PA P E R JA M . L U • JA N V I E R 2019
TAX & LEGAL
e u q i d i r u j , Fiscalité
p a c e l r e d r a G 2019 n e
uestions fiscale en q e rm fo ré e Un é te conformit u to n e 9 1 0 2 Une année nt gouverneme u a e v u o n u sd Les mesure
Thierry Lesage Partner Tax, Arendt
Pierre Gramegna Ministre des Finances
Sébastien Labbé Head of tax, KPMG Luxembourg
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ÉDITO
« Le rabais est-il rentable ? » Jean-Michel Lalieu Journaliste
PHOTO Maison Moderne
À
tous ceux qui imaginent encore que le Luxembourg est ce territoire au cœur de l’Europe où l’on ne paie pas ou très peu d’impôts, une récente étude d’Eurostat, l’office européen des statistiques, apporte un démenti flagrant. Sur l’année 2017, l’institut a mesuré le ratio global recettes fiscales / PIB qui correspond à la somme des impôts et des cotisations sociales nettes en pourcentage du produit intérieur brut. À ce jeu, le Luxembourg obtient une place en milieu de classement avec un taux de 40,3 %, soit exactement dans la moyenne de l’Union européenne (40,2 %). Il se situe à hauteur de l’Allemagne (40,5 %), mais évidemment loin de la France (48,4 %) et de la Belgique (47,3 %) qui monopolisent le haut du classement. Il n’est d’ailleurs pas rare d’entendre des experts en fiscalité plaider pour que le pays revoie sa politique fiscale vis-à-vis des entreprises, afin de rester compétitif dans un climat de course au « moins-disant ». Le précédent gouvernement a pourtant déjà fait des efforts et celui qui vient d’être installé en a encore promis. À travers la réforme fiscale de 2017, l’impôt sur le revenu des collectivités (IRC) a glissé, en deux temps, de 21 % à 18 % actuellement. Mais en ajoutant l’impôt communal commercial (ICC), le taux global de taxation des sociétés est de 26 %, au-dessus des moyennes de l’UE (21,9 %) et de l’OCDE (23,9 %). Dans le programme de gouvernement présenté début décembre, Gambia 2 prévoit encore de réduire le taux d’affichage global (IRC + ICC) de 1 % en 2019. Ce qui le laissera encore loin de l’Irlande et ses 12,5 % d’impôts. Faut-il s’en inquiéter ? « Je ne connais pas d’acteur qui vienne au Luxembourg juste pour le cadre fiscal », affirme Thierry Lesage, partner Tax au sein du cabinet Arendt,
dans ces pages. Plus qu’une fiscalité au rabais, les entreprises classiques recherchent un cadre clair et stable qui leur permette d’entrevoir leur avenir avec une certaine sérénité. Commentant le rapport Tax Policy Reforms en septembre dernier, Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d’administration fiscales de l’OCDE, observait, de son côté, que les différentes mesures prises par les États pour faire baisser l’impôt des sociétés étaient surtout menées par ceux où la taxation restait très élevée. Comme la France qui ambitionne de passer de 33 % à 25 % d’ici 2022 ou les États-Unis qui sont passés de 33 % à 21 % en décembre 2017. Avec un coût pour les finances publiques estimé à 1.500 milliards de dollars au cours de la prochaine décennie. En fait, même s’il est capital de ne pas faire passer le message d’un taux décourageant pour les entreprises, la forte tension sur le marché de l’emploi luxembourgeois imposerait plutôt au Grand-Duché de prendre des mesures destinées à réduire l’impôt des candidats à l’impatriation, afin de mettre toutes les cartes dans son jeu pour attirer les talents nécessaires au développement du pays. D’autant qu’on se rend compte peu à peu que les employés sont plus sensibles au taux d’imposition qui leur est réservé que les responsables d’entreprise. Or, à ce niveau non plus, le Luxembourg n’est pas toujours le pays de cocagne que certains imaginent.
La conversation continue en ligne : @paperJam_lu
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SOMMAIRE
TAX & LEGAL Janvier 2019 Dossier
Une réforme fiscale en questions Faut-il baisser l’imposition des sociétés ? Améliorer la fiscalité pour les start-up ? Revoir les droits de succession ? Quid des finances locales ? Ou encore comment lutter contre la concurrence internationale ? Alors que s’ouvre la nouvelle mandature, nous avons demandé à huit experts de nous livrer leur point de vue et de dessiner leurs priorités.
12 Sur le radar
Dans les coulisses
conseils
Next steps
IRC, taxes environnementales, impôts... État des lieux des taxes au Grand-Duché.
Notre photographe s’est rendu chez Hogan Lovells, un cabinet d’avocats installé au Luxembourg depuis cinq ans et qui a pris ses quartiers dans le bâtiment White Pearl, à Merl.
Comment repérer et évaluer de manière adéquate les enjeux de compliance ? Conseils de DS Compliance et de TMF Group.
Laurent Denayer, CEO de la regtech ume, livre en image sa vision de l’avenir du secteur réglementaire au Luxembourg.
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50
Les taxes, nerf de la guerre
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Sas de décompression
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PME
Une année 2019 en toute conformité
Interview
Pas de paradis fiscal « Nous voulons rester pour le petit entrepreneur compétitifs sans faire Bon nombre d’entrepreneurs s’interrogent une course au dumping » sur l’existence de niches fiscales dans lesquelles ils pourraient abriter leurs revenus et bénéfices...
26
Reparti pour cinq ans à la tête du ministère des Finances, Pierre Gramegna détaille ses priorités fiscales, budgétaires et ses ambitions pour la Place.
34
« Collaborer pour mieux se concurrencer »
Analyse
Le Luxembourg, valeur refuge Comme tous ses voisins, le Grand-Duché est exposé aux soubresauts géopolitiques et économiques. Mais le pays se distingue par sa stabilité.
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BRAND VOICE
FUND FINANCE
THE GROWING NEED OF INVESTMENT FUNDS FOR FINANCING SOLUTIONS “We have this unique combination of tax and legal expertises in one team.”
Antoine Fortier Marc Meyers
Maude Royer
Thibaut Partsch
CONTENT BY LOYENS & LOEFF LUXEMBOURG
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— Tax & Legal — Janvier 2019
Vassiliyan Zanev
PHOTO Caroline Lequeux
Loyens & Loeff is one of the major law firms in Luxembourg. Its Fund Finance team advises major lenders, investment fund managers and sponsors in the US and European markets on financing solutions for regulated and alternative investment funds. It offers tailor-made advice based on the current best practices, thanks to its unique multidisciplinary team of lawyers who practise in the banking and finance and investment management fields. The team has positioned itself as one of the leading fund finance practices in Luxembourg and is the ideal partner for structuring financing for investment funds.
BRAND VOICE
“We strongly believe that fund finance will become one of the pillars of the Luxembourg finance sector.” Where does this practice of external financing of investment funds come from?
innovative, pragmatic and tailor-made solutions to our clients. Thibaut Partsch: In concrete terms, this means that our client does not have to deal with several intermediaries. He has just one point of contact, capable of advising on all aspects concerning both the establishment and the bank financing of the fund. Marc Meyers: While the first part of our job as a fund formation adviser is generally related to the review and/or drafting of the fund’s constitutional documents, it is in this context paramount to ensure that the relevant documents cover the appropriate market-standard provisions in respect of the fund’s potential financing arrangements, as well as the related security packages, in line with the requirements of the finance providers. Antoine Fortier: The advantage of our team, which brings together in-depth knowledge of practices used in theinvestment management sector and the banking world, is to provide clients with a more comprehensive view of the trends and the practices in the fund finance industry. This enables our clients to take better decisions when structuring their fund finance transactions. We can prepare finance and fund documentation in line with the expectations and demands of lenders and fund managers.
Vassiliyan Zanev: Alternative investment funds have seen a considerable development in Luxembourg, and fund finance has emerged as a major means of financing. An increasing number of banks have responded to the growing demand of financing from investment funds. Such parties now offer specialist bridging and leverage solutions. This new practice, which originated in the Anglo-American countries, is spreading successfully across Europe. Marc Meyers: Luxembourg continues to strengthen its ranking as the world’s second largest fund domicile after the United States, as the assets under management of Luxembourg-domiciled funds have in 2017 for the first time crossed the bar of €4 trillion and stood at €4.207 trillion as at 31 October 2018. This increase is not only based on the growth of traditional Luxembourg-domiciled UCITS funds, but also due to the continued strong growth in respect of alternative investment funds. The modernisation of the Luxembourg partnership regime has led to offering fund initiators accustomed to Anglo-Saxon partnerships a new onshore alternative of fund structuring. This has been a significant driver for the success of Luxembourg as a European hub for the structuring of alternative investment funds, which is ultimately also a reason for the increased fund finance How do you see the investment fund finance market in Luxembourg activity in Luxembourg.
KEY MEMBERS OF THE FUND FINANCE TEAM:
VASSILIYAN ZANEV Partner in the Banking & Finance department of Loyens & Loeff, Vassiliyan Zanev leads the global Fund Finance practice and plays an active role in promoting this practice internationally.
MARC MEYERS Partner with Loyens & Loeff, Marc Meyers heads the Invest ment Management department.
THIBAUT PARTSCH Partner with Loyens & Loeff, Thibaut Partsch works in the Investment Management department.
and in Europe?
How was this team built?
Antoine Fortier: We have created a dedicated and
Thibaut Partsch: In light of the quick evolution
of the Luxembourg fund centre, the variety of products available and the increased competition, it is important to be able to rely on a team of experts with excellent industry knowledge and a strong understanding of complex transactions. This is our practice’s ambition. Vassiliyan Zanev: The recent years have been particularly active as regards fund finance transactions in Luxembourg and Europe, with positive growth, strong credit performance and absence of loan defaults. Given How does this structure make the continuing growth of the funds industry life easier for the client? in Luxembourg, we strongly believe that fund Maude Royer: Our Banking & Finance and finance will become one of the pillars of the Investment Management lawyers work Luxembourg finance sector. Having successclosely together, communicating with each fully represented lenders and fund managother on a daily basis and discussing legal ers in most of the major financings involving and structural issues from both the funds’ Luxembourg funds, we are proud to be one and the lenders’ perspective. Our best asset of the leading fund finance practices in Luxis our shared passion for fund finance and its embourg and to contribute to the industry’s development. Our goal is to offer the most development here.
multidisciplinary Fund Finance team, working in a fully integrated manner and combining the knowledge and expertise of lawyers from both our Banking & Finance department and our Investment Management department. We offer a wide range of services, including structuring of fund finance solutions, security interests over investors’ commitments, fund due diligence, regulatory, etc.
ANTOINE FORTIER Local Partner (as of 1 January 2019) in the Banking & Finance department of Loyens & Loeff, Antoine Fortier works on develo ping the Fund Finance practice.
MAUDE ROYER Senior Associate in the Banking & Finance department of Loyens & Loeff, Maude Royer advises clients on the financing for regulated and alternative investment funds.
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SUR LE RADAR
les taxes, nerf de la guerre irc union européenne
175.000 €
QUI PAIE LE PLUS D’IMPÔTS ?
Eurostat vient de livrer son classement des pays de l’Union européenne où l’on paie le plus d’impôts. Le montant a été calculé en mesurant le ratio global recettes fiscales / PIB, soit la somme des impôts et des cotisations sociales nettes en pourcentage du produit intérieur brut. Selon ce ratio, le Luxembourg pointe en milieu de classement dans la moyenne des 28.
La course au taux le plus bas est lancée entre les pays européens. Dans ce contexte, le futur gouvernement s’est engagé à relever de 25.000 euros la tranche de revenu à laquelle s’applique un taux minimal de l’IRC – actuellement à 175.000 euros –, soit 15 %.
41,4% ZONE EURO 40,2% UE
10%
20%
30%
r éfor me fiscale
50%
Une étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) de 2016 – reprise dans le texte d’accord de gouvernement – a calculé qu’au Luxembourg, les recettes des taxes environnementales ne représentent que 1,77 % du PIB ou 6,4 % de l’ensemble des recettes publiques. Des chiffres qui placent le Luxembourg en queue de peloton au niveau de l’Union européenne. Au sein des 28, seule l’Irlande fait moins bien (1,53 %).
c o o p é r at i o n f i s c a l e
1 % Après une réforme fiscale en 2017 qui a fait baisser l’impôt sur le revenu des collectivités de 21 % à 19 % en 2017 et à 18 % en 2018, Gambia 2 a encore promis une baisse de 1 % du taux d’affichage global en 2019. 8—
40%
Taxer plus vert
« Le Luxembourg n’est plus ce partenaire grognon qui bloquait un peu tout dès qu’il s’agissait de lutter contre l’évasion fiscale. »
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Pierre Moscovici, commissaire européen aux Affaires économiques et financières, à la Fiscalité et à l’Union douanière, estimait dans le dernier numéro de Paperjam (décembre 2018) que le Luxembourg joue davantage le jeu en matière de coopération fiscale, d’échange d’informations, de lutte contre la fraude et d’optimisation.
PHOTO Anthony Dehez
0%
en v ironnement
SOURCE Eurostat, novembre 2018
48,4% FRANCE 47,3% BELGIQUE 46,5% DANEMARK 45,1% POLOGNE 44,9% SUÈDE 43,4% FINLANDE 42,4% AUTRICHE 42,4% ITALIE 41,8% GRÈCE 40,5% ALLEMAGNE 40,3% LUXEMBOURG 38,9% PORTUGAL 38,4% HONGRIE 37,8% CROATIE 36,8% SLOVÉNIE 35,4% ROYAUME-UNI 35,4% TCHÉQUIE 34,5% ESPAGNE 34% CHYPRE 33,4% MALTE 33,2% SLOVAQUIE 33% ESTONIE 31,4% LETTONIE 29,8% LITUANIE 29,5% BULGARIE 29,2% PAYS-BAS 25,8% ROUMANIE 23,5% IRLANDE
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LAW
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PHOTO Jan Hanrion (Maison Moderne)
Encouraging a start-up Mentality in law
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PARTNERS
“We encourage everyone to take an entrepreneurial approach and get involved in business development.”
DR. MARCUS PETER — PARTNER Specialises in Investment Funds, Private Equity, Corporate, Real Estate
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Marcus Peter We opened in March 2016 with just 3 lawyers and 1 member of staff. We now have 5 partners, 20 associates, and 10 staff. Our team originates from more than 10 countries, and speaks more than 10 languages. This rate of growth is remarkable for a new law firm in Luxembourg and is among the fastest growth of a Luxembourg law firm over the last two years. This business-driven growth is based on client demand and delivery of timely and high quality work. We also put particular emphasis on building a loyal team with a transparent, social and motivating culture. Moreover, we are proud that the new function of an international partner as part of the GSK Stockmann management board will be carried out by Andreas Heinzmann to even more propel the development of our international business.
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get, but we will continue to expand in an organic fashion. Landmark deals have raised our profile in Luxembourg, and we are taking this Mathilde Ostertag We focus on practice areas message to a wider audience by attending that are particularly relevant to Luxembourg: international conferences as sponsors, speainvestment funds, private equity, banking & kers, and participants. We share our views on finance, capital markets, insurance law, corpo- current topics in publications, as well as in the rate & M&A, and tax. We are creative in how we national and international press. We also want combine these areas and offer clients uniquely to be good corporate citizens and support blended services. We have also benefited from the Philharmonie and the local art scene, for focusing on helping Asian businesses using example the art@office concept. The recent Luxembourg as a gateway to Europe. Track 02 exhibition on contemporary Luxembourg art was held in our premises and attracDo you see yourselves as a native ted more than 200 guests, showing once again Luxembourgish operation? the growing reputation of GSK Stockmann in Andreas Heinzmann Indeed. All five partners have Luxembourg. worked in Luxembourg for 10 to 15 years and are well established in the Luxembourg market. We understand very well the global, cross-border business in Luxembourg and serve both local and international clients from across Europe, formation Asia and North America. China is a particuFor more in : Stockmann lar focus and we have two lawyers of Chinese about GSK /en nationality in our team. On the other hand, we ww.gsk.de w do have particular affinity for the DACH region, as all partners are either native or fluent German speakers. We work closely with the GSK Stockmann offices in Germany and are part of an What have been the main drivers for this growth?
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FISCALITÉ
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Oling Paul Jean- UEL
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FISCALITÉ
DOSSIER
Une réforme fiscale en questions Janvier 2019 — Tax & Legal—
PHOTOS DR
Faut-il baisser l’imposition des sociétés ? Améliorer la fiscalité pour les start-up ? Revoir les droits de succession ? Quid des finances locales ? Ou encore comment lutter contre la concurrence internationale ? Alors que s’ouvre la nouvelle mandature, nous avons demandé à huit experts de nous livrer leur point de vue et de dessiner leurs priorités. — 13
FISCALITÉ
ATOZ
Doit-on réformer les droits de succession au Luxembourg ? Les droits de succession sont un sujet clivant pour le grand public comme pour les spécialistes. Pour certains, leur existence se justifierait par un souci d’équité et répondrait à une logique de redistribution qui pourrait atténuer les effets de perpétuation des inégalités. Pour d’autres, ils représenteraient une double imposition économique du capital et des revenus qui les ont générés.
A
u Grand-Duché, les droits de succession englobent deux composantes : les droits de mutation par décès et les droits de succession. Les premiers sont appliqués sur les transmissions d’immeubles localisés sur le territoire du Grand-Duché, quelle que soit la résidence du défunt et de ses héritiers. Les seconds s’appliquent aux autres éléments de patrimoine dès lors que le défunt est un résident luxembourgeois. Généralement, les droits sont assis sur la valeur du patrimoine transmis diminuée d’éventuels passifs. Les taux applicables dépendent du lien de parenté entre le défunt et ses héritiers : 0 % en ligne directe, jusqu’à 15 % en l’absence de lien de parenté. À ces taux s’ajoutent des majorations variant en fonction de la valeur du patrimoine transmis. Pour un patrimoine d’une valeur supérieure à 1.750.000 € et en l’absence de lien de parenté, les droits s’élèvent à 48 % (taux maximum au Grand-Duché). Certains États européens comme le Portugal, la Suède ou la Norvège, les ont supprimés. Les droits de succession en ligne 14 —
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directe (enfants du défunt) s’établissent à 30 % pour l’Allemagne et la Belgique, 36 % pour les Pays-Bas, 40 % pour le RoyaumeUni et 45 % pour la France, contre 0 % au Luxembourg. Notre système semble relativement attractif par rapport à celui de nos voisins. Eu égard à la faiblesse de l’enjeu budgétaire, un ajustement des droits de succession nous semblerait plus pertinent qu’une réforme : ces droits représentent en effet moins de 0,5 % du budget luxembourgeois. Se pose alors la question des objectifs politiques d’un tel ajustement. Nous en identifions trois principaux. En premier lieu, afin d’éviter ou réduire les risques de démantèlement de certaines entreprises luxembourgeoises, le dispositif pourrait introduire des abattements, exonérations ou sursis d’imposition successoraux en cas de transmission d’entreprises à des héritiers repreneurs autres que les héritiers en ligne directe, afin d’en réduire le coût financier immédiat et de maintenir l’outil de
production en place. En second lieu, il est possible d’envisager qu’un accroissement systématique des droits de mutation, sans possibilité d’exonération, aurait un effet incitatif sur les cessions de terrains constructibles. Cette disposition s’inscrirait dans un dispositif plus large répondant aux enjeux de développement démographique du pays et à la pénurie de logements. Enfin, le dispositif luxembourgeois ne prévoit actuellement aucun mécanisme d’imputation des impôts étrangers. Une succession peut en effet aboutir à une double imposition de l’actif successoral (pays de résidence du défunt et pays de résidence du ou des héritiers) faute de législation internationale harmonisée. Il semblerait logique de pallier cette situation compte tenu de la très grande mobilité des familles de résidents luxembourgeois. Un système d’imputation, voire d’exonération, pourrait être couplé à une politique active de signature de conventions de lutte contre les doubles impositions successorales avec les pays partenaires du Grand-Duché.
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FISCALITÉ
DELOITTE
Quelle fiscalité pour la Place ? Le Luxembourg offre au sein de l’Europe un environnement propice aux affaires soutenu par un cadre légal, politique et financier doté d’un grand dynamisme. Un centre mondial de premier plan pour la domiciliation de fonds d’investissement et également un pôle fintech émergent. wski ourg zyko rawc te Luxemb K d n it o lo Raym leader, De t tax tner e
A
u-delà du secteur financier, les autres domaines constitutifs du tissu économique luxembourgeois (i.e. mobilité / logistique, construction…) contribuent également au dynamisme national. Des infrastructures à la pointe, incluant un cadre réglementaire et de surveillance de haute qualité, placent le Luxembourg au premier plan de l’innovation. Compte tenu de la globalisation de l’économie et de l’intégration de différents savoirfaire propres aux technologies numériques, un nouvel écosystème est en train de se développer au Luxembourg. La fiscalité est un des
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moyens de soutenir les différents secteurs économiques du pays, en les accompagnant et en permettant leur développement. Il est donc nécessaire que la fiscalité soit cohérente, transparente, tout en garantissant un niveau élevé de sécurité juridique pour tous les contribuables. Pour les entreprises, une imposition prévisible est essentielle. Les axes de développement pris par le gouvernement doivent être clairement identifiables, tout en s’adaptant au gré des évolutions économiques. Dans ce cadre, si les orientations doivent être pérennes, il est néanmoins important d’évaluer les nouvelles mesures fiscales à prendre par rapport aux dispositifs déjà existants afin de les intégrer de manière adéquate en vue de former un tout cohérent.
DES MESURES PROACTIVES
De plus, les mesures doivent être prises de manière proactive afin de soutenir les nouveaux enjeux économiques qui se dessinent, et ce, dès leurs prémices. Ceci peut se décliner en différents points. 1. Soutenir le tissu économique luxembourgeois, en baissant le taux d’imposition des sociétés, aujourd’hui globalement de 26 %, afin de s’orienter au moins vers le taux médian actuellement enregistré au sein des États de l’Union européenne, soit 18 % - 21 %.
2. Permettre une meilleure capitalisation des entreprises luxembourgeoises, par un allégement de l’impôt sur la fortune, le Luxembourg étant le seul pays européen à encore appliquer cet impôt aux sociétés. Mais aussi accorder la déduction sur les fonds propres comme cela est proposé dans les projets de directives CCTB et CCCTB. 3. Renforcer le nouveau socle technologique (biotech, fintech, regtech), fortement développé lors de la précédente législature, par la mise en place d’un régime de R&D à l’instar de certains pays européens voisins. 4. Financer les projets innovants et encourager l’esprit d’entreprise, en prévoyant des déductions totales ou partielles pour les investisseurs dans ces projets. Par ailleurs, pour un marché de l’emploi en constante évolution, le Luxembourg devra mettre en place des mesures, entre autres fiscales, afin d’attirer et de retenir des personnes ayant les qualifications requises. Pour ce faire, une des pistes serait de revisiter le régime des expatriés en étendant le champ d’application des bénéficiaires aux personnes exposées, de manière générale, à la mobilité internationale. Il serait aussi intéressant de l’ouvrir à de petites entreprises (i.e. moins de 20 employés) et de faciliter sa mise en place pour ses bénéficiaires.
PHOTO Deloitte
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FISCALITÉ
KPMG
Quelle fiscalité pour les start-up ? Il y a certainement plusieurs axes à prendre en considération si l’on veut permettre au Luxembourg de réaliser son ambition de se placer en tête des start-up nations. Et si l’on suit l’exemple de certains de nos voisins européens, il est certain qu’avoir un environnement fiscal favorable et répondant aux besoins spécifiques de ce type d’entreprises est un élément-clé en termes d’attractivité.
é Labb bourg m stien Séba PMG Luxe tax, K f o d a
B
eaucoup de choses ont déjà été dites ou écrites sur ce sujet, mais le constat reste le même aujourd’hui : déterminer quel est le régime fiscal le plus adapté aux start-up implique de s’adapter à leur écosystème. En effet, une start-up ne doit pas être vue uniquement comme une jeune entreprise, mais aussi et surtout, comme une entreprise innovante. À notre avis, la politique fiscale doit donc se focaliser, en premier lieu, sur les mesures permettant de promouvoir la R&D et l’innovation. La France est un très bon exemple à suivre à cet égard, avec son système de crédit d’impôt qui permet aux PME d’obtenir un crédit d’impôt égal à 30 % des dépenses de recherche et à 20 % des dépenses d’innovation, voire le remboursement anticipé du crédit sous certaines conditions. Dans cette lignée, le Luxembourg pourrait donc utilement compléter son régime actuel de propriété intellectuelle (« IP box » de l’article 50ter LIR), par un système similaire de crédit d’impôt.
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Par ailleurs, améliorer la fiscalité applicable aux start-up elles-mêmes, et ce tout au long de leur cycle de vie, est également un élément important à prendre en considération. L’intérêt d’une baisse du taux global d’impôt sur les sociétés mérite à cet égard d’être débattu. En effet, ces jeunes pousses innovantes sont le plus souvent en situation de perte les premières années, ce qui pourrait, à première vue, sembler limiter l’intérêt d’avoir un taux d’impôt faible. Mais sur la durée, il est évident que si le taux global d’impôt sur les sociétés du Luxembourg (actuellement d’environ 26 %) était ramené en dessous du seuil de 20 %, une telle baisse conduirait considérablement à augmenter l’attrait de notre pays, y compris pour ces entreprises innovantes lorsqu’elles deviennent profitables après leur phase initiale de développement. Mais si l’on veut accompagner au mieux les start-up, la politique fiscale doit également se focaliser sur les investisseurs et les entrepre-
neurs personnes physiques. En effet, l’accès au financement est vital pour les start-up lors de leurs premières années d’existence. De ce fait, certains pays étrangers, comme la France ou le Royaume-Uni, proposent déjà des outils d’incitation fiscale à l’investissement au capital des PME, sous forme de réduction d’impôt pour les particuliers. Le Luxembourg devrait donc réfléchir à introduire un dispositif similaire afin d’inciter les investisseurs privés à financer l’activité de ces entreprises. Par ailleurs, à l’heure où la concurrence entre les pays pour attirer la main-d’œuvre hautement qualifiée ne fait qu’augmenter, il nous semble important d’introduire au Luxembourg des mesures fiscales permettant de séduire et conserver les profils les plus expérimentés. On pourrait envisager, à ce titre, de revoir le régime fiscal qui existe actuellement pour les impatriés, ou encore de moderniser le traitement fiscal de plans d’intéressement dédiés permettant de fidéliser les salariés.
PHOTO KPMG
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FISCALITÉ
LOYENS & LOEFF LUXEMBOURG
Faut-il revoir la fiscalité locale ? Au moment où la transposition de la directive sur la lutte contre l’évasion fiscale (également appelée Atad) est imminente au Luxembourg, il est opportun de se poser la question si la fiscalité locale, telle qu’elle est en vigueur actuellement, est toujours adaptée aux besoins de l’économie luxembourgeoise.
L
a fiscalité locale, par opposition aux règles de la fiscalité internationale, occupe une place très particulière au Grand-Duché. Ceci est dû à l’économie luxembourgeoise qui, malgré les efforts de diversification considérables, reste toujours largement orientée vers l’international. C’est ainsi que la question d’une réforme (qu’elle soit ponctuelle ou qu’elle ait comme but une refonte totale du système fiscal) doit à nos yeux toujours être appréhendée d’une manière holistique : toute réforme de la fiscalité locale ne doit pas perdre de vue qu’elle aura des répercussions non seulement sur des acteurs nationaux, mais aussi internationaux. Ceci tient notamment à l’impact en termes d’image que de telles modifications auront à l’étranger. C’est dans cette optique qu’il est impératif de contrebalancer l’élargissement de la base imposable qui découlera inévita-
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blement de la transposition de la directive sur la lutte contre l’évasion fiscale par des mesures qui enverront un signe positif vers l’étranger. Ainsi, si les baisses timides du taux de l’impôt sur le revenu des collectivités mises en avant par le gouvernement Bettel sont à saluer, il est souhaitable d’équilibrer davantage l’introduction du dispositif limitant la déduction des charges financières par une baisse conséquente des impôts sur le revenu dont les entreprises sont redevables. Une telle baisse maitiendrait non seulement l’attractivité du Luxembourg au regard de l’abaissement généralisé dans l’UE du taux de l’impôt sur le revenu, mais contribuerait aussi à l’allègement de la charge fiscale des entreprises luxembourgeoises, qui doivent faire face à une compétitivité toujours plus importante.
REVOIR LES RÈGLES D’IMPUTATION DE LA RTS
En matière d’impôt sur le revenu, il conviendrait également de modifier les règles d’imputation de la retenue à la source (RTS). Actuellement, le crédit de la RTS est limité à l’impôt sur le revenu des collectivités (IRC), ce qui signifie, par exemple, qu’un revenu qui a déjà subi une RTS à l’étranger subira au Luxembourg une charge fiscale additionnelle correspondant, au minimum, à l’impôt commercial communal (qui est de 6,75 % pour la commune de Luxembourg). Bien que, dans la plupart des cas, la RTS étrangère soit inférieure à l’IRC, il n’est pas exclu que celle-ci soit supérieure à l’IRC, et si tel devait être le cas, il ne nous semble pas justifié que les communes touchent un impôt sur
des revenus (dividendes, intérêts et royalties) qui ne génèrent pas de dépenses communales. Un dernier élément de la fiscalité locale qu’il s’agit de repenser est l’impôt sur la fortune. Cette singularité luxembourgeoise est en effet un impôt mal accepté par les investisseurs, tant étrangers que nationaux. Alors que le gouvernement Bettel a introduit une réduction du taux de 0,5 % à 0,05 %, applicable au montant de la fortune nette dépassant une valeur de 500 millions d’euros, nous sommes d’avis que cette baisse devrait profiter à tout contribuable, quel que soit le volume investi. Cet impôt risque surtout de heurter les investissements dans l’immobilier luxembourgeois à partir du moment où le barème d’évaluation pour les besoins de l’impôt sur la fortune sera adapté aux valeurs de marché. Une inflation encore plus forte des prix de l’immobilier en serait la conséquence. Alors que la réforme fiscale 2017 tant attendue a déçu les entreprises, nous sommes convaincus que l’introduction des mesures mentionnées ci-dessus devrait maintenir la fiscalité locale luxembourgeoise suffisamment attractive. Si celle-ci pouvait, par ailleurs, être ancrée dans un système prônant davantage la sécurité juridique, le bénéfice serait conséquent, et ceci sans impacter l’équilibre budgétaire. De ce point de vue, il nous semble critique que le législateur et les autorités fiscales luxembourgeoises soient des sources fiables d’information permettant d’intepréter les nouveaux concepts hautement subjectifs qui seront prochainement introduits en fiscalité luxembourgeoise.
PHOTOS Loyens & Loeff
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FISCALITÉ
PWC
Quelles réformes fiscales pour les entreprises ?
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otre proposition principale est la réduction significative du taux global d’imposition en vue d’une augmentation importante de la base taxable dans le cadre du projet Beps et afin de garantir au Luxembourg la possibilité d’attirer des sociétés ayant des activités à l’international. Ceci permettrait au Luxembourg de rester attractif et compétitif face à des acteurs dont le poids économique et politique dans l’économie mondiale n’est plus à démontrer. On pourra notamment prendre l’exemple de la Grande-Bretagne, qui affiche clairement sa volonté d’attirer les investissements, notamment étrangers, en diminuant progressivement son taux d’imposition (19 % depuis avril 2017 et 18 % en 2020), ou l’Irlande, dont le taux de 12,5 % reste imbattable. Cette mesure serait également en phase avec la philosophie de l’OCDE, même post-Beps.
la compétitivité du Luxembourg, notamment dans l’industrie des fonds et particulièrement des fonds alternatifs. L’exonération de retenue à la source devrait donc être élargie au niveau des bénéficiaires ayant des participations dites importantes, et notamment aux différents véhicules de fonds réglementés, fonds de pension ou encore fonds souverains. Il est à noter que ni les règles européennes ni les recommandations Beps n’imposent aux États de soumettre les revenus de dividendes à une retenue à la source. Certains pays, même au sein de l’Union européenne, n’appliquent déjà aucune retenue à la source sur de tels paiements, comme le RoyaumeUni par exemple. Une autre mesure serait l’introduction d’un abattement accordé aux financements par capitaux propres importants, abattement qui se baserait sur la part du capital d’une société dépassant le minimum requis. ACCROÎTRE LA COMPÉTITIVITÉ La détermination de ce minimum devrait L’élargissement de l’exonération de retenue à être effectuée en accord avec le principe la source sur dividendes est notre seconde pro- de pleine concurrence. Ces règles seraient position. Cette mesure accroîtrait davantage également liées à celles relatives à la sous-
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Tax le
capitalisation, qui limitent la déductibilité des intérêts supportés sur un financement excessif par dette. Ceci permettrait ainsi de prendre conscience de l’existence d’un continuum allant de sociétés sous-capitalisées à des sociétés capitalisées de façon prudente en passant par les sociétés capitalisées de façon suffisante. De surcroît, le rapport final du projet Beps de l’OCDE / G20 a explicitement confirmé que des déductions de ce type ne devraient pas être perçues comme des intérêts débiteurs dans le cadre des règles de limitation de déductibilité des intérêts. Enfin, l’abolition ou la limitation importante de l’impôt sur la fortune, tel que les sociétés le connaissent aujourd’hui, constituerait également une mesure-clé à mettre en œuvre afin d’assurer au Luxembourg sa place d’acteur important au sein de l’économie mondiale. Cet impôt supporté par les sociétés n’a pas d’équivalent dans d’autres pays européens et constitue régulièrement un frein à la mise en place de transactions financières, en particulier avec les États-Unis.
PHOTO PwC
Nos propositions, ci-dessous, s’inscrivent dans une volonté de permettre au Luxembourg de maintenir, voire d’améliorer, sa position en tant que lieu d’investissement privilégié dans un contexte de compétitivité fiscale accrue. Nous pensons que certaines de ces réformes sont nécessaires afin de répondre adéquatement aux besoins du marché en faisant face dans le même temps aux pressions d’États concurrents (par exemple le Royaume-Uni, les Pays-Bas ou l’Irlande).
FISCALITÉ
UEL
Le Luxembourg est-il encore un champion fiscal ?
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plus faible que celui de la Belgique (50 %) ou celui de l’Allemagne (44 %), mais est supérieur à celui de la France (36 %) et fortement supérieur à celui de la moyenne de l’OCDE (32 %). Puisque les talents internationaux constituent une ressource indispensable tant pour les entreprises matures que pour les start-up, l’UEL promeut un environnement favorable pour les attirer et les garder au Luxembourg.
ET POUR LES ENTREPRISES ?
N
onobstant cette réflexion cardinale, d’aucuns présupposent que le Luxembourg est un champion fiscal. Observons objectivement si tel est le cas.
EST-CE VRAI POUR LES PERSONNES PHYSIQUES ?
Le barème est particulièrement avantageux pour de nombreux contribuables, notamment parce que l’imposition débute à un taux relativement faible de 8 % (alors qu’il est de 14 % en Allemagne et en France ou de 25 % en Belgique) et que sa progressivité est étalée. Cependant, cet avantage s’estompe au fur et à mesure qu’on arrive dans les tranches supérieures du barème. Ainsi, selon l’OCDE, le taux moyen net d’imposition au Luxembourg d’un célibataire sans enfant gagnant le double du salaire moyen est de 39 %. Ce taux est certes 24 —
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Bien que le taux d’imposition statutaire sur le revenu des sociétés passe à environ 25 %, cette diminution n’est pas suffisante quand le taux médian au sein de l’UE est de 21 % et que des concurrents directs, comme les Pays-Bas (21,5 %) ou la Grande-Bretagne (17 %), mettent en place des baisses progressives. D’ailleurs, la tendance générale est à la baisse et le gouvernement l’a reconnu dans son accord de coalition. À ceux qui prétendent alors que ce taux de 25 % n’est que théorique, nous ne pouvons que les informer que l’impôt sur le revenu des sociétés représentait 4,5 % du PIB en 2016, soit bien plus qu’en France (2 %), en Allemagne (2 %) et en Belgique (3,4 %). Ce taux médian de 21 % constituerait pour le Luxembourg une cible rationnelle : il s’agit avant tout de ne pas décourager certaines entreprises étrangères à développer des activités au Luxembourg. Ensuite, dans une démarche de simplification administrative et de transparence, il
serait opportun de fusionner l’IRC et l’ICC (plus la contribution pour le fonds pour l’emploi), afin d’offrir aux personnes morales un taux global unifié. De plus, le Luxembourg se singularise par un poids démesuré de la taxe d’abonnement – qui a doublé depuis 2000 et représente aujourd’hui 971 millions d’euros – et de l’impôt sur la fortune – qui a plus que triplé depuis 2000 et représente aujourd’hui 521 millions d’euros. Ces deux impôts à charge des entreprises sont pratiquement inexistants dans la plupart des pays européens. En vue de maintenir la compétitivité fiscale du Luxembourg, il conviendrait d’abolir l’impôt sur la fortune au-delà de l’impôt minimum et d’adapter le système de la taxe d’abonnement. Finalement, même pour les jeunes entreprises, la fiscalité luxembourgeoise est loin d’être idéale, notamment face aux approches volontaires de nos pays limitrophes. C’est pour cela que l’UEL demande avec insistance l’introduction d’une réserve immunisée pour promouvoir l’investissement dans les PME et la mise en place d’un schéma fiscal spécial pour l’investissement dans les start-up. En conclusion, à la question posée, la réponse est non, aussi bien pour les salariés que pour les entreprises (qu’elles soient grandes ou petites). La vraie question est : comment développer un système fiscal attractif pour, in fine, plus de recettes et tendre vers la société désirée ? Telle devrait être notre ambition.
PHOTO Matic Zorman
L’impôt est le moyen financier dont dispose une nation pour construire la société qu’elle désire (santé, éducation, culture, infrastructures, sécurité...). L’ambition de récolter les recettes nécessaires pour atteindre ces objectifs passe à travers un système fiscal cohérent et efficace qui s’intègre dans une perspective internationale.
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PME
PRATIQUE
Pas de paradis fiscal pour le petit entrepreneur
Bon nombre d’entrepreneurs locaux s’interrogent sur l’existence de niches fiscales dans lesquelles ils pourraient abriter leurs revenus et bénéfices. Mais pour eux, contrairement aux grandes sociétés, l’éventail de l’optimisation accuse un sérieux manque d’envergure au Luxembourg. 26 —
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J’
ai commencé à me poser des questions... » Les témoignages d’entrepreneurs qui se passionnent soudainement pour la fiscalité luxembourgeoise débutent en général de la même façon : leur activité rapporte de l’argent et, idéalement, ils désireraient en reverser le moins possible dans les caisses de l’État. « Je fais des bénéfices depuis l’année dernière et obtenir des infos claires pour optimiser les impôts s’avère compliqué. J’ai commencé à me renseigner, j’ai interrogé mon expert-comptable et il m’a simplement dit qu’il n’y avait pas de grandes possibilités », confie la directrice générale d’une petite sàrl de Luxembourg-ville spécialisée dans le conseil juridique. Et alors qu’elle s’apprête à boucler un nouvel exercice comptable dans le vert, cette chef d’entreprise peine à croire qu’il n’existe pas d’autres alternatives. Elle a pensé aux holdings pour éviter la taxation des dividendes. « Mais dans ce cas, la question est de savoir s’il est vraiment rentable de créer une holding. Je suis une petite société d’une employée et je ne dispose pas de bénéfices énormes. Dès lors, est-ce que le coût annuel que je vais avoir en lien avec la création d’une holding ne va pas compenser la réduction d’impôts sur bénéfices ? », cogite cette entrepreneuse. Rappelons qu’au Luxembourg, le taux de l’impôt sur les sociétés est de 18 % à partir de 30.000 euros de bénéfice imposable. Une majoration de 7 % destinée à alimenter le fonds pour l’emploi ainsi qu’un impôt commercial communal sont également appliqués. « On m’a également parlé du warrant, au niveau des bonus accordés par un employeur. Je suis salariée de ma propre boîte, donc j’aurais pu m’octroyer un bonus sous forme de warrant. C’est un dispositif mis en place avec une banque, surtout pratiqué dans les grandes sociétés, pour éviter l’impôt sur les bonus. Mais il faut plusieurs employés. Et si nous étions deux, la question du coût se poserait à nouveau », regrette notre témoin, incrédule face à si peu d’options pour alléger la charge fiscale des petites et moyennes entreprises.
NULLE PART OÙ SE NICHER ?
À croire que les PME sont les parents pauvres de la fiscalité luxembourgeoise. Pourtant, le secteur compte près de 32.000 entreprises et occupe actuellement près de 210.000 personnes. Cela représente plus de la moitié de l’emploi intérieur. La situation semble d’autant plus étonnante que, dans le cadre de la réforme fiscale de 2017 essentiellement desti-
PME
née aux personnes physiques, le gouvernement Bettel avait promis des mesures censées profiter aux PME, ou à tout du moins les encourager, comme la baisse de l’impôt sur les revenus des collectivités à 15 % pour des sociétés dont le revenu annuel ne dépasse pas 25.000 euros. En juillet dernier, la Chambre des députés a par ailleurs approuvé à l’unanimité le projet de loi portant sur le renouvellement des aides en faveur des PME et son enveloppe budgétaire de 89 millions d’euros répartis sur cinq ans. Mais toujours pas de niche fiscale à proprement parler... D’ailleurs, lorsqu’on interroge sur d’éventuelles alternatives de défiscalisation pour petites entreprises la House of Entrepreneurship – la jeune plate-forme communautaire lancée par la Chambre de commerce et le ministère de l’Économie pour rassembler les acteurs institutionnels et privés de l’écosystème et développer ainsi l’activité des entrepreneurs luxembourgeoise –, on s’y estime « inadéquatement » placé pour recommander des niches fiscales. « Il pourrait sans doute y avoir des éléments quant au régime holding / soparfi, qui peut dans une certaine mesure s’appliquer aux start-up. Mais nous proposons des services de premier conseil, qui ne comprennent pas la structuration fiscale, réservée aux fiduciaires », botte en touche Guylaine Bouquet-Hanus, information & business support à la HoE. La recherche de conseils pratiques en optimisation fiscale pour PME ne se montre pas plus fructueuse du côté du « partenaire-clé pour les entrepreneurs », Luxinnovation, l’agence nationale en charge du développement et de la promotion économique. « Nos services ne traitent que des demandes de subvention et de financement, mais pas du tout de structuration. Il n’existe pas de niche fiscale en tant que telle. Il se peut que certaines aides du ministère se traduisent (aussi) par des crédits d’impôt, mais ça s’arrête là », précise Jean-Michel Gaudron, director Communication f.f. de Luxinnovation.
privée internationale confirme qu’au niveau des PME, la gamme d’avantages fiscaux reste sensiblement limitée. « Pendant des années a dominé l’optique de favoriser les grandes entreprises grâce à des mécanismes fiscaux, relativement complexes et totalement inaccessibles pour les patrons de petites entreprises tels que les fameux tax rulings. Cela a désormais légèrement changé sous la pression internationale », assure-t-il. Mais aujourd’hui, ces niches fiscales réservées aux experts et élites des sociétés ont tendance à disparaître. Les tax rulings sont ainsi devenus payants, et les milliers d’euros à débourser freinent l’ardeur de nombreux intervenants. Sans compter que l’administration luxembourgeoise est devenue beaucoup plus stricte, après toutes les polémiques au niveau des aides d’État, le scandale des LuxLeaks (où la majorité des sociétés mises en cause étaient des entreprises de taille intermédiaire) ou encore les procédures enclenchées par la Commission européenne. « On est un peu dans une période de transition. Reste à savoir si la nouvelle coalition gouvernementale va baisser le taux d’imposition des sociétés. Il n’y a pas eu d’annonce forte des partis lors des élections et on peut le comprendre : pas besoin, la croissance économique se porte bien », met en perspective Gaëtan Hertz. Cela étant dit, si la formule « niche fiscale » a mauvaise presse, l’État accorde tout de même des aides et régimes en vue d’optimiser la gestion fiscale des PME, au travers notamment de diverses bonifications d’impôt : pour investissement, formation professionnelle continue (20 % du coût), embauche de chômeur (10 % du montant de la rémunération mensuelle brute), ou encore pour indépendants (300 euros par année d’imposition).
LES INCONTOURNABLES
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ILLUSTRATIONS Sofia Azcona (Maison Moderne)
La niche fiscale à laquelle tout petit entrepreneur a le plus communément recours n’est autre que la bonification d’impôt pour investissement. « Comme son nom l’indique, il s’agit d’un crédit d’impôt lorsqu’on invesPOUR L’ÉLITE ? tit dans des actifs éligibles que sont, à l’exception des Les petites entreprises réalisent généralement des béné- voitures personnelles (sauf les véhicules électriques), fices assez modestes, ce qui n’offre pas beaucoup de marge les actifs corporels tels que les machines de chantier de manœuvre au niveau fiscal. « Pour un petit entrepre- ou encore, autre modification récente, les logiciels neur, le Luxembourg n’est certainement pas un paradis informatiques », détaille le comptable Gaëtan Hertz. fiscal », reconnaît Gaëtan Hertz, comptable indépendant Cette dérogation fiscale dédiée aux entreprises comet directeur du cabinet Galux. Cet ancien fondateur du merciales, industrielles, minières ou artisanales département Comptabilité et Reporting d’une banque luxembourgeoises se subdivise en deux applications : — 27
PME
la bonification de 8 % pour nouvel investissement jusqu’à une tranche de 150.000 euros, qui tombe à 2 % au-delà de ce seuil, ou la bonification pour l’investissement complémentaire sur l’exercice par rapport à une moyenne des actifs nets sur cinq ans. Pas besoin à ce propos d’être aux commandes d’une entreprise mature, c’est un levier que l’on peut utiliser dès la création. « Sont cependant exclus les biens amortissables normalement en moins de trois ans, les biens acquis par transmission en bloc d’une entreprise, les biens usagés, jusqu’à concurrence d’un montant de 250.000 € lorsqu’ils sont investis par le contribuable dans le cadre d’un premier établissement », expose-t-il.
DIFFÉRENCES SECTORIELLES
DE LA SUITE DANS LES IDÉES
L’autre incitatif fiscal à utiliser si possible est celui du nouveau régime de la propriété intellectuelle, imaginé pour sculpter un environnement en ligne avec les nouveaux standards internationaux et favorable aux activités de R & D au Luxembourg. « Mais ce régime ne s’adresse qu’à un nombre limité d’entreprises, puisqu’il s’agit de sociétés qui vont développer une marque, un logiciel protégé par un droit d’auteur, un médicament ou alors déposer un brevet. Dans ce cas-là, sous certaines conditions, le taux de l’exonération partielle peut atteindre jusqu’à 80 % », souligne le directeur du cabinet Galux. Enfin, dans le cas d’une cessation et d’une dissolution, la fiscalité du Luxembourg offre aussi certains avantages. « Cela reste, là encore, très limité, puisqu’il faut liquider sa société, mais il n’y a pas de retenue à la source sur le boni de liquidation. Quand vous liquidez une société volontairement, il reste très souvent de l’argent. Quelquefois, certains clients vont déménager pour un an dans un pays à faible fiscalité sur les dividendes ou sur les revenus des capitaux et dans ce cas-là, rapatrient ces fonds avec une faible imposition », commente Gaëtan Hertz. Le boni de liquidation distribué n’est pas assimilé à une distribution de dividendes au niveau de la société et le contribuable peut, en sus, profiter de certains abattements sur le bénéfice de cessation. À noter à ce propos que la cessation momentanée des activités commerciales, comme lorsqu’un entrepreneur traverse une période de convalescence, n’engendrera aucune imposition, contrairement à la cessation définitive de l’entreprise. 28 —
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En augmentant le taux de la bonification d’impôt pour investissement, le gouvernement Bettel avait affiché sa volonté de soutenir davantage les entreprises luxembourgeoises qui misaient sur les biens nécessaires à leur développement. « Mais encore faut-il pouvoir investir dans l’entreprise », tempère Norry Dondelinger, directeur des Affaires économiques de la Chambre des métiers, qui représente 7.000 entreprises artisanales occupant plus de 90.000 personnes au Grand-Duché. « L’optimisation fiscale ne s’applique pas vraiment aux entreprises artisanales. » Naturellement, les entreprises artisanales paient beaucoup moins d’impôts que d’autres secteurs, tels que l’industrie financière ou forestière, étant donné qu’ils dégagent beaucoup moins de bénéfices. Le recours à la bonification d’impôts ressemble dès lors moins à de l’optimisation fiscale qu’à une stratégie de maintien de compétitivité. « Parce qu’il s’agit en premier lieu d’entreprises de taille très réduite, en moyenne de 13 personnes. Beaucoup d’autres entreprises n’occupent techniquement pas de salariés. Et, en plus, le chiffre d’affaires est corrélé au nombre de salariés à cause de la production manuelle. Le volume d’activité est actuellement élevé, mais les marges bénéficiaires sont faibles et la concurrence intense », brosse Norry Dondelinger. Il y a, par ailleurs, très peu d’entreprises artisanales qui font partie d’un groupe multinational. Elles n’ont dès lors pas la possibilité de transférer leurs bénéfices dans une autre juridiction à faible fiscalité. Sans oublier que les frais pour une optimisation fiscale risqueraient d’être disproportionnés par rapport aux avantages. Tout cela n’apporte guère de solutions à la vulnérabilité des PME luxembourgeoises susceptibles, au moindre contrecoup économique, de se retrouver dans une situation sans poire pour la soif du fait du manque fréquent de liquidités. Combien de commerçants ou artisans ne sont pas criblés de dettes ? Leur incapacité à emprunter auprès d’un établissement de crédit, qui évaluera systématiquement la situation en matière de capitaux propres, restreint leur capacité d’investissement. Et ainsi de suite… « On se retrouve tous dans le même bateau et il s’agit de maintenir ou de renforcer l’attractivité de l’économie luxembourgeoise. Le monde change, il y a des initiatives comme Beps qui vont avoir pour effet d’élargir l’assiette.
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PME
Si les décideurs ne réagissent pas, à taux d’imposition inchangé, la charge fiscale augmentera. D’autres pays avancent dans ce domaine, comme le Royaume-Uni qui a annoncé une réduction du taux d’imposition à 17 % en 2020 », épingle le directeur des Affaires économiques. Mais la Chambre des métiers a d’autres demandes en ce qui concerne la fiscalité des PME, par exemple l’introduction d’une réserve immunisée d’impôts.
AUTOFINANCEMENT
Ce dispositif permettrait à un entrepreneur de réduire son bénéfice commercial du montant mis en réserve pour investissements futurs. Beaucoup de PME, notamment de
l’artisanat, sont sous-capitalisées, ce qui crée son lot de problèmes. En introduisant la possibilité d’un autofinancement plus important, les PME pourraient s’adapter plus facilement aux changements économiques et technologiques. « Le gouvernement sortant prévoyait un groupe de travail pour en discuter, mais ça n’a pas avancé. Les discussions ont commencé il y a pratiquement un an, mais tout a été bloqué à cause de la formation du nouvel exécutif, regrette Norry Dondelinger. On ne sait pas très bien pourquoi ça n’a pas été réalisé, mais ça ne donne en tout cas pas l’impression d’être une priorité. » L’idée de base de cette réserve immunisée est d’y transférer des bénéfices qui ne seraient pas imposés pour accumuler des fonds propres qui serviraient à investir dans l’entreprise. « Nous proposons aussi la mise en place d’un programme Seed pour les repreneurs et les créateurs d’entreprise afin de faciliter l’accès au financement des entrepreneurs. Des investisseurs privés pourraient placer de l’argent dans des entreprises artisanales et bénéficier en échange d’un avantage fiscal », résume le directeur des Affaires économiques de la Chambre des métiers, avouant que l’idée n’a pas encore été assez développée. L’administration des contributions luxembourgeoise pourrait alors émettre des certificats d’investissement qui pourraient être remis à l’investisseur. Comme il est d’usage pour des start-up innovantes à l’étranger. Un modèle que rien n’empêche d’appliquer aux entreprises traditionnelles. F. R.
LES DISPOSITIFS EXISTANTS (Extraits choisis)
Charges exceptionnelles Déductibles, en principe, à condition qu’elles soient en relation avec l’activité commerciale de l’entreprise.
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Abandon de créances à caractère commercial Déductible, à condition que la remise de dettes consentie à son débiteur le soit dans l’intérêt commercial de la société créancière.
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Option à la TVA Lors d’un achat immobilier ou d’une location, il est possible de renoncer à l’exonération de TVA qui devrait normalement s’appliquer. Cela permet au vendeur ou à l’acheteur de récupérer 100 % de la taxe en amont supportée sur son activité si la totalité du chiffre d’affaires est soumise à la TVA. De son côté, l’acheteur ou le locataire peut ainsi récupérer la TVA payée sur le prix d’acquisition ou le loyer, dans les limites de son droit à déduction.
Remboursement intracommunautaire de la TVA Les assujettis établis au Luxembourg peuvent demander un remboursement payé dans d’autres États membres de l’Union européenne, portant sur un montant minimum de 400 euros réclamé en l’espace d’une année civile.
Immunisation de la plus-value lors d’une cession d’immeuble Une telle plus-value est imposable, à moins que le bien cédé fasse partie de l’actif immobilisé autre qu’un outil de production, soit détenu depuis cinq ans au moins, soit de remploi. Temporairement immunisée, cette plus-value sera déduite du coût d’achat du bien, de sorte qu’en cas de cession ultérieure du bien de remplacement, elle sera soumise à l’impôt.
15 suppléments thématiques pour en savoir Plus À venir prochainement :
Autof estiva l (31.01. 2019)
DANS LES COULISSES
Logée au cœur d’un espace en « U », la bibliothèque a été conçue comme un lieu où les collaborateurs se retrouvent naturellement pour partager des réflexions, mais également souffler un peu avant de reprendre les choses sérieuses. Hogan Lovells revendique son esprit start-up.
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DANS LES COULISSES
SAS DE DÉCOMPRESSION
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PHOTO Jan Hanrion (Maison Moderne)
résent au Luxembourg depuis cinq ans, le cabinet d’avocats Hogan Lovells a pris ses quartiers dans l’immeuble White Pearl, à Merl. Nouveau venu d’un réseau de 45 bureaux disséminés à travers le monde, il traite en priorité le droit des sociétés, la fiscalité, les sujets liés à la banque et à la finance ainsi qu’aux fonds d’investissement. Il compte 30 personnes, dont trois associés luxembourgeois. Basé sur l’esprit collaboratif et l’échange entre les personnes, le cabinet a agencé son espace afin que les employés puissent communiquer facilement. La bibliothèque, qui sert également de lieu de rencontre et éventuellement d’espace de repos, est ainsi au centre de l’espace et devient un passage quasi obligé. Développée selon l’esprit start-up voulu par Hogan Lovells, elle permet aux collaborateurs de retrouver l’énergie nécessaire pour être performants au bon moment. — 33
PHOTO Anthony Dehez
INTERVIEW
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INTERVIEW
PIERRE GRAMEGNA, MINISTRE DES FINANCES
«Nous voulons rester compétitifs sans faire une course au dumping » Reparti pour cinq ans à la tête du ministère des Finances, Pierre Gramegna (DP) détaille ses priorités fiscales et budgétaires, ainsi que ses ambitions pour une place financière qui doit viser « un alignement vers le haut ». Janvier 2019 — Tax & Legal —
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INTERVIEW
Le gouvernement a placé son accord de coalition sous le triptyque « ambitieux, équitable et durable ». Comment décliner ce leitmotiv au niveau de la fiscalité ? Pierre Gramegna Au-delà de la fiscalité, nous
avons mis dans notre programme le critère de finances publiques saines, qui était déjà dans celui de 2013, et qui consiste à respecter l’objectif de moyen terme qui deviendra d’ailleurs plus sévère pour le Luxembourg en 2019. Deuxièmement, nous allons rester pendant toute la période largement en dessous de 30 % d’endettement par rapport au PIB. Nous n’avons aucunement l’intention de nous départir de cette ligne prudente pour assurer le triple A pendant toute la période. Certains insinuent que notre programme, c’est de l’aventure. Ce n’est pas parce qu’on fait quelque chose d’ambitieux qu’on veut mettre en péril la stabilité financière du Luxembourg.
« Nous sommes bien sûr à l’écoute du patronat, et je n’ai pas l’impression que notre programme lui soit défavorable. »
Le point de départ est différent. Il y a cinq ans, le risque, d’ailleurs mis en exergue par le gouvernement Juncker, était que le Luxembourg ne respecte plus les critères. Nous avons dû prendre toute une série de mesures, qui n’étaient d’ailleurs pas très populaires, pour Pierre Gramegna redresser la situation. Et maintenant, nous Ministre des Finances avons des finances publiques saines, avec un déficit de l’administration centrale très bas, autour des 200 millions d’euros. Dans ces conditions, nous pouvons être plus ambitieux. Nous tablons sur une croissance raisonnable moyenne sans qu’on n’ait jamais la certitude que cette croissance se matérialisera. Nous estimons que nous allons avoir un taux de croissance aux alentours de 3,5 % pour 2019. la finance verte et la digitalisation. Dans la cès, avec une quarantaine de start-up qui se Il est clair que si nous avons une crise finan- finance verte, nous sommes déjà parmi les sont lancées. Nous pouvons être un précurseur cière, nous devrons ajuster. pionniers à l’international, ce qui est déjà dans ce domaine. Nous avons d’ailleurs déposé très bien. Mais nous ne sommes qu’au début un texte pour reconnaître légalement des opéLorsque vous entendez le CSV déclarer d’un phénomène, et en tant que ministre rations qui sont faites à travers la blockchain. que les mesures de votre programme des Finances, je suis très enthousiaste de En prenant une législation spécifique, nous ne sont pas chiffrées, que répondez- continuer sur ce chemin en coopération renforçons la sécurité juridique. vous ? avec la ministre de l’Environnement, Carole Nous n’avons vraiment pas de leçons à rece- Dieschbourg (Déi Gréng, ndlr). Nous allons Y a-t-il encore certains types d’activités voir de qui que ce soit en ce qui concerne le mettre en œuvre la Sustainable Finance sur la Place dont vous souhaiteriez voir chiffrage, car nous avons fait preuve, il y a cinq Roadmap, qui nous encourage à systémati- la proportion baisser ? ans, d’un grand sérieux lorsque nous avons ser toutes les initiatives dans le domaine de Il y a un alignement vers le haut de tous les annoncé dans le programme gouvernemen- la finance verte. Je vois notamment beau- acteurs. Il m’est arrivé de rencontrer des tal que l’on allait tout faire pour remettre en coup de potentiel dans les fonds d’inves- acteurs qui me disaient que la CSSF était deveordre les finances publiques. Aujourd’hui, tissement qui respecteraient les critères nue plus stricte. Chaque fois que je creusais alors que nous avons redressé la barre, on ne environnementaux. Nous avons d’ailleurs le sujet, c’est parce qu’ils voulaient faire le peut quand même pas nous faire le reproche dit que dès que les critères européens en la minimum. Mais si la CSSF dit que ce n’est pas de ne pas calculer à l’avance ce que nous allons matière seront déterminés, il sera possible conforme à la législation, il faut s’y tenir. En dépenser sur cinq ans. de prévoir un système de taxe d’abonnement revanche, être actif au Luxembourg et y avoir spécifique, plus basse, pour ce type de fonds une licence est un label de qualité. Je note que Quels seront vos grands chantiers pour d’investissement, afin de les favoriser. l’abandon du secret bancaire et l’alignement la place financière au cours des cinq sur toute une série de directives touchant à Quels sont les projets en matière la fiscalité n’ont pas nui au développement prochaines années ? Deux éléments sont à mettre en évidence de digitalisation ? de la Place. Le secret bancaire était devenu pour diversifier la Place et la faire grandir : Nous avons créé la Lhoft, qui est un grandsuc- un handicap. 36 —
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PHOTO Anthony Dehez
Disposez-vous d’autres marges de manœuvre qu’il y a cinq ans ?
INTERVIEW
Quelles seront les suites du projet Beps et sa concrétisation ?
Nous allons encore avant la fin de l’année passer à la Chambre des Députés la loi antiévasion fiscale (Atad 1) qui est la première des deux directives qui met en œuvre Beps. Je compte d’ailleurs présenter encore au premier semestre 2019 un projet de loi qui adaptera la règle de limitation des intérêts de l’Atad aux besoins spécifiques des groupes en intégration fiscale, ceci dans un souci de maintien de la compétitivité du Luxembourg, au regard des options prises par d’autres États membres lors de la transposition de cette directive. L’année prochaine également, la deuxième directive sera adoptée. Beps a été adopté en 2015. Nous sommes dans le concret de l’élargissement de la base taxable. En très peu de temps, l’Europe s’est mise d’accord sur deux directives, à l’unanimité. Ceux qui craignent que l’unanimité empêche l’Europe d’agir dans le domaine fiscal se voient contredits par ces projets très concrets.
L’individualisation va aboutir à l’établissement d’un barème unique nouveau qui aura l’avantage d’éviter le changement de classes d’impôt qui n’existeront plus. La fiscalité sera rattachée à la personne. Ça simplifie les choses, car il ne faudra pas tenir compte des revenus du partenaire. Nous sommes un des derniers pays à avoir un régime d’imposition commune des biens des couples ou des partenaires. Cette évolution de société était indispensable, d’autant plus que le système actuel décourage le second partenaire de travailler. Le second partenaire, qui est souvent la femme dans ce cas, se voit taxé au taux marginal, qui est de 40-42 %, selon le cas. Le principal atout du Luxembourg ne serait-il pas sa stabilité politique sur base de la situation connue dans d’autres pays ?
Les trois plus grands avantages du Luxembourg sont sa stabilité économique et sociale ; son triple A et la prévisibilité. À un moment où l’on voit l’instabilité dans cerLe compromis temporel européen sur tains pays européens, à commencer par le la taxation de la publicité effectuée par Royaume-Uni, le climat délétère que l’on les géants du numérique vous constate chez nos voisins français, on se convient-il ? dit que nous avons beaucoup de chance Nous pouvons vivre avec cette proposi- d’avoir cette stabilité au Luxembourg. Mais tion – qui comporte des faiblesses – pour ça ne tombe pas du ciel. Nous avons décidé deux raisons. Nous voulons donner un signal d’augmenter le salaire social minimum de en Europe que le vide ne doit pas s’instal- 100 euros net. C’est une mesure qui a un coût, ler et entraîner l’OCDE à agir rapidement mais ça contribue à la paix sociale. pour trouver une solution internationale qui va au-delà de l’Europe, pour assurer le Le patronat fait écho d’un manque level playing field. La deuxième, c’est que d’écoute de la part du gouvernement. ça nous donnera peut-être un effet de levier Comprenez-vous ce cri d’alarme ? sur l’OCDE. Nous sommes bien sûr à l’écoute du patronat, et je n’ai pas l’impression que notre programme lui soit défavorable. Nous avons prévu Quels sont les risques pour le une baisse de la fiscalité des entreprises autour Luxembourg si on parvient à une de trois éléments dans ce domaine. Il y aura taxation des activités en ligne là où le produit est acheté ? une baisse, dès 2019, de 1 % du taux d’affichage C’est ce qui se passera avec la solution provi- (ICC + IRC, ndlr). Deuxième mesure, qui doit soire. Si l’idée de taxer les entreprises là où être vue en lien avec le SSM : il s’agit d’un effort se trouvent les consommateurs s’imposait, particulier pour les PME afin que le taux mininous aurions un changement diamétral vis-à- mum de 15 %, qui s’appliquait à 25.000 euros vis du système actuel, qui ramène toujours la de bénéfices, s’applique après changement de taxation au siège de l’entreprise, là où elle a la loi à 175.000 euros. La troisième mesure, qui son établissement stable. Le changement de passe peut-être inaperçue car elle est formuparadigme aurait des conséquences énormes lée de manière générale, consiste à dire que, pour tous les pays. Nous devrons donc trou- comme le taux luxembourgeois est de 26 % et ver autre chose que le pays de consomma- que la moyenne de l’OCDE et de l’UE est plus tion. La clé, c’est la valeur ajoutée, qui n’est basse, si nous constatons que le taux effectif pas nécessairement là où est le consomma- que paient les entreprises au cours des proteur, peut-être pas toujours où est l’établis- chains mois et des prochaines années augmente, le gouvernement s’engage à en tenir sement stable. compte. Nous voulons rester compétitifs d’un point de vue fiscal sans faire une course de Le programme du gouvernement poursuit l’idée d’une individualisation dumping. Il faut être raisonnablement attracde l’impôt des personnes physiques. tif. Avec ces trois mesures, le gouvernement a, Quelles seront les prochaines me semble-t-il, beaucoup écouté les appels du patronat. T. R. étapes en la matière ?
MESURES ÉVOQUÉES
INVESTIR DANS LES START-UP ? Déjà évoquée lors de la précédente mandature, l’idée d’incitants fiscaux pour investir dans les start-up refait son chemin. L’analyse va être ouverte. « J’y travaille et je ferai des propositions dans ce domaine. Il est trop tôt pour être précis », indique Pierre Gramegna, qui estime qu’« à un moment où l’on réfléchit à transformer la fiscalité avec un barème unique et nouveau, c’est aussi le moment de prévoir quelque chose dans le domaine des investissements par les personnes physiques dans les start-up ». Retrouvez l’intégralité de l’interview de Pierre Gramegna sur paperjam.lu
SOUVENIRS DE CAMPAGNE
« UNE CAMPAGNE FACTUELLE » Première campagne électorale pour Pierre Gramegna, qui était arrivé au gouvernement en 2013 sans être élu. Élu en 2018 dans le Sud, il se souvient d’une campagne moins rude que prévu : « Elle était beaucoup plus factuelle et concentrée sur les sujets. Quand on compare avec d’autres pays, nous avons eu un débat positif. Je retiens aussi que, contrairement à ce que l’on peut lire, j’ai noté très peu d’agressivité par rapport aux politiciens. » Le ministre des Finances se félicite en outre que l’électeur n’ait pas cédé aux sirènes extrémistes : « Cela contribue d’ailleurs à la stabilité et à la prévisibilité de notre pays. »
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PRATIQUE
Tous égaux devant la loi ? JURISTES, EXPERTS-COMPTABLES, AVOCATS
Où commence le travail des uns, où s’arrête celui des autres ? Si la loi laisse peu de place aux interprétations, en pratique, services juridiques internes, cabinets de conseil et avocats se marchent parfois sur les pieds. 38 —
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ul ne peut donner de consultations juridiques s’il n’est autorisé à exercer la profession d’avocat, stipule, en substance, la loi de 1991 réglementant le métier. Pourtant, il n’est pas rare de voir experts-comptables et consultants en entreprise se pencher sur des travaux juridiques de constitution de société, de négociation de contrats, de restructuration. « Il y a chez les experts-comptables d’excellents juristes qui sont à même de fournir d’excellents conseils, et d’autres un peu moins qualifiés qui s’aventurent tout de même sur le sujet », observe Renaud Le Squeren, partner chez DSM Avocats. Cet empiètement sur la chasse gardée des avocats n’est que toléré et n’a pas été validé par les autorités luxembourgeoises, contrairement à d’autres pays comme la France. Cette situation pourrait alors alimenter une certaine confusion des genres dans les esprits, surtout qu’elle risque d’exacerber le caractère concurrentiel du marché juridique. « Les principaux concurrents des avocats, ce sont les fiduciaires ou les Big Four, qui interviennent dans des domaines du droit bien balisés. Si vous êtes un avocat qui ne s’occupe que de ces domaines, vous éprouverez des difficultés car, effectivement, ces comptables sont probablement aussi bons et peut-être même mieux organisés économiquement, de manière à avoir des coûts fixes potentiellement plus faibles », remarque l’associé de DSM.
TERRAIN D’ENTENTE
En 2016, pour éteindre le feu des critiques, mais également une procédure judiciaire, le Conseil de l’ordre des avocats avait été contraint de réconcilier le Barreau de L uxembourgavec les géants du conseil au travers d’une charte interprofessionnelle. Ce texte délimite les prérogatives de chacun et est sous la supervision d’une commission paritaire compétente pour régler les litiges au cas par cas. Cela n’ouvre toutefois pas la porte à des structures hybrides où cohabitent avocats et experts-comptables. « Si vous faites un peu d’archéologie juridique, ça a longtemps été le cas. Les Big Four avaient des cabinets d’avocats intégrés. Mais suite au scandale Enron aux États-Unis et à la loi Sarbanes-Oxley de 2002, les cabinets d’avocats ont été séparés des cabinets de conseil. Ce qui est toujours le cas au Grand-Duché, malgré une pression forte pour revenir en arrière », explique Renaud Le Squeren. Il convient néanmoins de préciser que l’écosystème luxembourgeois nécessite la présence des cabinets de conseil et d’experts- comptables en général, et des Big Four en particulier, car ils apportent une qualité de réflexion et une créativité qu’eux seuls peuvent offrir, compte tenu de leur vision globale des enjeux. Au même titre que les cabinets d’avo-
PRATIQUE
« Les principaux concurrents des avocats, ce sont les fiduciaires ou les Big Four, qui interviennent dans des domaines du droit bien balisés. » Renaud Le Squeren Partner, DSM Avocats
cats internationaux, avec lesquels il sera bon de se répartir les tâches.
PHOTO DSM Avocats
COMPLÉMENTARITÉ
La concurrence peut en effet demeurer saine si chaque acteur juridique fait valoir sa pertinence sur les dossiers abordés. « Dans le domaine de la construction, si vous cédez des immeubles ou des entreprises qui possèdent des immeubles, vous allez avoir des problématiques de droit public, de droit des sociétés, de droit fiscal, d’autorisations de bâtir, de contrats, donc des éléments très variés. Les experts-comptables seront à même de conseiller sur l’un ou l’autre point, et d’ailleurs, leur expertise sera indispensable, mais pour tous les autres, l’intervention des avocats sera recommandée », indique le partner du cabinet DSM. De la même manière, des enjeux plus structurels, à l’instar des fonds d’investissement, de la rédaction des prospectus ou de la structuration des fonds alternatifs, requerront des avocats. Il n’existe pas de protocole-type à suivre pour savoir si seul le service juridique interne doit prendre en charge un dossier ou si un cas impose le recours aux cabinets de conseil ou aux cabinets d’avocats. Tout dépendra assez logiquement des besoins et de la nature de la société, de petite ou de grande taille. « Nous avons des PME qui nous disent vouloir une sorte de service juridique externalisé, une sorte de hot-line pour des questions day-to-day, des
contrats ou autres. Ce sont des services que nous fournissons et développons », souligne Renaud Le Squeren.
SPÉCIFICITÉ
Des opérations particulières pourraient d’ailleurs exiger l’implication des différentes parties, dans le cas par exemple de cessions d’entreprises, d’acquisitions d’immobilisations lourdes, de financement. « Après, nous bénéficions d’une valeur ajoutée immense en tant qu’avocats, à partir du moment où l’on plaide, parce qu’on comprend la manière dont les décisions vont être prises, les points importants et on s’éloigne de la théorie juridique », insiste-t-il. Imaginons que vous vouliez vendre une entreprise, vous devez dans la plupart des cas obtenir un financement bancaire. Et les banquiers s’attendent à trouver une société « juridiquement propre », c’est-à-dire avec des contrats écrits, des garanties, bref, tout ce qui permet de savoir ce qui appartient à qui. « Mais on a régulièrement aujourd’hui des sociétés difficiles à vendre parce que leur organisation interne est faite d’insérés d’accords oraux ou autres. Cela ne permet pas de sécuriser un financement pour un acquéreur, et cela quelle que soit la rentabilité de l’entreprise », déplore Renaud Le Squeren.
JUDGE-MADE LAW ?
Une autre tendance demanderait enfin une attention toute singulière. De longue date,
beaucoup de cabinets d’avocats anglosaxons se sont implantés au Luxembourg, mais ces cinq dernières années, leur présence s’est encore accentuée. Et il y aurait un débat de fond âpre et lourd de conséquences en Europe, dont personne ne semble prêt à parler publiquement : le remplacement du droit civil par la common law. « Il y a un lobby énorme à la Commission européenne pour entrer dans des systèmes plus common law, avec des propositions faites par le Royaume-Uni et l’Irlandepour essayer d’unifier un maximum », épingle le partner de DSM. De nombreux modèles circulent ainsi sur la Place, dans le secteur de la finance en particulier, qui sont des copier-coller de ce qui se fait en common law, avec bien sûr les adaptations nécessaires au regard du droit luxembourgeois, non sans anicroche. « Cela fait des documents monumentaux. Des contrats de 80 à 150 pages aussi indigestes à la lecture qu’à la rédaction et qui comportent alors très souvent des contradictions. C’est très complexe à manipuler, s’inquiète Renaud Le Squeren, alors que le Code civil prévoit beaucoup d’hypothèses ; pas besoin de réinventer la roue. » Ce type d’évolution n’emprunte manifestement pas la bonne direction pour assurer une relation positive avec les clients et pourrait troubler davantage un marché juridique accusant parfois un manque de clarté. F. R. Janvier 2019 — Tax & Legal—
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CONSEILS RÉGLEMENTATION
UNE ANNÉE 2019 EN TOUTE CONFORMITÉ Comment repérer et évaluer de manière adéquate les enjeux de compliance ? La conformité se doit d’être une préoccupation pour prémunir votre entreprise des risques de sanction et de réputation. Les conseils de DS Compliance et de TMF Group.
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Même les très discrets fonds d’investissement ne pourront plus se réfugier dans le silence... La CSSF a émis en août la circulaire 18/698 qui renforce les obligations en matière de lutte contre le blanchiment. « Celle-ci intervient en préparation de l’inspection du Gafi (Groupe d’action financière, ndlr), qui va interroger les autorités de contrôle, mais également des acteurs du secteur. La préoccupation actuelle du marché est de s’assurer que durant 2019, il y a aura suffisamment de formations et d’informations en lien avec les normes AML », épingle Elisa Da Silva, directrice générale de DS Compliance.
Toujours en anticipation du prochain rapport du Gafi et en conséquence de ladite circulaire, la gouvernance est renforcée avec de nouveaux contrôles en interne et rapports à produire sur base annuelle. « Par exemple, la due diligence sur les fonctions déléguées. C’est une particularité du Luxembourg où les sociétés de gestion ont un rôle administratif central et la plupart des fonctions-clés sont externalisées ou en tout cas déléguées à des entités extérieures. Cela induit au niveau du Grand-Duché un contrôle plus scrupuleux », indique Elisa Da Silva.
L’impact du RGPD persistera en 2019. Entré en vigueur depuis mai dernier, toutes les sociétés ne sont pas encore en conformité. « Et cela restera un enjeu suite au développement qu’il va y avoir dans la pratique, dans la jurisprudence, compte tenu des obligations à mettre en place. Beaucoup de questions se posent encore sur la façon de conserver les données, s’il faut les déplacer ou non », explique la conseillère en compliance.
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Dissiper les inconnues
ILLUSTRATION Maison Moderne
Se préparer aux Redoubler de interrogatoires méticulosité
CONSEILS
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Normaliser les Automatisation Culture processus d’entreprise
Avec un nombre croissant d’exigences variées aux niveaux local et mondial, il devient évident que le traitement de chaque exigence séparément n’est plus réalisable. « Par exemple, Fatca, CRS et AML se chevauchent beaucoup en ce qui concerne les informations que les entreprises doivent examiner dans le cadre du processus de conformité. Les entreprises ont tout intérêt à intégrer ou standardiser leurs procédés pour ces trois aspects », recommande-t-on chez TMF Group.
Les technologies intelligentes s’avèrent de plus en plus utiles afin d’automatiser les mises à jour, les échéanciers, les nuances incrémentales des réglementations. Cela peut alléger les opérations des équipes de conformité et réduire les risques d’erreur humaine qui peuvent toujours arriver... « Une action a ainsi été déclenchée auprès de la Cour de justice de l’Union européenne contre le Luxembourg car il n’avait pas transposé complètement la 4e directive AML lors de l’adoption de la 5e », raconte Elisa Da Silva.
Un dénominateur commun s’imposera au fil des ans : s’assurer que tous les employés comprennent l’environnement réglementaire et les obligations qui en résultent. « Comprendre la complexité est la première étape pour maintenir la conformité. Un programme déployé à l’échelle de l’entreprise permettra aux employés de se familiariser avec les normes en vigueur ou les sanctions en cas de non-respect, et fera en sorte que la responsabilité de la conformité ne repose pas sur une seule personne ou un seul département », résume-t-on chez TMF Group.
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COMPÉTITIVITÉ
Le Luxembourg, valeur refuge ANALYSE
Brexit, Trump, concurrence internationale... Comme tous ses voisins, le Grand-Duché est exposé aux soubresauts géopolitiques et économiques. Mais le pays se distingue par sa stabilité, notamment grâce à sa sécurité juridique, mais aussi fiscale.
époque est à l’incertitude... De la dérive protectionniste américaine à la sortie des Britanniques de l’Union européenne en passant par les relents de guerre commerciale, les économies européennes ne sont pas épargnées par les vents mauvais qui s’abattent sur la planète. Mais dans ce climat de tensions, le Luxembourg fait mieux que résister aux chocs : il tire son épingle du jeu. « Prenons la Turquie, où de grandes familles fortunées ont décidé de sortir leurs capitaux du pays et de gérer une partie de leur patrimoine via des plates-formes luxembourgeoises. Ou, meilleur exemple, les guerres commerciales. La Place attire de plus en plus de capitaux chinois et des dossiers de fonds d’investissement qui se montent pour la Chine directement », observe Laurent Fessmann, partner du cabinet d’avocat d’affaires Baker McKenzie Luxembourg.
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Dès que surviennent des tensions dans une région européenne, voire en périphérie, elles s’accompagnent toujours d’entrées de capitaux étrangers au Luxembourg. Sans compter l’impact notable du divorce du Royaume-Uni et de l’Union européenne sur toute l’industrie financière, qui déployait depuis Londres ses activités via les passeports européens. « Le Brexit a lancé un mouvement d’onshoring d’un certain nombre d’activités. Ceux qui étaient attentistes n’ont plus vraiment le loisir de patienter, ils ont besoin de pouvoir continuer leurs levées de fonds, de répondre de la solidité des structures d’investissement mises en place. Ce mouvement vers le Luxembourg est une tendance lourde », assure Catherine Martougin, partner chez Baker McKenzie. Naturellement, la fiscalité n’est pas le seul critère déterminant. D’autres éléments
influencent les implantations et autres mouvements d’actifs : l’ouverture de l’économie, la disponibilité des régulateurs et des autorités pour élaborer des projets. Un écosystème généralement propice aux affaires, consolidé par les qualités de ses cadres légal et fiscal.
PRÉVISIBILITÉ
« Je ne connais pas d’acteur qui vienne au Luxembourg juste pour le cadre fiscal. C’est un facteur parmi d’autres. Ce que les acteurs économiques nous confient, en réalité, c’est qu’ils se fichent de la charge fiscale en tant que telle, tant qu’elle est acceptable et surtout gérée de manière cohérente », relativise Thierry Lesage, partner Tax au sein du cabinet Arendt. Surtout que les intervenants évoluent désormais dans « l’ère post-Beps », dans une logique de réduction au maximum de la fiscalité du pays de la source en faveur d’une
ILLUSTRATION Sofia Azcona (Maison Moderne)
L’
COMPÉTITIVITÉ
taxation dans le pays de résidence. Avec l’Atad contre l’évasion fiscale, les règles de transmission obligatoire d’informations (MDRs), le reporting de dispositifs fiscaux potentiellement agressifs prévu par DAC6, les discussions en cours sur la CCTB (Common Corporate Tax Base), il est clair que le cadre fiscal se resserre pour le Luxembourg sous l’effet d’une certaine harmonisation à l’échelle internationale. Dans ce contexte, la stratégie du gouvernement luxembourgeois consiste à jouer sur le taux global nominal, pour le rendre plus compétitif. Car à 26,01 %, le niveau demeure notablement au-dessus de la moyenne OCDE. Le taux moyen de l’impôt sur les sociétés dans la zone a reculé de 32,5 % en 2000 à 23,9 % en 2018. Mais il ne faudra pas succomber à la « course au moins-disant ». « Le cadre fiscal se doit de rester simple, lisible et prévisible, voilà ce qui est très important pour les opérateurs économiques. L’enjeu de la coalition gouvernementale est d’offrir cette feuille de route, le plan stratégique qui sera développé sur les cinq prochaines années pour positionner le Luxembourg de la meilleure manière sur les différents pôles d’excellence », estime l’associé du cabinet Arendt. Et à ce titre, la réputation du cadre juridique grand-ducal participe encore fortement à l’attractivité de la Place. D’un point de vue légal et réglementaire, le Luxembourg a une réputation justifiée de stabilité. « Évidemment, faisant partie de l’UE, il n’y a pas d’autre choix que de participer à l’implémentation et l’harmonisation législatives. Mais les législations évoluent toujours de façon mesurée et proviennent généralement d’une initiative ou d’un besoin du marché »,
souligne Catherine Martougin, partner chez Baker McKenzie.
ANCRÉ DANS LE RÉEL
Pour objectiver ce sentiment, l’avocate d’affaires pense notamment aux réformes liées au partnership ou au RAIF qui, en deux ans, ont balayé l’habituelle utilisation des fonds spécialisés pour adjoindre à ces véhicules plus de flexibilité et de sécurité juridique en réponse aux attentes des investisseurs institutionnels. « Lors de la loi Sicar de 2004 sur le capitalrisque, tout le monde nous a regardés avec de grands yeux dans les autres juridictions, affirmant que le Luxembourg ne pourrait jamais attirer les venture capitals dans un si petit pays. Or, nous avons réussi. Même constat avec la loi de 2007 pour les fonds d’investissement professionnels non retail », se remémore aussi Laurent Fessmann, de Baker McKenzie.
23,9 % Le taux global nominal de l’impôt sur les sociétés dans la zone euro a nettement reculé. De 32,5 % en 2000, la moyenne est descendue à 23,9 %. Avec un taux de 26,01 %, le Luxembourg se situe encore au-dessus.
« Une tradition luxembourgeoise vise en quelque sorte à transposer les directives de manière fidèle, sans ajout ou extrapolation. On le voit avec la directive anti-évasion fiscale, transposée de manière scrupuleuse, tout en prenant les options favorables aux entreprises, mais sans aller plus loin, ce qui est parfois le biais de certains États membres », insiste Thierry Lesage de chez Arendt. Mais alors qu’on pourrait penser que l’harmonisation fiscale ou juridique dans l’Union européenne joue à rebours contre les petits pays comme le Luxembourg, c’est en fait l’inverse qui se produit. « Les petites juridictions disposent d’une agilité plus vive pour réagir car, d’emblée, il y a moins de pression populaire. Il est plus facile de réformer un petit pays de 500.000 habitants qu’un pays en comptant 60 millions », proportionne Laurent Fessmann, partner de Baker McKenzie Luxembourg. Du reste, le défi en matière de fiscalité, et plus globalement de cadre juridique, vise à capter des activités créatrices de valeur. Il s’agit à ce titre d’attirer et de retenir des ressources humaines à haut potentiel et à forte valeur ajoutée. « Le Luxembourg présente une fiscalité sur les revenus du travail qui est également plus élevée que dans bon nombre de juridictions en concurrence. Or, plus que les entreprises, ce sont les personnes qui sont attentives au cadre fiscal global. Ça complique le rôle des employeurs d’attirer les talents. L’instauration d’un environnement plus favorable est à mon sens un enjeu majeur pour le positionnement du pays dans les années à venir », assure le partner Tax de chez Arendt. F. R. Janvier 2019 — Tax & Legal—
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CARTES BLANCHES
RÉGLEMENTATION
Accompagner les compliance officers Bien que les exigences réglemen taires entraînent des investisse ments conséquents, elles représen tent un avantage concurrentiel de poids quant aux garanties offertes aux clients. Nos experts expliquent de quelle manière accompagner les compliance officers et ainsi garantir la compétitivité de la Place. 44 —
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CARTES BLANCHES ARENDT REGULATORY & CONSULTING
« La conformité : nouvelle clé du succès des gestionnaires d’actifs » Stéphane Badey Partner Arendt Regulatory & Consulting
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Antoine Peter Advisor Arendt Regulatory & Consulting
ite de passage obligé, la due diligence par l’investisseur institutionnel est un exercice attendu et souvent appréhendé par le gestionnaire d’actifs. L’accent est généralement mis sur les personnes composant l’équipe d’investissement, la performance des fonds précédents, mais les contrôles portent aussi et de plus en plus sur la gestion des risques, la conformité et la gouvernance en place pour protéger les intérêts des investisseurs à long terme. Depuis cinq ans maintenant, Arendt Regulatory & Consulting, l’expertise regulatory consulting d’Arendt, aide ses clients à se mettre en conformité avec leurs obligations réglementaires grâce à l’outil CAROL (Compliance And Regulatory Oversight onLine), un applicatif web qui permet au responsable de conformité de construire et piloter son plan de contrôle de la conformité. Mais CAROL est aussi un support objectif de mise en évidence de la conformité du gestionnaire avec ses obligations réglementaires dans le cadre des due diligences effectuées sur le gestionnaire. Plus récemment, les questions ESG se sont installées comme un élément déterminant du choix du gestionnaire d’actifs par les investisseurs institutionnels ; il s’agit non seule-
ment de choisir le gestionnaire qui présentera le meilleur retour en termes d’investissement en générant le moins de risque opérationnel, mais aussi d’identifier les gestionnaires d’actifs les mieux alignés avec l’organisation, les objectifs à long terme et les valeurs de l’investisseur. Bien qu’il ne s’agisse pas, pour le moment, d’obligations réglementaires, la conformité du gestionnaire avec ces obligations autoproclamées, volontaires et propres à chaque investisseur devient cruciale. Nous avons donc développé une méthodologie permettant d’accompagner les gestionnaires dans leur compréhension et leur prise en compte de ces questions ESG. Nous accompagnons notamment les gestionnaires dans la définition d’objectifs et de stratégies ESG correspondant au mieux à leur organisation et à leurs ressources, ainsi qu’à leur expérience en termes de stratégie d’investissement et d’actifs. Nous développons également des outils permettant, d’une part, de faciliter l’intégration par le gestionnaire de critères ESG dans son processus d’investissement et, d’autre part, de mettre en évidence de manière crédible la conformité du gestionnaire vis-à-vis de sa stratégie et de ses engagements en termes d’ESG.
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CARTES BLANCHES LUTHER
DSM AVOCATS
« Rentabiliser votre compliance officer »
« les missions ont largement évolué »
Renaud Le Squeren Partner DSM Avocats
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e cadre réglementaire des entreprises se complexifie : obligations réglementaires vis-à-vis des autorités de surveillance, lutte contre le blanchiment d’argent et contre le financement du terrorisme, réglementation sur la protection des données personnelles, etc. À cela, s’ajoutent les incertitudes géopolitiques majeures dans un contexte d’intense lutte d’influences entre les superpuissances mondiales. Dans cet océan de doutes auquel les entreprises sont confrontées, le Grand-Duché de Luxembourg doit continuer à être un îlot de stabilité pour les investisseurs. C’est ici que sa longue expérience et son expertise exceptionnelle en matière réglementaire peuvent devenir un atout commercial et lui permettre de générer des profits à partir de données qui étaient jusqu’à présent passives dans l’entreprise : celles collectées pour remplir des obligations réglementaires. L’ensemble des informations et des données collectées sur les clients et leurs investissements dans le cadre des obligations réglementaires doit pouvoir être utilisé, sous forme anonyme ou avec l’accord des personnes concernées, pour développer de nouveaux marchés de la connais-
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sance de l’information. Par exemple, les fonds d’investissement luxembourgeois ont l’obligation réglementaire de détenir des informations qui pourraient, sous une forme agrégée, anonymisée ou non, avec l’accord des personnes concernées dans certains cas, permettre des analyses macroéconomiques et microéconomiques détaillées de certains secteurs d’activité et de certaines zones géographiques. N’est-ce d’ailleurs pas le modèle économique développé par les Gafa avec leurs propres utilisateurs ? À partir du moment où les entreprises décident de rentabiliser les données qu’elles détiennent pour des motifs réglementaires, leurs avocats, particulièrement ceux qui sont familiers des nouvelles technologies et des règles afférentes, peuvent les aider à le faire en respectant le cadre légal, la transparence vis-à-vis des clients et personnes concernées, et la conformité avec les bonnes pratiques de la Place en matière de protection des données personnelles. Toutes les entreprises peuvent rentabiliser l’énorme travail des compliance officers – à condition de respecter l’ensemble des lois applicables –, et ainsi générer de nouveaux profits.
— Tax & Legal — Janvier 2019
E
n l’espace de 15 ans, nous avons assisté à un véritable changement de paradigme, le contrôle préalable des autorités a fait place à une véritable responsabilisation des entreprises, comme en témoignent le FATCA, le CRS ou le RGPD, et il appartient dorénavant aux acteurs du monde économique de s’assurer de leur propre conformité, sous peine de s’exposer à de très lourdes sanctions financières, si ce n’est pénales. En parallèle, l’environnement juridique européen a également drastiquement évolué, le recours à la réglementation s’est intensifié, les normes, toujours plus nombreuses (PSD2, 4e et 5e directives AML, FATCA / CRS, Bâle III, Mifid II…), sont devenues également plus complexes et plus techniques, et leur simple connaissance relève parfois du défi, en particulier pour les PME ne disposant pas nécessairement des ressources leur permettant d’assurer la veille juridique devenue le pendant de cette conformité. Nous avons par ailleurs constaté qu’au fil des années, les missions des compliance officers, originellement axées sur le respect des règles anti-blanchiment et la prévention du financement du terrorisme, ont largement évolué et englobent aujourd’hui des domaines très différents tels que la protection des données, la confidentialité, le contrôle des fraudes, le respect des règles professionnelles (ex : déontologie) ou sectorielles (ex : circulaires
CSSF, lignes directrices de l’EBA et de l’ESMA), ainsi que les questions liées à la gouvernance. En tant qu’avocats, nous venons ainsi soutenir et accompagner les compliance officers dans leurs missions, notamment dans les domaines suivants : - conformité réglementaire et AML : nous revoyons la documentation juridique préparée par les compliance officers et nous nous assurons que celle-ci est la plus adaptée aux activités et besoins de nos clients. Le secteur financier étant en perpétuelle mutation, nous fournissons également à certains de nos clients des services de veille juridique ; - protection des données : nous assistons nos clients dans la rédaction de leur politique, revoyons leurs contrats (prestataires / employés / clients / investisseurs) et les conseillons dans la prise de décisions stratégiques (ex : choix d’un DPO, mise en place d’un système de surveillance) ; - gouvernance : nous assistons nos clients dans la détermination de leur politique de gestion des conflits d’intérêts, whistleblowing... Le prochain challenge que nous anticipons est l’entrée en vigueur de la loi instituant le registre des bénéficiaires effectifs qui transformera encore la pratique des compliance officers.
Euryale Didillon Senior associate Luther
Générateur de business depuis 20 ans
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INDEX Maison Moderne ™ www.maisonmoderne.com Téléphone (+352) 20 70 70 E-mail publishing@maisonmoderne.com Courrier BP 728, L-2017 Luxembourg Bureaux 10, rue des Gaulois, Luxembourg-Bonnevoie fondateur
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AFAKIR JAMAL 14 ARENDT 42 ARENDT REGULATORY CONSULTING 45 ATOZ TAX ADVISERS 9, 14 BADEY STÉPHANE 45 BAKER MCKENZIE LUXEMBOURG 42 BÂLOISE VIE 25 BANQUE DE LUXEMBOURG 51 BEERNAERTS CHRISTINE 20 BETTEL XAVIER 8
KPMG LUXEMBOURG 18 KRAWCZYKOWSKI RAYMOND 16 LABBÉ SÉBASTIEN 18 LALUX 21 LE SQUEREN RENAUD 38, 46 LESAGE THIERRY 42 LINKLATERS 2 LOYENS & LOEFF 6, 20 LUTHER 46 LUXAIR 15 LUXINNOVATION 26
C - D
M - N
CHAMBRE DE COMMERCE 26 CHAMBRE DES MÉTIERS 26, 29 COMMISSION EUROPÉENNE 26 CSSF 34 DELOITTE LUXEMBOURG 16 DENAYER LAURENT 50 DIDILLON EURYALE 46 DONDELINGER NORRY 26 DP 34 DS COMPLIANCE 40 DSM AVOCATS 38, 46
MAISON STEFFEN 23 MARTOUGIN CATHERINE 42 MINISTÈRE DE L’ÉCONOMIE 26 MINISTÈRE DES FINANCES 3 4 MOSCOVICI PIERRE 8 NAUTADUTILH 17
E - F EUROSTAT FESSMANN LAURENT FOYER
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O - P - R OLINGER JEAN-PAUL 24 ORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES 8, 34 PETER ANTOINE 45 PIOT WIM 22 PWC 22, 52
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« Collaborer pour mieux se concurrencer » Chaque mois, un acteur du secteur couvert par Paperjam Plus est sollicité pour partager en image ses impressions sur l’avenir de celui-ci. Laurent Denayer, CEO de la regtech ume, s’est prêté à l’exercice et a répondu à la question : « Comment envisagez-vous l’avenir du secteur réglementaire au Luxembourg ? »
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elon Laurent Denayer : « Dans un contexte où les exigences réglementaires sont plus nombreuses et plus rigoureuses, les regtech apportent une réponse flexible et automatisée tout en mutualisant les coûts et les efforts de conformité. Être en conformité ne permet pas de se différencier. »
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“Préservation du capital ou performance sur le long terme ?
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PwC Legal A different law firm As of 1 December 2018, MNKS joined the PwC Network and is now known as PwC Legal. PwC Legal remains firmly independent and committed to deliver relevant, innovative and forward-looking legal advice with the same values and the same vision: A different law firm. Acting as a business partner, we provide a full range of services and technical expertise in the field of Corporate/M&A, Private Equity, Employment, Dispute Resolution, Banking & Finance, Capital Markets, Investment Funds, Technologies & IP. www.pwclegal.lu
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