Maxi-Basket 39

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Jaiteh... J.K. Edwards & Juby Johnson... All-Star Game... Barcelone... Challes... Alessandro Gentile...

#39

janvier 2012

ans • ASVEL & Le M

Rivaux éternels

ez h c e d é t ô c u D •

Blake Schilb

& • Rudy Gobehrot t : Vincent Pourc

© Jean-François Mollière

C’est géant !

r e i n r u o F n a v E

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MAXI-BASKET N°39 – janvier 2012 DOM-TOM : 5,60 € BEL 5,40 €

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HALLE ANDRÉ VACHERESSE

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Édito • maxi-basket 03

JANVIER 2012 Sommaire #39

04

échos

14 Evan Fournier 22 Mouhammadou Jaiteh

L’Ukraine et nous

24 J.K. Edwards

& Juby Johnson

Par Pascal LEGENDRE

L

a Fédération Internationale de Basket-Ball dans sa version européenne a désigné l’Ukraine pour organiser le championnat d’Europe de 2015. La France et ses colistières, l’Allemagne, l’Italie et la Croatie avaient retiré leur candidature dans la semaine qui a précédé le vote (le board de la FIBA est composé de 29 membres… dont les présidents français, allemand, italien et croate) estimant que les conditions imposées par la FIBA Europe étaient « inacceptables », dixit Jean-Pierre Siutat, le président de la FFBB, très amer. L’Ukraine après la Pologne, la Lituanie et la Slovénie ? Disons que les pays de l’Est de l’Europe ont le vent en poupe et que cette prédominance est cyclique. Côté occidental, les seules Suisse et France eurent le privilège de l’organisation entre 1937 et 67, mais durant 40 ans seules la Yougoslavie/Serbie et la Tchécoslovaquie furent désignées du côté du « Bloc de l’Est ». Une sorte de règle de l’alternance sur la durée, voulue ou non. Et puis ne mettons pas la Pologne et la Lituanie, deux membres de l’Union Européenne, dans le même sac que l’Ukraine. Qui aura la bêtise de ne pas reconnaître que l’Euro lituanien n’a pas été une réussite, une méga fête dans un pays qui pourrait faire figurer un ballon de basket comme emblème sur son drapeau national ? Ce qui nous gêne, nous révulse même, c’est que l’Ukraine est un pays où la corruption a été instituée en mode de fonctionnement. Dans son évaluation pour 2011 Transparency International l’a classée 152e sur 183 pays à égalité avec le Tadjikistan (Allemagne 14e, France 25e). « Depuis qu’il a été élu en mars 2010, le président Viktor Ianoukovitch s’emploie à rogner méthodiquement les libertés. Harcèlement judiciaire des opposants, musellement de la presse, assujettissement du législatif, peu à peu le pays suit les traces de la Biélorussie » lit-on dans Courrier International. « La FIBA Europe ne fait pas de politique ! » nous répondrait-

on. Comme le CIO qui avait offert les Jeux de 1936 à l’Allemagne nazie, ceux de 1980 à l’URSS de Brejnev, ceux de 2008 aux dictateurs chinois, en attendant les Jeux d’hiver de 2014 à la Russie de Poutine (143e). Notons que la Biélorussie (143e également) s’est retrouvée finaliste pour l’Euro’15 féminin (la Hongrie a finalement été choisie). Avec son sourire imperturbable, Nar Zanolin, secrétaire général de la FIBA Europe, s’est fendu d’un petit message d’encouragement : « Je voudrais féliciter l’hôte, mais aussi la fédération biélorusse pour leur empressement d’accueillir un tel événement marquant, et je voudrais leur dire « ne renoncez pas, continuez à travailler dur. » Bref, que les opposants dans ce pays soient systématiquement arrêtés n’a strictement aucune importance. Continuez à travailler dur, les gars ! Le rassemblement de 4 pays démocratiques (France, Allemagne, Italie, Croatie) forts de 212 millions d’habitants, la possibilité de disputer le tournoi dans deux des plus belles salles du Monde, l’O2 Arena de Berlin et le POPB rénové, le fait que le dossier compte 150 pages – contre une quinzaine pour l’Ukraine –, la provenance de l’argent, tout ça, les dignitaires de la FIBA Europe s’en contrefichent. Ils ont d’ailleurs eu un bon exemple à suivre puisque l’UEFA a confié une partie de l’Euro de foot à ce même pays. On fait confiance aux Ukrainiens, les hôtels pour la FIBA Europe seront « absolument parfaits » – une terminologie très prisée en haut lieu – et il y aura tous les menus plaisirs indispensables à des personnalités de haut rang. L’argent va rentrer dans les caisses. Pour en faire quoi ? En voilà une question saugrenue que l’on n’aura pas l’audace de poser à Kiev. Nous, les Français ? On devait organiser le Mondial de 2010, les JO de 2012, l’Euro 2015, c’était sûr ! On devait tirer un feu d’artifice gigantesque pour la « génération Parker ». Tous les pétards sont mouillés, pourris. Pas marre d’être toujours du côté des cocus ? l

30 Rétro :

ASVEL & Le Mans

38 All-Star Game 46 Kareem Reid 48 Blake Schilb 54 Rudy Gobert &

Vincent Pourchot

64

FC Barcelone

L’Ukraine est un pays où la corruption a été instituée en mode de fonctionnement.

Directeur de la publication Gilbert CARON Directeur de la rédaction Pascal LEGENDRE (p.legendre@norac-presse.fr) Rédacteur en chef Fabien FRICONNET (f.friconnet@tomar-presse.com) Rédacteur en chef-adjoint Thomas BERJOAN (t.berjoan@tomar-presse.com) MAXI-BASKET est édité par NORAC PRESSE (Capital : 25 000 euros). Siège Social : 3 rue de l’Atlas – 75019

PARIS. Téléphone : 02-43-39-16-21 Principaux associés : Print France Offset, Le Quotidien de Paris éditions, Investor.

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JOURNALISTES

Thomas BERJOAN, Jérémy BARBIER, Yann CASSEVILLE, Fabien FRICONNET, Florent de LAMBERTERIE (01-73-73-06-46), Pascal LEGENDRE (02-43-39-16-26), Antoine LESSARD, Pierre-Olivier MATIGOT, Laurent SALLARD. RÉDACTION AUX USA Pascal GIBERNÉ (New York).

Correspondants à l’étranger David BIALSKI (USA), Giedrius JANONIS (Lituanie), Kaan KURAL (Turquie), Pablo Malo de MOLINA (Espagne), Streten PANTELIC (Serbie), Bogdan PETROVIC (Serbie); Yannis PSARAKIS (Grèce), Sran SELA (Israël), Stefano VALENTI (Italie). Ont collaboré à ce numéro Claire PORCHER, Gaétan SCHERRER et Frédéric TRIPODI. Secrétaire de rédaction Cathy PELLERAY (02-43-39-16-21 - c.pelleray@norac-presse.fr).

RÉALISATiON GRAPHIQUE Conception charte graphique Philippe CAUBIT (tylerstudio) Direction artistique Thierry Deschamps (Zone Presse) Maquettiste Cyril FERNANDO

66 Challes 76 Contrôle surprise : Jim Bilba

78 Fondamentaux : Le Post Up

80 Dans l’œil des

scouts : Alessandro Gentile

82 à la Une :

Alexis Rambur

ABONNEMENTS

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À JUSTE TITRES : Badice BENARBIA (04 88 15 12 42) b.benarbia@ajustetitres.fr COMMISSION PARITAIRE : 1110 K 80153 RCS : Paris B 523 224 574 ISSN : 1271-4534. Dépôt légal : à parution

La reproduction des textes, dessins et photographies publiés dans ce numéro est la propriété exclusive de Maxi-Basket qui se réserve tous droits de reproduction et de traduction dans le monde entier.


04

maxi-basket

LES ÉCHOS

Par Jérémy BARBIER

Français en NBA

Leurs salaires

Cinq de nos douze représentants en NBA seront en fin de contrat à la fin de la saison. Quelles sont leurs perspectives d’avenir aux États-Unis ?

Boris Diaw est motivé, il est en fin de contrat

Boris Diaw

Le Bobcat, 30 ans en avril prochain, jouera sur 66 petits matches de saison régulière le montant de ses prochains salaires. Le manque de compétitivité des Bobcats ne va pas jouer en sa faveur néanmoins, son rôle de starter permet de produire des statistiques. Un nouveau contrat de 3 ans à 5 ou 6 millions par saison serait l’idéal.

Mickaël Pietrus

Ronny Turiaf

Le Martiniquais a certainement signé en 2008 son plus gros contrat en NBA (17 millions). Rotation au rendement statistique suspect, le Knick qui vient de passer à Washington compte certainement sur son étiquette de joueur de devoir pour chasser son prochain cachet.

Nom

Franchise

Tony Parker Joakim Noah

Kent Smith/NBAE via Getty Images

À l’heure actuelle, impossible d’imaginer le Guadeloupéen parapher un contrat similaire à celui signé en 2008 à Orlando. Plus que ses productions, ses blessures récurrentes rendent improbables un nouvel engagement longue durée, confer son transfert raté à Toronto. À bientôt 30 ans, Mike va devoir montrer sa solidité.

Ian Mahinmi

À condition de s’installer durablement dans la rotation des Mavs cette saison, Ian Mahinmi pourra faire valoir son récent titre NBA et ses centimètres lors des prochaines négociations. Un salaire annuel plus élevé serait une évolution logique.

Pape Sy

La saison qui commence sera décisive pour l’ancien joker du BCM. S’il prouve aux Hawks que sa place est bien en NBA, le combo héritera logiquement d’une prolongation de contrat en Géorgie. Le montant ne sera peut-être pas mirifique mais le sophomore aurait alors vraiment les deux pieds en NBA.

2011-12

2012-13

2013-14

2014-15

San Antonio Spurs

12,500,000

12,500,000

12,500,000

12,500,000

-

Chicago Bulls

10,000,000

11,000,500

12,100,000

13,150,000

14,200,000

Boris Diaw

Charlotte Bobcats

9,000,000

-

-

-

-

Michael Pietrus

Phoenix Suns

5,300,000

-

-

-

-

Ronny Turiaf

Washington Wizards

4,360,000

-

-

-

-

Johan Petro

New Jersey Nets

3,250,000

3,500,000

-

-

-

Nicolas Batum

Portland Trailblazers

2,155,364

3,166,230

-

-

-

Kevin Séraphin

Washington Wizards

1,680,360

1,797,600

2,761,113

3,898,694

-

Rodrigue Beaubois

Dallas Mavericks

1,236,720

2,227,332

3,271,951

-

-

Ian Mahinmi

Dallas Mavericks

884,293

-

-

-

-

Pape Sy

Atlanta Hawks

788,872

-

-

-

-

-

-

-

-

-

Alexis Ajinça Team Option / Qualifying Offer

2015-16

Team Option : Seule la franchise peut décider d’activer cette clause de contrat. Elle permet de retenir un joueur une année de plus sans avoir à le prolonger. Qualifying offer : Le joueur est potentiellement sur le marché. Il peut recevoir et accepter les offres d’autres franchises. Son équipe, qui a la priorité pour le re-signer, le gardera dès le moment (elle à une semaine pour le faire) où elle égalera officiellement l’offre de la concurrence. * Source : Hoopshype



06

maxi-basket

LES ÉCHOS

Par Pascal LEGENDRE

L’action de l’année

Golden Gate Bridge

Photos : Pascal Allée/Hot Sports

Notre photographe Pascal Allée était pile-poil au bon match (Nantes-Fos en Pro B), au bon endroit, pour voir une action rarissime. L’auteur : Dave Fergerson. La victime : Mamadou Dia. Un petit pont ? Non. Un grand pont ? Plus encore ! Un Viaduc de Millau, un Golden Gate Bridge !



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LES ÉCHOS

Par Pascal LEGENDRE

Supporters en Europe

Qui est le plus beau ?

Les photographes de l’Euroleague et de l’Eurocup sont à l’affût et pas seulement côté terrain. À vous de désigner votre supporter préféré.

Cibona Zagreb Stressée, puis soulagée. Kalise Gran Canaria Syndicaliste.

Fenerbahce-Ülker Istanbul Fou (folle) du Roi.

CSKA Moscou So russian.

Le Mans Sarthe Basket Le haut en supporter de foot, le bas de basket. Maroussi Athènes Yo man !

Turow Zgrozelec Le fils caché du Général Jaruzelski.

Photos : EB via Getty Iamges

Panathinaikos Athènes Comme dans un rêve.

Olympiakos Le Pirée Une écharpe de la taille d’un dessus de lit.

ASVEL Lyon-Villeurbanne Fantomas était présent à l’Astroballe.


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LES ÉCHOS Les balles perdues

Ricardo toujours placé ! Nom

Club

Saison

Total

Moy.

Sean Colson

Hyères-Toulon

2007-08

207

4,31

Darrell Mitchell

Chalon-sur-Saône

2007-08

189

3,94

Ricardo Greer

Nancy

2007-08

342

3,93

T.J. Thompson

Le Havre

2008-09

339

3,77

Ricardo Greer

Nancy

2009-10

324

3,60

Matt Walsh

Lyon-Villeurbanne

2010-11

75

3,57

Derrick Obasohan

Hyères-Toulon

2009-10

312

3,47

Ricardo Greer

Nancy

2008-09

297

3,41

Pierre Pierce

Hyères-Toulon

2009-10

306

3,40

Kareem Reid

Vichy

2009-10

300

3,33

Ben Woodside

Gravelines-Dunkerque

2010-11

100

3,33

Markus Carr

Reims

2006-07

339

3,32

DVD et livre

À la gloire des Bleus

L

a fédération a sorti un livre de 112 pages avec plus de 200 illustrations et un DVD de 50mn tous les deux intitulés « Euro Stars ». L’idée était de faire une avant-première avec les joueurs de l’équipe de France, avec en figure de proue Tony Parker, Boris Diaw et Nicolas Batum. Aussi l’attaché de presse fédéral, Fabrice Canet, a longtemps cherché la date adéquate car avec les diverses coupes d’Europe il n’était pas évident de croiser les calendriers. Rendezvous était finalement pris le dimanche 4 décembre au Club de l’Étoile, dans le 8e arrondissement à Paris, un cinéma spécialisé

dans les avant-premières de films. Sauf que six jours avant la présentation le lock-out de la NBA était levé. Conséquence, seuls Mickaël Gélabale, blessé, Vincent Collet et ses assistants Ruddy Nelhomme et Jacky Commères étaient présents. Et peu de journalistes ont fait le déplacement. « Même si on a eu un retour presse intéressant », note le responsable des éditions à la FFBB, Julien Guérineau. « On est très satisfaits des deux produits et donc un peu déçu de ne pas pouvoir les exposer d’une façon plus importante. » Une page facebook et un compte twitter (@FRAbasketball) spécialement dédiés ont été lancés en même temps. Le livre : 25€. Le DVD 14€. Le pack : 34€. En vente sur ffbbstore.com

Lesly Bengaber

Acte de Contrition

Lors du match Vichy-Antibes, Lesly Bengaber est auteur d’un «geste déplacé » vis à vis des supporters et, à froid, il décide d’envoyer au club cette lettre d’excuses à la JAV qui l’a publiée sur son site Internet. Suffisamment rare pour être mis en valeur ici.

Jean-François Mollière

• Voici les meilleurs, pardon les pires gâcheurs de ballons sur les cinq dernières saisons. À noter que Ricardo Greer a fait un festival sous le maillot de Nancy. Kareem Reid (5,0 bps sur ses 8 premiers matches) est très bien, pardon très mal, parti cette saison. Pas sûr que son coach Alain Weisz ait envie qu’il persévère et batte le record d’un autre meneur américain du HTV !


maxi-basket 11

Par Pascal LEGENDRE

Allison et Diandra

Destins croisés

Brian A. Weste

est/Getty rholt/Wake For

Images

G Fiume/Maryla

nd Terrapins/Ge

tty Images

I

l n’y a pas si longtemps elles étaient considérées toutes les deux comme de grands espoirs du basket européen. Allison Vernerey et Diandra Tchatchouang ont choisi il y a deux ans de poursuivre leur cursus en NCAA, l’une à Duke, l’autre à Maryland. Ce n’est pas l’Eldorado. Diandra est revenue cette saison en France et après une rupture des ligaments du genou elle a fait ses débuts début décembre à Lattes-Montpellier. Allison a du mal à s’imposer dans l’effectif des Blue Devils. Diandra commente leurs destins croisés. « Allison est arrivée aux États-Unis avec un très bon niveau d’anglais dans un pays qu’elle avait l’habitude de visiter et elle voulait aller à Duke depuis qu’elle est toute petite, alors que moi j’ai commencé à vraiment m’intéresser à la vie sur un campus américain un an avant de prendre ma décision. On avait joué à l’INSEP contre North Carolina et je savais que les Américains dominent toutes les compétitions internationales, j’avais envie d’aller voir ce qui se passe làbas. Allison est une très bonne amie alors évidemment je lui en ai parlé, elle m’a dit ce qu’elle en savait. Pour en avoir discuté avec elle, je peux dire qu’on n’a pas vécu ça de la même façon. J’ai joué 4 fois contre Allison là-bas et elles ont gagné 3 fois. Elle était plus en poste 5 et moi en poste 4 mais ma coach voulait parfois que je défende sur elle car je la connais bien. Allison et moi avions un rôle très important dans nos équipes respectives. Elle

MJ (5M) Min % tirs 3-pts

LF

Reb

Pds

Pts

2009-10 Allison

36-5

19

48,8

-

52,9

4,9

0,4

6,7

Diandra

34-34

26

41,8

32-103

43,9

5,4

1,3

11,5

Allison

36-11

19

47,1

-

42,2

4,1

0,6

5,9

Diandra

32-32

25

43,6

14-52

50,5

5,0

1,4

8,7

9-0

11

58,1

-

47,8

3,1

0,5

5,2

2010-11

2011-12 Allison

arrivait dans une équipe où les seniors étaient déjà en place et la hiérarchie là-bas fait que les seniors passent en priorité. Moi j’arrivais dans une équipe en plein renouvellement où les seniors venaient de s’en aller. Actuellement Maryland et Duke sont au même niveau au classement national alors que moi quand j’y étais on était toujours derrière elles car elles étaient dans le top-10. Ce qui veut dire qu’il y a dans cette équipe des filles très fortes et plus vieilles, ça devient un peu compliqué. Mais j’ai revu Allison a la fin de la première année en équipe de France er je peux dire qu’elle a super progressée. »


12

maxi-basket

LES ÉCHOS Les matches de Ligue Féminine

Qui est la plus… ? Émilie Gomis

La plus sexy Émilie Gomis Française, 28 ans, 1,80 m, Villeneuve d’Ascq. Originaire du Sénégal. Championne d’Europe et une pluie de médailles durant sa carrière. De bons photographes qui savent la mettre en valeur. Bientôt 5.000 amis sur facebook. OU

Kristen Mann Américaine, 28 ans, 1,86 m, Lattes-Montpellier. Championne du Monde espoirs. Possède un blog en français et en anglais où elle parle de ses goûts culinaires. A fait des photos glamour pour le magazine Dime où l’on découvre ses tatouages.

La plus expérimentée Aurélie Bonnan Française, 28 ans, 1,87 m, Nantes. 13 saisons de LNB. Nantes-Rezé est son 5e club de ligue avec deux passages à Mondeville et à Tarbes. Sans parler d’un court intermède à Salamanque, en Espagne. Vorace au rebond. En bronze à l’Euro 2011. OU

Magali Lacroix Française, 36 ans, 1,87 m, Charleville-Mézières. Longtemps Aixoise et aux portes de l’équipe nationale, comme Aurélie Bonnan elle est membre de la LFB depuis sa création en 98, mais compte en fait en plus deux saisons en 1ère division, à Clermont et Limoges.

La plus grande

Aurélie Bonnan

Krystal Thomas Américaine, 22 ans, 1,96 m, Lyon. Sort d’une fac où on ne fait pas semblant d’ouvrir ses bouquins, Duke, et où elle a côtoyé la Française Allison Vernerey. Discrète depuis son arrivée entre Saône et Rhône. La jeunesse sans doute. OU

Cinq joueuses à 1,95 m : la Néerlandaise Krysten Boogaard (Nice), la Russe Nadezda Grishaeva (Arras), l’Espagnole Cindy Lima (Aix) et les Françaises Ana Maria Cata-Chitiga et Charlotte Preiss (toutes les deux de Tarbes). Et avec les talons, qui est la plus grande ?

Krystal Thomas

Magali Lacroix

Kristen Mann


maxi-basket 13

Par Pascal LEGENDRE

Amel Bouderra

La plus petite

Tracy Albicy

Tracy Albicy Française, 19 ans, 1,56 m, Hainaut. La petite sœur d’Andrew est minuscule dans un univers d’infiniment grandes. Deux saisons à Villeneuve avant de prendre de la maturité en NF2 (Évreux et Roche Vendée). N’est pas encore entrée en LFB à ce jour… OU

Amel Bouderra Française, 22 ans, 1,63 m, Chaleville-Mézières… Ce qui lui coûte -pour l’instant- ce trophée au profit de cette autre puce qui a connu son moment de gloire en marquant en octobre un incroyable buzzer beater de 25 m contre Nice.

La plus Française des étrangères Ana Lelas Croate, 27 ans, 1,84 m, Lattes-Montpellier. Cette internationale polyvalente a enchaîné Tarbes et Aix, puis Mourenx et Bourges avant de rejoindre l’Hérault. Problème : son infidélité à la France –une saison à Vigo en Espagne- a retardé son dossier de naturalisation. OU

Kristen Brooke Sharp Américaine, 30 ans, 1,75 m, Mondeville. 6e saison en France pour cette meneuse vue en WNBA dont la moitié à Aix. Estime que la France est le plus beau pays du monde et s’est fait tatouer sur son biceps son drapeau à côté de celui des États-Unis.

Le plus titré Audrey Sauret Française, 35 ans, 1,79 m, Lyon. Deux fois vainqueur de l’EuroLeague, sept fois championne de France, une fois en Italie, championne d’Europe avec l’équipe nationale et une fois en argent. Un record de 9 Tournois de la fédération. OU

Aldo Corno Ana Lelas

Aldo Corno

Kristen Brooke Sharp

Audrey Sauret

Photos : Pascal Allée/Hot Sports-FFBB

Italien, 61 ans, coach, Challes. Six fois vainqueur de l’Euroleague (Vicenza et Come), deux fois de la Ronchetti, 12 fois champion d’Italie, et de nombreuses autres breloques avec la squadra azzura qu’il a coachée de 1985 à 91, de 1994 à 95 et de 1999 à 2004. l

Erratum

•Les photos parues dans le numéro précédent sur le thème « Behind the Scenes » sont de Claude Pène.


14

MAXI-BASKET

Poser devant les objectifs, il se prête volontiers au jeu. « Je commence à avoir l’habitude »


REPORTAGE • MAXI-BASKET 15

IN BED WITH EVAN FOURNIER (POITIERS)

LA PASSION ET L’AMBITION HOOP SUMMIT, COMPÉTITIONS INTERNATIONALES, MEILLEUR ESPOIR, ALLSTAR, LES DISTINCTIONS SE MULTIPLIENT POUR LUI. À COURT TERME, IL PARLE TOUT HAUT DE NBA ET NE S’EN CACHE PAS. MAXI-BASKET EST ALLÉ À LA RENCONTRE D’EVAN FOURNIER POUR MIEUX CERNER LE QUOTIDIEN DE CE JOUEUR QUI, EN OCTOBRE DERNIER, FÊTAIT SES 19 ANS. Reportage à Poitiers, par Yann CASSEVILLE (texte) et Jean-François MOLLIÈRE (photos)


16

MAXI-BASKET

M

« C’est comme de la muscu classique, mais au niveau des ischio, quand ça pousse, c’est chaud ! »

ercredi 14 décembre à Poitiers. Attendu à dix heures aux Arènes pour une séance photo, Evan Fournier est ponctuel. Jusque ici, rien d’anormal… sauf à connaître le caractère du garçon, qui se décrit lui-même comme un cossard. « Je suis grave flemmard. J’aime bien me lever tard. Quand j’étais à Nanterre l’entraînement du matin était à 10h donc je devais me lever à 9h, je sais que c’est tard pour certains, mais pour moi… À Poitiers j’ai de la chance, je peux me lever souvent à 10h. » Evan a trouvé la parade pour gagner quelques minutes de rab dans son lit : son appartement est situé juste à côté de SaintÉloi (la salle la plus souvent occupée par le PB86, à quelques minutes des Arènes). En sortant de son immeuble, le basketteur n’a qu’une route à traverser pour se retrouver devant la porte de son terrain de jeu. « Une journée type c’est 10h30 musculation, entraînement. Ensuite l’après-midi entraînement à 17h30 donc ça me laisse du temps pour faire la sieste. Je rentre chez moi, il est 19h30, je me mets devant un film avec Laura (sa petite amie, ndlr), on mange et voilà. En semaine je ne sors pas. Je n’en ai pas envie. Je suis fatigué, j’ai envie de rester chez moi, sur mon canapé, au chaud. » D’un naturel flemmard, Fournier est d’autant plus casanier à Poitiers. Pour le banlieusard parisien, né dans le Val-de-Marne, qui a usé ses premières basket à Charenton, puis vers le bois de

Vincennes à l’INSEP et dans les Hauts-de-Seine à Nanterre, la transition avec le Poitou a forcément marqué une rupture dans son quotidien. Aujourd’hui, pour sa deuxième année à Poitiers, il a ses habitudes dans la ville ; le jeudi soir par exemple, c’est menu japonais. « Les cinémas, les bons petits restos… Maintenant on a pris nos repères. » « On », Evan parle au nom du couple qu’il forme avec Laura, rencontrée à l’INSEP. Il y a aussi les loisirs classiques, les jeux vidéo – « je joue pas mal en réseau avec des jeunes de mon âge comme Jérémy Nzeulie» –, les films. Dans son appartement, alors qu’il se prépare pour rejoindre le centre-ville, sa télévision est allumée. À l’écran : « Les deux tours », le deuxième volet du tryptique « Le Seigneur des Anneaux ». « J’adore ce film ! », lance Evan. « J’ai dû le voir

« Ici il y a des personnes qui ont eu des accidents graves, ça fait un peu bizarre au début »


REPORTAGE • MAXI-BASKET 17 plus de vingt fois, je le connais par cœur. » Effectivement, le voilà qui commence à réciter quelques répliques… devant la mine désabusée de Laura ; elle, qui partage son quotidien, elle, son repère. « Comme je ne vais pas en cours et que je ne sors pas de la semaine, je ne connais personne. Quand j’étais à Nanterre, je vivais seul mais Antoine Gomis était mon voisin. Là, ça m’aide que Laura soit là, elle m’aide à ne pas me sentir seul, parce qu’à Poitiers, en dehors du basket je ne fais vraiment rien donc je pense que je me serais fait chier. »

La carotte de l’INSEP

Fournier voit néanmoins un avantage indéniable à la vie poitevine : rester focaliser sur le basket. « Il y a beaucoup de tentations à Paris, et si tu sors, les gens ne vont pas te reconnaître tandis qu’ici, si tu sors en semaine, ça peut vite atterrir dans l’oreille de n’importe qui, du coach par exemple ! », se marre-t-il. Quand il se balade dans le centre-ville, s’il n’est pas arrêté tous les cinq mètres, il y a tout de même ces regards, ces personnes qui le saluent. En ce mercredi 13 décembre, il est environ 17h quand Evan tape à la porte du Drop’N’Shoot – un bar dont l’un des trois gérants est… Pierre-Yves Guillard. L’établissement est fermé mais pour Fournier, les portes s’ouvriront. Ni rockstar, ni parfait anonyme.

Ainsi le quotidien de Fournier est uniquement rythmé par le bruit du ballon sur les parquets. Car quand il s’agit de balle orange, le garçon quitte immédiatement le costume du paresseux pour enfiler le short, le débardeur et lacer les baskets. « Je suis flemmard mais pas pour le basket. Oui, oui, je suis basketteur pro, certains voient ça comme un métier, attendent la paye, moi c’est pas ça. Le basket c’est un plaisir. » Shooter, marquer, passer, dribbler, il en redemande sans cesse. « Je ne l’ai jamais vu dire : j’ai la flemme de m’entraîner. Jamais », confie Laura. « C’est un plaisir ! », reprend Evan. Lui qui dit ouvertement que les cours, l’école, « ça [lui] passait au-dessus de la tête », assure s’être levé tous les matins à 6h30 à l’INSEP pour suivre les cours. La direction du Centre Fédéral avait trouvé une « carotte » pour faire lever ses « ânes » : ceux qui désertaient les bancs de la classe le matin étaient privés d’entraînement l’après-midi. « Juste pour ça je n’ai raté aucun cours. C’était ma seule source de motivation. » Aujourd’hui, il se shoote au basket sans craindre l’overdose. Il se rend très régulièrement les soirs à Saint-Éloi pour s’astreindre à des séances de tirs. Evan tire, Laura prend les rebonds – elle faisait partie de la section basket de l’INSEP avant d’avoir dû arrêter le sport, la faute à des problèmes cardiaques. Les dimanches, il les passe avec un coach perso, l’un des entraîneurs du temps du pôle espoirs Île-de-France. Fournier ne laisse rien au hasard. « J’ai un préparateur physiqiue qui m’envoie des programmes avec ce que je dois manger. J’ai un entraîneur perso depuis un an, et maintenant, deux fois par semaine, je fais des séances de trente minutes sur Skype avec un psychologue du sport qui vient de l’INSEP. Il faut mettre en place des choses pour optimiser les performances. » Tous ces à-côtés, Evan en a précédemment parlé avec son agent, Bouna N’Diaye (assisté de Jérémy Medjana et Sébastien Raoul), et son club évidemment.

Repères Né le 29 octobre 1992 à Saint-Maurice (Val-de-Marne) Français

• Taille : 1,97 m

• Poste : Ailier

• Clubs : Centre Fédéral (N1, 2007-09), Nanterre (Pro B, 2009-10), Poitiers (2010-…)

• Palmarès : 2e de l’Euro U18 2009, 3e de l’Euro U20 2011, Meilleur espoir et meilleure progression de Pro A 2011

• Stats’12 : 13,1 points à 39,5%, 3,2 rebonds et 1,5 passe pour 8,6 d’éval en 26 minutes

Au milieu des accidentés

C’est d’ailleurs le PB86 qui lui a proposé d’effectuer des séances de musculation supplémentaires au Centre Hospitalier Universitaire de Poitiers. Le joueur suit depuis quelques semaines un protocole standardisé pour les athlètes de haut niveau afin de renforcer les muscles de ses jambes. Ici, une heure durant, à raison d’une à trois séances par semaine, il peut travailler sur des machines dont disposent des instituts comme l’INSEP, Marcoussis, ou des clubs de foot, mais pas de basket – l’appareil sur lequel Evan travaille, relié à un dispositif informatique, coûte 150.000 euros. Il est le seul de son équipe à suivre ce programme. « La muscu, pour les autres, c’est plutôt pour s’entretenir, ils ont dans les 30 ans, ils n’en ont pas forcément besoin. Pour moi, il y a une idée de développement derrière. » En cette journée du 13 décembre, à 14h30, Evan a rendez-vous au CHU. Il arrive dans le service intitulé médecine physique et réadaptation. « Ici il y a des personnes qui ont eu des accidents

Evan sort rarement, parfois au Drop’N’Shoot, le bar de Pierre-Yves Guillard.


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MAXI-BASKET

graves, ça fait un peu bizarre au début », glisse Evan juste avant de pousser la porte du bâtiment. En effet, le contraste est saisissant. Ici, un homme âgé occupé à arpenter le couloir, appuyé sur sa béquille, soufflant, souffrant après chaque aller-retour ; là, une jeune fille qui, en guise d’exercice pour ré-apprendre à marcher, doit enjamber les trois petits plots qu’un homme du personnel médical a placé sur sa route. Tout doucement, là voici qui parvient, non sans mal, à lever la jambe, de quelques centimètres seulement, réussissant tout juste ce geste tout simple pour un quidam, cet exploit pour elle. Au milieu de ces personnes qui tentent de refaire leur corps, Evan Fournier, son t-shirt du AllStar Game sur le dos, parfait le sien. Après s’être échauffé sur un vélo d’appartement, il entre dans une pièce à part pour commencer le travail spécifique. Il s’asseoit sur une banquette, enclenche une ceinture de sécurité. Ses jambes maintenues par des sangles, il entame maintenant, comme dans un jeu vidéo, son combat contre l’ordinateur. « Tire, freine, tire, freine », l’encourage le médecin. « Je t’avais mis 200 Newton (environ 18 kilos, ndlr), comme t’as dépassé l’appareil

a débrayé », commente-t-il à la lecture des résultats, affichés instantément sur un écran sous forme de graphiques, de courbes. Après quelques mouvements, le visage du basketteur se durcit. « C’est comme de la muscu classique, mais au niveau des ischio, quand ça pousse, c’est chaud ! Vraiment, ça envoie du lourd. » Après une heure d’efforts, Evan quitte le CHU, les jambes lourdes. La semaine prochaine, il affronte un défi inédit avec trois séances en trois jours : lundi 9h, mardi 10h30, mercredi 9h. Oubliées les grasses matinées.

« Laura m’aide à ne pas me sentir seul, sinon à Poitiers je me serais fait chier »

Avec Laura, sa petite amie, devant Le Seigneur des Anneaux : « je le connais par cœur »

Grandir entouré de champions

Cette éthique de travail, cette envie de bosser toujours plus pour atteindre ses objectifs, Evan en a hérité de ses parents, tous deux anciens judokas internationaux. « Quand j’étais tout petit, ma mère ne me disait pas : l’important c’est de participer (rires) ! Mon père m’a toujours dit : quand tu fais quelque chose, tu le termines, jamais tu ne baisses les bras.Je l’ai vu combattre en K7, je l’ai vu coacher des judokas, j’étais juste à côté, j’étais dedans. » Gamin, le minot est déjà plongé dans le sport de haut niveau. Avec son paternel, il


REPORTAGE • MAXI-BASKET 19 rencontre dès son enfance les judokas de l’équipe de France, ou encore des athlètes comme Marc Raquil, Christine Arron, des cyclistes comme Florian Rousseau, la liste est longue. Alors qu’il est en benjamin, au club de Charenton, là où il a débuté le basket à l’âge de huit ans et où il rafla bon nombre de titres de champion de France, il participe – avec le concours de Fabrice Canet, attaché de presse de la FFBB et président de Charenton – au programme télévisuel « C’est quoi ton sport ? » Le principe est qu’une star joue avec un jeune. En l’occurrence, à 12 ans, Fournier a le privilège d’affronter … Boris Diaw. « C’était à Marcel Cerdan. On a fait un un-contre-un pendant longtemps, au moins 2h, 2h30. J’ai vu tellement de champions que pour moi, Boris, c’était quelqu’un de normal. » Quant à son joueur préféré, s’il dit apprécier les Dimitris Diamantidis, Manu Ginobili, Kobe Bryant, LeBron James, il s’agit de… Mike Bibby. « Quand j’ai commencé à regarder la NBA, je suis tombé sur les playoffs Lakers-Kings, j’ai vu Mike Bibby. Il était extraordinaire à l’époque, il mettait des shoots au buzzer incroyables, c’est con côté clutch qui m’a plu. » Il a également passé des heures à regarder des vidéos d’Allen Iverson pour mémoriser sa technique et tenter de reproduire ses cross foudroyants. Mais aujourd’hui, il réfute le terme de « fan ». À être élevé par des sportifs de très haut niveau, à cotoyer en

permanence cette espèce si particulière, Evan a appris à ne pas les idéaliser. Il n’idolatrera jamais un champion, il veut en être un. Il n’aime pas utiliser le mot « rêve ». « Depuis que je suis poussin, je dis que je veux aller en NBA. Quand t’es petit, on dit que c’est un gosse qui rêve mais ce n’est pas un rêve, c’est un objectif. Rêve, ça fait inaccessible. » Aujourd’hui encore, ses parents occupent un rôle très important dans son équilibre. « Ils ne me font pas un débrief après le match, simplement quand il y a quelque chose qui ne va pas, quand je me comporte mal, ils me le disent. Ma mère m’encourage, c’est vraiment du genre : allez fiston, vas-y ! Mon père, comme il était entraîneur, il analyse mon comportement, ce que je devrais faire, c’est vraiment pointu. Il était très reconnu pour ça dans le milieu du judo. Et c’est mon père, donc il trouve les mots. » Ainsi ses parents l’accompagnent… au sens premier du terme : « Ils viennent pour tous les matches. Tous, tous les deux, que ce soit en Italie, à Zagreb, partout ! »

« Non, raconte pas ça ! »

Evan Fournier professionnalise au maximum son quotidien, respirant basket, avec son objectif américain en ligne de mire. Il n’en reste pas moins

« Quand j’étais tout petit, ma mère ne me disait pas : l’important c’est de participer ! »


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MAXI-BASKET

« À l’INSEP, ils pensaient qu’on allait mettre le feu aux bâtiments ! »

Depuis son balcon, Evan a vue sur… Saint-Eloi ! Pratique pour aller bosser.

un jeune de 19 ans. Qui doute, parfois, aussi. Dans ces moments, même s’il sait qu’il peut compter sur sa copine ou ses parents, il préfère la jouer gros dur : « Quand j’ai des périodes un peu compliquées je ne parle quasiment à personne, peut-être à Laura, c’est tout. J’ai tendance à vouloir dire : je suis plus fort je vais y arriver. Mais à tort, ça joue des tours. » Ce n’est pas Laura qui dira le contraire : « Il ne va pas vers les gens. Quand ça ne va pas, il ne m’en parle pas directement. » Surtout, comme tout jeune, il aime la déconne. Allez lui parler de l’INSEP... Vous avez à peine le temps de lui demander quels souvenirs lui reviennent instantanément que son sourire s’élargit. Il se marre, Laura également. « Je ne peux pas tout te raconter. Franchement on

faisait n’imp’. Tu sais, quand tu mets 17 gars de 18 ans ensemble, ça te donne des scènes mythiques. Les gens disaient que nous, les 91-92, on était la pire génération qu’il y ait jamais eue, avec les Joffrey Lauvergne, Kévin Mondésir, etc. » Laura, témoin privilégiée de cette époque, de confirmer : « C’était abusé, ils étaient tous ensemble dans les conneries. Tout le temps, tous ensemble ! » Des anecdotes de l’époque du Centre Fédéral, Evan en a en pagaille. Il y a les sorties nocturnes : « Dans le stade couvert avec la piste d’athlétisme, on rentrait, illégalement, le soir, vers 2h, et on faisait des chasses à l’homme, des batailles d’eau, n’importe quoi. » ; il y a également l’épisode du petit déjeuner : « le repas c’est de 6h30 à 7h30, normalement tout le monde y va à 6h30 la tête dans le cul histoire de prendre un truc vite fait et de remonter dormir, mais un soir, on s’est dit : on va foutre la merde au p’tit déj. Le lendemain on s’est tous ramené à 6h30 avec nos enceintes, nos iPod et on a mis le son à fond, on était habillé n’importe comment, en peignoirs. » Toutes ces histoires, Evan et Laura en rigolent encore, devenant intarissables. Elle : « Nous les filles, on avait nos délires entre nous. » Lui : « Mais on vous faisait marrer ! Par exemple une fois, il faut savoir que les salles de cours sont juste en dessous et… » Elle, coupant : « Non, raconte pas ça ! » Lui, reprenant : « Mais si. Donc les salles de classe étaient ouvertes et on s’est dit : demain on ne va pas en cours. » Elle : « Ah, c’est cette histoire-là ? OK alors. » (L’autre anecdote restera secrète.) Evan continue : « Donc un soir on on a vidé toutes les classes en enlevant les chaises. Le lendemain il a fallu une demi-heure pour les retrouver, donc une demi-heure de cours grillée ! » Deux ans durant, Evan enchaînera donc les gentilles conneries aussi rapidement que les paniers. « Pierre Thomas (reponsable de la scolarité à l’INSEP) disait qu’on allait mettre le feu aux bâtiments. Les gens pensaient ça, je te jure c’est vrai ! On faisait peur aux gens, c’était trop marrant. »

« Jeune fou dans le vestiaire »

Après l’INSEP, Evan a la chance d’arriver au sein d’un effectif jeune à Nanterre, avec Jérémy Nzeulie, Jonathan Tornato, Antoine Gomis. « On peut ajouter Marc Judith et Loïc Akono. On faisait des conneries aussi, la transition n’a pas été difficile. » Après avoir régné au Centre Fédéral (17,0 pts), il découvre le monde pro, en deuxième division, dans le club de la banlieue parisienne (6,4 pts). Surtout, il apprivoise un nouveau quotidien. « C’est ma première année tout seul, je devais me faire à manger, m’occuper de ma lessive, etc. » Sorti de l’INSEP à l’issue de son année première, c’est à ce moment qu’il met un terme à ses études, avant d’aborder la terminale. « J’ai commencé à prendre des cours par correspondance à Nanterre mais avec le rythme pro, travailler à 21h c’était mission impossible. » Meilleur espoir et progression de la Pro A pour sa première saison dans l’élite, All-Star pour la deuxième, Evan est aujourd’hui à un tournant de sa carrière. La déconne, il ne l’a pas abandonnée – « j’apporte ma touche de jeune fou dans le vestiaire, parfois ils ont des conversations qui ne m’intéressent pas forcément donc je me fous de leur gueule, je suis le p’tit jeune qui fait rigoler tout le monde » –, mais il ne peut se cacher derrière. « Il a un nouveau statut », convient son coach Ruddy Nelhomme. Poitiers étant en difficulté en championnat – 2-9 au moment d’écrire ces lignes –, le club attend forcément une révolte de ses joueurs, et, donc, d’Evan.


REPORTAGE • MAXI-BASKET 21 Auteur de matches remarquables (27 pts à 11/17 au Mans, 23 unités face à Strasbourg), il est encore trop inconstant, parfois franchement décevant (-4 d’éval contre Chalon), à l’instar de son équipe. Avec l’étiquette de « jeune étoile du basket français » lui collant à la peau, ses mauvaises performances sont aussi remarquées que ses coups d’éclat : « Au début de saison je faisais des matches pas supers donc ça me gonflait qu’on parle autant de moi mais je commence à m’y habituer. Au Hoop Summit il y avait 40 scouts NBA qui nous regardaient. » La période n’est pas simple pour un joueur qui a toujours connu le succès, hormis dans le contexte particulier de l’INSEP. « J’ai toujours gagné, à Charenton, à Nanterre. Je déteste perdre donc là, ça m’atteint. Franchement, ça m’atteint. Mais ça va m’apporter parce que quand tu perds t’es constamment en train de te remettre en question. » Evan le sait, il a beaucoup de choses à prouver. « Il doit encore progresser », confirme coach Nelhomme. « Il aime scorer, c’est son point fort, en plus on a besoin qu’il marque des points mais en même temps il doit apprendre à créer un peu plus pour les autres. C’est un peu comme Nando De Colo, ce n’est pas évident pour ces joueurs-là d’alterner entre les postes, d’être autant à l’aise à la finition qu’à la création. »

–, se jauge face aux meilleurs de sa génération. « C’est là, en jouant contre d’autres pays, que tu te rends compte qu’il y a différents types de basket, il faut s’adapter, trouver une autre façon de marquer. Il y a tellement de choses à travailler, je veux progresser partout. » Ainsi, dans ses séances individuelles à la salle, il ne privilégie aucun domaine, travaille un jour le tir statique, le lendemain son dribble, etc. Et même son anglais ! Deux fois par semaine, Evan accueille une professeur pour deux heures d’apprentissage, ou plutôt de perfectionnement. « Je peux tenir une conversation, c’est de l’anglais littéraire, par exemple je connais certains mots mais je ne sais pas les écrire. C’est un échange, ce n’est pas trop scolaire. » Pour lui qui n’a jamais aimé les études – « j’avais tellement d’objectifs dans le basket, j’y pensais tellement que l’école a me passait au-dessus » –, s’asseoir à côté d’un enseignant pour dialoguer en anglais montre à quel point il est important pour lui de maîtriser la langue de Shakespeare. La langue que l’on parle en NBA. « Poitiers est un passage dans ma carrière, je ne m’en cache pas, le coach le sait. L’INSEP, le pôle Île-de-France étaient des étapes. Il y a de la route mais ce n’est pas si loin que ça. » Logiquement, en accord avec son agent et à la lecture des différentes mock drafts (celle de DraftExpress l’annonçant 21e choix), il se présentera à la Draft de juin prochain, « si je fais une bonne saison », précise-t-il. En tous les cas, né en 1992, Fournier, sous contrat à Poitiers jusqu’en 2013, sera encore éligible en… 2014. Toutefois, s’il est sûr de lui, de l’avenir qu’il veut connaître, il garde les pieds sur terre. Lorsque sont évoquées les récentes déclarations de Tony Parker au sujet des Jeux de Londres – « Je pense qu’Evan Fournier sera avec nous cet été pour compléter l’équipe », a dit TP –, il calme le jeu. « C’est une sorte de reconnaissance mais ça ne change rien, je ne vais pas m’arrêter de bosser. J’ai une saison à faire. Avant de parler de tout ça, il y a le travail à fournir. » Son passe pour entrer dans la salle de SaintÉloi, Evan Fournier n’a sans doute pas fini de l’utiliser. l

« Depuis que je suis poussin, je dis que je veux aller en NBA ; ce n’est pas un rêve, c’est un objectif »

Quand Parker évoque les J.O.

Dans son appartement, ses trophées sont disposés sur un petit meuble accolé au mur où est affiché un tableau représentant une scène de vie aux États-Unis ; comme la trajectoire qu’il a imaginée. « Quand j’étais tout petit je me disais : je veux entrer à l’INSEP, je vais faire deux ans, je vais entrer dans un club pro, au bout de ma deuxième année en Pro A je vais aller en NBA. Pour l’instant ça marche pas mal donc j’espère que ça va continuer. » Charenton, la N1 avec l’INSEP, la Pro B à Nanterre, puis la Pro A, aujourd’hui à Poitiers : Evan gravit les échelons étape par étape. « J’ai beaucoup appris partout. » Il dit notamment progresser énormément lors des étés avec les sélections de jeunes, là où il se frotte aux Valanciunas, Gentile, Kanter – « un bison »

En bas, ses trophées en LNB, en haut, son objectif : les Etats-Unis


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maxi-basket

MOUHAMMADOU JAITEH

OBJECTIF ? TURIAF ! Il est le leader du centre fédéral en Nationale 1. Un gamin (17 ans) qui joue déjà comme un homme. Grand (2,05 m pieds nus, 2,08 m en basket) costaud (déjà 102 kilos), ses stats en cours de saison interpellent. Découverte avec son coach Jacky Commères. Par Thomas BERJOAN

«

La comparaison avec Ronny (Turiaf) est une comparaison qui m’intéresserait », nous confie Jacky Commères, coach du centre fédéral et assistant de Vincent Collet en équipe de France. « Ce serait bien qu’un jeune comme Mam’ (le surnom de Mouhammadou) ait pour objectif d’atteindre l’image d’un joueur comme Ronny. Dans l’énergie, le rebond, l’intelligence et la justesse défensive, la vitesse, la présence au poste et pourquoi pas un profil un peu plus extérieur. L’erreur en revanche, serait de croire qu’il est sur les rails et qu’il est déjà arrivé. Alors qu’il y a encore un monde d’écart entre eux. » Le coach fédéral, qui connaît bien les trajectoires, réussites et échec parfois, des gamins de 17 ans tient un discours de formateur. Il a raison. Rien n’est encore fait. Jaiteh n’est pour l’instant qu’un joueur de N1 dans une équipe qui perd tous ses matches. Mais le potentiel est vraiment là. Un coup d’œil à ses statistiques (voir encadré) sur ce début de saison confirme la première impression. Actuellement, Mam’ est la quatrième évaluation de N1 (19,9, derrière trois étrangers). « Il résiste aux pivots adverses dans la défense en un-contre-un, il est solide, fort musculairement, courageux », note coach Commères. « Il peut jouer en encaissant les contacts. C’est un bon rebondeur offensif et défensif, il est intelligent il a le sens de l’aide et du contre. En attaque, il est mieux dos au panier que face au panier. Il a encore des progrès à faire. » C’est évident. Plus intéressant encore que ses chiffres bruts, c’est la comparaison qu’on peut effectuer avec les autres intérieurs dominants passés ces dix dernières années à l’INSEP (voir encadré). Le tableau donne les statistiques au même âge, dans les mêmes conditions.

« Je suis extrêmement prudent »

Pour l’instant, Jaiteh fraye dans les mêmes eaux que Turiaf, en dessous du phénomène Diaw (il faut se rappeler de l’avion de chasse physique qu’était Bobo à 17-18 ans). Mais au-dessus des autres. Plus que les points (le contre-exemple d’Aurélien Salmon, aujourd’hui en Pro B, invite à la prudence), c’est surtout l’abattage au rebond qui est intéressant. « Je suis extrêmement prudent par rapport à la potentialité », tempère tout de suite le technicien de l’INSEP. « Les choses peuvent se dégrader s’il s’imagine être un autre joueur. Mam’ est en formation. Il est en train de franchir des caps, mais c’est trop tôt pour lui de prévoir un type d’avenir même si je pense qu’il a vraiment un potentiel de joueur pro. Mais il ne faut pas en rester là. » Ça tombe bien. Depuis un an, la courbe de progression de Jaiteh laisse entrevoir de belles choses. La saison dernière (4,5

pts à 38,2%, 5,6 rbds, 0,3 pd et 0,3 ct en moyenne en 17’ en N1), il a vraiment peiné à s’adapter au niveau, montrant toutefois en deuxième moitié de saison des signes encourageants. Avec les Bleuets, même tendance. À l’été 2010, avec les moins de 16 ans, il signe un Euro moyen (7,0 pts et 6,1 rbds en 19’). L’été 2011, il joue avec les moins de 18 alors qu’il n’a pas 17 ans et pourtant, son tournoi est d’un tout autre acabit (11,7 pts et 9,8 rbds en 25’). Cet été, il sera le leader de sa génération dans un tournoi qu’il connait donc déjà. On peut attendre beaucoup de lui. « C’est un garçon qui a vraiment compris beaucoup de choses dans l’attitude et le comportement », reprend coach Jacky. « Il est très attentif, concentré avec un niveau d’écoute très élevé par rapport à sa génération. Je crois qu’il a une vision juste de ce que vont être les attentes d’un coach de haut niveau. Les choses basiques et fondamentales. Ça passe par la présence au rebond, la défense, la volonté de ne pas perdre la balle – même s’il la perd encore beaucoup trop je trouve. Mais il ne cherche pas à montrer des trucs. Il a une forme de sagesse et de maturité. Par rapport aux entraînements collectifs, individuels ou en vidéo, c’est un garçon qui cherche à transférer en match les choses simples et justes qu’on lui montre. Ça fonctionne et il progresse. »

La clé ? La vitesse et l’explosivité

Jaiteh, né à Pantin, a découvert le basket assez tard, après le foot, à Nanterre. Rapidement il a intégré le pole fédéral à Châtenay en Île-de-France mais ses débuts au basket ont été perturbés par un accident, avec des complications à la mâchoire et à la jambe. Sa jeunesse dans l’appréhension du sport est un handicap, forcément, mais laisse également entrevoir une belle marge de progression. Physiquement, Jaiteh est formé pour jouer au pivot. Il manque un peu de taille mais son envergure impressionnante lui permet de compenser. « Cette année, il est amené à travailler aussi en 4 », ajoute coach Commères. « On fait un travail important avec lui sur son aptitude à tirer à troispoints et à avoir plus d’aisance dans le jeu face au panier et aux départs en dribble. » Malgré tout, la question principale pour ce grand totem est de savoir si Mam’ va développer la vitesse et l’explosivité nécessaire pour dominer au plus haut niveau. « Il a quand même des qualités de saut mais il doit développer sa vitesse, c’est vrai », poursuit l’entraineur. « Il travaille beaucoup avec Fred Aubert le préparateur physique sur des séances de vivacité. C’est essentiel. Mais il faut lui amener ça, tout en conservant la précision technique. » Tout un programme. l


FOCUS • maxi-basket 23

Des meilleures stats que Moïso, Ajinça et Vaty au même âge !

Joueur Boris Diaw Ronny Turiaf Mouhammadou Jaiteh Aurélien Salmon Jérôme Moïso Livio Jean-Charles Ludovic Vaty Alexis Ajinça Alexis Tanghe Johan Petro (17 ans) Olivier Gouez

MJ 25 21 11 22 27 30 29 25 26 13 24

Min nc 28 31 26 nc 30 29 27 31 25 16

% Tirs Rbds Pds 62,5 9,2 5,0 54,7 10,5 nc 57,1 10,4 1,2 42,6 3,7 0,8 58,8 8,5 1,6 53,8 5,4 1,4 51,6 6,0 1,1 49,5 5,6 1,0 44,6 5,5 1,2 51,9 6,2 0,8 53,8 4,4 0,4

Cts 1,8 1,3 1,0 0,1 nc 0,5 0,4 0,8 0,2 0,5 1,2

Pts 16,8 16,3 14,7 14,6 13,6 13,0 12,5 11,3 11,2 10,5 6,5

FIBA Europe / Wojtek Figurski

Les intérieurs de l’INSEP au même âge


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MAXI-BASKET MAXIBASKETNEWS

DS N A R G S LE TIENS ENTRE de

J.K. EDWARDS JUBY JOHNSON (GRAVELINES-DUNKERQUE)

(GRAVELINES-DUNKERQUE)

ÉQUIPE PHARE DU DÉBUT DE SAISON, ON PARLE BEAUCOUP DU BCM CETTE ANNÉE, POUR SES BONS RÉSULTATS MAIS AUSSI POUR SON IMPORTANT CONTINGENT DE JOUEURS FRANÇAIS, PHÉNOMÈNE PLUTÔT RARE DANS L’HISTOIRE RÉCENTE DE LA PRO A. MAIS DANS CETTE « FRENCH TEAM » DE GRAVELINES, ON OUBLIE PARFOIS L’IMPORTANCE DE JULIUS « JUBY » JOHNSON ET J.K. EDWARDS. AVEC CHACUN DEUX ANS DE BCM DERRIÈRE EUX, LES DEUX HOMMES SONT TOUT SAUF DES MERCENAIRES – J.K. EST MÊME REVENU CETTE ANNÉE APRÈS UN AN PASSÉ EN UKRAINE – ET SI GRAVELINES CRÈVE L’ÉCRAN, C’EST AUSSI EN GRANDE PARTIE GRÂCE À EUX. SPECTACULAIRES SUR LE TERRAIN, JOHNSON LE SHOOTEUR FOU ET EDWARDS LE MAÎTRE DES RAQUETTES LE SONT AUSSI EN INTERVIEW, OÙ LEURS RIRES RAISONNENT SOUVENT TRÈS FORT. Propos recueillis par Florent de LAMBERTERIE

Pasal Legendre

Reportage photos : Hervé BELLENGER


LES GRANDS ENTRETIENS DE MAXI-BASKET • MAXI-BASKET 25


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MAXI-BASKET

COULISSES Le lieu Salle de conférence de presse du Sportica, à Gravelines. Le jour Vendredi 16 décembre. L’heure De 22h30 à 23h30, peu après la victoire de Gravelines contre Orléans. Le décor Une table, trois chaises et deux gobelets en plastique remplis de soda.

«PFFF!JUBY, JUBY…MAISÇA VEUTDIREQUOI JUBY!?» J.K. EDWARDS

Quel souvenir gardez-vous de votre première rencontre ? Juby Johnson : Quand je suis arrivé ici pour la première fois (en mars 2010, ndlr), j’avais déjà entendu des bonnes choses à propos de J.K. Je suis allé chez lui et J.K., c’est un cuisinier. Il avait préparé plein de nourriture, c’était très bon, très sympa. C’est un bon gars, on a une vraie amitié. J.K. Edwards : Oh non, ne lui donne pas tous les détails ! (Les deux hommes éclatent de rire) Je l’ai tout de suite invité chez moi, toute l’équipe était là, j’avais fait à manger pour tout le monde. Je fais souvent ça quand un nouveau joueur arrive, ça aide à créer une atmosphère familiale au sein de l’équipe. Vous êtes devenu tout de suite amis ? JJ : J’ai apprécié ce qu’il avait fait pour moi, l’invitation et tout ça. Mais c’est vraiment cette année que J.K. est devenu un très bon ami à moi. On peut tout se dire, des trucs débiles comme ce qui est important. Certaines personnes enjolivent les choses mais on ne devient pas amis comme ça, facilement, ça demande un peu de temps. JKE : Au début, c’est plus du respect, de la confiance. JJ : Mais aujourd’hui, je considère vraiment J.K. comme un ami, au-delà du basket. J.K. tu confirmes ? JKE : Parfois, parfois. (Rires) Quand on arrive dans une nouvelle équipe et qu’on est Américain, c’est plus facile d’aller vers les compatriotes au début ? JJ : C’est toujours plus facile. JKE : Oui, c’est un peu pareil qu’un Français qui parlera

plus facilement français avec un autre Français. Mais bon à Gravelines, il n’y a pas vraiment de groupes. Les Français parlent tous anglais avec nous, on sort souvent tous ensemble après les matches. Après, pour certains trucs comme regarder un film, c’est plus facile de partager autour d’une même langue. JJ : La majorité des Français parlent quand même bien anglais. JKE : La plupart, sauf Yannick Bokolo. Yannick, son anglais, c’est terrible ! Mais globalement les Français parlent bien anglais, c’est le cas à Gravelines ça l’était aussi dans mes anciens clubs. C’est normal, il y a toujours eu beaucoup de joueurs américains autour d’eux. JJ : En Croatie (Juby a joué cinq ans à Zadar avant de rejoindre Gravelines, ndlr), tout le monde parlait anglais, en tout cas la grande majorité des gens, c’était beaucoup plus facile pour moi quand je suis arrivé là-bas la première fois. On parle beaucoup de cette équipe de Gravelines parce qu’elle affiche de très bons résultats cette année, mais aussi en tant que « French Team », parce qu’il n’est pas courant de voir autant de Français dans une équipe de Pro A. Mais en disant cela, on a tendance à oublier qu’il y a aussi des Américains, en l’occurrence vous… JKE : Je suis trop vieux pour ces trucs-là. JB : Pour être honnête, je ne savais même pas qu’on nous appelait comme ça. JKE : Je ne suis pas coach, je ne lis pas la presse. JB : Et puis « French Team »… Oui, il y a une majorité de joueurs Français mais on est juste une équipe. JKE : On fait ce qu’on a à faire. JB : On veut gagner, et moi je me moque de savoir combien de matches j’ai déjà gagné, je veux toujours gagner le suivant. C’est un truc que beaucoup de gens ne comprennent pas mais plus il y a de bons joueurs, mieux c’est. Si J.K. et moi jouions dans une autre équipe, on jouerait beaucoup, beaucoup plus que cette année à Gravelines, notre rôle serait bien plus grand. Mais quand tu as des joueurs qui acceptent leur rôle, c’est beaucoup plus efficace. On pourrait se plaindre parce qu’on sort du banc, mais ce n’est pas ça qui nous intéresse et c’est la grande force de notre équipe. JKE : Tout le monde joue le jeu. Quand un joueur n’est pas dans un bon jour, un autre va être en réussite. Pour le moment, personne ne tire la couverture vers soi et ça marche donc… JJ : Tu peux toujours dire que tu étais la pièce importante d’une équipe, la star, mais moi ce que je veux c’est gagner. Et là, on est encore tôt dans la saison et je ne veux même pas m’attarder sur ce qu’on a fait jusqu’ici, ce qui m’intéresse c’est la suite, devenir encore meilleur. C’est quand tu cherches à devenir meilleur que tu gagnes les matches. Première place, 2e place au classement, on s’en fout. JKE : Tu peux être premier de la saison et perdre en juin, alors que c’est ça qui compte. On a perdu contre Dijon. Ok ! Et alors ? Juby, tu en es à ta 3e saison avec Gravelines. J.K., après deux ans au BCM, tu es parti en Ukraine, avant de revenir cette saison. Pour quelles raisons continuez-vous avec Gravelines ? JKE : À Donetsk, les choses s’étaient bien passées pour moi mais à la fin de la saison, Christian m’a appelé. Il m’a parlé de ce qu’il avait essayé de construire depuis plusieurs années à Gravelines et qu’il aimerait que je revienne, avec des gros projets : la possibilité d’aller en Euroleague, une équipe forte… Je n’avais pas vraiment comme objectif de revenir à Gravelines mais je connaissais beaucoup de joueurs qui y étaient, ma femme et mes enfants avaient adoré vivre ici, ils avaient des amis, une école qu’ils connaissaient. En fait, ça n’a pas été une décision très difficile à prendre. En Ukraine, ma famille n’était pas avec moi, l’année m’a paru très longue, ennuyeuse et froide, incroyablement froide. Mes journées, c’étaient entraînement, maison, entraînement, maison. Ça allait me tuer. JJ : Moi, j’ai la nationalité croate maintenant, donc c’était facile pour moi de partir n’importe où en Europe, en Italie, en Espagne,


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Gravelines n’a quand même pas grand-chose à voir avec Cleveland ou la Caroline du Nord, vos régions d’origine. Ça ne doit pas être facile de débarquer ici, dans une toute petite ville ? JJ : Ça, ça vient avec l’expérience. Je peux vivre n’importe où du moment où ma famille est avec moi. Quand tu as ça, tu n’as pas vraiment besoin d’autre chose. Gravelines n’est peut-être pas une grande ville mais tout est facile d’accès et puis on peut se prendre une soirée pour faire la fête si on veut. Vous avez le temps de visiter un peu, de voir d’autres choses que votre lit et la salle de basket ? JJ : Oui, grâce au coach. JKE : Il nous traite comme des professionnels. À l’entraînement ou en match, tu dois donner le meilleur que tu peux mais en dehors de ça, il nous laisse vivre. JJ : La plupart des coaches se trompent selon moi, ils ne s’attardent pas sur le plus important. Ils veulent tout contrôler. Christian, si t’es sur le terrain, il veut du 110% d’investissement mais en dehors, il te respecte en tant qu’homme, il te laisse faire tes propres choix. Pour certains : c’est pose ton téléphone ! Fais ci, fais ça ! JKE : Tu peux t’amuser, faire ce que tu veux, pas de problème tant que tu es là à 100% le samedi soir. C’est du respect. JJ : Et ça te donne envie de te défoncer encore plus pour lui. Ce n’est pas courant ? (Collégialement) Non ! JJ : Pour plein de coaches, il faut t’entraîner, t’entraîner, t’entraîner…

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JKE : Ils te tuent ! JJ : Je le dis, c’est vraiment pas la bonne façon de faire ! JKE : Physiquement, ça te bousille. J’ai testé ça l’an dernier. On s’entraînait deux fois par jour pendant deux heures et demie à chaque fois. C’était comme ça tous les jours. En plus, on devait tous manger ensemble, il fallait tout le temps se réunir, qu’on dorme le même nombre d’heures. Mais mon corps n’est pas le même que le tien ! Certains ont besoin de dormir une heure avant le match, d’autres plus, d’autres moins. JJ : Le plus dur c’est mentalement, quand quelqu’un essaye de te contrôler tout le temps. JKE : Qu’est-ce que tu vas me contrôler ?! Je suis père de famille moi, je peux prendre mes propres décisions quand même ! Avec Christian, sur le terrain, c’est son business, en dehors du terrain, c’est ton business. Plus jeunes, aviez-vous déjà pensé à jouer un jour en Europe ? JJ : Non, jamais. Avec mon lycée, on a été champion de l’État et après je suis allé à l’université à Miami. J’ai fait une très bonne carrière universitaire, j’ai participé à des camps avec les Cavaliers, les Celtics, mais ça ne s’est pas fait et c’est ensuite que j’ai eu la possibilité d’aller jouer en Croatie, où je suis finalement resté cinq ans. Mais je ne regrette pas du tout d’être venu en Europe, c’est une super expérience à vivre. Mais avant cela, je ne pensais qu’à une chose : NBA. JKE : Moi, je ne vais pas te mentir. J’ai commencé à jouer sérieusement au basket vers 15-16 ans et je jouais aussi au football américain. Je faisais les deux en parallèle, mes journées étaient chargées ce qui m’a permis d’éviter de faire des conneries. Ensuite j’ai rejoint un junior college parce que je n’avais pas mon diplôme de lycée et puis je suis parti pour Vegas, à UNLV (l’université de Las Vegas, ndlr). Et sincèrement, c’est la plus mauvaise décision que je n’ai jamais prise dans ma vie. J’ai adoré mes années à Las Vegas, adoré la ville, les gens avec qui je vivais mais pour le basket, il n’y a rien de pire. Attends, j’avais 19 ans, je vivais à Vegas, la ville des lumières et de la fête ! Et puis à Las Vegas, il n’y a pas d’équipe pro donc quand tu es dans l’équipe de la fac, tu es la star, surtout que la seule vraie bonne équipe d’UNLV, c’est l’équipe de basket. T’as 19 ans, on te traite comme une star NBA, il y a des soirées organisées tout le temps… Dans ces

« LA VRAIE QUALITÉ DE JUAN KHALIF, C’EST SON NOM »

JUBY JOHNSON

Jean-François Mollière

des plus gros marchés. Mais honnêtement, j’ai choisi de rester ici à cause du coach. JKE : Oh oui ! Pour moi aussi le coach était important. JB : Plus que ça, toute l’organisation, ici ils font le boulot, c’est très professionnel et moi j’aime ça. Mais la raison principale, c’est le coach. J’adore ses systèmes, ses entraînements, sa vision du basket. Et puis il respecte les joueurs. Déjà, il a joué en tant que professionnel avant, donc il sait ce que c’est et ça se sent, il respecte ses joueurs, il respecte la santé, le corps. Et puis ici, c’est une atmosphère familiale, on est tous proches les uns des autres.

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conditions, le basket devient un peu secondaire. Bref, je n’avais jamais pensé à partir jouer en Europe, je pensais arrêter le basket et puis un jour, un type de chez moi est venu me voir et m’a dit qu’il pouvait me proposer un job à Quimper. J’ai dit ok, je vais essayer. JJ : Pour moi, l’Europe était la seule option. En dehors du basket, je ne vois pas comment j’aurais pu gagner ma vie. Quand tu es jeune, tu joues pour l’amour du jeu, pour le fun mais après, tu as une famille à nourrir, tu joues pour l’argent. JKE : T’utilises ton talent pour gagner ta vie, comme toi, tu écris des papiers pour gagner la tienne. C’est pour ça que quand j’entends tous ces mecs en NBA ou ailleurs qui disent : « J’adore le basket, je joue parce que j’aime le jeu. » Mais t’aimes pas le jeu, t’aimes l’argent ! Tu n’aimes pas le basket J.K. ? JKE : J’aime le sport, j’aime la compétition, je pourrais jouer au hockey sur glace, juste parce que j’aime la compétition. Bien sûr j’aime le basket mais je ne jouerais pas juste pour l’amour du jeu, ce n’est pas vrai et je n’aime pas les mensonges. Si tu aimes vraiment le basket, va jouer en NBA pour le salaire minimum au lieu de prendre 8 millions par an. Moi, j’aurais bien aimé travailler dans un casino et si tu me payes bien, je peux faire un autre boulot que basketteur. J’ai une famille à nourrir, tant que c’est un boulot légal, pas de problème. Avez-vous hésité avant de venir tenter votre chance en Europe ? JJ : Non, ça n’a rien de difficile. Tu signes un bon contrat pour faire ce que tu aimes faire, jouer au basket, à l’étranger. En plus tu changes de vie, c’est excitant. Bien sûr, sur le coup tu ne sais pas vraiment à quoi tu t’attends mais c’est une chance, il faut la saisir. JKE : Moi en plus j’avais déjà quitté les États-Unis avant ça, quand j’ai joué avec l’équipe nationale. (J.K. a participé au tournoi des Amériques en 2001 avec les États-Unis, ndlr). JJ : J’étais nerveux de partir parce que je n’avais jamais été en Croatie, mais encore une fois, c’est une chance. Il y a pourtant des Américains qui quittent l’Europe au bout d’un an, parce qu’ils ne supportent pas. JKE : Oui mais c’est pareil dans l’autre sens, il y a des Européens qui viennent aux États-Unis et qui détestent. Mais si tu n’es pas trop obtus, si tu gardes ton esprit ouvert, c’est quand même pas si difficile que ça.

« SI TU AIMES VRAIMENT LE BASKET, VA JOUER EN NBA POUR LE SALAIRE MINIMUM AU LIEU DE PRENDRE 8 MILLIONS PAR AN.» J.K. EDWARDS

Quelle a été la plus grande différence pour vous en arrivant ? JKE : Les prix. JJ : Ça et puis aussi le fait qu’ici en Europe, tout est toujours fermé. JKE : Les magasins ferment trop tôt, ça c’est sûr. JJ : Tu veux la vérité ? Durant ma première année en Croatie, j’ai halluciné. Quand tu vas faire tes courses, tu dois emballer tes achats dans les sacs et en plus, tu payes pour les sacs ! J’étais là, j’attendais et personne ne venait remplir mes sacs. JKE : Aux États-Unis, les sacs sont gratuits, un type te les remplit et il vient même les mettre dans ta voiture. La première fois avec ma femme, j’ai demandé si quelqu’un allait venir et on m’a dit non. Aujourd’hui, parlez-vous français ? JKE : Non, mais je le comprends. Bon, je peux dire quelques phrases, quelques mots. JJ : Moi c’est pareil, je peux dire quelques trucs en français mais c’est tout. En revanche, je parle le croate. Je n’en avais pas besoin parce qu’en Croatie, tout le monde parle anglais mais j’y suis resté cinq ans, donc j’ai appris petit à petit. JKE : Dès que j’essaie de parler français, on me dit que mon accent est trop fort et qu’on me comprend mal, donc je ne parle plus. JJ : Ma femme le parle plutôt bien, elle a suivi des cours dans un


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lycée et elle se débrouille vraiment bien, elle me surprend parfois quand je l’entends parler, elle est douée pour ça. JKE : Moi, mes enfants vont à l’école française, comme les autres. Mon fils, c’est mon traducteur, quand je ne comprends pas quelque chose, c’est lui qui me traduit tout. Vous avez vu des trucs depuis que vous êtes là ? JKE : J’ai été plusieurs fois en Belgique, dans le Nord de la France… Par contre je n’ai jamais été à Londres alors que j’aimerais bien. Ma femme veut y aller en bateau mais moi je ne prends pas le bateau, et puis conduire à gauche m’effraie un peu. JJ : On a du temps libre mais pas tant que ça finalement, il faut faire attention, prendre soin de son corps, on ne peut pas partir tout le temps. JKE : Quand on part à l’étranger, on en profite des fois pour faire un peu de tourisme. Pour finir, commente pouvez-vous décrire l’autre ? JKE : Juby Julius Johnson, aka « Chessmaster » (le maître des échecs). C’est le roi pour jouer avec le cerveau des autres. (Juby proteste). Mais si, c’est la vérité ! Non, ce gars est un super mec, mais il est toujours en train de déconner. JJ : J’aime mes coéquipiers ! (Rires) JKE : Oui, il les aime, il adore surtout les faire tourner en bourrique. Son problème, c’est qu’il aime faire des blagues, mais c’est pas un problème en fait. Et puis il amène toujours de l’intensité sur le terrain à l’entraînement. Parfois on en a même un peu marre : « Allez ! On y va les gars ! » Il est toujours à fond. À ton tour Juby, que penses-tu de J.K. ? JJ : J.K., c’est un mec sensible. JKE : Eh ! Je suis sensible seulement sur certains trucs. JJ : Il aime faire des blagues mais il n’aime pas qu’on fasse des blagues sur lui. Il s’améliore mais il n’aime pas trop ça ! Bon sinon, je le respecte parce que c’est un bon père de famille, et quelqu’un sur qui on peut compter. Comme mon père disait toujours, c’est bien d’être un type important mais c’est surtout important d’être un type bien. J.K., c’est le mec qui t’emmènera loin. Et en tant que basketteur, il connaît vraiment bien le jeu. Mais la vraie qualité de Juan Khalif, c’est son nom : Juan Khalif. JKE : Pfff ! Juby, Juby… Mais ça veut dire quoi Juby !? JJ : Juby, c’est un surnom, ça veut dire : guerrier. JKE : C’est des conneries ! (J.K. éclate de rire) Guerrier, en Croate peut-être ?! JJ : En Croatie, j’avais un autre surnom : Kralj. Ça veut dire « le Roi. » JKE : Ah, tiens, une histoire. Quand on a été à Zagreb en Eurocup, on marchait dans la rue. Tout d’un coup, des gars nous ont vus. « Oh mon Dieu ! C’est le Roi ! Juby Johnson ! » Et là, ils ont commencé à chanter une chanson, je ne sais plus comment c’était : Juby, Lalalala ! JJ : Arrête ! (Juby est mort de rire) JKE : Attends, c’est pas fini. On continue à marcher. On croise des filles. On commence à parler. « Salut, ça va ? » Juby leur dit : « je m’appelle Juby Johnson ». Là les filles : « Je sais qui tu es ! Tu es le Roi ! » C’était n’importe quoi ! Il adore son surnom, il ne rêve que d’une chose : retourner en Croatie. JJ : Eh, cinq ans cinq titres ! Je vais te dire un truc sur J.K., il pleure tout le temps. JKE : Pleurer ? T’es sérieux ?! JJ : Il n’arrête pas de se plaindre, sur tout. JKE : Oui, c’est vrai, je me plains beaucoup. JJ : Mais bon, au moins il cuisine bien. JKE : T’as pas bien mangé hier peut-être ? JJ : Un énorme steak. En fait, je suis son ami juste pour ses steaks ! JKE : C’est ça, et aussi pour les desserts de ma femme. JJ : Oui, c’est vrai qu’ils sont bons. l

« EN DEHORS DU BASKET, JE NE VOIS PAS COMMENT J’AURAIS PU GAGNER MA VIE.» JUBY JOHNSON

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Le Mans & Villeurbanne

Entre gentlemen Bientôt un demi-siècle que l’ASVEL et le SCM devenu MSB bataillent l’un contre l’autre. Beaucoup de ferveur, peu d’embrouilles. Par Pascal LEGENDRE


• Original : Le Mans (ici Antoine Diot au rebond) et Villeurbanne se sont affrontés l’année dernière au tour préliminaire d’Euroleague. Qualification du MSB.

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Lancées des tribunes, plusieurs oranges iront se fracasser sur le parquet ! 24 septembre 1962

Grande première

• Dans les années 70, l’ASVEL déroulait le tapis rouge au Mans à Gerland. L’hebdo éphémère du Groupe L’Équipe s’en délectait. • Éric Beugnot, la figure symbolique du SCM Le Mans porta ensuite le maillot vert et fut un temps le manager général de l’ASVEL.

Dans l’un de ses titres à rallonge dont les journalistes raffolaient à cette époque Ouest France annonce : « Surprise de taille au Mans… Mené à la marque durant trois quarts d’heure, le S.C. Moderne a mis KO Villeurbanne dans les huit dernières minutes ! » L’article de Roger Cornet explique que Pierre Cordevant a imposé ses muscles au trio Iagoridcov (un Bulgare), Biasucci (un Italien) et Castellier. 59-49 pour les promus. La plus longue rivalité du championnat de France – seulement interrompue par 4 saisons de Pro B du Mans à la fin des années quatre-vingts – vient de prendre corps sur un exploit retentissant. L’ASVEL est déjà le Seigneur tout puissant du basket français. Depuis 1950, les Villeurbannais ont raflé cinq titres de champion, même s’ils sont à la diète sur les cinq derniers exercices. André Buffière, en argent aux J.O. de Londres, a été le grand bâtisseur de la Maison Verte. Un moustachu d’origine portugaise, Raphaël de Barros, un self-made man qui a monté une entreprise de chaudronnerie, va prendre la présidence quelques mois plus tard et sera le garant du triple A du club. « Avec De Barros, il n’y avait pas de papier, pas de contrat, mais la parole donnée était tenue. C’était un homme économe, très précis, même maniaque. Le dimanche soir, il préparait tout le travail des équipes d’ouvriers pour le lundi matin », nous dira Alain Vincent qui le fréquentera plus tard. Avec comme chef de meute sur le parquet Alain Gilles, l’ASVEL fera un carton entre 1966 et 72 : cinq nouveaux titres nationaux. Raphaël De Barros était taillé dans le même granit que Pierre Seillant à Pau-Orthez et Jean-Jacques Eisenbach à Nancy. Son pendant au Mans fut Bernard Gasnal, l’un des

fondateurs du Goulo-Club devenu Sporting Club Moderne, qui était la branche sportive des Comptoirs Modernes, une entreprise de grande distribution dans laquelle les 9/10e des basketteurs étaient employés. L’ascension du SCM s’accéléra avec la venue de l’entraîneur Justy Specker, un étonnant touche à tout, et du Mulhousien Christian Baltzer. Jamais Le Mans ne serait devenu une ville de basket sans cet ailier à la coupe en brosse qui fut un temps le recordman de sélections en équipe de France. Le destin est parfois espiègle car, deux ans avant son arrivée au Mans, Baltzer, qui cherchait à assurer son avenir social, fut à même de signer à l’ASVEL. « Je suis allé à Villeurbanne le matin chez l’employeur d’Henri Grange, un copain, et l’après-midi avec Buffière, qui était passé au Stade Auto Lyonnais, chez Berliet. Si j’avais été là-bas, je ne sais pas ce que j’aurais eu comme boulot, je ne regrette rien, mais c’est sûr que j’aurais eu une dizaine de titres. » Au Mans, il lui faudra attendre d’être président.

26 décembre 1971

Gillou au buzzer

En 1971 Le Mans puise dans le livre de recettes de l’ASVEL ; le SCM prend André Buffière comme entraîneur. « Je partageais le même bureau que Bernard Gasnal aux Comptoirs Modernes et on échangeait beaucoup », confie Christian Baltzer. « Cela faisait un moment que j’étais entraîneur-joueur, j’avais mon boulot en plus, et je commençais à en avoir marre. On venait d’avoir des résultats difficiles, il y avait désormais deux


RÉTRO • maxi-basket 33 la Maison des Sports est un peu étriquée mais pour les grandes cérémonies, l’ASVEL reçoit en tenues d’apparat au Palais des Sports de Gerland, une cathédrale de béton aux relents soviétiques érigée en 1962. L’Équipe Basket Hebdo fait ainsi état de 7.000 spectateurs pour la venue du Mans le 14 décembre 1974. La légende – ou la vérité – veut que le chiffre des dix milles a été plusieurs fois atteint. On s’asseyait dans les marches, on fumait en plein match, on picolait à la buvette, on allait chercher des noises aux arbitres quand ça ne sifflait pas dans le « bon » sens. Nous n’étions pas encore rentrés dans l’ère de l’Entertainment.

25 avril 1981

Semelles de plombs

L’ASVEL va faire plusieurs percées européennes, sans conclure. Un Final Four, une demi-finale et une poule finale à six de Coupe des Champions, l’équivalent de l’Euroleague. Une finale de Coupe des Coupes, l’ancêtre de l’Eurocup. Le Mans reviendra systématiquement en guenilles de ses campagnes européennes. « Ce qui était symptomatique à Villeurbanne, c’est qu’en championnat, on rentrait sur le terrain, à la présentation des équipes, de façon très classique, en partant des bancs de touche. Alors qu’en coupes d’Europe, on éteignait les lumières et on arrivait des portes de derrière. Une ambiance de feu, un côté exceptionnel », nous avait décrit Vincent Collet. Au Mans, il est toujours apparu que le championnat de France était privilégié vis-à-vis des épreuves continentales. Une préférence nationale qui toutefois a été récemment remise en question. L’actuel patron de l’équipe de France a la particularité d’avoir été joueur puis coach sous les deux bannières. D’autres noms célèbres ont changé de camp. André Buffière donc. Les frères Éric et Greg Beugnot. Jacques Monclar. Bob Purkhiser. Les Américains Norris Bell, Shawnta Rogers, Bobby Dixon. Amara Sy. Forcément, en un demi-siècle… Olivier Veyrat fait partie de ces transfuges. Comme Christian Baltzer, lui aussi a hésité entre les deux clubs alors qu’il était un jeune espoir de la Saint-Charles de Charenton. « Les

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« La troisième mi-temps était une tradition que les rugbymen les plus solides avaient bien de la peine à imiter » Serge Galichet

• Le lilliputien américain Shawnta Rogers a enchanté Antarès, moins l’Astroballe.

Photos : Maxi-basket et Pascal Allée / Hot Sports

Américains dans l’équipe, il fallait être à la hauteur, j’ai réussi à convaincre M. Gasnal de la nécessité d’avoir un entraîneur professionnel. » André Buffière fut rétribué par les Comptoirs et s’installa dans le bureau voisin de Baltzer qui se rendit compte que le coach avait un péché mignon qui ne l’a pas abandonné aujourd’hui à 89 ans, le téléphone ! Le 26 décembre de cette année-là, la première chaîne de l’ORTF retransmet Le Mans vs. Villeurbanne dans le cadre de la sacro-sainte émission Télé Dimanche. Jean Raynal est comme d’habitude au commentaire. Le SCM dispose désormais de La Rotonde et annonce plus de 5.000 spectateurs avec l’installation de banquettes au premier rang pour les enfants. Pour chaque achat de programme, des Espagnols en costume folklorique distribuent des oranges Pascual, l’un des sponsors du club. Les deux équipes sont à égalité à 75. Claude Peter part en dribbles le long de la ligne de touche, passe la balle à Claude Gasnal, qui marque. Du moins le croit-on. Le sifflet de l’arbitre retentit. Pied en touche de Peter. « Un erreur de Max Mamie, l’arbitre. D’ailleurs je lui ai rappelé ça dernièrement », glisse Christian Baltzer. Remise en jeu villeurbannaise, passe à Alain Gilles. « J’ai vu s’ouvrir un véritable boulevard devant moi. Je me suis avancé. J’ai tiré… », expliquera-t-il. Un tir alléluia au buzzer d’une dizaine de mètres, décalé sur la droite, qui va faire enrager le public manceau. Lancées des tribunes, plusieurs oranges iront se fracasser sur le parquet ! « Alain Gilles en a marqué quatre des paniers comme ça cette saison-là », se souvient Baltzer. Ce panier au finish face au Mans va réellement façonner la statue de commandeur du Villeurbannais. Il faut savoir qu’au début de cette décennie sept Français sur dix sont équipés de la télévision et que seulement la moitié possède la deuxième chaîne naissante. Il n’y a pas encore de boîtes noires pour calculer les audiences mais il est certain que ce match programmé au cœur de l’après-midi dominicale a été suivi par des millions de téléspectateurs. Le basket est en plein boom au Mans depuis que le SCM est passé de la salle Gouloumès à La Rotonde. À Villeurbanne,


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• Formé à l’ASVEL, épanoui au Mans, Amara Sy refit ensuite deux saisons dans le Rhône.

››› deux voulaient me recruter », se souvient-il. Malin, André Buffière, revenu à l’ASVEL, pour le séduire, lui expédiait une carte postale des quatre coins d’Europe où son équipe passait. Aux vacances de Noël 77, afin de l’aider à se décider, les deux clubs l’invitent une semaine à découvrir les lieux. « Buffière me dit : Alain Gilles va bientôt arrêter, tu vas prendre le relais, il sera le remplaçant. J’ai réfléchi et je me suis dit que Gilles n’allait pas prendre sa retraite comme ça. Je connaissais Bill Sweek – l’entraîneur du SCM – de Paris, et j’ai opté pour Le Mans. » Olivier Veyrat sera deux saisons Manceau. Bien après son départ, à l’ASVEL Alain Gilles sera toujours inaltérable sous le maillot vert. Alain Gilles est le symbole de l’ASVEL des années 60-70, un basketteur hors du commun, élu joueur français n°1 du XXe siècle, et un sacré fêtard. Les joueurs allaient boire des coups au milieu de leurs supporters au Stadium situé à deux dribbles de la Maison des Sports. « La troisième mitemps était une tradition que les rugbymen les plus solides avaient bien de la peine à imiter », écrivit le journaliste de Lyon Matin Serge Galichet. « Après il y a eu Buffière, un peu sévère, qui nous surveillait de très près. On le chahutait comme un maître d’école. Il y avait une sacrée ambiance car on vivait beaucoup ensemble », disait Alain Vincent. « Moi, ce que j’ai énormément apprécié au Mans, c’est Christian Baltzer, le meilleur président que je n’ai jamais

eu », témoigne Olivier Veyrat. « Il ne parlait pas souvent mais quand il le faisait, ça faisait tilt. Je ne te dis pas quand il fallait discuter de son salaire avec lui ! Tu voulais une augmentation de 1.000, tu revenais avec 10 et tu disais merci ! Mais le rapport humain, la profondeur, ça m’a marqué. » À l’époque d’Olivier Veyrat, les derbies avec Tours et Caen étaient volcaniques, mais la venue de Villeurbanne était toujours une rencontre de prestige. « L’ASVEL, c’était une dynastie, le mammouth, une tradition encore plus forte qu’au Mans. Avec Alain Gilles, Ted Evans, Alain Vincent, Bob Purkhiser, Daniel Haquet, c’était une académie de jeu. Quand on a été champions en 79, on ne perd que trois matches. Contre Nice au retour d’un match de coupe d’Europe, on était crevé. Et deux fois face à l’ASVEL. » À l’époque, il n’y a pas de playoffs, tout se joue sur une saison que l’on n’appelait pas encore régulière. Mais les décideurs de la fédé ont toujours cherché à faire différemment et souvent n’importe quoi. En 1981, on eut droit à une poule finale à quatre suivie d’une finale sur terrain neutre, à Coubertin à Paris. Villeurbanne contre Le Mans. Les costauds du Mans avaient la cote mais des semelles de plomb. En ce week-end du premier tour de la présidentielle, l’ASVEL fut élue haut la main. Parmi les champions, Jacques Monclar, au sommet de la courbe de sa carrière qui, une saison plus tard, rejoindra


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Photos : Maxi-basket et Pascal Allée / Hot Sports

On entendit des « Purkhiser, la valise » dégringoler méchamment des gradins.

Le Mans en se consacrant pour la première fois 100% au basket. Un échec. Le contexte était difficile avec le décès l’été précédent de l’entraîneur Bob Purkhiser, une gestion financière devenue hasardeuse, une cote d’amour en locale sur le déclin. Monclar retournera à l’ASVEL dès la fin de l’exercice, tout en reprenant un boulot à côté. « Je crois que c’est mieux comme ça. Le basket en France n’est pas encore mûr pour que nous soyons complètement pros. »

9 juillet 1982

La mort de Bob Purkhiser

Ses ancêtres allemands arrivés quatre générations plus tôt lui avaient laissé en héritage un nom à consonance germanique, Purkhiser. Bob avait grandi au pays du basket, l’Indiana, à Bluffton, là où disait-il il y a un panier dans chaque jardin et même lorsque les parents n’ont plus d’enfants à demeure, ils changent le filet l’été venu. Il porta le maillot de l’université de Purdue, évita la guerre du Vietnam, sillonna le pays avec l’équipe de l’US Army, émigra en Europe, à Anvers, et fut repéré par l’ASVEL au tournoi de Montbrison. Son arme fatale : un tir de loin, en léger déséquilibre arrière, un fouetté du panier à montrer dans les clinics. Bob était introduit dans une équipe villeurbannaise riche en internationaux où, constatait-il, « nous sommes dix pour

cinq places. » L’Américain fit connaissance d’une Lyonnaise, Suzy, ils décidèrent de se marier et le 23 janvier 1975, la fédération lui délivra une licence de joueur français. La paire d’arrières Gilles/Purkhiser a marqué les esprits à jamais. Plus encore Bob Purkhiser était candidat à l’oscar de la plus remarquable intégration à la société française pour un basketteur US. Il y avait son charme, ravageur, et son goût pour les us et coutumes de ce pays : la cueillette des champignons, le Beaujolais, la pêche, la chasse, les boules lyonnaises, « chaque année je fais le tournoi de la Pentecôte à Lyon. » Avec sa femme il acheta un bar dans la capitale des Gaules astucieusement nommé La Troisième Mi-temps. En 1979, Bob quitta la tribu villeurbannaise pour enfiler le blazer du coach au Mans. « J’ai hésité. À Lyon, j’avais un commerce, des amis, une maison que je venais de faire construire. La première année Suzy a été obligée de rester à Lyon, j’effectuais de fréquents va-et-vient », nous disait-il alors. Des copains, Bob allait s’en faire tout naturellement au Mans et à Roezé où il s’était implanté. Chaque dimanche il ne manquait pas de faire son tiercé au Bar de France à La Suze. Pourtant ce fut rude au début. Un soir, alors que la mécanique mancelle était grippée, on entendit des « Purkhiser, la valise » dégringoler méchamment des gradins. Ça lui fit mal au cœur mais l’homme était un gagneur et pour augmenter son influence sur l’équipe, à 36 ans, le numéro 7 au tour de taille ›››

• La preuve que Christian Baltzer fut tenté par le Lyonnais. • Bob Purkhiser à l’époque où il faisait peur à ses défenseurs et plaisait aux jeunes femmes.


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maxi-basket

• Jacques Monclar retourna à ses premiers amours villeurbannais et fit équipe avec Alain Larrouquis. • Le Croate Sandro Nicevic fut au cœur d’une – petite – polémique entre les deux clubs.

››› épaissi, refit son retour en piste. Le Mans se qualifia pour la finale du championnat perdue face à Tours. La saison suivante, lors d’une seconde finale, à Coubertin, face à l’ASVEL, il fut le seul avec Éric Beugnot à conserver ses esprits. Le troisième essai fut le bon. Cette fois, il s’était exclusivement consacré à son job de coach et les pleins pouvoirs à la mène avait été confiés à un chevelu qui s’était révélé sur le tard, Greg Beugnot, frère cadet d’Éric, le meilleur basketteur français de sa génération. Greg fut plus tard le coach de la renaissance de l’ASVEL et l’emmena jusqu’au Final Four de l’Euroleague. Éric a porté son maillot et en fut le manager général. En attendant, Le Mans fut déclaré champion de France 82 devançant le Limoges CSP vainqueur de sa première Korac. Parmi les récompenses, le SCM fut invité au tournoi de Taiwan. Bob en était revenu la veille après 29 heures de transit entre Taipei et le chef lieu de la Sarthe. La route qui menait de La Suze au Mans, il la connaissait aussi bien que ses playgrounds d’enfance de l’Indiana. Dans la salle de rédaction ce jourlà, une nouvelle tomba, glaciale, une hallucination, « Bob Purkhiser s’est tué. » Sa BMW venait de se fracasser contre un pylône électrique à la sortie d’un virage. Ses potes de Villeurbanne et du Mans se sont retrouvés une dernière fois autour de lui dans une église mancelle. Tous ensemble.

13 juin 2003

Playoffs à Angers

Le déclin du Mans et de Villeurbanne a correspondu avec la montée en puissance de Limoges et du professionnalisme. Les deux ont failli en crever. L’ASVEL se retrouva devant le Tribunal de Commerce avec une dette de 17MF. Marc

Lefèbvre, son ancien kiné, et la municipalité sauvèrent la Vieille Dame alors que l’on était en train de lui donner l’extrême onction. Malgré ses malaises jamais Villeurbanne n’est sorti de la première division française. L’ASVEL est vraiment éternelle. « De 1999 à 2001, j’ai eu ma société de recrutement et de conseil et parmi mes clients j’avais l’ASVEL de Marc Lefèbvre et Greg Beugnot. J’ai donc connu cette époque de l’intérieur et l’évolution avec Gilles Moretton », témoigne Olivier Veyrat qui pendant trois ans eut différents titres à l’ASVEL dont celui de Directeur des Opérations Basket. « Marc Lefèbvre état dans la tradition à l’ancienne et clairement avec Gilles Moretton on est entré dans la modernité, un accélérateur énorme. » Le basket au Mans vit également la mort de près, le club dépensant lui aussi davantage d’argent qu’il n’y avait de recettes. Il fit pénitence un temps en Pro B, le SCM se transforma en MSB, et reprit des couleurs avec la construction d’Antarès. Les présidences de deux « Historiques », Christian Baltzer et Jean-Pierre Goisbault, puis de leur fils spirituel Christophe Le Bouille, ont évité au Mans un choc des cultures aussi frontal qu’à l’ASVEL. La rivalité Le Mans/Villeurbanne n’a jamais été sulfureuse comme celle de Limoges avec Pau qui a eu parfois des petits côtés OM/PSG. Des anicroches, oui, forcément. Quand l’ASVEL souhaita signer Keith Jennings qui était encore sous contrat au MSB et qui fila finalement au Real Madrid. Les Manceaux firent aussi la tête lorsque Villeurbanne approcha le Croate Sandro Nicevic en pleine saison. « Ce qu’ils ne savaient pas c’est que Sandro nous appréciait beaucoup et il nous l’a dit tout de suite », rappelle Christophe Le Bouille. Affaire un peu similaire avec Bobby Dixon, qui, lui, concrétisa l’offre lyonnaise. « Même si j’ai zéro preuve, on ne m’enlèvera pas de l’esprit que Dixon a signé un contrat avec


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« Je pense que les gens ont été lassés de leur discours qui n’était plus en adéquation avec leurs résultats. » Christophe Le Bouille

Villeurbanne avant la fin de la saison et que ça l’a perturbé pour les playoffs. » Le président manceau ajoute : « Ceci dit, on n’est pas non plus dans le milieu de blanches colombes. » L’histoire contemporaine la plus originale date de 2003. Les deux équipes se retrouvent face-à-face en demi-finale des playoffs. L’ASVEL a l’avantage de recevoir pour la manche aller et la belle éventuelle. Or Antarès est indisponible. Déjà c’est la semaine des 24 heures du Mans et la salle est incrustée dans le circuit automobile. Surtout un concert de Patrick Bruel est programmé le soir du retour. Le Bouille dit avoir reçu l’accord verbal de son rival pour inverser les matches, qui refuse finalement dit-il, de passer aux actes. Olivier Veyrat ne se souvient pas aujourd’hui de la querelle. Ce qui est sûr c’est que le MSB est obligé de déménager à Angers, à 80 km de là, pour recevoir son hôte. Du jamais vu. Un millier de Sarthois fait le déplacement mais la salle Jean-Bouin est loin d’être pleine. Bien tristounet pour un tel événement. Les supporters sont remontés comme des coucous et une banderole exprime leur colère, « sans jouer sur ses terres, le MSB n’a pas les genoux à terre. » L’ASVEL est sifflée comme rarement. Avec un Nicevic de gala (22 pts et 6 rbds), le MSB s’impose de justesse avant de se faire plumer lors de la manche décisive. En fait, ce n’était pas contre l’ASVEL que Christian Baltzer, qui quittait ses fonctions de président, avait du ressentiment mais plutôt contre le fait que le basket était alors considéré

comme quantité négligeable par les régisseurs de la salle. « Antarès se moque du basket… Aujourd’hui je crie casse cou, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase », déplorait-il alors. Cet incident eut le mérite de faire prendre conscience à chacun au Mans que les playoffs ne représentent pas au basket ce que les critériums d’après Tour sont au vélo. Finalement, merci l’ASVEL ! Et aujourd’hui Christian Baltzer conclut : « Je n’ai pas toujours été d’accord avec Gilles Moretton mais en l’occurrence quand on est un club pro, il n’y a pas de raison que l’on fasse un cadeau. » Au Mans, l’affiche numéro un de la saison ce n’est plus l’ASVEL comme d’Antan. C’est désormais Cholet. Le désamour est récent. Jusqu’en 2005-06, Villeurbanne assurait une moyenne de 5.900 spectateurs à Antarès, depuis elle est tombée à 4.500, ce qui n’est déjà pas si mal. « Je pense que les gens ont été lassés de leur discours qui n’était plus en adéquation avec leurs résultats », analyse Christophe Le Bouille. « Ils sont censé passer un cap, avec la nouvelle salle, Tony Parker, la TP Academy, des investissements, et basculer vers ce que recherche l’Euroleague. Mais moi je ne crois que ce que je vois. Ils ont déjà eu ces discours très ambitieux et ils sont passés à travers, ils ont pris pour le moins beaucoup de retard. S’ils y arrivent tant mieux pour eux. Mais ça ne nous empêchera pas de continuer à essayer de les battre. » Prochaine manche le 21 janvier. l


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Amara Sy déjà MVP en 2004, est sacré une deuxième fois Roi de Bercy.


Portfolio

All-Star Game

Amara 1

er

• maxi-basket

Roi de Bercy

Photos : Hervé Bellenger / IS et Jean-François Mollière

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maxi-basket

En répétition « Bras croisés, comme ça. »

Cedrick Banks sous les sunlights.

J-1: En répé

John Holland, magnifique !

Charles Kahudi, Adrien Moerman et Victor Samnick sont heureux d’être là !

Les animateurs Jamil Rouissi et George Eddy ne laissent pas non plus la place à l’improvisation.


Portfolio

NBAers en Pro A • maxi-basket 41

Stephen Brun venu en ami, en voisin et en consultant de Sport+

étition

Andrew Albicy noircit du t-shirt et sera bientôt sur les ondes de RMC, RTL et L’Équipe TV.

La sélection française dans les entrailles de Bercy

Jean-Luc Monschau motivant ses troupes… en mode All-Star Game.

Même le high five d’encouragement est simulé !

À nu, c’est comme ça que ça se présentait.

Kim Tillie dans un magasin Nike, sponsor de l’événement.

Amara Sy se rêve-t-il en joueur de Manchester ?


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maxi-basket

Blessé, Kim Tillie montre à ses potes qu’il peut à défaut faire de belles photos.

Une Amazone du 3e Millénaire.

Léo Westermann. La valeur n’attend pas le nombre des années.

Un fidèle parmi les fidèles.

Tous et toutes doivent participer.

Ambiance : Show


Portfolio

NBAers en Pro A • maxi-basket 43

Xavier Corosine, l’adresse dans la peau.

L’arrivée des Superhéros. Majestueux !

Burnie, un autre as du Heat.

w devant

Le band de Miami. Classe ! On est là pour s’amuser, n’est-ce pas Amara ?


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maxi-basket

Ils défient les lois L’étonnant M. Dar Tucker, un fou volant identifié à Aix-Maurienne.


s de la gravité

Portfolio

NBAers en Pro A • maxi-basket 45

Max Kouguère pris en flagrant délit de main au panier.


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MAXI-BASKET

KAREEM REID (Hyères-Toulon)

KAREEM REID (1,78 M, 36 ANS) GÈRE L’ANIMATION OFFENSIVE DU HTV AVEC BRIO. MEILLEUR PASSEUR DE PRO B EN 2008 ET DE PRO A EN 2009 ET 2010, IL REVIENT AU PLUS HAUT-NIVEAU. L’ANCIEN HARLEM GLOBETROTTER ET ROI DU RUCKER PARK EST LE LEADER EN PASSES DECISIVES AVEC UNE MOYENNE -À LA 11E JOURNEE- DE 10,2 ! Propos recueillis par Claire PORCHER

Quel est ton geste préféré ? Mon spin move. Chaque joueur a son geste préféré, pour moi c’est celui qui me permet de passer mon vis-à-vis, d’aller au shoot.

Dans quel secteur de jeu espères-tu encore progresser ? Cette saison, j’ai progressé aux shoots et à trois points. Avec ma taille, les années qui passent et comme, la plupart du temps, les équipes veulent m’empêcher de créer des espaces pour mes coéquipiers, je me suis diversifié. Cette saison, j’ai été particulièrement performant derrière l’arc.

Exact, ton pourcentage de réussite est de 60,0 % (après 9 matches, 9/15). Penses-tu shooter davantage ? Quand je le dois. Je ne veux pas passer mon temps derrière la ligne et shooter n’importe quand, surtout que ce n’est pas ce que je préfère. Beaucoup d’équipes connaissent mon jeu ou le pensent. Dans le passé je shootais beaucoup et bien. Alors on m’empêchait de le faire, j’ai donc développé d’autres secteurs de jeu.

Quel meneur de Pro A t’a le plus impressionné cette saison ? Taylor Rochestie est une vraie surprise. Il m’a impressionné. À chaque fois que je le vois jouer, je me dis « Waouh ! », surtout contre Poitiers, avec ses 15 passes. Andre Barrett aussi, mais j’étais moins étonné car je le connaissais. C’est un ami de New York.

Quel est ton secret pour être un si bon passeur ? J’ai grandi en regardant Magic Johnson, mon joueur favori. Shooter, scorer, ce n’est pas moi. Depuis que je suis en Pro A, c’est plus satisfaisant pour moi de faire de bonnes passes et faire shooter mes coéquipiers. Le véritable point fort d’un meneur pour moi.

Quelle est ta passe préférée ? J’en ai tellement ! Peu importe, que ce soit une passe dans le dos, entre les jambes… Ma préférée, c’est celle qui permet à mon coéquipier de marquer !

Si tu avais le choix, un match à 30 points ou à 20 passes décisives ? 20 passes sans hésitation ! Même si je ne marque que 2 points, je préférerais toujours les 20 passes car ça signifie 40 ou 50 points derrière, donc pas besoin de scorer.

Le record d’assists en France est de 28 (Pierre Bressant en 1989). C’est ton objectif ? Oui, bien sûr, tout le monde a des objectifs. J’espère battre ce record cette saison, ça serait un bel accomplissement pour moi.

Pendant les entraînements, que travailles-tu le plus ? Je suis arrivé au club deux mois en retard. J’ai travaillé sur mon shoot mais sur mon basket de façon générale. Pour aider l’équipe du mieux possible, retrouver mon rythme avec de nouveaux coéquipiers et devenir meilleur.

Quel est ton spot préféré pour shooter ? Peu importe. Certains sont surpris par ma facilité à shooter de différents angles, des shoots parfois difficiles. On attribue ça à la chance mais c’est surtout de l’entraînement, depuis 20 ans.

Pascal ALLEE/HOT SPORTS

Un contre ou un dunk ? Quand j’étais plus jeune, je dunkais ! Peut-être qu’un jour, j’aurais la chance de dunker en match, si je suis assez chaud !

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DU CÔTÉ DE CHEZ • MAXI-BASKET 49

QUAND JE SUIS ARRIVÉ À CHALON, J’AVAIS UN PEU LA GROSSE TÊTE

DU CÔTÉ DE CHEZ…

BLAKE SCHILB SES TIRS COMME SES MOTS SONT RÉFLÉCHIS ET MINUTIEUSEMENT CHOISIS. GARÇON RÉSERVÉ DE PRIME ABORD, BLAKE SCHILB SE DÉVOILE UN PEU PLUS À MESURE QUE NOUS RETRAÇONS SON CHEMIN DE TRAVERSE. SI SA PLACE PARMI LES MEILLEURS JOUEURS DE PRO A NE SOUFFRE AUJOURD’HUI D’AUCUNE CONTESTATION, TOUT N’ÉTAIT PAS GAGNÉ D’AVANCE... Propos recueillis par Jérémy BARBIER, à Chalon


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MAXI-BASKET

CÔTÉ COUR

Tes premiers dribbles Mon premier souvenir, c’est à sept ans, au YMCA. J’ai grandi dans l’Illinois et, comme beaucoup, mon père était un fan absolu de Michael Jordan. Il n’a jamais eu la chance d’aller au college pour jouer au basket et il me racontait que quand ma mère était enceinte de moi, il lui répétait qu’elle aurait un meneur comme Magic Johnson. Sur le terrain, j’ai tout de suite eu l’impression de faire les bons moves assez facilement. C’était très amusant pour moi. À cet âge, tu te passionnes complètement. Tu ne veux pas dormir, tu ne veux pas manger, tu veux simplement jouer au basket tout le temps. C’était mon rêve de gosse d’être en NBA mais jusqu’à mes 15 ans, mon sport favori restait le baseball. Je voyageais dans tout le pays pour jouer dans des petites ligues et ce n’est vraiment qu’à partir du moment où je suis arrivé en high school que je me suis concentré sur le basket.

Rantoul High School Nous avions l’une des meilleures équipes d’Illinois lors de mon année junior et ce n’était pas courant pour une ville comme Rantoul. Il y avait beaucoup d’excitation mais tout s’est compliqué lors de ma dernière année. Je suis allé à une fête où il y avait de l’alcool et même si je n’ai pas bu, ma seule présence brisait les règles de l’école. C’était quelque chose pris très au sérieux et j’ai été suspendu pour cinq matches. On pourrait croire que cela m’aurait servi de leçon, mais environ deux mois plus tard, je me suis retrouvé dans la même situation. J’étais en boîte pour un concert de hip-hop, il y avait de l’alcool et nous étions toujours légalement mineurs. Les gens avec qui j’étais étaient malades et ont même été à l’hôpital. C’est moi qui conduisais donc cette fois, j’ai été suspendu pour la saison. J’ai perdu toute ma motivation pour l’école et le basket. J’étais un adolescent très en colère et complètement déprimé. Je restais enfermé chez moi pendant que ma mère me répétait qu’il valait mieux que j’obtienne une bourse si je voulais aller au college. J’avais vraiment l’impression de la décevoir, c’est ce qui faisait le plus mal. J’avais le sentiment d’avoir tout perdu. Beaucoup de grosses universités comme Kansas s’intéressaient à moi avant ces histoires mais après, aucune équipe ne voulait plus me parler.

car il y avait pour lui le risque de perdre un joueur même si, de mon côté, je voulais revenir pour ma dernière année. Le work-out était très physique, on jouait en 2-2 tout terrain. Tu ne t’arrêtes pas pour boire et tu shootes pendant des heures. La NBA est très rapide et ce qu’ils testent, c’est ta capacité à apporter rapidement des choses dans certaines situations.

La draft 2007 Comme Loyola n’est pas une équipe du Top 25, elle n’est pas très prolifique pour sortir des joueurs. Il est plus difficile d’être scouté quand tu ne joues pas contre les top teams du pays. Du coup, j’avais fait beaucoup de work-outs. L.A, Golden State, Denver... Boston était mon dernier et même si j’avais l’impression d’avoir fait de bonnes choses, mon agent ne me disait rien du tout. Je pensais peut-être pouvoir être sélectionné au deuxième tour mais j’étais un peu inquiet. Le soir de la draft, c’est l’histoire que tout le monde connaît. Je suis devant la télé avec ma famille et les noms défilent. Tu attends et puis…rien du tout ! J’ai appelé mon agent qui m’a alors demandé si je voulais jouer en D-League, j’ai compris qu’il n’avait jamais eu beaucoup d’ambitions pour moi et nous nous sommes séparés. Il y a deux ans, j’ai été à L.A pour travailler avec les Clippers. Il y avait Blake Griffin et DeAndre Jordan, j’ai essayé de faire le camp de la franchise mais ils ont drafté le frère d’Alade Aminu à mon poste (Al-Farouq Aminu, aujourd’hui aux Hornets). C’est vraiment difficile d’obtenir une place en NBA et depuis un certain temps, je pense davantage à la façon d’avoir la meilleure carrière possible en Europe.

“ J’AI TOUJOURS EU L’IMPRESSION D’ÊTRE UN LEADER ”

Brewster Prep School

Repères Né le 23 décembre 1983 à Monmouth (Illinois) Américain • Taille : 2,00m • Poste : Ailier • Clubs : Loyola (NCAA, 2003-2007), Nymburk (République Tchèque, 2007-2009), Chalon (2009-…) • Palmarès : Champion de République Tchèque 2008 et 2009, coupe de France 2011 • Stats 11-12 : 15,5 pts à 53,4%, 5,0 pds et 3,8 rbds en 32 min et 11 matches

J’avais besoin de quitter Rantoul car toute la ville me pointait du doigt, j’avais sans cesse l’impression d’être observé. C’était une très bonne idée d’aller en prep school dans le New Hampshire, à vingt heures de route de chez moi. Quand ont parle de « prep school », ça signifie vraiment quelque chose. On te prépare à être loin de la maison, à devenir responsable. C’était difficile, ultra-discipliné. Il y avait des horaires stricts, un couvre-feu, pas de télé dans les chambres, des uniformes, peu de sorties autorisées…C’était difficile mais un tel cadre a été bénéfique à ce moment de ma vie.

Université de Loyola J’étais vraiment heureux d’obtenir une seconde chance. Larry Farmer, le coach de Loyola, m’a recruté personnellement. Après deux années compliquées, je pouvais enfin dire que j’étais un joueur universitaire. Malheureusement, nous n’avons pas fait une bonne saison et le coach a été viré. J’avais un peu peur mais à l’arrivée de Jim Whitesell, j’ai conservé un rôle de leader. J’ai toujours eu l’impression de tenir ce rôle d’ailleurs, même si c’est souvent plus par mes actions que mes mots. Après ma troisième saison, j’ai voulu inscrire mon nom à la draft sans prendre d’agent, juste pour voir si je pouvais me projeter un peu. Mon coach m’a soutenu et a même organisé un work-out avec les Bucks. C’est rare qu’un coach agisse ainsi

Le départ en Europe

Quelques jours après la draft, mon nouvel agent m’a proposé un job en République Tchèque, à Nymburk. Je ne connaissais rien de ce pays ni même du basket européen. Nymburk jouait en Eurocup donc c’était une bonne exposition mais à ce moment, mon esprit était toujours orienté vers la NBA. Je me disais que j’allais faire une année en Europe puis revenir, j’ai surtout pris le boulot car je ne voulais pas jouer en D-League. J’étais assez anxieux à mon arrivée, je ne connaissais personne et j’étais soucieux de savoir ce qui allait transpirer de ma personnalité, comment j’allais être perçu. Sportivement, il y avait trois équipes de niveau européen mais derrière, c’était de moins en moins compétitif. Pourtant, quand tu n’es pas drafté, je considère qu’une expérience de ce genre est un apprentissage formidable. Même si la compétition n’était pas si élevée, gagner le championnat dès la première année a été la cerise sur le gâteau. Pour le moral, c’était parfait. J’ai gagné beaucoup de confiance et cela m’a permis de relativiser le fait de ne pas avoir été en NBA.

Chalon À Nymburk, j’ai rencontré Arthur Lee, un ancien joueur de Chalon. C’était un vétéran, quelqu’un de très sage par rapport au jeu et au business et qui avait un peu traversé les mêmes choses que moi. Lors de ma deuxième saison, je lui disais que je voulais m’améliorer et que j’avais le sentiment de ne plus progresser en République Tchèque. Mon agent m’avait alors parlé de la France et Arthur m’a dit que si un jour j’y allais, je devais choisir Chalon. Je me souviens qu’on en plaisantait et qu’il essayait de m’apprendre à prononcer Chalon en français. J’ai gardé ça dans un coin de ma tête et environ un mois plus tard, mon agent m’annonce qu’il a une offre pour une équipe française à…Chalon-sur-Saône. Je n’ai pas pu m’empêcher de rire. Le monde est petit. En arrivant, honnêtement, je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre. On m’avait dit que la compétition ressemblait d’une certaine manière à la NBA : très rapide, athlétique. La première saison a été très difficile. Il y a eu beaucoup de blessures, des joueurs coupés, d’autres


DU CÔTÉ DE CHEZ • MAXI-BASKET 51

2010-2011 Seulement trois joueurs sont restés, Nico (Lang), Joffrey (Lauvergne) et moi. Le coach connaissait les joueurs qu’il voulait signer et il savait que la saison serait bien meilleure. Bryan Smith est arrivé juste avant le premier match et c’était une vraie bouffée d’air frais. Nous n’avions pas encore vraiment d’identité et quand il est arrivé, tout a changé, nous avions trouvé notre mentor. Le plus beau souvenir, c’est bien sûr la coupe de France. C’était un travail de longue haleine puisque une fois que tu as passé un tour, tu peux parfois attendre un mois avant le suivant. C’est difficile de rester concentré sur l’objectif mais après notre défaite en finale des As, nous avions vraiment faim de titre. Après notre victoire à Nancy en demi-finale, personne chez nous n’imaginait qu’on pouvait perdre une deuxième finale. Nous avons beaucoup fêté ce trophée, je me rappelle à peine les instants après la coupe. Je ne me souviens plus trop non plus des playoffs, excepté que nous avons perdu au premier tour.

Greg Beugnot Il est la pièce la plus importante de ce club. Il m’a énormément aidé à grandir, en tant que joueur évidemment, mais également en tant que personne. Il m’a donné une identité de jeu grâce à ses qualités humaines. En quittant la République Tchèque après deux titres, tout me semblait plus facile et quand je suis arrivé à Chalon, j’avais un peu la grosse tête. Le coach s’est assuré qu’elle ne le reste pas trop longtemps. Il sait ce qu’il veut, il est exigeant et la plupart du temps, il a raison. Il a connu beaucoup de choses dans ce sport donc je considère comme un privilège de jouer pour lui. C’était très important pour moi qu’il signe un nouveau contrat l’été dernier, je serais peut-être parti s’il n’était pas revenu.

All Star C’est un honneur d’avoir été sélectionné car même si les joueurs NBA sont repartis, il y avait beaucoup de concurrence. Le coaching staff avait été très surpris que je n’y sois pas l’année dernière et ils en ont plaisanté avec moi tout le reste de la saison. Je suis content d’avoir été sélectionné mais en même temps, j’aurais aussi bien pu l’être l’année dernière puisque j’étais l’un des trois candidats au titre de MVP à la fin de la saison. C’était un peu étrange mais je n’étais pas déçu, plutôt content pour mes coéquipiers. C’était simplement une motivation supplémentaire.

Jean-François Molliere

qui arrivaient. Intérieurement, je me demandais dans quoi je m’étais embarqué. Le coach m’a vraiment aidé pendant cette première saison. Il avait confiance en moi, même quand le club avait peur de descendre en Pro B.


MAXI-BASKET

CÔTÉ JARDIN

JF Molliere / IS

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DU CÔTÉ DE CHEZ • MAXI-BASKET 53

L’un ou l’autre • Bière ou vin ? Bière • Dunk ou 3 points ? Le shoot, parce que c’est un point de plus.

Si tu n’étais pas basketteur professionnel J’aurais peut-être essayé de devenir joueur de baseball. Il y a un joueur dont j’ai oublié le nom qui vient de signer un contrat de 250 millions sur dix ans en MLB, alors oui, j’aurais peut-être opté pour cette carrière. Sinon, comme je suis diplômé en sociologie, peut-être un professeur. Et pourquoi pas coach ?

Un jour sans basket Normalement, c’est le dimanche, et comme en France presque tout est fermé, je reste souvent à la maison avec ma femme et mes enfants. Nous allons au parc si le temps le permet. Quand nous avons la chance d’avoir un jour dans la semaine, on aime bien aller à Dijon ou Lyon pour faire les boutiques et un petit restaurant.

Quel genre d’élève J’étais très bon élève jusqu’au moment où je suis arrivé en high school. Je suis devenu un élève moyen car c’était très difficile pour moi de jongler entre les exigences du basket et celles des cours.

Je ne sais pas… (Il réfléchit) C’est vraiment une question difficile parce que en tant que supporter, je n’aime pas la NBA autant que dans les années 1990. J’aurais adoré voir Michael Jordan bien sûr, mais aussi Magic Johnson. Et puis Larry Bird. En fait, j’aurais aimé assister à un All Star Game dans les années 1990. À mon avis, c’était l’âge d’or de la NBA.

Ce que tu ne ferais jamais, même pour dix millions Laisser mes enfants sans leur père, les abandonner.

2

En ce moment, tu pourrais certainement trouver beaucoup de morceaux du label « Jet Life ». Il y a pas mal de Drake aussi, Jay-Z bien sûr. Mais tu trouveras aussi du Miles Davis, beaucoup de jazz et de blues. Je n’ai pas un genre de musique préféré et généralement, je peux écouter un peu de tout.

3

• Facebook ou Twitter ? Facebook puis Twitter et puis encore Facebook. Je suis accroc ! • Foie gras ou hamburger ? Hamburger, désolé ! • Kobe ou Lebron ? Kobe. Mais en réalité, plutôt D-Wade

Un film fétiche La poursuite du bonheur, un film avec Will Smith.

Un endroit où vivre Chicago, sans hésitation. C’est une ville très culturelle où se mélangent beaucoup de mentalités différentes. C’est un peu au milieu du pays, je considère que c’est le cœur des États-Unis.

24 heures dans la peau d’un autre

“ LES ANNÉES 1990 ÉTAIENT L’ÂGE D’OR DE LA NBA ”

Quelqu’un que tu paierais pour voir jouer

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Sur ton I-Pod en ce moment

Ma femme ! (Il éclate de rire) J’aimerais vraiment bien être 24 heures dans sa peau car elle passe beaucoup de temps avec nos enfants en ce moment. Elle fait beaucoup d’activités avec eux quand je dois partir au boulot. Attention, je ne me plains pas du tout, mais c’est vrai que mes enfants sont jeunes et on a parfois l’impression de manquer certaines choses.

Des modèles Si je ne devais en choisir qu’un, je dirais ma mère. C’était une mère célibataire et elle a tout fait pour nous rendre la vie plus facile. Sportivement, je dirais probablement quelqu’un entre Michael Jordan et Charles Barkley. En dehors du sport, Barack Obama est aussi quelqu’un qui m’inspire.

J’espère que c’est quelque chose que je n’aurais jamais à faire.

Si tu étais • Un animal Un lion • Un superhéros Captain America • Une ville Prague. C’est ma ville préférée avec Chicago • Une femme Peut-être Hillary Clinton • Un plat Des spaghettis

Trois personnes avec qui diner Le Dalaï-Lama… (Il réfléchit) Je ne sais pas, peut-être Will Smith. Au cas où on ne l’aurait pas compris, j’aime vraiment beaucoup Will Smith. (Il rit) Et puis le président Obama.

Trois choses à emmener sur une ile déserte Du savon. (Il réfléchit longuement) Je ne sais pas, c’est vraiment une question très difficile. C’est un choix important, il ne faut pas se tromper. Un téléphone portable. C’est une île ou il fait beau ou il pleut ? On va dire que l’île est ensoleillée donc un maillot de bain.

4

5

1. Michael Jordan 2. Charles Barkley 3. Jay-z 4. Miles Davis 5. À la recherche du Bonheur 6. Le Dalaï Lama 6


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MAXI-BASKET

VINCENT POURCHOT & RUDY GOBERT

L’AVENIR EN GRAND ILS ONT TOUS DEUX 19 ANS, SONT TRÈS HAUT PERCHÉS. LE PREMIER AFFICHE 2,14 M SOUS LA TOISE, LE SECOND EST TOUT SIMPLEMENT LE PLUS GRAND SPORTIF FRANÇAIS DE L’HISTOIRE DU HAUT DE SES 2,22 M. POUR LE RESTE, RUDY GOBERT (CHOLET) ET VINCENT POURCHOT (NANCY) N’ONT PAS GRAND-CHOSE EN COMMUN. LE PREMIER RÊVE TOUT HAUT DE NBA TANDIS QUE LE SECOND TRAVAILLE PATIEMMENT DANS L’OMBRE DES PROS DU SLUC ET VOIT SON AVENIR DE CE CÔTÉ DE L’ATLANTIQUE. Par Antoine LESSARD

«

Pour l’instant, on ne l’a pas vu jouer avec nous, cela veut dire que ça se passe plutôt bien ! » Jean-François Martin est l’entraîneur historique des espoirs de Cholet Basket. L’un, si ce n’est LE, des meilleur(s) formateur(s) dans l’Hexagone. Après Nando de Colo, Rodrigue Beaubois, Kévin Séraphin, la dernière pépite passée entre ses mains expertes se nomme Rudy Gobert. Le centre de formation choletais l’a récupéré en 2006 après que le jeune Picard d’origine eut fréquenté la JSC Saint-Quentin puis le Pôle espoirs de Picardie à Amiens. Rudy est le fils d’un ancien basketteur professionnel, Rudy Bourgarel. Un superbe athlète, qui fut international en 1988 (19 sélections) et dont la courte carrière professionnelle l’a amené à SaintQuentin au début des années 90. Ceci expliquant cela. Lorsqu’il débarque dans les Mauges, le jeune Rudy a trois ans de basket derrière lui. Il mesure 1,92 m. Ses deux premières années au centre de formation se font en pointillé. En pleine croissance, l’adolescent souffre des genoux et doit régulièrement sécher les entraînements. Ce n’est qu’en 2009-10 que Gobert joue sa première saison pleine avec les Cadets France et les espoirs. À la fin de la saison, sa prestation remarquée au Trophée du Futur face à l’ASVEL de Bangaly Fofana marque les esprits. Il est appellé pour la première fois en équipe de France, chez les U18. Au championnat d’Europe, le jeune pivot finit meilleur marqueur, rebondeur et contreur des

Bleuets. En l’espace de quelques mois, Gobert s’est fait un nom.

100% avec les pros

En janvier 2011, le départ impromptu de Claude Marquis libère une place dans le groupe d’Erman Kunter. Rudy, 18 ans, saisit sa chance. Le contact quotidien des pros lui permet de booster ses performances en espoirs. Il est nommé dans le 5 majeur espoirs (14,9 pts à 61,1%, 10,3 rbds, 2,3 contres en 33 minutes) avant de démontrer l’étendue de ses progrès au championnat d’Europe des U20. « Dès lors, on a fait le choix de l’intégrer à 100% avec les pros en voyant comment ça se passerait », raconte J-F Martin. La suite a donné raison au staff choletais. 13 minutes en moyenne en Pro A. Autant en Eurocup. Gobert est aujourd’hui sur la même ligne que l’autre géant de CB, Romain Duport, de six ans son aîné. C’est dire le potentiel du garçon et les progrès fulgurants accomplis depuis la saison dernière. Son temps de jeu, Rudy le doit à sa charpente et ses qualités défensives. « On appuie beaucoup sur son côté défensif et athlétique, des choses basiques comme le rebond », décrit Erman Kunter. Les 2,14 m de Gobert, son envergure de 2,35 m – supérieure à celle d’Alexis Ajinca (2,30 m) – lui permettent d’exister à ce niveau, et de compenser en partie son déficit sur la balance (104 kilos). Après 11 journées, Gobert était le meilleur contreur du championnat (1,6 contre) alors

« Cela dépend comment il va évoluer mais Rudy peut dépasser Kévin » Erman Kunter


Jean-François Mollière

Rudy Gobert devrait pouvoir réaliser le rêve de son père Rudy Bourgarel, jouer en NBA.


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Repères Rudy GOBERT

Né le 26 juin 1992 à Saint-Quentin

• Taille : 2,14 m

• Club : Cholet Basket

• Stats’11 : 4,0 pts à 93,3%, 3,4 rbds, 1,6 co, 8,9 d’éval’ en 13’ (Pro A). 1,4 pt à 37,5%, 4,0 rbds, 0,8 co, 5,8 d’éval’ en 13’ (Eurocup) Médaillé de bronze U20 en 2011.

qu’il ne joue que 13 minutes par match ! « Physiquement, aujourd’hui, il ne peut pas tenir. Il faut qu’il remplisse bien son haut du corps », dit Kunter. Rudy s’attèle donc à prendre du poids, il passe beaucoup de temps dans la salle de musculation (« Au minimum une fois par jour quand il n’y a pas de Coupe d’Europe ») et travaille sur ses appuis pour corriger sa foulée. Le garçon a la mauvaise habitude de courir sur ses talons. Il a aussi la chance à Cholet d’avoir un préparateur physique à temps plein. « Cela lui a permis de travailler sur son gainage, de se renforcer. Ce qui fait que maintenant, ce n’est pas un grand dégingandé. Il a un bon équilibre corporel », dit J-F Martin.

« À la Tyson Chandler »

Repères Vincent POURCHOT

Né le 27 juillet 1992 à Metz

• Taille : 2,22 m

• Clubs : CFBB (2007-11), SLUC Nancy

• Stats’11 : 14,7 pts à 59,6%, 14,0 rbds, 3,4 co, 27,5 d’éval’ en 13’ (Espoirs Pro A). Médaillé d’argent U18 en 2009.

La morphologie du Choletais, son potentiel physique et athlétique, voilà ce qui fait saliver les scouts NBA. « Il est super bien proportionné. Sa mère l’a vue torse nu cet été en vacances, elle voyait son père », raconte Jérémy Medjana (Comsport), l’agent de Gobert. « Il a pris une dizaine de kilos en un an et demi. À terme il sera autour des 115-117 kilos. Il n’aura pas besoin d’être plus lourd, mais ça sera un très bel athlète, bien dessiné, à la Tyson Chandler. Il n’a pas une graisse. » On l’a compris, Rudy est un modèle radicalement différent de Kévin Séraphin, qui fut drafté en 2010 après seulement deux saisons pros à CB et une progression express. À 17 ans le Guyannais avait déjà la maturité physique d’un joueur de 25 ans. L’un joue avec son poids, sa puissance, l’autre avec son envergure. Cependant, en termes de potentiel, Gobert peut

rivaliser avec son ainé. « Dans la durée, Rudy aura toujours l’avantage par rapport à sa taille et son envergure. Cela dépend comment il va évoluer mais il peut dépasser Kévin », estime Kunter. « Il n’aura jamais de problème de mismatch comme cela peut arriver à Kévin qui fait 2,05 m-2,06 m. » Comme Séraphin à l’époque, les rêves de Gobert se situent de l’autre côté de l’Atlantique. En ligne de mire le Hoop Summit au printemps prochain, objectif prioritaire de sa saison. Les Batum, Ajinca et Séraphin s’y sont illustrés. Et ensuite ? « J’aimerais faire encore mieux que Kévin. Mon objectif, je peux le dire maintenant, c’est d’être dans le Top 10 à la Draft, en 2013 ou 2014. » En attendant, le joueur a encore de gros progrès à réaliser en Pro A. Jean-François Martin cite tour à tour son jeu dos au panier, son jeu de contestation au sol, son intensité, son agressivité sur non porteur. La marge de progression est encore très importante. « Rudy comprend le jeu, il le sent. Il y a de petits attitudes à changer, gagner en précision dans ses enchaînements moteurs. Il doit aussi progresser sur sa technique individuelle, c’est évident. »

Frustré

Comme tout jeune joueur, Rudy a des hauts et des bas. « D’une semaine à l’autre, voire pendant la semaine, entre l’Eurocup et la Pro A », dit Kunter. Ceci explique pourquoi son temps de jeu est si fluctuant. « Il y a des moments où il progresse, d’autres où il progresse moins, c’est normal. » Rudy gère tant bien que mal sa frustration. « Non, je ne le vis pas bien. Quand on fait 15 d’éval’ (ndlr, contre Orléans, 9e journée) et qu’on ne joue pas le match d’après, il y a de quoi se poser des questions. Je ne comprends pas toujours ce qui se passe. Le problème en France, c’est qu’on

L’ŒIL DE JEAN-AIMÉ TOUPANE (SÉLECTIONNEUR U20) SUR POURCHOT

« IL DEVRA SE SURPASSER »

«

L’année dernière, Vincent a été le dernier coupé. Cela a été un choix stratégique. Dans les autres équipes, il y avait beaucoup d’intérieurs qui s’écartaient beaucoup. Et puis j’ai été un peu pris de court. Avec Vincent, dans la mise en place des choses, c’était beaucoup plus lent, beaucoup plus difficile. À la fin, cela s’est joué entre lui et Joffrey Lauvergne, qui était beaucoup plus prêt. On s’est posé beaucoup de questions parce que c’est un gabarit hors norme. Il fait des efforts pour courir. Il peut être décisif aussi sur des séquences. Je l’ai vu sur certains matches amicaux. Ma crainte, c’était la blessure mais il n’a pas eu le pépin. Fred Aubert, le préparateur physique de l’INSEP, a fait un gros travail de renforcement avec lui, notamment au niveau des membres inférieurs, au niveau des déplacements (…) Il a de très bonnes mains, il est adroit, bon passeur, il est à l’écoute. La seule inquiétude aujourd’hui, c’est est-ce qu’il va tenir ? L’année dernière quand je l’ai pris, le but était qu’il fasse tout ce que les autres faisaient. Qu’on ne s’adapte pas toujours par rapport à lui. Qu’il apprenne aussi à s’adapter par rapport à l’équipe. Il a fait comme tout le monde et ça s’est très bien passé. Je ne l’ai pas ménagé plus que cela. Entre le début et la fin de la préparation, ce n’était plus le même joueur. Pendant 6 semaines, il n’a pas eu un seul « pète ». Avant, dans la crainte de la blessure, il avait du mal à faire plus que ce qui était demandé. Aujourd’hui, il comprend que s’il veut atteindre le haut niveau, il devra se surpasser. Cela ne doit pas être un frein. »

SUR GOBERT

« QUAND IL Y AURA DE LA VIANDE AUTOUR DES OS… »

«

J’ai découvert un garçon avec un énorme potentiel. Maintenant, le potentiel ne suffit pas. Il faut le réaliser sur le terrain. Rudy nous a montré de suite qu’il pouvait être compétitif. Il a une grosse vélocité, il est très haut, dissuasif. Je savais qu’il avait des dispositions défensives énormes mais il m’a surpris en attaque. Je pensais que c’était beaucoup plus un intérieur d’intervalle, un joueur qui flashe dans les intervalles, mais il était capable au championnat d’Europe de jouer vraiment en post up, de finir main gauche main droite. L’année dernière, il a été très important dans notre dispositif, il a pu élever son niveau de jeu sur des matches très importants…quand il n’avait pas de fautes. Régulièrement il joue avec les pros. Pour les garçons de cet âge-là, c’est vraiment un plus. Quand on les récupère, on voit la différence (…) Quand il y aura de la viande autour des os, il fera encore plus mal. Mais dans l’agressivité mentale, dans la recherche de l’agressivité, il est là. Quand il va au panier, il ne fait pas semblant. C’est la chose la plus importante. Son mental ? Ce sont tous des garçons qui ont un projet personnel déterminé. Ils savent ce qu’ils veulent, où ils veulent aller. Il est à l’écoute. Le problème, c’est beaucoup plus sur la maturité du jeu parce que le poste d’intérieur est un poste où il faut de la maturité dans le jeu. Il va prendre de l’expérience cette année. »


Avec ses 2,22 m Vincent Pourchot est le plus grand Français de tous les temps.

Herve Bellenger/EB via Getty Images

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regarde trop notre âge. » Le garçon a du caractère. Il n’est pas une forte tête pour autant. Jean-François Martin décrit un garçon ouvert, blagueur, loin d’être bête – il a décroché son bac S sans année de retard – « un petit filou qui doit gagner en constance dans la concentration mais globalement pas un garçon pas compliqué. » « Il est jeune dans la tête aussi, quelquefois il oublie des réunions, il oublie de mettre le réveil mais c’est tout à fait normal, on a eu ça avec Kévin et Rodrigue », rigole Kunter, « mais il apprend, il capte les choses, il est travailleur. » Rudy se donne les moyens de réaliser ses rêves. Le Hoop Summit, la Draft, la NBA, Vincent Pourchot est très loin de toutes ces considérations. Et pour cause, le Lorrain

d’origine – comme Fred Weis – n’a pas encore foulé un parquet professionnel. Alors que Rudy Gobert franchit allégrement les obstacles, l’espoir du SLUC avance bien plus tranquillement, à son rythme. Bien content de pouvoir jouer au basket une trentaine de minutes par match dans le championnat espoirs, sans pépins. Les très grands gabarits sont des mécaniques très fragiles, nous expliquait Lucien Legrand, le directeur du Centre Fédéral, qui a veillé sur Vincent pendant quatre ans. Le cursus de Vincent au CFBB n’a pas été un long fleuve tranquille. En décembre 2009, une fissure du tendon rotulien a stoppé net sa progression et lui a fait perdre pratiquement une année. Un sacré coup dur quand on sait que la maturation des pivots de grande

« Mon objectif, je peux le dire maintenant, c’est d’être dans le Top 10 à la Draft » Rudy Gobert

Pascal ALLEE/HOT SPORTS

Rudy Gobert


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« Besoin de faire beaucoup de basket »

Ceux l’ayant vu évoluer au Centre Fédéral et en sélection de jeunes – il fut vice-champion d’Europe en 2009 à Metz avec, entre autres, Evan Fournier et Léo Westermann – le savent déjà. Au niveau de la dimension athlétique et de la motricité, Vincent part de loin. Rien à voir avec Rudy Gobert ou s’il faut comparer avec un pivot plus proche de son gabarit, Fred Weis à l’époque. À la base,

Vincent est extrêmement lent, loin des standards requis dans le monde professionnel. Un gros travail de rééducation fonctionnelle a déjà été réalisé au Centre Fédéral, avec le préparateur physique Fred Aubert. Le processus n’est pas terminé. En plus des entraînements collectifs avec les espoirs et les pros du SLUC, Vincent doit effectif un travail de renforcement global. « De la musculation, du travail d’appui spécifique, de vélocité, de vivacité sur des choses essentielles qui le mettent en difficulté dans le jeu comme les déplacements défensifs, les courses ou les appuis croisés », décrit son coach en espoirs, Pierre Verdière. « Mais ce travail ne peut pas être fait à la place du basket. Vincent manque énormément de repères. Il a besoin de faire beaucoup de basket. S’il faut qu’il passe encore une ou deux années à ne faire que du travail physique, ce sera impossible, on ne pourra pas rattraper le temps perdu. L’objectif, c’est qu’il devienne autonome. » Vincent est logé au centre de formation, juste à côté du Palais des Sports. Les conditions sont idéales pour travailler du matin au soir. « Je suis bien entouré, j’ai un bon programme avec un préparateur physique qui me conseille. On travaille et ça portera

Vincent Pourchot

Pascal ALLEE/HOT SPORTS

taille est plus longue, à la base, que chez les autres joueurs. Il a fallu relancer la machine. « J’avais perdu toute ma force sur ma jambe gauche. Je devais absolument la récupérer après un an d’arrêt. Cela n’a pas été facile. » Contrairement à ses camarades de la promotion 92, Vincent a eu droit à une année de rab au CFBB. Ceci explique pourquoi à 19 ans, il est seulement dans sa première année espoir. « Aujourd’hui,» dit-il,« je n’ai plus rien du tout. C’est totalement oublié. Je joue 30-35 minutes sur le championnat espoir et je peux travailler à fond la musculation sur les jambes ainsi que la vitesse. »

« Vincent manque énormément de repères. Il a besoin de faire beaucoup de basket » Pierre Verdière


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ses fruits. En 4 mois, par rapport à tout ce qui est vitesse, lever de genoux, il y a de gros progrès par rapport au début de l’année. » Ses premières semaines à Nancy ont été plutôt folkloriques. Pierre Verdière a découvert avec stupeur les problèmes que peut poser le gabarit absolument hors-norme de sa nouvelle recrue. « Tout est compliqué ! J’ai passé les deux premières semaines avec lui à gérer le bordel. » Les 2,22 m de Vincent supportent difficilement les déplacements en mini-bus. Le lit, les vêtements, rien n’est adapté à ses mensurations. « Heureusement que sa mère sait coudre. Avec deux survets, elle a réussi à en faire un ! » En outre, le staff médical a été énormément sollicité pour réaliser un paquet d’examens. Un premier mois lourd et laborieux.

62 d’évaluation à Pau !

En championnat espoirs, la présence d’un pivot de cette taille contraste évidemment avec les gabarits présents et le style de jeu proposé. « J’appréhendais un peu

Vincent Pourchot

par rapport à la vitesse. Mais au fur et à mesure des matches, je m’en sors plutôt bien. » Après quelques essais infructueux, son entraîneur a décidé de lui demander la même chose qu’aux autres joueurs, sans modifier sa philosophie de jeu. « On ne peut pas lui demander de finir en smash en contre-attaque comme Abdel Sylla l’année dernière mais par exemple, ce n’est pas lui rendre service que de faire 40 minutes de zone 2-3, si le projet c’est de l’amener à haut niveau. On n’a pas travaillé une seconde de zone. » Après avoir produit 7,2 pts, 5,0 rbds et 10,0 d’évaluation la saison dernière en N1, Vincent s’est adapté sans problème au championnat espoirs. « Je m’en sors plutôt bien mais je pense que je peux faire mieux encore. J’aimerais bien être à 16 pts et 15-16 rebonds de moyenne », nous livrait Vincent le 16 décembre. Avant de mettre ses paroles en pratique dès le lendemain à Pau, et même mieux que cela. Le Nancéien a sorti un triple-double monstrueux : 26 points, 26 rebonds et 15 contres ! Pour une évaluation de 62 ! Du jamais

« Je crois en lui. Il va y arriver. Il va devenir professionnel » Jean-Luc Monschau CANDIDATS À L’EURO U20

ENSEMBLE L’ÉTÉ PROCHAIN ?

Pascal ALLEE/HOT SPORTS

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es douze bleuets médaillés de bronze l’été dernier, six seront encore sélectionnables en équipe de France U20 l’été prochain. À savoir ceux de la génération 92, vice-championne d’Europe junior en 2009. Les deux leaders de cette génération : Léo Westermann et Evan Fournier, ainsi que Théo Léon (1,80 m, ASVEL), Axel Toupane (2,00 m, Strasbourg), Kevin Mendy (2,02 m, Le Mans) et Rudy Gobert. Une bonne base d’équipe. « Les 92 étaient déjà leaders l’année dernière », dit Jean-Aimé Toupane. « Cela explique notre manque de maturité, de vécu contre l’Italie en demifinale. Cette même génération aura fait un championnat d’Europe, c’est une grosse expérience. Normalement, ça devrait mieux se passer. » Dernier coupé l’an passé, Vincent Pourchot est clairement dans les plans du sélectionneur, au même titre que Rudy Gobert et Louis Labeyrie (2,09 m, 19 ans), révélation au HTV cette saison. « On va anticiper certaines choses avec Vincent. Je commence déjà à réfléchir de la façon dont on va l’utiliser. Il ne peut être qu’un plus. », glisse Toupane. Avec le renfort plus que probable de Livio Jean-Charles (2,03 m, 18 ans, ASVEL), les Bleuets tiennent leur carré intérieur majeur. D’autres « 93 » sortis l’été dernier du Centre Fédéral sont attendus sur les autres postes. Le meneur de l’Élan Chalon, Ulysse Adjagba (1,85 m), le shooteur de la SIG, Hugo Invernizzi (1,96 m). Cette équipe espoir possède une bonne dose de talent à tous les étages. Rudy Gobert l’assure, « on pouvait faire mieux qu’une médaille de bronze. On va se rattraper cette année. Revenir encore plus motivés avec ceux de l’année dernière ! »


PIVOTS D’AVENIR • MAXI-BASKET 61 vu en espoirs. Le genre de prestations qui intrigue, forcément, quant au niveau actuel du jeune homme. De là à l’imaginer dès à présent en Pro A, comme Rudy Gobert ?

« Se mettre au rythme des pros »

Jean-François Martin en doute : « En espoirs, s’il a la balle près du cercle, on peut toujours courir pour l’avoir, mais au niveau supérieur, la taille ne suffit pas, il faut aussi gagner un duel physique avant de s’approcher du cercle. C’est important de mûrir dans la dureté au contrat des pros. » Au quotidien, Vincent mesure le chemin restant à parcourir face aux Akingbala, Samnick et Sylla. « Physiquement, c’est dur ! Je sais que j’ai les moyens d’avoir accès au monde pro avec mon intelligence de jeu, mais il me manque de petits détails qui font la différence : tout ce qui est physique et la vitesse. » Jean-Luc Monschau précise : « Comme son centre de gravité est haut, en pro, quand il reçoit la balle poste bas, il n’a pas la force d’entrer dans la raquette. Il faut se renforcer. La plus grande difficulté pour lui c’est de se mettre au rythme des pros dans les transitions et augmenter sa vitesse de déplacement sur les picks-and-roll, pour qu’il puisse être sur l’écran et tout de suite après près du panier pour utiliser sa grande taille. Mais il a un bon tir, des très bonnes mains, une bonne vision du jeu, beaucoup de qualités au départ qui font que je crois en lui. Il est appliqué, volontaire, il ne se la raconte pas. Il va y arriver, il va devenir professionnel. » Vincent n’a pas d’autre objectif. Quand Rudy Gobert évoque le Top 10 de la Draft, lui vise sagement un premier contrat pro à l’issue de ses deux années espoirs, et une dizaine de minutes en Pro A. « Ce serait déjà un bon objectif atteint. » D’aucuns pourraient voir chez ce gentil garçon un manque d’ambition. D’autres estimer au contraire qu’il a le mérite d’avoir les pieds sur terre. Que cet objectif est simplement réaliste. « Mon ambition, ce n’est pas forcément de devenir un intérieur qui marque beaucoup de paniers », dit-il encore. « C’est surtout de poser de bons écrans et de prendre tous les rebonds qui passent. » Les puristes apprécieront. l

L’EQUIPE DE FRANCE DU FUTUR

DE LA TAILLE !

Rudy Gobert

Jean-François Mollière / IS

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endant très longtemps, l’équipe de France a souffert de son manque de centimètres dans la peinture. À une époque pas si lointaine, la paire Bilba (1,98 m) – Ostrowski (2,05 m) tenait vaillamment la raquette des Bleus. Les 2,17 m de Fred Weis ont fait beaucoup de bien aux Bleus entre l’Euro 1999 et l’Euro 2007. Problème, derrière le grand Fred, la France n’a produit aucun grand pivot de classe mondiale. Claude Marquis, Ian Mahinmi, Ali Traoré et Ronny Turiaf ont tenu le poste entre 2008 et 2010. Aucun ne dépasse les 2,10 m. En ce sens, l’arrivée de Joakim Noah (2,11 m) l’été dernier a changé le paysage et le quotidien des Bleus. La tendance risque fort de perdurer dans les années à venir. En effet, l’association des générations 88-89 et 91-92 est susceptible d’alimenter l’équipe de France en pivots de grande taille. Même les ailiers-forts vont répondre aux standards internationaux. Ailiers-forts : Louis Labeyrie (2,09 m, 92, Hyères-Toulon), Joffrey Lauvergne (2,10 m, 91, Chalon), Kim Tillie (2,10 m, 88, ASVEL), Pivots : Alexis Ajinca (2,15 m, 88), Bangaly Fofana (2,12 m, 89, ASVEL), Rudy Gobert (2,14 m, 92, Cholet), Vincent Pourchot (2,22 m, 92, Nancy).


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LES BIG MEN FRANÇAIS

AU MÊME ÂGE

Rappelez-vous de la première saison de Joakim Noah en NCAA. Anonyme.

TRADITIONNELLEMENT, LA MATURATION DES PIVOTS EST PLUS LENTE QUE SUR LES AUTRES POSTES. OÙ EN ÉTAIENT LES « 7 PIEDS ET PLUS » FRANÇAIS DANS LEUR VINGTIÈME ANNÉE ? Par Antoine LESSARD

Frédéric Weis (2,18 m, né le 22 juin 1977) JOUEUR MAJEUR AU CSP À 19 ans et demi, le Mosellan est dans sa deuxième saison au CSP Limoges. Il joue 20 minutes par match au sein d’une top team du championnat de France – après être passé par le Centre Fédéral – et compile 7,4 pts à 61,7% et 5,1 rbds par match. Cette saison-là (1996-97), le CSP termine deuxième de la saison régulière. Deux ans plus tard, à 22 ans, Fredzilla sera drafté au premier tour par les New York Knicks (15e choix). S’il ne foulera jamais les parquets de la NBA, Weis accomplira une belle carrière en club et en sélection, riche de nombreux trophées (champion de France en 2000, double vainqueur de la Korac en 2000 et 2001, médaillé d’argent aux JO 2000 et de bronze à l’Euro 2005). Jusqu’à Noah, aucun pivot français de l’ère moderne ne pouvait en dire autant.

Olivier Gouez (2,18 m, né le 24 juin 1984) ENCORE EN N1

En 2003-04, Gouez n’est pas encore sorti du Centre Fédéral. Le géant a effectué deux saisons de rab dans la structure du Bois de Vincennes. Il fait équipe avec Marco Pellin, Aldo Curti, Souarata Cissé ou encore Abdou Mbaye et tourne à environ 10 points et 5 rebonds en Nationale 1. La saison suivante, Gouez choisit de rejoindre l’ASVEL. Une erreur d’aiguillage, concèdera-t-il après coup. Dans le Rhône, le Breton est cantonné au championnat espoir. Il poursuivra sa carrière en Pro B (Get Vosges’06, Limoges’07 et ’08). Après trois saisons à Lille entre N1 et Pro B, Gouez a retrouvé Philippe Namyst à Orchies. Après 14 matches, il compile 5,4 pts et 3,0 rbds en 12’ en Nationale 1. Sa carrière n’aura jamais décollé.

Joakim Noah (2,11 m, né le 25 février 1985)

Andy Lyons/Getty Images

FRESHMAN À FLORIDA

Les 7 pieds, Joakim Noah les fait…avec ses chaussures ! Mais avouez qu’il était difficile d’exclure l’actuel pivot titulaire de l’équipe de France. En 2004-05, Noah est freshman à l’université de Florida. Dans l’ombre de David Lee, les débuts sont timides : 3,5 pts et 2,5 rbds en 9 minutes par match sur sa première saison en NCAA. Rien qui ne laisse augurer, en tous les cas, de la suite de sa carrière. Deux titres NCAA en 2006 et 2007, un 9e choix de Draft en 2007. Des playoffs de feu dès sa deuxième saison avec les Bulls. Un contrat à 60 millions de dollars. Une première campagne tonitruante avec l’équipe de France. LE pivot que les Bleus attendaient depuis…depuis quand déjà ?


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Johan Petro (2,13 m, né le 27 janvier 1986) 19 MINUTES EN NBA En 2005-06, Petro, même pas 20 ans, joue 19 minutes par match en NBA ! Ce talent précoce a quitté le Centre Fédéral à 17 ans et rejoint Pau-Orthez. En deux saisons dans le Béarn, il goûte à la Pro A (44 matches) et à l’Euroleague (18 matches). Le Guadeloupéen est dominant dans sa catégorie d’âge. En 2004, il fait partie de l’équipe type de l’Euro Junior. Drafté par Seattle (25e choix) en 2005, les débuts sont prometteurs. Petro ponctue sa saison rookie avec une douzaine de matches à plus de 10 points. Un futur bon pivot NBA ? Il n’exploitera jamais son potentiel. La suite démontrera que Petro n’est au mieux qu’un role player. Et une immense déception en équipe de France.

(2,11 m à l’époque) aux bras interminables (2,28 m d’envergure) aussi mobile qu’un ailier. Techniquement, en revanche, Fofana est brut de décoffrage. Le pivot n’a que quatre ans de basket encadré derrière lui. Cette saison-là, Vincent Collet l’appelle à 10 reprises chez les pros. Le bilan est anecdotique (0,8 pt à 30,0%, 0,9 rbd en 5’) mais les premiers jalons sont posés. Divers pépins physiques vont retarder son apprentissage. Trois ans plus tard, Fofana, 22 ans, est loin d’être un basketteur abouti. Son efficacité est avant tout défensive. On attend encore le déclic.

19 minutes par match à même pas 20 ans. Johan Petro n’a jamais confirmé.

Romain Duport (2,17 m, né le 10 décembre 1986) EN ESPOIRS

En 2005-06, le pivot du Havre fait partie des bons espoirs du championnat (13,0 pts à 54,8% et 10,0 rbds en 27 minutes) au sein de la très forte génération havraise (Causeur, Jomby, Pape Sy…) mais est jugé trop juste par Christian Monschau pour jouer en Pro A. Ses premières apparitions avec les pros, il les fera la saison suivante (6,4 pts à 61,5% et 3,5 rbds en 14’ sur 12 matches). Le géant a des mains, un excellent shoot dans le périmètre. On se dit alors que son manque de dureté physique finira bien par s’estomper avec le temps. Sauf que cinq ans plus tard, le constat est toujours d’actualité. Duport manque de dureté et peine en défense. Rien n’est perdu mais à 25 ans, le temps presse.

Alexis Ajinca (2,14 m, né le 6 décembre 1988) IL BRILLE AUX AS

En 2007-08, Ajinca évolue au HTV. Un an plus tôt, en 2006, au sortir de son cursus au Centre Fédéral, le Stéphanois n’a pas suivi les orientations fédérales et choisi de rejoindre Pau en compagnie de Ludovic Vaty. Après une saison à cirer le banc des pros palois (15 minutes en deux matches), il rejoint l’équipe entraînée par Alain Weisz. Dans l’ombre de Vincent Masingue, Ajinca joue une dizaine de minutes par match (5,0 pts à 53,6% et 3,1 rbds). Il sort de sa coquille à l’occasion de la Semaine des As, jouée à Toulon : 6 points, 14 rebonds et 7 contres le 7 février 2008 en quart de finale face à Nancy. Quelques mois plus tard, Ajinca est drafté par les Charlotte Bobcats (20e choix). Il débute en NBA à 19 ans et demi. Ajinca est bien trop frêle physiquement, trop vert, pour s’y imposer. Après trois saisons, trois franchises différentes, un séjour en D-League, les coaches NBA se posent la même question : comment utiliser efficacement ce grand échalas ?

LANCÉ PAR COLLET

En 2008-09, Fofana est dans sa troisième année espoir à l’ASVEL (12,3 pts à 54,5% et 7,6 rbds en 25’). Son physique et ses capacités athlétiques intriguent. Une longue tige

Rocky Widner/NBAE via Getty Images

Bangaly Fofana (2,13 m, né le 3 juin 1989)


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LES GRANDS CLUBS EUROPÉENS

BARÇA, BARÇA,

BAAAAARÇA !

UN PEU D’HISTOIRE

EN TRAVERS DE LA GORGE

ondée le 24 août 1926, la section « baloncesto » du FC Barcelona a été plus ou moins quantité négligeable jusqu’aux années 80, avec un seul titre de Liga en 1959 (assorti d’une « Copa del Generalisimo »). Mais à partir de 1981, le Barça a commencé à engranger, autour de la génération San Epifanio, Solozabal, Sibilio. Ceux-là, entourés de forts joueurs nationaux et d’Américains de gros standing, ont cumulé six Liga entre 1981 et 1990, offrant au club son premier trophée européen en 1985 (77-73 contre le Zalgiris en finale de la Coupe des Coupes), puis son second l’année suivante (101-86 contre Pesaro, toujours en Coupe des Coupes). Mais, grand « loseur » sur l’échiquier continental, avec ses cinq finales d’Euroleague perdues (1984, 90, 91, 96 et 97) et, au surplus, trois Final Four vendangés (1989, 94 et 2000), le Barça a mis le paquet en 2003 (Bodiroga, Jasikevicius, Fucka, coach Pesic) et enlevé le triplé Euroleague (76-65 contre Trévise, à Barcelone), Liga et Copa. l

e 11 avril 1996, une date qui a longtemps hanté les « Culés » (les aficionados du Barça). Ce jour-là, les Espagnols disputent leur quatrième finale d’Euroleague, à Bercy, et croient tenir enfin l’affaire lorsque José Montero profite d’un cafouillage du Panathinaikos pour filer seul au cercle et marquer le lay-up de la gagne, quasi au buzzer. Mais Stojko Vrankovic revient du diable vauvert et contre Montero. Or, le block est illégal, la balle a déjà touché la planche. Tout le monde l’a vu sauf les arbitres, qui entérinent l’action défensive et offrent aux Grecs leur premier trophée continental (67-66). Le Barça en voudra à mort à l’arbitre français Pascal Dorizon, pourtant pas le seul fautif dans l’histoire. l

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Sasha Djordjevic

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LE PALAU BLAUGRANA

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a fameuse arène du Barça est loin d’être aux standards des luxueuses salles qui ont poussé, et poussent, un peu partout en Europe. Mais elle respire l’histoire. Construite en 1971, elle comptait alors environ 5.500 places avant d’être « améliorée » en 1994, sa capacité passant à 7.500 sièges. Pour les gros événements, ou en cas de nécessité, le Barça joue parfois au Palau San Jordi (17.000 places). Le tournoi des Jeux de 1992 ne s’est déroulé ni au Blaugrana ni au San Jordi mais au Palais des Sports Olympiques de Badalone, proche banlieue de Barcelone. L’édification d’un nouveau Blaugrana de 12.000 places a été annoncée. l

NAVARRO, SEUL AU MONDE

Sergio Carmona/Hot Sports

P

NOTRE HALL OF FAME DES TRENTE DERNIÈRES ANNÉES Premier cinq Sasha Djordjevic

1997 à 1999

Juan Carlos Navarro

depuis 1997 (sauf 2007-08)

Juan Antonio San Epifanio

1979 à 1995

Dejan Bodiroga

2002 à 2005

Pau Gasol

1998 à 2001

Deuxième cinq Nacho Solozabal

1975 à 1992

Sarunas Jasikevicius

2000 à 2003

Andres Jimenez

1986 à 1998

Audie Norris

1987 à 1993

Zoran Savic

1991 à 1993 et 2000-01

armi la pléiade de légendes passées au Barça, il en est une qui a fini par toutes les éclipser. Et elle joue encore. Juan Carlos Navarro, enfant de la petite ville catalane de Sant Feliu de Llobregat, où il est né le 13 juin 1980, a fait ses débuts avec l’équipe professionnelle le 23 novembre 1997 et vient de prolonger son bail jusqu’en 2015. Il n’aura fait qu’une seule infidélité au Barça, en 2007-08, lorsqu’il a passé une saison aux Memphis Grizzlies (où il a été bon mais où il s’est ennuyé). Avec le Barça, « La Bomba » a cumulé 2 Euroleague, 6 Liga, 5 Copa et une Korac. Fameux ! Il a également représenté son club dans les palmarès individuels : MVP de l’Euroleague en 2009, MVP du Final Four en 2010, MVP de l’ACB en 2006, MVP de la finale d’ACB en 2009 et 2011, ainsi que cinq nominations dans la meilleure équipe type de l’Euroleague (2006, 2007, 2009, 2010 et 2011), record de Nikola Vujcic égalé. Depuis le 24 novembre 2011, il est également le meilleur marqueur de l’histoire de la compétition européenne phare. Neuvième marqueur historique de l’ACB, il passera Juan Antonio San Epifanio dans ce classement sans doute au cours de la saison 2012-13 et sera alors le meilleur « anotador » de l’Histoire du Barça. La complète, quoi !l


Par Fabien FRICONNET

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ÉPISODE 3

LE FC BARCELONA CETTE SAISON

PLUS POSÉS

C

omme c’est le cas en football, où le Real est redevenu un adversaire très sérieux

UN RIVAL EMBARASSANT • Jusqu’en 1995, année de la dernière Euroleague du Real Madrid, le Barça était systématiquement rejeté dans l’ombre des prestigieux « Merengues », qui affichent toujours un palmarès beaucoup plus étoffé (8 Euroleague à 2, 13 coupes d’Europe à 6, 30 Liga à 16). Mais depuis, c’est clairement le Barça qui a pris le dessus : 2 Euroleague à 0, 8 Liga à 3, 5 Copa del Rey à 0.

LE CHIFFRE

Victor Sada (à gauche), Marcelinho Huertas et assis, Juan Carlos Navarro.

Photos : Jose Luis Surralles/EB via Getty Images

pour le Barça, les deux mastodontes se tirent la bourre en ACB, au contraire des deux saisons précédentes, lors desquelles les Catalans ont dominé la saison régulière (31-3 en 2010 et 27-7 en 2011) et atteint deux fois la finale (un titre), tandis que le Real faisait choux blanc sur toute la ligne. On pensait que le Barça pourrait être en recul cette année, après la saignée de l’été (Rubio, Lakovic, Grimau, Anderson, Morris), mais la qualité des recrues (Huertas et Eidson notamment) et le fond de jeu imposé par Xavi Pascual ont fait du début de saison des Catalans un rêve : 7-0 en Euroleague (avec un +28 à Kazan et un +17 contre Sienne) et 9-1 en ACB (une défaite de six points à Séville), soit le même bilan national que le Real. Lors de la deuxième journée, Estudiantes a pris une déculottée monstrueuse au Blaugrana : 97-51 ! Le Barça présente la troisième attaque de l’ACB (77,6) – le Real étant premier (82,4) – mais aussi la… meilleure défense (65,1). l

2

• Ça n’est pas donné à tout le monde : le Barça a battu, dans son Histoire, deux franchises NBA ! À chaque fois au Palau San Jordi. Le 5 octobre 2006, les Catalans s’offrent les Philadelphia Sixers, 104 à 99, une équipe qui, il est vrai, n’avait pas fait les playoffs la saison précédente. Porté par son trio d’arrières Navarro-Lakovic-Basile (52 points), le Barça met en plus sous l’éteignoir Allen Iverson (3/12 aux tirs). Plus fort, le 7 octobre 2010, les Espagnols, champions d’Europe en titre, s’offrent le champion NBA sortant, les Los Angeles Lakers, 92 à 88, grâce à deux matches de mammouth de Navarro (25 points et 6 passes) et Pete Mickeal (26 points, 13 rebonds et 7 passes !). En revanche, le Barça est tombé contre les Denver Nuggets en 1989 (103-137 à Rome), les Memphis Grizzlies en 2003 (80-91 à Barcelone) et les Lakers deux fois en 2008 (104-108 puis 109-114 à Los Angeles).

PALMARÈS • 2 Euroleague en 2003 et 2010 • 2 « C2 » Coupe des Coupes 1985 et 1986 • 2 « C3 » Coupe Korac en 1987 et 1999 • 16 Liga : 1959, 1981, 1983, 1987 à 1990, 1995 à 97, 1999, 2001, 2003, 2004, 2009 et 2011 • 22 Copa del Rey : entre 1943 et 2011


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Challes-les-Eaux

Retour en haute Le nom de Challes-les-Eaux est inscrit de nouveau tout en haut de l’affiche. Le club est pourtant regardant sur la dépense, au point d’avoir refusé de s’engager en EuroCup.

Fabien Savouroux

Par Pascal LEGENDRE, à Challes


REPORTAGE • maxi-basket 67

altitude

• Un lac avec la montagne en décor, quoi de mieux pour faire un peu d’aviron lors de la préparation d’avant-saison ?


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«

P. Allée-H.Bellenger/IS-Hot Sports-FF

BB

P.Allée-H.Bellenger/FFBB

Notre équipe est la première, ce s’exposer au Phare, la nouvelle enceinte de Chambéry, n’est pas la meilleure. » Le coach la ville qui jouxte Challes-les-Eaux, qui héberge les italien Aldo Corno sait qu’il est handballeurs et parfois les basketteurs de Pro B de Aixindiqué « fragile » sur le bel emballage. Il Maurienne. « Chambéry Métropole aimerait que l’on y fasse n’a sous la main que sept professionnelles des matches mais cela à un coût et c’est une salle énorme et quelques pépins physiques pourraient avec 5.000 places dans sa configuration basket », explique Marie Vicente Santa Cruz, ancienne MVP de Nationale 1, briser le leader en mille morceaux. Pour l’instant les Savoyardes confirment devenue responsable de la com’ du club. « Le calendrier leur excellente saison antérieure (2e de la saison régulière ne joue pas non plus en notre faveur puisqu’on a déjà reçu grâce à un meilleur point-average sur Tarbes et Lattes- Montpellier et Bourges et qu’il n’y a pas de grosses affiches Montpellier) grâce notamment à un alliage réussi de quatre sur la 2e partie du championnat. On aurait aimé y jouer étrangères, les Américaines Mistie Mims et Danielle Page, Tarbes mais ce jour-là, on n’aurait pas la salle avant 16h, l’Allemande Romy Bär et la Croate Emilja Podrug, alors que donc pas d’entraînement, pas de shooting, et comme c’est les postes 1-2 sont offerts à trois Françaises, l’enfant du l’un des deux derniers matches du championnat on ne peut pays Anaël Lardy, Alexia Plagnard et Mélanie Plust. pas décaler la date. Mais tout ça est à l’étude », complèteLa mythique Salle Polyvalente et sa fameuse coursive font le t-elle. plein des 1.300 places et une bonne partie du public a connu Bref, les basketteuses de Challes font leur trou même si la l’apogée du club il y a une vingtaine d’années. « Quand on terre s’est durcie avec l’une des meilleures équipes de hand est monté en Ligue Féminine, Yvan Mainini, alors président française – elle aussi en concurrence avec Montpellier – et de la fédération, avait dit que Challes, il connaissait, et que une légitime prédilection des Savoyards pour le ski. sa salle avait d’ailleurs besoin d’un bon coup de Ripolin. Ça m’a vexé car j’ai trouvé ça un peu méprisant vis-à-vis de ce Douceur de vivre club qui a tant apporté au basket féminin », juge le président Avec ses montagnes, ses lacs, sa verdure, mais aussi Maurice Meunier. sa proximité de Lyon, Genève, Grenoble, de l’Italie, la Un projet de « restructuration » est lancé avec la mairie et Méditerranée pas si éloignée, il est impossible de résister il n’est pas impossible que l’équipe aille prochainement à la douceur de vivre de l’endroit. Les joueuses ne sont pas › › ›

• L’athlétique Américaine Mistie Mims, élue haut la main MVP étrangère de la Ligue Féminine en 2010-11.


REPORTAGE • maxi-basket 69

Anaël Lardy

Enfant du pays

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naël Lardy est une « Falcoz ». Une tribu qui a nourri le club savoyard. « Ma grand-mère a fait 17 enfants et il a fallu qu’elle leur trouve quelque chose pour s’occuper, elle les a mis au basket. » Anaël est la fille de Gilberte, qui a joué en première division, elle aussi comme meneuse. Il y a aussi, Bernadette, Danielle, Sabine, Myriam… D’ailleurs Anaël s’y perd un peu quand il lui faut expliquer qui a joué avec qui et quand. Elle précise tout de suite que le basket n’était pas un devoir obligatoire pour la génération suivante. Une de ses cousines – la fille de Michèle – est bien au centre de formation, mais son petit frère Aurélien a préféré le ski. Ceci dit, elle était prédestinée puisque sa maman a continué à jouer jusqu’à six mois de grossesse ! Et tout le monde à Challes sait qu’Anaël est une « Falcoz », même si Gilberte s’est installée à Chamonix vu que son mari est militaire. Bien sûr elle a joué dans le gymnase toute petite et aujourd’hui encore sa plus fidèle supportrice est sa grand-mère abonnée aux matches depuis, ouf, des années. Seulement, à la sortie de l’INSEP, Anaël n’est pas rentrée à la maison. « Quand on part de chez soi à l’adolescence, on a envie de vivre sa vie, de découvrir du pays. » Ce fut donc ClermontFerrand, quatre saisons. Il faut faire le constat que son armoire à trophées était déjà riche de trois médailles de bronze à des Euro et un Mondial espoirs. Elle est de la génération de Sandrine Gruda. Et puis ce furent deux années tout à fait incroyables, à Bourges et en équipe nationale. Un titre de champion, une Coupe de France, deux bons parcours en Euroleague, et surtout un titre de championne d’Europe et une participation au Mondial. Le tout entre 22 et 24 ans. « Pour moi ce furent deux années excessivement dures », dit-elle sans détours. Un paradoxe ? En fait Anaël s’est introduite dans la cage aux fauves alors qu’on ne lui avait pas encore pleinement expliqué comment maîtriser le

P. Allée-H.Bellenger/IS-Hot Sports-FF

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Après deux ans à Bourges et en équipe de France, Anaël Lardy est revenue en Savoie pour se ressourcer.

fouet, et elle s’est mise une pression énorme que ses attitudes contractées sur le terrain trahissaient. Pas évident de succéder à Céline Dumerc chez les Tango, de relayer la même Céline et Flo Lepron en équipe nationale. Anaël était une formidable exécutante, pas encore une Générale. « Je me suis exigée un niveau de basket que je n’avais pas encore et l’impression que j’ai c’est qu’on ne m’a pas laissé le temps d’acquérir cette petite maturité qui me manquait », estime-t-elle en précisant, « j’ai eu la chance de tomber sur Pierre Vincent qui m’a beaucoup appris, aidée, et sur des coéquipières qui m’ont mise en confiance. »

Oxygène

En revenant à Challes, la Savoyarde a évacué le stress, s’est ré-oxygénée. « J’avais besoin de prendre un peu de recul, de voir autre chose que du basket, de faire une formation en anglais, de retrouver le plaisir. Quand on fait l’Euroleague, on n’a le temps de rien. » A-t-elle le sentiment d’être dévaluée, elle qui a connu avec Bourges ce qui se fait de mieux en made-in-France ? Aucunement. « J’ai été étonnée par la qualité du club, on a un préparateur physique qui nous suit, au niveau muscu c’est du sérieux. C’est pour ça que je suis très satisfaite de mon choix. » Le retour d’Edwige Lawson l’a mécaniquement boutée hors de l’équipe nationale et elle ne s’est pas rendue à l’Euro en Pologne. Aucune amertume. Allez, elle sait quand même que 2012 est une année olympique. « Déjà, il y a le TPO ! Je suis compétitrice, j’aime le basket, j’aime mon pays, en équipe de France, toutes les émotions sont décuplées, alors bien sûr que j’aimerais y retourner. Pour l’instant il n’y a pas de places pour moi. À moi de progresser. Et si je ne suis pas sélectionnée je ne serai pas en dépression pour autant. Si je peux être actrice c’est bien, sinon je serai dans les tribunes. » l P.L.


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10 questions à Alexia Plagnard

« J’aime apprendre »

La jeune (21 ans) meneuse savoyarde réussit parallèlement de brillantes études et se verrait bien bosser pour un grand équipementier.

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ourquoi l’Australienne Kristie Harrower était-elle ta joueuse modèle quand tu étais gamine ?

C’était la meneuse d’Aix quand j’étais petite, moi je jouais dans des clubs à côté. Quand je la voyais jouer j’avais l’impression qu’elle prenait toutes les bonnes décisions, elle était capable de shooter, de driver, elle savait gérer les tempos, c’était la leader sur le terrain. Ce sont les caractéristiques d’une bonne meneuse de jeu. Où as-tu rangé ton trophée de meilleure espoir de LFB 2010 ?

Dans ma chambre sur une petite étagère juste à côté de mon lit. C’est une distinction qui fait plaisir mais ce n’est pas parce que tu l’as que tu vas réussir et inversement. 15 des 16 joueuses à ce palmarès depuis 1990 ont été internationales A, tu attends quoi pour les rejoindre ?

J’espère que je le serai. C’est mon objectif, pas pour tout de suite. P. Allée-H.Bellenger/IS-Hot Sports-FF

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Quelle est la salle de Ligue Féminine qui est plus chaude que celle de Challes ?

Basket Landes c’est horrible ! C’est la plus dure de toute la ligue. Les gens sont assis à un mètre du terrain, limite tu ne peux pas faire les remises en jeu, le public est tout le temps en train de siffler sur les arbitres, sur nous. C’est dix fois pire que Challes. pour quatre ans. Je ne veux pas créer ma boîte mais intégrer Nike ou mieux Adidas ou du moins une grande entreprise, développer une gamme de Je n’en sais rien car je ne visite jamais rien (rires). produits de basket, participer à une opération de Les Galeries Lafayette de Chambéry ! Non, il y a la communication. Depuis le bac je fais mes études par correspondance, sauf là où j’ai eu un séminaire. Chapelle du Mont-Saint-Michel juste à côté… Ce sont des filières adaptées aux sportifs de haut niveau. Pour ma licence, j’y allais tous les 2-3 Bourges est-elle encore une ville qui fait mois et on faisait des points sur chaque matière. peur aux enfants ? Même si l’année dernière on a pris 40 points pour Ils disent qu’il faut y consacrer deux heures par moi ce n’est plus du tout… Je ne veux pas être jour, mais sincèrement je ne sais pas exactement méchante… Ça n’a plus le même prestige, ça ne combien de temps j’y passe en moyenne, ça dépend fait plus la même impression. Je crois que l’on des jours. C’est vrai que nous les filles on voit peut gagner là-bas. Ce n’était pas le cas lors de ma davantage l’après-basket que les garçons, et la première année à Montpellier en 2008-09 alors que première raison c’est l’argent. Moi ma première là c’est possible, d’ailleurs plusieurs équipes l’ont motivation c’est que le jour où j’arrête le basket je veux faire quelque chose qui me plaît. Et puis j’aime fait. Non, ça ne fait plus peur. apprendre de nouvelles choses. Quel est l’endroit qu’il faut absolument visiter en Savoie ?

Tu as eu une licence en Commercialisation des produits et services sportifs, tu veux monter une société concurrente de Nike ?

Je suis maintenant à l’école de management de Grenoble, c’est une école de commerce, j’en ai

Aix-en-Provence, Montpellier, Challes… Tu t’imagines un jour émigrer au Nord de la Loire ?

Non, non… Je n’irai jamais plus haut qu’Avignon !

Bon, disons que je suis bien dans le Sud et j’espère y rester le plus longtemps possible. Après si j’ai une proposition intéressante ailleurs, je partirai. Entre une sortie avec des copines pour faire du shopping et une séance de 100 shoots à 3-pts, seule, à 8h du matin, dans une salle pas chauffée, tu choisis quoi ?

De très loin le shopping (rires). Après j’irai shooter dans une salle qui est chauffée avec quelqu’un qui m’aide et pas à 8h du matin. Que penses-tu de « Let’s twist again » le tube mondial des années 60 du père de ta coéquipière Mistie Mims ?

Magnifique ! Ça anime les déplacements, elle nous fait la danse de son père. Même en début d’année je ne savais pas que c’était son père qui avait chanté ça et je ne comprenais pas pourquoi on mettait toujours cette chanson à l’échauffement. Et puis un jour on m’a dit, « c’est le père de Mistie. » l Propos recueillis par Pascal LEGENDRE


REPORTAGE • maxi-basket 71

• Alexia Plagnard en girly pour le calendrier 2012 du club.

perdues au milieu de nulle part. D’ailleurs plusieurs d’entre- était sur les fesses de voir qu’en France quand tu es malade, elles venues d’au-delà les frontières y ont trouvé racines c’est pris en charge alors que, dit-elle, aux États-Unis la (voir encadré). « C’est vrai qu’il y a une qualité de vie assez première chose que tu dois faire quand tu rentres à l’hôpital exceptionnelle à Challes », confirme Marie Vicente Santa c’est de montrer ta carte de crédit. Elle m’a dit aussi qu’elle Cruz qui a aussi porté le maillot du club. « Les filles sont veut acheter une maison », poursuit le président. « On a mis logées à côté de la salle, certaines y vont même à pied. Si on en place un accord d’intéressement avec les filles. En plus a gardé Mistie cette année c’est aussi parce qu’elle se sent de leurs salaires, on les intéresse à la vie du club ; elles bien ici. C’est un club professionnel avec un côté familial et touchent une prime par exemple si on est premier, et cette ça compte chez les filles. Elles passent au club quand elles prime est mise sur un plan d’épargne et le club l’abonde de veulent et le président est au petit soin pour elles. Il fait tous la valeur de l’épargne. C’est pour les inciter à ne pas craquer les déplacements et sa femme, une infirmière à la retraite, leur pognon et à mettre de côté. » Maurice Meunier sait qu’il ne conservera pas indéfiniment s’occupe du médical. » La prolongation du contrat de Mistie Mims a été le meilleur son trésor et ne s’en formalise pas. « Je refuse de signer recrutement de l’inter-saison tant l’impact athlétique de des contrats de plus d’un an, sauf pour Alexia (Plagnard) qui cette ancienne joueuse de WNBA, élue confortablement était espoir et qui avait besoin d’une relation de confiance. On me dit que je suis ballot car MVP étrangère 2011 de si on a des résultats, les filles la LFB, est considérable. prennent de la valeur. Mais Le président confirme que je me dis que ça serait aussi des offres alléchantes une manière de les piéger. Je venues de Turquie et aussi préfère faire le bilan ensemble de Montpellier étaient sur à la fin de la saison. C’est ce qui la table mais que Mistie a s’est passé avec Mistie. Elle préféré continuer son chemin en Savoie « et pas pour le salaire. » Il faut insister sur le est restée. Et si on ne peut pas, tant pis, c’est normal qu’elle fait que cette Américaine parlait couramment français après aille vivre sa vie ailleurs. » quelques mois sur le territoire national et que son adaptation À travers l’association La Force du Cœur, Challes-les-Eaux à la vie savoyarde est tout à fait exceptionnelle… Même Basket veut aussi démontrer que tout ne se résume pas à si Challes a déjà eu en son sein Kristen Brooke Sharp, l’équipe pro et aux résultats sportifs. L’école de basket et le l’actuelle meneuse de Mondeville qui porte les drapeaux centre de formation d’un budget annuel de plus de 200.000 américains et français tatoués sur son biceps. « Mistie me euros sont des priorités absolues. D’ailleurs celui-ci va parlait d’enfants puisqu’elle vient de se marier. Je lui ai dit bénéficier d’immeubles neufs et le club aimerait y abriter qu’elle a le temps ! », rapporte Maurice Meunier. « Mais elle un Pôle France décentralisé. « On a bâti un projet en disant › › ›

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Un alliage réussi de quatre étrangères.


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P. Allée-H.Bellenger/IS-Hot Sports-FF

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Avec tout le respect que j’ai pour Tarbes, je constate qu’ils ont une équipe moyenne et qu’ils ont perdu tous les matches en Euroleague. Elles sont fatiguées, mortes. Si on avait fait une coupe d’Europe à sept, mes joueuses seraient toutes à l’hôpital. J’ai parlé hier avec Sergio Scariolo, le coach de Milan, il a trois blessures, il est en difficulté. Ettore Messina Pas de coupe d’Europe Le revers de la médaille d’un club de petite bourgade, a gagné deux Coupes des Champions (sic) avec Moscou. Il c’est que l’envergure financière demeure limitée. Avec avait 15 ou 16 joueurs professionnels à disposition ! » 1.350.000$ de budget, Challes a guère plus que Lyon Le président étudie la possibilité d’un engagement en nouveau promu et près de deux fois moins que Bourges, le EuroLeague si la réussite sourit à son club jusqu’au bout. Mais navire amiral de la flotte française. Conséquence directe, là encore il ne prendra aucun risque. Et il profite de l’occasion le club a refusé de s’engager en EuroCup, bien que Basket pour lancer une diatribe contre les instances nationales et Landes et Hainaut aux ressources comparables n’aient pas internationales. « Personne ne sait où en sera l’économie mondiale au printemps et les gens qui croient être assis sur un refusé l’obstacle. Le coach, qui a gagné deux « Ronchetti » – l’actuel EuroCup qui trésor avec leurs subventions pourraient avoir de mauvaises porta le nom de cette joueuse prénommée Liliana, et dont Aldo surprises. Les sponsors sont aussi dans l’expectative. Corno… a habité la maison à Côme – insiste sur le fait que Le gros problème c’est que les fédérations nationales et sportivement la compétition est dévaluée puisque l’EuroLeague internationales sont sur a été gonflée de 24 équipes et que de grandes nations (une seule leur nuage. Quand je équipe espagnole, aucune italienne) la snobent complètement. vais à l’Open, toutes les « Le président m’a appelé en me disant qu’il n’avait pas d’argent délégations sont reçues pour faire la coupe d’Europe et à partir de là, la conversation est dans un 4 étoiles. C’est coûteux et c’est pris sur terminée », sourit Aldo Corno. Pierre Meunier rappelle que son club s’y est engagé deux l’argent des licences. fois (en 2008 et 2009) mais qu’il y a laissé des plumes et qu’il Ma femme et moi, on a failli même être complètement rôti. « On est allé au fin fond descend à l’Ibis et on de la Russie, en Israël, cela nécessite plus de 7-8 joueuses paye de notre poche. et au bout du compte on a eu un trou de 150.000 euros. C’est pareil pour les Si je n’avais pas eu les collectivités, certains sponsors, ça coupes d’Europe. Cette année ils ont institué une caution de 20.000 euros qui va servir à payer les pénalités. Montpellier m’aurait coûté le club. » Le choix de Challes de concentrer sa masse salariale sur s’est déjà pris 6.000 euros d’amende car le commissaire sept pros et de ne pas aller batailler sur le front européen a trouvé qu’il faisait trop chaud dans la salle. Tout est à a été mal pris par une partie de la concurrence qui estime l’avenant. On a affaire à une oligarchie qui rackette. Il est que les Savoyardes avec un match par semaine sont moins grand temps que ces gens-là sachent ce que c’est de gérer exposées à la fatigue. « Je connais ce discours », répond une équipe professionnelle. » le coach. « Premièrement, personne ne t’oblige à faire la Coïncidence : quelques heures après l’interview, on coupe avec un pistolet sur la tempe. Deuxièmement, j’ai fait apprenait que la FFBB retirait sa candidature à l’organisation 14 Euroleague avec Vicenza et Como parce que j’avais une de l’Euro 2015 masculin s’estimant victime d’un racket de la équipe pour faire les deux, comme Bourges et Montpellier. part de la FIBA Europe. l que l’on a aussi une vocation scolaire, professionnelle, et on a intégré un volet social. Il faut éduquer nos jeunes aux valeurs de fraternité, de solidarité et qu’ensuite ils les redistribuent autour d’eux. »

• Deux fois championne d’Allemagne avec Saarlouis, Romy Bär le sera-t-elle aussi en France avec Challes ? • Manon Morel possède la taille (1,92 m) mais pas encore la force physique qui doit aller avec.

« On a affaire à une oligarchie qui est assise sur un trésor et qui rackette. » Pierre Meunier


REPORTAGE • maxi-basket 73

De Benintendi à Koudashova

Un vrai hall of fame

Ce fut le premier club français à se qualifier pour un Final Four de l’Euroleague et depuis la Savoie s’est révélée être une formidable terre d’accueil.

U

n club historique ? Il suffit de consulter le listing des joueuses et coaches passés par la Savoie pour s’en convaincre. Corinne Benintendi, Frédérique Venturi, Isabelle Fijalkowski, Carole Force. Celle qui deviendra une arbitre de haut niveau, Chantal Jullien. Et la fameuse filière russe, le coach Vadim Kapranov, Olessia Barel, Olga Soukharnova, Elena Koudashova. Du très lourd. Encore plus significatif. Vadim Kapranov possède un appartement à Aix-les-Bains. Olga Soukharnova était jusqu’à cette saison la responsable de l’école de basket du club. Soukharnova ? Sans doute la basketteuse numéro 1 de la planète, hors Ouliana Semenova, dans la période 75-85. Une incroyable destinée. Juste avant l’implosion de l’URSS, elle s’est retrouvée à Mirande, en compagnie d’une Américaine, Shannon McGee. Une association iconoclaste à faire avaler sa clope au docteur Folamour. À l’époque, quand on lui avait demandé pourquoi elle avait choisi de poursuivre sa carrière en France, rongée par l’éloignement de son fils, elle nous avait répondu : « je n’arrive pas à trouver la raison qui m’a incitée à venir. » Depuis elle en a déniché mille pour rester. Elena Koudachova ? Une magnifique plante dont la carrière internationale a été tourmentée comme la géopolitique de son pays, l’URSS, la CEI, la Russie, et puis Challes, Bourges… Elle s’est mariée avec Jean-Claude Clanet, l’ancien président et s’est occupée des juniors russes avant de revenir sur Challes et de prendre en main les minimes. Sa fille Katia (1,88 m, 15 ans) est rentrée à l’INSEP. Lucie MachowiakClaude, une Polonaise qui a aidé le club à remonter la pente, est aussi toujours dans le coin et elle a eu trois gosses. Le plus célèbre des enfants de l’école de Challes Basket ? Sans aucun doute le chanteur Grégory Lemarchal révélé par la Star Academy et fauché à 24 ans par la mucoviscidose. Son père fut assistant-coach en équipe Une. « Il venait au match très discrètement, il s’installait en haut des tribunes », se souvient le président.

Remontée avec Benintendi

• L’internationale russe Elena Koudashova est revenue au club et y entraîne les jeunes.

Avant Bourges et Valenciennes-Orchies, Challes a réussi un incroyable exploit pour un patelin de 5.000 habitants. Le club s’est offert un Final Four de l’EuroLeague. C’était en 1993. Challes, avec une Frédérique Venturi fragilisée par son genou, s’était même présenté trop résigné face à un Valence fébrile. Les Savoyardes ligotèrent Ruzomberok pour se venger et enlever la 3e place. La vraie figure historique du basket challésien, c’est Corinne Benintendi. La meneuse. Et ensuite la coach. « Quand on a repris le club, mon vice-président et moi », explique Maurice Meunier, « on l’a rencontrée alors qu’elle était CTR dans le Nord. Elle est revenue à Jeunesse et Sports sur Lyon puis Chambéry. En N3, elle a même remis le short car on était mal en point. » C’est Corinne Benintendi qui a redonné à Challes son lustre d’Antan. « J’ai beaucoup apprécié son intégrité, sa volonté. Mais, et j’en ai longtemps discuté avec elle, arrivé en ligue, ça ne pouvait plus être la baguette, le coup de gueule, la punition. On a passé cinq heures à en discuter avec un préparateur mental. À la fin de la séance elle était OK mais quand il a fallu discuter des objectifs avec les joueuses autour de la table, le pas n’a pas pu être franchi et je lui ai dit qu’on ne pouvait plus continuer comme ça. » Les histoires d’amour se terminent mal, en général. l P.L.


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Pascal Allée/Hot Sports

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Aldo Corno

Il monumento nazionale

L e coach de Challes possède un palmarès aussi long que la queue aux portes du Musée du Vatican en période estivale. C’est lui-même un monument national du basket féminin italien.

Par Pascal LEGENDRE

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avent-ils les clients de ce café de Challes-les- la Tchécoslovaquie, la Bulgarie ou la Hongrie. Aujourd’hui Eaux qu’ils sont en présence d’une sommité du l’Italie est morte », déclare t-il sentencieux. « Lorsque j’ai basket féminin européen ? « Au total j’ai gagné 34 arrêté l’équipe nationale en 2004 j’ai dit à la fédération trophées », sourit-il. Et pas des breloques ramassées à la Foire qu’elle n’avait plus d’intérêt pour le basket féminin, la seule du Trône. On peut en extraire 12 titres de champion d’Italie, 2 chose qui les préoccupe ce sont les garçons. Toutes les filles Coupe Ronchetti rebaptisée depuis EuroCup, et surtout 6 titres en Italie qui font de 1,85 m à 2 m jouent au volley-ball. » de champion d’Europe pour 10 finales. Un record ? On ne sait Et il énumère les titres de la squadra azzura, championne pas trop qui coachait le TTT Daugava Riga qui mis longtemps du Monde en 2002, d’Europe en 2007 et 2009, 5e aux deux l’Europe à sa botte – 18 titres en 22 ans. « Il y avait une femme derniers Jeux Olympiques. « Aujourd’hui la France possède blonde, peut-être est-elle morte… » Plus 178 capes comme une grande école de formation et pour moi la meilleure sélectionneur national, en trois périodes. Un record en Italie. équipe en Europe », poursuit-il. « Je ne veux pas critiquer, De l’âge de 15 à 30 ans, Aldo Corno a joué à ce qui correspond mais perdre contre la Turquie, ce n’est pas possible… » Il aujourd’hui au Lottomatica Roma, oscillant entre la Serie A rit comme seuls les Italiens savent le faire en mélangeant et la Serie B. Un jour il a fait la rencontre de sa vie. C’est sérieux et ironie. « Avec Challes, nous avons perdu notre sa future femme, joueuse elle-même, qui lui a fait découvrir premier match à Villeneuve d’Ascq, ça nous a enlevés de la l’univers du basket féminin qu’il pression. Je préfère perdre un match qui n’est pas important n’avait jamais appréhendé. Il a et à côté de ça nous avons gagné contre Montpellier et coaché Sisv Viterbo, ce qui lui a Tarbes. Alors que la France, elle gagne tout, elle arrive en mis le pied à l’étrier avant d’être demi-finale et là elle joue un match de merde ! Avec tout embauché par Fiorella Vicenza le respect que j’ai pour la Turquie, la France est meilleure qui était déjà alors le maître de et elle devait aussi gagner en finale contre la Russie même toute l’Europe. Catarina Pollini avait 18 ans, Mara Fullin si la blessure d’Emmeline Ndongue a été préjudiciable. Et 19. « On avait une école de formation fantastique. C’est Bourges a le même problème actuellement. Ndongue c’est la base pour le futur, tu ne peux pas gagner sans ça. J’ai le cœur de l’équipe ! » gagné 2 championnats d’Europe avec seulement une étrangère et neuf Italiennes. À cette époque, la formation L’exploit contre Riga en Italie était meilleure qu’en France. À un championnat Le verbe « gagner » Aldo Corno l’a conjugué à tous les temps d’Europe, on arrivait 4-5e, derrière l’URSS, la Yougoslavie, et surtout au plus-que-parfait. « On est resté deux saisons

« Au total j’ai gagné 34 trophées «


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invaincus », déclare-t-il. On a vérifié pour ce qui est du championnat italien sur les saisons 1984-86 : 40 victoires en autant de matches. En Europe ? Pas de relevé précis, mais deux titres au compteur avec une victoire en finale en 85 sur l’indéracinable TTT Riga de la gigantesque Ouliana Semenova, 63-55. Un exploit dont on reparlera dans dix générations. « Semenova était annoncée à 2,11 m mais pour moi elle faisait 2,20 m. La forward était à 2,02 m. Il y avait deux joueuses à 1,90 m et une meneuse à 1,80 m… » Et puis un jour le sponsor principal de Vicenza a décidé de fermer le robinet. « Et comme le sponsoring représentait 80% du budget de l’équipe, c’était terminé. » Le plus incroyable, c’est qu’Aldo Corno a continué à faucher les lauriers avec une moissonneuse batteuse lorsqu’il est passé à Côme avec Fullin, Pollini, Passaro : 2 titres de champion d’Europe, 8 d’Italie, 5 Coupes d’Italie, 4 Supercoupes et même un Mondial des clubs. Alexandre le Grand n’a pas fait mieux.

En cours avec ses joueuses

Mais qu’est-il donc venu faire en Savoie, lui qui a fêté ses 61 ans en décembre ? « Je connaissais la ville, je suis venu deux fois ici. J’aime la montagne, et c’est près de chez moi. Je suis né à Rome mais ma famille est sur Turin. J’ai

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fait toutes les équipes en Italie, Taranto, Schio (et aussi quelques mois en Suisse). J’en avais terminé avec l’équipe d’Italie. J’ai eu 3-4 propositions de clubs russes, le club de Cracovie n’a pas cessé de m’appeler, on m’a aussi proposé d’être le sélectionneur de l’Espagne, mais j’ai un petit-fils et ce n’est pas à mon âge que je vais refaire ma vie. J’ai préféré ce travail. Ici le président a la super mentalité de dire que l’équipe professionnelle est très importante mais que le centre de formation est encore plus important. Et tous les présidents qui ont gagné au plus haut niveau avait cette mentalité-là », précise t-il. « Nous avons décidé de passer de 8 à 7 joueuses pros car derrière nous avons une bonne équipe espoirs. » Et de faire remarquer que Sara Chevaugeon (18 ans) a payé son écot contre Tarbes (13 min). « Manon Morel, la grande (1,92 m) a des problèmes physiques. C’est une forward qui pèse 64-65kg, Mistie c’est 90kg. Elle ne peut pas jouer ! » « Quand vous discutez avec les autres, ils vous disent qu’Aldo est Italien, qu’il fait ça en dilettante », relate le président Meunier. « En fait son raisonnement c’est de dire à la joueuse, « tu es pro, on passe un contrat ensemble, ce n’est pas moi qui vais t’apprendre à faire un double pas, récite ta partition ». Moi je suis architecte et je ne vais pas embaucher quelqu’un pour lui montrer à dessiner des plans. Aldo s’inscrit dans cette démarche. » Le coach multimédaillé s’est mis humblement à l’apprentissage du français. L’an dernier un prof venait dispenser des cours de deux heures deux fois par semaine. Aldo Corno a appris des recettes de cuisine avec ses joueuses étrangères et son président se demande si tout ceci n’a pas facilité l’alchimie du groupe. « L’entraîneur qui a l’autorité que l’on connaît sur le terrain s’est retrouvé à apprendre le français avec les deux Américaines, une Israélo-Américaine et une Allemande. Ils étaient sur un pied d’égalité. C’est cette entente qui a fait la différence, que les filles acceptent de jouer les unes pour les autres et pas seulement pour leurs stats. » l

BB

« Ce n’est pas à mon âge que je vais refaire ma vie. »


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CONTRÔLE SURPRISE !

JIM BILBA Par Claire PORCHER

le 100 % de bonnes ance… Ça sentait ch de u pe un , cé . Mais je pensais Bien commen honorable. « Ça va 10 6/ un t, en lem îneur adjoint de réponses. Fina », conclut l’entra it fa en ns tio es à d’autres qu Cholet basket.

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de bronze cet été à t remporté la médaille on 0 U2 les et t ber ipe Rudy Go 1. Contre quelle équ l’Euro espagnol ? ❏ Allemagne ❏ Italie mais en ❏ Russie ats des équipes jeunes e. Je regarde les résult idé ne cu au là, rs Alo Au hasard. « gros… » tches de 1998-1999 ? de la saison à 50 ma s lor nne pio am ch A a été 2. Quelle équipe NB ❏ New York Knicks tonio Spurs An n Sa ❏ écial. » s ❏ Indiana Pacer là, c’était un peu sp pelle de cette annéerap me Je « s) ion (Avant les proposit équipe de France ? re total de points en mb no ton est el Qu 3. ❏ 1356 ❏ 1198 ne sais pas, ❏ 1032 170 sélections. « Je x au al ion nat ter er les l’in ur ance po de gagner que de regard Encore un coup de ch ion. J’essayais plus pat cu oc pré re miè ce n’était pas ma pre médailles ! » préféré gagner plus de statistiques ! J’aurais 2002 en Pro A ? eur de la saison 2001rqu ma ur ille me ni fi is joueurs a 4. Lequel de ces tro ❏ Tony Dorsey it ❏ Roger Esteller lian Ju ivante, Jim Bilba revena ril Cy ❏ moyenne. La saison su de s int po 20 c ave der Tony Dorsey a fini lea u’en 2007). jouer à Cholet (jusq p ? en Eurocup/ULEB Cu remporté deux titres pas n’a s ipe équ 5. Laquelle de ces ❏ Valencia ❏ Real Madrid une seule fois, en ❏ Lietuvos rytas 05 et 2009. Le Real 20 en as ryt vos tu Lie Le 2010. Valencia en 2003 et en B 2010 ? . 07 20 du All Star Game LN le concours de dunks né gag a rs eu jou is tro 6. Lesquels de ces ❏ Marquez Haynes Zack Wright ❏ lie ❏ Kim Til me suis mélangé… » st Zack Wright ? Je « L’année dernière, c’e chael Jordan ? e de naissance de Mi 7. Quelle est l’anné ❏ 1963 ❏ 1962 2010-2011 ? ❏ 1961 passage en Euroleague s Batum pendant son ola Nic de ne yen mo on 8. Quelle est l’évaluati ❏ 21,5 ❏ 15,9 passes ❏ 23,1 ints, 6,7 rebonds, 5,2 ilé en moyenne 15,8 po ,4). mp (29 co ko a s ilen ola Kir i Nic dre es, An En six match évaluation derrière me xiè deu La . ion ept décisives et 1,7 interc de Sydney en 2000 ? rebondeur des Jeux ur ille me é min ter a eurs 9. Lequel de ces jou ❏ Yao Ming ❏ Kevin Garnett Kevin je dirais Garnett. » ❏ Sean Marks ces questions ! Allez, de sez po s vou à, làl (Il soupire) « Ho rebonds de moyenne. Garnett a compilé 9,1 re journée de d’elle lors de la premiè de Montpellier, a dit » ? lle ach fi co en le ba ry, Bil mo Jim De 10. Valéry me suis dit c’est je , vue i l’a je and championnat : « Qu ❏ Kristen Mann Mistie Mims ❏ inin », avoue Jim. rba Sk any ❏ Steph du tout le basket fém pas is nna co et 4 je , ard nn au has c 17 points, 14 rebonds « Je dirais Kristen Ma é MVP du match ave min ter it ava rba Sk La Canadienne Stephany d’évaluation. interceptions pour 32

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LE LIVRE D’OR 2011 Immanquable, la version 2011 du traditionnel Livre d’Or du Basket, édité par Les Èditions Solar. Sur 120 pages BIEN DOCUMENtées, les auteurs revisitent la saison 2010-11, ponctuée par l’incroyable épopée des Bleus à l’EuroBasket. De la chevauchée des Mavericks et de Nowitzki au sacre de Nancy, des coups de gueule aux coups de sang, des salaires aux révélations, le Livre d’Or raconte les petites et les grandes histoires d’une saison exceptionelle.

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LE LIVRE D’OR 2011


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MAXI-BASKET

FONDAMENTAUX

LE POST UP DISSÉQUÉ

COMMENT ÇA MARCHE ? Par Thomas BERJOAN

Nathaniel S. Butl

er/NBAE via Gett

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LE POST UP ? TOUT LE MONDE EN PARLE. JEU EN ISOLATION, JEU DOS AU PANIER, NÉCESSITÉ DE FIXATION, TECHNIQUE INDIVIDUELLE, IL SEMBLERAIT QUE CETTE FORME DE JEU SOIT INDISPENSABLE DANS L ATTAQUE MODERNE. MAIS QUI L UTILISE ? COMMENT ÇA MARCHE ? ET CONCRÈTEMENT, C EST QUOI ? Par Thomas BERJOAN

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Le sky hook de Kareem.

Mike Powell/G etty

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’est passé un peu inaperçu en juin dernier up » désigne précisément le moment où l’attaquant au milieu des flots de haine, d’acrimonie et cloue son défenseur dans son dos, en demandant la d’émotion qui ont submergé la finale NBA. balle (photo 1). Michael Jordan était un maître dans l’art. Mais les commentaires les plus intéressants Regardez ses pieds sur la photo, il se bat pour obtenir le concernant LeBron James se sont résumés à ceci : James ballon dans la raquette. Le post up désigne donc à la fois doit se doter d’un jeu de post up. Evidemment, il y a eu une un endroit sur le terrain : c’est l’action de demander la faillite mentale du Roi autoproclamé de la NBA. Mais il y a balle près du cercle, bien souvent à l’entrée de la raquette surtout eu une faillite technique. Le dispositif défensif des poste bas. Et c’est également le fait de demander la balle Mavs, pondu par l’assistant Dwane Casey, devenu depuis dos au cercle. Quand deux mastodontes comme Shaq ou head coach des Raptors, avait pour objectif de tuer le jeu Duncan se battent pour la position à cet endroit-là (2), ça face au panier de James. Ça a fonctionné. Logiquement, donne en général un ballet violent de pachydermes. les extérieurs jouent face au panier. Mais contre Kobe Bryant ou Michael Jordan, ou même Larry Bird, Magic Au départ, les intérieurs Johnson – bref les plus grands – un tel procédé aurait été Historiquement, le post up appartient aux intérieurs. Dans inutile. Parce que ces joueurs-là maîtrisent le jeu de post les espaces de jeu classiques de l’attaque au basket, ce up. Tout comme Dirk Nowitzki, qui a finalement gagné sont les pivots et les ailiers forts qui jouent au poste bas. le titre NBA 2011. Et s’il s’agissait de l’arme absolue du La technique de jeu dos au panier est venue avec eux. basketteur ? Il s’agissait avant tout d’un raisonnement de bon sens : Mais reprenons depuis le début. Le post up, c’est quoi ? protéger la balle avec son corps et s’approcher du panier Un peu d’étymologie ne fait jamais de mal. « To post up » le plus possible. Du mouvement tout en puissance – en anglais veut dire selon les expressions, afficher, clouer enfonçage avec le postérieur à la Barkley (3) en fin de au mur. Mais le « post » renvoie surtout à la position de carrière ou à la Shaq O’Neal version triplé des Lakers – pivot, le poste bas. Et jouer le post up, ou « poster » ou au contraire tout en finesse : le fameux sky hook, le comme ça se dit aujourd’hui sur les terrains français, tir en crochet de Kareem Abdul-Jabbar (4). Et puis, avec c’est donc jouer la position poste bas. Mais l’expression l’évolution moderne du jeu, de la même façon que tous les littérale anglaise est intéressante - parce que « to post- postes de jeu se sont mis à jouer face au panier et à tirer

Jordan face à Shandon Anderson.

BAE via Getty Ima

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Charles Barkley face à Bill Lambee

Nathaniel S. Butl er/N

BAE via Getty Ima

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Shaq devant Tim Duncan.

Nathaniel S. Butl er/N

Andrew D. Ber

nstein/NBAE via

Getty Images

Michael Jordan se bat face à Brian Shaw.


es Barkley Bill Lambeer.

MAXI-BASKET

NBAE via Getty Rocky Widner/

h/NBAE via Gett Layne Murdoc

« naturellement » doué pour ça. de loin, le post up s’est également « démocratisé ». Désormais, l’intérêt d’une attaque collective, c’est de profiter au poste bas d’un avantage de taille, de poids Un rouage essentiel pour le collectif ou de puissance d’un de ses joueurs, peu importe la Techniquement, la fixation de la défense qu’offre le jeu position. Magic Johnson le faisait très bien, emmenant au post up, pratiqué par un intérieur ou un extérieur, les petits meneurs d’en face à 2-3 mètres du cercle avant peu importe, est essentielle. Elle offre de la profondeur de déclencher sur eux le sky hook appris avec Jabbar. à l’attaque, elle mobilise l’attention de la défense sur Jordan en avançant dans sa carrière a développé au une zone très sensible du parquet, près du cercle. C’est poste bas son meilleur mouvement : le fade away jumper, souvent à cet endroit précis que viennent les prises à deux le tir en suspension à reculons. Une fois que Jordan avait pour ralentir les attaquants dévastateurs dos au panier. cloué son défenseur, il feintait puis finissait par prendre En mettant le ballon sur un joueur qui a pris la position – un tir en déséquilibre, totalement incontrable en raison de une passe apparemment anodine mais qui est difficile ses qualités athlétiques. L’attaque des Bulls était d’ailleurs à maitriser – l’attaque se donne une forme d’alternance dessinée pour servir Jordan en post up à la pointe du intéressante. C’est en fixant qu’on peut ressortir ou delta (5). Phil Jackson a ensuite dupliqué le modèle avec renverser des ballons intéressants pour les shoots Kobe Bryant aux Lakers (6). extérieurs ou les pénétrations des extérieurs, au milieu Du fait de leur gabarit, les meneurs de jeu sont les d’une défense hors de position. De plus, le post up étant moins à même de poster. Et encore ! Mark Jackson, une forme de jeu de un-contre-un, c’est une arme aussi l’ancien meneur des Knicks en avait fait une efficace sur défense individuelle que sur zone. spécialité. Dans le basket français, Ricardo Greer Avec des joueurs comme Dirk Nowitzki, le post up a pris ou Mickael Gelabale sont les deux exemples récents une autre dimension car l’Allemand joue dos au panier, d’extérieurs très forts dans ce domaine, même si les mais à 5 ou 6 mètres du cercle. Principalement pour défenses FIBA, avec un intérieur en permanence placer un shoot à reculons. Le concept est le même que dans la raquette, rendent la chose plus difficile Jordan ou Kobe, avec une exécution et des qualités qu’en NBA. L’idéal étant de les associer avec un différentes (plus de taille et d’envergure, moins de qualités poste 4 très extérieur, capable d’étirer les défenses athlétiques, adresse plus lointaine). C’est aujourd’hui et de faire sortir l’aide défensive de la raquette. Mais exactement ce qui manque à LeBron James pour devenir pour profiter de la position, le physique ou la taille le meilleur joueur de la planète. Parce qu’il est très difficile ne font pas tout. Le jeu dos au panier nécessite de de défendre sur un joueur qui joue dans cette position. maîtriser des fondamentaux de feintes, d’appuis, Et si le joueur en question a développé un mouvement de contrôle de son corps, de lecture de jeu et de automatique en post up, il peut alors le placer, s’il en a certains tirs spécifiques qui ne viennent qu’avec le les moyens physiques, contre n’importe qui ou n’importe travail. Il n’a jamais existé de fort joueur de post up quelle défense. ●

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La nouvelle arme absolue en NBA : le tir de Dirk.

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Kobe Bryant a piqué son fade away à Jordan.

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DAN S L’UŒTIL S DES SCO

LEMEILLEURENNEMI D’EVANFOURNIER En Italie, le leader de la génération 1992 se nomme Alessandro Gentile. En bien des points, le prodige italien qui vient de rejoindre Milan ressemble à Evan Fournier. Et si l’on assistait à la genèse d’une rivalité européenne ? Par Yann CASSEVILLE

FIBA Europe

P

Repères • Italien

Né le 12 novembre 1992 à Madalloni (Italie)

• Italien • Taille : 1,97 m • Poste : Ailier • Club : Benneton Trévise (200911), Olimpia Milano (2011-…)

• Stats en Lega (9 matches) :

12,9 pts à 45,3% (33,3% à 3-pts), 3,9 rbds et 1,3 pd pour 11,8 d’éval en 28 min

• Stats en Eurocup (5 matches) : 15,0 pts à 45,5%

(39,1% à 3-pts), 6,6 rbds et 1,4 pd pour 15,6 d’éval en 33 min

eut-être qu’en italien, Evan Fournier se prononce Alessandro Gentile. Même âge, même taille, même poste, tous deux fers de lance de leur génération dans leur pays. « Oui, c’est un peu la même chose. On se respecte beaucoup parce qu’on est un peu les deux mêmes joueurs », confirme Evan, qui dit de son alter ego italien qu’il est « très fort. » Pourtant, leur dernière rencontre lui reste en travers de la gorge. 23 juillet 2011. Demi-finale de l’Euro U20 : l’équipe de France affronte l’Italie. Les Bleuets sont favoris mais se font surprendre, 66-77. Meilleur marqueur : Gentile, 21 points, devant Fournier, 19. « Forcément ça me fait chier d’avoir perdu contre lui. Et comment ne pas être vénère alors que tu perds zéro match en préparation et en poule ? », questionne Evan. Le lendemain de ce match, juste après la finale remportée par l’Espagne contre la bande à Gentile, le Français et l’Italien ont posé ensemble devant les photographes, étant sélectionnés dans le meilleur 5 de la compétition. Comme l’extérieur de Poitiers, Alessandro collectionne les trophées individuels de par ses qualités offensives ; moins fluide mais à la force plus brute qu’Evan, il est une machine à scorer (18,2 points à l’Euro U20 2011). Comme Fournier, Gentile est un surdoué. L’été 2010, à 17 ans, il a participé à l’Euro U20 (17,2 pts) avant d’enchaîner par l’Euro U18, sa « vraie » catégorie, où il termina top scoreur de la compétition devant Jonas Valanciunas (23,0 pts de moyenne, avec 42 pts à 8/11 derrière l’arc, 7 rbds et 7 pds face à la Russie). Marquer, il a ça dans le sang. Littéralement. Dans la famille Gentile, nous demandons le frère, Stefano (22 ans, 9,0 pts à Monferrato cette saison) et surtout le padre, Ferdinando dit « Nando », figure de la sélection nationale dans les années 90.

Le plus précoce de la Lega Alessandro débute sa carrière pro à Trévise, où il a été formé, à l’automne 2009, alors qu’il n’a que 16 ans. Lega et Eurocup, le voilà plongé directement dans le grand bain. 3,3 points en Italie en 2010, 8,9 en 2011. Lors des derniers playoffs, en quart face à Avellino, il inscrit 20 points lors du match 1, devenant le plus jeune à franchir cette barre dans l’Histoire de la Lega – soit la même performance qu’avait « presque réussie » Fournier quelques mois plus tôt en Pro A, lorsqu’il avait scoré 21 points contre Nancy à 18 ans, étant plus précoce que Parker mais moins que Mahinmi. Et cette saison, sa 3e, c’est l’explosion. Devenu titulaire à

la Benneton, Alessandro aligne les bonnes performances, squattant même le Top 10 des meilleurs marqueurs de l’Eurocup. 19 points contre le Bayern, 18 face au Cedevita Zagreb, 16 sur l’addition pour le Spartak Saint-Petersbourg : Gentile, c’est du sérieux. Balle en mains, il sait tout faire : dribbler, pénétrer, jouer dos au panier, passer, shooter. Et marquer, surtout. Une telle faculté à mettre le ballon dans le cercle engendre forcément des jalousies, voire des critiques. Il a déjà été reproché à Gentile de garder trop la balle ou d’être parfos laxiste en défense. Le caractère de celui qui ne se sépare jamais de son air renfrogné a également été stygmatisé comme trop râleur. Il faut dire qu’Alessandro ne semble pas avoir peur de l’ouvrir devant les micros, en témoigne sa critique de la formation italienne dans une interview pour Real GM : « Nous avons beaucoup de jeunes joueurs, qui n’ont pas de bons coaches. Le plus important en Italie est de gagner, pas de développer de grands joueurs. Jonas Valanciunas va jouer au Lietuvos rytas et là-bas ils veulent le voir progresser. En Italie, si tu rates un tir, tu vas retourner sur le banc. »

Le gamin qui valait 500.000 euros Milan s’était intéressé à lui cet été, l’affaire n’avait pas été conclue. Mais quand l’équipe de Sergio Scariolo a dû pallier le départ de Danilo Gallinari, retourné à Denver, c’est naturellement vers la pépite nationale qu’elle s’est tournée. 500.000 euros de dédommagements à la Benneton plus tard, Alessandro signait en décembre dernier un contrat de 4 ans à Milan. « Je serai éternellemment reconnaissant envers Trévise. J’ai grandi et évolué ici. Il est difficile de laisser des gens avec qui vous êtes devenus proches. Trévise est un endroit très spécial », commentait-il sur son compte Twitter, avant d’ajouter : « Il est temps de regarder vers l’avenir. » L’avenir s’écrit donc du côté de Milan. Alessandro a quitté le cocon. Lui qui avait pris l’habitude de gagner toujours plus de minutes va devoir ré-apprendre à évoluer dans une équipe où il n’est qu’un joueur de talent parmi tant d’autres. Quant à la NBA, il dispose d’une clause dans son contrat pour la rejoindre à l’été 2014. D’ici là, peut-être sera-t-il devenu un joueur majeur d’Euroleague voire de l’équipe nationale. Mais avant, il y a cet été, il y a un nouvel Euro U20. Qu’Alessandro Gentile se tienne prêt car Evan Fournier a un mot à lui proposer : « revanche. » l


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« Je serai éternellemment reconnaissant envers Trévise. J’ai grandi et évolué ici. »

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ALESSANDRO(OLIMPIA GENTILE MILANO)


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BUR ALEXIS RAM

27 JUIN

2009

À la

Une

Propos recueillis par Jérémy BARBIER

« LE PÈRE FOURAS EST RÉEL, IL A VRAIMENT 260 ANS ! »

Pascal AL

LEE/HOT

SPORTS

À L’ÉTÉ 2009, TONY PARKER ET SES AMIS PARTAIENT À L’ASSAUT DU FORT BOYARD ET SES MULTIPLES DANGERS. TYROLIENNE, RADEAU, MYGALES, LA PETITE TROUPE N’A PAS ÉTÉ ÉPARGNÉE. DEUX ANS APRÈS SON FACE-À FACE INOUBLIABLE AVEC LE PÈRE FOURAS, ALEXIS RAMBUR SE SOUVIENT…

de intérêts ndre les in et que fe é d r u is po s gam ir le i ses am and tu e vait réun e A Wish ». Qu ve est de pouvo es a y n o T d « k rê a c l e M v u a e « n s ’est tion l’associa s Fort Boyard, to ntres dedans, c s tellement e a e tu regard ur alors quand tu ant, c’est que tu impression arr jo s l’ faire un nt. Ce qui est m is petit que tu a ère Fouras, P éta nfa le tu ’e d d » n x k a u c u e e y ends ission q onde. Tu « ch m e t’y att Tu é l’ n é tu rd m d n a le rega u e. t q é u e journ lle part aître to de conn ut surgit de nu C’est une gross y a d’abord rto , il te. Passe-Pa un peu surréalis aris et sur place x candidats t eP au nt pas, c’es eures du matin d ils apprennent s diffuse h ù o ix s s n té à io ri u rp . Il de ne pas c o é pars c s s e s d e et d afin efing un debri r des mygales erses situations savoir quoi iv d ule ns a s ip s n le a e c c m e à partir de DVD av on dans une piè n u t n s e re et à c u n e u h égalem e 4 es à 1 m d tu pens ver com le Fort à se retrou , tu arrives sur e coupures. Quan ge mais en d rès nta faire. Ap il n’y a plus trop l y a plus de mo ve. nt, u’i ture en li e q n e m is v o a ro m l’ c e re c tu iv r, v o e c d é du d sion l’envers raiment l’impres donc bougent sv a tu , it ucs qui tr fa ns le a s d e d s e e s ême fair et d’autres cho reuve où m d n a u y, ép lait q enne avec Ton éà Tony vou droit à la tyroli e radeau ’ai aussi particip n d le e u v e u a re p J é on te . u e é n u to u o ll h i fait g-ba nt éc genre. J’a lamentableme mmer un punchin été ridicule, s o n e g nous avo e où je devais dé lors j’ai peut-êtr le record de A uv ns une épre un tapis roulant. iser que je détie ouras et là, F réc sur courant x quand même p été devant le Père ras est trop u u i s e o s v F u je a re , j’ai mais , le Pè uve ! Bon pression cette épre échoué. Trop de re j’ai enco

impressionnant, tu n’é coutes même pas les indices. Le Père Fouras est réel, il a vra iment 260 ans ! La journée est très ph ysique et tu finis usé quand tu arrives dans la salle des tré sors. Il n’était pas loin de minuit, il pleuvait, on était cre vé. Mais vraiment, il n’y a pas de triche, aucun indice d’offert et d’ailleurs, nous avo ns sacrifié deux personnes avant d’e ntrer dans la salle. À ce moment, il vaut mieux trouver le mot car sinon, tu pa sses pour le roi des bouffons. Il y a eu un vrai caractère dra matique à cette journée. On part sur les chapeaux de rou e et ensuite, on est lamentable. On échoue chacun à no tre tour dans les épreuves, on a des prisonniers et on arr ive à la fin sur les rotules. Pourtant, on trouve le bon mot et on s’en sort très bien. On m’a beaucou p parlé de cette émiss ion par la suite et quand je suis arr ivé à Saint-Quentin, tout le monde me connaissait à cause de Fort Boyard. Tu as for cément le droit à des petites vannes et, apparemment, l’éche c devant le Père Fouras est resté dans les mémoires… »

L’Alsacien

Alexis Rambur est un ami d’enfance de Tony Parker, ils étaient ensemble à Mont-Saint-Aignan. Meneur de jeu de haute taille (1,93 m), il a porté les couleurs du SPO Rouen, de la JA Vichy et c’est sa troisième saison à Saint-Quentin BB en Nationale 1.


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