Le réveil des combattant - Octobre 2011

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70e anniversaire de Châteaubriant

L’euro et la crise

le réveil octobre 2011 - N°777 - 5 e

L’ARAC contre le fascisme

des combattants

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

s é h c r a m s e d i o l La menace-t-elle t e e i t a r c o m é d a l é t e n i a r e v u o s a l nationale ?

Le journal des droits de tous les anciens combattants et victimes de guerre


LE RÉVEIL actualités

e rsaire Afin de préparer le 50 annive , en 2012… de la fin de la guerre d’Algérie ur envoyer vos témoignages sur « votre » …le Réveil fait appel à vous, lecteurs, po vos espoirs, vos désespoirs, vos difant rim exp s, oto ph , res lett : rie lgé d’A e guerr ont marqués, qui vous ont émus. us vo i qu s film es, livr les e qu si ain ficultés… nvoyer vos témoignages d’e ou il ve Ré le r cte nta co de rci Me par courrier ou par mail : ridien - 94807 Villejuif cedex Réveil des Combattants - 2 place du Mé ttants@wanadoo.fr Tél. 01 42 11 11 11 - reveil-des-comba

o t m e d b n o a l r L e l a R n é r v u e o j i l d e r t e s Combat a G outenir no Pour s

Campagne de souscription 2011

Pour soutenir le Réveil des Combattants, une voiture est à nouveau en jeu, ainsi que de nombreux lots. Il s’agit de donner à notre journal les moyens de vivre et de se développer. L’an dernier, 40 000 euros ont été collectés qui ont permis la poursuite de l’aventure de notre journal. Pour participer à cette souscription, vous pouvez acheter un carnet entier et vendre des bons de soutien auprès

tants

de votre famille, de vos amis et camarades. Il est possible d’acheter un ou plusieurs bons à l’unité. Vous devez, dans tous les cas, retourner au siège national (Réveil des Combattants - 2 place du Méridien - 94800 Villejuif), la ou les souches remplies et accompagnées de votre règlement (2 à 20 euros ou plus) et garder votre ou vos tickets.

La date butoir pour le retour des souches est fixée au 5 décembre 2011.

Cette année encore, une voiture à gagner ! Tirage le 26 décembre 2011 2-

LE RÉVEIL - N°777 - octobre  2011


ÉDITO LE RÉVEIL

SOMMAIRE Actualités p. 4 Campagne de Balladur : trou noir dans le financement.. . . . . . . . . . . . 4 11 novembre et célébration de l’armistice 14/18.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 Décès d’Henri Karayan. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Les structures publiques aux enchères. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Les vrais comptes des niches fiscales. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 L’euro et la crise.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 Paradis fiscaux : la main dans le sac.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 International p. 10 Libye : retour sur une guerre coloniale.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 Pour la libération de Salah Hamouri.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 Grèce : l’appel de Mikis Théodorakis.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 Vos droits p. 21 CGT ONAC : non à la casse de l’office.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 Budget 2012 des ACVG : au Sénat de s’affirmer.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Pauvre France.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Commission de la carte du combattant. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Vie de l’ARAC p. 25 Commémoration du 17 octobre 1961.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 19 octobre : rassemblement contre le budget des ACVG.. . . . . . . 27 70e anniversaire des fusillés de Châteaubriant. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 Magazine p. 30

P. 13 D o s s i e r Comme hier, aujourd’hui combattons le fascisme ! L’ARAC, depuis sa création, s’est élevée contre le fascisme. Aujourd’hui, il est urgent de s’opposer aux attaques des marchés contre la République et la démocratie, qui peuvent ouvrir la voie au fascisme.

LE RÉVEIL DES COMBATTANTS Fondé en 1931 par Henri-Barbusse Mensuel de l’Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre. Commission paritaire n° 0713-A 06545 Édité par les Éditions du Réveil des Combattants SARL au capital de 45 734,41 - Siret : 572 052 991 000 39 2, place du Méridien, 94807 Villejuif cedex Téléphone : 01 42 11 11 12 Télécopie : 01 42 11 11 10 reveil-des-combattants@wanadoo.fr

Tirage : 60 000 exemplaires Gérant-directeur de la publication : Raphaël VAHÉ • Directeur délégué : Patrick STAAT • Rédacteur en chef : Raphaël VAHÉ • Service photos : Jean-Claude Fèvre • Secrétariat de rédaction, conception graphique : Escalier D Communication • Impression : RIVET P.E. - 24 rue Claude-Henri-Gorceix, 87022 Limoges cedex 9

La loi des marchés menace t-elle la démocratie et la souveraineté nationale ?

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vec la dette, les marchés mettent la main sur la gouvernance des pays européens, tentent d’imposer une conception fédéraliste de l’Europe pour soumettre totalement l’économie des pays concernés. Toutes les mesures prises en Grèce, en Italie, en Espagne, au Portugal, et aujourd’hui en France, conduisent à une réduction du pouvoir d’achat, à un repli économique, à la récession. La dette est construite par les banques pour accentuer leurs profits avec la complicité des gouvernements. Nous exagérons ? Savez-vous que Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne, a été vice-président pour l’Europe de Goldman Sachs ; que Loukas Papademos, le nouveau Premier Ministre de la Grèce, a été gouverneur de la Banque de Grèce, quand Goldman Sachs a falsifié les comptes pour permettre à la Grèce d’être qualifiée pour l’euro ; et que Mario Monti, le nouveau président du Conseil italien, a été durant dix ans commissaire européen et conseiller international de Goldman Sachs en 2005. Que peut-on attendre de tels dirigeants ? Ils s’attaquent aussi à l’histoire et à la mémoire de la nation. Cette histoire a fait de la nation française le pays des droits de l’homme. Cette France battante, conquérante, républicaine, ils ne la supportent pas, elle est forte de luttes pour l’indépendance nationale, la liberté, la démocratie. Ce n’est pas un hasard si en 2007, quand est élu Nicolas Sarkozy, Denis Kessler dirigeant du patronat déclare le 4 octobre 2007 : «…La liste des réformes ? C’est simple, aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance. » Nous devons nous rassembler, affronter les enjeux avec courage et détermination, dire haut et fort que d’autres choix sont possibles que ceux du marché et de l’asservissement des peuples, « car cette politique porte en elle la résurgence du fascisme » comme le déclare Mikis Théodorakis. Ce combat nous concerne tous, retraités, salariés, hommes, femmes, jeunes, chômeurs. Tous, nous sommes ensemble une force qui peut porter un nouvel avenir pour la France. L’heure est grave, il y a urgence, alors faisons nôtres les mots d’Aragon dans La rose et le réséda : « Quand les blés sont sous la grêle, fou qui fait le délicat, fou qui songe à ses querelles au cœur du commun combat ».

Patrick Staat octobre  2011 - N°777 - LE RÉVEIL

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Un trou noir dans le financement de la campagne de Balladur Le Canard Enchaîné du 19/10/2011 Au printemps 1995, on se bousculait à l’agence du Crédit du Nord du boulevard Haussmann, à Paris, pour verser discrètement de l’argent liquide sur le compte de l’association de financement de la candidature d’Édouard Balladur. Tellement discrètement que même le trésorier, René Galy-Dejean, l’ignorait. C’est en tout cas la version comique que l’ancien homme de confiance de Ballamou, aujourd’hui brouillé à mort avec lui, a servie aux enquêteurs. D’où viennent les cinq dépôts d’espèces du 21 avril 1995 (deux jours avant le premier tour), qui s’élèvent à 1 695 340 francs ? « Je l’ignore », a répondu GalyDejean au juge Van Ruymbeke. Et de préciser : « En tant que trésorier, je n’avais aucune responsabilité pour ce qui est des recettes. » Il ne s’occupait que des dépenses… Normal, donc, que cette moitié de trésorier ne s’explique pas plus le dépôt en cash de 7 millions de francs le

26 avril. Mais il a sa petite idée sur les coupables. Balladur ou Bazire aurait-il pu déposer subrepticement cet argent ? « Je ne vois pas qui d’autre. » Galy-Dejean reconnaît tout de même un dépôt en espèces de près de 3 millions ce même 26 avril. Il précise, fulgurance soudaine de sa mémoire, qu’il y avait notamment des billets de 10 francs. Sauf que ces coupures étaient déjà démonétisées depuis quinze ans… Le directeur de l’agence, lui, affirme mordicus que c’est Galy-Dejean en personne qui a apporté les biffetons. Impossible de faire appel à des témoins pour trancher : le directeur avait reçu comme consigne du grand patron de la banque de gérer le compte de Balladur en secret, « sans en référer à sa hiérarchie ». Que faire devant tant d’adversité ? Exhumer les archives de l’agence ? Impossible : elles ont été détruites en juillet 2007.

bon de commande

calendrier 2012 e Spécial 50 anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie Nom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prénom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Écrire en lettres capitales et adresser ce bon au Réveil des Combattants 2 place du Méridien - 94807 Villejuif cedex.

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Bernard Tapie évite 70 millions d’impôts Le Canard Enchaîné du 19/10/2011 Bernard Tapie ne paiera pas un sou d’impôt sur le pactole - plus de 250 millions d’euros - qu’il a perçu dans l’affaire Adidas. Lorsqu’elle était ministre de l’Économie, Christine Lagarde avait pourtant assuré que le magot serait sévèrement raboté par le fisc. C’était compter sans Nanard, qui a trouvé la bonne astuce pour échapper aux rigueurs de l’impôt. A la fin de 2010, la quasi-totalité de sa fortune, qu’il avait placée dans la société GBT, a été transférée vers une holding. A quoi rime cette opération révélée par Charlie Hebdo ? Un jour ou l’autre, Nanard aurait dû sortir cet argent de sa société française. Il aurait alors été imposé sur la plusvalue, en fait sur la totalité de sa toute nouvelle fortune, à un taux autour de 30 %. Soit un impôt de quelque 70 millions. Heureusement, en Belgique, les plus-values des entreprises échappent à toute imposition. Et le gonflement de GBT Holding, qui est passé d’un modeste capital de 20 000 euros lors de sa création, le 20 octobre 2010, à 215 millions le 24 décembre suivant, quand Nanard lui a rapporté ses économies, laisse le fisc belge de marbre. Interrogé par Le Canard, Tapie a expliqué ce transfert Outre-Quiévrain par une « grosse opération en Belgique ». Une grosse opération fiscale ?


ACTUALITÉS LE RÉVEIL

Communiqué du Secrétariat national de l’ARAC

Le 11 Novembre doit rester le jour de célébration de l’armistice de 14/18 Bien qu’il n’ait pas remis en cause la commémoration de l’armistice du 11 novembre 1918, le Président de la République demande au gouvernement de présenter une proposition de loi faisant du 11 novembre la date commémorative d’hommage à tous « les morts pour la France » de toutes les guerres qu’elle a menées. L’ARAC approuve les positions prises par l’UFAC en la matière, repoussant toutes les propositions qui n’ont d’autres objectifs que d’aboutir à l’instauration d’une journée nationale du souvenir, incompatible avec la symbolique de chacune des grandes dates de notre histoire contemporaine. Ainsi, lors de chaque manifestation patriotique, des grands témoins qui vécurent les tourments et les combats, les témoins de témoins comme l’a souhaité Lucie Aubrac, contribuent à l’indispensable travail de mémoire auprès des générations nouvelles leur permettant ainsi de mieux comprendre le présent. Toutes les familles de France, quelles que soient leurs origines géographiques, ont été meurtries par la guerre de 1914-1918. Mais également par toutes les autres guerres qui ont suivi. Ces familles témoignent d’une manière ou d’une autre de l’impact de ces drames sur leurs vies et celle de leurs proches. Que tous les « morts pour la France » méritent l’hommage de la Nation, c’est incontestable ; mais cet hommage doit prendre en considération les singularités de chaque conflit. Gommer les significations de chaque conflit en les commémorant ensemble, c’est occulter les valeurs symboliques spécifiques pour lesquelles nos concitoyens sont morts.

Vouloir imposer et mêler tous « les morts pour la France », c’est porter atteinte, de façon autoritaire et antidémocratique, au cadre dans lequel doit s’exercer la transmission et l’appropriation de la mémoire historique par les générations nouvelles. C’est décourager par la profusion des motifs en une seule cérémonie la compréhension des citoyens et des citoyennes. C’est aussi réaffirmer la volonté gouvernementale de ne pas reconnaître la vérité historique du cessez-le-feu en Algérie du 19 mars 1962 dont le 50e anniversaire doit être impérativement et largement commémoré en 2012. L’ARAC déclare inacceptable cette proposition du chef de l’État et elle interpellera l’ensemble des parlementaires et l’opinion publique pour leur faire connaître sa position. Souhaitant que tous « les morts pour la France » reçoivent l’hommage de la Nation, l’ARAC demande qu’une journée de mémoire soit consacrée aux « morts pour la France » des OPEX et que le 19 mars de chaque année soit la date de célébration officielle de commémoration du cessez-le-feu qui permit de mettre fin à la guerre d’Algérie ainsi que l’hommage à tous les sacrifiés de ce conflit.

Villejuif, le 14 novembre 2011

Décès d’Henri Karayan L’un des derniers combattants du groupe Manouchian « Je n’ai jamais tué d’Allemands, je n’ai tué que des nazis ». Voilà ce qu’avait coutume de répondre Henri Karayan lorsqu’on l’interrogeait sur ses actions armées durant la Résistance. Henri Karayan est décédé mardi 2 novembre. Il avait été l’un des compagnons de Missak Manouchian et était l’un des derniers témoins du groupe des FTPMOI, de ces hommes et ces femmes, « Français de préférence », dont l’Affiche Rouge perpétue le souvenir. Né en 1921 à Istanbul, dans une famille arménienne victime du génocide de 1915. Missak Manouchian, intellectuel engagé qui avait adhéré au Parti communiste français en 1934 et qui participait avec Henri Barbusse et Romain Rolland au mouvement Amsterdam-Pleyel contre la guerre, travaillait à mettre sur pied une nouvelle structure : l’Union populaire franco-arménienne. C’est dans ce cadre que la famille Karayan reçoit sa visite. Le jeune Henri a alors 17 ans. Entre le jeune homme et l’intellectuel, le courant passe. « Quand nous évoquions l’actualité », témoigne encore Henri Karayan, « nous étions si bien en résonance que j’aurais presque pu terminer ses phrases ». En mai 1940, Henri Karayan est incarcéré à la prison Saint-Paul de Lyon. En avril 1943, il s’engage dans la lutte armée. Il est incorporé aux côtés de Marcel Rayman et de Tamas Elek, au groupe de jeunes FTP-MOI, sous le commandement de Missak Manouchian. Jusqu’à il y a quelques mois, il n’a cessé de témoigner, d’expliquer les valeurs et les motivations qui l’ont habité, la fraternité qui le liait à ses camarades de combat, leur lutte pour la liberté et l’universalisme. Respect à l’homme et ses combats. Le Secrétariat de l’ARAC octobre  2011 - N°777 - LE RÉVEIL

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Les structures publiques aux enchères Dans la Santé, le contrat de partenariat privé c’est que du bonheur pour les actionnaires financiers ! Depuis quelques années les politiques se sont mis en accord avec les financiers pour déléguer, sous forme du PPP (1), la construction, la réhabilitation, l’entretien, la maintenance, l’exploitation et la gestion d’un équipement à un prestataire privé. Ainsi se sont multipliés les PPP, que ce soit pour la construction d’un stade, d’un équipement sportif, d’une école ou encore, par exemple, le siège du ministère de la Défense à Balard (300 000 m2), ou dernièrement, sous forme de BEH (2), la conception et construction d’un centre hospitalier comme celui du Sud Francilien (110 000 m2) en Essonne. Certains élus se laissent tenter, puisque les arguments mis en avant pour vanter un PPP sont les économies supposées en évitant l’emprunt, en maîtrisant les dettes. D’autres élus sont acquis d’avance à cette stratégie, il s’agit bien de stratégie financière et économique, car les opérations ainsi menées qui échappent à la maîtrise d’ouvrage publique n’ont comme objectif pour les grandes entreprises du BTP et les groupes financiers que de faire du bénéfice et de distribuer des dividendes à leurs actionnaires. Les contrats de partenariat privé dépossèdent les élus et les usagers de la maîtrise de leurs équipements publics et de leur devenir. Tous les contrats de partenariats dénoncés aujourd’hui le sont parce qu’ils s’avèrent moins fiables qu’une maîtrise 6-

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d’ouvrage publique et surtout plus onéreux, pouvant atteindre des surcoûts de plus de 70 % ! Cette stratégie de gestion de la commande publique est à dénoncer, à refuser, car elle constitue une « bombe à retardement » en reportant des dettes parfois de plusieurs milliards d’euros sur l’avenir de futurs usagers et citoyens. Des exemples de contrats de partenariats, baux emphytéotiques hospitaliers, font irruption et sont repris dans la presse. Le plus décrié est celui du CH Sud Francilien conclu en 2006 entre le ministre Xavier Bertrand et les maires d’Evry, M. Valls, et de Corbeil, M. Dassault. Cette opération est un véritable fiasco et un scandale politique : cette construction qui devait se monter à 400 millions d’euros, se chiffre à travers un bail sur 30 ans à 1,8 milliard d’euros ! Cette opération, construite par Eiffage, vendue avec garantie de rapidité et de qualité pour être livrée en fin 2010, est retardée depuis 2 ans pour malfaçons ! Ce bâtiment, pourtant vide de patients et d’hospitaliers, commence déjà à coûter à la collectivité et va coûter très cher à la population. Eiffage réclame les loyers (loyer annuel de 41 millions d’euros) et pour payer, le directeur (M. C. Evin) de l’Agence régionale de santé (ARS) a décidé des « économies » de postes de personnels et des réductions d’activités (fermetures de lits de chirurgie orthopédique …) Pour payer la dette contractée par le BEH, et « rentabiliser » le site des partenariats d’activités médicales public privé, des pôles d’activités concurrents, nés de la loi HPST, sont programmés.

Consultations privées, médecine lucrative, tarification à l’activité, logique de faire des recettes plutôt que des dépenses pour satisfaire les besoins, et prestations plus onéreuses pour le patient (chambres individuelles, hôtellerie). Il ne s’agit plus à travers cela de service public hospitalier mais bien d’entreprise de soins appartenant à Eiffage, qui compte bien récupérer son investissement avec intérêt ! L’hôpital public déjà en difficulté par manque de financement national, mis en déséquilibre par d’absurdes concurrences des tarifs et des prises en charge avec les cliniques privées, est maintenant remis en cause dans son concept, ses objectifs. Des choix politiques de contrats de partenariat privé, de sousfinancements des besoins risquent de porter gravement atteinte à l’accès aux soins pour toute la population si une intervention citoyenne de plus grande ampleur ne se manifeste pas. Pour nous, la dette contactée par le BEH doit être réglée en faisant payer les actionnaires. Il serait scandaleux de présenter la facture aux usagers. Les élus doivent prendre leurs responsabilités pour exiger du gouvernement un règlement politique de cette situation et l’arrêt de tous les contrats de partenariat privé pour la construction d’établissements hospitaliers. L’hôpital doit rester un service public, seul garant de satisfaire et d’élargir une réponse innovante à nos besoins de santé et d’action sociale. Hervé Corzani 1 - PPP : partenariat, public, privé 2 - BEH : bail emphytéotique hospitalier


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Les vrais comptes des niches fiscales Plus on est riche et plus on a les moyens de réduire ses impôts Dans son numéro de septembre, le mensuel Alternatives Economiques révèle la face méconnue, mais accessible à qui sait fouiller les documents budgétaires, des niches fiscales. Intitulée « Les vrais comptes des niches fiscales », l’enquête raconte comment les gouvernements déclassent des dizaines de dépenses fiscales dont on ne tient plus compte dans le recensement officiel des niches. Ainsi, les allègements et autres exonérations d’impôts accordés par l’État coûtent deux fois plus cher qu’on ne le dit et accroissent les injustices. Sur la sellette, quelque 500 mesures dérogatoires qui permettent aux contribuables (les plus aisés) et aux entreprises (les plus grandes) de réduire leurs impôts. Le manque à gagner pour les comptes publics s’élève à 65 milliards d’euros, soit un quart des recettes fiscales nettes de l’État. Mais il faut aussi ajouter les niches qui ont été « déclassées ». Derrière cette appellation se cachent de nombreux dispositifs dont on ne tient tout simplement plus compte dans le recensement officiel. Au total depuis 2006, cette technique a permis de soustraire à l’inventaire au moins 80 milliards d’euros de manque à gagner pour l’État, soit environ 35 % de ses recettes fiscales nettes. Si on y ajoute les 65 milliards liés aux niches dûment répertoriées, le coût global pour l'État avoisinerait donc 145 milliards d'euros, soit plus de 95 % de son déficit annuel ! Les artifices du déclassement ont en effet accrédité l'idée, fausse, selon laquelle les niches fiscales auraient d'abord une vocation sociale et qu'il serait donc difficilement envisageable de les réduire dans des proportions importantes. Certaines d'entre elles ont effectivement une fonction d'aide aux plus modestes. C'est le cas par exemple de la prime pour l'emploi, un crédit d'impôt dont profitent plus de 8 millions de ménages pour un coût estimé à près de 3 milliards d'euros.

Mais beaucoup de ces niches profitent d'abord aux grandes entreprises, aux hauts revenus et aux gros patrimoines. Si les grandes entreprises ont un taux effectif d'imposition largement inférieur à celui des petites, c'est en effet en bonne partie parce qu'elles jouent des niches fiscales pour optimiser leurs impôts, un sport auquel les PME ont moins aisément accès.

Quelques exemples • Le régime des sociétés mères et filiales (niches déclassées) qui exonère d’impôt sur les sociétés les dividendes versés par une filiale à sa société mère : coût estimé à 23,3 milliards d’euros en 2010, mais déclassée en 2011. • Le régime d’intégration de droit commun (niche déclassée) qui permet de faire remonter tous les résultats des filiales sans imposition vers la tête du groupe : coût estimé à 18,4 milliards d’euros en 2009, et déclassée depuis. • L’exonération des plus-values réalisées sur les titres de participation (niche déclassée dite « niche Coppé ») : coût estimé à 2,2 milliards pour 2010 et déclassée en 2011.

• Le crédit d’impôt recherche qui profite surtout aux grandes entreprises, alors que le caractère réel de la recherche est souvent discutable (c’est ainsi qu’une banque à réussi à bénéficier de crédit recherche pour la création d’algorithmes mathématiques pour mieux spéculer). Les déclassements favorisent aussi les forts patrimoines, notamment les droits de mutation à titre gratuit (717 millions d’euros de niches fiscales déclassées et 614 milliards classées) et l’impôt de solidarité sur la fortune (1,2 milliard d’euros de niches fiscales déclassées et 800 millions classées). Au final, que l'on s'intéresse aux ménages ou aux entreprises, la règle est à peu près la même : plus on est riche et plus on a les moyens de réduire ses impôts. B.C. A lire sur ce sujet : - A l’ombre des niches fiscales de Katia Weidenfeld, coll. Pratique du droit, Economica, 2011-10-25 - Documentaire budgétaire disponible sur internet : www.performance-publication-budget. gouv.fr/farandole/2011/pdf//VMT2-2011.pdf

L’impôt et les entreprises du CAC 40 En 2010, selon une enquête du JDD, une entreprise du CAC 40 sur quatre n’a pas payé d’impôts sur les sociétés en France en 2009. On apprend que Total, qui a réalisé un résultat net de 8,3 milliards d’euros en 2009, Danone, Essilor, SaintGobain, Schneider, Suez Environnement ou encore Arcelor Mittal ne paient aucun impôt sur leur bénéfice en France. Pour bénéficier d’un impôt nul, toutes ces sociétés utilisent les nombreuses possibilités qui leur sont offertes par le Code des impôts, comme le report limité des pertes, l’intégration fiscale des gains et pertes des filiales françaises par la maison mère, la déductibilité des intérêts, le crédit impôt recherche… Ces fameuses niches fiscales profitent aux entreprises du CAC 40. Un rapport de la Cour des comptes souligne que « les profits des entreprises du CAC 40 ne sont taxés qu’à hauteur de 6 % en moyenne ». Total, avec 8,3 milliards de bénéfices au niveau mondial en 2009, échappe pourtant aux impôts. Pourquoi ? Ses raffineries en France sont toutes déficitaires.

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L’accord signé

ne fait que prolonger l’agonie de l’euro Les dirigeants de la zone euro ont conclu un accord, vers 4 heures du matin ce jeudi 27 octobre, pour tenter de sauver l'euro. Pourtant, selon Jacques Sapir, ce plan anticrise est le « pire accord envisageable », car il va contribuer à nous plonger encore davantage dans la récession et priver l'Europe de son indépendance. D'autant plus qu'il ne suffira pas à sauver la Grèce. L’accord réalisé cette nuit ne fera que prolonger l'agonie de l'euro, car il ne règle aucun des problèmes structurels qui ont conduit à la crise de la dette. Mais en plus, il compromet très sérieusement l'indépendance économique de l'Europe et son futur à moyen terme. C'est en fait le pire accord envisageable, et un échec eut été en fin de compte préférable. Nos gouvernements ont sacrifié la croissance et l'indépendance de l'Europe sur l'autel d'un fétiche désigné euro.

Huit mesures actées Si nous reprenons les mesures qui ont été actées, nous avons : 1 - Une réduction partielle de la dette mais ne touchant que celle détenue par les banques. Autrement dit c'est 100 milliards qui ont été annulés et non 180 (50 % de 360 milliards). Cela ne représente que 27,8 %. La réalité est très différente de ce qu'en dit la presse. Cela ramènera la dette grecque à 120 % en 2012, ce qui est certes appréciable mais très insuffisant pour sortir le pays du drame dans lequel il est plongé. 2 - Le FESF va se transformer en « fonds de garantie » mais sur les 440 milliards du FESF, seuls 270 milliards sont actuellement « libres ». Comme il faut garder une réserve, c'est très probablement 200 milliards qui serviront à garantir à 20 % les nouveaux emprunts émis par les pays en difficulté. Cela représente une capacité de 1 000 milliards d'emprunts (200 / 0,2). C'est très insuffisant. Barroso avait déclaré qu'il fallait 2 200 milliards et mes calculs donnaient 1 750 8-

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milliards pour les besoins de la Grèce (avant restructuration), du Portugal et de l'Espagne. Cet aspect de l'accord manque totalement de crédibilité. 3 - La recapitalisation des banques est estimée à 110 milliards. Mais, l'agence bancaire européenne (EBA) estimait ce matin la recapitalisation à 147 milliards (37 de plus). De plus, c'est sans compter l'impact du relèvement des réserves sur les crédits (le core Tier 1) de 7 % à 9 % qui devra être effectif en juin 2012. Il faudra en réalité 200 milliards au bas mot, et sans doute plus (260 milliards semblent un chiffre crédible). Tout ceci va provoquer une contraction des crédits (credit crunch) importante en Europe et contribuer à nous plonger en récession. Mais, en sus, ceci imposera une nouvelle contribution aux budgets des États, qui aura pour effet de faire perdre à la France son AAA ! 4 - L'appel aux émergents (Chine, Brésil, Russie) pour qu'ils contribuent, via des fonds spéciaux (les Special Vehicles), est une idée très dangereuse car elle va enlever toute marge de manœuvre vis-à-vis de la Chine et secondairement du Brésil. On conçoit que ces pays aient un intérêt à un euro fort (1,40 USD et plus) mais pas les Européens. La Russie ne bougera pas (ou alors symboliquement), comme j'ai pu le constater moi-même lors d'une mission auprès du gouvernement russe en septembre dernier. 5 - L'engagement de Berlusconi à remettre de l'ordre en Italie est de pure forme compte tenu des désaccords dans son gouvernement. Sans croissance

(et elle ne peut avoir lieu avec le plan d'austérité voté par le même Berlusconi), la dette italienne va continuer à croître. 6 - La demande faite à l'Espagne de « résoudre » son problème de chômage est une sinistre plaisanterie dans le contexte des plans d'austérité qui ont été exigés de ce pays. 7 - L'implication du FMI est accrue, ce qui veut dire que l'œil de Washington nous surveillera un peu plus... L'Europe abdique ici son indépendance. 8 - La BCE va cependant continuer à racheter de la dette sur le marché secondaire, mais ceci va limiter et non empêcher la spéculation.

Les piètres conclusions que l'on peut en tirer... Au vu de tout cela on peut d'ores et déjà tirer quelques conclusions : - Les marchés, après une euphorie passagère (car on est passé très près de l'échec total), vont comprendre que ce plan ne résout rien. La spéculation va donc reprendre dès la semaine prochaine, dès que les marchés auront pris la mesure de la distance entre ce qui est proposé dans l'accord et ce qui serait nécessaire. - Les pays européens se sont mis sous la houlette de l'Allemagne et la probable tutelle de la Chine. C'est une double catastrophe qui signe en définitive l'arrêt de mort de l'euro. En fermant la porte à la seule solution qui restait encore et qui était une monétisation globale de la dette (soit directement par la BCE soit par le couple BCE-FESF), la zone euro se condamne à terme. En recherchant un « appui » auprès de la


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Chine, elle s'interdit par avance toute mesure protectionniste (même CohnBendit l'a remarqué...) et devient un “marché” et de moins en moins une zone de production. Ceci signe l'arrêt de mort de toute mesure visant à endiguer le flot de désindustrialisation. - Cet accord met fin à l'illusion que l'euro constituait de quelque manière que ce soit une affirmation de l'indépendance de l'Europe et une protection de cette dernière. Pour ces trois raisons, on peut considérer que cet accord est pire qu'un constat d'échec, qui eût pu déboucher sur une négociation concertée de dissolution de la zone euro et qui aurait eu l'intérêt de faire la démonstration des inconséquences de la position allemande, mais qui aurait préservé les capacités d'indépendance des pays et de l'Europe. Les conséquences de cet accord partiel seront très négatives. Pour un répit de quelques mois, sans doute pas plus de six mois, on condamne les pays à de nouvelles vagues d'austérité ce qui, combiné avec le « credit crunch » qui se produira au début de 2012, plongera la zone euro dans une forte récession et peut-être une dépression. Les effets seront sensibles dès le premier trimestre de 2012 et ils obligeront le gouvernement français à surenchérir dans l'austérité, provoquant une montée du chômage importante. Le coût pour les Français de cet accord ne cessera de monter. Politiquement, on ne voit guère ce que Nicolas Sarkozy pourrait gagner en crédibilité d'un accord où il est passé sous les fourches caudines de l'Allemagne, en attendant celles de la Chine. Ce thème sera exploité, soyons-en sûrs, par Marine Le Pen avec une redoutable efficacité. Il importe de ne pas lui laisser l'exclusivité de ce combat. La seule solution, désormais, réside dans une sortie de l'euro, qu'elle soit négociée ou non. Jacques Sapir Article tiré du site de Marianne, le 28 octobre 2011.

Paradis fiscaux : la main dans le sac En avril 2009, Sarkozy lançait à Madrid une charge terrible contre toute la mafia des paradis fiscaux : « Personne ne peut admettre que des paradis fiscaux bafouent la loi et permettent à l’argent du crime d’être accueilli sans vergogne au mépris de routes les règles de droit et des démocraties parlementaires. » Ça y est, la guerre était déclarée à tous ceux qui pillent l’argent public, qui planquent de la monnaie à l’étranger, en particulier aux iles Vierges ou au Luxembourg. Et notre va-t-en-guerre d’en rajouter une couche quelques mois plus tard à la tribune des Nations unies : « Il faut en finir avec les paradis fiscaux. Nous n’avons pas à tolérer les lieux où se cache l’agent de la spéculation, du crime et de la fraude ». Ça y est, les hostilités sont déclarées, on va voir ce qu’on va voir, dit-il en roulant des mécaniques. Et patatras, le Canard, le vilain petit Canard enchaîné, révèle il y a quelques jours une sombre affaire où il serait avéré que la remplaçante à l’Assemblée nationale de l’ancien maire de Neuilly, Joëlle Ceccaldi-Raynaud, députée-maire de Puteaux, présidente de l’EPAD, devenue EPRADESA (vous vous rappelez certainement de la tentative ubuesque du fils Sarkozy pour en prendre le contrôle)… Eh bien, dis-je, Joëlle Ceccaldi-Raynaud aurait planqué au minimum 4 millions d’euros dans les paradis fiscaux. La dame ainsi mise en question, et prise la main dans le sac, explique qu’il s’agit d’un héritage de mamie. Explication démentie par papa Ceccaldi. Bonjour l’ambiance ! En tous les cas, il reste que cette brave femme de Joëlle Ceccaldi (la fille) est comme un furoncle que l’on refuse de percer. A preuve, le juge Pallain qui menait l’enquête sur cette affaire a été muté et le parquet de Nanterre, où siège le très sarkozyste procureur Philippe Courroye, ne semble pas très

pressé de relancer les investigations. Allez savoir pourquoi ? En fait, à Madrid ou aux Nations unies, Sarko aurait dû compléter son discours d’un mot qui aurait tétanisé de peur tous les boursicoteurs, les spéculateurs de tous poils, tous les affairistes de la planète, tous les criminels financiers de notre monde : « Je ne lâcherai rien jusqu’au bout de mon mandat et je vous promets que vous paierez ». Mais en fait, c’est aux peuples qu’il parlait et on en rigole encore de cette terrible frousse au Fouquet’s. Herve Corzani

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LE RÉVEIL INTERNATIONAL

Libye

Retour sur la guerre néocoloniale Le conflit libyen vient de toucher à sa fin, avec les derniers massacres des partisans de Kadhafi et l’assassinat ignoble de celui-ci à l’initiative de l’OTAN, contraire à toutes les règles de la justice internationale. Aura-t-elle été une « guerre juste » selon une vieille terminologie qui remonte à Saint Augustin et posant la question de la légitimité de la violence dans l’histoire politique des nations ? Moi qui ai soutenu avec enthousiasme le printemps tunisien et égyptien et n’ai pas de sympathie particulière pour le pouvoir autocratique qu’exerçait le dirigeant de la Libye (mais il y en a bien d’autres que l’on oublie…), je réponds clairement : non. D’abord parce que, si l’intervention voulue par Sarkozy a bien été conforme à une décision de l’ONU, elle s’est faite au nom d’une menace visant les opposants à Kadhafi qui n’a jamais été prouvée et dont Rony Bauman a bien montré le caractère largement improbable. Ensuite parce que l’objectif initialement revendiqué de protection de la population de la ville de Benghazi par la neutralisation de l’espace aérien, qui pouvait se justifier malgré tout, s’est progressivement transformé en soutien militaire d’un camp et, il ne faut pas se voiler la face, en intervention directe au sol, dans le déni le plus total de ce qui était autorisé par l’ONU. Au nom d’un massacre seulement possible, on a ainsi perpétré un massacre bien réel, alimenté une guerre civile meurtrière, sans que la conscience occidentale s’en émeuve beaucoup et, tout autant, on a violé un principe essentiel guidant encore juridiquement notre vie internationale : la souveraineté des nations. Si la légitimité réside d’abord dans la légalité, jusqu’au moment où l’on change démocratiquement la légalité, cette guerre aura donc été parfaitement illégitime. On peut et on doit condamner tous les régimes qui bafouent la démocratie et regretter que seul un soulèvement populaire entraînant une guerre civile puisse y mettre fin. On peut et on doit trouver de multiples moyens 10 -

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pacifiques de pression (comme le boycott économique) pour aider à la chute des dictatures. Mais on n’a pas le droit de se substituer à la souveraineté des peuples et à appuyer militairement l’un des camps sans risquer de déclencher une spirale d’interventions guerrières risquant de mettre le feu à la planète : le droit d’ingérence n’existe pas, jusqu’à preuve du contraire, et l’émancipation des nations ne peut être que l’œuvre des nations elles-mêmes. Enfin, sur la base de quels critères réels cette intervention a-t-elle eu lieu ? Ici, il faut dénoncer la propagande mensongère des chefs d’État occidentaux, de l’immense majorité des responsables politiques, communistes exclus, et de la plupart des médias qui se sont livrés à un véritable bombardement idéologique destiné à en occulter la signification. Non, ce n’est pas au nom de la liberté que cette guerre a été décidée car, si c’était vrai, il faudrait intervenir dans bien d’autres pays du Moyen-Orient et, par exemple et au minimum, demander à Bernard-Henry Lévy, conseiller en politique étrangère de Sarkozy, de se préoccuper de l’état de la démocratie dans son cher pays du Maroc.

En réalité, c’est à une guerre néocoloniale à laquelle nous avons assisté, répondant au surplus à un calcul électoral hasardeux de notre président, candidat virtuel à la présidentielle de 2012. Guerre néocoloniale puisqu’il s’est agi pour l’Occident, comme en Irak avant, à la fois de s’assurer la maîtrise directe ou indirecte des richesses pétrolières de la Libye et, plus largement, une position géostratégique dominante dans cette région du globe au service d’avantages économiques plus larges, point essentiel que la référence à la défense des droits de l’homme ne fait que masquer. Il est curieux de constater ainsi que la démocratie dans le monde n’intéresse dans le principe les pays capitalistes que lorsqu’elle favorise leurs intérêts matériels : combien de pays pauvres, dépourvus de ressources exploitables et soumis à des dictatures, sont ainsi abandonnés à leur sort comme si la cause de la liberté était bien à géométrie (économique) variable ! Mais cela aura été aussi la guerre d’un président, Nicolas Sarkozy, qui a voulu, avec un cynisme exceptionnel, se refaire une stature politique en vue de 2012, non seulement en croyant pouvoir détourner l’attention des Français du désastre de sa politique économique et sociale intérieure, mais en tentant de faire oublier qu’il n’avait cessé de courtiser scandaleusement ces mêmes régimes qu’il condamne maintenant rétrospectivement et, spécialement, celui de Kadhafi. Son discours moralisant sur la justesse ou la justice de cette guerre n’est donc qu’une façade idéologique : c’est celui du « moraliste politique » que dénonçait Kant dans le Projet de paix perpétuelle, qui se fabrique une morale « à la convenance » de « ses intérêts d’homme d’État » au lieu de pratiquer une authentique « morale politique » : celle-ci condamne a priori la guerre et ses meurtres, respecte le droit des nations et ne saurait varier en fonction des circonstances ou des appétits des hommes et des États. Yvon Quiniou - Philosophe L’Humanité du 24 octobre 2011


international LE RÉVEIL

Pour Salah Hamouri

Jean-Claude Lefort écrit au Président de la République Monsieur le Président, Nous avons bien noté votre intervention le 18 octobre sur Radio J concernant la libération de Guilad Shalit, dont nous nous félicitons, et de vos propos concernant notre compatriote franco-palestinien, Salah Hamouri. Si nous ne pouvons qu’apprécier que vous vous intéressiez à son cas en cette occasion, par contre nous avons été choqués par vos déclarations. En effet, vous avez indiqué espérer que ce dernier sorte de prison lors «de la seconde vague de prisonniers palestiniens échangés contre Shalit ». Vous avez même ajouté : « Nous l’avons demandé avec insistance ». Comme vous ne pouvez manquer de le savoir, cette deuxième vague, qui est en voie de finalisation, doit avoir lieu deux mois après la première, soit le 18 décembre. Or Salah Hamouri doit sortir de prison, selon les termes du jugement, le 28 novembre, soit trois semaines avant cette seconde vague. Par ailleurs, votre démarche publique a été faite sans l’accord ni la consultation des parents de Salah Hamouri, ce qui est plus que choquant au moment même où, dans une lettre à Guilad Shalit, vous affirmez que la France a soutenu les efforts des parents de ce dernier et pas autre chose. Si vous aviez pris l’attache des parents de Salah Hamouri, vous sauriez leur refus, qu’ils ont fait savoir à l’Elysée, de ce que vous avez annoncé, et ceci pour deux raisons. Premièrement, et comme indiqué, leur fils doit sortir trois semaines avant la seconde vague. Il doit sortir le 28 novembre. Pourquoi ajouter trois semaines de prison en plus, ainsi que le suggère fortement votre intervention. Et deuxièmement, Salah Hamouri n’entend pas prendre la place d’un

Salah Hamouri dans sa prison en août 2010

autre prisonnier condamné dans cette seconde vague de sortie alors qu’il ne lui reste que peu de jours de prison relativement à d’autres qui pourraient être libérés en cette occasion. Il doit sortir le 28 novembre. Point. On nous a expliqué, à l’Élysée ou au Quai, que nous avions mal compris votre intervention, pourtant nette, et que des clarifications seraient apportées. Il n’en a rien été. De sorte que n’est officielle que votre intervention sur Radio J. Inutile de dire que cela ne fait que renforcer la colère. Si votre intervention ne reflète pas votre pensée ou vos intentions, il convient de le dire publiquement. Ceci nous avait été promis. Or rien n’est venu. Nous en sommes donc toujours au même point. Et notre demande demeure : que Salah sorte bien le 28 novembre, et non pas après, car la libération de Guilad Shalit rend caduque la loi qui porte son nom. Si des

conditions existent pour le sortir de prison avant le 28 novembre, et hors discussions entre Israël et le Hamas, alors vous ne manquerez pas de le faire savoir aux parents d’abord. Si de telles conditions ne sont pas réunies, c’est le 28 novembre qu’il doit sortir et c’est sur cette date que doit peser vos efforts. Au nom des parents et au nom de notre Comité de soutien, c’est la seule chose que nous vous demandons : que Salah Hamouri sorte bien de prison à la date dite, le 28 novembre prochain, et qu’il rejoigne ses foyers à Jérusalem-Est. Cette lettre vous offrira l’occasion de mises au point si jamais vous confirmez que votre intervention sur Radio J n’est pas conforme à votre pensée. Pour l’heure nous sommes bien évidemment contraints de nous en tenir à vos paroles officielles qui n’ont en rien été démenties. Et qui provoquent colère et même exaspération. Dans l’attente, je vous prie de croire, Monsieur le Président, en l’expression de nos salutations les plus distinguées.

Jean-Claude Lefort, Député honoraire, coordinateur du Comité de soutien Paris le 23 octobre 2011

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LE RÉVEIL international

Grèce

L’appel de Mikis Théodorakis (extraits) Alors que la Grèce est placée sous tutelle de la troïka, le compositeur Mikis Théodorakis a appelé les Grecs à combattre et mis en garde les peuples d’Europe qu’au rythme où vont les choses les banques ramèneront le fascisme sur le continent. Interviewé lors d’une émission politique en Grèce, Théodorakis a averti que si la Grèce se soumet aux exigences de ses soi-disant partenaires européens, c’en sera « fini de nous en tant que peuple et que nation ». Il a accusé le gouvernement de n’être qu’une « fourmi » face à ces « partenaires ». Si cette politique continue, « nous ne pourrons survivre (…) la seule solution est de se lever et de combattre ». Résistant de la première heure contre l’occupant nazie et fasciste, combattant républicain lors de la guerre civile et torturé sous le régime des colonels, Théodorakis a également adressé une lettre ouverte aux peuples d’Europe, publié dans de nombreux journaux grecs. Extraits : « Notre combat n’est pas seulement celui de la Grèce, il aspire à une Europe libre, indépendante et démocratique. Ne croyez pas vos gouvernements lorsqu’ils prétendent que votre argent sert à aider la Grèce (…) Leurs programmes de « sauvetage de la Grèce » aident seulement les banques étrangères, celles précisément qui, par l’intermédiaire des politiciens et des gouvernements à leur solde, ont imposé le modèle politique qui a mené à la crise actuelle. Il n’y a pas d’autre solution que de remplacer l’actuel modèle économique européen, conçu pour générer des dettes, et revenir à une politique de stimulation de la demande et du développement, à un protectionnisme dotée d’un contrôle drastique de la finance. Si les États ne s’imposent pas sur les marchés, ces derniers les engloutiront, en même temps que la démocratie et tous les acquis de la civilisation européenne. La démocratie est née à Athènes quand Solon a annulé les dettes des pauvres envers les 12 -

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riches. Il ne faut pas autoriser aujourd’hui les banques à détruire la démocratie européenne, à extorquer les sommes gigantesques quelles ont elles-mêmes générées sous forme de dettes. Nous ne vous demandons pas de soutenir notre combat par solidarité, ni parce que notre territoire fut le berceau de Platon et Aristote, Périclès et Protagoras, des concepts de démocratie, de liberté et d’Europe (…) Nous vous demandons de le faire dans votre propre intérêt. Si vous autorisez aujourd’hui le sacrifice des sociétés grecque, irlandaise, portugaise et espagnole sur

l’autel de la dette et des banques, ce sera bientôt votre tour. Vous ne prospérerez pas au milieu des ruines des sociétés européennes. Nous avons tardé de notre côté, mais nous nous sommes réveillés (…) Résistez au totalitarisme des marchés qui menacent de démanteler l’Europe en la transformant en tiers monde, qui monte les peuples européens les uns contre les autres, qui détruit notre continent en suscitant le retour du fascisme. » Le 28 octobre 2011 Nouvelle Solidarité

Les marches du pouvoir

George Clooney réalise un triller politique efficace et malin dans lequel il analyse les arcanes du pouvoir et interprète un gouverneur manipulateur. Le jeune Stephen Meyers est conseiller politique du gouverneur Mike Morris. Persuadé que son patron mérite de recevoir l’investiture démocrate lors des prochaines primaires du parti, il est prêt à se battre honnêtement pour faire gagner celui qu’il considère comme le meilleur atout politique du pays. Il est

guidé par le directeur de campagne de Mike Morris et son mentor, et doit faire face aux stratégies du conseiller du candidat adverse. Mais les manipulations diverses et variées, les révélations sur la personnalité du gouverneur vont faire évoluer sa façon de voir les choses et son rapport au pouvoir… Le George Clooney réalisateur continue de s’interroger sur le monde politique, mais aussi sur la loyauté, l’ambition et le prix à payer pour réussir. Il propose une analyse fine des coulisses, dans l’esprit de la série A la Maison-Blanche. « Ce n’est pas pour autant un film politique », souligne George Clooney. « Les questions que je pose sont : la fin justifie-t-elle les moyens ? Quels compromis sommes-nous prêts à faire pour atteindre notre but ? Et cela est valable dans tous les milieux. Dans notre monde actuel, le cynisme l’emporte sur l’idéalisme et cela m’attriste. Il y a eu une vague d’espoir au moment de l’élection de Barack Obama, mais, malheureusement, elle a laissé la place aujourd’hui à l’amertume. » Ryan Gosling campe avec justesse un idéaliste en pleine désillusion. Face à lui, George Clooney joue un candidat qui cache bien son jeu.


LE CAHIER MÉMOIRE

le réveil

N° 777 Octobre 2011

des combattants

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

Comme hier, aujourd’hui combattons le fascisme ! Il y a urgence !

ÉDITO - Par Paul Markidès Comme l’expliquait Henri Barbusse dans l’article du journal japonais Kaizo en 1926 : « La création et l’évolution du fascisme résultent de l’état de malaise et d’incertitude, des difficultés grandissantes de la vie qui surgissent de toutes parts, en un mot de la situation précaire où se débattent… toutes les couches moyennes de la

14 juillet 1936 : l’ARAC est largement représentée à la manifestation du Front populaire pour le pain, la paix et la liberté.

population. » Et j’ajouterai les couches modestes. Il souligne ensuite, « Le vrai moteur du fascisme, ce sont les pouvoirs d’argent. » La situation que nous connaissons aujourd’hui en France et en Europe notamment en Hongrie et dans les pays baltes, celle de nos anciennes colonies,

Édité par le Réveil des combattants - 2 place du Méridien - 94807  Villejuif - Tél. 01 42 11 11 12

celle de nombre de pays sur notre planète ne peuvent que nous sauter aux yeux en lisant les lignes des articles qui suivent. Ne laissons pas surprendre notre vigilance. Avec l’ARAC, opposons-nous à ces politiques qui ouvriront la voie au fascisme si elles étaient poursuivies ! octobre  2011 - N°777 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL dossier

Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre

Comme hier, aujourd’hui combattons le fascisme ! Il y a urgence ! Des années 1920 à ce début du XXIe siècle, dans des contextes historiques différents, les enjeux restent toujours les mêmes : guerre ou paix, dictature ou démocratie, exploitation du plus grand nombre ou partage des ressources entre tous les hommes, entre tous les peuples. Pour l’ARAC, l’objectif reste le même : lutte pour le respect des idéaux républicains, traduits par la devise française issue de la Révolution de 1789 : Liberté, Égalité, Fraternité. Par Georges Doussin (Extraits) Hélas, le monstre du fascisme a déjà de nouveau envahi plusieurs pays d’Europe et obscurci le ciel de France. L’histoire de notre pays nous fait percevoir que les politiciens des républiques qui ont présidé aux destinées du peuple de France ont trop souvent été, et sont encore trop souvent, de médiocres gestionnaires des intérêts de tous les citoyens qui les ont élus. Mais abandonner les principes de la démocratie républicaine pour remettre le destin du peuple de France entre les mains de celles ou de ceux qui rêvent d’exclusion, d’atteintes aux libertés, de règne de la force, de la haine et de la violence aveugle, c’est jeter le pays, pieds et poings liés, dans les serres d’une dictature qui ne peut exister que par la négation de la liberté, le refus de l’égalité, le rejet passionnel de la fraternité humaine. Le fascisme italien est né en 1919 et Mussolini a reçu du roi d’Italie les pleins pouvoirs en 1922. Le fascisme nazi est né également en 1919 et Hitler obtint les pleins pouvoirs en 1933. Dès 1926, Henri Barbusse, cofondateur de l’ARAC en 1917 fait, 14 -

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Georges Doussin est président honoraire de l’ARAC

dans un journal japonais, une analyse lucide des terrains sur lesquels le fascisme prolifère.

Le vrai moteur du fascisme, ce sont les pouvoirs d’argent … « La création et l’évolution du fascisme résultent de l’état de malaise et d’incertitude, des difficultés grandissantes de la vie qui surgissent de toutes parts, en un mot de la situation précaire où se débattent actuellement dans presque tous les pays toutes les couches moyennes de la population. Le vrai moteur du fascisme, ce sont les pouvoirs d’argent, qui ont su et qui ont pu, grâce aux moyens gigantesques de publicité, de propagande et d’action dont disposent ceux qui disposent des richesses, attacher à leur politique la petite et moyenne bourgeoisie, en canalisant dans le sens de la conservation et de réaction sociale son mécontentement, ses appréhensions et ses souffrances. … Partout le capitalisme a suscité le fascisme. Il l’a mis sur pied et lui a donné l’élan. Et ce n’est un secret pour personne que le fascisme italien et tous les autres fascismes nationaux sans exception se sont accrus grâce à l’appui financier de la grande bour-

geoisie riche, de la grande industrie et des banques. Le fascisme sort du capitalisme. Il en est la résultante logique, le produit organique. C’est l’armée qu’il jette dans la lutte sociale pour maintenir coût que coûte ce qu’il appelle ses droits et ce que nous appelons seulement : ses profits… En conséquence de ses principes constitutifs, le fascisme a deux buts, l’un politique, qui est l’accaparement de l’État ; l’autre économique, qui est l’exploitation du travail et sa raison d’être... » (Henri Barbusse, journal japonais Kaizo - 1926 - Le Réveil des Combattants, décembre-janvier 2004-2005)

Le fascisme a vingt masques Appelant les jeunes à participer au Congrès mondial de la jeunesse les 5, 6, 7 août 1933 à Paris, l’écrivain Romain Rolland, ancien combattant de 1914-1918 et actif militant de la paix, s’adresse aux jeunes en ces termes, complétant ainsi les propos d’Henri Barbusse : « Le fascisme a vingt masques. Il s’accommode au visage de chaque peuple. Il est ici, militaire ou clérical ; il est, ailleurs, capitaliste ou démocratique ; il grimace même


dossier LE RÉVEIL

le socialisme ; son infection peut se développer dans tous les bouillons de culture et d’inculture. Mais quel que soit son masque, il a toujours le même caractère essentiel : il est un étatisme nationaliste. Il subordonne tout à la maison et à l’État dictatorial qui se personnifie avec elle, pour l’absorber et l’asservir. Nous disons, nous : « Le nationalisme, voilà l’ennemi ! » Jeunes camarades, que ce soit notre devise de combat ! Cet ennemi, nous n’avons pas seulement à le combattre au dehors. Nous devons l’extirper de nos poitrines. Méfions-nous ! Il a des racines bien tenaces. Beaucoup de ceux qui sonnent la charge contre l’hitlérisme, le font, inconsciemment ou consciemment, par nationalisme. Nous avons vu partir en guerre, et dès la première heure, les journaux de l’état-major et de la bourgeoisie cocardière, nos vieilles connaissances de la guerre dernière, les jusqu’auboutistes, les « Souvenez-vous ! » N’oubliez jamais !... Nous ne marchons pas pour ces gens-là. Et nous non plus, nous n’oublions pas que ce sont eux les premiers responsables du fascisme hitlérien, né du délire et du désespoir d’un peuple exaspéré par ses vainqueurs. Ce sont eux qui ont toujours entretenu les haines mortelles contre les nations. Et nous qui répudions les divisions entre nations, si nous avons de la haine à dépenser, réservons-là contre ceux qui vivent de la haine entre les peuples !… »

9 février 1934 : une barricade à Paris, rue de l’Orillon, contre les milices factieuses qui veulent renverser la République.

en moins de 15 ans, le peuple des soldats et des travailleurs, tout puissant alors, tandis que les couronnes des monarques roulaient dans les ruisseaux, en soit aujourd’hui à subir les pires violences d’une réaction terrible dont les exploits seront comparés aux périodes les plus obscures de l’histoire de l’humanité. Il y a quelques années à peine, les sociaux-démocrates tenaient le pouvoir dans le Reichs-bund (Assemblée nationale). Quiconque alors aurait prévu l’avènement du fascisme hitlérien aurait été traité par le mépris ou pris tout simplement pour un esprit déséquilibré. C’est un tragique dossier à ouvrir que celui des responsabilités dans un tel moment où, des casernes allemandes, montent les cris de douleur et les appels de milliers d’hommes parmi les meilleurs qui sont torturés et fusillés par la canaille à la solde

des hobereaux et des industriels allemands. Cependant, il ne faut pas hésiter à marquer au fer rouge l’attitude des hommes qui en 1918 et 1919 sauvèrent le capitalisme allemand en assassinant Karl Liebknecht, Loguichès et Rosa Luxemburg, en détruisant le Spartacus Bund et les conseils ouvriers en Bavière et dans toute l’Allemagne. Ces mêmes hommes au pouvoir ont détruit l’organisation du Front rouge, alors qu’ils donnaient licence aux bandes hitlériennes naissantes, toutes les possibilités pour s’armer et préparer leur sauvage réaction. Par contre, les sociaux-démocrates allemands ont refusé toute action de front unique qui aurait permis de balayer la peste brune… Le Vorwaerts, organe socialiste central, écrit que, sans la constitution de Weimar, Hitler, homme sortant du peuple, n’aurait pu gravir les hauts échelons

Les événements d’Allemagne en 1933 L’avènement du fascisme hitlérien au pouvoir en Allemagne en 1933 compte pour le plus important des évènements d’après 1418. Voici comment le décrit Guy Jerram, (Réveil des Combattants de mars 1933) : « Les anciens combattants qui ont assisté en 1918, soit à l’armée du Rhin, soit comme prisonniers révolutionnaires qui ont entraîné la chute de l’Empire, en sont à se demander par quel concours de circonstances, octobre  2011 - N°777 - LE RÉVEIL

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du pouvoir ! … … Les responsabilités des naufrageurs du peuple allemand, crucifié ignoblement par la marée hitlérienne, ne doivent pas effacer les nôtres, anciens combattants français. Nous avons laissé faire la paix de Versailles par les généraux fusilleurs, par les profiteurs de la guerre de notre pays. Le monstrueux traité qui a mis l’Allemagne à genoux en lui découpant son territoire, a été générateur de nationalisme. »

L’année 1933 L’année 1933 restera dans l’histoire une année tragique. Tout d’abord par la montée du fascisme hitlérien, ensuite parce que tous les fascistes d’Europe s’appuient sur un nationalisme exacerbé qui sévit également en France. Henri Barbusse et Romain Rolland multiplient les initiatives. Le Congrès mondial de la Jeunesse a pour but de rassembler et de mobiliser la jeunesse contre le fascisme. En avril, a lieu à Tours le 15 e Congrès de l’ARAC. Le manifeste du Congrès appelle à l’union des anciens combattants et victimes de guerre de France. En septembre, le même appel est lancé par les congressistes et par Barbusse au Congrès de l’Internationale des anciens combattants. Barbusse renouvelle cet appel à Paris au Congrès mondial des jeunesses contre la guerre : « …Tous ceux qui veulent influer, dans un sens ou dans l’autre, sur l’ordre de choses présent, ont les yeux fixés sur la jeunesse. Elle est au foyer, elle est le foyer de l’agitation politique. Les rois actuels des pays capitalistes, ceux qui règnent sur les cinq sixièmes du monde, font, aux jours où nous sommes, un effort désespéré pour rallier la jeunesse des villes et des campagnes à leur formule de conservation et de réaction sociales. Ils les appellent à la guerre et au fascisme. C’est que, connaissant l’âme intrépide et frémissante des jeunes gens, on leur 16 -

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présente la guerre et le fascisme dans un rayonnement d’héroïsme et de résurrection... Cette tragique duperie doit prendre fin ! Déjà, sur tous les horizons, et de toutes les couches sociales, nous voyons de fortes minorités de jeunes gens s’insurger contre ces sanglants sophismes. Déjà les yeux s’ouvrent et les esprits s’éveillent ; déjà la jeunesse du monde discerne de mieux en mieux ce qui se cache derrière les appels à la guerre, derrière le décor pompeux des « rénovations » fascistes : la tuerie, le charnier, la ruine, l’effondrement du progrès humain. … Nous vous appelons à la lutte unifiée contre les régimes générateurs de tous les fléaux… Jeunes gens, dans tous les pays, contre la guerre et le fascisme, unissez-vous ! (Extrait de L’Appel du Comité mondial aux jeunes - Henri Barbusse, juillet 1933)

Les années 1934-1935 En janvier 1934, Camille Chautemps était chef du gouvernement. Le scandale surgit d’une escroquerie financière : le « suicide » d’un certain Stavisky qui avait des complicités dans la police, la magistrature et le Parlement. C’est l’occasion rêvée par les ligues factieuses pour tenter d’organiser des manifestations pour se lancer à l’assaut du Parlement et abattre la République. Le 6 février, Daladier doit présenter le gouvernement qu’il vient de former. Ce même jour, l’ARAC a appelé ses anciens combattants à manifester « contre le régime des profits et des scandales, contre ses mandataires, le gouvernement de Daladier, auteur de la révision des pensions, contre la politique impérialiste, pour l’arrestation de Chiappe, contre le fascisme et la guerre ». Trois mille membres de l’ARAC sont dans la rue. Ils se battent contre les Croix-de-Feu du colonel de La Rocque soutenu par les

militants de l’UNC. C’est là une des grandes pages de l’histoire de l’ARAC. Après ces évènements, l’ARAC appelle au front unique contre les « décrets-lois », contre le fascisme qui monte dans notre pays. Relatant ces événements dans son journal Le Réveil des Combattants, l’ARAC précise : « L’âme du complot fasciste, c’était Chiappe ! Chiappe, l’ennemi de toujours de notre association. Chiappe, que les anciens combattants ont toujours trouvé devant eux, lorsqu’ils manifestaient à l’appel de l’ARAC pour la défense de leurs droits. Chiappe qui les fit matraquer à maintes reprises et qui fit arrêter arbitrairement les dirigeants de notre association. Oui, l’ARAC était aux Champs-Élysées le 6 février, et c’est à son honneur. Elle s’affirmait ainsi comme une des premières à comprendre le péril fasciste, et à s’y opposer résolument… » Si l’intervention de l’ARAC ne parvint pas à empêcher l’émeute fasciste, on peut néanmoins penser qu’elle contribua à en affaiblir la portée… Faut-il le rappeler, au lendemain de l’émeute fasciste, quelle part l’ARAC prit aux journées antifascistes des 9 et 12 février ? Pas un instant son ardeur antifasciste ne se ralentit, puisque aussi bien elle savait que la cause et l’intérêt des anciens combattants se confondent avec le succès de la lutte antifasciste.

Le 13 mai et le 11 novembre Le 13 mai 1934, pour ne marquer que les principales étapes, l’Union départementale de la Confédération organisait pour la fête de Jeanne d’Arc un défilé « silencieux » et toujours, comme on pense, au nom « de l’honneur et de la propreté » ! L’ARAC décide, dans les mêmes conditions que le 6 février, de se mêler au cortège. Elle le fit. Elle groupa des milliers de victimes de la guerre au Carrousel. Les cris de « A bas la guerre ! A bas le


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et Daladier et des chefs militaires, organisateurs de la drôle de guerre et responsables de la débâcle de l’armée française, ont conduit au désastre de 1940. Mais c’est par décision de ces ministres capitulards que l’ARAC a été dissoute et ses responsables et ses militants jetés en prison dès octobre 1939. Ils étaient 282 internés à l’île d’Yeu, lors de l’invasion nazie. Ceux qui ont échappé aux prisons françaises sont rentrés en résistance. Et la liste des militants de l’ARAC, martyrs de la Résis-

fascisme ! Rivollet démission, A bas les 3 % ! », retentirent. Et l’ARAC transforma ainsi la manifestation en manifestation de défense des droits acquis.

Le 6 février 1935 Quand, pour l’anniversaire du 6 février, les ligues armées menacèrent à nouveau de lancer leurs sections d’assaut, l’ARAC s’empressa de se joindre au vaste mouvement de 98 organisations qui appelaient leurs 500 000 adhérents à submerger toute tentative éventuelle des groupements factieux. L’ARAC trouvait là, en effet, une application exacte de sa politique : il s’agit pour elle non pas d’opposer un clan à un clan, une troupe de choc à une troupe de choc, mais de réunir tous les anciens combattants sans distinction d’opinion pour la défense de leurs droits et de leurs intérêts contre ceux qui veulent y porter atteinte. De là, la position de l’ARAC contre le fascisme. Le fascisme c’est la réduction des pensions. A bas le fascisme ! Le fascisme c’est la suppression des libertés, dont on parlait tant dans les tranchées. A bas le fascisme ! Le fascisme, c’est le surarmement dont Hitler nous offre l’exemple, c’est la mobilisation à tout bout de champ comme le pratique Mussolini. A bas le fascisme ! L’ARAC poursuivra dans cette voie.

L’ARAC, face aux trahisons et la barbarie fasciste Les luttes contre les intérêts capitalistes et contre les fascistes de France ont permis l’unité et la victoire du Front populaire. Le lâche abandon de la République espagnole, livrée au fasciste Franco, les honteux accords de Munich, qui laissaient la voie libre à Hitler pour envahir l’Europe, le chemin ouvert à Pétain par toutes les trahisons des gouvernements Reynaud

29 septembre 1938, Édouard Daladier vient de signer le pacte de Munich.

tance au nazisme compte plus de 250 noms. Si nous rappelons ce passé dramatique d’une association d’anciens combattants aux générations d’aujourd’hui, c’est pour les inciter à se pencher sur le présent et sur l’avenir, pour les voir aussi lucides et autant engagés pour ne pas vivre, à leur tour, les conséquences désastreuses de l’abandon des idéaux républicains au bénéfice du règne de la contrainte policière, du mépris, de la haine

et de la violence, rejetant tout humanisme. Les années qui ont suivi la victoire sur le fascisme nazi, malgré une France ruinée par la guerre et l’occupation hitlérienne, ont été des années de progrès et d’espérance portés par la mise en application du programme adopté par le Conseil national de la Résistance et ratifiée par les gouvernements issus de la Libération. Il a fallu le terrain mortifère des guerres coloniales pour voir renaître et ressurgir de plus en plus actifs et de plus en plus dangereux, la xénophobie et le racisme, éléments constructeurs des idéologies fascistes. C’est dans les années dramatiques de la guerre d’Algérie que le fascisme s’est de nouveau présenté à visage découvert. Après 6 ans de guerre en Algérie, en 1961, le 22 avril, sous la conduite de 4 généraux félons, les factieux s’emparent du pouvoir en Algérie, sans résistance des autorités françaises en Algérie. Leurs buts : empêcher la paix en Algérie et instaurer le fascisme en France. C’est au cours de ces événements que les « appelés » en Algérie font obstacle aux officiers factieux en refusant leur participation au coup d’État militaire. En mai, les attentats OAS continuent en France, en Algérie et s’amplifient en juillet. En août-septembre, on dénombre 1 072 plasticages OAS. Le 19 novembre, le gouvernement interdit la manifestation anti-OAS prévue à Paris. Le 23 novembre, 13 plasticages à Paris.

1962, la France face à la menace fasciste L’année 1962, les crimes de l’OAS continuent. Le 8 février, pendant les manifestations pour la paix en Algérie, 8 manifestants sont tués (dont un militant de l’ARAC, Édouard Lemarchand) par la police de Papon. Et c’est enfin la signature des Acoctobre  2011 - N°777 - LE RÉVEIL

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cords d’Évian qui permet le cessez-le-feu le 19 mars, et qui ouvre une ère de paix que n’avait pas connu la France depuis 1959. Le 8 avril, les Accords d’Évian sont ratifiés dans un référendum par 91 % des citoyens français. Le 21 août, le général de Gaulle échappe à un attentat au Petit Clamart. Ce sont les fascistes coupables de cet attentat que les fascistes d’aujourd’hui honorent en leur élevant des stèles et en organisant des cérémonies où ils sont traités en martyrs et en héros. Cette situation, Le Réveil des Combattants paru en mars 1962 l’a décrite sans équivoque : « L’OAS poursuit impunément son activité criminelle. Attentats au plastic, assassinats, rapts d’enfants, opérations de racket se multiplient. On a pu dénombrer en un an plus de six cents attentats, quatre cents pour la région parisienne. Il est impossible d’en établir la liste pour l’Algérie où chaque jour apporte, hélas, son contingent de morts et de blessés, victimes des fascistes. En France, ils ont tué lâchement Camille Blanc, le maire d’Évian, Georges Mulard, ouvrier de l’aéroport d’Orly, Alfred Locussol, inspecteur de l’Enregistrement à Alençon, Roger Boissier, employé au Quai d’Orsay. Ils ont fait des dizaines de blessés, parmi lesquels des enfants ont été grièvement atteints. La petite Delphine Renard est défigurée. A la vérité, l’OAS n’est pas autre 18 -

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1958 - Manifestation contre l’OAS.

chose qu’une organisation fasciste dont les buts sont nettement définis dans les documents publiés par son chef, l’ex-général Salan. Il s’agit non seulement de s’opposer au rétablissement de la paix en Algérie, mais d’instaurer en France une dictature fasciste… Comme chacun le sait, l’OAS est condamnée par l’immense majorité de l’opinion publique française. Elle tire son audace des complicités dont elle bénéficie au sein de l’armée, de la police, de l’État lui-même. Son arme préférée est la terreur. Au lendemain de l’affreuse mutilation de la petite Delphine, l’émotion fut des plus grandes dans le pays. Une manifestation fut décidée, à laquelle notre association donna son accord, en vue d’exiger la mise hors d’état de nuire de l’OAS et de protester contre la mansuétude dont fait preuve le pouvoir à son égard. Plus de 20 associations s’associèrent à cette manifestation qui revêtit une grande ampleur et se déroula de la façon la plus pacifique. Jusqu’au moment de la dislocation où la police, sous la responsabilité du préfet Papon, chargea avec une sauvagerie inouïe. Neuf démocrates, dont trois femmes, un enfant de 16 ans, devraient trouver la mort sous les coups de la police… Une vague d’indignation et de colère souleva le pays, qui s’exprima par la grève générale du 13 février et par l’organisation d’obsèques grandioses où participèrent un million de Parisiens… »

Dans les années qui suivent les guerres coloniales, les ennemis de la République se servent toujours de la xénophobie et du racisme comme vecteurs de leur propagande. En France, ce sont les travailleurs immigrés et leur famille qui sont leur cible de prédilection, ce qui amène Pierre Paraf, président du Mouvement contre le racisme et l’antisémitisme, à préciser cette situation dans le Réveil des Combattants de mai 1971 : « … Racisme des castes dans l’Inde, racisme de la misère du fond de l’Amazonie à l’Asie du Sud-Est, où les trois quarts des hommes, des femmes, des enfants du globe ne mangent pas à leur faim, il s’inscrit partout ce racisme sur la carte de la terre, comme la manifestation de tous ces témoins de l’injustice et de la haine que nous, les anciens combattants, espérions avoir abattu. Notre déception est amère de nous confronter à lui jusque dans l’union socialiste, où le vieil antisémitisme hérité des tsars est loin d’être résorbé, jusqu’en notre France des droits de l’homme, où le venin raciste distillé sous l’occupation nazie empoisonne encore les consciences. Trois millions et demi de travailleurs étrangers sont nos hôtes. Et dans cette masse de main-d’œuvre indispensable à notre économie, un grand nombre d’entre eux, Portugais, fils de l’Afrique Noire ou de l’Afrique du Nord, constituent un sous-proléta-


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riat accablé à la fois par l’isolement, l’hostilité ou tout au moins l’indifférence de ceux qui les environnent, les conditions défectueuses de l’emploi et du logement. »

XXIe siècle : au carrefour de l’angoisse et de l’espérance Nous sommes rentrés dans le XXIe siècle, laissant derrière nous ce XXe siècle au cours duquel les peuples du monde ont connu des progrès scientifiques et techniques qui ont créé une véritable révolution pour toute l’humanité mais qui, hélas, ont subi des guerres atroces, des génocides, des misères économiques, sociales et politiques qui ont fait des millions de morts, des centaines de millions de victimes de la faim, de la maladie, de la violence et de la haine aveugle. Mais, aujourd’hui, nous sommes toujours au carrefour de l’angoisse et de l’espérance. Nous voulons garder l’espoir mais, dans notre pays, en Europe et dans toutes les parties du monde, nous avons peur de l’avenir. Ce qui me faisait écrire en décembre 2002,

dans le Réveil des Combattants, l’article suivant : « Le populisme et le sécuritarisme : deux pentes qui descendent vers le tunnel du fascisme ». En voici deux extraits : « … Qu’est-ce que le populisme ? Le populisme a été la première expression du fascisme mussolinien et hitlérien. Il est, aujourd’hui, le langage des Le Pen et consorts pour gagner à leur cause les gens les plus en difficulté, leur proposant la haine des autres, des « coupables » à bon marché : les étrangers, les arabes, les juifs, les jaunes, les noirs et les tziganes, et pourquoi pas les Parisiens (pour les provinciaux), les paysans (pour les citadins). Le populisme c’est aussi le refus des règles démocratiques au profit de la violence et des mesures discriminatoires : « Mettons-les en tôle », « Faisons la chasse à tous ceux qui mangent notre pain et l’argent de la Sécurité sociale ». On commence comme ça et l’on finit par des pogroms… Le sécuritarisme guide la politique intérieure du gouvernement Raffarin, si bien incarnée par Sarkozy,

véritable shérif des temps modernes, qui se déplace aussi vite que Superman. Mais, sincèrement, pensez-vous que seule la répression permettra de régler tous les problèmes de notre pays ? Sur la route, à l’école, dans les quartiers populaires où tant de gens jeunes et vieux attendent ? Attendent quoi ? C’est bien là la question ! Ce qu’ils attendent ? C’est pouvoir vivre décemment, c’est du travail pour leurs enfants, après une formation adaptée aux besoins du monde moderne, c’est une retraite décente pour les anciens, ce sont des conditions de logement avec des loyers abordables... Et tout ça ne dépend pas du nombre d’émigrés en France mais d’une distribution moins injuste des richesses de notre pays… » Et lorsque Nicolas Sarkozy, Président de la République, lance sa campagne sur « l’identité nationale », l’ARAC clame son opposition résolue à ce concept qui ne peut que réjouir les xénophobes, les racistes les ultranationalistes, les fascistes de la terre entière.

Adresse aux citoyennes et aux citoyens

© illustration de la FAPT CGT

C’est au nom des valeurs d’humanisme fondées sur la justice sociale, la solidarité nationale et internationale, la paix que lui ont laissé ses fondateurs que l’ARAC exprime sa très vive opposition au concept d’ « identité nationale », habilement choisi par le Président de la République, visant à établir, sur un fond de relent nationaliste, l’exclusion de « l’autre », l’étranger, qu’il soit né ou pas en France. Avec l’objectif d’aligner la France et l’Europe sur la mondialisation capitaliste, cette opération procède de l’entreprise de démolition du modèle social français et de recherche de boucs émissaires dans la population immigrée… Elle ne concerne donc pas seulement le monde combattant, mais l’ensemble de la société française. octobre  2011 - N°777 - LE RÉVEIL

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… L’ARAC n’a pas la naïveté de penser que ce faux débat va améliorer la défense des valeurs de la République, de la transformation sociale et de la paix dans le monde. Au contraire, le gouvernement est en train de détruire : les services publics, les droits économiques et sociaux, les programmes de recherche, la DSPRS pour les anciens combattants et victimes de guerre. Il poursuit sa politique de mise en concurrence des salariés et des peuples. Le peuple de France souffre. Le MEDEF en veut toujours plus, les riches s’en mettent plein les poches ! La vraie identité de la France est gagnée par les luttes sociales et politiques comme l’illustrent la Révolution française, la Commune de Paris, le Front populaire et le Programme du Conseil national de la Résistance et par l’instauration d’une République fondée sur les principes de « Liberté, Égalité, Fraternité » sur celle de la Déclaration des droits de l’homme de 1948. L’histoire de la France et de son peuple s’est forgée dans l’accueil de tous ceux qui sont venus au cours des siècles, apportant la diversité de leurs cultures, de leurs connaissances, de leurs expériences… Aujourd’hui, les progrès scientifiques et techniques, les enjeux des problèmes planétaires placent les adhérents de l’ARAC dans le cheminement des luttes et des combats menés, qu’il faut poursuivre avec détermination pour plus de démocratie, plus de liberté, plus de progrès humain dans le respect de l’autre, des valeurs du « vivre ensemble » républicain et d’une laïcité partagée. C’est dans ce contexte et compte tenu des enjeux que l’ARAC estime le moment venu de jeter les bases à l’élaboration d’un projet de VIe République. 20 -

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Nous sommes à quelques mois de l’élection présidentielle et nous voyons grandir à la lumière des sondages la cote de popularité de Marine le Pen. Certes, elle a poli les rugosités du langage de son père. Elle essaie de substituer aux violences verbales de JeanMarie le Pen un langage moins scandaleux. Elle veut faire moins peur aux braves gens malgré tout attachés à la culture républicaine dont ont hérité les citoyens de notre pays depuis la Révolution française. Mais, fondamentalement, la politique menée par le Front national est toujours la même. Aussi, ne commettons pas l’erreur fatale ! Certes, les gens sont en colère, les gens ont peur de l’avenir pour eux et pour leurs enfants. Les retraités voient leur pension fondre. Les bilans falsifiés ne peuvent cacher le nombre grandissant de chômeurs. Beaucoup de salariés vivent dans la crainte permanente de perdre leur emploi. La qualité des services publics (Poste, SNCF, santé, Éducation nationale…) régresse à grande vitesse, victime d’une politique forcenée de privatisation et de réduction d’effectifs. Cette colère des gens se transforme même en désespoir. C’est sur ce terrain de la peur et de la désespérance que se développe la campagne de Marine le Pen et du Front national. Ils n’inventent rien ! Mussolini et Hitler l’ont fait avant eux, car c’est bien sur ce terrain de la précarité, de la misère et de la peur du lendemain que prolifèrent les plantes vénéneuses de l’ultranationalisme, de la xénophobie et du racisme qui mènent droit à l’abandon des idéaux républicains de liberté, d’égalité et de fraternité, au repli sur soi, à la violence haineuse qui sont les vices permanents de tous les fascismes... N’oublions jamais que lorsque

les puissants ne peuvent plus gérer leurs intérêts sous une forme plus ou moins démocratique, ils ont toujours recours à la dictature, au fascisme. Alors ! Que faire ? Il n’y a donc pas de solution ? Si ! Une seule ! Comme au temps du Front populaire, comme au temps de l’occupation nazie et de la Libération, résister et faire front. Ne déléguons pas nos pouvoirs, ceux du peuple citoyen, à ceux qui s’en servent ou voudraient s’en servir pour nous tromper et asseoir leur puissance. Seule l’union de toutes les victimes de ce capitalisme mortifère peut arrêter les régressions économiques, sociales, politiques, et inverser le cours de l’Histoire. Ensemble, construisons nos projets pour le monde du travail, pour la santé, pour l’Éducation nationale, pour un logement décent et abordable pour tous, pour une agriculture favorable aux paysans et aux consommateurs, pour une terre vivable pour tous les humains. L’union sur toutes les valeurs républicaines de la France, c’est ce dont rêvent les militants de l’ARAC, ce pourquoi ils se sont toujours battus, se battent aujourd’hui et se battront encore de toute leur force demain. Aujourd’hui, comme hier, contre toutes les injustices générées par le système capitaliste, contre tous les intégrismes, tous les fascismes qui se nourrissent de peur, de violence, de mépris et de haine, la résistance se conjugue au présent. Résistons tous ensemble !

Ce cahier Mémoire est constitué d’extraits d’un ouvrage écrit par Georges Doussin, que l’ARAC va publier.


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La CGT de l’ONAC

Non à la casse de l’office - Maintien du service public ! Par courrier adressé au gouvernement, à l’ONAC, à ses administrateurs et aux présidents d’associations d’ACVG, « le syndicat CGT-ONAC réaffirme la place de toutes les composantes de l’ONAC (services départementaux, nécropoles, écoles de reconversions professionnelles et maisons de retraite) dans le service public et dans la fonction publique comme solution (…) d’avenir. » Services départementaux de l’ONAC Pas assez de personnels, plus de malvivre. Dans ce long envoi de trois pages, la CGT-ONAC dénonce notamment la diminution du nombre de fonctionnaires.« Ses effets négatifs , écrit-elle, ont des répercussions dans les services départementaux (de l’ONAC) où (…) le nombre d’agents qui se révèle insuffisant - couplé à la mauvaise qualité du système informatisé défaillant et mal conçu - ne rend plus le service que les ressortissants (de l’ONAC) sont en droit d’attendre. (…) Il ne s’agit pas d’accuser les agents, ils font leur travail et le font bien, vous (la direction de l’ONAC) l’avez reconnu. Mais la charge de travail est accrue et les mouvements de personnels n’assurent plus la transmission des compétences nécessaires pour répondre aux attentes et aux questions des usagers. L’image des Services départementaux en est appauvrie et les conditions de travail deviennent difficiles, générant, comme dans d’autres postes de travail de l’ONAC, des situations de mal-être de plus en plus nombreuses, de plus en plus visibles. »

Le service public bradé au privé La CGT de l’ONAC dénonce « l’externalisation », c'est-à-dire la remise au « privé » (qui sera payé pour ce faire) des services d’entretien des nécropoles et des lieux de mémoire. Et la CGT-ONAC « se positionne pour (leur) maintien dans le service public et (l’entretien réalisé) par des agents de la fonction publique de ces postes de travail ».

• Contre la « Fondation » livrant ERP et maisons de retraite de l’ONAC aux intérêts privés, le syndicat CGT-ONAC réaffirme son « opposition à cette mise à l’écart des maisons de retraite et des écoles de réinsertion (…) ». • Les maisons de retraite verraient leur prix de journée augmenter « dans une structure où la solidarité et la mémoire auraient laissé place à une démarche marchande ». • Les écoles ont un rôle unique à jouer dans le domaine de la reconversion professionnelle. « C’est leur cœur de métier et leur mission (…) et l’excellence de leurs résultats aux examens et leur taux de placement (est reconnu) dans un contexte de l’emploi par ailleurs difficile. Elles ont un avenir dans un paysage économique qui ne doit pas échapper à l’ONAC (…). Elles seules assurent le seul moyen d’accès à l’emploi qualifié et diplômé pour les travailleurs handicapés, à

l’heure où non seulement les employeurs mais l’Europe demandent des diplômes pour garantir la qualité des candidatures à l’emploi. »

Non à l’éviction de la CGT du CA de l’ONAC La CGT-ONAC dénonce enfin, dans le cadre des « nouvelles dispositions » qui vont présider à la mise en place du nouveau conseil d’administration de l’ONAC en décembre prochain, son éviction programmée de cette instance de direction. Actuellement, les trois syndicats représentatifs de l’ONAC (CGT, CFDT et FO) siègent au CA de l’ONAC avec voix consultative. La « refonte » de l’ONAC ne prévoyait plus que deux de ces syndicats, écartant de fait la CGT. Puis est venue une autre mouture prévoyant un représentant des personnels cadres et un des personnels non cadres, tous deux « élus ». Comment, sous quelle forme ? Mystère… Aussi la CGT-ONAC - « représentative d’un taux conséquent de personnels aux élections professionnelles (…) et siègeant au CTP (Commission technique paritaire) » considérant que « les dispositions (mises) en place ne (laissent) pas apparaître le rôle de dialogue souhaité dans ce conseil d’administration (…) demande (à nouveau) en toute logique (…) sa place dans ce nouveau CA ». Demande que les deux administrateurs actuels de l’ONAC membres de l’ARAC, Jacqueline Thabeault-Alcandre et André Fillère, appuieront sans réserve avec force, de même que les autres points soulevés dans ce courrier de l’ONAC-CGT. A. f.

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Budget 2012 des ACVG Au « nouveau » Sénat de s’affirmer ! Le projet de budget 2012 des ACVG a été adopté - avec une nouvelle baisse des crédits de 14 millions d’euros ! - par la majorité sarkozyste à l’Assemblée nationale le 4 novembre dernier à 2h15 du matin. Le Sénat va devoir se prononcer à son tour le 24 novembre prochain. Sa nouvelle majorité « à gauche » pourra-t-elle prendre en compte les revendications légitimes des ACVG ? Dans chaque département, le mouvement ACVG, et en premier lieu l’ARAC en tant que telle, se doit donc d’intervenir en ce sens auprès des sénateurs de son secteur. Ensuite, chacun jugera les siens… Prévu pour 15 heures le 3 novembre, puis reporté à 17 heures, le débat à l’Assemblée nationale n’a commencé qu’à 19h15, pour se terminer à 2h15 du matin le 4 novembre. Après les rapports de Jean-François Lamour (UMP), soit 15 minutes pour le rapporteur spécial de la Commission des finances, puis de Patrick Beaudoin (UMP), 10 minutes au rapporteur pour avis de la Commission de la défense nationale, qui appelèrent tous deux à voter ce budget, huit orateurs se succédèrent à la tribune : deux du groupe Nouveau Centre (15 minutes) et quatre de l’UMP, 25 minutes (tous POUR le vote des crédits), puis un socialiste (10 minutes) et un communiste (5 minutes) qui, critiquant la baisse des crédits, invitèrent l’Assemblée nationale à les amender… sinon ils voteraient CONTRE. Leur succéda, Marc Laffineur, secrétaire d’État aux AC, pendant plus de quarante minutes, qui répondit ensuite aux questions de 23 députés (1 Nouveau Centre, 11 UMP, 10 PS et 1 PCF) avant que le débat ne se poursuive par l’examen de 22 -

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plus de 25 amendements (!), tous rejetés par la majorité sarkozyste sauf 2… présentés par le gouvernement.

Une nouvelle baisse des crédits budgétaires Ce fut le coup de théâtre du 1er amendement présenté par M. Laffineur : suppression de 14 millions d’euros sur les crédits consacrés aux droits à réparation des ACVG, dans le cadre de la « mise en œuvre du plan d’économies supplémentaires d’un milliard d’euros annoncé par le Premier Ministre le 24 août 2011 »… Que les députés de la majorité votèrent à l’unanimité et sans état d’âme ! L’autre seule modification porte sur l’allocation exceptionnelle de 360 points en faveur des veuves des plus grands invalides (50 en tout) dont l’accès sera ouvert aux conjointes survivantes dont la pension du défunt s’élevait à au moins 11 000 points (contre 12 000 l’an passé), M. Laffineur ayant tout de même refusé un amendement ramenant le seuil à 10 000 points.

Les tricheurs ! Les tricheurs, ce sont tous ces députés de la majorité sarkozyste et leur secrétaire d’État qui n’arrêtent pas de clamer que : « le budget des ACVG n’est pas un budget comme les autres, qu’il affirme le respect, la considération, la reconnaissance et la solidarité que le gouvernement et euxmêmes portent envers les ACVG » et qui, les belles tirades à peine prononcées, votent sans vergogne les diminutions de crédits et repoussent sans état d’âme les amendements présentés en faveur de l’amélioration des droits des ACVG ! En fait, ils se retranchent derrière les 4 points de relèvement de la retraite du combattant, dont ils ont refusé la mise en œuvre proposée dès le 1er janvier 2012, pour affirmer (sans rire) qu’ainsi les engagements d’avril 2007 du candidat Sarkozy à la présidentielle… étaient tenus. Aveuglement ou hypocrisie ?

• Le bilan sera vite fait : - le 29 juillet 2011, le gouvernement récupère 13 millions sur les crédits votés pour les ACVG, - le 24 août 2011, le Premier Ministre annonce son plan d’économies supplémentaires, - le 19 septembre 2011, la loi de finances rectificative prélève à nouveau 12 millions d’euros sur les crédits ACVG 2011, - et, troisième atteinte, ce sont 14 millions qui sont détournés avant même le vote du budget 2012 ! Total : 39 millions d’euros récupérés au détriment des ACVG ! 39 millions qui auraient dû permettre de répondre à certaines de nos demandes - telle la carte du combattant aux ATM pour leur 120 jours de présence « à cheval » sur la date du 2 juillet 1962, ou encore pour la rente mutualiste AC : les 5 points à rattraper et promis valent 28 millions d’euros ! et qui nous ont été confisqués, au nom du « respect, de la considération, de la reconnaissance et de la solidarité » que ces gens clament avoir pour nous ! • M. Laffineur, l’art de l’escamotage, de l’agressivité et de la mauvaise foi. L’autre enseignement de ce débat aura été la découverte de la vraie nature du secrétaire d’État aux Anciens Combattants. Ses apparences d’homme calme, pondéré, à l’écoute et tolérant, ont volé en éclats pour céder la place à l’agressivité, les éclats de colère, l’art de dénaturer les choses, celui de donneur de leçons… même à la présidence de séance ! Patelin en apparence - tout le monde « il » a raison, dit-il, et pose des « questions pertinentes et judicieuses », etc. - mais en fait il ne supporte pas que l’opposition lui démontre l’échec de la politique sarkozyste, le non respect des engagements pris et, encore moins, le 19 Mars ! Alors là, il pique des colères, invective les députés, leur « interdit » de dire ceci ou cela. « Les AC, vous vous en fichez ! » leur lance-t-il. « Vous cherchez à diviser les Français et à les monter les uns contre les autres ! Vous ne pensez qu’à dépenser, à faire des dépenses ! Vos discours sont incohérents… La nature de l’opposition, c’est d’augmenter les dépenses publi-


vos droits LE RÉVEIL

ques et vous ne pensez qu’à ça ! », etc. Pour un homme qui affirme qu’il ne doit pas y avoir de polémique et qui prêche « l’unité nationale », quel spectacle affligeant ! De telles attaques portent autant atteinte à la dignité des élus qu’à celle des ACVG que nous sommes. Elle dévalorise même la fonction de secrétaire d’État aux Anciens Combattants. C’est intolérable, inacceptable ! Et si l’on comprend l’attitude digne et calme des élus de l’opposition (PCF-PS, etc.), on en vient tout de même à regretter que, à une timide exception près, M. Lebranchue, ils n’aient pas rappelé fermement à M. Laffineur leur bilan en faveur des ACVG et toutes les attaques nombreuses de sa famille politique à notre encontre, de 1960 (suppression de la retraite du combattant) à nos jours.

Et maintenant, le Sénat Le passage à gauche de celui-ci pourrat-il permettre aux sénateurs d’apporter un contre-feu à l’incendie budgétaire attisé par la majorité sarkozyste ? Abroger l’amendement gouvernemental et réintégrer les 14 millions d’euros dans le budget, avancer la mise en œuvre des 4 points pour la retraite du combattant au 1er janvier, opérer un rattrapage (même symbolique) pour la rente mutualiste AC, ramener à 10 000 points le bénéfice de l’allocation pour les veuves de grands invalides et se pencher sur la carte du combattant pour les ATM « à cheval » sur le 2 juillet, tout en rappelant l’ensemble de contentieux (retard de 43 % de la valeur du point PMI, etc.) qui doit être satisfait ? La Haute Assemblée devrait tout tenter en ce sens.

Certes, M. Laffineur s’emploiera à brandir tous les articles possibles de la constitution gaulliste (le 40 etc.) pour empêcher le Sénat d’avoir les moyens financiers d’être vraiment « solidaires » des ACVG. Mais ni lui, ni son gouvernement, ni « leur » Président de la République n’en sortiront grandis. C’est 2012 qui se prépare aujourd’hui. Et, à l’heure du bilan du quinquennat, il faudra bien régler les comptes présidentiels et ceux des députés. En 2012, l’heure sera à… remettre les pendules à l’heure ! A. F.

Pauvre France ? Pas si pauvre que ça, en tout cas, pour certains de ses « drôles » de citoyens… C’est la revue Challenge, le support favori du MEDEF pour en finir avec le programme du Conseil national de la Résistance, qui l’affirme : « Sur quinze ans, les fortunes ont crû six fois plus vite que la moyenne de l’économie du pays ou que ses rémunérations les plus basses. » Pour sa part, le Crédit Suisse indique que « la France compterait 2,2 millions de millionnaires en dollars », soit près de quatre fois plus que le nombre d’assujettis à l’impôt de solidarité sur la fortune, qui n’est que de 560 000 e !

Un millionnaire pour trente habitants ? Toujours selon le Crédit Suisse Group, prestataire mondial de services financiers dont le siège est à Zurich, la France compterait un millionnaire pour 30 habitants, densité la plus élevée du monde,

résultant des « inégalités de fortunes plus élevées que chez nos voisins ». Inégalités dont Challenge donne quelques exemples : depuis une dizaine d’années, les revenus ont progressé : - de + 20 % pour 1 % des plus riches, - de + 32 % pour le 0,1 % des super riches (35 000 environ) - et de + 43 % pour le 0,01 % des méga riches (3 500 environ) Pourquoi ? Parce que les très hautes rémunérations sont les seules à avoir augmenté à grande vitesse. A ce niveau, et c’est fondamental, les revenus du patrimoine prennent le pas sur ceux du travail. Ainsi, les deux tiers des revenus des 3 500 méga riches proviennent des loyers, des intérêts, des dividendes, des plus-values, etc. Or, précise Challenge, « ce sont ces revenus là qui sont les moins imposés » et le même chiffre, dans la foulée, l’écart de 1 à 400 entre les 10 % les plus pauvres et les 10 % les plus riches !

Riche de riches ! Mais qui sont-ils, ceux qui nous écrasent et s’enrichissent en pillant la France et en ruinant les Français ? Selon le ma-

gazine américain Forbes, Bernard Arnoult, PDG de LVMH (Louis Vuitton Moët Hennessy, 4e fortune du monde) est l’homme le plus riche de France avec 22,76 milliards d’euros. Le suivent, Gérard Mulliez (Auchan, 19 milliards), Liliane Béttencourt (L’Oréal, 14,45 milliards), Bernard Puech (Hermès), Louis Dreyfus (8,5 milliards), Serge Dassault (Le Figaro et les armes, 6,8 milliards), François Pinault (PRP, Pinault, Le Printemps, la Redoute, 6,2 milliards), Jacques Servier (laboratoire du scandale du Médiator se porte bien merci, 3,8 milliards)... Toujours selon Challenge, la fortune totale des 500 plus gros patrimoines professionnels français a augmenté en un an de 25 %, passant de 194 à 241 milliards d’euros ! S’il est une niche fiscale dorée, c’est bien la Bourse, repaire des brigands du CAC 40 ! Et durant ce temps, près de 8,2 millions de Français, dont tant de retraités parmi lesquels beaucoup d’ACVG, survivent en dessous du seuil de pauvreté estimé à 954 euros. Cherchez l’erreur… et souvenez-vousen en votant en 2012 ! octobre  2011 - N°777 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL vos droits

Commission nationale de la carte du combattant La Commission spéciale et la Commission plénière nationale d’attribution de la carte du combattant se sont réunies les 27, 28 septembre et 24 octobre 2011 à l’ONAC, aux Invalides à Paris. André Fillère en est l’un des rapporteurs. L’examen général de la situation a permis de constater que le logiciel Kapta avait été sérieusement amélioré, permettant la totalité du traitement des dossiers, de la demande à la vérification au BCAAM de Pau, leur présentation en Commission et l’information des services départementaux de l’ONAC quant à l’attribution de la carte ou au rejet de celle-ci. S’agissant des ressortissants algériens, tous les dossiers en retard ont été instruits et sont en attente au BCAAM. Ils se chiffrent à 15 ou 16 000 et devraient être tous traités d’ici fin mars 2012. Quant aux OPEX, si les listes d’unités combattantes sont connues pour l’exYougoslavie, elles ne paraîtront qu’en

fin d’année pour le Kossovo. Elles demeurent bloquées pour l’Afghanistan faute de personnels pour analyser les journaux de marche officiels (JMO) des unités. Le renfort de trois officiers et deux sous-officiers prévu n’a pu être concrétisé au Service historique de la Défense… faute de crédits ! On ne peut à la fois gaspiller de l’argent à bombarder la Libye et s’occuper de la carte du combattant des OPEX, n’est-ce pas ? Les prochaines réunions des Commissions auront lieu les 22 novembre 2011, puis les 10 janvier et 21 février 2012.

Résultats des commissions Les trois commissions ont examiné 5 088 dossiers, parmi lesquels elles ont donné 4 250 avis favorables et prononcés 818 rejets. • Les avis favorables concernent : 39/45 : 21, Indochine : 39, ATM : 2908 et OPEX : 1290, les plus gros contin-

gents relevant de l’ex-Yougoslavie (listes d’unités combattantes publiées) et l’Afghanistan (citations individuelles). Sont également concernés le Cambodge (5), le Congo (3), la Côte d’Ivoire (30), le Gabon (4), l’Irak (3), le Kossovo (11), le Liban (45), Madagascar (3), la Mauritanie (1), la Méditerranée Orientale (2), l’Ouganda (1), le Golfe persique et d’Oman (106), la République Centrafricaine (36), la République démocratique du Congo (1), la République du Liban et Israël (14), le Rwanda (1), la Somalie (3), le Tchad (94), le Timor Oriental (2) et le Zaïre (3). • Les rejets Ils sont au nombre de 409 pour l’Afrique du Nord (377 Algérie, 12 Maroc et 14 Tunisie) et de 416 pour les OPEX. Les intéressés, dès notification officielle, pourront donc, s’ils l’estiment justifié, présenter un recours… ou attendre la parution de nouvelles listes d’unités combattantes pour représenter leur demande.


vie de l’arac LE RÉVEIL

50e anniversaire de la commémoration du 17 octobre 1961 A Rennes A l’initiative de Rennes-Sétif, douze associations se sont rassemblées pour organiser et inviter les Rennais à se souvenir et s’informer sur ce « 17 octo-

Le 17 octobre 1961, c’est bien un crime d’État qui a eu lieu Un crime d’état commis au cœur de la capitale française, sans équivalent dans l’histoire répressive du monde occidental moderne. Le plus important massacre d’ouvriers à Paris depuis la Commune. Ce mardi 17 octobre 1961, c’est une véritable chasse à l’homme, à « l’Arabe », avec un massacre qui fut organisé par le préfet Papon avec pour seul objectif de réprimer la volonté d’indépendance du peuple algérien après la manifestation de Sétif du 8 mai 1945, départ de la lutte pour l’indépendance acquise en 1962. Le racisme, la croyance en la domination de la race blanche, rejetant toutes les autres « races » dans le sens humanité en est le centre. Octobre 1961 n’a pas été une bavure mais un paroxysme. Bien avant cette date, alors que le pouvoir voit échapper cette Algérie qui veut son indépendance, des actes de violence contre les travailleurs algériens vivant en France se multiplient. Depuis 1954, un climat de suspicion, de contrôle et de répression multiformes s’accentue. Les brutalités, les arrestations arbitraires et les vexations sont devenues le lot quotidien de chaque Algérien à toute heure du jour et de la nuit dans les rues, chez soi et sur son lieu de travail.

Un véritable couvre-feu est imposé à des citoyens français avec interdiction de circulation en fonction de leur faciès. L’exaspération au sein de la communauté algérienne monte d’un cran et c’est dans ce climat que la Fédération de France du FLN décide d’organiser la riposte et appelle à cette manifestation pacifique contre ces mesures, le mardi 17 octobre 1961. 50 ans après, il faut reconnaître enfin la responsabilité de l’État français dans ce massacre. Paris, sept villes des Hautsde-Seine dont Bagneux, mais aussi dans le Val de Marne, comme Villejuif, Ivrysur-Seine, etc, ont commémoré le massacre du 17 octobre 1961, sauf Neuillysur-Seine, ce qui est significatif. Au-delà des réticences, des dénis et des négationnistes de tout poil, le rassemblement à Paris a été couronné d’un fort succès, des fleurs ont été déposées et des prises de parole officielles ont réclamé la reconnaissance par l’État de ce massacre. La liberté, l’égalité et la fraternité sont des notions vides de sens, lorsqu’elles ne s’adossent pas solidement à la vérité et à la justice. Il y va du passé bien sûr, mais surtout de l’avenir qu’il nous revient de construire. Jean-Claude Fèvre

Sur le pont des Jumelages à Rennes, en souvenir, des centaines de fleurs seront jetées dans la Vilaine

bre 1961 » à Paris, où la manifestation pourtant pacifique des Algériens fut violemment réprimée. L’ARAC d’Illeet-Vilaine faisait partie d’un collectif organisateur qui a rassemblé des associations culturelles algériennes et du Maghreb, des organisations pacifistes, antiracistes et humanistes locales. Le lundi 17 octobre, le rassemblement annuel sur un pont de la Vilaine rassemblait plus de cent personnes, avec la présence du vice-consul et des représentants du consulat d’Algérie venus de Nantes. Le lendemain 18, la sensibilisation vers la jeunesse a été un succès : une salle de conférence de la Faculté de Rennes 2 était pratiquement remplie pour assister à la projection du film de J. Panigel, Octobre à Paris, et le débat qui suivait. Enfin, le mercredi 19 octobre, à l’auditorium de la Maison internationale de Rennes, l’historien et auteur Jean-Luc Einaudi rappelait, dans une conférence puis un échange avec les participants, les événements qui se produisirent avant, pendant et après ce 17 octobre 1961, dans ce lourd contexte de la guerre d’Algérie. octobre  2011 - N°777 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL VIE de l’arac

Pour l’ARAC départementale, ces soirées représentent un premier moment de mémoire pour les initiatives locales qui vont commémorer les derniers mois de cette guerre d’Algérie et le combat pour la paix. Georges Ploteau

A Alès Nous étions plus de 110 à Nîmes (près de 100 à Alès), devant le Palais de Justice. En présence de Smail Dahman, consul adjoint d’Algérie à Montpellier, d’un représentant de la grande mosquée de Paris et des présidentes et présidents des sept associations organisatrices (Amicale des Algériens, Association des Algériens en Languedoc-Roussillon et de l’Aveyron (ALR), ARAC, FranceEl Djazair, France Palestine Solidarité, Solidaires 30, Mouvement de la Paix. Lakdar Gejiou, président de France-El Djezair, a réclamé la reconnaissance du crime que constituent les massacres du 17 octobre 1961. Smail Dahman, consul adjoint d’Algérie, a déclaré : « La tristesse demeurera tant qu’il n’y aura pas de reconnaissance officielle de ce qui s’est passé pendant 130 ans de colonisation ». Marianne Durand( Mouvement de la Paix) insista sur le fait que le « silence officiel ne contribue pas au développement des relations amicales nécessaires avec l’Algérie », Huguette Ducros (Solidaires 30) lâchait émue « ce qui s’est produit est une horreur ». Une gerbe suivie d’une minute de silence a clôturé cette émouvante cérémonie. Pierre Clec’h

Robert Vayssette est décédé Nous venons d'apprendre avec tristesse le brusque décès de Robert Vayssette, vice-président national d'honneur, mutualiste et dirigeant de l'ARAC de la Gironde. Ancien combattant de la guerre d'Algérie, grand mutilé amputé des deux jambes, il avait 73 ans. Nous adressons à Gisèle, son épouse, à ses enfants et à tous les siens, notre soutien et nos condoléances. Et nous lui consacrerons un article dans le prochain Réveil. 26 -

LE RÉVEIL - N°777 - octobre  2011

A gauche, le président départemental Hugues Dominguez, au centre les deux récipiendaires, Pierre Marchais et Christian Élie.

ARAC Pessac (33)

A l'issue du conseil d'administration du comité départemental de la Gironde, le jeudi 27 octobre 2011, deux militants fidèles de notre association ont été honorés en leur remettant la médaille de l'ARAC. Il s'agit de Pierre Marchais, président de la section de Saint-Yzan-de-Soudiac et de Christian Élie, président de la section de Pessac.

NOS PEINES septembre 2011 Le Réveil des Combattants adresse aux familles et aux amis de nos camarades décédés ses sincères condoléances. ALLIER (03) Meillard : Louis AURAMBOUT, Résistant, AC 39-45. BOUCHES-DU-RHÔNE (13) Saint-Barnabé : Lucien FERRERES, AC ATM. Saint-Chamas : Paul SILVESTRE, victime civile Vellutini-Saint-Just : Roger RICARD, AC ATM. DORDOGNE (24) Excideuil : Roger VACHER, AC 39-45. La Coquille : Julien DUCAMUS, AC 39-45. Mussidan : Marc DEVEL Périgueux : Jean GAY, AC 39-45. Sarlande : Camille COINEAU, AC 39-45. Vertaillac : Guy BAZINET, AC 39-45. DRÔME (26) Taulignan : Emile CHAMBRE, AC 39-45. FINISTÈRE (29) Brest : Michel LE GUEN, AC ATM, président d’honneur du

comité. Mme Maguy PIBOULEAU, amie. ILLE-ET-VILAINE (35) Rennes : Marcel TOUFFLARD, 81 ans, AC 39-45. Georges VITTEL, 88 ans, AC 39-45. ISÈRE (38) Bourgoin-Jallieu : Gaston BOISSAC, 89 ans, AC 39-45. GIRONDE (33) Pessac : Michel SAINTOUT, 73 ans, AC ATM. LOIRE (42) Saint-Étienne : René GIRARD, AC ATM NIÈVRE (58) Fourchambault : Jean ARRIAT, AC Indochine. Roger OUDIN, AC ATM. Mme Antonia BELLON, veuve. André BERNIOT, AC 39-45, évadé. Raymond ROYER, ATM. Nevers : Henri RUFIN, 100 ans, AC 39-45. PUY-DE-DÔME (63) Issoire : Jean-Baptiste

CHABRUT, 78 ans, AC ATM. Maurice RIBOULET, 85 ans, AC Indochine et ATM. HAUT-RHIN (68) Mulhouse : Louis MIESCH, AC 39-45 YONNE (89) Migennes : Mme Josette DHENAIN. Théophile SEVIN, AC 39-45. ESSONNE (91) Athis-Mons : Lucien COTELLE, AC 39-45. Chilly-Mazarin : André MEDORI. SEINE-SAINT-DENIS (93) Noisy-le-Grand : Honoré MOLINARI, 90 ans, Résistant, chevalier de la Légion d’honneur, CVR, Médaille militaire. VAL-DE-MARNE (94) Villejuif : Benjamin CAMON, 79 ans, AC ATM.


vIE DE L’ARAC LE RÉVEIL

70e anniversaire

des fusillés

de Châteaubriant

19 octobre Rassemblement contre le budget des ACVG

Nous étions 7 000 à rendre hommage à l’occasion du 70e anniversaire des Fusillés de Châteaubriant, jeunes, résistants et anciens combattants, démocrates, enfants des écoles, les uns derrière les autres nous sommes rentrés dans la carrière. Le 22 octobre 1941, 27 martyrs attachés à la liberté, à l’indépendance de la France sont fusillés. Nous avons tous en mémoire les mots du plus jeune d’entre eux, Guy Môquet, plein d’espoir et de confiance dans l’avenir du combat qui lui coûta la vie. Aujourd’hui comme hier, le message est indéfectible. « Vous les jeunes, prenez en main votre avenir. Alors que sont mis en cause les acquis de cette période, il est impératif de se rassembler » rappelait Odette Nilès, présidente de l’amicale. Le combat continue.

Le 19 octobre, à l’appel des huit UDAC de la région parisienne, plus de 300 personnes se sont rassemblées devant l’Assemblée nationale pour protester contre le projet budget des Anciens Combattants et Victimes de Guerre. Les quatre groupes parlementaires sont venus à la rencontre du mouvement

anciens combattants. La délégation de l’ARAC était conduite par Raphaël Vahé, Paul Markidès, André Fillère, Pierre Bussone et Gabriel Guiche, président de l’UDAC 93. Ensuite une délégation a été reçue par les groupes parlementaires. Pierre Bussone octobre  2011 - N°777 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL vie de l’arac

PENSION D’INVALIDITE er

Valeur du point 13,86 e à partir du 1 janvier 2011 Pourcentage

Indices

Montant mensuel

INVALIDITE de 10 à 80 % 10 %

48

55,44

15 %

72

83,16

20 %

96

110,88

25 %

120

138,60

30 %

144

166,32

35 %

168

194,04

40 %

192

221,76

45 %

216

249,48

50 %

240

277,20

55 %

264

304,92

60 %

288

332,64

65 %

312

360,36

70 %

336

388,08

75 %

360

415,80

80 %

384

443,52

INVALIDITE de 85 à 100 % avec all GI 1,2,3 et 4 selon taux 85 % ss all GM av all GM

489

564,80

625

721,88

90 % ss all GM av all GM

522

602,91

745

860,48

95 % ss all GM av all GM

574

662,97

872

1 007,16

100 % ss all GM av all GM

628

725,34

1000

1 155,00

INVALIDITE à 100 % avec degrés de surpension (art l.16) et avec all. GI N°5 Invalidité 100 % 1° sans all GM avec all GM 2° sans all GM avec all GM

928

1 071,84

1139

1 315,55

947

1 093,79

de soins

916

1 057,98

de ménagement

458

528,99

de reclassement et de ménagement

28 -

au taux plein

687

793,49

au taux réduit

275

317,63

LE RÉVEIL - N°777 - octobre  2011

Indices

Montant mensuel

(1) invalidité à 100 % avec article l 18 + all gi 5 bis (a) + all gi n°6 100 % + art L.18 + all GI n°5 bis (a) sans all GM avec all GM

1 838

2 122,89

2 189

2 528,30

1180

1 362,90

966

1 115,73

100 % + art l16 et l18 + all gi n°5bis (a) et gi 6

1221

1 410,26

985

1 137,68

1° sans all G.M. avec all G.M.

1262

1 457,61

5° sans all GM avec all GM

1004

1 159,62

1303

1 504,97

6° sans all GM avec all GM

1023

1 181,57

1344

1 552,32

7° sans all GM avec all GM

1042

1 203,51

1385

1 599,68

8° sans all GM avec all GM

1061

1 225,46

1426

1 647,03

9° sans all GM avec all GM

1080

1 247,40

1467

1 694,39

10° sans all GM avec all GM

1099

1 269,35

1508

1 741,74

3° sans all GM avec all GM 4° sans all GM avec all GM

Par degré en plus de 10 sans all GM avec all GM

19

21,95

41

47,36

LES PENSIONS D’ASCENDANTS Ascendants âgés de moins de 65 ans

INDEMNITE DE SOINS AUX TUBERCULEUX

Catégories

Taux plein

213

246,02

Demi-taux

106,5

123,01

Ascendants de plus de 65 ans Taux plein

243

280,67

Demi taux

121,5

140,33

Majoration pour chaque enfant décédé en sus du premier

45

51,98

2° sans all G.M. avec all G.M.

1908

2 203,74

2289

2 643,80

1978

2 284,59

2369

2 736,20

3° sans all G.M. avec all G.M.

2048

2 365,44

2449

2 828,60

4° sans all G.M. avec all G.M.

2118

2 446,29

2529

2 921,00

2188

2 527,14

2609

3 013,40

6° sans all G.M. avec all G.M.

2258

2 607,99

2689

3 105,80

7° sans all G.M. avec all G.M.

2328

2 688,84

2769

3 198,20

8° sans all G.M. avec all G.M.

2398

2 769,69

2849

3 290,60

9° sans all G.M. avec all G.M.

2468

2 850,54

2929

3 383,00

10° sans all G.M. avec all G.M.

2538

2 931,39

3009

3 475,40

5° sans all G.M. avec all G.M.

Par degré en plus de 10 sans all G.M. avec all G.M.

70

80,85

80

92,40

(1) A ces totaux s’ajoute éventuellement l’une des all. G.I. N° 8 (de 368 à 800 points selon le taux ou la nature de l’infirmité). L’all.G.M servie est soit l’all. prévue selon le taux, soit certaines all. spécifiques (ex: 982 points pour aveugles) si cette all. est plus avantageuse.

RETRAITE DU COMBATTANT Annuelle Semestrielle

44

609,84 304,92


vie de l’arac LE RÉVEIL

Catégories

Indices

Montant mensuel

INVALIDITE à 100 % (1) Aveugles, bi-amputés, paraplégiques 100 % + L18 + all. GI n°5 bis (b) sans all G.M. avec all G.M.

1929

2 228,00

2280

2 542,20

100 % + art L18 + art L16 + all G.I. n°5 bis (b) + all G.I. n°6

PENSIONS DE CONJOINTS SURVIVANTS AU TAUX DE SOLDAT A tous ces indices s’ajoutent depuis le 1er janvier 2004 (art.121 de la loi de finances 2004) 15 points uniformes pour tous.

Indices

Montant mensuel

Conjoints survivants de victimes militaires (de guerre ou hors guerre) et de victimes civiles de guerre, quel que soit leur âge, dont le droit à pension découle de l’imputabilité ou dont le conjoint était pensionné à 85 % avec all. G.M.

500

577,50

Conjoints survivants de victimes militaires (guerre ou hors guerre) et de victimes civiles de guerre, quel que soit leur âge, dont le conjoint était pensionné à 85 % sans allocation G.M.

489

564,80

333

371,30

… au taux de 70 %

336

374,64

… au taux de 75 %

360

401,4

… au taux de 80 %

384

428,16

… au taux de 60 %

288

332,64

… au taux de 65 %

312

360,36

Veuves de déportés morts en déportation, et de prisonniers du Viet-Minh morts en captivité, sans condition d’âge et de ressources

667

770,39

Conjoints survivants âgés d’au moins 50 ans ou infirmes remplissant la condition de ressources

667

769,83

Catégories AU TAUX normal

1999

2 308,85

2380

2 748,90

2° sans all G.M. avec all G.M.

2069

2 389,70

2460

2 841,30

3° sans all G.M. avec all G.M.

2139

2 470,55

AU TAUX DE REVERSION

2540

2 933,70

4° sans all G.M. avec all G.M.

2209

2 551,40

Conjoints survivants de victimes militaires (guerre ou hors guerre) de moins de 40 ans bénéficiant du taux de reversion

2620

3 026,10

5° sans all G.M. avec all G.M.

2279

2 632,25

2700

3 118,50

6° sans all G.M. avec all G.M.

2349

2 713,10

2780

3 210,90

7° sans all G.M. avec all G.M.

2419

2 793,95

2860

3 303,30

8° sans all G.M. avec all G.M.

2489

2 874,80

2940

3 395,70

9° sans all G.M. avec all G.M.

2559

2 955,65

3020

3 488,10

10° sans all G.M. avec all G.M.

2629

3 036,50

3100

3 580,50

1° sans all G.M. avec all G.M.

Par degré en plus de 10 sans all G.M. avec all G.M.

70

80,85

80

92,40

Conjoints survivants de victimes militaires (guerre ou hors guerre) de plus de 40 ans,bénéficiant du taux de reversion, dont le conjoint était pensionné au taux de 70% … Conjoints survivants de victimes militaires (guerre ou hors guerre) quel que soit leur âge,bénéficiant du taux de reversion, dont le conjoint était pensionné…

avec supplément exceptionnel

MAJORATION POUR LES TITULAIRES DE L’ARTICLE L18 (tierce personne) Conjoints survivants pensionnés justifiant de 15 ans de mariage et de soins, dont le conjoint était bénéficiaire de l’article L18 (tierce personne) avec l’allocation n° 5 bis (b) et était donc : aveugle, ou amputé de deux membres, ou paraplégique

350

404,25

Conjoints survivants (autres que ceux ci-dessus) pensionnés justifiant de 15 ans de mariage et de soins, dont le conjoint était bénéficiaire de l’article L 18 (tierce personne) avec l’all. n° 5 bis (a)

260

300,30

(1) A ces totaux s’ajoute éventuellement l’une des all. G.I. N° 8 (de 368 à 800 points selon le taux ou la nature de l’infirmité). L’all.G.M servie est soit l’all. prévue selon le taux, soit certaines all. spécifiques (ex: 982 points pour aveugles) si cette all. est plus avantageuse.

LES IMPLAçABLES L’Allocation aux grands invalides n°9, dite allocation aux implaçables, n’est pas d’un montant fixe. En effet, elle représente pour le bénéficiaire la différence entre ses revenus (pension et autres) et le montant produit par la multiplication de la valeur du point et de l’indice 1500 s’il est âgé de 65 ans ou de l’indice 1200 s’il a plus de 65 ans. Ainsi par exemple, un pensionné à 90 % sans allocation G.M. bénéficie d’une pension d’invalidité calculée sur l’indice 522. S’il n’a pas d’autres

ressources que sa pension, et s’il est âgé de moins de 65 ans, le montant mensuel de son allocation n°9 sera calculée comme suit : • 522 x 13,86 e / 12 = 602,91 e • Les ressources globales autorisées sont fixées sur la base de l’indice 1500 multipliées par la valeur du point de pension en vigueur : Indice 1500 = 20 790,00 e par an, soit 1 732,50 e par mois. • En retranchant de cette somme le montant mensuel de cette pension : 1 732,50 e - 602,91 e on

obtient la valeur mensuelle de l’allocation n°9 : 1 129,59 e

• montant mensuel des ressources autorisées Indice 1500 = 1 732,50 e Indice 1200 = 1 386,00 e

NB : Calcul du montant de la retraite du combattant : on multiplie l'indice (44) par la valeur du point (13,86 e) pour trouver le montant annuel (soit 44 x 13,86 = 609,84 e). C'est la même formule de calcul pour le montant de la pension militaire d'invalidité (indice x valeur du point / 12).

octobre  2011 - N°777 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL magazine

La BD et les guerres

Football, Football

Bouzard, Ed. Poisson Pilote, 10,95 euros

La Première Guerre mondiale en caricatures

Mark Bruyant, Ed. Hugo et Cie, 25 euros

Excessives, incisives et parfois de très mauvais goût, les caricatures racontent la Première Guerre mondiale plus vite, plus fort et de manière parfois plus émouvante que bien des livres de texte. C’est que, bien avant l’existence de la radio et de la télé, l’impact des caricatures était immense, accessibles sur tous les supports et dramatiques en leur noir et blanc. Cet album, découpé chronologiquement année par année, de 1914 à 1918, nous propose des dessins provenant de journaux, de magazines, d’affiches, de posters d’époque, chaque chapitre étant introduit par un court rappel des faits historiques évoqués.

Guerre et match

Frano Pertrusa, Ed. Dargaud, 14,50 euros

Zagreb, 1999, championnat national junior de basket. La petite équipe de Dewescak a créé la surprise en se hissant en finale où elle va rencontrer le favori Dario. L’entraîneur craque sous la pression de la rencontre : la guerre atroce qu’il a vécu déferle soudain dans son esprit et la violence le submerge… Psycho-traumatisme. A deux pas de lui, Frano, le narrateur du récit et joueur de l’équipe, est tétanisé par le trac, la peur de jouer. Les deux hommes doivent affronter leurs propres démons. Victoire ? Défaite ? Quelle clef au bout du score ?

Commando colonial : Fort Thélème

Re-mind

C’est le tome 3 de la série, qui voit le major Robillard et le quartier-maître Rivière, soldats réunionnais des Forces françaises libres, à la recherche du trésor de la France libre dans le désert africain. Tempêtes de sable, oasis, danseuses, Afrika Korps… un pastiche qui nous renvoie à notre enfance avec l’illustré Coq Hardi et Les trois mousquetaires du maquis au lendemain de la Libération.

Thriller, action, espionnage, anticipation, cet album mêle tous les genres en posant les éternelles et tragiques questions : « La fin justifie-t-elle les moyens ? » « Peut-on tuer un homme pour en sauver des milliers ? » Comme on est aux USA et que le FBI, sur les dents face à un possible attentat bactériologique, possède une technologie (Re-mind) capable de lire dans l’esprit d’un être au seuil de la mort, je vous laisse à votre suspense…

Appolbo et Bruno, Ed. Poisson Pilote, 10,95 euros

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LE RÉVEIL - N°777 - octobre  2011

C’est l’album « saison 2 » où le dessinateur Bouzard s’efforce de répondre de façon documentée, et très complètement tordante, à des questions du style : A quoi ça sert les « jonglages » ? Comment Platini digère-t-il le fait que Thierry Henri lui ait piqué le record de buts ? Qu’est-ce qui pousse l’arbitre amateur à quitter sa famille tous les dimanches pour aller sur des terrains boueux ? Du virus H1N1 à la Coupe du monde, en passant par la main d’Henry et les affres de Domenech, vous saurez tout… tout… tout… sur le ballon rond.

Mutti et Alcante, Ed. Dargaud, 10,95 e


dossier LE RÉVEIL magazine

Baron rouge et cigogne blanche Patrick de Gmeline - Ed. Presses de la Cité - 24 euros

L’idée était intéressante : narrer, en parallèle, la vie de deux « as des as » de la guerre aérienne de 1914-1918, Manfred von Richthofen (et son Fokker triplan rouge) et René Fonck (et son SPAD) de l’escadrille des Cigognes. Ils n’ont jamais combattu l’un contre l’autre. Von Richthofen (80 victoires homologuées,

abattu le 21 avril 1918) et René Fonck (75 victoires homologuées et 52 non homologuées), jamais abattu, jamais blessé, mort à 59 ans, le 18 juin 1953, d’une hémorragie cérébrale. La première partie est intéressante, qui fait revivre de grandes figures de l’aviation tels Roland Garros, Georges Guynemer… dont les récits ont fait vibrer notre enfance. Hélas, l’auteur ne peut s’empêcher de laisser percer ici et là son antisoviétisme (p 244 à 246), et son anticommunisme (p 274). Ce qui entraîne le dérapage de la 2e partie du livre. Car si von Richthofen est mort, les pilotes survivants allemands (Udet, Göring et consorts) ont servi l’armée nazie. Et Fonck, vivant, va les fréquenter… et servir Pétain. Non content d’accuser Pierre Cot, ministre de l’Air, d’avoir affaibli l’armée française, voilà que s’étale la plus grande complaisance pour Pétain et le gouvernement de Vi-

chy dont René Fonck va devenir le messager personnel et secret. D’où un « délire », Pétain et de Gaulle alliés, Pétain renseignant les Américains, etc. La théorie des « deux fers au feu » fait que Fonck est à la fois collaborateur et « résistant ». Mais pourquoi un pilote de cette classe - l’as des as - n’a-t-il pas rallié l’Angleterre, combattu avec la RAF, dans les Forces aériennes françaises libres, comme Pierre Closterman, le commandant René Mouchotte, SaintExupéry, ou avec l’escadrille Normandie-Niemen auprès des Soviétiques ? Parce qu’on ne le lui a pas demandé, que sa femme Irène ne voulait pas aller à Londres et qu’il n’avait qu’un chef : le maréchal Pétain… Triste final pour un homme dont les ailes s’étaient couvertes de gloire en 1914-1918. Et lamentable fin aux accents pétainistes pour un livre qui méritait un meilleur traitement.

octobre  2011 - N°777 - LE RÉVEIL

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