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La ville aux champs


La ville aux champs Colloque du 7 mars 2000 PrĂŠface de Michel Delebarre

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Les auteurs Catherine Bonvalet, chercheur à l’Institut national des études démographiques. Arnaud Bouteille, directeur général de FIDERIM. Michel Delebarre, ancien ministre d’État, président du Conseil régional Nord Pas-de-Calais, président de l’Établissement public foncier du Nord Pas-deCalais. Pierre Donadieu, professeur à l’École nationale supérieure du paysage. Dominique Dron, cellule stratégie et prospective, ministère de l’Environnement. Max Falque, consultant, Le Barroux. André Fleury, ingénieur agronome, professeur à l’École nationale supérieure du paysage. Vincent Fouchier, chargé de mission au Secrétariat général des grandes opérations d’urbanisme, ministère de l’Équipement. Jean Frebault, président de la section aménagement et environnement du Conseil général des ponts et chaussées. Gérard Larcher, sénateur-maire de Rambouillet. Sébastien Loew, consultant, Londres. Stéphan Muzika, directeur général de l’Établissement public de l’Ouest RhôneAlpes. Jean-Pierre Orfeuil, professeur à l’Institut d’urbanisme de Paris. Vincent Piron, directeur de la stratégie et du développement, Groupe SGE Concession. Guy Poirier, maire de Meulan. Guy Portmann, président-directeur général de France-Terre. Jean-Michel Roux, directeur de l’aménagement, Société centrale d’équipement du territoire. Bernard Vorms, directeur de l’Agence nationale de l’information sur le logement. Marc Wiel, directeur de l’Agence de développement et d’urbanisme du pays de Brest.

La rédaction de cet ouvrage a été coordonnée par Muriel Martinez


Préface Le présent ouvrage restitue les communications et les débats du colloque organisé par l’ADEF en mars 2000 sur le thème de la périurbanisation. Alors que se préparent et se discutent les contenus de la loi Solidarité et Renouvellement urbain (SRU), l’état des lieux dressé à l’occasion de ce colloque par l’équipe de l’ADEF et ses invités nous montre combien, trente ans après l’émergence de ce phénomène, la question du devenir des territoires ruraux péri-urbains conditionne aujourd’hui les stratégies de reconquête urbaine portées et souhaitées par les pouvoirs d’agglomération. Force est de constater que les territoires ruraux périphériques des agglomérations sont porteurs d’une réelle attractivité face aux besoins fonciers immédiats des ménages et des entreprises. Les stratégies de recyclage foncier, tout en étant porteuses dans le moyen et le long terme de potentialités de revalorisation urbaine, appellent des investissements publics importants et constants qui font hésiter bien des élus locaux. Par ailleurs, la permanence du phénomène de péri-urbanisation pendant des décennies a contribué à construire l’identité particulière de ces territoires qui abritent aujourd’hui une population de culture urbaine attachée à une ruralité retrouvée. Au-delà du débat sur l’actualité et l’attractivité de notre modèle urbain, il faut reconnaître que l’accroissement généralisé des déplacements routiers et des consommations de terres agricoles qui caractérisent la péri-urbanisation pose un réel problème de gestion environnementale des aires urbaines concernées. Face à ces phénomènes, j’ai toujours eu l’intime conviction que la formulation et la mise en œuvre de politiques foncières publiques constituaient la cheville ouvrière de tout mécanisme de régulation territoriale et notamment en matière de contrôle de la péri-urbanisation. Dans de grandes régions urbaines comme le Nord - Pas-de-Calais, cette question revêt une réelle dimension supra locale dont la collectivité régionale doit se saisir.


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C’est ce qui a conduit les élus de cette région à demander à l’État la création d’un Établissement public foncier compétent sur l’ensemble du territoire régional qui, après avoir été pendant près de dix ans l’outil de la requalification des friches industrielles, a vocation aujourd’hui à élargir son action tant dans le domaine du renouvellement urbain qu’au service de stratégie de contrôle de la périurbanisation. La tenue à Lille en avril 1999 d’un colloque sur les politiques foncières en région avait permis d’identifier, avec la participation des autres régions françaises, la richesse et la pertinence des questions foncières à approfondir à cette échelle territoriale, tant dans le domaine environnemental et économique, que social et urbain. Le colloque de l’ADEF en traitant de l’actualité de la question de la péri-urbanisation a fait ainsi écho à ces préoccupations. Je remercie son équipe pour ce travail d’explicitation de la réalité qui constitue une étape indispensable de la prise de décision publique. Michel DELEBARRE, Ancien ministre d’État Président du Conseil régional Nord - Pas-de-Calais


Introduction Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, et tout d’abord, merci Monsieur le Président, merci à l’ADEF de m’avoir invité. C’est sans doute parce que j’ai commis le premier rapport parlementaire sur le sujet qui est donc la prise de conscience un peu politique par le Parlement, que le problème du péri-urbain n’était pas qu’un problème de consommation du territoire mais un problème d’organisation du territoire, d’organisation de la vie sur le territoire et aussi, en même temps, de maîtrise d’un certain nombre d’évolutions. Ce problème, nous l’avions vu et imaginé à partir des réflexions qui nous avaient conduits dans le cadre de la préparation de la loi sur l’aménagement du territoire, dite loi Pasqua, en 1994, à réfléchir notamment dans la réorganisation urbaine aux formes urbaines de demain et notamment à la maîtrise de l’étalement urbain, que nous avions fixé aux limites des transports urbains collectifs péréqués ou interurbains collectifs péréqués, puisque nous voyions bien qu’il y avait là des facteurs limitant au plan financier des investissements. Mais, je voudrais revenir à mon rôle de président en vous souhaitant la bienvenue. En souhaitant la bienvenue à ceux qui, ce matin, vont nous faire aborder une phase de sémiologie et de diagnostic. Je n’oublie pas, que je suis vétérinaire et que tout commence par poser un diagnostic. Le premier des éléments, c’est de dire ce qu’attendent les Français. Et ce qu’ils attendent, on le voit dans les résultats d’un sondage IFOP, commandé au printemps 1999 par moi-même pour le compte du Sénat, alors que j’étais le rapporteur de la loi Voynet. Les Français interrogés disaient à 70 % qu’ils souhaitaient vivre soit dans une commune rurale, soit dans une ville moyenne de province. C’est-à-dire qu’ils habitent là où ils ne désirent pas vivre aujourd’hui, si je m’en tiens à ce premier élément. Pardonnez-moi Monsieur le Président, vous qui venez du Nord, ils préfèrent vivre à 61 % dans le Sud ! L’héliotropisme est donc un phénomène extrêmement fort et j’allais dire avec un tropisme particulier pour le Sud-Ouest, beaucoup plus d’ailleurs que pour le SudEst. C’est assez intéressant de le voir comme si le Sud-Est ne condui-


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sait qu’à la retraite et le Sud-Ouest, par ses talents gastronomiques, pouvait conduire vers une forme de convivialité particulière. En tout cas, la région parisienne ne fait que 7 % et le Nord quasiment la même chose. Donc, vous voyez que nous sommes dans le même lot. À la troisième question : « où est-ce que vous préférez vivre ? » La ville ne fait que 16 %, ce qui recoupe la première observation que nous avions faite. Et pourtant, ils sont résignés puisque 63 % d’entre eux pensent que, dans dix ans, ils vivront au même endroit qu’aujourd’hui. Donc, cette espérance de vie à la campagne est un rêve continu, qui en même temps amène à ce que cela ne reste que rêve. Qu’est-ce qui sera le plus moderne ? Question qu’on leur pose et qui, d’ailleurs, recoupe un certain nombre d’observations que l’on fait, mais je crois et je suis même sûr que le sujet va être abordé par Max Falque sur l’étalement urbain aux États-Unis – où dans un certain nombre d’États, les cadres supérieurs partent à la campagne, de même qu’au Royaume-Uni. Ainsi, dans notre sondage, 48 % pensent qu’il sera beaucoup plus moderne de vivre à la campagne, et si vous ajoutez le cadre péri-urbain soit 25 %, c’est 73 % des Français qui pensent que ce n’est pas dans la ville qu’il sera moderne de vivre. Sur la définition de l’aménagement du territoire, les Français ont une vision de l’équilibre ville/campagne et de la protection de l’environnement qui est dominante, puisque ce thème représente 48 % de leur attente, alors que la vision d’aménagement, d’infrastructures, d’économie ne représente que 26 %. C’est dire qu’aujourd’hui, les Français ont donc fait le choix qui peut nous conduire à l’étalement urbain. Il faut donc au moment où l’on parle de recyclage, où l’on parle de renouvellement urbain, se faire à l’idée que l’image, qu’ils ont d’une partie de la ville aujourd’hui, est une image qui n’est pas positive. Et l’on voit cette difficulté quand on pratique le renouvellement urbain, ce que je fais depuis dix ans dans le cadre d’une ZPPAUP, avec la reconquête du cœur de ville de Rambouillet, qui n’a crû qu’en son centre et quasiment pas sur sa périphérie. C’est d’ailleurs une ville qui a la particularité d’avoir un centre « excentré » puisque le domaine présidentiel, auparavant domaine royal, a fait que la ville s’est construite le long de la route reliant Paris à Chartres, le long du domaine royal. Mais l’étalement urbain a été interrompu par un plan d’occupation des sols qui a maintenant onze ans, au bénéfice du centre-ville. Je ne vous infligerai pas ce qui était l’observation de mon rapport, car si les Français rêvent de campagne et, en tout cas, s’installent dans le péri-urbain pour un certain nombre de raisons que nous analyserons ce matin, notamment comme mode de compensation transi-


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toire entre ville et campagne. Le péri-urbain est pourtant un lieu de tensions humaines, car moins de 28 % de ceux qui y habitent connaissent le monde agricole, 65 % ont une simple notion d’appropriation d’un paysage qui serait différent ou d’un espace qui serait différent de l’intérieur de la ville. Une étude réalisée à NantesBouguenais a montré que 60 % des habitants des quartiers périurbains n’allaient jamais au centre de Nantes, et 40 % au moins ne connaissaient pas l’espace rural qui les entourait, comme s’il y avait une double relégation, avec un phénomène de double octroi, dans lequel les habitants s’enfermeraient en quelque sorte. Pour ne pas faire plus long et poser les principes, à partir de l’avis des Français, de la réflexion que vous avons conduite au Sénat, car, naturellement, l’utilisation du territoire fait partie « consubstantiellement » et constitutionnellement de la mission de la chambre qui doit représenter les collectivités territoriales de la République : je me suis posé, personnellement, cette question de la consommation de l’espace mais aussi du coût de la consommation de l’espace et des phénomènes induits par cette consommation de l’espace. Voilà pourquoi, il me semble important que nous puissions effectuer cette phase de sémiologie et de diagnostic. Et c’est donc à Catherine Bonvalet, directrice de recherche à l’INED, qu’il va revenir d’ouvrir cette première partie qui est d’observer sur le long terme et de se donner le temps. Nous aurons plus tard des chiffres d’actualité qui seront dans la transparence orale, faute d’être sur la transparence d’un écran, mais cela n’en aura que plus de vie : il s’agit des tendances sur le long terme de la démographie résidentielle et d’un certain nombre de courbes qui ne sont peut-être pas des fatalités mais qui recouvrent un certain nombre de politiques foncières et de modes de vie. Gérard Larcher Vice-président du Sénat Sénateur des Yvelines Maire de Rambouillet


I La mesure du phénomène


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