Comment réconcilier nos nations avec leurs marines ?

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Comment réconcilier nos nations avec leurs marines? Rédigé par le Groupe de travail sur la communication stratégique du CHENS Approuvé à Athènes, le 10 mai 2013

CHENS est l’acronyme de CHiefs of European NavieS. C’est un forum indépendant, non politique qui compte parmi ses membres tous les chefs d’état-major des marines européennes, qu’elles fassent partie de l’OTAN et/ou de l’Union européenne. Le but du forum CHENS est de mener des réflexions entre les différents pays membres afin de promouvoir des actions communes pour accroître la prise de conscience de l’importance du monde maritime.


1 Introduction À l'automne 2011, le thème de la «La mer, cette inconnue» a été soulevé pour la première fois dans la communauté du CHENS. La méconnaissance de la mer réfère ici au fait que les européens en général prennent pour acquis la sécurité des voies de navigation, le transport maritime sans restriction de par le monde, et l'accès légitime et incontesté aux ressources marines; ils ne se rendent pas compte à quel point tous les pays européens dépendent de la mer pour leur prospérité. Il en résulte que les citoyens ne comprennent pas la nécessité d'avoir une marine et peuvent aller jusqu'à remettre en question son financement. Une première réunion des représentants du CHENS a proposé plusieurs objectifs et thèmes de communication stratégique afin de parvenir à une «Vision européenne de la mer» - une large compréhension des richesses apportées par les océans, des problèmes possibles et des efforts nécessaires pour les résoudre. Il est cependant très difficile d’identifier une approche commune qui couvre tous les thèmes, qui permette d'atteindre tous les objectifs, et enfin qui soit adaptée à toutes les nations : les situations historiques, économiques, politiques et géographiques sont tout simplement trop différentes. Quel pourrait être un thème commun qui concerne la plupart, sinon la totalité des pays?

1.1 Périmètre Pour renouer le lien entre nos nations et leurs marines sur une large échelle, un thème stratégique de communication adapté à tous les pays doit être développé. Pour les marines du CHENS il s’agit de « L'importance de la mer pour la prospérité et le développement futurs »1.

1.2 Objectif Les objectifs de ce document sont les suivants : • • •

Sensibiliser les acteurs publics et les principaux intéressés à l'importance actuelle et future de la mer pour l'économie – y compris pour ceux qui vivent loin des côtes. Montrer les contributions navales réelles et potentielles à la prévention de l'exploitation illégale des ressources, la lutte contre les menaces pour le transport maritime et l'assurance du développement futur. Développer les messages clés pour l'ordre du jour de la communication stratégique des marines du CHENS.

2 La mer et ses ressources comme source de prospérité À l'heure actuelle, deux tiers de la population mondiale vivent à moins de 80 km du littoral. Cependant, l'importance et l'influence de la mer pour l'économie s’exercent bien au-delà de cette distance !

2.1 La mondialisation de l'économie Avec l'avènement du conteneur sont venus l'accélération de la mondialisation économique ainsi que de nombreux et considérables changements à l'échelle mondiale, tels que le 1

Les idées clés sont indiquées en gras à la fin de chaque paragraphe. Les audiences ciblées, les messages clés et les recommandations se trouvent en annexe à la fin du document.


rapprochement des installations de production vers les ressources naturelles et humaines, l’allongement des chaînes d'approvisionnement et la réduction des stocks. Quelques exemples de l'importance du transport maritime pour l'UE2: Nombre de conteneurs manutentionnés dans les principaux ports en 2010 : 77.601.000 EVP3, ce qui correspond à plus de 210.000 EVP par jour! Poids des marchandises transbordées dans les principaux ports en 2010 : 3.538.440.000 tonnes, ce qui correspond à plus de 28 fois le poids de l'Empire State Building chaque jour! Valeur des marchandises importées par mer de la République populaire de Chine en 2011 : 182.296.431.870 €, ce qui est légèrement plus que le PNB (produit national brut) de Singapour4. Valeur des marchandises exportées par voie maritime vers la République populaire de Chine en 2011 : 88.856.067.540 €, ce qui signifie que l'interruption de cette route d'exportation entraînerait une perte financière pour les entreprises européennes de plus de 243 millions d’euros par jour! Un exemple à l’échelle individuelle : l’expédition d’un ordinateur portable de Singapour à Rotterdam revient 100 $ par voie aérienne, contre 0,65 $ par voie maritime5.

Les économies des pays du monde entier sont désormais étroitement interconnectées dans un écheveau complexe où les délais jouent un rôle critique. Les conteneurs et les navires qui les transportent sont devenus les principaux entrepôts et installations de stockage des entreprises d'aujourd'hui. Malgré tout cela, la productivité augmente et les coûts baissent parce que chaque élément du processus de production s’établit à proximité des ressources et des meilleures conditions de main-d’œuvre. Tout cela tient finalement grâce à un transport maritime fiable et abordable ! L'économie dépend du transport maritime, ceci est vrai pour toutes les entreprises, même les plus enclavées. De nombreux produits de notre quotidien seraient bien plus coûteux s’ils devaient être acheminés par voie aérienne ou terrestre.

2.2 Transport du pétrole et du gaz A la une des journaux: · "Pétrolier japonais attaqué au large du Yémen"6 Plus encore que les marchandises qui sont expédiées dans les deux sens, l'énergie est un élément essentiel pour garantir la productivité et le développement. Pétrole, gaz, charbon, uranium, pour ne citer que ces quatre éléments, sont des ressources importantes qui ne sont pas naturellement disponibles dans tous les pays. Cette répartition inégale conduit à un complexe programme d’import-export à grande échelle pour toutes les sources d'énergie. 2

Les statistiques commerciales sont tirées du site Eurostat de la Commission européenne: http://ec.europa.eu/eurostat 3 EVP : unité équivalente à vingt pieds, une unité de capacité de chargement basée sur le volume d'un récipient de 20 pieds de long. 4 http://data.worldbank.org 5 Calcul basé sur 4000 ordinateurs portables d’un poids unitaire de 5 kg par ordinateur emballé, transportés par conteneur de 40 pieds; taux de port référencé sur http://globalshippingcosts.com, accès du 19.02.2013 6 http://www.ogj.com/articles/2008/04/japanese-oil-tanker-attacked-off-yemen._printArticle.html, accès du 11.12.2012


Toute perturbation de ces flux a un impact direct sur les prix de l'énergie, comme lors des crises pétrolières de 1973 et 1979, quand le prix du pétrole a doublé en un an – un scénario qui mettrait rapidement en péril nos conditions de vie actuelle en augmentant les coûts de chauffage et de transport. Dans le cas du pétrole, les producteurs sont en nombre limité et concentrés dans quelques zones géographiques. Ils sont confrontés à un grand nombre de consommateurs avec des exigences différentes, parfois à des milliers de kilomètres de distance - un défi qui ne peut être relevé sans transport maritime fiable. Que faut-il faire pour s’assurer que le transport maritime reste fiable et sans entraves? Pour de nombreux pays, la fourniture d'énergie dépend de la fiabilité du transport maritime. La vie telle que nous la connaissons aujourd'hui serait considérablement affectée sans un approvisionnement énergétique fiable par voie maritime.

2.3 L'énergie renouvelable La mer est une source d'énergie renouvelable très prometteuse. La production d'électricité en mer est déjà à un stade avancé grâce à l’utilisation d’éoliennes en pleine mer fixées sur le plancher océanique. Le développement d'une version flottante permettra de se libérer de la contrainte de la profondeur d'eau, ce qui va en permettre l'installation dans une bien plus grande partie de la zone économique exclusive (ZEE). En plus de l'énergie éolienne, l'électricité peut être produite à partir de l'énergie des vagues et des marées, ainsi que des différences de température de l'eau entre la surface et les profondeurs. Ces formes de production d'énergie en sont encore au stade du développement, mais les premiers résultats sont très prometteurs. Cependant, toute production d'énergie en pleine mer se traduira par l'installation d’une infrastructure essentielle et fort coûteuse, parfois très loin de toute côte ; cette infrastructure devra être protégée ou surveillée pour assurer la sécurité énergétique. La mer offre un énorme potentiel pour la production d'énergies renouvelables. L'infrastructure essentielle pour la production d'énergie en mer doit être protégée.

2.4 Ressources L'énergie fossile des champs de pétrole et de gaz au large des côtes est aussi une richesse. Les progrès technologiques ont permis d'exploiter des champs situés à des profondeurs de plus en plus importantes. Cela va conduire à une plus grande répartition géographique ainsi qu’à une augmentation du nombre de pays producteurs de pétrole et de gaz. Mais le pétrole et le gaz ne sont pas les seules ressources que l'on trouve en mer, il existe également des gisements considérables de minéraux qui reposent sur le fond de l'océan. Ils seront vraisemblablement utilisés comme de possibles nouvelles sources d'énergie sous la forme d'hydrate de méthane ou d’hydrogène, de nodules d’eau profonde contenant toutes sortes de métaux ainsi que de terres rares, ces dernières étant extrêmement importantes pour les industries de haute technologie telles que les télécommunications ou les énergies renouvelables.


N’oublions pas que la mer est aussi une source de nourriture. Pour de nombreux pays, l'exploitation des ressources halieutiques dans la zone économique exclusive n'est d’ailleurs pas seulement une source importante de nourriture, mais aussi une source de revenus. L’exploitation, la gestion et la protection des ressources halieutiques contribue donc directement à la prospérité de ces pays. Cependant, le droit d'exploiter les ressources de la zone économique exclusive est accompagné de la responsabilité de les protéger contre la surexploitation. Sans la durabilité, il n'ya pas de développement à long terme. Que faut-il faire pour protéger les ressources naturelles contre l’exploitation illégale et non durable ? L'exploitation responsable des ressources en mer offre un moyen de réduire la dépendance envers une source ou une région unique et conduit ainsi à un approvisionnement plus stable et plus sûr.

3 Des scénarios qui pourraient mettre en danger la situation actuelle 3.1 La concurrence accrue pour les ressources en mer A la une des journaux: · «Les réserves de pétrole et de gaz alimentent les tensions en mer de Chine méridionale"7. · "Le Vietnam va envoyer des patrouilles en mer sur fond de tensions avec la Chine"8. · «Des bâtiments de guerre indiens prêts à appareiller pour la mer de Chine méridionale si les troubles se confirment"9. · "La Chine met en garde l'Inde contre l'exploration pétrolière dans la mer de Chine méridionale"10. · «La Corée du Sud arraisonne des marins chinois dans la Mer Jaune"11. Le fait que les ressources terrestres se raréfient a amené les populations à se tourner vers la mer pour leur nourriture, pour l'énergie et pour les minéraux. La probabilité de trouver les ressources exploitables augmente avec la taille de la zone. La convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS), signée en 1982, définit la limite de la zone économique exclusive à 200 miles nautiques. Cependant, l'exploitation des ressources sur ou sous le plancher océanique est limitée par le plateau continental, qui peut s'étendre au-delà des 200 7

http://www.bbc.co.uk/news/world-asia-18054622, accès: 05/12/2012 http://www.bbc.co.uk/news/world-asia-20591084, accès: 05/12/2012 9 http://timesofindia.indiatimes.com/city/delhi/Indian-warships-ready-to-sail-for-troubled-S-China-Seaifrequired/articleshow/17469306.cms, accès : 06/12/2012 10 http://economictimes.indiatimes.com/news/politics-and-nation/china-cautions-india-against-oilexploration-insouth-china-sea/articleshow/17494349.cms, accès : 06/12/ 2012 11 http://www.bbc.co.uk/news/world-asia-17890929, accès : 06/12/2012 8


miles marins. Dans la dernière décennie, plusieurs pays ont demandé l'extension de leur plateau continental jusqu'à 350 nautiques ! Un exemple: La découverte de ressources sous-marines de pétrole et de gaz dans la mer de Chine méridionale, ou le simple espoir d’en faire la découverte, a conduit plusieurs pays à revendiquer la propriété des îles inhabitées situées très loin au large de leurs côtes respectives afin d'exploiter ces ressources. Afin d'élargir leur zone d'influence, tous les demandeurs offrent une preuve concluante de la légitimité de leur propriété.

L'extension des limites maritimes dans la quête de ressources naturelles ou d'énergie renouvelable va provoquer des tensions stratégiques croissantes. L'expansion de la zone d'influence, notamment le redécoupage des frontières, a souvent été une cause de guerre sur les terres. Le même potentiel existe en mer. Cela conduit à des tensions diplomatiques qui sont difficiles, voire impossibles à résoudre. La compétition pour l'exploitation des ressources de la mer conduit à une territorialisation accrue de la mer et pourrait conduire à des conflits.

3.2 L'importance croissante de la route vers l'Asie Dans la forte dépendance de l'économie mondiale envers le transport maritime l'importance de l'Asie augmente plus que pour toute autre région, et ce pour quatre raisons principales : l'abondance de certaines ressources (terres rares), la concentration des nouveaux sites de production (Inde, Chine), les hubs logistiques (ports) et les hausses de la demande de matières premières et de ressources pour ses économies en croissance rapide. Cette dépendance à l'Asie, et à la libre-circulation des marchandises sur les routes maritimes à destination et en provenance d'Asie, impliquent que les économies locales du monde sont très vulnérables aux perturbations potentielles de ces voies maritimes vitales. Un exemple : Si la route d'approvisionnement de l'Asie à l'Europe était interrompue par un blocage du canal de Suez ou du Bab-el-Mandeb, il ne faudrait que 12 jours avant que les premiers conteneurs n'arrivent plus en Europe! Même un réacheminement immédiat du trafic via le cap de Bonne-Espérance causerait un écart d'au moins 12 jours pendant lesquels rien n’arriverait12. Dans une simulation d'un cabinet de conseil américain, les entreprises ont signalé des pénuries de stocks et des fermetures d'usines après seulement 4 jours d’interruption des livraisons par voie maritime13.

En conséquence, même une perturbation qui se produirait à une distance considérable d’un pays aurait un impact local fort après seulement un très court délai. Il est donc plus que

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sur la base des temps de transit non-stop suivants à 17 nœuds : Salalah-Rotterdam (via Suez): 12d 20h; Salalah-Rotterdam (via le Cap de Bonne-Espérance): 24d 15h (http://www.searates.com) 13 http://www.booz.com/media/uploads/Port_Security_War_Game.pdf


prudent d'examiner attentivement cette dépendance et de suivre de près les développements dans cette région. Les effets du réchauffement de la planète finiront par ouvrir les passages du Nord, créant de nouvelles routes vers l'Asie via l'Arctique qui permettront de réduire considérablement les temps de transit et coûts de carburant14. En novembre 2012, un méthanier affrété par la société russe Gazprom a fait le voyage à partir de Hammerfest en Norvège jusqu'à Tobata au Japon pour la première fois par le passage du Nord. Le temps de transit a été réduit de 20 jours et les coûts de carburant de 40% par rapport au transit par le canal de Suez! Alors que l'ouverture des passages du Nord fournit une alternative plus courte aux routes existantes, elle va aussi créer de nouveaux problèmes au niveau stratégique. L'augmentation des périodes d’eaux libres et la disponibilité de nouvelles routes de navigation ne vont pas seulement provoquer une augmentation du trafic maritime, mais aussi encourager l'exploration et l'exploitation des ressources halieutiques et marines. En soi, cela va produire des conflits d'intérêt stratégiques qui devront être gérés et contrôlés par les pays respectifs. Ceci va encore accroître la charge potentielle du trafic maritime et créera de nouvelles exigences d'infrastructure et de soutien à ce niveau inédit d’activité maritime. Les économies européennes sont de plus en plus exposées à des perturbations des voies maritimes globales ; même si une telle perturbation peut se matérialiser à une distance considérable, l'impact local sera quasi immédiat. Les nouvelles routes maritimes rendues praticables par les modifications de l'environnement pourraient être un soulagement pour les routes existantes, mais pourraient aussi augmenter la concurrence pour l'accès aux ressources et requérir la mise en place d’infrastructures locales de soutien.

3.3 Quand le volume d'activités à la mer augmente, les risques aussi L'essor de la mondialisation connaîtra parallèlement une hausse du trafic maritime. Il faut déjà beaucoup de vigilance pour éviter les retards voire les accidents. En 2009, plus de 145 000 navires ont transité par la Manche15, les uns derrière les autres, un vaisseau toutes les trois minutes et demie, toute la journée, toute la nuit, tout le temps! Alors que les actes criminels en mer ont toujours été une réalité, l'augmentation du fret maritime combinée avec l’accès aisé aux équipements de navigation et aux armes automatiques font du piratage une entreprise prometteuse. Il est pourtant possible de lutter contre ce problème comme l’atteste la réduction quasi complète des attaques dans le détroit de Malacca. Mais les mesures politiques ne suffisent pas ; c’est l'étroite collaboration de trois marines qui a été la dissuasion majeure pour l’activité pirate16. La perturbation du transport maritime du fait des accidents ou des attaques en mer, par le blocage des points d'étranglement vitaux ou par le minage des ports importants, pourrait envoyer des ondes de choc à travers les économies locales et même, en fonction du niveau de perturbation atteint, à travers l'Europe. Ce ne sont pas seulement les navires, les marchandises et les infrastructures qui sont exposés, l'environnement aussi est en danger. Des activités illicites telles que la pêche non autorisée, 14

Distance Rotterdam-Tokyo par le passage du Nord-Est : 14,100 km; par le passage du Nord-Ouest: 15.900 km; via le canal de Suez: 21,100 km 15 http://www.dft.gov.uk/mca/mcga_-_hm_coastguard_-_the_dover_strait, accès : 11/12/2012 16 http://www.time.com/time/world/article/0,8599,1893032,00.html, accès : 02/02 2012


l'extraction illégale des ressources et la pollution démontrent la vulnérabilité de la haute mer : c'est un espace non gouverné et son utilisation à des fins pacifiques dépend de l’attitude conforme des propriétaires des navires et des États des pavillons. L'expérience montre que les activités illégales augmentent à mesure que la capacité de contrôler et de protéger diminue ! Avec l'extraction minière au large s’étendant au-delà des limites de la ZEE d'un Etat ou du plateau continental, de plus en plus de navires et d’installations vont être présents en haute mer, un fait qui mérite une attention particulière. Pour se protéger contre la piraterie, le terrorisme et les actes illicites en mer, une certaine capacité à protéger, contrôler, poursuivre et intervenir est et restera essentielle.

3.4 Une forte augmentation du nombre d'actifs navals A la une des journaux : • «Le Ministère de la Défense de l'Inde donne son feu vert pour la construction de six sousmarins"17. • «La modernisation de la marine chinoise est une cause de préoccupation"18. L'importance croissante des ressources marines a conduit certains pays à focaliser leurs nouveaux développements et acquisitions sur les moyens navals. En outre, de nombreux pays en développement utilisent leurs revenus pour augmenter le nombre de leurs moyens militaires, que le pouvoir militaire aille de pair avec la puissance économique ou que cela soit jugé nécessaire pour protéger le pouvoir économique. Cette évolution ne se limite pas à de petites unités légèrement armées pour faire respecter et protéger les droits souverains près des côtes ; elle englobe toute la panoplie jusqu’à de grandes unités lourdement armées capables d'opérer en haute mer : porte-avions, BPC, frégates lance-missiles, destroyers, sous-marins conventionnels et nucléaires, qui sont les nouveaux symboles du pouvoir. C’est une course à l’équipement particulièrement répandue dans les pays riverains de la mer de Chine méridionale : chaque fois qu'un pays augmente ses moyens navals pour étayer ses allégations, les pays voisins font de même pour restaurer le rapport de forces ! Quelques exemples : La Corée du Sud va accroître le nombre de ses destroyers, frégates et navires d'assaut de neuf en 2010 à plus de 20 dans les années 202019. Selon certains analystes, la Chine envisage de construire jusqu'à 20 sous-marins diesel entre 2010 et 2020, ainsi que 10 frégates lance-missiles entre 2010 et 201520. Le Brésil a signé un contrat pour acheter quatre sous-marins diesel et prévoit de développer un sousmarin à propulsion nucléaire, ce qui permettrait de doubler la taille de la flotte sous-marine brésilienne21. 17

http://economictimes.indiatimes.com/news/politics-and-nation/dac-has-given-nod-for-construction-ofsixsubmarines-government/articleshow/17478150.cms, accès : 06/12/2012 18 http://economictimes.indiatimes.com/news/politics-and-nation/modernisation-of-chinese-navy-causeofconcern-navy-chief-d-k-joshi/articleshow/17463381.cms, accès : 06/12/2012 19 http://thediplomat.com/2010/11/18/south-koreas-blue-water-ambitions/?all=true, accès : 17/01/ 2013 20 http://thediplomat.com/2010/09/29/china’s-naval-build-up-not-over/?all=true, accès : 17/012013


Officiellement, le Brésil développe ses sous-marins nucléaires «[...] pour protéger les richesses situées sur le plateau continental et décourager les actions étrangères agressives dans les eaux brésiliennes»22. Il est probable que les pays dont nous parlons reconnaissent déjà que la capacité globale de protection et d'intervention est indispensable pour la prospérité et le développement économique durable dans un monde globalisé. Certains pays accroissent de manière significative leur potentiel naval afin de faire valoir leurs droits ou pour protéger leur prospérité ou leur souveraineté.

3.5 Le danger de prendre du retard Par contraste avec les développements mentionnés ci-dessus, les dépenses de défense en Europe ont considérablement diminué depuis la fin de la guerre froide, et avec elles le nombre d'unités en service. Quelques exemples pour montrer l'étendue du phénomène : Entre 2000 et 2012, le Royaume-Uni a réduit le nombre de ses sous-marins nucléaires d'attaque de 12 à 7 et le nombre de grandes unités de surface de 38 à 22; la capacité de mettre en œuvre des catapultes sur ses porte-avions a été abandonnée complètement en 2011.23 En 2010, l'Allemagne a réduit le nombre de ses sous-marins de 10 à 4. A partir de 2016, quatre nouvelles frégates seulement remplaceront les 8 frégates de la classe "Bremen".24

Alors que certains pays asiatiques et sud-américains augmentent nettement la quantité et la qualité de leurs actifs navals, les pays de l'UE continuent de réduire le nombre d'unités. En outre, les coupes budgétaires encore plus sévères résultant de la crise financière vont aggraver la tendance à acheter de moins en moins d'unités. Il reste à prouver que ces unités moins nombreuses, plus coûteuses et plus performantes peuvent offrir la même présence. Dans certains domaines, les petits volumes pourraient suggérer l'abandon pur et simple d’une certaine capacité. Cette décision ne doit pas être prise à la légère, surtout si des systèmes très complexes comme des sous-marins ou des porte-avions sont impliqués! Dans ces domaines, la perte d'expertise opérationnelle, technique ou industrielle ne peut pas être inversée rapidement lorsque la situation financière s'améliore. Une fois qu’une telle capacité est perdue, cela peut prendre un certain temps pour la reconstruire. Dans le cas des porte-avions, cela peut prendre jusqu'à 20 ans ! Les pays européens continuent de réduire le nombre d'unités navales, ce qui crée des forces navales déséquilibrées et peut conduire à une perte totale de certaines capacités qui ne peuvent être facilement compensées.

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http://www.defenseindustrydaily.com/Brazil-France-in-Deal-for-SSKs-SSN-05217/, accès : 17/01/2013 http://www.usni.org/magazines/proceedings/2009-06/why-does-brazil-need-nuclear-submarines, accès : 17 Janvier 2013 23 http://www.dasa.mod.uk/modintranet/UKDS/UKDS2012/ukds.php, accès : 18 /01/2013 24 http://www.marine.de, accès : 18/01/2013 22


4 Une solution possible Deux questions clés ont été posées dans ce document: · « Comment assurer le transport maritime sans restriction? » · « Comment protéger les ressources marines contre l'exploitation illégale? » A ces questions, il y a une réponse - même si elle n'est pas connue de la plupart: c'est assuré au quotidien par la marine ! Dans le Concept Opérationnel Maritime du CHENS 25, on nomme cela « Opérations de Sécurité Maritime» : « Les mesures engagées [...] pour contrer la menace et atténuer les risques d'activités illégales ou menaçantes dans le domaine maritime». Chaque jour, dans chaque mission, que ce soit en entraînement ou en opérations, des unités navales patrouillent dans les espaces maritimes dans l'air, à la surface et sous la surface de la mer. Au cours de ces patrouilles, les unités attestent du droit souverain de chaque pays de contrôler ses espaces maritimes, de faire respecter les règles et réglementations internationales et de protéger ses actifs et ses intérêts en mer. Chaque jour, des unités navales contrôlent le trafic maritime, aident les personnes en détresse et travaillent à protéger les routes maritimes contre les menaces, même loin de leurs pays respectifs. Ce grand éventail de tâches nécessite les capacités correspondantes. Des unités plus petites et légèrement armées pourraient suffire à protéger les ressources contre l'exploitation illégale, mais assurer un transport maritime mondial sans restriction impose d’avoir des unités puissantes pour la haute mer. Pour rester un acteur crédible dans la quête pour les ressources et le développement économique, l’Europe nécessite un mélange bien équilibré de moyens, ce qui inclut un haut niveau de capacités militaires. En outre, ces unités à fort impact permettent à chaque pays de réaliser des missions de marine plus traditionnelles26, que ce soit des opérations mandatées au niveau international comme en Libye ou des opérations nationales telles que l'évacuation des citoyens d'une région en crise.

5 Conclusion La mer est essentielle pour le développement économique et la prospérité dans un monde globalisé car elle fournit les moyens d’un transport abordable, efficace et fiable. La mer est également une source de nourriture, de minéraux et d'énergie, avec de nombreuses ressources encore à découvrir. La raréfaction des ressources terrestres va accentuer les convoitises vers la mer et conduire à une concurrence accrue, voire à des conflits en mer.

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Document approuvé par les chefs des marines européennes en 2010; disponible en téléchargement sur http://www.chens.eu/products.htm 26 Le Concept Opérationnel Maritime du CHENS (cf. note 24) regroupe les activités navales possibles dans le cadre de la sécurité maritime dans les 4 groupes suivants: 1. La défense maritime 2. Opérations de sécurité maritime 3. Opérations de réponse aux crises 4. Diplomatie navale


L'accès illimité dans un cadre légal aux voies maritimes et aux ressources marines est donc d'un intérêt stratégique pour tous les pays européens! Pour préserver la prospérité économique et participer à une exploitation responsable des ressources nouvelles, une capacité crédible et cohérente à protéger et à intervenir est essentielle si les pays du CHENS doivent être en mesure d'atteindre leurs objectifs stratégiques. Les marines du CHENS fournissent une telle capacité d'intervention et de protection, à condition qu'elles aient les moyens appropriés. Grâce à cette capacité, les marines du CHENS assureront prospérité et développement.


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