Programme 2014
C.S. Wright
Depuis maintenant treize ans, tout d’abord aux éditions Viviane Hamy, ensuite aux éditions Attila et désormais aux éditions Le Tripode, je m’efforce de défendre des livres pour leur liberté. Sans esprit de collection, sans idée préconçue. Au risque de brouiller les pistes. On croit qu’un éditeur sait à l’avance ce qu’il cherche, c’est faux . Je ne connais d’autre beauté à un livre que sa singularité, et le hasard des rencontres qui l’a rendu accessible. L’étrangeté d’un livre fait à la fois sa force et sa fragilité, elle le rend dépendant des quelques lecteurs qui, les premiers, le comprendront et le rendront nécessaire à d’autres. Pour présenter l’année éditoriale, j’ai eu envie de rappeler cette évidence et de raconter la genèse de chacun des livres qui rythmeront les mois à venir. Histoire de rendre hommage aux personnes et aux hasards qui m’ont mené jusqu’à ces textes. Histoire aussi de faire entendre pour chaque œuvre son cheminement, sa résistance. Pour le dire autrement : sa nécessité.
Frédéric Martin
à paraître en janvier
Cherchant par curiosité quels éditeurs étrangers avaient eu l’envie de traduire Pierre Michon, je découvre un éditeur américain inconnu (Mercury House) et explore son catalogue. Un auteur attire en particulier mon attention : un romancier mort en 2008 dans la pauvreté, visiblement maudit. Admiré par James Baldwin pour son premier livre, brûlé par la critique pour son deuxième (le roman est aujourd’hui jugé comme son chefd’œuvre) et finalement frappé par l’errance et l’alcool (ce qui donnera les sujets de son troisième et dernier livre)... Je venais de rencontrer Charles Stevenson Wright et son tryptique sur New York. Stock avait publié en 1963 une traduction du premier roman. On s’entend avec Michel Averlant, le traducteur, pour revoir le texte et l’amener au niveau d’épure initiale de cette exploration des bas-fonds new-yorkais. La maquette du livre, inspirée de l’édition américaine, naît toute seule, avec une photo de l’auteur. Un voyage à New York permet de recueillir des témoignages de ceux qui ont connu Wright, de visiter les lieux qui étaient les siens et de revenir avec, dans la valise, comme un don, des documents inédits et la machine à écrire de ce vagabond éthylique. Merci à Phelonise Willie, amie et gardienne de l’œuvre, pour sa confiance. LE MESSAGER parution en janvier
à paraître en février
Extraits des archives du district est un texte qui m’est parvenu par la plus simple des manières. Un fin lecteur – Sholby – avait tant aimé les textes de Kenneth Bernard qu’il avait décidé d’en traduire pour lui-même une bonne partie : nouvelles, essais et, donc, ce roman. N’ayant jamais vraiment travaillé avec des éditeurs, il avait envoyé spontanément ses traductions par mail à des dizaines de maison d’édition... en vain. Pas une seule réponse en plusieurs années. Ce fut ma chance. J’ai eu envie de publier le roman dès la première lecture, et crois aujourd’hui encore que c’est une des œuvres les plus fortes que j’ai eu à défendre. Mais aussi un de mes plus grands regrets. Une mauvaise maquette, un papier mal choisi, un manque de chance au moment de la parution, il n’en faut pas plus pour qu’un texte ne soit pas lu. Quelle frustration pour ce romanovni, qui se situe quelque part entre 1984 et Brazil. Il fallait en faire une nouvelle édition. extraits des archives du district parution en février
à paraître en janvier-février-mars
Un texte d’humeur sur ce que c’est, aujourd’hui, qu’avoir 30 ans en France. Il s’agissait initialement d’un long post de Samuel Lévêque sur un blog durant l’été 2013. Une amie m’alerte. Quelques semaines après, c’était devenu un manifeste ( plus de 150 000 connexions via Facebook et Twitter).
Nicolás Arispe, dessinateur argentin ultra doué et inconnu en Europe. Rencontré par amour partagé d’Edward Gorey. En attendant son adaptation folle de la Bible (Le Livre des prophètes, à venir au Tripode), un hommage à la Ursonate de Kurt Schwitters. Un dada flip book à mettre dans toutes les mains, à partir de 4 ans.
TOTO, 30 ANS en janvier
RAKETE ZINNEKETE en mars
Jacques Roubaud is back ! On avait pris le bus avec lui à Paris, ce sera cette fois-ci le métro à Tokyo. Une nouvelle version de ce texte culte (deux premières versions chez Inventaire/Invention), avec notamment une longue exploration de la boutique de sanitaires TOTO. édition collector avec 4 couvertures et isbn différents, ainsi que 20 artistes-sérigraphes à la manœuvre. Exposition prévue en mars durant le festival Hors-Limites. Parution simultanée en e-pub enrichi de Ode à la ligne 29 des autobus parisiens, avec plusieurs inédits, vidéos et audios. Tokyo infra-ordinaire en mars
à paraître en mars
Une drôle d’histoire. Vous apprenez qu’un livre du Tripode est sélectionné pour le prix Laure Bataillon. Vous vous demandez qui est cette dame. Une grande traductrice de l’espagnol. Bon. Et elle a reçu ce prix (avant qu’il ne porte son nom) pour la traduction d’un roman de Juan José Saer, L’Ancêtre. D’accord. Vous n’avez jamais lu de texte de cet auteur, vous vous dites que c’est le moment. Mais le livre (Flammarion, 1987) n’est plus disponible. Ah. Vous en trouvez un vieil exemplaire. Et vous êtes ébloui, par le texte comme par la traduction. Vous apprenez que cet auteur est jugé dans son pays comme l’égal de Borgès, que Ricardo Piglia l’adore. Fichtre. Vous lisez un second roman, lui aussi épuisé, L’Anniversaire. Sublime. La préface de Jean-Didier Wagneur (un fin connaisseur des romans de Jacques Abeille, drôle de coïncidence) dit toute l’importance de l’œuvre. Que des romans pareils soient indisponibles, c’est à n’y rien comprendre. Il est impératif de (re)découvrir Juan José Saer. Et Laure Bataillon. Première salve, en mars, avec L’Ancêtre. Où l’on suit des explorateurs malchanceux à la découverte de l’Argentine. Le livre, à plus d’un titre, des origines. Préface d’Alberto Manguel l’ANCÊTRE parution en mars
à paraître en MARS-vril-mai
“ Les guerres considérables que Louis XIV eut à soutenir pendant le cours de son règne, en épuisant les finances de l’État et les facultés du peuple, trouvèrent pourtant le secret d’enrichir une énorme quantité de ces sangsues toujours à l’affût des calamités publiques qu’ils font naître au lieu d’apaiser, et cela pour être à même d’en profiter avec plus d’avantages. La fin de ce règne, si sublime d’ailleurs, est peut-être une des époques de l’empire français où l’on vit le plus de ces fortunes obscures qui n’éclatent que par un luxe et des débauches aussi sourdes qu’elles. C’était vers la fin de ce règne et peu avant que le Régent eût essayé, par ce fameux tribunal connu sous le nom de Chambre de Justice, de faire rendre gorge à cette multitude de traitants, que quatre d’entre eux imaginèrent la singulière partie de débauche dont nous allons rendre compte. ”
Pauvert a changé la lecture de Sade, Annie Le Brun l’a éclairée. Après la biographie Sade vivant, voici une nouvelle édition du livre le plus vertigineux du marquis. Préface d’Annie Le Brun les 120 journées de sodome en mars
Vous souvenez-vous de L’Homme qui savait la langue des serpents ? Saviez-vous que son traducteur, en plus de l’estonien, enseigne le basque, jongle avec les rudiments de dizaines d’autres langues et possède une des plus grandes bibliothèques personnelles de grammaires au monde ? Armé de ses quelque 1 200 grammaires, de plus de 800 langues différentes, Jean-Pierre Minaudier nous explique avec humour et quantité d’exemples pourquoi chaque langue est une vision particulière du monde... poésie du gérondif en avril
Où on découvre que le dessinateur Boll est aussi un drôle d’écrivain. Un crime a été commis, mais qui est le coupable ? Joël Armando et bien d’autres vont mener l’enquête. L’hôtel particulier de la rue des Cailloux-qui-Moussent est bouclé. Les amoureux des Monthy Python et les adeptes d’Eduardo Mendoza vont être heureux.
Le Tripode poursuit son entreprise de parution de l’œuvre intégrale d’Edward Gorey. En 2014, deux nouveaux chef-d’œuvre : L’Aile ouest (l’hommage du maître à Max Ernst) et le cultissime L’Invité douteux.
L’aile ouest en mai L’Affaire est dans le sac L’invité douteux enàoctobre enlemai He’s back !en Onpapier avait pris bus avec lui à Paris, ce sera cette fois-ci le métro Tokyo. Une nouvelle version de ce texte assez culte, avec notamment une longue exploration
à paraître en septembre Extraits de l’introduction
C
Il existe un blog américain, tenu par un drôle de lecteur, qui fait un inventaire très argumenté de chefs-d’œuvres méconnus. Pour certains, comme les romans d’Arno Schmidt (c’est par là que je suis arrivé sur ce site ; Arno Schmidt est un autre de mes dadas), cela peut se comprendre, car ils restent d’une lecture ardue. D’autres, en revanche, sont oubliés uniquement parce qu’ils sont bizarres, inclassables. Et parfois non traduits en français. C’était le cas de Wish Her Safe At Home, de Stephen Benatar. Lecteur américain, je te bénis. Non seulement pour m’avoir fait découvrir une perle (lire les extraits de l’introduction ci-contre) mais aussi pour m’avoir donné l’intuition de partager ce coup de cœur avec Christel Paris qui, du coup, en fera la traduction... TOUT VA BIEN ? (titre provisoire) parution en septembre
’ est en 1982 que j’ai lu Wish her safe at home pour la première fois, alors que j’étais président du jury pour le Booker Prize. La règle était la suivante : tous les éditeurs en Angleterre ne pouvaient proposer que deux romans – et on pouvait supposer qu’ils choisiraient les deux meilleurs parmi leurs publications. Ce qui signifiait que près de cent romans – parmi les têtes de liste de l’année – étaient en compétition. Les membres du jury avaient environ quatre mois pour les lire tous ; il était donc conseillé de prendre des notes au fur et à mesure des lectures afin d’éviter que les histoires ne se confondent dans un brouillard mental. Pour ma part, il ne s’agissait jamais à chaque fois que de quelques lignes. Cependant, l’autre jour, j’ai cherché ce que j’avais écrit à propos de Wish her safe at home, et j’ai retrouvé une page entière remplie de ma minuscule écriture. J’avais établi une liste d’une quarantaine de pages auxquelles se reporter et des notes qui faisaient référence aux passages qui me semblaient (et me semblent encore) les plus brillants. En haut de la page, j’avais rédigé un résumé qui donnait un aperçu général du livre : « Impressionnante étude psychologique d’une femme qui devient folle, avec discrétion et élégance. Tout ce qui est raconté est perçu à travers son point de vue à elle : c’est là que réside le talent de l’auteur. Ainsi, quand elle est confrontée au monde extérieur, vous êtes capable de la comprendre et sa folie vous met mal à l’aise. »
« Être mal à l’aise » : c’est tout le problème, et c’est ce qui paraît résumer parfaitement la réaction des autres membres du jury quand j’ai commencé à m’enthousiasmer pour ce livre dès notre première réunion. N’importe qui ayant fait partie
d’un jury de prix littéraire saura que de grandes différences entre les goûts personnels de chacun se font jour dès lors que se prépare le travail de sélection. L’hypothèse selon laquelle cinq personnes venant du même milieu culturel ressentent à peu près la même chose à propos d’un livre qu’ils ont lu attentivement ne tient plus dès les cinq premières minutes de discussion. Et, dans ce cas particulier, c’est exactement ce qui s’est passé, à la différence près que les autres membres du jury étaient des gens d’une grande intelligence, dont je respectais les opinions. Cependant, leur réaction à mon plaidoyer pour le roman de Benatar se situait entre l’embarras et le malaise physique, presque comme si j’avais fait une proposition indécente. Je ne me souviens pas exactement de ce qu’ils répondirent ; en revanche, je sais parfaitement qu’il s’agissait de tout autre chose qu’une critique raisonnée et méthodique du roman. Il s’agissait davantage d’une envie plus ou moins consciente d’abandonner, de se débarrasser d’un sujet par trop perturbant, voire pénible. Et nous l’avons donc rejeté, puisque c’était une voix contre quatre. Rétrospectivement, leur mauvaise volonté à vouloir poursuivre la discussion témoigne, me semble-t-il, de la force de ce livre qui leur avait tapé sur les nerfs : rien de moins surprenant, puisque que c’est l’un des livres les plus dérangeants que j’ai jamais lus ; et, même si c’est un bien étrange hommage à rendre à un ouvrage que je considère comme un chefd’œuvre, je connais un certain nombre de personnes à qui je déconseillerais de le lire. Pour être franc, c’est un livre qui dérange, parce que Rachel, la narratrice folle, nous ressemble beaucoup. (…)
Vous pourriez dire que l’histoire d’une personne fondamentalement bonne, mais folle et qui vit dans l’illusion, démasquée par ses mésaventures, avec des conséquences souvent ridicules, vous pourriez dire que cette histoire ressemble à celle du Don Quichotte de Cervantes qui est, sans aucun doute, l’un des chef-d’œuvre de la littérature mondiale. Mais les différences entre les deux textes sont plus importantes que leurs similitudes : Rachel est seule – elle n’a pas de serviteur ou de protecteur comique à l’inverse de Don Quichotte et, surtout, la différence la plus importante est que nous sommes dans sa tête, tandis que le chevalier fou de Cervantes est perçu de l’extérieur. Il faut aussi prendre en compte, bien sûr, le fait que Rachel est une femme et que Benatar, par une incroyable prouesse d’ambivalence sexuelle, est entré dans la conscience d’une femme : ce que très peu d’auteurs masculins ont réussi à faire (c’est tout au moins ce qu’il me semble, les lectrices en seront les juges ultimes). Ces disparités rendent la comparaison avec Don Quichotte peu pertinente. Cependant, aucun autre archétype littéraire ne s’impose à l’esprit. En y repensant, mes collègues membres du jury du Booker Prize me semblent avoir eu encore plus tort qu’il n’y apparaissait à l’époque : mon délit – qui consiste à leur avoir lâchement cédé au lieu de camper sur mes positions – est d’autant plus consternant. J’espère que cette introduction tiendra lieu, en quelque sorte, d’expiation. John Carey Merton College, Oxford Été 2007
à paraître en octobre
J’ai rencontré Fabienne Yvert sur un modeste salon de livres, elle y vendait elle-même ses ouvrages imprimés au plomb... Après Papa Part, Maman Ment, Mémé Meurt (qui sera d’ailleurs réédité à cette occasion, un best-seller de poésie !), voici un autre texte sur sa grand-mère, écrit à quatre mains avec Véronique Vassilou, pour la première fois imprimé en offset.
Un jour, Anna Boulanger envoie un courrier à un éditeur, mais oublie d’y glisser ses dessins... Après Le Haret québécois (Attila/Le Tripode, Pépite coup de cœur de Montreuil en 2011), voici son nouvel album, dédié aux rêves éveillés, aux monstres et aux sons étranges.
rose & madelEine en octobre
tintamarre en octobre
He’s back ! On avait pris le bus avec lui à Paris, ce sera cette fois-ci le métro à Tokyo.
Les Certitudes du doute conclut le grand cycle que Goliarda Sapienza avait intitulé Autobiographie des contradictions. Récemment réédité en Italie par son mari et défenseur de toujours, Angelo Maria Pellegrino, le texte repose sur un jeu de cache-cache entre Goliarda et Roberta, une jeune militante des années de plomb. à sa manière, si singulière et exaltée, Goliarda Sapienza nous fait partager les arcanes d’une passion amoureuse qui ne dit pas son nom. les certitudes du doute en octobre
à paraître en novembre
Vous dérogez à la règle de la Foire du livre de Francfort en vous promenant dans les allées sans rendez-vous. Vous découvrez dans un recoin lointain du salon, sur le stand A paraître aussi en avril-mai-juin d’un imprimeur d’art, des livres à la beauté étonnante. On vous explique qu’il s’agit d’un ensemble de 6 recueils conçus dans les années 1920 par un des plus grands maîtres de l’illustration Antonio Rubino, pour aider les enfants à jouer avec le monde. TOUT VA BIENitalienne, ? (titre provisoire) VousParution restez deux heures sur le stand. Vous lisez. Vous relisez. Et vous repartez avec les en septembre. droits de publication pour la France. La vie est belle. l’école des jouets en novembre
Tout est dans le titre. Un recueil de civilités délirant écrit et illustré par un des esprits les plus farfefus d’Allemagne : l’écrivaine et poète Ror Wolf. Déniché grâce à la ténacité sans faille de la libraire-agent Catherine Houssay (merci Madame !). Traduit avec bonne humeur par Chantal Philippe, à qui nous devons la découverte en France de Magda Szabó... Le Grand Guide de Raoul Tranchirer pour toutes les situations de la vie en novembre
Le Tripode 16, rue Charlemagne 75004 Paris info@le-tripode.net L’équipe du Tripode Marguerite Demoëte Frédéric Martin Christel Paris Joanie Soulié Affiches, éditions limitées, dessins originaux, objets incongrus, lampes interlopes, tirages d’art. Nous disposons de tout cela. Pour l’organisation d’une vitrine de librairie ou un cadeau que vous souhaitez faire, n’hésitez pas à nous contacter. Libraires, une info ? 01 48 87 67 07 (Joanie) Journalistes, une info ? 06 75 98 08 22 (Marguerite)
Brochure conçue par l’équipe du Tripode avec Jean-Yves Samacher et Corinne Pauvert / Photos de couverture : tapuscrit de C. S. Wright et maison de Phelonise Willie.