PA P E R JA M . L U • JA N V I E R 2018
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ÉDITO
plus qu’une course aux taux Thierry Raizer Rédacteur en chef
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L
a fiscalité n’est plus placée en tête de gondole par les opérateurs privés et publics pour convaincre une entreprise ou un acteur de s’établir au Luxembourg. Leur approche, comme ils le soulignent, a évolué depuis plusieurs années. Un changement de paradigme quelque peu forcé sous la pression internationale, mais qui est salutaire, ne fut-ce que pour l’image du pays, encore (trop) souvent écornée. Harmonisation et transparence sont les deux piliers sur lesquels une majorité de pays membres de l’OCDE bâtissent leurs relations d’affaires. Dans ce contexte, le Luxembourg veut faire figure de bon élève pour rester dans les rangs des pays compliant qu’il a intégrés à force d’efforts et d’échanges de données. La fiscalité ne serait donc plus l’arme absolue dégainée par les États – petits ou grands – pour renforcer leur attractivité. Du moins en apparence. La publication le 5 décembre dernier par l’Union européenne d’une liste de 17 juridictions jugées « noires », à savoir non coopérantes ou opaques quant à leurs pratiques fiscales, offre une vision en trompe-l’œil du combat que mène l’UE contre la fiscalité « agressive ». Grenade, la Mongolie, la Tunisie, la Barbade et bien entendu le Panama figurent sur cette liste âprement négociée. Le Qatar y aurait échappé de justesse. Les Émirats arabes unis y figurent. Mais qu’en est-il des États-Unis qui n’ont pas adhéré à l’échange de données dans le cadre de Beps ? En revanche, la première puissance mondiale est sur le point de boucler une réforme fiscale sans précédent, qui serait la première réalisation marquante de l’imprévisible Donald Trump. L’administration du président américain projette une baisse notoire de l’impôt des sociétés,
de 35 à 20 % à partir de 2019. Autres mesures craintes par les opérateurs internationaux et européens en particulier, une imposition minimale sur les bénéfices des filiales de groupes américains à l’étranger et, à l’inverse, une incitation à rapatrier leurs profits accumulés à l’étranger. « L’idée derrière cette réforme est (…) de rapatrier du business américain aux États-Unis », note Marc Schmitz, tax leader d’EY Luxembourg, interrogé dans ce numéro. Les impacts de telles mesures seront à jauger dans le temps, mais la publication de la liste noire, d’une part, et la réforme américaine, d’autre part, montrent que la fiscalité reste au cœur même de l’agenda politique à l’échelle internationale. Craignant que l’Angleterre sorte la carte du dumping en marge du Brexit, les acteurs de la Place luxembourgeoise réclament avant tout une sécurité juridique au gouvernement en place et à l’équipe qui suivra fin 2018. Plus qu’une course aux taux, les investisseurs attirés par un Luxembourg à l’appareil étatique business friendly questionneront leurs interlocuteurs ministériels quant à leur vision de la fiscalité à l’aune de leur mandat et au-delà. Entre la fin du symbolique impôt sur la fortune des sociétés ou l’adaptation des crédits d’impôt à la nouvelle économie, les partis politiques ont tout intérêt à s’atteler rapidement à la matière fiscale qui ne doit pas être reléguée au second plan de la campagne parce qu’elle suscite débat. Les entreprises qui s’étendent à l’international et créent réellement de la valeur par des emplois recherchent plus que des petits coins de paradis : des dirigeants capables de les comprendre. La conversation continue en ligne : @paperJam_lu
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Janvier 2018 — Tax & Legal —
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SOMMAIRE
TAX & LEGAL Janvier 2018 Big Four
Dans une autre league Les changements réglementaires affluent depuis 10 ans. Wim Piot, tax leader et managing partner de PwC Luxembourg ; Marc Schmitz, tax leader chez EY Luxembourg ; et Raymond Krawczykowski, tax leader, Deloitte Luxembourg, font le point sur leur profession, qui transite du conseil à de plus en plus d’administratif.
20 Radar
Conseils
Dans les coulisses
Imposition des sociétés, Big Four et Gafa… Quelques chiffres sur la fiscalité et ses métiers au Grand-Duché.
Atoz Tax Advisers dresse une liste de conseils et d’éléments à avoir sur son radar en 2018.
En 2018, Arendt & Medernach se lance un nouveau défi : celui de mettre en place des espaces de collaboration virtuels.
Le poids des taxes
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Ce qui vous attend en 2018
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Business
Réforme fiscale
S’adapter sans faire de vagues
Un facteur-clé pour rester compétitif
Pour préserver l’attractivité du pays, le défi est de procéder désormais aux réformes qui s’imposent, sans verser dans l’excès, de manière agile et opportune.
La réforme fiscale de 2017 a permis au Luxembourg de ne pas se faire distancer par ses concurrents. Mais flexibilité et inventivité restent de mise pour rester compétitif.
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Next steps
Esprit collaboratif
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« L’avocat a un avenir prometteur » François Prum, bâtonnier au Barreau de Luxembourg, répond à la question : « Comment envisagez-vous l’avenir du secteur juridique ? »
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Interview
« La digitalisation bouscule les pratiques » Guy Castegnaro, fondateur et managing partner du cabinet Castegnaro, Ius Laboris Luxembourg, fait le point sur le droit du travail.
36 Janvier 2018 — Tax & Legal —
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PAPERJAM ADVERTORIAL LOYENS & LOEFF
Your quality partner for Luxembourg tax compliance Loyens & Loeff’s tax compliance team provides tailor-made services through its integrated approach. We sat down with compliance team leader Menno Maat, direct tax compliance advisors Agnès Hédin and Sabrina Million, and indirect tax compliance advisor Maria Abreu. The responsible partner for the compliance team is Frank van Kuijk.
Talking key values Tax compliance advisors Agnès Hédin (l.), Sabrina Million (r.) & team leader Menno Maat.
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— Tax & Legal — Janvier 2018
Frank van Kuijk It all starts with the nature of our firm: as a law firm, we do not provide accounting or domiciliation services. A tax return relies heavily on the annual accounts of a company. Bifurcation of the two workflows secures healthy checks and balances. Tax compliance and accounting services under one roof is not a recipe to properly manage conflicts of interest. In peer jurisdictions, we already see a trend which moves towards tax (compliance) work being segregated from financial accounting and, e.g., domiciliation activities. Maria Abreu Another key element is that our tax compliance team is fully integrated within our tax advisory, transfer pricing and litigation team. It is therefore naturally up to speed with all matters that may impact the tax compliance process, and it has easy access to our advisors. Indeed, we have all key tax functions under one roof. Sabrina Million Moreover, we are a law firm and not a tax firm only. Through cooperation with our corporate, investment management, banking and regulatory lawyers, we have first-hand information on matters that may impact the tax compliance position of our clients. Direct access to our litigation
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team means the possibility to test reporting positions and to initiate procedures, if and when needed. Maria Abreu Our clients have each a dedicated and approachable advisor. This relationship enables us to better understand and address our clients’ requirements and to consequently provide them with high-quality service. Agnès Hédin Our team members each have a specialisation, such as in the tax compliance for real estate, private equity, or multinational enterprises, as well as in insurance, banking and geographically. Jointly, our team speaks some 15 languages, and we can accommodate communication with our clients in their preferred language. Menno Maat Returns are drawn up by our own team in Luxembourg and the work is not outsourced to any other country. With the increased focus on BEPS, substance in Luxembourg is essential. Although outsourcing may not directly be detrimental for substance, we find it inconsistent to outsource compliance services abroad, while we advise clients to secure sufficient substance in Luxembourg. We practise what we preach. Sabrina Million Our team is characterised by shortened hierarchical organisational structure and an open-door policy. It is in our “Loyens & Loeff” genes to communicate and be open to being challenged by our colleagues. We trade filing positions and views with other team members, so that we can learn and reach the best results.
In the report, we typically identify recent developments, e.g., in the field of transfer pricing, BEPS and state aid. The red flag report also provides background and history by giving a direct insight in transactions. Agnès Hédin Starting next year, it will be mandatory for direct tax returns to be electronically filed through the tax authorities’ website. But at Loyens & Loeff, we have been doing such e-filing for two years now already, even before it was mandatory. We have extensive experience in that field and are fully prepared for what lies ahead: that is a strength for us and for our clients. Maria Abreu More and more VAT audits are performed by the Luxembourg authorities, clients, therefore have even more focus on compliance and we can assist them in this respect.
“Our tax compliance team is fully integrated within our tax advisory, transfer pricing and litigation team.” Menno Maat Tax compliance team leader Loyens & Loeff
What are the key values of the team?
Menno Maat Summing up our key values: Quality is definitely the most important one. Our other values essentially support this key value. Integration of tax and legal teams secures efficiency. We consider it crucial that all our clients have a “go to” person who is accessible and responsive. Signalling risks and opportunities brings the tax compliance process to the next level, and turns it into an annual sanity check. Clients find our approach, philosophy and products very attractive, which is proven by a strong influx of new clients.
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How does a Loyens & Loeff tax compliance product distinguish itself?
Frank van Kuijk It is not only our organisation that makes the difference, but also the compliance products we deliver. When we take in clients, we hold their hand, so to speak. Throughout the year, we remind them of filing deadlines and fines that apply for late filing. The tax returns are prepared according to the principle of “double accounting”, meaning that we cross-check the developments of equity in the commercial balance sheet and tax statements with the result reported in the profit & loss account. In a world of BEPS and state aid, the law (and the law only) is our point of reference. Sabrina Million Indeed, our tax returns are much more than just a completed tax form. The form is provided with a red flag report mentioning concrete action points (e.g., need for substance or a transfer pricing analysis) and an analysis of risks and opportunities. Janvier 2018 — Tax & Legal —
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SUR LE RADAR
Le poids des taxes classement union européenne
LE LARGE SPECTRE DE L’IMPÔT DES SOCIÉTÉS
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Avant d’installer une société dans un pays, les grands groupes multinationaux se montrent attentifs à la fiscalité en vigueur pour les sociétés. L’étude d’Eurostat, basée sur des chiffres de 2016, qui publie les taux réellement pratiqués – parfois plus élevés que ceux annoncés – montre qu’il existe encore de fortes différences, même si beaucoup de pays veulent réduire l’écart avec les pays qui offrent des taux très avantageux. Taux de taxation effectif des entreprises (année 2016)
Dans le classement Doing Business 2018 de la Banque mondiale, le Luxembourg se classe à la 63e place. Il obtient toutefois des places honorables au niveau de la variable « imposition des sociétés » (21) et « règlement des conflits contractuels » (14).
50 %
40 %
étude
Taxer les riches ?
Moyenne européenne 20,9 %
30 %
20 %
10 %
13 % Les conseils en fiscalité restent fort demandés au sein des cabinets luxembourgeois. Chez PwC, le département Conseil fiscal a vu son chiffre d’affaires grimper de 13 % pour l’exercice 2016-2017. Chez EY, il progresse de 9,3 %, et chez Deloitte, de 5 %. 8—
SOURCE Eurostat
Chypre
Bulgarie
Irlande
Lituanie
Lettonie
Roumanie
Estonie
Slovénie
Croatie
République tchèque
Finlande
Pologne
Suède
Hongrie
g a fa
« C’est une erreur historique de ne pas vouloir imposer aux niveaux appropriés les bénéfices des multinationales qui agissent planétairement et qui ne paient pas l’impôt dû. »
— Tax & Legal — Janvier 2018
Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, juge, dans un entretien accordé à Paperjam, que le gouvernement luxembourgeois bloque les propositions de la Commission en matière de taxation de l’économie numérique, souvent réduite aux Gafa (Google, Apple, Facebook, Amazon).
PHOTO Maison Moderne (archives)
progr es sion
Slovaquie
Danemark
Pays-Bas
Royaume-Uni
Italie
Autriche
Luxembourg
Grèce
Portugal
Belgique
Allemagne
Malte
Espagne
France
0 %
Selon une récente étude de l’Ifo Institut, le centre munichois de recherche économique, taxer la fortune est contre-productif pour l’économie nationale. Une taxe sur la fortune ferait chuter les investissements, l’emploi, l’épargne et la croissance économique dans le pays, analyse l’institut. Selon ses calculs, une taxe de 1 % aurait un impact de 0,3 à 0,35 % sur le PIB.
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TABLE RONDE
« Nous devons aller au-delà du rôle de conseiller et agir comme un business partner. »
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Olivier Van Ermengem Associé Tax Linklaters
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— Tax & Legal — Janvier 2018
TABLE RONDE
BUSINESS
SUR LEUR RADAR POUR 2018
S’adapter sans faire de vagues
OLIVIER VAN ERMENGEM
Au cœur de l’Europe, le Luxembourg tire son épingle du jeu en offrant aux acteurs économiques présents sur son territoire un environnement fiscal et légal particulièrement stable. Pour préserver l’attractivité du pays, le défi est de procéder désormais aux réformes qui s’imposent, sans verser dans l’excès, de manière agile et opportune.
L
e Luxembourg a toujours cultivé l’image d’une destination business friendly. Il est parvenu à tirer son épingle du jeu en étant particulièrement attentif aux besoins des acteurs de la finance, et plus particulièrement de l’industrie des fonds, tout en veillant à diversifier son économie grâce à des niches porteuses. Dans un contexte d’harmonisation de la fiscalité internationale, sous la pression forte de pays voisins, l’attractivité du Luxembourg ne semble pas s’émousser. « C’est assez curieux, malgré un sentiment de compétitivité accru, le L uxembourg a mené peu de réformes. Nous n’avons pas vraiment vu de nouvel incitant fiscal ou de nouveau véhicule mis en œuvre. Ce qui n’empêche pas l’économie de se porter mieux qu’elle ne l’a jamais fait, commente François Brouxel, managing partner du cabinet d’avocats Wildgen. Le caractère business friendly du Luxembourg semble n’avoir souffert ni de nouvelles réformes ni de l’absence de celles-ci. » Parmi les avancées réalisées d’un point de vue légal au cours de ces dernières années, on peut citer la création du fonds d’investissement alternatif réservé (Fiar) et l’introduction, à travers la réforme du droit des sociétés, de la
société en commandite simple. « On ne peut pas parler de grand bouleversement, mais bien d’une adaptation du cadre légal à des pratiques largement répandues. À bien y regarder, c’est sans doute parce qu’il présente une grande stabilité légale et fiscale, en s’adaptant au bon rythme, que le Luxembourg se porte mieux que d’autres », commente Olivier Van Ermengem, associé Tax chez Linklaters. L’industrie des fonds prospère plus que jamais. Il faut dire que le Luxembourg, avec stratégie, ne court pas tous les lièvres à la fois. Les autorités veillent à renforcer l’attractivité du pays sur des segments d’activité bien précis. « Dans le domaine des fonds, qu’il s’agisse d’OPCVM ou de fonds alternatifs, le positionnement d’un véhicule au Luxembourg constitue une pratique de marché, commente Jean Schaffner, tax partner chez Allen & Overy Luxembourg. Quand un promoteur envisage d’établir une telle structure en dehors du Luxembourg, on a l’impression qu’il doit être en mesure de justifier ce choix. C’est un atout incroyable, acquis avec le temps. Bien évidemment, la situation peut évoluer. L’enjeu est de préserver cette position, en adaptant sans cesse
« En tant qu’avocats, nous devons faire face à une complexité croissante, explique Olivier Van Ermengem, associé Tax, Linklaters. Un des défis est de nous doter des moyens techniques et humains adéquats pour toujours mieux accompagner nos clients. Dans ce contexte, notre métier exige de s’appuyer sur de plus en plus de spécialistes. L’autre grand défi auquel nous sommes confrontés réside dans la digitalisation de notre métier. Des avancées technologiques, comme l’automatisation ou encore l’intelligence artificielle, doivent être mieux intégrées dans nos processus. Nous devons nous demander, compte tenu de cette évolution, comment continuer à servir nos clients dans le futur. L’enjeu est de toujours proposer le bon service au meilleur coût. Il est donc essentiel de bien appréhender ce tournant digital. »
le cadre luxembourgeois au regard des initiatives prises par les Places concurrentes. »
ATTRACTIVITÉ ET PRUDENCE FISCALE
Pointé du doigt pour des pratiques d’optimisation fiscale agressives, le Luxembourg a aujourd’hui tendance à se montrer prudent dans l’établissement d’un cadre fiscal et légal particulièrement attrayant pour les acteurs économiques. « Dans le domaine des fonds, on espérait assister à l’instauration de la fondation patrimoniale, en tant qu’instrument supplémentaire à la palette d’outils disponible, poursuit François Brouxel. Il semble que, par prudence, les autorités aient choisi de faire marche arrière. Cependant, la gamme de véhicules disponibles pour organiser des prises de participations semble suffisamment large. » Aux yeux de Jean Schaffner, par excès de prudence, le Luxembourg a perdu des opportunités de faire valoir son droit de veto dans l’établissement des directives de lutte contre l’évasion fiscale, Atad 1 et Atad 2. « On n’a pas assez tenu compte des intérêts du pays dans l’établissement de ces directives. Atad, par exemple, prévoit une imposition fiscale à la Janvier 2018 — Tax & Legal —
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TABLE RONDE
SUR LEUR RADAR POUR 2018
« Le Luxembourg est toujours considéré comme une passerelle de premier choix vers l’Europe. » Geoffrey Scardoni Tax partner DLA Piper
sortie, lors du transfert d’actifs d’une juridiction fiscale vers une autre. Si la mesure ne pénalise pas uniquement le Luxembourg, elle constitue un frein à l’investissement. Considérant notre position, tout ce qui peut détourner un investisseur de structures européennes ne sert pas le Luxembourg, expliquet-il. On a l’impression que, en la matière, nos autorités n’osent faire valoir leur influence. En plus, ces textes sont bâclés, compliqués à appliquer en pratique, et source d’insécurité pour les investisseurs, même s’ils ne sont pas inspirés par des motivations fiscales. »
ATTIRER DES DIRIGEANTS, DÉVELOPPER LA SUBSTANCE
L’un des principaux défis du Luxembourg, aujourd’hui et particulièrement dans le contexte du Brexit, est de pouvoir attirer des dirigeants. « En la matière, les autorités devraient pouvoir faire des efforts sur l’imposition des dirigeants, sur leurs salaires et leurs plans d’intéressement, 12 —
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pour accentuer son environnement business friendly, assure Olivier Van Ermengem. C’est un des leviers qui doivent nous permettre de faire venir plus de substance. En effet, dans un effort d’harmonisation fiscale, l’OCDE a tendance à regarder là où se trouvent les dirigeants. Pour les fonds, cependant, la directive AIFM a plutôt tendance à encourager une déconnexion des dirigeants et du fond, ce qui entraîne un risque à ne pas développer cette substance. » L’optimisation de l’environnement fiscal pour les décideurs doit s’accompagner du développement d’un cadre de vie de qualité répondant à leurs besoins, en matière d’éducation, de culture, de soins de santé. « Beaucoup d’efforts ont été faits dans ce sens ces 10-15 dernières années au Luxembourg, se réjouit François Brouxel. Il faut désormais que la fiscalité suive. » Dans ce contexte, si l’industrie des fonds semble encore préservée, les corporates établis au Luxembourg souffrent davantage. « Il devient en effet difficile d’y positionner une
GEOFFREY SCARDONI « Dans un environnement particulièrement concurrentiel, il est important que la stratégie et les ambitions du Luxembourg soient suffisamment lisibles pour les acteurs et les États étrangers, commente Geoffrey Scardoni, tax partner, DLA Piper. Plus que jamais, les observateurs extérieurs doivent avoir une bonne compréhension du Luxembourg, de ses atouts et des secteurs qu’il souhaite promouvoir. Cette lisibilité, alliée à une plus grande transparence et une plus grande ouverture, doit servir le Luxembourg en le mettant à l’abri d’attaques orientées uniquement sur les enjeux fiscaux. Le Luxembourg a une histoire, avec une économie bien réelle, sur laquelle il doit capitaliser. Comme il l’a toujours fait, le pays ne doit pas hésiter à envoyer des messages de modernité, en se transformant, en faisant preuve d’initiative, comme avec la loi sur l’exploitation des ressources spatiales, et en veillant à préserver la cohérence de sa démarche. »
holding si aucune autre activité de production n’est déployée sur le territoire. Considérant la taille du pays, il est plus facile de développer de la substance aux Pays-Bas qu’ici », assure François Brouxel. « Il apparaît évident que les acteurs qui ont choisi le Luxembourg pour y placer leur holding pour des raisons purement fiscales vont disparaître, confirme Geoffrey Scardoni, tax partner chez DLA Piper. Cependant, le Luxembourg est toujours considéré par les acteurs américains ou asiatiques, dans le domaine des services, financiers ou non, comme une passerelle de premier choix vers l’Europe. On le constate notamment avec l’arrivée de banques chinoises ou la volonté d’acteurs établis à Londres de déplacer leur centre de gravité européen vers Luxembourg. Il faut que Luxembourg conforte cette position, en attirant des sociétés actives dans des niches porteuses, s’inscrivant dans la stratégie de diversification du pays. À tra-
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TABLE RONDE
vers le Brexit, l’enjeu pour le Luxembourg, en tant que plateforme internationale, n’est pas forcément d’attirer les acteurs établis au Royaume-Uni vers lui, mais de trouver les pistes pour continuer à mieux collaborer avec eux et leur offrir cette porte d’entrée vers l’Europe. »
« Le Luxembourg a mené peu de réformes. » François Brouxel Managing partner Wildgen
ABROGER L’IMPÔT SUR LA FORTUNE
Si, comme évoqué, peu de réformes ont été mises en œuvre ces dernières années, les professionnels du droit des affaires pointent tout de même quelques améliorations possibles pour renforcer l’attractivité du Luxembourg. La première est sans aucun doute l’abrogation de l’impôt sur la fortune envers les sociétés. « Cet impôt est établi en fonction des avoirs des sociétés au 1er janvier de chaque nouvelle année. Il a pour effet de pousser les acteurs présents au Luxembourg à vider leurs comptes à la fin de chaque exercice. Un tel impôt n’a plus de raison d’être, commente Geoffrey Scardoni. Il ne représente en outre pas grand-chose en termes de recettes fiscales. Pourquoi ne pas tout simplement le supprimer ? » Au-delà, le tax partner de DLA Piper défend l’idée de continuer à faire baisser l’impôt sur les sociétés, avec la volonté de maintenir l’attractivité du pays face à d’autres États, comme l’Irlande, présentant un taux nettement inférieur. Aux yeux des professionnels du droit, les autorités luxembourgeoises vont devoir affronter quelques challenges réglementaires. Atad constitue le plus gros morceau. « Le Luxembourg doit implémenter ces changements comme il l’a toujours fait, avec intelligence et agilité, pour préserver l’attrait de l’environnement business qui prévaut jusqu’ici, assure Olivier Van Ermengem. Nos clients sont rassurés de voir le Luxembourg mettre en œuvre ces nouvelles dispositions au moment opportun. Cela évite des tensions découlant d’une insécurité juridique. » En étant agile, flexible et en anticipant bien les enjeux, le Luxembourg offre une réelle sécurité juridique aux acteurs installés sur son territoire. « La mise en œuvre de ces directives en droit national constitue des occasions de moderniser judicieusement le cadre actuel, comme cela a pu être fait avec le droit des sociétés et la directive AIFM. Il serait par exemple opportun de supprimer à cette occasion l’impôt sur la fortune des sociétés ou la retenue à la source sur les dividendes dans le contexte des fonds alternatifs », poursuit l’associé du cabinet Linklaters.
RENFORCER L’ADMINISTRATION
Jean Schaffner, cependant, pointe de réelles difficultés des autorités à suivre le rythme et les enjeux complexes qui découlent d’un cadre réglementaire de plus en plus étoffé. « La difficulté réside dans le fait que nous avons probablement du mal à recruter 14 —
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SUR LEUR RADAR POUR 2018
FRANÇOIS BROUXEL « Tout au long des mois à venir, il faudra suivre de près l’évolution des tractations dans le cadre du Brexit, commente François Brouxel, managing partner, Wildgen. Nous devons, dans le contexte actuel, nous tenir prêts à accueillir les multiples opportunités qui pourraient découler de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. 2018 sera l’année de vérité. Alors que la situation est encore pour le moins confuse, il ne fait
pas de doute que l’horizon va devoir rapidement s’éclaircir. Il faudra voir comment Theresa May, fragilisée dans son camp, pourra continuer à défendre ses positions sur le Brexit. Quoi qu’il en soit, je pense que des transferts de business vont s’opérer entre l’Angleterre et l’Union européenne. À nous d’être bien positionnés pour accompagner nos clients et accueillir les activités qui ont toute leur place dans l’écosystème luxembourgeois. »
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TABLE RONDE
SUR LEUR RADAR POUR 2018
« On a l’impression que, en la matière, nos autorités n’osent faire valoir leur influence. » Jean Schaffner Associé Allen & Overy
suffisamment de hauts fonctionnaires pour nous assurer d’être aussi réactifs, par rapport à certains besoins, que par le passé. L’État n’est plus toujours aussi disponible, et les circuits pour s’adresser aux autorités sont plus longs. Les décideurs semblent parfois plus à l’écoute de l’opinion étrangère et communautaire que des acteurs de terrain au niveau national », explique l’associé d’Allen & Overy. Pour lui, renforcer le sommet de l’administration et augmenter l’attractivité de la fonction publique supérieure pourraient permettre de remédier, du moins partiellement, à cette situation.
les professionnels du droit et de la fiscalité regardent cela avec un peu plus de recul. « Le Luxembourg, à travers la CSSF, est un modèle dans le domaine de la surveillance réglementaire. L’autorité veille au respect des règles, dans une volonté de toujours mieux comprendre les acteurs de la place financière, commente Geoffrey Scardoni. De cette manière, le Luxembourg a toujours su s’adapter et mettre en œuvre des pratiques plus modernes, tout en gardant le contrôle. La CSSF veille avant toute chose au respect des principes édictés. Pour le coup, les autres régulateurs sont peut-être un peu moins bons. La crainte, avec la mise PRÉSERVER LA QUALITÉ DE LA RÉGULATION en œuvre d’une surveillance par l’Esma à Une crainte, pour l’attractivité du l’échelle européenne, n’est pas forcément Luxembourg, résidait dans la volonté de de laisser filer un leadership. Le Luxeml’Autorité européenne des marchés finan- bourg ne veut pas la jouer solo. Le risque ciers (Esma) de prendre la main sur tous est de perdre en performance et en réactiles régulateurs nationaux. Après un mou- vité vis-à-vis de ces enjeux. Ce qui nuira au vement de panique, survenu au moment Luxembourg et à l’Europe. » Le souhait des de l’annonce de l’intention des autorités acteurs, si l’Esma devait en effet prendre la européennes d’aller dans cette direction, main, serait de s’inspirer autant que pos-
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JEAN SCHAFFNER « 2018 sera une année électorale. Dans une optique de renforcement de la compétitivité du Luxembourg, la question de l’utilisation de l’argent public doit être mieux considérée, explique Jean Schaffner, associé chez Allen & Overy. L’État luxembourgeois ne développe pas assez la culture de l’économie. Si, demain, la situation économique du pays venait à se retourner, nous devrions faire face à d’importantes difficultés, découlant du fait que nous n’avons pas pris la peine de nous préparer. Il faut moins de dépenses, créer plus de réserves et moins imposer pour soutenir notre attractivité. Je pense que les collectivités, avec des efforts justement répartis entre l’État et les communes, doivent collecter l’impôt et investir de manière plus raisonnable, en travaillant sur ce qui est essentiel, en évitant le superflu. »
sible des procédures et pratiques établies par la CSSF.
LE MÉTIER D’AVOCAT ÉVOLUE, LUI AUSSI
Dans un contexte où le marché évolue rapidement, le métier d’avocat se transforme, lui aussi. « Le métier d’avocat et de fiscaliste évolue vers plus de responsabilités », commente Geoffrey Scardoni. « Nous devons aller au-delà du rôle de conseiller et agir comme un business partner », poursuit Olivier Van Ermengem. Aussi, les avocats sont de plus en plus amenés à accompagner des contentieux. « Les cabinets doivent s’appuyer sur une structure administrative solide et désormais rassembler de nombreuses spécialités pour mieux accompagner leurs clients et créer de la valeur », assure François Brouxel. Les conseillers juridiques sont souvent les premiers consultés lorsqu’une société envisage une nouvelle localisation. L’attractivité du Luxembourg dépend aussi pleinement de leur capacité à répondre aux nouvelles exigences des acteurs business. S. L.
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CONSEILS RÉGULATIONS
CE QUI VOUS ATTEND EN 2018 Quelles sont les régulations et paramètres à prendre en compte pour la nouvelle année qui se présente ? Atoz Tax Advisers dresse une liste de conseils et d’éléments à avoir sur son radar.
2.
Le dépôt Les groupements électronique de personnes des déclarations autonomes fiscales
Le dépôt des formulaires d’imposition pour les collectivités luxembourgeoises devient obligatoire dès 2018 pour les déclarations fiscales 2017. Ce dépôt soulève des questions de préparation et de procédure qu’il semble nécessaire de revisiter dans un partenariat entre contribuables et prestataires externes en charge de la préparation des déclarations fiscales.
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Les groupes de sociétés luxembourgeois sont appelés à revoir leur organisation du fait de la non-conformité au droit européen du régime TVA luxembourgeois applicable au groupement autonome de personnes. Plus globalement, les acteurs économiques luxembourgeois sont invités à reconsidérer leur position vis-à-vis des questions de TVA, souvent négligées.
3.
Le nouveau régime de propriété intellectuelle
À partir du 1er janvier 2018, les contribuables luxembourgeois pourraient bénéficier, sous conditions, du nouveau régime d’exonération fiscale partielle sur certains revenus de propriété intellectuelle. Il est donc recommandé de mettre en place un suivi de la création d’actifs éligibles à ce régime et de créer un système d’affectation pertinent des revenus et charges.
ILLUSTRATION Maison Moderne
1.
CONSEILS
Déclaration fiscale
4.
5.
Les Brexit et intermédiaires fiscalité en matière de planification fiscale
Les effets réglementaires et institutionnels du Brexit sont largement médiatisés, les effets en matière de fiscalité, moins. La fin potentielle de l’imbrication du droit fiscal européen avec le droit domestique du Royaume-Uni aura des conséquences pour certains investisseurs luxembourgeois.
Ce projet de directive, dont l’entrée en vigueur est prévue pour le 1er janvier 2019, fait peser une obligation de déclarer automatiquement certains dispositifs fiscaux sur les personnes impliquées dans leur conception et mise en œuvre. Les conseils fiscaux externes et internes aux entreprises doivent se coordonner dès 2018 pour en anticiper les conséquences.
6.
Fiscalité de l’économie digitale L’incohérence des récents projets de législation internationale et européenne en matière d’économie numérique avec des concepts de fiscalité internationale établis affectera nécessairement les économies européennes. Il convient de saluer la position du Luxembourg, qui plaide pour accorder du temps à ces questions particulièrement cruciales pour l’économie européenne et les finances des États membres.
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ÉCOSYSTÈME FINANCIER
Les changements réglementaires affluent depuis 10 ans. Wim Piot, tax leader et managing partner de PwC Luxembourg, Marc Schmitz, tax leader chez EY Luxembourg et Raymond Krawczykowski, tax leader chez Deloitte Luxembourg, font le point sur leur profession, qui passe du conseil à de plus en plus d’administratif.
PHOTOS Patricia Pitsch (Maison Moderne)
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Wim Piot Une tendance que nous avions déjà perçue se matérialise, ou est sur le point de se matérialiser, à savoir l’augmentation de la base imposable, avec l’implémentation d’Atad. Pour rester concurrentiels, des pays réalisent qu’il faut réduire le taux d’imposition des sociétés. Ce qui ne veut pas dire que le taux d’imposition effectif diminue, mais de vouloir le garder stable, puisque la base augmente. Il faudrait dès lors que le Luxembourg se décide sur ce point. Je ne vois du reste que du positif. Les clients développent de plus en plus de substance, nous en attirons de plus en plus, notamment dans les fonds alternatifs. Cette tendance va continuer. Nous remarquons que le Luxembourg n’est plus uniquement considéré pour sa fiscalité, mais pour un ensemble de notions, dont la qualité de service. Nous sommes entrés dans une autre league, mais il faut que l’infrastructure continue d’accompagner
ce mouvement, de même que des impulsions, comme l’élimination de la retenue sur les dividendes pour les investisseurs institutionnels. Marc Schmitz Nous voyons en effet une tendance se dessiner autour du taux. Je me pose néanmoins la question de son importance au regard des récentes annonces d’investissements dans certains secteurs. Je pense notamment au milliard dans l’industrie, grâce à des entreprises qui sont venues s’installer ou d’autres, déjà présentes, qui ont décidé d’investir davantage. Il y a aussi potentiellement le dossier emblématique de Google… Je me pose dès lors la question : a-t-on vraiment besoin d’un taux nominal plus attractif ou en baisse ? Il ne faut certes pas être au-dessus de la moyenne, mais manifestement ce n’est pas uniquement la fiscalité qui fait la différence et nous rend attractifs. W. P. Les dossiers d’investissement ont avant tout été annoncés dans le secteur industriel, qui bénéficie du 152bis, à savoir un crédit d’impôt pour investissement, ce qui est beaucoup moins le cas pour le secteur tertiaire, dont le secteur financier. M. S. C’est un point crucial, car ladite « old economy » en profite, mais qu’en est-il des start-up, des énormes investissements déjà effectués et encore à réaliser dans la digitalisation, la robotisation, l’automatisation, l’intelligence artificielle… Nous ne parlons pas d’investissement dans les installations et les machines, mais dans du software, des applications ou dans les spécialistes en la matière que l’on doit recruter. Nous pourrions par exemple réfléchir à une bonification d’impôt pour Janvier 2018 — Tax & Legal —
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l’embauche de spécialistes que l’on fait venir et qui sont courtisés par des employeurs dans plusieurs pays. Nous avons besoin d’une remise en cause de cette bonification d’impôt pour tenir compte des besoins d’autres secteurs ou de nouveaux, dans la suite du projet Rifkin. Nous devrions en fait disposer d’un cadre fiscal qui accompagne tout le projet Rifkin. Raymond Krawczykowski Il y a un président américain qui a dit autrefois que si l’économie bouge, il faut l’imposer, si elle bouge encore, il faut la réglementer, et si elle arrête de bouger, il faut la subsidier. J’ai le sentiment que les 10 années écoulées sont vraiment un reflet de cette vision, avec une réglementation très forte mise en place pour donner l’impression que chacun des États maîtrise l’économie. On se retrouve avec des mesures de plus en plus lourdes et qui consomment énormément de temps. Une partie importante de la croissance des départements fiscaux de nos cabinets est en train de migrer du conseil vers l’administration des contraintes fiscales, pour aider nos clients dans leurs obligations de conformité. Celles-ci les exposent à des coûts supplémentaires sans leur offrir de débouchés économiques. Le montant fiscal payé dans les différents pays est-il pour autant plus juste ? On ne peut pas l’affirmer. On a vu récemment que des grands acteurs de l’économie mondiale qui ont été attaqués par différents États ont tous eu gain de cause. Je ne suis donc pas sûr que les mesures aient porté leurs fruits d’une manière générale. Or, il est impératif dans le contexte que nous vivons de rassurer les contribuables, dont les entreprises, sur la manière dont ils seront imposés, plus que d’agir sur le taux nominal affiché.
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LE BESOIN DE CROISSANCE AU LUXEMBOURG
W. P. Le débat actuel sur la remise en cause de la crois-
sance m’inquiète. S’il y a moins de croissance, il y aura un impact direct sur le budget et sur le chômage. On a absolument besoin de cette croissance, mais en même temps, on doit pouvoir maîtriser absolument ses dommages collatéraux, dont la mobilité et la hausse du prix de l’immobilier. Si on remet en cause la croissance, nous sommes devant de grands défis à long terme, comme les pensions, qui sont d’ailleurs sous pression même en cas de croissance. M. S. Nous sommes tous d’accord pour dire qu’il faut de la croissance, mais il faut réfléchir à quel type de croissance nous voulons. Elle doit être orientée sur la nouvelle économie, les nouvelles technologies, les industries du futur. Le mouvement déclenché autour des start-up et des fintech est d’ailleurs très positif, mais je crois qu’on peut encore mieux les encadrer et les supporter. Il faut aussi se demander quel genre d’entreprise on veut au Luxembourg. Dans le passé, beaucoup de multinationales sont venues pour payer peu d’impôts, pas pour y installer des activités mais pour transiter par un Luxembourg à fiscalité faible. Ce n’est plus pour ce type d’entreprise que l’on veut être attractif. Certaines entreprises qui ont utilisé le Luxembourg pour effectuer de la planification fiscale sont parties, mais la plus grande majorité attend de connaître les implications pratiques de Beps, des directives Atad, et garde les avantages fiscaux jusqu’au dernier moment. Une minorité va ensuite à mon avis se décider à inves22 —
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Quelles attentes vis-à-vis du futur gouvernement ? ATTAQUER LES DOMMAGES COLLATÉRAUX DE LA CROISSANCE « J’espère surtout que le gouvernement va mettre sur la table un agenda fort au niveau fiscalité, tant pour des personnes physiques que des sociétés, et l’implémenter directement, sans attendre. Car c’est ce que le gouvernement a fait, il a attendu très longtemps, presque à la fin du mandat, pour l’implémenter. J’espère que l’on arrivera, avec ce gouvernement et le prochain, à attaquer les dommages collatéraux de la croissance que sont la mobilité et le prix de l’immobilier. »
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Revue
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Revue générale de fiscalité luxembourgeoise N° 2017/2
Sommaire Articles 30
Droits fondamentaux des contribuables : une valse à trois temps — Protection, engagements internationaux et recherche d’un juste équilibre — Georges Simon et Vanille Peltier
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Financement intra-groupe : circulaire LIR 56/1-56bis/1 du 27 décembre 2016 — Une circulaire qui ne manque pas de BEPS — Jean Schaffner et Sophie Balliet
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Article 50bis LIR, abandon de créance et apport en capital — Sandrine Buisseret et Léna Breuillé
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C.J.U.E. et limitation des entités bénéficiaires de la directive mère-fille — Sami Douénias et Victor Mermet
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Condamnation du Luxembourg pour avoir transposé de manière trop extensive l’exonération de TVA prévue en matière de groupement autonome de personnes — Frédéric Wersand et Julie Kellal
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tir, mais la plus grande partie va probablement migrer vers le pays où elles auront le plus de substance.
LE BESOIN DE SÉCURITÉ DES INVESTISSEURS
R. K. Le Luxembourg est bon sur ce point, mais les direc-
tives européennes sont difficiles à interpréter, à comprendre. Par exemple, les deux directives anti-abus ensemble font une vingtaine de pages. Elles résument trois dispositions de Beps qui, chacune, comptent quelque 300 pages. Cette manière de résumer va créer beaucoup d’incertitude. En tant que techniciens de la fiscalité, nous nous posons des centaines de questions par rapport à chacune de ces dispositions. Par extension, on pourrait avoir 27 interprétations différentes dans chaque pays. Notre rôle sera d’expliquer au client les différentes modalités, selon les pays. Notre crainte est qu’il y ait encore plus de directives qui rajoutent encore plus de confusion. Le manque d’attractivité et de clarté de ces dispositions pour les acteurs économiques produit un double effet dissuasif qui profite à des pays ou des juridictions non européens. W. P. Dans une économie de marché, c’est l’entreprise qui décide d’investir ou de ne pas investir. Il faut faire très attention et regarder la position compétitive du Luxembourg sur le plan global et se demander si on reste attractif pour une société qui va se poser la question de créer de l’activité économique ou de l’emploi. Mais il semble que cet aspect soit ignoré ou oublié par le monde politique, comme si les investissements et l’activité économique étaient une évidence. Ce n’est pas le cas. Je reste par ailleurs étonné par les commentaires de certains décideurs, qui indiquent que rien ne bouge suite aux différents leaks. L’échange de données bancaires a tout de même été approuvé au niveau européen, Atad 1 et 2 ont été approuvés, par exemple. Dire que rien ne bouge n’est pas vrai. Il y a déjà énormément de régulations. R. K. On se retrouve aujourd’hui dans une situation kafkaïenne dans laquelle les conventions qui ont été conclues pour encourager le développement et l’investissement d’un pays dans l’autre sont entourées d’une telle complexité qu’elles vont à l’encontre de leur objectif initial, qui est de faciliter les investissements, d’avoir une clarté lorsqu’un opérateur investit dans un autre pays. On se retrouve en présence d’États qui sont de plus en plus en silo. Jusqu’au jour où les États se rendront compte que le commerce international qui est bien géré est une bonne chose. Car il a pour finalité de réduire ou de combler les trous qui peuvent se produire dans un État, ou le manque de développement technologique.
Quelles attentes vis-à-vis du futur gouvernement ? SUPPRIMER L’IMPÔT SUR LA FORTUNE DES ENTREPRISES « Le cadre fiscal attractif pour l’existant et pour le futur – nouvelles technologies, robotisation, intelligence artificielle –, avec une revue de la bonification d’impôt, une meilleure prise en compte des start-up et leur financement. Il faut aussi reconsidérer la retenue à la source sur dividende. J’ajouterais un autre point, qui est l’impôt sur la fortune pour les entreprises, un impôt anachronique qui subsiste au Luxembourg, contrairement aux autres États européens. »
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partie de la transaction, oubliant de montrer comment l’impôt est payé in fine et non évité. W. P. Cette discussion autour des Gafa ouvre la boîte de Pandore, car on veut taxer dans le pays dans lequel la société n’a peut-être aucune présence, mais vend ses produits. Pourquoi faudrait-il alors limiter ce type de taxaL’IMPOSITION DES GAFA tion à ces sociétés-là ? Pourquoi ne pas imposer d’autres R. K. Les impositions envisagées sur les Gafa (Google, sociétés pour des ventes dans les pays de distribution ? Amazon, Facebook et Apple, ndlr) vont retomber sur À l’échelle mondiale, c’est un véritable casse-tête potenles consommateurs, et donc les personnes physiques tiel si vous pensez à la taille de certains pays consommaqui vont devoir payer le surcoût supporté par ces géants teurs comme la Chine, ou aux États-Unis. Un producteur technologiques. C’est une forme de populisme qui européen de voitures qui exporte aux États-Unis serait entraîne de telles décisions pour montrer que les pou- taxable dans ce pays si un tel raisonnement était approuvé. voirs publics agissent. Or, certains dossiers qui sont Or, cette discussion passe à côté d’une question essentie sous les feux des projecteurs sont considérés par une lle pour l’Union européenne : pourquoi tous ces groupes information biaisée, car elle ne prend en compte qu’une technologiques sont-ils – presque – tous américains ? 24 —
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Quelles attentes vis-à-vis du futur gouvernement ?
M. S. Il faut déjà essayer de savoir comment faire grandir la prochaine génération, les prochains secteurs technologiques porteurs en Europe. Il faut s’assurer de pouvoir créer les conditions économiques attractives pour les voitures autonomes, la robotisation et l’intelligence artificielle par exemple. Mais j’ai certains doutes compte tenu de la jalousie qui existe entre les pays européens.
PLUS DE VUES À L’ÉGARD DES DISPOSITIONS EUROPÉENNES
LES IMPACTS DE L’ÉVENTUELLE RÉFORME FISCALE AMÉRICAINE
M. S. Il sera intéressant de savoir ce qui va se passer concrètement, en descendant d’un taux de 35 % avec l’idée d’atteindre les 20 %. Cela aura un impact. L’idée derrière cette réforme est d’être attractif, mais aussi de rapatrier du business à l’étranger des multinationales américaines vers les États-Unis, dans une certaine forme de nationalisme pour favoriser l’économie domestique. En plus, les entreprises américaines pourraient hésiter davantage avant d’investir à l’étranger. W. P. Avec cette réforme, la pénalisation qui pesait sur les sociétés américaines en cas de rapatriement va tomber. Or, cette pénalisation était aussi en quelque sorte un grand subside fiscal pour investir en Europe. En cas de disparition, cela aurait un effet important en Europe, avec la disparation des cash boxes, notamment. M. S. Et ce sont les règles américaines qui avaient boosté la planification fiscale. L’argent est resté en Europe et a été réinvesti depuis l’Europe. On se rend compte que toutes les problématiques telles que Beps découlent aussi des règles de fiscalité américaines qui taxent juste au moment du rapatriement des profits et créent ainsi une fausse image autour de montants qui en apparence ne seraient pas taxés. R. K. Les Américains ont une disposition qui résulte de Beps, à savoir des règles permettant d’éviter de différer l’imposition. Pour certains types de revenus qui sont établis dans un pays, il est convenu que, peu importe qu’ils soient distribués ou pas, ils sont imposés tout de suite. Beps a repris cette direction, y compris dans Atad. Or, la Commission est occupée à attaquer des règles similaires en Angleterre… Beps résulte de l’OCDE, l’Organisation de coopération et de développement économiques. Aujourd’hui, il n’y a dans Beps que des mesures qui sont là pour empêcher le développement économique. Il n’y a pas une seule disposition « pro ». Que l’Union européenne ait pris cette base pour construire la manière dont elle a envie de travailler dans le futur ne me semble pas bon.
« J’ajouterais, vis-à-vis des points soulevés par Wim Piot (voir page 22), l’importance de la sécurité juridique. Compte tenu du nouveau droit qui nous est imposé par l’Union européenne, il faut assurer plus de transparence, plus d’échanges, plus de prises de position de la part des autorités luxembourgeoises sur leurs vues à l’égard des dispositions européennes. En deuxième étape, mais plus minime, j’ajouterais, concernant les décisions récentes de la Cour européenne de justice sur groupements autonomes de personnes qui ne peuvent pas s’appliquer au secteur financier, qu’il faut vite revenir avec une solution alternative, solution qui est par ailleurs en élaboration par le ministère des Finances et les autorités fiscales. »
LES CONSÉQUENCES DU BREXIT
W. P. Il y aura plus d’AIFM et de fonds alternatifs sur la
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Place. Il est difficile de quantifier l’arrivée de nouveaux acteurs dans le cadre du Brexit. On parle plutôt de décision de la part d’acteurs qui avaient déjà une présence au Luxembourg d’y mettre plus de personnels, plus de substance. R. K. Tout ce qui est réglementé et avec une vision paneuropéenne devra bouger d’Angleterre. La force de chaque Place va ensuite jouer assez naturellement. Les acteurs déménageront en fonction de la spécialisation de chaque Place et de leurs activités. M. S. Encore une fois la fiscalité ne semble pas être le facteur majeur. C’est plutôt la présence d’un secteur dans le pays, d’une masse critique ou d’un cluster qui fait bouger les gens plutôt que la fiscalité. T. R.
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e Luxembourg est une place de choix pour positionner ses véhicules d’investissement. De cet attrait a découlé une importante activité facilitant l’accompagnement des gestionnaires de ces sociétés ou fonds d’investissement. Ce business est cadré par la loi de 1999 qui « régit la domiciliation des sociétés ». « Si la loi porte ce nom, notre activité n’est pas vraiment celle d’un domiciliataire. Le terme n’est plus approprié, commente Serge Krancenblum, CEO de SGG Group. Aujourd’hui, l’offre de services s’étend bien au-delà de la mise à disposition d’une adresse. Nous accompagnons nos clients dans la durée, en proposant de nombreux services, de la comptabilité au secrétariat juridique en passant par le reporting réglementaire. »
scandales ont pointé des pratiques d’optimisation fiscale qui, si elles étaient légales, ont été rapidement considérées comme abusives. Le cadre réglementaire, dans le même temps, a considérablement évolué. Chaque structure a désormais besoin de bien plus qu’une adresse pour être considérée comme luxembourgeoise. « Le lieu où est établie une société doit être celui où les décisions sont prises, poursuit Serge Krancenblum. Et il ne s’agit plus de simplement y organiser des conseils d’administration où l’on se contente de formaliser des décisions prises ailleurs. La présence des dirigeants sur place est requise. » Au sein de chaque structure, des équipes se mettent en place. « Nos clients embauchent leur propre personnel. Celui-ci assure la gestion et veille à la bonne marche de l’activité, ajoute Serge Krancenblum. Nous sommes à PRISES DE DÉCISION leurs côtés, en tant que prestataires de services Les besoins des clients désireux d’établir leurs externes, pour les aider à s’établir et les soutefonds d’investissement ou encore des socié- nir dans leurs démarches et leurs opérations. » tés à travers lesquelles ils opèrent des prises de participation ont évolué avec le temps et LE LUXEMBOURG ET SES NOMBREUX ATOUTS les attentes des régulateurs. Il y a quelques Le métier des prestataires de services a évoannées, la notion de substance ne faisait pas lué vers plus d’expertise, contribuant au l’objet de tant de débats. Depuis, plusieurs maintien de l’attractivité du Luxembourg.
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« Au-delà des enjeux fiscaux, le pays offre de nombreux atouts à nos clients, le premier étant son cadre législatif et fiscal stable. On peut aussi y travailler avec différentes devises. Enfin, le Luxembourg constitue une plateforme internationale unique pour nos clients », commente le dirigeant de SGG. La clientèle a évolué avec la place financière. Elle est de plus en plus institutionnelle. Elle se compose principalement d’asset managers internationaux, d’entrepreneurs privés, d’importants family offices, d’acteurs investissant sur les segments private equity et real estate. Elle est de plus en plus internationale. « Il s’agit d’une clientèle qui a besoin d’une expertise. Et elle est prête à payer pour en profiter, précise Serge Krancenblum. Elle sait que, au Luxembourg, elle trouvera les bons interlocuteurs, capables de l’accompagner face à ses défis et dans la gestion de ses investissements à l’international. » L’enjeu, pour les prestataires de services situés aux côtés de ces clients, est donc de rassembler les équipes qui pourront répondre à des niveaux d’exigence toujours plus élevés. Q. D.
ILLUSTRATION Ellen Withersová (Maison Moderne)
Ne parlez plus de domiciliataires. L’exigence de substance pousse les détenteurs de structures luxembourgeoises à investir localement. Et les prestataires de services en gestion et administration des sociétés et des fonds tendent à gagner en expertise pour mieux aider leurs clients à relever des défis internationaux.
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DANS LES COULISSES
Claude Kremer, Guy Harles (co-chairmen et cofondateur) et Jean-Marc Ueberecken (managing partner) en discussion dans le restaurant interne d’Arendt House.
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DANS LES COULISSES
ESPRIT COLLABORATIF
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aménagement intérieur d’Arendt House, qui compte actuellement presque 600 collaborateurs in situ, a été pensé pour faciliter la rencontre et l’échange informels dans des espaces de rassemblement, comme le restaurant interne. Au-delà de ces lieux physiques, des espaces de collaboration virtuels seront lancés début 2018 au travers d’un tout nouvel intranet. Le cabinet d’avocats Arendt & Medernach entend ainsi favoriser le dialogue et le partage du savoir au sein de ses équipes. — 31
RÉFORME FISCALE
RÉDUCTION DU TAUX D’IMPOSITION DES SOCIÉTÉS
Un facteur-clé pour rester compétitif La réforme fiscale de 2017 a permis au Luxembourg de ne pas se faire distancer par ses concurrents. Mais flexibilité et inventivité restent de mise pour rester compétitif.
ILLUSTRATION Ellen Withersová (Maison Moderne)
En 2018, le poids des taxes va s’alléger pour les sociétés : le taux nominal d’imposition va passer d’environ 30 % à 26 %.
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RÉFORME FISCALE
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l y a quelques semaines, à l’occasion de la conférence annuelle de Finance & Techno‑ logy Luxembourg, le ministre des Finances, Pierre Gramegna, se félicitait du nombre d’entreprises qui allaient rejoindre le Luxem‑ bourg suite au Brexit. On peut se réjouir d’une telle attractivité. Et se demander dans quelle mesure le cadre fiscal luxembourgeois, suite notamment à sa récente révision, pèse encore dans le choix de ces futurs nouveaux venus. « Il est trop tôt pour évaluer l’impact de la dernière réforme fiscale, estime Camille Seillès, secrétaire général de l’ABBL (Associa‑ tion des banques et banquiers, Luxembourg). Les mesures mises en place par cette réforme ne sont applicables que depuis le 1er janvier 2017 et se rapportent donc à l’année d’imposition en cours. L’une des mesures phares de la réforme fiscale 2017 – la baisse du taux d’imposition des sociétés – va dans le bon sens, même si cette diminution reste contenue. »
« Ce déficit au niveau du taux d’imposition peut être relativisé, la fiscalité n’étant pas le seul facteur considéré dans les projets d’investissement. » Camille Seillès Secrétaire général de l’ABBL
PHOTOS ABBL, Chambre des métiers
CONTRER L’ÉLARGISSEMENT DE L’ASSIETTE FISCALE
En effet, cette mesure permettra au taux nomi‑ nal d’imposition de passer d’environ 30 % à 26 % en 2018. « Une étude récente de l’OCDE montre que le taux d’imposition des sociétés est, parmi les facteurs fiscaux pertinents, celui qui est considéré en premier par les entreprises avant de s’installer dans un pays, poursuit Camille Seillès. Le baisser est donc une bonne chose, même si le taux global d’imposition des sociétés au Luxembourg reste supérieur à la moyenne des pays membres de l’OCDE, qui se situe aux alentours de 23 %. » Certains pays sont, à cet égard, bien plus compétitifs que le Luxembourg. L’Irlande offre ainsi un taux nominal d’imposition de 12,5 %. « Cela dit, ce déficit au niveau du taux d’imposition peut être relativisé, la fiscalité n’étant pas le seul facteur considéré dans les projets d’investissement, explique Camille Seillès. Le Grand-Duché a d’autres atouts susceptibles de faire pencher la balance en sa faveur, à commencer par un écosystème financier sophistiqué et mature. Toutefois, cela fait une vingtaine d’années que la tendance dans les pays industrialisés est à la baisse du taux d’imposition des sociétés. Le Luxembourg doit suivre le mouvement s’il veut rester compétitif. » Pour Norry Dondelinger, directeur des affaires économiques à la Chambre des métiers, c’est d’autant plus important que les conséquences du projet Beps, développé par l’OCDE, devraient bientôt se faire sentir. Ce programme tente de lutter contre l’érosion de la base d’imposition, conséquence des nom‑ breuses stratégies mises en place par les socié‑ tés pour transférer leurs bénéfices dans des territoires où la fiscalité est plus intéressante, sans pour autant qu’elles y déploient une acti‑
vité substantielle. « La tendance au Luxembourg, à travers ce genre de projets, est donc à l’élargissement de l’assiette fiscale, insiste‑t-il. Le Luxembourg pourrait donc réduire son taux d’imposition pour rester compétitif. Ce serait une mesure particulièrement intéressante pour le secteur financier qui, je pense, est le plus touché par la concurrence de pays aux taux d’imposition très bas. »
Le secteur bancaire, en matière fiscale, pointe aussi les enjeux de coûts nets relatifs à la TVA. Les services bancaires n’étant pas soumis à la TVA, les acteurs du secteur ne sont donc nor‑ malement pas autorisés à la récupérer sur les livraisons de biens et les prestations de services qui leur sont facturées, sauf si certaines condi‑ tions sont réunies. « Une exonération pouvait jusqu’alors être obtenue pour certaines fonctions de support mutualisées au sein du même BONIFICATION D’IMPÔT SUR groupe », relève Camille Seillès. Au Luxembourg, LES LOGICIELS ET TVA cette possibilité a toutefois été remise en cause D’autres éléments envisagés pourraient peser par plusieurs arrêts récents de la Cour de justice dans la balance. « L’enjeu de transforma- de l’Union européenne. « Les réponses apportées tion digitale entraîne des coûts importants par l’administration gouvernementale face en matière de développement informa- à cette problématique sont regardées de très tique, indique Camille Seillès. Un coup de près par les institutions installées ou en voie pouce fiscal serait donc le bienvenu. La pro- d’installation au Luxembourg, plus particuposition du gouvernement d’instaurer une lièrement dans le contexte du Brexit », assure bonification d’impôt sur les logiciels est une le secrétaire général de l’ABBL. évolution positive, même si le champ d’application de cette nouvelle mesure dans la pra- L’ARTISANAT TIRE SON ÉPINGLE DU JEU… tique reste encore à préciser. » Le budget 2018 Mais qu’en est-il de l’attractivité du Luxem‑ prévoit une bonification pour l’acquisition de bourg dans les autres secteurs ? « Contrailogiciels. L’ABBL souhaite qu’elle soit aussi rement au domaine financier, l’artisanat appliquée aux projets de développement de luxembourgeois reste assez privilégié, solutions informatiques. fiscalement parlant, par rapport aux pays Janvier 2018 – Tax & Legal –
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RÉFORME FISCALE
« Réduire le taux d’imposition serait une mesure particulièrement intéressante pour le secteur financier qui est le plus touché par la concurrence de pays aux taux d’imposition très bas. » Norry Dondelinger Directeur des affaires économiques à la Chambre des métiers
étrangers, explique Norry Dondelinger. Dans ce domaine d’activité, le taux nominal d’imposition est en effet plus bas au Luxembourg que chez nos voisins. » Norry Dondelinger rappelle toutefois l’im‑ portance d’adopter une attitude vigilante dans un monde où les lignes bougent très rapide‑ ment. « L’écart entre le taux d’imposition sur l’artisanat au Luxembourg et celui en vigueur en Allemagne, par exemple, ne fait que rétrécir, précise-t-il. En 2003, il y avait encore en moyenne 9,2 points d’écart entre l’Allemagne et nous. Nous ne sommes plus qu’à 2,7 points aujourd’hui. »
… MAIS SOUHAITE D’AUTRES MESURES FISCALES
Pour doper fiscalement l’artisanat au Luxem‑ bourg, le directeur des Affaires économiques à la Chambre des métiers se fait donc l’écho de deux mesures souhaitées par le secteur. « La première était prévue dans le programme du gouvernement, mais n’est toujours pas activée, relève M. Dondelinger. Il s’agit de l’instauration d’une réserve immunisée d’impôt. Concrètement, on n’imposerait pas une partie du bénéfice des artisans à condition qu’ils réinves34 —
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tissent ce montant dans leur entreprise. Ceci permettrait de renforcer les fonds propres de l’entreprise et de développer leur activité. Un système de plafond doit accompagner cette réserve, afin que les montants soustraits à l’impôt restent raisonnables et que la mesure reste orientée en faveur des PME. » En outre, Norry Dondelinger pointe une autre mesure intéressante pour le secteur de l’artisanat : l’amortissement fiscal pour les travaux de rénovation énergétique. « Cette possibilité de déduction fiscale pourrait inciter les propriétaires à investir dans leurs logements locatifs, afin d’en améliorer le bilan énergétique », explique-t-il.
ET L’ADMINISTRATION DANS TOUT ÇA ?
Si la fiscalité au Luxembourg se réforme constamment, c’est aussi le cas de l’admi‑ nistration. Comment les entreprises per‑ çoivent-elles les efforts entrepris pour faciliter les procédures administratives en matière de fiscalité ? « Nos membres sont plutôt des PME, indique Norry Dondelinger. En général, elles sous-traitent le travail administratif à des fiduciaires. La complexité des procédures administratives
n’est donc pas vraiment perçue par nos membres… si ce n’est à travers les factures de leurs fiduciaires, qui ont tendance à augmenter en raison de cette complexité. » De son côté, Camille Seillès relève le rôle croissant des banques comme « auxiliaires des administrations fiscales ». « Il s’agit d’une tendance de fond au niveau international, à l’heure où la mise en place des nouveaux standards d’échange de renseignements en matière fiscale requiert des investissements conséquents de la part des institutions financières. Sur ces dossiers, nous pouvons saluer la création d’une division dédiée au sein de l’Administration des contributions directes, avec laquelle nous avons étroitement travaillé dans la perspective des premiers échanges effectués cette année. » La dernière réforme fiscale engagée par le Luxembourg a donc au moins permis de ne pas laisser se creuser l’écart entre le Grand-Duché et les pays concurrents. Mais dans un monde aux changements constants, on ne peut que souligner l’importance d’une grande flexibilité fiscale ainsi que de mesures innovantes qui permettent de s’ajuster en fonction des pays concurrents. Q. D.
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INTERVIEW M E GUY CASTEGNARO
« Chaque nouveau problème n’implique pas forcément l’adoption d’une loi » Avec un arsenal de normes juridiques complet, le Luxembourg dispose d’un droit du travail particulièrement efficient, selon Guy Castegnaro, fondateur et managing partner du cabinet Castegnaro, Ius Laboris Luxembourg.
La digitalisation, en effet, bouscule beaucoup les pratiques et les modèles en place. On parle d’ubérisation de pans entiers de l’activité économique. De nouvelles formes de travail apparaissent. L’exemple d’Uber, avec des chauffeurs non professionnels dont l’accès à la clientèle dépend d’une plateforme unique, illustre bien ces changements. Il n’est pas le seul. Cependant, le droit du travail tel qu’il existe permet de gérer ces nouveaux enjeux contractuels. Le droit ne peine-t-il pas à suivre les évolutions actuelles ?
De manière générale, le droit est plus lent à s’adapter. Le travail législatif n’avance pas aussi vite que l’évolution technologique. Je pense cependant que les outils juridiques dont nous disposons déjà en droit du travail suffisent à répondre aux nouveaux cas de figure qui se présentent à nous. La relation de travail existante entre Uber et ses chauffeurs peut être envisagée et définie selon les règles actuellement établies. Le cadre existe. Il faut simplement 36 —
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l’appliquer au regard des nouvelles situations. C’est aux tribunaux, selon les critères définis dans le droit, de déterminer la nature du lien entre les chauffeurs et la plateforme digitale, de dire s’il y a lien de subordination ou non, de trancher sur d’éventuelles indemnités en cas de litige. De nouveaux usages posent de nouvelles questions, en permanence. Le droit du travail permet de trancher.
il appartient au législateur de procéder aux adaptations utiles, pour accompagner des changements de société. Quelles ont été les adaptations récentes en matière de droit du travail ?
On peut par exemple citer le congé de paternité de 10 jours accordé aux pères au moment de la naissance. Cela illustre bien comment le législateur adapte le droit au regard des nouIl n’y a pas lieu de réformer le droit du velles aspirations de la société. Dans le même travail en profondeur ? registre, le gouvernement a aussi adopté une L’encadrement des nouveaux usages ne passe réforme du congé parental, afin de le rendre pas forcément par l’adoption d’une nouvelle plus flexible et plus attractif. La législation loi. C’est faux de le penser. Avec la technolo- s’est adaptée dans le domaine du détachegie, de nouveaux problèmes et de nouvelles ment des travailleurs vers le Luxembourg, questions surgissent. Quel contrôle peut être avec la création du badge social notamment, effectué sur la correspondance privée réalisée à pour lutter contre le dumping social et assupartir d’une adresse e-mail professionnelle ou rer à chaque personne des conditions de traau moyen d’autres outils de communication ? vail adéquates. Peut-on tout dire sur les réseaux sociaux ? Les réponses à ces questions récentes trouvent des À quels enjeux vos clients sont-ils réponses dans le droit national et international. confrontés en ce moment ? Les textes constitutifs de l’Union européenne, Le nouveau règlement général sur la protecfondamentaux, consacrent la protection de tion des données personnelles, qui entrera en la vie privée, la liberté d’expression. Or, on application au printemps prochain, entraîne le sait : la liberté des uns s’arrête là où com- une importante demande de conseil. Beaumence celle des autres. Le secret professionnel, coup de questions sont relatives à l’utilisal’interdiction d’injurier, de diffamer existent. tion des nouveaux moyens de communication, On a ce qu’il faut. Et les tribunaux appliquent comme nous l’évoquions. Elles ont trait à la le droit, en interprétant les textes existants à possibilité d’utiliser des éléments recueillis l’aune de nouvelles problématiques. Ensuite, comme preuve ou non dans le cadre d’un litige,
PHOTO Patricia Pitsch (Maison Moderne)
Me Castegnaro, le monde professionnel connaît d’importantes mutations. On parle beaucoup de transformation digitale des métiers, de besoins accrus en flexibilité, de carrières plus hétérogènes, de meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle… Au regard de ces évolutions, comment le droit du travail doit-il s’adapter ?
INTERVIEW
en tenant compte du respect de la frontière entre vie privée et vie professionnelle. Beaucoup de dossiers entretiennent aussi un rapport avec le droit du travail collectif, le respect des conventions sociales, le portage salarial, la durée du travail, etc.
Guy Castegnaro, fondateur et managing partner, Castegnaro, Ius Laboris Luxembourg.
On sait que les carrières ne sont plus aussi linéaires qu’il y a quelques années. Quelles répercussions ces évolutions peuvent-elles avoir en droit du travail ?
Le temps où l’on entrait dans une banque en début de carrière pour en ressortir au moment de la pension est révolu, en effet. Diverses raisons permettent d’expliquer ce phénomène, la plus importante étant la disparition de garantie en matière de perspective de carrière à long terme. Les risques sont aujourd’hui plus importants, en raison de facteurs externes, et les travailleurs s’adaptent, bougent plus facilement. Les nouvelles générations ont aussi d’autres aspirations. Si l’on parle de plus en plus de flexisécurité, pour reprendre ce concept venu de Scandinavie, on peut dire que le Luxembourg la met déjà en œuvre. Comment cela se traduit-il ?
Au Luxembourg, le recours au CDD reste une exception, selon des principes fixés par la loi. La norme, c’est le CDI. Mais peut-on, pour autant, parler de frein à la flexibilité ? Pas forcément. Par rapport au droit du travail en France, en Belgique ou encore en Allemagne, pour peu que les conditions de licenciement soient respectées, il est assez facile de se séparer d’un salarié au Luxembourg. Si un tribunal est amené à déclarer un licenciement comme abusif, les indemnités qui en découlent restent modestes. En France, les dommages et intérêts sont plus élevés. En Allemagne, cela peut aller jusqu’à l’obligation de réintégrer l’employé licencié abusivement. Y aurait-il lieu d’accroître encore la flexibilité au profit des entreprises ou pour renforcer l’attractivité du Luxembourg ?
Les principes actuels sont bons. On pourrait encore assouplir un peu plus les conditions dans lesquelles on a recours au CDD, en augmentant le nombre de fois où il peut être renouvelé, en adaptant la durée limite d’un tel contrat à la réalité du marché. Mais cela ne changera pas fondamentalement la situation et ne devrait pas avoir beaucoup de conséquences sur le marché de l’emploi. Luxembourg dispose d’un éventail d’outils très large, avec suffisamment de normes juridiques pour répondre aux attentes tant des salariés que des entreprises. Au-delà des minima légaux en place, la négociation entre parties peut s’exercer au niveau du contrat de travail ou au travers des conventions établies entre partenaires sociaux. Employeurs et représentants du per-
sonnel doivent s’entendre. Le dialogue social a toujours occupé une place importante au Luxembourg. Si, depuis peu, il est de plus en plus difficile d’obtenir des accords, les textes de loi l’encouragent toujours. Dans quelle mesure le Luxembourg facilite-t-il l’arrivée de compétences recherchées ?
Des adaptations ont eu lieu en matière d’immigration pour attirer des travailleurs hautement qualifiés. Beaucoup de choses, au niveau du droit, ont été faites. Il y a d’autres enjeux, pas forcément légaux ou juridiques, pour renforcer l’attractivité du Luxembourg. On manque de logements, ou leur coût est prohibitif. On manque de place dans les écoles internationales. Il faut encore travailler sur la qualité de vie et le développement des infrastructures.
mum ou de l’indexation automatique. Cette mesure a des désavantages, mais présente aussi des avantages pour les employeurs. Si elle constitue un coût, elle garantit notamment une réelle paix sociale. C’est notamment parce qu’il y a cette indexation automatique que le Luxembourg ne connaît pas ou peu de mouvements sociaux comme des grèves. Quels sont les autres problèmes importants qui pourraient trouver des réponses à travers le droit du travail ?
Face aux problèmes d’épuisement professionnel, il y a sans doute une opportunité pour le législateur à adapter les dispositions relatives au harcèlement moral et d’envisager, avec les partenaires sociaux, de mettre des procédures et des règles en place pour prévenir les dérives. Le respect de la diversité est aussi un sujet important. Il faut sans En matière d’attractivité, l’indexation doute mieux veiller à l’application des règles automatique des salaires a souvent été existantes. Au Luxembourg, cependant, on pointée du doigt… ne peut pas se plaindre. La discrimination C’est vrai que c’est une particularité luxem- salariale reste faible. À l’avenir, je pense aussi bourgeoise. Mais je n’ai jamais vu une que nous devrons de plus en plus faire face à entreprise décider de ne pas s’installer au des questions relatives à la pratique du culte Luxembourg à cause du salaire social mini- dans l’environnement professionnel. S.L. Janvier 2018 — Tax & Legal —
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CARTES BLANCHES
ENJEUX À L’AGENDA
Quels sont les enjeux réglementaires et légaux pour votre secteur en 2018 ? Paperjam Plus a posé la question à des experts de différents horizons.
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ILLUSTRATION Ellen Withersová (Maison Moderne)
Quelles perspectives pour 2018 ?
CARTES BLANCHES LUTHER
HOGAN LOVELLS
« Un impact sur nos analyses juridiques » E
n tant que conseiller juridique en matière de fonds d’investissement, l’année 2018 annonce un renforcement assez marqué de la façon dont nous exercerons nos activités. En effet, alors que jusqu’ici (ceci était déjà moins vrai les dernières années, mais le processus semble s’accélérer) notre travail consistait principalement à faire usage de lois sectorielles locales, un certain nombre d’initiatives européennes vont pleinement entrer en vigueur au niveau national et impacteront substantiellement nos analyses juridiques, tant au niveau de la mise en place d’une structure que de son fonctionnement. Les principales sources de réglementations concernées sont – AIFMD à peine digérée – Mifid II, Euveca et GDPR sur la protection des données. Puisque les sources normatives proviennent désormais soit de « guidelines » émises au niveau européen par l’Esma, soit de règlements européens dont l’applicabilité est directe, notre tâche principale consistera en premier lieu à effectuer une analyse d’impact sur les lois applicables (SIF, RAIF, droit des sociétés, AML / KYC...) et sur les structures de fonds alternatifs que nous mettons
Hervé Leclercq Partner Luther
« Toi, tu auras des étoiles comme personne n’en a... »
en place ou conseillons. Cela n’est pas chose aisée puisque, dans certains cas, des concepts peuvent éprouver des modus operandi bien rodés, notamment en ce qui concerne la distribution et la délégation de gestion de portefeuille. Suite à cela, en partenariat avec nos clients, nous ajusterons au fil de l’eau les documents contractuels ou opérationnels. L’un des aspects saillants des règlements susmentionnés est d’avoir une applicabilité transversale, les règlements Mifir, GDPR impactant en effet des pans entiers de l’activité de nos clients et de leurs prestataires. Il conviendra alors de maintenir une veille juridique poussée dans ces domaines sans pour autant paralyser les initiatives entrepreneuriales de nos clients promoteurs. Ensuite, comme d’habitude, il faudra toujours prévoir l’imprévisible…
Pierre Reuter Partner Hogan Lovells Simon Recher Juriste Hogan Lovells
A
vec Spacer esources.lu, le Luxembourg est le premier pays européen à se doter d’un cadre réglementaire (à travers la loi du 20 juillet 2017, dite la « Loi » ci-après) assurant une sécurité juridique aux opérateurs privés quant aux ressources spatiales qu’ils pourraient exploiter. Que sont les ressources spatiales ?
Elles sont généralement définies comme des ressources abiotiques, situées hors de l’atmosphère terrestre et pouvant en être extraites. Cette définition devrait inclure les minéraux et l’eau, mais pas les positions orbitales, ni les bandes de fréquence. Pour la majeure partie de la doctrine, elles devraient être exploitées selon les règles du droit international et par analogie à l’exploitation des ressources maritimes. Cela signifie qu’elles sont susceptibles d’appropriation. Cependant, les astéroïdes eux-mêmes et autres corps célestes ne le sont pas. Le Parlement luxembourgeois a néanmoins décidé de ne pas les définir dans la loi. Le concept utilisé étant relativement large, une grande variété de matériaux est susceptible d’être soumise aux dispositions de la Loi. Qui peut extraire / exploiter des ressources spatiales ?
Toute société anonyme, société en commandite par actions, société à responsabilité limitée ou société européenne ayant son siège social au
Luxembourg et dûment agréée conformément aux termes de la Loi peut explorer ou utiliser des ressources spatiales. Un agrément ?
Le ministre en charge des activités spatiales est habilité à octroyer ledit agrément. La Loi impose des conditions similaires à celles prévues par la loi relative au secteur financier – l’Administration pourra ainsi s’appuyer sur son expérience dans ce domaine. En résumé, les candidats devront démontrer qu’ils disposent de connaissances suffisantes et d’un programme d’activité viable pour être agréés. Des astéroïdes à éviter ?
La Loi est visionnaire et prévoit un encadrement souple des mineurs spatiaux. Certaines problématiques ne sont, cela étant, pas résolues et seront probablement discutées au cours de l’année 2018. Le défaut d’une définition de « ressources spatiales » laisse subsister une marge d’interprétation (trop ?) importante. Quid également de leur utilisation : que pouvons-nous faire de ces ressources ? En avons-nous réellement besoin ? Les pionniers ont sans doute déjà leurs idées – il ne reste qu’à attendre et observer… Quoi qu’il en soit, la prochaine fois que vous admirerez les étoiles, n’oubliez pas que les étoiles sont dorénavant plus que de simples guides !
Janvier 2018 — Tax & Legal —
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CARTES BLANCHES ATOZ
CNS
« Une année de transition fondamentale »
« Finie la récré. Les données personnelles, mettez-vous en rang ! »
Jérémie Schaeffer Partner, head of corporate implementation Atoz Tax Advisers
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anvier 2018 sera marqué par l’entrée en vigueur de la directive européenne sur le marché des instruments financiers (Mifid II), et des nouvelles règles d’information sur les produits d’investissement packagés de détail et fondés sur l’assurance (Priips), dont la production de documents d’informations-clés (KID) à destination des investisseurs de détail. Ces mesures font peser des contraintes inédites sur les gestionnaires d’actifs et appellent donc des réponses nouvelles qui leur permettent de se conformer à leurs obligations tout en continuant à proposer des produits attractifs. Ceci passe par des outils innovants qui tirent le meilleur des derniers développements technologiques. Nous pouvons d’ailleurs nous enorgueillir d’avoir vu récemment le premier règlement européen signé électroniquement à l’aide d’un dispositif Luxtrust, témoignage du savoir-faire du pays. Sur des sujets proches, 2018 sera l’année de l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation sur la protection des données à caractère personnel (GDPR), et probablement de la transposition de la quatrième directive sur la lutte contre le blanchiment d’argent. Cette dernière soulève de nombreuses questions, notamment
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sur la création d’un registre des bénéficiaires effectifs. Quant au GDPR, plus que ses dispositions techniques, dont certaines procèdent essentiellement d’une mise à jour du droit actuel, c’est son champ d’application (parfois hors UE) et l’ampleur des sanctions prévues (jusqu’à 4 % du CA mondial annuel d’une entreprise ou 20 millions d’euros) qui exigent la plus grande attention. Enfin, et peut-être surtout, 2018 sera une année de transition fondamentale pour l’industrie des fonds en Europe. L’heure n’est plus à pronostiquer sur les possibles issues du Brexit, mais à s’emparer des questions qu’il impose. Les récentes positions de l’Esma sur les exigences de substance en matière de délégation, la réaction malheureusement tardive des autorités luxembourgeoises au projet de glissement de la supervision de certains fonds des autorités locales vers l’Esma – porte ouverte à un mouvement à plus grande échelle – et l’ambition décomplexée de pays voisins sont autant de sujets d’attention pour l’ensemble des acteurs, privés et publics, de la Place. Nous nous devons d’y apporter une réponse constructive, respectueuse du droit européen, mais aussi volontariste et garante du futur du Grand-Duché.
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C’
est le 25 mai 2018 que le règlement général sur la protection des données (General Data Protection Regulation, GDPR) entrera en vigueur. Ce texte supranational incite les entreprises et organisations à être davantage vigilantes concernant l’exploitation des données attenantes à un individu. Il ne s’agit pas simplement d’abroger la directive 95/46/CE, transposée au Luxembourg par la loi du 2 août 2002, pour une harmonisation des pratiques sur le sol européen. Cette volonté doit être saluée, convenons-en ; mais c’est bel et bien le niveau de renforcement de la législation déjà en place et normalement appliquée par tous (sic !) qui doit attirer toute notre attention. Notons le périmètre particulièrement large de ce texte. En effet, nous sommes tous citoyens, attachés à la défense de nos libertés fondamentales, d’une part, et maillons d’une vie en société consommatrice vorace de données, d’autre part. Nous voilà donc face à des prescriptions des plus intéressantes. Il y est plus question de principes, de conduite, de responsabilisation, voire d’éthique, que de modèles stricts d’organisation à appliquer ou d’interdictions manifestes de faire. Nous attendrons bien évidemment les précisions de notre loi nationale en cours de finalisation, des premières décisions des autorités de contrôle nationales, des ajustements de tel ou
Arnaud Constant Chargé de la protection des données Caisse nationale de santé
tel règlement grand-ducal et toute autre circulaire à appliquer. Le futur règlement ne vient que renforcer une situation existante, via une responsabilisation du bien nommé responsable de traitement, à qui il incombera des obligations de formalisme quant aux données qu’il traite. Il faudra aux responsables de traitement appréhender leur environnement et les spécificités de leur secteur (santé, fonds d’investissement, banque privée, assurance, commerce…), convenir des modalités d’information vis-à-vis des personnes concernées et satisfaire à l’exercice de leurs droits multiples. L’ensemble de ces tâches sera matérialisé par un véritable effort de documentation quant à la légitimité, la base légale, les moyens et tout autre détail que peut requérir la parfaite maîtrise des processus évoqués. Au final, il faut dès à présent que les responsables de traitement débutent leurs travaux pour ne pas être pris de cours par une année 2018 qui sera à coup sûr placée sous le signe de la protection des données, car quoi qu’il en soit, parions qu’en mai 2018 les comparaisons se feront sur les niveaux de retard réciproques, plus que sur les conformités atteintes.
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« Faire face aux exigences posées par le RGPD » À
compter du 25 mai 2018, le nouveau règlement européen relatif à la protection des données personnelles connu sous l’acronyme RGPD s’appliquera à toutes les entreprises publiques ou privées. Ces dernières devront entrer dans une démarche proactive de mise en conformité du nouveau règlement. L’enjeu est de taille, car tout manquement à ces nouvelles obligations pourrait être lourdement sanctionné par l’autorité de contrôle, la CNPD, qui sera habilitée dès l’entrée en vigueur du règlement à infliger des amendes allant jusqu’à 20 millions d’euros et 4 % du chiffre d’affaires mondial. Le champ d’application du RGPD est particulièrement large : toutes les entités, européennes ou non, sont concernées à partir du moment où elles collectent et effectuent des traitements de données à caractère personnel d’un citoyen européen. Le RGPD vient renforcer les droits de la personne, et par conséquent augmenter les devoirs et les responsabilités de toute la chaîne d’acteurs, du responsable de traitement aux partenaires commerciaux, y compris les sous-traitants fournisseurs de services. Tous les flux de données sont concernés par cette nouvelle réglementation. Ces nouvelles contraintes s’appuient notamment sur
le principe d’accountability qui impose à chaque entreprise une obligation de rendre compte, notamment en se dotant d’une politique globale de protection des données conforme à la réglementation, et en étant à même de prouver à tout moment que des mesures concrètes et des procédures adéquates ont été mises en place. Dans ce nouveau contexte, il est préconisé que les responsables de traitement aient recours à des prestataires externes leur permettant d’assurer une mise en conformité effective. L’étude Bonn & Schmitt offre d’assister ses clients en prenant en compte tant les aspects juridiques qu’organisationnels et techniques. Il s’agit de mettre en place une mise en conformité pragmatique à un coût raisonnable, afin d’appréhender en toute sérénité la date butoir du 25 mai 2018.
Alain Grosjean Partner Bonn & Schmitt Avocats
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« Mutation vers une fiscalité plus morale » Mathilde Ostertag Tax local partner GSK Stockmann
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ans un monde où l’échange de renseignements est devenu la norme et le secret bancaire une exception, le Luxembourg continue sa mutation vers une fiscalité plus morale. Or, le Luxembourg doit exercer ce difficile travail d’équilibriste et jongler entre l’obligation de transposer les mesures visant à éliminer l’évasion fiscale, d’une part, et la nécessité de conserver un cadre fiscal attractif encourageant les investissements et promouvant l’entrepreneuriat au Luxembourg, d’autre part. Un des enjeux pour 2018 et les années à venir sera, entre autres, la transposition par le Luxembourg des directives Atad et Atad 2, établissant des règles pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale et notamment les hybrid mismatches. Avant même que ces directives ne soient transposées, le secteur financier doit déterminer au plus vite quel sera l’impact de ces nouvelles mesures sur les investissements et structures actuels. Dans une certaine mesure, les fonds d’investissement, les véhicules de titrisation et les structures de type private equity seront impactés, nécessitant des ajustements afin de s’adapter au nouvel environnement fiscal. De l’autre côté de la balance, l’outil fiscal peut être utilisé à bon escient et servir à promouvoir l’essor de nouvelles entreprises,
ainsi que la recherche et développement. C’est dans cette optique que le gouvernement a déposé le projet de loi n° 7163 visant à instaurer un nouveau régime d’exonération fiscale pour certains revenus de propriété intellectuelle, la nouvelle IP Box. Ce nouveau régime a été élaboré conformément aux recommandations de l’OCDE dans son rapport final de l’action 5 du plan Beps, notamment en appliquant un ratio Nexus aux revenus exonérés. Cependant, ce projet ne va pas assez loin et ne vise pas les actifs de propriété intellectuelle issus d’activités innovantes entreprises par des PME. Une autre réformette proposée par le gouvernement est l’extension de la bonification d’impôt de 8 % pour l’acquisition de logiciels (projet de loi n° 7200). Dans le cade de la stratégie start-up nation, ensemble avec la réduction du taux d’imposition des sociétés à 26,01 % à compter de 2018, ce sont autant de petits signaux envoyés aux PME et start-up luxembourgeoises de la volonté de proposer un cadre fiscal attractif. Le Luxembourg pourrait aller encore plus loin et envoyer un message fort vis-à-vis des investisseurs en abolissant notamment la retenue à la source sur les dividendes. D’autres juridictions, à l’instar des Pays-Bas, sont en train de franchir ce pas.
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DIGITAL
TRANSFORMATION DU MÉTIER D’AVOCAT
Le numérique s’immisce peu à peu dans les cabinets d’avocats. Le métier se transforme progressivement, en replaçant le client au cœur des processus. Quels sont les impacts de la digitalisation sur les activités juridiques ? Comment les cabinets peuvent-ils s’y préparer, afin de l’intégrer au mieux et profiter des leviers de productivité et de croissance qu’elle offre ? 44 —
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ILLUSTRATIONS Ellen Withersová (Maison Moderne)
Une transition en cours
DIGITAL
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lors que les secteurs de la finance et du commerce sont depuis plusieurs années concernés par la digitalisation, les cabinets d’avocats semblent encore attachés aux méthodes traditionnelles. Leur digitalisation, pour tout dire, en est à ses prémices. « Si nous commençons seulement à parler de transformation digitale dans le domaine du droit, cela tient à la particularité de notre activité, explique Jean-Marc Ueberecken, managing partner au sein du cabinet Arendt & Medernach. Le droit, contrairement à la finance par exemple, n’est pas basé sur des chiffres, mais sur des mots. Et ces mots, ensemble, selon le contexte et la langue, peuvent recouvrir des significations différentes. » L’interprétation des textes de loi, considérant la diversité des situations qui peuvent y être confrontées, n’est pas le seul frein à l’entrée de la profession dans l’ère numérique. « Le métier d’avocat est également contraint par des règles déontologiques précises – le secret professionnel, l’honorabilité, la délicatesse… – qui peuvent, dans certains cas, limiter la digitalisation de nos processus », ajoute Guy Castegnaro, founder & managing partner du cabinet Castegnaro, Ius Laboris Luxembourg.
CERNER LES OPPORTUNITÉS DE LA DIGITALISATION
faisant appel à l’intelligence artificielle permettent également de rechercher des jurisprudences qui ont du sens dans un cas précis. » La technologie facilite aussi l’analyse et la rédaction des contrats. Il ne s’agit pas uniquement d’extraire les données, mais de les comprendre, de détecter d’éventuelles contradictions et de répliquer des modèles à partir de bases de données. « Une telle solution n’est pas forcément essentielle pour la rédaction d’un contrat spécifique, qui aura été négocié pendant des semaines. Mais elle s’avère extrêmement importante pour l’établissement des documents annexes, tels que des procurations », précise le managing partner d’Arendt & Medernach. Du côté du cabinet Castegnaro aussi, la digitalisation offre de réelles opportunités au quotidien. « Elle nous permet de mieux appréhender la gestion des connaissances à l’échelle du cabinet, c’est-à-dire l’ensemble des données, articles et informations que l’on collecte chaque jour. Nous pouvons désormais numériser ces documents, les organiser, les gérer et les retrouver beaucoup plus rapidement », confie Guy Castegnaro.
VEILLER À PROTÉGER SES DONNÉES
La digitalisation permet ainsi aux avocats de réduire le temps consacré à des tâches à faible valeur ajoutée et, de cette manière, d’augmenter leur productivité. La compétitivité accrue découlant de la digitalisation du métier permet notamment une réduction des coûts au profit du client. Parallèlement, la dématérialisation et l’automatisation des processus contribuent à renforcer la qualité du travail. « Grâce à ces systèmes, les modèles sont à jour en permanence. Nous pouvons plus facilement détecter les erreurs et donc réduire les risques, souligne Jean-Marc Ueberecken. La digitalisation entraîne une transformation du métier d’avocat, et non pas sa disparition pure et simple. L’ordinateur est en effet encore loin d’être prêt à émettre un jugement. » Si le numérique amène son lot d’opportunités, il engendre aussi certaines contraintes, notamment en matière de sécurité. « L’ensemble des données de nos clients sont désormais numérisées, et non plus seulement conservées dans des classeurs présents dans les bureaux. Nous devons pouvoir nous appuyer sur des infrastructures informatiques parfaitement sécurisées, explique Marie Behle Pondji, senior associate au sein
La profession n’est cependant pas épargnée par la déferlante digitale. Et les acteurs doivent se préparer à surfer dessus. Le défi, dès lors, est d’abord de bien en comprendre les enjeux et les intérêts. « Aujourd’hui, par exemple, nous faisons face à une inflation très importante des textes juridiques, commente Jean-Marc Ueberecken. Il est impossible pour un humain, même un avocat expérimenté, de gérer une telle masse de documents. » Or, la technologie offre des réponses à ces problématiques. Ce faisant, elle modifie différents pans de l’activité juridique, de manière plus ou moins importante. « L’impact le plus grand concerne l’analyse de documents. Les outils digitaux permettent d’analyser des bases documentaires et d’en sortir les informations utiles, par exemple les lois applicables ou les juridictions compétentes pour chaque contrat, indique Jean-Marc Ueberecken. Les programmes Janvier 2018 — Tax & Legal —
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de Castegnaro. Nous devons être en mesure de démontrer à nos clients que nos systèmes sont imperméables à d’éventuelles cyberattaques, que leur identité et leurs affaires resteront confidentielles. Pour nos cabinets, cet enjeu entraîne des investissements financiers importants, mais indispensables. Le règlement général sur la protection des données (GDPR), qui sera applicable à partir du 25 mai 2018, viendra étoffer les mesures de sécurité et organisationnelles qui existaient déjà en la matière. Nous nous y préparons activement. »
REPENSER SES PROCESSUS INTERNES
S’engager dans un projet de transformation digitale requiert de se doter d’une stratégie adaptée. « Pour réussir leur transition, les cabinets d’avocats doivent se montrer à l’écoute des nouvelles technologies et de ce que le marché leur propose, conseille Jean-Marc Ueberecken. Ils doivent parvenir à identifier leurs besoins et les outils technologiques qui peuvent les aider à y répondre. » Une fois les solutions technologiques identifiées, il faut ensuite envisager leur intégration dans son propre milieu d’affaires pour mieux les mettre en œuvre. « Le plus complexe ne concerne pas le volet technologique, mais la gestion de l’humain. La digitalisation transforme la façon dont les personnes travaillent et, de ce fait, l’ensemble du fonctionnement d’un cabinet, assure le managing partner d’Arendt & Medernach. Pour pouvoir profiter pleinement des avantages offerts par la digitalisation de l’activité juridique, il s’agit avant tout de donner les explications nécessaires aux collaborateurs, afin de leur permettre de comprendre pourquoi nous implémentons tels outils et pourquoi certains processus sont amenés à changer. Ensuite, nous préparons nos collaborateurs, de manière graduelle, à travers des formations, pour les aider à utiliser ces outils au quotidien. »
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—Tax & Legal — Janvier 2018
S’ADAPTER À DE NOUVEAUX DÉFIS
Outre les processus internes, la digitalisation ouvre également de nouveaux champs de possibilités en matière de business. « En réduisant le travail répétitif et routinier, les outils numériques permettent à l’avocat de se consacrer à des tâches plus sophistiquées, commente Jean-Marc Ueberecken. Il a l’opportunité de (re)devenir un véritable conseiller pour son client. » En outre, la digitalisation permet aux cabinets d’avocats d’être plus réactifs qu’auparavant. « Grâce aux nouvelles technologies, nous pouvons être connectés partout, avoir accès à tous les dossiers où que l’on soit et ainsi répondre aux questions de nos clients à n’importe quel moment, affirme Guy Castegnaro. Notre métier s’en trouve changé, la relation client-avocat transformée. » Le client peut aujourd’hui bénéficier de services améliorés. Arendt & Medernach a par exemple développé des outils qui permettent d’automatiser certaines tâches chez le client et de vérifier la conformité aux réglementations applicables selon son métier. Le cabinet entend aussi profiter des possibilités offertes par les technologies en matière de collaboration. « Le numérique permet de placer la collaboration au centre des processus. D’une part, les outils digitaux nous permettent d’améliorer la communication entre les différentes spécialités de notre étude. D’autre part, ils pourront, à terme, renforcer la relation avec notre clientèle. Nous envisageons par exemple de créer un extranet où le client pourra suivre son dossier à tout moment », précise Jean-Marc Ueberecken. Parallèlement, le client est aujourd’hui beaucoup mieux informé en matière de droit. « De nombreux instruments juridiques, qui étaient auparavant le monopole de l’avocat, sont aujourd’hui accessibles en ligne, et certains cabinets commencent à offrir des prestations juridiques via internet. On est donc beaucoup moins dans une relation profane-averti, souligne Marie Behle Pondji. Dans ce contexte, les avocats doivent aujourd’hui apporter une réelle plus-value à leurs clients s’ils veulent continuer à exister. L’avenir de la profession passera par une expertise renforcée. » J.R.
Les meilleurs candidats n’ont souvent qu’un défaut. Ils sont déjà en poste . Heureusement, ils lisent tous Paperjam .
Le job-board de ceux qui ne vont pas sur les job-boards
OURS/INDEX
INDEX Maison Moderne ™ www.maisonmoderne.com Téléphone (+352) 20 70 70 E-mail publishing@maisonmoderne.com Courrier BP 728, L-2017 Luxembourg Bureaux 10, rue des Gaulois, Luxembourg-Bonnevoie fondateur
Mike Koedinger
Richard Karacian
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Etienne Velasti
RÉDACTION Téléphone (+352) 20 70 70-100 Fax (+352) 29 66 19 E-mail press@paperjam.lu Courrier BP 728, L-2017 Luxembourg dir ecteur de l a publication r édacteur en chef coor dinatr ice
Richard Karacian
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r édaction
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Quentin Deuxant (Q. D.), Sébastien Lambotte (S. L.), Jeanne Renaud (J. R.)
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cor r ection
STUDIO GRAPHIQUE dir ecteur a s socié
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dir ecteur de l a cr é ation dir ecteur a rtistique st udio m a nager
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RÉGIE PUBLICITAIRE Téléphone (+352) 20 70 70-300 Fax (+352) 26 29 66 20 E-mail regie@maisonmoderne.com Courrier BP 728, L-2017 Luxembourg dir ecteur a s socié chef d ’ édition
ENTREPRISES PERSONNES PUBLICITÉS
A - B
I - J - K - L
ADMINISTRATION DES CONTRIBUTIONS DIRECTES 32 ALLEN & OVERY 11, 25 AMAZON 8, 10 APPLE 8, 10 ARENDT & MEDERNACH 41, 44 ATOZ 17, 18, 40 BANQUE MONDIALE 8 BEHLE PONDJI MARIE 44 BONN & SCHMITT AVOCATS 42 BROUXEL FRANÇOIS 11
INFO INSTITUTE 8 JUNCKER JEAN-CLAUDE 8 KRANCENBLUM SERGE 28 KRAWCZYKOWSKI RAYMOND 10, 20 LARCIER GROUP 15 LECLERQ HERVÉ 38 LILITH PROJECT 43 LINKLATERS 2, 11 LTCO 29
C - D CASTEGNARO GUY 36, 44 CASTEGNARO, IUS LABORIS LUXEMBOURG 36, 44 CHAMBRE DES MÉTIERS 32 CLIFFORD CHANCE 4 CNS 40 COMMISSION EUROPÉENNE 8 CONSTANT ARNAUD 40 COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPÉENNE 32 DELOITTE LUXEMBOURG 8, 27, 10, 20 DLA PIPER 11 DONDELINGER NORRY 32
M - N - O - P
MÉDECINS SANS FRONTIÈRES 47 NAUTADUTILH 35 OCDE 3 OSTERTAG MATHILDE 42 PIOT WIM 10, 20 PWC LUXEMBOURG 8, 10, 20
Q - R - S RECHER SIMON 38 REUTER PIERRE 38 SCARDONI GEOFFREY 11 SCHAEFFER JÉRÉMIE 40 SCHMITZ MARC 3, 10, 20 SEILLÈS CAMILLE 32 SGG GROUP 28 SOGELIFE 51 SPACERESOURCES.LU 38
E - F
T - U - V - W
ENGELWOOD 23 EUROSTAT 8 EY LUXEMBOURG 3, 8, 10, 20 FACEBOOK 8, 10 FOYER VIE 52
TRUMP DONALD WILGEN
3 11
G - H GOOGLE GRAMEGNA PIERRE GROSJEAN ALAIN GSK STOCKMANN HOGEN LOVELLS
8, 10 32 42 42 38
Francis Gasparotto Marilyn Baratto
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FRANÇOIS PRUM
« L’avocat a un avenir prometteur »
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elon François Prum : « Notre profession s’inscrit dans la tradition et repose sur des valeurs qui rendent l’avocat unique. L’excellente conjoncture de notre pays des dernières décennies a contribué à l’explosion du nombre d’avocats-conseils et également de ceux œuvrant dans le domaine du contentieux. L’avocat moderne s’adapte parfaitement à l’évolution du monde des affaires et aux nouvelles technologies. Il est aujourd’hui un acteur important et incontournable. »
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Chaque mois, un acteur du secteur couvert par Paperjam Plus est sollicité pour partager en image ses impressions sur l’avenir de ce secteur. Ce mois-ci, François Prum, bâtonnier du Barreau de Luxembourg, s’est prêté à l’exercice et a répondu à la question : « Comment envisagez-vous l’avenir du secteur juridique ? »
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