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SUMMER
Discover Bologna
2021
Energie fir haut a muer Depuis plus de 120 ans, nous sommes actifs dans la fourniture et la distribution de gaz naturel. Notre activité principale a certes toujours été le gaz naturel, mais en tant qu’acteur responsable sur le marché de l’énergie, nous sommes disposés à soutenir la transition énergétique. Dans cette optique, nous avons soutenu plus de 4.000 projets d’économies d’énergies depuis 2015 auprès de nos clients. En 2018 alors, nous avons mis en place le projet éolien SUDWAND et parallèlement
nous développons l’installation et l’exploitation de projets photovoltaïques, afin de produire localement de l’énergie verte. SUDGAZ se trouve en pleine transition et afin de manifester l’expansion de nos activités vis-à-vis de nos clients, de nos partenaires et de nos actionnaires, SUDGAZ devient SUDenergie.
Ensemble, contribuons au développement durable !
sudenergie.lu
Edito
SUMMER 2021 ISSUE Published by Maison ModerneTM exclusively for LuxairTM. With selected content from PaperjamTM and DelanoTM publications. Cover photography Karl Delandsheere shotbykarl.be Publication maison moderne head of content strategy
Emmanuelle Thivollard assistant editorial director
Marie-Laure Jouve art directors
José Carsi, Marielle Voisin layout
Guillaume Sinopoli luxair head of marketing
Vincenzo Manzella Advertising Maison Moderne Brand Studio Call (+352) 20 70 70 – 300 www.maisonmoderne.com director
Youcef Damardji strategic business development advisor
Francis Gasparotto
head of sales operations and people
Lionel Scaloni
head of media sales and solutions
Dominique Gouviaux Publisher Maison ModerneTM ceo
Geraldine Knudson cfo
Etienne Velasti founder and chairman
Mike Koedinger
No part of this publication may be reproduced without prior written permission by the publisher. Maison ModerneTM is used under licence by MM Publishing and Media S.A.
natureOffice.com | DE-261-JYACEBD
#SpottedByTravellers
Photo
Luxair
Vous êtes passionné par le voyage et aimez explorer des lieux originaux ? Rejoignez la communauté des Luxair Spotters et vos souvenirs seront peut-être publiés dans ce magazine ! Pour cela, dénichez votre endroit et téléchargez votre photo sur le site. Are you passionate about travelling and exploring original addresses? Then join the Luxair Spotters community and your memories may be published in this magazine! To do so, spot your place and upload your picture on the website.
www.luxairspottedbytravellers.lu
Welcome aboard! Bienvenue à bord !
Since its foundation, Luxair has guaranteed the citizens of Luxembourg and the Greater Region a travel experience commensurate with the highest standards of safety and comfort. Summer 2021 gives us the opportunity to rediscover the pleasure of travelling and Luxair is excited to share new adventures with its customers. We now fly to 85 popular destinations – including 16 brand new ones – where our passengers can enjoy the very best travel experiences. To make flying with Luxair even more fun, we have launched a new in-flight magazine called Inflight – covering all the hottest topics and offering insider tips. With a new look and feel, Inflight offers passengers the chance to kick back, relax and leaf through a magazine while on board. Through Inflight, Delano and Paperjam – two of Luxembourg’s key media brands – bring you all the very latest lifestyle, cultural and business news from Luxembourg and the Greater Region. In this edition’s Travelblog, discover Bologna, the Italian city of culture, renowned for its excellent cuisine, and four other fantastic destinations that could be next on your bucket list. Happy reading and enjoy your flight! EN
Depuis sa fondation, Luxair garantit aux citoyens du Luxembourg et de la Grande Région la possibilité de voyager selon les plus hauts standards de sécurité et de confort. Cet été 2021 nous donne la possibilité de retrouver le plaisir de voyager. Une envie que Luxair partage avec ses clients et à laquelle elle répond, avec énergie, en enrichissant son offre : 85 destinations, dont 16 nouveautés, vers lesquelles les passagers pourront s’envoler et s’offrir des moments de détente. Pour rendre le vol encore plus agréable, Luxair lance son nouveau magazine de bord, Inflight, au contenu riche et varié. Ce magazine, au design frais et dynamique, vous accompagnera lors de votre séjour à bord et vous offrira un moment de détente avant même d’arriver à destination. À travers Inflight, Delano et Paperjam, deux réalités incontournables du paysage médiatique luxembourgeois, vous transpor tent dans l’actualité lifestyle, culturelle et business du Luxembourg et de la Grande Région. Dans le Travelblog de cette édition, découvrez Bologne, la ville italienne de l’art, renommée pour son excellente gastronomie, et quatre autres destinations pour vous inspirer pour vos prochaines escapades. Bonne lecture et bon vol ! FR
GIOVANNI GIALLOMBARDO Chairman of the Board of Directors of Luxair
SUMMER 2021
3
Specific investment products managed by following asset managers have received the use of LuxFLAG Label in 2021 Full list of labelled product is available on www.luxflag.org
Supporting Sustainable Finance
Sustainable Finance
Green Finance ESG SFDR & SDGs Taxonomy Climate Finance
SRI
Responsible Investing Social Finance Impact Investing
How to choose the most sustainable investment product?
We have a
SOLUTION
LuxFLAG offers specific labels for investment products active in Sustainable Finance. LuxFLAG Label is recognized for its high standards and rigorous assessment of applicant investment funds’ investment strategy, ESG integration into the investment process as well as an affirmation of their transparency to investors which are all key components of the Eligibility Criteria of LuxFLAG Label
WWW.LUXFLAG.ORG +352 22 30 26 1
info@luxflag.org
Luxembourg Finance Labelling Agency (LuxFLAG)
| 12, Rue Erasme | L-1468 Luxembourg
Summer 2021
Travelblog 10 ITALY
Bologna –
12 ROMANIA
Bucharest –
14 POLAND
p. 16 Fuerteventura, the second largest of the Canary Islands. Fuerteventura, deuxième plus grande île des Canaries.
Krakow –
16 GREECE
Thessaloniki
Ristretto
–
26 SERGE KRANCENBLUM
18 SPAIN
« Proposer l’offre de services la plus complète »
Fuerteventura –
20
–
Luxair News
28 DIEGO MANZETTI
Flights to Dubai to resume in September
“Look at insurance law from a broader perspective” –
30 MARC HILGERT
p. 30 Tatiana Fabeck, architect in Luxembourg for 25 years. Tatiana Fabeck, architecte au Luxembourg depuis 25 ans.
« La demande est plus marquée pour les meubles » Conversations
Photos
Patronato de Turismo de Fuerteventura, Andrés Lejona, Luciano Mortula
32 TATIANA FABECK
« Nous sommes en contact avec tout le spectre de la société » –
44 NASIR ZUBAIRI
“Suddenly we saw a big spurt in digital demand” –
50 FRANÇOIS GROSDIDIER
p. 18 Dubai has plenty of surprises in store for visitors. Dubaï possède de multiples atouts pour surprendre ses visiteurs.
« Le phénomène luxembourgeois est une formidable chance » SUMMER 2021
7
ACTIF Oui, vous pouvez imaginer l’avenir avec sérénité : innovant, audacieux même, ou simplement confiant. Oui, vous pouvez oser aller toujours plus loin ; au bout de vos projets et de vos rêves parce que vous êtes parfaitement bien accompagné par nos équipes d’experts. Des équipes dédiées qui prennent activement soin de votre patrimoine pour que demain vous appartienne. Vous souhaitez en savoir plus ? www.degroofpetercam.lu ou prenez rendez-vous au +352 45 35 45 42 19
Imagine Tomorrow since 1871
Banque Degroof Petercam Luxembourg S.A., 12, rue Eugène Ruppert - L-2453 Luxembourg, R.C.S. B25459.
Et vous, comment IMAGINEZVOUS l’avenir ?
Summer 2021
Conversations 56 CHRISTINE MAJERUS
« J’ai dépassé le stade où l’on se plaint de ces inégalités-là » –
60 VINCIANE ISTACE
“Collective dimension to generate shared value” –
64 JEAN-PIERRE ZIGRAND
« Je n’entrevois pas d’explosion de la bulle » –
70 BÉATRICE BELORGEY
« Il est temps de passer à un développement plus durable » –
80 ALEX REDING
p. 54 Christine Majerus is undoubtedly the number 1 Luxembourg sportswoman of the 2010s. Christine Majerus est sans conteste la sportive luxembourgeoise n° 1 des années 2010.
90 PIERRE GRAMEGNA
« Faire avancer le milieu et partager ma passion »
“We ain’t seen nothing yet”
86 SARA NOEL COSTA DE ARAUJO
96 KELLY HEBERT
–
« Amorcer une évolution dans la conception de nos habitats »
–
« La demande pour l’ESG vient de partout » –
98 PIERRE AHLBORN
« Le rôle des banques a changé » –
104 CHLOÉ REUTER
“There’s some great creativity coming out of China”
Photos
Andrés Lejona
Lifestyle 110 MA MAISON 112 MON STYLE 116 MA COLLECTION 118 MA RECETTE p. 116 Frédéric Humbel, with his collection of tweed suits and pipes. Frédéric Humbel et sa collection de costumes en tweed et de pipes.
122 #SpottedByTravellers SUMMER 2021
9
Travelblog
SANCTUARY OF SAN LUCA EN Located in Colle della Guardia hill, this religious house of worship features the longest portico worldwide with more than 600 archways. The road leading to the church from the city centre is popular among cyclists and runners. The view from the top pays off. FR Situé sur la colline Colle della Guardia, ce sanctuaire religieux possède le plus long chemin bordé de portiques au monde, avec plus de 600 arches. Le trajet du centreville au sanctuaire est très prisé des cyclistes et des coureurs sportifs. Arrivé au sommet, la vue récompense de tous les efforts.
www.santuariodisanluca.it
Bologna 1H40
2 DIRECT LUXAIR FLIGHTS/WEEK*
ITALY
10
SUMMER 2021
Nightlife
Restaurant
Shopping
Leisure
Culture
Hotel
April - October
Info and bookings
TEATRO COMUNALE
PALAZZO DELLA MERCANZIA
Built in 1756 after the previous theatre was destroyed by a fire, the opera palace is the heart of the city’s cultural life. The auditorium is constructed in a bell shape, providing the audience with the best sound system regardless of where they are seated. FR Construit en 1756 après l’incendie du précédent théâtre, l’opéra est le cœur de la vie culturelle de la ville. La forme de cloche de l’auditorium assure à tous les spectateurs une expérience acoustique excellente.
This gothic building from the 14th century is the most stunning architectural landmark in Old Town’s Quadrilatero. Inside are kept the first handwritten local pasta recipes, such as the tagliatelle alla Bolognese from 1972. FR Cet édifice gothique du 14e siècle est un des plus étonnants fleurons architecturaux du quartier du Quadrilatero, dans la vieille ville. Entre ses murs sont conservées les premières recettes locales manuscrites de pâtes, comme les tagliatelle alla Bolognese (1972).
Largo Respighi 1 www.tcbo.it
www.bolognawelcome.com
Texts
David Palacios Photos
Bologna Welcome, Credit Ahimè, I Portici Hotel
EN
The Italian city in Emilia-Romagna is home to a rich medieval legacy and the perfect destination to delight the palate with local food delicacies. EN
FR Riche de son héritage médiéval, la cité d’Émilie-Romagne est aussi la destination idéale pour régaler vos papilles grâce à des spécialités locales.
TIPS
1
Producers and farmers gather every week in Mercato Ritrovato at Piazzetta Pasolini and Piazzetta Anna Magnani to offer seasonal and local products. EN
EN
AHIMÈ
I PORTICI HOTEL
Young chef Lorenzo Vecchia creates a constantly changing menu based on seasonal vegetables without forgetting some basics, such as pasta. He signs an original culinary concept, between the bistrot and the osteria, and only uses ethic-based products. FR Le jeune chef Lorenzo Vecchia renouvelle sans cesse ses menus selon les légumes de saison, sans toutefois oublier les fondamentaux tels que les pâtes. Il signe un concept culinaire original, entre le bistrot et l’osteria, et n’utilise que des produits éthiques.
Sophistication and elegance are behind this property located in a nineteenth-century palazzo. The hotel offers modern rooms and suites, a medieval icehouse turned into a tasting room and a Michelin restaurant with a refined concept by chef Gianluca Renzi. FR Dans ce palais du 19e siècle transformé en hôtel, règnent partout le raffinement et l’élégance : dans les chambres et les suites au confort moderne, dans le salon de dégustation (une ancienne glacière médiévale) et dans la subtilité des créations du chef Gianluca Renzi, aux commandes du restaurant recommandé par Michelin.
Via S. Gervasio 6e ahime.superbexperience.com (+39) 051 498 3400
Located right next to Parco della Montagnola Via dell’Indipendenza 69 www.iporticihotel.com
EN
Toutes les semaines, au Mercato Ritrovato de la Piazzetta Pasolini et de la Piazzetta Anna Magnani, producteurs et exploitants proposent des produits locaux de saison. FR
TIPS
EN
2
The narrow and picturesque streets at Ghetto Ebraico, the former Jewish area, host a booming gastronomic, cultural and shopping scene. EN
Étroites et pittoresques, les ruelles de l’ancien quartier juif du Ghetto Ebraico témoignent d’une scène gastronomique, culturelle et commerçante très vivante. FR
www.mercatoritrovato.it
* Visit luxair.lu for the updated timetable. Consultez le plan de vol actualisé sur luxair.lu.
SUMMER 2021
11
Travelblog
TIPS
1
The Palace of Parlia ment, with 365,000m2, is the world’s largest administrative building. FR Le palais du Parlement est le plus grand bâtiment admi nistratif du monde, avec 365.000 m2 de superficie ! EN
ARCH OF TRIUMPH
NOUA RESTAURANT
EPOQUE HOTEL
Located right next to the Herăstrău park, this small copy of the one in Paris honours the army’s victory in the First World War and the unification of Transylvania, Bessarabia, and Bukovina with the Romanian Kingdom in 1918. FR Juste à côté du parc Herăstrău, cette modeste imitation de l’arc de triomphe parisien célèbre la victoire de l’armée au cours de la Première Guerre mondiale et l’union des pro vinces de Transylvanie, Bessarabie et Bucovine avec le royaume de Roumanie en 1918.
EN
Chef Alex Petricean is the ambas sador of the Romanian nouvelle cuisine and presents a refined and inventive menu featuring local and seasonal products. FR Ambassadeur de la nouvelle cuisine roumaine, le chef Alex Petricean propose des menus raffinés et inventifs à base de produits locaux et de saison.
EN
7 Popa Nan Street www.nouarestaurant.ro
Intrarea Aurora 17C www.hotelepoque.ro
EN
TIPS
2
The Athenaeum offers classical music concerts in a stunning majestic interior, including historical frescos. FR Le magnifique Athénée roumain, avec ses superbes fresques historiques, sert d’écrin à des concerts de musique classique.
EN
This luxury urban retreat offers contemporary-styled suites steps away from Cişmigiu park, an indoor spa and a refined cuisine. The only Relais & Châteaux property in Romania. FR À quelques pas du parc Cişmigiu, ce luxueux refuge urbain propose des suites d’inspiration contemporaine, un spa intérieur et une cuisine raffinée. Le seul établissement Relais & Châteaux de Roumanie.
CARTURESTI BOOKSTORE
Bucharest ROMANIA
12
SUMMER 2021
EN The capital of Romania welcomes its visitors with French-inspired Belle Époque heritage, opulent buildings and a vibrant culture and nightlife.
FR Pour accueillir ses visiteurs, la capitale roumaine déploie ses nombreux atouts : un fabuleux héritage architectural d’inspiration Belle Époque, de somptueux édifices et une vie nocturne animée.
* Visit luxair.lu for the updated timetable. Consultez le plan de vol actualisé sur luxair.lu.
David Palacios Photos
2 DIRECT LUXAIR FLIGHTS/WEEK*
Texts
3H10
Ministry of Economy, Business Environment and Tourism, Noua, Epoque Hotel, Carturesti
EN A 19th-century building that used to serve as a bank is nowadays one of the most impressive bookstores in Europe and a hidden architectural gem combining the best of the old and modern styles. They have more than 10,000 books divided over six floors. FR Cette ancienne banque, construite au 19e siècle, est aujourd’hui une des plus grandes librairies d’Europe, mais aussi un joyau architectural où l’ancien et le moderne se marient à la perfection. L’établissement propose plus de 10.000 livres répartis sur six étages.
Your lifestyle...
City Concorde - Lifestyle Center is a unique shopping experience not to be missed! Only 5 km from Luxembourg City, you’ll find all you need in just one place. There are endless ways to spend your day. Be spoilt for choice among 100 stores, where you’ll find everything from home deco to over 500 fashion brands, as well as the biggest names in jewellery and luxury watch-making.
Indulge in treats from Luxembourg’s most renowned caterers or go on culinary journeys in our 15 restaurants, 2 terraces and rooftop. If you’re looking for some peace and quiet, get pampered in our beauty and hair salons, or shape up in our fitness center. For more inspiration, follow us on Instagram and check out our website!
...one place.
City Concorde | 80 Rte de Longwy | L-8060 Bertrange | Instagram: @cityconcorde | www.concorde.lu
Travelblog
Krakow 2H15
2 DIRECT LUXAIR FLIGHTS/WEEK*
POLAND
La deuxième ville de Pologne vibre d’une ambiance éclectique et écologique, sans toutefois oublier le charme et la tradition de ses quartiers historiques.
The second largest Polish city offers an eclectic and ecofriendly vibe, without forgetting the charm and tradition from its historical neighbourhoods.
FR
EN
KRAKUS MOUND
EN This tumulus from the 7th century served as a burial site and according to the legend it hosts the tomb of the city’s founder. Climb to the top to observe stunning views from Krakow’s highest point, certainly during sunrise and sunset. FR Ce tumulus du 7e siècle était un site funéraire, et selon la légende, il abrite la tombe du fondateur de la cité. Depuis son sommet, le point le plus élevé de Cracovie, vous jouirez de spectaculaires panoramas, particulièrement au lever et au coucher du soleil.
TIPS
1
The medieval master piece Altar of Veit Stoss is back in St. Mary’s Basilica after a restoration process. FR Enfin restauré, le retable de Veit Stoss, véritable chefd’œuvre de l’art médiéval, est à nouveau visible dans la basilique Sainte-Marie.
PURO KRAKÓW KAZIMIERZ
The smell of freshly baked bread is present in most parts of the city, especially in the early hours of the day. The obwarzanek is a traditional bun with 600 years of history sold in street stands. FR Partout dans la ville, et surtout tôt le matin, se répand l’agréable odeur du pain à peine sorti du four. L’obwarzanek, petit pain traditionnel, se vend dans les rues depuis 600 ans.
Luxury and design meet in this ‘hygge’ style property with artworks from local artists in the rooms, a traditional eatery and a curated spa. FR Luxe et design caractérisent le style « hygge » de cet hôtel aux chambres décorées d’œuvres d’artistes locaux. Un restaurant traditionnel et un spa proposant divers services complètent l’offre.
Żywe Muzeum Obwarzanka l. Paderewskiego 4 www.muzeumobwarzanka.com
Located in the vibrant former Jewish district Halicka 14A www.purohotel.pl
www.wawel.krakow.pl
14
EN
SUMMER 2021
EN
TIPS
2
The city has 240km cycle paths that go through the old town, parks and the banks of the Vistula river. FR 240 kilomètres de pistes cyclables serpentent à travers les vieux quartiers et les parcs en longeant la Vistule. EN
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David Palacios Photos
OBWARZANEK
Combining the Romanesque, Renaissance and Gothic styles, this national jewel used to be the centre of the political power in Poland. Do not miss Szczerbiec, the country’s original coronation sword, located in the cathedral. FR Jadis centre du pouvoir politique polonais, ce trésor national combine les styles roman, Renaissance et gothi que. Dans la cathédrale, ne manquez pas d’admirer Szczerbiec, l’épée de couronnement des rois de Pologne.
Texts
WAWEL CASTLE EN
Krakow City Hall, Puro Hotel
EN
Some accept the status quo, some challenge it. The new Taycan Cross Turismo. Soul, electrified.
Porsche Zenter Lëtzebuerg Garage André Losch S.à r.l. 5, rue Peternelchen L-2370 Howald T. +352 26 36 31 - 1 porsche.lu
Coming soon ― Summer 2021: Porsche Zenter Roost Succ. Garage André Losch S.à r.l. 4, rue André Losch L-7759 Roost porsche.lu
WLTP: Electricity consumption (in kWh/100km) combined 29.4 CO2 emissions (in g/km) combined 0 *Values determined according to the legally binding measurement method. Further information is available at www.porsche.com/wltp or from your Porsche sales consultant.
Travelblog
TIPS
1
Family winery Kechris produces retsina, an awarded aromatic and refreshing Greek wine. FR Le domaine viticole familial Kechris produit du retsina, un vin grec résiné primé, aromatique et rafraîchissant. EN
WHITE TOWER
CLOCHARD
Overlooking the Thermaic Gulf, this defensive building that once served as a communication centre for the allied forces of World War I is nowadays a symbol of the city and a museum about the town’s history from its foundation. FR Dominant le golfe Thermaïque, cet ancien ouvrage défensif servit de centre de communication des forces alliées lors de la Première Guerre mondiale. Aujourd’hui monument symbole de Thessalonique, il abrite le musée historique de la ville.
EN
EN
www.thessaloniki.travel
This elegant restaurant serves Greek recipes such as savoro fried fish marinated with raisins or raviolis with anthotyro and feta cheeses. FR Cet élégant restaurant propose des plats grecs comme le savoro, poisson grillé mariné aux raisins secs, ou des raviolis à l’anthotyro et à la feta, deux fromages typiques.
4, Proxenou Koromila st. www.clochard.gr +30 231 023 9805
PORTES LITHOS LUXURY RESORT
TIPS
2
If you want to get the best olives, spices, herbs and cheeses, head to Kapani, the oldest market in town. FR Olives, épices, herbes et fromages de qualité vous attendent à Kapani, le plus ancien marché de la ville. EN
Unwind in the pool or relax in the spa of this natural retreat located steps away from the beach. Rooms are constructed with natural materials such as river reeds. FR Délassez-vous dans la piscine ou détendez-vous au spa de ce havre de paix naturel, à quelques pas de la plage. Les chambres sont conçues avec des matériaux naturels comme le roseau. EN
Nea Moudania 632 00 www.porteslithos.gr
Thessaloniki GREECE
16
SUMMER 2021
The lively capital of the North Macedonia region owns a strategic port to the Adriatic and historical vestiges from the Byzantine empire. EN
1 DIRECT LUXAIR FLIGHT/WEEK*
FR Capitale animée de la région de Macédoine du Nord et port stratégique pour l’accès à l’Adriatique, la ville conserve de nombreuses traces historiques de l’Empire byzantin.
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David Palacios Photos
2H25
Texts
EN Built by the Ottomans in the 15th century after conquering the city, the walls of this fortress in the city’s acropolis have a lot of history. Besides being one of the most important buildings at the time, it also served as a prison in 1880. FR Érigées par les Ottomans au 15e siècle après la conquête de la cité, les murailles de cette forteresse située sur l’acropole sont chargées d’histoire. Cet édifice était l’un des plus imposants à l’époque. Il servit de prison en 1880.
Sakis Gioumpasis, Clochard, Portes Lithos, Greek National Tourism Organisation
HEPTAPYRGION
NOUS AURIONS PU ÊTRE GYMNASTES, MAIS NOTRE PASSION C’EST LA CUISINE
Qualité, fraîcheur & goût au cœur de Luxembourg !
BRASSERIE GUILLAUME
LOSTERIA
ALTRA OSTERIA
HÔTEL VAUBAN
PAS SAGE
Fruits de mer, carpaccios & poissonnerie
Bar Focacceria
Pizzeria Trattoria
Plein centre de la ville
Bar à vins Tapas
Travelblog
6H00
2 DIRECT LUXAIR FLIGHTS/WEEK*
Sable noir olcanique et eaux v cristallines : cette île des Canaries est un petit paradis et une terre de contrastes.
The brown volcanic soil together with the crystalline waters make this island in the Canaries a truly paradisiac retreat full of contrasts.
FR
EN
Fuerteventura SPAIN
CORRALEJO NATURAL PARK
BETANCURIA The history of the Canary Islands starts in this picturesque and peaceful town, the most ancient one of the archipelago and its first capital until 1834. Get lost in the traditional white houses surrounded by nature. FR L’histoire des Canaries commence dans cette paisible ville pittoresque, la plus ancienne de l’archipel et sa première capitale jusqu’en 1834. Perdez-vous dans ses ruelles bordées de maisons traditionnelles, étincelantes de blancheur et entourées de verdure. EN
18
MAJORERO CHEESE
RIU PALACE JANDIA
EN
The island produces an artisan cheese from goat milk, that with the years has become an essential product in local recipes. A museum in Antigua explains the history behind this delicacy. FR Ce fromage artisanal local à base de lait de chèvre s’est peu à peu imposé dans les recettes culinaires de l’île. À Antigua, un musée vous dévoile les secrets de cette spécialité.
EN
www.museoquesomajorero.es
www.riu.com
SUMMER 2021
Located in an idyllic beach setting, this renovated 5-star property offers a relaxing atmosphere with live-cooking restaurants and a wellness center. FR Dans l’environnement sublime d’une plage idyllique, cet hôtel 5 étoiles entièrement rénové offre un cadre reposant, des restaurants avec cuisine ouverte et un centre de bien-être.
TIPS
2
Famous Spanish writer and philosopher Miguel de Unamuno has a dedicated museum in Puerto del Rosario. FR À Puerto del Rosario, un musée est dédié à l’écrivain et philosophe espagnol Miguel de Unamuno. EN
* Visit luxair.lu for the updated timetable. Consultez le plan de vol actualisé sur luxair.lu.
David Palacios Photos
1
In Teppanyaki Restaurant at Iberostar Selection Fuerteventura Palace, they offer a Japanese food feast. FR Le Teppanyaki Restaurant du Iberostar Selection Fuerteventura Palace vous régalera de délices de la cuisine japonaise.
Texts
TIPS EN
Patronato de Turismo de Fuerteventura, Islas Canarias, Riu Hotels
EN The north side of the island features a unique natural dune park of 2,500 hectares. Big amounts of sand coexist with fine turquoise beaches, forming a priceless scenery and a good place to practise watersports such as surfing and diving. FR Au nord de l’île, un parc de dunes naturelles s’étend sur 2 500 hectares, formant un spectacle unique. Quel plus bel endroit que ce merveilleux décor de sable à l’infini et de plages bordées d’eau turquoise pour pratiquer les sports nautiques comme la plongée et le surf.
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Luxair News 20
Summer 2021
Destination
Flights to Dubai to resume in September Reprise des vols pour Dubaï en septembre Dubai, one of the world’s most cosmopolitan and innovative cities, was once a fishing village. Before the discovery of oil in the late 1960s, the people of Dubai made their living from fishing, pearl harvesting, boat building and maritime trade. In 1971, Dubai joined its neighbours to form the United Arab Emirates, thus safeguarding the prosperity of the region. With a wide range of culinary delights, fun activities and local culture, Dubai has plenty of surprises in store for visitors. In the wake of strong customer demand, Luxair has decided to include this top destination in its flight schedule for autumn/winter 2021.
EN
SUMMER 2021
Customers can choose from individual flights or package deals as well as the duration of their stay, four or eight nights. With the first flight scheduled for 30 September 2021, customers will also be able to experience Expo 2020 Dubai. Dubaï, l‘une des villes les plus cosmopolites et innovantes du monde actuel, n‘était jadis qu‘un village de pêcheurs. Avant la découverte du pétrole à la fin des années 1960, les habitants de Dubaï tiraient leur subsistance de la pêche, la récolte des perles, la construction de bateaux et du commerce maritime. En 1971, Dubaï a rejoint ses voisins pour
FR
former les Émirats arabes unis, sauvegardant ainsi la prospérité de la région. Gastronomie aux mille saveurs, activités à sensations fortes, découverte de la culture locale, Dubaï possède de multiples atouts pour surprendre ses visiteurs. Suite à la forte demande des clients, Luxair a décidé de reconduire cette destination phare du moment dans son programme de vols pour cet automne / hiver 2021. Vol sec ou forfait vol et hôtel, séjour de quatre ou huit jours, les clients auront le choix. Le premier vol étant prévu pour le 30 septembre 2021, les clients pourront aussi découvrir l’Expo 2020 Dubai.
Travel agency
Luxair Travel Stores
Luxair Travel Stores
In November 2020, Luxair launched the new Luxair Travel Store concept, adding two new travel agencies to its usual points of sale – one in the departure hall of Luxembourg Airport and the other in the Luxair building in Munsbach. Luxair Travel Stores allow customers to immerse themselves in the world of travel, and to benefit from the expertise, friendliness and flexibility of the agents when organising their trip. Offering a multilingual ‘madeto-measure’ service, the Luxair and LuxairTours experts help customers organise their holidays. Customers can also discover a brand new range of Luxair gadgets. These include model aircraft, vintage Luxair and LuxairTours posters, mugs, Sumo pins, ‘Remove Before Flight’ key rings and much more. Treat yourself!
FR
EN
En novembre 2020, Luxair a lancé le nouveau concept de Luxair Travel Store, et deux enseignes phares ont été ajoutées aux points de vente habituels, dans le hall de départ de l’aéroport de Luxembourg ainsi qu’à Munsbach, dans le bâtiment administratif de Luxair. Les Luxair Travel Stores permettent aux clients de s’immerger dans le monde du voyage et de s’inspirer de l’expertise, de la convivialité et de la flexibilité des agents pour planifier leur futur voyage. Avec un service multilingue « sur mesure », les experts de Luxair et LuxairTours accompagnent les clients dans l’organisation de leurs vacances. Les clients peuvent également y découvrir une toute nouvelle gamme de gadgets Luxair. Parmi ceux-ci se trouvent des maquettes d’avions, des affiches vintage Luxair et LuxairTours, des tasses, des pin’s Sumo, des porte-clés « Remove Before Flight » et bien plus encore. Faites-vous plaisir !
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Extra Seat Blocker Luxair Extra Seat Blocker
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Take advantage of the new service Extra Seat Blocker which allows you to secure more personal space by purchasing one or two empty seats next to you in Economy Class, guaranteeing no other passenger will be beside you and ensuring a stress-free experience.
EN
Bénéficiez des meilleures offres en vous inscrivant gratuitement à notre newsletter et recevez une remise de 5 € sur votre prochaine réservation de vol !
FR
EN
Profitez du nouveau service Extra Seat Blocker qui permet de disposer d’un espace supplémentaire en achetant un ou deux sièges vacant(s) à côté du vôtre en classe économique. Vous aurez ainsi l’assurance qu’aucun autre passager n’occupera le siège d’à côté et vous pourrez profiter de votre vol en toute quiétude. FR
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SUMMER 2021
21
Summer 2021
Partnership
This June: be Pride, be Luxembourg En juin : be Pride, be Luxembourg EN In June, the Pride Month, Luxair unveils its new “Be Pride, Be Luxembourg” aircraft livery, designed in partnership with the Luxembourgish non-profit organisation Rosa Lëtzebuerg, which has been actively fighting for the rights of Luxembourg’s LGBTIQ+ community since 1996. Through this partnership, Luxair is striving to continue to develop a more welcoming
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and inclusive culture, not only within its organisation but also by spreading the message of inclusivity throughout Europe with its newly designed aircraft. Luxair will also be launching a range of merchandise to commemorate the occasion and encourage everyone to wear the Luxair colours for the Luxembourg Pride.
SUMMER 2021
En juin, le Mois des fiertés, Luxair dévoile son nouvel habillage, « Be Pride, be Luxembourg » , conçu en partenariat avec l’association luxembourgeoise Rosa Lëtzebuerg, qui lutte activement pour les droits de la communauté LGBTIQ+ depuis 1996. À travers ce partenariat, Luxair souhaite continuer à développer une culture
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plus accueillante et inclusive, non seulement au sein de l’entreprise, mais aussi en diffusant ce message d’inclusivité dans toute l’Europe grâce au nouvel habillage de ses avions. Luxair lancera également une gamme de produits pour commémorer l’événement et encourager tout le monde à porter les couleurs de Luxair pour la Luxembourg Pride.
BESOIN D’UN RAPATRIEMENT moskito.lu
NOUS SOMMES LÀ. Membre à la CMCM, pas besoin d’une assurance supplémentaire. Tous les membres bénéficient gratuitement du service d’assistance à l’étranger, disponible 24h/24 et 7j/7. Il comprend, sans limites de frais, les rapatriements en avion médicalisé, les transports en ambulance ou en hélicoptère et la prise en charge des frais hospitaliers jusqu’à 100 000 € par membre et par incident. En outre, une assurance annulation voyage, peu importe le nombre de déplacements, couvrant les frais jusqu’à 1 500 € par membre et par voyage, est incluse. Envie de devenir membre? Plus d’infos sur www.cmcm.lu
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App
Summer 2021
Luxair
Luxair holidays à la carte Luxair vous propose des vacances à la carte Luxair launches a brand new concept, just in time for the summer holidays. A more tailor-made approach, offering clients a wider diversity of accommodation types (apartment, boutique hotel, villa, hotel de charme…) and adding more choice and flexibility to the holiday packages, as they can combine their accommodation with any flight.
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Luxair lance un tout nouveau concept, juste à temps pour la saison estivale. Une approche plus personnalisée qui permet aux clients d’accéder désormais à un plus grand choix de formules de séjour et de bénéficier d’une offre plus flexible, avec, entre autres, la possibilité de combiner leur hébergement avec le vol de leur choix et d’accéder à des formules d’hébergement beaucoup plus variées (appartement, boutique-hôtel, villa, hôtel de charme…).
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For further information, please check www.luxair.lu. Pour de plus amples informations, rendez-vous sur le site www.luxair.lu.
In flight
Luxair and Domaines Vinsmoselle consolidate their partnership Luxair et Domaines Vinsmoselle renouent leur partenariat In the coming months, Domaines Vinsmoselle’s Poll-Fabaire crémant will be back on board. This is a match made in heaven – excellent service from the Luxair staff combined with the unique, rich and varied flavours of this high quality crémant. EN
Dans les mois à venir, le crémant Poll-Fabaire de Domaines Vinsmoselle fera son retour à bord. Une combi naison parfaite entre l’excellence du service à bord des vols Luxair et les saveurs uniques, riches et variées présentes dans ce crémant de très grande qualité.
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Destination
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Multi-city travel Voyages multi-destinations
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destinations in 2021, including 10 new destinations for Luxair and 6 new destinations for LuxairTours. destinations en 2021, dont 10 nouvelles destinations pour Luxair et 6 nouvelles destinations pour LuxairTours.
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It is now possible to book your return flights with two different arrival and departure airports online at www.luxair.lu and www.luxairtours.lu. Book your outbound flight to one airport and your return flight from another with the option of combining Luxair and LuxairTours destinations. EN
Il est maintenant possible de réserver en ligne, sur www.luxair.lu et www.luxairtours.lu, vos vols aller-retour avec deux segments différents. Réservez votre vol aller vers un aéroport et votre vol retour depuis un autre. Vous pouvez combiner des destinations Luxair et LuxairTours.
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LARGE SCALE TESTING
Getting tested, even if you have been vaccinated, is still important to monitor the evolution of the antibodies that protect us against COVID-19.
www.covid19.lu
Ristretto #PlaceFinancière
« Proposer l’offre de services la plus complète » Alors que IQ-EQ accroît son empreinte sur le marché américain par la croissance externe, son président exécutif, Serge Krancenblum, nous fait part de ses objectifs pour la croissance du groupe.
Vous venez d’acquérir Constellation Advisers aux États-Unis. Quel est l’objectif ? Le marché américain est celui qui connaît la plus forte croissance, particulièrement dans les services aux asset managers alternatifs.
Vous dites vouloir devenir le premier fournisseur indépendant de services aux investisseurs au niveau mondial. En clair, qu’est-ce que cela veut dire ? Nous employons le terme « indépendant » en nous comparant aux grandes banques, en tant qu’acteur spécialisé. Nous sommes aujourd’hui un des cinq premiers acteurs dans le domaine des services aux investisseurs (family offices, investisseurs institutionnels, fonds de pension, etc.). Nous voulons rester l’un des grands acteurs mondiaux, nous développer encore, être présents dans plus de zones géographiques et, surtout, proposer l’offre de services la plus complète.
D’où vient cette croissance ? Notamment de l’essor de la collecte de fonds au niveau de ces acteurs. Du fait, ensuite, que la sous-traitance sur le marché américain reste moins développée qu’en Europe et en Asie. Beaucoup d’acteurs se rendent désormais compte, sous la pression des investisseurs, qu’ils doivent avoir recours à des tiers.
Vous vous êtes fixé un objectif de temps ? Les objectifs que nous nous fixons valent pour des périodes de quatre à cinq ans. Nous sommes convaincus que la taille de notre groupe aura au minimum doublé dans quatre ans.
Pourquoi ce souci d’externalisation ? Les investisseurs veulent être certains que les choses sont bien telles qu’on leur annonce – la valorisation des fonds, par exemple – et, au niveau du reporting, qu’il y ait un tiers de confiance qui opère. Enfin, face à la complexité croissante, les gérants d’actifs alternatifs misent désormais sur des spécialistes, plus efficients, et qui peuvent même aider à réduire leurs coûts.
Ce qui exigera à nouveau de la croissance externe ? Cela ne pourra pas se faire sans acquisitions. Mais cela nécessitera aussi une croissance organique forte.
Il existe donc encore un gros potentiel sur le marché américain ? Oui, un potentiel très important. Début 2020, nous avons déjà acquis Blue River Partners, aux ÉtatsUnis. Nous voulions compléter notre offre de services et grandir sur ce marché, où nous connaissons déjà une forte croissance organique de 40 % d’une année à l’autre. Mais nous souhaitions pouvoir agir dans d’autres régions du pays et développer de nouveaux services, notamment de compliance.
Les reins de IQ-EQ sont-ils suffisamment solides au niveau financier ? Nous avons encore des capacités financières importantes et une volonté commune, au niveau des actionnaires et du management, de continuer à agir comme un des principaux consolidateurs de notre métier.
D’où le rapprochement avec Constellation Advisers ? Oui, leurs segments de services et les régions où ils étaient implantés nous intéressaient. Il s’agit aussi d’une équipe reconnue de plus de 100 personnes, qui travaille pour beaucoup d’acteurs américains et qui a réussi à percer grâce à des services extrêmement personnalisés. Visez-vous d’autres cibles sur le marché américain ? Les 300 personnes que nous employons là-bas ne représentent toujours que 10 % du personnel du groupe. Nous voulons une présence locale beaucoup plus importante dans le futur.
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Le président exécutif de IQ-EQ, Serge Krancenblum, est déjà à la recherche de nouvelles cibles.
Quelle est la prochaine étape ? En tant que président exécutif du groupe et en charge des acquisitions, je suis très occupé ! Un autre acteur luxembourgeois, Alter Domus, a annoncé une acquisition aux États-Unis. C’est une course depuis Luxembourg ? Si d’autres la suivent, c’est avant tout la preuve que notre stratégie est la bonne. Nous pouvons donc être fiers, pour le Grand-Duché, de voir deux acteurs locaux qui se développent énormément à l’international, et en particulier aux États-Unis. Interview JEAN-MICHEL LALIEU Photo ROMAIN GAMBA
ASSURANCE HABITATION
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Ristretto #Finance
“Look at insurance law from a broader perspective” Diego Manzetti, a lawyer with a large American non-life insurer, talks about co-founding the Luxembourg chapter of the International Insurance Law Association (Aida) last year.
What brought you to Luxembourg? I’m from Italy. I moved to Luxembourg in 2018, when my employer moved its European headquarters to Luxembourg as a consequence of Brexit. Were you already active in Aida? Yes, I was involved in [the regional committee for] Aida Europe… and when I moved to Luxembourg, I thought it would be good to be involved in the Aida Luxembourg chapter, when I realised that actually, there wasn’t an Aida chapter in Luxembourg. Although it’s interesting to know that Aida was actually founded in Luxembourg originally... it was 1960 when Aida International was founded in Luxembourg, but then with the years, the organisation left the country. What does Aida try to accomplish? It’s a community that not only includes lawyers that work for [insurers], but it brings together different professionals that are interested in insurance law, coming from companies, but also law firms, the regulators, universities… so it is a place where we can look at insur ance law from a broader perspective. How did you get things off the ground here? Aida Luxembourg was formally accepted within the Aida community at the end of 2020... we found the good partner in Luxembourg to start our activities in the ALJB. That is the association of banking lawyers. So Aida has been formed within ALJB, to start with. Membership of Aida Luxembourg comes together with membership of the ALJB. And we are working together because we believe that there are a lot of common interests between the banking and insurance sectors, and there are a lot of commonalities. And therefore, we created this, let’s say, a sort of joint venture and we started this adventure together. How has the pandemic changed the sector? [Covid] changed the way we work, in terms of the work from home environment that before was less developed, in terms of the attention that the regulators have on how companies deal with the pandemic, also in terms of coverage... Companies with their headquarters in Luxembourg, but with
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offices in other countries, have to make sure that they are keeping very good knowledge of the different requirements that have been introduced in all the different countries. Because if a company operates, let’s say, in 10 markets, but with a headquarters in Luxembourg, then, of course, you need to be aware [of 10 sets of local rules] and there’s a lot of coordination to be done in relation to what rules apply to your employees, what rules apply to the policies you sell in those countries. Are national rules sometimes contradictory? Most of the rules come from European legislation, so they remain in a way more or less aligned, outside of covid, of course. But when you need to coor dinate with many different countries, with employees based in different jurisdictions, even a slight change in one rule from one country to another may have a real impact on you, because you cannot apply a consistent approach to solving a problem. We need to [create documentation] country by country, which requires increased cost. That may be seen as not material, but when you really have to deal with a large number of employees, a large number of countries, there’s an impact, and that’s where I think, as Aida, we can bring value. Because we can speak with the different players that have different experiences. We are connected with our colleagues at Aida around Europe, and so we can get their expertise.
Diego Manzetti, president of Aida Luxembourg, previously lived in Italy and the US.
Interview AARON GRUNWALD Photo ROMAIN GAMBA
SPUERKEESS.LU
Banque et Caisse d’Epargne de l’Etat, Luxembourg, établissement public autonome, 1, Place de Metz, L-2954 Luxembourg, R.C.S. Luxembourg B30775
Eager to expand your business?
Ristretto #Entreprises
« La demande est plus marquée pour les meubles » Qui dit plus de temps passé chez soi, dit davantage d’équipements. Marc Hilgert, cogérant du détaillant luxembourgeois de meubles et cuisines Kichechef, le constate.
Quels sont les plans de Kichechef pour 2021 ? Nous continuons à développer notre approche « home sweet home » avec des actions spécifiques. Nous nous devons de rester très flexibles. Vu la situation du Covid, on planifie large. On ne peut plus rien exclure, en ce compris un nouveau lockdown. Notre but est de terminer l’année dans le même esprit que 2020 : en lissant l’effet du confinement sur nos ventes. Les consommateurs semblent consacrer davantage de budget à leur habitation. Vous confirmez ? La demande est vraiment plus marquée pour les meubles. Je crois que les gens se sont rendu compte qu’en restant à la maison, ils pouvaient changer ceci ou cela, et les meubles en font partie. On a réussi à faire un petit peu plus de chiffre, mais, globalement, nous nous situons légèrement au-dessus de la moyenne à 10 ans. On ne peut pas dire que 2020 est la meilleure année que nous ayons connue, elle a été amputée de deux mois. Nous avons simplement réussi à rattraper le retard. L’été prochain, le centre commercial Escape ouvrira juste à côté de votre magasin de Capellen. Vous attendez-vous à une hausse de la fréquentation ? L’ouverture d’Escape est une bonne chose, et je ne la vois pas du tout comme un danger. Le centre abritera notamment un Delhaize, cela fait un point d’attraction. Nous nous sommes battus tout seuls, ici, pendant 16 ans. Puis, Bauhaus est arrivé en 2016. Même s’il vend des meubles de jardin, nous n’avons pas les mêmes produits ni les mêmes fournisseurs. Cela ne nous fait pas de concurrence. Au contraire, cela crée un flux. En décembre dernier, une étude a conclu qu’Ikea était la marque de meubles la plus forte au Luxembourg, alors que l’enseigne n’y est même pas présente. Qu’en pensez-vous ? Nous ne sommes pas étonnés. Ikea est une marque internationale que tout le monde connaît. Cela n’exclut pas qu’un client Ikea vienne chez nous. Je ne considère pas Ikea comme un concurrent, parce que nous avons d’autres produits et une offre beaucoup plus person nalisée. Ikea a son catalogue, Kichechef possède 60.000 références uniques en magasin, sans oublier les dizaines de milliers de combinaisons possibles à la commande. En 2003, nous voulions même avoir Ikea à côté de nous. Cela aurait été bien. Mais à l’époque,
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il était interdit de construire des commerces de plus de 10.000 m2. En 2019, Kichechef a lancé un vaste rebranding avec un nouveau logo et un nouveau slogan. Quel en est l’impact ? Nous sommes vraiment contents de l’avoir fait, c’est un grand pas. Beaucoup de gens ne nous connaissent pas, la population au Luxembourg change beaucoup et s’internationalise. C’est pour cela que nous avons choisi un slogan en anglais. Qu’est-ce qui vous distingue de la concurrence au Luxembourg ? Nous voulons vraiment tout faire pour satisfaire les clients, qu’ils se sentent chez eux dès qu’ils entrent chez nous. Nous accordons beaucoup d’importance à la formation du personnel et à l’accueil des clients. Observez-vous des retombées de la fermeture prolongée des commerces côté allemand ? Peut-être qu’à court terme, les gens viennent davantage dans les commerces luxembourgeois, mais, géographiquement, nous sommes plus proches des clients frontaliers belges et français. La fermeture en Allemagne impacte les fournisseurs. Il y a des sociétés qui ont arrêté la production par manque de commandes. C’est un problème qui impacte tout le monde, en particulier sur le segment de l’électro ménager, où certains fournisseurs ne parviennent plus à suivre, par manque de pièces. Cela rallonge les délais de livraison. Kichechef a commencé à écouler des articles en ligne pendant le confinement du printemps 2020. Vous poursuivez sur cette voie ? Il s’agissait de meubles de jardin, des articles dont nous avions une certaine quantité de pièces en stock, pas forcément des objets qui se commandent sur mesure. Nous commercialisons actuellement quelques articles d’ambiance sur notre site web. Depuis le rebranding, nous organisons nos propres shootings photo pour sortir du lot et nous différencier des prises de vue classiques des fournisseurs. Nous voulons présenter les articles dans des ambiances que nous créons.
Marc Hilgert, cogérant de Kichechef, aborde 2021 avec prudence.
Interview CATHERINE KURZAWA Photo ROMAIN GAMBA
Protection, Performance & Innovation La Mondiale Europartner, la référence en assurance patrimoniale.
Prendre la main sur demain
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Conversation Tatiana Fabeck
Interview CÉLINE COUBRAY
en contact
Photo ANDRÉS LEJONA
la société
Depuis 25 ans, le bureau Fabeck Architectes contribue à façonner le paysage bâti au Luxembourg et participe activement au rayonnement de l’architecture de qualité au Grand-Duché. Une entreprise fondée par Tatiana Fabeck, architecte, urbaniste, chef d’entreprise, femme, fille, mère, compagne, amie… 32
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Tatiana Fabeck réfléchit à de nouvelles conceptions de l’espace bâti dans une société post-Covid, mais également afin de favoriser une mobilité douce.
Conversation
BIO EXPRESS
Création du bureau En 1996, elle s’inscrit à l’Ordre des architectes et des ingénieursconseils au Luxembourg. En 2012, elle change le nom de son bureau pour devenir Fabeck Architectes. Engagement En 2008 et 2009, elle enseigne à la HTW à Sarrebruck. De 2013 à 2019, elle est viceprésidente du Luca. En 2014, elle est nommée présidente de la Fondation Valentiny. Elle est aussi membre du CA de la Rockhal. En 2019, elle devient membre du CA de LuxReal.
Je prêche ardemment pour laisser les gaines de ventilation accessibles afin d’en faciliter l’entre tien et le remplacement quand cela devient nécessaire. En général, les gaines de ventilation passent soit dans les dalles en béton, soit dans les chapes, ce qui rend leur accès difficile. Et je suis très sceptique face à l’usage de robots nettoyeurs. Je crois surtout à une architecture qui puisse garantir des hauteurs nettes libres plus conséquentes, afin d’avoir une nappe de répartition technique accessible. Or, dans le Et pour l’habitat, préconisez-vous plan d’aménagement particulier (PAP) « quartier des changements ? existant », nous avons des hauteurs de corniche Si le bon sens conduit les projets, beaucoup de figées qui ne permettent pas cette approche si ces mesures sanitaires sont évidentes. Actuel- on veut conserver des hauteurs sous plafond lement, l’efficience énergétique prime. Certes, d’au moins 2,60 m et respecter les critères d’isoc’est un volet important, mais imaginer un espace lation énergétique. Pourtant, la vraie qualité extérieur pour chaque unité de logement devrait d’habitat est dans l’espace et, à défaut de pouvoir l’être tout autant. La question de la ventilation, l’offrir au sol, il faudrait au moins l’avoir en entre autres, devra être traitée différemment. hauteur. Pour cela, il faudrait que les règlements
figent le nombre de niveaux constructibles et laissent plus de flexibilité sur les hauteurs de corniche, comme dans le PAP « nouveau quartier ». Je pense que nous allons également avoir de plus en plus d’espaces partagés polyvalents au sein des immeubles résidentiels, pour p ermettre le télétravail, mais aussi l’organisation de réceptions, de fêtes… Ceci serait bénéfique pour animer l’espace-rue. Il y a aussi une autre idée à laquelle je crois beaucoup, qui est celle du local à vélos facilement accessible. Actuellement, lorsque ces locaux sont au sous-sol, ils ne sont pas comptabilisés dans une enveloppe maximale brute de mètres carrés constructibles dans le cadre d’un PAP. Il faudrait qu’il en soit de même pour les rez-de-chaussée, ce qui permettrait d’envisager des locaux à vélos tempérés (à cause des batteries de vélos électriques) n’ayant pas d’incidence sur le nombre de mètres carrés réalisables. Cette situation beaucoup plus confortable encouragerait l’utilisation du vélo comme moyen de déplacement quotidien. Nous nous battons actuellement pour cela dans le cadre du Laangfur, mais cela n’est pas encore possible sans perdre de la surface constructible. Si on veut promouvoir la mobilité douce, il faut revoir la manière dont ces espaces sont comptabilisés dans les surfaces brutes légalement définies. Et à plus grande échelle, celle de l’urbanisme, voyez-vous des changements à venir ? À mon sens, les quartiers doivent aller vers plus de mixité de fonctions. Une ville est vivante et pétillante quand on parvient à créer un mélange de fonctions au pied des immeubles et dans les quartiers. Il faudra aussi rapprocher davantage le lieu de travail de l’habitat. Il est aussi très important de réserver des espaces dédiés à la culture, ce qui n’est pas assez le cas actuellement dans les plans d’urbanisme. Nous avons besoin de petites niches en dehors du trio logements-bureaux-commerces, et offrir la possibilité que la culture s’y installe. Ce ne seront pas nécessairement des espaces publics,
25 ANS DE PROJETS
Art Station 1994
Natixis Banque Populaire 2002-2003
École précoce Blummewiss 2002-2009
Projet pour le diplôme d’architecture de Tatiana Fabeck, sous la direction de Cuno Brullmann. Président du jury : Christian de Portzamparc. Le projet étudie la reconversion du site de la gare en un centre d’art contemporain.
Cet immeuble situé au niveau du rond-point Serra, au Kirchberg, est entièrement vitré et épouse la forme du rond-point. Une structure en acier apparent et un concept de protection au feu naturel permettent une grande flexi bilité d’aménagement au sein de cet immeuble administratif.
Cette école à Strassen regroupe les salles d’enseignement, un restaurant scolaire, un service de rééducation et une maison relais. Le projet est basse énergie et présente une facture simple pour répondre à un contexte urbain hétéroclite.
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Wax et Maison rouge 2005 (Concours) 2012-2016 Transformation de l’ancien m oulin de Waxweiler en un espace socioculturel, comprenant un restaurant, des espaces d’atelier, une scène extérieure, etc. La Maison rouge, elle aussi réhabilitée, est devenue un landmark qui abrite un espace muséal.
Maison des sciences humaines 2008-2014 Réalisée en collaboration avec Abscis Architecten, la Maison des sciences humaines abrite des bureaux de recherche et des salles pour séminaires et ateliers. Le projet sera prochainement complété par des tours de logement, également réalisées par Fabeck Architectes.
Tatiana Fabeck, Lukas Roth, Anja Schlamann, Christof Weber, LCGDP, Christian Aschman, Palladium Photodesign et Fabeck Architectes
Ressentez-vous une certaine frilosité pour de nouvelles commandes ? Effectivement, nous avons eu un projet de bureaux qui s’est arrêté. Pour d’autres qui étaient encore en phase d’analyse, nous avons fait des études de faisabilité pour intégrer une programmation plus mixte. Plusieurs de nos maîtres d’ouvrage se posent des questions sur le contexte post-Covid, et cela donne lieu par exemple à l’insertion de petits espaces de travail joints à l’habitation. Pour ma part, je suis convaincue qu’une autre mentalité va se mettre en place après le Covid. Nous aurons des changements dans la conception des bureaux, mais aussi dans le secteur de la santé, pour la construction des écoles…
Formation Elle est diplômée de l’École spéciale d’architecture (ESA) de Paris en 1994, lauréate du prix du Meilleur diplôme, puis suit une année d’études en urbanisme à l’University of Milwaukee-Wisconsin (États-Unis). Elle débute sa carrière dans le bureau de Cuno Brullmann à Paris, où elle travaille pendant deux ans.
Photos
Quel impact le Covid a-t-il sur votre activité professionnelle ? Nous n’avons jamais arrêté de travailler, et l’activité s’est maintenue à distance pendant le confinement. Mais notre métier ne se fait pas aisément en télétravail. Nous sommes donc majoritairement retournés à l’agence, car rien ne remplace un contact plus immédiat, en respectant les gestes barrières bien évidemment. D’ordinaire, nous travaillons dans un espace non cloisonné et devoir nous mettre à distance ne garantit pas le même échange, pourtant si important dans notre métier. Notre approche actuelle est de maintenir nos distances et d’avoir partiellement recours au télétravail. Toutefois, il n’y a rien de meilleur que de pouvoir rassembler les équipes autour d’une maquette, d’un papier et de discuter, d’échanger nos idées, de maintenir l’émulation collective.
Naissance De nationalité luxembourgeoise, Tatiana Fabeck est née le 4 juillet 1970 à Luxembourg.
Tatiana Fabeck
La vraie qualité d’habitat l’espace
mais aussi plus intéressants. Et il ne faut jamais perdre de vue le confort de l’utilisateur, ce qui est très important à mes yeux.
en hauteur mais des espaces qui peuvent être des cafés culturels, des espaces de rencontre, des lieux pour des associations. Vous fêtez, cette année, vos 25 ans de profession. Quel regard rétrospectif portez-vous sur votre parcours ? Je me suis en effet inscrite à l’Ordre des architectes et des ingénieurs-conseils en 1996. C’est exactement la moitié de mon existence ! Je me suis rendu compte que le temps passe très vite et que chaque projet demande patience et persévérance. Mon métier, c’est comme dans la « vraie vie » : il y a des moments plus ou moins difficiles, mais summa summarum, le bureau a connu une croissance permanente et rassemble aujourd’hui une équipe de 28 personnes. Sur ces 25 années, nous avons développé des projets très divers tant en architecture qu’en urbanisme. Je me suis aussi rendu compte que le métier d’architecte s’inscrit dans la durée, et jusqu’à présent, je ne regrette pas ce choix. C’est un métier qui me donne beaucoup de satisfaction, qui permet de passer de la grande échelle, avec les projets d’urbanisme, à une toute petite échelle, avec les détails d’aménagement intérieur. Ce registre de macro-micro est impressionnant et très plaisant. Et la diversité des personnes que nous sommes amenés à r encontrer est formidable. Nous sommes en contact avec tout le spectre de la société, et cette richesse de rencontres et de programmes est p assionnante
et enrichissante. Pour autant, ce n’est pas facile tous les jours, loin de là, mais je suis contente d’avoir pris ce chemin. Et je suis bien entourée au quotidien par l’ensemble de mon équipe très engagée et de mes deux associés, Frédéric Sold et Jens Letzel. Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ? Il faut avoir beaucoup de patience, car chaque projet implique des processus qui durent des années. Ce qui est sur la planche de travail aujourd’hui peut être réalisé dans 8 ou 10 ans. Cela comprend aussi parfois des déceptions, avec des projets qui s’arrêtent ou des concours perdus. J’ai comme cela plusieurs projets dans les tiroirs que j’aurais aimé voir se réaliser. Les réglementations deviennent aussi de plus en plus exigeantes, et il faut vraiment opérer comme un généraliste, qui continue à se former sans cesse et reste curieux tous les jours. J’ai connu le dessin à la main et, 25 ans après, toute la façon de dessiner et communiquer pour un projet a totalement changé. Le centre commercial Cloche d’Or, par exemple, a été dessiné entièrement en BIM, ce qui demande constamment de former les équipes et d’adapter les équipements informatiques. Les spécialistes impliqués aujourd’hui dans un projet sont devenus beaucoup plus nombreux, ce qui rend les projets plus complexes,
Maison Rischard 2013-2016
Royal Grace 2013
Haron 2015
Réhabilitation d’une ancienne ferme classée monument national située à LuxembourgMerl. Y prennent désormais place trois unités d’habitation et un espace wellness.
Cet immeuble administratif du boulevard Royal à Luxem bourg présente une façade qui est un écho au parc voisin, avec une structure verticale plus épaisse au niveau du socle, pour signifier le tronc, qui devient de plus en plus fine pour les branches au fur et à mesure qu’on monte dans les étages.
Immeuble administratif situé à Munsbach, premier prix d’un concours restreint. La construction est fortement influencée par la topographie, les contraintes urbanistiques et la forme de la parcelle. Le projet se démarque par une haute qualité de construction et des matériaux nobles.
C’est aussi pour cela que vous vous orientez de plus en plus vers la construction durable ? Absolument. La construction en bois du Lycée technique pour professions de santé à Ettelbruck, par exemple, a été une expérience formidable. C’est le résultat d’un travail d’équipe entre l’Administration des bâtiments publics, souhaitant réaliser un projet pilote, et une équipe pluridisciplinaire qui a œuvré pour livrer un cadre de travail humain. Il y a une volonté généralisée des pouvoirs publics, mais également d ’acteurs privés, qui poussent pour créer des projets à haute qualité environnementale et durables, et c’est une belle opportunité pour les architectes et ingénieurs. Nous allons poursuivre dans cette direction avec la conception, pour le Fonds Belval, des plus hautes tours en bois au Luxembourg. Est-ce que la concurrence entre les architectes s’est accrue ces 25 dernières années ? Oui, et il y a actuellement une très belle q ualité architecturale fournie par les bureaux au Luxem bourg, en partie grâce à cette concurrence. Par contre, l’augmentation du nombre de bureaux fait que les jeunes agences accèdent plus difficilement à des commandes que les architectes de ma génération. Jusqu’à il y a environ 10 ans, les jeunes bureaux avaient régulièrement une place dans les concours, ce qui est moins le cas maintenant. C’est devenu plus difficile pour eux de se démarquer. Je regrette également que certaines commandes partent dans des bureaux à l’étranger, alors que nous avons la matière grise n écessaire en ce qui concerne les architectes et les ingé nieurs au Luxembourg. De plus, nous prêchons pour une proximité du lieu de t ravail et du lieu d’exécution. Alors il faudrait davantage
Centre commercial Cloche d’Or et tours de logement 2014 (concours) 2019-2021 (livraisons) Premier prix d’un concours inter national. Réalisé en collaboration avec Schemel Wirtz Architectes Associés. Environ 100.000 m2 de commerces et 2.850 places de parking. Deux tours de loge ment (25.000 m2) surplombent l’ensemble à 60 m de hauteur.
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Laangfur 2018-À venir Premier prix d’une consultation rémunérée (2018). Développe ment du concept urbanistique pour un nouveau quartier mixte sur le plateau de Kirchberg qui prend en compte les enjeux du développement durable. Le quartier sera desservi par le tram et des pistes cyclables.
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Conversation Tatiana Fabeck
UNE MAISON-ATELIER Situé à Koerich, juste derrière les ruines du château restaurées par le bureau, l’atelier jouxte une ancienne ferme habitée par Tatiana Fabeck. L’extension en bois présente un bardage noir continu sur les murs et le toit. Une intervention résolument contemporaine qui dialogue avec l’ancien. À l’intérieur, l’écriture est graphique et l’espace de travail ouvert profite de beaucoup de lumière naturelle.
Le bureau Fabeck Architectes a connu une croissance cons tante et rassemble désormais une équipe de 28 personnes.
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Début de l’activité En 1996, sous le nom Tatiana Fabeck Architecte. Changement de nom, en 2012, pour devenir Fabeck Architectes. Associés Frédéric Sold et Jens Letzel sont associés depuis 2012. L’un suit de très près les dossiers d’exécution, tandis que l’autre développe le volet Construction en bois et efficience énergétique. Équipe 28 personnes Chiffre d’affaires en 2019 3.182.650 € Localisation du bureau À Koerich, à côté du château Réalisations Plus de 150 projets réalisés 39 récompenses reçues
et nous sommes en attente du résultat. Si des opportunités se présentent, nous les accueillerons bien volontiers, mais nous n’entamons pas de démarches spécifiques pour nous développer au niveau international. Malgré votre position de chef d’entreprise, parvenez-vous quand même à participer à la conception des projets, et à ne pas
être totalement accaparée par la gestion quotidienne du bureau ou la représentation et la recherche de nouveaux clients ? Oui, très clairement. Je suis investie dans c hacun de nos projets, et chaque projet est le fruit d’un travail d’équipe qui, elle, peut changer suivant les différents stades de celui-ci. La recherche de nouveaux clients est importante et elle se fait pour notre bureau par la participation à des appels d’offres ou des concours. Nous avons également la chance que certains clients viennent spontanément vers nous. Votre bureau fait-il encore des projets d’habitat unifamilial, ce que d’autres abandonnent une fois une certaine taille de bureau atteinte ? Oui, bien sûr, même si nous communiquons peu dessus, car les clients souvent ne le souhaitent pas. Ce sont des projets qui, lorsqu’on est en osmose avec le client, p ermettent de tisser des liens au-delà du projet. La conception d’une maison demande beaucoup d’écoute et de temps, mais c’est en même temps une échelle de projet très humaine qui nous permet de travailler sur des facteurs de matérialité, de toucher et de détail. La base de notre métier est quand même de créer un abri pour un utilisateur, et l’échelle de la m aison u nifamiliale est un beau challenge pour les architectes.
Andrés Lejona et Christian Aschman
Et à l’inverse, essayez-vous de travailler à l’étranger ? Nous aimons aussi nous investir dans des projets qui ne sont pas au Luxembourg, à l’occasion de concours par exemple, ce qui nous permet de réfléchir à d’autres programmes et contextes. Cela nous fait grandir, mais c’est un investissement financier et humain important. Nous avons quand même quelques p rojets à l’international : du résidentiel à Dakar ou en Russie, par exemple, où nous avons remporté deux concours pour des villas de haut standing. Récemment, nous avons participé à une consultation d’architectes pour un centre de formation aux métiers du numérique en Afrique,
FICHE D’IDENTITÉ DU BUREAU
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promouvoir notre savoir-faire local et une identité de la construction luxembourgeoise. D’un autre côté, c’est aussi important pour les bureaux luxembourgeois de pouvoir se comparer à des bureaux étrangers, et de nombreux concours internationaux ont permis aux bureaux locaux de se positionner. Comme dans d’autres disciplines, nous disposons, au sein de nos bureaux, d’une grande mixité de nationalités, avec des collaborateurs qui ont fait leurs études un peu partout en Europe. Je suis pour une mixité aussi des idées, et le Luxembourg est et restera toujours une plateforme ouverte aux cultures diverses. C’est un grand atout pour notre culture.
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Conversation Tatiana Fabeck
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D’une manière générale, la famille, c’est important pour vous ? Oui, je suis très attachée à ma famille. J’ai la chance d’habiter à côté de mon bureau, ce qui me permet, avec un emploi du temps chargé, de déjeuner avec ma fille de 11 ans et de voir, le soir, mon fils, qui passe son baccalauréat. Avec mes frère et sœur, nous avons eu la chance de passer beaucoup de temps ensemble et continuons à le faire. Mes parents nous ont beaucoup fait voyager, visiter des musées… Même si, à l’époque, cela ne nous a pas tellement amusés, j’en garde aujourd’hui un souvenir très agréable. Mes parents m’ont transmis le goût de l’esthétique, la passion des antiquités, l’intérêt pour le mélange de l’ancien avec le contemporain. Grâce à eux, j’ai acquis tout un bagage culturel et visuel que je continue d’enrichir. C’est difficile d’être une femme et architecte ? Non, à part pour l’emploi du temps. Pour le commun des mortels, quand on est une femme et qu’on dit qu’on est architecte, on est forcément architecte d’intérieur ou décoratrice. Pour le grand public, un architecte est masculin. Il est vrai que les femmes architectes sont moins exposées, alors qu’elles sont très nombreuses dans les bureaux d’architectes. Et certaines personnes de mon entourage me disent que je réfléchis comme un homme. 38
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Hôtel des Postes (2016) À l’occasion d’un concours d’idées organisé pour la réhabilitation et transformation de l’Hôtel des Postes à Luxembourg, Fabeck Architectes a fait équipe avec Archi2000. Ils ont imaginé un projet conjuguant de nombreux logements, bureaux et commerces, tout en revalorisant ce bâtiment historique. La cour intérieure, de nouveau à ciel ouvert, permet de profiter des façades anciennes. Une grande verrière vient se positionner à l’arrière de la façade principale tout en surplombant le toit pour agir comme un signal depuis la rue. La verrière sur le toit accueille un restaurant et complète l’offre de café, placé au rezde-chaussée, au niveau de la place.
Pavillon pour l’Expo 2020 Dubaï (2017) En collaboration avec NJOY Architectes d’intérieur, Fabeck Architectes imagine, pour l’exposition universelle à Dubaï, un pavillon où l’humain est au centre. La forme du pavillon s’inspire de celle du logo utilisé pour le nation branding, tout en s’inspirant des tentes bédouines et des moucharabiehs. La toiture est composée de deux couches de mailles métalliques suspendues à deux niveaux différents. À l’intérieur, deux plateformes se situent à la croisée des quatre piliers pour accueillir les visiteurs en provenance du monde entier.
Est-ce que la séduction joue un rôle dans votre métier, peut être un agent facilitateur ? C’est une question difficile, car on ne se voit pas soi-même. Et la séduction peut aussi être valable chez un homme, même si ce type de question est rarement posé à un architecte homme… Par contre, je suis persuadée que si un projet est amorcé grâce à un jeu de séduction, il ne pourra pas tenir dans la durée. Je crois que je suis bien trop honnête dans ma démarche pour que cela puisse entrer en compte. La séduction doit être intrinsèque au projet. Il faut que le projet séduise ! À l’inverse, avez-vous subi des comportements déplacés parce que vous êtes une femme ? Si quelqu’un emploie ce registre-là, je lui réponds comme un homme, de manière très consciente. C’est peut-être en cela que je pense comme un homme. En tout cas, je n’ai pas eu à subir d’attitude qui m’ait affectée, même s’il y a eu certaines situations comiques. Mais il est vrai que je progresse dans un milieu très masculin, c’est une réalité. On vous voit souvent dans les musées, les vernissages… Quelle place a l’art dans votre vie ? L’art est très important pour moi. La création artistique est beaucoup plus libre de contraintes que ne l’est l’architecture. L’architecte fait aussi de l’art, mais c’est un art d’équipe, qui doit composer avec un entourage divers et répondre à un contexte. J’apprécie la liberté de l’artiste dans sa création et j’aimerais que les projets puissent davantage, dès leur genèse, faire place à l’intégration d’une œuvre artistique. Comment décririez-vous votre univers artistique ? Je suis sensible à la création artistique à travers toutes les époques et disciplines. J’ai également un faible pour le graphisme et le design, qui jouent un rôle important dans notre vie car ils sont omniprésents et façonnent, tout comme
Fabeck Architectes
Pour autant, vous n’avez pas hérité du bureau de votre père. Non, pas du tout. Je suis allée faire mes études d’architecture à Paris et je me suis inscrite à l’Ordre des architectes et des ingénieurs-conseils au Luxembourg, mais j’ai commencé à travailler à Paris dans l’atelier de Cuno Brullmann. À cette époque, je ne savais pas encore si je voulais rester à Paris ou rentrer au Luxembourg. Puis, j’ai eu l’opportunité de réaliser une maison pour un philosophe et sa femme professeur au Luxembourg, et je me suis installée ici. Ayant été formée aux concours au sein du bureau Brullmann, j’ai d’abord commencé avec une équipe très restreinte, et nous avons participé à des concours, dont celui pour une école à Strassen, que nous avons remporté. Ensuite, un client de mon père nous a demandé de lui faire une esquisse pour un immeuble administratif au Kirchberg, pour la Banque Populaire, projet que nous avons pu réaliser et qui fut un coup de pouce pour permettre au bureau de s’affirmer et faire grandir les effectifs.
Siège d’ArcelorMittal (2013-2014) Cette étude de faisabilité pour la rénovation du siège d’ArcelorMittal, situé au 19, avenue de la Liberté à Luxembourg, a pour objectif d’augmenter les surfaces existantes dans le cadre de la mise en vente de l’immeuble. Grâce à une structure indépendante positionnée dans la cour arrière, environ 3.500 m2 supplémentaires peuvent être créés. Cette extension, qui ne touche pas le bâtiment classé et protégé, consiste en une sphère entièrement vitrée, dépassant la toiture. Pour les architectes, elle évoque l’image d’un soleil levant, tout en préservant la lecture des façades historiques.
Qu’est-ce que ça veut dire « réfléchir comme un homme » ? Ah, si je le savais… A priori, c’est un compliment ! Mais pour revenir à votre question précédente, c’est vrai qu’il est difficile de jongler entre impératifs professionnels et vie familiale, ce qui est valable d’ailleurs pour n’importe quelle profession. En tout cas, je ne ressens pas de difficultés à être une architecte femme et ne fais pas de différence entre hommes et femmes. Il est vrai que le domaine de la construction est fortement masculin, comme d’autres professions sont plus féminines. Être une femme peut même parfois être un avantage, comme dans les concours, où la parité peut jouer en notre faveur.
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Votre père travaille avec vous dans le bureau. Quel est son rôle ? Mon père est une personne qui compte énormément pour moi et qui adore son métier. Il est un pilier bienveillant pour toute l’équipe. Il s’occupe d’une partie de la gestion et suit les dossiers du point de vue administratif et contractuel, ainsi que certains chantiers.
Trois projets qui ont été présentés dans le cadre de concours, mais dont la réalisation ne se fera pas, faute de première place.
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Conversation Tatiana Fabeck
l’architecture, notre quotidien. En architecture, en ce moment, j’aimerais découvrir au Cap le Zeitz MOCAA, qui prend place dans d’anciens silos que Thomas Heatherwick a découpés et réaménagés de manière spectaculaire. Par ailleurs, j’aime le travail de Peter Z umthor pour son approche de la matière et de la lumière, de Jean Nouvel pour les conséquences de sa pensée à travers les décennies, de Renzo Piano pour sa sensibilité et le côté humain et chaleureux qu’il dégage et qui sont des qualités essentielles dans notre métier, de Frank Lloyd Wright, dont j’ai eu la chance de visiter beaucoup de bâtiments, de Carlo Scarpa… Il y a tellement de personnes qui réalisent de belles œuvres et dont je me sens proche.
je réfléchis comme un homme Je trouve dommage que les architectes ne se soutiennent pas plus les uns les autres pour revaloriser leur métier. Actuellement, l’architecte perd de plus en plus sa place dans un processus où on lui enlève des missions qui sont reprises par un project manager. Il faudrait que nos missions se complètent mieux.
Dans quelle ville vous sentez-vous bien ? J’aime Paris. Quand j’y vais, j’ai l’impression de revenir à la maison. Je trouve que c’est une Et travailler pour les promoteurs, ville dans laquelle on s’oriente facilement, est-ce que vous appréciez ce type son offre culturelle est foisonnante. J’aime y de commande ? manger, y flâner, revoir mes amis. Je suis restée Nous avons en général de bonnes expériences très attachée à cette ville. Et je dois dire que avec les promoteurs, et nous apprécions traj’aime beaucoup notre pays, je m’y sens bien. vailler à une cadence soutenue. En même Les chemins sont courts, le sentiment de sécu- temps, il arrive que les projets soient vendus rité est exceptionnel, les programmes culturels en cours de développement, ce qui peut avoir sont de haut niveau et Luxembourg est deve- des répercussions parfois non heureuses. nue très internationale ces 20 dernières années. Et quand la possibilité nous en est offerte, nous aimons bien les accompagner jusque dans la réflexion de la commercialisation, et bien Que pensez-vous de l’évolution du métier d’architecte au cours de ces dernières transmettre aux futurs acheteurs les idées que années, avec l’arrivée de nouvelles nous avons insufflées dans le projet. L’archiresponsabilités, le recours plus fréquent tecte a une histoire à raconter, et quand nous à un project manager, etc. ? pouvons travailler avec le promoteur jusqu’à
la remise des clés, c’est intéressant, car c’est l’aboutissement d’un projet. Et comment composez-vous avec la question de la qualité architecturale contrainte par la vision économique du promoteur ? C’est vrai que la pression économique est très forte, surtout à cause du prix des terrains. Mais je trouve qu’au Luxembourg, les promoteurs misent beaucoup sur la qualité, car il existe aussi pour eux une grande concurrence. Donc cela n’est pas si contraignant pour nous. Par contre, nous avons plus rarement la main sur les finitions intérieures, et là, il est vrai que la qualité est variable suivant le promoteur. Comment améliorer la densité au Luxembourg ? Il faut être plus audacieux et créer davantage de fronts de rue continus, moins de volumes solitaires, mais qui sont souvent l’héritage de PAP ou de choix plus anciens. Nous devrions pouvoir construire plus haut, revaloriser les cœurs d’îlot et travailler des immeubles en
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Christian Aschman
La construction de ce bâtiment est un projet pilote mené par l’Administration des bâtiments publics. Il répond au con cept innovateur de construction à énergie positive, certifié Minergie-P-Eco, et est réalisé avec des matériaux écologiques, sans aucun produit nuisible à la santé. C’est actuellement le plus haut bâtiment en bois construit au Luxembourg. Il a été récompensé par le Grand Prix Construction durable lors des Green Solutions Awards 2019, le Prix solaire luxembourgeois 2019, le Prix solaire européen 2019, le Holzbau preis Eifel 2020 et par un premier prix à l’Architekturpreis Gebäudeintegrierte Solartechnik, passant devant le Tribunal de Paris de Renzo Piano (deuxième prix).
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Conversation Tatiana Fabeck
Vous êtes également impliquée au niveau de la promotion de la culture architec turale, en occupant pendant plusieurs années le poste de vice-présidente du Luca, et vous êtes encore actuellement présidente de la Fondation Valentiny. Pourquoi cet engagement ? Il me semble important de soutenir la valorisation de la culture architecturale et de sensibiliser un large public à la culture du bâti. Je garde un très bon souvenir de mon implication au Luca. Je les ai beaucoup accompagnés dans la recherche d’un nouveau local que nous avons finalement trouvé à Clausen, avec la collaboration de M Immobilier. Ce projet, à cet endroit, va enrichir le quartier d’un lieu qui sera un vrai maillon de l’offre culturelle de la Ville de Luxembourg. En ce qui concerne la Fondation Valentiny, la présidence m’a été proposée, et je suis ravie et honorée de remplir ce rôle. François Valentiny est un personnage au caractère fort et, avec sa famille et son bureau, il porte à bout de bras la fondation. Mon rôle de présidente pour la fondation est plus honorifique qu’exécutif. Mais je suis très contente de pouvoir accompagner ce projet formidable. C’est un lieu absolument magnifique, ouvert à tous, avec des actions tournées vers la jeunesse. J’aimerais pouvoir initier plus de collaborations pour la Fondation Valentiny, travailler par exemple avec l’OAI et le Luca sur des projets communs, car finalement, toutes ces institutions œuvrent pour sensibiliser un public à l’espace bâti et non bâti.
deuxième position, comme nous l’avons fait au Limpertsberg pour le projet « Vivre sans voiture ». Le centre-ville est souvent uniquement occupé au rez-de-chaussée. Or, il faudrait davantage insérer du logement au-dessus de ces rez-de-chaussée commerciaux. Nous venons de livrer un projet répondant à cette demande dans la Grand-Rue. Il s’agit d’un immeuble, large de 4 m et profond de 31 m, sur quatre niveaux et situé entre deux immeubles où les étages n’étaient pas exploités. En retravaillant la distribution intérieure, nous sommes parvenus à intégrer des logements au-dessus du commerce. Même si l’accès au rez-de-chaussée enlève de la surface commerciale, l’ensemble du bâtiment retrouve une raison d’être et contribue à ramener les habitants au centre-ville. Quel est le projet grâce auquel vous avez le plus appris ? Certainement mon premier projet de bureau, celui de Natixis Banque Populaire au Kirchberg, il y a 20 ans, que nous avons construit en acier non protégé. Ce projet répond aussi aux critères actuels de déconstruction, étant donné que tous les éléments constructifs sont démontables un par un. Ce projet m’a aussi appris à analyser un contrat et à le lire attentivement, un apprentissage très important dans notre métier. À cette époque, il y avait peu de constructions sur le plateau, et je militais pour construire encore plus haut que la hauteur autorisée. L’empreinte au sol du bâtiment était réduite, et j’étais convaincue que monter plus haut était tout à fait justifié à cet endroit pour marquer l’entrée de ville. Je me souviens qu’il avait été difficile de convaincre le Fonds Kirchberg à l’époque, mais le temps nous a donné raison, car les bâtiments récents développés autour sont plus hauts. Ce projet avait en fait tous les ingrédients pour me préparer au fait que notre métier n’est pas facile et qu’il faut se battre pour faire passer ses idées. C’était très ambitieux, et j’y repense souvent dans le cadre d’autres projets. Vous avez aussi réalisé plusieurs collaborations. Que retenez-vous de ces expériences ? Nous avons eu l’occasion, en effet, de mener plusieurs collaborations. J’ai travaillé sur le « Plan lumière » de Luxembourg avec Yann Kersalé et, dans ce cadre, nous avons illuminé les Rotondes en bleu lors de l’année culturelle en 2007. Actuellement, nous travaillons avec Marc Mimram sur le projet de la passerelle pour piétons et vélos au Kirchberg. Nous avons également réalisé, avec Abscis Architecten, la Maison des sciences humaines, à Belval, et sommes actuellement en train de réaliser la maison de soins Elysis, à Esch, avec le bureau Arco. Pour le centre commercial Cloche d’Or, nous avons collaboré avec Schemel Wirtz. Chacune de ces collaborations apporte de nouvelles idées, une nouvelle manière d’approcher un projet. Il est important de rester curieux et ouvert à des opportunités. 42
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FAST & CURIOUS Maison ou appartement ? Maison. Gestion d’équipe horizontale ou verticale ? Horizontale. Dîner à la maison ou au restaurant ? À la casa. En bois ou en béton ? En bois. Diplomate ou franc-parler ? Entre les deux. Asie ou États-Unis ? Asie. Série ou film ? Film. Lève-tôt ou couche-tard ? Lève-tôt. Plein ou vide ? Plein. Commande ou concours ? Concours. Retrouvez l’interview vidéo Fast & Curious de Tatiana Fabeck sur paperjam.lu.
Pensez-vous que l’architecture peut contribuer à faire rayonner le Luxembourg à l’international ? Oui, absolument. Et lorsque je fais visiter le pays à des amis architectes étrangers, tous sont stupéfaits par la qualité des réalisations qu’ils découvrent, notamment à Belval et au Kirchberg. Je pense que Luxembourg et le Grand-Duché trouvent peu à peu leur place sur la carte des villes et des pays qu’il faut visiter si on s’intéresse à l ’architecture contemporaine. Nous devrions faire encore plus de lobbying dans ce sens, je pense. Et votre succession, y avez-vous déjà pensé ? Je n’y pense pas encore, pour être tout à fait sincère. Mais c’est évidemment un sujet dont je dois me préoccuper prochainement. C’est une problématique qui est liée à chaque entreprise, et à partir de 50 ans, il ne faut pas l’écarter. Mais je dois avouer que je suis tellement prise dans le tourbillon du quotidien que je n’ai pas encore eu l’occasion d’y réfléchir concrètement. Je suis ouverte au changement et souhaiterais vivement que l’activité du bureau continue aussi après moi.
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Nasir Zubairi became CEO of the Lhoft in 2016.
Conversation Nasir Zubairi
“Suddenly we saw a big spurt in digital demand” CEO of the Luxembourg House of Financial Technology Nasir Zubairi has seen a seismic institutional shift in adoption of fintech and regtech solutions since the pandemic. He explains why some solutions are game changers. Interview JESS BAULDRY
It’s been a challenging year for everyone. What changed at the Lhoft over the past 12 months? I shut down the office three or four days before the official lockdown. And obviously, just as everyone else did, we had to pivot to a digital remote model. A lot of our work, which is around community events, domestically and internationally, all shut down. There hasn’t been a physical event for a year. We had a quick strategic review and part of the agility we have as a team is that we pivoted everything to digital. Also, what we started seeing among members was confusion. At the beginning nobody quite knew what was happening, there was a lot of uncertainty to do with lack of business or business shutting down and managing costs. So, we focused very much firstly on providing a lot of information. We put together cheat sheets for all the different funding schemes because, yes, there was a lot and the government did a fantastic job to put out all these funding schemes, but wading through each one knowing which one was right, it wasn’t easy. We put together an A4 slide saying, ‘this is applicable to this business, with these criteria’. We tried to hold their hands and soften the blow. Have there been any surprises during this period of uncertainty? For three to five months, a lot of the firms here were really anxious because a lot of them are servicing the banking sector and the finance sector and obviously the finance sector themselves had to dig in and look internally, to see how they would ensure business continuity during this period. But after these three to five months, operations began running smoothly. That’s when we started to see demand seeping in from the finance sector for techno-
Photos MIKE ZENARI
logy tools. Because a lot of them realise that technology is critical to their business continuity. How do you get a signature and verify the identity of somebody if you can’t meet them face to face? Arguably I will say somebody signing a piece of paper is nonsense anyway. Many firms would have somebody sign something and fax it. But how do you pick up a fax if you can’t go into the office? I find the whole thing archaic! I wouldn’t know how to send a fax. So, a lot of firms which we look to develop in Luxembourg in the regtech sector became quite in demand because they provided these solutions. A lot of institutions started saying we need to talk to them. And suddenly we saw a big spurt in digital demand. A lot of firms have done quite well as a result.
LHOFT MEMBERS RAISING FINANCE In mid-March 2021, peer-to-peer investment platform Stokr successfully raised €3.9m in its pre-series A funding round. It received strategic investments from Borderless Capital, Utopia Genesis Foundation and G1 Ventures. It plans to scale up its investment platform to meet the growing demand for EU-compliant security token offerings. HQLAx in January 2021 raised €14.4m in funding from a number of financial investors. The funds will help combat European collateral fragmentation by boosting connectivity. Email management firm EmailTree raised an additional €1.4m in February 2021, through four new investors. Founded in 2019, it will use the finance to help automate more work processes.
We know that a lot of innovative tech startups like Airbnb and Uber emerged in the fall-out of the 2008 crisis. Who do you expect to be the winners in Luxembourg of this crisis? I’m not going to say anyone is going to be the next giant like that. But I think the firms that will do well over the next few years will be the tokenisation platforms, the blockchain companies. There’s a multitude. Also, cybersecurity firms. With this increased use of digital comes the issue of protecting digital. So, I think security is going to explode in terms of firms that are helping deal with cybersecurity issues as a general sector and I think we’re well placed for that as well. How does the current surge in demand for fintech compare with the period after the 2008 crisis? I’ve only been in Luxembourg for five years. I don’t have any knowledge of what came out in Luxembourg around that time. Was the sector lagging behind in Luxembourg? The fintech sector? Definitely. That’s partly why we were set up in the first place. The minister of finance said there was a lot going on around the world and there didn’t seem to be much going on in Luxembourg around financial technology, which is really the sort of the foundation of setting up the Lhoft. There weren’t many fintech firms in Luxembourg, let’s put it that way. To what extent will this surge in demand for fintech solutions be lasting? When you have a crisis of this kind of scale, and there have been other crises in history, the economic impacts tend to be delayed significantly after the actual point in time.
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Conversation Nasir Zubairi
Lhoft has 162 members, of which 75 are resident.
When I hear others, be it from economic ins- On the innovation side, the incubator school which provides technology education to teenagers between the ages of 13 and 18. titutions, think tanks or public sector bodies, at the University of Luxembourg And the terms of Tech School are aligned with saying Luxembourg’s doing OK, I’m like, ‘it is seeing unprecedented numbers is today, but not tomorrow’. You often see in of new products and services from school terms and they do it as an afterschool activity. They have a hackathon. It’s amazing the GDP figures that Luxembourg doesn’t seem wannabe entrepreneurs. How does this to be doing too badly, better than every other feed into your ecosystem? what they develop in 36 hours and demonsEuropean Union country. And then you have It’s great to see young people innovating and trate, it’s incredible! to ask yourself how much of that is actually being enthusiastic about innovation. Theirs attributable to the real economy, i.e., physi- is broadscale innovation, it’s not just finance. Generally, where does the fintech cal business, and how much of it has just Although there’s been some great success sto- innovation in Luxembourg come from, actually happened? ries. I’m not wearing them today, but Filip outside of the grand duchy or among Asset prices are at an all-time high, the US Westerlund [of Our Choice] gave me a special residents and natives? market is flying. What is our core business in pair of his sneakers early on. He’s doing great There’s a bit of a mix and match. But, LuxemLuxembourg? It’s investment funds. You saw job, he’s very charismatic, you can tell the bourg is always going to have limitations the numbers probably recently that we’ve now guy’s going to be successful. There’s also a because of the numbers of people, with a surpassed 5 trillion [euros] in assets. Do you guy who does sustainable housing. population of just 600,000. A lot of the innothink any of that is attributed to business? No, At the Lhoft we love to support education vation is coming from abroad into Luxemit has just happened. That doesn’t mean the very heavily and we’ve seen over the years bourg, where firms choose Luxembourg as a economy’s necessarily doing well. Businesses, more and more of a pivot towards focusing good place to set up their business, particuhoreca particularly, is in dire trouble. You can on education, particularly under digital. We’ve larly in fintech services. It’s the leading EU just see the high street over here is shutting run over 90 webinars and seminars, online financial services centre. You also need to look at it from an incendown. And we’re beginning to see now in our since last March, all education focused. We’re sector one or two firms getting into trouble currently running a series on AI. So, we’re tive perspective. If you’re already in L uxembourg, as well. But that’s expected to happen. Not all focused on finance, the fintech ecosystem, working in Luxembourg, let’s face it, the salabut we have programmes focused on child- ries are very high here, the cost of living is firms are going to survive this. ren from the age of 3 or 5, and we focus on high. Everyone has an element of risk averSurely that’s true even in good times? older youth at university and the Luxembourg sion and to take the risk to set up your own Exactly. Actually, generally I’m quite chuf- Tech School. business is a big thing when you’ve got a nice, fed that we seem to have a very robust sector. cushy job paying quite a lot of money and you’ve got a mortgage to pay off or high rent. I mean, if you look at the data, 8 out of 10 Tell me more about that. small businesses will go bankrupt. I think It’s an initiative by a guy called Sergio Coro- So, sometimes it’s the renewal or freshness of over the past four years, I’ve known of five nado. I don’t understand how many hours in new talent coming in, the people who don’t firms in our sector to go bankrupt. So, it’s a day he has. He’s chief information officer have that history, that will bring in a lot of held together pretty well. But every sector is at [the] Nato [Support and Procurement Agency] innovation. I do think [that] we are beginning going to suffer. but somehow managed to set up this tech to see job cuts occurring. Not everyone is 46
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Conversation Nasir Zubairi
You mentioned that you used to host There are not masses of innovation. Where a lot of events before the pandemic. do you get engagement, networking and To what extent are virtual meetings interaction online? It’s in gaming. I have a able to replace the physical interactions 14-year-old and a 12-year-old. If you watch of pre-pandemic times? online gaming and once these kids are playing, Right now, everyone is doing online confe- they’ve headsets on, their mobile is next to rences and events. I think we’ve all suffered them with some sort of chat room and they’re fatigue from it. It’s dull. It’s great listening engaging as part of that experience. The How does the Lhoft work with other to people you might learn something [from], gaming companies know how to do it. We financial platforms like Luxembourg but I’m not going to sit at my computer screen need to get the gaming know-how into this for Finance? You do have a sort of looking at Zoom, watching a bunch of intel- conference business side to build the engapromotion role, but you also really ligent people tell me stuff. Yeah, I might pick gement. I’ve seen a few little things, little develop financial solutions while LFF up a few good things, but I’m not going to gimmicky things that look like games, coming is purely promotional. do that for 8 hours a day. What’s missing is out. But it’s still not there. Nobody’s cracked That’s a good way to look at it. We work closely the networking. That’s the main reason people this nut. There’s little to no networking on with everyone, since day one. I remember a lot go to events and nobody has solved that pro- these platforms. of the suspicions when I was meeting people blem online yet. How do you do new business initially until we proved this. We’re here to col- development? That’s the area that’s sorely So, what is coming up for the Lhoft? laborate with everyone. The strength of Luxem- lacking. Even if you don’t have anything par- Lhoft TV has launched. We’ve been filming bourg is working together. It’s a small country ticularly newsworthy but if you’re good at a show, which we hope to put out at least so that’s really the USP in this country. what you do, and a CEO has to be good at every month. It has little sub-segments, focuI see it almost from a small business pers- that, they’re at events, putting their brand sing on different things. I interviewed an pective, in that LFF are the sales guys or business forward and making their brand known, even interesting character, John Holloway, with developers and we’re the product managers. if they haven’t got the full product yet. They’re little segments. We just want to do something We’re a product within Luxembourg but, because letting people know about the problem they’re a bit different. Also, a little bit upbeat as well, we’re the experts in what we know, we often trying to solve, getting feedback as well. And because everything’s so miserable in terms of news. We wanted to do something a bit support LFF internationally. We’ve often that’s just been cut off. more energetic and fun. been going all over the place when we can to support LFF. We also work with the ministry Have you seen any promising Is the goal to inform people or for of economy, ministry of foreign affairs, the solutions globally? Chamber of Commerce, and with [the Asso- No. I mean, Zoom, Webex and all these exposure for your members? ciation of the Luxembourg Fund Industry]. things, they’re not much different to the So, for exposure, there will be highlights and Everybody. solution we had 20 years ago, which is Skype. interviews with some members, and general information on user trends and deep dive insights and interviews. suddenly going to leave Luxembourg. But as is always the case in times of recession where people lose jobs, that spurs opportunity for people to set up new businesses, to try to build something for themselves because they’re forced into a corner. So, hopefully, we’ll see a lot of new innovation coming from that.
VOLUME DECLINES OVERALL AMID GLOBAL PRESSURES Total global investment activity (venture capital, private equity and M&A) in fintech, 2017-2020. Source
Pulse of Fintech, KPMG International
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Are there any new innovation programmes coming up? We’ve been an accelerator programme under financial inclusion for the past two-three years, where we bring in the ministry of foreign affairs with these fantastic tech firms. We will launch another one. It will be Catapult Kickstarter, targeting early-stage businesses across Europe, principally. Initially, it will be a digital programme lasting four weeks. The first edition will run in June. This will be in collaboration with the ministry of economy, where the target will be to have ten early-stage firms participating. And five of those firms will receive funding up to €50,000 each as well. And then we’ll run it again in November. Not every firm that participates will get the money, they have to show engagement participation and they’ve done a good job. It comes under the grant scheme so they would have to set up their business in Luxembourg.
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Le maire de Metz, François Grosdidier, veut plus de collaborations que de rétrocessions avec le Luxembourg.
Conversation François Grosdidier
« Le phénomène luxembourgeois est une formidable chance » Le nouveau maire (LR) de Metz, François Grosdidier, ne dira plus le gros mot le plus détesté des Luxembourgeois. À « rétrocession fiscale », l’ex-sénateur préfère « partenariat », notamment sur les volets transports et formation professionnelle. Auteur THIERRY LABRO
Indifférente au Covid-19, la cathédrale SaintÉtienne veille en silence sur le bureau du maire, faute de marché de Noël sur la place d’Armes. Avant son premier débat d’orientation budgétaire, mi-décembre, François Grosdidier range son smartphone. Rompu à l’exercice d’un mandat politique. Décrivez-moi « votre » Luxembourg, la manière dont vous voyez votre voisin. C’est marrant, j’ai deux visions. Originaire d’une vieille famille messine, j’ai grandi à Hagondange, parce que mon père travaillait dans la sidérurgie. Enfant, nous allions au Luxembourg, le dimanche. Nous passions la frontière, c’était un symbole très fort, et ça nous plaisait parce que nous avions l’impression d’être vraiment ailleurs. Aujourd’hui, le Luxembourg est devenu le fort pôle de développement économique d’une même métropole. C’est banalisé. C’est comme si les frontaliers habitaient dans la grande couronne parisienne et qu’ils allaient travailler à la Défense. Le Messin que vous êtes depuis toujours regrette-t-il cette situation ? Que Metz soit devenue le satellite de Luxembourg ? Non. On a toujours un peu la nostalgie de son enfance. Aujourd’hui, il y a moins de différences entre nos continents qu’il y en avait autrefois entre nos régions. Cela s’est joué en une ou deux générations. Le phénomène luxembourgeois est une formidable chance pour Metz et la Moselle, même si je suis aussi de la génération qui a vécu la prospérité de la sidérurgie. J’étais fier de dire à mes cousins parisiens que j’habitais dans le Texas français. On se considérait plutôt comme plus riches qu’eux. Puis, nous avons eu les années 1970-1980 où, tout d’un coup, nous étions les plus déshérités...
Photo ANDRÉS LEJONA
Que manquait-il pour comprendre que cela allait se produire, et prendre un virage ? Nous avons connu un surdéveloppement pendant la révolution industrielle, puisqu’on avait même une population venue de l’extérieur en nombre, d’abord d’autres pays d’Europe ( Italie, Pologne), puis des pays d’outre-Méditerranée… L’industrie a petit à petit disparu, et l’activité secondaire ne pouvait pas compenser. Si on voulait éviter la paupérisation et l’exode que connaissent certaines régions, on avait besoin d’une nouvelle dynamique économique. Globalement, nous avons perdu 100.000 emplois dans nos industries lourdes en une génération et demie, et au moins autant d’emplois induits. Nous avons retrouvé 100.000
BIO Politique À 15 ans, il adhère au CNI, petit parti conservateur et libéral, avant de mener sa première campagne, en 1973, avec le député-maire d’Amnéville, Jean Kiffer. Il exerce tous les mandats, sauf celui de ministre. Vert Assurément de droite, le maire de Metz a été initié à la défense de l’environnement par Jean-Marie Pelt. Avant de défendre la charte de l’environnement, de voter contre la loi sur les OGM de son ami Fillon ou d’écrire un livre en 2008 pour alerter, Tuons-nous les uns les autres : qu’avons-nous retenu des grandes catastrophes sanitaires ? Hyper-maire Vainqueur de toutes les élections en 2020, il est partout. Ce qui lui vaut le surnom d’« hyper-maire ».
emplois dans le travail frontalier et 40.000 à 50.000 emplois dans la logistique et le transport. Sans le phénomène luxembourgeois, la Moselle et la Lorraine seraient en état de paupérisation. Elles auraient toujours un tissu économique, mais pas au niveau de leur population. La dynamique luxembourgeoise, surtout à partir des années 1990-2000, nous a permis de rebondir. Vous vous inscrivez exactement à l’opposé de votre prédécesseur, Dominique Gros, qui a terminé son mandat en multipliant les exigences d’une rétrocession fiscale du Luxembourg. La rétrocession fiscale, ce n’est pas le sujet ? Non ! Je n’ai pas moins d’impôts locaux ni de dotation de l’État parce que mes administrés travaillent au Luxembourg plutôt qu’à Metz. Cela ne change rien à mes recettes ! Les dotations de l’État sont assises sur la population et les impôts locaux. Dès lors qu’ils habitent là, ils paient la même chose. Cette histoire de rétrocession d’impôts d’État n’est pas le sujet. On peut toujours se sentir frustré de ne pas avoir l’impôt sur le revenu. En revanche, tant que les frontaliers habitent et consomment en France, l’État perçoit quand même la TVA, qui constitue une recette plus importante dans ses caisses que l’impôt sur le revenu. Quels sont vos sujets, alors ? C’est une chance que beaucoup de mes administrés travaillent au Luxembourg, tout en habitant et en consommant ici. Ils apportent leur force de travail au Luxembourg, ils en tirent des revenus qu’ils dépensent ici. C’est du gagnant- gagnant. Je ne comprends pas que mon prédécesseur n’ait jamais compris que c’était une chance et qu’il demande des cofinancements SUMMER 2021
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Conversation François Grosdidier
comme on demande une indemnité en tant que Metz-Luxembourg au motif de cette difficulté réparation pour un préjudice. Il reste deux défis fiscale, alors même qu’il l’encouragerait sur la fondamentaux : les transports et la formation métropole parisienne ou lyonnaise. professionnelle. Il faut que les transports soient fluides entre la métropole de Metz, Thionville Vous êtes entendu, sur cette question, et le Luxembourg. On ne peut pas passer deux à Paris ? heures par jour le matin et deux heures le soir À Bercy, ils n’ont pas tous cette vision, mais entre son lieu de résidence et son lieu de travail. j’en ai parlé avec différents membres du gouIl faut aussi qu’on assure la formation. Là encore, vernement. Et je compte en parler avec Bruno certains, comme mon prédécesseur et une par- Le Maire (le ministre de l’Économie français, tie du patronat mosellan, pourfendent ces Luxem- ndlr). Notre métropole, pas juridique, mais bourgeois qui piquent la main-d’œuvre qualifiée. physique, démographique, a encore plus de Quand on est dans une agglomération qui se problèmes de transport que les autres, parce situe dans la moyenne nationale du chômage que les pouvoirs publics n’ont pas pensé les (pas loin de 10 %), qu’on est même à trois ou transports en commun comme ils l’auraient quatre fois ce taux dans certains quartiers, mon fait ailleurs. Metz-Luxembourg ne peut pas sujet n’est pas d’en vouloir à celui qui emploie être encore plus bloquée dans le télétravail un certain nombre de mes administrés, mais pour cette raison. Si on prend les flux actuels, plutôt de me demander pourquoi, quand j’ai les projets autoroutiers et ferroviaires apporune offre d’emploi non satisfaite, les chômeurs teraient des améliorations à moyen terme... qui ne trouvent pas de boulot ne peuvent être employés par les entreprises locales qui ont des Qu’entend-on par « moyen terme » ? emplois. Je me pose la question du problème Quatre ou cinq ans, je pense. Le ferroviaire de la motivation, de l’orientation, de la forma- devrait aller assez vite. Au niveau de l’A31 bis, tion, de la qualification, tant pour les emplois j’espère qu’on aura des résultats d’ici cinq ans. destinés au Luxembourg que pour les emplois Il faut s’inscrire dans le plus long terme. On a locaux. Si, à un moment, nous sommes confron- d’autres facteurs d’augmentation du trafic, tels tés à une insuffisance de formation et qu’il faut que l’augmentation du nombre des emplois qui qu’on forme ensemble, on doit pouvoir en dis- s’offriront aux frontaliers au Luxembourg. On cuter avec nos partenaires luxembourgeois, évoque les chiffres de 50.000 à 70.000. C’était définir des objectifs de formation, cofinancer peut-être avant le Covid, qui ralentit forcément des infrastructures ou des actions de formation, le phénomène, mais il y a quand même de fortes comme il faut certainement qu’on cofinance chances que cela reprenne. À Bettembourg, les de nouvelles infrastructures de transport, parce investissements logistiques sont en place. Je constate amèrement que la route de la soie que tout le monde a tout à y gagner. arrive à Rotterdam ou à Anvers, mais, hélas, pas Séparons ces sujets. Sur les transports, dans les ports français, alors qu’on a la plus belle le ministre responsable de ce domaine, façade maritime d’Europe. Mais on a les ports François Bausch (Déi Gréng), dit souvent les moins accueillants et les moins organisés. qu’il est prêt à discuter de cofinancements, Ça descend par le rail à Bettembourg, et ça part mais que les Lorrains ne lui présentent en camion... On avait annoncé à grands cris, il pas de projets... à part un P+R de temps y a 15 ans, cette autoroute ferroviaire Bettembourgen temps. Perpignan. Or, ça ne fonctionne pas, ou mal, et C’est gentil, mais cela ne règle pas le problème, on constate en plus un vrai engorgement feril a raison. Nous avons une insuffisance auto- roviaire dans la vallée du Rhône. Aujourd’hui, soit, malgré les insuffisances routière. La faute aux Lorrains : nous avons loupé l’A32 il y a 20 ans. Le projet d’A31 bis est foncières, il faut trouver le moyen d’augmenun pâle palliatif de l’A32, mais on n’a pas le ter l’infrastructure ferroviaire pour doubler les choix. On sait que cela ne suffira pas. Nous devons augmenter les capacités ferroviaires. Or, nous sommes au maximum des possibilités de l’infrastructure. La Région développe du matériel ferroviaire et est en train d’acquéL’ÉCOTAXE QUI POURRAIT PESER SUR L’A31 rir des rames plus longues, à deux étages, allonge Les deux départements d’Alsace même les quais des gares TER pour absorber ont obtenu un accord, début janvier, ces capacités. Même ça, cela ne suffira pas. pour la création d’une collectivité Ces deux solutions amélioreraient la situation européenne unique… qui pourrait poser un problème au Luxembourg : avec les flux actuels. Cela nous apporterait une écotaxe en discussion peut-être une certaine fluidité si on ajoute un à Strasbourg détournerait le trafic développement du covoiturage et du télétrade l’A35 sur l’A31. « Nous n’avons pas obtenu, au Parlement – j’étais sénateur vail. Avec cette difficulté sur le télétravail, face et j’ai amendé le texte –, la même auquel l’État, pour des raisons fiscales, est rétif. chose sur des autres axes. C’est une Je ne voudrais pas que l’État pose des restricmenace de plus », redoute le maire de Metz, François Grosdidier. tions au télétravail au sein de la métropole 52
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« Nous ne savons pas où mettre de nouveaux rails. » voies ferrées, soit nous devons utiliser un type de transport en complément, du type monorail, comme le font de grandes métropoles du monde où il y a un problème de foncier. C’est cher, non ? La première à en parler, la maire de Thionville aujourd’hui décédée, Anne Grommerch, s’était attiré les moqueries en 2015... Entre 500 millions et 1 milliard d’euros. L’hypothèse est-elle toujours sur la table ? Il n’y en a pas d’autres. Je sais que ce n’est pas la préférence du Luxembourg, qui a énormément investi dans son réseau ferroviaire, mais nous ne savons pas où mettre des rails supplémentaires. Je ne crois pas qu’on puisse régler notre problème sans infrastructure supplémentaire – un débat que j’ai avec l’État et la Région, et qui n’a aujourd’hui que des réponses en termes d’optimisation, de mutualisation, pour éviter le sujet de nouvelles infrastructures. Même si on les exploite mieux sur le Sillon lorrain et sur les petites veinules, les autres petites liaisons, ça ne joue qu’à la marge. Évidemment, on est sur du temps long, au moins une décennie. Peut-être que ce sera du ferroviaire, mais ça sera plus coûteux parce qu’il faudra démolir. Faire de la place. Les monorails qui existent ne sont pas si longs, si ? Quelles villes devraient-ils relier ? Metz à Luxembourg ! Il faut que ce soit connecté au réseau de transport urbain de la métropole et que ça parte jusqu’à Luxembourg. L’A31 n’apporte pas les réponses qu’il faudrait apporter, notamment sur le segment messin. L’autre grand dossier, c’est la formation. Il y a quelques semaines, le président du Département de la Moselle, Patrick Weiten, reprenait à son compte une idée émise par le ministre des Finances luxembourgeois,
Conversation François Grosdidier
Comment fait-on, alors, pour répondre aux besoins en main-d’œuvre ? Il n’y a aucun problème, à Metz ou à Thionville, à doubler ou tripler la formation des infirmiers ou des aides-soignants. On a la ressource humaine. Qui voulons-nous former ? Si on veut former des habitants de Moselle ou de Lorraine Nord, autant les former au plus près de là où ils habitent, même s’ils vont travailler plus loin. Pourquoi aller chercher plus au sud ou plus à l’ouest des lieux complètement nouveaux qui n’ont pas de sens ? Former près du Luxembourg, cela peut avoir un sens. Un infirmier au Luxembourg, en France ou en Sarre, c’est la même chose ! Nous ne demandons pas aux infirmiers que nous formons de s’engager à travailler en France, même si on a du mal à recruter. De la même façon, on devrait pouvoir cofinancer ceux qu’on forme demain et qui seraient même formés avec le concours du Luxembourg. Au début de leur carrière, ils vont plus facilement au Luxembourg. Ils peuvent vouloir se poser et revenir en France. Ils auront forcément un peu de mobilité professionnelle. Ils ne sont pas figés.
Pierre Cuny
UNE CONSTELLATION POLITIQUE FAVORABLE Si le Luxembourg parle avec le gouvernement français, la situation se décante de l’autre côté de la frontière : le maire de Metz est de la même sensibilité politique que le patron de la Région Grand Est, Jean Rottner, que celui du Département, Patrick Weiten, et que le maire de Thionville, Pierre Cuny. De plus, assure-t-il, « depuis un mois, le préfet de la Moselle a compétence pour discuter de l’ensemble des problèmes au nom de l’État français ».
Il n’y a pas de concurrence là-dedans, le marché du travail est transfrontalier, on doit former avec cette caractéristique. Sauf qu’il faut financer cette formation... Quand les financeurs, que ce soit le patronat ou la Région, disent qu’on forme pour les autres, ils font une erreur. La formation n’est pas attachée à l’employeur, mais à l’individu. Je préfère former un infirmier qui va habiter Metz et travailler au Luxembourg, plutôt qu’un psychosociologue qui sera à Pôle Emploi. Je n’ai pas l’impression que, parce qu’il est employé au Luxembourg, mais qu’il habite ici, je me sois fait rouler par les Luxembourgeois.
Pourquoi ces sujets-là n’ont-ils jamais été abordés de cette manière-là ? Je ne sais pas. Ça a toujours été mon discours. J’ai commencé très jeune, dans les années 1990, comme vice-président de la Région, en charge de la formation, et j’avais déjà le même discours. La collectivité doit proposer à chaque individu une formation qui lui permette de vivre de son travail. C’est vrai que c’est moins évident pour les financeurs professionnels. Quand on est sur des financeurs publics, les lycées professionnels, technologiques ou l’Université, il n’y a pas de problème. Plus les entreCela ne vous a pas choqué, prises financent, plus elles disent : « Halte-là ! depuis le début de la crise du Covid, Moi, je forme des gens qui ne viendront pas chez que l’on accuse le Luxembourg de piller moi. » La Région est un financeur public. Les les personnels de santé lorrains à coups infirmiers ne sont pas financés par l’État, mais de milliers d’euros ? par la formation professionnelle. Si on n’a pas Ce n’est pas lié à la crise. Cela montre que nous assez de soignants, on n’a qu’à en former plus ! ne formons pas assez pour répondre aux besoins Les hôpitaux ne demandent que ça ! Au CHR de tout notre bassin d’emploi, dont je consi- de Metz-Thionville, on peut sans problème dère qu’il est le même en France et au Luxem- doubler la formation des infirmiers. Former bourg, de Metz à Luxembourg. C’est évident en fonction des besoins est une nécessité pour qu’en raison des différences de salaire net, les les entreprises et dans l’intérêt des jeunes et employeurs luxembourgeois embauchent plus des salariés. facilement. Pour moi, la réponse, ce n’est pas de dire : « Salauds de Luxembourgeois qui nous Qui décide, par exemple, de doubler piquent nos employés ». Mais de dire que, quand la formation, dans le mille-feuille instituon a encore 10 % de chômeurs, on n’a qu’à for- tionnel français ? mer assez pour pourvoir aux deux ! C’est ça, la C’est compliqué ! L’État, via l’Éducation natioréponse ! Nous devons intégrer la demande nale, quand on est dans l’enseignement proluxembourgeoise à nos besoins de formation. fessionnel ou technique. C’est ou c’était en
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partie la Région sur la formation professionnelle qui, dans la dernière réforme, a renvoyé en grande partie cette compétence aux branches professionnelles. Nous n’avons pas une vision assez cohérente. Cela a été un des drames français : nous avons fermé des lycées professionnels parce qu’ils peinaient à recruter dans des métiers de l’industrie ou du BTP, alors qu’ils plaçaient 95 % des jeunes. Et on a ouvert des sections de lycée professionnel tertiaire, qui ne manquent pas de candidats, mais dont le taux d’insertion à la sortie est très faible. Comment le Luxembourg pourrait-il apporter cette participation à ce volet, qui s’est révélé fondamental pendant la crise ? Restons sur l’exemple des infirmiers. Je rêverais d’un partenariat entre le CHR et le Luxembourg pour augmenter fortement le nombre d’infirmiers et d’aides-soignants. Et on a plein d’autres métiers, dans le service à la personne, notamment. Ceux qui parlent sans arrêt de rétro cession fiscale avancent, à juste titre, un modèle suisse qui fonctionne... Oui... Mais si on est capable d’aller voir nos partenaires luxembourgeois, non pas en demandant une restitution d’impôt pour réparer l’injustice qu’ils commettraient, mais en leur expliquant qu’on a besoin d’eux là-dessus, parce qu’on forme déjà 120 % des gens qu’on emploie dans telle ou telle branche; si on leur explique que, « dans votre intérêt, on aimerait former davantage, mais pourriez-vous accompagner cette démarche en cofinancement ? », je ne suis pas sûr qu’on se heurte à une fin de non-recevoir. Notre approche du marché doit être globale, même si les règles ne sont pas les mêmes, les revenus ne sont pas les mêmes, les formations ne sont pas les mêmes. L’organisation institutionnelle non plus. Nos ministres parlent à Paris, d’État à État. Ce n’est pas insurmontable. En France, c’est un peu plus compliqué, mais on peut parler d’une seule voix entre la Ville, la Métropole, le Département, la Région et l’État... Ce sera plus facile avec moi qu’avec mon prédécesseur !
paperjam.lu (archives)
Pierre Gramegna (DP), celle d’un centre de formation commun aux deux pays dans certains domaines, comme le secteur hospitalier. Ce serait comme créer une ville nouvelle. Nous aurions totalement tort de nous dire que nous allons reconstituer une ville nouvelle, alors que nous avons, dans le Sillon lorrain (Épinal, Nancy, Metz, Thionville), et avec le Luxembourg, une armature urbaine, des villes qui ont des services, des centres de formation, des compétences. Cela n’a pas de sens de créer des villes ou des zones nouvelles, parce que nous ne serions pas capables de traiter les problèmes. À quoi bon sortir de l’activité économique et du logement, de la formation, en créant des unités urbaines totalement nouvelles, comme Marne-la-Vallée, mais qui n’auraient jamais ni identité, ni services culturels, ni équipements ?
Patrick Weiten
Photos
Jean Rottner
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Conversation
« J’ai dépassé le stade où l’on se plaint de ces inégalités-là » Christine Majerus est sans conteste la sportive luxem bourgeoise n°1 des années 2010.
À 34 ans, la cycliste professionnelle Christine Majerus a l’expérience de celles qui vivront cet été, à Tokyo, leurs troisièmes Jeux olympiques. Et le vécu pour analyser les mutations que connaît aujourd’hui le sport féminin. Interview JULIEN CARETTE
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Photo ANDRÉS LEJONA
Christine Majerus
BIO
Cet été, vous allez disputer vos troisièmes Jeux olympiques, après Londres et Rio. Le cyclisme est un sport qui n’a pas forcément besoin de l’exposition médiatique des JO pour exister. Par conséquent, que représente, pour vous, cette participation ? J’espère déjà que je pourrai bien prendre part à ces Jeux. La situation semble avancer dans le bon sens quant à leur organisation, mais par les temps qui courent, rien n’a jamais l’air complètement sûr avec la situation sanitaire… Pour en venir à votre question, dans pas mal de sports, le nombre de participations aux JO en dit souvent beaucoup sur la carrière d’un athlète et sur la qualité de celui-ci. Donc, oui, cela signifie quelque chose à mes yeux. Et si le cyclisme masculin n’a peut-être pas un grand besoin de la caisse de résonance qu’offrent des Jeux, chez les filles, cela reste un événement très important. Devenir championne olympique, c’est encore un peu plus fort qu’être championne du monde. Du moins, à mes yeux.
Études et débuts Née le 25 février 1987, Christine Majerus a fait des études de Staps à la faculté des sports de Nancy. Ancienne athlète, elle est arrivée au cyclisme via le triathlon et le duathlon, ne se mettant sérieusement au vélo que vers ses 18 ans. Aujourd’hui, elle fait partie de l’équipe SD Worx, une des meilleures au monde. 36 fois championne du Luxembourg Sacrée six fois Sportive luxembourgeoise de l’année, dont cinq fois lors des cinq dernières éditions (2015 à 2019), elle cumule 36 titres de championne nationale : 14 en contre-la-montre, 11 en course en ligne et 11 en cyclocross. Aucune de ces couronnes ne lui a échappé depuis 2010. Sur un plan international, elle a pris la 4e place des championnats du monde de cyclocross en 2018 et a terminé la saison 2019 au 9e rang mondial (UCI) sur route.
faire les choses pour les bonnes raisons. Je n’ai pas commencé le vélo pour être dans les médias. Ce qui m’ennuie plus, c’est que ce déficit de médiatisation n’aide pas à développer le sport ou, plutôt, à faire naître des vocations. C’est un manque de publicité que j’associe à une forme de gâchis, même si je dois être juste et dire que les choses se sont déjà un peu améliorées. Sur le plan personnel, j’ai d’ailleurs investi pas mal de temps à cultiver une certaine relation avec la presse. C’est tout le sport féminin qui est globalement moins médiatisé. Il suffit de feuilleter un journal ou un cahier sportif pour s’en convaincre. Mais, dans le cyclisme, la donne a un peu changé grâce à la télévision. Beaucoup plus de courses féminines sont aujourd’hui télévisées. C’est une belle exposition… Le cyclisme féminin n’est plus là pour servir de bouche-trou dans les grilles des programmes TV. Aujourd’hui, nos épreuves font partie de la programmation. C’est évidemment une évolution intéressante. Après, toutes les courses ne sont pas retransmises. Celles qui le sont sont souvent des épreuves où une version masculine existe déjà et passe à la télé. Ce qui signifie que les moyens techniques sont déjà en place. Cela rend plus simple la retransmission de notre course. Mais c’est déjà une avancée. Désormais, il faut espérer que toutes nos courses puissent être télévisées. Et pas juste les grandes classiques flamandes, comme c’est le cas aujourd’hui. La pandémie a eu beaucoup de côtés négatifs, mais il y en a tout de même un qui a joué en faveur du cyclisme féminin : vu que les spectateurs ne peuvent plus venir sur le bord des routes, les organisateurs sont obligés de proposer une retransmission. Sinon, cela ne sert plus à rien d’organiser cette épreuve. Et la bonne nouvelle, c’est que cela semble intéresser le public. Les audiences sont en augmentation et les retours sont positifs. Il faut maintenant que l’offre s’élargisse…
En 2016, vous aviez terminé 16e de préparation en montagne dans mon prode la course en ligne au Brésil… gramme, je ne perds pas de vue que d’autres Mes deux participations olympiques ont été belles courses m’attendent en fin de saison. très différentes. À Londres, en 2012, j’étais jeune et surtout inexpérimentée. Physique- Les Jeux sont un événement où hommes ment, j’étais au niveau, mais je n’avais pas et femmes sont mis sur un pied d’égalité. forcément l’expérience nécessaire pour accro- Ce qui n’arrive pas si souvent en matière cher un top 10 dans une telle course. Du coup, de sport. Vous qui évoluez dans une la 21e place que j’avais récoltée m’avait causé discipline à la tradition profondément quelques regrets. Même si cette expérience masculine, ressentez-vous souvent ne s’acquiert qu’avec le temps... Aujourd’hui, cette différence que l’on peut faire entre les hommes et les femmes ? dans les mêmes conditions, je ferais mieux. Quatre ans plus tard, à Rio, le circuit ne me Oui, c’est certain. On constate des inégalités convenait pas. Il était taillé pour des grimpeurs. en termes de médiatisation, de rémunération… Je m’étais donc rendue au Brésil sans grande Mais je vous avoue que j’ai dépassé le stade où ambition et, au final, si mon résultat (16e) peut l’on se plaint de ces choses-là. Le sport fémiapparaître quelconque pour le grand public, à nin a ses propres forces. J’essaie donc souvent mes yeux, c’était une petite victoire. Parce que de mettre celles-ci en avant, plutôt que d’aller j’avais pu réussir, le jour J, la meilleure perfor- dans la comparaison avec les hommes. Il y a mance qu’il m’était possible d’obtenir. largement de quoi rendre notre discipline intéLe cyclisme n’est pas un sport « normalisé ». ressante et attractive. Ce serait une faute de Ce que je veux dire, c’est que l’on ne court pas vouloir forcément reproduire ce qui se passe dans un environnement qui est toujours le même. chez les garçons. Il faut essayer d’apprendre Contrairement à des nageurs dans une piscine des erreurs commises sur le circuit masculin, qui fait toujours la même longueur ou des ath- mais tout en gardant notre propre identité. Vous parliez aussi de l’aspect financier. lètes sur une piste d’athlétisme. En vélo, un par- À mes yeux, c’est une manière de faire plus À ce niveau-là, la différence est-elle aussi cours peut vous convenir. Un autre non. C’est efficace que de se battre systématiquement grande qu’on peut l’imaginer entre hommes et femmes ? une donnée qu’il faut toujours garder en mémoire. sur tous les points de différence. Oui, c’est un fait. Même si tout n’est pas rose Et ne pas comparer « bêtement » les chiffres. Mais cela doit être frustrant, non plus chez les garçons. Ceux qui évoluent quand même, de voir ces écarts Et le parcours de Tokyo, comment est-il ? dans le World Tour, c’est-à-dire la D1 du cyclisme, Je n’ai pas eu la chance de pouvoir effectuer de traitement quand on commence gagnent bien leur vie. Mais pour ceux qui sont une reconnaissance… Après, les avis diver- à pratiquer un sport de haut niveau ? dans les catégories inférieures, cela peut s’avégent, même si la tendance est plutôt à dire Ce n’est pas gratifiant, en tout cas. Quand vous rer bien plus compliqué… Après, au sommet, les différences sont là qu’il s’annonce très difficile, avec un dénivelé réalisez un top 10 dans un monument du cyclisme, comme on n’en voit que rarement dans les comme le Tour des Flandres, et que cela vous et sont importantes. En matière de prize money, épreuves féminines et un circuit d’un type donne droit à une ligne dans les journaux, alors notamment. Vous avez peut-être vu l’énorme qu’on ne connaît pas vraiment par ici, avec que, dans le même temps, il y a deux pleines écart entre la dotation des vainqueurs masune moitié en faux plat montant. Je vais être pages sur une course masculine où aucun Luxem- culin et féminin sur la première classique de sincère : je ne vais pas tout miser sur cette bourgeois n’a franchi la ligne d’arrivée, c’est l’année, Het Nieuwsblad (l’Italien Davide course. Même si j’incorpore quelques stages forcément frustrant. Mais il faut apprendre à Ballerini a touché 16.000 euros, alors que la SUMMER 2021
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Conversation Christine Majerus
Néerlandaise Anna van der Breggen en a perçu… 960, ndlr) ? C’est assez incompréhensible ! Depuis deux ans, l’Union cycliste internationale (UCI) a imposé un salaire minimum sur le World Tour féminin. C’est une bonne chose, mais le décalage hommes-femmes reste très important (en 2021, le salaire féminin minimum est fixé à 20.000 euros brut pour une employée et 32.800 euros pour une cycliste sous statut indépendant, alors qu’ils sont respectivement de 40.045 euros et 65.673 euros sur le World Tour masculin, ndlr). Les salaires du vélo féminin doivent se situer loin de ceux révélés dernièrement dans la presse italienne concernant les stars du peloton masculin... Au niveau des meilleurs, les écarts sont encore plus marquants, oui. Les meilleures féminines gagnent beaucoup moins que leurs équivalents masculins. La Gazzetta dello Sport annonçait ainsi que le Slovène Tadej Pogacar, lauréat du dernier Tour de France, est à 5 millions d’euros par saison. Le Colombien Egan Bernal gagne, lui, 2,8 millions. Et juste derrière, on retrouve le champion du monde français, Julian Alaphilippe, à 2,3 millions d’euros, puis les nouvelles stars comme Wout Van Aert (2,2) et Mathieu van der Poel (2). C’est bien simple, avec un seul de ces derniers salaires, on peut réaliser une saison complète d’une équipe féminine !
DEPUIS JOSY BARTHEL EN 1952… Le seul champion olympique luxembourgeois se nomme Josy Barthel. Et son exploit date de 1952. Une médaille d’or en athlétisme remportée dans le stade olympique d’Helsinki, après sa victoire sur le 1.500 mètres. Et ce, alors que la légende tchèque Emil Zátopek réalisait, quant à lui, un exploit plus jamais égalé, le triplé 5.000 m-10.000 m-marathon. Depuis, à l’exception du skieur Marc Girardelli (double médaillé d’argent en 1992 à Albertville) aux JO d’hiver, plus aucun Luxembourgeois n’est monté sur un podium olympique. Le plus proche d’y arriver a été le cycliste Andy Schleck, en 2008 à Pékin. Le Mondorfois a passé la ligne en cinquième position, avant de gagner une petite place suite au déclassement pour contrôle positif de l’Italien Davide Rebellin. Il a donc terminé quatrième, au pied du podium…
de la hausse de médiatisation du cyclisme féminin. En tout cas, je l’espère, parce que cette dernière serait alors due à de mauvaises raisons. Même s’il est toujours bon de pointer des inégalités… [silence] Pour moi, l’explication est plutôt liée à la hausse de niveau des courses. Une fois que l’on regarde une course féminine, on s’aperçoit qu’elle contient tous les ingrédients qui font le sel du cyclisme. Si l’on est fan de vélo masculin, il n’y a aucune raison de ne pas apprécier son pendant féminin. À moins d’être misogyne.
On peut certainement évaluer à plus d’un millier le nombre de garçons qui sont professionnels dans votre sport. Et chez les filles, combien êtes-vous ? Le World Tour est composé, pour l’heure, de neuf équipes, comportant chacune 12 coureurs. Faites le calcul… Et à ce contingent, on peut Vous avez aujourd’hui 34 ans. sans doute ajouter une quinzaine de jeunes filles C’est un âge où une femme peut se dire qui ont la chance de pouvoir être soutenues par qu’il est temps de devenir maman. une structure comme celle que l’on connaît Une grossesse semble de plus en plus chez nous avec l’armée luxembourgeoise. Cette compatible avec le fait de mener une dernière accueillant en son sein pas mal d’ath- carrière de haut niveau dans le sport. lètes. Cela existe aussi notamment en Allemagne, Aujourd’hui, il apparaît possible d’être en Italie… Et cela en a sauvé plus d’une, ces une championne et une maman. Avez-vous dernières années. Heureusement que ces struc- senti une évolution à ce niveau-là ? tures étaient là. Parce que si on avait dû attendre La maternité est un frein à la carrière d’une le salaire minimum de l’UCI, beaucoup n’au- athlète féminine. Le temps est compté et peut raient pas connu la carrière qu’elles ont eue. amener à devoir effectuer des choix que les C’est d’ailleurs mon cas... hommes ne sont, eux, pas tenus de faire. Un En temps de pandémie, les structures comme garçon peut continuer sa carrière jusqu’à 38 celles-là sont encore plus un réel avantage. Cela ou 39 ans. Une fille aussi, potentiellement. assure une certaine sécurité financière alors Sauf que l’envie d’avoir un enfant pousse à que pas mal d’équipes, elles, ne parviennent arrêter. Mais il est vrai que, de plus en plus, pas à assurer leurs obligations à 100 %. C’est certaines arrivent à mener de front ces deux une assurance qu’il faut saluer. Et remercier les « vies ». Je pense notamment à mon ex-équipière, gens qui la rendent possible. la Britannique « Lizzie » Armitstead (32 ans). Cette dernière a donné naissance à une petite Avez-vous senti des effets de la vague fille voici deux ans, avant de revenir, l’année féministe qui a suivi le mouvement #MeToo ? dernière, sur le circuit. Et de retrouver son Les agressions sexuelles existent dans le sport. niveau, puisqu’elle fait toujours partie des Comme dans tous les secteurs. Mais je ne meilleures au monde. Du coup, alors qu’elle pense pas que ce mouvement soit à la base disait qu’elle allait arrêter à l’horizon 2020 58
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pour fonder une famille, elle envisage désormais de rouler quelques saisons de plus. Il existe également désormais une clause concernant la maternité dans les contrats des équipes World Tour. Ce qui semble être tout à fait normal pour une personne travaillant pour une entreprise quelconque, mais qui ne l’est pas forcément dans le domaine du sport. Souvenez-vous des athlètes qui avaient vu, voici deux ans, certains de leurs sponsors diminuer leurs dotations parce qu’elles étaient enceintes. Et ce en raison d’une clause dans leurs contrats liée à la performance. Nike, notamment, avait été mis en cause. C’est Allyson Felix, sextuple championne olympique d’athlétisme, qui avait dénoncé ces faits… La clause dont je parle nous offre donc une certaine forme de liberté vis-à-vis de notre employeur. On ne peut pas être « lâchée » du jour au lendemain. Cela peut forcément donner des idées. On sait que, dans votre discipline, une femme comme Jeannie Longo a couru jusqu’à 45 ans. Mais vous, à 34 ans, songezvous à l’après-cyclisme ? Il faut être réaliste, je suis plus proche de la fin que du début. Mais je suis toujours au niveau. Et si rien ne change dans les deux prochaines années, je ne vois pas de raison de précipiter ma fin de carrière. Mon contrat court jusque fin 2022. On verra alors les options qui s’offrent à moi, et surtout l’envie qui m’animera (ou non). Après, je n’ai pas encore pris vraiment le temps de réfléchir à cet après- carrière. Si vous me demandez aujourd’hui vers quoi je m’orienterais, j’aurais tendance à vous répondre que l’envie m’habite de découvrir d’autres horizons. Mais rien n’est encore concret dans ma tête. Et cela ne m’inquiète pas. Je suis quelqu’un de polyvalent à qui son job a apporté certaines qualités qui peuvent servir dans bien des domaines. Notamment dans le travail en équipe. On ne peut donc pas rêver de vous voir aux JO de Paris en 2024 ? Je ne crois pas… Même si cela pourrait être une très belle fin de carrière pour moi, vu que j’habite pas mal dans le Val-d’Oise, en région parisienne. C’est un peu ma deuxième maison. Mais tout cela est encore tellement loin…
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Vinciane Istace has served in her role as diversity & inclusion leader since 2003.
Conversation Vinciane Istace
“Collective dimension to generate shared value” For PwC Luxembourg, diversity and inclusion go beyond ticking boxes. Vinciane Istace, diversity & inclusion leader since 2003, reveals the quantitative and qualitative forces behind their approach, what’s evolved over the past ten years and the vision for the next decade. Interview NATALIE A. GERHARDSTEIN
Photos MIKE ZENARI
were asked just to describe the routine of their diversity, so we all started with counting and You’ve been in your role as diversity daily life, just to be able to understand if there compliance… the regulatory framework started & inclusion leader since 2003. Can you tell us how these aspects have was something beyond the workplace that evolving and became a bit more robust, and evolved over the last ten years? was influencing this allocation of roles. There there were six categories of diversity that were Most of the diversity and inclusion actors started were questions [asked at the time] like when initially gender, sexual orientation, ethnicity, enthusiastically as ambassadors. It’s probably was the last time you drove the kid to school? disability, age and religious beliefs. It started the way the dimension was pioneered, and for Who empties the dishwasher? with a kind of transactional approach to ensure And we started getting that it was a multi- we are compliant. But this mechanical approach our own story at PwC Luxembourg it came out of a reaction more than an action. We reacted factor equation, with so many dimensions. We was by far insufficient because ultimately, what to a portrait of our company that didn’t really came to the conclusion there are many stereo- was the impact that we wanted to make? We depict it [or] what we wanted to be as a corpo- types preventing both women and men to wanted to be sure that our workplace was a rate. And at the time--more than ten years ago, evolve. So it’s no longer a women’s issue. It’s safe place for anybody to come and work while by the way!--it was mainly acknowledging the a societal issue, and if we wanted to make an feeling respected, valued, with no need to disfact that there was a kind of inherited, histori- impact, we need to really include both the men guise [oneself]. The notion of inclusion appeared cal male dominance. I don’t want to judge, but and the women in this adventure… The next then, which is not to put people in silos. It’s we simply noted--and it was a visual recogni- step was when we started questioning what about ensuring that individual differences be tion--that when you could see any given picture social norms mean. Then you have gender, sex, respected and valued. that portrayed leadership of the company, you sexual orientation, so many additional elements could observe there were more men than women. entering into the perception of the other per- Being data driven has been at the core We asked ourselves, where was it coming son. Then diversity came, and how to define of what PwC Luxembourg is doing in this realm. Can you tell us more about from? There was no bad intention, no plan to that, and how this mindset can truly be be like that… you may learn some leadership ingrained into company culture? skills, but ultimately you become a leader because you are practicing it, experiencing it. That’s a very unfair question. When I [started I don’t believe in school of leadership. I believe this] in 2003, I was in learning mode, asking VINCIANE ISTACE in genuine, professional exposure, with some the soft HR dimension. And every rule I was forms of mentoring, support, and women were contemplating led to one ‘Rome’--all roads Education HEC Management School lead to Rome--and my ‘Rome’ was culture. not perfect, and as a result they were not exposed University of Liège master’s degree I remember a quote from a book that you to very revealing professional assignments, so in commercial engineering. can’t control corporate culture--what is this they were lacking the opportunity to shine. Qualified chartered accountant (réviseur d’entreprises). And the shortcut was, if they don’t shine it’s wild animal that no one can catch?--and after because they’re not shiny in a sense. They working decades with human beings, you PWC LUXEMBOURG CAREER (SINCE 1992) were, but you need a space [and] spotlight to cannot control culture. You can only relate Partner: current roles show to the world your capabilities. to individuals whose behaviours you believe People and organisation; you may influence. If you succeed in influenHR consultancy; Payroll, What concrete steps were then involved? cing the behaviours, they may start changing immigration and employee servicing for local and The first step was about understanding it… thinking, expand their vision, and they may international clients; and we started digging, and it was probably the shift a few degrees. That’s very difficult. But Diversity and inclusion leader. first kind of sociological analysis of our popif they shift a few degrees, and if you can Partner: prior roles replicate it across a reasonable number of ulation. We started collecting figures that were Head of communication people, then culture starts taking the direcnot assembled with this purpose before. Then and PR; and HR operations for Luxembourg. tion you wish it to have. we started conducting interviews. 300 people SUMMER 2021
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other hand, when it comes to work-life balance, it depends… it may be either positive, neutral or a negative experience. I know so many working mothers who are so tired of facing children and job in the same hours of the working days. Yes, covid has put an enormous social silence on us all, our personal and professional life. But when everything becomes silent, you don’t have these fancy events anymore to check the box, [say] I’ve done something for diversity and inclusion. And then you see the cracks. Because once the world has become silent, once a number of events has really decreased, you can listen to what is truly happening or not in your organisation. What I’ve found interesting--and you can extrapolate it--is that the sudden silence is enabling the world to see the situation for what it is…. This is the revealing and hurting effect of this crisis, and to a certain extent, we need to reconnect to this serious awareness to engage more genuinely and to have the C-suite jump to the next stage… Diversity and inclusion aren’t just the right thing to do. We need it, [e.g.] for artificial intelligence.
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Luxembourg Fund Governance Survey 2020, PwC Luxembourg & Institut Luxembourgeois des Administrateurs ; European Institute for Gender Equality (eige.europa.eu)
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thing becomes silent… then you see the cracks.”
Are you optimistic about the next decade with regards to diversity and inclusion? I don’t see any other position than being optimistic in general. Especially now, whatever news we are bombarded with. I believe that we are wonderful beings and we’re capable of doing great, great things--[even if] we haven’t You talked a bit about the health crisis, done [something] yet, we should not have a which has impacted work-life balance. single doubt about our ability to do so. And Have you seen ‘pressure’ linked to that it’s never too late. That’s the source of my optiand our new ways of working? mism and determination and courage. It’s a very multidimensional shift. There are The next debate coming ahead is equity. very positive phenomena and negative ones. That’s a subtle nuance. In large organisations, One interesting trend--[and] this is my per- equality often results in unfairness, a negaception… [is that] the crisis situation generated tive perception of unfair treatment… A simple multiple effects on men and women, some of example is about premium… let’s say we bounce them are very positive. We observed that women back, and as a leader I distribute the same have a greater voice digitally speaking than premium to everyone, I should be aligned compared with events… when you needed to with fairness. And I’m not at all… Similar is stand on the stage, we had more male speakers. not always the golden rule for diversity, but Digitally, it’s easier to have a more diverse equity is key… one size does not fit all, and panel because you can connect to many people that’s the challenge of the employer, to cusmuch more easily. So that’s positive. On the tomise the HR proposition…
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The first thing is to stop advocating… It’s a what’s happening… when you look through dynamic phenomenon. The more you advocate, other criteria, such as the seniority in the role, the more you create rigidity [and] reinforce the leadership position, objective elements, these invisible walls, making us belong to a cer- you see that there are still some gaps there… tain category [and] we prevent ourselves from in the talent pipelines, the way you navigate connecting to the larger human potential. across the pyramid, your professional journey [But] we cannot turn into passive actors… across the levels of the pyramid, you are slowed Because of the data [and] technology around down by very subtle remaining bias which you [it], you can gather those data and make them can’t see up front, but you can see the results… talk for you. The first step is to look at the situa- We have progressed, but many companies are tion in an objective manner, that’s where all encountering this plateau phenomenon, and journeys start, and when you see your point of that’s why we need to remain determined… origin you can ask: does it suit me as a leader? We have 27%-28% female [representation] at Sometimes you will see things that you the partnership level, and we can’t jump above hadn’t imagined were existing in your own 30%?... it’s coming from this speed of evoluorganisation… that’s this data-driven approach, tion across the pyramid… but it’s not always you can [even] do it with Excel. You saw and on the employer’s shoulder. When family roles then you will see things appearing… We have are not allocated, you will slow down a woman, reached a certain level of maturity, [but it] or, let’s remain positive, you will accelerate a doesn’t mean that we are a champion in eve- man… the pandemic to a certain extent has rything and we don’t have huge progress to been for some useful. The family dynamic has make. Our journey is not linear, sometimes been revisited for some… there’s not enough we [make] a big jump, and sometimes we lose energy and time spent really digging into what’s happening at the level of the organia bit of traction, we need to rebound… For us, we’ve made analysis about intro- sation… There are so many elements… but ducing gender in the way we recruit, promote, it’s only effective if it’s articulated. train and remunerate, so at each key intersection in the HR cycle, we are checking You talked about the pyramid structure. The PwC Luxembourg Fund Governance Survey 2020 revealed that women in the grand duchy were underrepresented on boards, making up barely one-fifth of board members, despite a clear interest in BOARD DIVERSITY? making boards more diverse. Why the gap? According to the Luxembourg Fund [It’s] how human beings are wired deeply into Governance Survey 2020*, there is a general upward trend in female board their structures. The gap is there because members amongst the insights gathered there isn’t enough pressure on the system-from boards of 122 investment fund it’s as simple as that. The phenomena we are & management companies covering liquid & alternative products. observing for the moment across the planet [include] how children are treated when they’re However, “the underrepresentation of women on boards remains an issue put to work at a very young age, how women in Luxembourg, with women making up are treated in the Hollywood industry and barely one-fifth of board members”. art scene in general, [etc.]... There are so many Compared to the bar set for the underthings that we know that aren’t right, and we represented sex on Luxembourg public don’t make a proactive change. In gender and institution boards at 40%, there’s still some work to be done. diversity, you have to shift opportunity to distribute them differently…
Vinciane Istace
If you could name the priorities that need to be tackled now in order to be in a better place in ten years, what would they be? Women need to step into roles of leadership, men in roles of caring. We need women to embrace more STEM opportunities, etc. Shifting the roles in all senses. As long as you’ve not done it, words are powerful, but they need to be aligned with your experience. Second, and this is for me an enormous challenge, relearning the collective dimension. This is essential for the entire civilisation… We are to a certain extent trapped in an ocean of individuality. Diversity and inclusion are not about affirming or positioning your individual rights [but rather] your ability to welcome the
difference of the other person into your own world and believe it will enrich you, empower you… And this collective dimension, I don’t see it anymore. That’s why we cannot produce shared value that easily. Shifting roles and relearning the collective dimension will enable us to generate what is no longer value, but shared value. I am accountable to create value for myself, but this value created should never be to the detriment of anybody else around me... That’s what diversity can bring to the world.
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PwC Luxembourg was the first company to sign onto Equilibre’s My Pledge, in addition to other commitments, but Istace says diversity and inclusion go deeper than just checking a few boxes.
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Jean-Pierre Zigrand a rejoint la London School of Economics à Londres après ses études et en est devenu l’expert en risques systémiques.
Conversation Jean-Pierre Zigrand
« Je n’entrevois pas d’explosion de la bulle » Directeur du centre de recherche sur les risques systémiques à la London School of Economics, le Luxembourgeois Jean-Pierre Zigrand s’est penché pour Paperjam sur les risques de bulle dans le secteur immobilier grand-ducal. Il se veut rassurant, mais conseille la prudence. Interview JEAN-MICHEL LALIEU
Photo JÉRÉMIE SOUTEYRAT
C’est culturel ? Les prix de l’immobilier ont continué C’est difficile à dire. C’est sans doute en partie à fortement grimper au Luxembourg culturel. Au Luxembourg, tout le monde a toumalgré le confinement du printemps. jours possédé sa maison. Mais il faut aussi tenir Comment expliquer cette envolée des prix depuis plusieurs années ? compte d’un effet de renforcement. En obserLes prix de l’immobilier sont en hausse un vant que les prix des maisons grimpent sans peu partout dans le monde, ce n’est pas un discontinuer, les gens sont tentés d’investir. En problème uniquement lié au Luxembourg. Ils Allemagne, par exemple, les prix de l’immobidépendent toujours de la combinaison de lier n’évoluent pas beaucoup, ce qui fait que les différents facteurs. D’un côté, on a la valeur gens ne sont pas tentés d’investir dans la brique. des loyers capitalisés dans la valeur du bien Pour les Allemands, une maison est le lieu que immobilier, qui est déterminée par la santé l’on habite, pas un bien d’investissement. Mais de l’économie réelle. De l’autre, on doit regar- au Luxembourg, parce qu’on a beaucoup investi der le niveau des taux d’intérêt. Le fait que et que l’économie tourne bien, les prix ont beaules taux d’intérêt soient bas actuellement coup grimpé, ce qui renforce à nouveau le désir pousse les gens à investir dans l’immobilier d’y investir. Aujourd’hui, lorsqu’ils regardent parce que les livrets d’épargne ne rapportent 40 ou 50 ans en arrière, les gens se disent qu’ils plus grand-chose et que les bourses sont trop ont bien fait d’investir dans l’immobilier. Ils volatiles. Ils préfèrent donc acheter un bien auraient pu gagner plus en bourse, mais c’est immobilier dont ils peuvent anticiper le loyer. plus risqué et les statistiques d’investissements Au Luxembourg, je pense que c’est vraiment révèlent que les Luxembourgeois ne sont pas ce phénomène de taux d’intérêt qui joue aujourd’hui. Il faut admettre que la situation du pays est étrange. L’économie tourne bien et l’immigration est forte. Les loyers devraient logiquement augmenter. Or, ils ne progressent BIO EXPRESS pas tant que ça. C’est donc moins le besoin Parcours académique de se loger que le souci d’investir qui influe Études universitaires en économie à l’Université de Louvain-la-Neuve sur les prix de l’immobilier. Un réflexe propre aux Luxembourgeois ? Le cas du Luxembourg est assez exceptionnel. Je ne connais pas de comportements similaires dans d’autres pays. Les résidents investissent leurs avoirs quasi exclusivement dans l’immobilier. Pas moins de 84 % du patrimoine des Luxembourgeois est investi dans la brique d’après les dernières études publiques. Bien que les systèmes de pension jouent un rôle, c’est quand même inouï. En France, la moyenne est plutôt de 50 %, et en Grande-Bretagne, elle est de 36 %.
(Belgique) et doctorat à l’Université de Chicago. Après ses études, il entre à la London School of Economics en tant que lecturer dans le département Finances.
Carrière Il y dirige aujourd’hui deux centres de recherche : le Systemic Risk Centre, créé il y a 6 ans, et le Financial Markets Group, le plus ancien centre spécialisé en finances de la LSE. Place financière Ce Luxembourgeois de 51 ans est aussi membre du conseil d’administration de la Spuerkeess.
naturellement enclins au risque. On ne peut donc que leur donner raison. Et il y a de fortes chances pour que les prix continuent d’augmenter par cet effet de renforcement. On considère généralement qu’après huit trimestres d’accroissement continu des maisons, la probabilité que la hausse se poursuive encore un trimestre de plus est de 90 %. Mais est-il logique de voir les prix des maisons et appartements augmenter à un rythme de 10 % par an comme on l’observe ces dernières années ? C’est logique dans la mesure où un nombre important d’investisseurs sont intéressés par l’immobilier. Mais je ne suis pas certain que cela soit sain. Le problème au Luxembourg, c’est que l’on dispose de très peu de données. Cela complique donc mon analyse en tant qu’académique. On ne sait pas exactement qui achète ces biens : les Luxembourgeois fortunés ou des investisseurs étrangers ? Dans la mesure où les loyers augmentent peu, on doit probablement écarter l’idée que c’est le manque de biens pour se loger qui fait grimper les prix. Il s’agit donc en partie probablement d’investisseurs luxembourgeois, mais des investisseurs étrangers qui voient les prix monter au Luxembourg de 10 % par an vont vouloir entrer dans le jeu, c’est naturel. C’est ce phénomène qui contribue aussi à des augmentations supplémentaires de 10 % l’année suivante. Vous pointez un problème de données. Le politique doit donc développer de nouveaux outils de collecte des données afin de mieux maîtriser la situation ? Absolument. Je n’envie pas les politiciens et les régulateurs. Ils n’ont pas accès actuellement à toutes les données nécessaires. J’ignore les raisons de cette situation, mais en règle générale les petits pays manquent de données. Il s’agit SUMMER 2021
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Conversation Jean-Pierre Zigrand
Justement, comment expliquez-vous ce phénomène des bulles ? Une bulle immobilière peut se développer lorsque les gens achètent une maison ou un appartement dans l’espoir de le / la revendre à un prix plus élevé et pas parce qu’ils espèrent des loyers suffisamment élevés pour rembourser le prix qu’ils ont payé. Dès qu’on n’achète pas un bien en vue de l’obtention d’un loyer, mais avec l’ambition de le revendre à un autre acheteur encore plus optimiste deux ou trois souvent d’une question de coûts fixes trop années plus tard, on contribue à la création importants par rapport à la taille de la popula- d’une bulle. Mais il est toujours très complition, même si, aujourd’hui, ce n’est plus une qué de reconnaître la formation d’une bulle. excuse valable. Ceci dit, l’information s’est amé- Même les milieux académiques ne sont pas liorée depuis 10 ou 20 ans. Jusqu’à une certaine d’accord sur les situations de bulle. On discute époque, le côté secret des données a joué un toujours la question de savoir si la crise de rôle. En Grande-Bretagne, c’est totalement dif- 2000 était liée à une bulle des actifs financiers férent. Tout est public. À partir d’une adresse, ou pas. Pouvoir dire qu’une classe d’actifs est on peut tracer l’évolution des prix pour une surévaluée est toujours très compliqué. même maison ou un même appartement, sans que le nom des acheteurs apparaisse. Mais le Mais ce pourrait être le cas au Luxembourg ? recensement des prix évolue aussi au Luxem- On ne le sait pas exactement. La Banque centrale parle d’une surchauffe de 6 %. Moi, je bourg, c’est important. regarde plutôt les loyers, qui sont purement C’est important de pouvoir retracer l’évolu- le signal de l’offre et de la demande d’habitation de l’immobilier sur le long terme ? tions. Or, ils n’augmentent pas, malgré le manque Oui, certainement. Prenez le cas d’Amsterdam. de biens que tout le monde constate. On peut Les informations concernant les prix de vente donc en déduire qu’un très grand nombre de des maisons remontent à l’an 1650. On peut donc retracer l’évolution des prix au cours des 350 dernières années. Ainsi, on voit par exemple que les prix réels en l’an 1650 sont les mêmes qu’en 2000. Ils ont augmenté à certaines époques, mais ils se sont par contre effondrés entre 1820 L’EXPLOSION DU PRIX DES MAISONS Prix moyen pour une maison en euros et 1860. Cet exemple permet de voir que toutes les évolutions sont possibles dans l’immobilier. 800.000 € Au Luxembourg, le passé de l’immobilier ne remonte pas à plus de 45 ans. Les personnes en charge du risque systémique du pays, par 600.000 € manque de données, ne peuvent pas retourner plus loin que les années 1970. Le passé récent n’ayant recensé aucun épisode difficile pour 400.000 € l’immobilier, il est difficile de proprement calibrer les modèles pour savoir l’étendue réelle de la surchauffe actuelle ou du risque de mener 182.000 200.000 € 154.000 à une explosion.
personnes qui acquièrent un bien le font avant tout pour investir. Si les prix augmentent, c’est sans doute moins à cause d’un besoin d’habitations que d’un souci d’investissement, donc de spéculation. Le fait que les loyers soient déconnectés des prix résonne comme une alarme. Mais ce n’est pas non plus un mouvement forcément irrationnel. Les taux d’intérêt sont très bas et l’argent placé en banque ne rapporte quasiment plus rien. Si on admet l’idée que les prix immobiliers au Luxembourg sont dans une bulle, qu’est-ce qui pourrait provoquer l’explosion de cette bulle ? Je n’entrevois pas d’explosion de la bulle. On connaîtra peut-être un mouvement d’arrêt à un moment donné et les prix commenceront à régresser. Mais je ne vois pas cette situation se produire à court terme. Les bulles ne doivent pas nécessairement éclater du jour au lendemain. Cela peut se produire dans 20 ans. Une bulle n’explose qu’à partir du moment où les gens qui ont acheté des biens avec l’espoir de les revendre plus cher observent que la situation n’est plus favorable et que leurs plans de sortie du marché sont à risque. À partir de ce moment, ils se mettent à céder des biens. Si les taux d’intérêt se remettent à grimper de 1 % ou 2 %, cela va produire des dégâts. En fait, plus les taux d’intérêt sont bas – or ils sont très bas actuellement –, plus la sensibilité des prix à une remontée de ces taux est élevée. Vous ne voulez cependant pas vous montrer trop inquiet ? Le marché de l’immobilier ne fonctionne pas comme celui des obligations et actions. Pour celles-ci, une augmentation des taux d’intérêt entraînerait directement une forte diminution des prix. Dans la mesure où ces actifs sont cotés en bourse, le changement de politique
742.000 619.000 Observatoire de l'Habitat/BRI/Statec
la Revue de stabilité financière de la Banque centrale du Luxembourg, des chercheurs ont conclu, à partir de quatre modèles différents, à une surévaluation des prix d’environ 6 % en 2020 par rapport à la moyenne récente. De là à dire que l’explosion d’une bulle est probable... Il n’y a pas de raison d’envisager de catastrophe au Luxembourg, mais le pays se trouve dans une situation de prix un peu trop élevés parce que les gens achètent en espérant voir les biens s’apprécier, ce qui est toujours dangereux. C’est ce phénomène qui entraîne des bulles.
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Ce risque d’explosion, il est réel ? Il existe bel et bien une surchauffe sur le marché immobilier luxembourgeois. Si vous lisez 66
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0 € 1986
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Source
« Lorsqu’une bulle immobilière explose, la diminution des prix s’opère lentement. »
Conversation Jean-Pierre Zigrand
monétaire se reflète instantanément sur les cours. Ce n’est pas le cas pour les maisons. Il s’agit de biens qui se vendent lentement. Par expérience, on sait que lorsqu’une bulle immobilière explose, la diminution des prix s’opère lentement. La grande exception est cependant la crise de 2007-2008 liée aux subprimes avec des prix qui ont dégringolé de plus de 40 % dans certains pays. Mais, dans l’ensemble, le côté intéressant des biens immobiliers est qu’il s’agit d’une classe d’actifs qui ne réagit pas rapidement. L’augmentation des taux d’intérêt provoquera une baisse des prix, mais celle-ci se fera lentement. Je ne pense pas que beaucoup de gens au Luxembourg seront contraints de vendre leurs biens rapidement. Mais il y aura sûrement des regrets. On ne risquerait donc pas de scénario catastrophe ? Certainement pas. Au Luxembourg, les personnes qui achètent des biens ne sont en règle générale pas des gens très endettés en termes de loan to value (ratio d’emprunt sur la valeur des biens, ndlr) ou en termes de revenus après service de la dette, qui ne pourraient plus payer les intérêts si ceux-ci venaient à augmenter un peu. D’autant que beaucoup de prêts immobiliers sont à taux d’intérêt fixes.
est nettement plus élevé que dans les autres pays, ce qui pose des risques potentiels. Des instances internationales, comme l’OCDE par exemple, s’inquiètent justement du poids de l’emprunt par rapport aux revenus des ménages... Oui, c’est vrai. Mais d’un autre côté, les banques sont protégées grâce aux montants des emprunts qui sont bas par rapport à la valeur des biens. Je ne dis pas que les risques n’existent pas, mais des mesures ont été prises pour minimiser les problèmes éventuels pour les institutions bancaires. Il se peut évidemment que des banques aient fait des emprunts dangereux, mais je n’en ai pas connaissance. Si on regarde les statistiques de la Banque centrale, en moyenne le ratio emprunt / valeur du bien est confortable. Mais cela peut évidemment cacher une distribution assez disparate. Il est possible que des banques aient accordé des prêts à 100 % de la valeur du bien. Mon boulot consiste à réfléchir sur des scénarios qui puissent générer des risques systémiques, et il y en a, mais ce n’est pas mon scénario principal.
Comment analysez-vous le comportement des banques face à l’emballement du secteur immobilier ? En général, les banques se sont montrées raisonnablement prudentes face au risque. Les ratios d’emprunt sur la valeur des biens au Luxembourg sont à un bon niveau. Ce n’est pas le cas dans de nombreux pays. Les gens disposent déjà d’une certaine mise de départ et peuvent généralement se contenter d’emprunter 70 % de la valeur totale. Il s’agit donc d’un important coussin de protection pour les banques. Par contre, le ratio d’emprunt par rapport au revenu
Les banques luxembourgeoises n’accordent pas des prêts trop facilement ? Ce n’est pas dans la tradition, mais il faut se méfier de la compétition dans un environnement de taux bas, toujours nuisible à la rentabilité des banques. Pour ne pas perdre un gros client, il est possible qu’une banque en vienne à accorder un prêt plus élevé que ce qu’elle aurait fait dans le passé. Si vous regardez les conséquences de la crise financière de 2007-2008, la valeur des biens immobiliers a chuté au Luxembourg, mais d’à peine quelques pourcents. Certaines banques ont connu des problèmes, mais ils n’étaient pas liés à des prêts immobiliers accordés au Luxembourg. Cette crise a eu valeur de test et on a observé que les actifs immobiliers luxembourgeois des banques ont bien résisté.
« Il existe bel et bien une surchauffe sur le marché immobilier au Luxembourg. »
Même si la situation reste sous contrôle actuellement, le politique doit-il prendre des mesures pour éviter tout risque lié à une éventuelle bulle ? Oui, tout à fait. Il a d’ailleurs déjà légiféré récemment sur la possibilité d’imposer des mesures macroprudentielles. Si elle le voulait, à travers les recommandations du Comité du risque systémique, la CSSF pourrait désormais imposer des limites aux ratios d’emprunts par rapport aux revenus ou à la valeur des biens. Le pays dispose donc désormais d’outils qui sont déjà utilisés dans la plupart des autres pays. Mais l’intérêt est aussi de ne pas bouleverser l’équilibre trop rapidement. Dans la mesure où les Luxembourgeois ont placé tous leurs œufs dans le même panier, un durcissement des mesures d’emprunt ferait diminuer les prix, et les propriétaires luxembourgeois, qui sont aussi les électeurs, en seraient frustrés. Dans la mesure
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où l’immobilier représente une grande partie du patrimoine au Luxembourg, agir sévèrement serait contre-productif. Les régulateurs font donc face à une situation délicate. Ils doivent pouvoir agir pour éviter une envolée des prix, suivie par des pertes difficilement surmontables et des répercussions négatives dans les agrégats macroéconomiques, mais pas trop sévèrement pour ne pas entraîner des conséquences importantes et évitables sur l’économie du pays. Mais disposer d’outils est quand même nécessaire ? Oui. Il faut pouvoir faire en sorte que la bulle n’explose pas. Si de plus en plus d’investisseurs achètent des biens pour les revendre rapidement, elle va exploser. La bulle a ses limites, surtout dans un pays comme le Luxembourg, qui ne compte que 600.000 résidents. Les responsables politiques doivent donc jouer subtilement en prenant des mesures pour décourager des investissements spéculatifs sans pour autant risquer de détruire le patrimoine national. Ceci inclut aussi des mesures d’imposition, comme renoncer à des impositions régressives tel le subside des dettes par la déductibilité fiscale des intérêts, ou introduire des taxes foncières qui ne créent pas de distorsions. Ces recettes aident à diminuer l’accumulation de positions à haut risque systémique et, en même temps, elles peuvent être utilisées pour réduire les impôts sur le revenu des plus bas salaires. Les acheteurs potentiels doivent-ils commencer à hésiter face aux prix qui leur sont proposés ? Les rendements locatifs sont très bas. Ils sont d’environ 3 %, ce qui veut dire que les prix sont très élevés. Mais les gens anticipent que les taux d’intérêt restent très bas. Donc 3 %, c’est mieux que ce qu’une banque peut offrir. Investir n’est donc pas irrationnel si on anticipe des taux bas pour longtemps et une économie performante qui génère des loyers suffisants, mais il est quand même raisonnable de songer à diversifier ses investissements. Le temps a donné raison aux Luxembourgeois qui ont investi dans la brique, mais désormais, miser tout sur l’immobilier et sur le crédit me semble assez risqué. Or, on le voit dans les statistiques, les Luxembourgeois investissent très peu dans les actions et obligations. Une situation étonnante pour un pays comme le Luxembourg... Oui, c’est étrange. Alors que le pays est un des tout grands centres mondiaux pour les fonds d’investissement, ses citoyens se refusent à envisager autre chose que l’immobilier pour leurs placements.
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Conversation Béatrice Belorgey
« Il est temps de passer à un développement plus durable » Interview MARC FASSONE
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Béatrice Belorgey a pris les rênes de BGL BNP Paribas en juillet 2020. Arrivée en pleine période de pandémie, elle a dû accompagner le basculement des activités de la banque en mode Covid. Un véritable défi, qui n’a pas empêché la BGL de produire un résultat net de 398,3 millions d’euros, en progression de 15 %. Si la banque a su prouver sa résilience, Béatrice Belorgey insiste sur la croissance et sur la nécessité de se digitaliser. SUMMER 2021
Photo ANDRÉS LEJONA
Béatrice Belorgey espère que la crise du Covid enclenchera la prise de conscience qu’il est temps désormais de passer à un développement plus durable.
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Conversation
BIO EXPRESS Naissance De nationalité française, Béatrice Belorgey est née le 23 mars 1962.
DIX DATES-CLÉS
De manière un peu rapide, même… Du coup, j’étais très heureuse de pouvoir revenir pour ce deuxième séjour, notamment parce que le premier avait été un peu écourté.
La banque comme choix de carrière Son diplôme en poche, elle choisit de faire carrière dans la banque. Elle entre chez BNP Paribas en 1986 comme analyste crédit. En 2000, elle fait un premier passage au Luxembourg comme membre du comité exécutif de la banque privée de BNP Paribas Luxembourg. Elle repart à Paris en 2005 et prend, en 2013, la responsabilité de la banque privée en France. Le retour au Luxembourg En juillet 2020, elle prend les rênes de BGL BNP Paribas et est nommée présidente du comité exécutif de BGL BNP Paribas, membre du conseil d’administration de la banque et responsable pays du groupe BNP Paribas au Luxembourg.
Ce deuxième passage au Luxembourg était-il un choix personnel ou un aléa de carrière ? Lors de mon premier passage, j’avoue avoir suivi mon mari. Ce n’était pas un choix personnel. Ce premier séjour nous a laissé de très bons souvenirs. Toute la famille a été heureuse ici, séduite à la fois par les activités professionnelles, artistiques et sportives. Nous avons été surpris par la très grande dynamique de la vie culturelle. Je crois que l’on n’est jamais allé autant à l’opéra et à des concerts de toute notre vie que lors de notre premier séjour ici. Je n’ai, à l’époque, pas eu d’autre choix que de repartir, parce que la banque me l’a demandé.
Quand on fait Sciences Po Paris, on se destine généralement à une carrière publique ou politique. Pourquoi avoir choisi la banque ? En France, pour faire une carrière publique, il faut passer par les concours administratifs, qui sont, quels qu’ils soient, très difficiles. Les réussir est une question de volonté. Mais il faut que l’on se projette complètement là- dedans, ce qui n’était pas mon cas. Je faisais à l’époque beaucoup de choses à côté de mes études : du bateau, du ski… et passer un à deux ans à m’enfermer pour préparer des concours administratifs n’était pas tellement dans mes projets. Par ailleurs, je me mariais, et donc je voulais commencer à travailler. Et comme je voulais faire une carrière diversifiée, assez naturellement, mon choix s’est porté sur la banque. Un choix que je n’ai jamais regretté. Pas plus que la décision d’entrer à Sciences Po. Outre la satisfaction d’y être entrée – car ce n’était pas évident –, cela a été très formateur. J’ai beaucoup capitalisé sur cette formation très généraliste. Quelle est votre journée de travail type ? J’arrive à la banque à peu près à 7 h 45, après un copieux petit-déjeuner, afin d’être opérationnelle dès 8 h pour les premiers rendez-vous et les premières réunions de la journée. E nsuite, il y a de nombreuses rencontres avec mes collaborateurs rapprochés, beaucoup de réunions et de comités sur les projets de transformation, et plus globalement sur tout ce qui touche à la gestion d’une banque au quotidien. Je consacre également beaucoup de temps aux questions relatives aux ressources humaines. L’administration d’une entreprise, c’est aussi la gestion des
01.01.1934
01.10.1968 13.12.1962
28.09.1919 Création de la BGL La création de la BGL résulte d’initiatives croisées. Alors que la Société Générale de Belgique sondait le terrain au Grand-Duché, l’avocat Alphonse Weicker la contacte pour l’attirer au Luxembourg. C’est ainsi que naît la BGL, société de droit belge, filiale de la SGB. Le siège est établi à Arlon, assorti d’un siège admi nistratif prévu à Luxembourg.
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23.04.1959 Société de droit luxembourgeois
Fernand Puissant Baeyens président
Suite à une loi belge de 1933 qui impose la séparation des banques d’affaires et de dépôt, la SGB fusionne toutes ses banques de dépôt, dont la BGL, dans la Banque de la Société Générale de Belgique. Après la dissociation du franc belge du franc luxembourgeois, la BGL devient une société de droit luxembourgeois.
En 1959, la BGL fête son 40e anniversaire, et deux événe ments marquent l’année : une augmentation du capital, qui passe de 20 à 40 millions de francs ; et le remplacement, à la présidence de la BGL, de Willy de Munck par Fernand Puissant Baeyens, vice-président de la Banque de la Société Générale de Belgique.
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Alphonse Weicker président
L’ère des innovations
Tout au long de l’année 1962, des négociations sont menées avec la Banque de la Société Générale de Belgique en vue de faire passer la majorité des titres de la BGL en des mains luxem bourgeoises. Ce sera acté lors d’une assemblée générale extraordinaire tenue en 1962. À cette même date, Alphonse Weicker est nommé président du conseil d’administration.
Une série de modernisations technologiques sont mises en œuvre à partir de la fin des années 1960. Le 1er octobre 1968, le premier distributeur automa tique de billets (Paymatic, créé par la Générale de Banque) entre en service à l’agence Gare de la BGL. La banque mettra les innovations techno logiques au centre de son modèle opérationnel.
BGL BNP Paribas
Formation Elle suit les cours de l’Institut d’études politiques (IEP) de Paris, dont elle sort diplômée en 1983. En 1999, elle complète sa formation avec un diplôme d’analyste financière (Cefa).
Photos
Vous avez été nommée à la présidence du comité exécutif de BGL BNP Paribas et responsable pays du groupe au Luxembourg en juillet dernier. Pouvez-vous nous parler un peu de vous et de votre parcours ? Mon diplôme de l’Institut d’études politiques de Paris en poche, j’ai tout de suite rejoint BNP Paribas, entreprise dans laquelle j’ai fait, jusqu’à aujourd’hui, tout mon parcours. Un parcours très diversifié. D’abord analyste crédit, j’ai ensuite passé 10 années dans la partie Corporate and Investment Banking, en commençant par le trading sur les taux pour finir responsable de l’équipe de trading obligataire, avant de passer sur la partie actions. C’est à ce moment-là que j’ai suivi le cursus pour devenir analyste financier, parce que, pour les dirigeants d’entreprise, il était très important d’avoir des interlocuteurs qui comprennent leur business et qui soient capables de bien apprécier la valorisation de leur entreprise. Puis, je suis arrivée au Luxembourg en 2000, pour mon premier séjour dans la banque privée comme membre du comité exécutif de la banque privée de BNP Paribas Luxembourg. J’ai ensuite rejoint l’équipe Relations investisseurs, où, durant toute la crise financière, j’étais à l’écoute des investisseurs et des analystes. C’est à ce moment-là qu’a eu lieu la fusion entre la BGL et le groupe. Cela a été une période passionnante et formatrice. Puis, je suis retournée dans la banque privée en France, où j’ai passé huit ans à la tête de la plus grosse banque privée du groupe, que j’ai quittée avec un peu plus de 100 milliards d’euros d’actifs sous gestion. Et en juillet dernier, j’ai pris la direction de BGL BNP Paribas, ce qui me permet de capitaliser sur cette diversité d’expériences que j’ai eues et d’avoir la gestion complète d’un établissement financier sur l’un des quatre marchés domestiques du groupe, qui opère en outre dans une économie dynamique.
Béatrice Belorgey
« Je suis convaincue que plus les collaborateurs se sentent à l’aise, plus ils sont efficaces et productifs. » équipes, des hommes et des femmes. Il faut passer du temps là-dessus. À 18 h, on arrête les rendez-vous. Du moins, on essaie… Après, je m’occupe des e-mails restants dans ma boîte, des derniers coups de fil à passer, et je quitte mon bureau aux alentours de 20 h. Comment définiriez-vous votre style de management ? Je suis très à l’écoute. Ce qui me permet de bien connaître les personnes. Je laisse beaucoup les gens s’exprimer, pour que se d essine un consensus. Et s’il tarde à arriver, on va dire que j’aide un peu à la solution. Et puis, je pense que je suis assez bienveillante. Je suis convaincue que plus les collaborateurs se sentent à l’aise, plus ils sont efficaces et productifs. Sous la pression, il n’y a rien de constructif qui sorte, ce n’est pas efficace. Cela étant, être à l’écoute et bienveillante n’empêche pas une certaine exigence. Tout le monde doit s’y mettre, et il faut que les choses soient faites de manière efficace. Si ce n’est pas le cas, tout le monde devra travailler plus. Quelles sont, ou ont été, vos principales sources d’inspiration ? J’ai été pas mal inspirée par certains de mes enseignants à Sciences Po. J’ai eu la chance d’avoir des enseignants de très haut niveau,
Rétrospectivement, je crois que la première fois où j’ai ressenti que j’avais une influence significative, c’était lorsque je m’occupais des relations investisseurs du groupe en pleine crise financière. J’écoutais du matin au soir les analystes et les actionnaires / investisseurs pour bien comprendre leurs questions, leurs interrogations, leurs doutes, que je devais relayer à la direction générale. Par ailleurs, dans mon rôle de responsable de la banque privée en France, gérant 100 milliards d’euros d’actifs, j’ai considéré qu’il était souvent exigeants – très exigeants –, mais important, et de ma responsabilité, de permettre bienveillants. Ce qui n’est pas toujours le cas. à nos clients, qui, en investissant, avaient J’ai aussi beaucoup appris auprès de certains un formidable pouvoir, de rencontrer des managers avec lesquels j’ai travaillé. Tout ce gens qui pouvaient leur donner des idées que je trouvais bien d’eux, je le prenais. d’investissements à impact positif. Dans cette Pour ce qui est des livres, j’ai des goûts très optique, j’ai noué un partenariat avec Habitat variés, mais j’aime bien quand il y a des réfé- et H umanisme, une association qui lutte contre rences historiques. Quant à la musique, j’aime le mal-logement et pour l’insertion des perbeaucoup l’opéra, avec une préférence très sonnes en difficulté, pour permettre à nos claire pour Verdi. clients de participer à des projets comme des logements sociaux ou des établissements Qu’est-ce qui vous préoccupe dans d’hébergement pour personnes âgées dépenle monde, aujourd’hui, et vous pousse dantes (Ehpad). J’ai également conclu un parà vous engager ? tenariat très important avec France Angels – la C’est d’abord clairement l’urgence climatique fédération nationale française des business et tout ce qui tourne autour du développement angels – afin de permettre à nos clients d’investir durable et de la préservation de la biodiversité. dans des start-up. Le sort des personnes âgées me préoccupe Évidemment, la banque n’interagissait pas également. Elles ont un poids de plus en plus dans ce processus. La volonté était de perimportant dans nos sociétés occidentales et mettre à nos clients, qui veulent de plus en sont, dans le même temps, mises de côté. Je ne plus donner du sens à leurs investissements pense pas que l’on pourra continuer long- et à l’épargne, de se rapprocher de projets temps comme ça. La condition des jeunes répondant à cette attente. entrepreneurs m’interpelle également, plus que jamais, même, avec la crise sanitaire que Influence, toujours… Que pensez-vous de la place des femmes dans la banque ? l’on traverse. Je pense que la place des femmes dans la Vous sentez-vous, à votre poste actuel, banque est la même que celle des hommes. Il ou dans vos postes passés, n’y a pas une place spécifique. Ce qui est imcomme une femme d’influence ? portant, c’est d’avoir des équipes diversifiées, On influence à la fois beaucoup et pas assez. de manière à avoir la plus grande richesse Et sûrement pas autant qu’on le souhaiterait… possible de points de vue, de suggestions.
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01.01.1970
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Georges Schwall président
Georges Arendt président
Marcel Mart président
Le sauvetage de FBL
Georges Schwall remplace Alphonse Weicker. Le début des années 1970 est marqué par les questions sociales et des problèmes liés aux ressour ces humaines (conventions collectives, manque de maind’œuvre qualifiée…). La marche des affaires est caractérisée par une internationalisation des activités et par le renforcement du réseau d’agences.
Georges Arendt devient président du conseil d’admi nistration suite à la démission de Georges Schwall. À la tête du comité de direction depuis 1984, il est remplacé à ce poste par Alain Georges.
Marcel Mart, ancien ministre, est nommé président du conseil d’administration. Entre la fin des années 1980 et le début des années 1990, quelques décisions impor tantes sont prises. C’est ainsi que, le 13 avril 1989, la décision de construire un centre ban caire au Kirchberg est prise – centre dont la première pierre sera posée le 24 mars 1993.
À cause de la crise des sub primes, la tentative de rachat d’ABN Amro par Fortis précipite la chute de la banque belge, qui avait repris la BGL en 2005. Fortis Banque Luxembourg (FBL) — nom qu’a pris la BGL en 2005 — redevient la BGL, avec, à son actionnariat, l’État luxembourgeois, qui détient 49,9 % des actions, et le groupe BNP Paribas.
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Les nouveaux bâtiments du Kirchberg Les deux tours, dont la construction fut lancée en 2013, sont pleinement fonctionnelles. La banque y réunit tout son personnel, sauf les agences, au début de l’année.
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Conversation Béatrice Belorgey
BGL BNP PARIBAS DEVELOPMENT Une initiative qui tient à cœur à Béatrice Belorgey.
Tout simplement. On va quand même dire qu’il y a encore un peu de travail pour y arriver. Tous les membres du comité exécutif du groupe ont signé une charte qui s’appelle « Jamais sans elles ». Tous ses signataires s’engagent à ne jamais participer à une réunion ou une table ronde où il n’y a pas de femmes. Ce n’est pas très compliqué, et cela peut contribuer à faire évoluer les esprits. Quelles sont vos missions et vos ambitions pour BGL BNP Paribas ? Elles sont grandes ! À court terme, c’est de continuer à accompagner nos clients dans cette crise sanitaire et de contribuer à la relance. Nous pensons qu’elle se fera progressivement dans le courant de l’année 2021. C’est important pour nous d’être un acteur majeur dans la contribution à cette relance de l’activité en 2021. À plus long terme, ce qui m’importe, c’est d’abord de continuer à développer la banque en nous appuyant sur notre modèle diversifié avec des franchises fortes en banque privée et en corporate. Opérer dans beaucoup de métiers différents est une chance. Cela nous permet d’avoir beaucoup de leviers de développement pouvant se passer le relais selon les périodes. De plus, tous nos métiers peuvent travailler entre eux, interagir. Forcément, cela développe le cross-selling, qui permet à la banque de croître un petit peu plus vite que si l’on n’avait qu’un seul segment de clientèle. Il faut également continuer à investir pour améliorer notre efficacité opérationnelle. La pression réglementaire s’accroît, cela génère énormément de travail, de tâches qu’il faut automatiser. Il faut également énormément investir pour digitaliser encore davantage les parcours client. Quelle a été votre première décision à la tête de BGL BNP Paribas ? Oh, cela n’a pas été très difficile : réduire le nombre de comités, et pour ceux qui restaient, réduire d’un tiers la volumétrie des présentations qui y étaient faites. Pour donner du temps aux équipes pour agir en faveur du développement de la banque, justement.
BGL BNP Paribas Development, c’est la branche private equity de la banque. L’idée est d’accompagner les entreprises luxembourgeoises de taille moyenne via une prise de participation minoritaire en capital.
Cela complique quand même la tâche dans les activités quotidiennes ? Il y a un élément qui est très important dans ce contexte, c’est que les collaborateurs sont plus loin, et donc, les managers les voient moins. Tout se fait beaucoup à distance, il faut donc une écoute plus attentive. Il faut certainement aussi beaucoup plus de bienveillance. Nous sommes très vigilants. Nous faisons régulièrement des enquêtes pour prendre le pouls de nos équipes à distance et voir comment elles vont. Et nous analysons les résultats de cette enquête avec l’ensemble de nos managers. Pour ce qui est de nos clients, évidemment, au-delà de toutes les précautions que nous avons mises en place en respectant scrupuleusement les recommandations des autorités sanitaires, il a fallu les guider en les encourageant à privilégier des canaux à distance pour toutes leurs opérations les plus courantes. Cela a impliqué un gros travail d’accompaVous êtes, pour ainsi dire, arrivée avec gnement de la part de nos équipes. On a la le Covid. Qu’est-ce que la pandémie chance d’avoir un modèle omnicanal, c’esta changé dans la manière de fonctionner à-dire que, quand le client a besoin d’interade la banque ? On ne peut pas parler de 2020 sans parler du gir avec la banque, c’est lui qui choisit comment : contexte dans lequel la banque a dû opérer, il prend son téléphone ou il utilise le web et de la façon dont elle a dû s’adapter pour banking, soit sur son ordinateur, soit sur son assurer l’accompagnement des clients et la smartphone. continuité des opérations. Bien entendu, ce Du coup, il a vraiment fallu encourager les qui était pour nous absolument essentiel, clients à utiliser tous ces moyens à distance c’était de préserver la santé de nos collabo- pour leur permettre d’éviter de se déplacer et rateurs et de nos clients. Ainsi, les premières de prendre les risques qui vont avec ces déplamesures ont consisté à se mettre en télétra- cements. Vraiment, on a noté une formidable vail progressivement, et puis, à la rentrée des mobilisation de nos équipes pour parfois congés d’été, on a franchi une étape supplé- résoudre des difficultés de certains clients qui mentaire en s’organisant en équipes séparées, étaient un peu la quadrature du cercle. Et avec ce qui veut dire que, dans une même unité, un peu d’ingéniosité, d’énergie, je crois qu’on on a séparé les équipes en deux, et ces deux est toujours arrivé à répondre à ces questions. morceaux ne se croisent jamais. On divise Je crois qu’on peut dire que cette organiainsi par deux les risques de contamination. sation, qu’il a fallu mettre en place relativeCe mode de fonctionnement est en place ment vite, et notre modèle omnicanal nous depuis septembre, et, depuis ce moment, on ont permis d’opérer et d’assurer la continuité a des collaborateurs qui n’ont pas revu l’autre des opérations de la banque. Une fois cette partie de l’équipe. Pour ceux et celles qui organisation mise en place, les équipes se sont mobilisées pour accompagner les clients pour trouver des solutions à leurs difficultés. Sont ciblées les sociétés luxembourgeoises commerciales, industrielles ou technologiques, non cotées, avec un chiffre d’affaires supérieur à 10 millions, une activité rentable et des perspectives de croissance. « Et qui ont besoin d’un coup de main, soit pour accélérer leur développement, soit pour éventuellement assurer une transmission. Nous n’avons pas vocation à rester indéfiniment au capital. Notre horizon d’investissement est de 5 à 10 ans, et nous avons prévu d’investir environ 50 millions dans les cinq années qui viennent. »
« Je pense que la place des femmes dans la banque est la même que celle des hommes. Il n’y a pas une place spécifique. » 74
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doivent travailler sur site, ces équipes ont été séparées et travaillent dans des espaces différents. On a la chance d’avoir des locaux très spacieux. On en a donc profité.
La question de la rentabilité des établissements bancaires est au cœur des interrogations des autorités prudentielles et des analystes. Quel est votre avis sur le sujet ? Il y a en effet une forte pression sur la rentabilité des banques, et elle résulte de deux facteurs différents. Le premier de ces facteurs est lié aux conséquences des crises financières qui se sont succédé depuis 2008. La réponse des régulateurs aura été, pour faire simple et schématique,
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Conversation Béatrice Belorgey
de renforcer considérablement les exigences de capitaux propres que les banques devaient avoir (Bâle III, puis Bâle IV) et de renforcer considérablement les règles en matière de protection des clients (Mifid II). La protection des intérêts des clients est un sujet crucial : on parle de la confiance même des gens dans le système bancaire. Tout cela a impliqué des investissements absolument considérables de la part des banques. Et n’oublions pas les coûts liés à la hausse de la pression réglementaire qui continue sur d’autres volets qui sont tous très importants, comme la lutte contre le blanchiment. Le deuxième facteur, c’est la baisse très forte des taux d’intérêt due aux politiques monétaires des banques centrales très accommodantes, d’abord en réponse à la crise de 2008, et maintenant en réponse à la crise sanitaire. Ce renforcement mène à des taux négatifs importants qui grèvent considérablement les revenus de la banque. Tous les soirs, les excès de dépôts qui ne sont pas replacés sont placés à 50 points de base à la Banque centrale européenne. Donc, forcément, ça veut dire que cette baisse de revenus doit être compensée par une amélioration de l’efficacité opérationnelle. Les établissements bancaires sont-ils à même de relever ce double défi ? Je crois qu’il faut d’abord dire que ce ne sont pas les seuls défis. Il y en a un troisième, qui est celui de la digitalisation. Le changement des habitudes de nos clients nécessite d’adapter tout notre dispositif de joignabilité et d’améliorer la capacité à répondre rapidement à leurs demandes. Aujourd’hui, les clients consomment la banque,
1.500
Et les petits acteurs ? C’est beaucoup plus difficile pour les acteurs plus petits que pour les grands groupes. C’est incontestable. Après, oui, peut-être que ça mènera à des rapprochements…
MILLIONS D’EUROS
C’est, en millions d’euros, le résultat net consolidé de la banque. Pour bien se rendre compte du poids de BGL BNP Paribas sur la Place, il faut rapporter ce chiffre aux 3,031 milliards de bénéfices des 126 banques luxembourgeoises pour 2020. À elle seule, la BGL pèse pour 13,14 % de ce chiffre !
Si vous étiez chef économiste, conseilleriez-vous à vos clients d’investir dans le secteur de la finance et des banques ? Oui. Mais cela dépend du point d’entrée.
comme n’importe quel autre service, un téléphone à la main. Commander un billet de train prend 30 secondes. Et vous voulez que ce soit bien fait, que votre billet soit disponible dans votre app. Les clients demandent au quotidien la même chose aux banques – banques qui doivent en plus être capables, à certains moments, d’apporter le service à valeur ajoutée qu’attend le client. Le bon conseil, la bonne suggestion... C’est à nous de trouver le bon équilibre entre la banque « au quotidien », délivrée rapidement et à distance, et les services à valeur ajoutée prodigués par un conseiller via le canal que le client aura choisi d’utiliser. Tout cela mis bout à bout nécessite d’investir – ce qui grève la rentabilité – et beau coup plus de fonds propres – ce qui grève la profitabilité. Pour bien opérer aujourd’hui, il faut bien connaître les règles du jeu, il faut être capable de mener des projets de transformation importants et avoir la capacité d’investir afin d’améliorer l’efficacité opérationnelle.
Le groupe a la volonté de réduire son réseau d’agences. Cette volonté se traduira-t-elle sur le terrain au Grand-Duché ? Quelle est la place du réseau dans l’omnicanal ? Le groupe adapte en permanence son dispositif d’agences aux usages des clients. Mais, en même temps, il investit considérablement pour que le client puisse justement travailler en interaction avec la banque, quel que soit le canal utilisé (téléphone, web, app…). Ce qui importe pour nous, c’est que chaque client choisisse son moyen de contact et que l’on puisse répondre à ses sollicitations rapidement. Pour citer quelques chiffres, on a eu une baisse de 50 % des opérations dans les agences en 2020, et, par ailleurs, une explosion des virements via les smartphones et des entrées en relation digitales. Donc, voilà, il faut continuer à nous adapter en ce sens. Sans oublier aussi d’accompagner nos clients dans un développement plus durable, un financement plus vert, des investissements plus socialement responsables. Ça, c’est aussi quelque chose qui est très important pour nous. Au final, c’est un jeu de vases communicants dans lequel l’agence reste une brique.
LES RÉSULTATS DE BGL BNP PARIBAS AU FIL DES ANS
2.000 MILLIONS D’EUROS Crise pour ce qui s’appelait alors Fortis Banque Luxembourg
398,3
Fusion effective BNP et BGL
Produit net bancaire
1.315,9
1.346,8
Centenaire
Résultat net (part du groupe)
1.373,5
1.352,2
1.345,3
1.447
1.510,1
Premiers résultats présentés par Béatrice Belorgey
1.595,5
1.123,4 797,6
793
500
277
297,8
226,4
336,9
342,3
357,9
403,9
365,8
338,9
345
398,3
6,2 0
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2009
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SUMMER 2021
2013
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2020
BGL BNP Paribas
811,4
Source
1.000
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Conversation Béatrice Belorgey
Pensez-vous que la crise du Covid a changé le rôle des banques dans nos sociétés ? Le rôle de la banque, c’est de permettre à la fois aux entreprises de se développer et aux particuliers de concrétiser leurs envies et leurs besoins. La banque est d’abord un facilitateur. Après, c’est un facilitateur qui a aussi les moyens de suggérer certaines s olutions plutôt que d’autres. Et là, je reviens au rôle que peut avoir une banque pour une économie plus durable. Et quid de l’image des banques ? Désastreuse après 2008, et en première ligne aujourd’hui. Pensez-vous que l’on voit désormais les banques comme un partenaire des sociétés ? Ce que révèle cette crise, c’est le caractère essentiel et l’utilité des banques pour les clients et pour l’ensemble de la société. Les banques se sont beaucoup mobilisées pour accompagner les clients particuliers qui se retrouvaient sans web banking, et donc en grande difficulté au moment du premier confinement, car ils ne pouvaient pas se déplacer. Elles se sont mobilisées aussi pour les entreprises, en travaillant avec l’État luxembourgeois pour la mise en place de moratoires et de prêts garantis, et pour conseiller les clients face à ces instruments. Durant notre exercice 2020, nous avons accordé 5.322 moratoires sur les activités luxembourgeoises afin d’aider nos clients à faire face à des difficultés imminentes de trésorerie, et une centaine de prêts garantis par l’État. Les banques se sont donc b eaucoup mobilisées. Nous verrons si cet engagement portera ses fruits dans les enquêtes d’opinion d’ici quelque temps. Ce serait bien que l’image du métier s’améliore. Mais je n’en suis pas certaine Les équipes ont été formidables durant la crise. Elles ont redoublé d’efforts et d’attention, et ont eu à cœur de mener des opérations solidaires pour venir en aide aux personnes qui étaient les plus démunies face à cette pandémie, et aussi aux personnels de santé. On se souvient que la crise est arrivée très vite et que, partout, les professionnels de santé manquaient de masques. Il se trouve que nous en avions. Partout dans le monde, le groupe a donné ces masques aux professionnels de santé. Au Luxembourg, ce sont 35.000 masques qui ont été cédés… Nous avons donné 100.000 euros à la Fondation Robert Schuman, à Caritas Luxembourg et à la fondation Stëmm vun der Strooss. Pendant tout l’été, nous avons prélevé un pourcentage des commissions des paiements par carte que faisaient nos clients pour à la fois faire à nouveau une donation à Caritas Luxembourg et accompagner des clients qui étaient confrontés à des difficultés pour se loger. Et on a fait la même opération à l’automne, en prélevant 78
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un pourcentage de nos commissions sur certains placements, au bénéfice de la fondation Stëmm vun der Strooss. La banque a accéléré ses projets autour du développement durable. Notre deuxième rapport RSE, publié en même temps que notre rapport annuel, recense toutes les initiatives prises dans le cadre des quatre critères que nous nous attachons à suivre dans des sujets économiques, sociaux, civiques ou environnementaux. Tout cela reflète ma forte conviction que notre croissance devra être durable, ou elle ne sera pas.
FAST & CURIOUS Thé ou café ? Café. Crémant ou champagne ? Champagne. Sur place ou à emporter ? Sur place. Télévision ou radio ? Radio. Presse papier ou internet ? Les deux. Netflix ou cinéma ? Mille fois le cinéma. Travailler tôt ou tard ? Plutôt tard. Pour ou contre les quotas de femmes aux postes de décision ? Contre. Épargner ou investir ? Sans hésiter, investir. Réunion en visioconférence ou, à l’ancienne, en présentiel ? Les deux. Retrouvez l’interview vidéo Fast & Curious de Béatrice Belorgey sur paperjam.lu.
Plus largement, quel sera, selon vous, l’impact du Covid sur notre société et nos modes de vie ? Et quelle leçon aimeriez-vous que l’on tire de cette crise ? Je crois que l’on s’est retrouvé du jour au lendemain dans une situation totalement inattendue, où il a fallu tout faire à distance. Je pense que les banques, la société, enfin, tout le monde s’est quand même adapté de manière assez remarquable à ce nouveau paradigme, et je pense que cela montre qu’il y a une capacité d’adaptation de la société plus forte que celle à laquelle on pouvait s’attendre. Dans cette crise, qui par ailleurs est à la fois très profonde et qui a généré beaucoup de malheur tout autour, il y a eu des côtés positifs. On s’est « débrouillé pour faire ». Au quotidien, nos équipes se sont vraiment débrouillées pour fonctionner, aider et accompagner. Je pense que la crise a aussi renforcé un certain besoin de solidarité. Ce que je considère comme très positif. J’espère que cela enclenchera une vraie prise de conscience sur le fait qu’il est temps de passer à un développement plus durable. Quels sont, selon vous, les trois moments-clés de votre vie ? Le premier serait mon entrée à Sciences Po, parce que cela a entraîné pas mal de choses ensuite. Et c’était aussi une grande satisfaction personnelle. Le deuxième moment-clé, c’est la rencontre avec mon mari, parce que cela aussi a induit pas mal de choses derrière. Le troisième moment, quant à lui, est lié à ma vie professionnelle : c’est lorsque j’ai pris la responsabilité de l’équipe Relations investis seurs de la banque. S’ensuivirent sept années de contacts quotidiens avec la direction générale de la banque – contacts particulièrement intenses durant la crise financière. On n’est plus pareil après.
Le Musée d’Art Contemporain du Luxembourg
Vue de l’exposition William Kentridge. More Sweetly Play the Dance, 13.02 — 30.08.2021, Mudam Luxembourg © Photo (détail) : Rémi Villaggi | Mudam Luxembourg
mudam.com
Dans le cadre du red bridge project
Avec le soutien de
Loo & Lou Foundation, abritée sous l’égide de la Fondation de Luxembourg
Partenaire média
William Kentridge More Sweetly Play the Dance
13.02 — 30.08.2021
Alex Reding assure la promotion, depuis deux décennies, des artistes contemporains luxembourgeois à travers la galerie Nosbaum Reding.
Conversation Alex Reding
« Faire avancer le milieu et partager ma passion » La galerie Nosbaum Reding célèbre cette année le 20e anniversaire de sa création. En deux décennies, Alex Reding a marqué le paysage de l’art contemporain au Luxembourg et est aussi un fin observateur de cette scène artistique. Discussion à cœur ouvert sur ce parcours encore en écriture. Interview CÉLINE COUBRAY
Pouvez-vous nous parler de votre parcours avant l’ouverture de la galerie en 2001 ? J’ai fait un parcours artistique assez traditionnel, en allant aux Beaux-Arts de Paris, en arts plastiques à Paris 1 pour passer une maîtrise, ce qui m’assurait de pouvoir devenir professeur au Luxembourg, puis en poursuivant à l’académie de Düsseldorf. À mon retour au Luxembourg, j’ai d’abord continué ma pratique artistique. Mais au début des années 2000, j’en ai eu assez du peu de réseaux possibles au Luxembourg, de l’absence du milieu de l’art, et, avec Véronique, que j’avais rencontrée pendant mes études, et qui partageait la même passion pour l’art que moi, nous avons ouvert la galerie Alimentation Générale en janvier 2001, place de Strasbourg, à Luxembourg. En parallèle, j’ai été professeur au Lycée Michel Lucius pendant environ 10 ans, car cette base économique était nécessaire. Ce n’est pas trop dur de renoncer à sa créativité ? Je considère chaque exposition, chaque accrochage comme un moment de créativité et de création. C’est comme cela que je m’exprime désormais. Quand vous avez ouvert la galerie – vous venez d’ailleurs de le souligner –, le milieu de l’art contemporain au Luxembourg était encore timide. Il y avait certes l’élan donné par la Capitale européenne de la culture de 1995, suivi de l’ouverture du Casino. Quelques galeries existaient sur la Place, dont Toxic, Erna Hecey ou Stéphane Ackermann. Le Mudam était en préfiguration… Pourquoi prendre ce risque d’ouvrir une galerie d’art contemporain ? Parce que j’ai dû m’occuper de développer ma propre carrière artistique, de communiquer sur mes expositions. J’ai appris à réaliser des projets culturels et acquis une certaine routine
Photo ANDRÉS LEJONA
et facilité pour cela. Et il faut être réaliste : Quelle ligne directrice avez-vous vivre professionnellement de son travail d’ar- voulu donner à la galerie ? tiste est très difficile, encore plus au Luxem- C’est avant tout un lieu de partage, de passion. bourg en 2001. Sur une génération d’étudiants Il y a l’énergie donnée au moment de la visite aux Beaux-Arts, seuls 1 à 3 % d’entre eux par- dans les ateliers d’artistes, puis le dynamisme viennent à vivre de leur art. Les autres se réor- du montage, et le partage avec le public et les ganisent. Je fais partie de ceux-là. C’est un collectionneurs lors de l’exposition. Notre galeconstat cruel, mais réel. J’ai préféré réaliser rie n’est pas un espace fermé ou élitiste. Contraides projets culturels pour et avec les autres. rement à certains, qui ont fait le choix d’un C’est comme cela que nous avons ouvert la grand espace, à la campagne, nous avons tougalerie, avec l’ambition de pouvoir partager jours privilégié les lieux de passage, là où il y a ma passion pour l’art, la création contempo- naturellement des visiteurs, une vie urbaine. raine et de pouvoir faire évoluer la scène cultu- Je vois la galerie comme un espace ouvert, publirelle au Luxembourg. Tout cela en restant dans quement accessible. Jamais je ne viendrai vous un engagement réel, proche des artistes, et en agresser pour vendre des œuvres. Je suis plutôt les aidant à produire. Ce choix m’a permis dans une démarche d’accompagnement et d’envisager une trajectoire longue, plus ou d’échange avec le plus grand nombre. moins stable, tout en structurant mes ambitions culturelles. Votre galerie est une galerie à programme. Comment le composez-vous ? J’essaie d’avoir un équilibre qui permet de couvrir un maximum d’orientations artistiques, et donc de passions. C’est pourquoi certains de mes artistes ont un travail très BIO EXPRESS intellectuel, d’autres réalisent des œuvres plus 1971 pop. Pour une zone aussi peu dense que LuxemNaissance d’Alex Reding bourg, il faut pouvoir proposer une sélection à Luxembourg. qui corresponde un peu à tous les goûts, mais Janvier 2001 toujours avec une haute exigence de qualité, Ouverture de la galerie Alimentation Générale avec que ce soit dans le choix des artistes, des Véronique Nosbaum, place œuvres ou de l’accrochage. Ce large spectre de Strasbourg, à Luxembourg. artistique permet d’asseoir un spectre finan2006 cier plus large aussi, avec des artistes émerDéménagement au numéro 4 gents, d’autres plus confirmés, des artistes de la rue Wiltheim et changement de nom. locaux, d’autres internationaux. Ce mélange structuré m’a permis de rester actif ces 20 der2015 Création de Luxembourg nières années, malgré les diverses crises que Art Week. nous traversons. Mais je n’ai rien inventé, Mars 2017 j’imite juste les meilleurs galeristes. La galerie Nosbaum Reding occupe également le numéro 2 de la rue Wiltheim.
9 septembre 2021 Ouverture de la galerie à Bruxelles, rue de la Concorde.
Les amateurs d’art et collectionneurs locaux sont-ils suffisamment nombreux pour développer un marché de l’art au Luxembourg ?
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Conversation Alex Reding Su-Mei Tse
Mike Bourscheid
Tina Gillen
C’est effectivement un challenge. Une galerie peut normalement compter sur trois piliers pour développer sa clientèle : le corporate, l’insti tutionnel et les collectionneurs privés. Or, au début des années 2000, les grandes entreprises présentes au Luxembourg avaient déjà construit leur siège social et constitué leur collection d’art. Pas de grande source de ce côté, contrai rement à l’Allemagne, par exemple, où c’est un secteur beaucoup plus important. Au niveau institutionnel, c’est un volet qua siment absent au Luxembourg. Il y a certes le Mudam, mais il n’achète presque pas dans les galeries locales, ou que de manière très exceptionnelle. Le MNHA arrive parfois à acquérir une ou deux œuvres quand ils font des économies sur les budgets d’exposition. Et c’est tout… Nous n’avons pas d’organisme comme le Centre national des arts plastiques (Cnap), en France, ou les fonds régionaux d’art contemporain (Frac), qui ont des politiques d’acquisition beaucoup plus soutenues et qui achètent en galerie. J’ai estimé que l’institution publique au Luxembourg dépense environ 200.000 euros par an dans les achats en art contemporain. Ce n’est rien du tout. C’est 2,5 % du budget global du Mudam, et 0,1 % du bud get du ministère de la Culture. Acheter, c’est faire des choix, et les politiques n’aiment pas cela. C’est pour ça que nous avons plutôt ce système de bourses, qui est plus neutre. Au final, ce n’est donc que très peu d’argent public qui arrive dans les galeries, et, par la suite, aux artistes pour la vente de leurs œuvres. Restent alors les collectionneurs privés… Oui, on ne repose finalement que sur un seul pilier. Or, il ne faut pas oublier que les galeries ont d’importants frais de fonctionnement. Il y a les loyers, les salaires, les frais généraux, la TVA… Et nous investissons dans les car rières de nos artistes, en leur offrant une com munication de qualité, avec des photos professionnelles de leurs expositions o rganisées à la
« N ous ouvrons une filiale à Bruxelles au mois de septembre. » 82
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LES ARTISTES REPRÉSENTÉS PAR LA GALERIE Thomas Arnolds, Stephan Balkenhol, Marcel Berlanger, Mike Bourscheid, Aline Bouvy, Philippe Cognée, Damien Deroubaix, Helmut Dorner, Tina Gillen, Tilo Kaiser, Steve Kaspar, Hubert Kiecol, Xavier Mary, Christoph Meier, Manuel Ocampo, Michael Simpson, Barthélémy Toguo, Wawrzyniec Tokarski, Su-Mei Tse, Maja Weyermann, Jens Wolf, Peter Zimmermann.
galerie, des p ublications de catalogues. Nous encadrons les œuvres… Tout ceci coûte de l’argent, bien évidemment. Il faut donc soigner les relations avec les collectionneurs… C’est une relation évidemment importante, un partage autour de la création. La rencontre se fait progressivement. Avec le temps, on apprend à se connaître, à s’apprécier, à partager des points de vue. On parvient à créer une discus sion, une fidélité. Le parcours d’un collection neur est un apprentissage permanent. Il y a une envie au départ, mais le goût et le jugement s’affinent avec les années. Il faut aussi apprendre à faire connaissance avec l’œuvre d’un artiste, comprendre son évolution. Tout ceci permet de mieux apprécier les prix, et de ne pas regar der de manière simpliste une œuvre et une valeur financière. L’argent ne doit pas être le seul critère d’appréciation d’une œuvre. On peut aussi faire connaissance avec le travail d’un artiste en achetant un dessin, qui est moins cher, puis évoluer par la suite dans son travail. C’est un peu comme avec les voitures : au début, on achète un petit modèle, puis on va progressi vement vers de plus gros modèles, avec une motorisation plus complexe.
d’avoir quelques beaux objets chez eux. Ils soutiennent aussi souvent les artistes locaux et ont un lien direct avec eux, sans nécessai rement passer par la galerie. C’est le groupe où je vois le plus de potentiel de développe ment. C’est aussi pour ce public que nous avons initié Luxembourg Art Week. Pour leur proposer un grand moment de rencontre avec une offre exceptionnelle, sans avoir la contrainte de rentrer dans une galerie. Restons sur le sujet de Luxembourg Art Week. Pendant de très nombreuses années, la création de cette foire a été en discussion, mais sans jamais se faire. Puis, vous avez décidé de prendre ce sujet à bras-le-corps, et, désormais, LAW en est à sa sixième édition, avec un succès qui se confirme d’année en année. La foire est née de cette même volonté de par tage, avec l’objectif d’élargir encore plus l’offre. La population active au Luxembourg a doublé en 20 ans. Il y a beaucoup de personnes qui viennent d’ailleurs et qui ne connaissent pas encore nécessairement bien toute l’offre cultu relle au Luxembourg. La foire est l’occasion de les rencontrer, d’élargir notre clientèle. C’est aussi l’occasion de toucher un public peut-être plus jeune avec la sélection de gale ries qui proposent des œuvres à des prix abor dables. Ce sont les collectionneurs de demain. Mais il faut toujours maintenir une exigence de qualité. C’est la clé du succès et de la dura bilité. C’est un équilibre savant à trouver dans le choix des exposants pour parvenir à attirer aussi bien des collectionneurs avisés, habitués aux grandes foires internationales et qui sont prêts à acheter des œuvres d’importance à cette occasion, qu’un public plus occasionnel, moins habitué aux rouages de ce milieu, avec un budget plus modeste.
Quelle place souhaitez-vous avoir Comment le public de collectionneurs au niveau international ? se compose-t-il au Luxembourg ? Si j’ai évoqué la dureté du milieu pour les artistes, Il y a environ une centaine de personnes qui pour les galeries, ce n’est pas plus tendre… sont de vrais passionnés, qui vivent l’art au Certains de ma génération sont devenus de quotidien, vont visiter de très nombreuses grands galeristes, d’autres ont complètement expositions, se déplacent dans tous les musées disparu. Les foires permettent de refléter nos à l’occasion de leurs voyages, qui fréquentent ambitions au niveau international et notre positionnement. Mais il y a un classement, là les foires internationales… Puis, il y a un grand groupe de personnes qui aussi : le top du top, c’est Art Basel ; juste après, aiment se faire plaisir à travers des achats artis il y a la Fiac, à Paris, et Frieze, à Londres ; un tiques. C’est une manière d’améliorer leur quo échelon en dessous, il y a les grandes foires tidien, que ce soit au bureau ou à la m aison. Ils européennes – mais sans portée mondiale – apprécient l’énergie qui se dégage des œuvres que sont Art Cologne, Art Brussels ou l’Arco, d’art, les pensées qu’elles reflètent, la relation à Madrid. C’est dans cette dernière catégorie avec l’art, les artistes, les échanges intellectuels que nous nous trouvons actuellement. Pendant que l’on peut avoir dans le milieu culturel. C’est un temps, nous avons été sur liste d’attente à un intérêt qui est partagé par beaucoup plus de Art Basel, et nous avons participé à deux reprises personnes que l’on ne pourrait le penser. Je dirais à la Fiac. Mais depuis le déménagement de qu’il s’agit d’un groupe d’environ 500 personnes. la Fiac au Grand Palais, le nombre de galeries Et puis, il y a un troisième groupe, qui est présentes a diminué, nous laissant moins d’op beaucoup plus large, qui apprécie simplement portunités pour participer.
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Conversation Alex Reding
D’autre part, ces foires sont très structurées au niveau des exposants : il y a ceux qui font de l’art moderne, les global players, ceux de la scène locale et les galeries hype. Nous ne rentrons dans aucune de ces catégories… donc, difficile d’y avoir une place. Nous faisons partie de ces 200-300 galeries qui comptent en Europe, mais qui ne peuvent pas avoir de visibilité sur les très grandes foires. Par contre, nous avons une grande facilité à participer à Art Cologne ou Art Brussels, ce qui nous convient tout à fait. Nous y vendons bien. Que pensez-vous de la vente d’œuvres sur internet ? Ce n’est pas vraiment valable. Sauf si vous connaissez déjà le travail d’un artiste et que vous recherchez précisément une œuvre. Ou pour le second marché. Mais pour une galerie comme la nôtre, ce n’est pas intéressant. Le second marché ne vous a jamais tenté ? C’est pourtant un créneau moins risqué et pouvant apporter un important complément de revenus. Tenir une galerie comme la mienne est déjà un travail très prenant. En temps normal – hors Covid, j’entends –, je peux être parti cinq jours sur sept, pour aller visiter des ateliers, assister à des vernissages… Avoir en plus une activité de second marché ne serait pas réaliste. C’est un choix, et j’ai décidé de ne pas le faire. Et vous développer à l’international, avoir une seconde adresse, cela ne vous tente pas ? Si, cela fait même 10 ans que j’y pense. Je peux désormais annoncer que je passe le pas cette année, puisque nous ouvrons une filiale à Bruxelles au mois de septembre ! Cela participe à cette même idée de désenclavement que celle qui nous a motivés au début. P endant un temps, j’ai pensé m’installer à Paris, car c’est, structurellement parlant, le meilleur terrain pour une galerie. Mais Paris est déjà saturée en nombre de galeries par rapport au nombre de collectionneurs. J’ai donc choisi de me développer plutôt à Bruxelles. Il y a une vraie ressemblance de mentalité avec Luxembourg. C’est une structuration de marché un peu plus hétéroclite, mais le milieu bruxellois est ouvert, avec des personnes beaucoup plus libres intellectuellement et dans leur attitude. C’est un public généralement curieux et intéressé. Et puis, il y a beaucoup de Belges qui vivent ici et avec qui nous avons déjà de bonnes relations. J’ai fait ce choix, aussi, parce que je me devais d’offrir aux artistes que nous défendons une vitrine dans une grande capitale européenne. Mais nous aurons aussi des défis, comme celui de faire découvrir des artistes moins connus aux yeux des collectionneurs belges. Cette nouvelle adresse va par ailleurs certainement permettre 84
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d’apporter de nouveaux accents à notre program mation au Luxembourg. Je suis personnellement très content et impatient de pouvoir ouvrir ce nouveau lieu. Finalement, vous allez participer à l’export des artistes luxembourgeois, comme ce qu’essaie de faire Kultur:LX. Vous savez, dernièrement j’ai fait le compte, et je suis à l’origine d’environ un quart, si ce n’est un tiers, des expositions à l’international des artistes luxembourgeois. Donc ce n’est pas vraiment nouveau pour moi. Kultur:LX va certainement pouvoir apporter quelque chose à la fois pour l’export, mais aussi pour le développement de la carrière des artistes. Vous êtes aussi engagé dans l’organisation du Leap, ou dans d’autres projets artistiques, avec l’asbl Artcontemporain.lu. On vous a vu récemment dans l’accompagnement du programme « Art in situ OAI », par exemple. Oui, c’est toujours dans cette dynamique d’essayer de faire avancer le milieu et de partager ma passion. L’association permet de faire des projets, de structurer des actions, indépendamment de la galerie. C’est à travers elle que nous faisons le dépliant et le site internet Art Actuel, sur lesquels nous répertorions les expositions d’art contemporain en cours au Luxembourg et dans la Grande Région. Nous proposons un cycle d’expositions à la Chambre de commerce, dans une de leurs salles. C’est aussi cette asbl qui est la structure organisationnelle de Luxembourg Art Week. Pensez-vous que l’État en fait assez pour aider les artistes ? La culture est devenue presque trop étatique. Je suis déçu de la tournure que cela a pris ces dernières années, et je pensais que le gouvernement actuel aurait une autre philosophie. Or, les artistes se retrouvent avec une sorte de salaire social étatique. C’est bien de leur donner de l’argent, mais peut-être devrions-nous réfléchir à comment amener de l’argent autrement dans le milieu. Quels sont les ascenseurs existants ? Lesquels sont défaillants ? Quelle place globale donne-t-on à la créativité et à l’art de manière générale dans notre société ? Les artistes que je défends n’ont que peu de possibilités de débouchés dans les institutions au Luxembourg. Pourquoi ? Nous n’avons pourtant pas de problème de qualité artistique. Plusieurs de nos artistes font désormais carrière au niveau international. Mais ici, au niveau local, ça bloque… Seriez-vous favorable à la création d’une école d’art au Luxembourg ? Pas nécessairement. Je trouve cela bien d’aller se confronter à autre chose, d’aller voir ailleurs comment ça se passe. Mais cette absence d ’académie explique aussi certaines défaillances,
« Si j’ai évoqué la dureté du milieu pour les artistes, pour les galeries, ce n’est pas plus tendre… » comme la structuration du milieu. Nous manquons de niveau intellectuel. La scène n’est pas très large non plus, et il n’y a pas de dynamique avec des jeunes, de grands moments de créativité. Cela manque. Pour autant, le niveau a fortement augmenté ces 20 dernières années. Regardez la qualité de la génération de Michel Majerus, Su-Mei Tse, Tina Gillen, Simone Decker… Et pour les trentenaires, avec Sophie Jung, Yann Annicchiarico, Mike Bourscheid… Par contre, je pense que nous manquons de lieux d’exposition. La Kunsthalle à Esch devrait aider à y remédier. Il faudrait aussi arriver à faire comprendre qu’une carrière d’artiste, cela se construit, qu’il y a une progression dans un parcours artistique. Il n’est pas normal, par exemple, qu’un artiste encore en début de carrière puisse faire la Biennale de Venise. Ce type de projet doit arriver comme une consécration, pour marquer un parcours déjà bien établi et avec un fort potentiel de développement. Il serait logique de commencer avec une exposition au Salon du Cercle artistique de Luxembourg, par exemple, puis dans des centres régionaux, de passer par Dudelange, puis au Casino, et enfin au Mudam ou à Venise. Cette progression semble évidente, et pourtant, ce n’est pas toujours le cas. Que pensez-vous de la mise en place d’une incitation fiscale à l’achat d’œuvres d’art ? Cela pourrait être intéressant, évidemment. On pourrait envisager un système comme ce qui a été fait pour le cinéma pendant un temps, avec la loi Rau, où, pour 100 euros dépensés dans le cinéma, on pouvait inscrire 200 euros sur sa feuille d’impôts. Mais c’est compliqué à mettre en place. Je ne suis pas sûr qu’il y ait actuellement la volonté politique pour le faire.
Conversation
« Amorcer une évolution dans la conception de nos habitats »
Sara Noel Costa de Araujo, commissaire déléguée de Homes for Luxembourg.
Sara Noel Costa de Araujo (Studio SNCDA), curatrice déléguée de l’exposition Homes for Luxembourg, curatée et organisée par le LUCA à la Biennale d’architecture de Venise, nous présente son approche. Interview CÉLINE COUBRAY
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Photo ANDRÉS LEJONA
Sara Noel Costa de Araujo
BIO EXPRESS
Tous les deux ans, le Luxembourg est présent à la Biennale d’architecture de Venise à travers une exposition, qui se tient désormais dans la Salle d’Armes de l’Arsenal. Commissionné par le ministère de la Culture, le Luxembourg Center for Architecture (LUCA) est désigné pour assurer l’organisation et le commissariat de l’exposition dans le pavillon. Pour cette 17e édition de la Biennale d’architecture, qui aurait dû se dérouler en 2020, mais qui a été reportée à deux reprises pour raisons sanitaires, le LUCA a confié le rôle de curatrice déléguée à l’architecte Sara Noel Costa de Ajauro (Studio SNCDA) .
Début de carrière À travaillé pour Coop Himmelb(l)au à Vienne en 2000, Zaha Hadid Architects à Londres en 2001 et Xaveer de Geyter Architects à Bruxelles entre 2002 et 2015. Indépendance Elle fonde Studio SNCDA en 2014 à Senningerberg et ouvre un second bureau à Bruxelles en 2015. Recherche Son travail de recherche l’amène à présenter Gesamtcollage, une réflexion autour d’un système autonome et durable de la ville à la Biennale d’architecture de Venise, à la Triennale d’architecture de Lisbonne, au LUCA, au Frac Centre et à Établissement d’en face.
Quand on dit habitat modulaire, on pense souvent aux logements conçus dans des containers, utilisés après une crise ou une guerre, qui ne proposent une qualité architecturale que très médiocre. J’imagine que ce n’est pas tout à fait cela que vous proposez... Non, effectivement. Ce sont des habitats modulaires et préfabriqués, mais avec une haute qualité architecturale et énergétique, réalisés à partir de matériaux durables, recyclables, réutilisables. Nous ne sommes en effet pas les premiers à développer des visions, des estimations et des modèles d’unités d’habitation mobiles. Ce que nous avons trouvé intéressant, en parallèle du développement d’unités d’habitation nomades, c’est la conception d’un habitat temporaire non pas en raison de la guerre, de la pauvreté ou d’autres catastrophes, ni en raison du mode de vie, mais pour des raisons financières. Parce qu’ils sont fabriqués en série et pour une certaine quantité, leur coût de production devient abordable.
Le commissaire général de la 17e Biennale d’architecture, Hashim Sarkis, a énoncé comme thématique « How will we live together ? ». Comment vous à la Biennale de Venise relève de la même êtes-vous approprié cette question approche et est combinée avec le sujet si forpour l’exposition présentée dans tement d’actualité qu’est l’habitat abordable. le pavillon luxembourgeois ? Avec Andrea Rumpf, directrice du LUCA, nous avons proposé une exposition pour le Du paysage à l’habitat abordable, pavillon luxembourgeois qui formerait la der- quel est le lien ? nière partie du triptyque commencé par l’ex- Il s’agit en effet de lancer le débat autour de Est-ce aussi une possibilité d’habiter position Futura Bold? Post-City: Considering l’habitat modulaire et abordable au Luxem- « à la carte »? the Luxembourg case, de Philippe Nathan, bourg, à travers un habitat non invasif, s’opé- Parfaitement. L’avantage de ce type d’habitat, Yi-Der Chou et Radim Louda en 2012, suivie rant sur des terrains loués qui sont restitués c’est que la maison réagit aux conditions de de The Architecture of Common Ground, en à la fin d’un bail. C’est une occupation tem- vie, et non l’inverse. Actuellement, les jeunes collaboration avec le master en architecture poraire d’un site, le temporaire pouvant quand qui sortent de leurs études ont cette habitude de l’Université du Luxembourg en 2018, et même être à longue échéance – de 5, 10 ou de consommation. Pourtant, notre habitat ne pour laquelle nous avions déjà exposé le pro- 15 ans en fonction de la durée du bail conclu s’adapte pas du tout à ces nouveaux comporjet Gesamtcollage. Pour ce dernier volet pré- avec le propriétaire foncier. C’est donc une tements. Le gouvernement luxembourgeois senté en 2021, nous avons souhaité poursuivre proposition qui permet de lever le poids du essaie de développer une offre de logements la recherche menée autour de la question du coût du foncier, puisque le terrain n’est pas abordables, mais celle-ci répond toujours à sol au Luxembourg, mais en nous intéressant acheté, mais loué. la même logique. L’habitat modulaire est une à la dimension humaine de ce sujet, et plus proposition de niche, qui se présente comme particulièrement à la question de l’habitat sur C’est par conséquent un autre une alternative supplémentaire et qui n’exce territoire. Ce qui pouvait sembler être, à rapport au site, au sol, que vous clut pas la densité. Avec ce système, il est pospremière vue, une question très générale a introduisez par ce biais. sible de construire des maisons individuelles, pris une tout autre dimension et signification Absolument, je pourrais même dire que dans des maisons en bande, des logements étuaprès les confinements que nous avons connus son rapport au site, la proposition est assez diants, du coliving... Cette approche peut aussi radicale : pas de jardin privé, pas de clôtures, être une solution pour densifier de grands et que nous vivons actuellement. pas de places de parking individuelles... En terrains partiellement occupés, comme une Comment êtes-vous parvenue à faire d’autres termes, moins privé, plus collectif. Cela maison avec un grand jardin, ou des espaces résonner ce sujet avec votre propre travail suggère que nous devons penser différemment laissés vacants entre deux constructions. Il de recherche et pratique architecturale ? et apprendre à vivre ensemble. Ensuite, cela ne s’agit pas nécessairement de grands vilDepuis plusieurs années, avec Studio SNCDA nous donne vraiment l’occasion de réfléchir à lages ou de grands ensembles de construcque j’ai fondé et que je dirige, nous abordons comment mieux utiliser nos espaces urbains. tions modulaires. Ce système peut aussi le paysage en modifiant le moins possible Ce que nous avons vu se produire au cours de fonctionner simplement comme un ajout. l’existant, embrassant à la fois la question du cette période remet radicalement en question paysage et de la ville. C’est une approche que la relation traditionnelle entre l’architecture et Avez-vous déjà des contacts avec nous avions développée pour un projet de le sol, la ville et la campagne, l’intérieur et l’ex- des propriétaires qui pourraient être jardin accolé à la Möllerei, à Belval, dans le térieur. Une situation aussi originale exacerbe prêts à accueillir ce type de logement cadre d’Esch2022, mais qui n’a finalement les enjeux de notre société et ceux spécifique- sur leur site ? pas eu de suite. Notre proposition était de ment liés au Luxembourg. Elle nous demande Nous sommes effectivement en contact avec créer un nouvel espace extérieur dialoguant de réfléchir à notre relation aux autres et au certaines personnes. Il s’est avéré, après disavec la végétation existante, en n’y apportant monde dans lequel nous vivons : comment cussion avec différents acteurs, qu’il n’y a pas que des structures ou du mobilier temporai- allons-nous vivre ensemble ? Nous pensons d’obstacle légal, mais plutôt des freins liés à rement ajoutés, pouvant être retirés pour que le cadre de la Biennale de Venise pourrait la mentalité. La Biennale sera l’occasion de retrouver l’état sauvage du site. C’est en fait être le bon endroit pour lancer un changement présenter des études de cas concrets d’urbaun projet qui mélange architecture, scénographie de mentalité et amorcer une évolution dans la nisation à l’aide de cette approche modulaire. et tiers paysage. L’idée que nous défendons conception de nos habitats. C’est aussi l’occasion d’interroger la possibilité SUMMER 2021
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Conversation Sara Noel Costa de Araujo
« Il s’agit en effet de lancer le débat autour de l’habitat modulaire et abordable au Luxembourg. » de faire de l’urbanisme avec de la végétation plutôt qu’avec du minéral. Mais avant tout, cette approche modulaire permet de rendre abordable le logement, car on se détache du coût d’achat du foncier. Qu’espérez-vous de cette proposition? Notre attitude de départ, pour le projet, est de transformer les vides urbains en de nouveaux lieux communs, et de produire de nouveaux modes de vie réversibles et abordables. À travers ce projet, nous voulons mettre en évidence des modes alternatifs de gestion des ressources et de la propriété, en opposition directe avec la privatisation ou la nationalisation. La « production » des nouveaux espaces communs présente spatialement une nouvelle notion de partage, de négociation et d’usage. Ces nouveaux espaces, définis par leur utilisation et non par leur propriété, sont des espaces régis par des programmes changeants et des usages ouverts, par une nouvelle forme de convivialité. Pourquoi développer cette question à Venise ? L’objectif de cette exposition à la Biennale est de mettre le sujet sur la table et d’ouvrir le débat. La Biennale de Venise est un moment fort dans l’actualité architecturale internationale. Cet événement polarise les attentions. C’est donc une merveilleuse occasion pour présenter nos recherches, lancer des idées, essayer de trouver des solutions, en discuter, en débattre. Montrer qu’il y a d’autres formes d’habitats possibles. En nous interrogeant sur le fonctionnement d’un pavillon national pendant la pandémie, nous retrouvons un thème central pour le Luxembourg, précédemment proposé par le LUCA, et l’inscrivons dans un thème universel, mais spécifique : le sol. Dans le cadre du lancement par le LUCA de la nouvelle problématique curatoriale élargie et de la scénographie que nous allons proposer, le prétexte du thème choisi nous donne des clés centrales pour aborder ce sujet et donner des réponses. La résidence peut commencer, donner vie à une scénographie et être un élément central de l’exposition, en dialogue constant avec une publication et 88
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ollaborative, de remettre en question nos c habitudes, d’interroger nos automatismes, d’apporter un autre point de vue, une autre approche, une réflexion complémentaire. Pour le projet de la Biennale, je me suis entourée de deux architectes qui sont aussi actifs dans d’autres domaines comme le textile et la recherche, et d’un artiste. Nous avons ensuite invité un photographe à collaborer avec nous. Nous travaillons aussi en dialogue avec les ingénieurs en structure du bureau Bollinger + Grohmann. Grâce à ce panel de personnes et de talents, nous évitons d’avoir un projet avec une vision unique. Nous interrogeons un site web qui permettront une audience le processus, et les idées des uns et des autres plus large et une durée de vie plus longue pour viennent enrichir le propos et sont intégrées nous réunir en dehors des murs de l’Arsenal au projet. Pour la conception de la caserne de Venise. Il s’agit, dans ce cas précis, d’une des pompiers à Dilbeek (Belgique), j’ai tranouvelle façon d’habiter une construction vaillé en collaboration avec le graphiste Karel existante, en changeant le programme et la Martens. Cela a abouti sur une façade très destination de la construction. Ce type de structurée, très graphique, avec des fenêtres projet a des contraintes fortes, mais il est ayant un coin arrondi qui sont en fait la réapintéressant de se réapproprier cette architec- propriation d’un objet trouvé par Karel. Nous ture et de dialoguer avec elle dans une nou- avons aussi repris et transformé la porte à velle perspective d’utilisation. C’est une forme double chambranle que Marcel Duchamp d’habitat alternatif, et il en existe plein d’autres. utilisait dans son appartement du 11, rue Larrey, à Paris. Cette inspiration du monde artistique Vous avez aussi choisi de collaborer compte beaucoup. Pour le projet à Venise, avec des artistes. Pourquoi ? nous nous sommes inspirés, pour un des éléLa collaboration avec les artistes est fréquente ments, d’un détail d’un tableau de Picasso, et dans notre travail à l’agence. Mais nous n’avons le titre de l’exposition, Homes for Luxembourg, rien inventé, le Bauhaus le faisait déjà. Cela a été choisi en référence aux Homes for A merica nous permet de développer une critique de Dan Graham. C’est à la fois un travail collaboratif et référencé.
« HOMES FOR LUXEMBOURG » L’exposition du pavillon luxembourgeois à la Biennale d’architecture de Venise, présentée du 22 mai au 21 novembre, se tient dans la Salle d’Armes de l’Arsenal. La contribution luxembourgeoise est commissionnée par le ministère de la Culture et curatée et organisée par le LUCA. Les visiteurs peuvent y découvrir une installation conçue par Sara Noel Costa de Araujo qui présente ses recherches sur l’habitat modulaire, avec la contribution des artistes Koenraad Dedobbeleer, Ester Goris et Arnaud Hendrickx. En plus de ces recherches, le LUCA programme un ensemble de rési dences curatoriales proposées à des professionnels émergents du domaine de l’architecture (auteurs, photo graphes, curateurs, scénographes, activistes…) ainsi qu’une série de débats, conférences et workshops.
Pour autant, on parle bien d’architecture, de création avec une fonction, pas de proposition artistique... Ce que nous présentons à Venise n’est pas une vision utopiste, mais une proposition très concrète, qui répond directement à un besoin identifié, tout en conservant une grande liberté de modulation, avec une solution spatiale intéressante pour chaque cas de figure. Notre proposition répond à une préoccupation bien réelle, celle de la rareté du foncier. Nous y répondons avec une proposition qui a une faible emprise au sol et qui laisse le foncier disponible. C’est une combinaison d’idées qui, in fine, répondent à un besoin. Cette approche architecturale de combinaisons d’éléments, nous l’avions déjà développée dans Gesamtcollage, un atlas de structures qui composent une ville. Pour Venise, la création de ce « Gesamtwerk » devient une structure, la structure devient une construction, la construction devient un bâtiment, le bâtiment devient un espace, l’espace devient une création.
Conversation Pierre Gramegna
“ We ain’t seen nothing yet ” Interview AARON GRUNWALD
Photos MIKE ZENARI
Finance minister Pierre Gramegna (DP) reckons sustainable investing is the future of Luxembourg’s financial sector. Delano sat down with Gramegna to take stock of the past decade, look ahead to 2031, and ask about the impact of the pandemic on public finances. 90
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Health before numbers, Pierre Gramegna says of the pandemic.
Conversation
Let’s talk about the budget if we can. that are going to be added in the next three PIERRE GRAMEGNA Given the pandemic recovery spending, months that are still going to be accounted for Education there’s a growing budget deficit and public in 2020. So we’re going to have a higher defiOriginally from Esch-sur-Alzette, Pierre Gramegna earned a bachelor’s debt is expected to go up by 7.4% of GDP. cit in 2020. But it will be lower than the €5bn in economics and master’s in civil law Do you anticipate submitting a revised that was anticipated [last year]. from Paris II Panthéon-Assas University. budget this year or are we on track Now for next year [2021], we have anticiProfessional career to handle the crisis with what you already pated €2.7bn. This is the most recent numGramegna entered the foreign service, got approved from parliament? ber. There’s no reason to change that, we do serving at Luxembourg’s embassy in Paris before being named consul not think of revising that in any way, in the First, before answering about where we stand general in San Francisco and then in terms of public finances, I would like to months to come. I think we’ve been very pruambassador to Japan and South Korea. really make a few [points] on some things that dent in the numbers with which we’ve built He became director general of the Luxembourg Chamber the budget. And I think that’s where we’re do not get enough attention. Now, let me start of Commerce in 2003. going to land. In terms of debt, as it stands, by saying that, obviously, this pandemic has Political posts at the end of 2020, our public debt will be caused an economic downturn, and has obviously Gramegna was named finance around 26.5% of GDP. And even this year, worsened public finances, everywhere. My minister in December 2013. He was the first priority, since the beginning of this pan2021, the debt level will be below 30% of GDP. top-placed DP candidate for the South constituency in October 2018 Now, obviously, this is quite an increase comdemic, has been the health of the people. This parliamentary elections, and was then was an absolute priority, which goes before pared to 2019, where we had a surplus in the reappointed finance minister. budget, as we had in 2018. But still we are the anything else. And we’ve proved that by spenOther mandates ding more than €200m in expenditures, investcountry in the EU and Eurozone that has had Gramegna sits on the boards ments in reinforcing medical personnel and the lowest percentage increase since 2019. of the European Investment Bank, European Stability Mechanism, And we will stay below 30%, even this year, doing the large scale testing, being the country International Monetary Fund, World Bank which is the national goal that this governthat is doing the most tests, which has allowed and Asian Development Bank. ment has given to itself. And knowing that at us to have a second lockdown that was less deep than in other countries. So the most European level 60% is allowed. And when important thing is health. The second most you see how much the debt is increasing in important thing, I would say, is not only to other countries, I think we have been doing focus on numbers, and we’ll get to numbers we agreed a bunch of measures equalling reasonably well, despite the fact that we’ve in a minute, but to realise that in this very more than a trillion, one thousand billion, spent whatever [is] needed to be spent in deep pandemic, which has put our lives upside euro that really go much farther than any soli- terms of health. And also despite the fact that down, there’s lots of rays of hope.... darity we’ve ever had in Europe. And who we were the country that per capita has spent The first one that I would like to mention would have expected that the [European] most to support the economy, close to €5,000 is that we have seen increased solidarity bet Commission would be allowed to lend on per inhabitant. And this investment in preserving jobs, in supporting small and medium ween people in the country of Luxembourg, behalf of the EU countries? increased solidarity in Europe, and a wake-up And then I mentioned the wake-up call for sized companies, even larger companies, was call towards climate change. Now, solidarity climate change. I think that this crisis and the the right answer in this very sudden crisis that between people because in the face of hun- lockdowns in many countries have proven has been triggered by the pandemic. dreds of deaths, in the face of the incredible one thing that climate sceptics had always commitment of the medical personnel, we contended. And that was that climate change It’s going to take a while to get everyone have had a society here in Luxembourg that was not due to human activity and economic vaccinated. So do you expect to keep a lot holds together. If I compare that to other activity, it was due to natural phenomenon. of the economic support programmes countries, [Luxembourg has demonstrated] Now we’ve had a life-size test, because the going for the rest of the year? a lot of common ground, a lot of solidarity. lockdowns show that when we reduce human When will they be cut? At European level, many would have anti- activity, the planet is faring much better. We’ve had a very pragmatic and step-by-step cipated before this crisis that if such a thing And [now] we can talk about numbers, which approach.... For the time being, some of these would happen, Europe would not be present, was your question. Yes, so, we’ve adjusted the support measures go until end of March. But would not rise up to the challenge. Exactly numbers. The deficit for last year, 2020, was we are already discussing to extend it to end the contrary happened. And as early as April expected to be around €5bn. And the deficit of June. And if necessary, well, we will extend at the level of [EU] finance ministers and then for the time being looks being around €2.4bn- it again. And I think the step-by-step approach later in July at the level of prime ministers, €2.5bn. And there’s still lots of expenditures is the right one to have. Because you also do not want companies to get addicted to support. Now, with all due respect, for some companies and enterprises, it is extremely difficult now, especially for those who have to remain closed. But even for those who can only function with strict limitations and constraints, it’s a very hard time. But obviously, this oxygen that we need to give to the to the economy is limited in time. And so we have promised, and we will keep that promise, that we’re going to support the companies as long as there are restraints and constraints. But then after that, we need to get again in a normal economic functioning.
“ The pandemic is just boosting those things that already had wind in the sails.” 92
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Pierre Gramegna
Pierre Gramegna poses for a portrait during an interview with Delano at the finance ministry in late January.
You’re not worried, though, that if the support programmes are wound up too quickly, maybe it’ll be a bit of a shock? Companies will still need a little bit of time to return to ‘normal’ otherwise they could have a cash crisis, kind of like in the beginning of the crisis. Well, I think this is part of the crisis. The immediate aftermath of the crisis, the weeks that follow, for me, are still like the immediate consequences. The goal of the support measures is neither to be stingy, neither to put our economy on a permanent oxygen lifeline. Finding the right balance is what we need to do here and we are committed to also organise the transition.
people keep their purchasing power. So even focus now is recovery. There’s plenty of time talking about tax rises now would not be smart to then see, when we’re at the end of this tunand would not be appropriate. I said that already nel, how we will deal with that. six months ago, and six months ago some people said ‘yes, but you need to deliver and Last year, there was some talk about act in the next couple of months and take deci- changes to estate, property and wealth sions’. I said, ‘we don’t know when the pande- taxes. You still have two-and-half years mic will be over. And when the immediate or so on your mandate. Can you tell economic consequences will be finished.’ We our readers: are you planning to change still don’t know that. We now have light at the these taxes during this government? end of the tunnel. But it will take time, it will The answer is no. Inheritance tax and wealth take months, many months, to conclude vac- tax are not in the government programme for cination programmes. So as long as the pan- the next two and a half years because they’re demic is not solved, one should not discuss not in the five-year coalition programme. So tax increases or changes in tax structures, on that’s very clear. This is not on the agenda. the one hand, and second, we should also make sure we have enough funding to cope with the Looking back at the past ten years, from The government has spent quite immediate difficulties of people and compa- your point of view, what’s changed the a lot of money to pay for this support. nies. And thanks to the very accommodative most in Luxembourg’s financial sector? Are our taxes going to go up? monetary policy of the European Central Bank, I would highlight three things.... One is we This is a very legitimate question. And I think we can now [borrow] at a very low rate. Luxem- have embraced transparency, exchange of that now is not the right time, neither to already bourg has experienced that now a couple of information, with not only with EU countries, make suggestions nor suppositions [about times as we are borrowing at negative rates. but with the rest of the world. And that was what] that could look like. I think what we And let’s not forget that talking about raising one of the first moves of the new government now need to ensure is that we’re going to mobi- taxes would really hurt the confidence of consu- back in 2013-14. And I remember that this lise the necessary amount of money to help mers and hurt the confidence of companies move was criticised by quite a few experts, companies and to help save jobs. So, help whom we need for the recovery. So the main and quite a few players. And today, I think SUMMER 2021
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Conversation Pierre Gramegna
there’s a general recognition that it was the right thing to do. And, on top of it, if you look at the financial sector today, it is healthier. And I would say more prosperous, and more competitive than it was before. So that brings me then to the financial sector itself, where I want to say two things. One is if you look at the fund industry ten years ago and today, two things happened. The alternative investment fund industry really took off, and we’re very well positioned in that. And the second thing is.... [in the funds sector] we’re at around €4.74trn-€4.8trn in assets under management and ten years ago, it was half [of that amount]. And the same goes for private banking, where assets that are being managed here are double of what they were ten years ago. And the third thing I would like to highlight is all the innovation that has taken place in the financial centre, and there I would like to highlight fintech, digital and green. Now fintech, we launched the Luxembourg House of Financial Technology back in 2017. And thanks to this private-public partnership, we’ve been able to attract dozens and dozens of companies.... obviously fintech brings you to digital. So these two things are very close. And we’re very well positioned there. Also in the context of Brexit, we’ve seen that we’ve been able to attract payment companies, regtech companies, insurtech companies to Luxembourg, and insurance companies at large. We have had a life-size test with Brexit, [to see] if we are attractive or not. And without
changing our legislation, we’ve been quite successful in making Luxembourg the hub for e-payment in Europe. And also I would say the hub for insurance in Europe next to London, which remains the largest place. And last but not least is obviously green and sustainable finance, which I’ve really put a lot of effort in, and where we have a lot to show.... the Luxembourg Green Exchange is the largest such dedicated stock exchange in the world. I mean, they are listing more than half of all the green bonds worldwide. Very few people realise that. The IMF, World Bank and European Commission, institutions like that use it, but investors from the US, from Asia use it.
Paris accord--and you know, Europe has committed itself be carbon-neutral by 2050, and we’ll reduce it by 55% in 2030—[and] to achieve that, there’s only one thing that needs really to happen: sustainable finance. If we do not achieve sustainable finance models that will help what you call the real economy to transform itself, then we’ll never reach it. What do you think the Luxembourg financial sector will look like a decade from now? It is difficult to guess how some things are going to accelerate. But building on what I just said, I think that the pandemic is just boosting those things that already had wind in the sails.... I think that we’re going to see a tremendous acceleration of digitalisation in financial services. And fintech is that. A considerable chunk of financing will build on two things; on the very low interest rates that we have now and which is going to last for quite some time. And the taxonomy of the European Union, which gives us a solution of what is green, what is climate compatible, and what is not, will give Europe a kind of competitive advantage and Luxembourg is at the centre of all this.
Luxembourg may have 50% of the green bonds in the world, but green bonds are a very small percentage of the global total. If you look ahead ten years, could you guess how much bigger sustainable investment can really get? I think we, if I may use this American expression, we ain’t seen nothing yet. In the sense that now green bonds are 2%-3% [of the overall world total]. 20% of ESG investing [editor’s note: 20% of global responsible investment funds, by assets under management] is taking place in Luxembourg, but the overall amount is still too little. So that’s why I’m saying we You think the EU taxonomy for ain’t seen nothing yet. I think we will have an sustainable activities will be like Ucits acceleration here that will be spectacular. And [the type of retail investor funds I think the pandemic will really boost that. that forms the backbone of Luxembourg’s Boost that, because we will have a recogni- current investment industry]? tion that to reach the ambitious goals of the Exactly. I use that in my speeches. I say that the Ucits story can be a forerunner of the taxonomy story. I really believe in that. The other thing is--I think we’ve been able in the last couple of decades, but especially in PRELIMINARY PUBLIC BALANCE SHEET the last [several] years--to strengthen the interGeneral government budget state of play, as of 31 December of each year. national attractiveness of Luxembourg to AmeThe government closes its fiscal year on 31 March. rican banks and Asian banks. And that is key. €18.8bn Source Luxembourg finance ministry This is our strength in Luxembourg. We are €19.8bn €21.2bn really open to the rest of the world. In the same way as [today] our Ucits are used from Hong €18.5bn €bn -€2.4bn Kong to South America, green finance with €1.3bn the EU taxonomy is going to be used from Asia 20 €12.9bn to America and maybe to Africa tomorrow. €13.1bn
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And what about you, Mr Gramegna? Where do you see yourself in 2031? I am going to switch from sustainable finance to sustainable agriculture. Because I would like to grow olive trees and make wine in a sustainable manner.
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Here in Luxembourg? Well, the wine you can definitely do here. The olive is more difficult.
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What kind of wine do you want to make? Great organic wine!
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Conversation
« La demande pour l’ESG vient de partout »
Kelly Hebert explique que la nouvelle directive assure la comparabilité des différents produits.
Une directive européenne impose désormais aux gestionnaires de fonds de préciser leur implication dans la finance durable. Le point avec Kelly Hebert, country head Belux et directrice de la distribution ESG chez M&G Investments. Interview JEAN-MICHEL LALIEU
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Photo HERVÉ THOUROUDE
Kelly Hebert
BIO
L’entrée en vigueur de la Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR), le 10 mars dernier, est-elle un événement important pour l’industrie des fonds d’investissement ? Oui, certainement. Elle concrétise une demande importante de la part des investisseurs, ces dernières années, d’obtenir plus de comparabilité, ce qui passe par plus de transparence. Nous avons vu la demande s’accroître fortement pour des solutions d’investissement plus durables. Or, si le thème était beaucoup discuté dans l’industrie financière, la finance durable n ’offrait pas de réels points de référence ni de comparabilité aux clients. Donc, si l’Union européenne veut concré tiser ses ambitions climatiques et durables, l’industrie financière a un rôle très important à jouer. Des montants de capitaux très importants y sont disponibles, elle a donc un pouvoir d’influence conséquent pour rediriger ces capitaux vers des projets et des entreprises qui permettront d’atteindre ces objectifs environnementaux et climatiques stratégiques. Qui dit nouvelle réglementation, dit inévitablement nouvelles contraintes. Qu’impose concrètement la SFDR aux gestionnaires de fonds ? Cette directive nous impose de divulguer de manière transparente un certain nombre de données sur notre approche de l’intégration des facteurs ESG et de catégoriser chacun de nos fonds sur nos documents marketing ou légaux. Elle donne un cadre de travail identique pour tout le monde. Si l’information fournie sur la durabilité devient donc comparable, la SFDR ne nous impose en aucun cas un standard minimum de comportement durable. Nous avons donc dû mettre à jour nos diffé rents documents contractuels (prospectus des fonds, sites internet, rapports marketing) qui, en fonction de la classification des fonds, doivent indiquer un certain nombre de données. Dans un second temps et d’ici fin 2022, la SFDR nous imposera davantage de granularité et d’indicateurs mesurables sur notre approche ESG au sein de chacun de nos fonds. Donc, une charge supplémentaire de travail ? Oui, absolument. Il s’agissait de données sur lesquelles on communiquait, mais pas de la manière dont l’exige la SFDR. Il a donc fallu dédier des ressources, des équipes ont travaillé nuit et jour, ces derniers mois, afin que nous soyons prêts à la date du 10 mars. C’est une directive qui a mis du temps à se mettre en place, jusqu’au moment où tout s’est accéléré. Mais c’est aussi une directive en plusieurs temps. Il a fallu bien comprendre ce qui devait être divulgué en mars 2021 et ce qui pouvait attendre 2022.
Parcours professionnel Elle rejoint le gestionnaire de fonds M&G en 2014 en tant que directrice commerciale Benelux. Elle avait acquis une expérience de 10 ans dans le secteur de l’inves tissement, chez AXA Investment Managers puis à La Financière de l’Échiquier. Formation Elle est titulaire d’un master of science en marketing international et dévelop pement commercial de la Skema Business School et d’une licence en administration des affaires de l’University of South Wales.
C’est donc une tendance faite pour durer… La demande n’est pas du tout retombée, effectivement. Tous les clients sont déjà en train de s’organiser par rapport à la nouvelle directive SFDR. L’ensemble de nos partenaires nous demandent des informations sur nos produits en rapport avec cette nouvelle directive. Au niveau des investisseurs institutionnels, la SFDR vient renforcer une tendance déjà bien installée. En Europe, on constate que 50 % de leurs investissements sont déjà gérés de manière durable. Mais ils vont désormais se concentrer de plus en plus sur l’investissement d’impact. Du côté retail, on assiste à un changement historique dans l’industrie. Les banques et compagnies d’assurances doivent revoir tous les produits qu’elles ont mis en avant par rapport à cette directive et vont certainement, elles aussi, devoir répondre à de nombreuses questions de leurs clients. Cela veut dire qu’on ne verra probablement bientôt plus de produits qui n’offrent pas une perspective durable, alors qu’il y en a d’accessibles. Les distributeurs vont revoir complètement leurs listes de produits en s’orientant vers plus de durabilité et d’impact investing.
Concrètement, quelles sont les obligations déjà en vigueur ? Depuis le 10 mars dernier, nous devons définir la classification des produits afin de pouvoir assurer de la comparabilité entre eux. Ceux-ci sont désormais divisés en trois catégories – article 6, article 8 et article 9 – selon le degré de durabilité que propose leur stratégie. Ces différents articles donnent aux investisseurs une indication sur le niveau d’intégration ESG, de durabilité ou d’impact Vu le succès, doit-on s’attendre dans la stratégie. Pour le 10 mars, tous les asset managers à un déséquilibre entre offre et demande devaient avoir déclaré, pour l’ensemble de de produits durables ? leurs produits, à quel article le produit corres Dans l’univers coté, un portefeuille 100 % pond. Dans un deuxième temps, en 2022, il durable et diversifié est désormais possible. faudra rentrer dans le détail et expliquer com- Au niveau des produits d’impact, en revanche, ment on peut affirmer que tel produit est c’est davantage accessible au travers d’actions, durable, d’impact ou intégré ESG. mais on observe plus de contraintes au niveau obligataire. Il y a une telle demande aujourd’hui Vous ressentez la pression pour les obligations vertes et sociales que le des investisseurs pour obtenir marché est peu liquide. La forte demande plus d’informations sur les produits ? fait aussi que ces produits ne sont pas tous Oui, c’est très clair. Depuis environ deux ans, très intéressants actuellement en termes de il n’y a quasiment plus un rendez-vous avec rendement et de prix et requièrent beaucoup un client où on ne nous interroge pas sur notre de sélectivité. On peut construire un portefeuille basé à politique en matière d’investissements s ocialement responsables ou sur la manière dont 100 % sur ces produits, mais c’est un marché qui doit encore grossir. Ce qu’il fait d’ailleurs on intègre l’ESG. La mise en place de ces directives a forte- de mois en mois. Les entreprises émettent de ment accéléré le phénomène, de même que plus en plus de ces obligations, au fur et à mesure la crise sanitaire qui sévit depuis un an. que la demande s’accroît. Les produits d’impact Les clients ont marqué leur envie d’avoir une sont au début de leur histoire, mais c’est la partie contribution environnementale et sociétale du marché qui grossit le plus vite et qui est la plus passionnante avec l’enjeu de mesurer via leurs investissements. la contribution nette de l’entreprise. Certains types de clientèle sont plus demandeurs ? La demande pour l’ESG vient de partout. Il y a une demande des clients finaux, mais aussi de la part des investisseurs institutionnels. Le assureurs, par exemple, vont avoir des respon sabilités de communiquer leur empreinte carbone et devront expliquer comment ils répondent aux enjeux climatiques par leurs investissements. 2020 a marqué un basculement, et 2021 verra la formalisation de ce phénomène. SUMMER 2021
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« Les banques sont plus résilientes, mieux préparées et mieux dotées en capitaux que lors de la crise financière de 2008 », souligne Pierre Ahlborn.
Conversation Pierre Ahlborn
« Le rôle des banques a changé » Née en période de grippe espagnole, la Banque de Luxembourg fête ses 100 ans en pleine épidémie de Covid. Le passage du siècle se fait donc en mode mineur. C’est l’occasion, cependant, de faire le point avec son CEO, Pierre Ahlborn, qui a vécu de l’intérieur ses développements au cours des trois dernières décennies. Interview JEAN-MICHEL LALIEU
Six mois après le confinement, quel bilan tirez-vous de la situation économique du Luxembourg ? On peut observer la très bonne résilience de l’industrie financière dans son ensemble, le secteur le plus important du pays. C’est une industrie de services, qui a pu facilement passer en mode télétravail. Elle n’a donc pas cessé de travailler, et les clients ont parfois eu plus besoin de conseils ou de financements, dans le cas des entreprises. C’est une chance pour le pays que tous ces acteurs de la finance aient pu maintenir leur niveau d’activité. Celle-ci a été très saine et très forte durant tous ces mois, ce qui devrait permettre à l’économie luxembourgeoise de mieux résister, aussi parce que beaucoup d’autres secteurs dépendent du secteur financier. Entre les mois de mai et d’août, le Luxembourg affiche d’ailleurs une création nette d’emplois, ce qui peut quand même étonner. Mais l’image générale est évidemment plus contrastée. Certains secteurs ont été lourdement touchés, et leur fragilisation aura des effets au niveau des bilans des banques au cours des prochaines années. Certaines entreprises ne pourront pas survivre, d’autres connaîtront des difficultés pour rembourser leurs crédits. Nous risquons ainsi de voir des provisions en augmentation, et donc la matérialisation de pertes au niveau des bilans des banques. Existe-t-il malgré tout un risque que cette crise touche le secteur financier ? Les banques sont plus résilientes, mieux préparées et mieux dotées en capitaux que lors de la crise financière de 2008. A priori, il n’y a donc pas de raisons de craindre une crise trop marquée. Elles pourront absorber une partie importante des pertes réelles liées à cette crise sans entrer en difficulté à leur tour. Au
Photo ANDRÉS LEJONA
Luxembourg, une demi-douzaine de banques seulement, dont la nôtre, sont actives dans les crédits aux entreprises. Mes confrères et moimême sommes d’accord pour dire que les impacts restent peu visibles actuellement, dans la mesure où les entreprises sont toujours « sous perfusion ». Probablement que la matérialisation des défauts ne s’observera qu’à partir de fin 2021. L’étalement des effets dans le temps sera une bonne chose afin de pouvoir mieux absorber le choc. Robert Reckinger
Pierre Ahlborn
BIO EXPRESS Origines Né le 6 juin 1962, Pierre Ahlborn est économiste et détenteur d’une maîtrise en sciences et géographie. Fidélité Entré à la Banque de Luxembourg en 1988, dès la fin de ses études, il intègre le comité exécutif en 1998. Le troisième homme En 2000, il est nommé CEO. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, il n’est que la troisième personne à occuper cette fonction, après Marcel Reckinger, à qui a succédé son fils, Robert Reckinger. Top 100 En 2014, il arrive en tête du Paperjam Top 100 des décideurs économiques les plus influents au Luxembourg, un classement effectué par un jury indépendant de la rédaction de Paperjam, et dont une nouvelle édition sera dévoilée le 16 décembre prochain.
En mai dernier, dans nos colonnes, vous vous étiez montré pessimiste, estimant qu’une partie saine du tissu économique serait détruite à cause de la crise sanitaire... C’est effectivement le cas. Je ne dispose pas de statistiques au niveau européen, mais aux États-Unis, elles montrent par exemple qu’un quart des restaurants sont en faillite déjà maintenant et qu’ils ne rouvriront pas. Dans le secteur du voyage, les chiffres sont encore plus dramatiques. L’impact du Covid est bien réel, on ne peut pas le nier, même si, au Luxembourg, nous avons la chance de connaître une bonne résilience grâce au secteur des services. Vous avez connu beaucoup de cas difficiles parmi vos clients ? Non. En ce qui nous concerne, nous leur avons toujours fait la promesse d’être proches d’eux tout au long du cycle de vie. Nous nous sommes donc montrés à l’écoute et très réactifs. Nous avons tout mis en œuvre pour pouvoir les aider rapidement à travers des moratoires ou la mise à disposition de lignes de liquidités. Le fait que nous soyons axés surtout sur les entreprises familiales, qui, d’un point de vue patrimonial, ont un comportement plus prudent, a sans doute permis d’éviter certaines difficultés. Les prêts garantis par l’État ont-ils rencontré une forte demande ? L’ensemble des mesures décidées par l’État ont été très utiles, très appréciées, et en partie consommées. On constate actuellement que la consommation des aides est inférieure aux budgets votés. Cela me semble normal : le gouvernement a tout simplement dédié des enveloppessuffisamment larges, ne sachant pas combien de temps la crise allait durer. Des moments diffi-
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Conversation Pierre Ahlborn
ciles pourraient encore survenir à l’avenir, et ces aides seront donc les bienvenues. UN SIÈCLE CHAHUTÉ
Au vu de la situation actuelle, de nouveaux outils devraient-ils être mis en place ? C’est difficile à dire actuellement, mais l’arsenal mis en place couvre déjà pas mal de besoins pour permettre aux entreprises de traverser la crise. Certaines aides spécifiques pourraient encore venir en aide aux secteurs les plus affectés. Vous avez entamé votre carrière à la Banque de Luxembourg il y a plus de 30 ans. Qu’est-ce qui explique cette fidélité ? J’ai d’emblée trouvé dans cette banque un esprit qui me correspondait. Et il n’a fait que se renforcer au cours de ces nombreuses années. Cette institution est une banque très humaine dans son approche. Les employés y sont très bien soignés. C’est pour nous une mission essentielle. Lorsque les employés sont bien considérés, bien traités et bien accompagnés, ils travaillent bien ensemble, et le client le ressent et en profite. Le succès commercial se renforce et, en fin de compte, l’actionnaire en profite. Ce cercle vertueux était déjà bien établi dans cette maison bien avant mon arrivée. Si on retourne un siècle en arrière, quel était le cœur de métier de la banque ? Avant tout, il est intéressant de noter que la banque s’est établie à Luxembourg en 1920, alors que la grippe espagnole sévissait. À l’époque, la banque était installée en Lorraine et cherchait à s’étendre. Elle a donc créé une succursale disposant de guichets à Luxembourg. Le CIAL (Crédit industriel d’Alsace et de Lorraine), son actionnaire basé à Strasbourg, a alors déve-
« N ous avions oublié à quel point notre santé et la planète sur laquelle nous vivons sont fragiles. » 100
Un groupe français Au sortir de la Première Guerre mondiale, en pleine pandémie de grippe espagnole, la Banque d’Alsace et de Lorraine crée une succursale à Luxembourg en 1920. Une banque locale En 1969, l’actionnaire, renommé Crédit industriel d’Alsace et de Lorraine, prend 30 % de la banque luxembourgeoise Mathieu Frères, créée en 1937, pour bénéficier d’une assise locale. En 1978, elle change son nom en « Banque de Luxembourg ». Crédit Mutuel De 1977 à 2002, la Banque de Luxembourg est sous le contrôle de Deutsche Bank. Elle est ensuite rachetée par le groupe français CIC, intégré au Crédit Mutuel.
loppé un réseau d’agences bancaires dans le pays, surtout dans le sud. Cette banque n’avait pas de spécialisation particulière. Cependant, après la Seconde Guerre mondiale, l’actionnaire a souhaité se recentrer sur la clientèle de Luxembourg-ville et ne plus rouvrir de guichets à travers le pays. Un changement stratégique ? L’objectif était de minimiser le risque, après deux guerres rapprochées. La banque a donc dû trouver d’autres opportunités de croissance et a passé les frontières pour attirer de nouveaux clients. Notre banque a donc bien su accompagner le développement de la Place : très tôt, nous avons été actifs sur le marché belge, ensuite en Allemagne et dans le reste de l’Europe. Nous avons aussi commencé à nous intéresser très tôt aux fonds d’investissement, l’autre grande branche de l’industrie financière luxembourgeoise. L’histoire de notre banque et celle de la place financière sont donc intimement liées. Mais si, au sortir de la guerre, perdre son réseau avait été vu comme un gros handicap, aujourd’hui, internet et les technologies modernes ont tout modifié. Ne pas avoir de réseau n’est plus vraiment perçu comme un problème.
pas sous le contrôle d’un actionnaire belge et présents à Luxembourg les intéressait particulièrement, nous sommes donc devenus le partenaire de nombreux agents de change belges au cours des années 1950-1960. C’est aussi grâce à cela que la banque a acquis peu à peu sa notoriété en B elgique. Quand je suis arrivé à la fin des années 1980, près de la moitié du fonds de commerce était d’origine belge. Ensuite, avec la disparition du secret fiscal, nous avons décidé de nous rapprocher de notre clientèle. Depuis 10 ans que nous y sommes établis, nous connaissons une forte croissance et attirons beaucoup de nouveaux clients. Mais vous n’envisagez pas de scénarios similaires dans d’autres pays ? Non, notre priorité est de nous développer dans notre bassin culturel, au Luxembourg et en Belgique. Nous avons aussi une importante clientèle d’origine allemande, mais nous ne prévoyons pas de nous établir dans le pays, premièrement, parce que les moyens de communication modernes permettent de rester en contact à distance avec les clients ; deuxièmement, parce que c’est un marché beaucoup trop vaste pour que nous puissions le couvrir entièrement. En France, nous avons récemment développé un fonds de commerce également, avec l’aide de notre actionnaire, le Crédit MutuelCIC, qui fait appel à nous dans le cas où des clients font face à une problématique transfrontalière, s’ils veulent s’internationaliser. Être intégré dans un groupe bancaire français, c’est un plus pour une banque luxembourgeoise ? Notre actionnaire a deux particularités : c’est d’abord une banque mutualiste qui appartient à ses clients. Elle bénéficie ensuite d’un fort ancrage régional. Elle propose donc un mode de fonctionnement décentralisé et tient compte des particularismes des différentes régions géographiques. Notre maison mère a toujours respecté ceux du Luxembourg et continue à nous accorder sa confiance. Notre banque a ainsi su se développer d’elle-même au cours des décennies tout en entretenant certaines coopérations très utiles avec sa maison mère. La volonté du Luxembourg de développer une place financière dans les années 1970 a-t-elle eu un impact fort sur le développement de la Banque de Luxembourg ? Notre banque est restée de taille relativement raisonnable jusqu’à ce que la banque privée se développe et, plus tard, l’industrie des fonds. Notre forte croissance a donc démarré dans les années 1980-1990.
Vous êtes présent au Luxembourg et en Belgique, à travers deux implantations. Avez-vous déjà envisagé de partir à la conquête de clients plus lointains ? En Belgique, nous sommes à Bruxelles et à Gand, pour être en relation avec nos clients francophones et flamands. Mais nous n’avons pas de projets dans d’autres pays. Si nous sommes bien implantés en Belgique, c’est que Marcel Reckin- Avec le début des Ucits ? ger – directeur de la banque après 1945 – a Les Ucits ont représenté une source de croisdéveloppé de bonnes relations avec des agents sance, mais nous ne nous sommes jamais de change à Bruxelles. Le fait que nous n’étions positionnés sur ce segment en tant qu’acteur
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Conversation Pierre Ahlborn
majeur, notamment en l’absence de volumes apportés par notre maison mère. Nous ne pouvions pas concurrencer les Américains, les Britanniques ou les Suisses, mais nous sommes encore aujourd’hui un acteur de niche reconnu pour son savoir-faire. Nos clients sont des gestionnaires d’actifs, des promoteurs de fonds innovants, dont les projets sont, pour la plupart, naissants. Nous sommes souvent le partenaire en phase de démarrage, et, la chance nous ayant souri, nos clients se sont très bien développés au cours des décennies. Comment voyez-vous l’évolution de l’institution bancaire en général au cours de cette décennie ? Tout d’abord, je pense que le pays dispose de tous les ingrédients du succès, je suis donc bien optimiste pour l’avenir de la banque au Grand-Duché. J’estime que le virage que nous avons entamé en abandonnant le secret fiscal et en faisant en sorte que nos banques soient conformes aux standards internationaux et aux changements sociétaux a été la condition essentielle du repositionnement de notre secteur au Luxembourg. Aujourd’hui, les banques jouent un rôle très utile pour aider à combattre le blanchiment d’argent, identifier les flux suspects et aider à la perception des impôts. Elles assurent donc de nouvelles responsabilités qui aident les États à mieux fonctionner. Ceci est, en quelque sorte, logique, dans la mesure où les banques sont des intermédiaires par qui passent les flux. La réputation de notre centre financier a ainsi bénéficié des réformes initiées, ce qui pose les bases d’un futur développement favorable. Vous envisagez un nouveau rôle pour les banques ? Nous disposons des bases d’un renouveau du secteur bancaire luxembourgeois. Les banques doivent non seulement aider à financer l’éco-
L’AVENTURE BELGE Si les relations avec la clientèle belge se sont intensifiées dans les années 1950, c’est en 2010, à Arlon, que la Banque de Luxembourg (BDL) a ouvert sa première succursale à l’étranger. Un pas rendu possible grâce au changement de plateforme informatique qui a permis de répliquer une entité hors du siège central. En 2012, la BDL pousse l’aventure jusqu’à Bruxelles et, en 2015, à Gand. Le bureau d’Arlon a alors été fermé, la clientèle francophone pouvant se tourner vers Bruxelles ou Luxembourg. La clientèle francophone, qui reste majoritaire, étant donné les liens plus étroits avec le Luxembourg, est plutôt composée de familles fortunées de souche ancienne, alors qu’en Flandre, elle vient surtout du milieu des affaires.
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nomie réelle, comme elles l’ont fait au cœur de la crise sanitaire, mais elles peuvent également aider le monde réel à mieux se développer, en facilitant la marche vers la finance durable. Selon moi, la justification de l’existence d’acteurs économiques dépend de leur utilité réelle. Il s’avère que le secteur financier dans son ensemble a connu des excès dans les années 2000 en se préoccupant plus de lui-même que du monde réel. Mais le rôle des banques a changé, condition nécessaire pour assurer leur développement au cours des années à venir. Le maintien des taux d’intérêt à des niveaux très bas a aussi demandé des adaptations aux acteurs bancaires. Le profit doit être cherché ailleurs que dans le rapport entre crédits et épargne... Oui, effectivement. Les taux d’intérêt, qui sont parfois négatifs, restent le vrai défi de l’époque. Mais nous observons que la rentabilité des acteurs de l’industrie financière reste résiliente, notamment au Luxembourg, parce que, à côté des revenus provenant des intérêts, une partie croissante des revenus provient des commissions liées à des prestations. Au cours des dernières années, nous avons assisté à une diminution de plus de 50 % des revenus d’intérêt, mais à une augmentation équivalente des commissions.
« Je suis optimiste pour l’avenir de la banque au GrandDuché. » et la solidarité, sont importants. Aujourd’hui, chaque pays doit évidemment songer à éponger ses dettes liées à cette crise, mais il faut garder à l’esprit que le réchauffement climatique représente une menace encore bien plus grave. Si le réchauffement se poursuit au rythme actuel, les hommes et les femmes de cette planète courront un danger important. La principale leçon à tirer de cette crise sanitaire, c’est donc celle de la fragilité de l’espèce humaine et de la biodiversité. Nous devons tout mettre en œuvre pour contrecarrer ce qui est en train de se produire.
Aujourd’hui, on parle de plus en plus d’open banking, de partage des données Il faut donc, plus que jamais, mettre avec d’autres acteurs. Ça vous fait peur ? en exergue les investissements durables ? Pas du tout. Nous sommes une des premières À la Banque de Luxembourg, nous avons choisi banques au Luxembourg à pouvoir offrir la de faire de l’investissement responsable et des consolidation des comptes et des portefeuilles. comportements durables un élément central L’open banking est une belle opportunité de de notre stratégie d’avenir. Tout ce que nous pouvoir mieux accompagner nos clients. Je vois entreprendrons désormais sera mesuré en donc cela plutôt comme une opportunité. Nos fonction des objectifs de développement durable clients sont souvent des familles multibancari- des Nations unies (ODD). Notre banque obtientsées. Si nous voulons les accompagner aux elle un meilleur bilan énergétique, amélioreniveaux familial et patrimonial, le fait d’avoir t-elle année après année son bilan d’émissions une vue sur l’ensemble de leur patrimoine nous de gaz à effet de serre, s’occupe-t-elle correctement de ses employés, etc. ? Tous nos fonds aide à mieux répondre à leurs besoins. sont labellisés UNPRI – United Nations PrinLa crise du Covid-19 risque de perdurer ciples for Responsible Investment (principes dans les prochains mois. Quelles traces pour l’investissement responsable des Nations laissera-t-elle dans la société ? unies) –, et nous visons par ailleurs toute une Comme je le disais au début de notre entretien, série de labels ISR. Mais les deux grands leviers il y a tout juste un siècle, le monde était confronté sur lesquels une banque a le plus d’impact sont à l’épidémie de grippe espagnole. Depuis lors, l’épargne et le crédit. Nous pouvons orienter le monde n’avait plus connu une crise sanitaire le client qui veut investir ses capitaux vers des de cette envergure, ou du moins, il avait su les projets plus responsables, mais aussi refuser éviter. Nous avions oublié à quel point notre certains financements sous l’angle des critères santé et la planète sur laquelle nous vivons sont de durabilité. Sur ces deux leviers, nous nous fragiles. C’est la plus grande leçon : l’humilité. positionnons comme un acteur qui prend en En quelques mois, la planète entière s’est rendu compte prioritairement les critères RSE. compte que l’on ne pouvait pas faire n’importe quoi avec notre environnement, nos ressources et notre santé. J’espère que cela nous permettra de prendre conscience que beaucoup d’autres sujets, comme la juste répartition des ressources
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Chloé Reuter has been living in Asia since 1993 and is a sought-after keynote speaker on the luxury market.
Conversation Chloé Reuter
“There’s some great creativity coming out of China” Luxembourg national Chloé Reuter is at the forefront of promoting international luxury brands in China through her Shanghai-based communications agency Gusto Luxe. She talks about her business experience and the rise of luxury in the middle kingdom. Interview Duncan Roberts
Photos Graeme Kennedy
You started your career in journalism loved nice things. But it was never really some- the one thing that probably really helped with in Tokyo, why did you then switch to thing I set my mind to do. Basically, what this whole endeavour was I have truckloads communications and end up in Shanghai? happened is that after almost five years at of optimism and passion, and bucketloads of I’ve always been a real news junkie… journal- DDB, I actually had small children at the time, naivety. And I think that all of those three ism was the most perfect job, because you and I wanted to have a bit more freedom. So, combined really helped to just sort of make have to want to understand more about issues I decided that I should set up my own busi- it happen. Certainly, it was pretty tough at and what’s going on, and you want to meet ness, so I could be a bit more flexible. And times, really quite a roller coaster. people and understand their stories and moti- then, 2010 was the Shanghai Expo. There vation. [In Tokyo,] I was covering mostly news were a lot of brands coming in, looking to You have said, in a previous interview, and financial news. But the key issue for me figure out how to get a bit more momentum that learning from failures and moving on was that a lot of what we were covering was in China. And then, Vogue China started, and is essential to success as an entrepreneur. about China. So, there I was in Tokyo, having all these luxury media sprang up. So, I think But that takes a certain amount of a fantastic time, but I thought, ‘I’ve got to get it was luck that I was around at that time. self-reflection and candour. Are those myself back to China, because that’s where With my background, I thought that I could qualities that you think successful business people generally have? the story is happening.’ I had majored in Chi- bridge brands into China. I mean, I think everyone makes mistakes, nese when I was studying at university. I had always wanted to go to Shanghai…I kind of When you first established Reuter Commu- right? The most important thing is to recognise that, learn from it and move on. I think got diverted by Tokyo. And I’m really happy nications, what was your five-year plan? I had that experience. But when I was ready I didn’t actually have any plan at all. I think you need to be eternally optimistic and posto come back to China properly, at the begin- I jumped right in at the deep end. And I think itive to be an entrepreneur. Because one of your number one roles is, you’re carrying all ning of 2005, I knew that it would be for the these people with you. And you’ve got this long term. vision of what you want to do. It takes a lot I just fell in love with Shanghai when I was 19 and studying in Beijing. I think it was the of energy. So, you are constantly coming into CHLOÉ REUTER romance of this European feeling in some parts the office and cheerleading everyone along. That’s why I go to bed at 9pm, because I’m of the city, coupled with real China, and then Originally from Luxembourg and the UK, Chloé Reuter is so done by the end of the day. I joke kind of, this incredible accelerated development that founding partner/vice chair of but it’s true. even then was palpable. Gusto Collective, Asia’s first I wanted to create a business that would I think, to me, the two [journalism and combrandtech holding company, and founding partner of Gusto munication] are very much linked. When I arri be really profitable and successful but would Luxe, which represents brands ved in Shanghai, it wasn’t as obvious to move be built on kindness, because I’ve worked for including Sotheby’s, Harrods, into a similar reporting and television news role, a lot of people who weren’t particularly kind Estée Lauder Companies and Swarovski. because there weren’t so many opportunities. and didn’t always listen. And I felt that there I was then offered a position to do corporate was another way to do things--you don’t have She previously worked as communications at creative agency DDB. a journalist before heading up to be, you know, a prat if you’re going to be DDB China Group’s corporate a CEO. communications. Had the luxury industry always been I was very lucky that I’ve always had an Fluent in English, French, Italian, of interest? incredibly supportive husband. I don’t think Spanish and Mandarin Chinese, I don’t think I ever thought about it in that I would ever have done the business if he she was named one of 2019’s sort of way. I mean, of course, I’ve always hadn’t been there. “women to watch”by Luxury Daily. SUMMER 2021
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Conversation Chloé Reuter
What experiences did you have building a business in China?
-23%
Shrink in global luxury market in 2020
+48%
Growth of luxury market in China in 2020
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Year when China is predicted to be the world’s biggest luxury market
I think that one of the most glaring differences is that, as a woman in China, I think the sky’s the limit. Being a woman in China doesn’t stand in the way of anything, whilst I think, purely from having worked in Japan, that it’s a country where women are not given as many opportunities. There’s actually a Luxembourger, Rupert Hoogewerf, who publishes the Hurun China Rich List. And he also publishes a list now of the world’s richest women, and the majority of self-made female billionaires are all Chinese [9 of the top 10, and 61 of the top 100 are Chinese, according to the report published in March 2020]. When Mao stood up in Tiananmen Square and declared the founding of the People’s Republic of China, one of his key messages was ‘women hold up half the sky’. And when you look at the number of Chinese entrepreneurs and designers and women in tech, it’s fantastic what’s happening here. So, what do you think of China’s reputation around the world, then? Some of it has been quite negative, in recent years. I think there’s no country in the world that doesn’t face some sort of criticism from some-
“I think you need to be eternally optimistic and positive to be an entrepreneur.” 106
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body or either, right? My own experience of living here is incredibly, incredibly positive. I live in a city of 24 million people, and I have never felt unsafe walking around late at night. To me, that’s amazing. And from a business perspective, I’ve never had any issues with anyone or with different departments, from a government perspective. There’s a lot of positive here, for instance in terms of social mobility. I think through sheer hard work, and grit, you can really do great things here. Whilst I think, in a lot of other countries, you don’t have that sort of social mobility, it just doesn’t happen. On the whole, you’ve got a middle class that is educated, and growing every year. What have been the main shifts in terms of customer expectations that you have noticed during your 15 or so years in the business? What we were doing 10 years ago is completely different from what we are doing now. Today, we are working with some of the world’s largest and leading luxury brands and groups. And you know, the budgets are much bigger, expectations, return on investment… everything is bigger. We are offering them everything from consulting to digital to marketing. I feel like the agency model is on its way out.I think that our kind of business needs to really be able to demonstrate how we are affecting the bottom line of our clients. And I think, in order for us to do that, we need to have more data, more insights, more of our proprietary tech tools, which we’re developing And when it comes to, you know, the market, I think the potential is massive. When you look at people’s appreciation of lifestyle, of experiences in travel or food and beverages, of everything to art and design, I think it actually means that more and more brands are now looking at China and thinking, wow, what should we be doing more? Because they’re realising that, you know, this is really the only market where things are moving. How was the luxury sector impacted by the pandemic? Did it require a radical rethink of strategy? I think that you can prepare for a lot of scenarios, and yet, the pandemic was never on a list of anything I’d foreseen. And I can safely say it was incredibly stressful and taxing. I ended up getting stuck outside China for six months until July. As a senior leadership team, we decided we were not going to cut anyone’s salaries, and we were not going to sack anyone, even though, obviously, we had a lot of cancelled work and projects. So, my business partner and I stopped taking salaries completely. And we kept the entirety of our staff throughout the pandemic. And I’m super proud of that.
Bain & Company “China’s Unstoppable 2020 Luxury Market”; Financial Times
Now, you have been acquired by Gusto Collective. Was it difficult to let go of the Reuter name? It’s funny, because that’s exactly what my mum was like--‘oh, how are you changing the name?’ I actually think it was something I was so ready to do. It’s quite heavy having your name on the door. And that name served us extremely well. Because, in the early days, people thought we were maybe part of Reuters. And that got us a few clients through the door. And you know, of course, to a certain extent, the buck still stops with me. I’m a founding partner of Gusto Luxe. I think not only is it exciting, because we’ve joined this new holding company called Gusto Collective, which is a startup holding company trying to do something very innovative and more tech- and data-grinding focussed, which I think is the way that our business needs to shift. And to be honest, it’s been really seamless. I’m still here, I’m still Chloe Reuter. I just now work for Gusto Luxe, and not Reuter Communications.
CHINA AS A KEY LUXURY MARKET
Sources
You built up a business with 120 employees with presence in four locations. What was the challenge in maintaining employee engagement as the company grew and spread its wings? Well, honestly, the big secret is finding people who are smarter than yourself, and hiring them. Right? Because we don’t have all the answers. I certainly do not. And I’ve been incredibly fortunate, especially five years ago when my business partner, Nick [Cakebread], joined me. He is brilliant, and I learn from him every day… not quite sure what he learns from me. I think that the only way you stay ahead in any business, and especially in China, is through constant evolution. The market moves so fast, and that means that your business has to move that fast. Because if you’re still going to be relevant to clients, you need to be evolving your services, evolving your talent, bringing on different kinds of people. Because no successful business is built on just one person.
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Conversation Chloé Reuter
Chloé Reuter says she wanted to create a business that would be successful but would be built on kindness.
We also started issuing a daily newsletter, a sort of covid watch newsletter, that I think a lot of clients found useful. China managed to contain the situation incredibly well. And so, what you have is you have a market that has come back more buoyant and even more resilient than ever before. You’ve got luxury breaking all records. I mean, of course, you don’t have people travelling overseas to buy luxury. But you also have a domestic travel market, which is stronger than ever, as people explore China and stay in luxury hotels. Even the other day, I was in a very nice shopping mall and they were queuing outside Chanel and Dior and all the top brands.
tion in China. But to be honest, I think Luxembourg has a positive reputation all over the world, right? They’ve got a very active consulate in Shanghai and embassy in Beijing. They are on WeChat and Weibo. You know, they’re using social media channels to reach out and hook people into events. They’re pretty cool, I’d say, and the consul generals who they’ve had for the last few years have all been very young and very dynamic, bringing real energy and momentum to their mission here.
Chinese brands and designers are really starting to make waves. How are they differentiating themselves? There’s some great creativity coming out of Do you keep in touch with what’s China. I don’t just mean fashion brands. And happening in Luxembourg and they have a serious advantage because you’ve its relations with China, especially got people here who are really proud that they in the world of finance? We do some work with Luxembourg for Finance. are Chinese. And these homegrown brands are We look after their communications when better at communicating through all these social they do trade missions with the likes of Pierre media channels in China than any Western Gramegna and Nicolas Mackel. I think that brands. And they are super flexible. They do Luxembourg has a very, very positive reputa- really great collaborations when it comes to 108
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finding opportunities to tap into different types of audiences. That can be a makeup brand teaming up with a big museum, for example, for a special collection inspired by some paintings. I think that the codes of luxury are quite different here. And I think that the way people wear luxury is different. So, you might have someone who’s marrying Dior with a Chinese fashion designer and mix and matching. So, I’m really, really encouraged and excited by all of these Chinese brands. So, could that be a future for your company, doing the reverse of what you’re doing now? Have you been reading my emails? That’s exactly what we’re doing right now. I’m pretty excited about this. We are actually starting to work with homegrown brands to help them go outside, yes.
HERINGSDORF Copyrights: TMV/Bley
DIRECT RETURN FLIGHT FROM LUXEMBOURG
SUMMER 2021 - EVERY SATURDAY
Ma maison
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Depuis 2014, le produc teur Donato Rotunno habite une maison de ville située en coin de rue. Une maison réalisée au fil du temps. Ici, il n’y a pas de chichis. La maison dégage ce caractère de franchise qui fait qu’on s’y sent immédiatement bien. Une mai son avec une personnalité, celle de son propriétaire, le producteur de cinéma Donato Rotunno. « J’ai acquis, il y a plus de 20 ans, une vieille maison, après que
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ma mère eut beaucoup insisté, se souvient, un peu amusé, celui-ci. Après l’avoir louée pendant un temps, j’ai voulu y habiter. Mais elle était très abîmée. Aussi, j’ai pris la décision d’en construire une nouvelle, avec l’aide des architectes Teisen & Giesler. » Commence alors une réflexion sur ses besoins réels : il souhaite donner beaucoup d’importance à l’espace de vie et à la cuisine. « La maison s’est construite en parallèle de mes moyens financiers, progressivement. J’ai investi là où je pensais que cela valait la peine. Pour le reste, on trouve des solutions. Et la construction d’une maison, c’est un peu comme faire un film : il y a différents corps de métier qui doivent travailler ensemble, avancer vers le même objectif. » Son objectif pour 2021 : végétaliser la maison, à l’extérieur et à l’intérieur. Auteur CÉLINE COUBRAY Photos ANDRÉS LEJONA
COIN PERSONNEL 110
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5 1 Au lieu d’avoir un jardinet ou une terrasse, l’extérieur est aménagé en plage, avec du vrai sable fin ! 2 La cuisine est très importante pour Donato Rotunno, et c’est un espace pour lequel il n’a fait aucune concession. La hauteur est adaptée à sa taille, il a insisté pour avoir une plaque au gaz, et la fenêtre d’angle cadre la vue. 3 Donato Rotunno possède une immense collection de vinyles, qu’il écoute dans l’espace de vie. Une bibliothèque entière leur est dédiée, mais on en trouve aussi ailleurs dans la maison, jusque dans la cave. 4 Dans cet espace partagé par toute la famille, au troisième et dernier étage, on trouve le bureau et la télé. Et la grande terrasse donnant sur les toits du quartier offre un espace extérieur très apprécié aux beaux jours. 5 L’escalier est en béton avec une finition centrale en métal. Pas besoin de garde-corps, et il est suffisamment large pour être confortable. Le coffrage réalisé avec des planches de bois est laissé apparent.
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Mon style
Maddalena Oliveira Designer et fondatrice Manalena Concept Store Comment définiriez-vous votre style ? Personnel et expressif. Que vous inspirent le denim et ses variantes ? Je pense à son histoire, où se mêlent plusieurs pays et villes, dont Gênes, qui ont fait de ce tissu de travailleur une icône de la mode et du quotidien au fil des générations. Quelle pièce iconique de votre garde-robe aimeriez-vous transmettre ? Ma jupe trapèze mi-longue, taille haute, en similicuir et boutonnée à l’avant par des boutons dorés… « So eighties » ! Que porter pour une occasion exceptionnelle ? Une belle tenue élégante avec une touche d’originalité et de modernité, qui en jette et nous met en valeur, sans oublier un parfum et un bijou. Un cocktail de self-confidence et d’empowerment. Quels sont vos designers préférés ? Au Luxembourg, j’aime Reza Kianpour pour son inspiration « out of the box » et ses créations multidisciplinaires. De quels univers, en dehors de la mode, vous inspirez-vous pour votre style ? La filmographie italienne et française des années 60, la nature, l’art et l’architecture. Une adresse shopping coup de cœur au Luxembourg ? C’est un peu comme demander à un boulanger où acheter son pain ! Mais je dirais The Modu Shop et Botari, où je trouve de très jolies choses...
Maddalena a été photographiée au Grand Théâtre de la Ville de Luxembourg.
Indémodable denim 112
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Mon style
Pit Romersa Fondateur et CEO Thalus – Water in a Box Comment définiriez-vous votre style ? Clean, simple, avec des essentiels. Tout en en faisant quelque chose de canon. Que vous inspirent le denim et ses variantes ? C’est un indémodable, des modèles sur papier glacé aux ouvriers. Le denim raconte des histoires ! J’apprécie aussi beaucoup sa solidité, et donc son caractère durable. Quelle pièce iconique de votre garde-robe aimeriez-vous transmettre ? J’ai cette veste noire Boris Bidjan Saberi complètement démente et iconique. Elle est assortie d’un pantalon qui me donne envie de marcher dans la rue comme dans le clip de ‘Bitter Sweet Symphony’. Quels sont vos designers préférés ? Je suis de plus en plus fan de Haider Ackermann. Il comprend parfaitement la complexité de la simplicité et transforme cette interaction en magie… De quels univers, en dehors de la mode, vous inspirez-vous pour votre style ? Cela peut varier du tout au tout : d’un film japonais à une peinture de Matisse, d’un drag show aux Beatles… Je ne me mets aucune limite ! Quel accessoire ne pouvezvous absolument pas prêter ? Mon collier et ma clé en pendentif, reçus de ma mère. « Way too precious, darling ». Une adresse shopping coup de cœur au Luxembourg ? J’aime particulièrement explorer la scène vintage : il y a des marchés de seconde main locaux qui voient le jour un peu partout dans le pays. Auteur FABIEN RODRIGUES Photos GEOFFREY MASURE
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Pit a été photographié au Grand Théâtre de la Ville de Luxembourg.
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08_legende de cette photo où l'on apprend qu'Anna porte un manteau en fausse fourrure de chez Zara, des escaprins Versace, un jean Reiko et un sac à main Gucci.
RECOVERY AWAR DS
Choose your category and participate in the Recovery Awards contest to offer your company the visibility it deserves...
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Innovation
Digitalisation
Solidarity
Green / Circular economy
... or name the company that you think deserves recognition for overcoming the crisis by reinventing itself or by showing resilience or solidarity. Awards ceremony with attendance of Mr Franz Fayot, Minister of the Economy, on 2 December Deadline for application submissions
FRIDAY 17 SEPTEMBER
G O L D S P O N SO RS
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Ma collection
voue ros mbel é ric Hu ulte aux h é d é r c F r. ritable t Mortime é v n e u Blake D B e d
Costume de tweed et pipe au bec 116
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Frédéric Humbel aime le tweed. Beaucoup. Et il porte ce tissu en laine dès qu’il le peut, et que la météo lui en donne l’occasion. Tout comme il aime fumer la pipe, un accessoire qui va bien avec le tweed, soit dit en passant. « Lorsque j’étais enfant, j’étais fasciné par Blake et Mortimer, se souvient Frédéric Humbel, coordinateur général du Minett Park. J’aimais leurs aventures, bien entendu, mais aussi la manière dont ils s’habillaient, leur élégance, leur prestance. » Des héros qui fument également la pipe, une autre passion de Frédéric Humbel, tout comme Sherlock Holmes ou le commis saire Maigret, deux autres figures littéraires qu’il apprécie. « J’aime le tweed, car c’est un tissu qui résulte d’un travail manuel, qui est le fruit d’une tradition, et dont les motifs et détails varient en fonction de son lieu de fabrication. J’apprécie les choses qui ont une histoire, et aussi que l’on peut réparer. Bien qu’il soit vu comme un tissu noble aujourd’hui, c’est initialement un tissu décontracté, fait pour aller chasser ou pêcher, un tissu pour les ‘sports’ d’extérieur. » Ce que Frédéric Humbel aime également avec les costumes de tweed, c’est qu’ils sont combi nables entre eux. « Cela permet, avec seulement quelques pièces, de composer des tenues bien plus variées. » Cette même attention aux matières et au savoir-faire, il la retrouve dans la fabrication des pipes, qu’il collectionne aussi. « Je dois en avoir environ 60, que je fume toutes régulièrement. Et le moment que je préfère pour fumer la pipe, c’est quand il fait très chaud, en plein été. » Auteur CÉLINE COUBRAY Photo ANDRÉS LEJONA
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Ma recette
Johanna Kinkela, compliance officer pour un gestionnaire d’investissement, passe en cuisine avec enthousiasme pour réinterpréter un plat gourmand inspiré de son héritage culturel et familial.
Peler et émincer l’oignon. Peler et hacher l’ail. Dans une casserole profonde, faire revenir l’oignon dans de l’huile d’olive jusqu’à ce qu’il devienne translucide. Y ajouter la tomate et son jus à feu vif, puis baisser le feu et couvrir partiellement. Laisser mijoter une vingtaine de minutes en mélangeant. À cette sauce tomate, on ajoute délicatement le poisson fumé et la pâte d’arachide (par petites cuillères). Laisser mijoter à feu doux-moyen pendant une autre vingtaine de minutes en mélangeant de temps en temps. Ajouter de l’eau si la sauce réduit trop pendant ces cuissons.
Pour 6 personnes Préparation : 40 minutes Cuisson : 45 minutes POUR LA RECETTE 4 50 g d’épinards en branches 1 50-200 g de chair de poisson fumé 1 20 g de pâte d’arachide 3 00 g de tomates concassées 4 bananes plantain mûres et 2 bananes plantain un peu moins mûres 1 oignon 2 gousses d’ail H uile d’olive 1 piment lampion frais 1 bouillon de bœuf, poulet ou légumes S el, poivre
Dix minutes avant la fin de la cuisson, ajouter délicatement les épinards préalablement nettoyés et le piment lampion entier pour relever le tout. Ce n’est pas obligatoire si vous n’aimez pas la nourriture épicée. Enfin, rajouter bouillon, sel et poivre en fin de cuisson. Pour la purée de plantain : retirer avec un couteau les extrémités des bananes plantain et couper chaque banane en deux. Mettre les morceaux de banane dans une grande casserole, couvrir d’eau et porter à ébullition pendant une vingtaine de minutes. Il faut que les bananes soient bien tendres, comme pour une purée de pommes de terre. Égoutter, laisser reposer et passer au mixeur.
POUR LE VIN V in Orange 2016, Domaine L&R Kox
Servir le tout en deux couches avec un emporte-pièce.
Épinards façon fumbwa congolais 118
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La cuisine congolaise est difficilement exacte en termes de temps ou de quantités. Ne pas hésiter à observer et à goûter pour rectifier cuisson et assaisonnement en fonction de votre instinct et de votre goût ! Bon appétit...
Auteur FABIEN RODRIGUES Photos ANDRÉS LEJONA
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Ma recette
Giovanni Farinella, senior product manager chez Amazon et fondateur de The Grapeist, replonge dans ses racines siciliennes pour s’essayer à une création intuitive et savoureuse.
Commencez par vider et laver les sardines : ôtez les têtes au tranchoir et ouvrez les poissons en deux à la manière d’un livre, puis glissez votre doigt entre les deux moitiés et retirez l’arête centrale. Le tout sous un filet d’eau froide afin de bien nettoyer la chair tendre des sardines. Réservez. Émincez les cébettes et versez-les dans une poêle avec de l’huile d’olive et un peu de garum – ou, à défaut, quelques anchois que vous pouvez laisser « fondre ». Laissez cuire 10 minutes à chaleur moyenne. Ajoutez les sardines, ainsi qu’une poignée de raisins secs et de pignons de pin pour le côté aigre-doux typique de la cuisine sicilienne... Laissez à nouveau cuire 10 minutes.
Pour 4 personnes Préparation : 30 minutes Cuisson : 12 à 15 minutes POUR LA RECETTE 3 20 g de bucatini 8 00 g de sardines fraîches 3 00 g de fenouil sauvage U ne petite botte de cébettes (oignons jeunes) Q uelques gouttes de garum (ou colatura di alici en épicerie fine italienne) C hapelure (maison si possible) R aisins secs P ignons de pin S el H uile d’olive
Pendant ce temps, blanchissez le fenouil sauvage dans l’eau salée, puis rincez-le, épongez-le et hachez-le au couteau. Gardez l’eau de cuisson du fenouil pour cuire vos bucatini dans la foulée. Dans une petite poêle, toastez la chapelure à l’huile d’olive jusqu’à ce qu’elle brunisse. Mélangez bien pour l’empêcher de brûler et de devenir trop amère.
POUR LE VIN I f God Exists, I Hope He Has A Good Excuse, riesling nature du domaine tchèque Milan Nestarec, chez The Grapeist.
Une ou deux minutes avant la fin de la cuisson des pâtes, selon le temps indiqué, versez les bucatini dans la poêle où se trouvent les sardines. Ajoutez une louche d’eau et le fenouil haché, augmentez la température de cuisson et finalisez celle-ci avec un sauté léger. Servez dans une belle assiette creuse et dressez avec la chapelure toastée. Buon appetito!
Pasta con le sarde 120
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Auteur FABIEN RODRIGUES Photos ROMAIN GAMBA
SAISON 13 2021
Les temps forts Selected highlights
10×6 Mobilité
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Vers un Luxembourg/une Grande Région décentralisé(e)
SEPTEMBRE
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SEPTEMBRE
LU N D I
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MBA Highlights
Formation organisée par Solvay
SEPTEMBRE
Paperjam Real Estate Seated Dinner Party avec Eric Lux, Olivier Bastin et Jacques Brauch
Crise du logement : qui freine ?
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O CTO B R E
10×6 Entrepreneurship
JEUDI
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CSR strategies
O CTO B R E
Club Talk
avec Nasir Zubairi, Laurent Kratz, Nadia Manzari et Luc Falempin
How to regulate crypto-assets without killing them JEUDI
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N OV E M B R E
en présence du ministre de l’Économie Franz Fayot
Table ronde
avec François Trausch
M E RC R E D I
M E RC R E D I
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N OV E M B R E
10×6 Cybersecurity 10 shades of risks
Paperjam Recovery Awards Ceremony and gala dinner
JEUDI
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D ÉC E M B R E
JEUDI
Start-up Stories Awards PLUS D’ÉVÉNEMENTS SUR PAPERJAM.LU/CLUB
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D ÉC E M B R E
#SpottedByTravellers Join the Luxair Spotters community and your photos may be published in this magazine! Rejoignez la communauté des Luxair Spotters et vos photos seront peut-être publiées dans ce magazine !
This spot is something not to be missed. The view is unforgettable. It’s like a little heaven on earth! The place is even better than on the photo. If you haven’t planned your summer vacation yet, you should visit Gorges du Verdon. You will fall in love with this place!
GORGES DU VERDON spotted by coding.girl
ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE, FRANCE
We took the hop-on hop-off tour through the city to get a higher (and maybe cleaner/better) view. I recommend taking the bus, so that you can enjoy the view from the rooftop. PARIS, FRANCE
PARIS spotted by POLI_D
COPENHAGEN spotted by MT
I just took the picture while having a beer sitting down in a bar close to the Burj Al Arab. 40 degrees outside. BURJ AL ARAB, DUBAI
Walking around all of Copenhagen, you come across streets like Gammel Mønt, making you realise how magical the whole city is if you take the time to look around you. COPENHAGEN, DENMARK
DUBAI spotted by PEDRO NETO
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Financial Services from a different angle Sustainable Finance: seize the opportunity to grow your business
#FinanceInFineHands Olivier Carré, Financial Services Leader +352 49 48 48 4174 | olivier.carre@pwc.com
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