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VERS UN RENOUVEAU EN MATIÈRE DE BIOFILTRATIONAU QUÉBEC

Marc-André Labelle Ing., Ph. D. Représentant technique

Brault Maxtech inc. marc-andre.labelle@braultmaxtech.com

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ne majorité de municipalités du Québec se sont dotées de stations de récupération des ressources de l’eau (StaRRE, autrefois appelées « stations ou usines d’épuration ») pour traiter leurs eaux usées d’origine domestique avec l’aide des programmes d’assainissement des eaux offerts dans les années 1980 et 1990. Seule une poignée des centaines d’ouvrages alors construits utilisent la technologie de biofiltration pour le traitement secondaire des eaux usées : huit installations municipales de biofiltration sont toujours actives. Les biofiltres (Biological Aerated Filters ou Biologically Active Filters – BAF) sont des procédés très compacts qui combinent le traitement biologique par biofilm et la capture des solides en suspension dans un même bioréacteur, éliminant ainsi le besoin d’ouvrages de séparation de solides distincts en aval du procédé biologique.

La première génération de biofiltres construits au Québec employait des médias filtrants d’origine minérale, par exemple à base de terre cuite, de schiste expansé ou encore d’argile expansée. Ces médias rugueux, poreux et plus denses que l’eau offrent une superficie élevée pour la croissance du biofilm et permettent un dépôt par gravité du lit filtrant sur le faux plancher.

L’écoulement de l’eau à traiter dans le lit filtrant est ascendant ou descendant, selon la technologie utilisée et les brevets attenants. Le filtre se compose essentiellement d’un média qui, pour être adapté à la biofiltration, doit permettre la croissance et la rétention du biofilm sur une grande surface spécifique, agir comme matériel filtrant robuste et assurer une bonne aération du lit. Il doit aussi permettre un comportement hydraulique adapté à la fois pendant l’étape de biofiltration et pendant celle de lavage à contre-courant.

Les lavages sont déclenchés quand la perte de charge atteint un certain niveau dans le lit filtrant ou après une durée déterminée, qui est typiquement de l’ordre de douze à vingt-quatre heures. Le rétrolavage permet non seulement de purger les solides accumulés par filtration, mais aussi de contrôler la quantité de biofilm dans le procédé.

Bien que l’avènement de plastiques résistants et légers ait permis des avancées importantes pour les lits bactériens et les disques biologiques dès les années 1970, ce n’est qu’à partir de la fin des années 1980 que de nouveaux médias faits de matériaux synthétiques sont mis au point pour les biofiltres. Par exemple, des médias filtrants comme le polystyrène puis, plus récemment, le polypropylène expansé très durable sont maintenant couramment utilisés. Les médias synthétiques, beaucoup plus légers, moins sujets à l’abrasion et offrant des surfaces d’attache au biofilm élevées en raison de leur petite taille, s’avèrent très adaptés aux biofiltres à écoulement ascendant. Avec eux, les faux planchers sont alors remplacés par de faux plafonds ! C’est aujourd’hui essentiellement ce type de biofiltre qui est employé dans les nouvelles installations et dans les modernisations. La capacité des premières installations de biofiltration au Québec variait de quelques centaines de mètres cubes par jour (à Orford) à plusieurs centaines de milliers de mètres cubes par jour (à Québec). Des installations de toutes les tailles sont aussi exploitées ailleurs dans le monde. Toutefois, les biofiltres sont particulièrement populaires dans les milieux urbains, où les coûts fonciers sont plus élevés. Leur compacité compense alors des coûts d’investissement plus élevés que pour les technologies moins intensives. Ces coûts sont en partie dus à leur conception modulaire en plusieurs cellules et au besoin d’avoir des structures plus complexes, telles que les faux plafonds.

La conception modulaire des biofiltres présente plusieurs avantages. En premier lieu, le fait d’avoir plusieurs cellules permet d’utiliser les volumes d’eau filtrée disponibles au-dessus des cellules adjacentes pour effectuer les lavages à contre-courant plutôt que d’avoir recours à une réserve d’eau filtrée dédiée et à des pompes. La conception modulaire permet aussi d’optimiser le traitement en variant les conditions d’exploitation de certaines cellules, par exemple afin d’optimiser la nitrification en période froide ou pour absorber les forts débits en période de pluie ou de fonte. Cette flexibilité du système modulaire peut justifier en partie des coûts de conception plus élevés. La conception en plusieurs cellules permet enfin d’assurer la capacité hydraulique lorsque des cellules sont en rétrolavage pour des installations plus modestes (contenant seulement quelques cellules) et de réduire la possibilité de court-circuitage et de chemins préférentiels dans des bassins de trop grande taille.

En plus de l’enlèvement de la matière organique (DBO), les biofiltres peuvent être conçus en deux étages pour permettre la réduction de l’azote total par nitrification et prédénitrification. Les cellules utilisées en dénitrification sont alors positionnées en amont des cellules de nitrification, et les nitrates y sont acheminés par une recirculation interne, comme c’est le cas pour la prédénitrification dans les procédés par boues activées conventionnels.

Certains biofiltres peuvent également remplacer des décanteurs primaires afin de fournir une flexibilité supplémentaire, et ce, sans ajout de produits chimiques.

Peu de nouvelles StaRRE ont été construites au cours des dernières années. Plusieurs mises à niveau et mises aux normes des StaRRE existantes sont toutefois entamées ou prévues au cours des prochaines années, notamment dans la majorité de nos plus grandes installations, dont celles de Laval, Longueuil, Montréal et Québec. Un biofiltre nécessite beaucoup moins d’empreinte au sol qu’un procédé par boues activées conventionnel avec ses décanteurs secondaires, et même moins d’espace que d’autres procédés à biofilm déjà reconnus comme compacts, comme les réacteurs biologiques à garnissage en suspension (RGBS). La technologie de biofiltration sera sans aucun doute une candidate sérieuse parmi les technologies envisagées dans ces contextes urbains, où l’espace disponible est parfois très limité ! n

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