Racines #08

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Côtes de Provence

Le mythe Minuty — Primeurs 2023

La grande opportunité ! — Saveurs estivales 5 cocktails classiques en accord

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Printemps / Été 2024 Le magazine réservé aux membres de Ventealapropriete.com

Petites gorgées

4 Primeurs 2023. La grande opportunité !

8 Trait d’union. Grands vignerons et membres

11 Services. Ventealapropriete et vous

12 Anatomie d’une bouteille. Notre cuvée avec Domaines Ott* : Bandol rosé 2023

13 Œnophilie. Autour du vin

14 Data. La Corse en chiffres et dates clés

Grands formats

16 Légende portugaise. Quinta do Noval

24 Renouveau à Beaune. Albert Morot

30 Success-story. Le mythe Minuty

36 Visionnaire en vallée de la Loire. Pascal Jolivet

Dégustation

42 Un verre avec… Grégory Marchand

44 Mets-cocktails. 5 duos magiques

50 Accords. Une aubergine, trois possibilités

52 Escapade. Du Ventoux au Luberon

56 Sélection. Les coups de cœur de nos acheteurs

58 Dernière gorgée. « Blanc sur rouge, rien ne bouge… »

édito

À TOUT SEIGNEUR, tout honneur… Les pages de Racines 8 s’ouvrent avec Bordeaux et ses Primeurs, cet événement romanesque qui s’écrit chaque année et dont la dramaturgie mériterait de ressusciter Balzac pour nous le raconter. Ce rendez-vous palpitant réserve toujours son lot de suspense, de contrariété et de joie… Cette année est celle de la « grande opportunité », puisqu’à la faveur d’une conjoncture économique compliquée, le millésime 2023, qui propose des vins de grande facture, se présente sur le marché à prix doux… Les vignerons sont aussi des consommateurs ; ils trouvent leur bonheur sur Ventealapropriete, on n’en est pas peu fiers ! Nous sommes allés à la rencontre de quelques-uns de nos vignerons membres, qui témoignent de leur expérience avec nous. Pas étonnant qu’ils souscrivent à nos offres : nous sommes issus du sérail, électrisés chaque jour par la même passion qu’eux !

Nous sommes un prolongement du vignoble, aux confins de la critique, de la production, des médias et de la distribution. Notre travail ? Réaliser une sélection de vignerons et de domaines, défendre le beau et le bon auprès du plus grand nombre, puisque vous êtes plus de 650 000 membres inscrits sur Ventealapropriete… Les valeurs que nous défendons sont celles des vignerons. Et chaque pas que nous faisons avec le vignoble, nous le faisons aussi pour le vignoble.

Le monde viticole est aussi beau que multiple.

L’adage est connu, un vignoble, c’est l’association de trois éléments : un terroir, un millésime, un homme. La dimension humaine induit la pluralité des aventures et son infinie diversité. C’est cette course vers un avenir indéfiniment ouvert qui rend les choses si palpitantes, jamais lassantes.

Si le monde viticole est aussi beau, c’est parce qu’il est multiple. De Bordeaux au Portugal en passant par Sancerre et la Provence, vous trouverez autant de passionnantes aventures que de passionnés. Voilà la grande histoire du vin. À travers ces pages, nous vous invitons à lire un peu de son récit.

Alaric de Portal

Directeur de Ventealapropriete

Le magazine Racines est réservé aux membres de Ventealapropriete.com, 200, boulevard de la Résistance, 71000 Mâcon. Directeur de la publication : Alaric de Portal. Conception et réalisation : Les Digitalistes, 9, rue Emilio-Castelar, 75012 Paris, lesdigitalistes.com. Coordination éditoriale : Julien Despinasse. Conseillère de la rédaction : Véronique Raisin. Direction artistique : James Eric Jones. Rédaction : Marie Aline, Séverine Augé, Sylvie Berkowicz, Léo Bourdin, Marie-Odile Briet, Stéphane Méjanès, Véronique Raisin. Photos : Anaïs Boileau, Timothée Chambovet, Rebecka Oftedal, Pierre Lucet-Penato, Dorian Prost, Quentin Salinier. Illustrations : Anaïs Lefebvre. Photo de couverture : Rebecka Oftedal. Secrétariat de rédaction : Muriel Foenkinos. Impression : Imprimerie Léonce Deprez. Nous écrire : mag@ventealapropriete.com. L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. À consommer avec modération.

Racines 3 Photo : Roberta Valerio

Primeurs 2023 : la grande opportunité !

La campagne 2023 a de quoi exciter les esprits : la qualité est au rendez-vous et les tarifs sont radicalement à la baisse !

Comme chaque année, notre comité de dégustation s’est rendu sur place pour sélectionner les plus belles réussites.

CE FUT UN SCÉNARIO HALETANT, où le classicisme et les équilibres ont triomphé. « C’est un millésime très rassurant, où l’on retrouve les bordeaux fins et civilisés que l’on aime », résume Olivier Poussier, Meilleur sommelier du monde et membre du comité de dégustation de Ventealapropriete. « 2023 signe des vins flamboyants dans l’expression du fruit où les identités de chaque terroir sont clairement affirmées et les hiérarchies des crus totalement respectées. Ce millésime me séduit ! » conclut-il, enthousiaste.

Un millésime de marathonien

Il aura pourtant fallu trier en raison des conditions climatiques imprévisibles et de la forte pression du mildiou. « C’est un scénario dont la qualité fait oublier les combats qu’il aura fallu livrer pour l’emporter, et qui surprend par la richesse et la diversité des vins obtenus », témoignent d’une seule voix les équipes de Derenoncourt Consultants. Après un hiver globalement doux et bien arrosé, puis un débourrement relativement homogène, un premier épisode de gel, début avril, donne quelques frissons, heureusement, il reste circonscrit à certaines surfaces. S’ensuit une ambiance printanière tropicale, avec abondance de précipitations et un air saturé d’humidité. La floraison, quoique subite, se passe sans encombre jusqu’à un développement végétatif fulgurant et une pression du mildiou record, jusqu’à la mi-août. Deux épisodes caniculaires ponctuent ensuite l’été, fin août puis début septembre, avant de faire place aux vendanges, sous le soleil et la chaleur ; une récolte qui clôt en beauté la campagne avec de somptueux liquoreux. Plus que jamais, 2023 fut le millésime de l’adaptation : flexibilité, efficacité et remise en cause des pratiques furent chaque jour d’actualité. Stéphane Derenoncourt parle

d’un « millésime ultra-trail » ; « il fallait faire preuve d’une grande endurance et de détermination ». Mais au moment du clap final, tout va pour le mieux, puisque la quantité de raisins offerte est considérable. Simon Blanchard, Frédéric Massie et Julien Lavenu, conseillers Derenoncourt Consultants, l’attestent : « La maîtrise des volumes a joué un rôle fondamental en 2023, car elle est à la fois garante de la profondeur des vins et responsable de leur allonge, assurant plus que jamais leur galbe et leur consistance. »

Le triomphe des grands terroirs

Avec des degrés d’alcool contenus, de l’ordre de 13,5 ° en moyenne, de belles structures tanniques et des matières de bonne dimension, ce millésime s’inscrit incontestablement parmi les réussites de la décennie. L’année 2023 signe une victoire sans appel de la maturité, aussi bien technologique que phénolique. Partout, les tanins sont mûrs et de bonne qualité et les rouges jouissent de concentrations, avec une retenue de puissance et de démonstration qui laisse place à l’expression plus subtile d’une lente maturation, d’une matrice énergique et d’une lecture nette et tactile de l’identité de chaque sol. « Il faut aussi souligner la réussite de tous les profils, aussi bien les blancs que les rouges, mais également les liquoreux, superbes de concentration, de liqueur et d’équilibre cette année », poursuit Olivier Poussier.

Les grands terroirs sont au rendez-vous et produisent des vins qui s’apparentent davantage aux harmonieuses réussites des années 2000. « Il me rappelle les équilibres de 2001 pour la rive droite, et ceux de 1996 pour la rive gauche, explique Olivier Poussier. Après 2022, plus solaire et opulent, 2023 s’inscrit dans la veine des grandes années classiques du Bordelais, avec des vins plus digestes et sapides,

Racines 5
Actualité
Ci-dessus, de haut en bas : Olivier Poussier, Meilleur sommelier du monde ; le Château Calon Ségur, à Saint-Estèphe.

davantage bâtis sur l’allonge que l’épaisseur. Je salue notamment la persistance de sève des Châteaux Hosanna, Pavie Macquin, Clos Fourtet, Beauséjour Duffau-Lagarrosse, Laroque ou encore Bélair-Monange sur la rive droite, et la gestion des cabernets des Médocains Brane-Cantenac, Rauzan-Ségla, Pichon Comtesse, Mouton Rothschild, Léoville Barton, Montrose et Margaux. »

Alaric de Portal, Directeur Général de Ventealapropriete, complète : « Je suis impressionné par la lecture des terroirs sur ce millésime ; tous les grands ont répondu présents et quelques surprises émergent également. Personnellement, j’aime ce style aimable, où l’élégance demeure le mètre étalon. Car certes, c’est un millésime moins pulpeux, avec moins de chair qu’un 2022 ou un 2020, mais qui offre une perception plus fine de chaque terroir, révélant l’identité de chaque lieu, l’allure de chaque cru. Le style se révèle, à nu, cueilli dans son expression la plus pure. J’ai notamment trouvé Château Margaux magique, tout simplement superlatif. Mais aussi Poujeaux, à Moulis, qui illustre toute la classe de Bordeaux, et Château de Pez, sur Saint-Estèphe, sublime de finesse et de suavité, l’une des belles révélations de 2023. » Il poursuit : « Il y a aussi de très belles échappées à saisir, des rapports prix-plaisir toujours au rendez-vous qui constituent, cette année plus

Ci-dessus

que jamais, des musts, comme Cantemerle, Lagrange à Pomerol, Château de Fieuzal ou Les Tourelles de Pichon Longueville. »

L’une des meilleures affaires de la décennie

Une année, trois atouts majeurs : la qualité, un accueil chaleureux de la critique et des prix attractifs. Sans compter que les volumes sont au rendez-vous. « La vie du vin est aussi dépendante du commerce. Nous sommes venus prendre le pouls durant une semaine, goûtant à plusieurs reprises tous les crus et passant dans une majorité de propriétés pour échanger, déguster et affiner notre jugement. Cette campagne doit fonctionner, car il faut continuer de le clamer : Bordeaux est aussi une terre d’affaires, où les très bons rapports qualité-prix abondent. La région, dans un contexte haussier global, aligne les atouts : une foisonnante diversité marquée par l’émergence de nouveaux talents, une évidente avance technologique, des méthodes culturales plus vertueuses. Elle demeure le meilleur réservoir d’excellence. En résumé, les vins sont grands et les prix savoureux », conclut Alaric de Portal. Ce millésime 2023 signe l’éclatante supériorité de Bordeaux. En doutiez-vous encore ? VÉRONIQUE RAISIN /

Les favoris du comité

Toutes catégories

Château Margaux, Margaux

Château Belair Monange, Saint-Émilion Grand Cru

Château Hosanna, Pomerol

Château Montrose, Saint-Estèphe

Château Calon-Ségur, SaintEstèphe

Château Pavie Macquin, Saint-Émilion Grand Cru

Château Bourgneuf, Pomerol

Château Beauséjour

Duffau-Lagarrosse, Saint-Émilion

Grand Cru

Pensées de Lafleur, Pomerol

Clos Fourtet, Saint-Émilion

Grand Cru

Meilleur rapport qualité-prix

Château Poujeaux, Moulis-enMédoc

Château Cantemerle, Haut-Médoc

Château Lagrange, Pomerol

Les Tourelles de Pichon

Longueville, Pauillac

Château de Fieuzal, Pessac-Léognan

Valeurs montantes

Château du Tertre, Margaux

Château La Garde, PessacLéognan

Château Saint-Georges Côte

Pavie, Saint-Émilion Grand Cru

6 — Racines
: l’équipe de Ventealapropriete avec Aurélien Valance, Directeur Commercial Adjoint de Château Margaux.

Retour sur le millésime

2021, livré actuellement

Nos six coups de cœur. Ce millésime d’influence océanique, plus léger qu’à l’accoutumée, nous avait séduits en primeur pour ses prises de bois très bien intégrées, ses degrés alcooliques mesurés et ses équilibres séduisants. Ces vins très digestes évoquaient les beaux profils ligériens et deux ans plus tard, en les dégustant en bouteille, on reste sous le charme de ces bordeaux suaves et élégants, de grande amabilité. On pourra se faire plaisir assez rapidement en les ouvrant sur la fraîcheur de leur fruit, d’ici trois ou quatre ans. Un magnifique remède à l’impatience.

Château

Rauzan-Ségla

Margaux, 95/100

Précision, pureté, élégance et finesse aromatique : ici, l’identité margalaise est à son comble, conjuguant la fraîcheur du millésime à la belle expression de cabernets juteux, séveux et longilignes, à la texture veloutée et équilibrée. La plus belle réussite de Margaux.

Château Léoville

Las Cases

Saint-Julien, 97/100

Il n’y a jamais de faux pas chez ce second Grand Cru Classé qui truste toujours les premières places. Racé comme jamais, il trouve sur ce millésime de demi-puissance une sève particulièrement brillante et savoureuse, illuminée par des cabernets à la juste maturité. La classe !

Château

Branaire-Ducru

Saint-Julien, 95/100

C’est sans doute l’une des meilleures affaires du millésime. Avec toute la droiture d’un beau vin de la rive gauche, sans aucune dureté de style, ce cru distingué, jouant davantage en allonge et en finesse qu’en puissance, offre un jus digeste et une sève de tanin élégante. RIVE DROITE

Clos Fourtet

1er Grand Cru Classé de Saint-Émilion, 96/100

D’une élégance rare, ce cru figure toujours parmi nos favoris. En 2021, son allonge raffinée et sa superbe précision font la différence. Sans jouer des coudes, il se hisse sur le podium avec naturel, déployant une trame de grande dimension à la fraîcheur saisissante.

Château

La Fleur-Pétrus

Pomerol, 96/100

Virevoltant sur un fruit frais et floral, cette étiquette confidentielle se distingue nettement. Qui ne serait pas séduit par son charme velouté, son niveau de concentration, son boisé noble aux notes fumées et sa trame étoffée avec une mâche qui impose sa matière ? Magique.

Château

Bélair-Monange

1er Grand Cru Classé de Saint-Émilion, 97/100

Notre primeur préféré de la rive droite ! Monumental d’équilibre et de fraîcheur, ce cru marque encore une fois les esprits de son empreinte généreuse et distinguée, au cœur de bouche pulpeux et savoureux qui porte la délicatesse d’un grand terroir.

Racines 7 Photos Quentin Salinier
RIVE GAUCHE

Les plus grands vignerons sont aussi nos clients

Ils sont propriétaires, maîtres de chai, chefs de culture ou vignerons. Partenaires, mais aussi amateurs et passionnés, ils commandent comme vous sur Ventealapropriete !

« Ventealapropriete

est le premier site sur lequel j’ai commandé, il y a 10 ans ! »

Guillaume Selosse

Champagne Jacques Selosse

« Fils de », mais bien plus que cela ! Guillaume Selosse a, depuis 2020, toute liberté sur le domaine familial d’Avize. Le Champenois n’en oublie pas pour autant d’être un consommateur (presque) comme les autres.

« Je recherche notamment des vins étrangers, car pour la France, c’est plus facile, je peux échanger avec des amis vignerons. J’ai ainsi acheté du Dominio del Àguila, parce que c’est un domaine (espagnol) que l’on trouve difficilement, et des vins de Viña Tondonia. Mais aussi des saint-romains d’Alain Gras. » Une sélection pointue qui n’est pas un coup d’essai. « Ventealapropriete est le premier site sur lequel j’ai commandé, il y a 10 ans ! Je reçois la newsletter et je m’oriente en fonction de ce que je connais et des vins que j’ai déjà goûtés. »

Bouteille culte « Le meursault de Bernard Bonin. Un domaine devenu très spéculatif, mais que j’ai découvert il y a quelques années déjà. C’est un peu le Bizot de la côte de Beaune ! »

Dernière commande « Dominio del Àguila. À l’origine, je cherchais le blanc, mais finalement, j’ai pris le rouge qui était proposé et j’ai beaucoup aimé. »

Le + « La livraison est rapide, les bouteilles sont en sécurité, parfaitement emballées, j’ai toujours été très satisfait du service. »

« J’aime bien l’idée de diversifier et je trouve toujours de belles opportunités. »

Didier Thomann

Maître de chai du Château Léoville-Poyferré, 2e Grand Cru Classé à Saint-Julien

« J’aime me tourner vers d’autres régions que Bordeaux, explorer d’autres vignobles. » Attaché au Grand Cru Classé de Saint-Julien depuis 2005, Didier Thomann n’affiche aucune lassitude, plutôt une envie d’ouverture et de découverte. « J’ai particulièrement apprécié les vins du Domaine Usseglio Raymond & Fils ; je reçois les offres et parmi elles, je trouve toujours de belles opportunités. Je recherche aussi tout particulièrement les grands blancs de Bourgogne, notamment Chablis, mais aussi les rieslings allemands, que j’affectionne particulièrement. J’aime bien l’idée de diversifier, c’est pourquoi si je peux acheter par trois bouteilles, je saisis l’occasion. [Afin de vous garantir les meilleurs prix,

8 — Racines Trait d’union
Ci-dessus : Guillaume Selosse. Photos : Rodolphe Escher, Richard Mouillaud, Anaka, DR

nos offres sont majoritairement conditionnées par cartons de six bouteilles. Certaines références, plus rares ou confidentielles, sont occasionnellement proposées à l’unité, ou par lots de trois bouteilles, ndlr ]

Coup de cœur Ventealapropriete

« Le châteauneuf-du-pape blanc de Raymond Usseglio. C’est vraiment un superbe rapport qualité-prix pour l’appellation, une bouteille que je préfère aux pures roussanne ou clairette, car elle introduit parfaitement aux blancs de la région. »

Bouteille culte « Châteauneufdu-Pape Arcane V Le Pape Rouge 2010. Un pur grenache de Xavier Vignon absolument magique. »

Le + « La logistique du site est parfaite, je n’ai rien à redire ! »

« La sélection est très rigoureuse, argumentée et fiable.

»

Stéphane Ogier

Vigneron dans la vallée du Rhône

Son domaine exploite 18 hectares, dont 3,5 hectares sur de très belles parcelles de Côte Rôtie. Malgré sa fulgurante ascension, Stéphane Ogier se laisse toujours guider par la curiosité. « Cela fait de longues années que je vends mes vins sur le site ; la sélection est rigoureuse, et les membres que je croise sont toujours très satisfaits. Moi-même j’achète de temps en temps – il faut être rapide, car les offres disparaissent vite… J’ai pris des rieslings allemands et j’achète toujours une bouteille d’Yquem pour Noël. En général, je choisis des vins que je n’ai pas forcément goûtés, pour le plaisir de la découverte. »

Bouteille culte « Un Château d’Yquem 1953… Merveilleux ! J’étais aux Flocons de Sel [restaurant trois étoiles Michelin à Megève, NDLR] avec des amis qui ont choisi cette bouteille à la teinte sombre et aux notes de safran si complexes. On l’a bue sur une bécasse, c’était somptueux, car les sucres s’étaient totalement fondus. »

Le + « Ces offres privées inspirent confiance, car la sélection est très bien faite, argumentée et fiable. »

Alaric de Portal

Directeur général de Ventealapropriete

« L’élite des vignerons achète chez nous ! Que ces professionnels de renom soient aussi nos clients, c’est à la fois une erté et la démonstration que notre sélection est pointue et exigeante. Ils viennent chez Ventealapropriete pour des raisons diverses, mais tous s’accordent sur la qualité des vins proposés et celle de la logistique, ce qui crédibilise notre travail. Par ailleurs, ce sont les mieux placés pour connaître les tarifs pratiqués, donc ils savent vraiment ce qu’ils achètent ! En n, il faut bien se rendre compte qu’ils ont accès à énormément de vins et que malgré cela, par facilité ou mieux encore, parce qu’ils n’arrivent pas forcément à se les procurer, ils viennent chez nous. Nous en sommes très ers ! »

Racines 9
En haut : Didier Thomann ; ci-dessus : Stéphane Ogier.
« Je choisis des cuvées plus confidentielles. »

Stéphane Derenoncourt

Propriétaire du Domaine de l’A, en côtes de Castillon

Il vient de confier à ses associés les clés de sa société de consulting, fondée il y a 30 ans. Stéphane Derenoncourt fut l’un des conseillers viticoles les plus respectés du Bordelais et au-delà, fervent défenseur du bio et adepte des vins de terroir. Ce propriétaire d’un domaine en bordure de Saint-Émilion est plutôt très éclairé en la matière. « J’ai accès à beaucoup de vins par mon réseau, donc je choisis sur Ventealapropriete des cuvées plus confidentielles ou que je ne trouve pas forcément. J’ai ainsi acheté du vin de Sicile et d’Arménie, par curiosité. Sinon, je reste un grand amateur de Bel Air Marquis d’Aligre, que j’achète depuis les débuts de Ventealapropriete. »

Coup de cœur sur Ventealapropriete « Marquis d’Aligre, sans hésiter ! J’achète ce margaux tous les ans, à chaque vente, et je le bois avec mon fils, car nous sommes des fans absolus tous les deux. »

Bouteille culte « J’ai récemment bu un Vosne-Romanée 1er Cru Les Beaumonts 2012 d’Emmanuel Rouget, absolument délicieux, et le même soir, un Beaune 1er Cru Grèves Vigne de l’Enfant Jésus 2002 de Bouchard Père et Fils… somptueux. »

Le + « Je consulte la newsletter quotidienne et je fais ma sélection en trois minutes, la logistique est impeccable, les bouteilles toujours bien emballées et les délais parfaits. »

« Un prix très abordable pour la Bourgogne. »

François Crochet

Vigneron à Sancerre, en Val de Loire

« Je consulte la newsletter quasiment tous les jours et je me laisse tenter au gré des opportunités. » François Crochet, tête de pont de Sancerre, dans le Cher, cible tous azimuts, hormis la Loire, bien sûr, mais aussi la Champagne, car il y compte de nombreux amis, dont Maxime Toubart et Yann Alexandre, bien présents sur Ventealapropriete. « Dernièrement, j’ai acheté des rouges du Piémont (de Sottimano) et du moscato d’Asti. Et puis l’année dernière, j’ai acheté pas mal de Primeurs 2022 de façon compulsive ; jusque-là je ne buvais pas tellement de bordeaux, mais un ami de mon fils nous avait apporté un Château Lynch-Bages 2001 excellent ; cela m’a évoqué les très beaux cabernets de Loire et j’ai craqué pour le domaine et quelques autres… » Régions de cœur aussi, le Rhône et la Bourgogne, même s’il y regrette l’envolée des prix.

François Crochet préfère alors se rabattre sur des pépites comme Camin Larredya, à Jurançon, ou Klein Constantia, en Afrique du Sud, deux liquoreux cultes.

Dernière commande « Des italiens de Sottimano et du moscato d’Asti pour mon fils, qui voulait goûter cette bulle. »

Coup de cœur sur Ventealapropriete

« Un Beaune 1er Cru Rouge 2018 de la Maison Roche de Bellene. C’était vraiment très bon, et à un prix très abordable pour la Bourgogne. »

Le + « J’ai toujours eu une très bonne expérience de livraison. Mon seul bémol : l’achat par six bouteilles. Parfois, j’aimerais découvrir une cuvée avec seulement trois bouteilles, par exemple. »

VÉRONIQUE RAISIN /

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Racines
Photos : Raphaël Reynier, Michaël Boudot, Pauline Théon Ci-contre : François Crochet et son épouse, Carine.

Ventealapropriete et vous

Engagement, réactivité, confiance et écoute sont au cœur de la relation au long cours que nous entretenons avec vous ; et pour toujours vous satisfaire, nous poursuivons le développement des services premium qui vous sont dédiés.

Parrainer ses amis vivant à l’étranger, c’est possible !

Ventealapropriete élargit ses horizons : nous proposons désormais la livraison dans d’autres pays que la France, au sein de l’Union européenne – Belgique, Italie, Allemagne aujourd’hui, Pays-Bas et Portugal très prochainement. Et d’autres vont s’ajouter à cette liste ! Dès son inscription, chaque filleul reçoit un bon d’achat et lors de sa première commande, à votre tour d’en recevoir un. C’est le moment de parrainer vos amis expatriés ! Accessible simplement depuis Mon compte > Parrainage.

Suivez en temps réel l’état de votre commande

Vous proposer la meilleure expérience possible avec Ventealapropriete nous tient quotidiennement à cœur. C’est pourquoi nous travaillons sans relâche sur des améliorations et de nouvelles fonctionnalités. Vous l’aurez peut-être remarqué, vous pouvez désormais suivre l’état de votre commande jusqu’à son expédition en cliquant sur Mon Compte > Mes commandes.

Scannez ici

Cet article page 36 vous donne très envie de goûter le vin évoqué… Les pépites de nos acheteurs, pages 56-57, attisent votre curiosité ? Scannez ce QR code pour retrouver, sur le site, une sélection de bouteilles présentées dans ce magazine.

Anticipez vos cadeaux d’entreprise

Cette tâche de fin d’année peut s’avérer fastidieuse. Pourquoi ne pas l’anticiper dès à présent ? Nous vous proposons un accompagnement clé en main pour vos cadeaux d’entreprise : vous passez une seule commande et nous effectuons les livraisons. Au sein du large catalogue, entre nos coffrets, nos spiritueux ou encore nos verres de dégustation, vous trouverez forcément le cadeau idéal correspondant à votre budget. N’hésitez pas à nous faire votre demande en Page d’accueil de notre site > Services.

MERCI DE VOTRE FIDÉLITÉ !

Nous vous o rons, avec ce numéro, une remise immédiate de 25 €* grâce au code RACINES8

* À valoir pour une commande sur tout le site, hors primeurs, d’un montant minimum de 250 € d’achat. O re valable jusqu’au 30/08/2024.

Racines 11 Illustration Anaïs Lefebvre Services

Une bouteille dans le détail

C’est un partenariat unique, noué de longue date par Ventealapropriete avec l’une des adresses les plus en vue de Provence : Domaines O *. Ce Bandol Rosé 2023 est le fruit de ce e collaboration inédite. Décryptage.

Dans le acon

Liant 56 % de grenache, 40 % de mourvèdre et 4 % de syrah, ce rosé a rme la profondeur du terroir d’altitude de Bandol, posé sur des sols de marnes et de calcaires. Il propose une parfaite symbiose entre des notes fraîches d’agrumes et de  eurs blanches et une matière juteuse et ample. « Les grands rosés de Provence expriment ce caractère a rmé qu’o re le mourvèdre. Ce sont des vins de gastronomie, indéniablement », précise Olivier Poussier.

Le millésime 2023

Millésime d’équilibriste marqué par la sécheresse, 2023 a livré des vins généreux et suaves. La chaleur a bien convenu au mourvèdre qui nécessite un fort ensoleillement et s’accommode des climats secs. L’altitude a préservé des excès et des blocages de maturité, o rant des jus croquants et parfumés, aux couleurs claires, tenus par de belles acidités.

Terre de pierre et de soleil « Ici, la force des terroirs d’altitude se révèle avec le temps et les vertus d’une viticulture douce et respectueuse. On se croirait en Toscane, inondés de lumière et suspendus au-dessus de la mer », décrit Jean-François O . Baigné de soleil et ouvert sur le rivage, ce terroir mêlant marnes et calcaires donne naissance à des rosés uniques, complexes et structurés.

Une création sur mesure

Nous sommes les seuls à avoir noué un tel partenariat avec l’un des domaines références de l’appellation. Re et du terroir méditerranéen et de nos convictions, ce Bandol Rosé a été conçu sur mesure, selon nos critères, avec le concours du Meilleur sommelier du monde : Olivier Poussier a retenu ses lots préférés de Bandol des Domaines O * pour forger ce e cuvée unique.

Viser haut By.O

Fondés en 1896 par Marcel O , les Domaines O * se partagent entre côtes de Provence et Bandol, au milieu d’une nature enchanteresse où les roches cristallines émergent face à la mer. Cet éden choyé par la quatrième génération de la famille est conduit en culture biologique et en biodynamie, impliquant des choix audacieux. Ce e marque forte et pionnière, reconnaissable à sa bouteille spéci que, a en e et très tôt adopté des codes d’exception qui aujourd’hui font école.

L’appellation Bandol

Créée en 1941, elle se blo it contre les rives de la Méditerranée, dans le Var. Si l’on y produit des vins dans les trois couleurs, le rosé reste majoritaire, avec près de 80 % des volumes. Le mourvèdre y règne en maître et infuse structure et parfums dans les acons.

« Nous associer à ce e belle maison était naturel pour nous, étant donné les valeurs d’exigence et de respect de la nature qui l’animent et qui rejoignent nos codes d’excellence. Nos échanges ont donc abouti, dès 2016, à ce e création originale forgée par nos expertises communes. Tous les ans, nous renouvelons ce e exclusivité ! » Maël Vincent, Acheteur Ventealapropriete

12 — Racines
Anatomie

On coche la cave déco

LE MONDE se divise en deux catégories : ceux qui en possèdent une et les autres. Il faut dire que les modèles de caves à vin « à la papa » – trop imposants, trop techniques, bref, pas toujours accessibles – ont du mal à trouver leur place dans un habitat moderne. C’est pour cela qu’est née Goguette. La marque française, issue du géant EuroCave, se destine à celles et ceux qui veulent profiter pleinement et rapidement de leurs quilles à température idéale et de leurs grands crus après conservation optimale. Chez Goguette, le design sobre et élégant est au service du vin et de ses amoureux. Et peut aisément s’exposer au centre du salon. Trois tailles, trois couleurs, deux types de portes, le tout avec un système de clayettes pratiques et astucieuses : Goguette mise sur l’essentiel sans compromis sur le niveau de fabrication « made in France ». goguette.com

Vivre la vie de château

CHAMPION de Madiran, Château Montus accueille pour la troisième année consécutive ses « Nuits Impériales », une manifestation conviviale au cœur de son vignoble. Au programme : visite du domaine et dégustation en musique, conférence et bien sûr, gastronomie autour de produits locaux issus de la ferme de Montus et du potager de Bouscassé. Stéphane Carrade, chef doublement étoilé sera, cette année encore, à l’origine des menus. Banquet médiéval ou pique-nique dans les jardins rythmeront les soirées, avant un grand spectacle son et lumière projeté sur l’une des façades du château. Laurence et Alain Brumont, propriétaires des lieux, ont souhaité plonger les visiteurs dans une atmosphère gasconne authentique en valorisant le patrimoine local, humain et environnemental. Trois jours de festivités hauts en couleur ! « Nuits impériales », les 12, 13 et 14 juillet 2024. Spectacle et repas sur réservation. Spectacle : 30 € ; banquet médiéval + spectacle : 80 € ; pique-nique + spectacle : 50 € (05 62 69 74 67 et brumont.fr).

Le Vin De France autrement

DU 23 JUILLET au 4 août prochain, l’association Vin De France (Anivin) investit Paris et installe sa résidence rue de Rivoli et au cœur d’une trentaine de spots ensoleillés de la capitale. Au programme, une exposition inédite, fruit d’un appel à créations destiné aux jeunes illustrateurs, mettra en lumière les 24 œuvres des six artistes sélectionnés. Chacune

interprètera à sa manière le thème de la biodiversité dans les vignes et la devise « Liberté, qualité, créativité » chère à Vin De France. Ateliers dégustations, soirées thématiques… Dans un rayon de 20 à 30 minutes à pied de l’exposition, les amateurs de bons vins et de cocktails pourront ensuite découvrir des créations mixo-

logiques originales – Flower Rosé, Merlot Mule, Sauvignon Special… – valorisant les cépages de France. L’occasion idéale pour expérimenter le vin différemment ! « L’art d’illustrer Vin De France », du mardi 23 juillet au dimanche 4 août 2024, de 13h à 20h (fermé le lundi), à la Galerie du 59 Rivoli, rue de Rivoli, à Paris (vindefrancewines.com).

Racines 13 Œnophilie
Photos : DR

De toute Beauté

À la pointe de la viticulture bio, la Corse produit des vins au caractère bien trempé. Leurs atouts ? Trente cépages autochtones, un climat exceptionnel et une longue tradition viticole.

3500h 3500 HEURES / AN

La vie en rosé

Ce n’est pas un énième lieu commun sur l’île française : les deux tiers de la production locale affichent bel et bien cette couleur et ce goût caractéristiques des vacances et des couchers de soleil entre amis.

C’est le nombre de producteurs qui cultivent les 5 800 hectares de vignoble corse. Les domaines les plus récents font aux alentours de 10 hectares quand les plus anciens peuvent aller jusqu’à une cinquantaine d’hectares.

Le roi soleil

Le taux d’ensoleillement sur le territoire est l’un des plus élevés de France (120 jours en 2023 à Ajaccio contre 70 à Paris). Avec le réchauffement climatique, cela pourrait sembler problématique, mais la chaleur a aussi des vertus. L’amplitude thermique apporte de la fraîcheur aux vins. Et surtout, elle prévient l’apparition de maladies telles que l’oïdium ou le mildiou.

Le nombre de bouteilles issues chaque année des vignes corses, disséminées le long du littoral. Cela représente l’équivalent de 358 000 hectolitres de vin, soit environ 1 % du volume de la production française.

Figari-ci, Figari-là

Lorsque les Phocéens, chassés par les Perses, ont fui l’Asie Mineure, en 546 avant J.-C., ils se sont réfugiés sur l’île de Beauté, prenant soin de transporter avec eux un cep de vigne. Le premier vignoble corse fit ainsi son apparition autour de Figari. Il représente aujourd’hui 143 hectares travaillés par neuf vignerons.

Les vignerons corses sont particulièrement engagés dans la conversion en bio : 40 % des surfaces viticoles, de Bastia à Ajaccio en passant par la Balagne, respectent le protocole du label, contre 20 % pour la totalité du vignoble français.

Les 20 piteuses

Entre 1970 et 1990, la Corse perd 20 000 hectares de vignes. En cause, la plantation, dans les années 70, de 14 000 hectares à gros rendements pour lancer une production industrielle. Mauvais calcul, car cette stratégie commerciale coïncide avec une chute de la consommation de vin de table. Les vignes sont arrachées. Les petits producteurs peuvent à nouveau respirer et surtout…  se remettre à faire du bon vin.

Petites gorgées
293
14 — Racines
47M
17 % 16 % 67 % OÙ BOIT-ON LE VIN CORSE ? 35 % 40 %
soleil
20 % Sur
45 % France continentale Export Source : Conseil Interprofessionnel des Vins de
(2023). Infographies :
l'île
Corse
James Eric Jones

CORSE PORTOVECCHIO

La bataille d’Aléria

Alors que l’industrialisation du vignoble insulaire bat son plein au mitan des années 70, des militants de l’Action régionaliste corse (ARC), équipés de fusils de chasse et d’armes de poing, occupent la ferme d’un viticulteur d’Aléria, en Haute-Corse, et prennent quatre travailleurs en otages. Ils accusent des négociants en vin et dénoncent « une énorme escroquerie de plusieurs milliards d’anciens francs, au préjudice de petits viticulteurs ». Six hélicoptères, des blindés, une frégate de la marine, et 1 200 gendarmes seront mobilisés.

Depuis les années 90, les vignerons corses redoublent d’énergie pour redonner ses lettres de noblesse à leur vignoble. Signe de leur succès : les exportations des vins issus de l’île de Beauté ont bondi en 2018.

Polyphonie de cépages

Une trentaine de variétés autochtones sont cultivées sur le territoire. Les neuf AOP locales – moins de 30 % de la production –concentrent quatre cépages (sciaccarellu, niellucciu, vermentinu et muscat petits grains). Les plus endémiques ne sont malheureusement pas reconnus par l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), qui dicte le cahier des charges des appellations. Conséquence : les meilleures cuvées corses sont souvent déclarées en « Vin De France ».

Racines 15
+21 % Data 67 %
Calvi L’Île-Rousse Calenzana Ajaccio Propriano Zonza Lecci Aléria Corte Borgo San-Nicolao Penta-di-Casinca Sartène Figari Bonifacio Porto-Vecchio Piana Appie o Bastia Sisco
AOP CORSE SARTÈNE AOP CORSE FIGARI AOP AJACCIO
CORSE
CORSE CALVI AOP MUSCAT DU CAP CORSE AOP PATRIMONIO AOP CORSE
Rogliano
AOP
AOP
CÔTEAUX DU CAP CORSE
AOP

le goût du risque

Berceau du Vintage Nacional, le porto le plus recherché du monde, Quinta do Noval est la grande porte qui permet d’entrer dans la vallée escarpée du Douro, au Portugal.

Serge Chapuis
Depuis 1715, la Quinta do Noval conserve sa fraîcheur à l’ombre d’un cèdre séculaire.

EN CE DÉBUT DE PRINTEMPS, les flancs de schiste qui bordent le Douro sont à nu. Aucune feuille de vigne ne les habille. Le large fleuve reflète les collines striées de terrasses de pierres sèches, classées au Patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2001. Les bourgeons pointent à peine sur les ceps à perte de vue. Le paysage, sculpté par la main de l’homme depuis des siècles, attend le vert tendre qui se mue en feu dès l’automne et laisse exploser la véritable expression de cette terre : le vin de Porto. Depuis 1715, au cœur du Cima Corgo, à la croisée de trois rivières, au-dessus du village de Pinhão, la Quinta do Noval conserve sa fraîcheur à l’ombre d’un cèdre séculaire. Au milieu des amandiers, des oliviers et des eucalyptus, quelques mandariniers marquent le début des escaliers de pierre qui montent vers cette demeure mythique, lieu de naissance du porto Vintage Nacional, réputé dans le monde entier. « Nos vins sont beaux parce que nos paysages sont beaux », résume José Eduardo Costa, le chef de culture.

Des langues de terre travaillées à pas prudents

Sur les terres escarpées alentour, dans la brume, des silhouettes bêchent les langues de terre de 80 cm de large, une étroitesse qui empêche le passage des machines. Sur les 192 hectares de vignes, toutes sont classées A : elles sont de la meilleure qualité possible sur l’appellation. Beaucoup sont travaillées par Bonito, le mulet conduit par João Jose, laboureur de sol à la quinta depuis 30 ans. À pas lents, homme et bête parcourent les parcelles des cépages les plus nobles de la vallée du Douro : touriga nacional, touriga franca, tinta roriz, tinto cão, sousão. Le vignoble, exposé aux quatre points cardinaux, s’étend de 100 à 500 mètres d’altitude.

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Photos : Serge Chapuis, Leif Carlsson, DR

Dans la vallée du Roncão, derrière la demeure, on en frôle les sommets. José Eduardo opère une marche arrière tonique sur une pente boueuse et escarpée : « On aime prendre des risques dans cette maison. La vivacité du vin de Porto dépend de l’altitude à laquelle on cultive les raisins », explique-t-il en revenant sur une route sûre. Alors que la Jeep est tirée d’affaire, il raconte sa dernière expérimentation, peu commune dans le pays : tailler les vignes en gobelet afin que les raisins exposés ouest soient préservés d’un mûrissement trop rapide grâce aux feuilles qui empêchent le soleil de taper sur les baies. Un autre exemple de la méticulosité prônée ici ? Chaque année et tous les matins durant les vendanges, José Eduardo goûte les raisins avec Carlos Agrellos, le directeur technique. Les deux comparses repoussent toujours la date de vendange pour la parcelle la plus précieuse du domaine : le Nacional.

Le mystère des pieds « francs »

Plantée juste au-dessus des cardanhos – une belle bâtisse où loge le personnel durant les vendanges –, la parcelle compte des cépages en cours d’identification par des chercheurs de l’Université de Trás-osMontes et Alto Douro. On l’appelle Nacional, car le vignoble a grandi sans les porte-greffes américains, il est resté européen. Personne ne sait pourquoi ces pieds, dits « francs », ont résisté au phylloxéra. Leurs feuilles sont plus claires, les baies plus petites et concentrées, le rendement moindre, mais d’une qualité incroyablement supérieure au reste du domaine et même de l’appellation. Certains pensent que le sol de cette parcelle contient du sable, alors qu’il est partout fait de schiste et d’argile ; d’autres, qu’une forme de magie la protège. Carlos Agrellos, José Eduardo Costa, Christian Seely, Directeur général

Ci-dessus : Carlos Agrellos, le directeur technique de la Quinta do Noval.

d’AXA Millésimes (propriétaire de la Quinta do Noval), s’abreuvent de ce mystère pour transcender le vin en le poussant à ses extrémités. Un jardinier dédié s’occupe de la parcelle de Nacional. Elle est vendangée le plus tard possible et vinifiée dans son propre lagar, une cuve traditionnelle de granit, et son propre foudre en bois de 2 500 litres. Dès le premier soir des vendanges, les raisins sont foulés aux pieds dans leur lagar. Durant le corto, les vendangeurs y marchent en ligne, le pas guidé par un homme qui compte très lentement : « Uuune, deuuuux, droiiiite, gauuuche. » Une heure et demie plus tard, commence le foulage dit « de liberdade ». Un accordéon accompagne parfois cette déambulation libre, durant laquelle on papote et on boit… de l’eau.

Une fois foulé, le raisin macère deux à trois jours. Ausenda Matos, œnologue dédiée à la quinta depuis 1994, évalue la qualité de la fermentation selon le nectar qu’elle veut obtenir. « Le vin est vivant, ditelle. Comme avec un enfant, il faut toujours vérifier qu’il est sur le bon chemin. » Le choc des températures entre le vin à 28 °C maximum et l’eaude-vie à 3 °C et 77 % d’alcool arrête la fermentation. Un subtil parcours de tuyau achemine le vin muté vers les tonneaux.

« Nous vinifions le Nacional de la même manière que tous les autres raisins du vignoble, rappelle Christian Seely. Le résultat pour le Vintage Nacional est toujours très différent des autres vins provenant du reste de la quinta. Il est ce qu’il est essentiellement grâce aux raisins et à leur origine et non en raison d’un quelconque procédé qui pourrait être mis en œuvre dans les chais. Son terroir forge sa grandeur. » Déclaré uniquement les années où il se révèle au sommet, le Vintage Nacional est produit en infime quantité (200 à 250 caisses par année de déclaration), ce qui en fait l’une des références les plus recherchées au monde.

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Serge Chapuis

«Le porto, c’est comme les amandes, chaque quinta a sa façon de faire, s’amuse Carlos Agrellos. Ici, elles sont écossées à la demande, blanchies, épluchées, torréfiées au four avec du beurre. Et nos cuisinières ont un secret pour qu’elles soient délicieuses : la porte du four doit rester ouverte durant la torréfaction. »

« Je garde du vin 10, 20 ou 40 ans pour les Tawnies »

Cette culture du sur-mesure inspirée par le Vintage Nacional et les fruits de l’amandier s’étend à plus grande échelle sur tout le vignoble de la Quinta do Noval et donne naissance à un large éventail de variations de portos. Les Ruby, assemblés ou millésimés, vieillissent (deux ans et plus pour les premiers, quatre à six ans pour les seconds) dans des tonneaux allant de 2 200 à 23 000 litres avant d’être mis en bouteille. Les portos Tawny, assemblés et millésimés, vivent entre sept et 40 ans dans des tonneaux de 640 litres, des pipas qui permettent l’oxydation. Les millésimés, dits Colheita, offrent une dernière variation : le vin d’une même année peut être embouteillé de façon différée. Ainsi, le Colheita 2012 a été mis en bouteille en 2023 et pourra l’être à nouveau dans quelques années.

Pour les assemblages, Ausenda Matos compose une large gamme de vins à vieillir et vieillissants. « Il faut être altruiste lorsque l’on fait du porto, car on prépare l’héritage pour l’avenir. Je garde du vin 10, 20 ou 40 ans pour les Tawnies. On travaille pour une autre génération », dit-elle en couvant du regard les trois millions de litres stockés dans les chais. Carlos Agrellos qui compose les vins, complète : « Le stock est le cœur de mon travail. Je dépends de la pyramide des vins pour créer nos assemblages. » Cette variété de références adaptée au caractère

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de chaque vin fait la singularité de la Quinta do Noval et appelle une multiplicité d’expériences de dégustation. « Le pouvoir de vieillissement et de complexification des vins de Porto est magique dans le temps ! » assure Alaric de Portal, Directeur général de Ventealapropriete. « Le Portugal est un vignoble qui bénéficie des mêmes caractéristiques (équilibre, précision de vin) que Bordeaux. Grâce à l’influence océanique, intrinsèquement, il a les mêmes dispositions que le Bordelais. La dégustation d’un Quinta do Noval est un moment d’excellence. En accord, on peut emmener ces vins partout. »

Une tradition précise de dégustation

Il y a toutefois quelques règles incontournables à respecter : garder le vin en cave ; une fois ouvert, le conserver au frais. Traditionnellement, au Portugal, chacun se sert son propre verre et passe la bouteille à son voisin de gauche sans la poser sur la table. Ainsi, on la finit en un repas. Les portos Tawny peuvent se boire plusieurs mois après l’ouverture de la bouteille (si elle est bien fermée). Mais les Ruby se dégustent le jour même ou dans les jours qui suivent l’ouverture. Ces vins fortifiés sont servis à 12 °C afin de souligner leur vivacité, qui s’exprime au mieux avec un fromage aux tonalités de noix ou un dessert. Thomas Blanquer, responsable des achats de Ventealapropriete, note tout particulièrement l’accord réussi entre un Colheita 2012, embouteillé en 2023, et la tarte aux amandes cueillies sur le domaine. Alors qu’Ana Carvalho, ambassadrice des marques d’AXA Millésimes, observe un accord plus inattendu entre le Quinta do Noval Vintage 2021 et une promenade matinale sur le chemin de crête de la vallée du Roncão. En cause ? Le nez prononcé de l’esteva, un buisson local

au parfum ambré et résineux. « Je sens aussi parfois des notes d’eucalyptus dans nos vins, précise Ana. Rien d’étonnant, puisque ces arbres sont présents sur la quinta. »

Cette sensibilité à l’environnement, ce savoir-faire ancestral et minutieux sont des atouts hors pair pour développer une gamme de vins secs, dans une région caillouteuse où le climat tutoie les extrêmes. « Neuf mois d’hiver et trois mois d’enfer », s’amuse Patricia Bastos, responsable du réceptif à la quinta. Plus sérieux, José Eduardo raconte comment les vignes percent le schiste jusqu’à 6 ou 7 mètres de profondeur pour aller chercher l’eau. « Nous n’irriguons plus depuis que nous avons compris que ce phénomène donnait du caractère à nos vins », précise-t-il. Alors que le thermomètre peut atteindre 45 °C en été, on reconnaît bien là l’esprit téméraire de la Quinta do Noval : assumer la prise de risque pour toucher l’excellence.

QUINTA DO NOVAL

Superficie / 192 hectares

Cépages / Touriga nacional, touriga franca, tinta roriz, tinto cão, sousão…

Âge moyen des vignes / 30 ans

Culture / Raisonnée

Type de sol / Schiste et argile

Quinta do Noval, Porto Vintage Rouge 2020.

D’une douceur et d’une sensualité étonnantes, né d’un millésime solaire, ce porto déploie un charme immédiat, avec une grande structure tannique et un très beau volume, coulés dans une finesse remarquable.

23
la
au
À gauche :
Thomas Blanquer
a ouvert un Porto Vintage 2003 à
pince rougie
feu, ce qui permet d’éviter d’y faire tomber du bouchon.
Photos : Marie Aline, Serge Chapuis, DR

la auxpisteétoiles

Changement de braquet chez Albert Morot. Partenaires de longue date du domaine, nous sommes allés sur place sonder les évolutions en cours. L’amorce d’une nouvelle ère qui promet de hisser encore plus haut cette adresse historique de Beaune.

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Texte Véronique Raisin Photos Dorian Prost

DERRIÈRE le portail, pas de panneau clinquant ni d’écriture dorée. La maison semble figée dans le temps, témoin d’une époque faste où sa renommée la plaçait parmi les plus cotées de la Côte. Enraciné dans cet esprit d’artisanat bourguignon, Albert Morot joue la discrétion, car l’essentiel se cache ailleurs, dans les coulisses de ce domaine bicentenaire. Son acquisition, fin 2023, par Sophie et Guillaume Poitrinal amorce un tournant. Des travaux d’agrandissement de la cave et de réfection de la maison débuteront à l’automne, permettant d’ouvrir le lieu aux grands amateurs. Les nouveaux venus ne sont pas des investisseurs lambda attirés par la cote du secteur ; Sophie est originaire de Beaune, où sa famille possède des vignes, Guillaume a navigué dans les sphères du CAC 40 pour se reconvertir dans l’habitat de bureau écologique et s’appliquer à la mise en valeur de ce nouveau patrimoine.

À la pointe de la Bourgogne

Cette adresse historique de Bourgogne n’est pourtant pas une inconnue. Michel Bettane, éminent critique, ne tarit pas d’éloge sur la Maison, dont il accueille quelques beaux millésimes dans sa cave personnelle, des Beaune 1ers Crus, bien sûr, mais aussi la cuvée emblématique, le Clos La Bataillère, sur Savigny-lès-Beaune. « C’est l’une des dernières belles endormies de l’appellation, dont les vins évoluent dans le temps de façon remarquable. »

Créée en 1820, Albert Morot fut l’une des premières Maisons de renom de la Côte. Elle fonda sa réputation sur un négoce de quelque 100 000 bouteilles chaque année, un volume colossal pour l’époque. Au XIXe siècle, rares étaient les domaines de cette taille et Albert Morot excellait déjà dans la sélection des meilleurs jus ; certaines années, 1870 ou 1877, elle achetait toute la récolte de la Romanée Conti…

Restée entre les mains de la même famille, transmise de génération en génération, cette institution beaunoise fut aussi assurée de

1. Vigneron et théoricien du vin (1907-1989).

Albert Morot, 200 ans d’histoire

Créée en 1820 à Beaune à partir d’une activité de négoce, la Maison prend vite de l’ampleur. Les bâtiments sont érigés en 1880 et les activités fleurissent… jusqu’à la crise du phylloxéra, qui détruit le vignoble partout dans le monde et n’épargne pas la Bourgogne au tournant du XIXe siècle. Profitant d’une dépréciation de la valeur des terrains, la famille Choppin de Janvry, héritière, achète les meilleures parcelles sur les terroirs les plus réputés de la Côte, entre Beaune et Pommard. Toute la ligne de crête est visée, avec une incursion sur des vignes plus basses, aux Cent-Vignes, l’ensemble égrainant un impressionnant chapelet de 1ers Crus ultra-prisés.

terroirs de premier ordre, patiemment et intelligemment constitués. En effet, bien avant le classement bourguignon distinguant villages, premiers et grands crus, et anticipant le système des Appellations d’origine contrôlées (AOC) institué à partir de 1936, Albert Morot s’enquit très tôt des meilleurs terroirs de la Côte. À raison, car aujourd’hui, le vignoble bénéficie de très vieilles vignes exceptionnelles, dont plus de la moitié sont issues de sélections massales – l’action qui consiste à multiplier et greffer un sarment issu des meilleurs plants de vignes d’une parcelle afin de favoriser la diversité génétique. Ce patrimoine inestimable, peu de maisons peuvent s’en targuer. Albert Morot dispose d’une collection unique de 1ers Crus : Les Bressandes, Les Grèves, Les Marconnets, Les Cent-Vignes, Les Teurons, Les Toussaints, Les Aigrots, La Bataillère s’agrègent ainsi en chapelet en suivant le faîte de la côte. Ces terroirs magnifiques ont plus tard été répertoriés par Jules Chauvet 1 comme les meilleurs de Bourgogne. Pierre-Jean Villa, conseiller de la Maison depuis près d’un an, égraine ces crus qui composent le vignoble, largement situés sur

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Racines

Beaune, avec une enclave à Savigny-lès-Beaune et quelques arpents à Pommard. Une suite fantastique de lieux-dits parmi les plus réputés.

« Il faut bien comprendre qu’à l’époque de la classification en Grands Crus, ces terroirs étaient bien sûr éligibles. Seulement, pour des raisons purement pécuniaires, de taxes notamment, les vignerons ont refusé le classement et ces terroirs sont donc restés en 1ers Crus ! » relate Pierre-Jean Villa. Vigneron en Côte Rôtie et Condrieu au domaine éponyme, formé en Bourgogne et conseiller affûté, ce dégustateur hors pair dresse un portrait juste de cette belle maison. « Les hiérarchies existaient malgré tout et les vignerons parlaient de “cuvées village”, de “têtes de cuvée” et de “têtes de cuvée extra”. » Sur ce domaine, Albert Morot pouvait aligner les références. Comme le Clos La Bataillère, deux hectares détenus en monopole sur Savigny-lès-Beaune et plantés à 60 % de rouge. « C’est aujourd’hui la meilleure parcelle des Vergelesses de Savigny » écrit La Revue du vin de France. Un Beaune 1er Cru Toussaints exclusif à saisir bientôt

« Albert Morot a toujours été une valeur sûre, poursuit Pierre-Jean Villa, produisant des vins intensément bourguignons. Mais jusqu’à présent, l’export représentait 90 % de ses volumes. C’est sans doute pour cela que la Maison reste un peu moins connue en France, aujourd’hui. » C’était sans compter sur nos fins limiers : Ventealapropriete a su réserver l’exclusivité de la distribution hexagonale à ses membres. « Nous avons à cœur de débusquer ce genre de pépite et de mettre en lumière des domaines méritants que nous aimons. À titre personnel, j’ai toujours beaucoup apprécié les vins d’Albert Morot, vendus sur le site depuis plus de 10 ans », détaille Alaric de Portal, Directeur Général de Ventealapropriete. « Très proches de Pierre-Jean Villa, nous avons été informés en avant-première de ce changement de propriétaire ; nous avons ainsi pu prendre les devants et la mesure

Ci-dessus

: Alaric de Portal et Pierre-Jean Villa, le 20 mars dernier.

du potentiel des cuvées à venir. La Bourgogne reste une terre de secrets où les informations circulent vite, mais dans un cercle restreint ! Nous avons pressenti ce qui allait advenir du domaine, c’est d’ailleurs pour cela que nous avons réservé la primauté d’une cuvée », poursuit-il. Ainsi, le Beaune 1er Cru Les Toussaints 2022, qui s’est particulièrement distingué lors du dernier comité de dégustation, a été sélectionné et réservé en exclusivité pour nos membres. La vigne d’un hectare de pinot noir sera bientôt arrachée et replantée en chardonnay. « Cette parcelle est très qualitative estime Pierre-Jean Villa. Mais pour équilibrer, diversifier et “blanchir” la production du domaine, qui compte actuellement trois quarts de pinot noir, j’ai choisi d’y replanter du chardonnay », justifie-t-il.

Des réglages métronomiques

À ces mises au point au vignoble s’ajoutent quelques ajustements en cave. Libre de vinifier selon sa sensibilité et sa connaissance de la Bourgogne – en la matière, l’homme jouit d’un respect peu égalé –, Pierre-Jean Villa affine les pressurages et les élevages. L’idée n’est pas de déconstruire, mais de pousser plus loin l’exigence pour propulser Albert Morot encore plus haut. « Je travaille avec moins d’extraction, de façon à obtenir plus de finesse dans les rouges, en choisissant une date de récolte optimale. Quant aux élevages, j’ai réduit la part de bois neuf sur les rouges de 30 à 15 %, et acheté beaucoup de fûts d’occasion. Pour les blancs, je suis passé à des contenants de 350 litres, cela permet de retendre un peu les vins. J’ai aussi fait varier la durée de maturation – 12 mois pour les blancs, 14 pour les rouges et 18 pour les 1ers Crus. » En dépit de ces réglages, la philosophie du domaine n’a pas changé : « Ce sont des vins de garde, qui s’expriment parfaitement à 10 ans ; les prochains millésimes seront sans doute prêts plus tôt, avec un tanin légèrement croquant, un fruit juteux et de

l’énergie. » Le tour de cave, pipette et verre en main, le confirme. Les dégustations au fût des 2023, dans les deux couleurs, comblent nos attentes. « Je vais ajouter aussi quelques cuvées en achats de raisin, avec des partenaires que je vais moi-même chercher ; ces cuvées, vinifiées et élevées au domaine, permettront d’étoffer la gamme, notamment sur les blancs, et de proposer un vin d’ouverture plus accessible en termes de prix et de dégustation. » Effectivement, le bourgogne blanc siglé négoce annonce déjà la très haute qualité du projet, avec une sève percutante, fine et fraîche. Le 1er Cru Les Aigrots Rouge affiche un croquant et un délié parfaits, avec de la mâche et une finale acidulée. « Voilà ce que je vise », lâche Pierre-Jean Villa. La Bataillère 2023 et son grain vibrant, ses tanins en relief et sa profondeur sont tout aussi saillants. On adhère totalement et l’on guettera avidement la sortie de ce millésime déjà grandiose !

DOMAINE ALBERT MOROT

Superficie / 8 ha, dont 2 ha de blanc

Culture / Biologique certifiée (AB)

Cépages / Pinot noir (80 %), chardonnay (20 %) Âge moyen des vignes / 40 ans

Type de sol / argilo-calcaire

Production / 55 000 bouteilles

Beaune 1er Cru Toussaints Rouge 2022. Un parfait modèle de 1er cru, concentré, généreux et pur, avec une abondance de notes de griotte et de cerise noire soutenues par un élevage boisé bien intégré.Un pinot éblouissant, de grande vibration, qui pourrait rejoindre les meilleures cuvées de l’appellation

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En haut, à droite : sur ce registre, on peut lire qu’en 1870 et 1877, la Maison a acheté toute la récolte de la Romanée Conti.

le mythe minuty

Grand Cru Classé de Provence, en 1955, ce domaine a toujours su entrer en résonance avec le goût de l’époque et incarner, avec allure, l’univers de la French Riviera.

Success-story Texte Sylvie Berkowicz

À UNE POIGNÉE DE KILOMÈTRES du port de Saint-Tropez, à bord de sa voiture, un couple de touristes étrangers remonte au pas l’allée qui, au centre des vignes, mène à la boutique et à la salle de dégustation de Minuty. Côté passager, elle filme par la fenêtre le paysage qui défile. Ils ne sont pas venus ici par hasard. Et veulent découvrir in real life cette adresse star de Saint-Tropez. Pour une certaine clientèle, celle des plages de Pampelonne et des terrasses d’hôtels de luxe, il y eut un moment où, au lieu de commander un simple rosé, on s’est mis à préciser « un Minuty ». Dans le golfe de Saint-Tropez, puis sur toute la Côte d’Azur et enfin à Paris, New York, Los Angeles et Miami, le mot s’est propagé. Car il fait toujours beau, chaud et soif, quelque part dans le monde. Minuty, c’est en tout 200 hectares de vignes situées sur les coteaux des villages de Gassin et de Ramatuelle, dominant le golfe de Saint-Tropez. Les cuvées du château sont vinifiées sur le domaine historique fondé en 1936, la partie négoce dans une grande cuverie ouverte en 2018 à Brignoles, pour un total de près de neuf millions de bouteilles par an.

Le grenache en majesté

« Il m’a fallu 20 ans pour réussir à mettre un nom sur une couleur », déclare d’emblée François Matton qui, dans la fratrie, est l’homme du marketing. Faire un bon vin, mais un vin glamour a été, dès son arrivée, une stratégie assumée. Avec son frère Jean-Étienne, il prend, au début des années 1990, la relève de leur père, Étienne Matton. « Papa avait déjà pour clients tout le port de Saint-Tropez et les plus importants

Toujours un coup d’avance

Pour augmenter sa production et la diversifier — en blanc et, dans une moindre mesure, en rouge —, Minuty a acheté 40 hectares qui seront exploitables dans huit ans. Des vins visant à atteindre des tables d’exception que le rosé, aussi bon soit-il, ne parvient pas à convaincre. « Nous essayons de faire des rosés de gastronomie qui, sans passer en barriques, offrent un peu plus de gras… Mais ça restera une niche », concède François Matton. « Nous travaillons davantage sur les blancs. Nous avons créé en 2022 un rouge nommé Gabriel, d’après notre grand-père, comptant 90 % de syrah et 10 % de grenache, entièrement élevé en barriques neuves. C’était une toute petite production de 4 000 bouteilles. Mon frère et moi nous souhaiterions également la décliner en blanc, en la nommant Jeanne, le prénom de notre grand-mère. » Comme un dernier hommage au couple Farnet par qui tout a commencé, en 1936.

établissements de plages : le Tahiti Beach, le Moorea, Le Club 55… Mais le rosé, c’était encore le petit vin du coin. Il m’a fallu 10 ans pour passer de “petit rosé” à “rosé” et encore 10 de plus pour passer de “rosé” à “Minuty”. » Avant de vendre du rêve et le mythe de Saint-Tropez, il leur a d’abord fallu accroître la qualité des vins. Grâce à l’encépagement, un travail déjà entamé par leur père, en optant pour les traditionnels tibouren, rolle et surtout grenache. « Nos vins sont à plus de 60 % de grenache, ce qui n’était pas le cas auparavant, poursuit François Matton, c’est lui qui est au cœur de l’identité de nos cuvées, leur apportant ce côté

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Photos : Zoe Fidji, Hervé Fabre

Les cuvées Château Minuty sont élaborées à partir de raisins récoltés à 100 % en vendange manuelle. Égrappé et foulé, le fruit est ensuite refroidi grâce à un générateur de glace carbonique permettant d’abaisser la température très bas et très vite. En quelques secondes, le raisin passe de 25-26 °C à 12 °C. Après un pressurage doux, les jus sont séparés en trois parties : les gouttes (destinées aux cuvées Château), les presses et les fins de presses. Après une nuit de décantation à froid (autour de 10 °C) dans les anciennes cuves de béton, les jus sont mis en cuves d’inox pour la fermentation. Elle se fait sur une dizaine de jours, toujours à basse température, avec très peu d’interventions. Les vins sont soutirés rapidement, puis assemblés. Aucun élevage sur lie ni en barrique, afin de préserver au maximum leur fraîcheur, le but étant de minimiser le temps entre la vinification et la commercialisation. C’est ce côté frais, sans sucrosité, sans lourdeur ni amertume, qui a fait le succès de la Maison.

« Minuty a réussi à donner accès au plus grand nombre à un rosé de qualité, en le démocratisant, mais aussi en le codifiant, avec l’assurance pour les amateurs que chaque bouteille est réalisée dans les règles de l’art »,

précise Christian Martray, sommelier et membre du comité de dégustation de Ventealapropriete. « Choisir une bouteille de Minuty, c’est avoir un vin qui est non seulement conforme à l’appellation, mais qui a 100 % de chances de séduire par sa fraîcheur, sa précision, ses tonalités aromatiques. Un rosé désaltérant, ciselé, appétant, mais surtout pas insipide. Un vin capable de remplacer un blanc à l’apéritif, mais qui peut aussi tenir tout un repas. Avec des grillades, des poissons grillés et même des tartares, ça fonctionne très bien. »

Un rosé qui flirte avec le champagne

C’est ainsi que Minuty devient la star des étés – où qu’ils soient sur la planète –, un vin de soif devenu le « champagne all day ».

Le déclic ? « Je dirais que le Rose et Or, sorti en 2005, a permis de propulser Minuty au top, précise François Matton. C’est lui qui a donné un coup de boost à la maison en devenant LA référence des rosés. Comme l’est par exemple aujourd’hui le Blanc de Blancs de Ruinart. » En gagnant en prestige, le rosé Minuty s’installe du matin au soir au premier rang des terrasses, de Capri à Miami. D’autant plus qu’il soigne aussi son image. La bouteille Cuvée 281, par exemple, dont le haut a été comme trempé dans une peinture bleue (n°281 du nuancier Pantone), est clairement conçue pour faire la belle. « Le 281, c’est un petit Dom Pérignon, avance François Matton. Vous avez tout ce qu’il faut avec cette bouteille : un habillage unique, une visibilité de loin. Même dans un seau à glace, vous la reconnaissez ! ». Le parallèle avec le champagne est pertinent, car ce sont bien les mêmes mécanismes statutaires qui sont ici mis en œuvre. « Je n’ai eu de cesse que de suivre mes clients là où ils allaient en vapêche et fruit. Nous ne voulions pas aller vers la barrique, la structure, mais plutôt sur l’élégance et la légèreté. Coup de chance, c’est ce que les gens ont aimé. Notre succès, nous le devons d’abord aux consommateurs. Ils sont venus en vacances ici. Ils ont découvert ces rosés, se sont fait plaisir, puis sont rentrés chez eux à New York, en Allemagne ou en Angleterre, où ils ont demandé aux restaurateurs, aux cavistes, du rosé de Provence. Or ils n’en avaient pas. Mais quand un deuxième, troisième ou quatrième client leur en a réclamé, ils se sont dit qu’il fallait peut-être s’y intéresser. »

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cances. Nous avons constamment cherché à être présents dans les endroits clés. Mon père m’a toujours dit : “Il ne faut pas être le vin à la mode, il faut être dans les lieux à la mode.” Si vous apportez une bouteille de Minuty à un dîner, vos amis vous en seront sincèrement reconnaissants. Vous êtes sûr de ne pas vous tromper et vous ne serez jamais déçu par la qualité. Et sur 30 ans, la constance, c’est un boulot de dingue ! ».

« Une locomotive pour la région »

Si rien ne semble avoir bougé au domaine – la chapelle construite en 1865, la belle bâtisse Napoléon III –, une étape importante vient d’être franchie. Après des années de rumeurs, la nouvelle est enfin annoncée, en février 2023 : LVMH achète la majorité des parts de l’entreprise. Déjà distributeur des vins Minuty en Asie, Moët Hennessy courtisait les frères Matton depuis une dizaine d’années. « Il est arrivé le moment où en tant que maison indépendante, j’avais touché un plafond de verre, révèle François Matton. D’autant plus que la quatrième génération (celle de mes enfants) est encore trop jeune pour la reprendre. Il était donc pertinent de céder la maison si on ne voulait pas redescendre. J’ai maintenant l’assurance que la marque existera toujours dans 50 ou 100 ans. Moët Hennessy va nous aider sur l’Asie, un marché sur lequel il faut entrer par de la formation et du marketing. Ils savent le faire, alors que moi, je ne connais personne en Chine. C’est la force de monsieur Arnault, de réfléchir avant les autres. Avec l’acquisition de Château d’Esclans et de Minuty, il possède les deux leaders mondiaux. Là où ils sont forts avec leurs champagnes, ils vont l’être aussi avec leurs rosés, car ils s’adressent aux mêmes clients. »

Consolider la marque, l’amener encore plus loin, c’est ce que souhaite François Matton qui accompagne la propriété jusqu’en 2025,

mais ne serait pas contre le fait de rester un peu plus longtemps. La stratégie de monter encore et toujours en gamme via des partenariats avec des marques comme Celine et Louis Vuitton (LVMH) est déjà perceptible.

« Par son travail, Minuty a été une locomotive pour la région, en particulier l’appellation Côtes de Provence, conclut Christian Martray. Nous le constatons, car il est toujours plus compliqué de proposer de très beaux rosés hors Provence. Et parce qu’il fait de plus en plus chaud, on a encore plus envie de vins désaltérants, avec une fraîcheur naturelle. Le rosé a de beaux jours devant lui, d’ailleurs, si tous les vignobles dans le monde essayent d’en faire, c’est parce qu’ils savent que ça fonctionne ! ».

CHÂTEAU MINUTY

Appellation / Côtes de Provence

Production / 9 millions de bouteilles

Surface plantée / 65 ha d’un seul tenant à Château

Minuty, complétés par 120 ha à Vidauban et 15 ha sur les coteaux de Val de Rian, à Ramatuelle

Cépages / Grenache (majoritairement) et tibouren pour les rosés ; syrah, mourvèdre pour les rouges ; rolle pour les blancs

Type de sol / Calcaire, schisteux et argilo-calcaire

Château Minuty Côtes de Provence Prestige Rosé 2023

C’est un rosé fédérateur, aux notes vives d’écorce de pamplemousse et de fleurs blanches délicates.

Une bouteille qui égayera à merveille vos apéritifs et moments de fête.

Ci-dessus : Anne-Victoire Matton entourée de son oncle, François (à gauche), et de son père, Jean-Étienne (à droite).

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Photos : Camille Moirenc, Roberto Frankenberg

monsieur l’ambassadeur

En l’espace d’une trentaine d’années, Pascal Jolivet, figure de l’appellation Pouilly-Fumé, est parvenu à installer son nom sur les tables du monde entier. Rencontre avec celui qui a su traduire les vins blancs de Loire en « plaisir immédiat ».

Texte Léo Bourdin Photos Anaïs Boileau

LE TRAIN À DESTINATION de la vallée de la Loire est parti tôt ce matin, depuis la gare de Paris Bercy. Peu après avoir pris place à bord, Alaric de Portal, Directeur Général de Ventealapropriete, consulte le programme de la journée de travail qui l’attend : son rendez-vous avec Pascal Jolivet, d’ici quelques heures, ainsi que la visite des différentes parcelles qu’il possède en appellation Pouilly-Fumé. Viendra ensuite la séance de dégustation au sein du chai de la Maison Jolivet, à Sancerre, pour sélectionner les jus qui donneront naissance à une cuvée inédite. Élaborée en collaboration avec le vigneron et exclusivement réservée aux membres de Ventealapropriete, elle incarnera cette relation étroite entretenue par les deux depuis une dizaine d’années déjà.

« C’est impressionnant, on retrouve les vins de Pascal Jolivet aux quatre coins de la planète et à chaque fois, dans les meilleurs endroits. Ses vins trônent autant dans les bains de foule à Ibiza qu’ils siègent en sénateur sur les cartes des étoilés parisiens… Si un nouveau restaurant à la mode apparaît en Thaïlande, vous pouvez être sûr qu’il y sera, plaisante Alaric de Portal. C’est un fantastique ambassadeur, un commerçant hors pair, c’est le meilleur VRP des vins ligériens qu’on puisse avoir, tout le monde le reconnaîtra. Et il a une autre force, c’est celle d’écouter les consommateurs. Il n’impose pas son style, il fait le vin qu’il aime, mais il le forge grâce aux retours qu’il a de ceux qui le consomment, c’est très fort. »

Passé la gare de Gien, les contours des vignobles de Sancerre et de Pouilly se dessinent progressivement. Implanté sur ces deux terroirs depuis 1993, Pascal Jolivet y possède et exploite une centaine d’hec-

Ci-contre : cuverie Pascal Jolivet, à Sancerre.

tares de vignes. Par la fenêtre, sur la droite, on devine les collines du Sancerrois et son ensemble de coteaux protégés par les vents. Sur la gauche, côté Pouilly, un discret halo de brume enserre les pieds de vigne et les fond dans la végétation environnante. De ce côté-ci de la Loire, on produit deux vins blancs secs : l’un à partir du cépage chasselas, le Pouilly-sur-Loire ; l’autre, plus célèbre, à partir du cépage sauvignon blanc, le Pouilly-Fumé. Les grains de ce cépage sont ici recouverts d’une petite pruine grise, comme une fine pellicule de suie, dont la couleur fait penser à des volutes de fumée. Une caractéristique qui a donné son nom à l’appellation Pouilly-Fumé – à ne pas confondre avec sa cousine Pouilly-Fuissé, quasi un homonyme, qui fait référence à un vin blanc du Mâconnais réalisé à partir de chardonnay.

Un parcours à rebours du chemin tracé

Arrivés en gare de Tracy-Sancerre, nous grimpons dans la voiture de Pascal Jolivet pour partir à la découverte de ses différentes parcelles en Pouilly-Fumé. Alors que nous roulons aux abords de Tracy-surLoire, notre attention se porte sur un vieil édifice de pierre de style Renaissance. « C’est ici, au Château de Tracy, que l’aventure viticole familiale a pris racine, rembobine Pascal Jolivet. Mon grand-père, Lucien, et son frère Louis y ont longtemps officié comme chefs de cave avant de créer leur société de négoce, en 1926. Puis c’est mon père, Jacques Jolivet, qui a repris le flambeau en développant l’activité et en créant une structure de distribution de boissons, avant de me transmettre à son tour la passion. » Il prend un moment pour évoquer son entrée dans le monde du vin :

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de son premier poste d’agent commercial pour la Maison de Champagne Pommery, à 22 ans, qui lui a permis de développer un carnet d’adresses solide, jusqu’au jour où il s’est lancé dans le négoce, en 1987. Cette année-là, durant laquelle il s’est véritablement installé, il a commencé à produire ses bouteilles en nom propre, avant d’acquérir, par l’entremise de son père, quelques années plus tard, ses premiers six hectares de vignes. Alors que la plupart des vignerons commencent généralement leurs carrières dans les vignes, au contact de la terre, avant de développer ensuite leur activité, Pascal Jolivet effectue le chemin inverse. Dès ses premières années d’activité, au début des années 1990, il investit dans des méthodes de viticulture et de vinification modernes et fait appel à l’expertise d’œnologues pour mettre au point des vins qui répondent exactement aux attentes du marché. C’est son don pour l’art du négoce, combiné à une parfaite connaissance du terroir et à sa capacité à produire des vins ciselés qui l’ont conduit vers le succès. La marque et la signature Maison Jolivet étaient nées.

Au détour d’une petite route de campagne, nous effectuons un stop aux Étangs et aux Froids : deux parcelles de vieilles vignes orientées à l’ouest, face à la Loire, qui entrent dans la composition d’Indigène, l’une des plus fameuses cuvées de la Maison Jolivet en Pouilly-Fumé. Nous filons ensuite non loin, sur les hauteurs du village de Boisgibault. C’est sur cette terre argilo-calcaire que Pascal Jolivet a acquis ses premières vignes en Pouilly-Fumé, en 1995. La parcelle en question – 6,5 hectares – jouit d’une belle orientation sud. Les grains

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récoltés ici servent à produire la cuvée Terres Blanche, un autre bestseller de la Maison.

Il est temps de prendre la direction de la cave, située sur l’autre rive de la Loire, au pied du village de Sancerre. Au moment de quitter les terres du Pouilly-Fumé, Pascal Jolivet évoque l’évolution de l’appellation au cours des dernières décennies : « À l’international, elle souffre parfois de sa comparaison avec Sancerre. Pour les non-francophones, ça reste un nom assez difficile à prononcer. C’est pourquoi j’ai toujours à cœur de mettre en avant et de réhabiliter ce terroir. À l’époque de la fameuse Route nationale 7, qui reliait Paris au sud de la France, c’était davantage le Pouilly-Fumé qui était sur le devant de la scène. Toute la France passait par ici et on dégustait le “Blanc Fumé de Pouilly” dans les trois ou quatre restaurants étoilés que comptait le village de Pouilly. »

Faire rimer la technique et le caractère du terroir

Arrivé à l’entrée de sa cave, Pascal Jolivet s’attarde devant un gigantesque pressoir en bois de plusieurs mètres de haut, daté de 1826, qu’il a conservé en exposition. « Ce pressoir, témoin d’un autre temps, raconte quelque chose de ma philosophie en matière de vinification : quelque part entre tradition et modernité, explique-t-il. On peut être moderne, mais il faut garder en tête que la meilleure manière de savoir où l’on veut aller, c’est de ne jamais oublier d’où l’on vient. » Nous poussons désormais la porte d’un bureau aux allures de poste de pilotage aérien. Dans cette grande pièce dédiée au travail des œnologues de la Maison Jolivet figurent des ordinateurs, un poste de dégustation,

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ainsi que de larges consoles qui permettent de réguler la température des cuves à distance : « Une manière d’apporter de la technique tout en laissant s’exprimer le caractère du vin et de son terroir. » Ici, depuis le début des années 2000, le style de vinification des jus est le même : pas de soufre avant la fermentation et aucun ajout d’enzymes ni de levures exogènes. Au fond de la salle, une grande baie vitrée offre une vue plongeante sur la cuverie. Un immense espace où cohabitent différents contenants (cuves inox, demi-muids en bois de chêne, amphores, dames-jeannes et œufs en béton). Verre en main, Pascal Jolivet et Alaric de Portal se lancent dans la dégustation des derniers millésimes de Pouilly-Fumé, échangent leurs notes, partagent leurs impressions. Plus tard, ils dégageront les premières tendances d’assemblages et dessineront les premiers contours de la cuvée collaborative entre la Maison Jolivet et Ventealapropriete.

Avant de partir, on interroge Pascal Jolivet sur un sujet plus vaste que l’appellation qui l’anime : quelle est, selon lui, la définition d’un bon vin ? « J’ai toujours imaginé faire du vin qui puisse plaire instantanément. Je n’ai jamais eu la prétention de produire le meilleur vin du monde, car c’est une notion très subjective. Ce qui m’importait, c’était avant tout le plaisir du goût ; c’était de trouver l’équilibre idéal entre le fruit, l’acidité et l’alcool ; c’était de parvenir à être reconnu pour un style. Et ce style, c’est un mélange d’énergie et de subtilité, sans lourdeur ; un plaisir immédiat, quelque chose qui parle au plus grand nombre. En fin de compte, je suis parvenu à réaliser mon objectif initial : faire le vin que j’ai envie de boire. »

Il faut croire que ce credo a porté ses fruits, car ses vins ont in-

tégré le top 100 des Luxury Lifestyle Awards, un programme qui recense et récompense les marques de vins et de spiritueux parmi les plus prestigieux du monde. Ses cuvées de Pouilly-Fumé sont à la carte des plus belles tables, en France (Lucas Carton, Troisgros, Pierre Gagnaire, pour ne citer qu’eux), comme à l’étranger (les restaurants du Groupe Hyatt, le Mandarin Oriental, à Tokyo, ou l’Eden Rock, à Saint-Barthélemy), ainsi qu’à bord des classes affaires de grandes compagnies aériennes. Et si certains en doutaient encore, le style Jolivet est si remarquable que le mythique domaine sud-africain Klein Constantia a fait appel à son talent pour réaliser une cuvée de sauvignon blanc baptisée « Métis ».

DOMAINE PASCAL JOLIVET

Appellation / Pouilly-Fumé

Superficie / 32 hectares

Cépages / Sauvignon blanc ou « Blanc fumé de Pouilly »

Âge moyen des vignes / Entre 20 et 30 ans

Terroir / Sable, argile à silex, argilo-calcaire

Production / 200 000-250 000 bouteilles

Pascal Jolivet x Ventealapropriete, Pouilly-Fumé Blanc Fumé

Blanc 2023. Porté par les terroirs d’argiles et de silex, ce sauvignon floral et croquant épate par sa pureté, ses parfums délicats de fruits blancs et sa belle finale saline, tonique et tranchante. Un délice universel !

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Ci-contre : échantillon argilo-calcaire typique des parcelles du domaine. Ci-dessus : Alaric de Portal et Pascal Jolivet, en mars dernier.

Grégory Marchand UN VERRE AVEC…

Chef pop et engagé pour le respect de la planète, il applique ses préceptes à la carte des vins de son restaurant parisien, Frenchie, une étoile Michelin.

Parlez-nous de cette bouteille…

C’est la cuvée Statera de Jérôme Bretaudeau, un pur pinot noir du vignoble nantais qui rivalise avec les grands bourgognes, travaillé en biodynamie, comme l’ensemble de son domaine. J’ai grandi à Nantes, j’ai été élevé au muscadet et au gros-plant, qui sont tombés dans l’oubli.

La première fois que j’ai goûté le Statera, c’était à l’aveugle. Il était dans sa chaussette et tout de suite, je suis parti en Bourgogne. Sa robe pinote. Le pinot noir est mon cépage préféré. Donc je pensais que c’était un bourgogne et là, je découvre que ça vient de mon pays ! [Il goûte, ndlr]. Il faut qu’il s’ouvre, il n’a pas eu le temps de se réchauffer.

Qu’est-ce que vous aimez dans le pinot noir ? Sa buvabilité. J’aime les pinots noirs d’Alsace, de Bourgogne, de Champagne. Si on parle d’un champagne, par

exemple. À boire seul, un blanc de blanc, 100 % chardonnay, non dosé, c’est frais. Mais pour un accord avec la cuisine, je préfère les assemblages. Dans un chardonnay-pinot meunier-pinot noir, le pinot noir va apporter du corps et c’est là que ça résonne avec la fraîcheur de nos plats.

Pourquoi avez-vous passé votre certification en vins WSET 2 ?

C’était il y a 20 ans, je travaillais chez Jamie Oliver et le sommelier me faisait découvrir des choses incroyables. J’appréciais, mais je ne mettais pas les bons mots dessus, je ne connaissais pas la technique, les cépages, je ne pouvais pas analyser. J’ai pris des cours du soir pendant quelques mois, ça m’a permis d’évoluer, d’aller plus loin dans ma compréhension des vins.

Qui est Aurélien Massé pour vous et quel rôle joue-t-il dans votre relation aux vins ?

C’est mon oncle connaisseur, mon mentor. C’est ma famille.

Au tout début de Frenchie, je faisais la carte des vins moi-même puis il y a eu Laura Vidal [ élue sommelière de l’année par le Gault & Millau, en 2020]. Aurélien est arrivé, il y a 13 ans, comme chef sommelier du bar à vins. Il m’a beaucoup appris, avec sa culture traditionnelle. Je l’ai emmené à plusieurs éditions de la Dive

Bouteille [le plus grand salon de vins nature]. Au fil du temps, il y vient de plus en plus. Je le guide sans rien lui imposer et il garde le cap en sélectionnant des vins plus conventionnels. Je lui fais une confiance aveugle.

Comment choisissez-vous les vins qui figurent à la carte ? Il y a cette phrase de Jacques

Puisais [célèbre biologiste et œnologue, 1927-2020] que je répète parce qu’elle dit exactement ma pensée : « Je veux des vins qui aient la gueule de l’endroit où ils sont nés et les tripes de ceux qui les ont faits. » C’est ce que je cherche dans un vin, qu’il soit nature, conventionnel, biodynamique… Mon curseur, je le place sur le vigneron qui prend soin de ses terres, qui donne au besoin un coup de main dans les vignes. On s’adapte aussi à la clientèle. On lui impose déjà un menu unique, donc c’est important qu’elle ait du choix, entre vins nature et plus conventionnels, petite maison, grande maison… Aurélien maîtrise ça très bien.

Avez-vous déjà travaillé une cuvée Frenchie avec un vigneron ? Oui, avec Lise et Bertrand Jousset, à Montlouis-sur-Loire. On a détourné leur cuvée Antidote et on a fait une cuvée Frenchie, qui s’appelle Cypress Nil [ clin d’œil au groupe de hip-hop Cypress Hill et à la rue du Nil]

Quelle région découvrez-vous en ce moment ? Le Sud-Ouest avec Irouléguy, du domaine Arretxea. Comme je le disais tout à l’heure, je préfère les bourgognes. Mais avec le réchauffement climatique, les régions du Sud sont obligées de travailler différemment, sinon on aura des vins qui collent aux dents. Alors, ça évolue. La culture du vin a beaucoup changé dans le Sud-Ouest.

Est-ce qu’on peut parler du Marathon des Châteaux du Médoc ? Êtes-vous prêt ? Oui ! Je m’y suis inscrit pour la troisième fois. Il est réputé pour être le marathon le plus long du

monde parce que les coureurs zigzaguent… Pour information, je cours trois fois par semaine et je fais aussi le Marathon de Paris ! À la dernière édition, on a validé les 26 dégustations. J’étais en famille, plus mon coach sportif. Nous étions déguisés en garçons bouchers. C’est un vrai moment de fête. Même si je ne suis pas très bordeaux, c’est magnifique de courir dans les vignes.

Ça vous a pris combien de temps ? Toute la journée ou presque… 6h30. Et on a bu de l’eau, évidemment…

Revenons à Paris. Pourquoi ouvrir deux adresses, en plus du restaurant, le bar à vins et le caviste ? Vous n’aviez pas assez de place sur votre carte des vins ? Depuis le début, le vin fait partie de Frenchie. Et encore aujourd’hui, on ouvre L’Altro, un restaurant italien avec une carte des vins 100 % Méditerranée. Le restaurant va communiquer avec la cave et les clients qui voudront du vin plus local auront le droit d’aller y faire un tour.

Avez-vous la culture des vins de garde ? On a toujours mis de côté des bouteilles. Je ne dirai pas où sont mes caves, car on y cache de vrais trésors. Mais on a eu jusqu’à 10 000 bouteilles. Laura Vidal, puis Aurélien Massé, ont toujours travaillé nos allocations. Ça représente un investissement important pour le restaurant. Et ça fait plus de 15 ans maintenant. On a des millésimes qui sont prêts à être bus. La plus belle bouteille qui dort en cave, en ce moment ? Un bourgogne, bien sûr… du Domaine Leflaive 2012. MARIE ALINE /

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Tête-à-tête
Ci-contre : Grégory Marchand rue du Nil, à Paris, non loin de son restaurant Frenchie, du dernier-né L’Altro et de son bar à vins.
Photos : Timothée Chambovet

Un cocktail de saveurs

À chacun de ces cinq grands classiques, le spiritueux sélectionné confère une note de modernité. Et chaque délicieuse recette d’amuse-bouche en accord vient rehausser la dégustation avec virtuosité.

OLD FASHIONED + QUEUES DE LANGOUSTINES RÔTIES

AUX AGRUMES

Pour 1 verre

1,25 ml de bitter Peychaud’s (4 traits)

5 ml de sirop de sucre riche

5 cl de Single Malt Scotch Whisky Aberlour, 12 years old, non chill-filtered

1 zeste d’orange

Le cocktail. Refroidir le verre au congélateur. Dans un verre à mélange (mixing glass), verser le bitter, le sirop, le whisky, ajouter 5 glaçons et mélanger 30 sec avec une cuillère à mélange. Double filtrer dans un verre Rocks rempli de glace. Détailler un grand zeste d’orange, en recouper les bords, le replier en deux et enfiler sur un pic métallique. Déposer sur le côté du verre.

Le whisky. Aberlour Single Malt Scotch Whisky, 12 years old , non chill-filtered. Tout en puissance et en générosité, ce whisky illustre à merveille la pureté d’expression de la gamme Aberlour. Ses notes chaudes et intenses se prolongent en finale sur de délicates saveurs de fruits et d’épices.

Pour 4 personnes 20 langoustines, 1 c. à s. d’huile de tournesol

Beurre d’agrumes : 1 citron vert, 1 citron jaune 1 orange, 1/2 c. à c. de piment d’Espelette

80 g de beurre doux (pommade), sel, poivre

Sauce chimichurri agrumes : 1/4 de botte de persil, 1/4 de botte de coriandre 2 gousses d’ail, 3 c. à s. de nuoc-mâm (ou Worcestershire)

2 c. à s. de vinaigre de vin, 10 cl d’huile d’olive

La bouchée. Prélever le zeste des 3 agrumes avec une microplane et diviser la quantité obtenue en deux. Mélanger une première moitié avec le beurre pommade, le sel, le poivre et le piment. Placer au frais. Prélever les suprêmes des agrumes au-dessus d’une assiette creuse pour en récupérer le jus. Les couper en dés, puis mélanger avec le jus des agrumes, l’huile d’olive, le nuoc-mâm, le vinaigre, les herbes et les gousses d’ail hachées. Décortiquer délicatement les queues de langoustines. Saisir les langoustines dans l’huile de tournesol quelques minutes pour les colorer, puis baisser le feu, ajouter 2 c. à s. de beurre d’agrumes et arroser quelques minutes de plus. Parsemer avec la seconde moitié des zestes. Embrocher deux à deux sur des pics apéritifs. Servir avec la sauce.

Recettes et stylisme Séverine Augé Photos Rebecka Oftedal

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GIN TONIC

AUX BAIES ROSES + QUESADILLA

CHORIZO ET GUACAMOLE

Pour 1 verre

5 cl de gin Christian Drouin

10 à 15 cl de tonic Hysope

1 fine tranche de concombre

1 citron jaune Baies roses

Le cocktail. Dans un verre haut (high-ball), déposer la fine tranche de concombre. Ajouter de la glace, verser le gin, puis le tonic et mélanger. Prélever un zeste de citron à l’aide d’un économe et l’exprimer (presser brièvement à plusieurs reprises) au-dessus du verre. Parsemer de baies roses.

Le gin. Christian Drouin. Rond et miellé, marqué par les agrumes, ce gin évolue sur des touches fleuries, de pivoine et de rose, également de fruits secs, de pruneau et d’abricot. La longue finale s’attarde sur des saveurs fruitées, des notes de foin coupé et de gingembre.

Pour 4 personnes

Quesadilla : 8 petites tortillas de maïs 2 poivrons rouges, 1 oignon rouge 1 c. à c. d’herbes de Provence 120 g de cheddar râpé, 50 g de chorizo 1 c. à s. d’huile d’olive, sel, poivre

Guacamole : 1 avocat 1/2 oignon rouge 1/2 tomate, 1/2 c. à c. de cumin 1/2 citron vert pressé 8 brins de coriandre sel, poivre

La bouchée. Retirer les pépins des poivrons, les couper en lanières et couper l’oignon en quartiers. Mélanger avec l’huile, le sel, le poivre et les herbes de Provence, puis cuire au four 25 min à 190 °C. Pendant ce temps, couper l’avocat en deux, mixer la chair avec le jus de citron, le cumin, le sel, le poivre et la coriandre. Couper la tomate en dés. Ciseler l’oignon rouge. Les incorporer au guacamole. Garnir chaque tortilla avec la moitié du fromage, quelques tranches de chorizo, les légumes grillés et le reste de fromage. Cuire 3 min de chaque côté dans une poêle antiadhésive.

DAÏQUIRI + HAMACHI CRUDO

D’ESPADON AU YUZU

Pour 1 verre : 15 ml de sirop de sucre riche, 25 ml de jus de citron vert frais, 5 cl de rhum El Pasador de Oro, 1 zeste de citron vert

Le cocktail. Refroidir le verre au congélateur. Détailler le zeste à l’aide d’un éplucheur (morceau de 2 cm de large env.). Dans le shaker, mettre tous les ingrédients, à l’exception du zeste. Ajouter 5 glaçons, puis shaker pendant 15 secondes. Double filtrer dans un verre à martini. Presser brièvement le zeste, puis le jeter. Couper une rondelle de citron vert, l’inciser et la disposer sur le rebord du verre.

Le rhum. El Pasador de Oro, Ron Guatemala XO. Un rhum nuancé qui associe des notes de fruits secs et de torréfaction dans une grande douceur.

Pour 4 personnes

Huile infusée aux herbes : 15 cl d’huile neutre (pépins de raisin), 1/2 botte de coriandre, sel, poivre Marinade : 400 g d’espadon en filets, 4 c. à s. de jus de yuzu, 1 pincée de piment d’Espelette, la chair de 2 fruits de la passion Finitions : 1/2 oignon rouge, 1 petit piment thaï (facultatif) 1 mini-concombre, fleur de sel, poivre

La bouchée. Couper grossièrement la coriandre, la placer dans un blender avec une pincée de sel, du poivre et l’huile neutre. Mixer 1 min puis filtrer dans une passoire fine pour obtenir une huile verte. Couper le poisson en tranches d’environ 1/2 cm et les déposer dans une assiette creuse. Mélanger les ingrédients de la marinade, la verser sur le poisson puis laisser reposer 10-15 min à température ambiante. Déposer quelques pétales d’oignon rouge, des tranches fines de piment et des biseaux de concombre.

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ESPRESSO MARTINI + ENTREMETS FAÇON OPÉRA

Pour 1 verre

1 cl de liqueur de café Kahlua, 1,5 cl de sirop de sucre riche, 4 cl de vodka Pyla des Vignes

5 cl de café froid (idéalement, pressé à froid)

Le cocktail. Refroidir le verre au congélateur. Dans le shaker, intégrer l’ensemble des ingrédients. Ajouter 5 pièces de glace et shaker 30 sec pour obtenir de la mousse. Double filtrer dans un verre à martini. La vodka. Pyla des Vignes. Sa texture soyeuse et enveloppante dévoile des arômes de vanille et de raisin, avec une finale intense et gourmande.

Pour 4 personnes

Brownie : 60 g de beurre, 65 g de chocolat noir

35 g de sucre, 25 g de cassonade

1 œuf, 35 g de farine, 1 pincée de fleur de sel

3,5 cl de crème fraîche

Pâte sucrée chocolat : 50 g de beurre doux (pommade)

40 g de sucre glace, 85 g de farine

15 g de poudre d’amandes

7 g de cacao poudre, 1 pincée de sel fin, 1/2 œuf

Mousse choco-café : 130 g de chocolat 30 cl de crème liquide (refroidie)

5 jaunes, 60 g de sucre, 3 cl d’extrait de café

Finition : grué de cacao

La bouchée. Pâte sucrée choco : mélanger le beurre pommade avec le sucre pour obtenir une texture crémeuse. Ajouter le reste des ingrédients et travailler jusqu’à obtenir une boule de pâte. Abaisser au rouleau, découper à la taille d’un moule carré (20 x 20 cm) et placer au frais 20 min. ↗ Brownie : faire fondre beurre et chocolat à feu doux. Blanchir les sucres et l’œuf, puis incorporer chocolat fondu, farine et crème. Verser dans le moule chemisé de papier cuisson, cuire 15 min à 170 °C. Laisser refroidir, démouler. Placer le carré de pâte dans le moule et cuire 20 min à 160 °C. Laisser refroidir dans le moule, déposer le brownie cuit dessus, et réserver au frais. ↗ Mousse : faire fondre le chocolat et monter la crème froide en chantilly. Blanchir les jaunes d’œufs avec le sucre, puis ajouter l’extrait de café, incorporer délicatement le chocolat, puis la crème fouettée. Couler la mousse et placer au frais au moins 1h. Couper en carrés et parsemer de grué.

SAZERAC+ TARTINE DE ROQUEFORT ET FIGUES

Pour 1 verre

5 ml d’absinthe Pernod

2,5 ml de bitter Peychaud’s 7,5 ml de sirop de sucre riche

5 cl de cognac Hennessy Very Special

1 citron pour son zeste

Le cocktail. Refroidir un verre Rocks au congélateur. Verser l’absinthe dans le verre. Détailler le zeste à l’aide d’un éplucheur. Dans un verre à mélange (mixing glass), intégrer tous les ingrédients, à l’exception du zeste. Ajouter 5 glaçons, puis remuer. Jeter l’absinthe du verre. Verser le contenu du verre à mélange dans le verre Rocks rempli de glace. Presser brièvement une lamelle de zeste au-dessus, puis le jeter. Décorer d’une lamelle de zeste de citron dans le verre. Astuce : vous pouvez utiliser un vaporisateur afin de répartir uniformément l’absinthe dans le verre.

Le cognac. Hennessy Very Special. Un élixir suave et intense, aux saveurs crémeuses, alliant un caractère franc et fruité à de vives notes boisées et une touche de vanille.

Pour 4 personnes Compotée de pruneaux macérés : 100 g de pruneaux dénoyautés Tartine : 6 tranches de pain aux noix 150 g de roquefort affiné 6 figues fraîches 4 c. à s. d’amandes entières non mondées 3 brins de thym

La bouchée. Placer les pruneaux dans une casserole avec 10 cl d’eau. Cuire à petite ébullition 10 min, puis mixer. Torréfier les amandes 15 min dans un four à 150 °C, puis les concasser. Couper les figues en quartiers fins, émietter grossièrement le roquefort et effeuiller le thym. Toaster les tranches de pain. Étaler un peu de compotée de pruneaux, ajouter le roquefort, les figues, les amandes et quelques feuilles de thym. Astuce : remplacer, selon la saison, les figues par des poires ou encore des prunes type reine-claude ou mirabelle.

Riedel (pp. 44-45, 49)

48 — Racines
Verres
L’aubergine,

la bonne copine

En gratin, farci ou rôti, ce légume-fruit accommodant se cuisine aisément.
Une souplesse de caractère qui élargit le champ des associations.

Aubergines

alla parmigiana

Spécialité née, dit-on, dans le sud de l’Italie – à Naples ou en Sicile – alternant tranches d’aubergines grillées, sauce tomate et fromage façon lasagnes, ce plat simple et ensoleillé offre texture et confort. Avec lui, nul besoin de surenchérir : accordons-le à un rosé de texture qui puisse s’affirmer sur le plat ; par exemple, de Bandol, ou même de Bordeaux, avec le fameux clairet. Pour un accord plus local, toujours sur la voie de la subtilité, on choisira un rouge délicat d’Italie. Barolo et sa région offrent, avec le cépage nebbiolo, des vins à la fois nuancés et raffinés qui iront parfaitement sur la chair du légume et libèreront les saveurs du plat. Le choix du sommelier Schiavenza, Barolo del Comune di Serralunga d’Alba Rouge 2018. Ce nebbiolo aligne de savoureuses notes de griotte et toastées autour d’une trame infusée et délicate. Perfetto !

Aubergines farcies au bœuf haché

Agrémentées de viande, parsemées de fromage râpé, puis gratinées au four, ces aubergines fondantes rappellent leur cousine grecque, la moussaka, à base d’agneau. Un rouge s’impose ici pour faire le lien avec la viande. Le bœuf nécessite de la structure, que l’on ira chercher dans un rouge du Sud pour prolonger le caractère méditerranéen du plat. Le Bierzo, au nord-ouest de l’Espagne, est une région d’altitude prisée pour ses vins frais. La cuvée choisie, aux arômes floraux tout en élégance, se révélera idéale. Un rouge du sud de la France pourra jouer sa doublure, un vacqueyras ou un châteauneuf, par exemple. Le choix du sommelier César Márquez, Bierzo Parajes Rouge 2021. Issu de vignes centenaires plantées en altitude, 85 % mencía, ce rouge séveux et profond libère un jus complexe bordé de tanins fins.

Aubergines rôties aux anchois

Inattendue, cette recette mêle plusieurs registres, avec des aubergines mijotées à l’huile d’olive et au four servies avec une sauce aux filets d’anchois, ail haché et touche de vinaigre. Ces saveurs puissantes et contrastées appellent un blanc sec pour répondre à l’ardeur de l’huile, à la tonalité vinaigrée et, bien sûr, aux anchois. Cap au Sud, pour des blancs de structure venant contrer les tempéraments affirmés – Roussillon, Languedoc ou même Rhône. Plus original, on ira du côté de la Provence pour ses blancs complexes, notamment ceux qui s’affranchissent du rolle pour des assemblages plus travaillés.

Le choix du sommelier Domaine Hauvette, IGP Alpilles Dolia Blanc 2017. Trio de marsanne, roussanne et clairette, ce blanc précis libère des notes d’infusion et une touche fumée, le tout dans une pleine fraîcheur.

50 — Racines Dégustation Accords
Photo Pierre Lucet-Penato

Boire bon, manger bien

Ces trois adresses aux accents sudistes choisies par le comité de sélection de Ventealapropriete concilient cuisine bien troussée et carte des vins affûtée.

Paris, Île-de-France

Piero

Le choix d’Olivier Poussier. La table transalpine du chef triplement étoilé Pierre Gagnaire se déploie dans une atmosphère plus décontractée que son aînée. Ou comment la dolce vita propulse une friture d’encornets, des ris de veau au curry vert, des cannellonis aux trois couleurs, un risotto au safran et parmesan ou une panna cotta dans un ballet orchestré sous l’égide de Marco Vigano. Maîtrise des cuissons, mise en scène et service au cordeau, tout y est. Côté cave, une sommellerie pointue décline l’Italie sur tous les fronts, Piémont en tête, mais pas que, en puisant aussi dans les trésors de la Botte, Sicile et Sardaigne comprises. Essayer Fratelli Alessandria Barolo Verduno 2019 ; Piero Busso Barbaresco Mondino 2019 ; Ornellaia Bolgheri Superiore 2014 ; Val Delle Corti Chianti Classico 2019.

Infos pratiques 44, rue du Bac, 75007 Paris (restaurantpiero.com) À la carte : entrée-plat-dessert, de 80 € à 140 € env.

Bastia, Corse Col Tempo

Paris, Île-de-France—

Dilia

Le choix d’Alaric de Portal. Cette trattoria chic menée par le Toscan Michele Farnesi à Ménilmontant mêle avec conviction cuisines italienne et française. Rognons de lapin, spaghettis à la poutargue, tortellinis ou pigeon au pesto de cacahuètes… En escorte, une carte des vins éclectique et fournie, entre Corse de l’épatant Domaine de Vaccelli, précieux Loire du Clos de l’Écotard, Vincent Pinard et Gérard Boulay ou encore blancs allemands et autrichiens et, bien sûr, crus italiens. Évitant l’écueil du catalogue, le chef affiche une sélection ajustée à sa cuisine. En annexe, la cave de Dilia pour prolonger le plaisir. Essayer Vincent Pinard Sancerre Charlouise Rouge 2018 ; Jérémie Huchet et Jérémie Mourat Goulaine Blanc 2013 ; Jean-Claude Rateau Hautes Côtes de Beaune Blanc 2022 ; Fritz Haag Moselle allemande Riesling Trocken Blanc 2021.

Infos pratiques 1, rue d’Eupatoria, 75020 Paris (dilia.fr) Menus déjeuner : de 21 € à 42 €. Menus dégustation : de 59 € à 92 €.

Le choix de Christian Martray. Une cuisine raffinée, une parfaite maîtrise des cuissons et des jus, un jeune chef créatif passionné de vins : voilà l’équation impeccable de cet établissement couru des natifs de l’île et repaire des meilleurs vignerons de Patrimonio. La carte est très bien fournie en crus locaux, mais aussi du continent, avec une belle place accordée aux champagnes de vignerons et quelques pépites d’Italie. En face, des plats exécutés avec maestria – risotto de saint-jacques, dos de cabillaud, côtes d’agneau grillées, paleron de bœuf – et des desserts alléchants. Idéalement située sur le vieux port, l’adresse de Clément Calendini est un must ! Essayer Pierre Girardin Chardonnay Éclat de Calcaire Blanc 2020 ; Antinori Tignanello Rouge 2020 ; Champagne Egly-Ouriet Grand Cru Extra-Brut ; Canarelli Tarra di Sognu Rouge 2021 ; Clos Venturi Altare Rouge 2019. Infos pratiques 4, rue Saint-Jean, 20200 Bastia. À la carte : de 35 € à 50 €.

Racines 51
1. Michele Farnesi | 2. Recette de homard, à la carte du restaurant Piero. Photos : Maki Manoukian ; DR 1 2

Du Ventoux au Luberon, notre carnet de route

Entre deux parcs naturels, ce territoire façonné par monts et montagne cumule les atouts : vignerons doués, tables inspirantes, hôtels et maisons d’hôtes au charme authentique.

ENVIE DE SILLONNER le Vaucluse en notre compagnie ? Gigondas, sous influence rhodanienne, est idéal pour se mettre en jambes. Puis cap au sud-est, avec le grenache – en vedette ici – comme fil rouge. Le rouge étant aussi la couleur préférée des meilleurs vignerons locaux. En ligne de mire ? La cime du Ventoux, dit « le Géant de Provence » par les commentateurs du Tour ! Suivre notre itinéraire à vélo, on s’en doute, tentera pas mal d’entre vous. Le Ventoux, puis le Luberon et ses villages perchés – gardez des forces – sont un must des virées entre copains. Dans cette Provence plus méridionale, nous vous avons déniché de superbes étapes « farniente » où se créer de jolis souvenirs à la table de chefs qui vous feront découvrir leurs cuvées coups de cœur. Un réconfort à la hauteur de l’effort !

1 Gour de Chaulé

Ce domaine situé au cœur du village a pris une nouvelle dimension avec l’arrivée du fils de famille, Paul Fumoso. Forts de parcelles ventilées sur tous les terroirs de l’appellation,

de longs élevages en foudres et en béton, les vins produits ici signent un coup de génie salué par Olivier Poussier. L’une des plus brillantes ascensions du moment, récompensée d’une étoile au Guide des meilleurs vins de France 2023. gourdechaule.com

2 Caveau du Domaine du Terme

Cette adresse attachante portée par la famille Gaudin depuis cinq générations se situe sur le plateau, au « terminus » de l’ancienne principauté d’Orange, à laquelle appartenait Gigondas. Plus accessible, le caveau ouvert sur la place du village tombe à pic : cet espace accueillant vous permettra de déguster tranquillement tous les crus du domaine – des vins tendres et équilibrés, sobrement élevés en cuves et en foudres. domaine-du-terme.com

3 Domaine Raspail-Ay

Prisé pour ses vins de garde et sa maîtrise du grenache dans ses subtilités les plus intimes, ce domaine modèle cultive la discrétion autant que l’excellence. Il faut absolument goûter ses vins, d’une régularité, d’une com-

plexité et d’une finesse rares ! D’autant que les quantités sont comptées, Anne-Sophie et Christophe Ay produisant exclusivement une seule cuvée de Gigondas par millésime.

4 Xavier Vignon

Une démarche créatrice inédite, c’est tout le sens du travail de Xavier Vignon. Fortement marqué par ses séjours en Champagne et dans le Bordelais, le vigneron en retient une idée forte : la liberté d’assembler à sa guise et à l’instinct. Vous pourrez tout goûter ici et même profiter de soirées dégustation et de visites commentées dans les vignes aux beaux jours. xaviervignon.com

5 Vin Ensèn

Un wine bar à la déco quasi citadine… Pas courant dans un petit village ! À l’ardoise, des plats du Sud, jusqu’à l’Espagne ou l’Italie. Aux manettes, deux sommeliers à la sélection œcuménique. L’occasion de s’offrir un reset du palais (un morgon de Lapierre ? Un riesling d’Ostertag ?) avant de reprendre l’exploration des AOP locales. vinensen.com

Ci-dessus : la cuisine inventive de Xavier Mathieu, au Phébus. La Bastide, la table étoilée de l’hôtel Capelongue (également à dr.).

52— Racines
Photos : Benoît Linero, Laurence Barruel

6 Domaine Dambrun, Ventoux

Patrick Chêne a réussi sa reconversion (cf. Racines n°7). Après les médias à Paris, le voici, depuis 10 ans, sécateur en main, à œuvrer sur son vignoble. L’éclosion d’un projet mûri de longue date et la réalisation de cuvées soignées, travaillées selon les principes de la biodynamie. Une adresse vertueuse à découvrir de toute urgence, car les cuvées se suivent et gagnent en complexité. Il suffit de vous annoncer et de pousser la porte ! domainedambrun.com

7 Crillon Le Brave

Occupant tout un ancien hameau, au sommet d’un village perché, cet hôtel & spa cultive un chic provençal discret, avec juste ce qu’il faut de tomettes et d’indiennes. Le chef Adrien Brunet explore tous les micro-terroirs de la région, jusqu’à la côte (huîtres de Camargue, pissaladière, panisses, poulpe de roche signature). Le midi, c’est bistronomie, avec barbecue et plancha. crillonlebrave.com

8 Château de Mazan

Une demeure à histoire(s) – le marquis de Sade l’appréciait –, dont une rénovation subtile a préservé le charme et l’authenticité, tout en apportant modernité et couleur. Des qualités que l’on retrouve à table. Truite de la Sorgue condiment cerise ; aïoli de légumes et poutargue ; asperges vertes et petit épeautre : la cuisine, comme le lieu, est élégante, mais décontractée. chateaudemazan.com

9 Château Pesquié, Ventoux

C’est l’une de nos adresses chéries du Sud. Au pied du mont Ventoux, ce domaine formule sans doute les plus beaux rapports prix-plaisir de son secteur, avec une dimension de « grand vin ». Les terroirs d’altitude couplés à la biodynamie profilent des textures adroitement ciselées, dans les

trois couleurs. C’est bien simple, tout est bon ! Venez rencontrer la famille Chaudière, artisane de cette réussite. chateaupesquie.com

10 La Colombe

Clin d’œil à tous les fous de cyclisme du coin, le menu s’intitule « L’ascension du mont Ventoux ». Étoilé au Château de Mazan, Christophe Schuffenecker avait déjà la connaissance du terrain, la technique et l’élégance. Ici – une note de géranium avec le pigeon, des variations sur « Le Pollen » au dessert –, ce champion de cuisine provençale se permet de belles échappées… la-colombe.fr

11 Le Phébus & Spa

Hôtel Relais & Châteaux + restaurant 1* Michelin

En pleine garrigue, le vaste mas d’origine abrite désormais 30 chambres et suites, un spa, un bistrot et un restaurant étoilé. Grand luxe, calme… et farandole de voluptés gourmandes. Contemporaine et végétale, la cuisine de Xavier Mathieu aime aussi réinter-

préter des recettes de patrimoine, comme la « raïte de Mémé Rose » ou les canailles « pieds et paquets ». lephebus.com

12 Le Mas Les Eydins

Maison d’hôtes + restaurant 2* Michelin

Hier triplement étoilé dans un palace du Var, Christophe Bacquié se réinvente dans son inédite « maison d’hôtes gastronomique », entre lavandes et oliveraies. « Libérée » elle aussi, sa cuisine, tout en surprises et émotions, se découvre désormais en tout petit comité, « comme à la maison », en échangeant avec le chef. Un pur rêve de gourmets ! leseydins.com

13 Ju-Maison de Cuisine

Dans sa première adresse en nom propre, ouverte depuis Pâques dernier dans une superbe maison voûtée, Julien Allano poursuit son parcours de chef engagé, locavore, éco-responsable et anti-gaspi. Avec une rare exigence (truite ikejime, mélasse de céréales pour remplacer le sucre), une créativité débridée et des bouffées de nostalgie gourmande pour l’Algérie de sa mamie. ju-maisondecuisine.com

14 Hôtel Capelongue

Hôtel + restaurant 1* Michelin + spa Là encore, un « hameau perché » déserté s’est réincarné en hôtel 100 % dans le goût de l’époque – céramiques ou vanneries contemporaines – et des propositions bienêtre variées. Trois options, aussi, pour se régaler : table étoilée pointue, cuissons au feu de bois (pagre entier, carré de cochon) dans l’ex-bergerie ou café pour grignoter, avec une superbe carte de pastis. beaumier.com

15 Domaine de Fontenille

Hôtel + restaurant 1* Michelin + spa

Bastide de rêve, arbres centenaires… Cette villégiature de luxe a gardé l’aspect chaleureux d’une demeure de famille. Côté « gastro », le chef étoilé Guillaume Goupil compose, autour d’un produit (pigeon, rouget…), des accords audacieux et ludiques. Côté bistrot, le potager en permaculture inspire aussi la carte. Restez dans l’hyperlocal en goûtant l’une des cuvées bio du domaine. lesdomainesdefontenille.com

16 Domaine du Castellas

Hôtel + restaurant + spa

Niché depuis 1720 dans les combes du Grand Luberon, ce hameau et domaine de 110 hectares abrite 10 suites au luxe dépouillé, un mini-spa scandinave, des ruches, un poulailler, des chèvres en semi-liberté. Légumes du potager, desserts lactés et miellés, poulet « Minette » du dimanche, la cuisine champêtre du chef sonne juste, dans cette nature totalement préservée. domaineducastellas.fr MARIE-ODILE BRIET ET VÉRONIQUE RAISIN /

54 —
Ci-dessus :
du
;
Racines
vignes
domaine Gour de Chaulé (Gigondas)
Julien Allano, chef de Ju-Maison de Cuisine.
Photos : Florian Domergue, DR ; Carte : James Eric Jones

Violès

Vacqueyras

Sarrians

Lafare

Gigondas Beaumes-de-Venise

Le Barroux Malaucène

Caromb

Aubignan

Loriol-du-Comtat

Carpentras

Monteux

Althen-des-Paluds

Mazan

Bédoin

Mormoiron

Malemort-du-Comtat

Saint-Didier

Pernes-les-Fontaines

Venasque

Velleron

Le Thor

Saumane-de-Vaucluse

Fontaine-de-Vaucluse

L’Isle-sur-la-Sorgue

Parc naturel régional du Mont-Ventoux

Villes-sur-Auzon

Blauvac

Méthamis

Gordes

Cabrières-d’Avignon

Saint-Pantaléon

Goult

Lioux

Monieux

Sault

Saint-Saturninlès-Apt

Gargas

Roussillon

Villars

Apt

Cabannes

Saint-Andiol

Plan-d’Orgon

Parc naturel régional des Alpilles

Cavaillon

Orgon

Taillades

Cheval-Blanc

Maubec

Beaume es

Ménerbes Lacoste Bonnieux

Mérindol Puget

Sénas

Mallemort

Charleval

Lauris

Parc naturel régional du Luberon

Lourmarin

Cadenet

Durance 3 1 2 4 6 5 9 7 10 13 8 11 15 16 12 14 N

nos atouts cœur

Nos acheteurs Thomas Blanquer, Benjamin Bounoure, Nicolas Sanson, Killian Sourice et Maël Vincent débusquent sans relâche les meilleures cuvées. Voici leurs trésors du vignoble, des recommandations pointues.

Bodega Cerron

Jumilla El Tiempo Que Nos Une Rouge 2022 (8,99 €) 93/100

Voici une des attractions les plus excitantes du vignoble espagnol. Petit projet familial niché sur les hauteurs de la Murcie, au sud-est de l’Espagne, la Bodega Cerron brille par sa fine lecture du terroir de Fuente Álamo, au sein de la DOP (l’équivalent espagnol de notre AOP) Jumilla. Vignes franches de pied, vignoble cultivé en bio et préservation du patrimoine végétal sont au centre de cette aventure menée par la famille Cerdan ; 100 % monastrell, El Tiempo Que Nos Une exprime l’alchimie du lieu : nuits fraîches, sols calcaires et journées ensoleillées livrent une partition florale, saline et rafraîchissante, sans renier le caractère méditerranéen du vignoble. Une merveille en toutes saisons et à prix canon !

Domaine

La Réserve d’O

Terrasses du Larzac Rouge 2020 (19,99 €) 93/100

Marie et Frédéric Chauffray domptent, depuis 20 ans déjà, les contreforts du plateau du Larzac. À près de 400 mètres d’altitude, leur vignoble respire la fraîcheur et offre un environnement préservé, cerné de bois et battu par les vents. Cette nature leur inspire des vins ouverts et joyeux, cultivés et vinifiés en biodynamie, parés d’une pleine gourmandise. Valeur refuge de

l’appellation, ce domaine peut se prévaloir d’en avoir renouvelé le style, apportant un velouté de chair et un soyeux de tanins à ces vins structurés. Dotés d’une superbe énergie et d’un potentiel de garde important, les vins de La Réserve d’O sont devenus des incontournables, et cette cuvée du millésime 2020 résume parfaitement le niveau atteint par le domaine ; un rouge idéalement mûr et épicé, concentré et séveux, porté par une grande fraîcheur et façonné dans une optique de garde. Sa finale sapide et ses beaux tanins crayeux ne trompent pas : nous sommes bien en présence d’un classique, un indémodable du Languedoc.

Jérémie Huchet

Muscadet Sèvre et Maine

Château-Thébaud Blanc 2018 (14,90 €) 93/100

Jeune garde de la Loire, Jérémie Huchet fait partie de ces noms sur lesquels il faut impérativement compter. Secouant le muscadet avec ses cuvées de grande classe, au potentiel de garde immense, il redonne toutes ses lettres de noblesse à ce terroir trop longtemps ignoré, qui borde l’océan. Tout est recommandable dans ce domaine en pleine forme ! La culture biologique, les longs élevages sur lies, la géologie variée forgent des cuvées pleines de grâce à l’aune de ce 2018, admirable de pureté et de finesse, au profil minéral affirmé. Après quatre ans d’élevage, le voici dense et accompli, solidement armé pour 10 ans et plus ; un délice avec un poisson cuisiné au four, en ceviche ou mariné.

Château Simone

IGP Pays des Bouches-duRhône Les Grands Carmes Rouge 2020 (27,90 €)

Château Simone déroule ses vignes centenaires et ses calcaires au pied de la Sainte-Victoire. Prestige de Provence, ce cru confidentiel de la minuscule appellation Palette cultive son aura en toute discrétion. Sa seconde étiquette, « Grands Carmes », permet d’approcher plus rapidement le profil sérieux et racé du style Simone, comme ce rouge élevé sous bois pendant près de deux ans. Fidèle interprète du terroir de Méditerranée, issu de vignes de plus de 50 ans sur des coteaux d’éboulis calcaires, il livre une matière puissante, intense, fraîche et nuancée, où pointent les accents du Sud, entre garrigue et olive. Une belle bouteille à la grande capacité de garde, déjà irrésistible avec des côtes d’agneau grillées ou une longe de porc confite.

Domaine des Roches Neuves

Thierry Germain, SaumurChampigny Rouge 2023 (14,90 €) 93/100

Artisan du renouveau de Saumur-Champigny, Thierry Germain défend un style où fraîcheur et justesse de fruit sont indéfectibles. Depuis plus de 30 ans, il œuvre avec passion, en biodynamie, réalisant des vins infusés, floraux et croquants, d’un éclat remarquable. Pour la première fois, Ventealapropriete s’associe à cette grande signature de Loire pour livrer une cuvée délicieuse, un rouge printanier et sensible, où le beau graphite du cabernet franc, les tanins fins, le fruit et la fraîcheur se mêlent avec gourmandise. Une exclusivité réservée à nos membres.

Section Rubrique Teaser Teaser 56 — Racines
LE CHOIX DE NICOLAS SANSON LE CHOIX DE MAËL VINCENT Portraits : Nicolas Dormont

Domaine de l’Argentière

Côtes-du-Rhône Villages

Visan Khrôma Rouge 2022 (12,99 €) 93/100

Dernière révélation du salon angevin, ce domaine fait partie de la jeune garde qui booste le Rhône méridional. Stéphanie Cave et Johan Bartholin, formés par de grands noms (Villa, Mellot, Sérol…) et riches d’aventures internationales (du Chili à la Nouvelle-Zélande), œuvrent à Visan, sur le prolongement du plateau de Vinsobres. Dominé par le grenache et élevé en cuve, Khrôma est un côtes-du-rhône au charme floral, soyeux, qui enchante le palais. Sans excès, mais non sans gourmandise, cette cuvée est à tomber. Une priorité !

Domaine

La Barroche

Châteauneuf-du-Pape

Julien Barrot Rouge 2021 (42,90 €)

Cette adresse confidentielle de 15 hectares, située au nord de l’appellation sur les terroirs de Bois des Dauphins, Pied Long et Cabrières, livre toujours des cuvées de grande éloquence. Laetitia et Julien Barrot, frère et sœur, s’y em-

ploient dans une quête de fraîcheur permanente, à partir de vieilles vignes situées sur les meilleurs secteurs de l’appellation, dans le voisinage de Rayas, et de longs élevages en cuves béton ou foudres de chêne, sans bois neuf. Ainsi éclosent des cuvées providentielles, disponibles uniquement sur allocation et réservées à une clientèle triée sur le volet. Ce 2021 à dominante de grenache, en cours de conversion à l’agriculture biologique, ne déroge pas à la règle ; élevé en cuves béton, en foudres et demimuids, il livre déjà un jus volubile très accessible, sur les fruits noirs et les épices, avec beaucoup de fraîcheur et de finesse, dans une texture veloutée absolument délicieuse. Un grand Châteauneuf est né !

Domaine

Daniel Bouland

Morgon Corcelette

Vieilles Vignes Sable Rouge 2022 (14,90 €) 96/100

Il fait peu parler de lui et pourtant… Daniel Bouland est l’un des plus grands vignerons du Beaujolais ! Salué pour ses vins millimétrés, bâtis sur la maturité, il réalise en bio des modèles de complexité et d’élégante finesse. Installé au hameau de Corcelette, l’un des meilleurs terroirs de Morgon, il compose une gamme indiscutable, en témoigne cette cuvée issue de terroirs plus sableux, sur l’un des plus beaux millésimes de la décennie. Forcément, le résultat force le respect, avec un jus parfumé imparable de velouté, une fraîcheur innée et une matière remarquable, mûre et précise, un concentré de cerise noire et un fruit libéré qui rappellent furieusement le monumental millésime 2009.

Domaine

Julien Pilon

Saint-Joseph Rue des Poissonniers, Paris XVIIIe Rouge 2022 (24,90 €) 94/100

Pilier du Rhône nord, établi en 2011, Julien Pilon a vite conquis les amateurs les plus exigeants. D’abord reconnu pour ses blancs, il a élargi sa gamme et propose désormais des cuvées sur les appellations les plus renommées. Aguerri auprès des plus grands, le vigneron pratique une vinification de pointe, imprégné de chaque nuance de ses terroirs. Ses vins comblent ainsi les adeptes de fraîcheur et de pureté, avec des blancs précis et des rouges tout aussi réussis ! Des cuvées aux quantités limitées, désormais très recherchées. Cette pépite de Saint-Joseph, sur l’excellent millésime 2022, constitue à ce titre une aubaine : Olivier Poussier, Meilleur sommelier du monde et membre de notre comité de dégustation, s’enthousiasme pour ce rouge dense et mature, au fruit juteux et bien proportionné, légèrement floral et épicé. Une leçon de syrah.

Denis Jeandeau

Saint-Véran Cuvée Hommage Blanc 2022 (26,90 €) 94/100

Il nous a quittés brutalement l’été dernier, laissant un vide immense. Pour honorer sa mémoire, nous avons choisi ce 2022, son dernier millésime, reflet de son style et de son talent. Adulé des chefs et des amateurs, Denis Jeandeau était un phénomène. Des tables étoilées aux caves de passionnés, ses vins trônaient en bonne place. Salué comme l’un des plus grands talents de sa génération, il a remis le Mâconnais dans la lumière. Cette cuvée est à son image : tonique, généreuse, sublime.

Section Rubrique Teaser Teaser Racines 57
LE CHOIX DE THOMAS BLANQUER LE CHOIX DE KILLIAN SOURICE LE CHOIX DE BENJAMIN BOUNOURE

Blanc sur rouge, rien ne bouge…

Rouge sur blanc, tout fout l’camp. L’axiome est si fameux que personne ( ou presque ) ne songe à le remettre en cause. À tort ou à raison ?

LE SENS de cet alexandrin parfait ne laisse aucune place au doute. Et loin de nous l’idée de contester le plus fameux (et consensuel) des adages bachiques. Quoique. Linguistiquement, il y aurait comme un hiatus. « Sur » induit au-dessus, par-dessus. Avant de poser quelque chose « sur », on a mis quelque chose « sous ». En toute logique, on pourrait donc déduire que « blanc sur rouge » implique une consommation de vin blanc après qu’on a dégusté du rouge, l’un couvrant l’autre dans l’estomac du buveur. L’expression voudrait ainsi dire l’exact contraire de ce que tout le monde pense : rouge puis blanc, ça va, blanc puis rouge, attention les dégâts. Vertigineux, n’est-ce pas ?

Ne jouons pas plus longtemps les iconoclastes, mais la cause de ce possible malentendu syntaxique réside sans doute dans l’une des étymologies couramment avancées. La maxime viendrait de la marine, plus précisément des drapeaux de couleurs utilisés comme feux de signalisation par les équipages des navires. Si le pavillon blanc est au-dessus du rouge, les marins restent à bord, le bateau ne bouge pas. Si le pavillon rouge est sur le blanc, branle-bas de combat, tout le monde sur le pont, l’embarcation s’apprête à manœuvrer. Sans que les historiens n’aient jamais pu trancher, une autre origine,

œnologique celle-ci, confirme plutôt le sens commun. Elle nous arrive cette fois de Bourgogne, où les locaux avaient coutume de dire : « Blanc puis rouge, rien ne bouge, rouge puis blanc, tout fout l’camp. » L’explication tiendrait à la nature même des cépages bourguignons, chardonnay et aligoté en blanc, pinot noir et gamay en rouge. Les seconds, plus costauds, écraseraient les premiers, plus légers.

Une liturgie répétée jusqu’à plus soif La perte de saveurs associée à l’enchaînement rouge-blanc serait trop dommageable. À partir de ce constat empirique, on a défini une sorte d’ordre immuable qui rythme les rendez-vous familiaux dominicaux, où l’on commence par les effervescents à l’apéritif pour enchaîner sur les blancs en début de repas, puis finir sur les rouges à partir de la viande. Mais, comme pour tout dogme, il est permis de blasphémer. C’est même parfois recommandé. On a beau s’être sagement conformé à la liturgie, après un pinot noir de Sophie Schaal sur une belle entrecôte, on éprouvera un plaisir intense en associant le riesling de cette merveilleuse vigneronne née en Bourgogne, mais tombée amoureuse de l’Alsace (et d’un Alsacien), à des fromages de chèvre ou de brebis.

Les couleurs passent… l’ivresse reste Que dit la science ? Peu sur le sujet stricto sensu, davantage sur les pratiques de nos voisins anglo-saxons, dont la culture est avant tout zythologique 1. En allemand, on dit : « Wein auf Bier, das rat’ ich Dir, Bier auf Wein, das lass sein » (« vin sur bière, je te le conseille, bière sur vin, ne fais pas ça »). Les Anglais sont au diapason : « Beer then wine, you’ll be fine. Wine then beer, you’ll feel queer » (« bière puis vin, tout ira bien, vin puis bière, tu te sentiras bizarre »)

En 2019, des chercheurs de l’Université de Cambridge ont recruté 90 volontaires divisés en trois groupes : le premier a dû boire deux litres et demi de bière, suivis de quatre grands verres de vin ; le deuxième, les mêmes quantités, mais dans le sens inverse ; le troisième n’a bu que de la bière ou du vin. Et on a tourné une semaine plus tard. Conclusion, selon les auteurs de l’étude : « Boire du vin blanc ou de la bière avant le vin rouge n’adoucit pas le degré de la gueule de bois. » Autrement dit, « le vin est innocent, seul l’ivrogne est coupable ». Voilà un autre adage qui, lui, ne se discute pas… STÉPHANE MÉJANÈS / 1. Ayant trait à la zythologie ou à la biérologie, discipline qui a pour champ d’étude la fabrication, la dégustation et la culture de la bière.

Illustration
gorgée
Anaïs Lefebvre Dégustation Dernière
58 — Racines
S D ’A L C OO L ES T D AN G EREU X PO U R L A S AN T É . À C O NS OMM E R AV E C MOD ÉR AT I O N .
L’ABU
L’AB U S D ’A LCOOL E S T D A NGE U REUX POUR LA SANTÉ, À CONSOM M ER AVEC MO D ÉR ATIO N

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