICCOBONO 115, chemin des Valettes 83490 - LE MUY

Une revue de la Fédération nationale des agents des collectivités territoriales (Fnact-CFTC)

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|Sommaire | Édito CFTC : UNE PLACE PRIVILÉGIÉE SUR L’ÉCHIQUIER DU DIALOGUE SOCIAL, PAR GILLES DEBIAIS ................................................... 3

| Tribune INTÉGRATION DIRECTE : LIER L’INTÉGRATION DIRECTE AU DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES, PAR JEAN-LOUIS BAJU, DIRECTEUR DU CDG 59 6

| Événement PFR : LA PRIME QUI VA REFONDRE LE RÉGIME INDEMNITAIRE...................................................... 7

| Actualité

........................................................... 10

| Événement p. 7 LA PFR VA REMPLACER L’ENSEMBLE DES PRIMES POUR UN SYSTÈME EN DEUX PARTS DONT UNE LIÉE À LA PERFORMANCE

| Territorial RETRAITES : LES CONSÉQUENCES PRATIQUES DE LA RÉFORME ........................................................ 14

| Dossier > SANTÉ AU TRAVAIL : L’ÉCHEC DE LA PRÉVENTION DANS LES COLLECTIVI TÉS ? .................................................. 18 > LE RECLASSEMENT : UNE FAUSSE BONNE SOLUTION ............................ 22

| L’interview PROTECTION SOCIALE : « CE N’EST PAS LA CONCURRENCE QUE NOUS REFUSONS MAIS LA DISTORSION DE CONCURRENCE ! », M. MOREAU POUR LA MNT ................................................... 24

| Carrière CATÉGORIE B : RÉVISION DU STATUT DES POLICIERS, ANIMATEURS ET ÉDUCATEURS .. 25

| Dossier p. 18 LA PRÉVENTION N’A PAS PERMIS DE RÉDUIRE L’USURE PROFESSIONNELLE

| Syndicaliste PHILIPPE GAILLARD VEUT MOBILISER LES AGENTS DE LA CC NORD-MARTINIQUE ............................ 28

| Solidaire LE REBORNING OU DES POUPÉES PLUS VRAIES QUE NATURE, VU PAR MARIE-JOSÉ MARQUET ......... 30

| Solidaire p. 30 RASSEMBLER DES PERSONNES AUTOUR D’UNE ACTIVITÉ ARTISTIQUE PAS COMME LES AUTRES !

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| Tribune

INTÉGRATION DIRECTE

@Philippe HOUZE - CDG 59

Lier l’intégration directe au développement des compétences Jean-Louis Baju, directeur du centre de gestion du Nord >

’ai toujours été partisan de passerelles entre métiers et filières différentes. Dès le départ, d’ailleurs, la loi de modernisation de la Fonction Publique et celle relative à la Fonction Publique Territoriale, de février 2007, visait à dissocier le grade de l’emploi pour un meilleur déroulement de carrière. Par la suite, on a plus parlé de métiers que d’emploi. Mais, ces passerelles existent aujourd’hui. C’est pourquoi l’intégration directe au sein d’une même collectivité, qui permet de passer par exemple de la filière sportive à administrative, n’est pas en soi une révolution. On avait déjà tous les outils, au moins sur le plan statutaire, pour permettre cette mobilité professionnelle. Le seul bémol tient à la mobilité vers l’État, quasiment inexistante. L’intégration directe permettra de passer plus facilement les freins d’équivalence entre statuts particuliers de l’État et de la Territoriale, celle-ci se faisant essentiellement dans le sens Etat collectivités…

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UNE RÉFLEXION SUR LES MÉTIERS L’intégration directe prévoit effectivement la reprise d’ancienneté et une titularisation dans un autre grade à classement équivalent. Cette possibilité va donc dans la continuité de l’évolution du statut. De la gestion plus collective du statut, la loi a évolué vers la prise en compte de l’individu (livret formation, prévention…) Ainsi les concours et les recrutements se sont progressivement spécialisés (options). Pour moi, les enjeux sont ailleurs. Il faut avant tout lier cette intégration directe à la question de l’efficacité des services et au développement des compétences. Il est important d’avoir

un dispositif qui permette des aménagements par rapport aux métiers. Car, l’agent ne doit pas recommencer sa carrière au début parce qu’il change de branche. La continuité de carrière, d’avancement, de promotion doivent être garantis. Les ressources humaines des collectivités travaillent dans ce sens aujourd’hui. Mais, pour ne prendre qu’un exemple, il ne faut pas qu’un régime indemnitaire moins avantageux dissuade les agents à changer de poste. Le pire serait que les personnels s’orientent vers les métiers les plus rémunérateurs… La réflexion sur la mobilité, c’est d’abord une réflexion sur les métiers. Des métiers territoriaux vont disparaître, d’autres apparaître. C’est pourquoi les collectivités doivent anticiper si on veut éviter des licenciements… D’autant qu’avec la réforme territoriale, l’achèvement de l’intercommunalité, les orientations de gestion vers la mutualisation vont accélérer les phénomènes de mobilité. La gestion des compétences sera alors un enjeu essentiel. L’évaluation, la mobilité, la formation, les bilans de compétences sont autant d’outils à la disposition des ressources humaines. À nous de les adapter en fonction des circonstances. C’est en ce sens que les responsables des ressources humaines se rencontrent pour échanger et partager leurs expériences et leurs prérogatives. PROPOSITION D’INTÉGRATION APRÈS DÉTACHEMENT En cas de détachement, à l’issue de la période maximale de cinq ans, les collectivités auront l’obligation de proposer une intégration directe dans le grade de détachement. C’est une avancée. Car on permet à l’agent de prendre sa carrière en main. Et cette possibilité nouvelle permet d’entériner le choix de l’agent. Ce n’est plus seulement du ressort des autorisations entre les collectivités d’origine et d’accueil. | n° 316 | Juin 2011 |

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| Événement

PFR : la prime qui va refondre le régime indemnitaire C’est probablement la plus grande réforme annoncée du régime indemnitaire depuis la création des IAT, IFTS et autre IHTS en 2002. Cette réforme, qui a débuté au second semestre 2010, se met doucement en place en généralisant le critère de performance.

n y est. La promesse faite en 2007 par Nicolas Sarkozy d’individualiser la rémunération des fonctionnaires en prenant en compte « le mérite, l'implication, l'expérience ou encore les résultats" a débuté dans les collectivités. Désormais, les employeurs territoriaux peuvent prendre une délibération pour mettre en place la prime de fonctions et de résultats (PFR). Créée à l’été 2010 à l’État, elle entre progressivement en application. Pour l’instant, par homologie avec l’État et à la publication d’arrêtés ministériels, seule la filière administrative est concernée (administrateurs, attachés, secrétaires de mairie). Les collectivités peuvent encore décider ou non de délibérer pour instituer la PFR. Certaines préfèrent cependant attendre que la prime devienne applicable « peut-être en 2013 ? » à l’ensemble des fonctionnaires et agents territoriaux… UNE PRIME EN DEUX PARTIES L’IAT (indemnité d’administration et de technicité) et l’IFTS (indemnité forfaitaire

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© Joachim Wendler

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pour travaux supplémentaires) qui régissent aujourd’hui les différents régimes indemnitaires pouvaient déjà être modulées en fonction de la manière de servir… La PFR en impose maintenant le principe. Lors de sa mise en place, elle remplace l’ensemble des primes (sauf la NBI ). Elle est alors composée de deux parties : la première attachée aux fonctions exercées (modulable de 1 à 6) et la seconde intégra-


LES RISQUES LIÉS À LA PFR Cette réforme attrayante risque cependant de battre en brèche un principe fondamental auquel sont attachées les organisations syndicales : règles collectives et équité. lus simple, plus transparente, plus équitable. Tels sont les arguments séduisants qui jouent en faveur de la prime de fonctions et de résultats (PFR). Alors que les collectivités s’échinent à harmoniser les régimes indemnitaires d’une filière à l’autre, la PFR devrait permettre de comparer rapidement les niveaux indemnitaires. D’autant qu’il est prévu que cette prime remplace toutes les autres à l’exclusion de la nouvelle bonification indiciaire (NBI). C’est un argument massif, et l’occasion d’une remise à plat en bonne et due forme. Seulement, pour cela, il faudra s’assurer que les 260 métiers et leurs spécifici-

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Françoise Descamps-Crosnier, maire de Rosny-surSeine et référente RH de l’AMF

« La prime de fonctions et de résultats (PFR) devrait permettre d’améliorer la lisibilité des régimes indemnitaires. Mais elle ne devrait pas changer fondamentalement les choses pour les collectivités. Elle n’aura pas plus d’influence sur la mobilité que les divers régimes indemnitaires déjà existants. La question qui s’est posée était de savoir si cette prime allait peser sur le budget de fonctionnement. Aussi, ce qui a gêné certains élus était le fait qu’ils n’aient pas la possibilité de ne rien payer, un montant minimum s’imposant. Après, j’estime que baisser le niveau de prime d’une année sur l’autre n’est pas un obstacle... À condition d’apporter toutes les garanties pour que l’agent atteigne ses objectifs (objectifs clairs, soutien de la collectivité, évaluation réelle et transparente...). Je ne dis pas que la décision est facile. Mais elle se justifie face à ceux qui s’investissent dans leur boulot. Après, à titre personnel, je considère que la PFR ne devra pas être trop importante par rapport au traitement indiciaire. Mais cette position n’est pas unanime à l’AMF... »

Face à...

« La PFR ? Ni une révolution, ni un problème... »

Face à...

lement consacrée à la performance de l’agent (modulable de 0 à 6). Et il s’agit d’après la circulaire d’application d’« adopter obligatoirement l’architecture de la prime » à partir du moment où une collectivité voudra modifier le régime indemnitaire ou le créer… La partie fonctionnelle vise à indemniser les responsabilités exercées, le niveau d’expertise et les sujétions spéciales. Cette partie fonctionnelle est cumulable avec la partie performance qui, elle, est assise sur les résultats obtenus par l’agent au regard des objectifs individuels qui lui ont été fixés. Seule exclusion de la PFR, les cadres d’emplois qui bénéficient d’un régime indemnitaire spécifique : ceux de la police municipale et des sapeurs-pompiers professionnels. |

tés soient réellement pris en compte… L’application de la PFR sera donc à suivre attentivement et de façon concertée. PLAFOND PLUS HAUT, EN THÉORIE… Autre facteur qui paraît a priori plus favorable aux agents, c’est le relèvement significatif des plafonds. Pour l’instant sur les trois cadres d’emplois concernés (administrateur, attaché et secrétaire de mairie), les plafonds seraient relevés significativement. Ainsi, le maximum qui peut être accordé par exemple à un attaché principal est actuellement de 15 885 euros annuels de |||

« Le dispositif nous redonne la parole et la liberté de penser » Catherine Issakidis, DGAS-RH de Drancy

« La prime de fonctions et de résultats va permettre de fixer un dispositif qui existe depuis des années à Drancy : la modulation du régime indemnitaire en fonction de la performance. Nous tentons de nous attacher plus au métier qu’au grade. La part modulable en fonction des résultats varie ensuite entre 10 % et 30 % du régime indemnitaire, et elle peut aller du simple au double à responsabilités égales. Donc, la PFR ne changera pas grand chose sur le fond mis à part l’emballage global. En revanche, ce sera sans doute l’occasion de lisser les différents régimes indemnitaires. Histoire d’attribuer les mêmes montants à responsabilité équivalente. Après, ce ne sont pas les règles juridiques qui permettront d’adapter cette prime aux différentes spécificités. Que peut connaître la loi des particularités de Nice, Rennes ou Drancy ? En revanche, cela mettra fin au catalogue de primes pas toujours équitables entre filières. Le dispositif nous redonne donc la parole et la liberté de penser, avec en fond l’intérêt de négocier. Là-dessus, les collectivités sont très en avance sur l’État. »

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| Événement

© Tomasz Trojanowski

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primes (s’il cumule plafonds IFTS + IEMP). Avec la PFR, le plafond annuel pour les attachés principaux passe à 25 800 euros… Sur le papier, le montant maximum est généralement plus attrayant. Néanmoins, l’AMF a calculé de son côté que l’attaché ou le secrétaire de mairie qui aurait en plus des plafonds de l’IFTS et de l’IEMP, le maximum de prime informatique et d’indemnité de régie pourrait atteindre annuellement 22 000 euros quand la PFR plafonne à 20 100 euros (à 14 850 euros avec logement de fonction). Mais c’est sans compter sur les budgets de plus en plus serrés des collectivités. Il est peu probable que celles-ci doublent leurs enveloppes indemnitaires. Et, plus risqué

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encore, qu’elles fassent porter un avantage à la faveur d’une catégorie au détriment d’une autre. C’est pourquoi ce plafond reste virtuel. La PFR entérine pourtant un risque bien réel à plus long terme. C’est que la part des primes dans la rémunération globale, qui avoisine en moyenne les 18 % aujourd’hui, poursuive sa hausse au détriment du traitement indiciaire (rémunération de base). Traitement indiciaire qui est gelé pour la deuxième année consécutive et qui reste la principale référence pour le calcul des pensions des agents… COTATION DES POSTES Composée d’une partie fonctionnelle et d’une partie résultats, la prime met également en œuvre un nouveau processus. Elle entérine d’abord la partie performance qui pourra être indemnisée sur un coefficient allant de 0 à 6. C’est-à-dire qu’il n’y aura pas de minimum et elle pourra être fixée à 0 euro (au


À trop vouloir individualiser le régime indemnitaire ne risque-t-on pas de menacer l’équité de traitement des fonctionnaires ? Au-delà des débats partisans, la question se pose avec d’autant plus d’acuité que l’histoire de l’attribution des primes a été une longue bataille jamais vraiment aboutie sur la question d’établir des critères objectifs. Les syndicats se sont longtemps attachés aux critères d’âge et d’ancienneté, critères on ne peut plus objectifs. Néanmoins, critères aussi qui comme ils l’ont généralement reconnu, présentent également des inconvénients. Pas de prise en compte de l’engagement ou des responsabilités et des contraintes professionnelles conduit notamment à la démotivation et à la démobilisation des agents. QUE RESTE-T-IL DU DÉBAT IAT/IFTS ? Aussi, la mise en place dans les collectivités de l’IAT et de l’IFTS ont-ils permis dans les années 2000 de relancer le débat des critères d’attribution du régime indemnitaire, puis de négocier la modulation des primes parfois jusqu’à la manière de servir. Dans le même temps, le grand chantier de l’évaluation professionnelle a suivi avec plus ou moins de réussite. Certains DRH en sont maintenant à parler d’une « professionnalisation de l’évaluation ». Aujourd’hui, la plupart des grandes collectivités ont intégré au moins une modulation des primes en fonction des responsabilités exercées (et de l’absentéisme !). Ce critère fonctionnel s’est alors inscrit dans une remise à plat de l’organigramme voire de la définition de profils types pour assurer des postes aux-

vu des résultats évalués). Seulement, la pertinence de l’attribution de la part résultats dépendra pleinement de la qualité de l’évaluation. Question complexe qui n’est en fait pas nouvelle pour les collectivités (cf. Analyse)… D’autre part, la partie fonctionnelle suppose que tous les postes soient cotés de 1 à 6, selon le niveau de responsabilité, l’expertise, les sujétions. Dès lors, le régime indemnitaire minimum (si une collectivité en met un en place ou modifie celui exis-

© Chlorophylle

Analyse

Plus de performance mais quelle évaluation ?

quels un grade de correspondance a été affecté. Mais les collectivités, bien plus rares, à avoir modulé en fonction de la manière de servir ne sont souvent pas allées bien loin. Et là encore, l’efficacité professionnelle, qui reste difficile à évaluer dans des services publics où il faut moins évaluer le temps passé sur un service que sa qualité, reste souvent très subjective… Surtout en comparant des filières et des métiers très différents où les employeurs territoriaux ont déjà du mal à harmoniser les régimes indemnitaires. Un premier constat s’impose néanmoins aujourd’hui. Si le cadre statutaire des primes IAT, IFTS, IHTS - qui a évolué au fil du temps, a permis d’unifier les pratiques, c’est réellement la qualité de l’évaluation professionnelle (inégale) qui a permis de lutter contre l’arbi-

traire. D’autre part, les choix réalisés dans chaque collectivité sur la modulation des régimes indemnitaires sont d’abord des choix politiques. Selon la sensibilité (sociale ou économique) des élus, et en fonction de la capacité syndicale à opposer des solutions alternatives ou une capacité de résistance, l’attribution du régime indemnitaire aura été un peu plus dans le sens des primes égalitaires ou, à l’inverse, du côté des primes au mérite. Mais comme le souligne un élu du Nord : « il est difficile d’être juste dans les collectivités lorsque les agents n’ont ni les mêmes métiers, ni le même type de responsabilités. Et baisser les primes que l’on a données l’année précédente paraît compliqué. Les collectivités ne sont pas prêtes pour les rémunérations à la performance. On en est au balbutiement. » |

tant) sera équivalent au coefficient 1 appliqué au montant de référence. Le principe d’une prime avec des coefficients était certes simple. Mais le principe en est déjà dévoyé à l’État dont certains services appliquent des décimales comme 1.1 ou 2.5, etc. Ce qui complexifie forcément le système dont la transparence, argument phare, perd de son efficacité. Dès lors, en dépit des apparences, la PFR ne sera pas forcément plus avantageuse pour les agents. Et, l’impact de la nouvelle indemnité dépendra une fois encore des choix pris dans son application. |

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| Actualité

En bref Décret « protection sociale » : pour l’été Très attendu, le futur décret qui va régir les modes de participation des employeurs territoriaux à la protection sociale de leurs agents est annoncé pour cet été. Celui-ci prévoira notamment deux options de participation : la labellisation des sociétés d’assurance et des mutuelles auxquels pourront adhérer directement les agents en bénéficiant de la participation employeur, ou bien la convention de participation où la collectivité choisira l’opérateur pour lequel elle accodera sa participation financière à ses agents. Voir à ce sujet la rubrique Interview, p. 27.

Police municipale : peu d’engagements lors des 1ères rencontres nationales

L’organisation le 16 juin des premières rencontres nationales de la police municipale, à Nice, ne s’est pas traduit par un projet fort pour la profession. Le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant n’a en effet pas répondu aux revendications réitérées depuis des années par les syndicats de policiers municipaux. Que ce soit le volet social ou le volet professionnel (armement, équipements de protection…), pas d’engagement ferme. Seules annonces concrètes, la remise sur pied de la commission consultative des polices municipales devrait ouvrir un espace de dialogue sur l’évolution du métier. Et, des négociations devraient être engagées sur l’indemnité spécifique de fonction (ISF) dont l’attribution optionnelle dépend des choix de l’autorité territoriale. Déçu par ces premières rencontres, le Syndicat national des policiers municipaux (SNPM-CFTC) n’en attendait pas moins des négociations promises sur l’ISF. Le SNPM-CFTC défend en effet une attribyution généralisée et harmonisée de l’ISF.

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Primes revues pour les techniciens territoriaux La réforme du cadre d’emplois de technicien territorial a eu une conséquence majeure. Celuici a perdu la m e n t i o n « supérieur » et ne peut donc plus prendre pour référence le corps de l’État des techniciens supérieurs du ministère de l’Équipement. Il se réfère désormais à celui de contrôleur des travaux publics de l’État. Ce qui a pour conséquence de modifier les montants du régime indemnitaire. Ils sont toujours éligibles aux deux primes (cumulables) de service et de rendement (PSR) et d’indemnité spécifique de service

(ISS). Mais taux et montaants de référence sont modifiés. La PSR (trois coefficients de calcul) est ainsi abaissée de 1010 à 986 euros pour les techniciens et de 1330 à 1289 euros pour les techniciens principaux de 2ème classe. Dans le même temps, le coefficient de modulation de l’ISS passe de 12 à 8.

TRAVAILLEURS SOCIAUX

Application du nouvel espace indiciaire Les travailleurs sociaux territoriaux étaient encore mobilisés le 16 juin dernier pour défendre leur reclassement en catégorie A. Les organisations syndicales CFTC, CGT, CFDT, FO, Unsa, FAFPT avaient gagné une première manche, le 16 mars dernier, en faisant reculer le gouvernement lors du conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Les projets de décrets de la catégorie B dans la filière médico-sociale (assistants socio-éducatifs et éducateurs de jeunes enfants) avaient alors été retirés. Les projets de décrets ont été remis à l’arbitrage pour réviser les statuts particuliers sans que personne ne sache dans quel sens. Or, dernier rebondissement, saisi par le député UMP Jean Ueberschlag lors des questions au gouvernement, ce dernier a dévoilé le 31 mai (JO) les évo-

lutions qu’il comptait prendre. Celui-ci exclut d’emblée un reclassement des assistants socio-éducatifs et des éducateurs en catégorie A, en précisant qu’il n’envisageait pas de revoir l’ingénierie des diplômes de la filière. Or, ces diplômes étant classés au niveau III (Bac+2) et les fonctions de catégorie A étant réservées à l’encadrement et la direction de structure, il prévoit plutôt de revaloriser les carrières en catégorie B de la filière médico-sociale. À celle-ci serait donc transposée le nouvel espace indiciaire (NES) qui permettrait aux fonctionnaires concernés d’avoir un traitement indiciaire équivalant à celui des techniciens territoriaux (revalorisé en début et fin de carrière). Réforme annoncée pour le second semestre 2011, sans négociations sociales.


Le chiffre

382 000

Levée de boucliers contre la réduction du budget du CNFPT

Paris : des primes pour compenser la pénurie dans la petite enfance

Le président du CNFPT se plaignait déjà il y a quelques mois d’une réduction de près de 7 % du budget du CNFPT avec les compensations financières versées aux centres de gestion pour l’organisation des concours. Cet amendement intervient après la recommandation de la Cour des comptes, en février dernier, de réduire temporairement le taux de cotisation de 1 % à 0,9 %. Une recommandation qui avait à l’époque était approuvée par le ministre du Budget.

Travail dominical les syndicats européens adoptent la proposition CFTC

Réunis à Athène sur la plan d’action 20112014, la Confédération européenne des syndicats (CES) a retenu la proposition CFTC de « préserver le dimanche comme journée de repos de travailleurs, afin de préserver la vie familiale, personnelle, associative et spirituelle ». Cette mesure inscrite au chapitre « mobilisation pour une Europe sociale, pour des emplois de qualité et durables » est une satisfaction pour la CFTC. « Il est maintenant nécessaire de faire vivre cette orientation », s’est lancé pour défi la confédération chrétienne.

© FC

© Jean-Michel POUGET

Le budget du Centre national de la fonction publique territoriale est assis sur les cotisations des employeurs. Ceuxci contribuent jusqu’à maintenant à hauteur de 1 % de leur masse salariale au titre de la formation de leurs agents. Aussi, l’amendement sénatorial de Jean Arthuis, dans le cadre de la loi de finances rectificatives pour 2011, fin juin, a fait l’effet d’une bombe. Les Sénateurs ont en effet introduit le passage de la cotisation employeur de 1 % à 0,9 % pour 2012 et 2013. Une mesure que grèverait de 10 % le budget national de formation des agents territoriaux. Ce qui n’a pas manqué de produire une vive réaction tant des organisations syndicales, qui ont lancé une pétition, que de la part des élus socialistes notamment. Cette ponction représenterait 32 millions d’euros, l’équivalent de 40 000 journées de formation.

C’est le nombre d’emplois à temps complet qu’auraient représenté s les 174 millions d’heure tes fai supplémentaires en France (public-privé) au premier trimestre 2008.

Les organisations syndicales parisiennes, dont la CFTC, se sont mobilisés une nouvelle fois le 21 juin pour protester contre la pénurie d’effectifs dans les crèches parisiennes. Estimés à 250 agents, les besoins en personnel ne seraient en effet couverts que pour moitié au vu des dernières propositions de la mairie. Une proposition inacceptable pour les personnels qui s’inquiètent des conditions de travail et des redéploiements. La mairie proposait en même temps une prime compensatrice avec une part forfaitaire (deux tiers) et une part variable (un tiers).

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| Actualité

ÉLECTIONS CCPD des Bouches-duRhône : la CFTC obtient un siège pour représenter les assistantes maternelles et familiales

150 millions d’euros pour les fonctionnaires et les élèves handicapés ?

© Gina Sanders

L’élection de la CCPD (commission consultative paritaire départementale) des Bouches-du-Rhône, le 16 juin, a permis à la CFTC de décrocher un siège. À l’issue d’un scrutin serré, les voix des assistants maternels et familiaux du département ont permis à la CFDT (590 voix) d’arriver en tête devant deux associations professionnelles (Spamaf, 538 voix et Abama, 520 voix). Avec 493 voix, la CFTC obtient le quatrième siège en jeu. La CGT (304 voix) et un groupe indépendant (180 voix) n’obtenant pas de siège.

« La CFTC est satisfaite de ce résultat. Nous regrettons surtout la moindre participation des assistantes maternelles et familiales », précisait Patrick Capone, le président CFTC du conseil général où siège la CCPD. Seuls 26 % des votants ont effectivement participé au scrutin de cette instance paritaire qui attribue les agréments et examine les motifs de retrait de l’agrément.

CCPD de Moselle : 23 % des suffrages pour la CFTC Près d’un tiers des assistants familiaux et maternels mosellans ont participé au scrutin électoral, début juin, de la commission consultative paritaire départementale de la Moselle. Et pour une première présentation de liste, la CFTC (675 voix) arrive en troisième position après FO (976 voix) et l’AAFAMM (721 voix), et avant une liste indépendante (475 voix). Le siège obtenu sera occupé par Fabienne Chudy, représentante CFTC.

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Lors de la clôture de la deuxième conférence nationale du handicap, le 8 juin, le Président de la République annonçait le déblocage de 150 millions d’euros pour les fonctionnaires handicapés et les enfants handicapés en milieu scolaire. À cette occasion, il a insisté sur la nécessité de l’aménagement de postes de fonctionnaires handicapés « en particulier dans les petites communes ». Mais, les fonds

promis sont en réalité le produit de la collecte du FIPHFP qui fait payer une pénalité aux employeurs publics qui n’emploient pas 6 % de travailleurs handicapés (employant plus de vingt personnes à temps complet). Et, ces fonds ont déjà vocation à être utilisés pour aménager des postes pour des agents en situation de handicap. Autrement dit, ces 150 millions sont déjà à la disposition des employeurs publics,

territoriaux notamment, qui y recourent régulièrement (cf. dossier, p. 18). On apprend seulement qu’ils serviront également à financer l’accessibilité dans les écoles. Deux mille auxiliaires de vie scolaire devraient ainsi être recrutés. Des déclarations qui ont donc déçu les associations de personnes handicapées qui attendaient une véritable politique de soutien.

RESPECT revient sur L’ÉVALUATION DES RISQUES PROS Lors de son congrès annuel, qui se tiendra du 5 au 7 octobre à Paris, l’association territoriale Respect (Réseau des préventeurs et ergonomes des collectivités) fera le point sur l’évaluation des risques professionnels, dix ans après la

parution du décret du 5 novembre 2001 qui rendait notamment obligatoire le document unique de prévention des risques professionnels dans les collectivités. http://www.respect-prevergo.org


AVANT-PROJET DE LOI SUR LES CONTRACTUELS

Le texte DIFFÈRE de l’accord L’examen parlementaire de l’avant-projet de loi sur les agents contractuels de la fonction publique* ne devrait se faire qu’à l’automne, même si l’urgence a été déclarée lors de son examen. Il n’en reste pas moins que le texte a déjà été amendé et exclurait du dispositif de titularisation les saisonniers. Avant même son passage en Conseil des ministres, le texte a déjà été rejeté par le conseil supérieur de la fonction publique d’État le 14 juin, et s’il a été adopté par celui de la Territoriale, c’était en l’absence © DURIS Guillaume de la CFTC, de la CGT et de l’Unsa qui ont quitté la séance plénière du 15 juin en apprenant l’introduction de modifications importantes... Même topo au conseil supérieur de la fonction publique hospitalière, où les organisations syndicales, après avoir refusé de siéger sur une première séance, ont simplement fait une déclaration commune sans prendre part au vote à la suivante. L’avant-projet de loi devait en effet être une transposition fidèle du protocole d’accord du 31

mars 2011 signé avec les organisations syndicales de la fonction publique, à l’issue de plusieurs mois de négociation. Ceux-ci attendaient donc le respect des engagements du gouvernement. Or, avec son amendement, celui-ci a resserré le champ des bénéficiaires du dispositif de titularisation. Les saisonniers ont été exclus de la mesure qui permettra la titularisation des agents qui auront cumulés quatre années de CDD en continu auprès du même employeur public. Par conséquent, selon les règles de droit commun, les saisonniers devront cumuler six années de CDD pour pouvoir être éligibles au CDI. « Il y a beaucoup de personnels précaires sur des emplois déguisés de saisonniers. Ils cumulent les CDD sans pouvoir justifier d’un emploi permanent. Avec l’amendement de dernière minute du gouvernement, ces agents ne pourront plus bénéficier de la titularisation après quatre ans. Ce n’est pas normal », réagissait Awa Burlet, la représentante CFTC, qui a quitté la séance du CSFPT.

(*) relatif à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique

REDÉCOUPAGE TERRITORIAL

Disparition et fusions de 38% à 45% des intercos Disparition de 40 % à 45 % des syndicats intercommunaux, fusion d’environ 35 % des communautés de communes… Les projections nationales de l’Association départementale des communautés de France (AdCF) présage d’un bouleversement radical sur le redécoupage des territoires. La réforme territoriale, qui prévoit l’achèvement de la carte intercommunale, va donc avoir un impact majeur sur les nouvelles frontières intercommunales. Dans cette perspective, les agents territoriaux devront préparer leur mobilité, parfois leur recon-

version. Ce chantier titanesque risque ainsi de modifier en profondeur les missions et modes d’organisation territoriaux. Ce que certains n’hésitent pas à désigner comme le grand défi des prochaines années. Tout en appelant à mettre en place des dispositifs d’accompagnement pour les personnels qui seront concernés… L’heure en est aujourd’hui à l’élaboration des schémas de coopération territoriale, espace de négociation entre les élus pour « rationaliser » la couverture des territoires sans qu’il y ait de superposition d’intercommunalités.

Le nouveau statut des sapeurs-pompiers volontaires ne risque-til pas de les desservir ? Certes, la proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers volontaires (SPV) a l’intérêt de clarifier un peu plus le cadre de l’engagement de ces engagés volontaires. D’autant, que sur les 249 300 sapeurs-pompiers, 79 % sont volontaires (près de 200 000). Et, ils assurent en conséquent plus des deux tiers de l’activité opérationnelle. L’ambition du texte : traduire juridiquement l’esprit de l’engagement tout en le facilitant, dans une période où le volontariat s’essouffle. Ainsi, les premières dispositions distinguent bien l’activité volontaire de celle des professionnels. Celle-ci repose sur le volontariat et le bénévolat, et « est exercée dans des conditions qui lui sont propres ». Précision vague mais qui vise surtout à exclure les SPV des conditions d’exercice professionnel (temps de travail, obligation de récupération, rémunérations, etc.). Ce qui peut paraître dangereux en matière de santé et de prévention compte tenu de la disqualification des règles d’hygiène et de sécurité (droit du travail). La proposition de loi fixe cependant le montant des vacations horaires selon les grades, les obligations de formation et les allégements possibles, le recul de la limite d’âge pour le concours de sapeur-pompier professionnel, la validation des acquis de l’expérience et les garanties de protection sociale… Un amendement a également permis d’introduire la reconnaissance des pharmaciens volontaires. L’exercice de clarification juridique a donc bien été engagé. Mais il laisse un certain nombre de flous, et non des moindres, qui sont loin d’être protecteurs pour les SPV. La proposition de loi adoptée le 30 mai par l’Assemblée nationale, dans le cadre d’une procédure accélérée, est à l’examen au Sénat et devrait être adoptée cet été. n° 316 | Juin 2011 |

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Certaines mesures de la réforme des retraites entrent en application au 1er juillet 2011 comme le recul de l’âge de départ... Retour sur toutes ces réformes difficiles comme le minimum garanti de pension et la fin du dispositif de départ anticipé pour les parents de trois enfants.

RETRAITES

LES CONSÉQUENCES PRATIQUES DE LA RÉFORME e régime de retraites des fonctionnaires titulaires relevant de la fonction publique territoriale est calqué sur le Code des pensions de la fonction publique de l’État. Aussi, la loi n°20101330, du 9 novembre 2010 a créé de nouvelles dispositions et modifications au Code des pensions civiles et militaires, qui se répercutent sur les Territoriaux.

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RELÈVEMENT DE L’ÂGE LÉGAL DE DÉPART EN RETRAITE À COMPTER DU 1er JUILLET 2011 • Pour les agents relevant de la catégorie sédentaire. L’âge légal de départ en retraite, avant la réforme, était de 60 ans. Cet âge légal, après la réforme, sera de 62 ans en 2018, selon les mêmes modalités que celles des salariés du secteur privé. D’ici-là, l’âge légal augmentera progressivement selon l’année de naissance, au rythme

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de 4 mois par an (cf. tableau p. 15). Si l’agent ne totalise pas tous ses trimestres de cotisation, il pourra poursuivre son activité afin d’éviter que le montant de sa pension soit abaissé par une décote. . Pour les agents relevant des catégories active et insalubre, l’âge légal de départ en retraite, avant la réforme, était de 55 ans (catégorie active) et 50 ans (catégorie insalubre). Cet âge légal, après la réforme, sera de 57 ans (active) et 52 ans (insalubre). Ce relèvement sera là-encore progressif jusqu’en 2018 et en fonction de l’année de naissance. Toutefois, les durées respectives de services pour être classé en catégories active et insalubre sont modifiées. Les durées minimales de services effectifs nécessaires à la liquidation des pensions de ces catégories passent ainsi de 15 à 17 ans pour la première et de 10 à 12 ans pour la seconde. Ces durées seront atteintes progressivement entre le 1er juillet 2011 et le 31 décembre 2015. Dans le même temps, la limite d’âge est portée progressivement : • de 65 à 67 ans en 2018, pour la catégorie sédentaire, • de 60 à 62 ans en 2018, pour la catégorie active.


CE QUI NE CHANGE PAS

DURÉE D’ASSURANCE La durée d’assurance s’obtient en totalisant les services pris en compte pour la liquidation de la retraite, les bonifications et la durée d’assurance retenue dans les autres régimes de retraite. À compter du 1er juillet 2011, l’âge d’annulation de la décote (anciennement appelée coefficient d’anticipation) sera reculé dans les mêmes proportions que celles concernant la limite d’âge, pour atteindre progressivement 67 ans (catégorie sédentaire) et 62 ans (catégorie active), à l’exception de ceux dont l’âge d’annulation restera 65 ans : • les fonctionnaires handicapés dont le taux d’incapacité permanente est supérieur à 50 % ; • les fonctionnaires bénéficiant d’une durée d’assurance pour avoir élevé un enfant handicapé à 80 % au moins ; • les parents de 3 enfants au moins, nés entre le 1er juillet 1951 et le 31 décembre 1955 ; • les fonctionnaires ayant arrêté leur activité professionnelle pour s’occuper d’un membre de leur famille durant au moins 30 mois en qualité d’aidant familial. Cette décote est actuellement de 3 % par année manquante. Mais, en 2012, elle atteindra son niveau de rattrapage par rapport au secteur privé à 3,50 %. La surcote (auparavant coefficient de prolongation) est elle aussi revue : • À compter du 1er juillet 2011, l’âge pour

- Règle de calcul de la pension La règle de calcul des pensions reste basée sur les grade et échelon détenus pendant les six derniers mois précédant l’arrêt des activités de l’agent. - Départ anticipé Le départ anticipé des agent relevant des catégories actives reste possible, mais il est modifié pour tenir compte du relèvement de l’âge légal de départ (cf. article). - Taux des pensions de reversion Le taux de pension de reversion au conjoint du fonctionnaire décédé est maintenu à 50 %, sans condition d’âge ou de ressources. - Bonifications Les bonifications restent inchangées, sauf celle accordée aux professeurs d’enseignement technique au titre de stage professionnel, pour les recrutements postérieurs au 1er janvier 2011. - Cumul Les règles de cumul pension/reprise d’activité restent inchangées. - Pension d’invalidité La pension d’invalidité n’est pas modifiée.

> Le décret 2011-620 du 31 mai 2011 relatif à l'âge d'attribution d'une pension de retraite à taux plein a été publié au JO du 2 juin.

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bénéficier d’une surcote passe progressivement de 60 à 62 ans. En 2011, le taux de surcote est de 5 % par an. • Le nombre de trimestres de cotisation, pour bénéficier d’une surcote, n’est plus limité. Chaque génération, née à partir du 1er janvier 1955, connaîtra sa durée d’assurance pour bénéficier d’une pension à taux plein et, ce, quatre ans avant d’atteindre l’âge de 60 ans. DÉPARTS ANTICIPÉS Pour les parents de trois enfants, le dispositif est supprimé à compter du 1er janvier 2012. Toutefois, les fonctionnaires satisfaisant les conditions de 15 ans de services et 3

enfants, avant le 1er janvier 2012, pourront toujours bénéficier du système sans condition d’âge… Mais avec les règles de calcul afférentes à leur génération, c’est-àdire avec une éventuelle décote. Quant aux parents d’enfants handicapés à 80 % au moins, ils conservent le droit au départ anticipé à la retraite, après le 1er janvier 2012, sous réserve de satisfaire les conditions de services, d’interruption ou de réduction d’activité. Pour les carrières longues, les assurés ayant commencé leur activité à 14, 15, 16 ou 17 ans pourront continuer à faire valoir leur droit à un départ à la retraite à 60 ans, ou avant, en fonction de leur durée d’assurance. MINIMUM GARANTI DE RETRAITE Le montant du minimum garanti de retraite reste inchangé (1 067 euros/mois en 2011). Seulement, les conditions d’attribution sont modifiées. Désormais, pour en bénéficier, l’agent devra totaliser tous ses trimestres (163 en 2011 ; 164 en 2012) ou avoir atteint l’âge annulant la décote (à terme 67 ans, cf. plus haut). Le fonctionnaire doit avoir fait valoir ses droits à l’ensemble des pensions de droit direct auxquelles il peut prétendre, y compris celle du régime additionnel de la fonction publique. Le niveau de ressources pourra cependant venir modifier le montant du minimum garanti. À l’origine, le minimum garanti a été mis en place pour relever les pensions du fonctionnaire qui totalise une carrière incomplète ou détient un faible traitement. Ce minimum concerne en général les agents de catégorie C. Et, 77 % des agents de la fonction publique territoriale sont ainsi concernés par ce calcul. C’est pourquoi ces nouvelles règles lèsent les agents concernés qui verront leur retraite baisser jusqu’à 200 euros/mois, à compter de 2011. Seules, des mesures transitoires sont prévues pour les agents nés en 1951. |||

MINIMUM GARANTI DE PENSION. Les nouvelles règles lèsent les agents concernés qui verront leur retraite baisser jusqu’à 200 euros/mois, à compter de 2011

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||| La condition d’âge ou de durée ne concerne pas les agents faisant valoir leur droit à retraite pour invalidité, handicap ou parents d’un enfant handicapé. | Dossier réalisé par Annick Simon

Les autres réformes en bref Cotisations CNRACL Actuellement au taux de 7,85 %, la cotisation vieillesse des fonctionnaires passe, en 2011, à 8,12 % du traitement de base du fonctionnaire. Elle augmentera ensuite progressivement pour atteindre 10,55 % en 2020. Cessation progressive d’activité À compter du 11 novembre 2010, la cessation progressive d’activité (CPA) est supprimée. Ce dispositif est toutefois maintenu pour les agents qui bénéficiaient déjà de celui-ci avant le 1er janvier 2011. Ces mêmes agents peuvent reprendre une activité à temps complet s’ils le souhaitent. Validation de services de non-titulaires La validation de services auxiliaires est supprimée pour les agents titularisés à compter du 2 janvier 2013. Les agents régularisés au plus tard le 1er janvier 2013 peuvent demander la validation jusqu’au 1er janvier 2015. Paiement du mois précédent le départ en retraite À compter du 1er juillet 2011, le paiement du mois précédent la retraite ne sera plus intégralement opéré par l’employeur. Le paiement s’arrêtera au jour de la cessation de fonctions. Suppression de la durée de 15 ans de services pour obtenir une retraite de fonctionnaire À compter du 1er janvier 2011, la condition de 15 ans de services est supprimée et ramenée à 2 ans. Rachat d’études supérieures remboursable Le décret n° 2003-1308 et 2003-1310, du 26 décembre 2003, stipule que les durées d’études qui ont fait l’objet d’un rachat de cotisation et qui devenaient sans objet, sont remboursables aux fonctionnaires dans un délai de 3 ans. Retraite additionnelle de la fonction publique Les conditions d’octroi de la retraite additionnelle de la fonction publique sont modifiées pour tenir compte du relèvement de l’âge légal de départ. n° 316 | juin 2011 |

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SANTÉ AU TRAVAIL

L’ÉCHEC DE LA PRÉVENTION DANS LES COLLECTIVITÉS ? Renforcée depuis 1985, l’obligation de protéger la santé de l’agent au travail n’a pas permis d’endiguer l’aggravation des maux et l’allongement des arrêts de travail. Constat de terrain. lusieurs personnes sont en grande difficulté dans leur travail au centre communal d’action sociale de Beauvais. Certaines ont développé des pathologies graves mais non reconnues. Cela les handicape au quotidien. Mais la direction ne leur fait pas de cadeau », témoigne Dominique Relmy, la représentante CFTC de la ville. La militante a ainsi convaincu un agent, à qui l’on reprochait sa lenteur sur un poste d’accueil, de demander et d’obtenir la reconnaissance du statut de travailleur handicapé. « Il fallait faire vite, car la nouvelle direction l’a secoué, en attisant ses difficultés et son mal-être… », regrette-t-elle. Une pression accentuée, des agents usés et un accompagnement souvent inexistant ou un déficit de formation de l’encadrement… Tous les éléments sont réunis pour former une véritable poudrière. Et, inexorablement, la Dexia Sofcap observe encore en 2010 une progression de 10 % du nombre d’absences maladie et l’aggravation des arrêts (22,6 jours en moyenne). L’HÉRITAGE EN CAUSE « La pénibilité du travail est réelle mais elle va en augmentant, assure Jean-Michel Maurel, le médecin conseil chef de Dexia Sofaxis. La pression s’accentue. Et lorsque les agents tombent malades, l’absentéisme fait peser une pression supplémentaire sur le service qui n’a pas davantage de ressources… » Le médecin pointe d’emblée les spécificités des métiers territoriaux, plus

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exposés : « dans la fonction publique d’État, plus administrative, le taux d’absentéisme est nettement moins élevé que les 11 % observés dans les grandes collectivités (6 % dans celles de moins de 10 agents, NDR). On retrouve les problèmes de lombalgies et de TMS. Mais le vieillissement pèse sensiblement ! » C’est à cet héritage que se sont attaqués les préventeurs en hygiène et

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Témoignage

sécurité et les médecins territoriaux, sans réussir à endiguer le phénomène. « Paradoxalement, le travail devient moins physique avec l’amélioration des équipements et des postes. Mais nous subissons de plein fouet ce qui n’a pas été fait pendant des années… », s’avoue impuissant Fabien Delattre, le préventeur de Saint-Quentin-en-Yvelines. « Il y a certes moins de pénibilité sur les charges lourdes, nuance cependant Guy Auburtin, le médecin de prévention de Bondy. Mais, on assiste surtout à un déplacement des formes de pénibilité. Lorsque un agent doit débarrasser 400 plateaux de 1,7 kg en un temps limité, celle-ci est manifeste. Mais elle se traduit en fréquence du geste plutôt qu’en effort intensif… » « Il n’existe pas d’outil pour mesurer la pénibilité et l’usure professionnelle, résume Élie Maroglou, le président de l’association Respect. Jusqu’ici, nous avons agi sur les risques. La prévention ne s’arrête jamais mais nous évoluons sur certains points. Les formations gestes et postures, par exemple, s’avèrent peu pertinentes. Dans une crèche, quand l’auxiliaire de puériculture ne plie plus les genoux, ce n’est pas forcément une méconnaissance des gestes. Mais elle ne peut plus les plier avec l’âge. Il faut donc faire une observation fine des postes de travail et prendre en compte les capacités des personnes… » Une contrainte qui pèse sur l’efficacité des démarches face au vieillissement de la population territoriale (45 ans de moyenne d’âge). Le CNFPT prévoyait qu’un agent sur quatre en poste en 2006 serait parti à la retraite en 2013. Conséquence du recul de l’âge de départ à la retraite, les employeurs territoriaux vont devoir accentuer toujours plus la prise en compte du vieillissement et adapter les postes (cf. p. 22 ). « Avec l’âge, les agents ont moins de possibilités d’évo-|||

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Si le nombre de pensions accordées pour invalidité baisse (sauf celles qui sont assorties d’une rente d’invalidité : en hausse), en revanche le nombre d’allocations temporaires pour invalidité (ATIACL) attribuées aux agents territoriaux augmentent, elles, de façon continue. Sources CNRACL

« Les aménagements de postes : la meilleure publicité ! » Élodie Cavrot, psychologue du centre de gestion de la Charente « Avec le handicap, les personnes réalisent qu’elles ne peuvent pas tout miser sur le physique. J’ai eu l’appel d’un agent de 28 ans, par exemple, qui me disait que sa vie était foutue. Il faut alors leur expliquer qu’il est possible de construire un nouveau projet professionnel. C’est pour cela que nous nous sommes adossés au FIPHFP qui octroie des financements pour soutenir l’aménagement des postes, dans les collectivités, en cas de handicap. Car, il vaut mieux miser sur un aménagement. Il existe peu de postes pour les reclassements surtout dans les collectivités de 10 agents. Et un cantonnier qui n’a pas de CAP et qui est en refus de scolarité peut difficilement se reconvertir. En revanche, le travail réalisé avec le FIPHFP nous permet d’apporter des solutions aux collectivités. Car à défaut de solution, le fonctionnaire inapte sur son poste peut être licencié. On a ainsi pu faire financer un siège adapté pour des tâches où un agent devait être assis puis debout, une caméra dans un tracteur pour un autre qui ne pouvait plus tourner la tête ou un chariot de levage pour un salarié abîmé (et dont a pu bénéficier son collègue valide)… Aux collectivités, quand on leur dit que tout est financé, elles n’hésitent pas. Après il faut lutter contre la mauvaise image qu’ont les agents handicapés. Quand ils ne peuvent plus assurer toutes leurs missions, celles-ci se reportent sur leurs collègues dont la charge de travail augmente… C’est pourquoi les réussites d’aménagement de postes restent la meilleure publicité. Les collectivités en parlent entre elles, et c’est le meilleur relais pour améliorer les conditions de travail. Les arrêts sont souvent très longs et cela pénalise à la fois l’agent, ses collègues et la collectivité. Il travaille jusqu’au bout de ses possibilités jusqu’à ce que ça craque. La moyenne d’age vieillissante accentue ce phénomène. Car le handicap acquis arrive après 40 ans. Alors certes, les conditions de travail s’améliorent. Mais pas forcément les pratiques professionnelles ! n° 316 | Juin 2011 |

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Préserver le capital santé restant

En matière d’usure professionnelle, nous subissons aujourd’hui ce que les anciens n’ont pas fait en matière de prévention. Nous voyons cependant apparaître de nouvelles pathologies même si le matériel est conforme et plus léger. Comme des problèmes de canal carpien. Nous savons réorganiser le travail et revoir les protocoles d’intervention. Mais cela ne nous empêchera pas de subir l’usure accumulée et la santé dégradée d’agents. Nous tentons maintenant de préserver le capital santé restant ! Fabien Delattre, conseiller en prévention des risques de la mairie et de l’agglomération de Saint-Quentin (1 400 agents)

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Le médecin chef de Dexia, Jean-Michel Maurel désigne le vieillissement et des procédures administratives lourdes comme des handicaps supplémentaires pour la santé au travail des agents.

||| lution et de changement d’activité. Et ils ne sont pas aidés par le statut et ses procédures longues et complexes… », ajoute Jean-Michel Maurel. SOUFFRANCE AU TRAVAIL : UN PROBLÈME SOCIÉTAL Dans le même temps que se mettaient en place les ACMO et ACFI dans les collectivités, après le décret de 1985, et que des démarches globales de prévention sur la santé des agents étaient engagées avec le document unique imposé par un décret en 2001 (…), un autre mal s’est invité dans le débat. D’abord appelé harcèlement puis élargi aux risques psychosociaux, c’est finalement toute la dimension psychologique qu’ont dû intégrer médecins de prévention, préventeurs, assistantes sociales et encadrement… « On identifiait les risques séparément : ici les risques biochimiques, là les biomécaniques… Finalement, l’émergence des risques psychosociaux redonne du sens en rassemblant les différents facteurs », remarque Bernard Dréno, le responsable prévention hygiène et sécurité du CIG de Pantin qui pilote la création d’un observatoire des risques psychosociaux dont l’objectif sera à terme de construire des indicateurs. Comme pour mesurer la pénibilité, les professionnels de la santé au travail sont déboussolés par l’expression de la souffrance. Et les demandes de formations ou

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d’information sur le sujet se multiplient… « Les risques psychosociaux doivent être présentés dans le document unique de la collectivité. Mais on observe, en grande couronne parisienne, qu’ils y figurent assez peu. Le mal-être est fluctuant, plus difficile à cerner. C’est différent du mal de dos », ajoute Nicole Gautier, la responsable du pôle prévention du CIG de Versailles. Souvent en première ligne, les acteurs sociaux mesurent bien la difficulté de résoudre ces questions. « La CFTC est intervenue pendant des années au CCAS de Tourcoing pour des conflits permanents entre la direction et les agents. Mais, il a fallu qu’il y ait un changement de directeur, il y a un an, pour que des réunions soient mises en place avec une véritable écoute. Nous commençons à en observer les effets et les améliorations… », relate Évelyne Demasy, la présidente de la section CFTC de Tourcoing.

SURCHARGE CONJONCTURELLE « Nous sommes dans une société qui évoque plus le mal-être au travail. La pression, la quantité de travail, le mauvais management y font beaucoup. Mais, à mon sens, il serait réducteur de résumer ce mal-être au seul niveau du travail », estime Fabien Delattre à Saint-Quentin, résumant un sentiment partagé sur le malaise social plus général. Le préventeur ne nie cependant pas que les charges de travail s’accentuent. « Les remplacements d’agents sont de moins en moins fréquents, la quantité de travail augmente et la question de la pertinence du travail se pose. Le couvreur ou le peintre qui ne peut plus faire de finitions aura une vision dégradée de son travail. Et cette réduction des moyens engendre des relations conflictuelles, une ambiance générale dégradée… » « Les postes s’alourdissent aussi dans les petites collectivités », ajoute André Leroux, représentant CFTC en Maine-etLoire qui a travaillé avec le CDG sur les risques psychosociaux. « Et les agents se déchargent sur leurs collègues qui finissent par s’arrêter pour maladie tandis que d’autres craquent. La pression est mise sur des agents qui sont propulsés responsables. Mais le management n’est pas au point… » « À Bondy, les services étaient peu encadrés », renchérit le Dr Auburtin, responsable du service prévention. « Et nous avons été confrontés à la violence entre agents. La démarche de progrès a été fixée sur le management. Mais le plus difficile est de réussir à impliquer la hiérarchie pour qu’elle intègre la prévention des risques dans son quotidien… » |


MARSEILLE

De l’absentéisme conjoncturel à l’accompagnement social Marseille, chaque médecin a 1 200 agents à surveiller sur l’année. Et systématiquement la fiche de poste est demandée afin de s’assurer de la compatibilité de l’état de santé de l’agent avec l’exigence de son poste… Nous sommes à chaque fois dans l’individuel », explique Joëlle Vernazza, la responsable du service médecine préventive. Bruit, poussière, charges à porter (…), les médecins, au besoin en allant sur le poste de travail, évaluent l’aptitude de l’agent. Et peuvent demander des adaptations selon l’âge, le sexe et l’évolution des compétences de la personne.

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ARTICULATION DES SERVICES DÉDIÉS À LA SANTÉ DES AGENTS Si des adaptations s’avèrent nécessaires, le service médecine passe le relais au service prévention, en étroite collaboration. « Nous avons aujourd’hui beaucoup moins d’accidents sur des risques traditionnels (coupure, chimique, électrique…) que par le passé, observe Max-Albert Cava, le responsable de la division prévention des risques. Cependant, les accidents liés à la manutention persistent. Mais derrière, on découvre souvent l’usure de personnes ou du mal-être. D’autant que nous avons des populations à risque avec, par exemple, 3 000 agents dans les crèches. Il nous arrive donc d’être sollicités pour des problèmes physiques, avant de se rendre compte que les difficultés relèvent également des

risques psychosociaux… » ENDIGUER L’ABSENTÉISME Avec un absentéisme s’élevant à 9 % (en hausse depuis peu), le malaise des agents est perceptible. La révision générale des moyens municipaux ont attisé les réorganisations… Ce qui perturbent les 11 600 agents de la ville. « C’est une période d’instabilité, poursuit Max-Albert Cava. À cela s’ajoute une moyenne d’âge élevée (45 ans chez les femmes, 46 chez les hommes). Et une recrudescence des agressions dans les nombreux services en contact avec le public. » « Les collègues peuvent supporter un certain dysfonctionnement, renchérit la responsable du service accompagnement social et psychologique, Janine Meaupoint. Les agents ont un revenu modeste. Il y a beaucoup de familles monoparentales, l’augmentation de loyers, des conflits avec les enfants, les huissiers parfois... Ils peuvent supporter jusqu’à un certain point l’accumulation. Au-delà, c’est le basculement. La pénibilité au travail en plus de difficultés personnelles importantes : c’est trop ! » Avec 2 400 entretiens en 2010, le service d’accompagnement social ouvert tous les jours, sert donc de disjoncteur. « Les risques psychosociaux ont toujours existé ! On les prend simplement en compte différemment. Aujourd’hui, nous allons aussi voir les agents dans les services. Si un agent est bien dans sa peau, il sera moins absent au travail… C’est pourquoi je leur demande toujours s’ils veulent évoluer, passer un concours ou changer de poste... », rapporte Janine Meaupoint. |

Témoignage

« Je cumule pénibilité du travail et pression psychologique » Christine Vigneaud, chargé de mission mobilité à l’école supérieure des Beaux-Arts d’Angers « J’occupe à moi seule quasiment deux postes. J’ai une capacité énorme de travail. Mais je fatigue. Là-dessus est venu s’ajouter le nouveau projet d’appuyer le site de l’école du Mans pour y développer notre expertise d’accompagnement des étudiants, tâche qui me reviendrait... Là, c’était trop. J’ai demandé le recrutement d’une secrétaire et obtenu un refus. C’était intenable ! Aussi, j’ai pris la décision de quitter ce poste. Seulement, je suis dans une impasse. Car à cette pénibilité du travail s’ajoute une pression psychologique que je subis depuis des années. À l’époque DRH d’Angers, j’ai été progressivement évincée par le DGS fraîchement recruté. Sous sa coupe, beaucoup de cadres sont partis. Mais, moi, j’ai voulu résister.

Je suis quelqu’un qui s’implique avec une conscience professionnelle forte. Seulement, je ne pensais pas qu’une telle volonté de nuire pouvait exister. J’ai été bloquée dans ma carrière, n’ai pas eu le choix de ma mobilité, et le DGS m’a même dit de partir dans une autre région ! Résultat, entre le stress du travail et cette pression latente, je ne dors plus et je suis dans un état de vigilance extrême. Je bénéficie heureusement d’un suivi psychologique, après des dépressions dans les périodes de travail très denses. C’est pourquoi, en m’engageant avec la CFTC, je me suis penchée sur ces questions de pénibilité et de souffrance au travail qui sont omniprésentes à Angers… »

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LE RECLASSEMENT : UNE FAUSSE BONNE SOLUTION… Que faire des agents usés par des années de labeur ? Le reclassement résonne souvent comme la solution. Mais, le succès de la démarche est loin d’être garanti…

haque employeur confronté à l’inaptitude d’un agent sur son poste le sait. Le recours au reclassement ne peut être, dans la majeure partie des cas, qu’une solution ultime. « Nous avons construit un parcours pour le reclassement pour raisons de santé à Maurepas. Mais, même avec 750 agents, nous sommes souvent bloqués pour trouver des postes moins pénibles et vacants… Nous proposons des formations ou un travail sur les compétences pour une ré-orientation. Malheureusement, les marges de manœuvre sont assez faibles », regrette la DGARH, Marité Boudjema. Comme dans d’autres collectivités, la ville fait tourner l’agent inapte sur plusieurs postes vacants disponibles avec un objectif : « qu’il puisse choisir le service dans lequel il se sent mieux ». Mais très vite, l’employeur est confronté à un dilemme. Soit il propose des emplois pas trop éloignés de celui qu’exerçait l’agent, soit il lui offre un emploi dans un univers complètement différent. Dans le premier cas, l’agent inapte se retrouve rapi-

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dement sur des fonctions avec une composante physique importante (en restant dans la filière technique par exemple). Et dans le second (cf. encadré), il est souvent perdu par des métiers qui n’ont rien à voir avec sa culture professionnelle. « Nous avons principalement des métiers de service et de main d’œuvre, et souvent des agents sans formation. C’est pourquoi il vaut mieux travailler sur la professionnalisation en amont, sur leur métier d’origine, plutôt que d’être confronté au reclassement », prévient Guy Auburtin, le médecin de prévention de Bondy. PRÉPARER UNE DEUXIÈME CARRIÈRE EN AMONT « Le problème majeur du reclassement professionnel est qu’il est intimement lié aux capacités de l’agent. S’il est inapte à son poste mais jeune, il aura plus d’aisance à se former sur un nouveau métier. À 50 ans, il est très difficile d’acquérir de nouvelles compétences. C’est pourquoi il ne faut pas attendre que la personne soit dans le handicap… », prêche le médecin conseil chef de Dexia Sofaxis, Jean-Michel Maurel. Et déjà en 2001, le premier rapport du Conseil d’orientation sur les retraites préconisait d’orienter à mi-carrière les salariés vers un nouvel emploi tant pour éviter l’usure que pour entretenir son expertise professionnelle. Or aujourd’hui, pour beaucoup d’agents territoriaux, il est trop tard (cf. L’échec de la prévention dans les collectivités ?,

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Témoignage DR

p. 18). En jouant sur la mobilité interne, de plus en plus de grandes collectivités travaillent justement à l’identification et au développement de compétences. Une stratégie encore

« Les agents sont polyvalents et ne peuvent être formés à chaque métier » récente qui pourrait payer à terme. Seulement, il faudra voir plus grand - au niveau d’un département par exemple, pour les petites collectivités notamment. « En Charente, la moitié des collectivités ont entre un et cinq agents. Les agents sont très polyvalents et ne sont pas formés à tous les corps de métier… Aussi, ne serait-ce qu’aménager un poste est souvent impossible sauf s’il y a deux agents pour l’atelier municipal… », remarque le préventeur du CDG, Pierre Victorin non sans regretter qu’« en France, on ait une culture de la réparation plus que de la prévention ». « En vieillissant, les personnes ne sont plus capables de faire la même chose. Cela impose de réaménager les postes. Mais cela suppose également que l’on recrute de nouvelles ressources », résumait Fabien Delattre, au service de prévention de Saint-Quentin. Un aménagement des postes qui est préférable à un reclassement, quand c’est possible et bien préparé… |

« À Nantes, des personnes en reclassement sont en

grande souffrance » Emmanuel Daviau de Ternay, paysagiste reclassé dans le secteur administratif « J’ai débuté dans le métier de paysagiste à 16 ans, à Nantes, j’en ai 47 aujourd’hui. Et j’ai dû abandonner mon métier pour une reconversion professionnelle. Après une hernie discale, j’ai été opéré et je suis tombé dans le coma. Là, je me suis dit qu’il fallait rapidement arrêter mon métier. C’est un deuil difficile à vivre… Après s’est enchaînée ma période de reclassement qui a été un véritable calvaire. Pendant quatre ans, j’ai vadrouillé entre huit ou neufs postes. Des postes sur lesquels j’ai été mis en difficulté. Le plus marquant a été mon affectation sur un poste d’accueil à la police municipale. Là, j’étais sans cesse agressé par les usagers, sans avoir été préparé à ce genre de missions. Heureusement que ma femme et mes enfants étaient derrière moi, cela m’a beaucoup aidé. Car on tombe vraiment très bas… En plus, les formations proposées ne sont pas adaptées. Et l’accompagnement est inexistant. Les personnes reclassées, comme moi, sont affectées sans consultation sur des postes,

déplacés comme des pions. Il n’y a pas de considération, nous sommes des numéros. La ville n’est pas claire sur le reclassement. J’ai des collègues en pleine dépression, certains veulent en finir… Ma chance a été d’être jeune et intéressé par l’informatique. Aussi, le jour où j’ai été affecté sur un poste administratif au service de l’Éducation, je me suis accroché. J’ai demandé une formation en informatique, et j’ai préparé le terrain. Car je savais que la personne que je remplaçais allait partir à la retraite. J’y suis allé au culot et j’ai dû me battre pour récupérer le poste, qui me convenait parfaitement… Mais aujourd’hui le contexte est encore plus compliqué. En plus de l’usure physique, s’ajoute en effet une véritable souffrance au travail à Nantes. Avec la mutualisation de la ville et de Nantes Métropole, les collègues sont sous pression. Les conflits se développent et le mal-être est perceptible. Des agents parlent de se foutre en l’air. C’est catastrophique ! »

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| L’interview

PROTECTION SOCIALE

LA VOIX : Comment évaluez-vous aujourd’hui la participation des employeurs territoriaux à la protection sociale de leurs agents ? Jean-Pierre Moreau : La participation des employeurs ? Elle est quasiment inexistante. Imaginez qu’elle ne représente que 57 millions d’euros pour 1,7 million d’agents ! C’est de la charité… En comparaison, les allègements de l’État à la protection sociale des personnels du privé est de 35 milliards d’euros. C’est 70 fois plus. LA VOIX : Mais très peu de collectivités participent effectivement ! JPM. : C’est exact, ce sont principalement les grandes collectivités, 12 % de l’ensemble. Il faut espérer que le prochain décret, qui va définir les règles de participation, va être un déclencheur. Maintenant, je crains aussi que l’état de santé financier des collectivités ne permette pas d’aller bien loin. Cela d’autant que le régime complémentaire de santé (les mutuelles et assurances complémentaires) doit se substituer de plus en plus au régime obligatoire de Sécurité sociale. Et les inégalités tendent à s’accroître. LA VOIX : Demain, les collectivités pourront participer selon deux options : la labellisation et la convention de participation. Laquelle vous semble la plus favorable aux agents ? JPM. : La labellisation permettra aux agents d’adhérer directement à des opérateurs (mutuelles ou assurances) dont les contrats répondront à un certain nombre de règles. Cela me semble performant pour la couverture santé, car les agents auront le choix. En revanche, la convention de participation, qui se fera avec un opérateur après la mise en concurrence sur appels d’offres, représente une meilleure garantie sur la prévoyance (maintien de salaire…). Car c’est un risque lourd. Aujourd’hui, il faut 100 personnes qui cotisent pour supporter la durée d’invalidité d’un agent. Or, la durée moyenne d’invalidité tend à s’allonger vers les huit ans ! Avec l’allongement de l’activité, les situations d’invalidité risquent également de se multiplier… C’est pourquoi la contractualisation avec un prestataire pour une couverture collective me semble tout indiqué.

© MNT

« Ce n’est pas la concurrence que nous refusons mais la distorsion de concurrence ! »

Le président de la Mutuelle nationale territoriale (MNT), Jean-Pierre Moreau, déplore la faible participation sociale des employeurs territoriaux.

LA VOIX : Pourtant des clauses de solidarité ont été incluses dans ces options de participation… JPM. : L’État a limité l’aide des employeurs territoriaux à un système de solidarité entre actifs et retraités. On dit aux retraités : « Vous pouvez adhérer à ce contrat ! » Mais les contrats ne sont pas connus. Qui va en faire la publicité ? Les assurances ne vont pas démarcher les retraités que l’on laissera implicitement aux opérateurs historiques, comme la MNT. C’est pourquoi nous réclamons la création d’une caisse de compensation. LA VOIX : Vous redoutez la concurrence ? JPM. : Ce n’est pas la concurrence que nous refusons. Mais la distorsion de concurrence ! C’est pourquoi il faut introduire des régulateurs. LA VOIX : C’est pour cela que vous multipliez les regroupements mutualistes, comme Istya ? JPM. : Uniter, créée en 2007, nous a permis de rassembler les mutuelles territoriales pour défendre la profession et être représentés dans les instances de dialogue. En revanche, la création d’Istya en mai dernier avec la MGEN, MNH, MGET, MAEE vise plutôt à renforcer l’influence des mutuelles publiques à l’heure où les services publics sont fortement attaqués. Il était de notre devoir de réunir toutes les énergies, au moins celles des principales mutuelles, pour mener une réflexion commune. Sa vocation est de défendre le système de santé à la Française avec un régime obligatoire de santé et des mutuelles complémentaires, humanistes et solidaires. Et, Istya va bientôt rassembler 70 % de la fonction publique avec la mutuelle civile de la Défense qui nous rejoint. |

Réunie en assemblée générale à Vichy, la MNT a décidé le 25 juin d’augmenter ses tarifs 2012. Une augmentation symbolique pour la couverture santé (+ 0,5 %) mais plus importante pour la garantie collective prévoyance (+ 5 %). En 2010, la MNT a perçu 606,5 millions d’euros de cotisations santé et prévoyance, dégageant un excédent de 13,3 millions d’euros. La mutuelle territoriale compte 746 000 adhérents.

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| Carrière

© DR

Si la réforme de la catégorie B a capoté dans la filière médicosociale, en revanche, elle est maintenant actée pour les policiers municipaux, les animateurs territoriaux et les éducateurs des APS.

CATÉGORIE B

RÉVISION DU STATUT DES POLICIERS, ANIMATEURS ET ÉDUCATEURS vec la réforme de la catégorie B, les techniciens territoriaux n’avaient pratiquement rien gagné, deux ou trois points d’indice* de rémunération. Et ce sera la même chose pour les chefs de services de police municipale et les animateurs... Chez les animateurs, l’un d’eux en début de carrière a bénéficié jusqu’à neuf points de plus. Mais c’est peanuts en matière de revalorisation salariale », estime ce DRH d’une grande ville de l’Essonne. Pour reprendre l’exemple des policiers, leur reclassement dans le nouveau cadre d’emplois de chef de service de police municipale (PM) leur fera gagner de 1 à 5 points. Ce n’est donc, une fois encore pas du côté de la revalorisation des salaires qu’il faudra

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attendre des améliorations. Mais plutôt du côté statutaire… UNE AUTRE ORGANISATION DES CARRIÈRES Désormais calqués sur la même architecture de la catégorie B, les cadres d’emplois de chefs de service de police municipale, des animateurs et des éducateurs des activités physiques et sportives (APS) sont organisés en trois grades. Ces grades sont régis par les mêmes durées d’avancement d’échelon (29 ans pour chacun des deux premiers grades et 18 ans pour le troisième en durée minimale ; et respectivement 33 ans et 23 ans pour les durées maximales). Voir le détail sur le tableau p. 26. Que ce soit pour les chefs de service de police municipale, les animateurs ou des éducateurs des activités physiques et sportives, les trois grades sont maintenant structurés sur les mêmes échelles indiciaires. C’est-à-dire en 13 échelons pour le premier grade (IB 325 à 576) et le deuxième grade (IB 350 à 614), et en 11 échelons pour le troisième grade (IB 404 à

(*) La point d’indice majoré correspond à 4,63 euros bruts.

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| Carrière

660). Voir le tableau ci-dessous. Du côté de l’avancement de grade (et non d’échelon), l’autorité territoriale devra s’assurer qu’un quart au moins des promotions sera réservé à l’avancement direct (au choix) et à l’avancement avec examens professionnels. RECRUTEMENT SUR CONCOURS Pour le recrutement, les conditions de diplôme exigées pour

Des fins de carrières améliorées pour les policiers municipaux Au-delà de l’harmonisation du cadre d’emplois de catégorie B de la police municipale avec celui des autres filières territoriales, la réforme ne bouleverse pas les carrières. L’allongement des échelles permettra cependant à ceux en fin de grade de catégorie B d’avoir des perspectives d’évolution salariale un peu plus large (cf. article principal). Désormais, le cadre d’emplois comprend les trois grades de chef de service, chef de service principal de 2ème classe et chef de service de 1ère classe (cf. tableaux pour l’échelonnement et les durées/conditions d’avancement). Au-delà de la surveillance de l’ordre, de la tranquillité, de la sécurité et de la salubrité publique, les chefs de service auront également vocation à encadrer des agents de PM, à coordonner leur activité, et à être adjoint du directeur de

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PM. Du côté du recrutement, la principale ouverture est la création du troisième concours. La répartition des postes du concours de chef de service de PM (premier grade) en fonction des trois voies de concours est maintenant de 40 % pour le concours externe, 50 % pour le concours interne et 10 % pour ce nouveau troisième concours. Les lauréats de concours recrutés devront ensuite suivre une formation initiale de neuf mois qui pourra être réduite à six mois pour ceux ayant quatre ans de service ou qui ont suivi la formation de gardien de PM. Enfin, pour être nommé, au-delà des conditions de formation initiale, les stagiaires devront également décrocher l’agrément accordé par la préfecture.

les concours externes ont également été harmonisées. L’accès au premier grade de chaque cadre d’emplois se fait au niveau IV (Bac), et l’accès au deuxième grade au niveau III (Bac + 2). Des diplômes professionnels sont généralement exigés pour pouvoir concourir. Ce seront par exemple le brevet d’État d’animateur technicien de l’éducation populaire de la jeunesse, le brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport (BPJEPS) ou une qualification équivalente pour le concours d’animateur. Pour le concours sur le 2ème grade, d’animateur principal de 2ème classe, le diplôme d’État de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport (DEJEPS), un Deust “animation” ou un DUT “animation sociale et socioculturelle” seront requis, ou une qualification équivalente. Les concours externes d’éducateur des APS sont eux aussi sur titres. Sur le premier garde, il est ouvert aux titulaires d’un brevet d’État d’éducateur sportif, du BPJEPS sport ou d’une qualification équivalente. Sur le deuxième grade d’éducateur principal de 2ème classe, un DEJEPS « perfectionnement sportif » ou équivalent avec un certificat de sauvetage et sécurité en milieu aquatique (pour les activités aquatiques/natation) sera demandé pour se présenter à ce concours externe. POLICE MUNICIPALE : UN CONCOURS SEULEMENT SUR LE PREMIER GRADE En revanche, pour le seul concours externe de chef de service de PM sur le premier garde (il n’y en a pas, comme dans les autres filières, sur le deuxième garde), un diplôme sans spécialité particulière est requis. En revanche, deux épreuves écrites d’admissibilité serviront de filtre pour ce concours. En sachant que les candidats devront préalablement réussir un test psychologique. Pour les autres voies de concours, qu’il s’agisse du concours pour le premier voire


le deuxième grade de la catégorie B, le concours interne sera ouvert à ceux qui justifient d’au moins quatre années de services publics, et pour le 3ème concours, de quatre années dans des fonctions correspondant à celles rattachées au concours. Les lauréats de concours suivent ensuite une période de stage d’un an renouvelable exceptionnellement jusqu’à neuf mois. PROMOTION INTERNE Pour la promotion interne, c’est pareil. Les conditions pour être promu de la catégorie C à la catégorie B ont été rapprochées d’une filière à l’autre. Il en est ainsi de la condition d’ancienneté pour être admis à la promotion sans examen professionnel. Les agents détenant les grades de la catégorie C ouverts à la promotion interne devront au moins justifier de dix ans de service public. Ces grades sont, pour la police, ceux des brigadiers-chefs principaux et chefs de police qui pourront être promus chef de service (catégorie B). Pour accéder au cadre d’emplois des animateurs territoriaux (catégorie B), seuls seront admis les adjoints principaux de 1ère et de 2ème

classes s’ils ont réalisé au moins cinq ans dans le cadre d’emplois d’adjoint d’animation. En revanche, l’examen professionnel sera obligatoire pour la promotion interne sur le cadre d’emplois des éducateurs des APS. En effet, seuls les opérateurs qualifiés et les opérateurs principaux seront éligibles, après la réussite à cet examen, et à condition qu’ils cumulent deux critères d’ancienneté : cinq années au moins dans le cadre d’emplois des opérateurs des APS et huit ans de services publics. Une deuxième voie de promotion interne est également ouverte, via un examen professionnel, pour les agents de police municipale et les gardes-champêtres. Ceux-ci devront avoir huit années de services effectifs pour s’y présenter et prétendre à être nommés chef de service de PM (catégorie B). Enfin, un accès au 2ème grade, au titre de la promotion interne, est également ouvert dans la filière animation. Pour en bénéficier, les fonctionnaires justifiant d’une ancienneté de 12 ans dont cinq en tant qu’adjoint d’animation devront réussir l’examen professionnel dédié. |

Éducateurs des APS : 20 % des postes au 3ème concours Comme dans les autres cadres d’emplois de catégorie B, celui de la filière sportive est maintenant composé des trois grades d’éducateur des activités physiques et sportives (APS), d’éducateur principal de 2ème classe et d’éducateur principal de 1ère classe. Voir la grille dans les tableaux p. 26. Ceux-ci sont chargés de coordonner et de mettre en œuvre - sur le plan administratif, social, technique, pédagogique et éducatif, les activités physiques et sportives. Il s’adressent tant à des publics jeunes qu’adultes et peuvent mettre en œuvre des activités sportives ou de plein air. Dans leurs responsabilités leur revient la surveillance et la bonne tenue des équipements, l’encadrement d’agents de catégorie C, et dans les piscines, ils peuvent occuper le poste de chef de bassin.

Les ETAPS encadrent les participants aux compétitions sportives. D’autre part, les titulaires des deux grades supérieurs sont sensés développer une certaine expertise : conception du projet d’établissement/collectivité, l’animation d’une structure, le bilan d’activité… Et peuvent occuper les fonctions d’adjoint au responsable de service. Les deux concours externes d’accès au premier et au deuxième grades (cf. détail dans l’article principal) sont sur titres. Les postes ouverts sont ensuite attribués selon la répartition de 40 % au concours externe, 40 % au concours interne et 20 % pour le troisième concours. La formation d’intégration de cinq jours, en cours de stage, et celle de professionnalisation dans les deux ans seront obligatoires.

ANIMATEURS : DEUX CONCOURS DE CATÉGORIE B

Les trois grades d’animateur, d’animateur principal de 2ème classe et d’animateur principal de 1ère classe composent la nouvelle architecture du cadre d’emplois. Ils ont vocation à encadrer (notamment les adjoints d’animation) et à coordonner les activités dans le secteur périscolaire, et dans les domaines de l’animation des quartiers, de la médiation sociale, de la cohésion sociale, du développement rural et de la politique du développement social urbain. Les titulaires des deux grades supérieurs doivent exercer une certaine expertise : conception, coordination, actions de formation… Et peuvent occuper les fonctions d’adjoint au responsable de service. Répondant à l’organisation commune de la catégorie B (dont font exception les policiers municipaux), deux concours sont créés. Le premier permet d’accéder au premier grade (animateur), et le second, au deuxième grade (principal de 2ème classe). En externe, ce sont des concours sur titres (cf. article principal). La répartition des postes mis à concours se fait ainsi pour 30 % au concours externe, 50 % au concours interne et 20 % pour le troisième concours (voir aussi l’article principal). Les deux concours s’organisent autour d’une épreuve écrite d’admissibilité et une épreuve orale d’admission. Toutefois, pour l’accès au deuxième grade, les concours interne et troisième concours auront en plus une deuxième épreuve écrite d’admissibilité. Comme pour les autres cadres d’emplois rénovés de la catégorie B, la période de stage est d’un an et renouvelable neuf mois. Durant celle-ci, les animateurs stagiaires devront faire leur formation d’intégration dans leurs nouvelles fonctions, formation qui dure cinq jours. n° 316 | Juin 2011 |

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| Syndicaliste

MARTINIQUE

MOBILISER LES AGENTS : UN IMPÉRATIF ! Philippe Gaillard souligne volontiers que la CFTC a obtenu un certain confort professionnel pour les agents de la communauté de communes NordMartinique. Mais, difficile maintenant de mobiliser les collègues… ’étais porté à aider les autres… J’ai participé à différentes associations sportives, culturelles ou à la Croix Rouge où je conduisais des camionnettes pour différentes manifestations. Mais c’est vraiment un concours de circonstances qui m’a conduit à co-fonder le syndicat CFTC de la communauté de communes Nord-Martinique », se souvient Philippe Gaillard, qui en occupe aujourd’hui les fonctions de secrétaire général adjoint. Lorsque un jour de 1995, un conducteur du service des ordures ménagères prend contact avec lui, c’est pour lui proposer de créer le premier syndicat de la CCNM, et

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d’en prendre les rênes. « Il pensait à la CFTC. Cela tombait bien. Sur mon précédent poste à la mairie de Paris, j’étais déjà adhérent CFTC. En revanche, j’étais plus gêné pour la direction du syndicat. Car cela entrait en conflit avec mes responsabilités de chef d’équipe », relève-t-il. Objection vite soulevées. Les deux collègues montent peu après le syndicat dont Philippe Gaillard deviendra finalement la cheville ouvrière. FIN DE LA PRÉCARITÉ Depuis, 16 années ont passé. Et philippe Gaillard égrène les victoires qui se sont empilées, à la force de convictions partagées par l’équipe CFTC. Titularisation de 80 % des effectifs,

Témoignage

« J’apprécie son ouverture d’esprit »

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Jocelyne Hilarus, trésorière du syndicat CFTC de la CCNM

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« Sur les six membres du bureau syndical, Philippe joue un rôle particulier. Il est véritablement un animateur privilégié de l’équipe. Et il apporte une véritable expertise tant sur les dossiers techniques sur les carrières des agents que sur le fonctionnement de la collectivité. C’est quelqu’un

qui a besoin de préparer en détail les dossiers avant d’aller les défendre. C’est aussi quelqu’un qui défend bec et ongles ses convictions, tant dans la défense des agents que dans le fonctionnement du syndicat. Ce qui ne manque pas de susciter entre nos deux tempéraments forts des discussions animées. Mais j’apprécie avant tout son ouverture d’esprit et l’esprit de travail qui nous permet de construire nos positions sur les différents sujets ! »


Parcours 1976 : ouvrier d’ajustage dans une unité de production dans les secteur aéronautique. 1980 : concours de la ville de Paris où il entre comme adjoint technique au service de l’éducation où il prépare les installations sportives. Il y évolue sur différentes missions. 1994 : il est d’abord détaché à la communauté de communes Nord-Martinique avant de l’intégrer en 1996. Contrôleur chargé de la gestion de la collecte des déchets sur une dizaine de communes pour le service environnement.

Philippe Gaillard, secrétaire adjoint du syndicat CFTC veille quotidiennement à l’avancée des conditions de travail pour les agents de la communauté de communes NordMartinique.

mise en place d’un régime indemnitaire pour l’ensemble des agents, accompagnement du plan de formation, résolution de problèmes individuels… « La grève de 2000 est gravée dans nos mémoires !, se remémore le représentant CFTC. À l’époque, le préfet a dû intervenir car nous avions bloqué le ramassage des déchets. Le président de la CCNM refusait en effet de négocier le régime indemnitaire. » Pas à pas, la CFTC a obtenu gain de cause, sur plusieurs années. « Aujourd’hui, les relations sociales sont beaucoup plus apaisées. Et nous sentons que les agents sont moins sur le qui-vive. C’est un peu frustrant. Car on les sent aussi moins mobilisés lorsque nous organisons des réunions d’information… », ajoute-t-il. Néanmoins, la CFTC reste toujours active. Dans les réunions de CTP, où Philippe Gaillard siège, comme pour défendre les cas particuliers. « PLUS DES PROBLÈMES INDIVIDUELS » Le militant sait qu’il devra aller au charbon lorsque les sujets sont sensibles. « Je suis habitué à prendre les coups de bâton », se justifie-t-il même s’il reconnaît obtenir des

1995 : il fonde avec Louis Thérès le syndicat CFTC dont il occupera à peu près tous les postes en fonction de l’évolution de l’équipe. 2000 : Philippe Gaillard décroche l’examen professionnel d’agent de maîtrise. 2007 : Il couple ses fonctions avec des missions de prévention (ACMO) dans le champ professionnel. 2008 : agent de maîtrise principal, il est alors promu contrôleur de travaux. 2008 : il occupe le poste de secrétaire adjoint du syndicat CFTC.

avancées. Dernièrement, le syndicat est allé enquêter dans un service où les agents se plaignaient d’être sous pression et en état de stress permanent. « Nous avons identifié le problème, une question de mauvais management. J’ai rédigé le rapport qui a été remis au président. Il n’a pas encore réagi. Mais je lui ai dit que nous attendions des interventions rapides sur ce genre de question… » Il relate aussi son intervention d’il y a deux semaines pour encourager la collectivité à nommer quatre agents qui ont décroché l’examen professionnel d’adjoint administratif de 1ère classe. « Nous avons eu gain de cause ! » Moins sur des questions collectives, plus sur des problèmes individuels, le syndicat CFTC travaille sur les conditions de travail et d’emploi. Des questions que le leader CFTC connaît bien. « Je suis chargé de la prévention des risques professionnels dans le cadre de mes fonctions professionnels », précise le militant qui peut concilier emploi et action syndicale, grâce à la participation de l’ensemble de l’équipe. Si le syndicat a été rejoint pendant quelques années par un syndicat concurrent, le CDMP, celui-ci n’a pas tenu. Il n’empêche. Philippe Gaillard s’attache à encourager, avec une pointe d’humour, ses adhérents à rester. « Ce n’est pas parce qu’il n’est pas arrivé de sinistre sur votre voiture ou votre maison que vous arrêtez de payer l’assurance. Alors pourquoi arrêter d’adhérer alors que la somme est modique en comparaison ? » Et, avec ses collègues CFTC, il ne manque pas de démontrer chaque jour sa détermination à défendre et « aider à s’élever professionnellement ». | n° 316 | Juin 2011 |

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| Solidaire

Lorsqu’elle a un peu de répit entre activité syndicale et son emploi de secrétaire de mairie, Marie-José Marquet donne vie à des poupées. Zoom sur un phénomène de mode : le reborningnewborning.

Reborning : poupées de collection ou représentations humaines ? ne passion naît rarement par hasard. Aussi, celle de Marie-José Marquet pour le reborning s’est révélée au moment où ses petites filles naissaient… « Un jour, sur Internet, j’ai vu la photo d’une poupée en croyant que c’était une vraie petite fille. Elle y ressemblait à s’y méprendre ! C’est là que j’ai découvert l’art de créer des poupées hyper réalistes de très jeunes enfants. Cela m’a intrigué et j’ai voulu essayer… » Elle pénètre alors dans une mode montante venue des Etats-Unis. Un Américain, Pat Secrist s’est mis en tête de redonner vie à des poupées anciennes qu’il récupérait avant de les décaper pour les refaire complètement. « Elles n’étaient pas très belles. Mais lorsque le phénomène a pris, on a commencé à fabriquer des kits de poupées brutes à créer soi-même. Et, le perfectionnement des techniques a permis de s’approcher de plus en plus d’un véritable enfant. C’est pour cela que je préfère appeler cet art, le newborning… »

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L’agent pyrénéen expose et fait découvrir le reborning fr marie-jose.marquet@sfr.

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NEW BORNING : ENTRE ART ET PASSION Depuis la création de son premier poupon, pas très réussi, il y a trois ans, Marie-José Marquet a développé un véritable savoir-faire et un intérêt fort pour l’activité. C’est ainsi en partageant, sur un forum sur le web, qu’elle a découvert qu’une autre passionnée habitait à

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25 kilomètres de chez elle, dans les Pyrénées-Orientales. Il ne leur en faut pas plus pour lancer le projet d’une association. « Reborning-newborning : entre art et passion » est finalement lancée à trois au début de l’année. « La vocation de l’association est vraiment de faire découvrir notre art et de partager notre passion, insiste la créatrice. Certes, nous vendons aussi nos poupées à prix coûtant car c’est une activité très onéreuse. Cela nous permet de racheter des kits et le matériel nécessaire que l’on fait venir des Etats-Unis ou de pays européens… » Avec 70 poupées à son actif, la revente s’est d’ailleurs vite imposée pour libérer de la place. Les subsides lui permettent ensuite de racheter le kit avec les seuls membres de la poupées en vinyle qui coûte plus de 100 euros (beaucoup plus pour les collectors produits en nombre limité). « Une poupée, c’est environ 40 heures de réalisation. Je passe entre 20 et 30 couches de peinture pour travailler les nuances, et entre chacune d’elle je cuis la poupée. La peinture se fixe à chaud. Ensuite, je dois implanter à l’aiguille, un à un, les cheveux, des poils de chèvre Angora d’Asie mineure (mohair). » Il faudra encore mettre les billes de verre à la place des yeux et lester la poupée qu’elle ait le poids véritable d’un enfant de cet âge. Un art encore puisque cela permet de donner à la poupée des positions naturelles… Marie-José Marquet aime ensuite aller au contact du public et récolter les réactions d’étonnement et d’admiration. « Le public n’est jamais indifférent. Mais dans les grandes villes, les personnes s’intéressent beaucoup plus aux procédés et à l’histoire du newborning. Il m’est aussi arrivé d’avoir des réactions hostiles. Des personnes s’indignent face à autant de réalisme dans nos œuvres… » Alors ces poupées, un cadeau pour ses petites filles ? « Non, les poupées sont bien trop lourdes pour de jeunes bras…, objecte aujourd’hui la newborneuse. Ce sont plus des objets de collection ! » |


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