Paperjam1 Juin 2015

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Éditorial Juin 2015

BON SENS NE SAURAIT MENTIR

L

e 7 juin prochain, le Luxembourg aura l’oc- grande implication des résidents non luxembourgeois dans casion de s’offrir un petit moment d’his- la vie politique nationale. « Mir sinn dofir », avions-nous affitoire dont lui seul a le secret. En appelant ché en couverture, relayant par ailleurs l’avis de 50 déciles électeurs à se prononcer, par voie de deurs économiques majeurs du pays. référendum, sur la possibilité d’accorder « Jo ! », affirmons-nous haut et fort encore cette fois-ci, à le droit de vote aux résidents étrangers moins d’un mois de ce référendum, persuadés que l’occa(sous condition de durée de résidence – sion est unique d’envoyer un message à l’Europe, voire 10 ans – et de participation antérieure à un scrutin com- au monde, pour lui dire que le Luxembourg n’est pas un munal ou européen), le gouvernement entrouvre la porte pays d’opérette vivant, soi-disant, de la fraude des autres, à un formidable bouleversement sociétal dans un pays à mais qu’il se pose au contraire comme un modèle de qui l’on reproche souvent un certain conservatisme. démocratie et d’intégration. La relative bonne santé du Luxembourg, sa prospérité de Le pari engagé par Xavier Bettel et sa coalition tricolore ces dernières décennies et ses perspectives d’avenir sont n’est évidemment pas sans risque. Certes, ce référendum étroitement liées à la présence de résidents étrangers, au n’est que consultatif et le contour de ses suites législatives, moins autant que de travailleurs frontaliers. voire constitutionnelles, est loin d’être dessiné. En 2000, lorsque naquit Paperjam, le pays comptait un peu Mais le danger est grand que l’électorat profite de cette moins de 440.000 habitants, dont 37 % de résidents étran- première consultation nationale depuis le scrutin légisgers, auxquels s’ajoutaient 86.000 travailleurs frontaliers. latif d’octobre 2013 pour exprimer, au travers de son vote, En 2015, 258.679 des 562.958 habitants du pays (soit 46 %) des griefs que les sondages semblent identifier comme sont non luxembourgeois et quelque 167.000 travailleurs étant nombreux. Le dernier Politmonitor de TNS-Ilres franchissent chaque jour l’une des trois frontières du pays. chiffre à 64 % la proportion des électeurs ayant une opiUne situation qui n’a probablement pas d’équivalent ail- nion défavorable de l’exécutif. leurs sur la planète. Au-delà d’une déception légitime ressentie par ceux qui Le revers de cette médaille atypique est que la quasi-moitié estiment plus qu’indispensable une plus grande intégrade la population résidante est exclue, de fait, d’un proces- tion des résidents non luxembourgeois, un « non » au sus électoral réservé aux seuls titulaires de la nationalité sortir des urnes le 7 juin pourrait avoir des conséquences luxembourgeoise. Et compte tenu de l’évolution démogra- – encore non mesurables – sur le « vivre ensemble » au phique de ces dernières années, ces Luxembourgeois seront sein d’un pays qui ne peut évidemment pas se permettre prochainement minoritaires chez eux. Déjà en avril 2013, de risquer la moindre fracture sur l’une des jambes qui Paperjam et Maison Moderne (qui lui permet d’avancer parfois emploie aujourd’hui quelque contre vents et marées, au risque Par Mike Koedinger, 90 collaborateurs d’une douzaine de devoir boiter longtemps. C’est Founder & CEO de Maison Moderne de nationalités différentes) avaient aussi pour cela que nous jugeons et Jean-Michel Gaudron, clairement pris position en faveur le « oui » autant comme un formirédacteur en chef de Paperjam d’une relance du processus démodable progrès sociétal que comme E-mail : jean-michel.gaudron@paperjam.lu Twitter : @jmgaudron cratique dans le pays et d’une plus une preuve de bon sens. ◄

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Sommaire Juin 2015

068 Luxaviation est devenue la deuxième compagnie mondiale du segment business.

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Grand entretien KARIM MICHEL SABBAGH

« Réinventer le champ du possible » En place depuis un an à la tête de SES, Karim Sabbagh s’attelle à prolonger le travail de son prédécesseur, Romain Bausch, qui a occupé les fonctions pendant près de 20 ans. Dans un style très différent, plus direct, il vise une plus grande mondialisation des services de la société, basés sur quatre piliers : vidéo, data, mobilité et gouvernement. SES veut jouer un rôle clé dans l’écosystème numérique, dont les progrès refaçonnent sans cesse notre quotidien. Par Jean-Michel Gaudron et Thierry Raizer

020

Coverstory 022 UN RÉFÉRENDUM, TROIS QUESTIONS, DES ENJEUX

Des citoyens dans l'Histoire Les réponses des électeurs, le 7 juin, permettront peut-être au Grand-Duché d’être à la pointe de la citoyenneté de résidence. Par Alain Ducat

026 APPROCHE JURIDIQUE

Les fruits de la Nation Plongée dans la Constitution et ses possibles futurs contours, ainsi que dans l’esprit des lois. Par Alain Ducat

030 OPINIONS

Les décideurs, aussi, disent « oui » ! 55 chefs d’entreprises ou acteurs de premier plan nous ont livré leurs avis personnels.

036

Économie & Politique 040 DISCOURS SUR L'ÉTAT DE LA NATION

Faire passer le triple « oui » au pays du triple A Le second discours sur l’état de la Nation par Xavier Bettel laisse sur leur faim ceux qui attendaient des effets d’annonce. Le Premier ministre s’engage, de manière volontariste et réaffirmée, sur le « oui » au référendum du 7 juin, notamment sur le droit de vote des étrangers. Un pari pour le gouvernement, qui passe mieux auprès des résidents étrangers qu’auprès des électeurs luxembourgeois. Par Véronique Poujol

062

Entreprises 068 LUXAVIATION

Champion mondial, mal-aimé chez lui L’opérateur business Luxaviation a franchi un nouveau cap avec l’acquisition de 100 % de son concurrent suisse Execujet. La transaction hisse la société luxembourgeoise au rang de numéro deux mondial, avec une flotte de 250 avions et plus de 1.500 employés. Pour autant, la compagnie ne trouve pas, au Grand-Duché, un écho à ses demandes d’établissement d’installations de maintenance dignes de ce nom. Par Véronique Poujol

090

Place financière 094 FRAUDE FISCALE ET BLANCHIMENT

Résister au cheval de Troie fiscal ? L’étau se resserre sur le Luxembourg, qui est l’un des seuls pays à ne pas considérer la fraude fiscale comme une infraction primaire au blanchiment. Un vent de panique plane sur la place financière et un arrêt récent de la Cour de cassation n’apaise pas le climat. Désormais, les clients des banques pourront demander des dommages contre celles qui n’auront pas respecté leurs obligations de vigilance. Par Véronique Poujol

Par Jean-Michel Gaudron

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Sommaire Juin 2015

047 Robert Garcia vous

fait visiter les Rotondes avant leur (ré)ouverture.

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Économie & Politique

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Entreprises

Place financière

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GR BUSINESS DAYS

MARCHÉS PUBLICS

EICHER BY RODENBOURG

CÉLINE COUBRAY

RENMINBI FORUM

VIRTUAL CURRENCIES WORKING GROUP

PME sans frontières La quatrième édition des GR Business Days se tiendra à Luxexpo les 17 et 18 juin. Ce salon, conçu pour mettre en contact les PME de la Grande Région, attire de plus en plus d’acteurs étrangers. Les organisateurs espèrent franchir le cap des 250 exposants.

L’opaque marché du Lycée français Les travaux de gros œuvre du futur campus francophone du Ban de Gasperich vont démarrer en septembre. Des questions se posent sur la régularité de la procédure.

Par Jean-Michel Lalieu

ICT

047 ROTONDES

360° et quelques La ténacité de Robert Garcia et son équipe a payé : les Rotondes ouvriront enfin le 13 juin. Seule une partie de la Rotonde 2 sera accessible au public. L’asbl devra attendre encore avant de devenir un établissement public. Par France Clarinval

Par Véronique Poujol

058 3.14, un cercle à développer Basé sur un modèle français, une école informatique gratuite et de haut niveau pourrait voir le jour au Luxembourg. Ses initiateurs cherchent à boucler un budget de l’ordre du million d’euros et espèrent ouvrir en novembre prochain. Par Jean-Michel Gaudron

Reprise en plusieurs dimensions Michel Rodenbourg a repris Eicher Frères. Rebaptisée Eicher, l’entreprise familiale mise sur le 2.0 pour conquérir de nouveaux marchés. Une start-up dans l’impression 3D vient compléter cet univers en mouvement. Par Thierry Raizer

073 ANNIVERSAIRES

Mikado et Concept, les baroudeurs Les dirigeants fondateurs des agences Mikado Publicis (25 ans) et Concept Factory (20 ans) sont toujours actifs sur le marché. Des années d’or du 20e siècle à la nouvelle donne numérique, la transition n’a pas toujours été aisée. Par Jean-Michel Gaudron

« L’architecture n’est pas réservée aux initiés » Le magazine Archiduc, édité par Maison Moderne, fête ses cinq ans d’existence. Depuis 10 numéros, la publication fait la promotion d’une architecture qui lui ressemble : audacieuse et exigeante. Sa rédactrice en chef porte un regard passionné. Par Jean-Michel Gaudron

079

Quand la monnaie chinoise s’éveillera Luxembourg for Finance organise son second Renminbi Forum le 3 juin prochain. Des orateurs viennent directement de Chine. En trois ans, le Grand-Duché est devenu un acteur incontournable du RMB et entend saisir toutes les opportunités. Par Jean-Michel Lalieu

099 PHILANTHROPIE

FEMMES PIONNIÈRES

Ouvrir la voie L’exposition itinérante Femmes pionnières de l’entrepreneuriat met en avant 12 Luxembourgeoises ayant fait carrière, dans l’idée d’en inspirer d’autres. Deux parcours parmi d’autres : ceux de Nelly Duhr et Céline Guillou.

Pas qu’une affaire d’argent Le recours à la solidarité privée est de plus en plus indispensable. Plusieurs pistes sont envisagées, d’un cadre fiscal plus incitatif à la finalisation du projet de loi sur la philanthropie, toujours dans les tiroirs.

Par Florence Thibaut

Par Florence Thibaut

Une tirelire bien réelle Dans le giron de l’Apsi, un pool de professionnels s’est branché sur la promotion ciblée des monnaies de type bitcoin. La Place aimerait attirer les QG d’acteurs internationaux. Les coulisses bruissent de gros enjeux et de grands noms dans les starting-blocks. Par Alain Ducat

104 MICROFINANCE

Coopérer et développer, vraiment 2015, Année européenne pour le développement : Ben Fayot est l’ambassadeur du Luxembourg. Les acteurs de la Place s’intéressent aussi au rôle de la finance inclusive. Par Fabrice Barbian

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Sommaire Juin 2015

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Désirs 108 CULTURE

Actualités Quelques événements culturels marquants à venir, les personnalités à suivre, les parutions du moment, les dates à retenir.

109 ZOOM SUR…

Aline Forçain Arrivée au Luxembourg il y a quelques mois, Aline Forçain, peintre et illustratrice, vient renforcer les rangs de la création sur notre territoire. Par Céline Coubray

110 SÉLECTIONS

Les Rotondes et Taïwan À l’occasion de l’ouverture des Rotondes, la rédaction a sélectionné cinq événements qui ponctueront le week-end des 13 et 14 juin. Le Casino Luxembourg nous présente trois artistes de Taïwan qui y exposent.

112 SHOPPING

Akobo-bus Partant du constat qu’il y avait un manque sur ce marché, Karel Lambert a décidé avec sa femme Lyne de lancer Akabo-bus, un « fashion-bus » qui ne propose que des vêtements écologiques et fairtrade. Ainsi que l’actualité du commerce à Luxembourg. Par Céline Coubray

114 GASTRONOMIE

Zoom sur Terra C’est la deuxième récolte pour la coopérative Terra, qui promet une agriculture raisonnée et raisonnable, en plein cœur de Luxembourg. La résilience est en marche. Rencontre avec les fondateurs, qui ont les pieds dans et sur terre. Et l’actualité de la restauration et de la nuit. Par France Clarinval

116 INTERVIEW

Le paradis, c’est l’enfer L’artiste luxembourgeois Filip Markiewicz et le commissaire de l’exposition Paul Ardenne présentent Paradiso Lussemburgo, la participation du Luxembourg à la Biennale de Venise. Un portrait sans concession du pays dans un contexte européen actuel. Par France Clarinval

114 Deuxième récolte pour la coopérative Terra.

TOP 5

des articles les plus lus sur paperjam.lu du 1er avril au 7 mai 2015

1

Le journaliste qui a révélé LuxLeaks inculpé (vu 1.889 fois)

2

18 mois avec sursis requis contre l’avocat fiscaliste (vu 1.840 fois)

3

Nico Castiglia, détrousseur converti à la politique (vu 1.634 fois)

4

Kurt : le premier expert jette l’éponge (vu 1.370 fois)

5

Édouard Perrin aurait dirigé le vol chez PwC (vu 1.071 fois)

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Agenda Événements à ne pas manquer dans les prochaines semaines

À SUIVRE 01/06 TRANSITION

Quilvest suit sa route

Un nouveau CEO pour Luxconnect

Le groupe Quilvest (maison mère de la banque CBP Quilvest dirigée par Marc Hoffmann) a enregistré, en 2014, une croissance de la valeur de ses actifs de 4 %, bien en deçà de la moyenne annuelle visée de 8-10 %. La faute, notamment, à la force du dollar comparé à l’euro. Cela n’empêchera pas de proposer le paiement d’un dividende de 1,50 euro par action (contre 1,25 un an plus tôt).

PHOTO : LUC DEFLORENNE (ARCHIVES)

12/06 ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Nommé CEO de Luxconnect à sa création en 2006, Edouard Wangen (à droite sur la photo) passera la main début juin, faisant valoir ses droits à la retraite. Son successeur, Roger Lampach (à gauche), est un autre « ancien » de la maison, où il est arrivé en janvier 2007. Il y occupait la fonction de chief technology officer.

18/05

19/05

20/05

28/05

RAPPORT D’ACTIVITÉ

DÉCLARATION INTERMÉDIAIRE

PRÉSENTATION

BILAN

Médiateure : suite des débats

Le premier trimestre de Luxempart

L’école de Differdange se dévoile

Les caoutchouteuses au rapport

Le débat d’orientation sur le rapport d’activité 2014 de la médiateure Lydie Err continue : après deux précédentes séances devant la commission des institutions et de la révision constitutionnelle et celle des pétitions, c’est au tour de la commission du travail, de l’emploi et de la sécurité sociale, présidée par Georges Engel (LSAP), de participer aux discussions.

La société d’investissement cotée en Bourse, Luxempart, présentera un premier état des lieux après trois mois d’activité en 2015. Des chiffres qui devraient refléter l’opération de rachat par la société, le 15 janvier dernier, des quelque 2.385.000 actions (soit 9,96 % du capital) jusqu’alors détenues par la Bil.

Le 27 mars dernier, le conseil de gouvernement avait adopté le projet de loi portant création d’une école internationale publique à Differdange, censée ouvrir ses portes pour la rentrée de 2016. À la demande du groupe parlementaire Déi Gréng, le projet sera présenté en détail devant la commission de l’éducation nationale, de l’enfance et de la jeunesse, présidée par Lex Delles (DP).

Les actionnaires du groupe Socfin (anciennement Socfinal) et ses filiales Socfinaf (anciennement Intercultures, détenue à 59 %) et Socfinasia (détenue à 56 %) se réunissent en assemblée générale. Les sociétés du groupe Bolloré, notamment actives dans les plantations d’huile de palme, valideront les bons résultats 2014 présentés plus tôt dans l’année, avec des bénéfices nets de 23,6 millions d’euros (Socfin), 12,6 millions (Socfinaf) et 46,2 millions (Socfinasia).

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Grand entretien Karim Michel Sabbagh ― Interview : Jean-Michel Gaudron et Thierry Raizer ― Illustration : Anne Mélan

« Réinventer le champ du possible » ► En place depuis un an à la tête de SES, Karim Sabbagh s’attelle à prolonger le travail de son prédécesseur, Romain Bausch, qui a occupé les fonctions pendant près de 20 ans. ► Dans un style très différent, plus direct, il vise une plus grande mondialisation des services de la société, basés sur quatre piliers : vidéo, data, mobilité et gouvernement. ► SES veut jouer un rôle clé dans l’écosystème numérique dont les progrès refaçonnent sans cesse notre quotidien.

M

onsieur Sabbagh, vous avez pris il y a un an la succession de Romain Bausch. Comment se passe cette succession ? « Je me place dans une perspective de passage de relais. C’est un renouvellement et un changement de génération. Sous Romain Bausch, SES a poussé les limites de la communication par satellite, construit les meilleures compétences du secteur et créé de la valeur pour les actionnaires. Il nous a donné cette direction et c’est désormais à nous, l’équipe en place, de continuer ce mouvement et de faire face aux nouveaux défis.

Quel type de manager êtes-vous ? « Je n’hésite jamais à poser des questions, même si elles sont parfois directes. La solution n’est souvent pas dans l’idée, mais dans la question que l’on pose. L’enchaînement des idées vient après. J’adhère au concept du primus inter pares, ce qui m’amène à entièrement compter sur les équipes et leur professionnalisme. Ce qui importe, c’est leur collaboration étroite à travers nos différents métiers et en fonction de nos différents marchés géographiques. Ce sont ces deux éléments-là – professionnalisme et collaboration – qui nous ont par exemple permis de nous engager, en seulement 14 mois, sur six nouveaux programmes de satellites. Cette concentration et cette accélération nous importent beaucoup. Sur une note personnelle, ce n’est pas un secret que j’ai une approche différente de celle de Romain Bausch. Et lui-même a déjà eu l’occasion de le dire (« Nous avons les mêmes réflexes, nous posons les mêmes questions et nous tirons les mêmes conclusions, mais à côté de cela, il a une approche beaucoup plus rapide et réactive, car il vient de l’industrie des télécoms et des médias où les changements technologiques sont permanents », déclarait M. Bausch dans Paperjam il y a un an, ndlr). Cet accès à la technologie représente-t-il un enjeu de société majeur ? « Je crois fondamentalement en l’impact de la technologie sur le développement de la

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Nous sommes en train d’ouvrir un nouveau chapitre de la connectivité.

Karim Michel Sabbagh Illustration : Anne Mélan Peinture à l’huile 50 × 40 cm, 2015

société et des économies. Il est connu que la digitalisation catalyse considérablement le développement économique, crée des jobs et de la valeur. SES a un rôle extraordinaire à jouer comme acteur incontournable de la digitalisation globale. Avec notre flotte de 54 satellites, nous touchons au quotidien de presque 1,2 milliard de viewers à travers le monde. Nous avons vocation à être le principal fournisseur de solutions de communication par satellite dans le monde entier. Nous sommes déterminés à réinventer le champ du possible dans notre industrie et au sein de l’écosystème numérique dont les progrès refaçonnent sans cesse notre quotidien. Ce que vous venez de vivre au cours de cette année correspond-il à ce à quoi vous vous attendiez ? « Je ne m’attendais à rien. Vous connaissez la formule de Warren Buffet : ‘Success is getting what you want. Happiness is wanting what you get.’ Je ne cherche pas, je découvre. Chaque jour. Depuis que je suis chez SES, j’ai rencontré beaucoup de gens qui ont, à un quelconque niveau, un vrai historique avec la société. Cela nous donne un sens profond de responsabilités. Au fil des jours, de mes visites et de mes voyages, je me suis de plus en plus rendu compte du très grand professionnalisme de nos équipes et de la très grande proximité entre SES et l’État luxembourgeois. Ensemble, nous serons capables de répondre aux attentes d’un monde qui demande de plus en plus de connectivité et des solutions novatrices pour accéder aux services numériques, aux médias et aux informations. La société O3b, qui opère une constellation de 12 satellites en orbite terrestre moyenne et dont nous détenons une grande part, en est un exemple. Elle travaille, entre autres, sur l’accès internet dans des bateaux, par exemple des grands navires de croisière. Grace à O3b, les standards de connectivité sur ces villes flottantes sont passés, d’un seul coup, de 20-30 Mb par seconde à 1 Gb par seconde ! C’est inouï. Avec des telles applications, nous sommes en train d’ouvrir un nouveau chapitre de la connectivité.



Grand entretien Karim Michel Sabbagh

Quelles sont les évolutions majeures que vous envisagez d’ici à 10 ans ? « Il y a quatre éléments clés. Premièrement, nous sommes déterminés à accélérer la mondialisation de nos services. Deuxièmement, nous nous concentrons sur quatre piliers de business : vidéo, data, mobilité et gouvernement. Historiquement, et pour de bonnes raisons, SES s’est d’abord développée dans la vidéo. Nous n’étions pas sûrs, au démarrage, de la pertinence de la technologie, la réglementation n’était pas encore en place et personne ne savait si cela tiendrait la route. Trente ans plus tard, nous savons que nous avons trouvé la meilleure réponse. Troisièmement, nous croyons à la convergence des services de communication. Prenons l’exemple vidéo : l’expérience sera entièrement basée sur une intégration sans couture sur un dispositif qui fusionne la télédiffusion linéaire avec le non-linéaire. Il s’agit d’envisager une consommation riche de vidéos, grâce à des solutions bidirectionnelles et des échanges de contenus, comme les réseaux sociaux ou les solutions de transaction électronique. Enfin, nous misons sur l’innovation. Nous avons, en fait, beaucoup innové dans la conception et la fabrication de nos satellites et introduit des nouveautés telles que les charges utiles multiusages conjuguant les faisceaux à large couverture et les faisceaux étroits et à haut débit, les faisceaux orientables, le traitement numérique du signal et la propulsion tout électrique qui économise énormément de poids sur un satellite. Nous avons des atouts extraordinaires avec nos satellites. Je reviens au passage de bâton : il faut aller plus loin ! Notre métier ne se résume plus à la vidéo, il y a de nombreux nouveaux horizons à explorer. Les possibilités sont pratiquement illimitées. Le data, c’est l’arme de demain ? « Il y a une demande énorme sur un grand nombre de secteurs et de marchés. Pour les servir, nous avions jusqu’alors un modèle industriel de production de satellites qui était cher et statique, avec un lanceur coûteux qui ne permettait pas d’offrir des services data pour une expérience digitale satisfaisante à destination des marchés en développement. Aujourd’hui, nous le pouvons ! Un satellite qui coûtait X il y a 10 ans coûte le même prix, mais avec trois fois plus

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Plan Juncker

Quelle place pour le satellite ? L’annonce du vaste plan d’investissement de la Commission Juncker et qui doit entrer en action dans les prochaines semaines concerne SES de près. « Nous avons des échanges réguliers avec Bruxelles pour définir quelle peut être la contribution que peut avoir le satellite dans la vision 2020. Notre but n’est pas de dire que X va remplacer Y, mais plutôt d’imaginer une approche très complémentaire. » Aujourd’hui, pousser un signal vidéo d’un point A à un point B par voie terrestre est de loin la solution la moins efficace et la plus coûteuse. Sur toute une gamme d’applications, le satellite se positionne comme un moyen intelligent de gérer tout ce trafic à des coûts moindres. « Il est possible de transporter un signal vidéo par satellite à un débit de 4 Gb par seconde. La fibre standard, c’est du 100 Mb. À l’horizon 2020, le projet est que 50 % des foyers européens soient raccordés en 100 Mb et 50 % à 30. Nous en sommes encore très loin. On voit bien qu’on ne gagnera qu’ensemble. Il ne faut pas être attaché à une réponse monolithique dans le choix de l’architecture du réseau qui doit livrer ces capacités. Il faut une combinaison. Une seule réponse n’est pas la bonne réponse. » J.-M. G.

« Il est possible de transporter un signal vidéo par satellite à un débit de 4 Gb par seconde. La fibre standard, c’est du 100 Mb. »

de capacité. Et dans le même temps, un lanceur qui coûtait 120 à 130 millions de dollars il y a deux ou trois ans est aujourd’hui disponible à 60-80 millions. Cela nous permet de démocratiser bon nombre de nos services et de croître, de nous globaliser et de développer des nouveaux marchés tout en garantissant que nous arrivons à générer les mêmes marges que dans les marchés matures. Il faut redessiner les satellites, nous assurer des rendements favorables et avoir accès à des lanceurs comme Arianespace ou SpaceX qui répondent économiquement à nos besoins. L’une des clés de la différenciation réside-t-elle dans la vitesse de mise en œuvre d’un projet ? « Bien sûr. Avant, le développement d’un satellite pouvait nous prendre trois ans, auxquels s’ajoutaient trois ans de construction. Cela n’est plus acceptable aujourd’hui. Il faut accélérer. Le time to market, c’est-à-dire le développement du projet, la construction et le lancement, doit être plus rapide. Et cela passe aussi par une approche plus collaborative avec nos partenaires industriels. C’est exactement comme cela que nous avons fonctionné pour la préparation des satellites SES-14, SES-15 et SES-16 : nos équipes n’ont pas quitté les partenaires industriels tant que la solution n’avait pas été développée. Cette collaboration étroite nous permet de trouver, avec rapidité, des innovations et de nouvelles réponses aux questions qui se posent dans nos quatre piliers sur lesquels nous nous concentrons. Cela veut dire qu’un modèle pragmatique tel que développé par SpaceX répond davantage à votre approche et à vos besoins que celui d’Arianespace ? « L’avantage de SpaceX est que c’est en effet un modèle industriel intégré. Il se base sur un atout très fort : celui d’avoir l’intégralité de la chaîne de valeur regroupée sous un même toit et de disposer d’une base de lancement sur le même site. Tout cela a aussi aidé à pousser le développement du modèle d’Ariane 6 qui est prévu pour 2020.

PHOTO : SES

Le fait que vous soyez le premier dirigeant de SES non luxembourgeois a-t-il pu constituer, à un moment donné, un frein ? « Non. Je pose simplement les questions différemment. Comme le disait Romain Bausch, j’ai une façon plus directe de demander, de faire, et je semble moins patient. Mais ça passe très bien. Chacun de nous s’adapte très vite. On doit de toute façon toujours s’adapter : une conversation avec des clients en Asie est très différente d’un échange avec des clients aux États-Unis. Sur une note plus générale, le Luxembourg est une plateforme très diverse et ouverte qui permet à des nouveaux talents de s’établir avec succès sur un plan aussi bien professionnel que personnel.


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PHOTO : SES

Grand entretien Karim Michel Sabbagh

Cela a pris du temps : la décision ministérielle de l’Agence spatiale européenne pour accélérer les préparatifs de ce lanceur 6 date de novembre 2012, à Naples, mais la décision finale du lancement du programme ne date que de décembre dernier et a d’ailleurs été signée à Luxembourg ! Comment est-il possible, à un niveau européen, de faire en sorte que les choses avancent plus vite ? « Dans la conception d’Ariane 6, la réflexion était de se dire : voici le type de lanceur dont les industriels comme SES ont besoin et voici le type de lanceur dont les institutionnels ont besoin. Il faut donc savoir répondre à la fois aux besoins d’opérateurs commerciaux et aux besoins d’opérateurs institutionnels. Nous y sommes. Cela constitue un grand progrès, car il y avait jusqu’alors une sorte de compétition être les deux parties, chacun défendant ses intérêts. Compte tenu de votre position commerciale très forte, la prospection représente-t-elle encore un enjeu majeur ? « Évidemment ! Nous avons besoin d’en faire et nous parvenons à bien le faire. Pour le compte du premier trimestre 2015, nous sommes, par exemple

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― Juin 2015

SES contrôle quotidiennement, depuis Betzdorf, pas moins de 54 satellites en orbite, auxquels s’ajoutent les 12 de la société O3b.

Les possibilités sont pratiquement illimitées.

par rapport à 2014, en avance de 10 % en termes de revenus générés par des nouveaux business, que ce soit avec des clients existants ou de nouveaux clients. Ce n’est pas rien ! Nous avons l’obligation de continuer à investir dans l’expansion progressive des marchés développés. En même temps, nous redoublons nos efforts financiers sur les marchés internationaux. Nous investissons et croissons dans nos quatre piliers : vidéo, data, mobilité et gouvernement. Dans ces quatre secteurs, et mondialement, il nous est possible de structurer des solutions et des services très novateurs et différents. Il ne s’agit pas de remettre en cause ce que nous avons acquis, mais de redéfinir et flexibiliser l’approche pour des nouveaux marchés. Cela nous ouvre d’autres horizons. Lorsque nous approchons de nouveaux clients, c’est parce que nous estimons que nous pouvons partager avec eux des idées susceptibles de les emmener très loin ensemble. Quels sont les leviers de croissance sur lesquels vous comptez vous appuyer ? « Nous disposons de bases très solides surtout dans le vidéo, où la marge de progression



Grand entretien Karim Michel Sabbagh

est encore grande car la pénétration de la télévision payante dans quelques-uns des plus grands pays émergents reste inférieure à 20 % et, dans de nombreux cas, même à 10 %. Nous devons accélérer le développement de ces écosystèmes, que ce soient les antennes, les réseaux de distribution, les technologies IP. Nous ne devons pas nous limiter à la seule infrastructure : nous devons aussi développer des services de valeur ajoutée pour nos clients. C’est pourquoi nous travaillons aussi beaucoup avec nos partenaires downstream. Nous devons, par ailleurs, beaucoup investir dans le data, la mobilité et le gouvernement : une grande partie de nos investissements s’y concentre. Les derniers accords commerciaux annoncés ces derniers mois s’inscrivent-ils précisément dans cette logique ? « Tout à fait. La mobilité est l’un des segments de notre portefeuille qui connaît la plus forte croissance. SES est aujourd’hui un acteur majeur des services de connectivité haut débit dans les secteurs maritime et aéronautique. Nous avons ainsi conclu des partenariats avec de grands prestataires et intégrateurs de services de mobilité aéronautique, comme Global Eagle Entertainment. Quand nous avons commencé à travailler avec eux, nous nous sommes interrogés sur ce à quoi pourrait ressembler l’avenir dans un avion ; comment développer des antennes qui permettent d’être connecté plus efficacement pendant le vol et quelles expériences il serait possible d’imaginer par la suite. En théorie, notre responsabilité pourrait se limiter à faire en sorte que le signal parvienne correctement sur l’antenne de l’avion. Mais ça, c’était avant. Désormais, nous nous devons aussi d’être impliqués dans la façon dont le signal sera ensuite reçu. Ce qui ne veut évidemment pas dire que nous voulons nous substituer à nos partenaires ! Qu’en est-il du développement du projet de satellite militaire luxembourgeois GovSat ? Quel est le timing ? « Nous avons lancé le programme avec Orbital ATK, comme partenaire industriel aux États-Unis, pour la construction du satellite. Nous avons déjà dépêché quelques ingénieurs sur place. Le conseil d’administration de la nouvelle société LuxGovSat est actuellement dans le processus de désignation de l’équipe de gestion qui suivra ce projet. C’est elle qui sera alors responsable de structurer les offres commerciales et de s’y engager. La mission GovSat joue un rôle clé dans la réalisation de notre stratégie de croissance et est un projet phare dans le secteur gouvernemental. Avec le E de SES, quelles autres collaborations est-il possible d’imaginer avec les États du Vieux Continent ? « Prenons encore une fois l’exemple de GovSat : nous avons accès à des bandes de fréquences réservées au secteur militaire. Elles sont évidemment plus sécurisées et plus robustes et le secteur commercial, tout seul, ne peut pas y accéder. Elles sont assignées aux États, mais les États ne sont pas des opérateurs de

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satellite. Un partenariat public-privé comme GovSat nous permet maintenant, d’une manière très élégante, de satisfaire des besoins de deux volets publics : militaire et sécurité, ainsi que civil et institutionnel.

Digital Lëtzebuerg

Trois niveaux d’implication Discrètement, mais concrètement, SES apporte sa pierre à l’édifice du programme « Digital Lëtzebuerg » que le gouvernement met en place. « Nous sommes impliqués à trois niveaux », explique Karim Sabbagh. Tout d’abord, sous l’égide de la Fedil, une initiative a été lancée par le secteur privé pour apporter une perspective indépendante en matière de cybersécurité. « Nous nous investissons dans l’articulation de ce plan », explique-t-il. Ensuite, la société fait aussi partie intégrante des solutions et de l’écosystème fournis par l’État luxembourgeois dans le cadre du soutien dans des zones sinistrées et touchées par des catastrophes. « Je cite l’exemple d’emergency.lu, qui consiste en une antenne mobile facile à déployer qui, dans des conditions extrêmes, peut créer des moyens de connectivité pour transmettre des données médicales et techniques. Nous venons de la déployer au Népal, après l’avoir utilisée aux Philippines. » Enfin, SES travaille étroitement avec le SnT de l’Université du Luxembourg sur des algorithmes destinés à faire converger tous les différents systèmes opératoires des satellites – dont certains ont une trentaine d’années d’existence – vers un système unique sans qu’il soit nécessaire de réécrire tous les codes. « C’est un projet fascinant et il faut bien se dire qu’une fois stabilisé, ce genre d’outil peut servir à beaucoup d’autres applications. » J.-M. G.

En tant que transporteur de données, comment vous positionnez-vous sur l’évolution des dispositions en matière de sécurisation et de protection des données personnelles ? « Nous distinguons deux types de données : celles liées a la nature des missions satellitaires, qui sont alors stockées sur nos propres serveurs, et celles qui sont les signaux de nos clients et qui sont diffusées par nous, mais stockées sur leurs propres serveurs. Nous faisons évidemment en sorte que les deux types de données soient parfaitement sécurisés. En ce qui concerne la gestion de notre flotte, nous avons mis en place un certain nombre de mesures technologiques avec des équipes dédiées. Lorsque j’étais membre du comité d’audit et de risque, je peux vous assurer que ces questions occupaient une grosse partie de notre activité, et elles continuent de l’être à présent. Mais même nous, avec tous nos savoirs et nos moyens, nous ne pouvons pas nous défendre tout seuls face aux milliers d’attaques dont nous sommes l’objet chaque jour. Nous avons donc besoin de dispositifs étatiques très solides, sachant que nos infrastructures sont considérées comme étant essentielles, au même titre que peuvent l’être celles de l’électricité ou de l’eau, ou des institutions telles que La Poste, la BCL ou l’aéroport. Par ailleurs, nous contrôlons quotidiennement pas moins de 54 satellites en orbite. Plus 12 de la société O3b. Nous avons trois sites de contrôle de ces satellites, en Europe et aux ÉtatsUnis. Si l’un de ces sites tombe, il y en a toujours deux autres pour prendre le relais. La problématique des talents peut-elle constituer un frein au développement d’une société de pointe comme SES ? « J’ai toujours tendance à considérer le verre à moitié plein. Le Luxembourg a le grand avantage d’avoir une université très jeune, ce qui permet, idéalement, de modéliser plus facilement les besoins en formation. C’est plus difficile avec les grandes universités et les grandes écoles qui ont une histoire plus ancienne et qui font preuve d’une plus grande rigidité. Sur un plan plus général, il y aura un grand besoin, en Europe, d’un programme de formation universitaire de référence dans l’ingénierie aérospatiale. C’est un domaine très pointu, mais la plupart de ces programmes se trouvent aux États-Unis. Il y aurait clairement des opportunités, d’autant plus qu’avec le développement de nouvelles positions orbitales, les enjeux technologiques et donc les opportunités de carrière sont multiples. » ◄ En résumé Un an après son entrée en fonction à la tête de SES, Karim Sabbagh a déjà bien pris le rythme, dans la continuité des 20 ans de développement pilotés par son prédécesseur Romain Bausch. Impliqué à tous les niveaux de l’écosystème numérique, l’opérateur de Betzdorf vise plus que jamais une large mondialisation de ses services basés sur les quatre piliers que sont la vidéo, le data, la mobilité et les services gouvernementaux.



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1. « Approuvez-vous l’idée que les Luxembourgeois âgés entre 16 et 18 ans aient le droit de s’inscrire de manière facultative sur les listes électorales en vue de participer comme électeurs aux élections pour la Chambre des députés, aux élections européennes et communales ainsi qu’aux référendums ? » 2. « Approuvez-vous l’idée que les résidents non luxembourgeois aient le droit de s’inscrire de manière facultative sur les listes électorales en vue de participer comme électeurs aux élections pour la Chambre des députés, à la double condition particulière d’avoir résidé pendant au moins 10 ans au Luxembourg et d’avoir préalablement participé aux élections communales ou européennes au Luxembourg ? » 3. « Approuvez-vous l’idée de limiter à 10 ans la durée maximale pendant laquelle, de façon continue, une personne peut être membre du gouvernement ? »

Réfé 7 juin rendu m 2015

TEXTES : Alain Ducat et Jean-Michel Gaudron

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C

Un référendum, trois questions, des enjeux

Des  citoyens  dans  l’Histoire  ► Trois questions seront posées aux électeurs luxembourgeois le 7 juin. Les réponses permettront peut-être au Grand-Duché d’être à la pointe de la citoyenneté de résidence. ► L’élargissement du corps électoral aux résidents non luxembourgeois cristallise les débats. ► Paperjam a voulu s’engager pour le « oui », parce que tout, dans le contexte socioéconomique, sociologique et politique, laisse à penser que c’est la voie à suivre. Explications. TEXTE : Alain Ducat et Jean-Michel Gaudron

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Rajeunir les cadres

ombien d’habitants comptera le GrandDuché de Luxembourg en 2050 ? 600.000 ? 800.000 ? Ce qui compte, ou qui risque de peser dans la balance, c’est la part des citoyens qui, à ce moment de la vie du pays, exprimeront leur droit de vote. Alors, on pourra mesurer, avec le recul critique, l’importance d’une journée, celle du 7 juin 2015. Le référendum pose en effet question au pays et, mieux, à l’Histoire. On verra alors qui l’aura écrite. Les trois questions (voir page 21) qui demeurent – pour rappel, la quatrième initialement prévue, portant sur le lien économique entre l’État et les cultes, a été évacuée avec l’accord intervenu entre le gouvernement et les représentants philosophiques, en janvier dernier – sont fondamentales. Pour l’avenir et, déjà, pour le présent. Car elles posent aussi l’interrogation de la citoyenneté, de la représentation des habitants du pays dans le processus démocratique. Cela a fait couler beaucoup d’encre et de salive, depuis quelques semaines et sans

L’âge de la majorité électorale pourrait, le cas échéant, être différent de l’âge de la majorité civile ou légale. On verra (lire aussi page 26 et page 30) que ce n’est pas la question du référendum qui soulève le plus d’enthousiasme. Le sondage TNS-Ilres (Politmonitor Luxemburger Wort-RTL) réalisé en mars dernier éclaira le sentiment assez négatif de la population. Les résidents luxembourgeois sont contre cet abaissement, à 67 %. Ajouter les résidents étrangers ne modifierait pas la donne de manière spectaculaire, 55 % se disant en défaveur de la mesure. Sur l’ensemble de la population (Luxembourgeois et étrangers), on ne trouve même, parmi les jeunes (de 18 à 24 ans), que 44 % de « oui » clairement exprimés. Est-ce une cause perdue ? Parmi ceux qui défendent une maturité politique à 16 ans, un argument frappe juste et fort : l’idée est que ce n’est pas l’âge qui compte, mais le degré d’implication. Et que, donc, si l’on veut moderniser la société, il convient de le faire en impliquant plus en amont les citoyens qui auront à façonner le futur de leur pays. De manière un peu provocatrice, mais difficile à contredire, un juriste observe : « La majorité sexuelle est à 16 ans. L’âge légal pour leur vendre de l’alcool est 16 ans. Mais ils ne seraient pas mûrs pour décider de qui les représente et leur prépare un avenir ? » Aujourd’hui, l’âge moyen des votants est de 52 ans, alors que l’âge moyen de la popula-

Évolution de la population du Grand-Duché Croissance générale 14,3 %

269.262 115.372 Recensement 1991

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doute jusqu’à la veille du scrutin référendaire. On a beaucoup parlé et écrit, souvent en sens très divers, aux limites de la désinformation parfois. « Un référendum, c’est une excitation nationale où on met tout dans le pot. On pose une question, les gens s’en posent d’autres et viennent voter en fonction de raisons qui n’ont plus rien à voir avec la question. » La phrase de l’ancien ministre français Michel Rocard peut prêter à sourire, mais, dans le contexte luxembourgeois qu’il faut rappeler, elle prend sans doute toute sa pertinence. Les trois questions sont claires. Chacun a immédiatement perçu leurs portées et, plus encore, celles de leurs réponses. Paperjam, depuis le début, a décidé de soutenir le « oui ». Trois fois plutôt qu’une. Avec des nuances parfois, des explications sûrement. Mais avec une volonté d’avancer et de faire avancer. Voici pourquoi.

+3,0  % +40,7 %

277.254 162.285 Recensement 2001

Luxembourgeois Étrangers Croissance générale 16,6 %

+5,3 % +35,9  %

291.831 220.522 Recensement 2011

Sources : Statec et Cefis

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20 % Taux d’inscription Poids de l’électorat

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Source : Cefis

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Évolution du taux d’inscription et du poids de l’électorat étranger aux élections européennes de 1994 à 2014

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Identité cosmopolite

Poids de l’électorat

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Source : Cefis

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Il est évident que le gros morceau réside dans la question centrale résumée – peut-être de façon trop schématique, par rapport aux crispations qu’elle peut engendrer – par « le droit de vote des étrangers ». En version intégrale, cela donne : « Approuvez-vous l’idée que les résidents non luxembourgeois aient le droit de s’inscrire de manière facultative sur les listes électorales en vue de participer comme électeurs aux élections pour la Chambre des députés, à la double condition particulière d’avoir résidé pendant au moins 10 ans au Luxembourg et d’avoir préalablement participé aux élections communales ou européennes au Luxembourg ? » On est là face à de tout autres enjeux, dans un pays aussi unique que peut l’être le GrandDuché en 2015, avec une situation démographique complètement atypique : 46 % de nonLuxembourgeois dans la population résidente (304.279 Luxembourgeois pour 258.679 étrangers au 1er janvier 2015). « Si ce chiffre peut faire peur à certains, comme on peut le constater par le repli identitaire observé ces derniers temps dans différents blogs, publications ou prises de position publiques de certains mouvements ou personnalités luxembourgeoises, il est aussi et surtout la preuve de la richesse économique et de l’attractivité sociale du Luxembourg. » C’est ce qu’écrivaient déjà Marc Gerges et Philippe Poirier, dans une visionnaire contribution parue dans Moien – Luxembourg aujourd’hui (édité par Maison Moderne), en octobre 2011. Dans l’article « Identité cosmopolite », les deux auteurs relevaient que le « développement démographique du Grand-Duché, pays d’immigration par excellence, risque de faire des Luxembourgeois une minorité dans leur propre pays ». Il était donc déjà question d’un changement de paradigme consistant à faire accepter, par les autochtones comme par les étrangers, un « modèle sociétal participatif et ouvert ». Car, écrivaientils, « il est difficilement imaginable qu’à terme, une minorité (c’est-à-dire les électeurs luxembourgeois) parvienne à gérer la chose politique pour le compte d’une majorité sociale qui contribue activement à la richesse du pays, mais n’a pas le droit de participer à la prise de décision ». Qui vote au Luxembourg, aujourd’hui ? 54 % de la population résidente de 18 ans ou plus. Un tiers a 60 ans et plus. Seulement la moitié du nombre de votants est active professionnellement. Et 44 % des votants travaillent dans le secteur public ou paraétatique (administrations, éducation, services sociaux, santé). « Ainsi, l’électorat luxembourgeois ne représente pas le Luxembourg dans son ensemble », souligne, comme une évidence, la plateforme Migrations & Intégration (Minte.lu), une initiative de la société civile luxembourgeoise qui plaide « pour un débat public juste et équitable ». Dans un pays où l’emploi salarié intérieur

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Évolution du taux d’inscription et du poids de l’électorat étranger aux élections communales de 1999 à 2011

Une autre approche, plus « entrepreneuriale », pourrait trouver injuste la formule consistant à « exclure » quelqu’un qui a passé les années précédentes à gagner sa légitimité à « monter en grade ». Car, c’est au moment où il commence à marquer les choses de son empreinte qu’il devrait s’effacer. Et ce serait aller à l’encontre de l’encouragement des jeunes vocations que de fixer d’emblée une limite concrète à leur carrière.

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tion est de 39 ans. L’idée de rajeunir potentiellement le corps électoral s’inscrit dans une démarche globale de modernisation institutionnelle, afin de l’adapter à la réalité quotidienne du pays et de ses habitants. Combien de nouveaux électeurs pourraiton intégrer, le cas échéant ? Selon les données du Statec (au 1er janvier 2015), 7.335 Luxembourgeois ont 16 ou 17 ans, auxquels s’ajoutent 5.651 habitants ne disposant pas de la nationalité luxembourgeoise. Tous ne seraient pas dans les conditions pour aller voter, sachant aussi qu'il faut s'inscrire et qu'il n'y aura pas obligation. La question qui porte sur la limitation des mandats ministériels à 10 ans consécutifs est mieux reçue dans l’opinion. Bien qu’elle ait un petit côté « populaire », cette idée est dans l’air du temps et entre, aussi, dans l’objectif d’un « rajeunissement des cadres ». Dans le même sondage TNS-Ilres, on voit que 59 % de la population se dit favorable à cette limitation. Les résidents luxembourgeois (à 54 %) font juste un peu baisser la moyenne. Seuls les plus de 65 ans affichent un taux de « oui » sous la moyenne (48 %). L’idée de base, rafraîchir la classe politique, voire empêcher les règnes « à la Juncker », peut être saluée. Elle gagnerait sans doute à être affinée : on parle juste de mandat ministériel, et on n’évoque pas la question d’une période « de carence » entre deux mandats. Elle pourrait aussi être durcie, dans le sens d’un « décumul » des mandats (local et national par exemple).

s’avère beaucoup plus élevé que le nombre de résidents luxembourgeois, la logique est aussi socio-économique. « Ces données résument non seulement la réalité du Grand-Duché, mais aussi et surtout la désuétude du système électoral luxembourgeois », écrivait dans l’édito de Paperjam d’avril 2013 – il y a un peu plus de deux ans déjà ! – le fondateur et CEO de Maison Moderne, Mike Koedinger. Ce mois-là, le magazine barrait sa une d’un « Mir sinn dofir – Pour l’intégration des étrangers à la démocratie luxembourgeoise ». « Nous voulons promouvoir l’idée du pays qui progresse grâce à sa population. Une population active, économiquement et politiquement », concluait l'éditorial. Tout cela reste valable. C’est devenu d’autant plus pressant. Et permis par un processus mis en route, une révision de Constitution d’une part (lire aussi page 26), un appel aux citoyens de l’autre. « Le référendum sur le droit de vote des non-Luxembourgeois représente une chance réelle de redéfinir la société politique luxembourgeoise en ancrant sa légitimité non pas sur des critères de sang et de privilège, mais sur des droits politiques individuels », indique Catia Gonçalves, jeune figure montante du LSAP, avant tout politologue ayant consacré son mémoire de master au droit de vote pour tous et à sa légitimité démocratique, dans le cas du Luxembourg.

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« Quel que soit   le résultat   du référendum,  un score étriqué   laissera des séquelles   dans la société. » Serge Kollwelter (Ancien président de l’Asti) 024 ―

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(Une des conditions d’accès au droit de vote)

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très généreuses venaient à être mises en œuvre, le fossé entre le nombre de résidents et celui des votants ne cesserait de se creuser. L’accès au droit de vote n’est pas non plus une option qui exclut l’acquisition de la nationalité. Même débat avec la langue luxembourgeoise, ciment possible entre les communautés culturelles du pays, et partie intégrante des trois langues officielles du Grand-Duché. Déjà, 87 % des non-Luxembourgeois résidents sont des citoyens de l’UE. En tant que tels, ils se sentent « chez eux » au Luxembourg. Le sentiment d’appartenance est un moteur puissant, sans doute suffisant, pour défendre un pays et avoir envie de s’intégrer davantage, de participer à sa vie, jusque dans les décisions qui engagent le quotidien de chacun. Le processus qui est en marche n’est d’ailleurs pas une fin en soi. Et les évolutions de la société sont à aider à tous les étages. ◄

Source : Cefis (estimation sur base du recensement de 2011)

Comme le relève le Centre d’étude et de formation interculturelles et sociales (Cefis) dans une étude très fouillée (mars 2015 – accessible via le site cefis.lu) sur le droit de vote des ressortissants de nationalité étrangère au Luxembourg, il s’agit de (re)définir les critères de la citoyenneté politique. Si la participation politique semble aller de soi – « Toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l’intermédiaire de représentants librement choisis » (article 21 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme) –, le principe peut se heurter à de véhémentes réserves. « Les débats publics, quand ils existent, s’appuient sur des arguments simplistes et commodes qui prennent le dessus, qui tournent à une opposition réductrice entre ‘Nous’ les autochtones et ‘Eux’ les étrangers, avec tous les a priori qui accompagnent ce genre de construction mentale manichéenne », écrivent les auteurs du Cefis. Si le critère fondamental de la citoyenneté politique est la nationalité, le Traité de Maastricht a de facto donné aux citoyens de l’Union le droit de vote actif et passif aux élections communales et aux élections européennes dans un État membre dont ils n’ont pas la nationalité. « D’une citoyenneté nationale, on est passé à une citoyenneté européenne, semi-ouverte, note le Cefis. Le Luxembourg a été plus loin en ouvrant le droit de votre actif et passif aux élections communales pour les ressortissants non communautaires. Si ce n’est certes pas le premier, ni le seul pays européen

Durée de résidence (en années) des étrangers âgés de 18 ans et plus au Luxembourg

ne mo an ins né e de 1à 2a ns de 3à 4a ns de 5à 9a ns de 10 à1 9a ns 20 an se tp lu s

Maximum 35.000 électeurs en plus

qui est allé dans ce sens, c’est le seul pays à abolir la condition de nationalité pour accéder à un poste de bourgmestre ou d’échevin. Une nouvelle étape est franchie, en passant de la citoyenneté européenne à la citoyenneté de résidence, en ce qui concerne les élections locales au moins. » Étendre cette approche au scrutin législatif, pour l’électorat actif en tout cas et dans les conditions précisées de résidence et de participation préalable à un scrutin local, constitue à la fois une suite logique et un enjeu de taille. La bourde – répétée en direct sur la radio 100,7 – du vice-Premier ministre Schneider, oubliant le caractère simultané des deux conditions de l’élargissement du droit de vote (durée de résidence ET participation préalable à un scrutin), n’a pas vraiment servi la cause. Mais est-ce que ce « pas en plus » changerait tout, causant ce que certains redoutent comme un « glissement politique » important ? Selon les données disponibles, on estime que, si tous ceux qui entraient dans les nouvelles conditions pour voter faisaient usage de ce droit, le corps électoral augmenterait de quelque 35.000 personnes, au maximum. Cela représenterait une augmentation hypothétique de 15 % par rapport au nombre d’électeurs inscrits au scrutin législatif d'octobre 2013. Cette hausse est à mettre en balance avec les 21.650 ressortissants de l’UE qui s’étaient inscrits sur les listes électorales au Luxembourg pour les élections européennes de mai 2014, soit un taux d’inscription de 12,2 %. « Néanmoins, cette ouverture est importante. Elle est le début d’un processus démocratique qui renforcera le modèle sociétal luxembourgeois », plaide justement la plateforme Minte.lu, et renforcera le caractère d’un « Luxembourg unique à travers le monde ». La question peut aussi être observée sous un angle philosophico-politique. TNS-Ilres identifie ainsi que les « oui » se retrouvent surtout dans les intentions de vote à gauche et libéral. Quid du plus puissant parti depuis la Seconde Guerre mondiale ? 29 % seulement des électeurs déclarés du CSV diraient « oui » au vote des non-Luxembourgeois. Mais les jeunes du CSV ne sont pas nécessairement sur la même longueur d’ondes que leurs aînés. Les débats, généralement, s’appuient notamment non pas sur une opposition de principe à l’extension de l’électorat, mais sur un passage obligé par la nationalité luxembourgeoise, laquelle serait plus facile à acquérir pour les résidents allochtones. On peut encore observer que les résultats des scrutins auxquels les non-Luxembourgeois ont participé (les communales en octobre 2011, les européennes en 2014) n’ont pas permis de montrer que les étrangers votent à gauche ou libéral. On peut même déceler une vigueur du vote de tradition chrétienne. Cela correspond à l’immigration « issue de pays catholiques » voulue jadis par les autorités du Luxembourg. Et cela se rapproche de la prise de position contemporaine, et courageuse, de l’archevêque Jean-Claude Hollerich, estimant qu’« un pays ne doit pas exclure de la vie politique ceux qui contribuent quotidiennement à sa vie économique, sociale, culturelle et religieuse ». Et si c’était « non » ? On peut penser que, même si des conditions d’accès à la nationalité

d’u

« D’aucuns imagineront qu’en 2019, année du centenaire du droit de vote des femmes et de l’abolition du vote censitaire (basé sur un seuil d’impôt appelé ‘cens’, ndlr), le droit de vote pour tous ne sera plus une chimère, mais l’avènement d’une nouvelle définition de la démocratie et des droits de l’Homme. » De fait, par ses spécificités et sa volonté d’avancer dans le sens d’une citoyenneté de résidence, le Luxembourg a une occasion manifeste d’entrer dans l’Histoire, ni plus ni moins.


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Approche juridique

Les fruits de la Nation ► Le débat sur la « citoyenneté de résidence » est à éclairer par la science juridique. ► Plongée dans la Constitution et ses possibles futurs contours, ainsi que dans l’esprit des lois. ► Un périple entre Nation, État, citoyens luxembourgeois et habitants du territoire. TEXTE : Alain Ducat ILLUSTRATION : Stephanie Post (Maison Moderne)

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ans doute les débats que devront trancher les électeurs de demain seront-ils éclairés par les questions posées, le 7 juin, aux citoyens d’aujourd’hui. Les questions juridiques sont, à cet égard, fondamentales. Il faut commencer par noter que, indépendamment du référendum qui viendra ajouter une pièce au puzzle, la révision de la Constitution est un exercice en cours, depuis 2009. La discussion a lieu au sein de la CIRC (Commission des institutions et de la révision constitutionnelle), sur le projet de loi 6030, auquel le site internet de la Chambre donne écho après chaque réunion. Le débat est d’autant plus public qu’il est assorti d’un appel aux citoyens (au sens le plus large du terme dans ce cas-ci), qui peuvent commenter le texte constitutionnel en ligne. « C’est une procédure inédite », note Luc Heuschling, docteur en droit et professeur de droit constitutionnel et administratif à l’Université du Luxembourg, qui se passionne aussi « en tant que citoyen luxembourgeois et en tant que juriste » pour le référendum… et pour les questions que cet exercice pose(ra) dans la marge. « En 1986, le gouvernement Santer avait aussi invité les Luxembourgeois à réfléchir sur la Constitution », note l’éminent observateur du droit et de la politique. Cela n’avait pas déchaîné les passions… Luc Heuschling constate que, en 2015, « ce premier référendum sur la refonte constitutionnelle » a agité le

microcosme politique d’emblée, dans un débat « sur la nature et les modalités juridiques » de ce référendum. Le recours est-il conforme à la Constitution ? Luc Heuschling pointe l’article 51/7 présent dans le texte fondamental depuis 1919 : « Les électeurs pourront être appelés à se prononcer par la voie du référendum dans les cas et sous les conditions à déterminer par la loi. » « C’est donc le Parlement qui, à travers le vote d’une loi, à la majorité simple, peut décider à tout moment de convoquer le peuple. » Au demeurant, « le référendum est un instrument en soi politique, qui est mis à la disposition d’acteurs politiques, la majorité parlementaire, qui l’utilisera selon des logiques et calculs politiques », analyse le Pr Heuschling. Si certains prétendent que la pratique ne fait pas partie de la culture politique au Luxembourg, il y a eu des précédents, dans des contextes certes différents, en 1919, 1937 et 2005. Le premier portait sur la monarchie ou la république. Celui de 1937 abordait le pluralisme des partis. Et celui de 2005 consacrait l’intégration européenne, après le traité de Maastricht. Autre débat juridique intéressant : quelle sera la valeur, contraignante ou pas, des réponses au référendum ? « On parlera de la volonté du peuple, évoque le Pr Heuschling. Respecter cette volonté, est-ce une obligation en droit ou juste une obligation morale, découlant de l’idéal philosophique de démocratie ? » Les textes apportent leur éclairage. « La Constitution distingue, au niveau du vote des députés – porteurs de la volonté du peuple par représentation –, d’une part, une matière constitutionnelle qui exige la majorité qualifiée des deux tiers et, d’autre part, la matière législative où la majorité simple suffit. Cette distinction n’existe pas à l’égard de la volonté du peuple exprimée directement par voie de référendum. »

L’âge et la durée, cela se discute Luc Heuschling observe encore que « la loi du 4 février 2005 relative au référendum au niveau national n’aborde nulle part la question de la nature ou force juridique dudit référendum ». Il en conclut déjà que, dans tous les cas, la Constitution future devrait donner un statut à la volonté populaire en cas de consultation, mais aussi, notamment, clarifier les types de sujets pouvant donner matière à référendum et définir si seuls les élus peuvent déclencher un processus de consultation ou si les citoyens peuvent pousser plus loin le droit de pétition. Concernant l’abaissement de l’âge légal pour voter, le Pr Heuschling ne voit pas de souci juridique particulier. « Permettre à un jeune d’être électeur dès ses 16 ans, c’est, sur le plan


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du droit, une simple émancipation qui existe déjà dans d’autres domaines », indique-t-il. Il ne voit pas davantage de difficulté technique. « Un seul article serait à modifier légèrement dans la Constitution. » Sortant des textes, mais restant les deux pieds dans le tissu de son pays, il livre son opinion. « Il y a au Luxembourg l’image d’une société âgée, traditionnelle, conservatrice. Un ‘non’ à cette proposition serait sociologiquement sévère et poserait la question de savoir si l’on veut aider les jeunes qui souhaitent s’impliquer dans le processus démocratique de leur pays. Un ‘non ’ viendrait alors des tripes », estime le citoyen Heuschling. La possible limitation à 10 ans consécutifs des mandats ministériels lui pose davantage question. « Juridiquement parlant, on est face à une limitation du droit à devenir ministre, qui fait partie des droits politiques. » À la base, on sait que l’actuel vice-Premier ministre Étienne Schneider a pesé dans cette proposition. On sait aussi que, la question passant a priori bien dans l’opinion publique, il n’y a pas de réelle friction ni de gros débat. Si la longévité du CSV semble être visée en filigrane ( Juncker a été ministre pendant 32 ans, Fernand Boden 30, Jacques Santer 18 et Pierre Werner 26 ans dont 21 consécutifs), il faut aussi observer que le LSAP était aux côtés du CSV dans l’équipe Santer-Poos, lancée en 1984, maintenue en 1989 et prolongée en 1994, ce qui lui a fait 15 ans aux rênes du pays... Autre exemple, plus près de nous : l’actuel ministre des Affaires étrangères, Jean Asselborn, avait, avant de prolonger dans le gouvernement Bettel, déjà une longue carrière ministérielle, et même de vice-Premier, aux côtés de Juncker (entre 2004 et 2013). Cela étant posé, dans une brève incursion historique (mais pas exhaustive), Luc Heuschling note que la limitation de mandats, telle qu’elle est proposée, laisse plusieurs vides et interprétations qu’il faudrait combler si le « oui » venait à valider ce potentiel changement. « Il est question de mandats ministériels. Rien que le fait de devenir ministre ferait retourner le sablier. La question n’évoque pas non plus la durée de break pour arrêter le décompte des 10 années consécutives. Et il n’y a pas de garanties politiques. » Les modèles de référence ne courent pas les rues et donc, là encore, le Luxembourg devrait un peu défricher le terrain, faire œuvre pionnière. Au passage, il n’est pas exclu que des précisions juridiques soient apportées, voire abordent d’autres volets allant dans le même esprit, comme une limite d’âge pour exercer un mandat ministériel (ou pour être élu dans

un sens encore plus large) ou une incompatibilité entre mandats, au niveau local et au niveau national par exemple.

Droit de vote et droits politiques Doctorante en droit européen et droits de l’Homme à la Sorbonne, membre de la Ligue luxembourgeoise des droits de l’Homme, Véronique Bruck, dans une contribution au magazine Forum en mars dernier, mettait en avant le rôle de la Constitution luxembourgeoise et son évolution à la lumière du contexte politique, socioéconomique et, indubitablement, en fonction des résultats du référendum à trois inconnues. « Il faudrait élaborer, à travers la Constitution, un projet d’avenir pour la communauté politique », indiquait-elle, déplorant plus loin que « le projet de Constitution laisse l’impression (…) d’un texte abstrait qui ne donne aucune indication claire aux citoyens sur les droits dont ils bénéficient concrètement ». Luc Heuschling, qui suit au plus près les différentes évolutions du projet de révision constitutionnelle, constate aussi une ambiguïté, qui touche au cœur de l’élargissement possible du droit de vote.

« Une majorité simple pourrait suffire pour conférer l’exercice de droits politiques à des étrangers non-UE. » Luc Heuschling

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La Nation a un état, mais pas de définition arrêtée… Ainsi, dans la version de la Constitution à jour au 1er août 2013 (en ligne sur referendum.lu notamment), le terme « Nation » n’apparaît pas dans les titres de chapitres, le 1er s’intitulant « De l’État, de son territoire et du Grand-Duc ». Cependant, l’article 32, au chapitre III, souligne que « la puissance souveraine réside dans la Nation », laquelle n’est pas définie plus avant. En outre, par symétrie et étymologie, on assimile aisément Nation avec nationalité. Or, « le rapport entre la citoyenneté et la nationalité est le fruit d’une concomitance historique née avec l’État-nation qui est de plus en plus remise en question par le droit international et l’intégration européenne, observe la politologue Cátia Gonçalves. Les droits et libertés personnels ancrés dans les traités sur les droits fondamentaux ont lentement fait évoluer la notion de citoyenneté du statut de privilège vers celui de droit fondamental individuel. » A. D. ◄

Cette ambiguïté, d’une manière ou d’une autre, devrait être utilisée ou supprimée. Et c’est un enjeu « technique » subtil. Si l’on prend la version du projet de nouvelle Constitution après le PV de la CIRC du 26 juin 2013, l’article 10 ne manque pas d’intérêt. On est dans le chapitre Ier (intitulé « De l’État, de son territoire et de ses habitants »), section 3 « De la nationalité et des droits politiques ». L’article 10, donc, énonce : « Les Luxembourgeois jouissent de la plénitude des droits politiques qu’ils exercent dans les conditions déterminées par la Constitution et les lois. » La suite dit : « La loi organise l’exercice des droits politiques des citoyens de l’Union européenne. » Puis « La loi peut conférer l’exercice de droits politiques à des personnes qui n’ont pas la citoyenneté de l’Union européenne ». « Si l’on dit que ‘la loi peut’, cela veut dire qu’une majorité simple peut suffire pour ‘conférer l’exercice de droits politiques’ à des étrangers non-UE, pointe Luc Heuschling. Et donc, par exemple, le droit de vote. » Au passage, d’aucuns observent également que, d’un côté, il y a un droit de vote, national, qui ouvre sur une obligation d’aller exercer ce droit. Et un potentiel vote « étranger », qui relèverait de la simple liberté, puisque le droit ne s’exercerait que de manière conditionnelle (résider depuis 10 ans, s’inscrire comme électeur et avoir déjà voté à un scrutin local ou européen) et, surtout, facultative. En tout cas, la notion de « citoyenneté de résidence », introduite dans le

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contexte actuel de la révision de Constitution et du référendum, est cruciale. Luc Heuschling appuie cette vision. « Le Luxembourg est entré dans le débat. Qui risque d’être agité parce que le sujet est sensible, voire épidermique. Mais il faut souligner que, dans les pays proches, un tel débat n’existe même pas. » Le Luxembourg peut donc servir de laboratoire mondial. « Le nombre de pays à avoir accordé aux étrangers l’électorat actif, voire passif, au niveau local, est déjà assez élevé », confirme le Pr Heuschling, qui cite notamment le Chili, l’Uruguay, le Malawi, la Nouvelle-Zélande ou quelques cas particuliers (le Brésil en faveur des Portugais ou l’Irlande en faveur des Britanniques, par exemple). « Pour ce qui est du pouvoir exécutif et législatif, il n’y a que quelques pays qui ont sauté le pas. Et les conditions ne sont pas comparables. Certains, comme la Nouvelle-Zélande, accordent le droit de vote à tous les résidents, mais les conditions d’entrée des étrangers dans le pays sont très restrictives. »

Population étrangère (45,9 % de la population totale) selon l’origine géographique au 1er janvier 2015

6%

2% 3 % 0,2 % 3%

Logique fédérale européenne La logique fédérale pourrait aussi éclairer les pas du Luxembourg. « La question européenne n’est guère évoquée, commente Luc Heuschling. Elle est pourtant cruciale, puisque 86 % des étrangers au Luxembourg sont ressortissants d’autres États membres de l’UE. Quand on étudie des systèmes fédéraux, comme en Allemagne ou en Suisse, des principes moteurs ont été appliqués, comme la liberté de circulation ou l’interdiction de discrimination. Dans un ensemble fédéral, le principe de la citoyenneté de résidence est souvent acquis. Si l’UE continue sur la voie du fédéralisme, il est probable qu’un jour les Portugais, Français, Belges, Allemands, etc., résidant au Luxembourg, aient le droit de vote pour la Chambre des députés dès leur installation, sans aucun délai. Une des questions qui se posent aujourd’hui au peuple luxembourgeois et à ses élus est de savoir si l’on veut devancer cette évolution, voire l’imposer dès maintenant. » Certains parlent des difficultés à gérer une double nationalité, d’autres évoquent une logique fiscale qui ferait du contribuable un électeur potentiel. Sans aller aussi loin, mais en rappelant des principes élémentaires, la politologue Cátia Gonçalves estime, pour sa part, dans son mémoire de master, que « l’articulation entre la nationalité et le statut fondamental de la citoyenneté européenne n’est donc pas près d’être remise en question. Mais l’évolution en termes de libre circulation, de nondiscrimination et de jurisprudence en matière électorale montre que d’autres critères de lien ou de loyauté que celui de la nationalité peuvent rendre compte d’un lien entre l’État et l’individu.

86 %

Sources : Statec et Cefis

Nation, nationalité, citoyenneté

Europe non-UE Afrique Asie Amérique Océanie et autres Europe UE27

L’un des critères les plus convaincants à ce jour étant celui de la résidence qui a d’ores et déjà été confirmé à plusieurs reprises par certaines cours de justice internationales. » Et elle arrive à une conclusion : « On peut penser qu’en tant que droits individuels, les droits politiques doivent respecter le principe selon lequel doivent avoir le droit de vote ceux qui sont directement touchés par les décisions des responsables politiques qui les gouvernent. » ◄


formerly known as


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Opinions

Les décideurs, aussi, disent « oui » ! ► Consultés par Paperjam, 55 chefs d’entreprise et décideurs de premier plan nous ont fait part de leur vote et exprimé leurs avis à titre personnel. ► Aux trois questions qui seront posées le 7 juin, le « oui » l’emporte. ► Si l’élargissement du droit de vote aux résidents non luxembourgeois est largement plébiscité, les deux autres thématiques sont loin de susciter un même enthousiasme. TEXTE : Jean-Michel Gaudron ILLUSTRATIONS : Stephanie Post (Maison Moderne)

L

a démarche n’a rien eu de scientifique. Juste une façon de prendre le pouls de la société civile. Nous avons sollicité quelque 340 chefs d’entreprise et décideurs de premier plan sélectionnés, notamment, parmi ceux classés dans l’édition 2014 du Top 100 Paperjam des décideurs les plus influents au Luxembourg et parmi les plus gros employeurs du pays. Nous leur avons soumis les trois questions du référendum, telles qu’elles seront posées le 7 juin prochain aux électeurs luxembourgeois, et demandé de nous indiquer leur vote. Ils ont été 55 à accepter de jouer le jeu, représentant la quasi-totalité des secteurs d’activité clés du pays, de la place financière à l’industrie en passant par les services et le commerce. Certains ont même souhaité enrichir la démarche de leurs commentaires, exprimés à chaque fois à titre personnel. Les répondants ont été, en quasi-totalité, des Luxembourgeois, de sorte

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qu’il est malheureusement impossible de disséquer plus en avant les résultats de ce « sondage », lequel n’a évidemment aucune autre ambition que d’apporter sa modeste pierre à l’édifice d’un débat essentiel dans le contexte socio-économique du pays. La toute première observation, indépendamment des résultats propres, c’est que l’initiative même de ce référendum fait débat, sa pertinence étant loin de faire l’unanimité. « Les questions posées ne reflètent pas une volonté politique, mais tout simplement des ‘coups de blues’ de certains politiciens, comme celle du droit de vote à 16 ans, chère à Eugène Berger, et la limitation à 10 ans des mandats de ministres, chère à Étienne Schneider », note Jo Kox, directeur de Casino Luxembourg – Forum d’art contemporain et président du Fonds culturel national (Focuna). D’autres estiment que la question du droit de vote à 16 ans et celle de la limitation des mandats des ministres à 10 ans ne méritaient pas une importance telle qu’elles fassent l’objet d’une consultation populaire nationale. « Questions sans intérêt », tranche Nicolas Henckes, secrétaire général de l’Union des entreprises luxembourgeoises (UEL). « Questions sans objet, estime, presque en écho, Romain Schmit, directeur de la Fédération des artisans. Je trouve franchement embarrassant que la politique n’ait pas trouvé autre chose à mettre sous la dent du bas peuple que des pseudo-problèmes. » Jean-Jacques Rommes, directeur de l’UEL, regrette, pour sa part, ces deux questions « pour la galerie ». Il aurait préféré des questions « bien plus pressantes, par exemple celle de l’adéquation du cumul entre les mandats de bourgmestre et de député. »

Ouverture Le constat suivant, à la lecture des résultats de notre consultation, c’est que des trois questions posées, c’est celle concernant le droit de vote des résidents non luxembourgeois (sous certaines conditions) qui a suscité le plus de prises de position. Ce n’est pas vraiment une surprise, tant le sujet est à l’origine de passions et d’engagements de toutes parts depuis plusieurs semaines déjà. « Au-delà de ses ramifications socio-économiques, culturelles et politiques, la question est éminemment sentimentale, émotionnelle et personnelle », indique Marc Wagener, directeur des affaires économiques à la


Chambre de commerce et directeur chargé des affaires courantes du think tank Fondation Idea asbl. À titre personnel, il « considère l’ouverture du droit de vote comme une évidence citoyenne ». Marc Lauer, CEO du groupe Foyer, y verrait pour sa part « un signe clair pour un Luxembourg plus démocratique et accueillant pour des gens qui contribuent quotidiennement à notre bien-être ». S’exprimant également à titre personnel, Carlo Thelen, directeur général de la Chambre de commerce, estime qu’en accordant ce droit de vote aux résidents non luxembourgeois, « le pays ne comblerait pas seulement un déficit démocratique évident, mais gagnerait aussi un atout compétitif que peu de pays seront prêts à lui ravir. Le Luxembourg, sa crédibilité, son image de marque et son capital sympathie en sortiraient grandis. Refuser un droit citoyen essentiel à ces résidents au seul motif de leur nationalité me semble ne plus être tenable dans une société qui se dit moderne et ouverte ». Cette question du droit de vote à accorder – ou pas – aux résidents étrangers est aussi celle pour laquelle le résultat est le plus tranché, avec près de 91 % des dirigeants d’entreprises et décideurs ayant répondu à notre sollicitation qui se prononcent ainsi en faveur d’une telle disposition. Un plébiscite ! Il y a tout de même deux niveaux de lecture à cette problématique : un concernant le principe général de l’accès au vote des résidents non luxembourgeois (qui représentent, dans l’ensemble de la population, 45,9 % des 562.958 habitants) et un autre concernant les conditions de ce vote. « En tant que chef d’entreprise, je vote ‘oui’ pour deux raisons, nous indique Michel Braquet, associé gérant du Garage Étoile (Citroën). D’abord, le gap croissant existant entre les ‘forces vives’ de la nation et le pouvoir politique législatif et exécutif conduit, et

« Les questions posées ne reflètent pas une volonté politique, mais tout simplement des ‘coups de blues’ de certains politiciens. » Jo Kox

conduira forcément, à une politique mal adaptée à notre économie et à son développement futur. Ensuite, et c’est l’argument principal, les travailleurs étrangers, résidents ou frontaliers, sont souvent mal intégrés dans notre société et dans nos entreprises : le droit de vote serait un signal fort pour leur faire comprendre qu’ils sont les bienvenus dans notre société civile et dans nos entreprises comme membres à part entière, et non seulement comme main-d’œuvre destinée à suppléer les lacunes de notre marché du travail. Cela contribuerait certainement à leur motivation au travail et à leur loyauté vis-à-vis de l’entreprise. Nous ne pouvons pas, à la longue, faire coexister une économie ouverte avec une société fermée. » À ses yeux, si rien n’est fait rapidement, « notre société se dirige vers une société de classes et de castes de type médiéval ou du genre ayant existé dans quelques pays européens durant la première moitié du siècle dernier. La force de notre pays réside dans son ouverture au monde ». Cette ouverture linguistique, culturelle, politique et économique sur l’étranger fait partie des éléments quasi constitutifs du Luxembourg. « Un ‘non’ sonnerait comme une fausse note dans cette caractéristique identitaire essentielle pour notre pays », remarque d’ailleurs JeanJacques Rommes.

Pour une meilleure intégration La caractéristique sociétale du pays constitue, évidemment, un argument massue pour tous ceux qui sont en faveur d’une meilleure intégration des non-Luxembourgeois. « Le droit de vote pour les résidents étrangers est un impératif pour le futur de notre pays, tranche Marco Houwen, un des cofondateurs du groupe DCL et tout récent fondateur de la société BHS Services. L’histoire nous montre que des pays qui sont dirigés par des minorités n’ont pas de futur. Afin que le Luxembourg ne devienne pas à terme un pays non gouvernable, nous nous devons

Le droit de vote pour les étrangers

1,8 % 7,3 % nsp

La limitation des mandats des ministres à 10 ans

Le droit de vote à 16 ans

non

10,9 %

12,5 %

nsp

36,4 % non

nsp

52,7 % oui

90,9 %

39,3 %

48,2 % oui

non

oui

Résultats des suffrages exprimés par 55 décideurs interrogés par Paperjam fin avril 2015.

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d’intégrer, par cette mesure, les personnes qui ont choisi le Luxembourg comme leur lieu de résidence et leur donner l’opportunité de participer au processus démocratique. » Et de donner une tout autre lecture à la devise nationale « Mir wëlle bleiwe wat mir sinn » (« Nous voulons rester ce que nous sommes ») : « Une nation qui a toujours été capable de s’adapter aux nécessités de son temps ! » Patrick Kersten, multi-entrepreneur (il créa au Luxembourg Monster et atHome et, dernièrement, a lancé Doctena), juge qu’il est « nécessaire de pallier la sous-représentation des actifs dans les votants » et propose même une solution alternative (ou complémentaire ?) : « Remplacer l’obligation de vote par un droit de vote pour les retraités (qui représentent 50 % des votants), en espérant que cela augmente le nombre de ceux qui décideront de ne pas se déplacer… et ainsi faire confiance aux ‘jeunes’. » Les jeunes, justement, sont ceux qui constituent la motivation dans la prise de position de Georges Bock, general manager de KPMG Luxembourg : « C’est un ‘oui’ critique pour le Luxembourg. Mon ‘oui’ est un vote pour le futur de mes enfants et petits-enfants. » Si le principe de faire activement participer les résidents étrangers au processus démocratique semble largement acquis auprès des décideurs qui ont accepté de participer à notre consultation, la définition des conditions de cette participation suscite, elle aussi, un vaste débat. Les restrictions imposées par le libellé de la question (être résident au pays depuis au moins 10 années et avoir déjà été électeur au moins une fois au niveau des élections communales ou européennes) sont, pour la grande majorité des répondants, suffisantes. D’autres plaident pour une vision encore plus vaste de cet élargissement de l’électorat : « Il faudrait permettre aux frontaliers et aux résidents étrangers depuis moins de 10 ans de s’exprimer également par le biais d’un organisme consultatif sur tous les sujets les concernant directement, et en particulier la mobilité », propose Michel Braquet. Quelques-uns, comme Fernand Wolter, directeur et administrateur délégué de Prolingua, y ajoutent une « maîtrise convenable de la langue luxembourgeoise ». Si, en l’espèce, on peut imaginer que M. Wolter prêche pour sa propre paroisse, la condition de la langue fait, elle aussi, largement débat. Elle vient se greffer sur l’argumentation majeure opposée au droit de vote des étrangers : celle d’un accès facilité à la nationalité luxembourgeoise. « La question du référendum est inappropriée pour pouvoir y répondre par ‘oui’ ou par ‘non’ », indique un chef d’entreprise du secteur IT qui souhaite rester anonyme. « Il faut donner des droits aux étrangers, mais de façon substantielle, et aussi les mêmes devoirs que les citoyens. Il faut donc faciliter l’accès à la citoyenneté », estime-t-il. Une approche partagée par Hugues Delcourt, le président du comité de direction de la Bil, lui-même Français, et qui plaide pour une plus vaste intégration des non-Luxembourgeois, allant bien au-delà de la seule question du droit de vote. « Toute communauté, nationale ou autre, est enrichie par la diversité des natio-

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« Nous ne pouvons pas, à la longue, faire coexister une économie ouverte avec une société fermée. » Michel Braquet

nalités qui la compose. J’ai moi-même, en tant que ressortissant français, résidé dans différents pays en Europe et en Asie et j’ai pleinement vécu cette ‘internationalisation’ dans mon parcours. À chaque étape, j’ai fait un effort d’intégration et aujourd’hui, étant résident luxembourgeois, je prends beaucoup de plaisir à approfondir mes connaissances de la langue, de la mentalité et de tous les atouts que ce pays offre. Plutôt que de me donner un droit de vote, je préférerais, dans ce parcours qui est le mien, pouvoir désormais accéder plus facilement à la nationalité luxembourgeoise. Il est vrai que l’introduction de la double nationalité fut une étape fondamentale dans le débat d’intégration au Luxembourg. Aujourd’hui, je proposerais d’étendre la discussion actuelle et de repenser, à côté du droit de vote, les différents aspects qui mènent à une bonne intégration et communication avec les étrangers au Luxembourg. »

Faciliter l’accès à la nationalité ou au droit de vote ?

« L’ouverture du droit de vote comme une évidence citoyenne. » Marc Wagener

S’exprimant à titre personnel, Michel Wurth trouve, lui aussi, l’énoncé de la question « critiquable » et plaide aussi pour la promotion d’autres formes d’intégration, « dont la double nationalité ». Mais à ses yeux, « la proposition d’associer plus directement les étrangers au processus démocratique est le reflet que la société luxembourgeoise fonctionne aujourd’hui grâce à l’apport des résidents et est une marque de confiance en leur capacité à s’intégrer dans la société luxembourgeoise et à contribuer à la moderniser ». Nicolas Henckes, pour sa part, s’il approuve le principe, se sent un peu « pris en otage par le gouvernement », estimant que d’autres moyens existent pour augmenter progressivement l’intégration des non-Luxembourgeois dans le processus démocratique et décisionnel du pays. « La question posée est très discutable et le réfé-


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« Le Luxembourg est en train de faire une erreur historique en voulant autoriser le droit de vote à des personnes qui n’ont même pas fait l’effort de vouloir apprendre la langue. » Sharon March

rendum, de toute façon, un outil soumis à tous les vents populistes. Le gouvernement, n’ayant pas la majorité nécessaire pour une modification constitutionnelle, aurait dû prendre ses responsabilités et choisir une amélioration de la situation par la voie parlementaire, certes plus lente et moins totale. Au lieu de cela, il organise à la va-vite un référendum à double tranchant, car si cela aboutit à un rejet net et sans bavure, le sujet pourrait bien être enterré pour de nombreuses années. » Parmi les décideurs interrogés qui s’expriment ouvertement en défaveur d’une telle ouverture du droit de vote aux étrangers, citons Nico Simon, directeur général du groupe Utopia, qui trouve « certaines conditions tout simplement scandaleuses dans la mesure où elles entraînent de facto une obligation de résidence de plus de 10 ans ». La consultante Sharon March est également défavorable à ce principe. Arrivée au Luxembourg, cette Anglaise d’origine a fait l’effort d’intégration jusqu’à apprendre la langue et a acquis, depuis, la nationalité. Elle estime justement que le droit de vote devrait être lié à cette nationalité, quel que soit le pays concerné. « Dans le contexte européen, on pourrait à la rigueur imaginer que les étrangers provenant d’un autre pays de l’UE pourraient avoir ce droit de vote. Ceux qui prétendent à vouloir voter devraient aussi faire l’effort d’apprendre la langue locale. On ne peut pas avoir de droits sans avoir aussi des responsabilités. Et cet aspect a été laissé hors de la discussion publique. » Jugeant « inacceptable » que ce soit

Le Bierger-Center de la Ville de Luxembourg devra-t-il gérer un afflux de nouveaux inscrits sur les listes électorales ?

généralement aux « locaux » de devoir changer de langue pour s’adresser à un résident étranger, elle ne trouve pas logique d’autoriser le droit de vote à des personnes qui n’ont même pas fait l’effort de vouloir apprendre la langue. « Le Luxembourg est en train de faire une erreur historique en voulant faire autrement. À Rome, il faut vivre comme les Romains et rendre à César ce qui lui appartient. »

Renouveler, oui, mais de soi-même Si cette question du droit de vote des résidents non luxembourgeois est celle qui a suscité le plus de commentaires de la part des décideurs que nous avons sollicités, c’est aussi celle pour laquelle le résultat de la consultation ne souffre d’aucune discussion. C’est loin d’être le cas des deux autres sujets qui seront soumis aux électeurs le 7 juin, concernant l’établissement du droit de vote à partir de 16 ans et la limitation du mandat des ministres à 10 années consécutives. Au vu des résultats de « notre » vote, les avis sont très largement partagés. Le « oui » l’emporte, certes, mais dans des proportions bien plus restreintes : 48,2 % pour la première (contre 39,3 % de « non ») et 52,7 % pour la seconde (contre 36,4 % de « non »). Pour ceux qui ont estimé que ces deux questions méritaient un certain intérêt – car ils sont nombreux à ne même pas comprendre leur pertinence dans le contexte d’un scrutin national –, c’est la question de la limitation à 10 ans de la durée maximale pendant laquelle, de façon continue, une personne peut être membre du gouvernement, qui semble poser le plus de problèmes. « Les personnes compétentes doivent pouvoir continuer à exercer. Ce n’est pas à la loi que revient la tâche de renouveler les gouvernements, mais aux électeurs », tranche ainsi Patrick Kersten.


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« L’histoire nous montre que des pays qui sont dirigés par des minorités n’ont pas de futur. » Marco Houwen

Une position qui rejoint celle d’un chef d’entreprise du secteur IT sous couvert d’anonymat : « Cette question est inappropriée pour un référendum. C’est aux partis de montrer qu’ils sont capables de gérer la relève des postes. Pourquoi ceux qui proposent cette disposition ne pourraient-ils pas commencer à la pratiquer ? » C’est surtout l’aspect « expérience » qui est mis en avant pour justifier qu’un ministre puisse rester plus de 10 années au sein du gouvernement. « Je pourrais comprendre une limitation pour un même poste ministériel, tempère Keith O’Donnell, managing partner d’Atoz. En revanche, en l’imposant comme restriction générale, on risque de se priver des compétences de personnes expérimentées. » Pour les adeptes du « oui », c’est le mot « renouvellement » qui revient évidemment le plus souvent dans l’argumentaire. « En politique, cela permet un renouvellement des idées et ouvre les fonctions publiques à un nombre plus important de personnes », note ainsi Sam Tanson, future ex-coprésidente du parti Déi Gréng et première échevine de la Ville de Luxembourg. Un avis que partage Fabrice Poncé, directeur général d’Adecco Group Luxembourg, qui estime que cette disposition pourrait permettre « une ouverture à plus de diversité et certainement un meilleur contrôle des bilans lors des passations de pouvoir ». René Elvinger (CEO d’Elth) y voit pour sa part « une belle opportunité de donner un nouveau souffle à notre démocratie. Le succès d’un système démocratique dépend en effet en grande partie d’un renouveau politique régulier et d’un apport constant de nouvelles idées ». Quant à l’entrepreneur Norbert Friob (FNP), s’il n’utilise pas le mot en tant que tel, l’esprit y est : « L’expérience dans d’autres organisations a montré une certaine usure, même parmi les meilleurs. L’apport de sang neuf est presque toujours positif. »

Une meilleure éducation à l’école Enfin, l’idée que les Luxembourgeois âgés entre 16 et 18 ans aient le droit de s’inscrire de manière facultative sur les listes électorales ne semble pas susciter un enthousiasme débordant. Certes, René Elvinger constate qu’il

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« Mon ‘oui’ est un vote pour le futur de mes enfants et petits-enfants. » Georges Bock

existe bien des jeunes qui s’intéressent à la politique avant d’avoir atteint la majorité et que, dans ce contexte, « il serait juste de leur donner la possibilité de se prononcer sur leurs choix politiques, d’autant plus que les décisions politiques de nos jours concernent toutes les générations et particulièrement les jeunes ». Mais l’âge de 16 ans est tout de même, pour beaucoup, un peu prématuré, même si l’intérêt pour « la chose politique » commence à se faire jour à cet âge-là. « Les études scientifiques récentes montrent que les gens continuent à mûrir mentalement et physiquement jusqu’à 24 ans. Alors pourquoi devrions-nous forcer un jeune qui est encore à la recherche de son identité à aller voter pour prendre des décisions importantes ? », s’interroge Sharon March. Norbert Friob, lui, qui n’est pas favorable, au stade actuel, à cette disposition, verrait bien cette possibilité devenir réalité « à terme, à condition qu’une éducation à la citoyenneté soit assurée dans les cursus scolaires ». Sam Tanson, pour sa part, évoque plutôt « une meilleure éducation politique à l’école ». Car, comme l’indique Fabrice Poncé, « les cours de politique et / ou d’économie dispensés à l’école sont encore trop superficiels et ne permettent pas de pouvoir bénéficier de suffisamment d’éléments pour voter tel ou tel programme ». ◄

« Je proposerais d’étendre la discussion actuelle et de repenser, à côté du droit de vote, les différents aspects qui mènent à une bonne intégration et communication avec les étrangers au Luxembourg. » Hugues Delcourt


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Économie & Politique Voici un aperçu des principales informations de ces dernières semaines, à lire en détail sur www.paperjam.lu. Retrouvez ensuite 10 sujets clés sélectionnés par la rédaction. L’année 2014 a été « une année difficile » pour le secteur. Voici en substance le message délivré par Alain Rix, prési­ dent de l’Horesca. La hausse de la TVA sur les boissons alcoolisées ; les consé­ quences de l’interdiction de fumer dans les éta­ blissements et la nouvelle régle­ mentation euro­ péenne ont été poin­ tées du doigt pour expliquer la situation du secteur, qui emploie quelque 20.000 personnes. Pour M. Rix, la seule hausse de la TVA sur les boissons alcooli­ sées a généré une hausse des prix de 13,6 % entre octobre 2014 et mars 2015. L’École polytechnique fédérale de Zurich vient de publier l’édi­ tion 2015 de son « KOF index of globalisation », un indice qui mesure à travers 23 variables les dimensions économique, sociale et politique de la globalisation dans 187 pays à travers le monde. L’Irlande, les Pays­Bas et la Belgique occupent le podium. Le Luxembourg figure en 15e position. Mais le pays pointe à une brillante 3e place (derrière Singapour et l’Irlande), en ne tenant compte que de la dimen­ sion économique (qui mesure les flux de biens, de services et de capitaux, tout comme l’informa­ tion et les perceptions qui sont liées aux échanges marchands ; et qui mesure également les

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entraves aux flux de capitaux et aux échanges commerciaux). La hausse des prix des produits pétroliers, qui restaient sur une tendance baissière, a contribué en mars à une inflation de 0,14 % des prix à la consommation et à une augmentation du taux annuel d’inflation qui s’est fixé à 0,3 %. Pour la troisième fois en 10 ans, une charte en faveur de la sécurité routière a été signée début avril. Mais pour la première fois, cet engagement est pris sous la responsabilité du Premier ministre, faisant de cette question une priorité nationale. Le texte entend mettre sur pied « une poli­ tique de sécurité routière durable ». Autrement dit, développer les efforts de l’ensemble des minis­ tères aussi bien en matière de pré­ vention, d’infrastructure, mais aussi de sanctions. Après 25 ans d’existence, le Centre de ressources des technologies et de l’innovation pour le bâtiment (CRTI­B) vient de se muer en groupement d’inté­ rêt économique (GIE) pour asseoir la qualité de la construction au Luxembourg et améliorer la com­ pétitivité de ce secteur. Les activi­ tés de cette nouvelle structure – qui regroupe l’État, la Chambre des métiers, l’Ordre des archi­ tectes et des ingénieurs­conseils, la Fédération des artisans ainsi que le Groupement des entrepre­ neurs du bâtiment et des travaux publics – consistent également à établir des standards en matière

de contrats pour les marchés publics et la coopération électro­ nique entre les différents acteurs impliqués dans la construction. Dans le cadre d’une réponse à une ques­ tion parlementaire posée par Marco Schank (CSV), le ministre du Développe­ ment durable C’est en millions le nombre de nuitées, et des Infra­ structures, record, enregistré François par le secteur de Bausch, a l’Horesca au confirmé qu’un Luxembourg groupe de travail en 2014. commun avec les autorités belges est actuellement en train d’élaborer « un projet de tarification unique », à finaliser entre les deux compagnies ferro­ viaires CFL et SNCB. Dans le même temps, l’abonnement M­Pass va être élargi aux frontaliers belges, « à l’instar de ce qui se fait déjà avec la France ». À compter d’octobre 2015, il pourra être ainsi combiné à un supplément d’abonnement pour les parties de réseau entre Kleinbettingen (dernière gare luxembourgeoise en direction d’Arlon) et la frontière, avec enchaînement sur le réseau belge.

1,64

En un an, entre février 2014 et février 2015, les prix à la production industrielle ont diminué en moyenne de 1,3 % dans tous les États membres de l’Union euro­ péenne, à l’exception du Luxem­ bourg, où ils ont progressé de 0,7 %.

Le Statec a fait le décompte de la population luxembourgeoise fin 2014 : 562.958 habi­ tants, ce qui réduit encore la portion des Luxembourgeois à 54,1 % au 1er janvier 2015, contre 54,7 % un an plus tôt. Les chiffres montrent surtout que les flux migratoires des Français ont surpassé l’année dernière ceux des Portugais : 19,5 % pour les premiers (17,8 % en 2013) contre 16,9 % pour les seconds (17,8 % en 2013). Pour autant, la communauté portu­ gaise est encore la plus étoffée au Luxembourg (16,4 % de la population), loin devant les Français (7 %). Arguant que les desiderata de l’artisanat ne sont pas ceux de l’industrie ou de la finance, le nouveau président de la Fédération des artisans, Michel Reckinger, s’est de nouveau prononcé ce week­end contre le projet de fusion entre la Chambre de commerce et la Chambre des métiers. « La Fédération des artisans n’est définitivement pas demandeuse, a­t­il confirmé sur les ondes de 100,7. L’artisanat a d’autres intérêts que l’industrie ou la place financière. »


2.252

C’est le nombre d’emplois créés en 2014 par le secteur de l’artisanat, dont plus des trois quarts ont concerné le secteur de la construction. L’artisanat revendique désormais quelque 6.600 sociétés, pour 82.635 salariés.

À quelques semaines de son départ en tant que procureur général d’État, Robert Biever s’est ouvertement prononcé contre le projet de loi du ministre Déi Gréng de la Justice Félix Braz devant durcir la lutte (mondiali­ sée) contre le terrorisme. Ce « Patriot Act » à la luxembour­ geoise crée le « malaise » chez les magistrats. M. Biever se dit mal à l’aise du tournant préventif du droit pénal, parce qu’il met à mal « des valeurs aussi essentielles que la présomption d’innocence ». Il reproche ainsi aux dispositions proposées d’avoir « pour objet d’incriminer préventivement cer­ tains faits desquels on peut déduire (ou plutôt entend déduire) que son auteur a (le cas échéant) l’intention de commettre des attentats ou encore d’être mêlé à des actes ter­ roristes ou de terroristes ». François Biltgen, le membre luxembourgeois de la Cour de jus­ tice de l’Union européenne, voit son mandat prolongé jusqu’en 2021. Âgé de 56 ans, l’ancien ministre de la Justice (entre autres) et président du CSV était entré dans l’institution dont il rêvait le 4 octobre 2013, marquant la fin d’un chapitre politique. Son man­ dat actuel se termine à la fin de cette année.

« Investir dans la pierre sera moins intéressant. »

Romain Schmit, le secrétaire général de la Fédération des artisans, continue de regretter la hausse de la TVA dans le secteur du logement et juge « paradoxale » la politique du gouvernement, qui veut favoriser l’accès à la propriété, mais renchérit le tout.

Il n’y aura pas de second report de l’abrogation – au 1er juin prochain – des allocations de maternité et d’éducation, comme le réclamait l’OGBL à la ministre de la Famille, Corinne Cahen. « Cela a été voté et ne sera pas reporté », a indiqué cette dernière, soulignant que cette abrogation avait déjà été reportée du 1er janvier au 1er juin « afin que les femmes qui étaient déjà enceintes au moment de l’an­ nonce ne soient pas prises au dépourvu ». Les experts du Fonds monétaire international tablent sur une hausse du PIB plus importante que celle prévue par le Statec, selon les dernières estimations. Après 2,9 % de croissance en 2014, le FMI table sur 2,5 % pour 2015, alors que l’institut national de sta­ tistiques limite ses prévisions à 2,2 %. Pour justifier son estima­ tion, le FMI avance comme princi­ pal argument le recul des prix du pétrole et des principales matières premières. À compter de septembre pro­ chain, une formation continue sur la langue, la culture et la société italienne sera inaugurée à l’Université, destinée « aux pro­ fessionnels impliqués dans les échanges économiques, culturels et politiques » avec l’Italie. Limitée à 20 places, la formation se dérou­ lera les mercredis après­midi au campus Belval. Pour la première fois depuis les débuts du classement du Forum économique mondial sur les technologies de l’information, le Grand­Duché intègre la liste res­ treinte des pays les plus perfor­ mants sur le plan numérique. Classé 21e au niveau mondial en 2012, le Luxembourg intègre le top 10 selon le classement 2015 en prenant la 9e place sur les 143 économies mises au ban d’essai.

François Biltgen a vu son mandat de juge à la Cour de justice de l'UE prolongé jusqu'en 2021.

Économie & Politique Brèves

regrette que, sur le concept de la qualité de l’accueil, le gouverne­ ment ne produit toujours pas plus de précisions en ce qui concerne le contenu même du cadre de référence national, « qui reste un concept sans réel contenu et donc difficile à appréhender ». La balance commerciale de la zone euro a affiché un excédent de 20,4 milliards au mois de février, soit 6 milliards de plus qu’en février 2014, d’après les premières estimations d’Eurostat. En revanche, au Luxembourg, la situation est stable avec une balance commerciale en déficit de 800 millions d’euros : 2,4 mil­ liards d’euros d’exportations et 3,1 milliards d’importations. L’ancien recteur de l’Université du Luxembourg, Rolf Tarrach, vient d’être élu à la présidence de l’Eu­ ropean University Association, forte de quelque 300 membres et qui regroupe les universités européennes. Il sera, en quelque sorte, « la voix » des quelque 850 membres de 47 pays chargés de prodiguer des cours à environ 17 millions d’étudiants. Il prendra officiellement le relais de Maria Helena Nazaré en juillet prochain.

30

La faible producti­ vité du Fonds du logement (30 logements Le (très faible) nombre locatifs mis sur de logements locatifs le marché en mis sur le marché en 2014 pour des 2014 par le Fonds du effectifs de logement. 60 personnes) a une nouvelle fois été montrée du doigt dans le cadre de l’audit réalisé par PwC et présenté en commission parlementaire par le secrétaire d’État au Logement Marc Hansen. Le rapport souligne principale­ ment les défaillances en termes stratégiques du Fonds, les faibles­ ses de sa gouvernance qui devront fatalement déboucher sur une révision de l’organigramme et la mise en place d’une direction opé­ rationnelle, avec une séparation des pouvoirs avec la présidence. Les frontaliers français bénéfi­ cient, depuis le 27 avril, d’un train supplémentaire entre Metz et Luxembourg, le matin : un TER programmé à 6 h 06, inter­ calé entre les trains de 5 h 54 et de 6 h 23. Il dessert les gares de Hagondange (6 h 23), Thionville (6 h 34), Hettange­Grande (6 h 41) et Bettembourg (6 h 50) avant d’ar­ river à 6 h 59 à Luxembourg­ville.

Rolf Tarrach, le nouveau président de l'European University Association

Dans un avis concernant les amen­ dements apportés au projet de loi sur l’accueil extrascolaire et le chèque-service accueil (CSA), la Chambre des salariés réclame un texte mieux formulé, plus précis, ainsi que la révision de tout le mécanisme du CSA. La Chambre

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Économie & Politique Brèves

52,7 % Après quatre mois consécutifs à un niveau identique, le taux de chômage a très légèrement dimi­ nué au mois de mars pour s’établir à 6,9 % de la population active, soit 18.150 personnes résidentes sans emploi. Depuis fin avril, les plus anciens horodateurs du centre­ville, de la gare et du Limpertsberg ont com­ mencé à être remplacés par des machines de nouvelle génération, capables d’accepter les paiements par Visa ou V­Pay. D’ici à fin juin, pas moins de 250 appareils nou­ velle génération seront ainsi opé­ rationnels. Le tout pour un mon­ tant global de 1,6 million d’euros. Francine Colling-Kahn, la bourg­ mestre de Junglinster, a annoncé, fin avril, son choix de quitter ses fonctions après six années passées à la tête de la commune. Une déci­ sion motivée pour raisons person­ nelles. C’est Romain Reitz, qui fut échevin pendant sept ans, qui lui succédera. Le gouvernement et les parte­ naires sociaux se sont mis d’accord sur la réforme du congé parental. Une démarche voulue par le gou­ vernement « dans le souci d’amélio­ rer la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle et en visant une augmentation de la proportion des pères ayant recours à cette pres­ tation ». Le versement entier du salaire est désormais prévu, avec un plafond de 3.200 euros. L’OCDE a livré son deuxième rapport sur les politiques menées en faveur de l’innovation au Luxembourg. L’organisation indique que l’accent devra être mis sur la promotion à l’interna­ tional et recommande par ailleurs de concevoir une stratégie natio­ nale d’innovation coordonnée, « pour intensifier les liens entre les investissements en recherche et leurs impacts sur la diversification économique voulue par le gouverne­ ment, le bien­être social et les objec­ tifs de développement durable ». Le Luxembourg City Tourist Office annonce avoir pris en charge 619.226 « visiteurs clients »

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Selon Eurostat, en comparaison avec ses partenaires, le Luxembourg dispose d’une population de 30-34 ans comptant parmi les plus diplômées de l’Union européenne, avec un taux de 52,7 %. Il connaît aussi un des plus faibles taux de jeunes qui quittent prématurément le système éducatif. Dans l’UE, cette part est de 37,9 % en 2014.

à travers ses différentes activités au cours de l’année 2014, soit une hausse de 3,1 % par rapport à l’an­ née 2013. Ce sont encore et tou­ jours les visites guidées qui décrochent la palme, puisque l’équipe du LCTO a organisé en tout 6.353 visites guidées aux­ quelles ont participé 254.120 per­ sonnes (+3,72 % par rapport à 2013). C’est la cinquième année de hausse des statistiques mesu­ rées par le LCTO. Le ministre de la Justice, Félix Braz (Déi Gréng), a confirmé, à l’occasion d’un séminaire organisé par l’American Chamber of Commerce, que le projet de loi concernant la mise en place de la société à responsabilité limitée simplifiée est toujours en attente d’être voté par la Chambre des députés. Aucune échéance n’est cependant à ce jour annoncée. Le bilan statistique du secteur des télécommunications, publié par l’ILR, indique un repli des revenus de la téléphonie mobile. Une première depuis 2009, large­ ment imputable à la régulation drastique des tarifs maximaux de la terminaison d’appel (lire l’article page 60). Les chiffres du Statec confirment la tendance déjà annoncée depuis le début de l’année : les autorisations de construction ont bondi au 4e trimestre de 160 % (comparé à la même période 2013) dans le domaine résidentiel, portés par l’effet TVA. Pour pouvoir bénéfi­ cier du taux super­réduit de 3 % (désormais porté à 17 %) jusqu’au 31 décembre 2016, les demandes devaient être accompagnées de l’autorisation de bâtir… « Il faudra attendre les données du début 2015 pour voir si (…) ne se cache pas également une dynamique plus favorable pour la construction résidentielle », indique le Statec. Toujours dans le domaine immo­ bilier, la vente d’appartements neufs a affiché une hausse de 50 % par rapport à la normale en nombre de transactions, un niveau record (voir aussi notre tableau de bord en page 122).

Dans les cartons depuis plusieurs années et réclamé régulièrement par les juges européens, la troi­ sième tour de la Cour de justice de l’Union européenne a reçu le feu vert du conseil de gouver­ nement. Les Twin Towers du Kirchberg ne vont donc pas le res­ ter longtemps… D’une hauteur et d’une largeur plus importante, la tour C ne devrait cependant pas dépasser les 110 mètres de haut, pour un montant qui devrait être inférieur à 170 millions d’euros, selon les informations de la CJUE. Inauguration prévue pour 2019. Les régulateurs luxembourgeois et belge des télécommunications viennent de signer un accord bilatéral qui supprime les frais d’itinérance entre les deux pays. Actuellement, l’opérateur luxembourgeois Join Experience, qui travaille avec Base en

l’opposition (CSV­ADR­Déi Lénk), qui continue de reculer dans l’opinion publique : son indice de confiance passe de 49 % en novembre dernier à 43 %. Selon le rapport publié par PwC Luxembourg, Luxembourg Real Estate 2020 : les fondations du succès, le paysage immobilier grand-ducal connaîtra de profondes évolutions au cours des cinq prochaines années. La firme anticipe ainsi une crois­ sance de l’ordre de 60 % pour l’immobilier de bureaux et de 50 % pour le résidentiel (en pre­ nant 2012 comme année de réfé­ rence). Selon elle, si l’économie poursuit sa croissance au rythme attendu, les entreprises viendront à manquer d’espaces de bureaux, créant une situation de pénurie.

Davantage de confort et de facilités pour les passagers du Findel.

Belgique, s’est montré intéressé (lire l’article page 60). La dernière livraison du sondage Politmonitor, publié à la veille du discours sur l’état de la Nation de Xavier Bettel, crédite l’équipe au pouvoir de 36 % de soutien de la part des électeurs, soit à peu près le même niveau que celui enregistré en novembre dernier. Cette stagnation ne profite cependant pas à

Luxair et Lux­Airport ont mis en opération de nouvelles bornes en libre-service à l’aéroport de Luxembourg. Cinq sont dédiées à Luxair et cinq pour une utilisation mixte, ouvertes aux autres compagnies aériennes opérant au départ de Luxembourg et offrant déjà ce service self check­in.


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Économie & Politique Discours sur l’état de la Nation

01 Faire passer le triple « oui » au pays du triple A

► Le second discours sur l’état de la Nation par Xavier Bettel laisse sur leur faim ceux qui attendaient des effets d’annonce. ► Le Premier ministre s’engage sur le « oui » au référendum du 7 juin, notamment sur le droit de vote des étrangers. ► Mais quid de l’après en cas de victoire du camp du « Nee » ? ― Texte : Véronique Poujol ― Photos : Christophe Olinger

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Le Premier ministre, pour le deuxième exercice du genre de son mandat, n’a pas fait dans le grand style auquel son prédécesseur Jean-Claude Juncker nous avait habitués, année après année, avec des annonces qui se voulaient « chocs », mais des discours lénifiants ayant vocation à baigner le Luxembourg dans le Lexomil, un célèbre anxiolytique. Celui de Xavier Bettel, mardi 5 mai, a duré 60 minutes chrono (réduit de moitié par rapport à son premier discours en 2014). Il n’a rien dit qu’on ne savait déjà, sur le logement, le droit à l’information ou la société de l’information. Il a surtout voulu marquer le terrain sur la question de l’ouverture de la société luxembourgeoise, en matière d’intégration, d’éducation et de droit de vote, à moins de quatre semaines du référendum (lire notre coverstory, en pages 20 et suivantes) que la majorité n’est pas certaine de pouvoir gagner, tant le droit de vote des résidents surtout cristallise actuellement le « non ».

▲ Attendu et observé, Xavier Bettel est resté fidèle à son style. Et n'a pas oublié d'adresser des bons points à ses partenaires de coalition.

« L’objectif est de faire disparaître le Luxembourg des listes noire et grise. » Xavier Bettel (Premier ministre)


Économie & Politique Discours sur l’état de la Nation Le chef du gouvernement a surtout voulu faire de son intervention à la Chambre des députés un plaidoyer autour du « oui », trois fois « oui » : au droit de vote conditionnel accordé aux résidents étrangers, à l’abaissement du droit de vote facultatif à 16 ans, ensuite, et à la réduction des mandats des ministres à 10 ans, enfin. L’exercice du pouvoir et la tendance grandissante des Luxembourgeois autochtones à l’entre-soi montre à Xavier Bettel combien il est difficile de faire passer auprès d’eux certaines idées. « Peur de son propre courage » : c’est en ces termes qu’un chroniqueur de la radio publique 100,7 a résumé le discours du Premier ministre de la coalition bleue, rouge et verte. Si tout le monde a retrouvé sa couleur dans le discours de Xavier Bettel, ce dernier n’a rien laissé paraître pouvant froisser une opinion publique manifestement à cran. Le gouvernement a d’autant plus peur, au moment d’aborder le référendum avec volontarisme, que personne n’est en mesure de s’avancer sur l’ampleur que prendra le camp du « non » ni sur les conséquences politiques à tirer d’une éventuelle victoire des partisans du « Nee ». Encore moins sur les capacités de l’opposition à exploiter le résultat du référendum après le 7 juin, en cas de « défaite » des idées référendaires.

MODERNITÉ DES IDÉES On saura alors si l’électorat est prêt à suivre Xavier Bettel et son gouvernement réformateur sur le terrain de la modernité des idées et des dispositions de la société luxembourgeoise à s’adapter à la réalité d’une économie ouverte. C’est un pari risqué politiquement, mais il faut sauter le pas. Le Premier ministre a en tout cas indiqué que le résultat au soir du 7 juin serait contraignant pour la suite des travaux de réforme de la Constitution luxembourgeoise (lire page 26).

Aussi, l’absence d’annonce de réforme, notamment fiscale, prend toute sa signification : Xavier Bettel ne voulait pas de sujets qui fâchent. Or, ce qui sera écrit sur la feuille d’impôt des contribuables luxembourgeois risque d’en être un, alors que les chiffres montrent une inégalité flagrante entre ceux qui travaillent et « ceux qui gagnent de l’argent en dormant », pour paraphraser un célèbre président français, aujourd’hui décédé. Toutefois, en évitant les thèmes non consensuels, le Premier ministre DP pourrait donner l’impression de se couper d’une population résidente qui s’inquiète de la montée du chômage, de la difficulté à trouver un logement ou de l’avenir de ses enfants. Des sujets comme l’accès des citoyens à l’information, le devoir de mémoire, les LuxLeaks ou les priorités de la présidence luxembourgeoise de l’Union européenne apparaissent un peu comme des ovnis aux yeux des citoyens lambda. Et l’opposition n’a pas raté l’occasion de rappeler le gouvernement de coalition DP, LSAP et Déi Gréng à la réalité, jugeant totalement dépourvu de profondeur le discours d’un Xavier Bettel davantage préoccupé à faire bouger les lignes de la société luxembourgeoise en intégrant ceux qui fondent une grande partie de sa prospérité économique, en l’occurrence les « étrangers ». Aussi, attendu sur la réforme fiscale, inscrite à l’agenda du gouvernement pour 2017, Xavier Bettel a déçu en ne faisant aucune annonce phare derrière ses formules bien emballées. Le Premier ministre a bien sûr adressé des messages aux petites gens, ceux qui émargent au SSM ou au RMG, qui auront droit aux subventions de loyer (entre 125 et 240 euros par mois, selon les revenus) pour endiguer l’exil aux frontières. Bettel veut voir dans cette mesure « une très nette hausse du revenu minimum garanti ». C’est

avec le rappel du nombre de logements dits sociaux qui seront servis au Kirchberg par la Société nationale des habitations à bon marché (SNHBM) et des prix au mètre carré inférieurs de moitié à ceux du marché sur le quartier du Kirchberg, le sujet qui « parle » le plus aux « vraies gens ».

BONS POINTS Ce n’est sans doute pas un hasard si Xavier Bettel a mis en exergue l’amélioration de la situation budgétaire et de la dette publique en les mettant sur le compte non seulement de la hausse des recettes supérieure aux prévisions, mais aussi de la réduction des frais de fonctionnement que l’État a imposée suite au paquet de mesures décidé l’an dernier. En 2014, le solde budgétaire global affichait un excédent de 289 millions d’euros, tandis que le déficit de l’administration centrale diminuait de 120 millions pour s’établir à 502 millions d’euros. Or, les sujets tournant autour de la réduction du train de vie du gouvernement et de l’administration plaisent à la population. Pour le reste, le Premier ministre a distribué des bons points à ses partenaires de coalition, en faisant la revue, après deux ans de pouvoir, de l’action de son gouvernement. Une note satisfaisante pour le ministre LSAP de l’Économie (et numéro deux du gouvernement) Étienne Schneider et sa volonté de développer le secteur touristique, de poursuivre le développement des secteurs logistique et de la connectivité électronique, de booster les PME et de faciliter la vie aux entrepreneurs (le projet de sàrl simplifiée à un euro en est une illustration). Satisfecit adressé aussi au ministre du Développement durable et des Infrastructures François Bausch (Déi Gréng) sur le tram, le projet qui devrait être mis sur les rails en 2017 pour relier Luxexpo au Pont

► En meneur de l'opposition, le CSV Claude Wiseler s'est dit déçu du manque de souffle.

― Juin 2015 ― 041


Économie & Politique Discours sur l’état de la Nation ◄ Étienne Schneider a reçu le satisfecit du Premier, notamment pour sa volonté de booster les PME et de faciliter la vie aux entrepreneurs.

Grande-Duchesse Charlotte. Le trajet complet de la Cloche d’Or jusqu’au Findel est prévu pour 2021. Xavier Bettel n’oublie pas non plus son propre parti en encourageant son ministre des Finances, Pierre Gramegna, dans la tâche ingrate qui est la sienne de gérer le service après-vente de l’après-secret bancaire. Le Premier ministre a rappelé une nouvelle fois, sans rien dire de nouveau, la volonté du gouvernement de mettre de la transparence sur la place financière, après le choc du scandale des LuxLeaks. « L’objectif est de faire disparaî­ tre le Luxembourg des ‘listes noire et grise’ », assure-t-il. Il n’a surpris personne en évoquant la mise en place d’une stratégie de prévention, élaborée par Luxembourg for Finance, et d’une cellule interministérielle qui travaillent désormais main dans la main pour améliorer la communication. Et défendre la réputation du pays dans l’après-LuxLeaks. Séance de rattrapage aussi pour Xavier Bettel qui, après que sa ministre de la Culture,

En évitant les thèmes non consensuels, le Premier ministre DP pourrait donner l’impression de se couper d’une population résidente qui s’inquiète de la montée du chômage, de la difficulté à trouver un logement et de l’avenir de ses enfants. 042 ―

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Maggy Nagel, a fait passer à la trappe une exposition sur le centenaire de la Première Guerre mondiale, a remis un projet de recherche sur le métier qui prendra corps sous la forme d’une exposition digitale susceptible d’attirer du public au-delà des frontières du Grand-Duché. Inscrite dans le programme du gouvernement, la création de l’Institut du temps présent devrait se concrétiser : ses travaux de recherche seront menés dans le contexte de l’Université, a prévenu Xavier Bettel.

« NI VISION, NI CONCEPT » Dans le camp de l’opposition – et du CSV en particulier, qui joue son va-tout sur le « Nee » au droit de vote des étrangers alors que ses jeunes et le LCGB (sans oublier l’archevêque) appellent sans ambiguïté au « Jo » –, l’absence d’annonces phares du Premier ministre de la « coalition Gambie » fait la « démonstration de l’absence de vision et de concept » du gouvernement, selon les propos de Claude Wiseler. Le président de la fraction CSV au Parlement reproche avant tout au Premier ministre d’avoir utilisé la plateforme du discours sur l’état de la Nation pour faire valoir la position de la coalition sur le référendum. Claude Wiseler s’est déclaré « déçu et frustré » par « une énumération de généralités que nous avons déjà eu l’occasion d’entendre à maintes reprises ». C’est vrai que le message d’ouverture du Premier ministre a tranché avec les habitudes de celui qui avait bercé, si ce n’est pas endormi, la vie politique pendant près de 20 ans. ◄ En résumé Le chef du gouvernement a prononcé mardi 5 mai son deuxième discours sur l’état de la Nation en décevant ceux qui s’attendaient à des annonces dans le style Juncker. Xavier Bettel a surtout voulu faire de son intervention à la Chambre des députés un plaidoyer autour du « oui », trois fois « oui ».

Sondage

Le gouvernement convainc difficilement

36 % d’opinions favorables venant des électeurs. 50 % de confiance dans la population non luxembourgeoise. Un an et demi après son accession au pouvoir, le gouvernement Bettel peinerait à convaincre les électeurs, selon les résultats du Politmonitor Luxemburger Wort et RTL, réalisé par TNS-Ilres, qui ont été diffusés deux jours avant que Xavier Bettel ne monte au perchoir de la Chambre pour son discours sur l’état de la Nation. Avec 36 % d’opinions favorables de la part des électeurs, la coalition stagne au niveau enregistré en novembre 2014 lors du dernier sondage du genre. Effectuée auprès de 1.141 personnes  dont 823 électeurs , cette enquête montre une défiance particulière des résidents luxembourgeois, puisque les résidents étrangers sont 50 % à accorder leur confiance au gouvernement. Au total, l’indice de confiance global (électeurs + résidents étrangers) se situe à 43 %, contre 42 % lors du dernier sondage. Cette stagnation ne profite cependant pas à l’opposition (CSVADR-Déi Lénk), qui continue de reculer dans l’opinion publique : son indice de confiance passe de 49 % en novembre dernier à 43 %. On notera aussi une différence d’appréciation entre les électeurs luxembourgeois et les résidents étrangers quant à la capacité du gouvernement à contrôler la situation du pays. 55 % des résidents luxembourgeois jugent l’action sans contrôle, alors que 67 % des résidents étrangers pensent que l’équipe BettelSchneider-Braz tient bien le gouvernail. J.-M. H. ◄


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Économie & Politique GR Business Days

► La quatrième édition des GR Business Days se tiendra à Luxexpo les 17 et 18 juin prochains. ► Ce salon, conçu pour mettre en contact les PME de la Grande Région, attire de plus en plus d’acteurs étrangers. ► Les organisateurs espèrent franchir, cette année, le cap des 250 exposants. ― Texte : Jean-Michel Lalieu

Déjà, c’est quasiment devenu une tradition. À l’approche du solstice d’été, les PME et start-up de la Grande Région se donnent rendez-vous à Luxexpo pour les GR Business Days. Cette année, la quatrième édition de ce salon organisé par la Chambre de commerce du Luxembourg se déroulera les 17 et 18 juin. Ses responsables espèrent dépasser le chiffre de 250 exposants et pouvoir accueillir plusieurs milliers de visiteurs. Nés en 2012, les Greater Region Business Days ont eu pour objectif de faire se rencontrer les entreprises luxembourgeoises et celles des autres territoires de la Grande Région (Lorraine, Wallonie, Sarre, Rhénanie-Palatinat) dans le contexte d’un salon B2B. Parce que, jusque-là, un tel événement n’existait pas, alors que les PME constituent l’essentiel du tissu économique de cette zone d’activité qui affiche quand même un PIB supérieur à 300 milliards d’euros. « Nous avons

effectivement constaté que de nombreuses PME se rendaient dans des salons sectoriels dans les pays voisins, mais qu’il n’existait pas un salon multisectoriel pour les PME, commente Carlo Thelen, directeur général de la Chambre de commerce. Aujourd’hui, nous pouvons affirmer que c’était une bonne initiative. » Pour appuyer le constat, le responsable de la Chambre de commerce note que des entreprises présentes les années précédentes seront à nouveau de la partie et que, désormais, on peut déjà plus le qualifier de salon « européen » que d’événement « Grande Région ». « C’était un peu notre espoir, admet Carlo Thelen. On voit clairement aujourd’hui que les entreprises étrangères sont intéressées à entrer en contact avec des sociétés luxembourgeoises. » C’est d’autant plus important que l’économie nationale s’appuie en grande partie sur l’ouverture vers l’étranger. Ce salon est donc à nouveau une manière d’aider les petites structures à se tourner plus facilement vers l’international. L’an dernier, pour la première fois, des délégations étrangères – Pays-Bas et Pologne – étaient représentées parmi les exposants.

Les GR Business Days, une autre manière de pousser les PME luxembourgeoises à l’international. ▼

Pour la future édition, les Pays-Bas ont déjà confirmé à nouveau leur présence. Ils seront accompagnés par des représentations d’Autriche, de Chine, du Sénégal, de Croatie, d’Inde et de Slovénie. La Tunisie a également manifesté son intérêt. En plus, les organisateurs ont fait le choix de mettre à l’honneur la région turque de Kocaeli, une zone industrielle proche d’Istanbul que les entrepreneurs ont déjà eu la possibilité de visiter plusieurs fois à l’occasion de missions économiques. Au rayon des innovations, le salon annonce trois nouveaux « villages ». L’Expo plaza, qui regroupera des stands d’information, le Village de l’entrepreneuriat féminin, que la Chambre de commerce entend promouvoir, et le Village de la performance numérique. « Le Luxembourg n’a plus à prouver ses performances dans les domaines de l’ICT, explique Carlo Thelen, mais dans cet espace, nous voulons plutôt mettre le doigt sur les menaces liées à ce secteur et mettre en avant les acteurs qui proposent des solutions à ces risques. » L’expo The dark side of the bizz y sera d’ailleurs consacrée. Ces nouveaux espaces viennent allonger le parcours du visiteur, qui disposait déjà de villages pour les start-up, les clusters et d’un « network village ». L’enjeu du salon étant de mettre en contact des entrepreneurs, les GR Business Days leur proposent une plateforme pour des rendez-vous en face à face. Les organisateurs estiment que 4.500 rendezvous d’affaires devraient être organisés au cours des deux jours. « Maintenir un village des clusters est aussi très important, poursuit le directeur de la Chambre de commerce. Parce qu’un salon multisectoriel est moins facile à organiser qu’un événement centré sur un seul secteur d’activité. Nous n’avons évidemment que peu d’industriels présents sur le salon, mais en revanche nous n’avons pas de limites dans les secteurs représentés. » Enfin, notons que si le Luxembourg fait cavalier seul en tant qu’organisateur, il reçoit un coup de pouce des autres entités géographiques qui assurent la promotion du salon auprès de leurs entrepreneurs. « Nous réalisons de belles collaborations au sein de la Grande Région, confirme Carlo Thelen. Nous organisons depuis 10 ans des réunions de coordination trimestrielles entre régions. Chacun met en avant les événements des autres. » Et y participe. On le verra sans doute encore lors de la 20e édition du Salon à l’envers à Thionville, en octobre prochain, où les PME luxembourgeoises sont souvent largement représentées. ◄ En résumé Quatrième édition, les 17 et 18 juin, pour les GR Business Days. Leur objectif est de mettre en contact les PME et start-up de la Grande Région, mais le spectre s’ouvre de plus en plus à l’ensemble des acteurs européens. Une preuve de l’attrait des PME luxembourgeoises à l’étranger.

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PHOTO : CHAMBRE DE COMMERCE

02 PME sans frontières


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Économie & Politique Luxembourg Institute of Science and Technology

03 « Enthousiaste et impressionné » ► Gabriel Crean a officiellement pris les rênes du List, début mai. ► Le professeur irlandais entend positionner l’institut en accélérateur européen d’innovation, entre la recherche fondamentale et le marché. ► « On peut faire du Luxembourg un vaste laboratoire d’expérimentation et de test », confie-t-il. ― Texte : Fabrice Barbian ― Photo : Christophe Olinger

Le List (Luxembourg Institute of Science and Technology) est officiellement entré en acti­ vité en début d’année. Né de la fusion des CRP Tudor et Lippmann, fort de 630 collabo­ rateurs dont 80 % de chercheurs, l’institut se positionne comme la référence luxembour­ geoise en matière de recherche et d’innovation, dans trois domaines tout particulièrement : les matériaux, l’environnement et les agro­ biotechnologies, ainsi que les technologies de l’information et de la communication. L’ambition est de positionner le List comme un RTO (Organisation de recherche et de tech­ nologie) de référence en Europe. Voilà pour le positionnement et les ambi­ tions. Pour mettre tout cela en musique, le conseil d’administration a choisi d’en confier la direction à une figure de la recherche inter­ nationale, le professeur irlandais Gabriel

Crean, qui a officiellement pris ses fonctions début mai. « Je suis très enthousiaste, également très impressionné par le List qui, avec son équipe pluridisciplinaire, affiche une force incroyable, confie le nouveau CEO à Paperjam. Au-delà des acteurs de la recherche, la taille du pays, les moyens déployés, les ambitions, mais également la proximité avec les décideurs et le gouvernement sont d’indéniables atouts pour faire du Luxembourg un vaste laboratoire d’expérimentation et de test. » Rencontré lors de sa première sortie, le 29 avril dernier, dans le cadre de la conférence annuelle des Organisations de recherche et technologie européennes organisée au Luxembourg, Gabriel Crean poursuit. « Les data centers, le déploiement des smart grid (réseaux intelligents), le high performance computing (science des « superordinateurs », ndlr) ou bien encore la stratégie Digital Lëtzebuerg sont autant de domaines ou d’initiatives sur lesquels nous pouvons nous positionner pour tester et expérimenter des innovations, des prototypes et des concepts. Cela vaut pour des technologies développées au Luxembourg, mais également du reste de l’Europe, pour des

produits comme pour des services. Au Luxembourg, contrairement à ce qui se passe ailleurs, nous pouvons aller très vite pour développer un portefeuille de technologies complet, c’est un avantage considérable. » Si le professeur confie que son agenda est déjà bien chargé, cela n’a rien à voir avec son déménagement – alors en cours. Cela s’expli­ que notamment par sa stratégie : Gabriel Crean se veut avant tout pragmatique et fédé­ rateur : « Les équipes, les outils et les moyens (la dotation étatique s’élève à 39 millions d’euros par an dans le cadre d’un plan quadriennal, ndlr) mis à notre disposition offrent un réel potentiel. L’ambition est de travailler en étroite collaboration avec l’ensemble des acteurs concernés : le FNR (Fonds national de la recherche), Luxinnovation, l’Université, les clusters… L’une de mes priorités est également d’aller à la rencontre des chefs d’entreprise, des PME comme des grands groupes, afin, ensemble, de développer un écosystème compétitif au sein duquel l’industrie, notamment, a toute sa place. L’innovation est le moteur principal de la croissance économique, donc de l’emploi, ne perdons pas cela de vue. »

AU CŒUR DE LA COMMUNAUTÉ Figure de la recherche à l'expérience affûtée, Gabriel Crean, patron du List, croit au potentiel et aux forces du pays. ▼

Gabriel Crean peut puiser dans son expérience acquise au CEA Tech, le pôle recherche tech­ nologique du Commissariat à l’énergie ato­ mique en France, dont il était le vice­président depuis 2012. Le CEA Tech, qui regroupe 4.500 collaborateurs et qui est le plus important RTO d’Europe, est une référence en matière de valorisation de l’innovation industrielle. Autre atout, et non des moindres, sur lequel compte s’appuyer le professeur Crean pour positionner le List comme un accéléra­ teur d’idées, de concepts et d’innovations, entre la recherche fondamentale (on l’a com­ pris, l’accumulation des publications scienti­ fiques n’est pas une priorité en soi) et le mar­ ché : l’ouverture prochaine de la Cité des sciences et de l’innovation à Belval. « Je suis vraiment impatient que l’on prenne possession des lieux. Le fait de fédérer les équipes sur un même site va naturellement générer une nouvelle dynamique et de la créativité. Des chercheurs y sont déjà installés, mais le timing est bon, puisque nous disposons encore d’un peu de temps pour façonner et modeler les lieux comme nous l’entendons », souligne Gabriel Crean. Un chantier que le professeur va suivre de très près : « J’emménage à Belval. Je veux faire partie intégrante de cette communauté. » ◄ En résumé Gabriel Crean, éminent scientifique irlandais, a pris les rênes du Luxembourg Institute of Science & Technology. Il livre sa vision de la recherche luxembourgeoise, qu’il veut ambitieuse en Europe. La mission, les moyens, les équipes, le cadre de Belval, tout l’enthousiasme.

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Économie & Politique Rotondes

360° et quelques

04 ► La ténacité de Robert Garcia et son équipe a payé : les Rotondes ouvriront enfin le 13 juin. ► Seule une partie de la Rotonde 2 sera accessible au public. ► L’asbl devra attendre encore avant de devenir un établissement public. ― Texte : France Clarinval ― Photo : Mike Zenari

▲ Robert Garcia, le directeur des lieux, nous ouvre la porte des Rotondes en avant-première.

Des bâtiments ronds reconvertis en espace culturel, il y en a un peu partout dans le monde. Une association les rassemble même. Mais deux rotondes au même endroit, c’est du jamais vu ! Luxembourg peut se targuer d’une telle rareté. Une rareté alimentée, aussi, par la longueur du chantier qui a été nécessaire pour permettre à ces rotondes de connaître enfin une nouvelle vie. Classés « monument national » dès 1985, ces bâtiments, construits en 1875 pour servir de remise pour les locomotives à vapeur, ont longtemps servi d’ateliers pour la Société nationale des chemins de fer luxembourgeois (actuels CFL). Autour de 1995 et de l’engouement pour la première année culturelle, plusieurs per­ sonnes ont cherché à leur donner une nou­ velle affectation, dont un certain Robert Garcia, député écologiste à l’époque, qui plaidait pour y installer le Musée d’Art contemporain. En 1999, les CFL transmettaient officielle­ ment les clés de la première rotonde au minis­ tère de la Culture, qui avait lancé un appel à projets pour occuper les lieux : marché cou­ vert, exposition de trains miniatures, centre multimédia, bibliothèque… tout y est passé. Des travaux d’envergure ont été menés pour assainir, refaire la toiture et le sol. Si bien qu’après quelques expositions tempo­ raires, l’année culturelle 2007, dirigée par le même Robert Garcia, a pu y installer ses quar­ tiers avec, dans la première rotonde, une pro­ grammation d’expositions prestigieuses (Sophie Calle, Martin Parr…) et un restaurant éphémère. « Il y avait encore des bus dans la deuxième rotonde quelques semaines avant l’ouverture, se souvient le coordinateur géné­ ral, mais l’endroit a pu être sécurisé et accueillir la programmation jeune public et public jeune qui a été un grand succès. » Le succès de cette programmation et le soutien des autorités communales et natio­ nales ont permis de pérenniser une partie de l’équipe et de ses idées. Dès 2008, l’asbl CarréRotondes était créée et s’installait – tem­ porairement – dans des halls industriels désaf­ fectés à Hollerich, avec l’intention de regagner les « vraies »rotondes dès que possible.

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Économie & Politique Rotondes En 2010, une étude de faisabilité a été menée, en vue d’un réaménagement complet du site. Ont alors commencé des travaux de décon­ tamination du terrain et de la Rotonde 2. « Les restrictions budgétaires n’ont pas permis de réhabiliter la Rotonde 2 entièrement », regrette Robert Garcia. En effet, si 23 millions d’euros étaient prévus, finalement, ce ne sont que 5,7 millions qui ont été alloués pour tous les travaux, restaurations, assainissements qui ont été réalisés à partir de 2010. La ténacité a payé : l'ouverture est prévue le 13 juin.

Nouvelle identité

Deux points c’est tout

EXPLORATIONS CULTURELLES L'équipe s'est attelée à l’établissement d’un programme. Les grands axes mis en avant au CarréRotondes restent en place : arts de la scène (anciennement Traffo), expositions, musiques et conférences. Le nombre de mani­ festations pourrait augmenter progressive­ ment, même si le budget alloué par le minis­ tère de la Culture (1,4 million d’euros cette année) n’atteindra la somme demandée de 1,8 million d’euros qu’à l’horizon 2018. Trois zones distinctes permettront des programmations simultanées et variées. La Rotonde 1, magnifiquement restaurée, héber­ gera les spectacles des arts de la scène pour jeunes publics et pour un public adulte, qui se dérouleront sous la coupole de la grande salle. « Grâce à un subside complémentaire de la Ville de Luxembourg, nous pouvons cons­ truire des gradins semi­circulaires mobiles qui serviront pour les spectacles des arts de la scène », se réjouit M. Garcia. Des gradins amo­ vibles permettent plusieurs configurations et pourront accueillir jusqu’à 400 enfants (contre 180 aujourd’hui), ce qui permettra de satisfaire plus de monde, « puisque actuel­ lement nous sommes obligés de refuser près de 70 % des demandes… » Autour des gradins, protégés par des rideaux, la galerie accueillera des artistes émergents et des événements innovants, mais sera également disponible pour des locations privées ; la plateforme, structure originale de l’ancien restaurant Serre bleue, hébergera conférences, projections et autres événe­ ments. « En été, une grande exposition d’en­ vergure prendra place dans toute la rotonde. » La Rotonde 2 restera pour l’instant à l’état brut, avec un accès limité à une sorte de boîte en bois, ingénieux système proposé par les architectes Teisen & Giessler. La programma­ tion suivra ce qui a fait ses preuves à l’Exit07 : musiques actuelles et émergentes. La buvette ouvrira toute la journée et la soirée pour deve­ nir le rendez­vous quotidien pour un public d’habitués et de curieux, avec une restauration de brasserie midi et soir ; une vie cosmopolite et conviviale remplira les alentours de la ter­ rasse lors d’événements en plein air. Entre les deux rotondes, la Container city hébergera la Black box, une salle pour des spectacles intimistes, trois salles d’ateliers et de répétition pour les projets participatifs,

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Pour accompagner le déménagement aux Rotondes, les responsables ont voulu une nouvelle identité graphique. Aussi, un appel a été lancé aux agences de graphisme et de communication en octobre dernier. 27 agences ont rendu un dossier (book dans le domaine culturel, offre de prix et dossier de motivation) manifestant, dans un premier temps, leur envie de participer. Un premier jury en a retenu quatre qui ont été invitées à plancher plus profondément sur la nouvelle identité graphique. Après délibération d’un jury interne et externe aux Rotondes, c’est l’agence Comed qui a remporté ce concours rémunéré. « Notre idée a été de travailler dans la continuité : le carré disparaît,

une salle de projets pour des start­up cultu­ relles et les studios d’enregistrement de Graffiti / Ara pour les programmes radio jeunes et associatifs. « Les Rotondes font figure de centre d’expertise et d’incubateur d’initiatives nouvelles dans l’in­ terface entre la culture et l’éducation », conclut le directeur. Il annonce encore que le CarréRotondes à Hollerich continuera à vivre : « Six associations se mettent ensemble pour que le lieu serve pour des répétitions, des productions ou des ateliers d’artistes. Nous estimons qu’avec 100.000 euros par an, le hall peut vivre, argent qui sera partie intégrante des budgets de production. »

VERS UN ÉTABLISSEMENT PUBLIC ? Jusqu’ici, les Rotondes fonctionnent sous un statut d’asbl, financé essentiellement par l’État et la Ville de Luxembourg. Un statut qui laisse de la liberté à l’équipe, qui réfère à un conseil d’administration où les parte­ naires institutionnels sont très représentés, mais qui peut s’avérer précaire, puisque

restent les rotondes », explique Thierry Wunsch, account manager chez Comed. Aussi, en jouant de la spécificité des Rotondes – le seul endroit où il y en a deux –, la nouvelle identité se décline autour des deux points et du nom Rotondes. Il est décliné sur le programme, les affiches, le site internet, le matériel de bureau et de communication et la signalétique sur place. « Nous n’utilisons que le noir et blanc, la couleur est apportée par les événements qui remplissent les Rotondes. » Enfin, le sous-titre est passé de « Espace culturel » à « Explorations culturelles ». Une manière d’insister sur l’aspect pluridisciplinaire de la programmation, son côté novateur, défricheur et s’adressant à un large public. F. C. ◄

dépendant des dotations revues régulière­ ment. Aussi, la demande a été introduite de transformer l’asbl en établissement public. Cela doit transiter par une loi, qui tarde à venir. À noter, tout de même, que sur le site de la Trésorerie de l’État, CarréRotondes figurait bien au rang des établissements publics… « D’autres sont dans le même cas que nous, le Casino Luxembourg en particulier ; le texte règlera sans doute tous les cas d’un coup », suppose Robert Garcia, qui sait à quel point « c’est un enjeu politique ». Après avoir exa­ miné et restructuré les conventions, le ministère de la Culture a annoncé qu’il se pencherait sur les établissements publics. Mais aucune date n’est encore fixée. ◄ www.rotondes.lu En résumé Après des années de chantier, les Rotondes ouvrent leurs portes. Sous le mot d’ordre des explorations culturelles, l’équipe des Rotondes est appelée à exploiter ce site unique comme lieu pluridisciplinaire de création, de production et de diffusion dans les domaines du spectacle vivant, des musiques actuelles et des arts visuels, avec une ouverture sur le monde socioculturel associatif.


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Économie & Politique Marchés publics

05 L’opaque chantier du Lycée français

► Les travaux de gros œuvre du futur campus francophone du Ban de Gasperich vont démarrer en septembre. ► Des questions se posent sur la régularité de la procédure ; certains entrepreneurs la boycotteraient. ― Texte : Véronique Poujol Le chantier du futur Lycée français de Luxembourg sur le Ban de Gasperich a été lancé en grande pompe le 23 février dernier en présence du Premier ministre, Xavier Bettel. Casque vissé sur la tête, mais sourire un peu crispé aux lèvres, il avait posé sur la photo de famille, aux côtés du ministre de l’Éducation, Claude Meisch, pour un premier coup de pelle symbolique. Il ne s’était pas avancé sur la date d’ouverture. Le gigan­ tesque chantier devra être réalisé au pas de charge afin de permettre aux élèves de poser leur cartable dans leur nouvelle école en sep­ tembre 2017. Mais il est déjà entaché de mal­ formations congénitales. Deux semaines avant la petite cérémonie, l’association qui est le maître d’œuvre du pro­ jet, l’École et lycée français de Luxembourg (ELFL), faisait publiquement un « point d’étape » sur le projet Gasperich : autorisation de bâtir le site scolaire délivrée en octobre 2014 par la Ville de Luxembourg ; autorisa­ tion de l’ITM pour les travaux de terrasse­ ment et de construction du campus ; feu vert de l’Administration de l’environnement donné le 23 janvier dernier pour l’aménage­ ment et l’exploitation du bâtiment scolaire ; permis de voierie accordé trois jours plus tard par l’Administration des ponts et chaussées.

UN RÔLE DE TRÉSORIER Le conseiller consulaire et conseiller à l’Assem­ blée des Français de l’étranger (apparenté Les Verts,) Alexandre Château­Ducos, avait saisi la balle au bond pour demander aux admi­ nistrateurs de l’ELFL de lui transmettre le cahier des charges concernant « les différents lots liés à la construction de l’établissement, dont le gouvernement français, via la caution bancaire de l’AEFE (Agence pour l’enseignement fran­ çais à l’étranger, ndlr), est partie prenante ». L’élu réclamait des informations sur l’agenda des adjudications et cherchait à connaître les noms des membres des différents comités chargés de dépouiller et d’examiner les offres. Alexandre Château­Ducos se heurte alors à un mur de béton. L’ELFL lui oppose une fin de non­recevoir. L’élu s’entête et s’adresse au

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ministère des Affaires étrangères français, jugeant le refus de l’ELFL « inadmissible » et « préjudiciable en termes d’image pour la communauté française au Luxembourg ». Dans sa communication avec le quai d’Orsay, il parle « d’opacité et d’entre-soi, surtout dans le domaine du bâtiment ». Il se plaint aussi d’être exclu des délibérations de l’associa­ tion qui gère les travaux du futur lycée, pour lequel près de 150 millions d’euros vont être engagés, dont 80 % en provenance de l’État luxembourgeois, les 20 % restants ayant été garantis par l’État français dans le cadre d’un prêt consenti à l’ELFL. Cette intervention, toujours sans réponse, laisse déjà subodorer les zones d’ombre du marché public. Contacté par Paperjam, Alexandre Château­Ducos se dit « préoccupé » et évoque un « gros conflit d’intérêts potentiel » en raison de la présence dans le conseil

▲ Les travaux doivent impérativement démarrer en septembre pour avoir une chance d'ouvrir l’école à la rentrée de 2017.


ILLUSTRATION : ATELIER D’ARCHITECTURE DU CENTRE

Économie & Politique Marchés publics

d’administration de l’ELFL de dirigeants d’entreprise de bâtiment qui se sont mis sur les rangs pour décrocher des marchés (parti­ culièrement celui du gros œuvre, le plus allé­ chant) du futur Lycée français. Voilà donc le nœud gordien : la présence d’entrepreneurs dans le conseil d’administra­ tion d’ELFL. Dans le milieu du bâtiment aussi, on s’inquiète des « anomalies » enta­ chant le dossier. Financé comme toute autre école privée poussant sur le territoire grand­ducal (Inter­ national School, Sainte­Sophie, etc.), le chan­ tier du lycée ne sera pas piloté directement par les pouvoirs publics luxembourgeois, mais par l’asbl École et lycée français du Luxembourg, présidée par Pierre Girault, conseiller consulaire. On y retrouve aussi comme administrateur Franck Becherel, égale­ ment patron de l’entreprise de travaux

publics Tralux, filiale du groupe français Demathieu Bard. Le contrôle que les autorités luxembour­ geoises exercent se limite à son financement, comme le prévoit le projet de loi adopté défi­ nitivement le 25 novembre 2010 avec une enveloppe de 147 millions d’euros, dont 117 financés par le contribuable luxembour­ geois. Aucun représentant du ministère de l’Éducation nationale ne siège dans l’ELFL. Un commentaire de la commission parlementaire de l’éducation nationale, de la formation pro­ fessionnelle et des sports (28 octobre 2010) signale de façon assez vague que « les dispositions relatives à la législation luxembourgeoise sur les marchés publics sont pleinement applicables ». Sans autre précision sur le contrôle que les autorités vont exercer sur les condi­ tions de l’attribution des marchés (déléguée au maître d’œuvre, l’ELFL), ni sur l’élaboration

du cahier des charges d’un projet plusieurs fois revu et longtemps repoussé, faute de garanties financières suffisantes du côté fran­ çais (la part des 20 % étant à charge de l’asbl). Le ministère de l'Éducation a toutefois pro­ cédé à un contrôle de routine comme le pré­ voit la loi sur les écoles privées. Le rôle du Luxembourg semble être davan­ tage celui de trésorier que de contrôleur. « Nous sommes subventionnés à 80 % par l’État luxembourgeois, qui nous contrôle, ainsi que l’emploi des fonds », rétorque un proche du dos­ sier. Interrogée sur le potentiel conflit d’inté­ rêts de Franck Becherel, via la société Tralux qu'il dirige et dont la candidature parmi quatre autres a été retenue en janvier dernier par ELFL pour la construction du campus, cette source fait remarquer que la première soumis­ sion publique, celle du terrassement, rempor­ tée par le groupement CDCL / Giorgetti,

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Économie & Politique Marchés publics alors que Tralux comptait parmi les soumis­ sionnaires, « apporte la démonstration de la régularité de la procédure ». « En matière de conflit d’intérêts, l’apparence est primordiale », s’inquiète toutefois un autre proche du dossier. Il n’y aurait rien à suspecter derrière cette double casquette du patron de Tralux et d'ad­ ministrateur de l’ELFL. En tout cas, un autre élu des Français du Luxembourg, Bruno Théret (apparenté UDI), n’y voit pas d’em­ brouille. « Ce serait gros comme une maison. Le comité de gestion n’a pas pu se soustraire aux règles et aucun élément à l’heure actuelle ne permet de remettre en question la régularité de la procédure », assure­t­il. Mais pourquoi un autre entrepreneur qui comptait parmi les administrateurs d’ELFL a­t­ il dû jeter l’éponge, précisément en raison d’un conflit d’intérêts ? Arnaud Regout, dirigeant de CLI, une filiale de CLE, qui s’est associée à Tralux, en lice pour le marché du futur lycée, vient de présenter sa démission de l’asbl. « Il a été transparent dès le départ et nous avait fait savoir que son employeur n’excluait pas de soumissionner pour la construction du lycée à Gasperich », raconte un proche. Regout n’a pas vu son mandat renouvelé le 31 mars dernier au sein de l’asbl de l’École française (une seconde association gérant le cycle inférieur). Il a dû, du même coup, rendre son tablier au conseil d’administration de l’ELFL. Son collègue de Tralux n’a pas eu la même démarche.

POURQUOI FAIRE UNE OFFRE ? Des entrepreneurs concurrents de Tralux se sont montrés perplexes lorsqu’ils ont constaté la non­exclusion de cette entreprise du mar­ ché du gros œuvre du futur lycée, puis sa sélection à l’appel d’offres lancé fin 2014. « C’est une anomalie, signale un entrepreneur qui préfère garder l’anonymat. Tralux aurait du être exclue de la procédure, dans la mesure où M. Becherel a été associé à l’élaboration du dossier technique du lycée. » Selon nos informations, six entreprises ou groupements d’entreprises ont soumis­ sionné pour le gros œuvre et cinq offres ont été retenues au mois de janvier 2015. Il s’agit de celles de Tralux / CLE ; CBL / Cit Blaton ; CDCL / Giorgetti ; Soludec / GTM (groupe Vinci) et Lux TP (avec le Belge Besix). La candi­ dature du groupement Poeckes / Zublin a été éliminée dès le premier tour. Un second tour, à la mi­mai (après le bouclage de cette édition, ndlr), devait permettre de sélectionner l’heureux gagnant du marché. Le résultat est­il joué d’avance ? Certains entrepreneurs ne sont pas loin de le croire, malgré les dénégations du maître d’ouvrage. D’ailleurs, malgré les relances, des entreprises qui font partie de la présélection auraient déjà jeté l’éponge, choisissant cette forme de boycott plutôt que de « perdre du temps à élaborer une offre ». Non pas qu’ils craignent d’afficher des prix non compétitifs, mais parce que les critères du marché public, fai­ sant intervenir à hauteur de 30 % des

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éléments techniques, devraient faire pencher la balance du côté du candidat qui aura la meilleure connaissance du chantier. Ces entrepreneurs veulent ainsi montrer leur désapprobation. « Personne ne travaille sérieusement sur l’offre », fait savoir l’un d’eux, mani­ festement résigné. Sur les cinq groupements sélectionnés « pour sortir des offres » avant ce 15 mai, com­ bien en restera­t­il dans le tour de table final ? « Malgré les relances de l’ELFL, Tralux / CLE pourrait se retrouver seule à faire une offre », pronostique un entrepreneur. Les travaux doivent impérativement démarrer dès le mois de septembre pour avoir une chance de respecter l’agenda, pour ouverture de l’école à la rentrée de 2017.

Certains évoquent un conflit d’intérêts potentiel en raison de la présence dans le conseil d’adminis­ tration d’entrepreneurs du bâtiment sur les rangs pour décrocher le marché. Il faut noter que le dirigeant de Tralux ne fait pas partie du comité de sélection ni du comité technique chargé de l’examen des dossiers de soumission. Mais ce n’est pas suf­ fisant pour calmer les craintes des concur­ rents. L’un d’eux signale ainsi la très forte implication de M. Becherel dans l’élaboration du projet du nouveau Lycée français. « Or, ce ne sont pas les prix qui feront la différence dans cette affaire, mais le volet technique du dossier », explique­t­il. Les nouvelles règles sur les marchés publics ont dilué l’importance des critères des prix les plus bas au profit des offres les « mieux disantes ». Le but était d’assainir le marché face à des pratiques de dumping. Mais la méthode aurait induit un effet pervers : « Les maîtres d’ouvrage choisissent tout simplement qui ils veulent », déplore un entrepreneur. « Sur les gros marchés publics, poursuit­il, les entreprises affichent souvent des offres de prix assez similaires, avec des écarts variant entre 1 et 2 %. Un mémoire technique en revanche peut faire basculer le marché. Le mémoire technique du groupement Tralux / CLE sera probablement meilleur que les autres, car Franck Becherel s’y est beaucoup investi », conclut­il. ◄ En résumé Le chantier du futur Lycée français sur le Ban de Gasperich laisse planer les questions. Les travaux de gros œuvre vont démarrer en septembre. Des entrepreneurs s’interrogent en raison de la candidature du groupement Tralux / CLE, dont un des dirigeants est dans le conseil d’administration de l’association qui va gérer le lycée, financé à 80 % par le contribuable luxembourgeois.

Point de vue

Pas de conflit d’intérêts selon l’ELFL « Une situation de conflits d’intérêts ne peut se présenter que si un des administrateurs de l’asbl exerce ses droits ou ses pouvoirs, notamment en prenant part à une délibération ou à un vote, et si cet exercice devait aboutir à satisfaire un intérêt personnel extérieur à l’association », fait savoir l’ELFL, sollicitée par Paperjam. Ses dirigeants évoquent la mise en place « très en amont » de la soumission d’une « politique de séparation stricte de son processus de délibération et de prise de décision pour tous (ses) choix et (ses) résolutions ». Ce qui leur fait aussi assurer que « les décisions ayant abouti à retenir la candidature de l’association momentanée Tralux / CLE ont été prises de manière transparente, et à l’unanimité des membres de la commission de soumission (cinq personnes) et sans pouvoir être remises en cause pour des raisons de potentiels conflits d’intérêts ». L’ELFL fait aussi état d’un audit récent du ministère de l’Éducation nationale sur les premières phases de soumission et de consultation n’ayant « révélé aucun manquement aux règles des marchés publics ». La question n’est pas là : ce qui dérange dans cette affaire, c’est l’engagement de parents d’élèves, qui se trouvent aussi être aussi des entrepreneurs, dans la confection du projet de Gasperich à son stade précoce. « Oui, monsieur Becherel était au courant du projet », admet Bruno Lorrain, directeur exécutif de l’ELFL. Il ajoute que l’implication, entre autres, du dirigeant de Tralux a permis d’optimiser le coût du projet, avec une économie de 10 millions d’euros. Pierre Girault, président de l’ELFL, s’offusque lui des critiques qui sont portées à l’engagement bénévole de Franck Becherel et Arnaud Regout : « Je suis inquiet de cette vision des choses, car ça coûtera très cher à l’école française », dit-il en rappelant que la loi de dotation financière par l’État ne prévoit pas d’indexation de la participation. Aussi, un retard dans le démarrage des travaux de gros œuvre pourrait-il renchérir le prix du futur lycée et à tout le moins la part à charge de la communauté française. V. P. ◄


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Économie & Politique Mobilité

06 P + R : plus et plus grands 57

► Dans les investissements de la politique de mobilité, les « Park & Ride » représentent au moins 50 millions d’euros. ► Les parkings de grande capacité se posent aux nœuds cruciaux – route et rail –, aussi hors des frontières.

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― Texte : Alain Ducat et Jean-Michel Hennebert ― Infographie : Maison Moderne

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Une mobilité qui plus est durable : l’enjeu est de taille, dans un pays dont les réseaux, routier et ferroviaire, sont de plus en plus saturés. C’est une vieille équation à quelques inconnues pour le Luxembourg, dont le pool d’emplois se remplit plus vite – surtout de main-d’œuvre voisine – que le temps nécessaire aux réseaux importants pour se développer. Parmi les priorités, qui s’étalent sur quelque 2,5 milliards d’euros investis d’ici à 2020, sous le pilotage du ministère du Développement durable et des Infrastructures, les P + R (Park & Ride) constituent des éléments non négligeables. D’une part, parce qu’ajouter de la capacité pour garer les véhicules aux points de rencontre des réseaux – bus et train –, c’est retirer autant de véhicules de la circulation. D’autre part, parce les investissements font leur poids. Rien que l’agrandissement programmé de trois P + R à Rodange, Wasserbillig et Mersch pèse environ 50 millions. Les projets ne manquent pas, y compris aux points frontières, pour prendre le problème à la source, en collaboration avec les voisins. D’ici à 2020, il y aura plus de P + R et ceux qui existent déjà aujourd’hui auront grandi. Tour d’horizon. ◄

30

16 23 50 14 15

38 52 35

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Travaux programmés

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Des chantiers entre rail et route

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Selon une liste confirmée par le ministère de François Bausch (arrêtée fin mars 2015), les chantiers suivants sont programmés d’ici à 2020 pour un montant de plus de 2,5 milliards d’euros. Chantiers ferroviaires : arrêt Pont Rouge (96 millions), doublement de la voie Sandweiler-Hamm (215 millions), poste directeur d’Ettelbruck (98 millions), doublement de la voie Luxembourg-Bettembourg (220 millions), nouvelle ligne ferroviaire à Bettembourg (212 millions), gare périphérique d’Howald (42 millions), tram (565 millions), agrandissement de trois P + R à Rodange, Wasserbillig et Mersch (environ 50 millions). Chantiers routiers : 2 x 3 voies de l’A3 entre la Croix de Gasperich et Dudelange (159 millions), mise à trois voies de l’échangeur à Ettelbruck (pas d’estimation fiable), liaison Micheville (338 millions), couloir de bus près de Pontpierre (4 millions), nouvelle N3 de la gare centrale à Hesperange (74 millions puis 60 millions), fonds de la route du Nord (60 millions), échangeur de Hellange (35 millions), échangeur de Burange (36 millions), pôle multimodal d’Ettelbruck (45 millions), les deux boulevards du Ban de Gasperich (70 millions), amélioration de la N7 (70 millions), contournement de Bascharage (70 millions). J.-M. H. ◄

054 ―

― Juin 2015

4 32

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GL 37

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Économie & Politique Mobilité

P + R Train

Chemins de fer Moins de 200 places Plus de 200 places

P + R Bus

Autoroute Moins de 200 places Plus de 200 places P + R en projet

GL

Le parking de Luxembourg-gare dispose de 634 places. Géré par les CFL, il est plus dévolu aux voyageurs allant vers l’extérieur.

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1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64

P + R (ordre alphabétique)

Nombre de places

Arlon (+Stockem-Viville) (Bel) Audun-le-Tiche (Fr) Bascharage Beggen Belval-Université [A13] Belvaux-Soleuvre Berchem Bertrange-Strassen Bettembourg Bouillon-Luxembourg Capellen Clervaux Cloche d'Or Gasperich Colmar-Berg [A7] Cruchten Diekirch Differdange Dippach-Gare Dudelange Echternachersee Echternacherbrück Elange [A3-A31] Ettelbrück Frisange [A13] Grevenmacher Hettange-Grande (Fr) Höhenhof [A1] Howald-Sud Junglinster + Contournement Kautenbach Kirchberg-Luxexpo Kleinbettingen Kockelscheuer-Luxembourg Leudelange-Gare Lintgen Lorentzweiler Mamer Mersch Mesenich frontière [A1] Münsbach Nennig (All) Oetrange Ottange (Fr) Pétange Raemerich Rodange Roodt-Syre Rumelange Sandweiler Schieren Schifflange Schwebach-Pont Sirzenich (All) Steinfort Tétange Trier-Messepark (All) Troisvierges Volmerange (Fr) Walferdange Wasserbillig Gare Wecker Wiltz Wilwerwiltz Wincheringen (All)

521 167 241 160 1.500 21 167 56 308 2.442 52 145 0 41 27 376 271 89 304 500 75 735 213 268 36 216 0 881 77 82 265 127 567 76 177 125 52 199 261 54 200 55 89 340 160 166 64 80 31 36 118 0 170 175 21 731 148 152 32 77 44 118 44 35

500 à 1.000 prévues en plus entre 2015 et 2016

1.500 prévues en plus entre 2020 et 2025 750 prévues en plus entre 2020 et 2025

518 prévues en plus en 2017, 500 prévues en plus en 2019

2.500 à 4.000 prévues en plus entre 2020 et 2025 251 prévues en plus en entre 2015 et 2016 1.500 prévues en plus en 2017

600 prévues en plus entre 2015 et 2016 893 prévues en plus en 2017, 1.800 prévues en plus en 2019

300 prévues en plus en 2017, 1.800 prévues en plus en 2019

160 prévues en plus entre 2015 et 2016

500 prévues en plus en 2017

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Économie & Politique Loi de 1915

07 Des sàrl toujours plus flexibles ► La réforme du droit des sociétés est sur le métier depuis huit ans, mais vient de faire un bond en avant. ► Le texte a été amendé par les membres d’une sous-commission qui ont surtout voulu assouplir le régime des sàrl pour le rendre plus compétitif. ― Texte : Véronique Poujol ― Photo : Sven Becker Dépoussiérer la loi centenaire… La réforme du droit des sociétés avait été commandée par le gouvernement, en juin 2007, au Labo­ ratoire de droit économique (LDE). Le texte vient d’être revu par la sous­commission de modernisation du droit des sociétés. Sur ses cinq membres, quatre – avocats d’affaires – se sont montrés hyperactifs et ont rendu leur copie, après avoir planché pendant près de neuf mois sur des aménagements qui rendent la version initiale du projet assez méconnais­ sable. Les amendements ont été adressés le 2 avril au Conseil d’État (les Sages avaient retoqué la version initiale et les opérateurs de la place financière, via la Chambre de com­ merce, ne s’étaient pas montrés tendres non plus), qui doit rendre un avis complémentaire. Le contexte – LuxLeaks et compagnie – n’incite guère les autorités à exhiber la très libérale réforme du droit des sociétés, mélange entre le droit anglo­saxon, l’inspiration néer­ landaise et l’ancrage historique dans les droits français et belge. Parmi les modifications apportées à la « loi 1915 », une place de choix est laissée à la réforme du régime des socié­ tés à responsabilité limitée (sàrl), véhicule favori des opérateurs de la place financière, notamment pour l’optimisation fiscale. Le LDE avait proposé de durcir certaines règles. Les députés ont, au contraire, voulu le statut plus compétitif, donc plus flexible. Ainsi, la réforme prévoit l’instauration d’un régime de parts rachetables pour les sàrl, alors que ce n’était permis que pour les sociétés ano­ nymes. La source d’inspiration est ici anglo­ saxonne. Cela offre, soulignent les auteurs des amendements, « une flexibilité complémentaire au régime de la sàrl – flexibilité permise par les textes européens – sans pour autant affecter les droits fondamentaux des associés ». La gérance d’une sàrl pourra donc aussi logiquement annuler des parts rachetées et décider une réduction de capital sans trop de contraintes. « Ce capital autorisé à rebours permet de donner une flexibilité de gestion administrative accrue, notamment dans les cas où des rachats réguliers sont prévus ou si les associés sont nombreux et difficiles à mobiliser pour une décision qui est somme toute purement administrative », note la commission.

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▲ Il fallait dépoussiérer le texte centenaire. Des amendements prévoient quelques coups de balai.

Autre assouplissement non prévu dans le texte initial mais qui risque de faire grincer des dents : les vérifications notariales ne sont pas indispensables lors de la constitution des sàrl, qui « doivent rester une forme sociale simple et flexible ». En cas d’apport des parts en nature, il n’est pas nécessaire d’établir préa­ lablement à la constitution un rapport de réviseur d’entreprise. Idem pour des augmen­ tation de capital en nature. Le projet initial prévoyait aussi de libérer les actions émises par des apports autres qu’en numéraire dans un délai de cinq ans. Cette disposition est passée à la trappe. Parmi les autres amende­ ments, on peut noter : Les pouvoirs accrus des comités de direc­ tion et des directeur généraux : leur champ d’action ne sera plus confiné aux actes de gestion journalière. Leurs pouvoirs de ges­ tion et de représentation vont donc être « consolidés » en vue d’un exécutif fort. La suppression de la limite des 50 % des actions sans droit de vote (comme aux Pays­Bas), la limite constituant « un frein à la libre organisation de la gouvernance ». Ce sont les actionnaires qui détermineront les droits financiers attachés aux actions sans droit de vote ou actions « privilégiées ».

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L’assouplissement des règles lors d’un changement de nationalité d’une société : l’exigence de l’unanimité disparaît, la majorité qualifiée sera suffisante. Les délais de convocation de l’assemblée pour délibérer sur ce changement de nationalité sont raccourcis, les exigences de publication dans deux journaux sont supprimées : ce sera au moins 15 jours avant l’assemblée (et non plus deux fois 15 jours) et une publication dans un seul journal au Luxembourg. Ce dernier point est inquiétant pour les revenus de certains quotidiens qui souffrent déjà du coup de rabot effectué par les ministères dans les avis officiels. La suppression de l’obligation, dans les sta­ tuts, de mentionner le jour et l’heure de la tenue de l’assemblée générale annuelle. Cette disposition devient facultative.

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À signaler enfin que tout acte de dissolu­ tion (y compris sans liquidation) des sociétés civiles et commerciales devra être assorti des attestations des administrations fiscales et des institutions de sécurité sociale dans un but de protection des créanciers publics. ◄ En résumé La réforme du droit des sociétés avait été commandée en juin 2007, par le gouvernement, au Laboratoire de droit économique. Le texte vient d’être retoqué par les membres de la sous-commission de modernisation du droit des sociétés qui y ont apporté des amendements visant, entre autres, à rendre plus flexibles les sàrl.


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Économie & Politique ICT

08 3.14, un cercle à développer ► Basé sur le modèle français de l’École 42, une école informatique gratuite et de haut niveau pourrait voir le jour au Luxembourg. ► Pour l’heure, ses initiateurs cherchent à boucler un budget de l’ordre d’un million d’euros, avec l’espoir d’ouvrir la formation en novembre prochain. ― Texte : Jean-Michel Gaudron

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▲ 42, c’est un cas unique qui fait déjà école.

Dupliqué à Cluj (en Roumanie), sous l’étiquette Academy+Plus, le concept pourrait débarquer aussi au Luxembourg. C’est en tous les cas le vœu pieu d’Antoine Bordier, ancien journaliste free-lance et ancien producteur d’émission de radio, cofondateur d’Academy+Plus et investi désormais dans la mise en œuvre du projet au Luxembourg sous l’appellation 3.14. « Nous manquons de plus d’un millier de développeurs au Luxembourg, explique-t-il à Paperjam. Des entreprises digitales quittent ou ne s’installent pas au Luxembourg à cause de la pénurie locale de développeurs. » Cette École 3.14 serait la première école informatique du pays totalement gratuite, financée par des donateurs – issus tout autant du secteur privé que public – et portée par la Fondation Sel (Smart Education au Luxembourg), en cours de constitution. Elle pourrait concerner, chaque année, une promotion de 70 à 100 étudiants appelés à suivre un cursus sur trois ans et 12 mois de stages cumulés. « Il y a urgence à investir dans l’éducation et former une nouvelle génération de dévelop­ peurs. Cette école a vocation à répondre aux besoins du marché local, mais aussi au niveau

européen en se basant sur une pédagogie inno­ vante et disruptive », indique M. Bordier. Début avril, une délégation luxembourgeoise forte d’une quinzaine de personnes, avec à sa tête le ministre du Travail et de l’Emploi, Nicolas Schmit, s’est rendue à Paris au cœur de l’École 42 et y a rencontré Xavier Niel. Preuve de l’intérêt porté en haut lieu à la démarche. « L’École 42 peut être une excellente source d’inspiration pour nous, a commenté le ministre au sortir de cette rencontre. Je suis persuadé que notre stratégie nationale Digital Lëtzebuerg peut réussir si nous trouvons des moyens innovants pour préparer les personnes à cette transformation vers le numérique. » La balle est désormais dans le camp des donateurs. Antoine Bordier a sorti son bâton de pèlerin pour tenter de prêcher la bonne parole et convaincre les investisseurs publics et privés de s’engager. Le budget de fonctionnement estimé de l’École 3.14 tourne autour du million d’euros, dont un tiers consacré aux équipements (informatiques, infrastructures et réseaux, mobiliers). L’ambition de M. Bordier est de pouvoir faire de ce projet une réalité concrète à compter de novembre 2015. ◄ En résumé Un enseignement gratuit, innovant et disruptif : telle est l’ambition de l’École 3.14, basée sur le modèle de l’École 42 en France et qui est en gestation au GrandDuché. Son lancement dépendra de la capacité à trouver des donateurs publics et privés pour boucler un budget de l’ordre d’un million d’euros.

PHOTO : 42.FR

Trouver les bonnes ressources humaines en ICT fait partie des défis majeurs que les acteurs économiques se doivent de relever. La pénurie des talents est une réalité dans un secteur pourtant essentiel dans l’écosystème. Au niveau de la Grande Région, les estimations tablent sur plus de 10.000 postes qui ne sont toujours pas pourvus. Au niveau européen, cela se compte en plusieurs centaines de milliers. Lors de la dernière édition du Moovijob Tour Delux en mars, l’Adem, Moovijob et le groupement ICTluxembourg ont, par exemple, formalisé un partenariat visant directement à promouvoir les métiers dans la filière numérique, dans le contexte de l’élan apporté par la stratégie Digital Lëtzebuerg, dont l’un des piliers vise à développer des compétences ICT spécifiques au Grand-Duché. L’enjeu est bien évidemment plus vaste que le seul Luxembourg. La Commission européenne a présenté, le 6 mai dernier, un plan d’action en 16 points pour la création d’un marché unique numérique européen. Parmi ces points figure la volonté de « favoriser une société numérique inclusive dans laquelle les citoyens possèdent les compétences nécessaires pour profiter des possibilités qu’offre l’internet et augmenter leurs chances de trouver un emploi ». Les intentions sont nobles, mais le chantier est colossal et commence, notamment, par le développement d’un système de formation adapté. L’entrepreneur français Xavier Niel (fondateur de l’opérateur Free) n’a pas hésité à mettre les pieds dans le plat il y a deux ans, en voulant développer une approche différente, « qui ne repose plus sur les choses classi­ ques que l’on voit depuis toujours, c’est­à­dire un professeur et des élèves, qui s’ennuient, qui en ont marre », expliquait-il au moment de lancer l’École 42, considérée comme la plus grande école privée d’informatique en France, offrant aux jeunes une formation de pointe et, surtout, gratuite, basée sur une pédagogie collaborative, pratique et inclusive. « Le système éducatif ne marche pas. On peut être en échec scolaire et pourtant correspondre à ce qui est un génie en informatique. On peut ne pas avoir le bac et pour­ tant devenir le développeur le plus brillant de sa génération », affirme-t-il.


Économie & Politique Contre les doubles impositions

Au moins 10 éléments probants face au fisc belge

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► L’accord amiable signé par les ministres des Finances belge et luxembourgeois devrait apaiser les tensions nées du traitement fiscal de salariés. ► Un vade-mecum de l’administration précise les preuves admises pour attester de la présence physique sur le territoire d’un État.

Le 16 mars 2015, Pierre Gramegna et son homologue belge, Johan Van Overtveldt, signaient à Luxem­ bourg un « accord amiable », enca­ drant la convention préventive de la double imposition entre les deux pays et, surtout, « le traite­ ment fiscal des professions dépen­ dantes ». Il s’agissait avant tout de donner des règles complémen­ taires, pratiques et praticables, afin que, le cas échéant, un rési­ dent belge travaillant au Luxem­ bourg puisse démontrer aux zélés inspecteurs du royaume qu’il est bien régulièrement salarié au Grand­Duché, où il travaille effec­ tivement. Ce n’était pas évident et les cas de frontaliers belges se disant harcelés (ou au mieux mal compris) par le fisc de leur pays de résidence l’avaient suffisam­ ment démontré, remontant jusqu’aux plus hautes sphères des deux États. L’accord vaut à compter du 1er janvier 2015. Et il est précisé par un vade­mecum très prati­ que, annexé à une circulaire du directeur des contributions datée du 31 mars dernier. Dans le document titré Pré­ sence physique sur le territoire d’un État : preuves, il est d’abord exposé que, côté belge, « le con­ tribuable supporte la charge de la preuve lorsqu’il revendique une exonération basée sur la conven­ tion » (préventive de la double imposition). La présence phy­ sique sur le territoire de l’autre État est à démontrer mais « il ne peut pas être exigé une démonstra­ tion de (cette) présence physique pour chaque jour ». Les exigences doivent aussi être modulées, selon l’activité du contribuable et / ou le type d’activité de son

employeur ou encore la distance domicile­travail. Comme, pour des métiers pas toujours sédentaires, « un contrat de travail et / ou l’attesta­ tion de l’employeur ne sont pas suf­ fisants », il faut pouvoir « fournir annuellement une preuve » de la présence physique sur le terri­ toire luxembourgeois. Sont cités comme moyens de preuve le kilo­ métrage du véhicule, des titres de transport datés pour le train, l’autobus ou l’avion, des listes d’adresses des clients visités (!), des factures, des comptes rendus de réunions ou extraits d’ordre du jour, fiches de présence ou d’enregistrement du temps de prestation par l’employeur…

PHOTOS : MFIN / SIP – DR / PAPERJAM

― Texte : Alain Ducat

▲ Les ministres belge et luxembourgeois ont conclu un accord amiable, précisé par une circulaire, pratique et détaillée.

INDISPENSABLES OU INDICES BIEN PENSÉS Indispensable, mais parfois insuf­ fisant, le contrat de travail est à assortir de pièces constituant « un indice, sans être comme tel déter­ minant », les bulletins de paie avec retenue d’impôt et l’avis d’imposition dans un autre État. Alors, concrètement, le vade­ mecum établit une liste non­ exhaustive de « documents suscep­ tibles de constituer des preuves ». 1 Feuilles nominatives de poin­ tage des heures de travail 2 Documents de transport nominatifs (billets de train, tickets d’avion…) 3 Documents non nominatifs liés aux déplacements (preuves de péage, contraventions…) 4 Factures d’achat de carburant 5 Factures nominatives en rap­ port avec des frais de séjour (hôtel, location de voiture…)

6 Listes de présence à des réunions (extrait de procès­ verbal…) 7 Documents relatifs à des achats de matériel, nourriture, dans le pays d’activité (relevés de cartes de crédit, tickets de caisse…) 8 Factures de téléphonie mobile (roaming) 9 Ordres de mission nominatifs 10 Documents relatifs à des chan­ tiers (localisation précise) sur lesquels la présence du travail­ leur est requise… Il est même prévu que, « exceptionnellement et pour autant que la situation du travail­ leur n’ait pas évolué (même

employeur, mêmes fonctions, même lieu d’activité), les preuves réunies pour une année récente pourront être invoquées pour attester de la présence au cours d’une année antérieure ». Les choses sont donc clarifiées, mais conserver toutes les preuves bien au frais devra toujours faire partie de la prudence élémentaire du frontalier belge, s’il veut un jour pouvoir clamer sa bonne foi contributive. ◄ En résumé L’Administration des contributions dispose d’un vade-mecum précis détaillant les preuves communément admises pour qu’un salarié frontalier puisse attester de sa présence physique sur le territoire de son employeur luxembourgeois.

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Économie & Politique Télécoms

10 Quand le mobile accuse le coût ► Les revenus des opérateurs mobiles ont baissé au Luxembourg en 2014, conséquence logique de la régulation drastique des tarifs maximaux de la terminaison d’appel. ► En attendant la disparition programmée du roaming, les acteurs tendent le dos.

Ce fut la dernière annonce de l’Institut luxembourgeois de régulation sous la direction de Paul Schuh : à quelques heures de la cérémonie de passation de relais avec son successeur, Luc Tapella (voir notre précédente édition en page 44), un communiqué commun publié par l’Institut belge des services postaux et des télécommunications et l’ILR annonçait un accord bilatéral entre les deux régulateurs télécoms permettant d’associer un numéro mobile belge à un réseau luxembourgeois. Autrement dit, une facilité technique permettant de mettre fin à la problématique des frais de roaming (itinérance), puisque l’accord conclu est évidemment bilatéral. Pour l’heure, seul le dernier venu sur le marché, l’opérateur Join (détenu à parité par Join Wireless et Post Luxembourg) a saisi la balle au bond : une aubaine pour celui qui a construit majoritairement son business model sur de telles facilités tarifaires. Cette nouveauté intervient alors que le Conseil européen a repoussé à mi-2018 l’examen par la Commission du texte qui prévoyait l’abolition des frais de roaming sur le Vieux Continent pour le 15 décembre… 2015. Un délai de grâce qui n’est pas anodin au Luxembourg où, comme le rappelle le dernier rapport statistique publié par l’ILR fin avril, le volume des communications entrantes sur les réseaux mobiles luxembourgeois représentait, en 2014, 30,2 % des communications totales terminées sur les réseaux mobiles. « Ce taux dépasse rarement 5 % dans les autres pays européens », indique le rapport, qui pointe donc du doigt l’enjeu économique majeur que représente le maintien, ou pas, de ces tarifs d’itinérance. Les opérateurs mobiles ont déjà dû subir de plein fouet la régulation des tarifs maximaux de la terminaison d’appel, décidée en début d’année 2014 par l’ILR et qui avait notamment ramené les prix des terminaisons mobiles de 8,80 centimes d’euro par minute à 0,98 centime d’euro. Du coup, et pour la première fois depuis bien longtemps, les revenus du secteur des télécoms s’affichent en baisse : selon ce même rapport statistique annuel de l’ILR, le revenu global « mobile »

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― Juin 2015

▲ En 2014, le revenu global « mobile » des opérateurs au Luxembourg s’est replié de 5,2 %, glissant à 534,7 millions d’euros.

s’est replié de 5,2 % en 2014, glissant à 534,7 millions d’euros. « Cette baisse inter vient après des années de croissance continue au Luxembourg, alors que dans la plupart des marchés européens, les revenus baissent depuis quelques années », tempère néanmoins l’ILR dans son rapport. Depuis 2009, les revenus mobiles affichaient une plus forte croissance que les revenus fixes. En 2014, ils ont fondu de 13,2 % à 270,7 millions et se retrouvent ainsi pratiquement au même niveau que les revenus fixes (264 millions d’euros, en croissance de 4,7 %). C’est dans le domaine des revenus au titre des services d’interconnexions internationales entrantes que les baisses de revenus sont les plus sensibles : -49,3 % à 8,72 millions d’euros en 2014 (alors que le volume des interconnexions entrantes n’a diminué que de 9 %), les opérateurs mobiles (-57,1 %) ayant été davantage touchés que les opérateurs fixes (-6,6 %). À noter que ces statistiques 2014 ne tiennent évidemment pas compte des développements liés à l’annulation par le tribunal administratif en mars 2015 de la décision de l’ILR de janvier 2014 sur les tarifs de termi-

nai sons mobiles. Une annulation contre laquelle le régulateur luxembourgeois a d’ailleurs choisi, fin avril, de faire appel. Entre-temps, un nouveau tarif avait été publié par l’Institut, établi cette fois selon un modèle de calcul des coûts dit « LRIC » (long run incremental cost). Un tarif finalement établi à… 0,97 centime d’euros, soit 0,01 centime de moins que celui qui avait fait l’objet de recours de la part des opérateurs ! Il n’est pas exclu que la guerre des prix entre les opérateurs et leur instance de régulation continue encore un moment. En attendant, les investissements continuent de plus belle, les opérateurs injectant dans leur infrastructure en moyenne plus de 30 % de leurs revenus, selon les statistiques de l’ILR. « Ce taux est élevé et en forte augmentation et concerne les investissements lourds dans les infrastructures fixes », indique le rapport. Entre 2013 et 2014, ces investissements ont bondi de 41,7 % à 215 millions d’euros, dont 45,5 millions d’euros (+158,5 %) consacrés au développement des réseaux mobiles de quatrième génération. Une obligation vitale pour chacun des opérateurs, qui ne sont pas en mesure de tordre le coût de ces évolutions technologiques, au risque de se voir distancés… ◄ En résumé Pour la première fois depuis bien longtemps, les revenus du secteur des télécoms s’affichent en baisse au Luxembourg. Une conséquence de la nouvelle tarification des terminaisons d’appel décidée début 2014. Dans le même temps, les opérateurs mobiles tendent le dos en attendant l’éradication des tarifs d’itinérance (roaming) prévue à l’échelle européenne.

PHOTO : LUC DEFLORENNE (ARCHIVES)

― Texte : Jean-Michel Gaudron


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Entreprises Voici un aperçu des principales informations de ces dernières semaines, à lire en détail sur www.paperjam.lu. Retrouvez ensuite 12 sujets clés sélectionnés par la rédaction. Du nouveau sur le marché de l’IT au Luxembourg, avec la création de BHS Services, une nouvelle SSII dont le positionnement est d’assister ses clients dans la recherche de solutions IT innovantes, pragmatiques et efficaces, tenant compte des exigences régulatoires. B comme Buck Xavier (président du conseil d’administration) ; H comme Houwen Marco (son complice de toujours avec qui il a déjà cofondé Datacenter Luxembourg, EuroDNS ou encore Luxcloud, et administrateur de BHS) et S comme Schiltz JeanLouis (administrateur), l’ancien ministre des Communications et des Médias, avocat spécialisé, entre autres, dans le domaine ICT. Le successeur de Marco Houwen à la tête de Luxcloud n’est autre que Joost Pisters, arrivé fin 2011 et qui occupait les fonctions de head of product development. En l’espace de cinq mois, le groupe français Carrefour vient d’ouvrir son deuxième point de vente Carrefour Express au Grand-Duché. Après une première implantation quartier Gare de la capitale en octobre dernier, c’est à Esch que le distributeur vient d’ouvrir un espace de vente plus grand, d’une surface de 350 m2. Le groupe admet regarder d’autres opportunités sur le pays via sa filiale belge, sans qu’aucun contrat de bail n’ait été signé jusqu’à présent. À la veille d’une réunion à l’Office national de conciliation autour du litige entre le personnel et la direction de l’Agence luxembourgeoise pour la sécurité aérienne, pour la mise en place d’une convention collective, le

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président du conseil d’administration s’est dit prêt à discuter. Du coup, le syndicat OGBL a suspendu la procédure de conciliation. Tango a complété début avril son catalogue de programmes TV francophones en intégrant trois chaînes du poids lourd français Canal+ : D8, D17 et iTélé, qui font désormais partie de son offre de divertissement. Telindus, filiale de Belgacom, a vu son chiffre d’affaires 2014 progresser de 37 % en 2014, atteignant plus de 110 millions d’euros, dépassant l’objectif des 100 millions annoncé un an plus tôt. La société précise que la solidité de ses performances opérationnelles résulte principalement du contrat de services remporté fin 2013 auprès de la société Innovative Solutions for Finance (IS4F), qui sert les institutions issues de l’ancien groupe Dexia. Avec quelque 400 personnes employées, Telindus affiche une progression de 7 % de ses effectifs. Grâce à son expérience dans les nanotechnologies, le List vient de décrocher un partenariat avec le géant industriel suédois Sandvik, via sa filiale Sandvik Machining Solutions. Objectif : contribuer au développement d’un revêtement nanocomposite pour les systèmes d’outillage, pour lequel le groupe scandinave « détient une compétence exclusive dans ce domaine ». Le conseil d’administration de la SES se féminise un peu plus : pour remplacer les départs de René Steichen (l’ex-président) et de Miriam Meckel (Université de Saint-Gall), les actionnaires ont approuvé la nomination de Katrin Wehr-Seiter (directrice générale de la société BIP Investment Partners) et Anne-Catherine Ries (conseillère politique principale auprès du Premier ministre et du

ministre des Médias et des Communications, en charge de la coordination de la stratégie Digital Lëtzebuerg). Dans le même temps, Romain Bausch, l’ancien CEO de SES, a été élu en tant que président du conseil.

une plateforme d’auto-édition pour la création libre, la distribution et la monétisation de e-magazines à destination des tablettes. Elle a reçu un prix de 50.000 euros ainsi que six mois de services gratuits avec Nyuko Luxembourg.

En prenant sous sa coupe les sept crèches KidsCare, dont la première avait été créée en 1994 par Béatrice Martin, le groupe Lavorel s’affiche aujourd’hui parmi les plus grands employeurs du pays. Depuis l’établissement de ses structures en 2012, il a procédé à une rapide croissance via les acquisitions du réseau Ribambelle (11 crèches et cinq foyers de jour) en décembre 2013, puis de Children’s World en juin 2014 (les 9e et 10e crèches de la marque ouvriront prochainement) et de Villa Wichtel (cinq sites) en novembre dernier. Le groupe gère désormais 36 crèches et foyers, proposant au total 1.400 places pour les enfants, entourés par 360 employés.

Numen Europe, spécialisé dans le traitement de données et documents sensibles, et qui fête son 20e anniversaire, annonce le lancement au Luxembourg de l’activité Mailroom, le premier centre de gestion externalisée de courriers entrants opérant sur le mode J. Installée sur le site de Howald, cette activité traite actuellement par jour 10.000 plis (enveloppes courrier) ainsi que des colis et transports express.

C’est la société Wondermags qui a remporté la première édition de « Pitch your start-up » organisée au Luxembourg par Docler Holding, en collaboration avec le Luxembourg ICT Cluster et animée par Luxinnovation. Wondermags est

La Société nationale des habitations à bon marché a inauguré la résidence Altaïr dans le quartier de Grünewald, à proximité du Rehazenter au Kirchberg. Signé par le bureau Steinmetzdemeyer, ce projet comprend 20 logements sociaux destinés à la location. Il complète un ensemble de trois immeubles au total, les deux autres résidences (Deneb et Vega) étant destinées à la vente.

L'immeuble Altaïr offre 20 nouveaux logements sociaux au Kirchberg.


Entreprises Brèves

23

C'est le nombre d'entreprises (16 nouvelles et 7 renouvellements) qui se sont vu remettre le label ESR « Entreprise socialement responsable » par l’INDR. Cela porte à 90 le nombre d’entreprises labellisées au Grand-Duché.

Le dernier Luxembourgeois membre du comité de direction de Cargolux, Marcel Funk, a quitté son poste de vice-président fin avril, avant de quitter la compagnie d’ici à la fin de l’année. Les raisons de ce départ n’ont pas été précisées. M. Funk était entré chez Cargolux il y a 40 ans. Il y avait gravi tous les échelons et avait été nommé, en 2004, chef des équipages et, en 2008, responsable de la planification des vols. Il était vice-président du comité de direction de la compagnie depuis un an.

surtout axé sur l’Europe, alors que FedEx est beaucoup plus fort globalement à l’international et nous donnera accès à un réseau plus vaste qu’aujourd’hui », précise Hjoerdis Stahl, directrice poste et courrier chez Post. Le groupe informatique belgoluxembourgeois Systemat s’émancipe. Il a établi un nouveau bureau à Metz et souhaite s’y positionner comme « un intégrateur local ». Plus de deux ans après la proposition de modification de la loi sur l’organisation du secteur des

Cargolux a perdu le dernier membre luxembourgeois de son comité de direction : le vice-président Marcel Funk a démissionné de ses fonctions.

Le PwC’s Accelerator, structure d’accompagnement de concepts et entreprises technologiques, s’offre un nouveau managing director en la personne de Cyrille Foillard. Cet ancien membre de la direction européenne d’Amazon et administrateur indépendant du groupe Foyer pilotera donc le vaisseau aux côtés de son instigateur Laurent Probst. Début avril, le transporteur américain FedEx a lancé une OPA amicale sur son concurrent néerlandais TNT Express, pour un montant de 4,4 milliards d’euros. Vu du Luxembourg, cette opération n’est pas anodine, car Post Group détient 50 % du capital de TNT. Mais l’entreprise publique y voit surtout une belle opportunité de développement. « TNT est

taxis, les changements pour les clients et les professionnels se font toujours attendre. Voulu à l’origine pour faire baisser le prix des courses, le projet bloque désormais sur des questions de réglementation. « C’est une longue histoire qui commence sérieusement à devenir louche », regrette Olivier Gallé, président de la Fédération des taxis, qui vise directement le ministère du Développement durable et des Infrastructures, coupable à ses yeux d’« ajouter des critères irréalisables » et « de ne pas écouter le retour d’expérience qui vient du terrain ». Le ministre François Bausch s’est défendu en répondant, à Paperjam.lu, qu’il est « persuadé que M. Gallé ne représente pas le secteur des taxis en entier ».

Les fondateurs de l’application mobile CityHour, créée en 2013 et lancée aux États-Unis par la société TrueBear Corporation, ont choisi le Grand-Duché pour étendre leurs activités en Europe avec comme point de départ le Technoport de Belval. À l’intersection des réseaux sociaux, de la technologie de géolocalisation mobile et des besoins pour les utilisateurs de nouer des contacts professionnels, CityHour a été sélectionnée par MacWorld / iWorld lors de son Innovation Showcase en 2014. Elle est arrivée discrètement mi-mars au Technoport d’Esch. L’équipe de deux personnes vise de nouveaux développements, dont deux recrutements au Luxembourg d’ici à la fin de l’année. À la demande de l’actionnaire Promobe Finance, qui en détient un tiers des parts sociales, la société Gravity Sport Management a été placée en liquidation volontaire. « Pour l’instant, cette mise en liquidation ne touche en aucune façon les collaborateurs et les pilotes, ni les engagements pris avec des tierces personnes physiques ou morales », a précisé le groupe Genii, propriétaire des deux autres tiers, et qui avait contesté la demande de mise en liquidation volontaire, formulée le 9 mars 2015 par Promobe, sous prétexte que le capital social de la société (31.500 euros) avait été absorbé par les pertes. Les représentants de Genii Capital au conseil d’administration de Gravity ont été nommés liquidateurs de la société.

20.000

annonces via l'app d'Immotop

Immotop.lu annonce le lancement d’une nouvelle version encore plus performante et adaptée aux besoins des utilisateurs luxembourgeois de son application mobile pour smartphones. Développée intégralement en interne, elle permet un accès facilité à plus de 20.000 annonces et permet désormais des recherches par géolocalisation.

La société luxembourgeoise Wordbee, qui a développé une plateforme collaborative de traduction, et son fondateur et CEO José Vega, ont été sélectionnés pour l’édition 2015 du Red Herring Top 100 Europe Awards, l’un des plus prestigieux événements internationaux récompensant les sociétés technologiques les plus prometteuses. Face à ce qu’elle considère comme un risque de contournement du droit du travail et de celui de la Sécurité sociale, du fait de l’utilisation d’un statut de faux indépendant, la Chambre des salariés s’est prononcée contre le projet de loi visant à permettre la création de sociétés à responsabilité limitée simplifiée : les fameuses sàrl à un euro. La CSL propose une ébauche de mécanisme impliquant davantage l’Inspection du travail et des mines pour éviter toute fraude, et préconise par ailleurs une obligation de constitution de réserves qui ne serait pas plus exigeante que celle applicable aux sàrl classiques. MyHippocrates, le projet de logiciel e-santé destiné à faciliter l’accès aux données médicales du patient, quel que soit l’environnement de travail du médecin, a été sélectionné par le jury international de l’accélérateur européen Fiche (Future Internet Challenge eHealth) pour entrer en phase 2 d’accélération. Initiée par la société luxembourgeoise heMarketsTrust, c’est la seule entreprise luxembourgeoise présente à ce stade de la compétition. Cette phase 2 consiste à présenter un proof of concept à la fin du mois de juin. Chaque équipe sélectionnée recevra, via l’accélérateur Fiche, 65.000 euros de subventions européennes pour développer son projet. Les agences de communication luxembourgeoises Concept Factory et Interact, épaulées par des experts basés à Paris, New York et Washington, ont orchestré au

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Entreprises Brèves Amal Choury (e-Kenz) a été reconduite en tant que présidente d'Eurocloud Luxembourg.

niveau du marketing et de la communication le lancement d’Edan, une nouvelle chaîne TV de divertissement en langue française, dans 23 pays d’Afrique subsaharienne via les bouquets Canal+. Positionnement de marque, identité visuelle, discours de marque, communication digitale, réseaux sociaux, relations presse : les deux agences luxembourgeoises n’ont pas fait de la figuration, mais ont bel et bien assumé la responsabilité et joué un rôle majeur sur les nombreux volets stratégiques du projet (lire aussi l’article sur les 20 ans de Concept Factory en page 73).

Plus de deux ans après avoir rompu son partenariat avec le Qatar, Cargolux se tourne vers un autre émirat de la péninsule arabique, via la création d’une joint-venture avec Oman Air. Objectif annoncé : « Créer de nouvelles opportunités. » Concrètement, l’accord prévoit la possibilité pour Cargolux d’utiliser la flotte d’Oman Air, ainsi que ses installations aéroportuaires, pour desservir ses clients. La compagnie du sultanat bénéficiant pour sa part « des innovations introduites par Cargolux au cours de ces dernières années » et de la possibilité d’étendre son champ d’action.

L'IBBL va participer au projet européen de recherche contre le cancer Cancer-ID.

La biobanque luxembourgeoise IBBL va contribuer au programme de recherche européen Cancer-ID. Rassemblant 33 partenaires de 13 pays, c’est le projet qui aura le plus de retombées concrètes pour les patients au Grand-Duché. Ce nouveau consortium européen disposera d’un budget total de 14,5 millions d’euros. Pour l’IBBL, intégrée sous l’ombrelle du Luxembourg Institute of Health depuis le 1er janvier, cela représente le plus gros chantier de recherche international jamais mené. Sa quote-part de 725.000 euros sera notamment consacrée à veiller à améliorer les conditions de prélèvements sanguins, à valider les nouveaux protocoles et à construire une démarche qualité autour des résultats obtenus.

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Plus de trois quarts des détenteurs d’une voiture proposée par leur employeur ne sont pas prêts à renoncer à cet avantage, même contre une hausse de salaire, révèle une étude de LeasePlan. Selon les derniers chiffres de la Fédération luxembourgeoise des loueurs de véhicules, les voitures de leasing représentent 21 % du parc automobile actuel et près de 50 % des ventes enregistrées dans le pays. Un marché qui « pèse » quelque 400 millions d’euros par an. Sur les bases du concept ZiDCard, e-thicHR se prépare à sa mise sur le marché, avec une nouvelle structure. L’algorithme de traitement des candidatures anonymes se prolonge d’un outil plus vaste de gestion des RH (lire l’article en page 78).

Amal Choury (fondatrice et CEO d’e-Kenz) a été reconduite dans ses fonctions de présidente de l’association Eurocloud Luxembourg. Ses deux vice-présidents sont Yves Reding (EBRC) et Frank Lacroix (IBM). Sur la feuille de route 2015 de l’association figurent les discussions en cours portant d’une part sur l’amélioration des mécanismes de financement pour les PME qui doivent être adaptés au domaine du cloud computing et d’autre part, sur l’application de la loi modifiant l’article 567 du code du commerce relative à la réversibilité des données en cas de faillite d’un prestataire cloud. L’Institut luxembourgeois de régulation (ILR) a infligé une amende de 10.000 euros à l’opérateur de télécommunications Coditel (qui commercialise ses services sous la marque Numericable) pour ne pas être en règle avec certaines informations obligatoires. Il est reproché à Coditel de ne pas avoir proposé aux consommateurs une fiche

bergeur luxembourgeois Root a été la cible des dirigeants de la multinationale d’origine japonaise. La société, hébergée chez LuxConnect à Roost, était visée pour avoir offert l’asile à une quinzaine de sites de téléchargement illégaux de films. Fondée en 2003 par quatre étudiants, la société appartient depuis 2013 au groupe chypriote XBT Holding Inc, après avoir été détenue un temps par le groupe luxembourgeois DCL. Xavier Bettel la joue discrète : invité à détailler en commission parlementaire le contenu de la visite de promotion menée en début d’année à Seattle et à San Francisco, le Premier ministre n’a pas souhaité répondre à la demande du député CSV Laurent Mosar de donner le nom des 14 entreprises rencontrées, pour « respecter la nécessaire relation de confiance » établie avec ces prospects.

L'ILR a infligé 10.000 euros d'amende à Coditel.

signalétique téléchargeable à partir du site internet pour son produit « Pack Trio Fiber 2000 », en dépit de nombreuses injonctions de la part de l’ILR. Le régulateur a fait aussi remarquer que deux autres offres de Coditel présentent des défauts, à savoir une différence de prix selon qu’ils soient consultés sur le site internet ou sur la fiche signalétique. La publication par le site WikiLeaks de milliers de documents piratés auprès de la firme Sony Pictures a permis d’apprendre que l’hé-

Commercialisée depuis le 24 avril aux États-Unis, l’Apple Watch, le premier produit lancé en grande pompe sous l’ère Tim Cook par la marque à la pomme, ne devrait pas être disponible au Luxembourg avant l’été… sans pour autant que cela soit sûr ! Aucune information n’a encore filtré sur le sujet, pas plus du côté du département Communication d’Apple que des revendeurs locaux de la marque (Lineheart, Saturn ou encore Hifi International).


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Entreprises Brèves

Aux prises avec des ennuis judiciaires à Monaco, Yves Bouvier, le principal actionnaire du Freeport luxembourgeois, avait annoncé vouloir prendre un peu de recul avec ses responsabilités. C’est désormais chose faite, puisqu’il a cédé la présidence du conseil d’administration de la société à Olivier Thomas, un conseiller en art français entré au sein du CA en 2014. Un conseil qui s’enrichit de deux nouveaux membres : l’ancien ministre et député européen (LSAP) Robert Goebbels et l’ancien directeur de la fiscalité au ministère des Finances et ambassadeur Alphonse Berns.

Le groupe luxembourgeois KarpKneip a été choisi par la justice française pour reprendre une partie des activités de Trabet, une société mère d’un groupe familial spécialisé dans les travaux publics, basée à Illkirch-Graffenstaden, en périphérie de Strasbourg, et qui était placée en redressement judiciaire depuis le 9 février. Le tribunal de Strasbourg a ordonné la liquidation judiciaire de la société pour permettre une reprise de l’activité et du personnel, à dater du 16 mai. Le groupe luxembourgeois d’aviation d’affaires Luxaviation a signé un accord avec China Minsheng Investment (CMI), le

Yves Bouvier a cédé la présidence du Freeport luxembourgeois.

Depuis le 21 avril dernier, et jusqu’au 22 mai, des millions d’élèves de 72 pays dans le monde (pour plus de 80 langues) planchent sur les épreuves concoctées par l’OCDE dans le cadre de l’étude internationale dite Pisa (Program for International Student Assessment). Des tests réalisés principalement au travers d’un questionnaire en ligne, via une technologie élaborée… au GrandDuché, par les équipes de l’ancien CRP Tudor désormais intégré au Luxembourg Institute of Science and Technology (List). Un projet qui a démarré fin 2002, testé pour la première fois grandeur nature en 2007.

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plus grand conglomérat privé chinois, pour l’acquisition d’une centaine de jets d’affaires (lire aussi l’article sur Luxaviation en page 68). C’est le journaliste du Wort Christophe Langenbrink qui a remporté l’édition nationale 2015 du Citi Journalistic Excellence Award, pour un article dédié à l’avenir de la presse digitale. Les deux autres journalistes nommés à cette occasion étaient JeanMichel Gaudron (Paperjam) et Stefan König (Tageblatt). L’immeuble de bureaux One on One, au 1, route d’Esch, en a terminé avec ses travaux de gros œuvre. Le développeur immobilier Ikogest, l’entreprise générale

Soludec et les différents corps de métier ont célébré la traditionnelle fête du bouquet pour un site qui proposera 3.000 m2 de bureaux disponibles à la location dès la fin 2015.

sereinement d’établir un nouveau record annuel. L’année dernière, Luxair avait transporté pas moins de 1.087.246 passagers, ce qui représentait un bond de 19 % par rapport à 2013.

Le One on One sera prêt à la location fin 2015.

Pour la deuxième année consécutive, Cargolux a réalisé des résultats positifs en 2014, même si la performance est bien moins importante qu’en 2013 : un chiffre d’affaires de 2,1 milliards de dollars (1,9 milliard d’euros) et un bénéfice de 2,9 millions de dollars (2,6 millions d’euros) contre des bénéfices de 7,6 millions de dollars (6,9 millions d’euros) un an plus tôt. Lors de la présentation des résultats, les dirigeants de la compagnie se sont surtout attelés à souligner « la nécessité de réaliser des efforts pour permettre la survie de la compagnie ». Les coûts liés au personnel, représentant 12 % des charges, ont ainsi augmenté de 7 % en 2014. Une situation jugée non tenable à terme par le CEO Dirk Reich, qui rappelle que d’ici à 10 ans, le montant global des économies à réaliser pour la compagnie s’élèverait à « quelque 400 millions de dollars », soit un peu plus de 361 millions d’euros. La compagnie aérienne Luxair reste sur une trajectoire de croissance forte au 1er trimestre 2015 : elle annonce ainsi une hausse de 10 % du nombre de passagers transportés. Ils ont été 246.189 entre janvier et mars 2015, contre 223.865 durant la même période de 2014. De quoi envisager

Bien qu’affichant un résultat net en baisse de 150 à 131 millions d’euros sur un an, la Société européenne des satellites (SES) reste confiante et envisage, sur base de ses résultats du premier trimestre de cette année, un taux de croissance de son chiffre d’affaires et de son Ebitda de 1 % pour 2015 (lire l’interview du CEO Karim Michel Sabbagh en page 12). Le groupe de distribution Cactus annonce la fermeture de son magasin à Ettelbruck le 1er juillet prochain, en raison de loyers jugés démesurés. En location depuis 2000 auprès de la Coopérative des chemins de fer (également propriétaire de l’ancienne Coopérative de Bonnevoie, remplacée l’automne dernier par… un Cactus Marché), l’enseigne a choisi de ne pas renouveler le bail de 15 ans qui arrivait à terme cette année. Les 27 employés du magasin seront réaffectés sur d’autres sites du groupe, en attendant de trouver une autre localisation dans le nord du pays.


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Entreprises Luxaviation

01 Champion mondial, mal-aimé chez lui

― Texte : Véronique Poujol

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Le groupe luxembourgeois d’aviation d’affaires, Luxaviation, a réussi une opération qui le hisse dans le monde des très grands, avec l’achat de 100 % du capital de son concurrent suisse Execujet Aviation Group, avec son millier d’employés, une flotte diversifiée de 165 avions et un chiffre d’affaires qui avoisinera les 500 millions de dollars cette année. « Cette acquisition fait de nous le deuxième plus grand opérateur au monde après l’américain Netjet et le premier au dehors des États-Unis », se félicite Patrick Hansen, le CEO de Luxaviation, dans un entretien à Paperjam à bord d’un Cessna Citation reliant Luxembourg à Bruxelles puis Paris-Le Bourget pour un mini-tour du propriétaire. L’intégration d’une compagnie comme Execujet fait en effet passer la société luxembourgeoise, qui avait multiplié les emplettes au cours des trois dernières années, sur une autre planète en étendant la zone de couverture à 18 « bases », un peu partout dans le monde, notamment dans des zones de forte croissance pour une telle activité. Luxaviation devient surtout un opérateur global dans l’aviation d’affaires, du transport de passagers aux opérations de maintenance

▲ La flotte de Luxaviation va passer à 250 avions et se diversifier.

des avions qui ne lui appartiennent pas en propre (à l’exception de sept appareils qui vont d’ailleurs bientôt sortir de son portefeuille, car ils ne correspondent plus au modèle d’affaires). Les appareils font l’objet de contrats avec leurs propriétaires, soit pour l’entretien et les opérations en vol, soit pour leur location (activité de charter), étant donné que ces avions sont rarement utilisés tous les jours par leurs propriétaires. Pour le patron de Luxaviation, sa compagnie et Execujet sont des sociétés « très complémentaires ». Il n’y a donc pas de dégraissage à attendre dans les rangs des employés du nouveau groupe qui en compte désormais 1.550. « Il est très clair qu’il fallait nous consolider sur le marché. Nous voulions atteindre la taille critique depuis trois ans. Nous l’avons réalisé il y a deux ans avec l’acquisition du belge Abelag. Aujourd’hui, nous allons devenir une

PHOTOS : DR

► L’opérateur d’aviation d’affaires Luxaviation a franchi un nouveau cap avec l’acquisition de 100 % de son concurrent suisse Execujet. ► La transaction hisse la société luxembourgeoise au rang de numéro deux mondial, avec une flotte de 250 avions et plus de 1.500 employés. ► Pour autant, la compagnie ne trouve pas, au Grand-Duché, un écho à ses demandes d’établissement d’installations de maintenance dignes de ce nom.


Entreprises Luxaviation compagnie européenne profitable à long terme, affirme-t-il. Il fallait qu’on se développe sur les marchés en Asie, au Moyen-Orient et en Afrique, qui sont les marchés de croissance de l’avenir. » Pour l’heure, et comme dans les opérations de rachat successives réalisées par Luxaviation ces trois dernières années, Execujet va conserver son nom, son identité et la plupart de ses dirigeants, mis à part son fondateur, l’Irlandais Niall Olver qui quitte la direction pour devenir conseiller. Du coup, Patrick Hansen hérite de la présidence du conseil d’administration. Le montant de l’acquisition n’a pas été rendu public. « C’est un prix à neuf chiffres », se contente de dire le CEO. Comment cet achat a-t-il été financé par une compagnie qui, à ses débuts il y a sept ans, était valorisée à un million d’euros et dont la valeur aujourd’hui atteint les neuf chiffres ? « D’abord, notre propre cash flow, il y a eu ensuite un peu de financement bancaire – mais pas par un établissement luxembourgeois – et en troisième lieu les fonds de private equity », répond M. Hansen. En début d’année, son groupe avait levé sur les marchés financiers sous la forme d’obligations 30 millions d’euros dans deux opérations successives de 10 puis 20 millions d’euros. Une autre partie des fonds vient de CMI (l’un des plus grands fonds de private equity en Chine qui compte dans son actionnariat 59 grands industriels chinois), avec lequel Luxaviation avait conclu au mois dernier un accord de partenariat en matière de leasing d’avions privés. CMI devrait d’ailleurs entrer dans le capital de Luxaviation, « mais pas plus d’un tiers », indique le CEO du groupe, qui détient à titre

Patrick Hansen, le CEO de Luxaviation, a des plans ambitieux pour développer l'infrastructure au Findel. ▼

Le groupe d’aviation d’affaires doit se contenter au Luxembourg d’un hangar « non viable », à faire rougir les autorités luxembourgeoises. personnel un tiers de la compagnie et n’entend pas passer la main. « J’essaie de rester maître à bord aussi longtemps que possible, et lorsque je dis moi, ça veut dire aussi mes amis luxembourgeois. » Ceux qui, comme Philippe Kaufmann (avec lequel il a créé les fonds Edison Capital Partners et Saphir, ce dernier véhicule ayant racheté la brasserie Diekirch), Claude Mack ou l’avocat René Faltz, l’ont accompagné dès les débuts un peu chaotiques de la compagnie et sa flotte de deux avions. En ce temps-là, Luxaviation était encore aux mains d’un petit oligarque russe, Nicolay Bogachev, qui fut longtemps le chouchou des autorités luxembourgeoises, à tout le moins d’un ministre socialiste de l’Économie, avant de finir en disgrâce, à moitié ruiné.

UN MILLIARD DE CHIFFRE D’AFFAIRES D’ICI 2019 L’opération Execujet, en gestation depuis le mois de septembre 2014, a exigé une réorganisation de la société mère au Luxembourg, avec la constitution toute récente d’une holding au capital de 110 millions d’euros. « L’actionnariat a été simplifié, la dette restructurée au niveau de la nouvelle holding, ce qui devrait faciliter l’arrivée de nouveaux investisseurs », indique M. Hansen. Et plus tard, sans doute, une entrée en Bourse à l’agenda de Luxaviation à l’horizon de 2017, si les conditions de marché s’y prêtent. Le listing, s’il doit se faire, se fera à la Bourse de Hong Kong. Une seconde cotation à la Bourse de Luxembourg n’est pas exclue, mais n’est pas une priorité, vu l’étroitesse du marché et son peu d’activité, donc de liquidités. L’ouverture du capital doit servir la croissance de Luxaviation qui a pas mal d’appétit et une shopping list (mais pas aux États-Unis, selon son CEO) encore bien remplie. L’objectif de la compagnie, qui doit réaliser un chiffre d’affaires de 500 millions de dollars cette année dans un secteur qui permet de dégager une marge Ebitda de 10 % environ, est d’atteindre le milliard de dollars à l’horizon de 2019. Ça passera forcément par de nouvelles acquisitions. En attendant, l’opérateur luxembourgeois va calmer son appétit vorace d’une petite année, qui lui permettra de digérer cette dernière opération et de parfaire la structuration d’un groupe qui va peut-être devoir se trouver un nouveau nom. La réflexion devrait aboutir au mois de juin : « Chez nous, tout va très vite. Nous allons maintenant développer notre croissance organique pendant plus d’un an. Il s’agit désormais d’intégrer ce que nous avons. »

Execujet dispose d’AOC, c’est-à-dire de licences pour opérer des vols commerciaux en Suisse, en Grande-Bretagne et au Danemark, qui s’ajoutent aux licences déjà dans les mains du groupe Luxaviation. « Nous avons neuf licences en Europe et huit autres à travers le monde, c’est suffisant et satisfaisant pour l’intérêt de nos clients », assure le dirigeant. L’intégration de la compagnie suisse permet aussi à Luxaviation de consolider ses activités dans la maintenance et l’entretien des avions pour le compte de ses clients. Elle a hérité, entre autres, d’un premier centre opérationnel à Dubaï qui fait travailler 150 personnes et d’un second en Afrique du Sud qui emploie une centaine des personnes. Ces bases complètent celles de Bruxelles et de Paris-Le Bourget. Au Luxembourg, paradoxalement, le groupe d’aviation privée peine, depuis deux ans, à obtenir les autorisations pour construire un centre de maintenance et d’opérations en vol et doit à l’heure actuelle se contenter « d’un hangar non viable », qui occupe trois personnes avec des opérations limitées sur le plan technique. Il est possible d’y changer des ampoules à l’abri de la pluie ou d’effectuer de menues réparations, mais pas davantage, l’infrastructure louée au Findel ne s’y prêtant pas. « Il est impossible de faire ici de la maintenance pour 250 avions », assure le CEO. Il est vrai que comparé aux installations du Bourget ou de Zaventem, le hangar du Findel devrait faire rougir les autorités au Grand-Duché. Et c’est peu dire. L’état des lieux pourrait faire croire que dans son propre pays, Luxaviation n’est pas la mieux servie des compagnies d’aviation. Ce n’est pas faute d’avoir demandé aux autorités de gestion de l’aéroport les autorisations nécessaires pour installer une base opérationnelle capable de faire travailler quelques 150 personnes dans la maintenance et le dispatching des avions en vol. Les plans d’architecte sont prêts depuis deux ans au moins. L’argent aussi : une quinzaine de millions d’euros serait sur la table, selon son dirigeant qui n’attend plus que le feu vert des autorités. Un rendez-vous est du reste imminent avec le ministre du Développement durable et des Infrastructures, François Bausch, pour en discuter. Et plus si affinités… ◄ En résumé L’opérateur d’aviation d’affaires Luxaviation a franchi un nouveau cap avec l’acquisition de 100 % de son concurrent suisse Execujet. Le voila numéro deux mondial du secteur, avec une flotte de 250 avions, plus de 1.500 employés et un chiffre d’affaires prévu de 500 millions de dollars en 2015. Pour assurer son développement, Luxaviation cherche à développer au Findel des activités de maintenance. Mais jusqu’à présent, les autorités font la sourde oreille.

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Entreprises Eicher by Rodenbourg

02 Reprise en plusieurs dimensions ► Michel Rodenbourg s’est lancé un nouveau défi en reprenant Eicher Frères. ► Rebaptisée Eicher, l’entreprise familiale mise sur le 2.0 pour conquérir de nouveaux marchés. ► Une start-up dans l’impression 3D vient compléter cet univers en mouvement. ― Texte : Thierry Raizer ― Photo : Mike Zenari

Pousser la porte d’Eicher Frères, route d’Arlon à Strassen, c’est un peu retomber en enfance. Entre les pots de gouache et les nombreux articles scolaires, cette caverne d’Ali Baba aux mille et une références s’étend jusqu’au secteur des travaux publics avec une gamme de niveaux et de lunettes topographiques haute précision. La variété des produits et une spécialisation dans la livraison sur mesure ont convaincu Michel Rodenbourg, figure bien connue du commerce grand-ducal, de reprendre le flambeau début 2015, lorsque la deuxième génération de l’entreprise familiale fondée en 1936 a choisi de prendre sa retraite. Transmission ou arrêt de l’activité malgré un capital de réputation et l’expérience de neuf collaborateurs disposant d’une vingtaine d’années d’ancienneté en moyenne ? La réponse a été trouvée avec le cabinet de conseil Tenzing Partners. L’option retenue a été celle de la transmission dans la continuité, les cédants participant à la période de transition. En cinq mois, l’affaire était bouclée. « Le potentiel de développement est impor­ tant », déclare Michel Rodenbourg. L’ancien président de la Confédération luxembourgeoise du commerce s’implique pleinement dans ce nouveau projet. « Le marché des four­ nitures de bureau est mature, mais nous pou­ vons nous distinguer dans notre approche tailor-made. Nous voulons aussi compléter notre gamme dans le domaine des beaux­arts, car il manque une offre. » À la fois investisseur et entrepreneur, il entend effectuer un transfert de connaissances tout en modernisant les flux internes et la manière de délivrer les services, avec un accent 2.0 prononcé. « J’ai rarement vu une entreprise avec un tel capital sympathie », se réjouit Michel Rodenbourg. Mais le secteur du matériel de bureau, comptant un nombre restreint d’acteurs spécialisés, présente la particularité de proposer des marques et des produits similaires. D’où la volonté de se distinguer par une valeur ajoutée dans le service et l’approche marketing. « Nous voulons continuer dans le créneau d’une offre vaste en optimisant la logistique et la communication », ajoute le

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▲ Michel Rodenbourg a repris Eicher, Delphine Masson a fondé Bulb Zone. Et les destins changent de dimension.

repreneur. Un web shop doit venir sous peu pour « se remettre à la page » et augmenter les ventes hors des frontières. Deux personnes ont déjà été embauchées dans la foulée d’une nouvelle dynamique qui s’oriente sur plusieurs dimensions. Dans tous les sens du terme. Toujours par l’entremise de Tenzing Partners, un autre projet, pas si éloigné que cela du cœur de métier d’Eicher, a séduit Michel Rodenbourg : l’impression en 3D ou additive manufacturing. Considérée par d’aucuns comme la troisième révolution industrielle, cette technologie permet de concevoir des objets pour la vie quotidienne, mais aussi des applications industrielles par assemblage de matière. Dans ce cas, le plastique est prisé par l’équipe de Bulb Zone, une start-up fondée en Moselle par un couple belgo-français, Pascal Poeck et Delphine Masson, passionnés de la technologie et surtout de l’univers de création collaborative qui s’est bâti autour de cette dernière. « Tout a débuté par une activité de tissage de perles que j’effectuais à mi­temps en France. J’ai ensuite été tentée par les imprimantes 3D, je me suis prise au jeu, j’ai troqué mes aiguilles contre des tournevis », se souvient Delphine Masson,

qui se définit volontiers comme un couteau suisse. De l’envie d’apprendre sont nées des réalisations « gadgets », comme des lampes Led installées dans le sac à main de la jeune femme. L’envie d’entreprendre a suivi. Mickaël Captant les a rejoints pour le volet IT et la structure Bulb Zone, devenue société, a passé la frontière avec le concours de Michel Rodenbourg. L’objectif est d’augmenter une activité d’e-commerce avec la vente en ligne d’imprimantes de la marque américaine Printrbot et des accessoires. Voire plus. Mais les protagonistes préfèrent procéder étape par étape, tout en avançant vite. « C’est un marché en pleine expansion et nous y croyons d’autant plus que nous avons l’avan­ tage de rassembler les compétences nécessaires », ajoute Michel Rodenbourg. Entreprises, grand public, voire institutions, le public visé est plutôt large, avec une considération écologique qui complète le marketing, puisque le « plastique » utilisé provient en réalité d’amidon de maïs. D’une enseigne bien connue du paysage économique à un renouveau dans l’impression 3D, l’exemple Eicher est révélateur du besoin pour les entrepreneurs de disposer de solutions sur mesure dans le cadre de processus de succession. ◄ En résumé Eicher est un bon exemple de transmission-reprise d’entreprise familiale qui poursuit son développement. D’une enseigne bien connue du paysage commercial à un renouveau dans l’impression 3D avec Bulb Zone, Michel Rodenbourg est passé par là.


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Entreprises Awards

03 Diversifier pour progresser ► Les premiers Diversity Awards ont récompensé les entreprises les plus soucieuses de représenter la société en leur sein. ► Objectif : créer un effet boule de neige.

Donner un coup de projecteur sur les meilleures initiatives des entreprises de la Place, montrer ce qui se fait déjà, faire essaimer les projets porteurs et, in fine, contribuer à une société plus inclusive : voilà les deux piliers de la première Journée nationale de la diversité, mise en place par le réseau IMS Luxembourg et soutenue par le programme Progress de l’UE. Sous le sceau du slogan « Agir pour la diversité », le programme s’est révélé très riche, avec en point d'orgue la remise des premiers Diversity Awards, le 12 mai, en présence de Corinne Cahen, ministre de la Famille et de l’Intégration et marraine de la Charte de la Diversité Lëtzebuerg. Ouvert à tous, l’exercice a récompensé cinq organisations pour leurs bonnes pratiques dans quatre grandes familles de critères : recrutement, gestion des carrières, environnement et bien-être au travail et communication. Ont notamment été pris en compte le caractère innovant de la démarche ; son aspect mesurable, réplicable et durable ; son mode de pilotage, ainsi que son impact direct ou indirect sur les collaborateurs. Inscrite en filigrane, la lutte contre toute forme de discrimination était aussi mise à l’honneur par le jury final présidé par Corinne Cahen et dans lequel siégeaient Natalie Bausch (COO de Deutsche Bank), Pierre Bley (président de l’œuvre nationale Grande-Duchesse Charlotte), Nathalie Morgenthaler (chargée de direction au Centre pour

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l’égalité de traitement), Gilbert Pregno (président de la Commission consultative des droits de l’Homme), Christian Scharff (président d’IMS Luxembourg) et Massimo Serpieri (head of unit à la DG Justice et Consommateurs de la Commission européenne). Dans la catégorie « diversité, recrutement, accueil et intégration », c’est Onet qui a remporté les suffrages. Spécialisée dans les services de nettoyage, l'entreprise emploie 502 salariés à Howald. Elle a été choisie pour son processus de recrutement basé sur la motivation des profils diversifiés rencontrés. Depuis plus d’un an, elle organise ainsi des sessions de recrutement collectif qui lui permettent de rencontrer tous types de candidats sans critères de nationalité, situation sociale ou différence culturelle. Le but est bien de mettre en place un traitement plus juste des embauches. La famille « diversité et gestion des carrières » a salué BNP Paribas pour sa pratique en matière de combat contre les discriminations, en particulier auprès du management. Une formation a pu être dispensée au top 100 du groupe. Obligatoire pour cette première vague, elle était aussi chaudement recommandée à tout responsable d’au moins une personne. Originale sur le plan du format, elle l’est aussi pour le contenu délivré : il mêle neurosciences, anthropologie et psychologie sociale pour démontrer que chaque être humain est soumis à des préjugés. Au total, ce sont

quelque 500 personnes qui ont assisté à cette formation. Dans le champ « diversité, environnement et bien-être au travail », c’est la Ville de Luxembourg qui a été choisie. Mobilisant 3.850 salariés, elle mène une politique active en matière de gestion du handicap et d’intégration depuis des années. Soucieuse de donner une chance à des personnes en situation de handicap mental, la ville s’est durablement engagée sur le plan de l’insertion professionnelle, un de ses objectifs centraux en tant qu’administration publique. En 2003, 2008 et 2010, trois projets ont été menés avec la Ligue HMC (Handicap cérébral mental) dans cette optique. Les travailleurs fraîchement recrutés ont été encadrés par des éducateurs instructeurs et des chauffeurs formés en conséquence. La dernière catégorie représentée, « diversité, communication et valeurs de l’organisation », a mis en avant conjointement deux organisations : la Ville d’Esch et le Mouvement pour l’égalité des chances (Echternach) pour la formation délivrée à leurs équipes pédagogiques. La ville a ainsi soutenu une approche sensible au genre et à la diversité au sens large dans ses maisons-relais.

Les chargés de direction et leurs adjoints ont suivi une formation à la stratégie gender diversity management et tout le personnel éducatif a assisté, durant son temps de travail, au module obligatoire gender4kids sur des thèmes allant des images de rôles, aux visions de la famille, jusqu’aux types de conflits. La MEC, quant à elle, avec un projet Diversity4Kids, a formé 100 éducateurs et enseignants dans six communes de la région de Mullerthal. L’impact potentiel a concerné environ 900 enfants. Il s’agit de la toute première formation organisée conjointement pour un public mixte de professeurs, écoles fondamentales et éducateurs de maisons-relais. De longue haleine, l’ensemble du processus de candidature aux awards aura permis aux entreprises en lice de prendre une photo de leurs avancées, de tester leurs projets, ainsi que de bénéficier d’un coaching soutenu du Comité de la charte. Omniprésent, le sujet de la diversité gagne pourtant encore à être discuté, partagé et challengé. ◄ En résumé Dans le cadre de la première Journée pour la diversité, les Diversity Awards 2015 ont été remis aux acteurs ayant les politiques de diversité perçues comme les plus inspirantes.

PHOTO : IMS LUXEMBOURG

― Texte : Florence Thibaut


Entreprises Anniversaires

Mikado et Concept Factory, les baroudeurs

► 2015 est une année particulière pour les agences de communication Mikado Publicis (25 ans) et Concept Factory (20 ans). ► Leurs dirigeants fondateurs sont toujours actifs sur le marché, forts d’une expérience irremplaçable. ► Des années d’or de la fin du 20e siècle à la nouvelle donne numérique et éco­ nomique, la transition n’a pas toujours été aisée. ― Texte : Jean-Michel Gaudron ― Photo : Jan Hanrion

Dans le paysage très dense du secteur de la communication au Luxembourg (avec quelque 280 acteurs recensés, de toutes tailles et tous services), Concept Factory et Mikado font partie des références incontournables. Par leur taille, évidemment (une quarantaine d’employés chez la première et une vingtaine d’employés chez la seconde), mais aussi leur expérience et leur histoire. Une expérience qui se retrouve dans la longévité de ces deux sociétés (hasard du calendrier, elles célèbrent, en 2015, un anniversaire symbolique : un quart de siècle pour Mikado et 20 ans pour Concept Factory) tout autant que dans celle de leurs dirigeants historiques. Car Dan Eischen et Pol Goetzinger (Concept Factory) et Jean-Luc Mines et Camille Groff (Mikado) étaient déjà là aux premières heures de leurs agences respectives. En ce temps-là, dans les années 90, ce qu’on appelait alors généralement « la publicité » vivait des années d’or, où (presque) tout était permis : on catapultait même des voitures sur des ponts de porte-avions (la Citroën Visa pour ne pas la nommer). Jean-Luc Mines, alors stagiaire à Paris dans des grandes agences « créatives », découvre une réalité éloignée de

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▲ Camille Groff, Pol Goetzinger, Dan Eischen et Jean-Luc Mines : quatre garçons toujours dans le vent, symboles d’un marché de la communication en évolution permanente.

la théorie académique. « Tout ce que j’avais appris en école n’avait rien à voir avec ce que je découvrais. Je ne savais pas ce qu’était un directeur artistique, un copywriter. J’étais au sein de vraies équipes : nous faisions des brain­ stormings et je trouvais ça extraordinaire. Ça m’a totalement emballé et convaincu de faire la même chose au Luxembourg, avec la motivation de pouvoir travailler pour des marques et pouvoir élaborer des grandes affiches, ces grandes campagnes. Ce ne serait plus possible aujourd’hui. » À peine six mois après la création de Mikado, Camille Groff, qui avait connu M. Mines à l’université, embarque à bord et ne descendra plus du navire, même s’il n’avait, au démarrage, aucune idée de la façon dont fonctionnait une telle agence.

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Entreprises Anniversaires « C’est le côté touche­à­tout que j’ai trouvé fascinant », concède-t-il, revendiquant au final le développement de la première « vraie » agence globale de communication, réunissant tous les métiers clés de la création. « Nous avons été les premiers à travailler avec un vrai team », explique-t-il aujourd’hui. Cinq années plus tard, le contexte de la création de Concept Factory est un peu différent. Pol Goetzinger et Dan Eischen sont déjà actifs au sein de Pep, l’agence intégrée à la régie commerciale IP. À un moment où des conflits d’intérêts se font de plus en plus pressants, ils élaborent un plan de reprise de la société. Mais le MBO échoue et ils se retrouvent pratiquement « à la rue ». « Nous sommes allés boire un verre et manger une pizza. Et sur un sous­bock, nous avons fait le business plan de ce qui allait devenir Interact et Concept Factory », se souvient Pol Goetzinger. Avec, dès le commencement, l’ambition de baser les efforts de créativité sur la recherche stratégique et le business. « Un marché de niche qui était en train de changer, rappelle Daniel Eischen. Nous avons créé le besoin. »

Daniel Eischen (Concept Factory) « Garder un client, c’est dur ! C’est une question de chimie. 30 % du temps de réunion passé avec un client est souvent consa­ cré à lui parler d’autre chose que de son projet. »

Pol Goetzinger (Concept Factory) « La pression écono­ mique et la crise font que l’atmosphère entre agences et clients a tendance à devenir plus malsaine. »

Camille Groff (Mikado Publicis) « La stratégie d’entreprise influence la communica­ tion et la communication essaie de suivre la straté­ gie d’entreprise. Cet engrenage n’existait pas avant. »

Jean-Luc Mines (Mikado Publicis) « Les petites structures qui sauront rester agiles et lean s’en sortiront. Les plus grosses vont sans doute disparaître. »

DES ÉCHANGES PLUS CRÉATIFS ET PLUS COMPLEXES En 2015, les têtes ont, à peine, changé. L’envie et la motivation, non. Ce qui est loin d’être le cas du marché de la communication, qui a toujours dû chercher sa voie dans un contexte économique plus que fluctuant, surtout depuis le début des années 2000, reléguant au rang de doux souvenir ces années 90 à 10 % de croissance annuelle. Les entreprises clients sont, elles-mêmes, davantage aguerries au métier, ce qui rend les échanges plus interactifs, mais bien plus complexes. « Avant, pour chaque 100 euros vendu, il pou­ vait arriver que nous cumulions 40 euros de commission d’agence et personne ne trouvait rien à y redire. Aujourd’hui, pour chaque euro gagné, il faut se battre et souvent avec deux ou trois autres agences en concurrence », résume Dan Eischen. Jean-Luc Mines se souvient du temps où il gérait lui-même, et seul, une dizaine de grands comptes. Un ou deux rendez-vous annuels suffisaient pour entretenir la relation. « Aujourd’hui, nous disposons de cinq account qui gèrent un maximum de cinq bud­ gets si tout va bien. » Et la nature même de la relation n’a plus rien à voir. « Avant, j’allais chez le client, je lui faisais trois propositions, on en validait une et on la déclinait sur l’an­ née. Aujourd’hui, même pour un dépliant de trois pages, le client amène 10 personnes pour discuter. Et souvent, il n’y a même pas le décideur final. » La crise économique et le souci de faire un mauvais pas ont clairement influé sur le comportement des annonceurs. Et pas uniquement en termes de budgets, souvent revus à la baisse. « Les responsables de communica­ tion doivent se justifier devant leurs directions et du coup, les gens n’osent plus ! Au niveau de

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la créativité, les choses ont beaucoup baissé ces dernières années », regrette Camille Groff, qui constate parallèlement une forte augmentation des compétences requises : « Dans notre équipe, ils ont pratiquement tous Bac +5 aujour­ d’hui. Et le succès réside aussi dans la capacité de pouvoir engager des gens plus intelligents que soi. » À cela s’ajoutent la multiplicité des supports de communication, notamment mobiles, et les possibilités quasi infinies que cela permet. « Le rôle de la publicité, avant, était d’informer qu’un produit existe, explique JeanLuc Mines. Aujourd’hui, il faut non seulement informer, mais le faire là où est le client et en permanence. » Cette expansion numérique a, bien évidemment, profondément changé la relation annonceur-agence, au moins aussi profondément que la relation annonceur-client final. « On n’est plus dans l’impact purement visuel. On est dans le dialogue, l’engagement, le data, note Dan Eischen. La communication est inter­ nalisée. Elle fait partie de la marque, du fonds de commerce de l’annonceur. Le client est devenu un objet de communication que l’on recherche. La communication influe sur tout le processus de l’entreprise. » Forts d’un cumul d’expérience incomparable, les dirigeants fondateurs de Mikado Publicis et Concept Factory envisagent sereinement l’avenir. « Ces 45 ans d’expertise cumu­ lés nous donnent la possibilité d’avoir un cer­ tain recul sur les défis et les situations nouvelles, note Pol Goetzinger. Ajouté à la spontanéité

que nous parvenons à maintenir, c’est un atout considérable. Cela rend plus difficile aussi la possibilité de nous raconter des bobards, car on a tout de même expérimenté et suivi énormé­ ment de concepts et d’approches depuis tout ce temps. C’est ce qui nous donne aussi un avantage vis­à­vis des petits champignons qui poussent un peu partout sur le marché et dont nous avons d’ailleurs été, pour la plupart, les formateurs. » Jean-Luc Mines, lui, constate qu’au fil des ans, les changements en interne chez ses clients ont été nombreux et que beaucoup de patrons ont pris leur retraite… et que lui et ses équipes sont toujours là. « Je n’ai pas d’appréhension pour l’avenir. Nous avons su prendre le virage du digital au bon moment. Ça reste la clé du futur. » Une clé sur le point d’être partagée avec d'autres employés. « C’est une marque d’intérêt très positive », se réjouit Camille Groff. Quant à Dan Eischen, il ne cache pas que trouver des personnes qui acceptent de prendre un risque entrepreneurial est « un problème. Mais à partir du moment où nous conservons notre logique stratégique et notre état d’esprit, il n’y a pas de raison que la transition future ne se fasse pas. Le grand chal­ lenge sera évidemment de ne pas céder l’entre­ prise pour un euro symbolique ! » ◄ En résumé Les agences de communication Mikado Publicis et Concept Factory franchissent un cap symbolique en 2015 : 25 ans pour la première et 20 ans pour la seconde. Leurs diri­ geants fondateurs, toujours actifs sur le marché, survolent ces deux décennies et demi de développement et de bouleverse­ ments économiques.


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Entreprises Céline Coubray

05 « L’architecture n’est

pas réservée aux initiés »

► Le magazine Archiduc, édité par Maison Moderne, fête ses cinq ans d’existence. ► Depuis 10 numéros, la publication fait la promotion d’une architecture qui lui ressemble : audacieuse et exigeante. ► Sa rédactrice en chef porte un regard passionné sur l’évolution du magazine, autant que de l’architecture au Luxembourg. ― Interview : Jean-Michel Gaudron ― Photo : Jan Hanrion

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Céline Coubray, Archiduc fête ses cinq années d’existence. Comment est né le concept de cette publication semes­ trielle ? « Il s’agissait de la volonté de Maison Moderne de consacrer un nouveau magazine à l’architecture contemporaine. Nous souhai­ tions toucher les professionnels et les ama­ teurs avisés à travers un magazine à la ligne éditoriale exigeante et au design pointu. Pour cela, Mike Koedinger a sollicité le partenariat de la Fondation de l’architecture et de l’ingé­ nierie (devenue Luca depuis, ndlr), qui nous a soutenus dans notre démarche. Nous avons décidé de réaliser un magazine semestriel permettant de suivre l’évolution de l’archi­ tecture au Luxembourg à travers des sujets d’actualité et des dossiers de fond. Le tout complété par un site internet avec un blog, un agenda et une newsletter bimensuelle, ainsi que des événements live en partenariat avec le Paperjam Club.

▲ Céline Coubray : « Nous pouvons nous réjouir d’avoir au Luxembourg des projets de qualité, mais un peu d’audace et d’expérimentation seraient les bienvenus ! »

Cela veut dire qu’il y avait, au Luxem­ bourg, un grand vide en matière de publication de qualité et grand public sur la thématique de l’architecture ? « Oui, et il y a encore beaucoup à faire ! Les quotidiens suivent les chantiers, mais la cri­ tique architecturale est encore peu développée. Contrairement à ce que l’on pense, l’architec­ ture n’est pas réservée aux initiés. C’est l’af­ faire de tous. Nous habitons dans une maison


Entreprises Céline Coubray ou un appartement, travaillons dans un bâti­ ment, traversons les rues, fréquentons des espaces publics, des équipements collectifs. Nous sommes donc tous concernés par notre environnement bâti. La culture architecturale devrait devenir une priorité dans notre apprentissage et notre ouverture au monde. Elle aide à mieux vivre ensemble, participe à la cohésion d’une population. Ceci est d’au­ tant plus important dans un pays comme Luxembourg, où il y a tant de personnes qui viennent de l’étranger, avec des expériences très diverses.

Quelles sont les ambitions éditoriales d’Archiduc ? « Nous visons une ligne édi­ toriale exigeante, avec une maquette auda­ cieuse et pointue, à l’image de la profession que nous présentons, soucieuse de qualité et d’innovation. Nous avons apporté beaucoup d’attention à la réalisation du magazine, avec différentes sortes de papiers et une couver­ ture au fort impact visuel. Notre objectif est de promouvoir les bonnes pratiques en archi­ tecture, et ainsi de sensibiliser et responsabi­ liser les maîtres d’ouvrage, qu’ils soient des particuliers, des entreprises ou une adminis­ tration publique. Nous souhaitons montrer les bons exemples réalisés dans notre pays pour inciter ceux qui veulent se lancer à réa­ liser des projets architecturaux exigeants et de qualité. Nous nous adressons bien sûr à la communauté des architectes, mais aussi aux maîtres d’ouvrage, privés et publics, aux déci­ deurs, aux amateurs d’architecture… Bref, toute personne curieuse d’architecture ! Les réalisations des architectes sont, par définition, publiques et visibles par tous. Paradoxalement, la communication ne semble pas faire partie des priorités de ces mêmes architectes qui, du coup, sont souvent méconnus. Dans quelle mesure Archiduc a­t­il contribué à une certaine émancipation de la profession ? « Il faut savoir que les architectes et ingénieurs­ conseils n’ont pas le droit de faire de la publi­ cité. Par ailleurs, très peu de bureaux peuvent se permettre d’avoir une personne dédiée à leur communication. Ce sont donc souvent les architectes eux­mêmes qui s’occupent de leurs relations extérieures et presse, et leur emploi du temps ne leur permet que rare­ ment d’y consacrer du temps. Cette commu­ nication passe donc bien souvent après beau­ coup d’autres choses. Or, c’est en présentant et expliquant les intentions architecturales qu’il est possible de mieux comprendre le projet, ce qui participe à son acceptation par la population. En outre, quand on comprend ce que l’on fait, et pourquoi, il est plus facile de supporter un chantier par exemple. Avec Archiduc, nous faisons l’effort d’aller chercher ce discours et le transmettons aux lecteurs. Quels ont été, au cours de ces cinq années, les contributions et / ou sujets les plus marquants traités ? « En regardant

Genèse d’un branding

« Surtout pas un nom qui commence par Archi… » Céline Coubray, rédactrice en chef de la première heure, se souvient de la façon dont le nom Archiduc a été trouvé. « Monolithe ou Muovo : ce sont des noms auxquels nous avions d’abord pensé. Nous avions très vite développé le projet avec la Fondation de l’architecture et de l’ingénierie ; nous avons vite défini le contenu, la structure, la maquette… Il ne manquait plus que le nom. Et ce dont nous étions sûrs, alors, c’est que nous ne

rétrospectivement, il est formidable de voir que Luxembourg a construit plusieurs projets de grande qualité. Il est aussi passionnant de pouvoir suivre les projets dans la durée. Le Kirchberg, par exemple, est encore un quar­ tier en pleine évolution, avec ses réussites, mais aussi des améliorations possibles. Voir l’émergence de la Cloche d’Or est une occa­ sion unique. Relater les réflexions portées à la Biennale de Venise au cours des différentes éditions est une chance formidable. Mais il n’y a pas que les ‘gros’ projets. Beaucoup, plus petits, sont tout aussi captivants. Je suis très heureuse de pouvoir faire connaître des projets qui sont longuement pensés, réflé­ chis, qui visent la qualité et l’amélioration de notre cadre de vie.

Qu’en est­il de la qualité architecturale globale au Luxembourg ? Comment a­t­ elle évolué ces dernières années ? « D’une manière générale, nous pouvons nous réjouir d’avoir sur notre territoire des projets de qua­ lité, portés par des architectes formés à l’in­ ternational et apportant donc différentes expériences et approches qui enrichissent notre patrimoine bâti. Je trouve, néanmoins, qu’un peu d’audace et d’expérimentation seraient les bienvenus ! Certes, le terrain est cher, mais il est possible de faire de la bonne architecture avec des moyens modestes, en saisissant davantage certaines occasions. Le Luxembourg se trouve par exemple face à un manque important de logements. Il y a là une réelle opportunité pour trouver des voies nouvelles d’habiter, oser l’expérimen­ tation de nouvelles formes de quartier. Ce serait dommage de passer à côté de cela et de laisser certains promoteurs privés rentabi­ liser au maximum les parcelles, privilégiant le profit au détriment d’une vision architec­ turale et urbanistique.

voulions pas d’un nom qui commence par ‘Archi’. Mais nous n’étions pas totalement convaincus des propositions que nous trouvions. Alors nous avons continué à chercher. Un soir, je rentrais chez moi en bus, un moment propice à la divagation. Et je continuais à chercher un nom, mais rien n’y faisait. Aucune idée géniale. Et puis la voix dans le bus annonce l’arrêt suivant. ‘Archiduc’… » J.-M. G. ◄

À quoi va ressembler Archiduc dans les cinq prochaines années ? Faut­il s’at­ tendre à des nouveautés ? « Nous sommes contents de ce qu’Archiduc est devenu : une marque média établie sur le marché, appréciée de ses lecteurs et par les professionnels du sec­ teur. Toutefois, nous aimerions aller encore plus loin. Aussi, nous allons repenser notre magazine, faire évoluer son site internet et sa newsletter, et renforcer les événements live. Nous travaillons actuellement dans ce sens, et espérons que la marque grandira encore au cours des prochaines années en qualité, et en rayonnement national et international. Depuis cinq ans, les « covers » d’Archiduc ont toutes un cachet particulier. À quoi correspondent ces formes géométriques hypnotisantes ? Seront­elles encore de mise pour les cinq prochaines années ? « Ce concept a été développé à l’origine par Maxime Pintadu, alors directeur artistique sur cette publication. Il avait choisi d’isoler une forme issue du portfolio de l’architecte et de la traiter de manière géométrique. Puis, le concept a évolué en une forme géomé­ trique sans fin, à l’instar des œuvres d’Escher, mise en volume. Les couleurs ont également leur importance : si vous mettez toutes les cou­ vertures les unes à côté des autres, elles for­ ment un ensemble. Il y a une continuité dans le choix des couleurs, avec un lien entre la couverture précédente et le numéro en cours. À cela s’ajoute, d’un numéro à l’autre, une alter­ nance entre un fond blanc et un fond coloré. Mais nous avons décidé que ce numéro de printemps marquait la fin de cette série. Nous sommes donc en train de travailler à la refonte du magazine et de préparer une toute nouvelle maquette pour le numéro 11, sous la direction de Vinzenz Hölzl et Jeremy Leslie. À découvrir le 14 octobre ! » ◄ ― Juin 2015 ― 077


Entreprises Recrutement 2.0

06 Éviter la bulle

numérique des RH

► Money for Job n’a pas pu se relancer ; le concept ZiDCard se redéploie dans e-thicHR ; diverses start-up misent sur de nouvelles applications. ► Les outils technologiques ont de vraies pistes de développement, mais toutes les solutions éviterontelles le dérapage financier ? ― Texte : Alain Ducat ― Photo : Olivier Minaire

Le recrutement sera numérique et ciblé ou ne sera pas. Le tableau, vite brossé, n’est pas loin de représenter l’idéal d’acteurs très focalisés sur le Luxembourg. On peut même se demander s’il n’y a pas un risque de bulle, et donc d’éclatement, entre la vue idyllique et la réalité économique. Les exemples de solutions IT centrées sur la gestion des RH ou / et le recrutement pointu ont tendance à se multiplier, parfois à se bousculer, voire à disparaître. Parmi les nouveaux acteurs, Jobtoday est une application aux accents espagnols, qui est développée depuis le Lux Future Lab. Plutôt orientée low profiles, elle permet une interaction rapide et directe entre l’employeur et les candidats potentiels. Déjà, la start-up a trouvé au Luxembourg un appui financier de taille : Mangrove Capital Partners. Divers échos évoquent l’émergence d’une app par-ci, d’un outil web par-là. Dans tous les cas, l’idée sonne bien. Mais c’est le déploiement sur le marché et l’accompagnement financier qui créent le risque, quand l’idée ne séduit pas assez ou dérape de son modèle économique, tandis que l’investissement et les besoins de fonctionnement sont, eux, toujours bien réels. Money for Job a bien illustré le phénomène. Le 3 avril dernier, MFJ Group était déclaré en faillite à Luxembourg : la tête de pont de la plateforme de recrutement en ligne s’écroulait un gros mois après la déconfiture de la sàrl Money for Job. Pourtant, Vincent Balzano, le porteur du projet, assurait que MFJ, détenteur des droits de propriété intellectuelle, négociait une « grosse levée de fonds » auprès d’investisseurs « insti­ tutionnels européens », pour se renforcer et gérer la reprise de l’exploitation du concept, « plusieurs opérateurs potentiels » étant sur les rangs. Le deal devait être révélé au printemps. Mais depuis, plus personne ne répond… Il s’avère que l’intérêt des bailleurs de fonds n’a guère été éveillé et que le groupe n’y a pas

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▲ Jérôme Pittie, alias Monsieur ZiDCard, a repris la main sur le concept, développé et étendu dans e-thicHR.

survécu. Ce n’est pas vraiment étonnant, à consulter quelques présentations ayant servi de plaidoyer pour la « première plateforme européenne de social media recruiting » auprès de possibles investisseurs. Money for Job disait vouloir « démocratiser le recrutement par cooptation de la même façon que Easyjet et Ryanair ont démocratisé les transports aériens ». Le business plan, pourtant très optimiste sur le décollage des chiffres, ne prévoyait pas de trésorerie positive avant fin 2017. Dans un document de février 2015, MFJ décrivait un pool de nouveaux financements dépassant 1,3 million d’euros et espérait des « financements complé­ mentaires » allant du crowdfunding aux busi­ ness angels (ces derniers apportant entre 100.000 et 250.000 euros au Grand-Duché). Rien de tout ça n’a eu lieu. Par exemple, BPI, partenaire français sollicité dès le départ pour soutenir le capital, n’a pas souhaité prolonger. Idem du conseil général de Moselle. Ou, au Grand-Duché, pour Luxinnovation. D’autres, comme le capital-risqueur Eurefi, n’ont pas embarqué dans le navire à la flottaison menacée. De l’aveu même d’un ex-cadre, « personne ne peut dire qu’il a trouvé un emploi par la cooptation de Money for Job ». Parmi les pionniers du recrutement 2.0 implantés à Luxembourg, le concept ZiDCard

est, lui, repris par une poignée de partenaires. Désormais, on l’appellera e-thicHR. L’algorithme de gestion de candidatures anonymes, malmené faute d’avoir capté tous les financements promis, renaît, se développe et s’émancipe. Et Jérôme Pittie, l’homme de ZiDCard, se retrouve à la tête des relanceurs, réunis dans une nouvelle structure détentrice des droits. Une société luxembourgeoise exploitera e-thicHR, entité indépendante d’éventuels gros porteurs de l’industrie RH. Jérôme Pittie confirme toutefois que les « parte­ naires de base sont intéressés par des partenariats économiques pour le développement de l’acti­ vité », avec une ambition transfrontalière. Ici, le côté non discriminant et la vision de la diversité positive dans les RH semblent être des arguments à part entière pour aider à ce qu’un modèle puisse se développer ou rebondir. Il y a donc bien moyen de voir les choses positivement. Bien sûr, rien ne dit que le recrutement numérique risque de faire passer les start-up ou les entreprises clientes du côté obscur de la force de travail. Mais, hors des mirages ou des coups marketing, il reste qu'il faut, dans ce domaine-là aussi, avoir de la suite dans les idées, de la substance économique et un bon accompagnement financier. Afin de ne pas fragiliser la bulle. ◄ En résumé Plateformes web, algorithmes ou autres applications, les acteurs essaient de décoller dans les RH et le recrutement. Des start-up de la première heure connaissent des fortunes diverses. ZiDCard rebondit dans e-thicHR. Money for Job a sombré corps et biens.


Entreprises Femmes pionnières

Ouvrir la voie

07 ► L’exposition itinérante Femmes pionnières de l’entrepreneuriat met en avant 12 Luxembourgeoises ayant fait carrière, dans l’idée d’en inspirer d’autres. ► Deux parcours féminins parmi d’autres : celui de Nelly Duhr, patronne de vignoble, et celui de Céline Guillou, sixième génération à La Gaichel. ― Texte : Florence Thibaut ― Photo : Mike Zenari

▲ Céline Guillou est très fière que le Domaine de la Gaichel soit resté dans la famille.

Une entreprise sur cinq est aujourd’hui créée par une femme et environ 18 % des structures existantes sont chapeautées par des directrices. Si les pionnières ont tracé la route, le sujet est toujours autant d’actualité. Réalisée par Joëlle Letsch, Netty Thines et Domenica Fortunato, toutes trois ambassadrices de l’entrepreneuriat féminin au Luxembourg, l’exposition itinérante Femmes pionnières de l’entrepreneuriat met en avant 12 Luxembourgeoises ayant fait carrière entre 1850 et aujourd’hui, et espère un effet boule de neige. « Nous avons souhaité mettre en avant ces femmes pour la richesse de leur parcours et leur apport à l’économie luxembour­ geoise, introduit Joëlle Letsch. En faisant preuve de courage, ces visionnaires ont souvent su concilier travail, dans le commerce, la médecine, l’artisanat ou encore l’hôtellerie, et vie de famille. Dotées d’une forte personna­ lité, elles ont bousculé l’ordre établi. Aux 19e et 20e siècles, lancer ou reprendre une entreprise était un pari osé pour une femme. Le réflexe n’est pas encore acquis aujourd’hui. Les défis sont différents, mais tout aussi complexes. » Et il y a de beaux exemples mis en valeur au fil de l’expo. Fondé par Barbe Peckels et son mari Baptiste Dhuren en 1852, le Domaine de la Gaichel, aux portes d’Arlon, s’est toujours transmis de mère en fille. Mère de trois enfants, la fondatrice a fait le succès de l’établissement grâce à ses talents de cuisinière. La gestion de la ferme-auberge, progressivement devenue hôtel de luxe, en est à la sixième génération. « L’entreprise familiale a été construite par des femmes. Chaque géné­ ration a eu ses challenges et a apporté quelque chose à la suivante, même si certaines difficultés, comme celle de recruter du personnel bien formé, traversent le temps, explique Céline Guillou, actuellement aux commandes de la propriété depuis janvier 2014. J’ai la grande chance de pouvoir bénéficier des conseils et de l’expertise de ma mère et de ma grand­mère. Cette dernière faisait tout, de la lessive au service en salle, en passant par la cuisine.

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Entreprises Femmes pionnières

« Il ne faut pas avoir peur des obstacles, car il y en aura toujours. » Nelly Duhr

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Le souci de continuité s’incarne aussi dans la stabilité de l’équipe. Le chef est là depuis 28 ans, la gouvernante depuis 15 ans et le second depuis une dizaine d’années. « Le noyau dur est resté le même, cela nous a apporté une certaine crédibilité. » Mère de trois fils, Elvis, Oscar et Gabin, la patronne s’est résolue à rompre la chaîne féminine. « Je serai la dernière héritière féminine en ligne directe ! Je ne veux pas forcer mes fils à reprendre l’entreprise, c’est un métier très prenant. S’il faut vendre, je vendrai. Si l’un d’eux a envie de s’investir, il faudra que le choix vienne de lui et qu’il le fasse avec passion. Ma plus grande ambition, comme celle des géné­ rations précédentes, est de transmettre un outil qui fonctionne. Là, j’aurai réussi ma carrière. »

Exposition

Montrer l’exemple

À voir à Luxembourg fin mai, l’expo tournera ensuite dans différentes communes ou entreprises.

LE GOÛT DU TRAVAIL L’histoire de Nelly Duhr est aussi mise en avant lors de l’exposition. Elle a repris l’exploitation viticole familiale de Ahn, à la mort de son mari en 1974, avec la farouche volonté de la léguer à ses enfants. « Cela a parfois été difficile, mais je voulais à tout prix pouvoir conserver le domaine dans la famille. Je consi­ dère avoir simplement fait mon travail. Avant le décès de mon mari, je connaissais déjà tous les recoins de l’exploitation. Je m’occupais de la salle, des clients, de l’administratif… J’allais donner un coup de main là où il y avait un man­ que. » Née Hirtt en 1931, Nelly entame des études dans une école de commerce avant de se marier à 21 ans. Elle entre alors dans le domaine viticole Duhr fondé en 1872. Elle apprend tous les métiers du vin, tout en s’occupant de ses trois enfants en parallèle. « Une fois seule aux commandes, je devais être partout. J’ai eu la chance de pouvoir me reposer sur mon équipe, ainsi que sur des familles de travailleurs saisonniers qui revenaient chaque année. » Plus tard, grâce à l’appui de son plus jeune fils, elle développe les activités du domaine, modernise les infrastructures et assoit la réputation de qualité de ses vins grâce à différents concours. En 2012, elle confie à ses petits-fils la gestion des 12,5 hectares de vignoble, devenu l’un des domaines les plus importants de la région. « Ils sont bien meilleurs que moi ! C’est une grande source de satisfaction. Ils ont étudié la matière et font progresser nos techniques. Je peux me reposer l’esprit tranquille ! » Toujours présente, Nelly Duhr organise encore des dégustations. « Il faut aimer ce qu’on fait, sinon on ne le fait pas bien. » Son conseil à une jeune fille qui voudrait se lancer à son compte ? « Je lui dirais de prendre goût au travail et ne pas avoir peur des obs­ tacles ; il y en aura toujours. » ◄ En résumé Si les exemples de brillantes cheffes d’entreprise ne manquent pas, la création d’entreprises reste encore une activité très masculine. Le but de l’exposition Femmes pion­ nières est de montrer que concilier famille et travail, c’est possible. Paperjam a sorti deux tranches de vies entrepreneuriales, ancrées au Domaine de la Gaichel aux portes d’Arlon et au domaine viticole Aly Duhr à flancs de Moselle. Informations et agenda via http://femmespionnieres.lu.

PHOTOS : FEMMES PIONNIÈRES

Elle a vraiment fait passer l’hôtel à un autre niveau. Aujourd’hui, elle est très fière que le domaine soit resté dans la famille. » Fille aînée de Claudine et Michel Gaul, gérants dès 1999, Céline fait évoluer l’image tout en douceur. « Comme mes deux sœurs choisissent d’autres voies, la transition s’est faite très naturellement. » Née dans le domaine, elle y habite toute sa jeunesse et travaille à la réception pendant les vacances à partir de 16 ans. Après des études en communication à Bruxelles, elle travaille notamment dans un hôtel à Luxembourg, puis passe un an en Australie, avant de décider, en couple, de rejoindre le giron familial il y a une dizaine d’années. Sous l’ère de ses parents, l’hôtel familial acquiert le voisin et rival de longue date, l’Hostellerie de la Bonne Auberge, qui devient l’Auberge de la Gaichel en 2006. « Mes parents ont eu l’intelligence de s’effacer et d’être présents aux bons moments. Ils se sont retirés petit à petit pour qu’on se sente chez nous. J’ai notamment beaucoup travaillé avec mon père pour développer mes compétences en comptabilité. » Abritant un restaurant étoilé, le domaine est aujourd’hui géré par Céline et son mari, Erwan Guillou, issu d’une famille de restaurateurs bien connus du côté de Schouweiler. Le couple gère une équipe de 45 personnes. « Mon époux a réussi à trouver sa place. Il s’oc­ cupe de la partie gastronomique, élabore la carte, travaille avec le chef et n’hésite pas à mettre la main à la pâte. De mon côté, je gère tout ce qui a trait au back­office : réservations, comptabilité, communication… Nous sommes très complémentaires », précise Céline Guillou. La différence du domaine, c’est son cachet familial. « Nous sommes des propriétaires exploitants, c’est très important. Nous connais­ sons nos clients. C’est ce qui fait notre force. La renommée familiale est un label de qualité, mais elle nous demande aussi de travailler deux fois plus pour dépoussiérer notre image. En res­ tant curieux, nous essayons d’être dans l’air du temps. » L’arrivée des réservations en ligne a amené une autre clientèle. « À l’époque de mes parents, on travaillait encore avec un livre de réservations. Aujourd’hui, tout est informatisé, il a fallu nous adapter. »

Le vernissage de l’exposition a eu lieu en mars 2015 à la Chambre de commerce, après deux ans de recherches documentaires. Une des difficultés a été d’illustrer les parcours, certaines photos s’étant perdues au fil des années. « Nous avons voulu représenter la diversité de la société luxembourgeoise : d’époques, de métiers ou de géographies. Regarder vers le passé permet de mieux compren­ dre où on en est aujourd’hui. Leur point commun à toutes est d’avoir été des femmes courageuses et très investies », cadre Netty Thines. L’objectif ultime de tout ce travail : inspirer les jeunes générations. « On veut insister sur le fait qu’une carrière à l’État n’est pas la seule possibilité. Il y a encore beaucoup de stéréotypes à déconstruire. Notre but est de faire réfléchir », embraye Joëlle Letsch. En suspens pour le moment, l’exposition itinérante, après le Lycée technique d’Esch, sera à la Maison Elysis à Luxembourg du 26 mai au 2 juin. Pour lui donner une deuxième vie, elle sera ensuite accueillie dans différentes communes, entreprises ou maisons de retraite. Ses instigatrices espèrent en parallèle susciter des découvertes dans les familles, réaliser un livre de cette expérience et, peut-être, une deuxième exposition avec d’autres parcours inspirants d’ici quelques mois. F. T. ◄


THE FUTURE

10 X 6

OF BUSINESS

1 soirée, 10 experts, 6 minutes par orateur

En 1964, Isaac Asimov, le visionnaire et auteur de science-fiction américain, livrait sa vision du monde de 2014, prévoyant l’arrivée des robots et des ordinateurs, des appareils électriques sans fil, des satellites synchronisés en orbite... Étonnamment, 50 ans plus tard, ses prédictions sont si proches de la réalité que nous avons demandé à 10 orateurs de différents secteurs d’activité de se prêter au même exercice, tentant de prédire le futur proche – et si possible le futur lointain – de leur secteur. Événement sous le parrainage d’Etienne Schneider, ministre de l’Economie.

Laurent ANNET WSI

Ed GOEDERT Autopolis

Date Mercredi 3 juin 2015 Lieu Centre Culturel Tramsschapp 49, rue Ermesinde Luxembourg - Limpertsberg

Jean-Marc KIEFFER CDCL

Marc PONCÉ Sodexo

Neil SCOBLE YAPITAL

Evert VAN CAMP Samsung

Parking 72 - 74 avenue Pasteur Luxembourg - Limpertsberg Programme 18:30 Welcome cocktail 19:00 Mots de bienvenue 19:15 10 présentations 20:20 Walking & networking dinner Inscription obligatoire : www.Paperjam.club

Événement organisé par :

Jeremy LESLIE magCulture

Dr Françoise LINERS Luxembourg Institute of Health

Gold sponsors :

André VON DER MARCK LUXTRAM

Tom WIRION Chambre des métiers

Premium sponsor :


Entreprises Steffen

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Tout en un ― Texte : Alain Ducat ― Photo : Eric Chenal

Le groupe Steffen a dévoilé son nouvel écrin. Le site de Niederkorn (au Haneboesch II) rassemblera l’ensemble des activités et sera entièrement opérationnel fin 2017. Pour 2,7 millions d’euros d’investissement, hall de stockage de 2.000 m2, hall de pro­ duction (aux normes de sécurité alimen­ taire) de 3.000 m2, bâtiment administratif de 1.200 m2 feront cohabiter tous ceux qui ont fait la renommée des bouchers, charcutiers, traiteurs et autres métiers de bouche estampillés Steffen. Les quelque 150 personnes du groupe ont généré un chiffre d’affaires de près de 17,5 millions d’euros en 2014. ◄

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Entreprises Identité visuelle / DuPont

Lamesch change d’image

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PHOTO : MIKE ZENARI

► La raison sociale ne change pas. Mais Lamesch Exploitation SA arbore désormais la seule image de Sita-Suez Environnement, son actionnaire de référence depuis 2002. C’est un changement sans vraiment en être un. En 2002, l’entreprise familiale Lamesch, fondée 40 ans plus tôt, et spécialisée dans le traitement et le recyclage des déchets, avait été vendue au groupe Suez Environnement, via sa division propreté Sita. Elle avait néanmoins conservé son nom d’origine, tout en affichant son appartenance au géant mondial (80.000 collaborateurs dans plus de 70 pays et un chiffre d’affaires global de 14,32 milliards d’euros en 2014), coté en Bourse et actif dans la gestion de l’eau, la valorisation des déchets et l’aménagement durable des villes. Depuis le début du mois, les quelque 200 véhicules de Lamesch, les vêtements de travail et autres papiers officiels

commencent à arborer le logo aux trois cercles qui trouvent leur source dans le mouvement de l’économie circulaire, celle où rien ne se perd dans un monde où les ressources se renouvellent sans fin. « Ce n’est pas un gros changement pour nous, car l’économie circulaire, nous y sommes déjà très actifs depuis plusieurs années, explique Alain Jacob, administrateur directeur général de Lamesch (photo). Notre société reste la même avec les mêmes services et le même investissement auprès de nos clients. » En 2014, la société, qui emploie environ 450 personnes, a réalisé 60 millions de chiffre d’affaires, à peu près équitablement répartis entre la collecte, le tri et l’assainissement. J.-M. G. ◄

10 Des hectares aux enchères ► Le groupe chimique américain est prêt à céder la moitié de son site de Contern à d’autres entreprises.

PHOTO : DR

Installé à Contern sur un site de 104 hectares, le groupe américain DuPont de Nemours emploie quelque 1.200 personnes au Luxembourg, essentiellement pour la production de films en polyester ou géotextiles. L’usine tourne et continue de gagner de nouveaux contrats. Le groupe chimique était venu s’installer en 1962 au Grand-Duché. À l’époque, la place n’était pas un problème et DuPont s’est donc équipé d’un vaste terrain lui permettant de prévoir de nouveaux investissements. Au point qu’actuellement, certains de ses espaces verts ont été ouverts au grand public.

◄ Le groupe américain dispose d’un site de 104 hectares bien équipé à Contern.

Mais aujourd’hui, la direction luxembourgeoise a fait le constat qu’elle avait vu trop grand. Elle vient donc de lancer un projet destiné à partager avec d’autres entreprises la moitié de son site, soit 52 hectares. L’avantage ? Un terrain qui dispose déjà de toutes les autorisations pour de futures activités. Et DuPont a notamment construit une station d’épuration pour l’équivalent de 60.000 personnes, qui pourrait donc servir également à ses futurs « voisins ». L’entreprise reste discrète sur les contacts pris pour céder ses parcelles, mais elle verrait bien le développement d’un pôle regroupant des firmes actives dans le « biohealth ». Une opportunité renforcée par l’initiative de LuxairCargo qui a mis en place, en 2013, une zone de 3.000 m2 dédiée aux produits pharmaceutiques et de santé au Findel. J.-M. L. ◄

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Entreprises Shell Eco-marathon

11 Pour quelques gouttes de moins ► Le Shell Eco-marathon tente chaque année de battre le record de la distance parcourue avec un seul litre d’essence. ► Depuis 2009, une équipe du Lycée technique des arts et métiers de Luxembourg prend part à la compétition. ► Elle sera à Rotterdam du 21 au 24 mai avec son Ecotöff II et entend franchir la barre des 600 km. ― Texte : Jean-Michel Lalieu ― Photo : Sven Becker

Au Lycée technique des arts et métiers de la ville de Luxembourg, la tension monte dans l’atelier de mécanique. Une équipe composée de professeurs et d’élèves de la 10e à la 12e mécanique se prépare à participer, pour la septième année consécutive, au Shell Ecomarathon. Le départ pour Rotterdam est prévu le 18 mai. Les compétitions se tiendront du 21 au 24 mai. Le but : rouler le plus longtemps possible avec un litre d’essence. La « voiture » qui participera aux épreuves, l’Ecotöff II, a pour l’instant un record fixé à 587 km. Mais cette fois, l’objectif est de franchir la barre des 600 km. Organisé pour les écoles secondaires et les universités, l’Eco-marathon est une compétition qui leur propose de concevoir des véhicules écologiques et de se confronter une fois par an sur un circuit. Shell organise le même événement en Asie, en Europe et sur le continent américain. L’épreuve européenne en est cette année à sa 30e édition. Organisée pour la quatrième année de suite à Rotterdam, sur un circuit urbain, elle rassemblera 230 équipes venues de 30 pays. Selon l’organisateur, on devrait donc retrouver autour du circuit 3.000 participants entre 16 et 25 ans et 40.000 spectateurs. Le Lycée technique des arts et métiers de Luxembourg est la seule école du pays à avoir jusqu’à présent relevé le défi. L’Ecotöff II est le deuxième véhicule conçu pour la compétition. Il a été étudié et construit en interne pour le circuit de Rotterdam, plus exigeant au niveau des virages, et est amélioré d’année en année pour gagner en poids, en sécurité et en puissance. « Chaque année, lors des compétitions, on voit de nouvelles techniques utilisées, explique Sam Elsen, un des professeurs chargés du projet. Il n’y a pas de secret, chacun peut voir les autres voitures et apprendre pour les années suivantes. » La compétition est répartie en deux grandes classes – les prototypes et les

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▲ Les élèves du département mécanique mettent la dernière main à l’Ecotöff II avant le départ pour Rotterdam.

véhicules urbains – et en sept catégories selon la motorisation (essence, diesel, gaz to liquid, électrique, etc.). Depuis le début, le team luxembourgeois a fait le choix de concourir en prototype essence. « C’est la catégorie la plus en vue, celle où les challenges sont les plus importants », note Sam Elsen. Celle aussi des records les plus impressionnants : l’an dernier, un prototype français a établi un nouveau record avec un rapport de 3.314,9 km pour un litre d’essence. « Nous en sommes évidemment loin, poursuit le prof de mécanique. Mais nous n’avons pas non plus les moyens d’une université qui dispose de labos de développement de voitures. Nous, nous travaillons en moyenne un soir par semaine entre octobre et mai pour être au point. » Mais en se positionnant à la 21e place l’an dernier sur les 60 concurrents de sa catégorie, le lycée fait finalement mieux que se défendre.

UN MOTEUR DE DÉBROUSSAILLEUSE Pour réunir un budget qui tourne autour des 20.000 euros, la jeune équipe grand-ducale peut compter sur plusieurs sponsors. « Le Fonds national pour la recherche nous finance

une bonne partie du matériel, explique Damien Brauch, un autre professeur actif sur le projet. Cette année, la société EuroComposites d’Echternach nous a aussi fourni des matériaux extrêmement légers – les mêmes que ceux utilisés pour concevoir les parois dans les avions – pour fabriquer la carcasse. » L’équipe du lycée technique peut encore compter sur le soutien de RTL, des Voyages Emile Weber et des magasins S-Cape, spécialisés dans le cycle, qui ont fourni et adapté une partie du matériel au niveau des roues. Étincelante dans sa robe rouge feu, l’Ecotöff II est équipée d’un moteur de débroussailleuse de 35 cc mais qui bénéficie, depuis cette année, d’un système d’injection électronique. Sur la balance, elle affiche à peine 46 kilos. Le poids étant un des secrets de la conduite économique, l’école a dû procéder à un casting parmi ses 1.450 élèves pour trouver deux nouveaux chauffeurs, un garçon et une fille. Des pilotes amateurs qui, casque et combinaison compris, ne pèseront guère plus de 50 kilos. « Le peu d’expérience de nos pilotes sera un handicap pour cette année, convient Sam Elsen. Mais nous espérons quand même battre notre record. » Avant une prochaine édition qui pourrait, selon les rumeurs, les conduire jusque dans les rues de Londres. ◄ En résumé Le Lycée technique des arts et métiers de Luxembourg participe pour la septième année consécutive au Shell Eco-marathon. Une expérience unique qui pousse les équipes à chercher chaque année de nouvelles techniques pour faire plus de kilomètres avec un litre d’essence.


prêts pour la révolution de la ressource

toutes les entreprises de SUEZ environnement n’en font plus qu’une SITA, Degrémont, Ondeo Industrial Solutions, SAFEGE et 40 autres experts de l’eau et des déchets deviennent SUEZ environnement. Sur les 5 continents, SUEZ environnement accompagne les villes et les industries dans l’économie circulaire pour préserver, optimiser et sécuriser les ressources essentielles à notre avenir. ready-for-the-resource-revolution.com | lamesch.lu


Entreprises Université et entreprise

12 Étudiants, mais aussi auditeurs ► Depuis la faculté d’Économie, JE Lux promeut l’entrepreneuriat à l’Université, vient de fêter son premier anniversaire et prépare sa transmission. ► Ses services ont déjà été sollicités par huit organisations. ► Regard neuf, enthousiasme, voire potentiel de main-d’œuvre font partie des avantages de la formule. ― Texte : Florence Thibaut ― Photo : Mike Zenari

Ayant essaimé partout en Europe depuis les années 1960, le concept de junior entreprise met le bagage théorique des étudiants au service des entreprises. Première initiative du genre au Luxembourg, la JE Lux a débuté il y a un an, au salon Unicarreer.lu, dans l’idée de valoriser différemment les compétences acquises par les étudiants de l’Uni, et de leur ouvrir une expérience de terrain. « On s’est rendu compte qu’il y avait finalement peu de liens entre le monde académique et les entreprises. À travers leur cursus, les étudiants n’approchent pas la vie professionnelle, si ce n’est dans le cadre de stages plus ou moins intéressants. Dans le cadre de la junior entreprise, on propose de vraies missions avec une vraie rémunération », cadre Carl Massonneau, fondateur et président de JE Lux. Passé par la Sorbonne où il s’est familiarisé avec cette approche très répandue dans le paysage français, il a entamé des études en économie à Luxembourg, où il a mûri son projet. « Aujourd’hui, notre première ambition est de briser la fracture entre savoir théorique et savoir pratique, mais aussi de professionnaliser les étudiants, de leur donner le goût de l’entrepreneuriat. » Hébergée sur le campus de Limpertsberg, l’association bénéficie d’un vrai soutien académique. « Certains professeurs apportent un regard externe sur notre travail, leur carnet d’adresses et leurs conseils pour répondre aux difficultés inhérentes à toute association débutante. Nous collaborons également étroitement avec le réseau Jade, qui rassemble les junior entreprises d’Europe. C’est une plateforme d’échanges incroyable, qui prouve que les junior entreprises ont bien leur place dans le paysage économique d’un pays. » Pour la saison 2014-2015, les jeunes talents impliqués auront réalisé 8.500 euros de chiffre d’affaires, dans le cadre de huit missions, dont cinq déjà terminées. Désormais connue dans les amphis, JE Lux s’appuie sur un bureau central de 10 coordinateurs adossé à un réseau d’étudiants-auditeurs couvrant presque toutes les filières de l’Université. « Nous sommes organisés en quatre

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▲ Pour Carl Massonneau, il faut « briser la fracture entre savoir théorique et savoir pratique ».

départements : stratégie et communication, coordination, RH et volet juridique, dévoile le président de JE Lux. Il y aura toujours un connecteur entre l’étudiant et l’organisation qui fait appel à nous. » L’association fonctionne comme une entreprise miniature, avec convention signée par le client et les étudiants missionnés, grille tarifaire, reporting, managers, conseil d’administration. « Quand une entreprise nous contacte, elle est prise en charge dans les 24 heures. Un premier entretien, étape essentielle, a lieu pour bien comprendre ses attentes et l’environnement dans lequel elle évolue. Nous réalisons un devis selon la difficulté de la mission, sa longueur ou le nombre d’étudiants à mobiliser. Les auditeurs sont choisis selon leur parcours, leur curiosité et leur engagement. Nous accordons beaucoup d’importance au suivi du travail effectué, c’est crucial pour être reconnu comme partenaire sérieux. » 10 % des prestations vont dans les caisses de l’asbl, le reste est versé aux auditeurs en herbe. Une saison de la JE démarre en octobre pour finir avant les examens et colle aux contraintes académiques. « L’idée n’est pas de surcharger les étudiants, mais de leur

permettre d’apprendre autrement. Nous formons nos volontaires, notamment à l’aide de jeux de rôles. » La palette de services proposés va du marketing à l’audit. « Jusqu’à présent, ce sont les études de marché et la traduction en français, anglais, allemand ou luxembourgeois qui ont eu le plus de succès. » Dans toute mission, l’entreprise vise le win-win. Pour les entreprises et en particulier les start-up, l’avantage est de pouvoir recourir à une main-d’œuvre bien formée, bon marché, multilingue. « Pour l’étudiant, l’intérêt numéro un est de sortir du monde facile de l’Université et de se challenger », renchérit Carl Massonneau. Pour l’Uni, c’est une belle vitrine sur la qualité des formations offertes. Amenée par essence à être renouvelée chaque année, JE Lux a mis en place des solides processus de transfert de connaissances. « Nous venons de lancer notre campagne de recrutement. Chaque année, le staff va changer, la transmission du savoir collecté sera déterminante pour le futur de la junior. Cette première année nous aura permis de tester la formule, de nous faire connaître et de créer la bonne structure », achève le fondateur de la junior entreprise, qui quittera la présidence à la rentrée prochaine pour faire un stage à l’étranger. « Chaque étudiant est un futur professionnel, le potentiel de créativité est immense. » ◄ En résumé Lancée il y a un an, la junior entreprise adossée à l’Université du Luxembourg a déjà conquis huit entreprises. Amenée à renouveler son équipe chaque année, elle s’ancre dans des processus bien définis et une entraide de chacun.


Adrien Ney photographié à l’aéroport de Luxembourg par Julien Becker.

Adrien Ney lit City Mag depuis 2009. Merci

Maison Moderne célèbre 20 ans d’édition indépendante et 200.000 lecteurs. Découvrez 20 ans d’archives sur www.maisonmoderne.lu/20


Entreprises Start-up

LE RESTO À LA MAISON ► Un portail web et des services logistiques : Foostix assure la commande dans le restaurant de son choix et la livraison des plats directement chez le client. ― Texte : Sébastien Lambotte ― Photos : Olivier Minaire

Chaque mois, Paperjam1 propose un gros plan sur une start-up luxembourgeoise qui sera peut-être un fleuron de l’économie de demain. Ce mois-ci : Foostix Ses cogérants : Stephen Edwards et Steve Edwards Sr

LE CONCEPT Foostix permet, via un portail en ligne, de commander des plats de la carte d’un restaurant partenaire et de les faire livrer à domicile. « Et ce au moment le plus opportun, explique Steve Edwards Sr, le fondateur et CEO. Le client peut effectuer ses commandes et payer en ligne à toute heure, même lorsque le restaurant est fermé. Il peut aussi prendre connaissance d’un large choix, d’une offre dont il ne soupçonne peut-être même pas l’existence à proximité de chez lui. Il a la possibilité d’effectuer des recherches selon ses envies du moment. » Le restaurateur, de son côté, peut, via cette « sous-traitance », proposer un service de livraison, sans forcément avoir à investir dans du matériel roulant et des livreurs. « Il accède donc à un plus vaste marché. »

088 ―

― Juin 2015

LE DÉVELOPPEMENT Foostix a été créé sur base du constat, en 2012, que le nombre de restaurants proposant un service de livraison demeurait relativement restreint. Or, une demande existe, comme l’a confirmé une étude de marché réalisée par TNS-Ilres. « De plus, les restaurants qui offraient cette possibilité devaient le plus souvent mobiliser du personnel dédié à la salle pour acheminer les plats, précise Steve Edwards. Nous avons voulu leur proposer une solution. » Foostix a, dans un premier temps, assuré un service logistique pour les restaurants. « Puis, nous rendant compte des possibilités offertes par le web, nous avons développé un portail commercial dédié, qui permet aux clients de découvrir une offre de proximité, de consulter des menus, de réserver ou de se faire livrer à domicile. » Le concept a pris. Steve Edwards, après avoir démarré seul, gère l’entreprise avec son fils, Stephen, directeur et responsable IT. Et emploie une douzaine de livreurs.

LE MARCHÉ Foostix étend son marché de manière organique. Son approche exige de séduire deux clientèles différentes. Les restaurants partenaires d’une part, qu’il faut convaincre des opportunités de recourir à ses services. « Ils peuvent bénéficier via le portail d’une présence et d’une visibilité renforcées en ligne, et accéder à un nouveau marché, grâce aux services de livraison à domicile », explique Steve Edwards. D’autre part, il faut rendre le service visible aux yeux du consommateur final. « Beaucoup ignorent encore que cette possibilité de se faire livrer existe au Luxembourg. Nous étendons donc notre marché progressivement, en travaillant au développement de l’offre et de la demande. Notre premier souci est la préservation de qualité du service et donc du maintien d’un temps de livraison bref. Nous sommes actuellement bien présents sur Luxembourg-ville et dans le sud du pays. Nous poursuivons un développement continu. »

LES PERSPECTIVES Foostix nourrit des ambitions logiques. En deux ans, la société a triplé ses chiffres et connaît une progression quotidienne d’une quinzaine de livraisons par jour. Au début de l’année 2015, face aux enjeux inhérents à cette croissance, Foostix a établi un partenariat avec Linc, le nouvel incubateur et investisseur luxembourgeois à destination des start-up du web, adossé à Yellow.lu. « Pour renforcer notre business, il nous fallait investir, mais aussi accéder à d’autres compétences. Nous avons beaucoup d’idées, mais manquons de moyens et de compétences nécessaires pour les mettre en œuvre, poursuit Steve Edwards. C’est dans cette optique que nous avons pu établir un partenariat entrepreneurial avec Linc, qui nous permet notamment de renforcer notre force de frappe commerciale et de marketing. »



Place Financière Voici un aperçu des principales informations de ces dernières semaines, à lire en détail sur www.paperjam.lu. Retrouvez ensuite 10 sujets clés sélectionnés par la rédaction. Entre janvier et février 2015, la somme des bilans provisoires des institutions financières monétaires a connu une La hausse, sur un légère baisse de an, de la somme 0,2 %, reculant des bilans des à 1.018,7 milinstitutions liards d’euros. financières. Mesurée sur un an, en revanche, l’évolution est haussière avec un taux important de 11,3 %.

Digicash par BGL BNP Paribas – après Post Finance en août 2013 et la Bil en mars 2014 – fait que, désormais, plus de 80 % des comptes primaires luxembourgeois sont éligibles Digicash. Une situation qui fait du Luxembourg un leader européen en matière de paiement mobile bancaire. Parallèlement, la société revendique la présence du QR code Digicash sur près de 60 % des factures établies par les grands émetteurs basés au Luxembourg (parmi lesquels Foyer, Tango, Orange ou encore la Ville de Luxembourg).

La cinquième banque chinoise du Luxembourg, Agricultural Bank of China, Luxembourg Branch, a posé ses valises le 27 mars au 65, boulevard Grande-Duchesse Charlotte, deux ans après l’annonce faite, sous le gouvernement précédent, de cette installation. Deux responsables chinois ont été nommés, avec effet au 12 février dernier et pour une durée indéterminée : un homme, Bingkai Zheng, 41 ans, de la province de Zhjiang, et une femme, Wen Jiang, 43 ans, originaire de la province de Sichuan. ABC est la troisième entreprise mondiale au classement Forbes Global 2000, après ICBC et China Construction Bank, deux autres banques établies elles aussi au Grand-Duché.

La banque BGL BNP Paribas a dégagé en 2014 un résultat net part du groupe en hausse de 2 % par rapport à l’exercice précédent à 342,5 millions d’euros. Le produit net bancaire a fait du surplace à 1,346 milliard d’euros, alors que le résultat brut d’exploitation s’est affiché à 680,6 millions. La banque va distriC’est, en millions buer à ses actiond’euros, le divi­ dende BGL BNP naires un diviParibas perçu dende total de par l’État 174,86 millions luxembourgeois. d’euros, dont 59,45 millions à l’État luxembourgeois. BGL BNP Paribas, qui affiche 5,2 milliards d’euros de fonds propres, part de groupe, « reste la banque la mieux capitalisée au Luxembourg », se sont félicités ses dirigeants lors de la présentation de ces résultats.

11,3 %

Depuis la première expérience lancée avec la BCEE en novembre 2012, la collaboration entre la jeune société Digicash et les grandes banques luxembourgeoises a connu des progrès très rapides. L’adoption officielle, le 27 mars dernier, de la solution

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― Juin 2015

59,45

Une circulaire de la Commission de surveillance du secteur financier, publiée fin mars, demande aux

opérateurs du secteur financier de se montrer proactifs dans la lutte contre la fraude fiscale et d’anticiper la nouvelle directive anti-blanchiment sans attendre sa transposition en droit luxembourgeois. Le texte rappelle aux entités surveillées et à leurs dirigeants (direction autorisée et administrateurs) le caractère « impératif » de la mise en place de procédures et infrastructures nécessaires en matière d’échange automatique d’informations fiscales dans un environnement réglementaire en profonde mutation, qui fera de l’échange automatique d’informations la norme absolue tant avec les partenaires de l’UE qu’avec les ÉtatsUnis (lire aussi l’article page 94). La BCEE a présenté des résultats 2014 « solides », avec un bénéfice en hausse de 4,9 % à 218,5 millions d’euros. Le produit bancaire, lui, est en repli de 1,5 % et s’élève à 598,8 millions d’euros. Quant à la marge nette d’intérêt, elle est en diminution de 2,9 % en raison de la baisse généralisée des taux d’intérêt. L’ONG néerlandaise Somo s’en est prise aux multinationales opérant en Grèce à travers des domiciliations aux Pays-Bas ou au Luxembourg, dans un rapport présenté début avril à Athènes. Le document cite abondamment le Luxembourg et sa position de numéro un dans les flux entrants d’investissements directs en Grèce, avec une part de marché

de 23 % en 2011 et 31 % en 2012 (les chiffres de l’ONG ne vont pas au-delà de cette date). Keytrade Bank Luxembourg a lancé ses nouvelles applications mobiles pour iPhone, iPad et Android, permettant de placer directement des ordres de Bourse en temps réel sur un total de 18 marchés boursiers mondiaux. Le conseil d’administration de l’Association des compliance officers a élu, pour une durée de deux ans, Thierry Grosjean, 39 ans, le CEO de Centuria Capital Luxembourg, en tant que nouveau président. Il succède à Jean-Noël Lequeue, qui occupait les fonctions depuis 2008. Une nouvelle activité pour Pecoma, société spécialisée dans la consultance en matière de pensions et de fonds de pension et filiale de Lalux et la BCEE : la voilà désormais agréée en tant que professionnel du secteur de l’assurance, pour des activités de consultance actuarielle et les services de gouvernance d’entreprise pour des compagnies d’assurance et de réassurance. Un élargissement d’activité qui s’accompagne d’un nouveau nom : Pecoma Actuarial and Risk.


48,1 %

C’est la hausse du montant total de primes brutes émises (à 95,2 millions) par Bâloise Luxembourg au cours de l’exercice 2014. Une performance largement portée par l’acquisition, fin 2013, des activités luxembourgeoises de l’assureur belge P & V sous la marque Vivium.

L’Administration des contributions directes exige que les administrateurs de Leyne StraussKahn, qui fut présidée par Dominique Strauss-Kahn, remboursent les impôts impayés sur les salaires. Les anciens dirigeants du holding qui aurait dû devenir une banque d’affaires s’y refusent et vont demander l’arbitrage du tribunal administratif, ce qui signifie une certaine publicité du dossier. Le montant réclamé par l’administration fiscale n’a rien d’extraordinaire, 74.792,40 euros, si on le compare avec le passif qui a été laissé par LSK qui, si le cours des choses s’était écoulé normalement,

« Si Londres quitte l’UE, notre siège sera au Luxembourg. » Martin Gilbert, le CEO d’Aberdeen Asset Management, indique son intention de transférer le QG européen du groupe vers le Grand­Duché en cas de victoire du « oui » au référendum britannique promis pour 2017.

luxembourgeoise contre le liquidateur du « fonds Madoff » Luxalpha et, indirectement, la banque UBS Luxembourg qui en était le dépositaire. L’enjeu portait sur 30 millions d’euros. La Cour d’appel de Luxembourg a confirmé, le 1er avril dernier, un jugement commercial du 27 avril 2012 refusant la restitution de ce montant, alors qu’un ordre d’achat avait été passé par Oddo le 4 novembre 2008, soit plus d’un mois avant que le scandale financier éclate. Oddo estimait ne pas devoir être traitée comme n’importe quel autre créancier…

La société de gestion de fortune du groupe Foyer, CapitalatWork, développera un nouveau bureau en Belgique en septembre pour asseoir son ancrage local. Déjà présente à Anvers et à Gand, la société s’établira ainsi à Courtrai. « Nous voulons poursuivre la philosophie d’investissement opérée durant les 25 dernières années, qui nous a permis de traverser deux crises », explique Claude Eyschen, le CEO de CapitalatWork. Comme on pouvait s’y attendre, le président de la SNCI, Patrick Nickels, prend aussi la présidence du Luxembourg Future Fund officiellement créé fin avril. Il sera épaulé par l’ancien CEO de SES, Romain Bausch (lire aussi l’article page 102).

LSK doit quelque 75.000 euros au fisc.

devait servir d’ossature à la création d’une banque d’affaires au Luxembourg : une source proche du dossier évoque un montant de déclaration de créances d’environ 100 millions d’euros. Assya Asset Management, une autre entité du groupe LSK au Luxembourg, spécialisée dans la gestion d’actifs et placée en liquidation judiciaire, doit 138.000 euros au Centre commun de la sécurité sociale pour des cotisations impayées. La société de gestion française Oddo a perdu une nouvelle fois la face devant la justice

Place financière Brèves

Après l’annonce du retrait de Royal Bank of Scotland du Luxembourg, le cabinet de conseil et d’audit PwC a été nommé pour conseiller l’institution britannique dans la vente de sa division de gestion de fonds qui, fin 2014, gérait quelque 28,5 milliards d’euros d’actifs. Au cours de l’exercice 2014, la Bourse de Luxembourg a ouvert ses portes à 10.669 nouvelles valeurs en provenance de 750 émetteurs, soit une hausse annuelle de 5 %.

Vitis Life a présenté « de solides résultats financiers » pour 2014. La compagnie d’assurance du groupe KBL affiche un encaissement de 237,5 millions d’euros, en hausse de 73 % par rapport à 2013, pour un résultat annuel de 13,6 millions d’euros. « Vitis Life a nettement dépassé ses objectifs financiers, enregistrant une nouvelle année de rentabilité durable », se réjouit Nicolas Limbourg, le CEO de Vitis Life. Le chantier du futur siège de la Banque ING a pris un virage décisif, fin avril, avec la pose de la première pierre en présence du Premier ministre, Xavier Bettel. Fin 2016, un bâtiment flambant neuf de quelque 20.500 m2 s’érigera fièrement, avec près de 14.600 m2 de bureaux (dont 10.000 occupés par ING), 2.400 m2 de commerces (parmi lesquels le supermarché Primavera et un magasin K Kiosk) et 3.500 m2 de logements. « C’est un jour historique », a commenté Luc Verbeken, le CEO d’ING Luxembourg, dans un discours prononcé pour moitié en luxembourgeois et pour moitié en français (lire aussi en page 105).

Selon le président de l’ABBL, les mises en œuvre réglementaires auxquelles le secteur financier est soumis ont coûté quelque 400 millions d’euros à l’ensemble des banques présentes au Luxembourg. Soit l’équivalent de 1 % du PIB. « Ce sont des moyens que nous ne pouvons pas utiliser pour mieux servir nos clients », a regretté le président de l’ABBL, Yves Maas (Credit Suisse). Le journaliste français Édouard Perrin, qui a révélé le scandale LuxLeaks, a été inculpé fin avril par une juge d’instruction luxembourgeoise comme co-auteur de vol domestique, violation du secret professionnel, violation de secrets d’affaires, blanchiment et accès frauduleux à un système de traitement automatisé de données. Une inculpation qui entre dans le cadre de la seconde vague de révélations, indépendante, donc, de la première déclenchée par Antoine Deltour, l’ancien auditeur de PwC, lui aussi mis en examen. D’après le Parquet, M. Perrin serait en fait l’instigateur de la disparition des documents au travers d’une commande faite à l’une de ses sources. Le groupe d’assurances Foyer revendique, fin 2014, 205.826 clients, soit une hausse de 4,6 % sur un an. Le chiffre d’affaires, lui, a bondi de 13 % à 949,5 millions d’euros (6,9 % hors transfert du portefeuille de pensions complémentaires en provenance d’IWI), pour un bénéfice en progression de 9,7 % à 76,71 millions d’euros. Nouveau record pour les fonds d’investissement : fin mars, le patrimoine global net a atteint 3.524 milliards d’euros, soit une progression de 13,89 % depuis le début de l’année et de plus de 30 % en un an. Les souscriptions nettes se sont élevées, en mars, à 49,92 milliards d’euros : ce sont les plus élevées de tous les temps.

― Juin 2015 ― 091


Place financière Brèves

26,47

C’est, en milliards, le montant des primes d’assurance encaissées par les assureurs membres de l’Aca (Association des compagnies d’assurances) en 2014, soit près de 19 % de mieux qu’en 2013.

« J’ai perdu le contrôle de mes documents et je désapprouve en partie ce qui en a été fait. » Antoine Deltour, le Français à l’origine des révélations de LuxLeaks, invité au Luxembourg à participer à un débat, a tenté tant bien que mal (et plus mal que bien) de justifier son geste. Les assureurs, par la voix de leur association professionnelle, l’Aca, demandent au gouvernement une hausse des plafonds fiscalement déductibles dans l’assurance pension complémentaire. Celui-ci étant figé à 1.200 euros par an depuis 1999, l’Aca plaide pour un nouveau plafond annuel à 1.600 euros. « Avec la fin du secret bancaire, le Luxembourg revit. » Le Premier ministre Xavier Bettel, invité à la pose de la première pierre du futur siège d’ING Luxembourg, n’a pas manqué d’insister sur le savoir-faire des professionnels de la Place : des compétences qui, à ses yeux, permettent au pays de continuer à aller de l’avant.

Thierry Seignert (IBM) a été reconduit à la présidence de l’Association des PSF de support, qui regroupe 49 des 81 sociétés disposant de cet agrément et réalisant plus d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires.

La guerre que se livrent les clans La firme d’avocats OPF Partners Becca et Lux, associés dans la a été nommée « Luxembourg Law firme Kurt Constructions et dans Firm of the Year » à l’occasion des le fonds Olos, en partie devant les Chambers Europe Awards for tribunaux, a débouché sur la Excellence 2015, qui se sont tenus nomination d’un expert pour véri- à Amsterdam fin avril. fier la pertinence des comptes 2011 à 2013 de Kurt. L’expert-comptable Paul Laplume avait été désigné par Le 6e Prix européen de la microfinance est lancé ! Doté de une juge, mais l’intéressé a 100.000 euros de récomfinalement décliné l’offre pense, il sera remis à en invoquant un conflit l’occasion de la d’intérêts avec le Semaine européenne groupe Becca. Il C’est, en euros, de la microfinance s’agit désormais le montant du qui se tiendra en pour les deux actionPrix européen naires de se mettre novembre 2015. de la microfinance Ce prix s’adresse d’accord sur le nom qui sera décerné aux institutions qui d’un nouvel expert et à l’automne. travaillent dans les de faire valider sa États dits fragiles et qui nomination par la juge. proposent des services financiers et non financiers destinés à La Cour d’appel a acquitté le banaccroître la résilience des populaquier Peter Rusch des préventions tions affectées. Les candidatures de faux et d’usage de faux dans une sont attendues jusqu’au 3 juin à affaire de détournement de fonds 17 h (contact@e-mfp.eu). appartenant à l’homme d’affaires autrichien Gaston Glock. Ancien Lancés en mars 2013, les travaux dirigeant de la banque Ferrier de construction des deux nouveaux Lullin à Luxembourg (rachetée immeubles sur le site de BGL BNP par UBS avant d’être liquidée), Paribas au Kirchberg doivent se M. Rusch était présenté comme le complice de Charles Ewert et était terminer d’ici à la fin de l’année. poursuivi pour l’avoir aidé à établir Soit six mois d’avance sur les plans des montages financiers et des cloinitiaux. L’entrée d’une partie du nages de sociétés, via notamment personnel est programmée pour la société panaméenne Reofin début 2016 avec les équipes de BNP International, pour spolier Paribas Securities Services LuxemM. Glock. En première instance, bourg (BP2S), actuellement basées Peter Rusch avait été condamné à Howald. Le projet immobilier, à six mois de prison avec sursis conçu par le cabinet M3 Architectes, et 5.000 euros d’amende. en charge du projet, en collaboration avec le bureau d’études Goblet Lavandier, représente un investisseLa Banque populaire de Chine ment de 200 millions d’euros. a attribué un quota de 50 milliards de yuans (7,3 milliards d’euros) au Luxembourg dans le cadre du programme RQFII (Renminbi Qualified Foreign Institutional Investor), permettant à des investisseurs institutionnels basés au Luxembourg d’investir directement sur le marché des capitaux domestique en Chine, Les nouveaux auprès des Bourses de Shanghai et bâtiments Shenzhen (lire l’article page 98). de BGL BNP

100.000

Alter Domus a reçu le feu vert des autorités de surveillance de l’île de Malte pour y exercer l’activité de dépositaire en relation avec les développements liés à la directive AIFM.

092 ―

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Paribas devraient être occupés à partir de début 2016.

Il concerne deux bâtiments d’une surface cumulée de 51.500 m2. Un troisième immeuble de 18.000 m2 est susceptible de venir s’ajouter au site. Selon un rapport du FMI, la part de la finance islamique dans le volume total de la finance mondiale est de 1 %, soit un montant de 1.800 milliards de dollars. Après la hausse importante de l’activité tout au long de l’exercice 2014, l’encaissement du secteur des assurances a enregistré un recul annuel des primes de 2,3 % au premier trimestre 2015, selon les chiffres communiqués par le Commissariat aux assurances. Un repli qui touche autant les branches non-vie (-2,01 %) que vie (-2,33 %). À noter dans ce dernier domaine un contraste entre les encaissements relatifs aux produits à rendement garanti (-27,52 %) et ceux pour les produits vie en unités de compte (+29,92 %). Le groupe NPG Wealth Management, spécialisé dans l’assurance vie au niveau européen en LPS, annnonce une restructuration de sa stratégie et de son modèle d’activité. Bilan : 55 postes seront supprimés sur un total de 200 effectifs. Dans le même temps, la structure du groupe est simplifiée, avec l’abandon des activités à Gibraltar et aux Bermudes.


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Place financière Fraude fiscale et blanchiment

01 Résister au cheval de Troie fiscal ?

► L’étau se resserre sur le Luxembourg qui est l’un des seuls pays à ne pas considérer la fraude fiscale comme une infraction primaire au blanchiment. ► Un vent de panique plane sur la place financière et un arrêt récent de la Cour de cassation n’apaise pas le climat. ► Désormais, les clients des banques pourront demander des dommages contre celles qui n’auront pas respecté leurs obligations de vigilance. ― Texte : Véronique Poujol

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Coup de théâtre dans la lutte contre le blan­ chiment et la criminalité financière et surtout le droit des victimes : grâce à un arrêt de la Cour de cassation du 25 mars dernier, les victimes d’une fraude financière pourront désormais voir engagée directement la res­ ponsabilité civile de leurs banques, si elles n’ont pas rempli leurs obligations profession­ nelles, et donc leur réclamer des indemni­ sations. Une issue qui n’était pas possible auparavant, pour des raisons difficilement explicables. La juridiction suprême luxembourgeoise répare là ce qui apparaissait comme une « incohérence » du droit, sous le prétexte de règles limitées à la protection de l’inté­ rêt général et non pas celui du particulier. Or, l’un va rarement sans l’autre. De plus,

▲ Face à la pression européenne, les murs se fissurent, les banquiers paniquent et la CSSF, pourtant réputée business friendly, peut difficilement aller contre le courant.


Place financière Fraude fiscale et blanchiment

ce droit était sélectif. Ce qui valait pour la circulation automobile n’était pas applicable au secteur financier ni aux affaires d’urba­ nisme. Ainsi, la victime d’un accident de la route peut demander à l’automobiliste ayant grillé un feu rouge le droit d’obtenir réparation, alors que la règle a été édictée dans l’inté­ rêt général (en l’occurrence la sécurité de la circulation sur les voies publiques). En revanche, les clients d’un établissement financier, en délicatesse avec la réglemen­ tation financière, étaient jusqu’alors privés de cette faculté au nom de la théorie, un peu fumeuse, de la « relativité aquilienne » : selon ce principe, seules les personnes spécialement protégées par la règle de droit enfreinte peu­ vent demander réparation du dommage qui en est résulté.

UNE CONCEPTION « RELATIVE DE LA RESPONSABILITÉ » En schématisant sommairement cette « con­ ception relative de la responsabilité », selon la définition qu’en a faite le magistrat John Petry dans ses conclusions, l’inobservation par une banque de règles de conduite ne cons­ titue une faute que si cette règle vise les per­ sonnes qu’elle a pour objet de protéger et dans la mesure où survient un dommage contre lequel elle a pour but de prémunir la victime. Bref, les cours et tribunaux avaient jusqu’alors soutenu que les victimes d’escro­ queries ne pouvaient pas tirer profit d’une défaillance des établissements financiers dans l’exécution de leurs obligations de vigi­ lance, notamment en matière d’anti­blanchi­ ment, pour aller ensuite leur réclamer des indemnités. On ne pouvait pas invoquer le secours de la loi de 1993 sur le secteur financier, « loi

« La fraude fiscale n’est pas du blanchiment. Elle est même exactement l’inverse. » Thierry Pouliquen (BSP)

Les banques vont-elles être incitées à dénoncer leurs clients plus qu’elles ne l’ont fait jusqu’à présent, avec des déclarations de soupçon adressées au Parquet qui dissimulent à peine leur volonté de se débarrasser d’eux à bon compte ?

de police administrative » organisant l’accès à certaines professions et visant uniquement les professionnels du secteur financier, com­ me base légale permettant aux particuliers d’agir directement en justice sur la base d’un manquement par rapport à ces dispositions. Dans une vaste affaire d’escroquerie – deux ordres de virement sur la base de fausses fac­ tures et l’acceptation de prélèvements de fonds importants, 715.000 euros, par des escrocs présumés – ayant impliqué la Bil, les juges de première instance et d’appel avaient « considéré que l’obligation de vigilance imposée aux professionnels du secteur financier au titre de la lutte contre le blanchiment a pour finalité la détection de transactions se rapportant au trafic de stupéfiants ou d’activités criminelles organisées, donc poursuit un but d’intérêt géné­ ral ». Et d’en « déduire que les victimes d’agis­ sements frauduleux ne peuvent se prévaloir de l’inobservation de cette obligation pour engager la responsabilité délictuelle d’un tel profession­ nel », résume l’avocat général John Petry. Les juges, poursuit­il, ont ainsi fait application de cette théorie de la relativité aquilienne. John Petry, en citant Georges Ravarani (une autre référence incontournable du droit au Luxembourg), juge cette exigence à la fois dangereuse et impraticable. Dangereuse, parce qu’elle retire à l’article 1382 du Code civil (« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par qui la faute duquel il est arrivé, à le réparer »), en empruntant des notions inspirées de droits étrangers, « son universalité qui rend précisément tout intérêt digne de protection à condition qu’il soit lésé par une faute ». Pour le magistrat du Parquet général, les obligations en matière de blanchiment font la démonstration que les règles édictées dans l’intérêt général protègent aussi, dans de nombreux cas, l’intérêt particulier. L’affaire d’escroquerie au cœur du recours en cassation

apporte aussi la preuve du caractère oiseux de la théorie de la relativité aquilienne. L’escroquerie fut préparée avec minutie et les rôles bien répartis. Tout laissait subo­ dorer un possible blanchiment du produit de l’infraction. Il y eut d’ailleurs une décla­ ration de soupçon à la Cellule de renseigne­ ment financier (par la victime mais pas par la banque). « Le blanchiment suspecté, relève John Petry, et par voie de conséquence les obli­ gations professionnelles aux fins de le prévenir que sa découverte déclenchait, ne concernaient dans ce cas concret pas exclusivement l’intérêt général, mais également l’intérêt particulier du demandeur en cassation. Dans le cas d’espèce, les obligations professionnelles protégeaient donc également l’intérêt particulier. »

INTÉRÊT GÉNÉRAL RIME AVEC INTÉRÊT PARTICULIER Cette théorie de la relativité aquilienne a été formellement rejetée par le droit belge et n’aurait pas réellement pénétré le système juridique français. Les juges luxembourgeois y sont restés longtemps favorables, avant que le vent ne tourne, sans doute aussi en raison du changement de génération (et de menta­ lité) au Palais de justice. Traditionnellement plus protecteurs des intérêts des institutions de la place financière que de ceux des (petits) clients, les magistrats se sont émancipés et montrent davantage de compassion que par le passé pour les victimes. « On renverse la vapeur », souligne, dans un entretien à Paperjam, l’avocat Thierry Pouliquen, associé de l’étude BSP et membre de la commission anti­blanchiment du Bar­ reau de Luxembourg. « Ça ouvre des cas très intéressants notamment pour les clients qui avaient été dénoncés par leurs banques dans des déclarations de soupçon dites de ‘confort’ (parce que leurs clients n’étaient pas fiscalement

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Place financière Fraude fiscale et blanchiment

en ordre dans leurs pays de résidence, ndlr) et qui pourraient désormais invoquer un préju­ dice, car ils n’ont pas pu retrouver un autre éta­ blissement. » Il y a forcément un revers de la médaille, car ce qui est bon pour les clients des banques ne l’est pas forcément pour les maisons de crédit. Ce renversement de jurisprudence fait crier au loup les banquiers, que l’on dit déjà tétanisés par la réglementation financière. Ils craignent ainsi les recours en responsa­ bilité de leurs clients à tout bout de champ, engageant leur responsabilité civile.

LE SPECTRE APOCALYPTIQUE L’avocat général avait jugé ces craintes large­ ment exagérées dans ses conclusions : « Le rejet de la théorie de la relativité aquilienne n’entraîne pas le spectre apocalyptique d’une responsabilité quasi automatique des profes­ sionnels, la mise en œuvre de celle­ci supposant toujours la preuve de l’existence d’un lien de causalité entre la faute et le préjudice. » L’obligation de vigilance à l’égard de la clientèle présente un « caractère impératif » et leur inobservation par un établissement financier constitue une faute. Ce qui ouvre effectivement les actions en responsabilité en pagaille et fait du métier de la banque une activité à haut risque par les temps qui courent. Les banques vont­elles être incitées à dénoncer leurs clients plus qu’elles ne l’ont fait jusqu’à présent, avec des déclarations de soupçon adressées au Parquet qui dissimu­ lent à peine leur volonté de se débarrasser à bon compte de déposants n’étant pas forcé­ ment propres sur eux dans leurs déclarations de revenus dans leur pays d’origine ? Pour autant, cela ne fait pas d’eux des blanchisseurs. L’avocat Thierry Pouliquen met en garde contre le risque de confusion, plus ou moins délibérée, entre des délits fiscaux et le blan­ chiment, des infractions pourtant très diffé­ rentes. « La fraude fiscale, écrit l’avocat dans un vade­mecum sur La lutte contre le blanchi­ ment d’argent (Promoculture / Larcier), n’est pas du blanchiment. Elle est même exactement l’inverse. La fraude consiste à cacher de l’argent à l’administration fiscale, le blanchiment à faire réapparaître l’argent sale au grand jour. » Les banquiers luxembourgeois sont pris en étau. Car si la fraude fiscale commise sur le territoire luxembourgeois n’est pas consi­ dérée comme une infraction primaire du blan­ chiment, ce qui fait du Grand­Duché un cas à part au sein de l’UE, les magistrats de la Cellule de renseignement financier (CRF) du Parquet estiment toutefois que le mobile

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fiscal n’est pas élusif de l’obligation de décla­ ration de soupçon de blanchiment. Mais de façon tout aussi paradoxale, pour ne pas dire hypocrite, la justice luxembour­ geoise a refusé 10 fois en 2012 l’échange d’in­ formations entre CRF sur la base d’infraction de blanchiment de la fraude fiscale. Le Parquet de Cologne a dû récemment faire les frais de ce refus des magistrats luxembourgeois d’ac­ corder l’entraide dans l’affaire de la fraude fiscale à la Commerzbank. Il faut de la grosse cavalerie, des manœuvres systématiques et des montants significatifs pour obliger la justice grand­ducale à lever le voile sur le secret bancaire. Les juges français auraient appris la leçon et n’insisteraient plus auprès de leurs homo­ logues au Luxembourg pour requérir des informations sur les simples fraudeurs du fisc. Il n’y aurait pas eu d’exception, affirme Thierry Pouliquen, pour l’ancien ministre Jérôme Cahuzac, s’il avait caché sa fortune dans des banques luxembourgeoises. Pour autant, face à la pression européenne, les murs se fissurent, les banquiers paniquent et le régulateur du secteur financier, pourtant réputé business friendly, peut difficilement aller contre le courant. La circulaire que la Commission de surveillance du secteur finan­ cier a publiée le 27 mars 2015, invitant les établissements tombant sous sa coupe à anticiper la 4e directive anti­blanchiment, témoigne de ce vent mauvais qui souffle sur la place financière. En demandant aux ban­ ques de « se conformer de façon proactive et sans tarder aux développements (échange automatique, extension des infractions pri­ maires à la fraude fiscale, ndlr), de coopérer pleinement avec les autorités compétentes en la matière et, de façon générale, d’agir confor­ mément aux principes d’intégrité, de transpa­ rence et de professionnalisme », la CSSF a commis, selon Thierry Pouliquen, une « faute pédagogique » qui contribue à entretenir la flamme de la confusion entre blanchiment et fraude fiscale, l’un punissable pénalement, l’autre toujours pas. On voit mal pourtant comment le Luxem­ bourg pourra résister au cheval de Troie fis­ cal que lui collent ses partenaires aux portes de ses établissements financiers. ◄ En résumé L’étau se resserre sur le Luxembourg qui est l’un des seuls pays de l’Union européenne à ne pas considérer la fraude et l’escroquerie fiscales comme des infractions primai­ res au blanchiment. Or la 4e directive européenne impose aux États membres de lutter contre l’évasion fiscale. Les banquiers sont donc placés entre le marteau et l’enclume. Le vent de panique plane sur la place financière et un arrêt récent de la Cour de cassation n’apaise pas le climat. Désormais, les clients des banques pourront demander des dommages contre celles qui n’auront pas respecté leurs obligations de vigilance.

Dépénalisation de la fraude fiscale

Pour combien de temps ?

Le village des irréductibles Luxembour­ geois qui ignorent encore l’incrimination de blanchiment venant de la fraude fiscale va­t­il pouvoir résister encore longtemps dans ses retranchements ? Les spécia­ listes du droit financier se demandent si le législateur osera maintenir la dépénali­ sation de la fraude fiscale, alors que la 4e directive anti­blanchiment va imposer dans l’Union européenne la chasse aux évadés fiscaux et que la CSSF encourage déjà les établissements financiers à anti­ ciper les effets de ce texte européen. Aucune législation nationale ne les y oblige. Là encore les banquiers luxem­ bourgeois sont placés entre le marteau et l’enclume. La fraude fiscale avait été dépénalisée par le législateur luxembour­ geois en 1993. Comme le rappelle Thierry Pouliquen, la fraude fiscale est uniquement punissable d’une amende et ne figure pas au rang des infractions primaires susceptibles de don­ ner lieu à une infraction de blanchiment. Quant à l’escroquerie fiscale, punissable d’une peine minimum d’un mois à cinq ans de prison, elle ne peut pas rentrer non plus dans le champ des infractions primaires « qui, au sens du droit antiblanchiment, est nécessairement une infraction grave, c’est-à-dire punie d’une peine d’emprisonnement d’un minimum supérieur à six mois », écrit l’avocat. Le Luxembourg ne peut pas poursuivre la fraude fiscale commise à l’étranger, parce que la condition de la double incrimination n’est pas remplie. Ce qui a permis de renvoyer à leurs pénates des magistrats étrangers qui deman­ daient l’exécution de l’entraide pour lever le secret bancaire sur des comptes de leurs résidents dans des banques au Grand­Duché. Il faudrait donc réformer la loi de 1993 et durcir les sanctions (plus de six mois de prison) pour faire rentrer l’escroquerie fiscale, et pourquoi pas la fraude, dans le moule de la nouvelle directive euro­ péenne. V. P. ◄


Stephan Gehmacher photographié à la Philharmonie par Julien Becker.

Stephan Gehmacher lit Delano depuis 2011. Merci

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Place financière Renminbi forum

02 Quand la monnaie ► Luxembourg for Finance organise son second Renminbi Forum le 3 juin prochain avec, notamment, des orateurs venus directement de Chine. ► En trois ans, le Grand-Duché est devenu un acteur incontournable du RMB et entend en saisir toutes les opportunités. ― Texte : Jean-Michel Lalieu

Pas plus tard que le 29 avril dernier, la Banque populaire de Chine (PBoC) a attribué au Luxembourg un quota d’un montant initial de 50 milliards de yuans sous le programme RFQII (Renminbi Qualified Foreign Institutio­ nal Investor). Sous ce programme, des inves­ tisseurs institutionnels basés au Luxembourg pourront investir directement sur le marché des capitaux domestiques chinois. Après la désignation, en septembre 2014, par la même PBoC, de la branche luxembourgeoise de la banque chinoise ICBC en tant que banque de compensation en renminbi (ou RMB) au Luxembourg, c’est un nouveau signe de l’im­ portance du pays par rapport au développe­ ment international de la monnaie chinoise. La volonté de la Chine d’internationaliser sa monnaie pour la faire mieux refléter son poids réel sur la scène internationale est

récente. Mais l’intérêt pour le renminbi gran­ dit au fur et à mesure des étapes franchies pour en faire une véritable monnaie de réfé­ rence au niveau mondial. « C’est impression­ nant de constater qu’en trois ans, entre janvier 2012 et janvier 2015, le renminbi est passé du vingtième au cinquième rang des monnaies les plus utilisées dans le monde pour les paiements », constate Grégory Weber, directeur de l’équipe de recherche chez PwC Luxembourg. Face à ce nouvel enjeu financier, la Place a directe­ ment développé son savoir­faire pour devenir un acteur de référence. Des compétences qu’elle veut mettre en évidence au cours du second Renminbi Forum qui se tiendra le mercredi 3 juin. Organisé par Luxembourg for Finance (LFF), ce rendez­vous devenu désormais annuel veut faire mieux con­ naître les enjeux de la monnaie chinoise, mais également montrer à un public international le poids déjà acquis par les acteurs grand­ducaux dans ce domaine. « C’est le seul forum sur ce sujet dans la zone euro, note Elisabeth Adams, une des responsables de LFF. Le but est clairement de se positionner sur le renminbi. Nos compé­

L’intérêt du Luxembourg s’est manifesté tôt. Par exemple, en novembre 2013, Nicolas Mackel, CEO de Luxembourg for Finance, était déjà à la Renminbi World Conference à Pékin. ▼

tences sont déjà connues, mais nous voulons faire part de notre expérience et montrer l’étendue de notre réseau. » La meilleure preuve de cette reconnaissance, c’est que des orateurs vien­ dront tout droit de Chine, ce qui est assez rare. Pour cette deuxième édition du forum, LFF a souhaité des interventions sur des sujets techniques pour lesquels les connaissances sont encore lacunaires. « L’internationalisation du renminbi est arrivée à un stade où les investis­ seurs demandent plus de produits, explique Elisabeth Adams. Nous allons tenter de cerner ces demandes et détailler ce que les places finan­ cières peuvent imaginer faire pour développer ces nouveaux produits. » Au cours des prochaines années, le ren­ minbi devrait être la monnaie au plus fort potentiel haussier. Depuis les véritables débuts de son extension hors du continent asiatique, en 2012, le Luxembourg a mis tout en place pour devenir un centre de référence européen. « C’était pratiquement une obligation pour une place financière comme Luxembourg qui est ouverte aux échanges avec l’étranger, explique Grégory Weber. Une de ses forces est justement de permettre de traiter toutes les monnaies. Si une nouvelle devise prend de l’importance, le Luxembourg doit autoriser les acteurs à traiter cette devise comme toute autre. » Mais son importance croissante offre aussi des opportunités de voir de nouveaux acteurs aboutir à Luxembourg, attirés par l’activité autour de la monnaie de la deuxième économie de la planète. « Ça pourrait convaincre de nou­ velles banques chinoises de s’installer à Luxem­ bourg à côté de celles qui y sont déjà, poursuit le directeur de l'équipe recherche de PwC. Tout comme c’est une opportunité de drainer des opé­ rateurs étrangers qui voudraient investir en Chine et, à l’inverse, des Chinois qui souhaiteraient devenir actifs dans l’économie européenne. » Mais la Place grand­ducale a déjà fait plus que prendre ses marques. Actuellement, elle est considérée comme le hub étranger le plus important pour la distribution des fonds trans­ frontaliers avec un total de 300 milliards de renminbi investis en actifs dénominés en mon­ naie chinoise. La Bourse de Luxembourg est aussi le premier pôle européen d’obligations listées en renminbi tandis que les dépôts (61,5 milliards RMB fin 2014) et les prêts (61,1 milliards RMB fin 2014) en font aussi le principal centre du Vieux Continent. Des chiffres importants pour une aventure démarrée il y a à peine trois ans. ◄ En résumé Luxembourg for Finance organise le 3 juin la seconde édition du Renminbi Forum. Elle entend prouver par ce biais la volonté de la Place grand-ducale de devenir un acteur de référence face à l’internationalisation de la monnaie chinoise.

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PHOTO : LUXEMBOURG FOR FINANCE (ARCHIVES)

chinoise s’éveillera


Place financière Philanthropie

Pas qu’une affaire d’argent

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► Le recours à la solidarité privée est de plus en plus indispensable pour financer de nombreuses associations et institutions culturelles. ► Pour en faire un réflexe citoyen à part entière, plusieurs pistes sont envisagées, d’un cadre fiscal plus incitatif à la finalisation du projet de loi sur la philanthropie toujours dans les tiroirs. ► La Banque de Luxembourg organise sa deuxième journée événement en octobre.

PHOTO : EME

― Texte : Florence Thibaut

Culturellement très implantée dans les pays anglo-saxons, la philanthropie peine encore à s’imposer comme un réflexe au Luxembourg, même si plusieurs signaux montrent qu’elle commence à gagner du terrain. « Elle se développe partout en Europe. Au Grand-Duché, toutes les conditions sont réunies pour passer à la vitesse supérieure, mais on n’y est pas encore. La philanthropie est encore trop confidentielle, constate Philippe Depoorter, secrétaire général de la Banque de Luxembourg et responsable des services en philanthropie. On pense trop souvent qu’il s’agit d’un outil pour les banques ou les grandes fortunes. Or, c’est avant tout une pratique au service des citoyens, ici et maintenant. Il ne faut pas forcément créer une fondation pour s’y intéresser. Aider son voisin à faire ses devoirs, c’est déjà de la philanthropie. C’est toute une culture qu’il faut insuffler, pas à pas. » Créée en janvier 2009, la fondation Écouter pour mieux s’entendre (EME) ressent un intérêt de plus en plus aigu pour ses activités et repose, depuis ses débuts, sur un mécénat privé. « La philanthropie commence tout doucement à entrer dans les mœurs, partage Dominique Hansen, fondatrice d’EME, actuelle directrice et head of corporate relations pour la Philharmonie. Je pense que la naissance de la Fondation de Luxembourg a pu inspirer d’autres initiatives. Il y a une dynamique qui se met progressivement en place. » La Banque de Luxembourg formalise sa réflexion en 2008 avec un premier colloque « Saisir l’opportunité de la philanthropie au Luxembourg » afin de dessiner les priorités pour le secteur, donnant ainsi naissance à un premier livre blanc remis au gouvernement précédent. Depuis, plusieurs avancées se sont produites, dont la création de la Fondation de Luxembourg – en décembre de la même année – devenue ombrelle et centre d’expertise local pour de nouvelles fondations. « Le rôle socioéconomique de la philan-

▲ Encore plus que d’argent, le mouvement philanthropique a besoin d’énergie.

« À partir d’une bonne idée, on peut déjà faire changer les choses. » Philippe Depoorter (Banque de Luxembourg)

thropie est très important. Il y a aussi des gens dans le besoin au Luxembourg, on a parfois tendance à l’oublier. La première édition de notre journée dédiée à ces sujets a eu lieu en 2012. Elle a suscité beaucoup d’enthousiasme, il faut à présent entretenir le mouvement et la prise de conscience initiés alors », indique Philippe Depoorter. En tant que banquier, l’opportunité est donnée de jouer le rôle de connecteur entre les familles, les projets et les entrepreneurs socioculturels. Et de préciser : « Plutôt que de remettre des chèques à telle ou telle association, la banque a très tôt décidé de jouer un rôle systémique pour faire progresser l’ensemble du secteur. » Des mécanismes simples pour aider les petits projets, à l’image du « compte de projet » développé en Belgique par la Fondation Roi Baudouin et qui offre des possibilités de déductibilité des dons et une garantie de suivi des projets financés, font encore défaut. Avec le site philanthropie.lu offert à l’Œuvre nationale de secours Grande-Duchesse Charlotte, la Banque s’est donné la mission de mobiliser le grand public. Créée en 2008 pour mettre en lien donateurs, bénévoles

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Place financière Philanthropie

Journée de la philanthropie

Susciter des vocations

ou organisations, la plateforme recense 127 associations demandeuses de fonds ou de coups de pouce ponctuels. « Nous avons conçu ce site comme une vitrine sur toutes les bonnes initiatives de la Place, poursuit Philippe Depoorter. Le but est aussi d’identifier plus facilement les besoins non couverts. » Plus que d’argent, le mouvement philanthropique a besoin d’énergie. « Chacun peut contribuer à son échelle en apportant du temps ou des compétences. Le site entend, avant tout, diffuser un esprit d’engagement. À partir d’une bonne idée, on peut déjà faire changer les choses. C’est aussi une question de choix, les causes et les chemins sont multiples. » L’éducation publique a également un important rôle à jouer pour conscientiser les plus jeunes et leur rappeler leur responsabilité. « Bien aider est difficile. Il faut montrer l’exemple. Les lycéens sont autant de futurs philanthropes. »

RÉACTIONS EN CHAÎNE Dans le monde culturel, après la crise, de nombreux acteurs ont souffert de subsides réduits. Pour continuer à financer leurs activités, certaines associations et institutions commencent à devoir compter sur des relais privés. Émanation de la Philharmonie, la fondation d’utilité publique EME s’est d’emblée conçue hors de tout soutien public. « Nous dépendons exclusivement de dons, legs ou donations privés en provenance du Luxembourg, comme de l’étranger, explique Dominique Hansen. Chaque projet a un mécanisme de financement propre. Cela nous permet de conserver une certaine indépendance. C’est aussi la raison pour laquelle nous avons choisi de créer une fondation autonome. Ce format nous permet de toucher d’autres types de public, tout en bénéficiant du carnet d’adresses de la Philharmonie, qui elle est subventionnée par le ministère de la Culture. » Avec l’aide de 70 musiciens socialement engagés, le moteur de la fondation est d’offrir un accès à la musique à des personnes habituellement exclues de la vie culturelle : enfants en situation de précarité, public souffrant de mobilité réduite, en prison, à l’hôpital ou en maison de retraite. « Notre principale raison d’être est d’offrir un moment d’évasion, de

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partage et de plaisir hors de son quotidien. La musique est vraiment un langage universel, elle a des vertus calmantes et fédératrices. » Des dons en ligne de 20 à 500 euros permettent aux internautes découvrant l’association de la soutenir directement. « De fil en aiguille, nous attirons de nouveaux types de donateurs. Certains s’engagent même sur une période de trois ans, cela nous donne une belle marge de manœuvre. » En 2014, près de 420 projets ayant touché 11.500 personnes ont ainsi pu être organisés dans tout le pays grâce à un budget d’environ 130.000 euros, dont 85 % directement affectés à la réalisation des projets. La fondation s’est créée au fil du temps un réseau de 200 organisations partenaires (foyers, asbl, etc.). « Aujourd’hui, nous avons atteint notre rythme de croisière. Notre but n’est pas forcément de grandir, même si on sent un vrai engouement autour de notre travail, c’est très encourageant, partage Dominique Hansen, qui s’appuie sur une collaboratrice pour récolter les dons et coordonner les plannings. La première année, nous avions réussi à faire 88 événements mobilisant 1.858 spectateurs. Cela n’a fait qu’augmenter depuis. » Le projet itinérant « Joy Caravan » créé il y a deux ans, bel exemple de collaboration intergénérationnelle avec la Fondation JeanPierre Pescatore, réunit enfants et personnes âgées autour d’ateliers de djembé, de répétitions, puis d’un spectacle final. Pour les musiciens, c’est à chaque fois l’occasion de vivre une expérience humaine inédite. « Certains vont jouer en soins palliatifs ou auprès de personnes handicapées, on est loin de l’audience type. C’est à la fois très fort et très enrichissant, achève Dominique Hansen. Le modèle conçu par la fondation n’existe pas ailleurs, du moins pas à cette échelle. Nous avons rempli un vide, c’est une grande source de satisfaction. Nous avons encore beaucoup de pistes à explorer. Tous les trois mois, on examine les priorités ; nous ne manquons pas de travail ! » ◄ En résumé Pas encore un réflexe au Luxembourg, qui a pourtant un potentiel conséquent, la philanthropie a besoin d’un cadre culturel, législatif et politique adéquat pour s’épanouir. Elle s’adresse à tous les citoyens, quel que soit leur patrimoine, et peut s’ancrer dans des petites actions de proximité.

Le 3 octobre sera organisée la deuxième Journée de la philanthropie sous l’impulsion de la Banque de Luxembourg. Dans la foulée de celle de 2012, l’idée de l’action « La philanthropie ça marche » est d’organiser une grande fête autour de l’engagement sociétal, de resensibiliser M. et Mme Tout-le-Monde et de faire passer le message que s’engager peut se faire à tout niveau. Un vaste appel à candidatures initié début avril sur le site philanthropie.lu se clôturera le 15 juin avec la sélection d’une dizaine de projets inspirants. Cinq associations naissantes et cinq structures plus établies pouvant partager des best practices seront mises en valeur et se verront offrir tout un pack de formations, de la recherche de financement à la communication externe. « Pour une fois, nous ne proposerons pas de financement. Notre rôle sera celui de révélateur de talents et de bonnes idées », cadre Philippe Depoorter, de la Banque de Luxembourg. Les seuls critères pour faire partie du top 10 : améliorer le vivre ensemble, favoriser un projet collectif et avoir un ancrage luxembourgeois. « Nous avons eu envie de montrer tout ce qui se fait déjà au Luxembourg. On a parfois trop tendance à aller chercher de l’inspiration à l’étranger », affirme Pierre Ahlborn (photo), administrateur délégué de la Banque de Luxembourg. Un resources board composé de professionnels du secteur, dont la jeune Fondation de Luxembourg et le Service national de la jeunesse, aura la délicate mission de choisir les initiatives les plus éclairantes. Outre les possibilités de networking, l’intérêt pour les associations en lice sera de bénéficier d’une visibilité accrue. Les porteurs de projets peuvent dès à présent concourir en remplissant un formulaire en ligne. Une hotline a même été ouverte pour les assister dans leurs démarches. F. T. ◄

PHOTO : MIKE ZENARI (ARCHIVES)

◄ Émanation de la Philharmonie, la fondation d’utilité publique EME s’est d’emblée conçue hors de tout soutien public. Mais les dons privés permettent des actions pour des publics inédits.


Lydie Polfer photographiée à l’Hôtel de Ville de Luxembourg par Julien Becker.

Lydie Polfer lit Flydoscope depuis 1975. Merci

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Place financière Investissements / Bil

04 Le gros dos, en attendant ► Le Luxembourg Future Fund a été lancé discrètement. Les premiers dossiers sont espérés pour la fin du printemps. que fonds d’investissement spécialisé (sa durée de vie a été annoncée pour 17 ans, extensible à 19) et comme gestionnaire de fonds d’investissement alternatifs. Comme dit fin mars, LFF ne comporte pas, pour l’heure, de compartiment d’investissement direct, dont la gestion aurait pu être confiée à Gerard Lopez, via Genii Investment Management (GIM). Faute d’accord sur le mode opératoire, chacun a finalement repris ses billes, au point que GIM n’a jamais pu obtenir son agrément en tant que gestionnaire AIFM, « en raison de l’inaction de son demandeur », a précisé à Paperjam la CSSF. Quant aux premières opérations du fonds, elles sont « espérées avant l’été », selon Étienne Schneider. J.-M. G. ◄

PHOTO : LUC DEFLORENNE (ARCHIVES)

Entre l’agitation médiatique qui a entouré la création du Luxembourg Future Fund (LFF) et son lancement officiel, le contraste est saisissant. La signature devant notaire, le 20 avril, des statuts du fonds n’a pas été accompagnée de la moindre conférence de presse, comme cela avait été dit un mois plus tôt par le ministre de l’Économie, Étienne Schneider. La SNCI et le FEI, initiateurs de ce fonds de 150 millions d’euros, se sont contentés d’un simple communiqué pour détailler la composition du conseil d’administration, dont la présidence a été confiée à Patrick Nickels (photo, également président de la SNCI) et la vice-présidence à Romain Bausch (SES). Le fonds est aussi entré dans la liste officielle des entités surveillées par la CSSF, en tant

05 Le retail perd la tête, pas les chiffres

Quelques mois après Thierry Delroisse, c’est Christian Strasser qui quitte le comité de direction de la Bil. À 44 ans, l’intéressé a pourtant passé toute sa carrière au sein de la banque, où il était entré en 1994. Au comité de direction depuis 2010, il était head of retail banking. La banque luxo-qatarie garde cependant de bons chiffres. Elle versera un dividende global de 150 millions d’euros, dont 10 % pour les caisses de l’État actionnaire. La Bil a réalisé, en 2014, un bénéfice avant impôts de 164 millions d’euros, en progression de 17 %. Le résultat net, lui, monte à 114 millions d’euros.

◄ Hugues Delcourt voit la Bil dans une position renforcée.

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« Le financement de l’économie luxembourgeoise demeure au cœur de l’activité de la Bil, comme le mon­ tre la hausse de 7,7 % du volume des crédits accordés en 2014 », indique le rapport annuel de la banque. Les actifs sous gestion sont passés à 30,8 milliards (+ 2 milliards). « Les entrées ont totalement compensé l’impact du passage à l’échange automatique d’informations. » « La modernisation continue de son réseau de succursales et la numérisation de ses activités ban­ caires de détail et pour les entre­ prises ont contribué à renforcer la position de la Bil sur le marché luxembourgeois », se réjouissent François Pauly (président du conseil d’administration) et Hugues Delcourt, qui lui a succédé aux fonctions de CEO. A. D. et J.-M. G. ◄

PHOTO : ERIC CHENAL (ARCHIVES)

► La Bil fait un bénéfice avant impôts de 164 millions d’euros (+ 17 %) et le financement de l’économie luxembourgeoise « demeure au cœur de l’activité ». ► Christian Strasser quitte aussi le comité de direction.


Place financière Virtual Currencies Working Group

Une tirelire bien réelle

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► Dans le giron de l’Apsi, un pool de professionnels s’est branché sur la promotion ciblée des monnaies de type bitcoin. ► Il s’agit de préparer la Place à attirer les acteurs internationaux et, d’emblée, leurs quartiers généraux. ► Les coulisses bruissent de gros enjeux et de grands noms dans les starting-blocks.

Tout le monde en parle, parfois sans en mesurer les enjeux. Le bitcoin est leur porte-drapeau mais, fondamentalement, les monnaies virtuelles touchent l’ensemble de la chaîne de valeur financière, voire d’une économie aussi globale qu’elle est technologique. Au Luxembourg, la méfiance de la Place s’estompe peu à peu mais il y a encore un travail de conviction à opérer. En février dernier, la CSSF (Commission de surveillance du secteur financier), tout en rappelant son rôle en la matière, prenait pour la première fois une position officielle sur la monnaie électronique, dont les échanges sur la toile ressemblent furieusement à une niche à suivre de près. C’est ce que pensent aussi les acteurs qui se sont rassemblés, de manière quasi informelle, dans le Virtual Currencies Working Group né au sein de l’Apsi (Association des professionnels de la société de l’information). Sa première sortie, relativement discrète, a été réservée au dernier Apsi Day printanier. « Il s’agissait de faire le point sur les fintech. Mais au-delà, il y a de solides enjeux pour le pays, sa place financière et son économie numérique, ses acteurs dans un vaste écosystème ; des enjeux liés aux monnaies virtuelles, à la désintermédiation, aux technologies de transactions décentralisées, aux devises scripturales non conventionnelles, aux échanges interbancaires, à la régulation et au clearing, aux actes de consommation les plus courants… » Chris Marcilla plaide avec force : promu président de ce working group, l’homme, qui a contribué de l’intérieur à l’essor du paiement numérique – au sein de Flashiz

notamment –, est en pointe du combat. « Il y a une vitesse d’évolution inouïe et des montants investis colossaux. Autour des monnaies virtuelles et de la finance électronique, on n’est plus dans une logique de bulle. Il y a de l’expérience accumulée. Et des perspectives énormes. » Pour le groupe issu de l’Apsi, qui rassemble déjà des acteurs en vue, comme l’avocat d’affaires Jean-Louis Schiltz, les entrepreneurs Xavier Buck ou Laurent Kratz, mais aussi des représentants de l’audit et du conseil, des assurances, des fédérations et clusters ou de l’Université, le Luxembourg doit se positionner. Et attirer. La CSSF considère les monnaies virtuelles comme de la monnaie électronique, sans que forcément les premières tombent sous la définition qu’en fait la directive européenne de septembre 2009 sur l’accès à l’activité des établissements de monnaie électronique, son exercice et la surveillance de ces établissements. Mais la CSSF souligne que « nul ne peut s’établir au Luxembourg pour exercer une activité du secteur financier sans en avoir obtenu l’autorisation » du ministre des Finances. À l’échelle locale, Nexunity, la start-up de Diekirch mue par le jeune Max Wolter, entend créer une plateforme européenne, un bureau de change pour convertir le bitcoin en monnaie sonnante. L’exemple en appelle d’autres. Une poignée d’opérateurs européens et américains, de bitcoins ou autres monnaies virtuelles, ont déjà approché l’ABBL et la CSSF en vue d’installer leur plateforme au Grand-Duché. « Car il faut voir plus haut, confirme Chris Marcilla, et se positionner

PHOTO : LUC DEFLORENNE (ARCHIVES)

― Texte : Alain Ducat

▲ Chris Marcilla (à droite) préside le working group qu’a notamment rallié Xavier Buck aussi.

en hub, en terre d’accueil pour les headquarters de grands groupes venus notamment des États-Unis et d’Asie. » Au Luxembourg, capitale des crypto-monnaies, cela aurait de l’allure et de l’horizon, autant dans l’émergence de devises que de revenus mondiaux à centraliser ou à optimiser, par exemple. Ainsi la BCL, certes prudente, n’a pas interdit aux fonds luxembourgeois d’investir dans le bitcoin. « Oui, il y a un cadre régulé applicable et c’est un atout, relance le président du Virtual Currencies Working Group. Il y a un savoirfaire et nous sommes ici au croisement de deux mondes intéressants, la finance et les technologies, tous deux inscrits dans la diversification et la promotion du pays. » Le groupe, en bonne intelligence avec les stratégies nationales, veut jouer le partage d’informations pour faciliter l’accès aux banques et rassurer les intermédiaires, développer la sensibilité au bitcoin et à ses clones pos-

sibles, défricher les peurs logiques face à l’exposition au risque en instaurant un véritable management spécialisé… On ne parle plus de chimères. On évoque l’intérêt, d’une manière ou d’une autre, d’Inotribe, un géant du conseil et des services en business technologies, de la Bitcoin Foundation, de Blockchain, LoanCoin ou Ledger. Certains emblématiques CEO, fondateurs ou investisseurs se croiseront à Luxembourg, notamment dans les allées de l’ICT Spring d’ici quelques jours. Les promoteurs de la Place ne l’ignorent pas et joueront l’effet d’émulation. De fait, les grands de la monnaie virtuelle ont déjà bien capté l’intérêt que pouvait représenter la Place luxembourgeoise, qu’il ne faut plus mettre sur leur carte, mais défendre en tant que destination premium. Car évidemment le Grand-Duché n’est pas le seul à avoir l’intention de jouer des coudes. ◄ En résumé Un pool de professionnels s’est branché sur la promotion des monnaies de type bitcoin. Pour le Virtual Currencies Working Group, la Place peut attirer les acteurs internationaux. Les plateformes viennent aux nouvelles. Les demandes arrivent au régulateur. Et, en filigrane, capter les quartiers généraux prolongerait le business.

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Place financière Microfinance

07 Coopérer et développer, vraiment

► 2015, Année européenne pour le développement : le Luxembourg y a un ambassadeur, Ben Fayot. ► Des ONG de terrain mènent des actions à objectifs économique, social et environnemental. ► Les acteurs de la Place s’intéressent aussi au rôle de la finance inclusive. ― Texte : Fabrice Barbian ― Photo : Jessica Theis

Année charnière, avec l’adoption de l’agenda international de développement durable, alors que les objectifs du millénaire pour le dévelop­ pement (OMD) arrivent à leur terme, 2015 est consacrée « Année européenne pour le déve­ loppement ». Avec AED 2015, l’ambition de l’Union européenne est de sensibiliser l’opi­ nion publique et de mobiliser les citoyens en faveur de la coopération au développement. Le Luxembourg, qui prendra la présidence du Conseil de l’UE en juillet prochain, entend pleinement jouer son rôle en la matière. « Pour l’heure, notre action se concrétise par l’élaboration d’un programme de manifestations visant à informer le grand public sur toutes les actions développées pour combattre la pauvreté. Le gouvernement consacre 1 % du RNB, soit 323 millions d’euros en 2013, à l’aide au développement. C’est plus que bon nombre de pays. Il est important de le faire savoir et d’expliquer à quoi sert cet argent », souligne Ben Fayot, l’ambassadeur spécial de l’AED – « spécial et bénévole ! », ajoute­t­il. Il a participé à l’élaboration du programme en question, au sein d’un groupe de coordina­ tion qui rassemble la Direction de la coopéra­ tion du développement et de l’action humaine, le Cercle de coopération des ONG, la Repré­ sentation de la Commission européenne au Luxembourg et le Bureau d’information du Parlement européen. Ben Fayot se charge personnellement d’intervenir lors des multiples manifestations organisées dans ce cadre. Il a ainsi conclu la 31e édition du Midi de la microfinance, orga­ nisée par l’ONG Ada, le 23 avril dernier à la Banque de Luxembourg. Dédiée aux change­ ments climatiques et au rôle que la microfi­ nance peut jouer en la matière, cette confé­ rence réunissait deux mondes. Celui des ONG impliquées dans des actions de terrain, avec Runa Khan, fondatrice et directrice de Friend­ ship Bangladesh, et Carla Palomares, chargée de projet Innovation en finance inclusive chez Ada. Et celui de l’entreprise avec Jérôme

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▲ Ben Fayot (à l'écran) milite pour que s’unissent ONG de terrain et entreprises responsables.

Broutin, directeur financier de GDF Suez Rassembleurs d’énergies. Une initiative à travers laquelle l’acteur mondial de l’énergie (aujourd’hui rebaptisé Engie) apporte son soutien à des projets d’entrepreneurs sociaux contribuant à l’accès à l’énergie durable pour des populations vulnérables, via de l’investis­ sement solidaire, du don et de l’assistance technique. Carla Palomares a présenté un projet développé au Pérou par Ada, qui permet à des populations de bénéficier de microcrédits pour financer l’acquisition de chauffe­eau à énergie solaire et de séchoirs solaires pour les grains de café. De son côté, Runa Khan pilote un projet qui rend l’électricité solaire acces­ sible à une population pauvre du Bangladesh, « là où les gens n’ont rien et où les changements climatiques ont déjà des répercussions ». Ces projets visent à favoriser un dévelop­ pement économique et social harmonieux, compatible avec un monde aux ressources limitées. Ce qui induit des stratégies qui pren­ nent en compte de multiples facteurs logis­ tiques, économiques et sociaux. L’un des enjeux pour les ONG et leurs partenaires – des institutions de microfinance actives et

des entreprises (notamment Engie) – est de parvenir à ce que les populations s’ap­ proprient ces outils, utilisent cette énergie durable pour générer de l’activité économi­ que tout en optimisant leur autonomie, et puissent ainsi rembourser leurs microcrédits. « Ces projets sont intéressants car ils s’inscrivent dans une démarche responsable tout en plaçant les gens, et leur quotidien, au cœur des dispositifs. Ils illustrent aussi la pertinence d’un rapprochement entre les ONG et le monde économique et financier », souligne Ben Fayot. L’ambassadeur spécial précise qu’au­delà de la population (et des politiques), l’ambition du Luxembourg est également de sensibiliser les acteurs économiques. « Si nous voulons aider chaque pays à se développer lui-même, nous devons veiller à ce que le commerce international et les régulations financières donnent aux États la marge de manœuvre nécessaire », avait­il indiqué en janvier, lors de la cérémonie d’ouverture de l’Année européenne pour le développement. Un souci de mobiliser tous les acteurs qui répond à la devise de l’AED 2015 : « Notre monde, notre dignité, notre avenir. » ◄ En résumé « 2015, Année européenne pour le développement », une initiative à laquelle adhère le Luxembourg qui a nommé un ambassadeur spécial, en la personne de Ben Fayot. Entre régulations financières, commerce international et développement durable, la microfinance a un vrai rôle à jouer, comme le monde économique en général, pour soutenir des projets portés sur le terrain par des ONG luxembourgeoises.


Place financière ING face à la gare

08 Au pied du mur orange ― Texte : Jean-Michel Gaudron ― Photo : Luc Deflorenne

La première pierre du futur siège d’ING, au nouveau Centre Kons dans le quartier Gare, c’est un jalon, posé par le CEO d’ING Luc Verbeken, entouré notamment du Premier ministre Xavier Bettel et de la bourgmestre de la Ville, Lydie Polfer. Fin 2016, un bâtiment flambant neuf de quelque 20.500 m2 s’érigera fièrement : près de 14.600 m2 de bureaux (dont 10.000 occupés par ING), 2.400 m2 de commerces (dont le supermarché Primavera et un KKiosk) et 3.500 m2 de logements. Après plusieurs années de réflexion sur le regroupement des quatre bâtiments principaux dont dispose la banque au Grand-Duché (deux route d’Esch, dont l’actuel siège, et deux à la Cloche d’Or), le projet Kons s’est finalisé, en 2012. Il est entré sous un soleil de plomb dans une phase décisive, on ne peut plus concrète. ◄

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Place financière KBL / CSSF

09 KBL trace sa route ► La banque privée a digéré les investissements consentis en 2014, notamment en talents, et envisage sereinement l’avenir, porteur de valeur à long terme. Le retour sur investissement de ces recrutements n’est pas attendu avant 18 mois, ce qui laisse espérer, pour la banque, un impact positif à l’horizon 2015-2016. Les fondamentaux, eux, sont solides, puisque les revenus du groupe se sont maintenus à un niveau élevé (539 millions en 2014 contre 540,6 un an plus tôt) alors que les actifs sous gestion (+6 % à 44,90 milliards d’euros) et les actifs sous conservation (+6 % à 43,8 milliards) ont connu une hausse substantielle. Tout comme le dividende versé à Precision Capital, l’actionnaire (à 99,9 %) de la banque, qui percevra 67 millions d’euros au titre de l’exercice 2014 contre 31,8 millions pour 2013. J.-M. G. ◄

PHOTO : BENJAMIN CHAMPENOIS (ARCHIVES)

Certes, avec 67 millions d’euros de résultat net, KBL affiche un recul de 21 % comparé aux 84,5 millions réalisés en 2013. Pourtant, ce résultat « dépasse largement l’objectif annuel fixé », indique le groupe (sans plus de précisions chiffrées). Il faut dire qu’entretemps, la banque a lourdement investi, notamment dans le recrutement, avec l’arrivée de pas moins de 50 nouveaux banquiers privés dans le giron du groupe. « Ce ne sont pas les premiers venus, explique à Paperjam Yves Stein, le group CEO de KBL. Ce sont vraiment des gens venant d’enseignes de première qualité, des profils senior qui nous confortent dans la pertinence de notre stratégie, au vu de la qualité des professionnels que nous recrutons, y compris au Luxembourg. »

10 De la Commission à l’Autorité La Commission de surveillance du secteur financier a publié son rapport annuel 2014. Son directeur général, Jean Guill, y glisse des messages explicites : le régulateur plaide notamment pour une adaptation de la loi de 1998 et une modification de la loi de 1993 sur le secret bancaire, pour le rendre plus soluble dans le bain de la transparence fiscale. « La CSSF, héritière du CCB et de l’IML, membre à part entière du Système européen de surveillance financière et du Mécanisme de surveillance unique, mériterait une mise à jour de sa gouvernance, de ses missions et de ses moyens », écrit Jean Guill. Un avant-projet de loi a été présenté au ministre des Finances pour créer une

◄ Jean Guill a glissé des messages clairs dans le rapport annuel.

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Autorité du secteur financier. Rien de révolutionnaire, selon le dirigeant. Il ne faut pas y voir non plus l’antichambre d’une fusion avec le Commissariat aux assurances ou la Banque centrale du Luxembourg. Le terme « commission » est de plus en plus impropre à décrire les missions et le rôle du régulateur luxembourgeois dans le contexte de l’union bancaire et du Mécanisme de supervision unique, mise en œuvre le 4 novembre dernier. Au-delà du changement d’appellation, la réforme se jouera avant tout sur la gouvernance. Des changements pourraient ainsi intervenir au niveau de son conseil pour marquer davantage l’indépendance de l’institution par rapport au ministère des Finances. On ne connaît pas la substance de l’avant-projet de loi sur ce point. V. P. ◄

PHOTO : LUC DEFLORENNE (ARCHIVES)

► Bientôt un nouveau nom et une autre gouvernance pour le régulateur du secteur financier.


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Désirs Culture, sélections, gastronomie, shopping, interview

20 Les instrumentistes hors pair Christian Dierstein (percussion), Marcus Weiss (saxophone) et Nicolas Hodges (piano), qui forment le Trio Accanto, interpréteront des créations des compositeurs passionnants Johannes Schöllhorn et Rolf Riehm. Le programme est complété par des œuvres de Peter Ablinger et Wolfgang Rihm. Ouvrez grand vos oreilles !

De la musique, de la danse, du théâtre, des marionnettes, ils font tout et mélangent tout, de préférence en dehors des salles habituelles, dans des lieux excitants et extraordinaires à travers le pays. Le collectif d’artistes Maskénada fête ses 20 ans avec un programme aussi farfelu et pluridisciplinaire qu’à son accoutumée. Il propose, du 31 mai au 1er août, Friture Henriette um tour, un spectacle itinérant qui passera à Differdange, Wiltz, Remich, Echternach et Luxembourg. Comme son nom l’indique, c’est au sein même du stand de frites itinérant que le show sera proposé.

Le programme Les Émergences, initié par le Trois C-L, est destiné aux jeunes chorégraphes pour encourager la professionnalisation et leur donner les outils nécessaires à la bonne gestion de leur production. Outre un soutien financier, le Trois C-L encadrera l’ensemble des artistes sélectionnés tout au long de leur processus de création en leur proposant notamment des workshops théoriques et pratiques. Ils profiteront ainsi d’un encadrement artistique, administratif, technique et en communication. www.danse.lu

www.maskenada.lu

Le Casino Luxembourg – Forum d’art contemporain a publié sa cinquième édition du magazine Traces. Carte de visite artistique de l’institution, cette publication revient sur les expositions de l’année précédente et les engagements pris envers les artistes présentés. C’est Cropmark qui a réalisé le graphisme de ce numéro, le plaçant entre magazine et catalogue d’exposition. 10 €.

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Pas de répétition, pas de mise en scène, pas de décor. C’est le concept original de Wäiss Kanéngchen, roud Kanéngchen (Lapin blanc, lapin rouge), un solo de l’auteur iranien Nassim Soleimanpour. Chaque représentation est défendue par un interprète différent qui prend connaissance du texte devant le public. Depuis qu’elle a été créée en 2010, la pièce a voyagé dans le monde entier, traduite dans une quinzaine de langues. C’est l’ingéniosité du jeune auteur, interdit de sortie de territoire, qui l’a fait inventer un théâtre par procuration sans metteur en scène, ni répétition, ni décor. 20 May, 8 p.m. with Jules Werner (GB) 11. Juni, 20.00 Uhr mit Nickel Bösenberg (D) 2. Juli, 20.00 Auer mam Christiane Rausch (L) www.tnl.lu

Le Luca invite l’architecte danois Louis Becker du bureau Henning Larsen Architects pour une conférence au cours de laquelle il présentera la salle de concert et centre de congrès Harpa, réalisé en collaboration avec Olafur Eliasson, et lauréat du prix Mies van der Rohe 2013, ainsi que d’autres projets de ce bureau passionnant. Le 21 mai à 19 h à l’auditorium de la Banque de Luxembourg (en anglais, entrée libre). www.luca.lu

16-17/05

Comme chaque année au printemps, d’stater muséeën invite tous les publics à franchir les portes des musées de Luxembourg et du pays à l’occasion de l’Invitation aux musées. Des visites guidées et de nombreuses animations sont organisées spécialement pour ce week-end festif de découverte et de partage autour des œuvres d’art. Rappelons que toutes les entrées et activités sont gratuites. Programme détaillé sur www.invitation-aux-musees.lu

PHOTOS : MAISON MODERNE / NIC LEHOUX / DORADZILLO

Le 1er juin à 20 h, espace découverte de la Philharmonie


Désirs Culture

ZOOM SUR

ALINE FORÇAIN ― Texte : Céline Coubray ― Photo : Sven Becker

Arrivée au Luxembourg il y a quelques mois, Aline Forçain vient renforcer les rangs de la création sur notre territoire. Son histoire commence près de La Rochelle, en France. Issue d’une famille d’agriculteurs, elle choisit pourtant de s’éloigner de ses terres et part étudier les beaux-arts à Toulouse. S’ensuivent une année à Bruxelles à l’Académie royale des beaux-arts et une année à Madrid qui la réjouit particulièrement. « J’ai une passion pour ce pays et la langue espagnole. J’habitais alors dans une petite chambre de 9 m2, ce qui m’a forcée à envisager autrement ma pratique artistique. » Car si Aline Forçain pratiquait jusque là surtout la peinture, ne disposant ni de place chez elle ni d’atelier, elle a dû trouver d’autres moyens pour s’exprimer dans la capitale espagnole. C’est alors qu’elle choisit de travailler le dessin, et plus particulièrement de les réaliser dans des carnets. « À cause de ma précarité, j’ai trouvé des moyens de secours pour continuer à travailler. De ce manque d’espace a surgi le dessin dans les carnets, ce qui m’a permis de créer en permanence sans avoir besoin d’un lieu privé. Les carnets sont pour moi des moments de recherche et de liberté. C’est aussi un médium qui me permet de nouer le contact avec les gens. Toutefois, j’aime préserver un aspect aussi plus

intime, proche du journal. J’écris alors de gauche à droite et en miroir. » Lorsqu’on tourne les pages de ses carnets, on y découvre des dessins au crayon, au feutre, à l’aquarelle. Des portraits, des scènes de la vie courante, des impressions captées dans des musées, les bars, les rencontres entre amis. « Je suis arrivée à Madrid en 2013, en plein dans la crise. J’ai entamé alors une démarche plus sociale, plus engagée, témoignant des événements qui se déroulaient autour de moi et je continue à faire de même aujourd’hui. » Installée au Luxembourg depuis septembre, on peut voir le travail d’Aline Forçain dans les colonnes du Land ou prochainement dans une nouvelle publication pour enfants de Kremart Edition, De Poli an d’Maisy, avec un texte de Christiane Kremer (sortie prévue en juin). On pourra par ailleurs la croiser à la Summerakademie ou comme médiatrice culturelle au Casino Luxembourg. Elle aimerait aussi reprendre la pratique de la peinture, délaissant la toile pour lui préférer le papier, rejoignant ainsi les préoccupations et les sensations qu’elle a avec ses carnets. www.alineforcain.com

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Désirs Sélections Sélection d’ouverture

LES ROTONDES TOURNENT ROND

Après des années à Hollerich, la programmation pluridisciplinaire qui a fait la réputation de l'endroit déménage aux Rotondes à Bonnevoie. L’occasion d’un week-end d’ouverture festif et multiple.

MA BICHE ET MON LAPIN

LA GRANDE BOÎTE

Un court spectacle sur table, décalé et sans paroles, où les couples se forment et se défor­ ment dans un ballet d’objets manipulés. Un vaudeville com­ posé d'histoires d’amour buco­ liques, badines ou tragiques, tricotées à quatre mains. Par le collectif Aïe Aïe Aïe.

Envie de faire la fête ? Dans un contexte bien particulier ? La plus petite disco du monde et la plus petite la salle (tempo­ raire) du site des Rotondes attend les fêtards. Le DJ est prêt, le videur aussi… Stefaan de Winter propose cette per­ formance pour une personne sur 1 m2 pour tous les âges.

SUAVECICLO

Le duo de vidéastes brésilien VJ Suave partira le samedi à 22 h 30 de la place Léon XIII pour explorer les rues de Bonnevoie, projetant ses des­ sins poétiques sur les murs des bâtiments. Les curieux sont invités à les accompagner jusqu’à l’arrivée et le final aux Rotondes à 23 h 30.

LOOP

Pour cet espace­écran surplom­ bant le comptoir de la buvette, le photographe Sven Becker (et le graphiste Paul Schreoder) a arpenté les quartiers de Hollerich et de Bonnevoie pour animer des vues connues de la ville, muni de son appareil photo et de son bâton de pixels (pixelstick). Lire aussi page 49.

DAN DEACON

Après de nombreux concerts, Dan Deacon s’est enfermé chez lui pour produire Gliss Riffer, nouvel album qui le voit retourner à ses premières amours : le sample. Il découpe, triture, superpose sur des morceaux électro­pop jubilatoires aussi inventifs que primitifs.

Kevin Muhlen Directeur, Casino Luxembourg

Sélection taïwanaise

PHANTOM OF CIVILIZATION

La nouvelle exposition du Casino Luxembourg s’articule autour du travail de trois artistes taïwanais qui, à travers des médiums très différents, s’intéressent à la création de paysages reflétant notre civilisation contemporaine. Exposition du 16 mai au 6 septembre – www.casino-luxembourg.lu

FUJUI WANG

WU CHI-TSUNG

YUAN GOANG-MING

Ses installations explorent le monde dans sa dimen­ sion sonore. Porté par ses explorations, il récolte les bruits de notre environnement, parfois même inau­ dibles, pour les mettre en exergue à travers ses œuvres. Dans l’installation sonore Electromagnetic Soundscape, les visiteurs sont invités à s’approcher d’un dédale de cadres en aluminium mis sous tension. Le dispositif leur permet d’écouter les paysages sonores enregistrés par l’artiste.

Il nous transporte dans des paysages oniriques formés par la rencontre de matériaux simples et de la technologie de l’image. Wire II consiste à coupler une image à une roue dotée d’un maillage de fil de fer. La création se déplace progressivement de l’image vers le mécanisme et souligne la relation entre les deux.

Il nous plonge dans ses installations vidéo dans un univers où le réel et l’imaginaire ne font qu’un. Ces « rêves » sont peuplés d’éléments issus de notre réalité quotidienne, de notre civilisation, mais sem­ blent appartenir à un autre temps. Disappearing Landscape a été filmé avec trois camé­ ras vidéo animées d’un mouvement linéaire en avant et en arrière, qui explorent la vie quotidienne et l’environnement de l’artiste.

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PHOTOS : FRANK HAMILTON, DR, SVEN BECKER ET PAUL SCHROEDER

Week­end d’ouverture les 13 et 14 juin – Programme complet sur www.rotondes.lu


OUVERT : lundi et mardi midi (11h30 à 14h00) Mercredi au samedi (11h30 à 14h00 / 19h00 à 23h00)

SPÉCIALITÉS ARGENTINES 18, rue des capucins L -1313 Luxembourg Tél : 26 20 36 83 cafetin@pt.lu www.cafetin.lu Pensez à réserver pour vos repas d’entreprise, banquets, fêtes familiales !

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Désirs Shopping

Chambres du Grund Florence et son mari cherchaient un lieu à faire vivre pour accueillir les touristes de passage. Après de longs mois de recherche et autant de travaux de rénovation, la Pipistrelle (la chauve-souris, rapport aux murs bruts) a ouvert ses portes au cœur du Grund. Quatre chambres de haut standing pour une à quatre personnes sont proposées dans cette maison classée où la pierre apparente fait partie du décor. Le petit déjeuner est aussi proposé dans la jolie salle commune. 26, montée du Grund à Luxembourg www.pipistrelle.lu

ZOOM SUR...

AKABO

Après les boutiques dans les centres commerciaux (Belle Étoile, Auchan), voici que L’Occitane s’offre une nouvelle adresse en ville. On y retrouve toutes les gammes de la marque, avec les parfums, les crèmes pour le corps, les soins, les produits de toilette. Parmi les nouveautés, on craque sur la nouvelle fragrance Cédrat pour l’homme ou l’Iris bleu et Iris blanc pour la femme. 11, avenue de la Porte-Neuve à Luxembourg (Centre-ville)

Vivre dehors Quoi de mieux qu’une terrasse pour présenter du mobilier d’extérieur ? Carré Rouge profite donc de son toit au deuxième étage pour y installer un pop-up store et présenter une sélection de mobiliers et luminaires extérieurs des marques Fast, Montana, Fatboy, Arper, Moroso, etc. Jusqu’au 1er septembre. 119, rue de Hollerich à Luxembourg (Hollerich)

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― Texte : Céline Coubray ― Photo : Sven Becker

Il y a encore quelques mois, Karel Lambert travaillait pour les CFL. Mais depuis mai 2014, une idée bien précise a grandi dans sa tête : celle de pouvoir rendre disponible au Luxembourg des vêtements réalisés selon les principes écologiques et fairtrade. Alors qu’un certain nombre de boutiques propose ce type de vêtements pour les enfants, le marché pour les adultes était jusqu’à présent inoccupé. « Nous trouvions dommage que nous ne puissions acheter nos vêtements écologiques que sur internet, avec les impacts environnementaux que cela implique et les désagréments de devoir retourner les articles si ceux-là ne conviennent pas. Aussi, nous avons décidé que nous allions combler ce manque », explique Karel Lambert. Après avoir contacté les marques qu’ils souhaitaient représenter, ils ont cherché un local. Mais le prix des loyers les a vite découragés. « Nous avons alors pensé à avoir un magasin mobile. Nous avions d’abord envisagé aménager un container, mais cette solution ne s’est pas révélée satisfaisante. Alors, à l’instar de ce qui existe déjà aux États-Unis, notamment

en Californie avec des camionnettes, nous avons opté pour un bus. » C’est à Munich que Karl trouve la perle rare, un bus qui avait déjà été transformé précédemment en atelier de réparation pour vélos. Avec l’aide de l’architecte d’intérieur DO Demuth, il aménage le bus en un espace de vente confortable, disposant même d’une cabine d’essayage. Ils demandent en parallèle au Studio Polenta de leur dessiner le design extérieur du bus et leur site web. Quelques tours de vis plus tard, le bus flambant neuf est prêt pour sillonner le pays. À l’intérieur, une sélection de vêtements street wear répondant aux labels Fairtrade et GOTS (Global Organic Textile Standard) avec les marques Bleed, Room to roam, Armedangels, Recolution, Bag to life ou Globe hope. Quant au nom ? « Il s’agit du nom d’un dialecte d'une petite île en Inde, mais dont la dernière femme sachant le parler est décédée en 2008. » Un nom comme un signal devant marquer la fin d’un certain mode de consommation… www.akabobus.com

PHOTOS : DR

Des airs de Provence

Partant du constat qu’il y avait un manque sur ce marché au Grand-Duché, Karel Lambert a décidé avec sa femme Lyne de lancer Akabo-bus, un « fashion-bus » qui ne propose que des vêtements écologiques et fairtrade.


qu’il vous souhaite un bon appétit. Souhaitez-lui un bon anniversaire.

Vente en kiosque 20e édition 250 restaurants 10 euros

Disponible sur explorator.lu et maisonmoderne.lu


Désirs Gastronomie

UN HUITIÈME

Parce qu’un huitième de cercle, c’est 45 °, le taux de la plupart des alcools, Octans porte haut et fort son nom. Ce nouveau bar surfe sur la mode des cocktails, avec la touche en plus : du sur mesure à chaque instant. La très hype Agnieszka propose au client de concocter le breuvage qui lui plaît avec les ingrédients qu’il affectionne. Il faut se laisser surprendre. 15, rue du Curé (Centre-ville)

ZOOM SUR...

TERRA

C’est la deuxième récolte pour la coopérative TERRA, qui promet une agriculture raisonnée et raisonnable, en plein cœur de Luxembourg. La résilience est en marche.

37, avenue Pasteur à Luxembourg (Limpertsberg) Tél. : 22 34 55

TEMPÉRATURE IDÉALE

Le bar du Sofitel Luxembourg Europe a été entièrement repensé et redécoré, avec une vue sur le plateau du Kirchberg et des belles matières comme le cuir, le bois et le laiton. Il se voit doté d’un nouveau nom : SixtyFour°. Il ne s’agit pas de coordonnées de géolocalisation, mais de la température idéale, en degrés Fahrenheit (18 °C), à laquelle le whisky doit être servi. Avec 130 variétés du breuvage ambré, on peut parler de spécialiste !

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― Texte : France Clarinval ― Photo : Sven Becker

L’idée est née il y a deux ans. Sophie, Pit et Marko ont été, par divers moyens, sensibilisés à la permaculture et à la volonté d’un maintien d’une agriculture paysanne. Une anthropologue, spécialiste de l’agro-écologie, un maraîcher et un autre anthropologue, orienté vers la permaculture : cela donne Terra, joli acronyme pour Transition and Education for a Resilient and Regenerative Agriculture. « À force de formations, cours, groupes de travail, on a voulu aller plus loin et voir si l’utopie pouvait devenir réalité », raconte Marko. Leur volonté était de monter un centre agro-écologique pour fournir de la nourriture à des familles, servir d’exemple d’une transition vers une ville écologique et maintenir une agriculture locale. Après analyses chiffrées et enquête publique, la coopérative a pu être mise en place sous la forme d’une Amap (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne), c’est-à-dire un modèle économique d’agriculture et de distribution alimentaire alternatif et local. Un champ de quelques hectares a été trouvé au Eicherfeld (non loin du Bambësch, sur le territoire de la Ville), la coopérative a été lancée et le travail de la terre a pu commencer. En pratique, les part sociales de la coopératives ont été vendues parallèlement à la mise en place d’une liste de clients qui reçoivent chaque semaine un panier de

fruits (et légumes) de la terre. De 30 paniers la première année, Terra est passée à 150 cette saison et arrivera certainement à 200 l’année prochaine. « Le but n’est pas de faire plus, mais d’inciter d’autres à faire pareil. » Les membres paient (18 à 24 euros par semaine) pour le service de l’agriculture à l’avance et permettent donc au producteur de planifier aussi à l’avance, ainsi que de minimiser le gaspillage de la production. La saison vient de commencer avec quelques salades, choux et chicons ; viendront bientôt les aromates, les radis et les épinards avant que les fruits d’été (cerises, framboises, myrtilles) et les légumes ensoleillées (aubergines, ail, tomates) ne fassent leur apparition. « Tout le concept repose sur l’autogestion, la permaculture et la biodiversité avec récupération des eaux de pluie et des déchets pour le compost. Les membres sont invités à venir travailler la terre s’ils veulent pour créer un lien avec l’endroit d’où vient leur nourriture et les gens qui l’ont produite. » La coopérative s’ouvre volontiers au public : volontaires qui viennent travailler, écoles et maisons-relais qui viennent découvrir, et le dernier dimanche de chaque mois, Terra revêt un aspect plus festif où chacun est amené à participer avec ses produits et son énergie. www.terra-coop.lu

PHOTOS : LUC DEFLORENNE

FRAÎCHEUR GARANTIE

Après plusieurs expériences dans de grandes maisons, Nordine Perrier vole désormais de ses propres ailes au restaurant Inside. Il a décidé d’apporter une cuisine fraîche réalisée avec des produits de qualité, souvent bio. La carte, plutôt française aux influences asiatiques, est affichée sur une ardoise et change au rythme des arrivages de produits. Également take-away et épicerie bio.


Strip et bar-restaurant de nuit. Lieu inédit à Luxembourg. le dimanche à partir de 20h00 : Pâtes à volonté . Pour vos évènements, veuillez nous contacter au 49 05 52

La nourriture servie jusqu’au petit matin. Ouvert tous les jours 21 heures-9 heures. Adresse: 13 rue Dicks L-1417 Luxembourg Tel: 00 352 49 05 52 www.saumur.lu


Désirs Interview – Culture on habite une époque et un pays avec son héri­ tage, une réalité et un devenir. Il tente une démarche très originale qui consiste à esthéti­ ser, poétiser une civilisation.

Filip Markiewicz, cette volonté était-elle consciente ? Était-ce bien votre propos de départ : esthétiser notre civilisation ? F. M. : « Oui. Mon propos était de partir du Luxembourg pour montrer ce qu’est l’Europe, comme un échantillon, un laboratoire. Le film présenté au pavillon l’indique bien : c’est un Voyage au bout d’une identité. Il s’agit à la fois d’un autoportrait, à travers mon parcours et celui de mes parents qui sont arrivés de Pologne, et d’une réflexion sur ce qu’est le Luxembourg en Europe.

FILIP MARKIEWICZ ET PAUL ARDENNE

LE PARADIS, C’EST L’ENFER

L’artiste luxembourgeois et le commissaire de l’exposition présentent Paradiso Lussemburgo, la participation du Luxembourg à la Biennale de Venise, qui dresse un portrait sans concession du pays dans le contexte européen actuel. ― Interview : France Clarinval

Comment vous êtes-vous rencontrés et avez-vous eu envie de travailler ensemble ? Filip Markiewicz : « Quand j’étais étudiant, j’étais déjà un lecteur de Paul Ardenne et j’ai eu l’occasion de le rencontrer en 2012 lorsque j’étais invité à l’exposition Ricochets à Paris. Il avait écrit le texte du catalogue. Ce qui me plaît dans son approche, c’est sa proximité avec le travail, un côté proche du sol, terre à terre. Ensuite, je l’ai contacté pour Venise et nous avons commencé à discuter. Paul Ardenne : « Je ne connaissais pas le tra­ vail de Filip. Je me suis plongé dans son œuvre. Elle est déjà bien établie dans ses thématiques et son approche plastique avec le dessin, la 116 ―

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vidéo et les installations. C’est pour cela que j’ai accepté de travailler avec lui pour l’appel à par­ ticipation. C’est intéressant de se projeter dans quelque chose dont on n’est pas sûr qu’il aura lieu. C’est un choix dicté par une véritable fra­ ternité à la fois esthétique, politique et cultu­ relle. J’ai une grande familiarité avec les idées qui sont les siennes : une culture européenne, de gauche et libérale à la fois, solidaire et indi­ vidualiste. Il présente un travail qui a quelque chose à dire sur l’état de la civilisation euro­ péenne avec le prisme du Luxembourg comme point d’ancrage. On n’aurait pas gagné, je ne regretterais pas mon engagement aux côtés de Filip. Son travail pose la question de comment

Il y a aussi le logo du pavillon, PL, qui fait penser à une marque de maroquinerie de luxe… F. M. : « … et aux lettres utilisées pour la Pologne ! C’est aussi une partie de mon identité. P. A. : « Vous constatez que le travail de Filip est complexe et à tiroirs. C’est une forme hybride, très concentrée, où il y a de nom­ breuses entrées et interprétations possibles. Finalement, c’est un paradis, le Luxembourg ? Comment a évolué votre point de vue sur cette question ? F. M. : « Le Luxembourg est un paradis trom­ peur. Je me sens plutôt moins patriote après le travail qu’avant. J’ai un rapport entre amour et haine, entre symbiose et rejet avec le Luxembourg. L’ambiguïté, dans notre société, se retrouve partout. Nous faisons la fête, nous dansons, nous consommons, mais en même temps, nous aurions bien des raisons de pleurer. À cet égard, le Luxembourg apparaît comme un échantillon parfait pour parler de notre société. Concrètement, que montre l’exposition ? Comment avez-vous conçu le parcours ? P. A. : « L’œuvre prend la forme d’un vaste théâtre ‘total’ qu’accueillent les six salles du

PHOTOS : SVEN BECKER, CHRISTIAN MOSAR

1

Le titre, Paradiso Lussemburgo, semble évoquer beaucoup de choses à la fois... F. M. : « Il y a différentes façons de lire ce titre et, ainsi, de considérer le ‘paradis’. Le paradis est un concept biblique, et c’est aussi la partie finale de la Divine Comédie de Dante. Le fantasme para­ disiaque, issu de différentes mythologies, se rapproche également beaucoup, de nos jours, du monde des finances et de ses promesses maté­ rielles. Le Luxembourg est souvent réduit à un paradis fiscal. Choisir un titre en italien, enfin, est une bonne manière de donner au projet un côté proche d’un conte ambigu. Il y a une évoca­ tion du film Cinema Paradiso, mais aussi un clin d’œil aux noms des pays qui sont inscrits en ita­ lien sur les façades des pavillons nationaux dans les Giardini. Ce qui m’intéresse, ce sont les contradictions, les contrastes qui peuvent appa­ raître dans une société. Paradiso Lussemburgo est la confrontation entre un concept biblique et un système économique.


Désirs Interview – Culture pavillon, qui est tout à la fois musée, laboratoire de création et lieu de divertissement culturel mêlant danse, performance, DJing, lecture, architecture et musique. Cette œuvre est une allégorie visuelle, une métaphore, une vision. C’est une proposition, pas l’expression d’une vérité. Il ne s’agit donc pas d’adhérer, mais de recueillir une impression, des sensations. F. M. : « Le parcours part d’une citation d’Oscar Wilde, retranscrite en néon ‘The world is a stage but the play is badly cast’. Le monde est une scène, mais le casting est raté. C’est bien l’idée d’un théâtre qui est mise en œuvre. En même temps, j’ai pensé l’installation dans les diffé­ rentes pièces comme des morceaux de musique pop qui composent un album, l’un appelant le suivant.

La pièce centrale du pavillon est le film, Voyage au bout d’une identité... F. M. : « Le film est présenté sur trois écrans, avec un montage qui mélange les esthétiques de sitcom, de film expérimental et de film holly­ woodien. Ce film part de l’histoire du Luxembourg, mais son développement nous entraîne vers quelque chose d’onirique, voire de surréaliste. C’est une sorte de road movie, interprété par Leila Schaus et Luc Schiltz, qui part de Luxembourg pour aller en Pologne. Ils sont des sortes d’alter ego me représentant, disant mes mots, mais me permettant une distance par rapport à l’autopor­ trait ou l’autofiction. On peut aussi les considérer comme des Adam et Ève égarés dans un nouveau paradis. Si le film est au centre, il y a un avant, un prologue et un après, un épilogue… F. M. : « Le prologue, c’est le couloir avec 19 dessins qui montrent des aspects très divers du Luxembourg, que ce soient les frères Schleck ou Jean­Claude Juncker, la finance, mais aussi l’aspec t folklorique et provincial du Luxembourg. Dès l’entrée du pavillon, le spec­ tateur est confronté à cette problématique cen­ trale du pouvoir. Mon but est de questionner les différentes couches du pouvoir dans notre société en partant du modèle de la société luxembourgeoise. On peut penser à un story board qui annonce l’exposition. Vient ensuite le Limbic Theater comme une porte d’entrée du Luxembourg, référence évidente aux limbes de l’enfer. C’est aussi un rapport au système lim­ bique du cerveau humain jouant un rôle dans diverses émotions (la peur, la mémoire, l’agres­ sivité, le plaisir). Après le voyage, il y a la forêt et surtout la finance… F. M. : « Je voulais mettre en évidence le côté romantique et naturel du Luxembourg, en réso­ nance avec d’autres paysages ruraux moins amènes, territoires de pauvreté et d’adversité socioéconomique. On y croise aussi un renard aux dents en or, qui pourrait faire penser à celui de Michel Rodange ou à l’image d’un Luxembourg futé qui se faufile dans les mailles du filet, et une baignoire où stagne une eau saignante, à rebours

2

1. Filip Markiewicz devant le logo du pavillon : à la fois initiales du titre et clin d’œil à la Pologne. 2. Le couloir est comme un prologue avec des dessins évoquant le Luxembourg. 3. La reproduction de l’ancien billet de banque demande pardon... 4. Allusion au Renert, l’animal empaillé affiche des dents en or.

3

« J’ai conçu l’installation comme des morceaux de musique pop qui composent un album, l’un appelant le suivant. » 4

de toute perspective de purgation. Vient ensuite une salle sur le pouvoir et la finance avec trois maquettes, celles du Palais de la culture de Varsovie, du Parlement européen de Luxembourg et de la cathédrale de Luxembourg­ville. C’est un condensé de l’histoire européenne centré sur la tradition catholique luxembourgeoise et le pou­ voir de l’argent. Également la reproduction d’un billet de banque en francs luxembourgeois de 1943 avec la mention ‘Sorry’. P. A. : « Et la dernière salle de l’exposition est un dance floor, un club animé par des images psychédéliques et une bande­son pop­rock assez kitsch.

Vous utilisez souvent des modes d’expression populaires, voire kitsch, pour exprimer des points de vue beaucoup plus sérieux. F. M. : « Je conçois le divertissement, l’entertainment, comme la clé de l’équilibre du système libéral. Il suffit, pour s’en rendre compte, d’ana­ lyser l’histoire du cinéma hollywoodien et les parallèles avec l’histoire du pouvoir politique. C’est à travers le divertissement que nous cataly­ sons notre existence. De nos jours, la pop culture est la propagande douce du capitalisme. Je ne sais pas si le divertissement nivelle tout, mais que ce soit la politique ou la pop culture, tout passe par le même tube digital. Ainsi, une image de

Filip Markiewicz réfugiés syriens a la même valeur qu’une image promotionnelle du groupe Daft Punk. P. A. : « Filip utilise l’humour pour se mettre en retrait. Son œuvre pose plus de questions qu’elle n’offre de réponses. Il utilise plusieurs médias pour offrir des variations de distance plus ou moins proches de l’événement.

Justement, pourquoi ne pas se concentrer sur un média ? F. M. : « Je pense qu’on ne peut pas tout dire avec un seul média. Le dessin est pour moi une base de recherche. C’est assez expérimental, mais c’est la base de tout mon travail. Entre deux dessins, il se passe quelque chose qui devient une scène, un dialogue qui sera filmé. À partir de la séquence filmée, je peux revenir au dessin ou à une autre forme plastique qui serait une synthèse, sous une autre forme, plus tangible, plus physique. Je fais tout à la fois, il n’y a pas de chronologie. P. A. : « Le monde du réel ne lui suffit pas. Le monde de l’art lui sert à reconstruire un nou­ veau réel, un métaréel qui comprend ces diffé­ rentes strates qu’expriment les différents médias. »

www.paradisolussemburgo.lu

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508 personnalités & entreprises ont été citées sur les 124 pages de Paperjam1.

INDEX 1,2,3 03b

12

A ABBL 91, 103 ABC 90 Abelag 68 Aberdeen Asset Management 91 Aca 92 Academy+Plus 58 Ada 104 Adams Elisabeth 98 Adecco Group Luxembourg 30 Adem 58 Administration des contributions directes 59 ADR 22, 38, 40 Aéroport du Luxembourg 12 Agence spatiale européenne 12 Agricultural Bank of China 90 Ahlborn Pierre 99 Alco 90 Allen & Overy 75 Alsa 62 Alter Domus 92 Apple 64 Apsi 103 Archiduc 76 Arianespace 12 Asselborn Jean 26 Association des PSF de support 92 atHome 30 Atoz 30

B Bâloise Luxembourg 91 Balzano Vincent 78 Banque de Luxembourg 99, 104, 107 Banque Ferrier Lullin 92 Banque populaire de Chine 98 Banque Raiffeisen 123 Base 38 Bausch François 36, 54, 63, 68 Bausch Nathalie 72 Bausch Romain 12, 62, 91, 102 BCEE 90, 91 BCL 12, 103, 106 Becherel Franck 50 Belgacom 62 Berger Eugène 30 Berns Alphonse 66 Besix 50 Bettel Xavier 26, 38, 40, 50, 64, 92, 105 BGL BNP Paribas 90 BHS Services 30, 62 Biever Robert 37 Bil 10, 30, 90, 94, 102 Biltgen François 37 BIP Investment Partners 62 Bitcoin Foundation 103 Bley Pierre 72 Blockchain 103 BNP Paribas 72 Bock Georges 30 Bordier Antoine 58 Bourse de Luxembourg 91 Bouvier Yves 66 BPI 78 Braquet Michel 30 Brauch Damien 84 Braz Félix 37, 38 Broutin Jérôme 104 Bruck Véronique 26 BSP 94

118 ―

― Juin 2015

Buck Xavier Buffet Warren Bulb Zone Bureau d’information du Parlement européen

62, 103 12 70 104

C Cactus 66 Cafetin 111 Cahen Corinne 37, 72 Cahuzac Jérôme 94 Canal+ 62 CapitalatWork Foyer Group 91 Captant Mickaël 70 Cargolux 63, 64, 66 Carrefour 62 Casino Luxembourg - Forum d’art contemporain 30 CBL 50 CBP Quilvest 10 CDCL 50 CEA Tech 46 Cefis 22 Cellule de renseignement financier 94 Centre commun de la Sécurité sociale 91 Centre Kons 105 Centre pour l’égalité de traitement 72 Centuria Capital Luxembourg 90 Cercle de coopération des ONG 104 CFL 36 Chambre de commerce 30, 56 Chambre des métiers 36 Chambre des salariés 63 Château-Ducos Alexandre 50 China Construction Bank 90 Choury Amal 64 Cit Blaton 50 CLE 50 CLI 50 Clifford Chance 25 CMI 68 Coditel 64 Colling-Kahn Francine 38 Commissariat aux assurances 92, 106 Commission anti-blanchiment du Barreau de Luxembourg 94 Commission consultative des droits de l’Homme 72 Commission des institutions et de la révision constitutionnelle 26 Commission de promotion des vins 43 Commission européenne 72 Commune d’Echternach 38 Concept Factory 64, 82 Conseil d’État 56 Cour d’appel 92 Cour de cassation 94 Cour de justice de l’UE 37, 38 Crean Gabriel 46 Credit Suisse 91 CRP Henri Tudor 46, 66 CRP Lippmann 46 CRTI-B 36 CSSF 90, 94, 102, 103, 106 CSV 22, 38, 40

Depoorter Philippe 99 Deutsche Bank 72 Dexia 62 Digicash 90 Direction de la coopération du développement et de l’action humaine 104 Do Recruitment Advisors 89 Docler Holding 62 Doctena 30 DP 10, 22, 40 DuPont de Nemours 83

E e-Kenz 64 e-thicHR 64, 78 EasyJet 78 EBRC 64 École 3.14 58 École 42 58 École polytechnique fédérale de Zurich 36 Edison Capital Partners 68 Eicher 70 Eicher Frères 70 Eischen Daniel 82 Elsen Sam 84 Elth 30 Elvinger René 30 Engel Georges 10 Engie 104 Err Lydie 10 État luxembourgeois 36, 90 Eurefi 78 Euro DNS 62 Euro-Composites 84 Eurocloud 64 Eurostat 37 Execujet Aviation Group 68 Eyschen Claude 91

F

D

Faltz René 68 Fayot Ben 104 Fédération des artisans 36, 37 Fédération des taxis 63 FedEx 63 FEI 102 Fiat 15 Flashiz 103 FMI 37, 92 FNP 30 FNR 46 Foillard Cyrille 63 Fondation de l’architecture et de l’ingénierie 76 Fondation de Luxembourg 99 Fondation Écouter pour mieux entendre 99 Fondation Idea 30 Fondation Sel 58 Fonds culturel national 30 Fonds du logement 37 Forum 26 Foyer 90, 91 Free 58 Freeport 66 Friendship Bangladesh 104 Friob Norbert 30 Funk Marcel 63

Datacenter Luxembourg 64 Déi Gréng 10, 22, 30, 37, 38, 40 Déi Lénk 22, 38, 40 Delcourt Hugues 30, 102 Delles Lex 10 Delroisse Thierry 102 Deltour Antoine 92

Gallé Olivier Garage Étoile Gaudron Jean-Michel GDF Suez

G 63 30 66 104

Genii Group 63 Genii Investment Management 102 George Ravarani 94 Gerges Marc 22 Gilbert Martin 91 Giorgetti 50 Girault Pierre 52 Global Eagle Entertainment 12 Glock Gaston 92 Goblet Lavandier 92 Goebbels Robert 66 Goetzinger Pol 73 Gonçalves Catia 22, 26 GR Business Days 44 Gramegna Pierre 59 Gravity Sport Management 63 Groff Camille 73 Grosjean Thierry 90 Groupe Bolloré 10 Groupe DCL 30 Groupe Foyer 30 Groupe Lavorel 62 Groupe Steffen 82 Groupement des entrepreneurs du BTP 36 GTM 50 Guill Jean 106

H Hansen Dominique Hansen Marc Hansen Patrick Henckes Nicolas Hermès Heuschling Luc Hifi International Hoffmann Marc Hollerich Jean-Claude Hölzl Vinzenz Horesca Houwen Marco

99 37 68 30 2 26 64 10 22 76 36 30, 62

I IBBL IBM ICBC ICTluxembourg IFSB Ikogest ILR Immotop.lu IMS Luxembourg INDR ING ING Luxembourg InoTribe Interact Intercultures IP IS4F ITM Iwi

64 64 90, 98 58 6 66 38, 60, 64 63 72 63 105 91, 92 103 64 10 82 62 50 91

J, K Jacob Alain Jiang Wen Jobtoday Join Experience Juncker Jean-Claude Karp-Kneip Kaufmann Philippe KBL Kersten Patrick Keytrade Bank Luxembourg

83 90 78 38 26, 40 66 68 106 30 90


Dans cet index sont reprises les entreprises, les personnalités et les publicités apparaissant dans ce cahier

Khan Runa KidsCare Kkiosk Koedinger Mike König Stefan Kox Jo KPMG Luxembourg Kratz Laurent Kurt Constructions

104 62 91, 105 22, 76 66 30 30 103 92

L Laboratoire de droit économique 56 Lacroix Frank 64 Lalux 91, 93 83, 85 Lamesch Lampach Roger 10 Landewick Tobacco 113 Langenbrink Christophe 66 Laplume Paul 92 Lauer Marc 30 LCTO 38 LeasePlan 64 Ledger 103 Lequeue Jean-Noël 90 Leslie Jeremy 76 Ligue luxembourgeoise des droits de l’Homme 26 Limbourg Nicolas 91 Lineheart 64 List 46, 62, 66 LoanCoin 103 Lopez Gerard 102 Lorrain Bruno 50 LSAP 10, 22, 40, 66 LSK 91 Luca 76 Lux Events 111 Lux Future Lab 78 Lux TP 50 Lux-Airport 38 Luxair 38, 55, 66, 87 LuxairCargo 83 Luxalpha 91 Luxaviation 66, 68 LuxCloud 62 LuxConnect 10, 64 Luxembourg for Finance 98 Luxembourg Future Fund 91, 102 Luxembourg ICT Cluster 62 Luxembourg School of Finance 49 Luxemburger Wort 40, 66 Luxempart 10 LuxGovSat 12 Luxinnovation 46, 62, 78 Lycée technique des Arts et Métiers 84

M M3 Architectes Maax Yves Mack Claude Maison Moderne

92 91 68 22

Maison Steffen Mangrove Capital Partners March Sharon Marcilla Chris Martin Véronique Masson Delphine Meckel Miriam Meisch Claude MFJ Group Mikado Publicis Mines Jean-Luc Ministère d’État Ministère de Finances Ministère de la Famille et de l’Intégration Minte.lu Money for Job Monster Moovijob Morgenthaler Nathalie Mosa Laurent Mouvement pour l’égalité des chances

82 78 30 103 62 70 62 50 78 82 82 62 66 72 22 78 30 58 72 64 72

N, O Nagel Maggy 40 Nexunity 103 Nickels Patrick 91, 102 Niel Xavier 58 NN Life 29 Numen Europe 62 Numéricable 4, 64 Nyuko 62 O’Donnell Keith 30 OAI 36 OCDE 38, 66 Oddo 91 Œuvre nationale de secours GrandeDuchesse Charlotte 72, 99 Office national de conciliation 62 OGBL 37 Olos 92 Olvr Niall 68 Oman Air 64 Onet 72 OPF Partners 92 Optique Thill 39 Orange 90 Orbital ATK 12

P P&V Palomares Carla Paperjam Pauly François Pecoma Actuarial and Risk Pep Perrin Édouard Petry John Philharmonie Pintadu Maxime Pisters Joost Pittie Jérôme

91 104 22, 66 102 91 82 91 94 99 76 62 78

Poeck Pascal Poirier Philippe Polfer Lydie Poncé Fabrice Poos Jacques Post Finance Post Luxembourg Post Telecom Pouliquen Thierry Precision Capital Pregno Gilbert Primavera Printrbot Prolingua Promobe Finance PwC Luxembourg PwC’s Accelerator

70 22 105 30 26 90 12, 63 124 94 106 72 91, 105 70 30 63 38, 91, 98 63

Q, R Quilvest RBC Reckinger Michel Reding Yves Regout Arnaud Reich Dirk Reitz Romain Renault Représentation de la Commission européenne au Luxembourg Ries Anne-Catherine Rix Alain Rocard Michel Rodenbourg Alain Rommes Jean-Jacques Root RTL Rusch Peter RyanAir

10 91 36 64 50 66 38 11 104 62 36 22 70 30 64 84 92 78

S S-Cape 84 Sabbagh Karim Michel 12, 66 Salon à l’envers 44 Sandvik 62 Sandvik Machining Solutions 62 Saphir Capital Partners 68 Saturn 64 Saumur 115 Schank Marco 36 Scharff Christian 72 Schiltz Jean-Louis 62, 103 Schmit Nicolas 58 Schmit Romain 30, 37 Schneider Étienne 26, 30, 40 Schuh Paul 60 Seignert Thierry 92 Serpieri Massimo 72 Service des Médias et des Communications 62 Service national de la Jeunesse 99 SES 12, 62, 91, 102

Now in the city Center

Shell Simon Nico SNCB SNCI Socfin Socfinaf Socfinal Socfinasia Société Générale Société nationale des habitations à bon marché Soludec Some Sony Pictures Sorbonne SpaceX Stahl Hjoerdis Statec Steffen Steichen René Stein Yves Strasser Christian Swiss International Systemat

84 30 36 91, 102 10 10 10 10 17, 19 62 50, 66 90 64 26 12 63 22, 36, 38 82 62 106 102 35 63

T, U, V Tageblatt 66 Tango 62, 90 Tanson Sam 30 Tapella Luc 60 Tarrach Rolf 37 Technoport 63 Telindus 62 Tenzing Partners 70 Thelen Carlo 30, 44 Theret Bruno 50 TNS-Ilres 22, 40 TNT Express 63 Traber 66 Traiteur Loriers 45 Traiteur Steffen 81 Tralux 50 UBS 91, 92 UEL 30 Université de Saint-Gall 62 Université du Luxembourg 12, 26, 37, 46, 103 Utopia 30 Van Overtveldt Johan 59 Vega José 63 Verbeken Luc 91, 105 Ville d’Esch 72 Ville de Luxembourg 30, 50, 72, 90, 105 Vinci 50 Virtuel Currencies Working Group 103 Vitis Life 91 Vivium 91 Voyages Emile Weber 84

W, X, Z Wagener Marc Wangen Edouard Weber Grégory Wehr-Seiter Katrin Wiseler Claude Wolter Fernand Wolter Max Wondermags Wordbee Wurth Michel XBT Holding Zheng Bingkai ZiDCard

30 10 98 62 40 30 103 62 63 30 64 90 64, 78

12 Côte d’Eich (Place du Théâtre) L-2229 Luxembourg Tel : 26 68 38 43 Bandeau_Vinoteca.indd 1

20/03/2015 09:57 AM

― Juin 2015 ― 119


Juin 2015 Paru le 15 mai 2015

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18 juin 2015

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JUIN 2015

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28 mai 2015

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Fondateur et CEO Mike Koedinger Directeur administratif et financier Étienne Velasti

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Anouk Agnes photographiée au Nouveau Centre de Conférence Kirchberg par Julien Becker.

Anouk Agnes lit Paperjam depuis 2003. Merci

Maison Moderne célèbre 20 ans d’édition indépendante et 200.000 lecteurs. Découvrez 20 ans d’archives sur www.maisonmoderne.lu/20


Le Luxembourg en chiffres

TABLEAU DE BORD

Taux d'inflation (en %)

6.000

939

-0,2

Nouvelles immatriculations 4.

MAI 2014 : 1,03

3.000

0,5

OCT. 2014 : 4.522

1

AVRIL 2014 : 5.220

4.000

8

5.000 1,5

86

2

0,3

20 15

Dette publique (en % du PIB)

23,6 % (2013) +10,28 % par rapport à 2012

2.000

0

14

T4 2014

20

T3 2014

13

T2 2014

1.227

1.958

1,9

20

T1 2014

2,2

2

504

495

531

T4 2013

étrangers

2,9

12

T4 2014

258.679

SOURCE : STATEC

2.872 2.989

3,1

20

T3 2014

46 %

PIB en volume (évolution en %)

20 10

T2 2014

981 1.098

1.108 1.570

2.274

5.571,66

563 T1 2014

54 %

Luxembourgeois

Autorisations de bâtir bâtiments - logements - volume (milliers de m3)

4.437,62

4.916,75

4.344,15

5.311 4.276

4.882,05

4.217,73

4.230,01 5.408,05

Prix moyen au mètre carré (en euros) ancien - neuf

T4 2013

304.279

562.958

2

20 11

2.586 km

Population totale (au 1er janvier 2015)

1.280

Superficie

1.000

Av 4 ril 14 Ma i1 4 Ju in 14 Ju il. 1 Ao 4 ût Se 14 pt .1 4 Oc t. 14 No v. 1 Dé 4 c. 14 Ja n. 15 Fé v. 15 Ma rs 15

rs 1

rs 14 Av ril 14 Ma i1 4 Ju in 14 Ju il. 1 Ao 4 ût 1 Se 4 pt .1 4 Oc t. 14 No v. 1 Dé 4 c. 14 Ja n. 15 Fé v. 1 Ma 5 rs 15

Ma

Ma

OPC (en milliards d'euros)

14

3

3.403,87

3.227,01

3.094,99

3.083,35

3.034,46

3.006,76

2.970,52

2.904,14

2.854,64

2.815,87

2.742,21

145

2.709,21

avril 2014 : 151

6,9 %

rs Av 14 ril 1 Ma 4 i1 Ju 4 in Ju 14 il. A o 14 ût Se 14 pt . O c 14 t. No 14 v. D é 14 c. 1 Ja 4 n. 1 Fé 5 v. Ma 15 rs 15

(en mars 2015) 7,1 % en mars 2014

Ma

Av ril 14 Ma i1 4 Ju in 14 Ju il. 14 Ao ût 1 Se 4 pt .1 4 Oc t. 14 No v. 14 Dé c. 14 Ja n. 15 Fé v. 15 Ma rs 15

4 rs 1 Ma

(de janvier à avril 2015) 218 de janvier à avril 2014

Taux de chômage

140

44.056

402.577

Emploi total intérieur en mars 2015

41,6 % 58,4 %

dont 167.608 travailleurs frontaliers

Emploi du secteur financier au 4e trimestre 2014 (hors assurance)

25.785

emplois dans le secteur bancaire 122 ―

234

― Juin 2015

41,47 % 58,53 %

18.271

emplois dans les autres secteurs

SOURCES : STATEC, CSSF

150

3.524,79

Nombre de banques 155

SOURCES : STATEC, CSSF, BARREAU DE LUXEMBOURG

Nombre de faillites

0


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