Paperjam Plus - Fonds d'investissement

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Fonds d'investissement MAI 2022

DURABILITÉ

Le nouvel uni­vers des investissements « verts » – INTERVIEW DE CORINNE LAMESCH

« Sophistication n’est pas nécessairement synonyme de risque » – L’INDUSTRIE DES FONDS

Un colosse aux pieds agiles – INTERVIEW DE LAETITIA HAMON

Les priorités du Luxembourg Green Exchange – LE MATCH IRLANDE-LUXEMBOURG

De la compétition à la collaboration ? – FONDS ALTERNATIFS

Les dessous d’un succès grandissant – ACTIFS NUMÉRIQUES

La révolution crypto


LUCIENNE ANDRING

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Édito #Persévérance

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Thématiques durables Guerre en Ukraine, inflation, Omicron… incertitudes éco­ nomiques et géopolitiques, perturbations sur les marchés des produits énergétiques, alimentaires et industriels, risque de récession, volatilité des marchés financiers. Les crises s’enchaînent, pas de répit… les investisseurs doivent s’accrocher. Le cycle post-pandémie va se traduire par une hausse des taux d’intérêt et une inflation plus élevée. Les experts sont d’accord. Les investisseurs doivent se préparer à un changement de régime des marchés financiers, où la seule manière de créer de la valeur consistera à choisir les bons actifs pour générer de l’alpha. Les politiques monétaires accommodantes constituaient une garantie de croissance pour les actifs. Celle-ci n’existe plus. Deux mégatendances continuent à structurer nos économies : la lutte contre le changement climatique et la digita­lisation accélérée de l’économie. Dans un contexte de marché haussier, il est donc logique que les fonds thématiques à propos de ces tendances, c’est-à-dire ceux axés sur la transition énergétique, les changements démographiques ou l’évolution technologique – comme l’intelligence artificielle –, aient le vent en poupe. Une augmentation spectaculaire entre 2019 et 2021 en résultait. Les actifs sous gestion des fonds thématiques ont plus que triplé pour atteindre 806 milliards de dollars dans le monde, selon une étude de Morningstar. À la fin de l’année 2021, les actifs des fonds thématiques mondiaux représentaient 2,7 % de tous les actifs investis dans les fonds d’actions à l’échelle mondiale. Mais attention aux mirages ! Ces fonds seraient souvent conçus en tenant davantage compte de leur capacité à être vendus que de leur pertinence en termes d’impact, d’après la mise en garde de l’agence de notation.

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Auteur NATHALIE REUTER

MAI 2022 FONDS D′INVESTISSEMENT

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Fonds d′investissement Mai 2022

08 LE JOUR OÙ…

40 FACE-À-FACE

J’ai compris que je resterais à Luxembourg

Gestion active vs gestion passive 44 NOUVEAUX PORTEFEUILLES

10 INTERVIEW

Fonds alternatifs : les dessous d’un phénomène

CORINNE LAMESCH

« Sophistication n’est pas néces­sai­ rement synonyme de risque »

52 TENDANCES

16 GÉANT DU SECTEUR

L’industrie luxembourgeoise des fonds, colosse aux pieds agiles 22

p. 10 D’après Corinne Lamesch, il y a quasiment une composante « démocratique » à vouloir ouvrir la distribution de fonds alternatifs, sous réserve et avec les garde-fous appropriés.

Le Fiar, nouvelle star de la Place luxembourgeoise 54 DOMICILIATION

IrlandeLuxembourg : de la compétition à la collaboration ?

Dossier

Catalyseur de la transition

58 CRYPTOMONNAIE

Se préparer à la révolution crypto

24 DURABILITÉ

Un nouvel univers d’investis­ sement « vert » se dessine

30 INTERVIEW

62 TENDANCE NUMÉRIQUE

LAETITIA HAMON « Sans la réglementation, nous n’en serions pas là »

NFT… Qu’est-ce que c’est ?

Au service des Objectifs de développement durable

64 RISQUES

36 FONDS DURABLES

Photo

Matic Zorman

Illustration

Marielle Voisin

Fonds d’investis­ sement : la cyber­ sécurité n’est plus une option 66 FORECAST p. 22 L’industrie des fonds va être profondément transformée par la vague réglementaire durable et pourra contribuer à jouer un rôle de catalyseur essentiel de la transition environnementale et sociale.

Comment garder la compétitivité de la Place ? MAI 2022 FONDS D′INVESTISSEMENT

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Sur le radar

Les fonds en bonne santé ORIGINE

APERÇU

D’où viennent les principaux promoteurs de fonds ?

Montant total des actifs sous gestion dans les fonds d’investissement au Luxembourg

De quels pays proviennent les promoteurs de fonds domiciliés au Luxembourg ? Voici un classement, selon le volume d’actifs sous gestion, des pays d’origine des principaux initiateurs de fonds (en janvier 2022, en milliards).

Source

1

États-Unis 1.152,365 € (20,3 %)

2

Grande-Bretagne 950,521 € (16,7 %)

3

Allemagne 817,187 € (14,4 %)

4

Suisse 792,271 € (13,9 %)

5

France 603,147 € (10,6 %)

6

Italie 359,777 € (6,3 %)

7

Belgique 243,546 € (4,3 %)

8

Luxembourg 214,827 € (3,8 %)

9

Danemark 126,317 € (2,2 %)

Au 31 décembre, en milliards d’euros CSSF

10 Pays-Bas 124,898 € (2,2 %) 11 Autres 301,263 € (5,3 %)

Total 5.686,119 €

6

1998

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1999

2000

2001

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2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010


Avec une régularité exemplaire dans ses augmentations, la Place financière au Luxembourg n’a toujours pas à rougir de sa réputation. Le secteur continue d’élargir ses portefeuilles et de devenir un centre d’investissement de premier choix.

6.000 milliards €

3 QUESTIONS À

CAMILLE THOMMES

Director general Alfi

5.000

4.000

3.000

2.000

1.000

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

Comment a évolué l’activité des fonds d’investissement luxembourgeois ces derniers mois ? Nous avons enregistré un record absolu à la fin du mois de décembre 2021, avec des actifs sous gestion s’élevant à 5.859 milliards d’euros, soit une hausse de près de 900 milliards en un an (+18 %). Cette croissance provient en partie de souscriptions nettes, qui représentent 33 milliards d’euros par mois en 2021. C’est assurément un signe positif par rapport au dynamisme de l’industrie luxembourgeoise et à l’intérêt qu’elle suscite pour les acteurs du secteur. Quels sont les segments qui soutiennent la croissance de l’activité au Luxembourg ? Si les fonds réglementés rassemblent la majorité des actifs gérés au Luxembourg (84 %), ce sont aujourd’hui principalement les fonds alternatifs qui soutiennent la croissance de l’activité. Une grande partie des véhicules alternatifs – fonds de dette, private equity, immobilier, infrastructure, etc. – n’est pas directement réglementée par la CSSF. Ils n’apparaissent donc pas dans les chiffres fournis par le régulateur. Selon différentes études de l’Alfi et de KPMG, en 2021, les fonds immobiliers ont connu une croissance de 14,83 %, les fonds de private equity, de 29,9 %, et les fonds de dette, de 40,6 %. Comment l’incertitude liée au conflit en Ukraine affecte-t-elle l’activité ? Le conflit entre l’Ukraine et la Russie nous a fait entrer dans une période d’incertitude, avec une volatilité sur les marchés financiers et une inflation en hausse. Une baisse des actifs sous gestion a d’ailleurs été enregistrée au mois de janvier 2022 (5.686,119 milliards d’euros, -2,96 % par rapport au mois précédent). Les effets restent limités pour la Place luxembourgeoise. Au vu de notre exposition réduite en valeurs mobilières russes – environ 20 milliards d’euros –, l’impact devrait être marginal. Mais des conséquences directes et indirectes sont visibles.

0 Auteur S.L.

MAI 2022 FONDS D′INVESTISSEMENT

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Le jour où…

J’ai compris que je resterais à Luxembourg L’actuel PDG de Clearstream, Philippe Seyll, débarquant de Londres, a découvert la place financière luxembourgeoise en 2005. Il s’y est tout de suite senti « comme un poisson dans l’eau ».

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FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

Propos recueillis par S. L.

Pour Philippe Seyll, un environnement dans lequel on se sent bien est déterminant pour réussir, que ce soit au niveau personnel ou au niveau collectif.

Matic Zorman (archives)

preuve de pragmatisme à leur égard. C’est un élément-clé du succès de l’activité financière luxembourgeoise. Quand je suis arrivé, l’activité que nous développions représentait un chiffre d’affaires d’une petite dizaine de mil­ lions d’euros chaque année. Quinze ans plus tard, le chiffre d’affaires annuel inhé­ rent à ce business est de 400 millions d’euros. L’activité de Clearstream, soute­ nue notamment par le développement de l’activité Fonds, a doublé au cours de cette période. Cette dynamique, on la doit notam­ ment à une place financière robuste, à la pré­ sence de nombreux talents. En découle une réelle émulation positive. Les acteurs en pré­ sence, et c’est assez unique au monde, par­ viennent à travailler à l’unisson pour développer l’activité luxembourgeoise dans son ensemble, maintenir les positions de la Place dans un contexte international concurrentiel. Prestataires de services financiers, avocats, fiscalistes… tous ont compris l’intérêt de bien travailler ensemble pour faire grandir Luxembourg et profi­ ter des retombées de cette croissance d’en­ semble. Évidemment, la concurrence s’exerce, et c’est heureux. Mais elle agit avant tout en poussant chacun à avancer et à se dépasser, dans l’intérêt global de la Place. Le fait de se sentir bien, dans un tel contexte, a été déterminant dans la réussite de ce qui a été accompli à notre échelle, tant au niveau collectif que personnel. Cet environnement nous a permis de bien recruter, de monter une équipe solide pour, in fine, créer la plus grande plateforme au monde de distribution de fonds. En étant connectés à cet écosystème unique, nous avons pu identifier les opportunités qui se présentaient à nous, mettre en œuvre avec beaucoup de rigueur une vision stratégique qui s’est, à peu de choses près, imposée à nous. Le succès qui a suivi a été largement porté par la croissance ininterrompue de l’industrie des fonds luxembourgeoise.

Photo

Avant de rejoindre le Luxembourg, j’évoluais à Londres, déjà dans le domaine de l’industrie financière. En 2005, j’ai rejoint Clearstream avec la mission de constituer une équipe et de développer une activité de services dédiée à l’industrie des fonds d’investissement. Ce que j’ai découvert en arrivant au Grand-Duché, c’est que, bien qu’étant plus petite que la City londonienne, la Place revêtait déjà un carac­ tère cosmopolite et une ambiance interna­ tionale très sympathique. En la matière, Luxembourg n’avait rien à envier à d’autres grandes Places. L’environnement dans lequel je m’immer­ geais ne m’était pas totalement inconnu. J’ai grandi en Belgique, à quelques kilomètres de la frontière. J’avais des souvenirs de jeunesse associés à la Schueberfouer, ou au Parc Merveilleux de Bettembourg. J’avais aussi un peu travaillé avec Luxembourg. Toutefois, c’est à partir de 2005 que j’ai vraiment découvert toute l’étendue de cette place financière. Quand on vient de Londres, c’est la qua­ lité de vie que propose Luxembourg – cette ville propre où tout est proche, où tout fonc­ tionne – qui est directement appréciable. C’est aussi la grande diversité des métiers que l’on trouve sur la place financière, et que l’on découvre petit à petit, qui impressionne. Luxembourg, à ce titre, offre aux profession­ nels du secteur financier des perspectives de carrière et d’épanouissement bien plus larges qu’une Place comme Paris. J’ai tout de suite su que j’y resterais dura­ blement, appréciant directement tout le poten­ tiel de cet écosystème unique au monde. Je me suis senti ici comme un poisson dans l’eau. Un des grands intérêts de la place financière luxembourgeoise réside dans sa taille, la faci­ lité avec laquelle on accède aux bonnes res­ sources, aux bonnes personnes. On connaît vite tout le monde et l’on peut très rapide­ ment s’intégrer à l’écosystème. On peut aussi facilement nouer un dialogue constructif avec les autorités de contrôle ou le gouvernement. Chacun, dans son rôle, agit pour le dévelop­ pement de l’activité. Le régulateur ou encore le ministère des Finances, sans être permissif, est à l’écoute des besoins des acteurs et fait



Interview Corinne Lamesch

« Sophistication n’est pas nécessairement synonyme de risque » Premier centre de fonds d’investissement en Europe avec des actifs sous gestion qui frôlent tous les records, l’industrie des fonds au Luxembourg est-elle armée pour affronter le futur ? Tour d’horizon avec Corinne Lamesch, la chairperson de l’Association luxembourgeoise des fonds d’investissement (Alfi), sur les défis les plus importants qui l’attendent, à savoir la réglementation, la finance durable et responsable, les actifs numériques et la guerre des talents. 10

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022


Matic Zorman Photo

Selon Corinne Lamesch, le Luxembourg veut et doit se positionner comme domi­cile de fonds investissant dans les actifs numériques.

MAI 2022 FONDS D′INVESTISSEMENT

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Interview Corinne Lamesch

les fonds. Enfin, le plan d’action de la Commission euro­ Le Luxembourg a terminé l’année 2021 avec une péenne pour une Union des marchés de capitaux sert de croissance record des actifs, +17,8 % et 5,9 milliers de milliards d’euros, c’est impressionnant. Quels ont catalyseur pour attirer plus de financement par des sources été les moteurs de la croissance l’année dernière ? non bancaires, dont les fonds bien entendu. La croissance des actifs est venue avant tout des investis­ seurs. Avec près de 33 milliards de souscriptions nettes par Luxembourg se positionne dans les alternatives – mois, 2022 a été une année battant tous les records puisque ou ce que l’on appelle parfois les actifs privés. nous étions dans une fourchette de 10 à 20 milliards les Le Grand-Duché est-il bien positionné dans ce segment ? années précédentes. C’est une confirmation de la tendance Oui, sur bon nombre de stratégies. C’est essentiel puisque qui s’est fait jour en avril 2020, après le début de la pandé­ c’est un moteur de croissance. Contrairement aux OPCVM, mie. Les investisseurs ont privilégié les fonds actions (+11,4% le recours au passeport pour la distribution est encore à ses de souscriptions nettes), certainement portés par les per­ débuts, et cela renforce l’intérêt pour Luxembourg d’être formances des marchés actions. Le second moteur de crois­ bien positionné sur ce créneau. Le fonds Eltif (European sance est l’alternatif: +13,3% pour l’immobilier et +11,4% long-term investment fund) est un nouveau véhicule avec pour le private equity. Les raisons en sont connues: besoin des perspectives intéressantes, notamment en raison des de diversification, moins de volatilité, décorrélation avec adaptations que la Commission européenne souhaite pro­ les marchés actions et rendements nets positifs sur le long poser dès cette année. Sur 68 Eltif en Europe, 37 sont domi­ terme. Le secteur de l’alternatif est intéressant tout autant ciliés à Luxembourg. Selon l’étude de l’Alfi, les Reif (real pour les investisseurs institutionnels que pour les investis­ estate investment funds) à Luxembourg ont bénéficié d’une seurs de détail, ces derniers étant cependant soumis à un croissance de 14,8% en 2021 pour des actifs de 104 milliards cadre réglementaire plus restrictif. d’euros. Les fonds de dette privée, selon KPMG, atteignent 184 milliards d’euros (+40,6%) et les fonds de private equity, Quel sera l’impact de la guerre en Ukraine selon la CSSF, totalisent 137 milliards d’euros (+29,9%). sur l’industrie des fonds au Luxembourg ? Comment pourrions-nous porter un regard de techniciens À l’origine, les OPCVM ont été conçus pour répondre sur cette tragédie qui se déroule devant nos yeux? Je suis aux besoins des investisseurs de détail, avec un cadre avant tout une citoyenne, fière de ce que l’Europe est deve­ robuste et un niveau élevé de protection des investis­ nue, de nos valeurs démocratiques. Ce que nous vivons, ce seurs. Les fonds alternatifs, quant à eux, étaient plutôt ne sont pas des chiffres, mais une immense souffrance et destinés aux investisseurs professionnels, donc plus une remise en question de l’ordre international depuis la sophistiqués. Pourtant, le secteur semble préconiser fin de la Seconde Guerre mondiale. L’impact direct de la une certaine forme de retailisation des fonds alternatifs. guerre en Ukraine sur les fonds luxembourgeois est a priori Pourquoi ? Est-ce une bonne idée ? limité. L’exposition sur les actions et obligations d’émetteurs C’est un vrai débat. Le message de l’industrie est simple. Il russes s’élevait au début de la crise à 18 milliards d’euros, nous semble difficile de justifier que l’investisseur de détail soit 0,3% des actifs. S’y ajoutent quelque 4 milliards d’eu­ ne puisse accéder à toute une série de classes d’actifs qui ros en titres d’émetteurs ukrainiens. 61 fonds et comparti­ offrent des rendements élevés à long terme, au motif que ments avaient une exposition supérieure à 10 % de leurs ces stratégies sont plus sophistiquées. Sophistication n’est actifs nets sur la Russie, dont 41 avaient suspendu les sous­ pas nécessairement synonyme de risque. Une plus grande criptions et rachats dans l’intérêt des investisseurs. Plus diversification du portefeuille et une orientation à long important, à mon sens, est l’impact mondial de cette crise: terme sont tout aussi importantes pour les investisseurs de tendances inflationnistes à la clé, augmentation des taux détail. Il y a quasiment une composante «démocratique» à d’intérêt, forte augmentation du prix de certaines matières vouloir ouvrir la distribution de fonds alternatifs sous réserve premières et de l’énergie… et, bien sûr, cela ira de pair avec et avec les garde-fous appropriés. Pour ce faire, il est essen­ tiel qu’il y ait une transparence totale dans les informations une plus grande volatilité des marchés financiers. mises à disposition et la durée estimée de l’investissement. Où voyez-vous des opportunités de croissance future, L’exemple de l’Eltif est intéressant car la réglementation et quels sont les défis auxquels l’industrie des fonds européenne prévoit, sous conditions, la possibilité pour les est confrontée ? investisseurs de détail d’investir dans de tels fonds. Tout dépendra de l’évolution de la situation en Europe – impon­ dérable majeur – et de ses retombées sur l’économie mon­ Depuis mars 2021, le règlement SFDR (règlement diale dont notre activité est tributaire. Si l’on revient sur les sur la publication d’informations en matière de fondamentaux: l’OPCVM (organisme de placement collectif durabilité dans le secteur des services financiers) en valeurs mobilières) distribué dans plus de 70 pays depuis est en vigueur. Comment jugez-vous son impact ? le Luxembourg reste le véhicule d’épargne le plus adapté Pensez-vous que l’industrie fait un bon travail d’infor­ pour les investisseurs de détail et les institutionnels. Il garde mation des investisseurs sur les fonds durables ? un énorme potentiel de croissance à l’international. L’épargne Le règlement SFDR et le Règlement sur la taxonomie sont des ménages en Europe est investie à hauteur de 9% dans deux pièces maîtresses dans le plan d’action de la Commission les fonds d’investissement, contre 23% aux États-Unis. Une européenne sur la finance durable. L’impact de cette légis­ bonne partie des avoirs (plus ou moins 40%) est toujours lation, qui va bien au-delà du secteur financier, est vital. Les détenue en cash auprès des banques. Il y a donc un grand gestionnaires ont catégorisé leurs produits, optant, pour potentiel de convertir cette épargne en investissement, et certains, pour l’Article 8 (promotion de caractéristiques ce encore plus dans un environnement inflationniste. Le environnementales ou sociales) ou l’Article 9 (investisse­ financement des retraites (second et troisième piliers) s’ap­ ments durables). À fin décembre 2021, 42,4% des fonds (sur puie sur des fonds de pension investis pour une part dans base des actifs nets) en Europe sont classés Art. 8 ou Art. 9. 12

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

BIO EXPRESS Chairperson Après un premier mandat de deux ans, Corinne Lamesch a été réélue en juin 2021 pour un second mandat en tant que présidente du conseil d’administration de l’Alfi. Elle intervient régu­ lièrement lors d’évé­ nements du secteur et participe activement aux conférences et roadshows que l’Alfi organise au Luxem­ bourg et dans le monde entier. Country head Aujourd’hui Luxem­ bourg country head chez Fidelity International, Corinne Lamesch a plus de 20 ans d’expérience dans le secteur des fonds luxembourgeois. Elle a rejoint Fidelity International en 2008 et agit également en tant qu’agent de conduite de la société de gestion de Fidelity Interna­ tional, basée au Luxem­bourg depuis 2015. Avant de rejoindre Fidelity International, Corinne a travaillé comme avocate pour Clifford Chance et Allen & Overy de 1998 à 2008, conseillant l’industrie luxembourgeoise et interna­tionale des fonds d’investissement. Strasbourg et New York Titulaire de deux masters en droit de l’Université Robert Schuman de Strasbourg et de la New York University School of Law, Corinne Lamesch a été admise comme avocate au Barreau de Luxem­ bourg (1999-2008) et au Barreau de New York (depuis 1998).



Interview Corinne Lamesch

La demande pour ces produits est croissante. L’objectif affi­ ché de la Commission est de faciliter la transition vers un modèle de développement durable, en réorientant les flux de capitaux. C’est un processus à long terme. Je pense qu’il y a encore des améliorations à faire quant à la qualité d’information aux investisseurs. Le défi est de traduire des concepts assez complexes en informations simples et com­ préhensibles. L’industrie commet aussi une erreur en se référant aux catégories Art. 8 et Art. 9 comme des quasilabels SRI alors qu’ils sont uniquement destinés à amener de la transparence sur la stratégie par produit. Un autre plan d’action doit s’articuler autour de l’éducation financière afin que l’investisseur soit en mesure de comprendre les pro­ duits financiers et comment ceux-ci peuvent être utilisés dans la poursuite de leurs objectifs durables.

«Luxembourg veut et doit se positionner comme domi­cile de fonds investissant dans les actifs numériques.» classification des différents actifs numériques ainsi que de leurs caractéristiques permettrait d’adresser de manière plus ciblée les considérations relatives à la protection des investisseurs de détail. Les fonds alternatifs peuvent, sous condition de respecter leurs documents constitutifs et le cadre réglementaire, investir dans des actions numériques.

Il y a beaucoup de bruit autour des « actifs numériques ». Est-ce un effet de mode ou une tendance pour l’industrie? C’est un vrai sujet. Les actifs numériques offrent de nou­ On parle beaucoup d’une « guerre des talents » velles opportunités d’investissement et une étude récem­ pour les gestionnaires d’actifs et les professionnels ment publiée par la Lhoft et PwC, à laquelle l’Alfi a été des fonds. Or, le Luxembourg a récemment été classé associée, montre un intérêt dans le marché. Luxembourg 3e pays le plus attractif pour les talents au niveau veut et doit se positionner comme domicile de fonds inves­ mondial par l’IMD Business School. N’est-ce pas tissant dans les actifs numériques afin d’offrir l’opportunité contradictoire ? Que faut-il faire dans ce domaine ? aux investisseurs de gagner une exposition sur ces actifs Différentes tendances se juxtaposent, ce qui rend la pro­ tout en assurant un niveau de protection et de transparence blématique complexe. Le manque de personnel qualifié qui caractérisent la Place et l’industrie des fonds. La mise dans la gestion d’actifs n’est d’ailleurs pas limité à Luxembourg. en œuvre d’un tel cadre requiert de nombreuses interac­ Les métiers de la gestion d’actifs sont de plus en plus sophis­ tions entre les sociétés de gestion, le régulateur, les acteurs tiqués, qu’il s’agisse de finance durable, de gestion du risque, de la chaîne de valeur de la gestion d’actifs (tels que les dépo­ de compliance ou de gestion des fonds alternatifs ou des sitaires), mais aussi avec de nouveaux intervenants, tels que actifs numériques. Luxembourg est par ailleurs une écono­ les Vasp (virtual asset service providers). L’Alfi travaille sur mie dynamique, importatrice nette de main-d’œuvre avec le sujet avec ces principaux intervenants, dont les autorités un taux de croissance de la population active de 2% à 3% publiques. L’approche consiste à analyser dans quelle mesure par année. Les nouvelles générations ont des attentes dif­ le cadre réglementaire actuel permet l’investissement dans férentes. La pandémie a renforcé ces aspirations puisque de tels actifs, puis à s’accorder sur les modifications et cla­ le télétravail est devenu la norme. Nous devons travailler rifications nécessaires, notamment sur certains concepts, sur toutes les composantes du problème et accepter de nous certaines définitions et pratiques de marchés. Plus concrè­ remettre en question. Il faut permettre de nouveaux modes tement, les aspects sur lesquels nous travaillons traitent du de travail, offrir des formations continues ou spécialisées volet dépositaire, de la gestion du risque, du caractère éli­ et attirer du personnel qualifié. gible par type de fonds en fonction de l’exposition directe Je sais que la diversité et l’équilibre entre les sexes ou indirecte, de l’alignement avec la taxonomie. sont des sujets qui vous tiennent à cœur. Que faut-il faire de plus, dans ce domaine ? S’agit-il de produits destinés à des investisseurs particuliers ? Les fonds d’investissement sont-ils C’est encourageant de voir que l’état d’esprit des gestion­ autorisés à investir dans les actifs numériques ? naires d’actifs a changé depuis quelques années. Il y a une La question reste ouverte à ce stade, sachant que l’European réelle intention et un engagement à devenir plus diver­ Securities and Markets Authority ou d’autres institutions sifié et inclusif. Mais le progrès réalisé, bien qu’encoura­ internationales se penchent sur la question de l’éligibilité geant, reste insuffisant. À défaut de quotas, il faut que le de ces classes d’actifs. À ce stade, je me limiterais à men­ secteur s’autorégule. Les entreprises doivent se fixer des tionner les documents FAQ Virtual Assets publiés par la objectifs clairs par rapport au progrès à faire pour aug­ CSSF, en décembre, mentionnant que les OPCVM ne sont menter le pourcentage des femmes dans les conseils d’ad­ pas autorisés à investir dans les actifs numériques de manière ministration, la direction, et pour réduire l’écart de directe ou indirecte. Cette position fait écho aux avertisse­ rémunération entre les sexes. L’industrie a besoin d’un ments des Autorités européennes de supervision (ESA) sur pool de talents diversifié et il faut que le monde des les risques associés aux investissements numériques (comme finances soit rendu plus attrayant et plus intéressant pour la volatilité accrue). En revanche, nous pourrions conjectu­ les jeunes. Une culture du travail flexible et le télétravail rer que cette position conservatrice puisse être provisoire sont également essentiels pour réconcilier sa vie profes­ dans un contexte où les investisseurs, les gestionnaires et sionnelle et privée. les régulateurs deviennent de plus en plus informés et experts sur le sujet. Ainsi, le positionnement des autres juridictions en la matière est un élément pertinent à considérer. Il faut aussi reconnaître le caractère très hétérogène du terme « actifs numériques ». Une meilleure compréhension et Interview NATHALIE REUTER 14

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022


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Géant du secteur

Luxembourg 35,90 %

L’industrie luxembourgeoise des fonds, colosse aux pieds agiles

Irlande 22 %

Autres 5,9 % Royaume-Uni 11,10 % Belgique 1,4 % LE LUXEMBOURG REPRÉSENTE 36 % DES ACTIFS DES OPCVM AU 30 SEPTEMBRE 2021

Italie 1,9 %

En Europe, pour un total de 13.113 milliards d’euros. Source

Espagne 2,1 %

CSSF

Allemagne 3,6 %

France 6,9 %

Première Place européenne en matière de fonds d’investissement, deuxième au monde derrière les États-Unis, le Luxembourg, malgré sa petite taille, reste un géant du secteur au niveau global. En deux ans de crise sanitaire, le volume des actifs sous gestion a continué de croître, jusqu’à battre des records. Le secret ? Une agilité à toute épreuve, qu’il faudra continuer à cultiver pour faire face aux défis de demain. 16

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

09_credit

Suisse 5,1 %

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Suède 4,0 %


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Matic Zorman

Au mois de décembre dernier, l’industrie luxembourgeoise des fonds a réalisé un nou­ veau record absolu. Selon les chiffres de la CSSF (Commission de surveillance du secteur financier), un total de 5.859,5 milliards d’eu­ ros d’actifs était en effet géré depuis la Place luxembourgeoise à la fin de l’année 2021. Il s’agit d’une progression de 17,81% par rapport à décembre 2020, et de plus de 24 % par rap­ port à la fin 2019. Il faut aussi se souvenir qu’au sortir de la dernière crise financière (en décembre 2008), ce montant s’élevait « seu­ lement » à 1.559,6 milliards d’euros… La croissance de l’industrie des fonds au Luxembourg est donc constante depuis de nombreuses années. La crise sanitaire majeure que nous traversons depuis deux ans semble avoir glissé sur elle comme une vaguelette sur un paquebot. «Ce qui est remarquable par rapport à ce résultat record enregistré en 2021, c’est qu’une grande partie de la croissance émane de souscriptions nettes, qui représentent 33 milliards d’euros par mois, explique Camille Thommes, directeur général de l’Alfi (Association luxembourgeoise des fonds d’investissement). Cela montre le grand intérêt que suscite notre industrie, et son réel dynamisme.»

à assurer la gérance des fonds et à attirer de nouveaux clients. C’est très positif, car cela indique aussi à quel point les différents acteurs de la Place se connaissent et sont capables de collaborer, même à distance », estime Oliver Weber, asset manager leader au sein de PwC Luxembourg. Le son de cloche est le même chez Ocorian Luxembourg, société spécialisée notamment dans l’administration de fonds. «Il est clair que le secteur financier est loin d’être le plus impacté par la crise. En plus d’assurer une certaine stabilité, le secteur a progressé sur ces deux années », souligne Christophe Gaul, regional head of Europe and managing director Luxembourg chez Ocorian. Si cette crise – qui n’est certes pas terminée – a donc été gérée de main de maître par la Place luxembourgeoise, elle vient d’être brutalement chassée des radars par une autre, dont la vio­ lence a laissé l’Europe et le monde sans voix. L’attaque russe en Ukraine est-elle de nature à impacter l’industrie des fonds, comme pourrait le laisser penser la légère baisse des actifs (s’éle­ vant tout de même toujours à 5.686,119 milliards d’euros) enregistrée au mois de janvier dernier? «Au-delà du choc que représente cette invasion, et des terribles souffrances qu’elle inflige au peuple ukrainien, l’impact du conflit sur notre business Une crise chasse l’autre devrait être marginal. Notre exposition en valeurs Pour l’ensemble des acteurs du secteur, la réac­ mobilières russes est limitée, puisqu’elle se chiffre tion de l’industrie des fonds à la crise sanitaire à environ 20 milliards d’euros. Cela dit, il est a démontré sa grande adaptabilité. «On pour- clair que tout trouble géopolitique entraîne une rait presque dire que l’impact de la crise sur le grande volatilité sur les marchés. On ne peut secteur a été plutôt positif. Alors qu’il y a deux donc pas exclure un impact indirect, surtout au ans, tout le monde travaillait à temps plein au vu de l’ampleur et de la proximité de ce conflit bureau, on s’est retrouvé, en l’espace de deux armé», relève Camille Thommes. semaines, à travailler entièrement depuis la maison. Et ce changement majeur n’a eu aucun Ucits, alternatifs et ESG : tiercé gagnant effet sur nos performances: nous avons continué Les bons résultats enregistrés par l’industrie luxembourgeoise des fonds doivent beaucoup aux fonds Ucits. Créée au départ d’une direc­ tive européenne datant de 1985, et transposée au Luxembourg dès 1988, cette typologie de fonds a servi de socle au développement de « la place financière luxembourgeoise. Et ils continuent d’être attrayants pour les inves­ tisseurs actuels. Mais ce sont surtout les fonds alternatifs – appelés aussi «private/real assets» – qui portent la croissance du secteur. « C’est en effet une grande tendance, qui ne fait que s’accé­lérer, indique Oliver Weber. Depuis quelques années, nous constatons que les fonds alternatifs ont tendance à remplacer le rôle historique des banques dans le financement de projets ‘réels’, qu’il s’agisse d’infrastructures, d’immobilier, etc. Par ailleurs, il faut relever la volonté de rendre cette catégorie d’ac.» tifs accessible à une clientèle de détail, à travers des fonds comme l’Eltif CHRISTOPHE GAUL (European Long-Term Investment Fund), Regional head of Europe dédiés aux projets d’infrastructures. » and managing director Le Luxembourg a d’ailleurs bien tiré Luxembourg, Ocorian

L’environnement ban­ caire, au Luxem­bourg, est devenu bien plus prudent qu’il y a quelques années. C’est une bonne chose à certains égards, mais cela peut poser des problèmes

LES CHAMPIONS DES FONDS AU LUXEMBOURG Source

Monterey Insight

Administrateurs de fonds

En milliards de dollars (31 décembre 2020)

1

State Street

2

J.P. Morgan Bank

3

BNY Mellon 419,3

4

BNP Paribas 378,8

1.210,20 938,5

Banques dépositaires

En milliards de dollars (31 décembre 2020)

1

State Street

2

J.P. Morgan Bank

3 4

1.214,00

1.175,40 Brown Brothers Harriman (BBH) 484,6 BNP Paribas 451,7

Agents de transfert

En milliards de dollars (31 décembre 2020)

1

IFDS / State Street

2

RBC Investor Services Bank 766,4 Caceis 466,7

3 4

1.195,30

J.P. Morgan Bank 440,5

Promoteurs de fonds

En milliards de dollars (31 décembre 2020)

1

J.P. Morgan Bank 435,5 2 Amundi 246,5 3 DWS International 226,7 4 UBS 219,6

Auditeurs de fonds et sous-fonds

En nombre de fonds (31 décembre 2020)

1

PwC

2

KPMG

3

EY

4

Deloitte

5.949 2.927 2.757 2.517

Conseillers juridiques fonds et sous-fonds

En nombre de fonds (31 décembre 2020)

1 2 3 4

Arendt & Medernach

4.413 Elvinger Hoss Prussen 3.567 Linklaters 730 Allen & Overy 729

Management companies (AIFM / Ucits) En milliards de dollars (31 décembre 2020)

1

J.P. Morgan AM (Europe) 435,1 2 DWS International 225,2 3 UBS Fund Management (Lux.) 224,2 4 Amundi Luxembourg 216,7

MAI 2022 FONDS D′INVESTISSEMENT

17


Géant du secteur

son épingle du jeu par rapport à ces fonds Eltif, puisque sur les 67 fonds référencés en Europe, 36 sont domiciliés au Luxembourg. Bien évidemment, les fonds de dette, le private equity ou le real estate continuent, eux aussi, d’avoir un succès important dans le seg­ ment des fonds alternatifs. Sa croissance a d’ailleurs été objectivée par différentes études de l’Alfi et de KPMG, complétées par des don­ nées de la CSSF. « En 2021, on estime que les fonds immobiliers ont augmenté de 14,83%, les fonds private equity de 29,9 % et les fonds de dette de 40,6 %, détaille Marc-André Bechet, directeur général adjoint de l’Alfi. L’environnement actuel de taux bas rend ces fonds attractifs pour les investisseurs institutionnels, car ils offrent une bonne rentabilité et permettent de diversifier les portefeuilles.» La dernière tendance forte constatée sur le marché des fonds – sans surprise – est celle de l’ESG, c’est-à-dire les structures intégrant des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance. « C’est peut-être encore un peu nouveau au Luxembourg, mais c’est un sujet d’actualité qui occupe une place croissante. La demande est importante. Mais il faudra sans doute attendre que l’ensemble des réglementations en préparation pour encadrer ces investissements aboutisse avant que les fonds ESG soient réellement privilégiés. Un cadre légal clair offrira en effet plus de confort aux investisseurs», estime Christophe Gaul. Des défis à la pelle Si le Luxembourg est parvenu à se positionner rapidement sur ces différentes tendances de fond, il devra maintenir ses efforts pour rester cette Place européenne de référence pour la distribution transfrontalière de fonds d’inves­ tissement. Les défis sont en effet nombreux et la concurrence féroce. «L’environnement bancaire, au Luxembourg, est devenu bien plus prudent qu’il y a quelques années. C’est une bonne chose à certains égards, mais cela peut poser des problèmes, pointe Christophe Gaul. Dans le secteur des fonds alternatifs, notamment, il faut pouvoir être très réactif pour rester attractif. Or, s’il faut des mois pour ouvrir un compte, cela devient très difficile d’être compétitif par rapport à d’autres Places, comme l’Irlande par exemple. Je comprends qu’on cherche à limiter les risques, mais quand les clients ne présentent aucun problème au niveau KYC ou AML, je pense que l’on pourrait accélérer un peu les choses.» Mais c’est aussi au niveau des ressources humaines que se joue l’avenir de la place finan­ cière luxembourgeoise. «Il faut sans cesse veiller à renforcer l’attractivité du pays en matière d’employabilité, estime Oliver Weber. Au Luxem­ bourg, le coût d’engagement est élevé, tout comme le coût de la vie. C’est un enjeu considérable si l’on veut continuer à attirer les talents nécessaires. » Du côté de l’Alfi, on prend la pleine mesure de cet impératif et on relève les progrès 18

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

LES ALTERNATIFS ONT LA COTE Les chiffres collectés par l’Alfi et la CSSF montrent bien à quel point les actifs alternatifs ont le vent en poupe ces dernières années. La croissance des actifs alternatifs sous gestion en 2021 est en effet impressionnante.

29,9 % Private equity

40,6 %

Fonds de dette privée

14,83 % Real estate

déjà réalisés, notamment au niveau du renfor­ cement des cursus universitaires dédiés aux matières financières. C’est toutefois loin d’être la seule priorité de l’organisation. «Il y a également un travail à mener sur la fiscalité, notamment par rapport à la taxe d’abonnement qui existe au Luxembourg et pas toujours ailleurs, indique Marc-André Bechet. La digitalisation est un autre enjeu de taille et on peut se féliciter de voir le nombre d’initiatives qui existent en la matière au Luxembourg, à commencer par la Lhoft, dédiée aux fintech. L’agenda réglementaire très dense qui est le nôtre doit, par ailleurs, être un point d’attention crucial.» En effet, entre la révision de la directive AIFM et les changements apportés à la direc­ tive Ucits et à la réglementation Eltif, le travail d’adaptation ne manquera pas. « A priori, la révision de la directive Ucits devrait rester maîtrisable en ce qui nous concerne. Visiblement, il sera toujours possible de déléguer la gestion de fonds à l’étranger, pour peu que l’on garde la substance au Luxembourg. Or, à ce niveau, le Luxembourg est déjà bien avancé», estime Camille Thommes. Le chantier le plus important sera celui qui concerne la finance durable. «On est loin d’une mise à jour. C’est au contraire un travail gigantesque qui s’annonce, proche de ce que l’on a connu par rapport aux OPCVM et à AIFMD, explique Marc-André Bechet. Nous sommes pour l’instant au milieu du gué. Au cours des prochains mois, des prochaines années, les réglementations vont s’emboîter les unes dans les autres et vont impacter non seulement les fonds, mais également les sociétés dans lesquelles on investit. C’est un défi, certes, mais cela ouvre aussi de nouvelles opportunités de croissance.» Des atouts toujours réels Pour faire face à ces défis, le Luxembourg pourra toutefois compter sur ses atouts tra­ ditionnels : sa position au cœur de l’Europe, sa stabilité économique et politique, mais aussi sa grande expertise. «L’image du Luxem­ bourg à l’étranger est très positive. Certains de nos clients estiment même que, pour certaines fonctions, comme le risk management notamment, personne ne fait mieux que le Luxembourg, relève Oliver Weber. C’est quelque chose dont il faut être fier.» Mais l’expert de PwC Luxem­ bourg pointe également la grande agilité de la Place, qui lui permettra de transformer les nouveaux défis qui se présentent en oppor­ tunités. « Au Luxembourg, les acteurs collaborent constamment, pour aller dans la même direction. Le régulateur joue aussi son rôle en s’adaptant rapidement aux nouvelles contraintes réglementaires. À mon avis, cette agilité est l’atout fondamental de la Place luxem­bour­ geoise. » De quoi garantir encore de longues années de succès à l’industrie luxem­bourgeoise des fonds. Auteur Q. D.



BRAND VOICE

Marc Arand, new CEO of Banque Havilland Group.

Meet with the new CEO

The CEO who is bringing back client-centricity

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Originally from Germany, Mr Arand has more than 20 years of experience in bank­ ing and has been with Banque Havilland since the beginning. In 2009, he was part of the team that created the private bank which is headquartered in Luxembourg. Now oversee­ ing the entire group, he wants to reaffirm the bank’s commit­ ment to excellence and greatly enhance its clientcentric approach.

FONDS D’INVESTISSEMENT MAI 2022

What is the story of Banque Havilland? We are a private bank that was born of an entrepreneurial mindset. Because we are bou­ tique-sized, we are firmly posi­ tioned as a niche player in the wealth management space. It’s also important to point out that we are privately owned and that we are a well-capital­ ised and solid bank. This own­ ership also provides the group and our clients with unmatched

stability and consistency, and it allows us to take a longterm approach to the manage­ ment of our client’s wealth while forging generational client relationships. Our values are at the heart of everything we do. We strive for excellence, and this desire has been in our DNA since the birth of the company in 2009. We were built on strong finan­ cial foundations and adherence to prudent principles.

Photo

Marc Arand is the new CEO of Banque Havilland Group. His main goal: make sure that clients remain at the centre of the private bank’s operations.

Eva Krins

Content sponsored by BANQUE HAVILLAND


BRIEF BIO

Why were you selected for this role? I’ve been with Banque Havilland since the beginning, and because of this, I’ve had the privilege of growing with the group. We now have a branch in London, subsidiaries in Monaco, Switzerland, and Liechtenstein, and a represent­ ative office in Dubai. Over the years, I’ve been able to see up close and personal what our clients expect and deserve. Several years ago, I served as Chief Operating Officer, and during that time I oversaw the expansion of the group as well as the acquisition of sev­ eral other banks. In 2016, I became CEO of Banque Havilland (Liechtenstein) Limited, where I was tasked with restructuring the bank to make it profitable. Within six years, we had turned it around. We went from being in the red by 4 million euros to seeing profits in excess of 3 million. The board was very pleased and asked me to serve as CEO of the group. As a side note, I come from an investment banking back­ ground, and I’ve looked into a lot of different businesses over the past two decades. Clients appreciate this, having someone who grasps their busi­ ness aims. We understand the issues they face, and I can per­ sonally support them and help to bring the right people on board, should they need it. What are some of the challenges that private banks face today? Across the board, margins are shrinking, as are the returns of clients. Private banks are

“Unfortunately, many clients today no longer see their private bank as a trusted advisor.”

facing difficulties, and they need to find ways to maintain profitability margins. Largely due to the growing regulatory landscape, many banks have chosen to adopt a model of industrialisation. Under this model, clients are compelled to fit into standardised pro­ cesses, and the result is that they end up seeing their bank as a faceless entity rather than as a trusted advisor, which is really unfortunate. How do you plan on overcoming these difficulties? We are going to dramatically reaffirm our client-centric approach, which has been with us since the beginning anyway, but sometimes it needs to be revamped. Obviously, our clients are at the centre of everything we do, but we need to make sure that we recognise that and orient ourselves accordingly. To this end, we have a two-fold strategy: we are going to offer greatly improved digital tools to clients, while at the same time enhanc­ ing our capacities for human-tohuman interactions. In short, we are going to marry these two vital elements: technology and personalised support. What are some of your plans for technical enhancements? We are making every effort to work much more closely with IT vendors because we want to ensure that our clients have every digital tool in the tool­ box, and more, at their dis­ posal. Similarly, we are going to make sure that all of our delivery channels are flawlessly designed and offer a superior client experience. We are not there yet, and we have some way to go, but that is the sort of challenge we are taking on. Our aim is to be one or two notches above the standard, which is a lofty goal, but one that we know we can and will achieve. We want our clients to have overwhelmingly positive expe­ riences with our digital tools, an objective which aligns with our credo to be totally service-­ oriented and personally available.

“Clients are at the centre of everything we do, and they need to feel like it.” How do you intend to enhance the human element and personal touch? This sort of change does not occur overnight, and that is why we are working hard to enhance our corporate culture across the board. Once such changes are underway, the effect will be amplified. The right corporate culture leads to motivated workforce, attractive workplace and ulti­ mately high client satisfaction. We already have great people working at our bank, and I know they are eager to improve our corporate culture and con­ tinue to offer excellence and client-centricity. Above all, we are going to make certain clients will always have at their disposal someone to talk to – in order to work through any issue or get an answer to any question, big or small.

Marc Arand holds a diploma in banking administration from the Frankfurt School of Finance, and he can look back on a career of more than 25 years in national and international banks. He has an investment banking background that allows him to understand UHNWI’s needs and incorporate them into his decisions. He pays great attention to the compo­ sition of his strategic decisions so that the most important asset, the bank’s clients, is always at the centre of his daily activities. He strives for excellence in everything he does.

KEY DATES

2009 Marc Arand was part of the team that created Banque Havilland. The headquarters are in Luxembourg. 2016 Marc Arand became CEO of Banque Havilland Limited in Liechtenstein. He was tasked with restructuring the bank to make it profitable. 2022 Marc Arand is the new CEO of Banque Havilland Group. Now overseeing the entire group, he wants to reaffirm the bank’s commitment to excellence and greatly enhance its clientcentric approach.

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FONDS D’INVESTISSEMENT MAI 2022

21


Dossier

Catalyseur de la transition 24 DURABILITÉ Un nouvel univers d’investissement « vert » se dessine

30 INTERVIEW LAETITIA HAMON « Sans la réglementation, nous n’en serions pas là »

36 FONDS DURABLES Au service des Objectifs de dévelop­ pement durable


Illustration

Marielle Voisin

Durabilité

En se plaçant au service des enjeux de transition environnementale et sociétale, l’industrie des fonds d’investissement opère un nouveau tournant. L’Union européenne considère aujourd’hui qu’elle est un catalyseur essentiel du changement, reconnaissant sa capacité à mobiliser l’épargne privée pour la mettre au service d’une société plus durable. À travers une série de réglementations, l’Europe entend orienter les capacités de financement vers des activités plus vertueuses ou, du moins, contribuant à la nécessaire transition à mener. L’industrie des fonds n’a toutefois pas attendu d’être contrainte de le faire pour s’engager dans le développement de la finance durable. Le Luxembourg, d’ailleurs, a été un pionnier en la matière. La place financière, à commencer par la Bourse de Luxembourg, a exploré de nou­ velles approches, ouvrant la voie à de nouveaux modèles, démontrant que l’on peut donner du sens à ses investissements au-delà de la recherche de performance financière. Dans un monde qui doit aujourd’hui se transformer, l’investissement responsable et durable doit être considéré comme source d’opportunités. C’est en premier lieu aux acteurs de l’industrie des fonds d’en prendre conscience, pour permettre rapidement à chaque investisseur de contribuer à un meilleur avenir commun.


Dossier

Un nouvel univers d’investissement « vert » se dessine La vague réglementaire durable, qui occupe actuellement les acteurs de l’industrie des fonds, devrait redéfinir en profondeur l’offre en produits d’investis­sement. Cette transition, avec la mise en application progressive d’un nouveau cadre, soulève cependant encore de nombreux défis et questionnements. ACTIFS SOUS GESTION DES MARCHÉS PRIVÉS EUROPÉENS : ESG VS NON-ESG En milliards d’euros, selon l’étude EU Private Markets: ESG Reboot. ESG Sources

Non-ESG PwC Global AWM Market Research Centre, Preqin

2.000 milliards d’euros

1.707,1

1.750 1.630,5

1.500

1.407,7

1.250

1.161,4 1.050,2

1.000

1.454,2

906,1

1.416,5 1.233,5

750 1.030,6 926,2

250

0

24

103,1

124

130,8

2015

2016

2017

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

174,2

214

252,9

2018

2019

2020

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803

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Durabilité

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Romain Gamba (archives)

L’industrie des fonds opère un virage-clé, celui de la finance durable. Actuellement, l’ensemble des acteurs s’adapte et se repositionne par rapport à un paquet de nouvelles réglemen­ tations, en cours d’implémentation ou annon­ cées. L’Union européenne, engagée dans la lutte contre le dérèglement climatique, a décidé de faire de la finance un vecteur de transfor­ mation de son économie, de transition vers des modèles durables et même vertueux. Ce changement n’a rien d’anodin pour les acteurs de l’industrie des fonds, qu’il s’agisse des distributeurs, des asset managers ou encore des asset servicers. Tous sont appelés à prendre la mesure de ces nouvelles règles et exigences pour y répondre efficacement. «En la matière, on peut évoquer un ensemble de réglementations nouvelles et complémentaires qui concernent les divers acteurs en présence, explique Georg Joucken, head of private banking au sein de Banque Raiffeisen. Depuis le 10 mars 2021, la Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR), qui concerne uniquement le secteur financier, est entrée en vigueur. Depuis le début de cette année, le volet écologique de la taxonomie, qui concerne tous les secteurs d’activité, est entré à son tour en application. Enfin, à partir d’août 2022, les distributeurs de produits financiers, comme le requiert la nouvelle version de la Directive sur les marchés d’instruments financiers (Mifid), devront s’enquérir des préférences des investisseurs en matière de durabilité. » Ces trois chantiers réglementaires, com­ plétés par d’autres, doivent permettre de diri­ ger les flux financiers vers des activités plus favorables à l’environnement, vertueuses sur le plan social ou qui intègrent des règles de bonne gouvernance. Mais comment fonc­ tionnent-elles ensemble, et quel impact aurontelles sur l’activité de l’industrie des fonds ? Garantir la transparence Le premier gros morceau concerne les pro­ moteurs et gestionnaires de véhicules d’in­ vestissement. La SFDR, en effet, établit un ensemble de contraintes à leur égard. « Cette réglementation contraint les gestionnaires à positionner leurs fonds vis-à-vis des enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) », explique Marie Niemczyk, respon­ sable des relations assureurs chez Candriam. La réglementation établit trois grandes catégories de produits. On trouve les fonds dits « Article 8 », qui font la promotion de caractéristiques ESG. Les fonds « Article 9 » sont ceux qui poursuivent des objectifs expli­ cites, mesurables. On parle de fonds à objec­ tif d’impact durable. Les fonds « Article 6 », quant à eux, ne font pas la promotion de cri­ tères ESG. « L’enjeu est, d’une part, d’intégrer les risques de durabilité et, d’autre part, de garantir une plus grande transparence en matière d’investissement durable. Pour les gestionnaires,

«L’investissement durable, ce n’est pas un phénomène de mode, mais un réel choix de conviction. Aujourd’hui, un nombre croissant d’investisseurs souhaitent agir pour changer le monde.» GEORG JOUCKEN Head of private banking Banque Raiffeisen

cette réglementation a d’abord exigé de mener une réflexion sur les produits proposés, pour­ suit Marie Niemczyk. Quelle que soit la catégorie dans laquelle ils s’inscrivent, tous les fonds doivent désormais communiquer s’ils tiennent compte des risques de durabilité et des incidences négatives des investissements en matière de durabilité. Tout fonds d’investissement qui se dit durable doit donc analyser l’impact des risques ESG sur les entreprises dans lesquelles il investit et l’impact de ces dernières sur la société et l’environnement. » Au-delà, si le fonds souhaite faire la pro­ motion de caractéristiques ESG, il doit détail­ ler sa stratégie en la matière au cœur de son prospectus et sur son site internet. Pour les fonds poursuivant un objectif de durabilité (Article 9), il est nécessaire de déterminer une méthodologie de mesure d’impact. Les acteurs, évidemment, seront contraints d’établir des rapports relatifs à ces enjeux de durabilité.

pourrait se renforcer à partir du moment où, de manière systématique, nous devrons demander à nos clients leur préférence en la matière. Ces réglementations, in fine, sont de nature à changer le paysage des fonds, contraignant chacun à se positionner vis-à-vis de ces enjeux. » Pour Banque Raiffeisen, qui ne gère pas acti­ vement de véhicules d’investissement, mais distribue ceux proposés par d’autres, l’appli­ cation de ces réglementations a principale­ ment exigé de revoir le modèle de sélection des produits proposés à ses clients. Pour les gestionnaires de fonds, l’impact est plus conséquent. «Aujourd’hui, lorsqu’on interroge les investisseurs sur les critères de choix de leur produit d’investissement, l’idée qu’ils puissent générer un impact positif sur la société s’inscrit en haut du classement, confirme Marie Niemczyk. Les millennials, principalement, ont ce souci de responsabilité. Et on voit que les générations plus âgées leur emboîtent le pas. La transition menée au niveau de l’industrie des Intégrer les préférences durables fonds, si elle est induite par la réglementation, de l’investisseur est aussi soutenue par des considérations comConsidérant ces enjeux, les acteurs ont dû se merciales et, nous concernant, par de réelles préparer, intégrer ces nouvelles contraintes convictions. » Candriam, en effet, inscrit ses et étudier les évolutions qu’elles peuvent induire produits dans une approche durable depuis au niveau du marché. À l’autre bout de la chaîne de nombreuses années. Le gestionnaire de de valeur, en effet, l’investisseur semble déve­ fonds, à l’instar d’autres, est convaincu que lopper un attrait grandissant pour les produits l’intégration des critères ESG contribue à une intégrant des caractéristiques ESG. meilleure gestion des risques et à des perfor­ Cet impact pourrait encore être renforcé mances plus durables. par l’intégration des préférences en matière de durabilité des clients dans la nouvelle direc­ L’investissement durable à l’épreuve tive Mifid. «À partir du 2 août prochain, pour de la performance apporter un conseil en investissement à nos La mise en œuvre de la réglementation SFDR clients, nous devrons préalablement nous enqué- associée à Mifid ne sera toutefois pas sans rir de leurs préférences en matière de durabilité, conséquences. L’une d’elles, notamment, réside explique Georg Joucken. Jusqu’à présent, les dans une réduction de l’univers d’investisse­ distributeurs et conseillers en investissement ment, celui-ci étant amené à se concentrer étaient contraints d’établir un profil ‘risque’ des davantage sur des acteurs s’inscrivant dans une clients. Déjà aujourd’hui, on constate un réel démarche de durabilité et étant capables de le attrait pour les produits d’investissement inté- démontrer. Or, à l’heure actuelle, c’est loin grant une dimension durable. Cet engouement d’être le cas de la plupart des acteurs. «Si l’on MAI 2022 FONDS D′INVESTISSEMENT

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Dossier Durabilité

s’en tient aux grandes théories de gestion de porte­feuille, plus l’univers est ouvert, plus les chances d’engranger de bonnes performances sont élevées, commente Mario Mantrisi, spé­ cialiste de la finance durable au sein de la société Kneip. Si, indéniablement, le marché s’oriente vers les investissements durables, des questions demeurent. Une des clés du succès implique de démontrer que les fonds ESG permettent d’atteindre des performances financières au moins équivalentes à celles d’un fonds classique. Or, ces contraintes ESG vont inévitablement entraîner des coûts supplémentaires qui pourraient peser sur les performances du fonds.» Si l’on s’en tient à cette question des per­ formances, des dilemmes ne manqueront pas de se poser. «Plusieurs études tendent à démontrer que l’on peut obtenir des performances aussi bonnes à travers des investissements ESG, notamment parce que les ressources dans ce contexte sont souvent mieux utilisées, parce que les dirigeants de ces structures sont souvent plus créatifs, plus attentifs au bien-être du personnel et plus rigoureux en matière de gestion des risques», explique Georg Joucken. Cependant, il ne s’agit pas d’une vérité immuable. « Par exemple, l’investissement durable dans ce contexte de crise ne profite pas de l’envolée des prix des produits pétroliers dans la période mouvementée que nous traversons actuellement, pointe le dirigeant de Banque Raiffeisen. Il sera particulièrement intéressant de voir comment les investisseurs se positionnent en termes d’objectifs dans la situation actuelle. » Si ces nouvelles réglementations entraînent des coûts supplémentaires, il y a un réel enjeu, pour les gestionnaires et pour l’industrie européenne, à en tirer un avantage concur­ rentiel. « On ne peut pas ignorer le coût supplémentaire inhérent à la mise en place des nouvelles obligations, d’une gestion plus responsable, plus transparente, qui vient répondre aux engagements pris par nos pays en faveur d’une société plus durable, commente Marie Niemczyk. Au-delà, il y a une opportunité commerciale liée à ces enjeux de transition. L’Union européenne, pour le coup, a pris une longueur d’avance en la matière, pour rendre tangible auprès des investisseurs la transition nécessaire à l’échelle de nos sociétés. Les acteurs qui appréhendent ce tournant sérieusement pourraient, à long terme, tirer un avantage concurrentiel de ces efforts. » Répondre à ces nouvelles contraintes, iné­ vitablement, exige un effort financier des acteurs, qui doivent s’adapter, revoir leurs modèles opérationnels et leur approche com­ merciale. « Toutefois, il faut développer des perspectives à long terme, assure Mario Mantrisi. C’est un nouveau marché qui se dessine, une industrie différente de celle qui prévalait jusqu’alors. À ce titre, elle est encore jeune. Avec le temps, elle va gagner en performance, et les coûts vont diminuer. » 26

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

RÉGLEMENTATION DURABLE EN BREF La réglementation en faveur d’un investissement plus durable s’articule autour de trois textes principaux. SFDR Le règlement SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation) impose aux acteurs des marchés financiers des règles en matière de transparence en ce qui concerne l’intégration des risques de durabilité et la prise en compte des impacts négatifs sur la durabilité dans leurs processus d’investissement et de conseil. Le règlement instaure aussi des obligations de publication au niveau de l’organisation, des services et des produits en matière de durabilité, ce qui permettra d’éviter le greenwashing. Mifid Instaurée dès 2007, la réglementation Mifid impose aux institutions financières de connaître le profil d’investisseur de leurs clients. Parmi les nombreuses et récentes modifications apportées au texte, dès août 2022, les conseillers financiers devront s’enquérir de l’impact recherché par les clients au travers de leurs investissements, afin de leur proposer des produits financiers adaptés. Taxonomie Au 1er janvier 2022, la taxonomie européenne est entrée partiel­ lement en vigueur au sein de l’Union européenne pour plus de 11.000 organisations (institutions financières, entreprises et États). La taxonomie est une classification standardisée des activités économiques contribuant substantiellement à la réalisation d’objectifs environnementaux selon des critères scientifiques. Elle permet l’évaluation de la durabilité de 90 activités économiques, représentant plus de 93 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) de l’Union européenne.

Le défi de la donnée Au cœur de cette transition, de nombreux défis doivent encore être relevés. La régle­ mentation, comme évoqué, entre progres­ sivement en application. Et, dans beaucoup de cas, au-delà de la direction générale qui a été déterminée, les spécifications techniques peinent à suivre. « Un des challenges, pour les gestionnaires de fonds, est de parvenir à une interprétation la plus juste des nouvelles réglementations actuelles et à venir. Il faut aborder ce changement en développant une vision à long terme, adapter les processus d’investissement en ayant conscience que le cadre de la réglementation évolue, explique Marie Niemczyk. Au-delà, il faut acquérir la capacité de porter un regard analytique, intégrant ces éléments ESG, sur l’ensemble de ses investissements. » Au niveau de la SFDR, notamment, la régle­ mentation sera complètement effective à par­ tir de 2023. « Jusqu’à présent, les acteurs ont surtout dû adapter les informations précontractuelles, assure Mario Mantrisi. Le prochain défi, pour les fonds qui font la promotion de critères ESG ou d’objectifs durables, sera de récupérer l’information et les données relatives aux enjeux de durabilité au niveau des sociétés investies. Le problème est qu’à l’heure actuelle, on compte seulement 200 sociétés pour lesquelles ce type de données est facilement accessible. Dans beaucoup de cas, il faut trouver les moyens de récupérer l’information, pouvoir la traiter afin de rendre compte ensuite des éléments. Aller récupérer de la donnée relative aux émissions de CO2 pour chaque position prise au niveau du fonds, notamment si l’on parle de private equity, n’est en rien évident. L’exercice, si l’on parle de fonds de fonds, peut s’avérer encore plus complexe. » Face à cette problématique, de nouveaux acteurs, fournisseurs de données, émergent. Les gestionnaires de fonds, au-delà de l’in­ formation qu’ils peuvent récupérer, se dotent d’équipes d’analystes spécialisés. La qualité de la donnée disponible est variable. Il faut pouvoir la vérifier, la questionner, ne fût-ce que pour éviter de se voir incriminé pour du greenwashing. C’est un enjeu réglementaire, mais avant tout réputationnel. Une même grille de lecture Toutefois, ce qui relève du durable ou non est encore souvent sujet à interprétation. Ce qui nous amène à l’autre grand chantier régle­ mentaire mis en œuvre au niveau de l’Union européenne: l’établissement d’une taxonomie dont l’objet est de classifier les activités ayant un impact favorable sur l’environnement, sur le social ou en matière de gouvernance. «L’appréciation de ce qui est durable laisse place à une grande subjectivité, commente Mario Mantrisi. Si la SFDR contribue à la transparence nécessaire, la taxonomie va poser un cadre, permettant à tout le monde de s’aligner


PUBLIREPORTAGE

Joachim Cour, Partner at Elvinger Hoss Prussen

rectement de notre économie nationale, donnant ainsi raison aux auteurs de ces projets de loi. Si la nouvelle société en commandite (simple ou spéciale) devait s’imposer comme l’outil juridique de référence pour la structuration de FIAs, il manquait à la ‘boite à outils’ luxembourgeoise un moyen de constituer des FIAs plus classiques sans pour autant nécessiter l’aval d’une ACN. La loi de 2016, en permettant la constitution de FIAR sous la forme de FCP, SA, Sàrl ou SCA (SICAV ou SICAF) venait combler ce manque et ainsi assurer qu’un FIA peut être constitué sous les principales formes juridiques existantes au Luxembourg, sans devoir pour autant choisir un régime supervisé par une ACN (Partie II, SIF ou SICAR).

La place des FIARs dans l’industrie des fonds au Luxembourg Avec plus de 1550 entités inscrites sur la liste tenue par le registre de commerce et des sociétés depuis l’entrée en vigueur de la loi du 23 juillet 2016 (Loi de 2016), le FIAR est sans conteste un des fleurons de l’industrie luxembourgeoise des fonds d’investissement. Et encore, ce chiffre ne nous informe pas sur le nombre de compartiments existants au sein de ces FIARs. Par comparaison, 1632 fonds d’investissement spécialisés (dont le régime a été introduit en 2007) et 217 sociétés d’investissement en capital à risque (introduite en 2004) sont inscrits sur les listes de la CSSF. Le succès du FIAR donne raison au législateur Luxembourgeois, qui se faisait fort en 2016 de libérer le marché des fonds d’investissement alternatifs (FIA) de la contrainte d’un « double régime d’agrément et de surveillance [qui] n’est pas prévu ou imposé par la Directive GFIA, mais résulte de l’environnement législatif luxembourgeois » , donnant ainsi plein effet au changement de paradigme introduit par la Directive GFIA , selon laquelle « La présente directive ne réglemente pas les FIA. Il devrait donc être possible de continuer à réglementer et surveiller les FIA au niveau national. (…)». Avec la Directive GFIA, et contrairement au principe de la Directive OPCVM , c’est la règlementation du GFIA qui

compte, celle du ‘produit’ (ie le FIA) devenant superfétatoire. En introduisant le FIAR dans la ‘boite à outils’ luxembourgeoise comme un FIA non soumis à l’autorisation préalable d’une autorité de contrôle nationale (ACN), le Luxembourg n’en était pas à son coup d’essai. La faculté de constituer de tels FIAs sans agrément préalable et de les commercialiser dans l’Union européenne à des investisseurs professionnels avec un passeport avait déjà été offerte aux GFIAs depuis l’adoption de la loi du 12 juillet 2013 relative aux gestionnaires de FIAs (« Loi de 2013 »). La Loi de 2013, en modifiant en profondeur le régime de nos sociétés en commandite, avait ouvert la voie à la banalisation de FIAs non soumis à autorisation préalable d’une ACN. L’immense succès des sociétés en commandite, puis du FIAR, et les mutations qui s’en sont suivies pour l’industrie des FIAs ont largement contribué au succès de notre place financière, et indi-

1 Projet de loi N°6929 relative aux fonds d’investissement alternatifs réservés, 17 mars 2016.

2 Directive 2011/61/UE du 8 juin 2011 sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs (« Directive GFIA ») 3 Considérant (10) de la Directive GFIA.

4 Directive 2009/65/CE du 13 juillet 2009 concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM)

Notre place financière peut-elle dès lors se satisfaire de ces succès, et se contenter de ces outils en l’état ? Tout est-t-il pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles ? S’il est indéniable que l’industrie luxembourgeoise des FIAs connait depuis 10 ans une dynamique sans précédent, il ne faudrait pas pour autant se reposer sur nos lauriers et considérer notre position comme définitivement acquise. Autour du Luxembourg la concurrence s’organise. L’Irlande a finalement adopté son ‘investment limited partnership (ILP)’ qui peut être approuvé par la Banque Centrale d’Irlande en 24 heures et il est désormais possible en France de constituer une ‘société de libre partenariat’ sans devoir obtenir un agrément préalable de l’Autorité des Marchés Financiers. Ces initiatives sont délibérément conçues pour concurrencer notre industrie en reprenant certaines des recettes de son succès : offrir aux gestionnaires un outil similaire aux partnerships anglo-saxons commercialisable en Europe, tout en les affranchissant d’un contrôle prudentiel préalable. De plus, la Directive GFIA est en cours de modification et les équilibres construits depuis l’entrée en vigueur de sa première mouture pourraient s’en trouver affectés à des degrés variés sous l’influence de la présidence française du Conseil de l’Union européenne. Face à cette concurrence et à l’évolution normative européenne, notre boite à outils (y compris notre FIAR) doit évoluer. Plusieurs pistes ont été identifiées par l’industrie, et d’autres suivront. Mais la finance n’a pas toujours bonne presse et une certaine atonie semble s’être installée depuis les campagnes médiatiques récentes dirigées contre les centres financiers internationaux. La tentation serait grande de limiter les initiatives visibles. Mais il n’y a pas d’alternative à l’innovation, et les mutations à venir au niveau européen et le poids de notre industrie dans l’économie nationale commandent au contraire de poursuivre une gouvernance audacieuse, engagée et entrepreneuriale de notre place financière.


Dossier Durabilité

sur des critères communs de durabilité. » Pour chaque activité, dans chaque secteur, la taxo­ nomie va établir des critères et des seuils déterminant ce qui relève ou non du déve­ loppement durable. L’établissement de cette classification est toutefois titanesque et prête à de nombreux débats. L’enjeu n’est pas des moindres puisque ce cadre devrait avoir pour conséquence de for­ tement limiter l’accès à des possibilités de financement pour des activités catégorisées comme « non durables ». L’un des débats les plus médiatisés, ces dernières semaines, avait trait à l’inclusion du nucléaire et du gaz au sein de cette taxonomie verte en vertu du rôle que ces énergies ont à jouer « pour faciliter le passage aux énergies renouvelables » et à la neutralité climatique. «La taxonomie se place au service de la transition et va apporter une même grille de lecture sur toutes les activités économiques. Elle va permettre un même niveau d’interprétation, explique Marie Niemczyk. Jusqu’à présent, l’application de la taxonomie ne concerne que les aspects environnementaux, sur un nombre limité de secteurs et sur deux critères uniquement. Elle est appelée à s’enrichir progressivement, en couvrant toutes les activités économiques, au départ de critères plus nombreux. À plus long terme, elle est aussi appelée à considérer, au-delà des enjeux environnementaux, des aspects sociétaux. » Le défi, pour les acteurs de l’industrie des fonds, est dès à présent de s’approprier ce

nouveau langage et d’envisager leurs politiques d’investissement à l’aune des seuils définis.

Allemagne 36

Regarder vers l’avenir « Avec la SFDR et la taxonomie, on devrait progressivement voir les données s’enrichir. Des standards vont émerger. L’industrie va aussi gagner en maturité. C’est une bonne chose pour la transition à mener comme pour l’industrie financière européenne qui est à la pointe sur ces sujets. Luxembourg, premier domicile de fonds en Europe, n’est pas en reste, commente Mario Mantrisi. La Place est très active sur ces sujets. L’enjeu, dès lors, est de permettre à de nouveaux acteurs d’émerger localement, de soutenir le développement de technologies qui faciliteront l’intégration de ces aspects au service d’une société plus durable. » Ces nouveaux outils sont les leviers d’une transition nécessaire et voulue par les diri­ geants. L’industrie des fonds, dans ce contexte, est appelée à se placer au service de cette transition, en soutenant son financement. « C’est une période très intense, exaltante pour la finance de marché, commente Marie Niemczyk. Elle est riche en opportunités pour les acteurs qui se posent les bonnes questions sur les produits qu’ils souhaitent proposer, sur les politiques d’investissement qu’ils veulent mener. Au cœur de cette transition, de nouvelles entreprises, de nouvelles activités, de nouvelles technologies vont se développer et se placer au service d’une économie et d’une société plus durables. L’enjeu, aujourd’hui, est d’investir dans l’avenir, en proposant des approches rendement-risque intéressantes, qui tiennent compte surtout du monde de demain. » Pour Georg Joucken, on est au début d’une transition majeure. «L’investissement durable, ce n’est pas un phénomène de mode, mais un réel choix de conviction. Aujourd’hui, un nombre croissant d’investisseurs souhaitent agir pour changer le monde, explique-t-il. Je m’attends à voir se développer une offre avec beaucoup de sous-catégories et de fonds thématiques, s’inscrivant tous dans une approche durable. On peut imaginer des véhicules dédiés à la mobilité douce, à la gestion de l’eau ou à la lutte contre la pauvreté. On le voit déjà aujourd’hui, l’investisseur est de mieux en mieux informé sur les possibilités qui s’offrent à lui. La transparence qui découle des nouvelles réglementations est aussi un vecteur de confiance pour l’investisseur, qui peut dès lors opérer des choix plus éclairés. » L’industrie des fonds, à n’en pas douter, va être profondément transformée par cette vague réglementaire durable. Toutefois, en saisissant les opportunités liées aux change­ ments qui s’opèrent, elle peut jouer un rôle de catalyseur essentiel de la transition envi­ ronnementale et sociale.

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Auteur S. L.

LE LUXEMBOURG, LE PLUS IMPORTANT DOMICILE EUROPÉEN POUR LES FONDS DURABLES Actifs nets des fonds durables. Fin d’année 2020, en milliards d’euros. Total Europe : 1.155 milliards d’euros (UE27 et Liechtenstein, Norvège, Suisse, Royaume-Uni) Source

Morningstar Direct

Luxembourg 371 France 136 Suède 136 Irlande 135 Royaume-Uni 87 Suisse 67 Pays-Bas 49 Belgique 42

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FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

STRATÉGIE ESG : LES PIÈGES À ÉVITER Tous les acteurs de la finance sont appelés à prendre position à l’égard de l’investissement ESG et à se doter d’une stratégie adaptée. Elle implique une réflexion approfondie pour éviter les pièges. 1 Sous-estimer la réglementation La réglementation, à commencer par la SFDR, s’applique à l’ensemble des acteurs, que leur offre s’inscrive dans une dynamique ESG ou non. Les acteurs financiers doivent désormais intégrer des risques de durabilité et la prise en compte des impacts négatifs sur la durabilité dans leurs processus d’investissement et de conseil. Personne ne peut dire « je ne suis pas concerné ». 2 Gare au greenwashing Commercialement, on constate un attrait croissant pour les produits d’investissement con­tri­buant à un impact positif au niveau environ­nemental ou social. Beaucoup d’acteurs, dès lors, sont tentés de s’afficher « plus verts que verts ». En la matière, il est essentiel de construire une stratégie solide, garantissant que les investissements contribuent effectivement à un monde plus durable. Une réputation peut rapidement être mise à mal pour suspicion de greenwashing. 3 Attention à la qualité de la donnée L’un des plus grands enjeux, avec l’émergence de la finance durable, est de parvenir à évaluer la contribution des investis­ sements à une dynamique environnementale ou sociétale. Les acteurs doivent parvenir à rendre compte de la perfor­ mance des investissements, non seulement sur le plan financier, mais aussi sur les critères ESG. C’est un tout autre univers de données qu’il faut parvenir à collecter, analyser et exploiter.


PUBLIREPORTAGE

Taxonomie verte, un challenge par-delà du règlement La Taxonomie verte est devenue un sujet clé pour l’ensemble du secteur financier. Les acteurs doivent s’approprier le sujet car de celui-ci, découle de nombreuses obligations réglementaires. La Taxonomie verte est devenue depuis ce début d’année 2022 le sujet phare chez les acteurs financiers. La réglementation leur impose de nombreuses obligations en termes d’informations à collecter, à traiter et à rapporter. D’autant plus que cette dernière évoluera potentiellement dans les prochains mois avec : (i) les discussions en cours au niveau de la Commission Européenne au sujet de l’intégration ou non d’autres activités, (ii) mais également la définition d’une taxonomie dite brune où la Commission indiquerait les secteurs accélérant le réchauffement climatique. Néanmoins, il est dans l’intérêt des acteurs financiers de prendre la réglementation à bras le corps et à mener des chantiers en vue d’être capable de s’y conformer dès à présent. Aujourd’hui ce texte réglementaire sert à visualiser si les investissements réalisés sont en ligne avec les objectifs définis au niveau européen. Pour cela, les acteurs doivent collecter, intégrer et traiter la donnée liée au climat et à l’environnement tout en s’assurant que celle-ci soit qualitative, actuelle et disponible. Mais également réaliser une cartographie entre les éléments collectés et la classification donnée par la Taxonomie Verte.

Au-delà d’une conformité avec la réglementation Taxonomie, de nombreuses autres attentes réglementaires découlent de celle-ci. En effet, les rapports attendus par les RTS SFDR exigent des indicateurs tirés de la cartographie avec la classification Taxonomie. Également, les actes délégués MiFID et IDD demandent de prendre en considération les préférences de durabilité des clients ainsi que leurs appétences à investir dans de l’ESG en fonction de la Taxonomie. L’ensemble de ces attentes obligent les acteurs financiers à visualiser la réglementation ESG dans son ensemble. Afin de palier à ces obligations, nous recommandons à nos clients de refondre et remettre à plat leur stratégie ESG pour : (i) mettre en place l’ensemble de ces réglementations, (ii) se bâtir une image de marque reconnue sur le marché, (iii) attirer de nouveaux talents et clients.

EN SAVOIR PLUS AXEL BARREAU - Assistant Manager t. +33 6 80 23 41 54 axel.barreau@99-advisory.com MELVIN HENRION - Consultant t. +33 6 82 35 59 32 melvin.henrion@99-advisory.com


Interview

«Sans la réglementation, nous n’en serions pas là»

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FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

Photo

Créé en 2016, le Luxembourg Green Exchange (LGX) s’est considérablement développé en quelques années, faisant du Grand-Duché une référence mondiale en matière de finance verte. Laetitia Hamon, head of sustainable finance du LGX, nous dévoile ses priorités pour les années à venir.

Romain Gamba

Le Luxembourg a plus qu’une longueur d’avance en matière de finance verte.


Laetitia Hamon

BIO EXPRESS Une formation axée sur la finance durable Laetitia Hamon a été formée à l’économie en France, notamment à l’Institut supérieur européen de gestion. Elle se spécialise ensuite dans la corporate social responsibility (CSR) à l’Université Paris-Est Créteil. Elle a également obtenu un diplôme de sustainable finance expert à la Frankfurt School of Finance & Management. Une expérience internationale La carrière de Laetitia Hamon débute en 2007 à Londres, chez Thomson Reuters, où elle occupe la fonction de funds research analyst. De 2008 à 2011, elle est ESG / responsible investing advisor au sein de l’Alfi. Après une année sabbatique durant laquelle elle parcourt le monde, la jeune femme est embauchée chez KPMG. Elle y restera huit ans, s’occupant des questions de finance durable, avant de rejoindre le LGX en 2020.

Pouvez-vous nous rappeler dans quel contexte et sous l’impulsion de quels acteurs est né le Luxembourg Green Exchange (LGX), en 2016 ? Le Luxembourg Green Exchange est né à un moment où les discussions sur la finance durable étaient nombreuses. Les Objectifs de développement durable des Nations unies venaient d’être adoptés, en 2015. La COP21 venait par ailleurs d’aboutir sur les accords de Paris. Il y avait donc une réelle émulation autour de ces questions, et un grand nombre d’initiatives ont été lancées par plusieurs institutions d’envergure. Je n’y étais pas encore active, mais c’est à ce moment-là que les équipes de la Bourse de Luxembourg ont commencé à se demander comment elles pourraient appliquer ces différents principes à leur activité, apporter leur pierre à l’édifice de la durabilité. C’est ainsi qu’a été mis sur pied le Luxembourg Green Exchange, en l’espace de seulement neuf mois. Cette création en un temps record est une belle démonstration de la capacité non seulement de la Bourse, mais aussi du Luxembourg dans sa totalité, à faire preuve d’agilité.

diligence par rapport à chaque fonds. Nous ne pouvons pas, pour le moment, offrir de garantie particulière quant au caractère intrinsèquement durable du fonds. Cette réglementation s’attache en effet au reporting, à la trans­ parence des informations fournies par rapport au fonds, mais elle n’assure pas, en soi, la durabilité des investis­ sements. Il faudra encore faire un peu évoluer le cadre légal, au niveau européen, pour que des assurances réelles puissent être fournies aux investisseurs en ce qui concerne les fonds d’investissement durables. Puisque vous évoquez la réglementation, pensez-vous qu’elle ait eu un rôle déterminant dans l’évolution de la finance verte au cours des dernières années ? Pour moi, le développement considérable de la réglemen­ tation au cours des dernières années est en effet très posi­ tif pour l’industrie financière, notamment au Luxembourg. Sans cela, nous n’en serions pas où nous en sommes aujourd’hui, et ce pour une raison très simple : la régle­ mentation impose à l’ensemble des acteurs du secteur financier, mais aussi aux sociétés qui composent le tissu économique global, d’aller dans le même sens, c’est-à-dire vers une plus grande durabilité des investissements.

Après cinq années de fonctionnement, quel bilan peut-on tirer de cette initiative ? Le bilan est largement positif. Les obligations vertes, sur lesquelles nous nous sommes concentrés dès le départ, Diriez-vous que le Luxembourg Green Exchange a joué ont connu un réel succès. 1.300 obligations lancées par un rôle moteur dans la croissance de la place financière 230 émetteurs sont désormais enregistrées sur la plate­ luxembourgeoise au cours des dernières années ? forme, pour un montant total de 678 milliards d’euros. Je vais paraître très humble en disant cela, mais oui ! Le LGX a désormais acquis un rayonnement ­international À travers notre activité, nous avons démontré que même pour cette activité obligataire, même si nous avons, depuis, de petites sociétés privées, au Luxembourg comme ­ailleurs lancé également d’autres produits et initiatives. Nous dans le monde, peuvent faire bouger les lignes. Nous avons aussi reçu de nombreux prix qui attestent de la avons insufflé cet état d’esprit au Luxembourg, et c’est valeur de notre travail en matière de finance durable, et un point très positif. qui contribuent également à ce que notre expertise soit reconnue à l’étranger. Avec le Luxembourg Green Exchange, le Grand-Duché a pris une longueur d’avance en matière de finance Vous l’avez dit, les obligations vertes sont votre verte. L’objectif, aujourd’hui, est de la conserver. cœur de métier. Quels sont les critères à respecter Comment procédez-vous pour y parvenir ? pour qu’une obligation soit répertoriée sur Nous avons commencé avec notre plateforme d’affichage la plateforme LGX ? des obligations vertes et durables. Mais depuis notre lance­ Les exigences sont différentes en fonction du type d’obli­ ment, nous avons créé beaucoup d’autres produits et ini­ gation dont on parle. En ce qui concerne les obligations tiatives. Tout d’abord, en 2020, notre LGX Academy a été GSS (green, social & sustainable), nous veillons tout d’abord mise sur pied. Elle doit servir à améliorer l’éducation, la à nous assurer que l’argent qui est levé est destiné à être formation par rapport à la finance verte, car il reste énor­ consacré à des projets verts ou sociaux. Nous vérifions mément de travail à faire en la matière. Ce travail doit aussi que les projets choisis sont alignés avec un standard notamment être mené par rapport aux jeunes qui sont international reconnu, en faisant appel à un avis exté­ aujourd’hui en formation. Par ailleurs, nous avons égale­ rieur. Enfin, la façon dont sont alloués les fonds doit nous ment créé notre LGX DataHub. Il s’agit d’un outil crucial, être précisément décrite à travers le reporting, afin d’éva­ car il nous permet de récupérer toutes les informations luer l’impact réel qu’ont les moyens financiers qui ont nécessaires, non seulement sur les obligations affichées été investis. En ce qui concerne les SLB (sustainability-­ au LGX, mais aussi sur celles qui sont cotées ailleurs. Des linked bonds), les documents demandés diffèrent quelque informations sur plus de 5.800 obligations vertes, sociales peu. Mais la volonté reste la même : il s’agit de fixer des et durables à travers le monde sont ainsi centralisées dans objectifs et de vérifier si ceux-ci sont atteints grâce aux cette base de données. Les données que nous y retrouvons fonds qui ont été levés. sont très précises et nous donnent notamment la possi­ bilité de savoir si les objectifs fixés par les obligations ont Qu’en est-il des fonds d’investissement ? Comment été atteints. Enfin, l’an dernier, nous avons également s’est développée l’activité en la matière, et comment déployé les LGX Assistance Services, qui visent à accom­ vérifier que l’argent investi a bien l’impact voulu ? pagner les émetteurs, notamment dans les pays émergents Des fonds d’investissement durables sont également cotés qui souhaitent se lancer dans ce secteur de la finance à la Bourse de Luxembourg. Ceux qui correspondent aux durable. Au final, notre volonté est de répondre le mieux articles 8 et 9 de la SFDR (Sustainable Finance Disclosure possible aux défis de l’industrie. C’est la raison pour Regulation) sont affichés sur la plateforme du LGX. laquelle nous restons en contact permanent non seule­ Après, c’est le rôle de chaque investisseur de faire sa due ment avec les acteurs du marché local, mais aussi avec MAI 2022 FONDS D′INVESTISSEMENT

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Interview Laetitia Hamon

ceux qui évoluent à l’international. Avec ces atouts, mais aussi avec l’aide de notre équipe dédiée à ce sujet, nous pensons avoir toutes les armes pour maintenir notre ­leadership en matière de finance durable.

«Nous souhaitons abolir la différence entre la finance durable et la finance classique, car elle n’a désormais plus de raison d’être.»

Quels sont les nouveaux projets sur lesquels vous travaillez en ce moment ? Dans quel sens va se développer le Luxembourg Green Exchange au cours des prochaines années ? Nous avons plusieurs projets en cours. Tout d’abord, nous sommes très actifs sur le développement des marchés émergents. C’était l’une des recommandations de la COP26, et c’est un sujet qui nous tient particulièrement à cœur, car les pays émergents sont les plus impactés par le changement climatique, et ils devraient l’être plus encore à l’avenir. En début d’année, nous avons par exemple signé un MoU avec la Bourse du Cap-Vert concernant le développement de BluX, une plateforme financière qui La réglementation, justement, sera-t-elle encore se concentre sur les obligations « bleues », par exemple amenée à évoluer dans les quelques années à venir ? pour financer la protection des ressources marines. Nous Je pense qu’il faudra d’abord digérer les différentes avons également signé un accord avec la Bourse du Nigéria, ­nouveautés réglementaires qui sont en cours d’implé­ et, tout dernièrement, avec celle du Rwanda. Le but est mentation. Avec la SFDR et la taxonomie verte, nous notamment de mettre à leur disposition les services de sommes déjà partis jusqu’en 2024, au moins. Il faut donc notre académie pour développer ces places financières laisser un peu de temps aux acteurs pour que tout cela se et leur faire prendre le virage de la durabilité. Au-delà de mette en place. En outre, il ne faut pas oublier qu’en l’activité du LGX, nous cherchons aussi à pousser la Bourse dehors de ces réglementations, la plupart des textes légaux de Luxembourg dans une direction plus verte. Nous le encadrant les instruments financiers traditionnels – Ucits, faisons en nous interrogeant de manière plus systéma­ etc. – ont également été revus au cours des derniers mois, tique sur l’identité de leurs émetteurs, leur alignement ou vont bientôt l’être, pour intégrer des critères durables. par rapport à certains scénarios climatiques, ainsi que Il s’agit donc d’une évolution énorme, qui a de nombreuses sur leur contribution positive ou négative aux Objectifs implications et ne peut pas être effective en quelques de développement durable. Aujourd’hui, nous cherchons mois à peine. à mettre en place un système permettant d’analyser de façon structurelle notre exposition aux risques ESG, au En dehors des aspects légaux, pensez-vous risque qu’ils présentent par rapport à la réputation des que les mentalités aient, elles aussi, bien évolué sociétés, etc. En définitive, nous souhaitons abolir la sur le sujet de la finance durable au cours ­différence entre la finance durable et la finance classique, des dernières années ? Tout à fait. Il y a 15 ans, quand j’ai commencé à travailler car elle n’a désormais plus de raison d’être. dans ce secteur, nombreux étaient les experts du monde Certains nourrissent toujours une méfiance financier à regarder de haut la finance durable, à la consi­ importante par rapport aux investissements verts. dérer comme un phénomène marginal. Aujourd’hui, les Comment les rassurer ? Comment se prémunir mentalités ont clairement changé, même au Luxembourg, durablement contre le risque de greenwashing ? et plus personne ne met ce sujet de côté. Le changement La chance que nous avons, c’est que les obligations sont de génération a certainement eu un effet positif à cet des instruments financiers relativement simples : on lève égard. Je pense que, désormais, tout le monde veut rendre de l’argent, avec lequel on finance des projets. C’est très son activité plus durable. Par contre, il est clair que de différent de l’univers des fonds ou des dérivatifs, qui sont nombreux acteurs ne savent pas encore très bien com­ tout de suite plus complexes. On est dans un monde très ment s’y prendre et peuvent donc encore commettre des clair, avec peu d’intermédiaires. Grâce à notre DataHub, erreurs, sans qu’elles soient forcément volontaires. C’est nous pouvons donc savoir très facilement si une obliga­ aussi notre rôle de les guider… tion censée investir dans les panneaux solaires, par exemple, l’a réellement fait. En fixant des objectifs et en vérifiant systématiquement s’ils ont été atteints, nous pouvons donc offrir de solides garanties aux investisseurs. Pour nous, c’est extrêmement important. Malheureusement, c’est par contre plus difficile à mettre en place en ce qui concerne les fonds. La SFDR constitue un premier pas pour nous permettre d’avoir plus de visibilité sur les inves­ tissements réalisés à travers des fonds, mais la vérifica­ tion est encore délicate à mettre en œuvre pour l’instant. Je ne doute toutefois pas que la Commission européenne, dans un second temps, mettra en œuvre les outils légaux nécessaires pour pouvoir contrôler plus efficacement le Interview Q. D. caractère durable des fonds d’investissement. 32

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022


PUBLIREPORTAGE

Astrid der Weduwe, Sales Manager, Luxembourg at Nordea Asset Management

The Power of Engagement

Crédits

Iberico Carmo, Nordea Asset Management

At Nordea Asset Management, we favour engagement over exclusion as the most effective way to bring about change because we’re looking for solutions, not just avoidance. At Nordea, we have focused on climate solutions for many years. Our Global Climate and Environment Strategy, launched in 2008, was one of the first in the market to address this theme, and is now one of the largest climate funds in Europe. However, many companies continue to pollute. These companies need not only solutions, but a change in approach. This is the next area we are trying to tackle. Our new Global Climate Engagement Strategy focuses on weaker climate performers that are open to change but need some help. We do this through engagement – discus-

sions and dialogue with the companies we invest in. For example, wind turbines are made of steel, so a green transition needs the steel industry, but not the steel manufacturers’ high carbon emissions. Working together, we can help them to reduce their carbon emissions and bring about real world change. Companies with high emissions are shunned by investors at the moment. Engaging with them, we can unlock their hidden value as they move towards high sustainability standards investors want. We are ready to get our hands dirty to reduce emissions, unlock value, and make the world a cleaner place. MORE INFORMATION NORDEA ASSET MANAGEMENT t. +352 27 865 221 clientservice.benelux@nordea.com

Nordea Asset Management is the functional name of the asset management business conducted by the legal entities Nordea Investment Funds S.A. and Nordea Investment Management AB (“the Legal Entities”) and their branches and subsidiaries. This document is advertising material and is intended to provide the reader with information on Nordea’s specific capabilities. This document (or any views or opinions expressed in this document) does not amount to an investment advice nor does it constitute a recommendation to invest in any financial product, investment structure or instrument, to enter into or unwind any transaction or to participate in any particular trading strategy. This document is not an offer to buy or sell, or a solicitation of an offer to buy or sell any security or instruments or to participate to any such trading strategy. Any such offering may be made only by an Offering Memorandum, or any similar contractual arrangement. This document may not be reproduced or circulated without prior permission. © The Legal Entities adherent to Nordea Asset Management and any of the Legal Entities’ branches and/or subsidiaries.


BRAND VOICE

Advice and strategy

A fine balance: operating models in alternatives Content sponsored by PWC LUXEMBOURG

The alternative investments sector is booming, and in it we find a variety of operating models. Choosing the right one is key, says Alexandre Igel, Accounting and Tax Partner at PwC Luxembourg. Factors to consider include flexibility, cost optimisation, technology, and digitalisation.

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same way, nor should they. It is critical for each player to con­ sider the budget, resources and time required as well as if the organisation has enough tech­ nical skills and human resources. One must seek the right balance, and quite often the answer comes from outside the organisation. This is where the role of an external service provider brings value. Finding the value in the mix While there is no clear indica­ tion of an overall inclination toward one or the other, Mr Igel says there is certainly a desire for increased flexibility. “Do what you do best and outsource the rest,” goes the expression. In the industry, this is known as the blended formula. Mr Igel suggests looking at the pros and cons of the two most common operating models. With insourcing, functions are performed in-house, result­ ing in a dependency on dedi­ cated internal resources and experts. This limits the possi­ bility to take advantage of external tech applications, but on the other hand, it means improved quality control and

“Rather than asking our clients to adapt to us, we should serve them in a unique and tailored way.” Alexandre Igel Accounting and Tax Partner PwC Luxembourg

Eva Krins (Maison Moderne)

Remain relevant: from compliant to data-centric Mr Igel explains that players from the world of alternative investments often pass through four stages of internal organi­ sation evolution. The first stage is usually the same for everyone. The focus is on being compliant, which can mean getting the relevant licence to operate or meeting the reporting deadlines. In the second stage, building efficient processes and growing the team becomes not only key but nearly unavoidable. During the third stage, technology helps to implement end-to-end solu­ tions, the objective being to operate within an IT landscape that is fit for purpose. During the data-centric fourth stage, data becomes the main asset and enables the organisation to go one step further to support the overall reporting and busi­ ness strategy. The more data-centric the business is, the better. One can no longer only remain a fully compliance-oriented organisa­ tion and continue to be rele­ vant. However, not every organisation evolves in the

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The alternative investments industry is in constant evolu­ tion. Regulators increase their scrutiny while new and com­ plex regulations require ever more reporting and compli­ ance. To that, one can add the need for upgrading risk man­ agement, reducing costs, catch­ ing up with the digital wave, upskilling professionals, and retaining talent. “That is why it is important to understand the different types of operating models that fund managers, management companies, and service providers can adopt. Considera­tions include transforming internal organisation and relying, to various degrees, on service providers,” Mr Igel says. “Additionally, it is important to grasp how the industry continues to be impacted by external factors such as the changing regulatory landscape in regard to ESG or ATAD3 (the Third AntiTax Avoidance Directive), for example. Other factors such as Covid-19 affect the operating models and also increase the drive to evolve. But remember, change is not always a bad thing,” says Mr Igel.


“Some alterna­ tive players will have to adapt their structures to cope with the new regulatory changes.” Vincent Lebrun Alternatives Leader and Tax Partner PwC Luxembourg

Alexandre Igel, Accounting and Tax Partner, and Vincent Lebrun, Alternatives Leader and Tax Partner at PwC Luxembourg

logistics, and you also have intellectual property controls. Co-sourcing is more effective when looking for gains on time-consuming activities or for specific technical expertise. “It fills gaps in internal capacity and experience and allows internal departments to focus on highly sensitive or acutely critical tasks.” By using external tech­ nology platforms and experts, the business reduces internal expenditures. A clear govern­ ance, clear task allocation, strong communication and monitoring are usually key suc­ cess factors. Mr Igel explains, “PwC has strong experience in assisting clients regardless of the operating model they have or target to implement. We are there to help in defining the fit-for-purpose framework, advising on a wide variety of topics which includes setting up processes and assisting in systems implementation

with our clients, for instance. PwC can also bring a wide team of experts to support clients on any type of outsourced activities within our managed services offering. We work as an extension of our client’s team with the aim of bringing greater peace of mind.” How regulations and Covid-19 impact operating models External factors have a big impact on operating models, Mr Igel says. Every change in the regulatory landscape impacts the model. In the past months, the Sustainable Finance and Sustainability Framework of the EU has grown in content and sophistication. The early adoption standards such as the Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFRD) will trigger change in the investor disclo­ sures and therefore impact reporting needs and processes,

for instance. “This will surely impact the operating models in place,” Mr Igel says. Another example is the so-called ATAD3 addressing the abusive use of shell companies. One of the objectives is to define common tax-related sub­ stance requirements to be met for entities operating within the European Union. Companies may therefore be required to provide the tax administration with the necessary information to determine whether they have a substantial presence and a real economic activity. Vincent Lebrun, Alternatives Leader and Tax Partner at PwC Luxembourg, says, ‘Looking at the current draft, it becomes clear that the directive doesn’t fully take into account how alternative players are structured nor the regulatory requirements imposed by the AIFM directive. There is indeed an obvious contradiction

between this latter directive and the current draft ATAD3 directive. And on the other side, some alternative players will also have to adapt their structures to cope with the new changes.” Mr Igel finishes by saying, “Finding the fit-for-purpose operating model is a long and changing journey. At PwC, we believe that there is no onesize-fits-all solution, so a tailored and customised approach is key.”

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Dossier

Au service des Objectifs de développement durable

L’industrie des fonds se transforme et entend davantage peser dans la transition vers un monde plus durable. Comment ? En allouant ses ressources financières aux projets qui soutiennent les Objectifs de développement durable des Nations unies, ou encore en demandant aux sociétés investies de s’engager autour de thématiques bien définies. Agissant de la sorte, la gestion collective se positionne comme un rouage-clé du changement. Auteur S. L. 36

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Fonds durables

#Mobiliser

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Société Générale

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Marielle Voisin

Au sein de l’Union européenne, la finance est envisagée comme un élément-clé de la transition environnementale et sociale souhaitée par les dirigeants. « En la matière, l’Union européenne fait preuve d’une très forte ambition, commente Nathaële Rebondy, head of sustainability Europe au sein de Schroders. À ce titre, elle a mobilisé les acteurs de l’industrie des fonds, dont nous faisons partie, afin de mobiliser l’épargne disponible et d’orienter les flux financiers vers les activités durables, les acteurs qui contribuent à cette transition. » Relever les défis climatiques, et plus largement répondre aux 17 Objectifs de développe­ ment durable définis au niveau des Nations Unies (voir encadré), implique de mobiliser des moyens conséquents pour permettre à de nouvelles activités vertueuses d’émerger et de se développer. La transition, en effet, ne pourra pas s’appuyer sur les seuls pou­ voirs publics. « Ces derniers mois, et notamment durant la période de crise, on a assisté à une croissance très soutenue des capitaux épargnés. L’épargne mondiale en actifs financiers des particuliers a en effet dépassé la barre symbolique des 200.000 milliards d’euros, explique Mathieu Maurier, membre de la direction et responsable pays pour Société Générale Securities Services. Un des enjeux, pour l’industrie des fonds, est d’aider à capter ces actifs, en répondant à une clientèle qui a à cœur de donner du sens à son épargne à travers ses investis­ sements, et de les mettre au service d’objectifs vertueux. »

« À nous de répondre à une clientèle qui souhaite donner du sens à son épargne en la mettant au service d’objectifs vertueux.» MATHIEU MAURIER Membre de la direction et responsable pays, Société Générale Securities Services

11 % Les fonds durables ont capté 52 % des souscriptions nettes en 2020 et ont représenté 11 % du total de l’encours des fonds domiciliés en Europe à la fin de l’année 2020.

#Allouer C’est la réglementation européenne, au premier chef, qui invite les acteurs de l’industrie des fonds à jouer ce rôle de catalyseur. Ces acteurs, pour beaucoup, appréhendent ces nouveaux défis avec enthousiasme, voyant des opportunités importantes liées à ces changements. « Dans ce contexte, c’est la recherche de progrès et de performance en matière sociale ou environnementale que nous devons aller chercher aux côtés des performances financières, poursuit Nathaële Rebondy. À ce titre, nous devons nous assurer que les investissements durables auxquels nous procédons répondent à la promesse faite aux investisseurs, tout en accompagnant la juste transition nécessaire de nombreuses entreprises. Nous devons donc pouvoir suivre les performances des sociétés investies en la matière. » Dans un monde où la gestion et l’allo­ cation d’actifs tiennent compte des perfor­ mances sociales et environnementales, il deviendra plus difficile pour des sociétés n’intégrant pas ces enjeux de se financer sur les marchés. Des sociétés polluantes ou peu regardantes en matière de respect des droits humains auront beaucoup de difficultés à accéder à de nouveaux moyens. « Toutefois, lorsque l’on parle de transition, tout n’est pas blanc ou noir. Notre rôle, dans ce contexte, sera d’accompagner la transition, en nous dotant des outils adaptés pour s’assurer d’une bonne allocation, vers des projets qui servent des objectifs définis clairement, commente Mathieu Maurier. Cela implique de développer une autre approche du métier et de repenser les portefeuilles, comme les processus d’investissement. Dans ce contexte, certains financements sont appelés à être stoppés, au profit, notamment, d’autres activités vertueuses et porteuses d’avenir. »

#Contrôler Au-delà de l’allocation des moyens disponibles, l’industrie des fonds sera aussi appelée à rendre compte de la contribution des investissements à la transition environ­ nementale et sociale. Pour cela, les acteurs de l’industrie des fonds vont devoir récupé­ rer de nouvelles données, leur permettant d’évaluer les impacts sociaux et environ­ nementaux des activités financées, ainsi que les progrès réalisés en la matière. « C’est un tout nouvel écosystème qui doit se mettre en place, avec de nouvelles expertises, de nouveaux processus, en phase avec les attentes des réglementations qui sont définies en la matière, explique Mathieu Maurier. Nous sommes au début d’un processus qui va redéfinir l’industrie des fonds en profondeur. Le chemin à parcourir est encore long. Actuellement, les textes se précisent, et les critères permettant d’évaluer la performance environnementale, dans un premier temps, puis sociale et de bonne gouvernance par la suite, sont progressivement définis. Petit à petit, les acteurs gagnent en maturité, apprennent à gérer ces nouvelles variables, à se repositionner par rapport aux objectifs poursuivis. Des normes émergent, soutenues aussi par des labels. En tant qu’acteurs au service des gestionnaires, nous devons appréhender tous ces enjeux pour faciliter cette transition. » L’enjeu, à travers la mise en place de nouveaux processus opérationnels, est de garantir une transparence optimale, tant vis-à-vis des régulateurs que des investis­ seurs. Les gestionnaires, en s’appuyant sur des prestataires de services, doivent s’assu­ rer de la véracité des données, contrôler leur qualité, se doter des moyens de les ana­ lyser. Des reportings réguliers autour des enjeux de durabilité devront être établis. Les acteurs de la finance, brassant toutes ces données, occuperont une position privilégiée permettant de rendre compte des efforts entrepris par les acteurs économiques au service de la transition. « Un des enjeux, pour nous, est de nous positionner en tiers de confiance, à même de garantir que les financements opérés sont bien mis au service des Objectifs de développement durable poursuivis », précise Mathieu Maurier.

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Dossier Fonds durables

#S’engager Plus que de se contenter d’allouer des moyens en faveur des Objectifs de dévelop­ pement durable, les gestionnaires de fonds entendent jouer un rôle actif aux côtés des acteurs économiques. «La prise de participation au niveau des entités investies nous offre la possibilité de nous engager concrètement, d’influer sur la politique de l’entreprise en matière de développement durable», explique Nathaële Rebondy. À ce niveau, le gestion­ naire d’actifs peut agir de différentes manières, à l’occasion du vote lors de l’as­ semblée des actionnaires, ou encore à travers l’établissement d’un plan d’engagement. «Cela commence par un dialogue avec les dirigeants de l’entreprise, visant à comprendre comment elle agit et à préciser ce que l’on at­tend d’elle sur des sujets bien précis, comme le climat, la préservation de la biodiversité, la gouvernance, la diversité et l’inclusion, les droits humains, pour ne citer que quelques exemples, poursuit la représentante de Schroders. La démarche, sur des aspects définis comme prioritaires, vise à produire des effets tangibles dans une période déterminée, au-delà de la prise de participation. Si, malgré nos démarches, l’entreprise ne répond pas à nos attentes, une procédure d’escalade peut être enclenchée, avec, par exemple, la possibilité de s’exprimer publiquement.» De plus en plus, des groupements d’actionnaires se mobi­ lisent de manière coordonnée, pour augmen­ ter leur influence auprès des dirigeants et influer sur la politique durable de l’activité.

FLUX NETS DE FONDS DANS LES FONDS DURABLES, RÉPARTIS PAR DOMICILE En fin d’année, en milliards d’euros Luxembourg Irlande France Suède Pays-Bas Allemagne Royaume-Uni Suisse Autres Source

Morningstar Direct

2020 216 milliards d’euros 13 %

2019 111 milliards d’euros 14 % 5%

7%

2%

4% 2%

5% 6% 4% 24 %

20 %

47 %

38

44 %

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17 OBJECTIFS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE Les Objectifs de développement durable (ODD) ont été adoptés par les Nations unies en 2015. Ils sont un appel mondial à agir pour éradiquer la pauvreté, protéger la planète et faire en sorte que tous les êtres humains vivent dans la paix et la prospérité d’ici à 2030. Les 17 ODD sont intégrés, reconnaissant que les interventions dans un domaine affecteront les résultats dans d’autres, et que le développement doit équilibrer les aspects sociaux, économiques et environnementaux. De quels objectifs parle-t-on ? La lutte contre la pauvreté et la faim ; la bonne santé et le bien-être de chacun ; une éducation de qualité pour tous ; l’égalité entre les sexes ; la préservation de l’eau ; une énergie propre et abordable ; un travail décent ; la préservation de la vie terrestre et aquatique ; la réduction des inégalités, ainsi qu’une consommation et une production responsables.

#Accompagner Les gestionnaires d’actifs savent mieux que quiconque que le changement sera progres­ sif, et qu’il doit s’envisager de manière réa­ liste et pragmatique. Si l’urgence est bien présente, si les ambitions sont exception­ nelles, la transformation ne sera pas pour autant radicale, et c’est sans doute une bonne chose. « Des choix vont certainement être posés dans le temps. Dans certains cas, des gestionnaires arrêteront d’apporter leur soutien à certaines activités, excluront une série d’acteurs de leurs univers d’investissement parce qu’ils ne répondront pas aux critères de durabilité définis. Il y a cependant un réel enjeu, plutôt que de se désengager de certains secteurs, à accompagner leur transformation vers un monde durable, à soutenir leur transition », explique Mathieu Maurier. « On ne peut pas, d’un coup, quitter tout un pan de l’industrie de l’énergie qui est capable de soutenir la transition, pour uniquement investir dans Vestas (fabricant danois d’éo­ liennes, ndlr). Si tout le monde, du jour au lendemain, ne fait plus qu’investir chez les super-leaders en matière de durabilité, on risque de créer des bulles, commente Nathaële Rebondy. Plus que jamais, nous souhaitons accompagner les entreprises dans leur évolution, en considérant les activités qu’elles mènent, leur progression, leur capacité à contribuer aux Objectifs de développement durable. » C’est le propre d’une transition. Il faut donc une approche cohé­ rente, qui intègre les risques en présence, avec la volonté de transformer les modèles actuels, en s’appuyant sur les forces de cha­ cun et en veillant à gommer les faiblesses.

#Élever l’ambition L’industrie des fonds se voit, dès aujour­d’hui, comme un partenaire essentiel de cette transition. « La direction est donnée. Une ambition a été fixée. Il n’y a pas si longtemps, l’investissement durable constituait une classe d’actifs à part entière, un segment dans lequel on choisissait d’investir par conviction. Désormais, on a dépassé ce stade. Ces critères et enjeux s’incorporent au cœur des métiers, intègrent naturellement toutes les politiques d’investissement », commente Mathieu Maurier. L’investissement durable est de cette manière devenu mainstream. Et la tendance devrait se renforcer, faisant converger les investissements vers ces Objectifs de développement durable avec un effet multiplicateur. De plus en plus de gestionnaires d’actifs, dans la conduite de leurs activités propres, intègrent les Objectifs de développement durable, et ce avant d’exiger des entités dans les­ quelles ils investissent qu’elles fassent de même. « Nous avons par exemple défini un plan net zéro émission pour nous-mêmes et pour nos investissements », explique Nathaële Rebondy. Elle évoque aussi, pour Schroders, un plan « inclusion et diversité », ou encore la mise en place d’une équipe RSE très engagée. « Nous avons défini un plan pour décarboner notre entreprise et nos portefeuilles d’investissement. C’est aujourd’hui un engagement ferme, aligné avec le scénario d’une limitation du réchauffement à 1,5 °C en 2040 », poursuit-elle. Mais les ambitions ne doivent pas se limiter à l’enjeu climatique, qui correspond à l’urgence du moment. Les Objectifs de développement durable définis au niveau des Nations unies, au nombre de 17, abordent de nombreuses thématiques. « Les acteurs de l’industrie des fonds doivent se donner les moyens de les appréhender pour mieux y contribuer, explique Nathaële Rebondy. Dans ce domaine, par exemple, nous développons des outils dédiés, permettant de déterminer, pour divers objectifs durables, comment une entreprise dans laquelle nous investissons y contribue à travers les diverses activités menées. » En d’autres termes, il s’agit de parvenir à établir une comptabilité ana­ lytique, par entreprise, des performances durables. Un tel outil, qui permet de regar­ der toute activité sous un autre spectre que celui des résultats financiers, devrait nous inviter aussi à envisager le monde autrement.


PUBLIREPORTAGE

The race is on to Net Zero

Net zero needs decarbonisation solutions

Crédits

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Despite global cooperation on climate change, a chasm remains between government plans to cut emissions and the shared goal of net zero by 2050. Nascent decarbonisation solutions may help bridge the gap. For years, the world has underestimated the scale of the climate emergency facing us. Global warming can only be limited to 1.5 degrees Celsius if we halve greenhouse gas emissions by 2030 and cut them to net zero by 2050. Decarbonisation is no longer an abstract idea that needs transformation into real world solutions. The technologies are widely available today, including renewables, green hydrogen, clean transportation, recycling, buildings efficiency, industrial automation, alternative protein, 5G and cloud computing. A low-carbon or carbon-neutral world requires integrating all aspects of the economy with technologies that generate energy and materials with little to no carbon output. This means minimal emissions across populations, buildings, machines, and consumer products, from production to operation to disposal. There are varying studies of the cost to fully decarbonise the global economy, but one of the best estimates - by Goldman Sachs - has put the current-price cost at $4.8 trillion per

year, with a total spend of $144 trillion by 2050. If we decarbonised by half, the annual cost would be around $1 trillion. To succeed, public and private entities would have to massively ramp up funding for decarbonisation solutions, forcing entire industries to re-think their business models. For companies innovating these solutions or able to efficiently adopt them, there are substantial multi-decade growth opportunities ahead. Key policy areas that can stimulate decarbonisation include establishing a price for carbon - as the current price is too low. Another form of support is subsidising new technology, while policymakers could also restrict the use of high emissions technology. The potential for growth in decarbonisation technologies is huge, with rising demand and widening application across multiple industries. The world desperately needs these technologies and, fortunately, some financial and policy support is beginning to flow through, but much more needs to be done.

EN SAVOIR PLUS SOLENE GARNAVAULT Senior Manager Client Support - Fidelity International www.fidelity.lu solene.garnavault@fil.com


Face-à-face

Gestion active vs gestion passive

«L e choix entre actif et indiciel se résume à l’objectif d’investissement et à la tolérance au risque.»

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Commençons par le début… de celui de l’indice choisi. Comme cette straQu’entend-on exactement tégie d’investissement n’est pas proactive, les par gestion passive ou active ? frais de gestion appliqués aux portefeuilles MARK FITZGERALD (M. F.) Dans un fonds d’inves- ou fonds passifs sont souvent bien inférieurs tissement à gestion active, un gestionnaire à ceux des stratégies de gestion active, car ils de portefeuille individuel, des cogestionnaires ne nécessitent pas de grandes équipes d’anaou une équipe de gestionnaires prennent les lystes et de chercheurs, contrairement aux décisions d’investissement pour le fonds. Les produits actifs. fonds actifs ont généralement un objectif O. P. L’idée est d’offrir aux investisseurs une d’investissement déclaré qui vise à surpasser performance représentative d’un marché de un indice de référence particulier, ce que l’on manière diversifiée. À noter qu’il ne faut pas appelle l’« ajout d’alpha ». Le succès du fonds confondre gestion passive et ETF (Exchange dépend de la recherche approfondie, des pré- Traded Fund), puisqu’il y a plusieurs types visions du marché, de l’expertise de l’équipe d’ETF sur le marché qui n’offrent pas tous de gestion et de sa capacité à mettre en œuvre des stratégies passives, notamment les ETF inversés/short, les ETF à levier, les ETF théavec succès sa stratégie active. OLIVIER PAQUIER (O. P.) Il y a deux grands types matiques, les ETF alternatifs et, depuis quelques de gestion active : la gestion quantitative, années, les ETF actifs offrant la gestion active basée sur des règles ; et la gestion fondamen- dans un format liquide et transparent. tale, basée sur la recherche et le stock picking, ce que l’on appelle aussi la « ges­t ion de Quels sont les avantages et les inconvénients de ces deux méthodes ? conviction ». M. F. Un portefeuille passif est généralement O. P. Il y a deux principales différences entre conçu pour suivre d’aussi près que possible les deux méthodes : les coûts initiaux et le les rendements d’un indice de marché ou niveau de risque pris. Dans la gestion indid’une référence particulière. L’objectif est de cielle, les coûts de réplication sont souvent générer un rendement identique ou très proche faibles, et le niveau de risque moins élevé que dans une gestion de conviction, où des participations importantes peuvent être prises dans des biais sectoriels, de style, de géographie, avec des horizons de temps très différents. Ces décisions actives de gestion peuvent engendrer des rebalancements de portefeuille avec des coûts associés. Cela fait partie de la liberté qu’a un gérant actif vis-à-vis de son portefeuille, sous réserve des objectifs affichés par la catégorie d’actifs. M. F. Les fonds indiciels constituent un bon point de départ pour tous les investisseurs et, pour certains, ils suffisent à répondre entièrement à leurs besoins d’investissement. Cependant, pour ceux qui sont à l’aise avec les risques des investissements actifs, ces fonds peuvent constituer une solution viable. En fin de compte, les preuves suggèrent que la gestion active est très difficile à mettre en place, avec un risque élevé de sous-performance nette à long terme, mais qu’il est possible d’obtenir une surperformance MARK FITZGERALD nette avec de l’habileté, de la patience, et en Head of product specialism – PRD Europe Vanguard maintenant des coûts bas.

Jérémie Souteyrat

Mark Fitzgerald, head of product specialism – PRD Europe chez Vanguard, et Olivier Paquier, head of EMEA distribution of ETFs chez JP Morgan, partagent leur vision de ces approches qui se complètent plutôt qu’elles ne s’opposent.


Mark Fitzgerald et Olivier Paquier

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Hervé Thouroude

«L’idée est d’offrir aux investisseurs une performance représentative d'un marché de manière diversifiée.»

On lit beaucoup d’articles sur internet qui affirment que la gestion passive surperforme largement la gestion active. Qu’en est-il réellement ? Quelles performances a-t-on enregis­trées ces dernières années ? M. F. Permettez-moi de répondre à cette question par ce que nous appelons le « jeu à somme nulle ». La théorie du jeu à somme nulle stipule qu’à tout moment le marché est constitué des avoirs cumulés de tous les investisseurs, et que le rendement global du marché est égal au rendement pondéré des actifs de tous les participants au marché. Pour chaque position qui surperforme le marché, il doit y avoir une position qui sous-performe, du même montant, de sorte OLIVIER PAQUIER que, dans l’ensemble, le rendement excédenHead of EMEA distribution of ETFs JP Morgan taire de tous les actifs investis est égal à zéro. Cette théorie décrit un marché théorique sans coût. Dans la réalité, cependant, les investisseurs sont soumis à des coûts pour participer au marché. Lorsque les coûts sont pris en compte – y compris les frais de gestion, les Ces deux types de gestion s’adressent-ils écarts entre les cours acheteur et vendeur et à la même clientèle ? les commissions de négociation et les taxes –, O. P. Oui, à une même clientèle, qui aura la performance globale des investisseurs n’est une appétence différente en termes de pas égale à zéro, ce qui signifie qu’il y a plus risque / rendement, de coûts associés et de capacité à acheter / revendre un produit de d’actifs perdants que d’actifs gagnants. En fait, cela signifie que plus un gestion- manière plus ou moins rapide (liquidité). Dans naire de fonds demande de frais aux inves- le monde des fonds ouverts, chaque produit tisseurs, plus il doit surperformer pour est offert aux investisseurs via des distribuatteindre la moyenne du marché, ce qui désa- teurs qui vérifient leur connaissance des provantage immédiatement les fonds les plus duits avant toute opération, surtout pour les coûteux. Ce point est au cœur de la discus- particuliers. Un avantage lié aux ETF en parsion « actif vs indice », car les fonds actifs ticulier est la disponibilité du produit pour facturent généralement des frais plus élevés tout type d’investisseurs, allant du client particulier pouvant effectuer des opérations via que les fonds indiciels. Nous avons étudié la distribution des rende- une application sur son smartphone jusqu’au ments excédentaires pour tous les fonds com- fonds de pension prêt à appeler une table muns de placement et les fonds négociés en d’exécution et à traiter des montants bourse (FNB). La plupart des fonds, qu’ils soient significatifs. indiciels ou actifs, ont enregistré des performances inférieures à celles de leur indice de réfé- Faut-il absolument opter pour l’une ou l’autre solution ? rence sur la période, après déduction des frais. Bien sûr, les ETF et les fonds communs de Y a-t-il des pistes intermédiaires ? placement ne représentent pas l’ensemble du O. P. Il est possible de choisir entre l’une marché, et il est important de noter que l’étude ou l’autre option, les deux combinées, ou considère les rendements des fonds de manière une troisième piste qui peut former une égale – quelle que soit leur taille – plutôt que solution innovante : les ETF actifs, mêlant sur une base pondérée par les actifs, à laquelle les attributs des ETF (simplicité, liquidité, la théorie du jeu à somme nulle fait référence. transparence, coûts maîtrisés) et les atouts Les résultats suggèrent que, une fois les fonds de la gestion active afin d’optimiser la fusionnés et liquidés pris en compte, les ren- construction d’un portefeuille et de génédements excédentaires négatifs ont tendance rer une potentielle surperformance. À titre à être plus fréquents que les rendements excé- d’exemple, nous avons lancé la plus grande dentaires positifs. En résumé, les fonds indi- gamme d’ETF actifs (gestion fondamenciels présentent un avantage significatif en tale) en Europe appelée Equity Research termes de coûts par rapport aux fonds actifs Enhanced Index ETFs. Cette gamme de 6 ETF représentait, en mars 2022, plus de sur la plupart des marchés. C’est pourquoi nous pensons que la plu- 3 milliards d’euros. part des investisseurs ont intérêt à investir L’objectif pour les investisseurs est simple: dans des fonds indiciels à faible coût et lar- surperformer de 40-60 points de base les gement diversifiés. indices des grands marchés en fonction des


Face-à-face Mark Fitzgerald et Olivier Paquier

zones géographiques (comme le S&P 500 ou le MSCI Europe), tout en conservant les carac­ téristiques de la gestion indicielle (diversifi­ cation importante, pas de biais sectoriel, etc.) et en prenant en compte des critères ESG (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance). Le résultat fonctionne et nous permet d’afficher de belles surperformances, dans des ETF simples et accessibles à tout type d’investisseurs. M. F. Le choix entre actif et indiciel se résume à l’objectif d’investissement et à la tolérance au risque d’un individu. Et le choix n’est pas binaire – un mélange de stratégies indicielles et actives peut constituer une combinaison efficace au sein d’un portefeuille multiactif largement diversifié. Comment s’assurer le meilleur des deux mondes ? M. F. Les investisseurs sont libres de choisir. Tout ce que nous disons, c’est que le coût de l’investissement a une grande importance. Les investisseurs ne peuvent pas contrôler les marchés, mais ils peuvent contrôler les coûts qu’ils doivent payer pour investir. Chaque euro qu’un investisseur paie en frais, c’est un euro de moins pour sa retraite. O. P. L’investisseur doit prêter attention à une multitude de critères de sélection : per­ formance passée, déviations possibles si accep­ tables, risques pris et compris (devise, marché, contrepartie etc.) et qualité du gérant, que cela soit dans la gestion active ou indicielle d’ailleurs. Dans la gestion indicielle, la qua­ lité sera perçue dans le tracking error faible par rapport à un indice. Dans la gestion active, la qualité de la gestion sera notamment obser­ vée dans la régularité à surperformer un panier de référence (benchmark). Au final, dans le contexte d’incertitude actuel (coronavirus, inflation, guerre en Ukraine), comment assurer une stratégie d’investissement gagnante ? O. P. Sur ces dernières années, les gestions active et passive ont affiché de belles perfor­ mances, montrant leur complémentarité en fonction des cycles de marché : situation complexe ou forte reprise. Deux configurations complémentaires ont eu lieu. Dans des contextes complexes de marché (mouvements de marché incertains), la gestion active tend à performer car elle bénéficie d’une certaine flexibilité, surtout dans l’obligataire, pour s’adapter à un contexte de manière rapide et pertinente. La gestion indicielle, quant à elle, tend à capter les phases de fortes reprises des marchés. Il est donc important d’allier les deux. M. F. Plus récemment, les événements en Ukraine ont engendré un bilan humain et des souffrances incommensurables. Les réponses économiques, y compris les sanctions, ont 42

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

entraîné des turbulences sur les marchés et une anxiété quant à la suite des événements. Une réaction émotionnelle est naturelle. Toutefois, lorsqu’il s’agit d’investir, il est préférable de résister à l’envie d’agir. Ce n’est pas facile, mais dans une situation comme celle-ci, nous suggérons aux investisseurs de s’armer de courage pour faire face à ce qui pourrait arriver et d’essayer de garder leurs émotions en dehors des décisions d’investis­ sement. Par conséquent, ils ne devraient pas interrompre leurs plans d’épargne dans ces phases de marché. Les investisseurs devraient prendre cette leçon à cœur, car la volatilité continuera de nous accompagner au cours du second semestre de 2022. Comment voyez-vous l’avenir dans ce domaine ? O. P. Un mélange optimal de gestions active et passive pourrait aider beaucoup d’inves­ tisseurs à construire des portefeuilles capables de faire face à de nombreuses situations de marché comme récemment observées. J’insisterais sur la complémentarité des approches dans le cadre d’un portefeuille intégrant différents types de gestion, d’hori­ zons de temps et de niveaux de risque. M. F. Le débat sur l’opposition entre gestion active et gestion passive se poursuivra, en particulier sur les marchés volatils, où les appels à la gestion active se font plus pres­ sants. Bien que l’approche active reste impor­ tante, les investisseurs doivent éviter de penser que « cette fois-ci, les marchés volatils sont différents », et que le marché actuel est particu­ lièrement favorable aux gestionnaires actifs. Ce n’est tout simplement pas le cas. Comme nous l’avons déjà dit, pour nous, la question n’est pas celle de l’investissement actif par rapport à l’investissement passif, mais celle du faible coût par rapport au coût élevé. L’actif a sa place, au bon prix. Nous souhaitons apporter notre contribution en proposant des solutions à la fois indicielles et actives à des frais compétitifs, afin que les investisseurs puissent conserver une plus grande partie de leur rendement.

Auteur M. P.

EN QUELQUES DONNÉES Zoom via des données et chiffres sur la gestion passive et la gestion active. 1 Gestion indicielle en hausse En 2021, pour les fonds ouverts, la gestion active domine le marché dans le monde avec 70 % de part de marché contre 30 % pour la gestion indicielle (fonds passifs, indiciels et ETF), selon les données publiées par Bloomberg fin décembre dernier. « La gestion indicielle a cependant doublé en termes de part de marché entre 2011 et 2021 dans le monde – elle était de 14 % en 2011 », explique Olivier Paquier. 2 Vaste choix de produits Le choix de produits, tant du côté de la gestion active que de la gestion passive, est vaste. « Pour mettre en perspective le côté passif, le secteur des ETF en Europe comptait, fin février 2022, 2.655 produits, avec 10.497 cotations, des actifs de 1,55 milliard de dollars, provenant de 90 fournisseurs et cotés sur 29 bourses dans 24 pays », poursuit Olivier Paquier. 3 Que faire en temps de crise ? Une étude réalisée par Vanguard sur le comportement d’investis­ sement pendant la pandémie du coronavirus et les turbulences du marché qui l’ont accompagnée est arrivée à la conclusion que seule une très petite minorité d’investisseurs – moins de 0,5 % – a paniqué, vendu tous ses investissements en actions et a conservé une position unique en espèces dans son portefeuille entre le 19 février et le 31 mai 2020. « De plus, nos analystes ont calculé que plus de 80 % des investisseurs qui ont paniqué et se sont débarrassés de leurs actions auraient obtenu de meilleurs rendements s’ils avaient simplement laissé leurs portefeuilles là où ils étaient le 18 février 2020 », confie Mark Fitzgerald.


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Nouveaux portefeuilles

Fonds alternatifs : les dessous d’un phénomène Visant à investir dans des actifs «réels» plutôt que dans des actifs cotés en bourse, les fonds alternatifs sont l’objet d’un succès grandissant depuis quelques années. Aujourd’hui, ce sont même eux qui connaissent la plus importante croissance au Luxembourg. Mais dans quoi investissent-ils exactement? Avec quelle stratégie? Et quel rendement? Nous faisons le point pour vous. Auteur Q. D.

ÉVOLUTION PAR CLASSE D’ACTIFS AU LUXEMBOURG Croissance des actifs sous gestion en 2021 Source

Alfi

35 %

30 %

29,90 %

29,80 %

25 % 25 %

20 %

18,40 %

18,50 %

18,50 %

15 %

10 % 7% 4,40 %

44

Private equity

Equity

Fonds de fonds

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

Autres catégories

Mix

Real estate

Marché monétaire

Obligations

Photos

0%

09_credit

5%


Dettes d’infrastructure

De plus en plus souvent, on pointe le secteur financier comme un précieux auxiliaire de la transi­ tion énergétique. Il faut dire que ce sont plusieurs milliers de milliards d’euros qui sont brassés dans cette indus­ trie et que l’ampleur de ces capitaux pour­ rait permettre de mettre rapidement en œuvre les changements nécessaires pour faire face à l’urgence climatique. Dans cette pers­ pective, les fonds d’infrastructure peuvent jouer un rôle important. «À travers ce type de fonds alternatif, on peut financer la création de routes ou de ponts, mais aussi de champs de panneaux solaires ou d’éoliennes, pointe Renaud Breyer, partner, sustainability leader au sein d’EY Luxembourg. Dans ce contexte où la durabilité prend de plus en plus d’importance, les fonds d’infrastructure sont donc des leviers d’envergure. » Au-delà de cet aspect environnemental qui constitue une tendance forte, les fonds d’infrastructure sont également impactés par d’autres éléments conjoncturels. La pandé­ mie, tout d’abord, a redéfini notre façon de travailler. La façon dont on conçoit les bureaux, les transports et même nos logements a donc également évolué. Or, les fonds d’infrastruc­ ture investissent souvent dans ce type de structures. L’évolution de la technologie modi­ fie aussi profondément nos attentes par rap­ port à nos infrastructures, avec une importance croissante de l’intelligence artificielle et d’autres technologies digitales. Cette tendance doit évidemment être prise en compte par les fonds d’infrastructure. Pour les maîtriser, il faudra monter en compétences sur ces sujets souvent pointus. On le voit, l’enjeu «ressources humaines » n’est donc jamais bien loin. Des milliards pour l’infrastructure Si des chiffres précis sur les fonds d’infrastruc­ ture au Luxembourg ne sont pas collectés par l’Alfi ou d’autres acteurs, il est toutefois clair qu’il s’agit d’un business porteur pour les années à venir. Selon une étude de Deloitte, 2022 sera véritablement l’année de l’in­ frastructure : 1,2 billion de dollars seront investis aux États-Unis dans des projets d’infrastructure, 1,5 billion de dollars en Inde, 110 milliards de dollars en Australie, 55 milliards de dollars en Allemagne, notam­ ment dans des projets liés à la production d’hydrogène, à l’éolien offshore, ainsi qu’aux véhicules électriques… Comme pour la plupart des « actifs réels », le Luxembourg offre une large gamme de

Dans le contexte de transition énergétique qui est le nôtre, les fonds peuvent financer la création de nouvelles infrastructures.

BIEN PLACÉ SUR L’INFRASTRUCTURE Le Luxembourg est aujourd’hui très bien positionné sur les fonds d’infrastructure, selon des chiffres de PwC Luxembourg (Infrastructure in Luxembourg with PwC).

40

Parmi les 40 principaux gestionnaires d’actifs globaux en infrastructure, deux tiers sont déjà actifs au Luxembourg.

1er

Luxembourg est la première Place européenne pour la levée de fonds en infrastructure, et la deuxième dans le monde.

15 %

structures légales, particulière­ ment adaptées aux investisse­ ments dans l’infrastructure. Les plus populaires restent toutefois la SCSp et le Fiar. Ces véhicules per­ mettent d’investir dans des projets d’in­ frastructure en Europe, mais aussi en dehors des frontières de l’Union, ce qui offre beau­ coup de flexibilité aux investisseurs. Si les rendements obtenus à travers un fonds d’infrastructure peuvent être très inté­ ressants, ce type de structure entraîne égale­ ment des coûts, qui vont de la création du fonds aux frais d’audit, en passant par les coûts de compliance ou de conseil.

L’Eltif, un fonds dédié Les investissements dans l’infrastructure étant considérés comme particulièrement impor­ tants dans le contexte actuel, l’Union euro­ péenne a créé un régime spécial destiné à canaliser les placements à long terme effec­ tués dans l’économie réelle, et particulière­ ment ceux qui sont en ligne avec ses objectifs de croissance intelligente, durable et inclusive. Ce type de fonds, appelé Eltif (European LongTerm Investment Fund), doit être géré par un gestionnaire de fonds autorisé et peut investir dans une large gamme d’actifs: entreprises de taille réduite ou moyenne, développement de bâtiments publics, d’infrastructures sociales, de transports, de communication, ou encore de production d’énergie renouvelable. Sous ce régime, on peut donc trouver des fonds immobiliers, de dette, d’infrastruc­ ture ou de private equity. L’Eltif vise toute­ fois à développer des projets qui sont dans l’intérêt de l’ensemble des Européens. Il facilite le développement de fonds trans­ frontaliers qui – nouveauté notable – sont accessibles aux investisseurs de détail. «Élargir l’accès des investisseurs de détail aux fonds alternatifs fait vraiment partie des priorités du secteur des fonds au cours des prochaines années, même si les investisseurs institutionnels continueront certainement à être les plus importants en matière de volume », explique Renaud Breyer. Dans ce sens, l’Eltif constitue donc un réel pas en avant. Il pourrait, de plus, jouer un rôle très important dans l’évolution de nos sociétés vers un modèle plus durable.

Selon l’étude KPMG/ALFI debt fund survey 2021, qui détaille les secteurs financés par les fonds de créances, une part importante est consacrée à diverses formes d’infrastructures et d’installations physiques.

MAI 2022 FONDS D′INVESTISSEMENT

45


Nouveaux portefeuilles

Fonds immobiliers

Avec 311 fonds enregistrés au 3e tri­ mestre 2021 et un volume total d’ac­ t i f s s o u s g e s t i o n s ’é l e v a n t à 104,4 milliards d’euros, l’immobilier est un actif lui aussi très populaire au sein de l’univers des fonds alternatifs. Particulièrement concret, il correspond bien à l’image qu’ont les investisseurs des actifs alternatifs, aussi appelés «actifs réels». Certes, l’immobilier a toujours été la pierre angulaire des stratégies d’investissement, par­ ticulièrement dans nos régions, mais le recours à un fonds d’investissement offre plusieurs avantages complémentaires. « À travers un fonds immobilier, on peut accéder à une série de biens qui seraient inaccessibles à un investisseur seul, assure Renaud Breyer, partner, sustainability leader au sein d’EY Luxembourg.. En outre, on bénéficie de l’expertise de professionnels par rapport à des marchés qu’on ne connaît pas forcément, puisque le fonds est amené à investir dans de nombreux pays. Cette diversification géographique, couplée à une diversification du type de biens dans lesquels le fonds investit, permet par ailleurs de mieux répartir les risques.» Des rendements intéressants Cette combinaison offre aux investisseurs la promesse d’un rendement intéressant, quelle que soit la stratégie pour laquelle on opte. « Un fonds immobilier peut obtenir un rendement en achetant et en vendant des biens au meilleur moment. Mais il peut aussi le faire en exploitant un immeuble résidentiel ou de bureaux pendant de longues années, à travers la location», détaille Renaud Breyer. La ques­ tion du risque se pose toutefois de la même façon pour ce type de fonds. S’il s’agit d’acquérir un terrain, de construire un bien dessus puis de l’exploiter, le risque sera plus important que lorsqu’on achète et exploite un bâtiment existant. Mais le rendement pourrait aussi s’avérer supérieur… Quant au coût de ce type de fonds pour l’investisseur, il varie également en fonction de sa com­ plexité (multijuridictionnel, plusieurs types de biens, etc.). Il faut toutefois distinguer les frais liés à la mise en place de la structure des frais de gestion, qui servent notamment à rémunérer les experts en charge de la gestion du risque, des aspects légaux, etc. Selon l’Alfi (Luxembourg Real Estate Investment Funds Survey 2021), les structures légales choisies par les gestionnaires de fonds pour la mise en place de fonds immobiliers sont souvent des SCSp (société en comman­ 46

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

L’immobilier est un autre type d’actif très représenté dans l’ensemble des fonds alternatifs au Luxembourg. Plus de 300 fonds de ce type sont enregistrés dans le pays.

CHIFFRES Selon l’Alfi, les fonds immobiliers sont majoritairement des FIS (fonds d’investissement spécialisés). Les fonds Part II sont bien moins représentés.

101,318

milliards d’euros

C’est le montant des actifs sous gestion dans des fonds immobiliers montés sous forme de FIS.

3,051

milliards d’euros C’est le montant des actifs sous gestion dans des fonds immobiliers montés sous forme de fonds « Part II ».

dite spéciale) sous la forme de Sicav combinées avec le régime FIS (53 % des fonds immobiliers de la Place en 2021). Le Fiar rencontre également un succès croissant pour ce type de fonds. Nous sommes en effet passés d’un seul fonds de ce type en 2016 – année de lan­ cement du Fiar – à 134 en 2021. Le plus sou­ vent, les gestionnaires optent pour une stratégie multisecteur (47% des fonds). Pour les fonds qui se concentrent sur un seul secteur, l’Alfi indique que le résidentiel est en tête (9%), suivi du commerce et de l’immobilier de bureaux (7 %). Autre chiffre intéressant : 66 % de ces fonds investissent en Europe, 7% le font dans le monde, 9 % en Amérique du Nord et 8 % dans la région Asie-Pacifique. 85% des inves­ tisseurs dans ces fonds sont européens.

Une grande variété de biens Si nous avons principalement évoqué le rési­ dentiel, l’immobilier de bureaux et de com­ merce, il faut toutefois noter qu’un fonds immobilier peut investir dans d’autres biens encore, avec des stratégies différentes. « On peut par exemple investir dans du logement social, qui est un segment particulier du résidentiel, ou encore opter pour le value-added, qui consiste à acquérir un bien immobilier et à l’améliorer, que ce soit en termes de confort ou d’énergie, par exemple», explique le partner d’EY Luxembourg. Avec le renforcement des exigences en matière de durabilité, de nom­ breux fonds optent ainsi, aujourd’hui, pour des immeubles très énergivores, qui sont transformés pour devenir des structures qui utilisent une énergie renouvelable, dans des volumes très réduits. Notons que les fonds immobiliers pour­ raient, au cours des prochaines années, attirer non seulement des professionnels et des institutionnels, mais aussi des privés. La volonté, au sein du secteur financier, est en effet de capter les importantes liquidités dont ceux-ci disposent, et l’immobilier est de nature à ras­ surer ces investisseurs. Pour généraliser cette pratique, il faudra toutefois adapter la régle­ mentation qui, aujourd’hui, préfère encore réserver les fonds alternatifs à des « investis­ seurs avertis». Mais les mentalités évoluent et des véhicules comme l’Eltif offrent déjà de belles possibilités aux particuliers.


Année après année, les fonds de dette privée connaissent une croissance impressionnante au Luxembourg. En 2020, le volume des actifs sous gestion avait déjà augmenté de 36,2 %. 2021 a vu ce phénomène s’accentuer, avec une hausse de 40,6 % des actifs sous gestion dans des fonds de dette privée, pour un montant total de 181,7 milliards d’euros. Désormais, 35 % des fonds de dette privée européens sont domiciliés au Luxembourg. Mais la dette privée, qu’est-ce que c’est exactement? À l’instar de ce qui se passe dans le private equity, le fonds de dette privée va accorder des prêts à des entreprises qui ont besoin de capitaux, que ce soit en cas de dif­ ficulté ou pour lancer une nouvelle activité. Mais là où un fonds de private equity, en investissant dans une entreprise, va acquérir des parts de la société, un fonds de dette pri­ vée n’en fera rien. Il sera donc moins inté­ ressé par le développement conséquent de l’activité de l’entreprise. Le fonds de dette privée joue ainsi plutôt le rôle d’une banque, qui prête et attend un remboursement avec des intérêts. Depuis la crise financière de 2008, ce rôle des fonds de dette a pris une importance considérable. Vu la frilosité des banques à prêter des capitaux à des start-up ou des structures en difficulté, cette solution s’est en effet avérée indispensable. Mais qu’en est-il des risques pour l’investisseur? «Comme c’est le cas pour la plupart des fonds alternatifs, le risque qu’on assume dans un fonds de dette privée va dépendre de ce qu’on finance, estime Renaud Breyer, partner, sustainability leader au sein d’EY Luxembourg. Il est évident qu’il sera plus risqué de financer une société en grande difficulté, dans un secteur concurrentiel, qu’une entreprise mieux établie, disposant de produits compétitifs et d’une clientèle établie. Le risque, ici aussi, est donc étroitement lié à la nature de l’actif. » FIS et Raif en tête Selon une étude conjointe de l’Alfi et de KPMG (Private Debt Fund Survey 2021), les fonds de dette privée luxembourgeois régulés sont le plus souvent structurés à travers le régime légal du FIS (56 %, -11 % par rapport à 2020), le Fiar (36 %, +8 % par rapport à 2020), l’UCI « Part II » (3 %, -2 % par rapport à 2020), et le Sicar (5 %, +5 % par rapport à 2020). Notons que si les Fiar, SIF et autres Sicar sont réser­ vés aux « investisseurs avertis », ce n’est pas le cas des fonds « Part II ».

Fonds de dette privée Avec une croissance de plus de 40 %, les fonds de dette privée sont ceux qui ont le plus progressé au Luxembourg cette année.

CATÉGORIES DE FONDS D’EMPRUNT Entre les fonds d’origine de la dette et les fonds de participation à la dette Source KPMG/Alfi’s Private Debt Fund Survey 2021 ; KPMG/Alfi’s Private Debt Fund Survey 2020

100 %

75 %

57 % 50 %

43 %

55 % 45 %

25 %

0%

2020

2021

Quant aux fonds non régulés, ils sont très majoritairement structurés via la SCSp (88 %, +4 % depuis 2020). Notons toutefois que les fonds de dette privée non régulés sont légèrement minoritaires au Luxembourg: 42%, pour 58 % de fonds régulés. Enfin, un dernier élément chiffré intéressant est lié aux stra­ tégies déployées par les gestionnaires de ces fonds : 50 % des fonds de dette privée sont à un seul compartiment, alors que 33% utilisent des sous-fonds pour développer des straté­ gies d’investissement séparées. L’ESG gagne du terrain Comme dans l’ensemble des fonds alternatifs, les critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) sont réellement montés en puissance au cours des dernières années en ce qui concerne les fonds de dette privée. La réglementation européenne, à cet égard, a sans doute joué un rôle important. Parmi les textes les plus importants adoptés, on peut relever la SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation), qui permet de classer les fonds qui prennent en compte des critères de dura­ bilité et ceux qui ne le font pas. Si, aujourd’hui, 61 % des fonds de dette privée luxembourgeois sont toujours classés sous l’article 6 de la SFDR (fonds qui n’in­ tègrent aucun critère de durabilité dans leur stratégie d’investissement), ils sont désormais 33 % à répondre aux exigences de l’article 8 (fonds qui promeuvent des caractéristiques environnementales et/ou sociales) et 6% à se conformer à celles de l’article 9 (fonds qui ont un objectif d’investissement durable). Au cours des prochaines années, la pro­ portion de ces fonds de dette privée classés sous les articles 8 et 9 de la SFDR devrait aller croissant. Du côté des investisseurs, le respect des critères ESG n’est désormais plus, en effet, un « nice to have », mais bien une priorité qui va sans doute devenir plus évidente encore à l’avenir. Or, à travers le prêt de capitaux aux entreprises, on peut avoir une influence déterminante sur la façon dont elles opèrent un changement de modèle en matière énergétique, environne­ mentale ou sociale. Bientôt, seules les socié­ tés capables de prouver leur respect de certains critères ESG pourront obtenir ce type de financement…

Origine (marché primaire) Participation (marché secondaire)

MAI 2022 FONDS D′INVESTISSEMENT

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Nouveaux portefeuilles

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FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

«On voit se rencontrer deux besoins: celui des entreprises et celui des investisseurs.» RENAUD BREYER Partner, sustainability leader EY Luxembourg

Une stratégie guidée par l’appétence au risque Cette variété des structures légales permet aux gestionnaires de bénéficier d’une grande flexibilité et de construire un fonds de private equity répondant parfaitement aux besoins des investisseurs. Mais la stratégie utilisée dépend toutefois en grande partie du profil de risque de ces derniers. « En private equity, on peut vraiment investir dans un très grand nombre d’entreprises aux caractéristiques très différentes : des start-up actives dans les proptech ou les fintech jusqu’aux entreprises de taille moyenne. Évidemment, le risque variera en fonction du choix des sociétés… tout comme le rendement », explique Renaud Breyer. Le choix du gestionnaire aura, à cet égard, une grande importance. « Comme pour l’ensemble des fonds alternatifs, il est nécessaire de réunir des compétences pointues dans le domaine dans lequel on souhaite investir pour espérer des rendements intéressants. Cela peut aussi avoir un impact sur les frais qui seront facturés : plus le secteur et les investissements sont complexes, plus les coûts en ressources humaines seront importants », ajoute le sustainability leader d’EY Luxembourg. Précisons qu’aujourd’hui le segment du private equity est marqué, comme l’ensemble du secteur financier, par la transition éner­ gétique et la recherche de durabilité. De nom­ breuses sociétés sont en effet créées pour développer des produits et services qui per­ mettront d’atteindre cet objectif. Et les fonds de private equity sont bien entendu à l’affût des pépites qui mettront sur le marché des solutions qui feront la différence…

Matic Zorman

Un environnement réglementaire adapté Mais les facteurs conjoncturels ne sont pas les seuls à expliquer cet attrait pour les fonds de private equity. Le Luxembourg offre éga­ lement un environnement légal parfaitement adapté à ce type de structures. La création du Fiar (fonds d’investissement alternatif réservé), en 2016, a notamment permis de mettre à disposition des gestionnaires un véhicule entièrement dédié aux investissements alter­ natifs, et n’étant pas directement régulé par la CSSF (Commission de surveillance du secteur financier), ce qui réduit considéra­ blement le time to market. Mais il est également possible de dévelop­ per des fonds de private equity/venture capital

Comptant parmi les actifs les plus populaires au Luxembourg, le private equity porte le marché des fonds alternatifs.

à travers la Sicar (société d’investisse­ ment en capital à risque), le FIS (fonds d’investissement spécialisé), voire la SCA (société en commandite par actions) ou le SCSp (société en commandite spéciale). La transposition rapide de l’AIFMD (Alternative Investment Fund Managers Directive) au Luxembourg a, par ailleurs, permis d’offrir un certain contrôle sur toutes ces structures, propice à renforcer la confiance des investisseurs.

Photo

En 2021, les actifs sous gestion dans le segment du private equity au Luxembourg ont connu une augmen­ tation de 29,9 %, pour un total de 137,2 milliards d’euros. Une bonne par­ tie de cette croissance est due à l’injec­ tion de nouveaux capitaux, qui est également en hausse en 2021. Ces éléments montrent le succès de ce type de fonds alternatif. Un succès qui n’est pas récent, puisque cette classe d’actifs connaît une croissance conti­ nue depuis 20 ans au Luxembourg, un pays dans lequel sont désormais gérés plus de 10% des actifs en private equity globaux. Cette trajectoire s’explique d’abord par la nature des investissements indirectement réalisés en plaçant des fonds dans une struc­ ture dédiée au private equity et au venture capital. Traditionnellement, ces fonds inves­ tissent en effet dans des entreprises non cotées en bourse, en misant sur leur importante croissance au cours des années à venir. Or, dans un contexte de crise, où les banques rechignent de plus en plus souvent à prêter à des sociétés en développement proposant des produits ou services innovants, les fonds de private equity sont venus combler un manque. « Cette situation a été renforcée par la crise du Covid, qui a entraîné une disponibilité accrue des capitaux, notamment du côté des acteurs institutionnels, estime Renaud Breyer, partner, sustainability leader au sein d’EY Luxembourg. Or, le private equity, à l’instar de nombreux actifs alternatifs, permet aujourd’hui d’obtenir de bons rendements. D’un autre côté, de nombreuses sociétés cherchent à développer de nouvelles solutions, notamment dans le cadre de la transition énergétique. On voit donc se rencontrer deux besoins: celui des entreprises, d’un côté, et celui des investisseurs de l’autre. »

Private equity / venture capital


Bénéficiant d’un régime moins régle­ menté, le hedge fund est un fonds spéculatif qui utilise beaucoup les produits dérivés, la vente à découvert et l’effet de levier. Le gestionnaire d’un hedge fund recherche des performances absolues, indépendantes du contexte du marché. Pour cela, il bénéficie souvent d’un mandat plus large que celui accordé pour d’autres fonds d’investissement alternatifs, ce qui lui permet de modifier sa stratégie avec plus de flexibilité. Le modèle tarifaire est éga­ lement différent puisque, en plus des frais de gestion, des frais sont généralement facturés en fonction des résultats. Cela étant dit, les rendements des hedge funds peuvent s’avérer très importants pour les investisseurs. Comme l’indique leur nom – « to hedge » signifiant « couvrir », « se proté­ ger» –, les hedge funds ont la capacité d’offrir des performances décorrélées des indices boursiers. La stratégie du gestionnaire consis­ tera à maximiser le rendement lorsque le marché est en hausse, et à limiter l’impact lorsqu’il est en baisse. Cette vision « asymé­ trique » développée par les hedge funds rend ces derniers intéressants dans le cadre d’une diversification du portefeuille. Traditionnellement, le Luxembourg était moins bien positionné pour la domiciliation de hedge funds que d’autres pays, comme les îles Caïmans ou encore notre plus important compétiteur en Europe, l’Irlande. Cette situa­ tion a toutefois rapidement évolué au cours des dernières années. Si, en 2019, les îles Caïmans continuaient à détenir la plus impor­ tante part de marché en matière de hedge funds (21,7%), suivies de l’Irlande (20,3%) et de l’État américain du Delaware (19,6%), le Luxembourg en détenait déjà 18,9%. Un chiffre impression­ nant, sachant qu’il n’était que de 6% en 2011. Aujourd’hui, plus de la moitié des hedge funds basés en Europe sont domiciliés au Luxembourg. Des records au niveau mondial Le régime choisi pour un hedge fund dépend principalement de la stratégie adoptée et des investisseurs qu’on cherche à attirer. Fonds UCI « Part II », SIF et, plus récemment, Raif peuvent être utilisés. Au niveau de la struc­ turation légale, ce sont plus souvent les SA (sociétés anonymes), SCA (sociétés en com­ mandite par actions) ou SCS (sociétés en com­ mandite simple) qui sont les plus populaires au Luxembourg. Si les chiffres spécifiques concernant les actifs sous gestion dans des hedge funds au

Hedge funds Contenant des actifs liquides, contrairement aux autres fonds alternatifs, les hedge funds recherchent des performances absolues.

LE LUXEMBOURG GAGNE DES PARTS DE MARCHÉ Alors qu’il ne détenait que 6 % des actifs en hedge funds en 2011, le Luxembourg a vu ses parts de marché croître considérablement en quelques années à peine (chiffres de 2019).

21,7 %

Parts du marché global des hedge funds détenues par les îles Caïmans.

20,3 %

Parts du marché global des hedge funds détenues par l’Irlande.

19,6 %

Parts du marché global des hedge funds détenues par l’État américain du Delaware.

Luxembourg font défaut, il ne fait aucun doute que ce segment se porte à merveille. En octobre 2021, les encours des hedge funds au niveau global s’éle­ vaient à 3,459 milliards d’euros. C’est la première fois dans l’histoire que le volume total d’actifs dans ce segment atteint un tel niveau. Une croissance conditionnée par plusieurs facteurs La question est de savoir comment évoluera ce type d’actifs au cours des prochains mois. Si personne ne possède de boule de cristal permettant de prédire l’avenir, la croissance du segment des hedge funds au Luxembourg, comme celle des fonds alternatifs dans son ensemble, sera très certainement liée à la disponibilité des ressources humaines. «Il est indispensable de pouvoir compter sur un certain nombre de professionnels pour que la croissance de ce secteur se poursuive, explique Renaud Breyer, partner, sustainability leader au sein d’EY Luxembourg. La complexité des fonds alternatifs l’impose en effet. Dans les années 80, les gestionnaires pouvaient se permettre de faire un peu de tout. Mais, aujourd’hui, ce n’est plus possible, tout cela s’est fortement spécialisé. » Parmi les priorités des services de ressources humaines du sec­ teur, on trouve la nécessité d’engager (ou de retenir) des spécialistes en matière d’ESG (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance). En dehors de ce facteur humain, le déve­ loppement des hedge funds et des autres fonds alternatifs au Luxembourg est également conditionné par l’évolution constante, dans le bon tempo, de l’environnement légal. «Cela dit, je suis plutôt positif par rapport à l’avenir de ce type d’actifs, car les opportunités sont bien présentes. Elles sont évidemment liées aux impératifs environnementaux, mais aussi à de nouveaux actifs digitaux. Sur la Place luxembourgeoise, on sent que l’intérêt pour des fonds crypto est en effet de plus en plus vif. Ce n’est pas encore une réalité au Luxembourg, mais c’est clairement dans les tuyaux pour de nombreux gestionnaires de fonds… », conclut Renaud Breyer.

18,9 %

Parts du marché global des hedge funds détenues par le Luxembourg.

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PUBLIREPORTAGE

Pour Laurent Marochini, Responsable Innovation chez SGSS Luxembourg, la blockchain et la crypto transforment d’ores et déjà l’industrie des fonds.

Crédits

SG Luxembourg

Le marché des cryptos à l’aube de l’adoption La Blockchain, l’utilisation de crypto devises, la création de « security tokens », aidées par une règlementation européenne favorable, se développent au profit de l’industrie des fonds.


Avec plus de 2.100 milliards de dollars de capitalisation1, le marché des cryptos assets suscite de plus en plus l’intérêt de l’industrie des fonds. L’intérêt est grandissant à la fois en tant que nouvelle classe d’actifs mais aussi dans l’intérêt d’utiliser la technologie à travers la blockchain appelée aussi DLT, pour « Distributed Ledger Technologie ». L’ADOPTION, C’EST MAINTENANT 2021 et 2022 ont vu l’arrivée massive de la clientèle institutionnelle et corporate dans le monde des actifs digitaux. Aux États-Unis, des entreprises comme Microstrategy ou Tesla ont converti une partie de leur trésorerie en Bitcoin. Les hedge funds comme les fonds classiques cherchent des expositions sur cette nouvelle classe d’actifs. Le Salvador reconnait le Bitcoin comme monnaie légale, menant ainsi le pays à une adoption massive. Voici là quelques exemples d’initiatives qui ont contribué à développer l’adoption et le renforcement de l’écosystème global. Notons toutefois des écarts entre les continents. Les États-Unis dominent le milieu des crypto devises. L’Europe, quant à elle, se positionne plus sur les « security tokens », des actifs financiers créés sur une blockchain. Société Générale est moteur dans ce domaine, notamment via sa filiale SG Forge qui a déjà « tokenisé » des obligations et des produits structurés. Trois tokens ont été par ailleurs admis auprès de la « Security Official List » de la Bourse de Luxembourg. L’indice de Chainalysis2 nous confirme l’adoption en flèche des cryptos et le nombre de détenteurs mondiaux de Bitcoin3 a été multiplié par dix au cours des six dernières années. Les récents développements des monnaies digitales de banques centrales, devenus réalité en Chine avec le Digital Yuan, va sans doute contribuer à transformer notre marché en un marché « token ». ET LES FONDS D’INVESTISSEMENT ? Sur la partie des fonds d’investissement, les États-Unis sont déjà actifs depuis près de dix ans. Le célèbre fonds Grayscale4 revendique plus de 40 milliards d’actifs sous gestion. Les projets de développement se sont réellement développés depuis 2019 et arrivent progressivement en Europe, aidés par des signaux verts que la règlementation semble montrer. Les projets de fonds crypto sont diversifiés dans leurs stratégies avec des expositions directes comme le Bitcoin ou l’Ether, mais aussi sur d’autres « crypto assets » (crypto actifs) qui promettent des gains de performance élevés. Certains fonds souhaitent privilégier l’accès aux cryptos via des investissements indirects : des fonds de fonds. La taille des fonds reste relativement faible. Seul 30 % des crypto fonds ont des tailles supérieures à 50 millions d’euros5 mais nous sommes au début de l’histoire. Une enquête réalisée au dernier trimestre 2021 par la LHoFT, PWC et l’ALFI auprès de l’écosystème luxembourgeois confirme cette tendance. 18 % des interviewés considèrent les « crypto assets » comme entrant dans leur

stratégie et 43 % s’attendent à les prioriser d’ici deux ans. En parallèle de cette évolution, de plus en plus de gestionnaires vont poursuivre leur transformation, que ce soit à l’actif en y intégrant des security tokens, ou au passif via des parts de fonds tokenisés. Cette transformation profonde qui touche à la fois les infrastructures de marché et les stratégies d’investissement va constituer un enjeu d’adaptation pour les acteurs existants. L’agilité sera la clé de succès pour cette transformation afin de pouvoir saisir les opportunités qui se présenteront, tout en faisant face à une clientèle de plus en plus sensible à ces enjeux. UN PAYSAGE RÈGLEMENTAIRE SE DESSINE Si l’adoption des cryptos est possible, c’est grâce au cadre règlementaire de l’ensemble des juridictions qui a permis d’apporter la clarification nécessaire. La France a été pionnière sur le sujet, avec la loi Pacte notamment, mais aussi en montrant l’exemple à travers les expérimentations de la Banque de France. Elles

« Les cryptos et la Blockchain sous-jacente sont source d’innovation et de développement de projets ambitieux » LAURENT MAROCHINI Head of Innovation SGSS Luxembourg

ont permis d’anticiper les réglementations au niveau européen, et ainsi d’influencer les futures tendances. Le Luxembourg a également montré la voie avec le questionnaire CSSF publié en décembre 2021. Il a notamment apporté plus de clarifications à l’écosystème des fonds d’investissement afin de pouvoir lancer des projets viables. En synthèse, il est possible d’investir dans la crypto au sein d’un monde professionnel, mais selon des conditions précises. Les fonds UCITS ne pourront pas bénéficier de l’exposition aux cryptos en tant que classe d’actifs. QUELLE EST LA POSITION DE L’EUROPE ? Les crypto devises et les « stables coins » sont l’objet de la réglementation MICA (Markets in Crypto Assets), afin d’instaurer un cadre

Logo à placer sur fond blanc

réglementaire européen applicable aux prestataires de services sur actifs numériques. L’avenir se joue maintenant. Pour ce qui est des security tokens, c’est le régime pilote qui fera foi dont le rôle est de faciliter les échanges et règlements d’instruments financiers émis sous forme de crypto actifs. Le régime permettra d’effectuer des tests dans un environnement de type « sandbox », en obtenant des dérogations par rapport aux règles normalement applicables aux instruments financiers. DES CONSIDÉRATIONS ENVIRONNEMENTALES À NE PAS NÉGLIGER Dans un monde où le réchauffement climatique est au top des agendas des Etats et des entreprises, la prise en considération de l’environnement n’est pas un « nice to have » mais un « must have ». La Blockchain et les cryptos ne peuvent ignorer ce phénomène tant la critique médiatique est grandissante. Il est important de rappeler que la critique sur la consommation énergétique des cryptos est liée au protocole « Proof of Work » qui soustend des cryptos comme le Bitcoin. Ce protocole consomme beaucoup d’électricité, avec une emprunte carbone importante. Cependant, l’utilisation d’énergies renouvelables permet de tempérer les propos. Les alertes reçues sur une potentielle interdiction dans le cadre de MICA va sans doute accélérer les transitions vers des protocoles moins énergivores (comme le « Proof of Stake »). C’est dans les défis qu’on développe les opportunités. Nous sommes là face à un marché plein de ressources et de créativité. Sans s’attarder sur la Finance Décentralisé (DeFI), les NFTs (Non Fungible Tokens) ou les Metavers, et malgré la maturité – en cours d’acquisition – de l’industrie des fonds dans ce domaine, les innovations technologiques sont pléthores et demandent une constante adaptabilité. La clé de succès de cette industrie au Luxembourg a été l’innovation. Gardons-la pour ces opportunités afin de transformer l’industrie en un futur metavers des fonds d’investissement. 1 2 3

4

5

Coinmarketcap.com Chainalysis.com https://fr.statista.com/statistiques/665756/nombre-detenteursportefeuille-bitcoin-sur-blockchain-monde/ https://www.coindesk.com/business/2022/01/01/ grayscale-holds-43b-in-crypto-assets-under-management-downfrom-609-in-early-november/ Crypto Fund Research

EN SAVOIR PLUS LAURENT MAROCHINI Head of Innovation SGSS Luxembourg t. +352 47 93 11 1


Tendances

Le Fiar, nouvelle star de la Place luxembour­geoise Adoptée en 2016, la loi luxembourgeoise sur les Fiar (fonds d’investissement alternatifs réservés) porte la croissance de l’industrie financière. Moins coûteux et plus rapide à mettre en place que les SIF et les sicar, ce véhicule accompagne idéalement le développement du segment alternatif.

ÉVOLUTION DES FIAR En accumulé et net Source

RCSI et PwC

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1.400

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4 Février Juillet Janvier Juillet Janvier Juillet Février Juillet Janvier Juillet Janvier Juillet Janvier 2016 2016 2017 2017 2018 2018 2019 2019 2020 2020 2021 2021 2022

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

Immobilier, private equity, venture capital, fonds de dette ou d’infrastructure… les fonds alternatifs connaissent, depuis quelques années, un succès croissant. Cela est certes dû à une conjoncture économique favorable poussant les acteurs institutionnels à y investir massi­ vement – à commencer par un environnement de taux bas –, mais aussi à un cadre réglemen­ taire qui, au cours des dernières années, s’est considérablement étoffé. Et le principal ­élément de cet arsenal est le Fiar, acronyme de fonds d’investissement alternatif réservé. «Avant 2016 et l’adoption de la réglementation luxembourgeoise introduisant le Fiar, il n’existait pas de véhicule dédié aux fonds alternatifs dans leur ensemble, explique Gautier Despret, head of private debt chez IQ-EQ. Pour monter des fonds alternatifs, les acteurs détournaient le plus souvent le FIS – fonds d’investissement spécialisé – ou la sicar – société d’investissement en capital à risque – qui, comme son nom l’indique, est certes consacrée aux investissements alternatifs, mais uniquement en capital-risque.» Une régulation indirecte Toutefois, la sicar présente un problème majeur: elle est régulée. «La régulation n’est en soi pas un problème, mais elle allonge considérablement le temps de mise sur le marché, poursuit Gautier Despret. Avec le système luxembourgeois de préapprobation, les délais s’éternisent, et ce manque de rapidité ne permet pas de profiter de certaines opportunités qui exigent une réelle réactivité.» Le Fiar, quant à lui, n’est pas régulé… directement. « Ce véhicule n’est en effet pas soumis directement à une autorisation et une supervision de la CSSF, mais il est soumis indirectement à un contrôle par le biais de son gestionnaire, qui, dans ce cas, doit être un gestionnaire externe autorisé», précise Susanne Weismüller, senior legal adviser au sein de l’Alfi (Association of the Luxembourg Fund Industry). Cette caractéristique du Fiar, dont la créa­ tion était demandée de longue date par les acteurs du secteur, permet une mise en place très rapide de fonds alternatifs. «En sept jours, on peut créer un Fiar, relève ainsi Gautier Despret. D’un autre côté, le fait qu’il existe malgré tout un contrôle permet de rassurer le marché, de renforcer sa confiance dans ce véhicule. On peut dire qu’entre la flexibilité et la sécurité, le Fiar offre le meilleur des deux mondes. » Car une série d’exigences subsiste pour créer un Fiar, au-delà de la nécessité qu’il soit géré par un gestionnaire autorisé : l’administration centrale doit se trouver au Luxembourg, le fonds doit nommer un dépo­ sitaire et un réviseur situés eux aussi au GrandDuché, les actions et parts doivent être réservées à des investisseurs avertis, etc. Des avantages qui font mouche Cette réduction du délai de création du ­véhicule n’est pas le seul atout du Fiar. «Dans la mesure


où le fonds lui-même ne doit pas être approuvé directement par la CSSF, les coûts sont également réduits par rapport à un autre véhicule, indique Susanne Weismüller. Les Fiar peuvent par ailleurs être gérés et distribués sur une base transfrontalière, donc également en dehors du Luxembourg. En outre, le Fiar peut être constitué en fonds multicompartiments et avoir un capital variable. » Le Fiar peut donc être uti­ lisé pour faire fructifier des actifs alternatifs «classiques», comme le private equity, le v­ enture capital, le real estate, l’infrastructure ou la dette privée, mais il peut aussi s’appliquer à des placements plus « exotiques » : le bois, les bijoux, la peinture, les chevaux, les ­voitures, le vin, les matières premières, etc. Non content d’offrir ces avantages aux investisseurs, le Fiar évolue également régu­ lièrement pour être de plus en plus attractif. « Jusqu’à récemment, pour le Fiar, on ne pouvait établir les comptes annuels audités que sous LuxGAAP (Generally Accepted Accounting Principles) ou IFRS (International Financial Reporting Standards), sauf exceptions a ­ ccordées au cas par cas. Depuis, le législateur a ouvert le Fiar à une liste de standards internationaux, comme les US/Japanese/Canada/China GAAP. C’est évidemment une très bonne chose pour l’attractivité internationale du ­véhicule», ajoute Gautier Despret.

«Sans le Fiar, le Luxembourg, en tant que place financière, n’aurait peut-être pas connu un tel succès. En créant au bon moment ce nouvel outil, le Luxembourg a vu juste.»

UNE INDUSTRIE GOURMANDE EN RH

Comment faire mieux ? Si le succès du Fiar et son rôle dans la crois­ sance de la place financière au cours des der­ nières années sont indéniables, peut-on encore affiner les contours de ce véhicule pour le rendre plus attractif ? « Nous n’avons actuellement pas connaissance de problèmes majeurs concernant le Fiar, même si quelques aspects mériteraient d’être clarifiés. C’est par exemple le cas de la définition de ce qu’est un investisseur averti, qui bénéficierait d’une harmonisation au regard des autres concepts utilisés dans la législation européenne, notamment dans le contexte des fonds Eltif, EuVECA et EuSEF, explique Susanne Weismüller. Par ailleurs, le processus de constitution des Fiar pourrait être simplifié, dans la mesure où il y a actuellement une double formalité pour l’acte notarié. » Malgré la réduction de certains coûts, ­certains acteurs pointent par ailleurs ses frais

GAUTIER DESPRET Head of private debt IQ-EQ

Photo

IQ-EQ

«La popularité du Fiar a clairement contribué au succès de Luxembourg en tant que place financière, estime Susanne Weismüller. Grâce à ses caractéristiques, le Fiar constitue un complément utile à notre boîte à outils, cette dernière offrant par ailleurs un large éventail de possibilités répondant aux besoins des gestionnaires, tout autant que des investisseurs. Pour ce qui a trait aux fonds alternatifs, le Fiar se situe en quelque sorte à égale distance entre les véhicules non réglementés et les fonds réglementés tels que le FIS, la sicar et les OPC Un jalon dans le succès de la Place relevant de la partie II. » Ces différents atouts expliquent aisément le Comme souvent au cours des dernières succès remporté par le Fiar depuis sa création décennies, le Luxembourg a également été (voir graphique). Si les premiers temps ont un pionnier en mettant en place rapidement été difficiles, ce véhicule a rapidement décollé, ce véhicule. « Sans le Fiar, le Luxembourg, en pour atteindre les sommets. Selon les derniers tant que place financière, n’aurait peut-être chiffres disponibles, on dénombre aujourd’hui pas connu un tel succès. En créant au bon moment 1.686 Fiar au Luxembourg, soit presque ce nouvel outil, le Luxembourg a vu juste. Il deux fois plus qu’il y a seulement deux ans. suffit de constater le nombre de ‘petits frères’, aux noms parfois quasiment similaires, qui ont vu le jour en Europe depuis sa création », relève Gautier Despret.

Le développement des fonds alternatifs au Luxembourg accentue un problème qui n’est pas neuf : celui de la disponibilité des talents. Petit pays disposant de peu d’universités ou d’écoles supérieures, le Grand-Duché a un besoin grandissant en experts financiers, qu’il est contraint d’aller chercher en dehors de ses frontières. La complexité des fonds alternatifs, qui investissent dans des actifs peu liquides et variés, entraîne des besoins encore plus importants en ressources humaines que pour des fonds classiques. Avocats, tax advisors, agents de transfert, comptables, gestionnaires… ces profils, qu’on s’arrache sur le marché du travail luxembourgeois depuis un certain temps, sont indispensables pour gérer correctement ces fonds alternatifs. De quoi poser la question suivante : et si le principal défi de la Place luxembourgeoise n’était pas dans le perfectionnement de sa boîte à outils, mais bien dans la profondeur de son vivier de talents ?

de gestion toujours élevés. « Cela reste donc compliqué à mettre en place pour une petite structure, indique Gautier Despret. Par ­ailleurs, même si le Fiar a été une réponse salutaire aux besoins de nombreux acteurs, l’obligation de diversification qu’il implique peut poser problème dans certains cas. La seule façon d’y échapper est de créer un Fiar investissant uniquement dans du capital-risque. » Enfin, si le spectre des actifs alternatifs est bien couvert par le Fiar, le head of private debt d’IQ-EQ pointe d’autres vides dans l’arsenal luxem­ bourgeois. « On constate une demande importante pour un véhicule dédié au real estate, à l’image de ce qui se fait aux États-Unis via les Reit, ou même un véhicule dédié à la dette privée dans lequel on combinerait le principe d’amortized cost pour la valorisation des porte­ feuilles de debt, de fair value pour les equity kickers, et qui répondrait aussi aux exigences à venir suite à la refonte de la directive AIFM. De tels outils conjuguant les obligations réglementaires et les demandes du marché permettraient de séduire un nombre plus important encore d’investisseurs et d’asset managers.» Une révision de la loi Fiar pourrait peutêtre, dans quelques années, venir corriger certains de ces points de souffrance. Mais il faudra sans doute d’abord attendre la révision des lois sur les FIS et les sicar, ainsi que celle d’AIFMD (Alternative Investment Fund Managers Directive). « Eu égard à l’ensemble de ses caractéristiques, qui en font un véhicule attractif, nous pensons que le Fiar va continuer à se développer positivement à l’avenir. Il satisfait en effet parfaitement à des besoins de structuration pour certains investissements, et il peut être rapidement constitué», conclut Susanne Weismüller. C’est tout ce que l’on peut s­ ouhaiter à la Place luxembourgeoise.

Auteur Q. D.

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Domiciliation

IrlandeLuxembourg : de la compé­­tition à la collaboration ? Si le Luxembourg conserve sa première place en matière de domiciliation de fonds d’investissement en Europe, l’Irlande connaît une croissance constante de sa propre industrie. Certains acteurs évoquent désormais la nécessité de renforcer la collaboration entre ces Places rivales.

5.859,485 mrds €

Le montant des actifs sous gestion dans des fonds d’investissement au Luxembourg en décembre 2021.

4.067,836 mrds €

Le montant des actifs sous gestion dans des fonds d’investissement en Irlande en décembre 2021.

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FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

À chaque bilan annuel établi sur base des chiffres de la CSSF (Commission de surveil­ lance du secteur financier), les médias et les pouvoirs publics luxembourgeois se félicitent de la bonne forme du secteur des fonds au Luxembourg. Et à raison. Depuis la dernière crise financière en 2008, la Place vole de record en record. Alors qu’elle comptabilisait 1.530 milliards d’euros sous gestion en février 2009, l’industrie luxembourgeoise des fonds a passé la barre des 2.000 milliards en juin 2010. En septembre 2014, c’est celle des 3.000 milliards d’euros sous gestion qui a été dépassée. Avec une régularité remarquable, l’industrie a ensuite battu de nouveaux records en septembre 2017 (4.037 milliards d’euros d’actifs sous gestion) puis en janvier 2021 (5.050 milliards d’euros). Le point le plus élevé de cette ascension quasiment constante a été atteint en décembre dernier, avec un record absolu de 5.859 mil­ liards d’euros d’actifs sous gestion au Luxembourg. Cela signifie donc que l’argent placé dans des fonds d’investissement domi­ ciliés au Luxembourg a plus que triplé en un peu plus de 10 ans. Il a doublé entre 2014 et aujourd’hui. Comment ne pas se flatter de cet insolent succès ? La fulgurante ascension irlandaise Rétifs à tout excès de confiance, les représen­ tants du secteur financier luxembourgeois ainsi que les responsables politiques du pays n’ont jamais eu l’outrecuidance de se reposer sur leurs lauriers. En témoignent les efforts constants réalisés pour renforcer l’attractivité du Luxembourg, notamment à travers la créa­ tion de nouveaux outils comme le Fiar (Fonds d’investissement alternatif réservé), qui a boosté la croissance du secteur des fonds alternatifs. Et ils ont bien fait. Car, tapis dans une ombre de moins en moins épaisse, les concurrents de la place financière luxembour­ geoise n’ont jamais cessé de se développer. Parmi ces acteurs aux dents longues, l’Irlande est certainement celui dont les crocs sont les plus acérés. Selon les derniers chiffres de l’European Fund and Asset Management Association (Efama), les actifs nets sous gestion atteignent désormais, en Irlande, le chiffre considérable de 4.067 milliards d’euros. Dans ce total, les fonds Ucits se taillent la part du lion (3.095 mil­ liards d’euros). Mais les actifs alternatifs sont, ici aussi, en forte croissance : ils totalisent 972,1 milliards d’euros à la fin 2021, alors qu’ils ne rassemblaient que 796 milliards d’euros l’an dernier. Ce chiffre est désormais plus élevé que celui du Luxembourg (935 milliards d’euros d’actifs alternatifs). La croissance annuelle des actifs alternatifs en Irlande avait déjà été plus importante que celle du Luxembourg entre le 4e trimestre 2018 et l’an­ née 2020 : + 14,2 %, alors qu’elle n’était « que »


de 7,6% au Luxembourg. Par ailleurs, toujours selon les chiffres de l’Efama, on compte également plus de sociétés de gestion en Irlande (417 en 2020) qu’au Luxembourg (268). L’industrie des fonds irlandaise est donc en plein développement, et maintenir la première place européenne du Luxembourg en matière de domiciliation de fonds sera donc un défi permanent au cours des prochaines années… Un jumeau du modèle luxembourgeois Cette croissance de l’activité en Irlande pour­ rait ne pas être inquiétante pour le Luxembourg si elle ne reposait pas sur une spécialité iden­ tique à celle développée sur la Place luxem­ b o u r ge o i s e , à s avo i r l a d i s t r i b u t i o n trans­frontalière de fonds d’investissement. En d’autres mots, c’est en chassant sur le même territoire que Luxembourg que Dublin a commencé à tutoyer les sommets. « Au Luxembourg, l’industrie des fonds a commencé à se développer à la fin des années 80, quand a été mise en œuvre, à l’échelle nationale, la directive européenne sur les Ucits, explique Nicolas Mackel, CEO de Luxembourg for Finance. Rapidement, des acteurs américains, suisses, anglais ou venant d’autres régions du monde ont commencé à venir à Luxembourg pour y créer des fonds destinés à être distribués sur plusieurs marchés européens. L’Irlande a compris, un peu plus tard, que c’était là un business particulièrement intéressant. Et le pays nous a tout simplement imité. » En Irlande, ce serait ainsi un jumeau de l’écosystème luxembourgeois qui aurait été mis en place. «L’expertise multijuridictionnelle en moins », assure Nicolas Mackel. Il n’em­ pêche que les capacités de mimétisme de l’industrie irlandaise s’avèrent très poussées, jusque dans le choix des mots. «Il y a trois ans, l’Irlande a sorti une nouvelle stratégie pour guider le développement de son industrie financière. Savez-vous comment ils l’ont nommée ? Ireland for Finance, relève le CEO de Luxembourg for Finance. Autre exemple: alors que le Luxembourg fait son nation branding à travers le slogan ‘Let’s Make it Happen’, l’Irlande vient de sortir ‘We Make it Happen’. Cela m’amuse beaucoup, mais ça m’irrite aussi un petit peu. C’est toutefois un bon signe. Comme le dit l’expression : ‘imitation is the sincerest form of flattery’.» Fiscalité et disponibilité des talents Il n’empêche qu’au-delà de son habilité à imi­ ter le Luxembourg, l’Irlande dispose aussi de réels atouts, qui ne doivent rien à la Place luxembourgeoise. Son succès repose ainsi également sur sa proximité culturelle avec les États-Unis. Parlant la même langue et parta­ geant un certain nombre de traditions, Américains et Irlandais s’entendent comme larrons en foire. Lorsque Londres a quitté

ARGUMENTS DE POIDS L’Irlande attire les investisseurs grâce à plusieurs atouts majeurs. Mais le Luxembourg ne manque pas, lui non plus, d’arguments solides. 1 Une expertise multijuridictionnelle unique Au Luxembourg, on pratique depuis des années la distribution transfrontalière de fonds. Une expertise unique s’est donc construite dans le pays (gestionnaires, avocats, etc.), en même temps que se créait une gamme d’outils et de véhicules variée. Pour les investisseurs soucieux de lancer ce type de fonds en Europe, en toute conformité, le Luxembourg est depuis longtemps une évidence. 2 Un environnement multiculturel Là où l’Irlande offre un environnement principalement anglo-saxon, le Luxembourg, grâce à sa position centrale au cœur de l’Europe, est un pays fondamentalement multiculturel. Dans l’industrie des fonds luxembourgeoise, on peut donc traiter avec des clients du monde entier dans leur langue maternelle. Un atout non négligeable quand on se positionne comme un hub européen pour les fonds d’investissement. 3 Une grande stabilité Dans les périodes de trouble, le Luxembourg reste toujours un partenaire solide. Cela s’est vu lors de la crise financière de 2008. Stable économi­ quement, le Grand-Duché l’est aussi au niveau politique. Depuis de nombreuses années, on note en effet une certaine continuité dans la façon de gouverner le pays. Pour les investisseurs, c’est la garantie de ne pas voir la législation (fiscale notamment) modifiée constamment.

l’Europe, il a donc paru logique, pour de nom­ breux acteurs américains, de se relocaliser en Irlande. «Cela dit, l’Irlande existait déjà avant le Brexit, estime Nicolas Mackel. La plus grande partie des acteurs présents sur le territoire irlandais l’étaient déjà avant que le Royaume-Uni quitte l’Union européenne, mais cet événement a confirmé la position importante de l’Irlande dans l’industrie européenne des fonds… comme celle du Luxembourg. » Parmi les autres attraits de la Place irlan­ daise, il faut évidemment relever un régime fiscal plus avantageux qu’au Luxembourg. L’impôt sur les sociétés ne s’élève en effet qu’à 12,5 %, contre 17 % au Luxembourg, pour les sociétés dont le revenu imposable dépasse les 200.000 euros. Pour des gestionnaires dont les marges s’érodent, notamment en rai­ son de l’inflation réglementaire, ces quelques pourcents font une différence importante… En outre, l’Irlande dispose d’un réservoir de talents important et relativement jeune, là où le Luxembourg peine de plus en plus à recru­ ter et n’est pas capable de produire lui-même le nombre de professionnels dont il a besoin pour faire fonctionner son industrie. « En Irlande, des accords existent entre certaines universités régionales et d’importants acteurs de l’industrie pour s’assurer d’obtenir, chaque année, un nombre important de nouveaux diplômés. La création d’emplois est également subventionnée dans des régions plus éloignées de Dublin, de nature rurale. Cela explique le développement de plusieurs centres financiers dans le pays », détaille Nicolas Mackel. Si l’Irlande peut compter sur une maind’œuvre locale abondante, elle attire égale­ ment des profils étrangers, et ce pour une bonne raison: elle dispose d’une grande répu­ tation à l’international. « Tout le monde a en tête une image de l’Irlande, ses campagnes verdoyantes, son caractère festif… Le nation branding du Luxembourg est loin d’être au niveau. Personne, à l’étranger, ne s’imagine exactement ce qu’est le Grand-Duché, et c’est certainement un point à travailler », affirme le CEO de Luxembourg for Finance. Voilà qui donne un aperçu du sérieux de ce candidat au titre de première Place pour la domiciliation de fonds d’investissement en Europe… Expertise et agilité luxembourgeoises Si la concurrence est donc de qualité, le Luxembourg n’est pas arrivé là où il en est par hasard. La Place regorge d’atouts, qui ont séduit un nombre croissant d’acteurs tout au long des dernières années. C’est en premier lieu son indiscutable expertise multijuridic­ tionnelle qu’il faut pointer. « Si on souhaite distribuer des fonds sur plusieurs marchés et le faire de façon conforme, le Luxembourg est l’endroit idéal. C’est là un fait que plus personne n’ignore», poursuit Nicolas Mackel. MAI 2022 FONDS D′INVESTISSEMENT

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Domiciliation

«En ce qui concerne la difficulté de recruter des collaborateurs, je suis pour ma part plus positive. Au Luxembourg, je constate que les jeunes travailleurs sont bien mieux formés au secteur des fonds.» CAROLINE PIMPAUD Partner DLA Piper

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FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

effectifs en place. Le défi de la formation et de l’upscaling est donc aussi bien connu en Irlande.» Cela ne signifie pas que cette croissance se fera au détriment du Luxembourg. « Il y a clairement du business pour tout le monde, notamment en raison des importantes liquidités accumulées durant la pandémie, ajoute Caroline Pimpaud. Dans ce cadre, le Luxembourg dispose encore de nombreux atouts : le service offert dans le pays, longtemps décrié mais qui a su devenir extrêmement professionnel et qualitatif, la grande diversité des outils juridiques et réglementaires, le multilinguisme, sa position centrale en Europe… En ce qui concerne la difficulté de recruter des collaborateurs, je suis pour ma part plus positive. Au Luxembourg, je constate que les jeunes travailleurs sont bien mieux formés au secteur des fonds. Dès leur arrivée, ils savent de quoi on parle et sont vraiment motivés à l’idée de travailler dans ce domaine. C’est pour moi un signe très positif pour l’industrie luxembourgeoise. » Alors, compétition ou collaboration ? Il y a peut-être un dernier mot qui résumerait mieux la relation entre l’Irlande et le Luxem­ bourg, en lui apportant de surcroît une touche plus positive : émulation. Car en échangeant, en s’observant et en souhaitant toujours faire mieux, les deux places financières devraient, à terme, bénéficier toutes deux de ces efforts répétés pour gravir la première marche du podium des Places européennes dédiées aux fonds d’investissement.

DLA Piper

clientèle, explique Caroline Pimpaud, partner au sein de DLA Piper Luxembourg. Notre objectif est en effet de pouvoir proposer la meilleure structure et le meilleur domicile en fonction des besoins particuliers de chaque client. » Encore très récemment, le Luxembourg conservait, par exemple, une meilleure attrac­ tivité par rapport aux fonds alternatifs. «L’introduction, en 2020, de l’Investment Limited Partnership Bill en Irlande devrait toutefois permettre aux acteurs de disposer d’une structure pour les fonds de private equity, real estate, Le meilleur des deux Places venture capital, etc., précise Aongus McCarthy, Les acteurs du secteur, eux, n’ont pas attendu legal director au sein de DLA Piper Irlande. que les deux places financières commencent Pour l’Irlande, cette nouveauté permet de gagner à échanger. Ils sont déjà nombreux à avoir du terrain dans le secteur des actifs alternadéployé une activité tant en Irlande qu’au tifs. » La flexibilité, la stabilité et la solidité Luxembourg. Parmi eux, on compte notam­ du cadre légal luxembourgeois restent toute­ ment Ocorian. Pour son regional head of Europe fois des atouts majeurs pour tous les acteurs et managing director Luxembourg, Christophe de l’industrie financière. « Avant de décider Gaul, ce choix fait totalement sens. «De nom- où domicilier un fonds, on travaille donc énorbreux clients souhaitent créer des fonds en mément ensemble, entre le Luxembourg et Irlande. Pour une société comme la nôtre, on l’Irlande, pour comparer les deux juridictions ne peut pas nier que le coût de l’emploi est aussi sous tous les angles et choisir l’endroit qui bien moins élevé. Par ailleurs, la réactivité des conviendra le mieux aux attentes du client », banques irlandaises, lorsqu’il s’agit d’ouvrir ajoute la partner de DLA Piper Luxembourg. un compte, est parfois plus importante que celle de leurs homologues luxembourgeoises, ce qui Un effet boule de neige peut faire pencher la balance du côté irlandais Forte de ses nouveaux outils légaux, l’Irlande ne compte en tout cas pas mettre un frein à dans certains cas de figure. » Au lieu d’une compétition entre les deux ses ambitions. «Le Luxembourg dispose d’une Places, ces acteurs soulignent plutôt une grande grande réputation en matière de fonds, notamcomplémentarité. Au-delà des gestionnaires ment en ce qui concerne les actifs alternatifs, ou administrateurs de fonds, ce sont aussi les mais l’Irlande peut offrir de nombreuses opporcabinets d’avocats, indispensables supports tunités à tous les acteurs qui ne se seraient pas de l’industrie de fonds, qui développent leur encore installés au Grand-Duché, poursuit activité de part et d’autre du Royaume-Uni. Aongus McCarthy. L’objectif du pays est de Le cabinet international DLA Piper fait par­ faire rentrer un nombre important de nouveaux tie de ceux qui ont choisi de s’établir tant dans acteurs en Irlande et de créer un effet boule de un pays que dans l’autre. « Nous avons ouvert neige bénéfique pour le business. Les projections un bureau en Irlande pour disposer d’un plus de croissance sont très intéressantes, notamgrand nombre de solutions à offrir à notre ment avec une augmentation considérable des

Auteur Q.D.

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Les atouts traditionnels du Luxembourg sont également toujours aussi séduisants pour les structures cherchant à créer des fonds en Europe: la stabilité économique et politique, le multilinguisme généralisé qu’on connaît dans le pays, et la position centrale du GrandDuché en Europe, là où l’Irlande est située à la périphérie du continent. « Le Luxembourg s’est également engagé au bon moment dans des tendances porteuses, comme la finance durable. L’Irlande est encore à la traîne à ce niveau. Nous avons par ailleurs considérablement développé notre activité avec la Chine. Et puis, même si nous sommes tous les deux membres de l’Union européenne et donc tenus d’implémenter les mêmes règles, nous avons toujours fait preuve d’une grande agilité, qui doit continuer à nous différencier à l’avenir», ajoute Nicolas Mackel, qui estime que c’est au niveau du service rendu que la Place luxembourgeoise offre une réelle plus-value aux acteurs financiers. Toutefois, au-delà de l’inévitable compé­ tition qui existe entre deux places financières aux activités et aux résultats comparables, le CEO de Luxembourg for Finance insiste sur la nécessité d’améliorer la collaboration entre les deux pays. « Il est évident que nous avons des intérêts communs, explique-t-il. Pour moi, il est essentiel que nous commencions à nous parler un peu plus, à échanger plus régulièrement entre responsables irlandais et luxembourgeois. Ce n’est pas le cas pour l’instant. Or, nous avons tous à y gagner. »


PUBLIREPORTAGE


Cryptomonnaie

En décembre, la CSSF a clarifié sa position sur les crypto. À l’échelon européen, la réglementation autour des actifs virtuels se précise. Désormais, il appartient aux acteurs du marché de se positionner, pour tirer profit des possibilités nouvelles qu’offrent cette nouvelle génération d’actifs et la technologie qui la sous-tend. 58

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

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Se préparer à la révolu­tion crypto

Priorité stratégique Cet intérêt grandissant a été confirmé à l’occa­ sion d’une étude sur cette thématique com­ mandée par la Luxembourg House of Financial Technology, menée au 4e trimestre par le cabinet PwC avec le soutien actif de l’Alfi. Les résultats ont été dévoilés en février dernier. 123 structures, membres de l’écosystème des fonds luxembourgeois, y ont pris part. Il en ressort que 18 % des répondants con­ sidèrent déjà les crypto-actifs comme une priorité stratégique, tandis que 43 % s’at­ tendent à ce qu’ils deviennent une priorité stratégique d’ici deux ans. 88 % s’attendent à ce que les crypto-actifs aient un certain im­pact sur leur activité à l’avenir. De manière plus générale, 9 répondants sur 10 souhaitent que le Luxem­bourg adopte une position plus active à ce sujet. Ces acteurs n’ont pas eu à attendre les résultats de l’étude pour être entendus. À la fin de l’année dernière, en effet, la CSSF clari­ fiait sa position en la matière, publiant ses lignes directrices en matière d’actifs virtuels. « Les actifs virtuels ont pris une multitude de formes différentes, ont connu une croissance exponentielle ces dernières années et, en tant que nouvelle catégorie d’actifs, ont suscité un grand intérêt auprès des professionnels ainsi que des investisseurs », reconnaissait alors le régulateur. Affirmant adopter une approche ouverte basée sur les risques vis-à-vis de ces

Marielle Voisin

L’avenir de l’industrie des fonds passera-t-il par la crypto ? Les actifs digitaux ou virtuels et la technologie qui leur est associée, la blockchain, sont aujourd’hui considérés avec attention par la plupart des acteurs de l’éco­ système. « L’intérêt grandissant des inves­tisseurs pour ces actifs a changé la donne », com­mente Nestor Verrier, directeur général de Swissquote, l’une des rares plateformes luxembourgeoises et seule banque au Luxem­ bourg autorisée à proposer un service d’échange de cryptomonnaie. « Jusqu’à récemment, les acteurs de l’industrie des fonds n’avaient pas la possibilité d’intégrer ces actifs au cœur de leur portefeuille. Du point de vue du régulateur, ces investissements se font en dehors de tout cadre, à travers des sociétés ou des juridictions qui, pour la plupart, ne sont pas régulées. » Malgré cela, un marché crypto a émergé et gagne en importance, ce qui, du point de vue du régulateur mais aussi des acteurs r­ égulés, soulève de nombreuses questions et des inquié­ tudes. Dans le monde de l’investissement, ce sont le plus souvent les institutionnels qui explorent de nouveaux segments de marché, bien avant que les particuliers n’y accèdent. « Avec la crypto, c’est l’inverse qui s’est passé. Le développement de cette classe d’actifs est porté par les particuliers et, désormais, les insti­tutionnels souhaitent pouvoir l’intégrer », ­poursuit Nestor Verrier.


du cabinet Deloitte. Il y a une réelle demande du secteur financier et même des acteurs de la crypto pour une régulation paneuropéenne, susceptible de générer la confiance nécessaire au développement du marché. » La réglementation, à l’échelon européen, a pour objet de déterminer comment les acteurs de la finance peuvent appréhender cette nouvelle génération d’actifs. Elle éta­ blit aussi une définition commune de ce que sont ces actifs, leurs objets. Ce chantier régle­ mentaire ne manque pas de susciter le débat, comme il l’a fait notamment en hypothéquant l’avenir du bitcoin en Europe. Au-delà, cepen­ Définir un cadre commun dant, il constitue une bonne nouvelle pour Au cœur d’une FAQ, le régulateur ouvre notam­ l’ensemble des investisseurs et une réelle ment la possibilité, pour des fonds alternatifs, opportunité pour l’industrie des fonds. Cette d’investir dans des actifs virtuels précisant évolution permet d’élargir l’univers d’inves­ les conditions à respecter. « C’est une bonne tissement, de considérer de nouvelles possi­ ­n ouvelle, assure Nasir Zubairi, CEO de la bilités de diversification. Luxembourg House of Financial Technology. Elle vient répondre aux attentes du marché de Nouvelles possibilités manière pragmatique. Limiter l’accès au niveau À l’heure actuelle, les fonds Ucits ne peuvent de l’inves­tissement alternatif a du sens compte pas travailler avec des actifs virtuels. Pour tenu de la nature et de la volatilité de ces actifs.» Nestor Verrier, cela devrait sans doute évo­ Si certains ont pu reprocher au régulateur luer dans le futur. « C’est inévitable si ces véhide ne pas faire preuve de davantage de proac­ cules, sur lesquels s’est construite l’industrie tivité vis-à-vis du développement de l’activité des fonds luxembourgeoise, veulent rester comd’investissement dans les cryptos au départ pétitifs, explique-t-il. On peut imaginer une du Luxembourg, le dirigeant de la Lhoft tem­ ouverture à ce niveau, avec certaines limitapère : « Nous sommes ici face à des actifs qui, tions, comme cela s’est fait récemment avec la par nature, sont sans frontière. Cela n’a pas clarification de la CSSF concernant l’éligibilité de sens qu’un régulateur, seul, définisse ses de certaines Spac, celles-ci ne pouvant pas propres règles. La CSSF s’inscrit dans une représenter plus de 10 % de la valeur liquidaapproche internationale de la régulation de ces tive d’un fond Ucits. » valeurs, qui se dessine notamment à l’échelon L’ouverture aux cryptos permet d’envisager européen avec l’adoption récente de la Markets de nouvelles possibilités bien au-delà de la simple création de fonds intégrant les crypto­ in Crypto-Assets Regulation. » Les autorités européennes, en outre, monnaies. «Cela conduit les acteurs à envisager semblent bien décidées à encadrer l’investis­ de nouvelles offres, à proposer de nouveaux prosement crypto. C’est un enjeu essentiel. «Sans duits, explique Thibault Chollet, partner, régulation, c’est le far west, avec d’importants Technology Transformation, au sein de Deloitte risques de dérives possibles. Réguler à l’échelon Luxembourg. La tokénisation, par exemple, national, d’autre part, ne facilite pas l’émer- permet d’améliorer l’accessibilité à certains types gence d’un cadre homogène et est de nature à de produits. Le déploiement de la crypto, dans créer un marché fragmenté, explique Benoît son ensemble, doit permettre de réduire les coûts Sauvage, director Regulatory Watch au sein opérationnels associés à la gestion des actifs,

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Romain Gamba

évolutions, le régulateur a souhaité répondre aux questions des entités régulées et des asso­ ciations professionnelles sur les opportunités et les possibilités concrètes de s’engager dans des activités impliquant des actifs virtuels. «Beaucoup de ces questions concernent notamment les investissements dans des actifs virtuels par des fonds d’investissement, les investissements directs (par opposition aux investissements indirects qui utilisent des instruments dérivés) dans des actifs virtuels ou les missions du dépositaire en lien avec les actifs virtuels », poursuit la CSSF.

« La blockchain permet d’envisager de supprimer la nécessité de tiers tout en garantissant la confiance dans les opérations menées.» NESTOR VERRIER Directeur général Swissquote

TOKÉNISER ? De quoi parle-t-on lorsqu’on évoque la tokénisation ? Il s’agit d’un processus visant la création d’une représentation digitale d’un actif, c’est-à-dire un token, ou jeton. C’est un processus similaire à la titrisation d’un actif, à la différence que cet actif virtuel (ou sa représentation) est enregistré au niveau d’un registre distribué. On parle de technologie des registres distribués (DLT), ou plus communément de blockchain. La DLT garantit une plus grande transparence à l’ensemble des parties concernées par la détention ou l’échange d’actifs. En effet, les transactions doivent être validées à travers un algorithme complexe avant d’être enregistrées, partout, de la même manière, auprès de l’ensemble des participants à un même réseau distribué. Dès lors, il est vain d’essayer d’altérer le registre en un point. L’information est accessible et vérifiable à tout moment. Chaque transaction, une fois validée, ne peut ensuite plus être modifiée. Réputé inaltérable, ce registre est gage de sécurité.

à leur suivi. Et, de ce fait, elle doit permettre de réduire les montants minimums nécessaires pour pouvoir investir dans certains domaines.» La tokénisation désigne l’inscription d’un actif et de ses droits sur un token, autrement dit un jeton électronique, afin d’en permettre la gestion et l’échange en pair-à-pair sur une blockchain, de façon instantanée et sécurisée. Le recours à cette technologie, avec son fonc­ tionnement décentralisé, change toute la donne. Comment ? À l’industrie d’engager le changement L’exemple le plus souvent donné a trait à l’inves­tissement immobilier. Un immeuble peut être tokénisé. L’actif peut être subdivisé en une multitude de jetons, chacun détermi­ nant les droits de l’investisseur qui le détient à son égard. Grâce à la blockchain, il est plus facile d’acquérir et d’échanger de pair à pair ces jetons, comme pour une cryptomonnaie, mais aussi d’assurer le suivi des opérations liées à la valorisation de l’actif et des inves­ tisseurs. On peut, dès lors, faire en sorte que ces jetons puissent facilement s’échanger sur un marché secondaire. «Il y a tout un ensemble d’investissements, au niveau de l’industrie des fonds, qui pourraient bénéficier de la tokénisation », poursuit Benoît Sauvage. La plupart des actifs peuvent en effet être tokénisés et être gérés au départ de la blockchain. Cette transformation, toutefois, soulève beaucoup de questions. «Il faut, par exemple, se d ­ emander comment peuvent être appréhendées les ­exigences en matière d’AML / KYC qui incombent au gestionnaire de fonds si les jetons peuvent ­s’échanger plus librement entre personnes », commente Thibault Chollet. Désormais, le régulateur ayant posé un cadre – même si celui-ci est appelé à évoluer –, c’est aux acteurs de l’industrie d’investir le sujet.

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Cryptomonnaie

«Tout ne se joue pas au niveau de la régulation. Aujourd’hui, les acteurs de l’industrie luxembourgeoise, s’ils veulent rester à la pointe, doivent s’engager, devenir des acteurs du changement, précise Nasir Zubairi. Dès à présent, les cabinets d’avocats, les conseillers juridiques, avec les acteurs de l’ensemble de l’écosystème, ont une nouvelle opportunité de démontrer que le Luxembourg est en capacité de tirer le meilleur parti d’une évolution à la fois réglementaire et technologique. Je pense que le pays, à travers les diverses initiatives prises jusqu’alors, a développé un niveau de connaissance élevé autour de ces enjeux et est bien positionné pour aborder cette évolution. » Soutenir l’innovation La révolution qui s’amorce ne concerne pas uniquement l’offre de produits. « Un autre enjeu, pour le régulateur, en adoptant une approche plus ouverte, est de favoriser l’émergence d’une technologie – la blockchain – qui doit permettre de réduire les coûts opérationnels, favoriser une meilleure interopérabilité entre les acteurs, garantir une transparence accrue », explique Nestor Verrier. À l’heure actuelle, l’industrie des fonds s’appuie sur un vaste écosystème d’acteurs, chacun menant des fonctions et devant a ­ ssumer des responsabilités bien précises pour ­garantir son bon fonctionnement. « La blockchain ­permet d’envisager de supprimer la nécessité de tiers tout en garantissant la confiance dans les opérations menées, assure Nestor Verrier. De cette manière, on peut gagner du temps et réduire les coûts. » Transformation progressive Pour l’écosystème luxembourgeois, les possi­ bilités qu’offre la blockchain pourraient redes­ siner en profondeur le paysage. Luxembourg étant souvent considéré comme un large back-­ office de l’industrie des fonds, comment les acteurs locaux doivent-ils appréhender cette technologie qui permet une automatisation avancée de la plupart des fonctions et opéra­ tions liées à la gestion des fonds? «La blockchain est un réel game changer, reconnaît Nasir Zubairi. Toutefois, si elle doit permettre de considérablement réduire les coûts opérationnels, sa mise en œuvre implique des investissements conséquents. Pour être effective, la technologie doit être mise en œuvre à l’échelle d’un écosystème. Dans la mesure où son principal avantage est de faciliter les échanges, elle ne concerne pas qu’une seule personne. » Autrement dit, la révolution ne sera pas radi­ cale. De nombreuses considérations pratiques et légales doivent encore être appréhendées et clarifiées. D’autre part, les infrastructures existantes ne vont pas cesser de fonctionner du jour au lendemain. Si de nouvelles perspectives se dessinent pour l’ensemble de l’industrie, elle devrait 60

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PETIT LEXIQUE « CRYPTO » La crypto est un univers nouveau pour beaucoup. Voici quelques éléments qui doivent vous aider à en appréhender le jargon. 1 Blockchain Technologie permettant de stocker et d’échanger de la valeur sur internet sans intermédiaire centralisé. Une blockchain désigne une base de données sécurisée et décentralisée, répliquée sur un très grand nombre de serveurs, et contenant un ensemble de transactions dont chacun peut vérifier la validité. Une blockchain peut donc être assimilée à un grand livre comptable transparent, pseudonyme et infalsifiable. 2 Cryptomonnaie Monnaie électronique, échangeable en peer-to-peer (autrement dit, sans passer par des intermédiaires ou tiers de confiance). Elle s’appuie sur la technologie blockchain, en se basant sur des principes crypto­ graphiques et des ­mécanismes ­d’incitation économique pour la validation des transactions et la génération de la monnaie elle-même. Un réseau d’acteurs, disposant d’une puissance informatique, a pour mission de valider chaque transaction et de l’enregistrer dans la blockchain en processant un algorithme complexe (c’est ce que l’on appelle le minage). 3 Token Actif numérique, émis et échangeable sur une blockchain, et possédant les caractéristiques d’une cryptomonnaie : infalsifiabilité, unicité, enregistrement des échanges dans un registre immuable, sécurité des échanges, etc. Un token a la particularité d’être transférable, sans pouvoir être dupliqué, entre deux parties sur internet, sans nécessiter l’accord d’un tiers. 4 ICO (« initial coin offering ») Méthode de levée de fonds fonctionnant via l’émission d’actifs numériques, appelés tokens, échangeables contre des cryptomonnaies durant la phase de démarrage d’un projet.

aborder cette transformation de manière incrémentale, au départ de nouveaux pro­ duits. «Il n’y a pas d’urgence particulière à être le premier à la déployer, assure Nasir Zubairi. Londres ou Paris peuvent adopter une plateforme blockchain avant Luxembourg, ces Places ne possèdent pas l’expertise en gestion des fonds dont on dispose ici. Cependant, il y a un réel intérêt à pouvoir profiter des avantages de la technologie, pour renforcer notre compétitivité à long terme. Il faut donc, dès à présent, se préparer, développer des compétences, multiplier les initiatives, créer des fondations robustes. Il faut gagner en maturité pour pouvoir faire le pas au moment le plus propice. » Bâtir sur l’expertise luxembourgeoise Thibault Chollet abonde dans ce sens. «La Place luxembourgeoise a des compétences poussées sur la gestion de fonds. Celles-ci sont pertinentes, que l’on parle de titres ou d’actifs tokénisés, explique-t-il. On a une bonne compréhension de l’ensemble de la chaîne de valeur, nous permettant de définir ce qu’il convient de mettre en place pour avoir une plateforme d’échange ­s’appuyant sur la blockchain qui soit efficiente et prenne en compte tous les aspects de la chaîne de valeur, notamment opérationnels et réglementaires.» Le marché, conscient des enjeux, doit donc porter le changement. Au niveau national et des associations sectorielles, les initiatives se sont multipliées ces dernières années autour de la technologie blockchain. «Il est urgent que les acteurs qui ne se sont pas encore posé la question se demandent quel sera leur métier dans cinq ans, dans un contexte où la technologie des registres distribués (l’autre petit nom de la blockchain, ndlr) se déploiera, explique Benoît Sauvage. C’est le moment de positionner sa stratégie, ou du moins d’engager une réflexion sérieuse, et ce en amont de l’entrée en application des textes évoqués.» Par exemple, Swissquote espère obtenir très prochainement l’autorisation de pouvoir agir en tant que dépositaire pour des fonds investissant dans ces actifs virtuels. «Les rôles évoluent. Il y a des opportunités qu’il faut pouvoir saisir, avec la volonté de rester compétitif au cœur d’un monde appelé à changer, précise Nestor Verrier. Dès à présent, l’ensemble des acteurs, des gestionnaires d’actifs aux sociétés de domiciliation, en passant par la banque dépositaire, les administrateurs de fonds, les avocats ou les fiscalistes, doit se positionner, créer des projets, les soumettre à la CSSF. C’est la clé pour permettre l’émergence d’un nouveau marché. »

Auteur S. L.


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Why is bitcoin mining environmentally friendly? At STOKR, we are committed to deconstructing myths around bitcoin's negative environmental impact and stating the facts.

Crédits

STOKR

Did you know that Bitcoin consumes 650 times less CO2 than the banking system itself? The bitcoin network consumes energy because it is intrinsically linked to how the transaction verification works, but it does not waste it. Bitcoin consumes around 120 Terawatthour (TWh), which is comparable to 0.5% of the world’s grid electricity, representing less than 0.1% of human energy production. Did you know that 76% of miners use renewable energy sources? The Bitcoin Mining Council estimated that the "global mining industry's sustainable electricity mix has grown to 58,5% in Q4 2021". The Bitcoin mining industry is using increasingly more renewable energy because miners are incentivised to go where power is the cheapest. Bitcoin miners are the perfect candidate to develop a carbon-neutral grid as they offer “highly flexible and easily interruptible load, provide payout in a globally liquid cryptocurrency, and are completely location agnostic, requiring only an internet connection.”

Did you know that STOKR teamed up with Blockstream to finance sustainable mining? Last April 2021, STOKR listed Blockstream Mining Note (BMN), and closed successfully 8 tranches totalling to over $44 million as of February 2022. Following the Bitcoin conference in Miami in April 2022, Blockstream, Tesla and Block announced a collaboration to mine bitcoin off solar power in Texas, aiming to be a proof of concept for 100% renewable energy bitcoin mining at scale. At STOKR, we believe that bitcoin mining can fund zero-emission power infrastructure and build economic growth for the future. We all recognise the value of burning thousands of tons of fuel to send rockets to Mars. So why do we have a problem using energy to secure and develop a decentralised global financial system? Flash the QR code. Discover on STOKR’s website a series of posts and investment opportunities in Bitcoin Mining.

STOKR Chitralada Pensuk Head of Marketing STOKR chitralada@stokr.io


Tendance numérique

NFT… Qu’est-ce que c’est ? Dans l’univers des crypto-actifs, le concept de NFT entre 150 et 200 signes suscite un intérêt croissant. Mais de quoi parle-t-onChapo ? Et pourquoi les investisseurs devraient-ils s’y intéresser ? Auteur S.L.

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QUE VEUT DIRE NFT ?

NFT est l’acronyme de non-fungible token, traduit en français par « jeton non fongible ». Un token, ou un jeton, est un actif numérique émis par une blockchain. Un bitcoin, par exemple, correspond à un jeton. Un NFT se distingue d’un jeton appartenant à une cryptomonnaie dans la mesure où il est unique. Il peut y avoir plusieurs bitcoins, de valeur équivalente. Un NFT sera unique, non reproductible. 2

POURQUOI A-T-ON RECOURS AUX NFT ?

La valeur d’une œuvre d’art dans le monde réel, comme une peinture ou une sculpture, tient notamment à son caractère unique. Lorsque l’on parle d’une œuvre numérique, par contre, les fichiers peuvent être facilement et indéfiniment dupliqués. Avec les NFT, l’œuvre originale peut être associée à un certificat numérique de propriété, garantissant son authenticité, lui conférant toute sa valeur. 3

LA BLOCKCHAIN, GARANTE DE L’AUTHENTICITÉ

Comme pour les cryptomonnaies, la blockchain joue le rôle de registre dans lequel est indiqué qui possède quoi. Ce registre présente l’avantage d’être géré et contrôlé de manière décentralisée, selon un modèle qui empêche de falsifier les enregistrements. Une fois l’attribution de l’œuvre enregistrée, personne d’autre n’est en mesure d’en revendiquer la propriété. Au départ de la blockchain, évidemment, des NFT peuvent s’échanger. Mais ils ne peuvent avoir qu’un seul propriétaire. 4

QUELLE EST LA VALEUR D’UN NFT ?

QUE REPRÉSENTE LE MARCHÉ DES NFT ?

Le volume des ventes de NFT a atteint 24,9 milliards de dollars en 2021, contre à peine 94,9 millions de dollars un an plus tôt, selon les chiffres dévoilés par DappRadar, qui collecte des données sur une dizaine de blockchains différentes, auprès de Reuters. Texte entre 1.700 et 1.800 signes

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09_credit Shutterstock Wikipedia,

Comme pour l’art, la valeur d’un NFT correspond au montant que l’acheteur est prêt à payer pour en disposer. L’an passé, Christie’s a notamment vu une œuvre entièrement numérique du crypto-artiste américain Beeple être adjugée pour 69,3 millions de dollars. Le premier tweet de Jack Dorsey a été vendu pour 2,9 millions de dollars, le code source du World Wide Web pour 5,4 millions de dollars… La plupart des œuvres s’échangeraient toutefois dans une fourchette comprise entre 100 et 1.000 dollars.


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Virginie Leroy and Jevgeniy Nesch, Investment Funds Partners at AKD

Real Estate investment strategies – is a Luxembourg RAIF flexible enough?

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Maison Moderne

The Reserved Alternative Investment Fund (RAIF) regime is often chosen by the Real Estate (RE) fund managers wishing to benefit from a well-recognized fund brand and market the fund to EU investors. The RAIF has proven to be a very practicable, efficient, and successful fund product due to the regulatory framework and reduction of the time to market without the prior CSSF approval for its launch. Under the RAIF law, the fund may either invest in compliance with the risk diversification or risk capital requirements. Due to the analogy of these two options to the well-known regulated Luxembourg funds –SIF and SICAR – a risk diversified RAIF is often referred to as a SIF-like RAIF and the RAIF investing in risk capital assets only is referred to as the SICAR-like RAIF. Whether the RE fund will be a SIF- or a SICAR-like RAIF depends on its investment strategy. Among the main RE investment strategies, funds pursuing a Core, Core+ and Value Add strategies typically choose SIF-like RAIF. Even if those strategies generally allow for risk diversification, a SIF-like RAIF may foresee a “ramp-up period” during which the risk-diversification requirements do not apply. For fund managers pursuing an Opportunistic RE strategy characterised e.g. by the absence of renting out, a

SICAR-like RAIF provides efficient legal, tax and regulatory environment. The RE investments under this regime would be made via entities that invest in RE assets to be developed, creating added value at the level of the underlying properties in accordance with the assessment criteria provided by CSSF. The RAIF regime is applied on demand and should the risk-diversification or risk-capital requirements be a challenge, instead of a RAIF, a fully-fledged AIF structure with i.a. authorized AIFM and depositary may be used. Such AIF, if set-up as a SCS or SCSp, in addition to a great corporate flexibility provides almost the same features as the RAIF, but without the SIF- or SICAR-like specific requirements. Furthermore, small RE fund managers relying on the de-minimis exemption under AIFMD may benefit from the Luxembourg partnership structures without being subject to specific restrictions to the investment strategy. In such structure, special focus should be put on fund marketing and investors requirements.

EN SAVOIR PLUS VIRGINIE LEROY Investment Funds Partner +352 26 75 82 303 vleroy@akd.lu

JEVGENIY NESCH Investment Funds Partner +352 26 75 82 324 jnesch@akd.lu


Risques

Marielle Voisin

Les risques liés à la cybersécurité doivent aujourd’hui figurer au même rang que les autres risques financiers et réputationnels à l’agenda des conseils d’administration des fonds d’investissement au Luxembourg.

D’importants flux financiers à protéger « Les gestionnaires se demandent encore trop souvent quel est l’intérêt de hacker un fonds d’investissement ou l’un de leurs prestataires, reprend Astrid Wagner. Il est pourtant clair. Il touche en premier lieu à la confidentialité des données. Les investisseurs s’attendent à ce que des données relatives à leurs investissements soient gardées confidentielles. Une fois que les cybercriminels ont accès à ces données, ainsi qu’à d’autres données financières, telles que des numéros de comptes bancaires et des données personnelles d’investisseurs personnes physiques ou de représentants d’investisseurs personnes morales, ils peuvent voler une identité et utiliser les données à leur insu. Un autre aspect, et certainement pas le moindre, concerne l’importance des flux financiers engagés, que ce soit lorsqu’il s’agit de souscrire des actions ou lorsque le fonds fait son investissement. » Autant d’élé­ ments qui font que l’industrie des fonds d’in­ vestissement peut être une cible de choix pour les cybercriminels. De la théorie à la pratique, il n’y a qu’un pas. Aucune société n’est aujourd’hui épar­ gnée par des tentatives de cyberattaques et les risques qui y sont liés. «Là encore, de nombreux fonds et leurs gestionnaires sous-estiment le risque réel. Les attaques ayant pour cibles les fonds ou leurs prestataires externes sont relativement fréquentes, et si de gros prestataires qui, parfois, opèrent pour de nombreux fonds sont attaqués, ils deviennent ainsi des vecteurs de contamination en cas d’incident. Les attaques peuvent prendre de multiples formes, comme le phishing, les fraudes au président, l’introduction de malwares, etc. Nous sommes régulièrement contactés a posteriori, pour analyser si quelque chose peut être fait

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Fonds d’inves­ tissement : la cybersécurité n’est plus une option

La cybersécurité n’est pas un sujet dont l’in­ dustrie luxembourgeoise des fonds d’inves­ tissement peut faire l’économie. En cas d’incident, les risques financiers et réputa­ tionnels peuvent être colossaux, et l’organe de gestion du fonds se retrouve aux premières loges en termes de responsabilités… « En comparaison avec tout autre type de sociétés, l’industrie luxembourgeoise des fonds occupe une place particulière en matière de cybersécurité pour la simple et bonne raison que son modèle est basé sur la sous-traitance, relève Astrid Wagner, partner au sein de la practice area IP, Communication & Technology du cabinet Arendt & Medernach. Dans ce modèle, de nombreuses tâches qui doivent être remplies par un fonds sont déléguées à des prestataires externes. Dans ce cadre, le rôle du board est de veiller à ce que les activités déléguées soient correctement exécutées. C’est à lui de s’assurer – et de contrôler – ses sous-traitants et les opérations qu’ils exécutent, mais aussi de s’inquiéter de leur maturité sur toutes les questions de cybersécurité. »


« Les attaques ayant pour cibles les fonds ou leurs prestataires externes sont relativement fréquentes.» ASTRID WAGNER Partner Arendt & Medernach

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Maison Moderne (archives)

d’un point de vue pénal ou si ces attaques entraînent des obligations d’un point de vue réglementaire ou de la protection des données, ce dernier domaine tombant sous la compétence de l’équipe dont je fais partie », poursuit Astrid Wagner. Passer de la réaction à l’action, et idéalement même à la prévention Trop souvent encore, les fonds d’investisse­ ment, tout comme leurs sous-traitants, sont dans la réaction, alors qu’ils devraient davan­ tage miser sur la prévention. Dans cette confi­ guration, les cybercriminels ont souvent un coup d’avance. Ils s’infiltrent dans les sys­ tèmes bien longtemps avant que leur victime ne s’en rende compte. Ils observent les pra­ tiques, étudient les processus, jusqu’au moment où ils arrivent à faire valider une transaction importante, au nez et à la barbe de ceux qui gèrent le fonds… Mais comment s’en préser­ ver ? « La première étape est de sensibiliser les membres du board aux risques de cybersécurité, afin qu’ils prennent conscience de l’importance du sujet, reprend la partner du cabinet Arendt & Medernach. Ensuite, le conseil d’administration doit assurer sa mission de contrôle de ses prestataires. » Il doit bien identifier les sous-traitants, leur poser les bonnes questions, notamment par rapport à la maturité de la sécurité de leurs systèmes d’information, la formation de leur personnel sur ces questions, les procédures en place, y inclus en cas d’in­ cident, afin de pouvoir donner la réponse adéquate et de renforcer la résilience de l’or­ ganisation. «En matière de protection des données, il est important de noter que la période de temps pour notifier une violation de données est très courte. Le responsable du traitement doit le faire dans les meilleurs délais et au plus tard dans les 72 heures après en avoir pris connaissance, rappelle Astrid Wagner. Pour les sous-traitants, le Règlement général sur la protection des données est encore plus strict et requiert que cette notification soit faite au

responsable du traitement (le fonds ou le gestionnaire du fonds dépendant de la forme juridique du fonds) dès que possible après en avoir pris connaissance. Cela veut dire que dès qu’ils sont au courant d’une violation de données, ils doivent faire remonter l’information au niveau supérieur. Or, cette remontée d’information est un réel challenge dans ce secteur de l’industrie des fonds, en raison de l’importante chaîne de sous-traitance qui est en place. Il est également important que les fonds puissent convoquer à bref délai une réunion du board si un incident cyber se produit. » Une vigilance de tous les instants Dans le domaine de la cybersécurité, toute la difficulté réside également dans l’agilité des hackers, bien décidés à contourner les mesures de protection mises en place. « Le risque zéro n’existe pas. Mais il convient d’être diligent et de prendre les mesures de protection nécessaires, afin de limiter les risques au maximum. Pour cela, le risque de cyberattaque doit se trouver au même rang que tous les autres risques, notamment financiers, pouvant affecter les actifs d’un fonds d’investissement, précise notre spécia­ liste de la protection des données. La question de la cybersécurité doit figurer à l’ordre du jour des réunions du board au moins une à deux fois par an. Ce n’est pas une matière qu’on règle une fois pour toutes. Il faut très régulièrement s’interroger sur le niveau de sécurité en place. Les nouvelles technologies évoluent très vite et il faut sans cesse se mettre à jour. » De la même manière, il est important de faire le point sur les incidents éventuels qui ont eu lieu. « En cas d’incident, une procédure permettant de convoquer une réunion du conseil en urgence doit être en place. Les décisions doivent être prises très vite. N’oublions pas que la responsabilité revient in fine aux administrateurs, soutient Astrid Wagner. On peut d’ailleurs se réjouir de l’arrivée prochaine d’un règlement européen sur la résilience opérationnelle informatique (Dora ou Digital Operational Resilience Act, ndlr) à l’attention des services financiers. Il s’appliquera notamment aux fonds d’investissement et à tous leurs prestataires. Les questions de cybersécurité vont prendre une nouvelle dimension, et on ne peut qu’inviter les gestionnaires de fonds et les prestataires dans ce domaine à s’y conformer rapidement plutôt que de se retrouver submergés au moment de son entrée en vigueur. Les prestataires de services de l’industrie des fonds devraient d’ores et déjà faire de la cybersécurité une opportunité de développement de leurs activités par rapport à des concurrents prenant le sujet moins à cœur. La même chose vaut pour les fonds d’investissement par rapport à leurs investisseurs retail. » Auteur M. P.

NOUVELLES RÈGLES ATTENDUES Le projet de règlement de la Commission européenne Dora (Digital Operational Resilience Act) a pour objectif d’améliorer la résilience opérationnelle informatique des acteurs des services financiers, en mettant en place un cadre de gouvernance et de contrôle interne spécifique (ICT risk management framework). Il s’appliquera entre autres aux entreprises d’investis­ sement, aux gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs et aux sociétés de gestion. 1 Gestion du risque de tiers Faire entrer dans le périmètre réglementaire les tiers « fournisseurs TIC critiques » (CTPP ou critical third-party providers), en y intégrant les fournisseurs de cloud (CSP ou cloud services providers). Ceux-ci seraient supervisés par l’une des Autorités européennes de surveillance (AES), qui aurait le pouvoir de demander des informations, de mener des audits sur site et hors site, d’émettre des recommandations et des deman­ des, et d’imposer des amendes lorsque cela est nécessaire. 2 Tests de résilience opérationnelle informatique Établir des normes européennes pour les tests de résilience opérationnelle informatique, en laissant de côté, pour le moment, la reconnaissance transfrontalière auto­ matique des tests d’intrusion (TLPT ou threat-led penetration testing). L’objectif final étant l’harmonisation des règles locales dans toute l’UE. 3 Déclaration des incidents Harmoniser les règles de gestion des risques liés aux TIC dans l’ensemble du secteur des services financiers, sur la base des lignes directrices existantes. 4 Gestion des risques Harmoniser la classification et la déclaration des incidents liés aux TIC et créer un centre européen unique pour centraliser les déclarations d’incidents majeurs, liés aux TIC, des institutions financières.

MAI 2022 FONDS D′INVESTISSEMENT

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Forecast

Comment garder la compétitivité de la Place ? Le Luxembourg se doit d’innover pour conserver son statut de premier centre européen de distribution de fonds. Trois acteurs du monde financier luxembourgeois nous livrent leurs conseils pour que la Place reste compétitive. Propos recueillis par A. B.

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MARC MEYERS Partner et head of investment management Loyens & Loeff Luxembourg

Le Luxembourg est la première place finan­ cière en termes d’actifs sous gestion en Europe et la deuxième au niveau mondial. Compte tenu, notamment, des développe­ ments au niveau de la fiscalité internationale, le pays devra continuer à travailler sans relâche sur plusieurs chantiers afin de rester compétitif. Attirer et garder les talents reste plus que jamais d’actualité. Plus d’efforts devront être entrepris pour créer des forma­ tions dédiées aux métiers des fonds pour que le Luxembourg devienne un centre d’excel­ lence. Il faudra continuer à encourager la localisation de fonctions à forte valeur ajoutée. Ensuite, il est important de rester agile dans un monde qui change et dans un environne­ ment de plus en plus concurrentiel. Dans ce contexte, la collaboration active entre tous les acteurs de la Place sera essentielle afin de continuer à innover dans l’intérêt commun. Il faudra également continuer à investir ­massivement dans l’infrastructure. De ce fait, il sera nécessaire de limiter la spéculation immobilière et de réduire simultanément la durée effective des procédures administra­ tives afin de mobiliser plus rapidement les terrains et, de cette manière, augmenter signi­ ficativement la liquidité du marché immobilier. 66

FONDS D′INVESTISSEMENT MAI 2022

« Notre compétitivité est fortement liée à notre capacité à attirer, à développer et à retenir des talents. »

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« Renforcer l’écosystème consacré aux technologies au service de la gestion d’actifs est critique pour assurer le développement durable de la Place. » LAURENT CAPOLAGHI Partner Private Equity leader EY Luxembourg

Notre succès au cours des dernières années peut être attribué à un subtil mélange de sta­ bilité, d’agilité et de pragmatisme. À mon sens, la pérennité de l’attractivité de notre pays passe à la fois par un maintien de cette culture historique – favorable au développe­ ment des affaires grâce à un dialogue perma­ nent entre tous les acteurs – et par la capacité de continuer à innover et à attirer les talents. Concernant l’innovation, il s’agit selon moi de conserver l’innovation juridique et l’audace réglementaire dont nous avons toujours fait preuve pour devancer les réformes euro­ péennes et confirmer notre grande compré­ hension de l’industrie. De plus, le renforcement de l’écosystème consacré aux technologies au service de la gestion d’actifs est critique pour assurer le développement de la Place. L’attraction des talents est un élément-clé. Il est nécessaire d’accompagner les nouveaux arrivants et de leur offrir, si besoin, une infra­ structure de formation dédiée à notre indus­ trie. Le développement de nouvelles fonctions me paraît très important. Je pense notamment aux métiers liés à la levée de fonds et à la rela­ tion investisseurs, qui sont tout à fait alignés avec la place centrale de Luxembourg dans la distribution paneuropéenne des produits d’investissement.

Loyens & Loeff Luxembourg, Maison Moderne (archives) et EY Luxembourg

« La collaboration active entre tous les acteurs de la Place sera essentielle afin de continuer à innover dans l’intérêt commun. »

Le Luxembourg connaît un énorme succès dans le domaine des fonds alternatifs, mais cela ne durera pas éternellement si nous ne restons pas vigilants quant à ce qui ne fonc­ tionne pas de manière optimale et, surtout, si nous ne préparons pas l’avenir. Notre com­ pétitivité est fortement liée à notre capacité à attirer, à développer et à retenir des talents. Cela semble être le cas dans de nombreuses industries aujourd’hui, mais cela est particu­ lièrement vrai pour le secteur des fonds de capital-investissement et de capital-risque, qui connaît une croissance à deux chiffres. La Place est également connue pour sa capa­ cité à se moderniser. Cela comprend ainsi l’entretien et l’évolution de la «boîte à outils» luxembourgeoise et des régimes juridiques flexibles et plébiscités par les différents inves­ tisseurs internationaux. Alors que beaucoup de nos membres investissent dans des entre­ prises innovantes, c’est à notre tour de pro­ mouvoir l’adoption de plus de technologie sur le lieu de travail, notamment avec des ser­ vices à haute valeur ajoutée qui améliorent les relations avec les investisseurs, l’efficacité de la gestion et de l’administration de fonds, et facilitent le reporting.

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LUIS GALVEIAS Chief operating officer Luxembourg Private Equity & Venture Capital Association (LPEA)


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The firm fosters a positive way of thinking and promotes a strong team spirit. It motivates me as I know that I can make a difference, and that the efforts I put into my work each day have an impact for me and for others. Katharina Thielges Senior Associate Tax

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