7 minute read
Tom Bellens, directeur de l’agence Push To Talk, vit cette crise du coronavirus sous un triple angle unique. Avec lui, nous examinons les leçons que le secteur pourra tirer de cette période difficile
«Collaborer avec le secteur pour améliorer la connaissance des assurances»
L’annulation obligatoire de leurs événements a constitué une pilule difficile à avaler pour de nombreux organisateurs. Cette crise montre aussi clairement que les organisateurs ne réalisent souvent pas assez ce pourquoi ils sont et ne sont pas assurés. Nous nous sommes entretenus avec Tom Driesens, du bureau d’assurances Verheyen qui, depuis quatre ans, travaille à la sensibilisation en matière d’assurances dans le secteur de l’événementiel. «Une connaissance de base des assurances apportera certainement une valeur ajoutée à la manière dont les organisateurs envisagent les risques.»
Tom Driesens
Depuis quatre ans, Verheyen Assurances se consacre spécifiquement au secteur événementiel. «Nous sommes une agence de courtage classique et avons développé ces dernières années plusieurs produits sur mesure pour ce secteur», explique Tom Driesens. «Nos clients sont issus de tous les types d’événements: festivals, concerts, B2B, congrès, salons, événements sportifs et entreprises qui organisent elles-mêmes leurs événements. En outre, nous proposons aussi nos services aux sous-traitants, comme les traiteurs, les loueurs de tentes, les constructeurs de stands, etc. Nous leurs offrons aussi des possibilités spécifiques. En général, les assureurs ne connaissent pas vraiment le secteur événementiel et ne possèdent dès lors pas de produits spécifiques. C’est pourquoi, en collaboration avec l’ACC, nous avons inventorié les besoins des organisateurs et cherché un (ou des) assureur(s) approprié(s). Cela a donné un très bon résultat, entre autres, pour la Responsabilité Civile. Nous sentons que ce secteur a besoin d’un partenaire en matière d’assurances qui comprend son fonctionnement. Nous contribuons ainsi à la professionnalisation de ce secteur.»
Une connaissance meilleure
de base
Il est important que les organisateurs et les fournisseurs considèrent leur assureur comme un partenaire. «Nous préférons que nos clients nous posent des questions sur les contrats qu’ils concluent avec les fournisseurs et/ou les clients. Nous pouvons ainsi leur fournir des conseils appropriés et leur exposer les éventuelles conséquences financières de certaines clauses. Nous avons ainsi déjà pu faire en sorte que des clauses soient supprimées de contrats avec des fournisseurs parce qu’elles mentionnaient des montants excessifs au détriment de notre client. La crise du corona
virus a clairement mis en lumière que les connaissances en matière d’assurances ne sont pas encore suffisamment présentes. En soi, ce n’est pas si grave. Nous ne pouvons pas non plus organiser des événements créatifs. Mais nous sommes convaincus qu’une connaissance de base des assurances représentera une valeur ajoutée pour la manière dont les organisateurs envisagent les risques. C’est pourquoi il est intéressant de passer en revue les deux principaux produits d’assurance pour le secteur.»
Responsabilit é Civile
L’assurance Responsabilité Civile, également connue sous le nom de RC Exploitation, constitue un must absolu pour tout entrepreneur événementiel. Il s’agit de l’assurance familiale de l’entreprise. «Le principe de base est que votre responsabilité est assurée pendant l’exercice de votre activité. Pour parler de responsabilité, il faut qu’il y ait une faute, un dommage et un lien de causalité. Si ces 3 éléments ne sont pas présents, il n’y a pas de responsabilité. En outre, la partie lésée doit également être un ‘tiers’ et seuls les dommages extra-contractuels seront indemnisés. Il peut s’agir ici de dommages matériels et/ou physiques, mais parfois aussi de pertes financières résultant de ces dommages.»
Il est important de se rendre compte de ce qu’une politique inclut et n’inclut pas. «Dans une police standard, les dommages occasionnés au matériel loué, comme le matériel son et lumière, ne seront pas indemnisés parce que restituer le matériel dans le même état forme une obligation contractuelle. De nombreux organisateurs ne s’en rendent pas compte jusqu’à ce que des dommages se produisent. Évidemment, il s’agit d’une des couvertures que nous avons incluses de manière standard, de même que les dommages occasionnés aux locaux loués/utilisés. À
notre avis, les limites des polices standard étaient trop basses pour les risques que courent les organisateurs, c’est pourquoi nous avons sérieusement relevé ces limites. Un événement rassemble beaucoup de gens en un même lieu, avec un potentiel de dommages importants.»
Mais d’autres couvertures sont possibles et toutes les compagnies ont leurs propres conditions et systèmes de primes. «De telle sorte que des risques spécifiques sont trop souvent restés non-assurés et qu’il n’y avait pas de système de primes univoque. Cela ne doit plus être le cas. Nous entendons souvent dire que les sous-traitants assurent déjà leur matériel, mais dans de nombreux cas, on ne sait pas exactement contre quels dommages celui-ci est assuré. Dans la plupart des cas, celui-ci est uniquement assuré contre l’incendie et le sous-traitant ne sera pas couvert, par exemple, en cas de chute d’un écran. Une RC Exploitation couvrira donc les dommages aux tiers, mais il n’est pas erroné de penser aussi à soi-même. Les dommages causés à son propre matériel ou la perte financière résultant de l’annulation d’un événement font partie des exemples de risques souvent oubliés.»
Assurance annulation
Alors que l’assurance Responsabilité Civile est proposée par de nombreuses compagnies – indépendamment de la complétude des garanties –, il en va tout autrement pour l’assurance annulation. «Cette matière est tellement spécialisée que seuls quelques assureurs la proposent en Europe. Les assureurs classiques tels ceux que nous connaissons en Belgique ne la proposent pas. Les courtiers en assurances classiques ne maîtrisent pas non plus cette matière, ce qui signifie que les informations fournies ne sont souvent pas correctes.» vent sous-estimé. «Combien de coûts des fournisseurs sont tout de même facturés en cas d’annulation? Le commanditaire veut-il toujours bien payer le solde? Notre expérience nous a appris qu’il est très difficile d’estimer cet impact. Nous procédons à cet exercice avec nos clients et sommes très souvent confrontés à des contrats qui ne mentionnent pas, voire peu, la ‘force majeure’. En général, la clause d’annulation concerne le fait que le client ne veut plus du service. Il va sans dire que
ces clauses impliquent une indemnisation, mais il en va autrement en cas de force majeure. En cas de force majeure, des négociations sont menées avec les fournisseurs et le client. L’issue reste donc incertaine pour toutes les parties. C’est pourquoi il est très utile de déterminer contractuellement comment l’aspect financier sera réglé en cas de force majeure. Cela éliminera de nombreuses incertitudes.»
L’assurance annulation a pour but d’indemniser les coûts non-récupérables (ou parfois le chiffre d’affaires) en cas de force majeure. «On pense ici par exemple à un incendie, des grèves, un accident mortel durant le montage, le décès du CEO du commanditaire, un acte terroriste ou une menace, une tempête, etc. Autant de situations où tout le monde veut encore que l’événement ait lieu, mais où, en raison des circonstances, c’est devenu impossible ou nécessite d’engager des coûts supplémentaires. Tous les organisateurs seront confrontés tôt ou tard à de telles situations. Nous conseillons d’en discuter ouvertement avec les clients et les fournisseurs. Nous sommes convaincus que tous les organisateurs font tout leur possible pour éviter les dommages et mènent une certaine politique de prévention. Toutefois, le scénario de l’annulation d’un événement n’est pas encore totalement intégré dans de nombreux plans de prévention, de sorte que les conséquences n’ont pas toujours été réfléchies. Ici aussi, nous venons en aide à nos clients et leur indiquons les points auxquels il convient de prêter attention.»
Quid de l ’avenir ?
La crise du coronavirus frappe durement, avec un impact énorme pour tous les acteurs du secteur événementiel. «Malheureusement, le coronavirus est désormais un fait connu, ce qui le rend par définition non-assurable. Certains assureurs ont exclu les pandémies après l’apparition du SRAS en 2002-2003. Actuellement, tous les assureurs excluent les coronavirus et les pandémies des polices souscrites après l’apparition de la pandémie. Nous espérons qu’une solution pourra être trouvée à l’avenir, mais cela reste incertain. Après les attentats de 2015-2016, nous n’aurions jamais osé penser que nous serions en mesure d’offrir aujourd’hui des couvertures très vastes en matière de terrorisme. En collaboration avec l’ACC, nous étudions différentes pistes de réflexion sur la manière d’attirer davantage l’attention sur les assurances annulation et sur la manière de souscrire efficacement à celles-ci à l’avenir.»