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CARTE BLANCHE

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ENVIRONNEMENT

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LA CARTE BLANCHE

20 JOURS DE CONGÉ DE PATERNITÉ? BIEN, MAIS ...!

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PAR ROMAIN BEAUMONT

Le passage d’un congé de paternité de 10 à 20 jours en Belgique, prévu dans le nouvel accord de gouvernement, est un élément important afin de promouvoir l’égalité des sexes. Mais la réalité est légèrement autre, car une différence flagrante fait toujours rage en dépit de la parité. En effet, tandis que les femmes peuvent obtenir jusqu’à 15 semaines de congé de maternité, les hommes n’auront prochainement droit qu’à 20 malheureux jours, ce qui pousse les nouvelles mères à assumer quasiment seule la parentalité considérée comme naturellement féminine, entraînant la discrimination professionnelle et salariale de ces citoyennes…

Vous, lecteurs! Vous que d’autres appellent peut-être «papa» et «maman». Vous qui avez peut-être comme projet d’avenir, tant proche que plus lointain, d’avoir un enfant voire même plusieurs. Vous qui vous sentez tout simplement concernés par la situation parentale actuelle et à venir, je m’adresse à vous. Même si vous n’êtes qu’étudiants, ce sujet vous impactera sûrement dans quelques années, et les mesures et combats d’aujourd’hui seront vos droits à l’avenir. Voilà pourquoi ce plaidoyer vaut la peine d’être lu, c’est probablement vos droits futurs qui se trouvent dans cet article.

Qu’y a-t-il de plus beau que la naissance de son enfant? Imaginez-vous, vous êtes aux côtés de votre femme venant d’accoucher, vous devenez père et ce choc vous fait fondre… Vous profitez pleinement de ce congé qui vous est accordé pour prendre soin de votre petite famille. Malheureusement, selon l’État belge, 20 journées, 480 malheureuses petites heures, sont suffisantes pour profiter d’un des plus heureux événements de votre vie, la naissance d’un enfant, et pas n’importe lequel: le vôtre… 20 jours, 480 heures… cela passe vite. Et tandis que vous retournez au boulot, votre épouse, désormais seule, peine à récupérer de son accouchement… On estime en effet qu’il faut 3 à 6 mois afin qu’une mère puisse récupérer d’une grossesse. Votre conjointe est devenue femme au foyer en congé de maternité, et vous, vous «ramenez l’argent à la maison». Je pourrais placer cette phrase dans un contexte moyenâgeux que cela n’étonnerait personne. Et c’est bien là que se situe le problème!

En effet, l’État belge, en laissant inchangée cette forte différence de durée entre un congé de paternité et de maternité, prône une certaine part de sexisme et ne contribue pas à l’évolution des mentalités. Plus concrètement, par sa passivité, l’État soutient une parentalité laissée aux femmes; ce qui, professionnellement, peut nuire à l’égalité des chances en raison de la différence de temps de congé et donc de la différence de productivité entre hommes et femmes. C’est d’ailleurs ce que dit Marilyse Hamelin, journaliste indépendante et auteure de Maternité, la face cachée du sexisme: «Tant que la parentalité sera considérée comme une responsabilité naturellement féminine, il n’y aura pas de vraie égalité des chances pour les femmes, toutes les femmes, au travail comme à la maison». Ce qui entraine, toujours selon elle: «La discrimination professionnelle liée à la maternité [qui] s’opère de manière systémique à l’encontre de toutes les femmes, qu’elles soient mères ou non, et ce, peu importe leur âge». Marilyse, féministe convaincue, se pose alors une question: «Comment peut-on faire en sorte que le fait d’avoir des enfants soit accueilli favorablement, ou au moins considéré comme un passage normal de la vie, plutôt qu’un problème?». Dans quelle mesure le manque de jours de congé de paternité accentue-t-il le sexisme, le patriarcat et les pensées arriérées de la parentalité comme responsabilité féminine? Je vais, à elle, à vous et à toute personne se posant la même question, tenter d’apporter une solution en proposant un autre modèle. Il suffit de prendre pour exemple le système scandinave, plus précisément, celui de la Suède, connu pour être le plus égalitaire en matière de congés parentaux au sein de l’Union européenne. Le pays aux couleurs bleue et jaune se différencie du nôtre en ce sens que ce sont les parents qui décident du partage de leurs congés parentaux. Ainsi, 480 jours sont accordés au couple, dont 60 intransférables sont donnés aux hommes et 60 autres intransférables, aux femmes. Les jours restants sont donc à partager comme le couple le souhaite.

Et il est vrai, aussi, que certains pays au sein du continent européen font pire que la Belgique. Citons en exemple la Suisse qui n’octroie – tenez-vous bien – aucun jour de congé de paternité. Toute la charge parentale est volontairement donnée aux femmes. Alors oui, la Belgique se trouve dans la moyenne européenne quant au nombre de jours de congés parentaux, mais cela ne doit pas pour autant nous faire baisser les bras si nous tenons à profiter d’un événement qui n'arrivera en moyenne qu’1,68 fois dans notre vie. Ce sont les premiers instants de la vie elle-même que nous découvrons lors d’une naissance. Durant ces semaines cruciales, il faut rapprocher les parents autour de l’être célébrant leur union et réclamer ce droit de la vie. Où et à qui faut-il le demander? À l’Europe, car c’est elle qui doit inscrire les congés de paternité dans le droit européen et réglementer ceux-ci… En n’intégrant pas ce droit, l’Europe nie partiellement l’évolution des mentalités en la matière.

Requérons un changement! Demandons-le à l’État belgeet à l’Europe! Ce droit est légitime étant donné que ces mêmes instances défendent l’égalité des sexes. Requérons une évolution comme le fait l’Espagne, dont les congés de paternités sont actuellement de 8 semaines, mais seront étendus à 16 semaines en 2021. Les hommes obtiendront 16 semaines de congé de paternité, soit autant que leurs conjointes. Emboitons le pas de cette noble cause. Profitons de la source de la vie elle-même. Rétablissons le principe d’égalité des sexes et d’égalité des chances et faisons évoluer ces considérations archaïques de «la parentalité comme responsabilité féminine».

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