LA SOUS-TRAITANCE DANS L'INDUSTRIE AUTOMOBILE
LA MUTUELLE FAMILIALE UN ESPRIT DE RÉSISTANCE
TRUMP VEUT DOMINER VIE DE L’ARAC LE RÉVEIL L'ESPACE
Septembre 2018 - N° 847 - 5 €
Pour combattre les inégalités, les injustices et se faire entendre, manifester partout en France
le 9 octobre
c'est œuvrer à la Paix dans le monde LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
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LE RÉVEIL ACTUALITÉS
LE 9 OCTOBRE, ensemble à la conquête d’un autre avenir ! Nos salaires, pensions de retraite et minima sociaux stagnent et les dividendes versés aux actionnaires, multipliés par 5 en 30 ans, flambent ! En une décennie, les 10 plus riches fortunes françaises ont vu leur patrimoine quadrupler. Les annonces gouvernementales et les contre-réformes successives ne font qu’amplifier le creusement de ces inégalités : une large majorité de la population juge injuste et inefficace la politique du gouvernement au service exclusif des intérêts patronaux. La journée de mobilisation et de grève interprofessionnelle du 9 octobre à l’appel de la CGT, FO, Solidaires, FIDL, UNEF et UNL est le moment pour toutes et tous, salarié-e-s, retraité-e-s, privé-e-s d’emplois, lycéen-ne-s et étudiant-e-s d’exprimer le refus de cette politique détruisant brique par brique notre modèle social. C’est aussi le moment de transformer les attentes en une expression forte des revendications ; du lieu de travail à la rue.
Il est urgent de revendiquer : - une augmentation des salaires, des pensions et des minima sociaux pour gagner du pouvoir d'achat ; - la réalisation concrète de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ; - un service public de proximité pour toutes et tous qui mette fin aux inégalités territoriales et sociales ; - l’arrêt des réformes régressives visant la casse des droits collectifs et les mécanismes de solidarité. Celles-ci favorisent l’émergence d’une logique de chacun pour soi inégalitaire où l’on ne reçoit qu’à la hauteur de ses moyens et non plus en fonction de ses besoins : remise en cause des conventions collectives et des statuts, réforme des assurances maladie et chômage, retraite ; – le droit à la retraite à taux plein pour tous les salariés, dès l’âge de 60 ans et en deçà pour les travaux pénibles ; - l’égalité d’accès à l’éducation et à la formation pour faciliter l’insertion des jeunes dans la vie active et la fin d’une logique de sélection aveugle du plus jeune âge jusqu’à l’université via Parcoursup ; - une vraie politique d’investissement ciblée notamment sur les enjeux environnementaux qui assure l’avenir des générations futures.
Dans chaque entreprise, dans chaque administration, sur les lieux d’études, dans les lieux de vie, ensemble le 9 octobre, il est grand temps de nous faire entendre pour que le progrès social soit au rendez-vous ! 2-
LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
ÉDITO LE RÉVEIL COMBATTRE LES INÉGALITÉS, C’’EST ŒUVRER POUR LA PAIX
SOMMAIRE Actualités Mobilisation le 9 octobre ....................................................................................................... 2 Intensification de la pauvreté en France : une tendance inquiétante............................ 4 Macron fait les poches des gens sous tutelle .................................................................. 4-5 Après la réforme de la SNCF, que prévoit le gouvernement pour la RATP ? ....................................................................................................................... 5-6 Une prime pour récompenser les économies des préfets ............................................... 6 Politique : La monarchie française vacille ............................................................................ 8 La sous-traitance dans l’industrie automobile : coût et conséquences ......................... 8
International Venezuela : L’interventionnisme de l’administration Trump .............................................. 9 USA SPACE COWBOY : Trump veut dominer l’espace ...................................................... 10 La Grèce loin d’être tirée d’affaire...................................................................................... 11 Des bombardiers stratégiques américains B-52 déployés en Grande-Bretagne ......... 12 Deux contingents belges en passe d’être déployés en Lituanie, dans le cadre du renforcement de l’OTAN en Europe de l’Est ..................................................................... 12
Témoignage La Roque d’Anthéron (13) : le rescapé du massacre du Fenouillet ............................. 21 Maurice AUDIN : Aller au bout de la vérité ....................................................................... 28
Vos Droits Retraite du Combattant : Prise ou non en compte dans le calcul des ressources pour l’entrée en EHPAD ? .............................................................................................................. 23 Plan pauvreté : l’USH* appelle à la cohérence entre les actions annoncées et la défense du logement social ................................................................................................ 24 Quel avenir pour l’hôpital public ? ..................................................................................... 25
Vie de l’ARAC Vie des Comités.................................................................................................... 27-30 Nos peines ................................................................................................................. 30 Etats Généraux de la Paix........................................................................................... 31
P. 13 . D O S S I E R La Mutuelle Familiale, un esprit de résistance au service de la défense de la santé pour tous ◗ Dans ce numéro : un carnet de bon de soutien et une enveloppe T
www.le-reveil-des-combattants.fr LE RÉVEIL DES COMBATTANTS Fondé en 1931 par Henri-Barbusse Mensuel de l’Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre. Commission paritaire n° 0723-A06545 ISSN N° 0751-6215 • Édité par les Éditions du Réveil des Combattants • SARL au capital de 45 734,41 € - Siret : 572 052 991 000 39 2, place du Méridien - 94807 Villejuif cedex Tél. 01 42 11 11 11 Fax. 01 42 11 11 10 reveil-des-combattants@wanadoo.fr • Tirage : 60 000 exemplaires
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a volonté de redécouper le monde, de se redistribuer les richesses de la planète entre les mains de quelques-uns conduit aux guerres, aux inégalités, à la misère, à la migration de millions d’habitants de notre terre. Ce besoin d’appropriation de profits entraîne une escalade de violence aux 4 coins du globe. Dans notre pays, le président poursuit la casse de tout ce qui a été construit tout au long des 230 années depuis la Révolution Française. Droits sociaux, retraite, sécurité sociale, services publics, tout est mis à l’encan pour le plus grand malheur des Français. Au plan international, M. Macron s’arroge le droit d’intervenir militairement, de menacer des pays faisant fi du droit international, de la charte de l’ONU, bafouant la souveraineté des nations. Il a du faire sienne la phrase abjecte de février 2012 d’Henry Kissinger (Prix Nobel de la paix ?), « qui contrôle les réserves de nourritures, contrôle les peuples, qui contrôle l’énergie peut contrôler des continents entiers, qui contrôle l’argent peut contrôler le monde ». Ces actes portent le sens de ce qui se passe dans le monde aujourd’hui avec les conflits en cours. Le fossé entre les riches et les pauvres est aujourd’hui plus profond que jamais et chaque jour, il continue de se creuser. Ne laissons pas le pouvoir se concentrer dans les mains de quelques élites, l’histoire se charge de nous montrer les risques encourus quand la liberté, la démocratie, la souveraineté des peuples est bafouée. Alors que la pauvreté touche 13,6 % des Françaises et des Français, que le chômage touche 6 millions de personnes, le gouvernement continue ses attaques. Les L milliards récupérés sur le dos des plus anciens e des plus pauvres sont distribués aux plus riches. et I y a urgence à agir car depuis 20 ans, les écarts de Il r richesses se creusent en France : les 10 % les plus r riches détiennent plus de la moitié des richesses alors q les 50 % les plus pauvres s’en partagent à peine que 5 %. I faut rapidement un juste retour vers ceux qui ont Il créé de la richesse par leur travail et qui aujourd’hui s’angoissent sur leur avenir, et pire pour eux, sur celui de leurs enfants. Tant que des hommes voudront en opprimer d’autres, leur dire ce qu’il faut penser, leur interdire simplement de penser, il y aura toujours des champs de bataille de par le monde. Nous savons qu’il ne suffit pas de crier la Paix sur tous les tons pour éviter les guerres. La paix est précieuse, soyons vigilants et ayons la volonté de défendre toujours, la liberté, l’égalité, la fraternité, la souveraineté. Patrick STAAT LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
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LE RÉVEIL ACTUALITÉS
Intensification de la pauvreté en France : une tendance inquiétante Le Secours Populaire Français et Ipsos ont publié leur baromètre annuel de la pauvreté, avec cette année un focus sur la précarité alimentaire. Selon ce Baromètre, plus d’un tiers des Français (39 %) ont été confrontés à un moment de leur vie aux privations et à une situation de pauvreté, soit une augmentation de 2 points par rapport à 2017. « Depuis trente ans, cette précarité ne cesse de s’accroître. Ce chiffre de 39 % est colossal ! C’est pourquoi, nous devons tous nous sentir concernés pour soutenir l’association et aider ainsi les plus modestes », affirme avec conviction Thierry Marx, chef de cuisine et parrain de la campagne Pauvreté-Précarité. Indicateur-phare du baromètre Ipsos-SPF, la proportion de personnes avouant leur crainte de la pauvreté est toujours très forte. Plus d’un Français sur deux a connu la pauvreté ou a craint d’y être confronté, à un moment de sa vie. En 2007, avant le début de la dernière crise, moins d’un Français sur deux faisait part d’une telle angoisse. Ils disent à 81 % redouter l’avenir pour leurs descendants. Un Français sur cinq (21 %) a du mal à se nourrir : un chiffre qui grimpe à une personne sur deux chez les plus pauvres.
Autre point alarmant : 19 % des parents déclarent éprouver des difficultés pour payer la cantine scolaire. La majorité des ménages les plus modestes confesse ne pas pouvoir faire face à cette dépense. Face à l’intensification de la pauvreté en Europe, les Français estiment impératif à 92 % de conserver l’aide alimentaire fournie par l’Union européenne et 84 % sont convaincus qu’elle permet de repérer d’autres problèmes vécus par les
personnes et d’apporter une solidarité plus globale. Ils sont 3 sur 4 à considérer que l’Union européenne n’agit pas assez contre la pauvreté. Près de 9 millions de Français vivent sous le seuil officiel de pauvreté, fixé à 1 015 euros (Insee, publication de 2017). Ils seraient plus nombreux si l’on retenait le seuil de 1 118 euros avancés par les Français dans ce baromètre. Source : Secours Populaire Français
Macron fait les poches des gens sous tutelle Afin de compenser des coupes budgétaires, un décret vient d’augmenter la participation financière des personnes sous protection juridique. Les associations s’insurgent. Depuis l’épisode de la baisse des APL, on savait que le gouvernement n’avait 4-
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aucun scrupule à piocher dans la poche des plus vulnérables pour leur faire payer l’addition de ses choix politiques. Il vient de récidiver, cette fois en s’attaquant aux ressources, souvent bien maigres, des personnes sous tutelle ou curatelle. Un décret du 31 août 2018, en vigueur depuis le 1er septembre, revisite, en effet, les modalités de financement des mandataires chargés de la protection juridique. Avec, pour principale mesure,
de demander aux personnes accompagnées, dont la moitié vit en dessous du seuil de pauvreté, de participer davantage au coût de leur protection ! Les derniers de cordée ont intérêt à se cramponner… Les adultes placés sous protection juridique paient une partie des montants versés aux associations ou à leurs proches chargés de leur suivi. Un reste à charge déterminé par un barème précis. C’est ce barème que le gouvernement a décidé
ACTUALITÉS LE RÉVEIL de tripatouiller afin de compenser de funestes coupes budgétaires. Dans la loi de finances 2018, le Parlement, sur proposition de l’exécutif, a voté une baisse des dotations destinées aux associations et services tutélaires. « Il a décidé, par un calcul purement arithmétique, d’augmenter la participation des adultes protégés afin de permettre aux associations tutélaires de fonctionner avec un budget égal à celui des années précédentes », déplore la direction de l’Unapei, fédération qui défend les personnes handicapées mentales et leur famille. Concrètement, l’ensemble des taux de prélèvement appliqués aux personnes sous tutelle ou curatelle ont été relevés. Et, surtout, la « franchise » qui s’appliquait en dessous d’un seuil minimal a été supprimée. L’affaire est technique mais vaut explication. Pour les personnes sous protection dont les revenus sont inférieurs ou égaux à l’allocation adulte handicapé (AAH), soit 819 euros
par mois, pas de changement. Elles continuent d’être exemptées de participation. Pour les autres, l’addition va se corser. Jusqu’ici, leur participation était calculée sur leur revenu annuel déduit d’une « franchise » égale au montant de l’AAH sur un an (9 828 euros). Par exemple, si vous gagnez 10 000 euros, on enlève 9 828 et on calcule la participation sur les 172 euros restants. Avec Macron, c’est fini. La franchise disparaît. À partir de 820 euros par mois, vous êtes ponctionné sur l’intégralité de vos revenus. Selon certains calculs, une personne percevant 850 euros par mois va voir sa contribution passer d’environ 2,20 euros à 7,50 euros. Soit 340 % d’augmentation. Merci qui ? Cela « aura des conséquences dramatiques sur les personnes ayant de très faibles ressources », a mis en garde l’Union nationale des associations familiales (Unaf), vendredi dernier. Qui rappelle que la moitié des personnes
protégées vit en dessous du seuil de pauvreté, soit 1 015 euros par mois en 2015, selon l’Insee. L’Unaf redoute des « effets néfastes sur le niveau de vie de ces personnes, qui vivent déjà dans une très grande précarité ». De leur côté, l’Unapei et les Petits Frères des pauvres ont dénoncé, dans un communiqué commun, une « réforme injuste ». « C’est une aberration humaine et économique, déplore Luc Gateau, président de l’Unapei. Le gouvernement fragilise les personnes vulnérables et leur bon accompagnement en ne donnant pas les moyens nécessaires aux professionnels d’accomplir leur mission. » D’autant que cette mesure s’ajoute à « celles de ces derniers mois qui participent d’une précarisation renforcée des personnes âgées », ajoute Alain Villez, président des Petits Frères des pauvres. À quand Macron sous tutelle ? Source : L’HUMANITE - Laurent Mouloud
Après la réforme de la SNCF, que prévoit le gouvernement pour la RATP ? Les parlementaires devraient bientôt se pencher sur l'ouverture à la concurrence des bus franciliens, annoncée en 2017. Alors qu'elle s'inscrit dans le cadre des traités européens, cette ouverture à la concurrence en rappelle une autre. La RATP subira-t-elle le même sort que la SNCF ? Citant le média spécialisé Contexte, un article publié le 5 septembre 2018 « les échos.fr » révèle quelques lignes d'une note de présentation de l'avant-projet de la loi d'orientation sur les mobilités (LOM). Rédigée par le ministère des Transports, la note explique, entre autres, que la « détermination des conditions d'ouverture à la concurrence des bus en Ile-de-France », qui fait partie du texte de loi, a « vocation à être enrichi[e] en septembre ou lors du débat législatif ». Dans le cadre des traités européens, plus précisément du règlement N° 1370/2007 du Parlement européen et du Conseil, qui précise que « les au-
torités compétentes ne devraient pas être autorisées à fractionner les contrats ou les réseaux afin d’échapper à l’obligation d’organiser une mise en concurrence », la RATP doit en effet se préparer à renoncer à son monopole pour le réseau existant, une réalisation à laquelle s'était engagée le gouvernement français en juillet 2017. La ministre des Transports Catherine Guillouard avait alors annoncé, entre autres, que la mise en concurrence de la RATP sur l'exploitation de son réseau de bus francilien devrait être entamée en 2024. En outre, conformément à la législation européenne, la RATP est déjà mise en concurrence pour l'exploitation de toute nouvelle ligne.
La venue imminente des discussions parlementaires sur l'ouverture à la concurrence de la RATP sur son réseau de bus francilien intervient seulement quelques mois après la réforme de la SNCF qui portait, entre autres, sur l'ouverture progressive à la concurrence de la Société nationale des chemins de fer français. LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
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LE RÉVEIL ACTUALITÉS Impulsée par le gouvernement français et adoptée à une très large majorité le 13 juin 2018 à l'Assemblée nationale, cette réforme s'inscrivait également dans le cadre des traités européens, plus précisément dans une série de « paquets ferroviaires », rédigés par la Commission européenne, dont le quatrième visait à concrétiser la totale libéralisation du transport des voyageurs
par le rail en Europe. Pour rappel, les deux premiers paquets avaient pour objectif de contraindre les Etats membres à ouvrir leurs compagnies nationales à la concurrence pour le fret. De son côté, le troisième paquet avait permis de libéraliser le transport international de voyageurs, le quatrième s'étant quant à lui focalisé sur le transport national de voyageurs.
Si, au fil des gouvernements, la France semble se conformer aux recommandations bruxelloises en matière d'ouvertures successives à la concurrence, le Royaume-Uni (qui quittera officiellement l'Union européenne, le 29 mars 2019), a quant à lui décidé de renationaliser plusieurs sociétés privées ferroviaires, celles-ci ayant échoué à exploiter de façon rentable le réseau ferré.
Une prime pour récompenser les économies des préfets Dans une circulaire du Premier Ministre, du 24 juillet, nommée « organisation territoriale des services publics », il y est précisé qu’"un mécanisme d’intéressement aux économies réalisées sera également instauré". Concrètement, Édouard Philippe "promet des primes aux préfets s’ils réalisent des économies dans leur région ou dans leur département". Parmi les propositions pour faire des
économies : des regroupements immobiliers, des mutualisations de services, « gains de performance dans le service rendu ». Pour résumer, le 1er ministre demande aux préfets de détruire les services publics en réalisant des économies dans leur région ou leur département (enfin, ça se traduit en termes choisis dans la circulaire : mutualisation, efficience, rationalisation etc)….
Clap de fin pour la loi Bichet ? Il n’y avait pas de quotidiens nationaux dans les kiosques le 13 septembre. En cause : la « réforme » programmée de la loi Bichet de 1947 sur la distribution de la presse en France qui devrait se faire sur la base du rapport Schwartz, remis fin juillet à la ministre de la Culture Françoise Nyssen et à Bruno Le Maire, ministre de l’Économie. La loi Bichet (loi issue du programme du Conseil de la résistance) était fondée sur trois grands principes : la liberté (quiconque peut en France créer un journal), la solidarité (le système coopératif permet de mutualiser les coûts de distribution), l’égalité de traitement (la presse est diffusée de façon équitable sur l’ensemble du territoire). La loi Bichet n’a pas seulement créé un « droit à la distribution » mais un système permettant de conserver et de développer une solidarité entre éditeurs 6-
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quels que soient leurs moyens logistiques et financiers. Ce système a permis aux idées les plus diverses de se propager, à la démocratie de s’exprimer et au pluralisme d’exister. Avec la réforme annoncée, il n’y aurait plus d’obligation pour les titres de passer par une coopérative existante (il en existe deux aujourd’hui : Presstalis et les Messageries lyonnaises de presse), mais d’organiser de nouvelles messageries afin de réaliser des groupages. Là où la loi Bichet était protectrice pour les titres les moins riches, ils se retrouveraient alors à la merci des plus gros : clap de fin du système de mutualisation. On peut légitimement penser que les titres ne seraient plus traités de façon égalitaire mais que chacun verrait son existence sur le territoire tributaire de ce qu’il serait prêt à débourser. Une pierre de plus dans le traitement inégalitaire
des territoires : certains journaux ne pourraient plus exister dans de petites zones rurales où le coût de transport est plus important. Ces nouvelles organisations entraîneront dans leur sillon la remise à plat des statuts des salariés opérant dans la filière.
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Politique : La monarchie française vacille L’affaire Benalla a sapé la promesse faite par Emmanuel Macron d’une gouvernance plus juste et transparente, estime ce quotidien britannique. Le caractère impérieux du président français n’aide pas à apaiser la situation. On aurait pu s’attendre à ce que le premier grand test d’Emmanuel Macron concerne ses réformes, l’économie française, l’Europe ou sa relation avec Donald Trump. Mais quatorze mois après son élection, le président est mis à l’épreuve sur un tout autre sujet : l’un de ses gardes du corps, Alexandre Benalla. L’Elysée réduit peut-être « l’affaire Banalla » à un emballement médiatique, mais l’épisode influence la façon dont les Français voient leur chef d’Etat, âgé de 40 ans, et il affaiblira sûrement ses chances de mettre en œuvre son programme de réformes. Comme souvent, ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui ont provoqué la crise, mais plutôt la réaction du gouvernement. Macron a fait campagne en promettant de mettre fin aux pratiques louches qui ont caractérisé la grande époque de la Ve République. Mais étant donné la nature quasi monarchique de sa présidence, la tentation est grande pour son entourage de se croire au-dessus des lois. Et cette tendance est accentuée par une atmosphère de cour à l’Elysée, laquelle est favorisée par la concentration des pouvoirs entre les mains du président et l’importance qu’il accorde à la loyauté de ses proches. Au début de la Ve République, à la fin des années 1950, les militants gaullistes ne se sont guère préoccupés de la légalité quand ils ont combattu les extrémistes qui refusaient d’abandonner l’Algérie. Dans les années 1980, François Mitterrand a créé une cellule secrète à l’Elysée pour surveiller ses opposants, les médias. Macron a promis un système plus moral et plus ouvert. Il a évoqué une présidence « jupitérienne », c’est-àdire placée au-dessus des querelles de partis qui tourmenteraient la France
depuis si longtemps. Soutenu par une nouvelle formation, La République en marche (LREM), il a annoncé l’avènement d’une vie politique « exemplaire », telle que l’exige le XXIe siècle. La protection offerte à Alexandre Benalla a sapé cette promesse. L’enchaînement des révélations et les tentatives maladroites de dissimulation détonnent avec la bonne fortune dont bénéficiait Macron et qui semblait faire de lui la figure providentielle qu’attendait la France depuis longtemps. Emmanuel Macron a eu la victoire facile contre Marine Le Pen. LREM n’avait plus qu’à surfer sur la vague pour remporter une majorité à l’Assemblée nationale. Depuis l’éclatement de l’affaire Benalla, le 18 juillet, Jupiter est toutefois redescendu sur terre. Si son gouvernement a facilement survécu, le 31 juillet, à la menace de deux motions de censure, un sondage (de l’institut britannique) YouGov mené dans les jours suivants accordait au président français une cote de popularité de 27 % seulement. On l’accuse d’être déconnecté des préoccupations de la masse des Français. Le président est désormais aussi bien critiqué par l’opposi-
tion que par certains des économistes qui l’ont aidé à rédiger son programme de campagne. Il lui est notamment reproché une forme d’indifférence pour les questions sociales, écho de l’accusation faisant de lui le « président des riches ». Il sera plus compliqué de vendre la prochaine série de réformes aux Français alors que les prévisions de croissance sont en baisse pour la fin de l’année. Dans le système Macron, tout passe par lui, ce dont il semble raffoler. « S’ils cherchent un responsable, le seul responsable c’est moi, et moi seul », a-t-il déclaré. Cette attitude de défi souligne le caractère impérieux d’Emmanuel Macron. Une tendance qui ne peut qu’aggraver les dysfonctionnements d’une présidence déjà peu encline à rendre des comptes. Alors qu’il prépare un nouveau train de réformes, le président Macron n’a peut-être pas l’affection des Français, mais il a besoin de leur respect et de leur confiance dans l’idée qu’il est en train de changer les choses. Tout cela est désormais compromis par l’affaire Benalla. Jonathan Fenby Financial Times Londres (extraits) Courrier International – 3 août 2018 LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
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La sous-traitance dans l’industrie automobile : coût et conséquences Plein gaz. Le secteur automobile a fait de la flexiprécarité l’une des clés des profits records réalisés par les constructeurs français en 2017… sur le dos des salariés. Soulevons le capot. La fête devrait être belle au Mondial de l'Auto qui se tiendra à Paris du 4 au 14 octobre. Les constructeurs automobiles français pourraient s'y repaître de leurs profits records (lire « Zoom » ci-dessous). Pas les salariés de la filière qui n'en profitent guère, comme le signale la fédération CGT de la métallurgie qui devrait appeler – courant octobre à une mobilisation nationale. Objectif ? – Mettre les pleins phares sur les rouages de l'auto, moins rutilants que son capot. Depuis la crise de 2008, tout est bon en effet pour dynamiser les profits et choyer les actionnaires. Cet été, l'UIMM, le patronat de la métallurgie, a même obtenu l'extension à la branche des contrats de chantier et des CDI intérimaires. Depuis deux ans, il mène en outre un travail de sape pour revoir à la baisse l'ensemble du dispositif conventionnel de la branche. La combine, qui s'ajoute à une panoplie de mesures visant à accroître la flexibilité, devrait aussi affecter les salariés de la sous-traitance. Celle-ci est moins visible que les accords de compétitivité ou le recours à l'intérim, très pratiqués chez les donneurs d'ordres. Pourtant, le phénomène est central : de nos jours, plus de 80 % d'une voiture est fabriquée par des prestataires extérieurs. L'enjeu ? D'une part, les constructeurs, concentrés sur le développement de véhicules de plus en plus sophistiqués, peuvent s'adresser à leur guise à de nouveaux sous-traitants mieux-disants sur les plans économiques et 8-
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techniques, plutôt que de financer l'évolution technologique de leurs prestataires usuels – comme pourraient les y enjoindre les juteuses aides de l'État glanées sans contrepartie. D'autre part, ils peuvent délocaliser les emplois plus facilement : adieu le coût des PSE et les images de marque écornées. « Externa-liser la production, c'est externaliser la responsabilité sociale des directions », explique Fabien Gâche, délégué CGT de Renault. Qui a entendu parler des Sealynx ? En mars 2013, Arnaud Montebourg plastronnait parmi les ouvriers de cette entreprise de Charleval, dans l'Eure. Il vantait son « redressement productif réussi » après lui avoir trouvé un repreneur, GMD, et un client, Renault, qui s'était engagé à garnir le carnet de commandes. Depuis, la défense du « made in France » en a pris un coup : le 13 juillet, huit syndicalistes étaient jugés polit s'être opposés au transfert des machines. Renault au-
rait durci ses exigences tarifaires, et, pour y répondre, le sous-traitant avait prévu de délocaliser en Roumanie. La justice a donné raison aux salariés, la délocalisation a été différée… Mais jusqu'à quand ? GMD est aussi le repreneur depuis septembre 2017 de l'usine GM&S de La Souterraine (Creuse), « allégée » de 156 postes après une âpre bataille des salariés contre la fermeture. Renault et PSA, responsables par leur désengagement des licenciements, avaient fini par promettre 22 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel sur cinq ans. « Un an plus tard, on arrive à 11 millions d'euros. Le redressement judiciaire de l'usine pourrait intervenir plus tôt que prévu », dénonce Vincent Labrousse, ex-délégué CGT, alors que les pièces produites à La Souterraine le sont désormais au Brésil… ELSA DUPRÉ Ensemble ! N° 110 (mensuel des adhérents de la CGT)
Zoom En 2017, Renault a fait 5,11 milliards de bénéfices, soit 50 % d’augmentation par rapport à l’année précédente, tandis que PSA a engrangé 1,9 milliard de bénéfices, en augmentation de 11,5 %. Les marges opérationnelles des deux groupes dépassent, elles, les 6 %. Des résultats obtenus « grâce » à la flexibilité et aux sacrifices imposés aux salariés.
INTERNATIONAL LE RÉVEIL
Paroles de syndiqués : Christelle Broult, DS chez Seaynx : Il faut un bras de fer commun. En septembre, toutes les boîtes qui appartiennent à GMD vont agir de concert. Ce sera peut-être une occasion pour partir en grève afin de médiatiser notre histoire et d’obliger l’Etat à intervenir auprès du vrai patron, Renault. Thomas Baudouin, DS central adjoint à PSA : Le nerf de la guerre, c’est l’information. Bien souvent, quand les salariés des sous-traitants de nos entreprises nous alertent sur
l’état de leur carnet de commandes, il est trop tard pour que nous puissions faire pression. Pour éviter cette désorganisation, nous devons développer des comités interentreprises. Fabien Gâche, DS central chez Renault : Le développement de la sous-traitance et les réorganisations permanentes de la production rendent le travail syndical et la structuration plus difficile. Cela implique de pratiquer un syndicalisme plus proche du terrain et, surtout, de s’adresser à tous, de discuter avec tous les tra-
vailleurs de l’auto, quel que soit leur contrat de travail. Vincent Labrousse, ex délégué syndical chez GM&S : Les délocalisations ne sont pas une fatalité. Par la lutte, on peut rendre, plus difficile leur mise en œuvre. Nous avons par ailleurs rédigé une loi afin d’étendre la responsabilité sociale des entreprises donneuses d’ordre à leurs sous-traitants, afin que licencier devienne un coût pour elles. Le but est qu’elles intègrent les coûts sociaux et environnementaux à leur politique d’achat.
Venezuela
L’interventionnisme de l’administration Trump Le New York Times fait état de réunions entre militaires vénézuéliens et des fonctionnaires états-uniens en vue de destituer le président Maduro. Le New York Times a confirmé un secret de Polichinelle. Dans un article publié le 8 septembre, le quotidien états-unien assure que des fonctionnaires de l’administration Trump se sont réunis, à trois reprises, courant 2017 et 2018, avec des militaires vénézuéliens en vue de renverser le président Nicolas Maduro. Les journalistes Ernesto Londono et Nicolas Casey détaillent la teneur des échanges entre un ancien diplomate et des hauts gradés séditieux. Ceux-ci auraient envisagé de passer à l’acte à l’été 2017, lors de l’installation de l’Assemblée constituante, avant de se raviser. Un ex-commandant vénézuélien précise qu’ils ont, par la suite, planifié une opération en mars 2018, mais ont été contraints de l’abandonner après qu’elle a fuité. Finalement, les militaires envisageaient d’agir en mai, au moment de la réélection de Nicolas Maduro. Ils demandaient pour ce faire
l’aide technologique des Etats-Unis, à savoir des canaux de communication protégés que Washington leur a refusé. La Maison-Blanche a signalé à travers un communiqué qu’il était nécessaire de participer à « un dialogue avec tous les Vénézuéliens qui expriment le désir de rétablir la démocratie » avec pour fin « d’apporter un changement positif à un pays qui a beaucoup souffert sous le gouvernement de Maduro ». Cependant, un commandant militaire de ce pays, qui a été impliqué dans les conversations peut difficilement être considéré comme un émissaire démocratique : il figure sur la liste des fonctionnaires corrompus du Venezuela qui ont été sanctionnés par le gouvernement états-uniens », rapportent les journalistes. La réponse de Caracas ne s’est pas fait attendre. « Il est absolument inacceptable et injustifiable que des fonctionnaires du gouvernement de Trump participent à des réunions pour (…) promouvoir des actions violentes avec pour fin d’attenter à la démocratie vénézuélienne » a fustigé le ministre
des affaires étrangères, Jorge Arreza. L’histoire dira si les militaires « rebelles » se sont crus autorisés à franchir la ligne rouge après les propos tenus à l’été 2017 par Donald Trump lorsque le président a affirmé que les Etats-Unis avaient une « option militaire » pour le Venezuela. En août, le président Nicolas Maduro a été la cible d’un attentat manqué alors qu’il prononçait un discours. Le socialiste a dénoncé, à maintes reprises, les plans interventionnistes de la Maison-Blanche, sans effet sur les capitales européennes. Cathy Dos Santos Humanité du 11/9/2018 LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
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LE RÉVEIL INTERNATIONAL
USA
SPACE COWBOY : Trump veut dominer l’espace L'administration Trump a annoncé mi-juillet la création de la « Force de l'espace », une sixième branche des forces armées qui doit permettre aux Etats-Unis de "dominer l'espace". L’annonce s'est heurtée à un certain scepticisme dans la classe politique américaine ; élection de mi-mandat oblige ! Ce qui n’arrête pas Trump qui surfe sur l’inquiétude d’une guerre spatiale. Cette volonté n’est pas nouvelle chez les dirigeants américains. En 1983, le locataire de la Maison Blanche : Ronald Reagan, ancien acteur hollywoodien, baptise sa nouvelle « initiative de défense stratégique » du nom de code « star wars » (« guerre des étoiles », en référence à la célèbre trilogie que George Lucas venait alors de sortir sur les écrans). L'un des objectifs affichés : maîtriser l'espace pour parer à toute attaque russe. Trente-cinq ans plus tard, l'administration Trump a relancé ce projet en annonçant la création d'une « Force de l'espace », une sixième branche des forces armées souhaitée par Donald Trump qui veut ainsi s'assurer que les Etats-Unis « dominent l'espace ». « Le temps est venu d'écrire le prochain chapitre de l'histoire de nos forces armées, de se préparer pour le prochain champ de bataille », a déclaré le vice-président américain Mike Pence dans une allocution devant les militaires au Pentagone. Et le vice-président de citer le lancement en 2007 par la Chine d'un missile qui a repéré et détruit un de ses propres satellites, ce qu'il a qualifié de « démonstration hautement provocatrice de la capacité 10 - LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
croissante de la Chine à militariser l'espace ». Il a également mentionné les projets russes de laser aéroporté et de missile destinés à détruire les satellites américains. « Aujourd'hui, d'autres nations cherchent à perturber nos systèmes basés dans l'espace et contestent comme jamais la suprématie américaine. » Sur Twitter, Donald Trump a complété le propos en cinq mots : « La Force de l'espace, jusqu'au bout ! »
La Chine et la Russie dans le collimateur Les préparatifs sont désormais en cours pour faire de cette force spatiale la sixième branche des forces armées, aux côtés de l'armée de terre (US Army), l'armée de l'air (US Air Force), la marine (US Navy), le corps des Marines et les garde-côtes, comme Donald Trump l'avait ordonné en mai. « Pour défendre l'Amérique, une simple présence dans l'espace ne suffit pas, nous devons dominer l'espace ». Les militaires du monde entier dépendent de plus en plus des outils de géolocalisation pour leurs opérations et la sécurisation des satellites est devenue un enjeu à l'importance croissante. Les Etats-Unis ont toujours été très actifs dans ce secteur, mais, jusqu'à maintenant, l'espace était placé sous la responsabilité de l'US Air Force. L'administration Trump considère qu'en
faire une branche à part entière permettra de débloquer plus de moyens pour ce domaine. Problème : la création d'une nouvelle armée implique celle d'une nouvelle administration, et donc l'embauche de centaines de fonctionnaires. Au total, la Maison-Blanche estime à huit milliards de dollars le seul coût de la création de cette nouvelle entité. Un budget conséquent qui doit être validé par le Congrès. D'un côté, de nombreux élus démocrates s'y opposent, à l'instar de Bernie Sanders qui a twitté : « On pourrait peut-être s'assurer que nos concitoyens ne meurent pas par manque d'assurance-santé avant de dépenser des milliards pour militariser l'espace. » Mais dans l'autre camp, la majorité des élus républicains hésitent à soutenir le projet. Les élections de mi-mandat ont lieu dans quelques semaines et le parti républicain est en mauvaise posture dans les sondages. Il reste que la paranoïa meurtrière du locataire de la Maison-Blanche peut conduire le monde à la catastrophe. Pendant la Guerre froide l’espace était sanctuarisé. Aujourd’hui, le Pentagone semble envisager l’espace que comme un champ de bataille où il faudra manœuvrer et mener des opérations », quitte à préparer le terrain à une guerre des étoiles qui n’aurait alors plus rien d’un film de science-fiction. JP Delahaye
INTERNATIONAL LE RÉVEIL
La Grèce loin d’être tirée d’affaire
La Grèce en pleine fallite sociale morale et politique
Athènes a officiellement émergé le 20 août du troisième des plans d’aide qu’on lui imposait depuis 2010 sans pour autant en avoir tout à fait terminé avec l’austérité et les réformes. Huit ans après le début de la cure d’austérité imposée à la Grèce, Athènes a tourné lundi 20 août la page de sa mise sous tutelle en recommençant à se financer seule sur les marchés. Après années de profonde récession et trois programmes d’aide de 289 milliards d’euros, le pays se porte aujourd’hui mieux, mais il demeure toujours extrêmement fragile. Les réformes exigées par le FMI et les autorités européennes l’ont notamment mis sur le flanc : le chômage vient seulement de redescendre sous les 20 % après un pic à 27,5 % en 2013, et un quart du PIB s’est évaporé en huit ans. « Cette énorme perte de produit intérieur brut aurait pu être évitée, mais la Grèce, comme le reste de l’Europe, s’est faite à l’idée que la priorité, dans le cadre de la plus grave crise financière du siècle, devait être d’équilibrer les comptes au moyen de la déflation », regrette dans le Guardian Larry Elliott, rédacteur en chef du service économie du quotidien britannique. « La Grèce n’est peut-être plus sous assistance respiratoire, mais on est encore loin de la reprise. Selon le FMI,
seuls quatre pays ont reculé davantage que la Grèce au cours de la dernière décennie : le Yémen, la Libye, le Venezuela et la Guinée Equatoriale », rappelle le journaliste de la BBC Mark Lowen. « Les soupes populaires continuent de servir les nouveaux pauvres, ceux qui ont brusquement perdu leur maison et leur emploi pendant la crise », explique le reporter britannique à Athènes. « Le plan de sauvetage et la crise ont pris fin sur le papier mais pas dans la réalité », témoigne notamment Tassos Smetopoulos, qui s’occupe de l’une de ces soupes populaires dans le centre de la capitale. Autre conséquence désastreuse de la crise : Athènes ne parvient pas non plus à freiner la fuite de ses cerveaux. Dans une tribune publiée sur le site du Wall Street Journal, le journaliste grec Yannis Palaiologos rappelle que « plus de 50 000 personnes parmi lesquelles on trouve les plus brillants ingénieurs, docteurs et jeunes cadres de la Grèce, continuent chaque année de quitter le pays, comme c’était déjà le cas au début de la crise ». Pour le reporter, « c’est un cercle vicieux », l’émigration vidant « le pays de son capital humain » et réduisant « la possibilité d’une action politique en faveur d’une réforme méritocratique ».
Dans un long entretien publié dimanche par le quotidien libéral grec I Katchimerini, le gouvernement de la Banque centrale grecque, Yannis Stournaras, met de son côté en garde contre toute remise en cause des engagements pris par Athènes auprès de ses créanciers. « Si nous revenons sur ce qui a été convenu, maintenant vu dans le futur, les marchés nous abandonneront et nous ne serons plus en mesure de refinancer dans des conditions viables les prêts arrivant à échéance », explique-t-il. « Selon le FMI, seuls quatre pays ont reculé davantage que la Grèce au cours de la dernière décennie ». Le Premier ministre de gauche radicale Alexis Tsipras devait s’exprimer à la télévision mardi, premier jour de l’après-programme. Celui qui n’a eu d’autres choix depuis son arrivée, en janvier 2015, que de gouvernement dans le cadre des plans, devant même accepter de nouvelles réformes en 2019 et en 2020 et le maintien d’une surveillance du pays par ses créanciers pendant plusieurs années, avait indiqué en juin qu’il voudrait désormais instaurer plus de « justice sociale ». Une promesse qui laisse sceptique le quotidien grec To Vima, qui estime que Tsipras n’a cessé de trahir les Grecs. « Rien ne semble pouvoir nous assurer aujourd’hui que la sortie du plan de sauvetage se fera en douceur et qu’elle peut être porteuse d’espoir ». Courrier International du 23 au 29 août 2018
La Chancelière allemande,Angela Merkelet le Premier ministre, Alexis Tsipras. Réunion de l'Otan- – 11 juillet 2018, Bruxelles LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018 - 11
LE RÉVEIL INTERNATIONAL
Des bombardiers stratégiques américains B-52 déployés en Grande-Bretagne…
Les Etats-Unis ont envoyé en Europe plusieurs bombardiers stratégiques B-52 Stratofortress pour participer aux manœuvres militaires de l’OTAN Ample Strike-2018. Ces exercices seront organisés en République tchèque
entre le 3 et le 14 septembre. « Les bombardiers seront provisoirement déployés sur la base de la Royal Air Force de Fairford, au Royaume-Uni, pendant près de deux semaines. Pendant ce temps, se dérouleront des exercices militaires conjoints impliquant nos alliés en vue de perfectionner l’interaction » a indiqué Renée Pittman, une porte-parole de l’US Air Force. La responsable a ajouté que toutes les manœuvres de ces appareils seront effectuées soit dans l’espace aérien international, soit au-dessus des pays qui
ont convenu de ces exercices avec les Etats-Unis. Dans les semaines à venir, l’OTAN envisage d’organiser toute une série de manœuvres sur le sol européen, dont plusieurs se tiendront en Europe de l’Est. Commentant jeudi cette perspective, la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova s’est dite préoccupée par cet événement, dénonçant le fait que les militaires travailleront leurs capacités offensives à proximité immédiates des frontières russes. (Radio Sputnik, le 06-09-2018)
Important dispositif naval russe déployé en Méditerranée… Plus de vingt-cinq navires russes et trente avions de guerre participeront aux manœuvres militaires en Méditerranée du 1er au 8 septembre, a annoncé jeudi le ministère russe de la Défense, après les menaces proférées par les pays occidentaux de bombarder de nouveau la Syrie. La force navale comprendra des navires des flottes du Nord de la Russie, de la mer Baltique, de la mer Noire et de la flottille de la Caspienne, et sera menée par le croiseur Maréchal Ustinov, a indiqué le ministère russe dans un communiqué. La force aérienne sera composée des bombardiers stratégiques Tu-160, des aéronefs anti-sous-marins Tu-142MK
et II-38, et des avions de combat Su-33 et Su-30SM. L’ambassade russe aux Etats-Unis a déclaré sur Facebook que l’ambassadeur Anatoly Antonov avait rencontré en début de semaine le représentant spécial américain pour la Syrie, James Jeffrey, et le secrétaire assistant, David Satterfield. M. Antonov a alors fait part des inquiétudes de Moscou face aux potentielles nouvelles frappes américaines sur la Syrie, sous prétexte d’utilisations possibles d’armes chimiques par le gouvernement syrien. « Nous avons dit aux Américains de ne pas entreprendre une autre agression sans fondement et illégale contre la
Syrie. Cette nouvelle aggravation en Syrie ne servirait les intérêts nationaux de personnes et seuls les terroristes en profiteraient » a assuré M. Antonov. (Radio Chine Internationale, le 31-08-2018)
Deux contingents belges en passe d’être déployés en Lituanie, dans le cadre du renforcement de l’OTAN en Europe de l’Est… L’armée belge dépêchera, début septembre et pour quatre mois, deux contingents, l’un terrestre et l’autre aérien, en Lituanie dans le cadre du renforcement de la présence militaire de l’OTAN en Europe de l’Est. L’objectif déclaré est de dissuader la Russie de toute velléité d’agression, a appris l’agence Belga de source militaire. La Belgique participe depuis 2017 au renforcement du flanc oriental de 12 - LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
l’Alliance Atlantique face à la Russie, qui se traduit par le déploiement par
rotation de quatre bataillons multinationaux dans les trois pays Baltes, Estonie, Lituanie et Lettonie, ainsi qu’en Pologne, sous l’appellation Enhanced Forward Presence. Il s’agit de la huitième participation belge à la mission BAP ou à son volet renforcé en 2014, à la suite de l’annexion de la péninsule ukrainienne de Crimée par Moscou, l’Enhanced Air Policing Mission. (Press TV, le 30-08-2018)
LE CAHIER MÉMOIRE N° 847 SEPTEMBRE 2018
L’histoire de La Mutuelle familiale constitue une aventure humaine et solidaire singulière. Elle prend un sens particulier alors que les questions du vivre ensemble sont plus que jamais d’actualité et que notre modèle de protection sociale est remis en question. Une mutuelle représente une forme d’entreprendre atypique, sans visée lucrative. C’est à la fois un mouvement et une entreprise qui, sans le choix volontaire des adhérents, n’existeraient pas. Portée par un idéal humaniste conjugué à des actes d’entraide, d’accompagnement, de prestations, la Mutuelle familiale est gouvernée par ses adhérents à travers l’élection de l’assemblée générale. C’est une forme de démocratie originale, qui responsabilise et participe à l’émancipation citoyenne centrée sur l’intérêt général. La solidarité au sein de la mutuelle constitue un mode d’organisation et de relation volontaire entre les personnes : en s’épaulant les uns les autres, on se protège ensemble et durablement. La Mutuelle familiale agit contre le déclin organisé de la Sécurité sociale car personne ne peut imaginer vivre sans elle. Elle promeut l’idée d’un
Léonora Tréhél, présidente de la Mutuelle familiale, lors de l'Assemblée générale de 2016
nouveau pacte de solidarité, d’un nouvel essor de la Sécurité sociale en matière de droits et de prestations, de gestion et de démocratie, de financement pérenne. Elle n’abdique pas non plus devant la marchandisation de la santé servie par un libéralisme qui ouvre la porte à toutes les dérives : le droit à la santé signifie aussi reconnaissance de la dignité de chacun. La Mutuelle Familiale se veut résolument solidaire, et sa bienveillance
Édité par le Réveil des combattants - 2 place du Méridien - 94807 Villejuif - Tél. 01 42 11 11 11
porte la marque de la considération, du respect et de l’empathie portés à autrui, dont les plus vulnérables. Notre raison d’être et notre spécificité dans le mouvement mutualiste résident plus que jamais dans l’esprit de résistance face aux reculs sociaux et d’innovation. Et les valeurs qui les portent, que nous partageons tous, sont reconnues par nos pairs qui viennent de récompenser nos nouvelles prestations solidaires.
ÉDITO Par Léonora Tréhel, Présidente de la Mutuelle familiale
La Mutuelle Familiale, un esprit de résistance au service de la défense de la santé pour tous
LE RÉVEIL DOSSIER
Histoire de la Mutuelle familiale Militants de la solidarité Naissance d’une combattante de la solidarité La Mutuelle familiale a vu le jour dans le contexte du Front populaire et de l’essor du syndicalisme ouvrier. Elle est créée le 16 janvier 1937, à l’initiative du syndicat CGT des métallurgistes de la Seine et prend le nom de « Mutuelle du métallurgiste ». En 2017, à l’occasion de son quatre-vingtième anniversaire, un livre est paru aux Editions de l’Atelier : « Militants
de la solidarité- Une histoire de la Mutuelle familiale ». Cette histoire s’inscrit dans celle, plus générale, de la mutualité, ce mouvement social séculaire, mais témoigne également d’une conception du syndicalisme ne limitant pas son action à la défense des intérêts corporatifs. La mutuelle, engagée dans la défense des valeurs républicaines et des droits démocratiques et sociaux, a toujours compté dans ses rangs des hommes et des femmes épris de justice et de paix.
Cortège de la cgt métaux en 1937.
Des racines mutualistes et syndicales
Délégation CGT de la métallurgie, ministère du Travail, 12 juin 1936. De droite à gauche : Ambroise Croizat, Eugène Henaff, Robert Poirot, Jean-Pierre Timbaud, Robert Doury, homme au chapeau non identifié, Henri Gautier, Jean Borne.
La mutualité trouve son origine dans les premières formes de prévoyance solidaire apparues dès l’Antiquité. En France, les sociétés de secours mutuel se développent au 19e siècle. Le principe est le suivant : moyennant le versement de cotisations mensuelles, leurs membres reçoivent des prestations en cas de maladie, d’invalidité, voire de vieillesse. Ils gèrent eux-mêmes leur société, cette dimension démocratique étant un caractère essentiel de la démarche mutualiste. Souvent, ces socié14 - LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
tés organisent pour leurs membres des obsèques dignes à une époque où les pauvres et les ouvriers sont le plus souvent voués à la fosse commune. Avec les révolutions industrielles et le développement du capitalisme, certaines de ces sociétés de personnes vont contribuer à l’expression des revendications populaires. C’est par exemple au sein de la société de secours mutuel des tisseurs de soie, « Le Devoir mutuel », que se prépare la révolte des canuts à Lyon en 1831. Sous le Second Empire, on assiste à une séparation nette entre, d’un côté, une mutualité officielle et territoriale, et, de l’autre, un mouvement ouvrier qui s’affirme peu à peu, s’imprégnant de l’influence du socialisme puis du marxisme. Alors que s’achève le 19e siècle, la mutualité, porteuse des valeurs de solidarité et de démocratie, affirme son caractère non lucratif qui la distingue des compagnies d’assurance. Elle bénéficie en 1898 d’une loi de liberté et s’affirme comme un acteur social incontournable aux côtés de l’Etat républicain. Dès le début du 20e siècle se développe
un débat passionné entre les tenants d’une protection sociale obligatoire et les défenseurs du principe d’une prévoyance libre et volontaire. Curieusement, à l’occasion de la mise en place de la très modeste loi sur les retraites ouvrières et paysannes en 1910, on retrouve dans le camp de ceux qui s’opposent au principe d’obligation, mais pour des raisons différentes, la jeune CGT qui refuse les ponctions sur les salaires, le patronat, adepte du libéralisme économique, et la mutualité. Les lois instituant les assurances sociales (1928-1930) seront également combattues par le PCF et la CGTU (née d’une scission de la CGT en 1921) alors que la mutualité, après s’être de nouveau opposée à leur caractère obligatoire, se laissera accaparer par les tâches gestionnaires d’assureur social au détriment de sa vocation d’acteur du progrès social. C’est du côté syndical que naissent alors, dans la foulée du Front populaire, des pratiques sociales innovantes. La CGT réunifiée multiplie ses effectifs. Ses ressources financières et humaines donnent au syndicat des métallurgistes
DOSSIER LE RÉVEIL de la Seine les moyens d’investir de nouveaux terrains d’action, au moment où le droit aux congés payés s’impose. Très vite, ce syndicat dirigé par des militants de l’ex-CGTU, prend de nombreuses initiatives sociales, sous l’impulsion de son président Alfred Costes et de son trésorier Henri Gautier, tous deux militants communistes. Henri Gautier devient président en 1938 de l’Union fraternelle de la métallurgie, créée par le syndicat CGT pour acquérir et gérer un important patrimoine social : colonie de vacances, aérium et maison de repos à Vouzeron (Cher), parc de loisirs à Baillet-enFrance (Val-d’Oise), aéroclub à Persan-Beaumont (Val-d’Oise), école de rééducation professionnelle pour les chômeurs, polyclinique des Bluets et Maison des métallurgistes à Paris 11e. Cette dernière abrite les bureaux du syndicat, la caisse primaire des assurances sociales pour les métallurgistes,
la Mutuelle du métallurgiste, une bibliothèque et une salle de lecture… Le président de la mutuelle, René Codomié, dans une interview parue le 15 novembre 1937 dans l’Humanité, explique que cette mutuelle vise à « réaliser l’entraide du prolétariat » en offrant à ses adhérents des prestations en cas de maladie, de maternité, de décès ou pour des raisons exceptionnelles. La mutuelle se développe très rapidement, passant de 162 sociétaires en janvier à 23 500 en novembre 1937. La démarche des métallurgistes CGT parisiens reste exceptionnelle au sein du mouvement syndical qui se revendique du courant révolutionnaire. Elle s’inspire du « syndicalisme à bases multiples », courant né à la fin du 19e siècle au sein du mouvement ouvrier européen, dont l’objectif est de promouvoir un syndicalisme de masse, capable d’offrir de nombreux services aux adhérents et d’entretenir des liens
Ouverture en 1937 au 94, rue d’Angoulême - aujourd'hui rue Jean-Pierre Timbaud - La Maison du Métallurgiste accueille en façade la mutuelle et la librairie-bibliothèque.
durables avec eux. Ambroise Croizat, alors secrétaire de la Fédération des métaux CGT, souligna en 1939 que « si nous sommes des syndicats créés pour l’action et la défense des intérêts corporatifs, les préoccupations d’ordre social, d’entraide, de solidarité et de soutien sont, pour nous, au moins égales et même essentielles ».
Guerre, répression et Résistance Dès 1938, l’élan du Front populaire est brisé. Après la signature du Pacte germano-soviétique et la déclaration de guerre de la France à l’Allemagne nazie, le 3 septembre 1939, le gouvernement Daladier dissout le PCF et des organismes proches. Un an plus tard le gouvernement Pétain procédera à la dissolution des centrales syndicales et professionnelles. Les mutuelles ne sont pas touchées en tant que telles,
Place de la Bastille, le 1er mai 2002. La mutualité participe à la manifestation contre l’extrême-droite.
mais la Mutuelle du métallurgiste, qui compte alors 40 000 adhérents, est elle aussi dissoute en raison de ses origines et ne peut poursuivre sa mission. Les dirigeants de la mutuelle qui sont quasiment tous des dirigeants syndicaux et des membres du PCF sont victimes de la répression vichyste. Parmi eux, Henri Gautier, qui possède la carte d’adhérent numéro 1 de la mutuelle. Mobilisé au Havre en février 1940, il est arrêté en octobre 1940. Interné, il s’évade de la prison de Châteaubriant en novembre 1941. Responsable de la fédération illégale de la métallurgie, il est repris à Paris en octobre 1942, torturé par la police de Vichy puis livré à la Gestapo. Il est déporté à Mauthausen en avril 1943, puis à Auschwitz, Jawichovitz et Monovitz ; on ne connaît pas précisément les circonstances et la date de sa mort en 1945. Il est fait chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume et médaillé de la Résistance.
Tandis que ces militants, parfois au prix de leur vie comme Henri Gautier, Jean-Pierre Timbaud ou Marius Ruch paient leur engagement politique, syndical et mutualiste, la Fédération nationale de la mutualité française (FNMF) s’adapte aux circonstances. Les mutuelles continuent certes de faire œuvre utile et quelques-uns de leurs responsables entrent dans la Résistance, mais les dirigeants de la FNMF prennent position en février 1942 en faveur de la Charte du travail de Vichy. Cette attitude tranche avec celle du mouvement syndical pour lequel l’engagement dans la Résistance restera longtemps une référence essentielle de son action et de sa légitimité. La Mutuelle du métallurgiste est reconduite dans ses droits à la Libération. Une autre histoire peut alors commencer dans le prolongement de sa dynamique fondatrice : solidarité, émancipation et résistance. LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018 - 15
LE RÉVEIL DOSSIER
Aux côtés de la Sécurité sociale
Les assurés sociaux font la queue devant le Grand Palais à Paris pour voter lors des premières élections à la Sécurité sociale, le 4 avril 1947.
L’ordonnance organisant la Sécurité sociale est publiée le 4 octobre 1945. Deux autres suivent le 18 octobre, l’une définissant les prestations de la Sécurité sociale, l’autre le nouveau statut de la mutualité. Pierre Laroque, un haut fonctionnaire, joue un rôle essentiel dans la rédaction des textes, de même que le ministre communiste Ambroise Croizat dans leur mise en œuvre. L’ambition de départ est celle d’un nouveau système de solidarité nationale, universel, généralisé, unifié, financé et géré par les cotisants, destiné à garantir la liberté et l’émancipation de chaque citoyen. La FNMF s’oppose avec virulence dans un premier temps à ce projet, craignant que celui-ci remette en cause sa raison d’être, d’autant que dans le même temps la CGT parie sur le dépérissement de la mutualité. Par contre, Ambroise Croizat estime que 16 - LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
l’institution de la Sécurité sociale sera l’occasion d’un nouvel essor pour une mutualité capable de prendre des initiatives et d’innover, en utilisant pleinement les perspectives offertes par son nouveau statut. La FNMF abandonne en 1946 son attitude d’opposition radicale, en raison de la possibilité donnée aux mutuelles de gérer les prestations en nature de la Sécurité sociale, cette délégation de gestion étant même obligatoire et exclusive pour les fonctionnaires. La Mutuelle du métallurgiste, présidée par André Léveillé et dirigée par Jean Clerc, est en phase de reconstruction et, à la différence de la FNMF, elle se place immédiatement aux côtés de la Sécurité sociale. Mais elle est victime de l’ostracisme des dirigeants de la Fédération mutualiste de la Seine (FMS) qui lui refusent la place qu’elle occupait avant-guerre au sein de cette institution, ce qui conduit à l’éloigner de la FNMF. La Mutuelle du métallurgiste commence alors sa mue. Le 6 janvier 1946, elle prend le nom de « Mutuelle familiale des travailleurs de la région parisienne » (MFTRP), ne limitant plus son champ de recrutement aux seuls métallurgistes. Puis elle n’exige plus que ses membres soient adhérents de la CGT, estimant que « la solidarité ne se limite pas à une carte syndicale ». Les 10 000 adhérents mutualistes récupérés en 1945 passent à 35 000 en avril 1947, au moment des premières élections à la Sécurité sociale pour lesquelles la mutuelle appelle à voter pour la CGT. Le syndicat est largement majoritaire, tandis que la liste de la FMS recueille un score médiocre. Au même moment la MFTRP crée, avec six autres mutuelles, l’Union des mutuelles ouvrières de la Région parisienne (UMORP), qui rassemble, début 1948, 166 000 adhérents. Son objectif : « axer vers plus de démocratie les sociétés conservant un caractère de paternalisme, être les auxiliaires de
la Sécurité sociale et non des concurrents » et offrir de nouveaux avantages collectifs aux adhérents. Alors que, dès 1947, la construction de la Sécurité sociale marque le pas, la MFTRP se développe en tant que mutuelle interprofessionnelle, se modernise et met en place un important réseau de correspondants bénévoles dans les entreprises. Elle signe des accords de tiers payant avec les établissements et les professionnels de santé qui respectent les tarifs de remboursement de la Sécurité sociale et de la mutuelle. Dans les années 1950, la mutuelle acquiert par donation ses premières réalisations sociales : une colonie de vacances à Belle-Ile (Morbihan), puis un terrain de camping à La Tremblade (Charente-Maritime). Elle soutient la méthode de l’accouchement sans douleur mise en place par le docteur Fernand Lamaze à la maternité des Bluets. Pendant toute la période du pouvoir gaulliste, la MFTRP joue un rôle actif dans la défense de la Sécurité sociale, contre les projets d’instituer une franchise sur les remboursements en 1958 ou d’interdire le tiers payant en 1964. Dans le même temps, elle contribue à la création de la Fédération nationale des mutuelles ouvrières en 1960, tout en se
70 ans de la Sécu.
DOSSIER LE RÉVEIL rapprochant de la FMS pour défendre la Sécurité sociale. Cette volonté de rassembler le mouvement mutualiste trouve un écho au sein de la FNMF qui réalise son « aggiornamento » lors de son congrès de Saint-Malo en mai 1967 : le dialogue avec la mutualité ouvrière est admis et la FNMF aban-
donne le concept de neutralité pour choisir celui d’indépendance vis-à-vis des pouvoirs publics. Ce nouveau positionnement se concrétise dans l’action contre les ordonnances de 1967 qui visent à transformer profondément la Sécurité sociale en tournant le dos à ses principes initiaux : FNMF, FNMO
et organisations syndicales de salariés agissent de concert. Fin 1967, la Mutuelle familiale, présidée par Philippe Vernoux, qui a succédé à Roger Patinot, et dirigée par Claude Stefani, compte 135 000 adhérents et emménage rue Dieu (Paris 10e).
Au cœur de la Mutualité des travailleurs Les événements de 1968 n’ont pas permis d’abroger les ordonnances de 1967, tout en conduisant le pouvoir gaulliste à renoncer à ses projets de réduction des remboursements et d’interdiction du tiers payant. La MFTRP cherche à s’adapter aux modifications sociétales en expérimentant de nouvelles formes de cotisations et s’engage dans une politique de décentralisation. Pour favoriser le développement de mutuelles de travailleurs sur tout le territoire, pas moins de dix-sept mutuelles départementales sont créées dans les années soixante-dix, ce qui ampute la mutuelle d’une partie de ses effectifs, ceux-ci continuant cependant de progresser. En 1971, Adrienne Pivardière est élue présidente de la mutuelle, illustrant d’une certaine manière le combat pour l’émancipation des femmes qui se développe alors dans la société française. C’est la première fois qu’une femme est élue à la tête d’une grande mutuelle française. Monique Verreccchia lui succédera en 1988, puis Léonora Tréhel entamera en 1999 un mandat qui se poursuit aujourd’hui : 47 ans de présidence féminine, sans discontinuité, forment une histoire singulière. En 1972, la MFTRP soutient le programme commun de la gauche qui comprend, en matière de protection sociale et de santé, des propositions qu’elle a toujours préconisées. Dans cette période l’aspiration à l’unification du mouvement mutualiste grandit. La Fédération nationale des
Les militants de la Mutuelle familiale dans l’une des nombreuses manifestations contre le plan Juppé à l’hiver 1995.
mutuelles de travailleurs (FNMT- ex FNMO) signe en 1976 un protocole d’accord avec la FNMF pour concrétiser cette unification, mais il restera lettre morte. Le mouvement mutualiste se rassemble néanmoins dans l’action pour combattre le ticket modérateur d’ordre public que le Premier ministre Raymond Barre veut imposer en 1979. Ce projet vise à interdire aux mutuelles de rembourser la totalité du ticket modérateur laissé à la charge de leurs adhérents. La MFTRP se mobilise contre cette atteinte à la solidarité et aux libertés mutualistes. Lancée par la FNMF, soutenue activement par la FNMT, sept
millions d’exemplaires d’une carte-pétition arrivent sur le bureau de l’Elysée. Le gouvernement est contraint d’abandonner son projet tandis que la mutualité affirme son rôle d’acteur social. Après la victoire de la gauche en 1981, la MFTRP qui n’a pas pris position dans la campagne électorale, reste vigilante. Forte de ses 209 000 adhérents et de sa présence dans 1 700 entreprises, elle veut s’engager dans une nouvelle politique de décentralisation, cette fois-ci en région parisienne. Cette politique va cependant échouer, faute d’une vision claire et partagée des objectifs poursuivis, et troubler pendant de nombreuses années la vie de la mutuelle. LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018 - 17
LE RÉVEIL DOSSIER
Une mutuelle résiliente
Une délégation de la Mutuelle familiale remet des pétitions au ministère de la Santé pour l'amélioration des remboursements de la Sécurité sociale en dentaire et en optique (1972). De gauche à droite : Jacques Landre, vice-président, Adrienne Pivardière, présidente, Claude Stefani, directeur, Pierre Bremont, vice-président.
La MFTRP s’oppose en 1983 à la mise en place du forfait hospitalier et s’inquiète des choix gouvernementaux concernant le devenir de la protection sociale complémentaire. Alors que jusqu’à la fin des années soixante-dix, la mutualité et les organisations syndicales de salariés souhaitaient que l’exclusivité de la couverture complémentaire maladie soit confiée aux mutuelles, le gouvernement, avec l’accord de la FNMF qui a changé de position, décide d’organiser la concurrence entre mutuelles, institutions de prévoyance et sociétés d’assurance : la réforme du code de la mutualité en 1985, puis la loi Evin de 1989 concrétiseront cette orientation. Dans le même temps la FNMF, présidée par René Teulade, met
Le Travaileur mutualiste (n° 51, 1974), en pointe dans le combat pour l’émancipation des femmes.
18 - LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
fin aux projets d’unification du mouvement mutualiste et va jusqu’ à exclure de ses rangs en 1985 les groupements adhérant également à la FNMT. Celle-ci décide alors, avec six unions départementales exclues de la FNMF, de créer, début 1986, la Fédération des mutuelles de France (FMF), présidée par Louis Calisti. L’Union des mutuelles de travailleurs de la région parisienne (UMTRP-ex UMORP) devient l’Union des mutuelles d’Ile de France (UMIF). Celle-ci organise le tiers payant pour le compte de ses mutuelles adhérentes et gère désormais un important réseau de réalisations sanitaires et sociales. Dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix, l’UMIF va développer un partenariat avec la Fédération nationale des déportés, internés, résistants et patriotes (FNDIRP) et gérer, par acquisition ou donation, les établissements créés par cette dernière. De son côté, la MFTRP décide en 1987 de changer de nom pour s’appeler « la Mutuelle familiale », tout simplement. Cependant, dans un environnement économique et social difficile qui frappe notamment le secteur industriel, cœur de son implantation, et confronté à l’offensive des sociétés d’assurance, la Mutuelle familiale voit chuter ses effectifs. Sa situation financière s’en ressent et devient déficitaire dès 1985, d’autant qu’elle doit également provisionner des immobilisations financières consenties dans le cadre d’une politique de groupe mal maîtrisée par la FMF. La mutuelle, présidée par Monique Verrecchia, se réorganise, mais ce n’est qu’en 1990 qu’elle redevient excédentaire et en 1991 qu’elle retrouve des fonds propres positifs. Néanmoins début 1992, elle dépasse à peine les 100 000 adhérents. La FMF, dont la Mutuelle familiale est un acteur essentiel, change de stratégie en 1992, sous la présidence de Daniel Le Scornet, Il s’agit de mettre fin au volontarisme excessif qui a prévalu dans la construction du groupe des mutuelles
de France et de redonner à celles-ci la maîtrise de son développement. Cette remise en ordre est d’autant plus importante que les réformes de la protection sociale se succèdent, plus régressives les unes que les autres. Après le plan Seguin en 1987, c’est le plan Veil en 1993 puis le plan Juppé en 1995. La FMF et la Mutuelle familiale multiplient les actions et les propositions pour une réforme démocratique de la Sécurité sociale. La Mutuelle familiale souhaite être davantage en phase avec son temps et, en 1995, synthétise ses missions en cinq verbes : protéger, soigner, prévenir, aider et solidariser. Adoptant un projet d’entreprise en 1996, elle repasse la barre des 120 000 adhérents en 1997 et connaît une situation financière de nouveau satisfaisante, redistribuant une partie de ses excédents à ses adhérents sous la forme d’une diminution des cotisations.
Stagiaire en formation au centre de réadaptation professionnelle Jean-Moulin à Fleury-Mérogis, l’un des établissements qui seront transférés de la FNDIRP à l'UMIF (1997-1998).
DOSSIER LE RÉVEIL
Une nouvelle donne
Monique Verrecchia, présidente de la mutuelle dans son bureau, rue Dieu. Elle est entourée de Léonora Tréhel, secrétaire générale et d’Alain Lhostis, chargé de la mutualisation et du développement (1993).
La Mutuelle familiale emménage rue d’Hauteville (Paris 10e) en 1999, au moment où Léonora Tréhel est élue présidente. Celle-ci a déjà une riche expérience mutualiste, après avoir exercé des responsabilités au sein des syndicats CGT de la métallurgie. L’environnement de la mutuelle est en pleine transformation. En 1999 la couverture maladie universelle (CMU) est mise en place. Elle garantit à tous une prise en charge des soins par un régime d’assurance maladie et le droit à une protection complémentaire pour ceux dont les revenus sont les plus faibles (CMU-C). Avancée sociale préconisée par la FMF, la CMU-C est néanmoins controversée dans sa mise en œuvre et la Mutuelle familiale aurait préféré une solution universelle à l’accès aux soins plutôt qu’un régime spécifique susceptible de faire perdurer des discriminations. L’autre grand dossier de la période concerne les directives européennes d’assurance. La Mutuelle familiale et la FMF s’étaient toujours opposées à leur application à la mutualité : les mutuelles pouvaient perdre leur originalité historique en étant soumises aux mêmes règles concurrentielles que les sociétés de capitaux. Mais les dirigeants de la FNMF avaient très imprudemment souhaité en 1991 que les mutuelles fassent partie de la liste des organismes visés par ces directives et le gouvernement en avait pris acte. Très vite le nouveau président de la FNMF, élu en 1992, Jean-Pierre Davant comprend que c’était une er-
reur et en 1994 les directives ne sont transposées dans le droit français que pour les sociétés d’assurance et les institutions de prévoyance. Cependant en 1998 la Commission européenne engage une action en justice à l’encontre de la France, en raison de l’absence de transposition aux mutuelles. Le nouveau Premier ministre, Lionel Jospin confie alors une mission à Michel Rocard afin de trouver une solution conciliant la transposition et le respect de la spécificité mutualiste. Les dirigeants de la FMF et de la FNMF, sachant que le droit européen pouvait désormais être opposé aux mutuelles, même en l’absence de transposition, donnent leur accord pour définir un nouveau code de la mutualité. Ainsi s’ouvre en 2001 une période de profonde mutation pour la mutualité, mais dans le respect de son identité. C’est dans ces circonstances qu’en 2002 l’unification mutualiste est enfin réalisée, au sein de la FNMF, dans le respect de la diversité de chacune de ses composantes. Uni, le mouvement mutualiste est plus à même d’affronter l’avenir dans un contexte politique difficile - pour la première fois de son histoire, la FNMF donne une consigne de vote en appelant à faire barrage à l’extrême droite au second tour des présidentielles de 2002 - et à la veille d’une nouvelle réforme de l’assurance maladie. Celle-ci intervint en 2004,
pénalisant les assurés sociaux et renforçant, de manière technocratique, le rôle de l’Etat. S’adaptant à son nouvel environnement, la Mutuelle familiale consolide son organisation d’entreprise, renforce son fonctionnement démocratique interne, améliore ses prestations et met en place de nouveaux services. Elle innove avec le « Mémo-pro santé », permettant aux salariés de faire l’inventaire de leur parcours professionnel et de repérer leur exposition aux risques au travail. Elle reçoit pour cela le prix de l’innovation mutualiste institué par la FNMF.
Mobilisée contre le plan Seguin, la FNME rassemble 100 000 personnes le 23 mai 187 à l’hippodrome de Vincennes. LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018 - 19
LE RÉVEIL DOSSIER
Le choix de l’autonomie et des partenariats
La Mutuelle familiale affiche une démarche non commerciale, humansite et soldaire (1997).
Après la fusion avec deux mutuelles, l’une lorraine et l’autre bretonne, la Mutuelle familiale compte plus de 150 000 adhérents en 2007. Elle s’oppose aux réformes du gouvernement Fillon qui institue des franchises de remboursement des soins et transforme les mutuelles en collectrices d’impôts. Les taxes atteignent 13,2 % de leur chiffre d’affaires en 2012, contre 1,75 % en 2001. La mutuelle ne répercute qu’une partie de ces taxes sur les cotisations de ses adhérents en utilisant les revenus de ses placements financiers obligatoires. La Mutuelle familiale prend toute sa place au sein de la FNMF. Membre du conseil d’administration de celle-ci, Léonora Tréhel est également élue en 2009 présidente de la Mutualité française d’Ile-de-France qui rassemble toutes les mutuelles affiliées à la FNMF dans la région-capitale. Toujours membre de la FMF, la mutuelle connaît cependant des différents stratégiques avec cette fédération dont elle a été depuis l’origine un acteur essentiel. Ces différents portent sur le rôle et le mode de développement de la FMF. Ils aboutiront en 2014 à la désaffiliation de la Mutuelle familiale qui ne pouvait accepter que cette fédération participe directement, y compris financièrement, à la construction d’un groupe ne rassemblant qu’une partie de ses mutuelles adhérentes. La Mutuelle familiale veut préserver son autonomie mais n’entend pas s’isoler : elle noue des partenariats pour innover dans de nombreux domaines. Elle signe par exemple en 20 - LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
2010 une convention avec le Réseau environnement santé (RES), convaincue que la lutte contre « l’épidémie » des maladies chroniques passe en priorité par la prévention des risques environnementaux, au sens large du terme. Elle participe à des expérimentations avec d’autres mutuelles pour répondre aux besoins de santé et d’accompagnement de ses adhérents. En même temps la mutuelle se dote d’un nouveau projet d’entreprise, afin de renforcer la professionnalité de ses équipes et leur engagement dans une politique de développement plus dynamique au moment où la concurrence des assurances devient de plus en plus vive. Sous la présidence de François Hollande, l’objectif de généralisation de la couverture complémentaire santé se poursuit dans des conditions qui, paradoxalement, accentuent les inégalités d’accès à celle-ci et mettent en cause le rôle de la Sécurité sociale en tant que pilier de la protection sociale en santé : c’est l’accord national interprofessionnel de 2013, confirmé par la loi Travail, qui crée un nouveau système de couverture complémentaire collective obligatoire dans les entreprises privées à compter de 2016. Pour répondre aux appels d’offres des entreprises et mutualiser certains investissements, la Mutuelle familiale crée avec d’autres groupements une union de groupe mutualiste dénommée « Umanens ». Après qu’une mutuelle méditerranéenne a fusionné avec elle, la Mutuelle familiale élargit son implantation nationale et compte 153 000 adhérents et 247 000 bénéficiaires fin 2015. Cependant, elle est de nouveau confrontée à des difficultés d’exploitation qui ne la mettent pas en danger compte tenu de sa solidité financière, mais nécessitent de prendre des mesures de gestion et d’organisation lui permettant de retrouver progressivement un équilibre économique pérenne.
La transposition, en 2016, d’une nouvelle directive européenne d’assurance, Solvabilité 2, conduit la mutuelle à renforcer sa vie démocratique interne, le rôle stratégique de son conseil d’administration et la formation de ses administrateurs. Elle veut devenir une véritable « complémentaire de vie » pour ses adhérents, échapper à la banalisation qui menace nombre de mutuelles et jouer pleinement son rôle d’acteur du mouvement social. A cette fin, elle se veut force de propositions pour garantir l’avenir de la Sécurité sociale, à l’occasion du soixante-dixième anniversaire de celle-ci en 2015, et innove encore en créant la « Fondation Santé-Environnement », première fondation mutualiste de ce type, en 2016. Marc Zamichiei, auteur du livre « Militants de la solidaritéUne histoire de la Mutuelle familiale ».
Pendant l’une des séances des ateliers mémoire mis en place par la Mutuelle familiale.
Photos tirées du livre du 80e anniversaire de la Mutuelle Familiale.
TÉMOIGNAGE LE RÉVEIL
La Roque d’Anthéron (13) : le rescapé du massacre du Fenouillet Marceau Morel est né le 8 juillet 1927 à Aureille, dans les Alpilles, au sein d’une famille modeste dont le père exerçait le métier de cheminot d’entretien sur la voie ferrée départementale qui reliait alors les villes de Meyrargues et d’Aix en Provence. Agé aujourd’hui de 91 ans, il témoigne : « lorsque la France a déclaré la guerre à l’Allemagne nazie, ma famille était déjà installée dans la commune de La Roque d’Anthéron. Mon frère aîné René et moi avions été recrutés pour aider le maquis de Sainte Anne, basé au Plateau de Manivert, sur la commune de Lambesc. Nous nous y trouvions depuis vingtdeux jours quand, au matin du 12 juin 1944, les forces spéciales « SS » ont attaqué le maquis. Jusqu’à ce jour terrible, trop jeunes pour porter les armes, avec deux copains rocassiers, Marceau Duplan et René Pignoli, nous étions chargés du ravitaillement alimentaire. Régulièrement, nous descendions pour récupérer le pain qui était fabriqué à « La Bastide de Long », une ferme des environs. La veille de l’attaque, nos chefs nous renvoyèrent rejoindre nos foyers. Le lendemain, les forces Allemandes, constituées de la 244e division d’infanterie et d’éléments de la 8e compagnie de la Division Brandebourg, donnèrent l’assaut au maquis. Les combats firent rage durant des heures, jusqu’à ce que l’ordre de repli soit donné aux maquisards. Ce fut le sauve-qui-peut. Mais les troupes ennemies avaient encerclé la zone des combats et montaient la garde à l’orée des bois. C’est ainsi que nos camarades ont été pris et conduits dans un premier temps sur le quai de la gare. Une grand-mère voulut apporter un petit sac de victuailles à l’un des prisonniers. Un soldat allemand l’en dis-
suada : « Là où ils vont, ils n’auront besoin de rien ». Tout le village était pétri d’inquiétude. N’y tenant plus, le 13 juin à midi, avec Jeanne Davin, nous sommes partis en tandem sur la route de Charleval pour tenter d’avoir des nouvelles, elle de son mari, moi de mon frère René. Arrivés au « Pont d’Aubergue », des Allemands qui montaient la garde sur le bord de la route nous arrêtèrent. Ils ordonnèrent à Jeanne de repartir au village. Moi, un fusil pointé dans le dos, je fus conduit auprès des 22 jeunes partisans qui attendaient assis au bord des collines. Comme je les connaissais, je m’assis entre Jauffrey et Franco. A cinq heures de l’après-midi, deux camions arrivèrent sur place. 16 soldats « SS » en arme en descendirent. Ils armèrent aussitôt leurs fusils. C’est alors que nous comprîmes le sort qu’on nous réservait. Vêtu d’un uniforme allemand, c’est en français, teinté d’un fort accent provençal, que leur chef nous ordonna de nous lever. Puis il s’adressa à moi : « toi petit, qu’est-ce que tu fais ici ? ». Je lui expliquai qu’un soldat m’avait arrêté et amené jusqu’ici. Il m’interrogea à nouveau : « quel âge as-tu ? ». Comme j’étais d’un petit gabarit, je lui mentis : « j’ai quatorze ans ! J’en avais 17 ». Il m’assena un grand coup de pied au cul en me criant : « rentre chez toi ! ». Je m’enfuis en courant. Mon ami Raoul Jauffret tenta de me suivre mais il fut aussitôt abattu et s’écroula dans mes jambes. Les « SS » déclenchèrent le massacre… Bizarrement, je n’ai jamais eu peur. Je suis rentré à La Roque par l’ancienne voie, tout au long de laquelle se tenait une multitude de soldats allemands ; beaucoup s’amusaient de me voir courir. En arrivant, j’ai informé le village : « ils sont tous morts ». Personne ne
m’a cru… Jules Honorat se chargea de la triste besogne de récupérer les corps. « Gute » Roux, un vieux de la vieille de 14-18 cacha mon frère René au milieu des collines d’où ils en revinrent sains et saufs deux jours plus tard ». Témoignage recueilli le 13 juin 2018, Jean-Michel Carretero, secrétaire du comité de l’ARAC Lambesc et Canton.
LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018 - 21
Sig
Édité par le Conseil départemental du Val-de-Marne - Direction de la communication/studio graphique - Juin 2018.
r f . e n r a m e d val r u s n o i t i t é nez la p
VOS DROITS LE RÉVEIL
Retraite du Combattant Prise ou non en compte dans le calcul des ressources pour l’entrée en EHPAD ? Attention votre retraite du combattant n’entre pas en ligne de compte pour l’évaluation de vos ressources servant au calcul de la demande de l’aide sociale et devra vous être laissée. Dans le cas contraire, faire état des articles suivants du Code de l’action sociale et des familles qui sont applicables. Article L.132-2 Code de l’action sociale et des familles La retraite du combattant et les pensions attachées aux distinctions honorifiques n’entrent pas en ligne de compte dans le calcul des ressources des postulants à l’aide sociale, mentionnées à l’article L.132-1.
Article L.132-3 Code de l’action sociale et des familles Les ressources de quelque nature qu’elles soient, à l’exception des prestations familiales, dont sont bénéficiaires les personnes placées dans un établissement au titre de l’aide aux personnes âgées ou de l’aide aux personnes handicapées, sont affectées au remboursement de leurs frais d’hébergement et d’entretien dans la limite de 90 %. Toutefois les modalités de calcul de la somme mensuelle minimum laissée à la disposition du bénéficiaire de l’aide sociale sont déterminées par décret. La retraite du combattant et les pensions attachées aux distinctions honorifiques, dont le bénéficiaire de l’aide
sociale peut être titulaire, s’ajoutent à cette somme. A savoir : en 2018 la somme laissée au bénéficiaire de l’aide sociale à l’hébergement est de 10 %. Cette somme ne peut pas être inférieure à 100 euros en 2018, (1 % du montant de l’ASPA) auxquels il convient d’ajouter, puisque exclue, le montant de la retraite du combattant. Article L.321-3 du Code des PMIVG La retraite du combattant est incessible et insaisissable. Elle n’entre pas en ligne de compte pour le calcul des sommes passibles de l’impôt sur le revenu, ni pour la détermination des droits à l’aide sociale de l’ancien combattant. L’Ancien d’Algérie N° 569
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LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018 - 23
LE RÉVEIL VOS DROITS
Plan pauvreté : l’USH* appelle à la cohérence entre les actions annoncées et la défense du logement social Après l’annonce des mesures contenues dans le "Plan pauvreté", l’union sociale pour l’habitat (UH) rappelle que dans un contexte où plus de 2 millions de demandeurs de logements sociaux ont été enregistrés en 2018 et où un nouvel entrant sur deux dans le parc social vit en dessous du seuil de pauvreté, le Gouvernement a, dans la loi de finances 2018, largement amputé les moyens des organismes de logements sociaux, en les ponctionnant en 2018 de plus de 800 millions d’euros et en portant le taux de TVA de 5,5 à 10 %, et qu’il s’apprête à renouveler en 2019 ces mesures. Parallèlement, après une baisse massive des APL en 2018, le Gouvernement a annoncé pour 2019 une revalorisation
Tombola de Noël
des APL de 0,3 %, soit à un niveau largement inférieur à l’inflation annoncée. Leur nouvelle méthode de calcul (« contemporanéisation ») ne viendra pas corriger ces baisses. Elle constate également que l’État a aujourd’hui quasiment totalement disparu du financement des « aides à la pierre » qui concourent pourtant au financement des logements sociaux au moment de leur construction, et sont un des éléments nécessaires à la production de logements à bas et à très bas loyers. Ces mesures ne sont pas sans impact. Alors qu’en 2017 la programmation de logements sociaux a connu une baisse de 9 %, elle devrait à nouveau connaître une baisse de l’ordre de 5 % en 2018. Pour Jean-Louis Dumont, président de
* USH (Union sociale pour l’Habitat) organisme regroupant tous les acteurs du logement social.
Retraite du Combattant : 748,80 € annuels en 2018 La retraite du combattant est liée à l’attribution de la Carte du Combattant.
Dans ce numéro, vous trouverez pour la tombola de Noël du Réveil avec en lot une voiture Sandero à gagner comme chaque année.
Basée sur l’indice 52 depuis le 01/09/2017, son montant semestriel est de 374,40 euros et de 748,80 euros par an.
Pensez à renvoyer vos souches avec vos coordonnées, votre chèque de 20 euros en utilisant l’enveloppe T à votre disposition.
Vous ne recevez plus de bulletin de paiement tant qu’aucune modification n’intervient ni sur son indice, ni sur une nouvelle valeur du point, mais le paiement s’effectue tous les six mois sur le compte bancaire ou postal que vous avez renseigné auprès du centre de gestion des retraites dont les références sont données sur le dernier bulletin de paiement. Il y a toujours un décalage entre le montant de la retraite du combattant et celui de l’application des mesures nouvelles. Il est donc fort probable qu’une
24 - LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
l’USH, à la veille du Congrès Hlm de Marseille, « Nous sommes en plein paradoxe, voire en pleine contradiction. Ce plan est nécessaire, urgent mais, dans le même temps, l’État non seulement se désengage du financement des aides à la pierre, mais il ponctionne très sévèrement les ressources des organismes Hlm en diminuant les APL. C’est pour le moins incohérent, et les grands perdants de cette incohérence, pensée et pilotée par Bercy, ce sont les centaines de milliers de familles modestes et pauvres qui, au final, attendront un logement social encore plus longtemps. »
petite différence existe, rattrapée automatiquement alors à l’échéance postérieure par le biais de rappels. Rappelons qu’il s’agit d’une retraite nominative, non réversible au décès, non imposable, insaisissable. Elle n’est pas versée automatiquement, il faut en faire la demande sur imprimé spécial auprès du service départemental de l’ONACVG ayant attribué la Carte du Combattant… Si vous n’avez pas demandé cette retraite du combattant, alors que vous étiez en droit d’y prétendre, vous ne pourrez solliciter les arrérages que sur l’année en cours et les trois années antérieures. Ce sont les articles L.321-1 et suivants qui définissent les conditions dans lesquelles elle peut être attribuée. L’Ancien d’Algérie N° 569
VOS DROITS LE RÉVEIL
Quel avenir pour l’hôpital public ? Retour sur un débat organisé à la veille des annonces d’Emmanuel MACRON par la Mutuelle Familiale, dans le cadre de la Fête de l’Humanité. Nous savons avant même son annonce que le plan santé 2022 sera insuffisant car il se fera avec très peu de moyens financiers supplémentaires. Il faut réorganiser globalement l’offre de soins et ne pas seulement aborder la question de la saturation des urgences à l’hôpital. Si le constat est largement partagé par les professionnels de santé, les usagers, les syndicalistes, les mutualistes ou les élus locaux, la ministre Agnès Buzyn utilise cet argument pour esquiver les moyens nécessaires pour l’hôpital public. Il est urgent de changer de paradigme : il faut enfin partir des besoins de la population et non d’une approche comptable de notre système de santé comme cela est devenu le cas depuis bien trop longtemps. Les mutuelles ouvrières, dont est issue la Mutuelle Familiale, se sont toujours construites sur deux jambes : une assurance santé complémentaire du régime général de la Sécurité Sociale et une offre de soins afin de permettre l’accès aux soins pour tous. Ces œuvres sociales se sont voulues complémentaires du système public,
parfois avant-gardiste de celui-ci avec des concepts innovants comme l’accouchement sans douleur ou le tiers payant. Demain mutuelles et hôpital public continueront à innover pour répondre aux besoins, par exemple en lançant ensemble une expérimentation de téléconsultation en ophtalmologie. Les défis sont nombreux : déserts médicaux, prévention, facteurs environnementaux défavorables à la santé. Autant de sujets portés fortement dans les discours du Président de la République mais qui malheureusement ne sont pas suivis d’effet dans les actes à ce jour. Le mouvement mutualiste a la volonté de s’inscrire dans des projets de territoire pour participer à l’offre de soins pour tous et réduire les inégalités de santé. Ce travail nous ne pourrons le réaliser que si l’ensemble des acteurs du système de santé se mobilise. Le large public lors de ce débat, ainsi que les interventions convergentes à la tribune de ce débat montre que ce chemin est possible. Dès le débat sur l’examen du PLFSS 2019 (Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale) qui
aura lieu à l’automne, n’hésitez pas interpeller votre député ou sénateur. Maxime PAUL Vice-Président de La Mutuelle Familiale
Avec Maxime Paul, étaient présents à la tribune de ce débat : Alain Bobo, président de la FNMDU (Fédération Nationale des Maisons des Usagers), Laurence Cohen, orthophoniste, sénatrice du Val de Marne, Christophe Prudhomme, porte-parole de l’AMUF (Association des médecins urgentistes de France), membre de la CGT santé, Syvie Ben Jaber, Secrétaire générale de la Mutuelle Familiale.
Pour aider l’ARAC à pérenniser son action pour la paix, pour le respect de la souveraineté des peuples et du droit international. Pour contribuer à défendre les valeurs de la République, aujourd’hui menacées et les droits acquis par l’action des hommes et des femmes de notre pays tout au long de l’histoire de notre pays. Pour donner les moyens à l’ARAC de poursuivre son combat antifasciste avec détermination. Pensez aux dons ou aux legs à l’ARAC. Pour tous renseignements, toutes documentations. Prendre contact avec Annick par téléphone le lundi, mercredi ou jeudi au 01 42 11 11 18 ou par mail arac.nationale@orange.fr ou encore par courrier à l’adresse de l’ARAC – 2 Place du Méridien – 94800 VILLEJUIF.
LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018 - 25
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VIE DE L’ARAC LE RÉVEIL
Bouches du Rhône (13) Marseille, le 20 septembre 2018. C’est dans la salle Michel CACCIOTI du collège François VILLON à St Marcel, qu’a été visionnée pour la première fois un CD témoignage d’un ancien résistant en la personne de Michel CACCIOTI officier de la légion d’honneur, grand invalide de guerre et président d’honneur de l’ARAC 13, du proviseur M. SANTINI, des enseignants, d’élèves, du président du Concours National de la Résistance M. BEAU, du vice-président du Conseil Départemental M. Maurice REY, des élus du secteur, des représentants d’associations, du président de l’ARAC 13, et de la population. Ce CD de près d’une heure retraçant non seulement le parcours d’un résistant, mais aussi pourquoi et comment avons-nous résisté, a été enregistré à la mairie des 11° et 12° arrondissements de Marseille et financé par le
Conseil Départemental des Bouches du Rhône. Mais c’est aussi et surtout grâce à la volonté de l’ARAC de la section de St Marcel avec à sa tête son président Paul ROUBIN, également vice-président départemental délégué à la mémoire que ce CD a vu le jour. Très apprécié du public et notamment des enseignants, il sera un outil pédagogique de plus pour le travail de mémoire envers la jeunesse dans les lycées et collèges. Toutes les sections de l’ARAC départementale en auront copie à notre prochain Bureau Départemental où il sera projeté, pour ainsi aider au travail de mémoire. D’autres grandes initiatives mémoire sont à venir dans le cadre du centenaire de la fin de la 1° guerre mondiale dont l’ARAC de St Marcel a obtenu le label et reçu le soutien extraordinaire de Madame la Présidente du Conseil Départemental Martine
Vassal, qui a mis à notre disposition 20 cars pour aller chercher les élèves dans les collèges pour un parcours mémoire. A bientôt donc et encore bravo à l’ARAC de St Marcel et toute son équipe. Patrick Saintenoy.
Les marches pour la paix que notre association a été créée par H. Barbusse, P. Vaillant-Couturier, R. Lefebvre et G. Bruyère. S’attaquer en pleine guerre de 14/18 aux causes du conflit nécessite courage et obstination.
Marche pour la paix Toulouse 22 09 2018.
Dans 140 villes se sont tenues des initiatives, des marches, des rassemblements pour la paix. Le combat pour la paix fait partie de l’ADN de la création de l’ARAC en 1917. C’est pour s’attaquer aux causes des guerres, ces causes qui bafouent la souveraineté des peuples, entraînent des populations dans la misère, le chaos, et permettent à une poignée d’individus de se partager le monde,
22 septembre Nantes.
Marche pour la paix Paris.
C’est pour cela que nous continuons et continuerons à faire du combat pour la paix, le respect des peuples, du droit international et des engagements de la charte de l’ONU, une action continue à l’ARAC. C’est ainsi que nous continuerons les états généraux pour la paix à la suite du 21 avril 2018, dans chaque ville, département, avec tous ceux qui partagent la démarche. LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018 - 27
LE RÉVEIL TÉMOIGNAGE
Maurice AUDIN : Aller au bout de la vérité la porte à toutes les dérives possibles. La guerre d’Algérie, guerre coloniale, impose avec le devoir de vérité, le respect à l’aspiration légitime à l’indépendance et à la souveraineté de chaque peuple. Plutôt que de se repentir demain, il faut dès aujourd’hui mettre en œuvre les principes portés par la charte des Nations Unies.
Depuis soixante et un an, l’ARAC exige que la « disparition » de Maurice Audin, soit révélée au grand jour par la République et reconnue comme crime d’état. Maitre-assistant de mathématiques à l’université d’Alger, militant du parti communiste algérien agissant pour obtenir l’indépendance de l’Algérie, Maurice Audin, fut arrêté, torturé et éliminé physiquement par des soldats parachutistes aux ordres d’officiers servant la volonté du gouvernement de l’époque, le 11 septembre 1957.
de la République s’en trouveront renforcées. Ce geste officiel devra entraîner la diffusion de véritables connaissances historiques auprès des jeunes scolaires et étudiants sur la réalité de la guerre d’Algérie, ses causes, ses effets et ses conséquences. Attention, comme le montre l’histoire, toute utilisation des pouvoirs spéciaux ouvre
L’ARAC se félicite que le Président de la République, reconnaisse cette responsabilité portée par le gouvernement français depuis 1957. Pour l’ARAC, il ne s’agit pas d’une question d’apaisement mais d’une question de vérité et de justice pour dénoncer l’innommable. C’est une victoire historique, pour le devoir de mémoire, la démocratie, les valeurs 28 - LE RÉVEIL - N° 847 - SEPTEMBRE 2018
Maurice et Josette Audin.
Ce geste contribuera à renforcer les relations de coopération et d’amitié entre les peuples de France et d’Algérie et constitue un pas important vers la signature d’un traité de paix et d’amitié entre la France et l’Algérie, tel que le demande l’ARAC depuis la fin de cette guerre en 1962. Notre Nation doit rester le pays de la déclaration des droits de l’homme et ainsi retrouver l’écoute et la parole dans le monde. Toutes nos pensées fidèles, solidaires et affectueuses se tournent présentement vers notre amie et camarade Madame Josette Audin et ses enfants.
Villejuif, le 21/9/2018 Déclaration de l’ARAC
VIE DE L’ARAC LE RÉVEIL
Les Etats Généraux de la Paix dans le département de la Seine-St-Denis, auront lieu le : Samedi 6 octobre 2018 de 14 heures à 18 h 30 à la Maison des Associations, 15 Place Rol-Tanguy au Vieux-Pays de Tremblay en France. La question de la paix, cent ans après la fin de la guerre 1914-1918 demeure un enjeu majeur pour l’avenir des peuples, des nations, de notre planète. Il faut exprimer avec force notre volonté de Paix entre les peuples et redonner dans ce sens toute sa place et tout son rôle à l’ONU. Ont déjà manifesté leur soutien et répondu favorablement à la tenue de l’initiative : le maire de Tremblay François Asensi, ancien député ; Mme Carinne Juste, maire de Villetaneuse ; M. Jean-Christophe Lagarde, député ; M. PierreYves Martin, maire de Livry-Gargan ; M. Xavier Lemoine, maire de Montfermeil ; M. Patrice Bessac, maire de Montreuil-sous-Bois ; M. William Delannoy, maire de St Ouen ; M. Patrice Calméjane, maire de Villemomble ; Mme Martine Valleton, maire de Villepinte.
Val de Marne (94)
Aisne (02)
L’ARAC du Val de Marne présente à l’initiative du Conseil départemental du Val de Marne sur le centenaire de 14/18 à la maison des syndicats et aux archives départementales, 10/11 rue des archives à Créteil, le samedi 6 octobre 2018. 10 h 15 : Inauguration de l’expo de l’ARAC 14/18 10 h 30 : Conférence sur le rôle des femmes dans la Grande guerre avec Liliane Rehby, secrétaire nationale de l’ARAC. L’ARAC sera également présente dans l’espace librairie où sera proposé un grand choix d’ouvrages de la guerre 14/18 en présence d’éditeurs et d’écrivain.
Expositions de l'ARAC de Montescourt et de la Fédération Nationale de la Libre Pensée tenues du 14 au 16 septembre 2018 à Tergnier (Aisne). Visite des classes de CM1 et CM2 de l'École Pasteur de Tergnier. Vernissage des Expos, Hommage aux Poilus au Monument aux Morts du Parc Sellier. Conférence/Débat de Liliane Rehby avec comme thème “le Rôle des femmes pendant la Grande Guerre”. M. le Maire de Tergnier s’est félicité de l’initiative. La section ARAC de Montescourt renouvellera ces expos les 8 et 9 décembre à la salle Gérard Philippe de Montescourt mais également avec l’ARAC de la Somme à Saint-Blimont les 10 et 11 novembre 2018. Un monument en Mémoire des Fusillés pour l'exemple sera inauguré le samedi 6 avril 2019 au Parc Notre Dame de Chauny (Aisne).
Fête de l’Humanité, stand de soutien au combat de Tran To Nga Cette année, comme l’an passé le comité de soutien à Tran To Nga dans son combat contre les fabricants de l’agent orange a tenu un stand à la Fête de l’Humanité. Le Comité Français du Village de l’Amitié, avec d’autres associations du Comité de soutien a participé activement à la diffusion des informations sur les conséquences de l’agent orange et la situation tragique des anciens combattants et des enfants vietnamiens victimes de la
dioxine. Samedi, un échange avec William Bourdon, avocat international défendant Tran To Nga nous a permis d’en savoir plus sur le procès intenté par Tran To Nga contre une vingtaine de compagnies chimiques dont Monsanto. Dimanche s’est tenu un débat dans le stand vietnamien Nhan Dan en présence de l’Ambassadeur du Vietnam en France. Animé par Hélène Luc cette rencontre a eu pour objet de rappeler les conséquences d’une guerre chimique initiée par les EtatsUnis au Vietnam et de faire le point sur l’avancée du combat mené par Tran To Nga. Représentant le Village de l’Amitié, nous avons apporté notre témoignage sur l’accueil des vétérans et des enfants victimes de l’agent orange au Village de Van Canh.
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LE RÉVEIL VIE DE L’ARAC
Alpes-maritimes (06) Charente (16)
Le 27 août 1944 les mouvements de la Résistance niçoises réunis en comité insurrectionnel au Palais Stella, rejetant la consigne d'attendre l'arrivée des troupes américaines, décidèrent le soulèvement contre l'ennemi pour le lendemain. Le 28 août, 32 niçois sont tombés sous le feu ennemi et 280 ont été blessés. Le 28 août 2018, un circuit de la Mémoire reliant les plaques commémoratives du sacrifice de ces héros situées dans les rues de la ville se déroula de 8 h à 13 h 30 ; la cérémonie au monument aux morts de Rauba Capeu clôtura cette longue journée de recueillement. Francis Pipart
Nord (59) L’ARAC de Fenain-Somain a participé au Forum des Associations le samedi 8 septembre 2018 à SOMAIN, présentation de l’ARAC, de la mutuelle, Van Canh, avec vente d’objets.
Angoulême a commémoré sa libération à l’occasion de son 74ème anniversaire, en présence de la nouvelle préfète Marie Lajus qui a déposé une gerbe. De nombreux porte-drapeaux dont deux de l’ARAC côte à côte avec son béret rouge et notre jeune de 19 ans étaient présents. Les jeunes du conseil municipal des enfants ont énoncé un à un les noms des civils et combattants tombés au combat ce 31 août 1944.
Nos peines ■ BOUCHES-DU-RHONE (13) La Fare les Oliviers : Michel JUMELLE, AC ATM, président de la section. ■ EURE ET LOIR (28) Chartres : Mme Germaine FOUQUET. ■ HAUTE-GARONNE (31) Launaguet : Robert LANOIR, AC ATM, porte-drapeau départemental. ■ GIRONDE (33) Bordeaux 1er : Michel SALED, 78 ans, AC ATM, président de la section. Cavignac : Raoul BLONDIN, AC 39-45 ■ ISERE (38) Bourgoin-Jallieu : Georges NOYAU, 94 ans, AC 39-45, Médaille Militaire, ancien des Missions Australes et Polaires françaises. ■ LOT-ET-GARONNE (47) Layrac : Claude GIBRAT, 82 ans, AC ATM. ■ MOSELLE (57) Ottange-Villerupt : Jean-Marie DAL FOVO, 82 ans, AC ATM. ■ NORD (59) Fenain : Paul LENNE, Résistant. Maurice PINATON, AC ATM
■ PAS-DE-CALAIS (62) Courcelles les Lens : Jules DUBRULLE, 77 ans, AC ATM. ■ HAUTES-PYRENEES (65) Tarbes : Mme Solange LARROUTURE. ■ SAVOIE (73) Chambéry : Marcel ZANELLA, 82 ans, AC ATM. ■ PARIS (75) 19ème : Georges VUKAS, AC ATM. Premier-maître Georges ZWANG, 103 ans. Il rejoint dès 1940 les commandos de la Marine Britannique, puis rallie la FNFL en Angleterre en 1941. ■ SEINE-MARITIME (76) Le Havre : Belkacem CHAA, 78 ans. Mme Bernadette LE BOUCHER, veuve. ■ VIENNE (86) Chatellerault : Michel SAIVAUS, 88 ans. ■ SEINE-SainT-DENIS (93) Drancy : Henri LAJOT, 94 ans, Résistant Romainville : Mme Arlette TEPHANY. Albert TURPIN ■ VAL-D’OISE (95) Méry sur Oise : Michel TRUANT, 83 ans, AC ATM.
VIE DE L’ARAC LE RÉVEIL
s e l r u o p e l b Ensem x i a P a l e d x u a r Etats Géné Les initiatives de l’ARAC A Sevran (93) : du 6 au 13 novembre : expo 14/18 et rencontre. A Jaunay-Marigny (86) : du 7 au 16 novembre : expo 14/18 et débat Dans la Sarthe (72) : du 8 au 11 novembre : expo Henri Barbusse A Bouguenais (44) : du 5 au 11 novembre : expo front des poètes A St-Herblain (44) : du 1er au 30 novembre : expo Normandie-Niemen A Tremblay en France (93) : 6 octobre – Etats généraux pour la paix. A Tulle (19) : Fin novembre : Etats généraux pour la paix.
Les initiatives se poursuivent sur les états généraux pour la paix. St Nazaire (44) : exposition Front des poètes et Henri Barbusse – débat le 11 novembre. Dans les Bouches-du-Rhône (13), à Mallemort, le 19 novembre, l’ARAC organise autour de l’expo 14/18, un débat avec Paul Markidès Dans le Val-de-Marne (94) : • expo 14/18 et débat à Gentilly • expo Front des poètes et débat à Fresnes Le 23 novembre en Dordogne (24), débat à Montrem. Le 28/29 novembre à Annet-sur-Marne (77), débat sur jean Moulin.
Mémoire en BD 14-18 vu des tranchées anglaises La bande dessinée, en devenant un art d’expression majeure, s’est emparée avec bonheur du témoignage historique et a acquis sa place en matière de « Mémoire ».
• LA GRANDE GUERRE DE CHARLIE Charlie c’est le tommy anglais venu – comme ses frères – mourir aux côtés des « Poilus » français dans les tranchées. Cette série est une œuvre majeure de la BD britannique (10 volumes prévus) et le 7e – qui vient de paraître – traite de « la grande mutinerie ». Septembre 1917, Charlie et ses copains sont repliés sur le camp d’entraînement d’Etaples (Pas de Calais) avant de repartir au front. Injustices, mauvais traitements, coups, assassinats, injures sont leur lot quotidien infligé par les « casquettes rouges ». D’où la grande mutinerie durant laquelle les soldats anglais – les Ecossais notamment – ont occupé Etaples pendant une semaine. La répression fut terrible et les hommes renvoyés
en lignes pour l’assaut « décisif » sur Passchensdaele. Combats, ou à l’arrière, tabous tels que fraternisation, châtiment « pour l’exemple », mutinerie, quotidien du corps médical et des brancardiers, tout y est minutieusement abordé par Pat Mills et superbement illustré par Joe Colqhoun, très grand dessinateur disparu avant d’avoir pu boucler son œuvre. Les Mutineries de 1917 vus sous un angle inédit, le côté anglais sans concession. Avec, avec en parallèle, un chapitre sur les mutineries françaises et – en supplément – les paroles intégrales de la chanson de Lorette (Craonne) et la photo de Paul Vaillant-Couturier « considéré comme son auteur ». Chez Delirium – Préfacé par Tardif – 22 euros
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* Tarif 2018 applicable pour une personne seule entre 60 et 64 ans, résidant dans le département 22. Si le contrat est conclu dans le cadre d’une vente à distance ou par voie de démarchage, les conditions d’exercice de la faculté de renonciation sont de 14 jours calendaires révolus (articles L 221-18 et L22118-1 du Code de la Mutualité). Document non contractuel - Juillet 2018 - Crédit photo : Adobe Stock. Mutuelle régie par le livre II du Code de la mutualité. SIREN n°784 442 915.
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L’ARAC et La Mutuelle Familiale ensemble pour la solidarité, la fraternité et la santé La Mutuelle Familiale primée en 2018 !
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