Droit-Montréal No 30 – Printemps 2024 : La marche inexorable de l’intelligence artificielle

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Grand dossier de 35 pages

Aussi
La marche inexorable de l’intelligence artificielle De nouvelles perspectives à explorer

Dossier spécial

La Faculté de droit de l’UdeM

Incubateur de changement social

P. 70

Clinique juridique

Don important de la Fondation Rossy

P. 20

Trajectoire inspirante Christian Khoury (LL. B. 2009)

P. 89

Printemps 2024 No 30
Droit Montréal
DM

DM

Droit Montréal No 30

Rédactrice en chef

Aminata Bal

Rédaction et coordination

Alexandre Caron et Éric Monette

Révision linguistique

Monique Paquin, Louise Richer

Design graphique

Éric Monette

Collaboration

Andrée Bélanger, Jessica Céré et Lise Cummings

Photographies

Archives, collections personnelles

Poste-Publications

Convention no 40069245

© Faculté de droit, Université de Montréal

C. P. 6128, succ. Centre-ville

Montréal (Québec) H3C 3J7

Télécopieur : 514 343-2030 redaction@droit.umontreal.ca

ISSN 1715-6092 Droit Montréal (imprimé)

ISSN 1715-6106 Droit Montréal (en ligne)

Dépôt légal Bibliothèque nationale du Québec

Tirage : 16 800

Changement d’adresse

Trois façons de procéder

1. Par courriel : changement-coord@droit.umontreal.ca

2. Par la poste :

Université de Montréal

Pavillon Maximilien-Caron Faculté de droit

C. P. 6128, succ. Centre-ville Bureau A-9430

Montréal (Québec) H3C 3J7

3. En visitant notre site Web : diplomes.umontreal.ca

Donnez-nous de vos nouvelles 514 343-6124 info-droit@umontreal.ca droit.umontreal.ca

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Printemps 2024

Sommaire

4 Le mot de la doyenne

5 Vie facultaire

15 Les écoles d’été

16 Coopération internationale Troquer la toge pour un casque bleu Louis-Philippe Caron Vivre la doctrine Gérin-Lajoie au quotidien Genia Cishahayo Interdisciplinarité et interculturalité William Bayiha

19 Du côté du notariat

Thuy Nam Tran Tran

20 Clin d’œil sur la Clinique juridique

Josée Aspinall

55 Développement professionnel

« Ce n’est pas ce que tu connais, mais qui tu connais qui compte »

Caroline Haney

Le bonheur passe-t-il par la bonne gestion du temps ?

Jessica Céré

62 Centres de recherches de la Faculté

Centre de recherche en droit public Un nouveau CRDP

CDACI

Centre de droit des affaires et du commerce international Laboratoire de cyberjustice Les retombées internationales d’un laboratoire montréalais

IMAJ… etc Innovations et mutations des activités de justice

66 Études supérieures

67 Communauté étudiante Comité femmes et droit Tisser des liens, briser des barrières

Comité droit autochtone Enjeux autochtones : pour leur reconnaissance au sein de la Faculté de droit

Comité droit et technologie Pour une utilisation écoresponsable de l’intelligence artificielle

80 Éditions Thémis

81 Publications professorales

84 Dons et philanthropie

Chantale Mercier

86 Nos diplômées et diplômés

89 Trajectoires inspirantes Christian Khoury (LL. B. 2009) Naviguer dans les mondes juridiques avec intégrité et engagement

Andréa Khouri

90 Au-delà du droit

Écouter sa voix intérieure Quel chemin prendre ?

Sophie Hébert

DOSSIER SPÉCIAL

30e numéro

Droit Montréal

70 Page d’histoire

La Faculté de droit de l’UdeM Incubateur de changement social Jean Hétu

72 L’honorable juge Alice Desjardins (LL. L. 1957) Briser les plafonds de verre

Annick Provencher

74 Le parcours de Harry Pierre-Étienne (LL. B. 1983) Quand tout est possible ! Jonathan Pierre-Étienne

76 André d’Orsonnens (LL. B. 1983), à l’origine d’une bouillante communauté d’innovation

Un avocat à la défense du français

André d’Orsonnens

78 L’ascension de Julien BriseBois (LL.B. 1999) vers les hautes sphères du sport Marquer des points

Comité droit et sports

La marche inexorable de l’intelligence artificielle De nouvelles perspectives à explorer

23 La marche inexorable de l’intelligence artificielle Entre promesses et préoccupations

Aminata Bal

24 La gouvernance de l’intelligence artificielle Entre possibilité, risques et urgence

Benjamin Prud’homme

26 L’humain et l’IA

Pierre Noreau

29 Santé

Pour que l’IA soit bénéfique

Catherine Régis

30 L’IA pour le notariat

Un atout si on l’utilise intelligemment

Nicolas Handfield

31 Les grands modèles de langage (LLM) et leur place dans le droit du travail Intégration inévitable Xavier Beauchamp-Tremblay et Éric Lallier

32 La régulation de l’intelligence artificielle De l’innovation technique à l’innovation juridique

Vincent Gautrais et Ledy Rivas Zannou

34 Le JusticeBot

Faire dialoguer le droit et l’intelligence artificielle

Karim Benyekhlef, Sébastien Meeùs et Nicolas Vermeys

35 Responsabilité civile relative aux systèmes d’IA

Un premier ouvrage québécois

Mariève Lacroix et Nicolas Vermeys

36 Intelligence artificielle et droit d’auteur Entre défis et potentialités

Caroline Jonnaert

37 L’intelligence artificielle et la prof de droit d’auteur Ysolde Gendreau

38 Consommation de produits et services financiers

Bénéfices et risques de l’IA

Maya Cachecho et Kim Lachapelle

40 Entre risques et potentialités Les systèmes d’IA et le travail professionnel

Patrick Garon-Sayegh

42 Plateformes numériques Zone de turbulences

Pierre Larouche

43 Intelligence artificielle et droit des contrats

Perspectives de renouveau de la réflexion juridique ?

Jérémie Torres-Ceyte

44 IA et modélisation prédictive en finance Une aide de plus en plus importante à la prise de décision

Barbara Boucher

45 L’IA instrument subversif de transformation du système de justice pénale Entre promesse d’une justice vertueuse et adhésion du public Kévin Moustapha

46 Mieux utiliser l’intelligence artificielle Faire face aux défis énergétiques de demain

François Ramsay

47 Survol de l’évolution de la gouvernance des organisations Face à l’IA, quelle solution ? Gilles de Saint-Exupéry et Véronique Guèvremont

48 Le collectif L’angle mort de la protection des données

Simon Du Perron

49 Loi 25

L’intelligence artificielle sous la loupe

Antoine Aylwin et Soleica Monnier

50 IA et information juridique Quelques leçons apprises sur le terrain

Danielle Blondin

51 L’application de l’IA dans le domaine du transport

Imran Ahmad

52 Propriété intellectuelle

Ce texte a été rédigé par un humain

David Langis

53 Droit des affaires

IA, entreprises en démarrage et PI

Louis-Pierre Gravelle et Alexandra Vas

54 IA et mobilité des données Responsabilisation et protection

Cynthia Chassigneux

55 L’IA générative : nouvelle béquille intellectuelle ?

L’importance de faire confiance au processus

Louis-Philippe Provencher

56 L’e-File estonien

Un guide pour l’innovation du système judiciaire au Canada

Marie-Jeanne Tétreault

57 IA et santé mentale

Innovation sociale et enjeux éthiques à l’ère de la thérapie numérique

Jasmine Lu

58 Nouvel outil nécessaire à l’office d’une autorité de régulation de l’intelligence artificielle ? Le risque renforcé

Issouf Ouattara

Ce numéro se penche sur l’innovation sociale de l’IA qui transforme progressivement notre quotidien, non sans susciter quelques craintes, comme le soulignent les auteurs et autrices des articles contenus dans ce numéro.

L’influence de la Faculté de droit en intelligence artificielle Toujours à

l’avant-garde

L’intelligence artificielle (IA) occupe déjà un espace non négligeable dans l’organisation du travail du secteur juridique. Il n’y a pas de doute que son intégration se manifestera de manière croissante et accélérée dans un proche avenir.

automatisation des tâches liées à la recherche documentaire en droit est déjà une pratique courante et l’intelligence augmentée nous a menés encore plus loin. Le traitement et l’analyse des textes juridiques mis en lien avec des données factuelles génèrent des réponses à caractère prédictif. C’est déjà le cas dans certaines opérations gouvernementales de haut volume, comme le traitement des demandes de visa en droit de l’immigration.

Aujourd’hui, l’IA permet de forer des masses de données qui peuvent être rassemblées dans des masses de données. Pensons à cette quantité phénoménale de renseignements pouvant être accumulés par la création d’un lac contenant tous les décrets et arrêtés ministériels adoptés par les gouvernements du Canada et d’autres pays pendant la pandémie. Le forage de cette mine et l’analyse des informations qui s’y trouveraient permettraient de comprendre de manière extraordinairement fine la portée et les limites de l’action gouvernementale durant cette période, et… sans doute aussi ses excès.

Ce numéro se penche sur l’innovation sociale de l’IA qui transforme progressivement notre quotidien, non sans susciter quelques craintes, comme le soulignent les auteurs et autrices des articles contenus dans ce numéro. L’IA s’est installée dans plusieurs domaines du droit et soulève plusieurs questions : Comment protéger les renseignements personnels, notamment dans les secteurs de la santé, des services financiers ou de l’emploi? Comment déterminer la responsabilité civile lorsque de mauvaises décisions automatisées sont prises et causent des dommages? Ou encore, qui détient la propriété intellectuelle d’une création générée par l’IA ?

L’Université de Montréal exerce un leadership mondial dans le domaine de l’IA et la Faculté de droit est fière de compter en son sein des spécialistes dans le domaine qui ont étroitement collaboré à la rédaction de la Déclaration de Montréal pour un développement responsable de l’intelligence artificielle. Depuis l’adoption de cette déclaration, nos expertes et experts juristes poursuivent un travail d’information crucial pour nos sociétés. Agissant à la fois comme chefs de file dans cette communauté scientifique et dans la société, ils jouent un rôle important dans la communication claire des enjeux posés par l’IA et exercent une influence remarquable afin de veiller à la création de systèmes juridiques protégeant les droits fondamentaux des personnes, mais aussi à la mise en place d’une gouvernance économique laissant suffisamment d’espace à l’innovation.

Bonne lecture !

4 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
Mot de la doyenne
L’

Vie facultaire

Nos professeures et professeurs

Pierre Noreau et Miriam Cohen

650 000 $ du Fonds de recherche du Québec

Le professeur titulaire Pierre Noreau et la professeure agrégée Miriam Cohen obtiennent chacun une subvention du Fonds de recherche du Québec – Société et culture. Pierre Noreau et son équipe recevront près de 240 000 $ sur quatre ans dans le cadre du projet Innovations et mutations des activités de justice : éléments d’une théorie du changement (IMAJ… etc.). Les travaux de l’équipe de recherche multidisciplinaire et interuniversitaire portent sur l’étude du changement au sein de champs d’action fortement structurés. Pierre Noreau a également été nommé membre émérite au Gala de l’Acfas. Miriam Cohen et son équipe se voient remettre 400 000 $ sur quatre ans dans le cadre du projet Aux confins de la mondialisation : la gouvernance mondiale et ses limites. L’équipe multidisciplinaire se propose de jeter un regard critique sur les lisières de la mondialisation et de la gouvernance mondiale.

Nouvelle complète en ligne

n Deux subventions du FRQSC – Soutien aux équipes de recherche pour deux professeurs de la Faculté de droit

Suzanne Lalonde, Jean Leclair, Michel Morin et Karine Millaire Subvention de plus de 6 millions $ La professeure titulaire Suzanne Lalonde et son équipe ont reçu une subvention de plus de 6 millions de dollars du Fonds d’excellence en recherche Apogée Canada pour un projet de recherche sur la navigation dans les eaux arctiques canadiennes. L’équipe de la Pre Lalonde, composée de Jean Leclair, Michel Morin et Karine Millaire, travaillera en collaboration avec le Conseil circumpolaire inuit et l’Université Memorial de Terre-Neuve, les deux institutions principales, ainsi que Jackie Dawson du Département de géographie de l’Université d’Ottawa et Aldo Chircop de la Faculté de droit de l’Université Dalhousie.

L’Initiative Qanittaq pour un transport maritime propre dans les eaux arctiques canadiennes vise à donner suite aux préoccupations liées à l’augmentation du transport maritime dans l’Arctique et à ses répercussions environnementales sur les populations du Nord.

Nouvelle complète en ligne

n Une subvention de 6 millions de dollars pour un projet de recherche Qanittaq pour repenser la navigation en eaux arctiques

Catherine Piché Nommée juge à la Cour supérieure du Québec

Catherine Piché, ancienne professeure et vice-doyenne aux affaires internationales de la Faculté, a été nommée juge puînée à la Cour supérieure du Québec dans le district de Montréal.

Témoignage de France

Houle : « Avec tout son bagage disciplinaire en droit de la preuve, de la procédure et des recours collectifs, la juge Piché apportera une contribution très importante à la Cour supérieure.

La Faculté de droit perd une collègue très appréciée, mais elle est ravie par cette nomination de haute qualité à la Cour. »

Nouvelle complète en ligne

n Catherine Piché nommée juge à la Cour supérieure du Québec

5 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Vie facultaire Nos professeures et professeurs

Hervé A. Prince Nomination

Le professeur Hervé Agbodjan Prince a été nommé directeur de l’Observatoire de la Francophonie économique (OFÉ). Spécialiste du droit international économique, M. Prince est également titulaire de la Chaire en gouvernance et droit du commerce international de l’Université de Montréal. Jusqu’au 31 décembre 2022, il était directeur du Centre de droit des affaires et du commerce international de la même université.

Dans son nouveau rôle, M. Prince aura comme mandat principal d’élaborer et de mettre en œuvre un plan stratégique afin de consolider les actions de l’OFÉ et de renforcer son positionnement au sein du réseau des acteurs et actrices de la Francophonie économique.

Nouvelle complète en ligne n Hervé A. Prince nommé directeur de l’Observatoire de la Francophonie économique de l’Université de Montréal

Karim Benyekhlef

La médiation à l’aide d’un robot

Le Laboratoire de cyberjustice est engagé dans le développement d’un robot conversationnel. Ce robot aurait pour rôle d’assister les médiateurs et les utilisateurs lors de processus de médiation. Ce projet de recherche est supervisé par le professeur titulaire Karim Benyekhlef et bénéficie de la contribution de doctorants et doctorantes en intelligence artificielle, notamment Hannes Westermann, ainsi que de professionnels et professionnelles en informatique. Pendant la période estivale, plusieurs étudiants et étudiantes en droit ont eu l’occasion de mettre à l’épreuve l’utilité et la pertinence des suggestions de médiation proposées par ce robot conversationnel.

Miriam Cohen

Un ouvrage à l’honneur

La professeure Miriam Cohen a remporté deux prestigieux prix pour son ouvrage

Realizing reparative justice for international crimes : From theory to practice, publié par Cambridge University Press en 2020. L’ouvrage a remporté le Prix du livre savant, décerné par le Conseil canadien de droit international (CCDI) dans le cadre de son concours pour le Prix d’excellence en érudition. L’ouvrage a également remporté le premier prix du Concours juridique de la Fondation du Barreau du Québec dans la catégorie « Nouvel auteur ».

La Pre Cohen a aussi été appelée à titre de témoin expert par le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international à la Chambre des communes du Parlement du Canada dans le cadre de l’étude sur le projet de loi S-223, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (trafic d’organes humains).

Nouvelles complètes en ligne

n La Pre Miriam Cohen remporte le Prix du livre savant du Conseil canadien de droit international

n Miriam Cohen invitée à comparaître à titre d’experte devant le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes du Canada

n Miriam Cohen lauréate du 1er prix du Concours juridique de la Fondation du Barreau du Québec dans la catégorie « Nouvel auteur »

Amissi Melchiade Manirabona

Prix Walter-Owen

Le professeur Amissi Melchiade Manirabona a remporté le 2e prix Walter-Owen pour son Introduction au droit des victimes d’actes criminels au Canada publiée chez LexisNexis. Le prix du livre Walter-Owen rend hommage à son homonyme (1904-1981) et vise à récompenser l’excellence dans la rédaction juridique et de nouvelles contributions exceptionnelles à la doctrine juridique canadienne. Ce prix est remis par l’Association du Barreau canadien et est accompagné d’une bourse de 15 000 $ pour la recherche juridique. Nouvelle complète en ligne n Amissi Manirabona remporte le 2e prix Walter-Owen

6 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Michel Morin Nomination de l’Académie des sciences sociales de la Société royale du Canada

Michel Morin, professeur et vice-doyen aux affaires internationales, vient d’être nommé membre de l’Académie des sciences sociales de la Société royale du Canada. Cette nomination de Michel Morin, élu par ses pairs, marque une reconnaissance de l’excellence de ses réalisations universitaires.

Les travaux de Michel Morin ont grandement contribué à renouveler notre compréhension de l’évolution du droit québécois et canadien, des débuts de la colonisation européenne jusqu’à l’adoption du Code civil du Québec de 1991, ainsi que de la transformation du statut des peuples autochtones pendant cette période. Ses publications illustrent la nécessité de l’interdisciplinarité dans le domaine des études juridiques. En outre, ces nouvelles orientations révèlent le caractère pionnier de l’œuvre de Michel Morin et l’influence directe de celle-ci sur notre conception du droit contemporain.

Violaine Lemay

Jour de célébration à l’Université du Québec en Outaouais

Le 15 septembre 2023, l’établissement procédait à l’inauguration officielle de son tout nouveau programme de formation en droit. La Professeure Lemay figurait en bonne place parmi les personnes invitées. Elle est conseillère du comité de formation du programme depuis ses débuts.

Pre Lemay aux côtés du ministre québécois de la Justice, Simon Jolin-Barrette, et de Julie Bourgeault, directrice du nouveau programme

La Faculté accueille deux nouveaux membres dans son corps professoral

Ugo Gilbert Tremblay

Titulaire d’un doctorat en droit de l’Université de Montréal, le Professeur Gilbert Tremblay se passionne pour tout ce qui touche de près ou de loin le droit pénal, avec un intérêt marqué pour les questions relatives aux fondements de l’imputabilité, au neurodroit et à la criminalisation des discours de haine. Sa thèse, consacrée à l’épineuse question de l’impact des neurosciences sur le concept de responsabilité criminelle en droit pénal canadien, lui a valu le prix Thémis de la meilleure thèse en droit ainsi que le prix de la meilleure thèse au Canada dans la catégorie rassemblant toutes les disciplines des arts, des sciences humaines et des sciences sociales.

Titulaire de nombreuses distinctions et bourses d’excellence, le Pr Gilbert Tremblay a notamment remporté le prix du meilleur manuscrit d’article juridique de la Fondation du Barreau du Québec grâce à une étude consacrée à l’incidence des neurosciences de la colère sur la défense de provocation. Avant de se joindre au corps professoral, il était chercheur postdoctoral (boursier du Fonds de recherche du Québec – Société et culture) à la Faculté de droit de l’Université McGill. Il venait aussi d’être choisi dans le cadre du concours 2022-2023 du programme de bourses postdoctorales Banting.

Myriam Dumont-Robillard

Myriam Dumont-Robillard possède une formation en études internationales et en droit de l’Université de Montréal et et elle a soutenu sa thèse avec succès en décembre dernier à l’Université McGill. Ses parcours universitaire et professionnel l’ont amenée à développer un intérêt particulier et une expertise en droit du travail et en droit de l’immigration, plus particulièrement en ce qui concerne les travailleuses et travailleurs migrants temporaires. Ayant œuvré durant plusieurs années dans le milieu communautaire auprès de ce groupe de travailleuses et travailleurs, elle s’intéresse actuellement à la justification de l’existence du statut de travailleur temporaire en droit canadien en regard de ses conséquences sur les droits fondamentaux de ces derniers. À ce titre, ses recherches abordent notamment les processus de racialisation qui s’opèrent dans la construction historique de ce groupe de travailleuses et travailleurs ainsi que la manière dont le droit actuel s’avère non seulement inefficace à leur protection, mais contribue à justifier la production – et la reproduction – d’un système d’exploitation par le travail. De manière générale, ses travaux cherchent à mettre en lumière les processus à l’œuvre dans la précarisation des travailleuses et travailleurs, tout en explorant les avenues juridiques, tant nationales que transnationales, permettant la pleine réalisation de la dignité humaine.

7 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
GRACIEUSETÉ DE GILLES TRUDEAU

Nos professeures et professeurs

Départs à la retraite

Pierre Trudel

Pierre Trudel a été professeur titulaire à la Fauclté de droit de l’Université de Montréal. Il a assuré la direction, du Centre de recherche en droit public (CRDP) de la Faculté de droit de 1990 à 1995. De 2003 à 2015, il a été le premier titulaire de la Chaire L.R. Wilson sur le droit des technologies de l’information et du commerce électronique et a enseigné en droit de l’information et en droit du cyberespace.

Brigitte Lefebvre

Docteure en droit de l’Université Panthéon-Assas (Paris II), Brigitte Lefebvre a été professeure à la Faculté de droit de l’Université de Montréal où elle a enseigné le droit privé, le droit de la famille, le droit des successions, le droit patrimonial de la famille, le droit immobilier et le droit commercial. Elle a également été titulaire de deux chaires de recherche : Chaire Jean-Louis Beaudoin en droit civil (2017-2023)ainsi que la Chaire du notariat de 2004 à 2018. De 2008 à 2012 elle a été secrétaire de la Faculté.

France Houle

Avocate émérite du Barreau du Québec

La doyenne de la Faculté de droit de l’Université de Montréal, France Houle, a obtenu la distinction honorifique Advocatus Emeritus (avocate émérite) du Barreau du Québec en reconnaissance de son apport exceptionnel à l’enseignement et à la recherche en droit.

Pour l’enseignement du droit, les membres du jury ont tout particulièrement mis en lumière le travail de la doyenne relatif à la réforme en profondeur du baccalauréat en droit, à l’accroissement du nombre et de la diversité des divisions de la Clinique juridique de la Faculté et à la création de la toute première division-conseil de la Clinique ainsi qu’à l’instauration de nouveaux programmes visant à mieux structurer les services de nature juridique offerts aux personnes immigrantes.

En recherche, le jury a souligné ses nombreux articles et ouvrages sur les transformations des systèmes règlementaires au Canada et les travaux de son partenariat de recherche portant sur l’intégration au marché du travail québécois des immigrants et immigrantes exerçant une profession règlementée.

Chaque année, le Barreau du Québec accorde cette grande distinction à environ une dizaine d’avocates et avocats parmi les 30 000 membres figurant au tableau de l’Ordre.

Deux nominations pour Catherine Régis Titulaire d’une chaire en IA

La professeure Catherine Régis a été nommée titulaire d’une chaire en IA Canada-CIFAR. En plus d’occuper cette nouvelle fonction, elle exerce également celle de superviseure scientifique pour une pièce de théâtre qui aura pour toile de fond la Déclaration de Montréal pour un développement responsable de l’intelligence artificielle. De plus, en qualité de membre d’une équipe composée de cinq chercheuses, la Pre Régis s’est vu octroyer une subvention du CRSH pour soutenir leur projet relatif à l’Initiative de recherche sur la violence fondée sur le genre.

Nouvelles complètes en ligne n Catherine Régis, membre d’une équipe de 5 chercheuses, obtient une subvention importante du CRSH n Une pièce de théâtre pour réfléchir sur l’intelligence artificielle n Catherine Régis est nommée titulaire d’une chaire en IA Canada-CIFAR

Directrice de l’innovation sociale et des politiques internationales chez IVADO

La professeure Catherine Régis vient d’être nommée au nouveau poste de directrice de l’innovation sociale et des politiques internationales chez IVADO, l’Institut de recherche et de transfert en intelligence artificielle. Dans ce rôle, elle exercera un leadership essentiel pour le développement de la stratégie de mobilisation des connaissances du programme IAR3 et l’établissement de partenariats axés sur l’innovation responsable et son adoption dans différents milieux.

Vie facultaire
8 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Jean Hétu

50 ans d’enseignement du droit à la Faculté

Le professeur émérite

Jean Hétu, Ad. E., a commencé sa carrière d’enseignant à la Faculté le 1er juin 1972 après avoir obtenu une maîtrise en droit de la Harvard Law School. Au fil des ans, il a enseigné le droit social, le droit de l’environnement, le droit administratif et surtout le droit municipal. Son livre intitulé Droit municipal : principes généraux et contentieux, qu’il continue de mettre régulièrement à jour, est devenu le principal ouvrage de référence en la matière au Québec.

Le Pr Hétu a pris officiellement sa retraite à titre de professeur titulaire le 1er janvier 2018 mais il continue, comme chargé de cours, à enseigner le droit municipal aux étudiantes et étudiants inscrits au programme de maîtrise en droit notarial ainsi qu’au baccalauréat en droit.

Le 1er juin 2023, il a entrepris sa 51e année d’enseignement à la Faculté. Par ailleurs, il s’intéresse à l’histoire de la Faculté et de ses diplômés et diplômées en publiant divers articles à leur sujet, en plus d’écrire des ouvrages sur la Ville de Lavaltrie, son lieu d’origine, dont il est le président de la Société d’histoire et du patrimoine. À cet égard, il a été honoré le 19 octobre 2023 par l’organisme provincial Action patrimoine, qui lui a remis un prix spécial pour son engagement exceptionnel dans la préservation et la valorisation du patrimoine de la Ville de Lavaltrie.

Nos étudiantes et étudiants

Rayene Bouzitoun

Titulaire de la prestigieuse bourse Rhodes

Rayene Bouzitoun a remporté la bourse Rhodes, qui lui permettra de poursuivre ses études à la réputée Université d’Oxford au Royaume-Uni. Détentrice d’une licence en droit et d’un baccalauréat spécialisé en développement international et mondialisation de l’Université d’Ottawa, elle terminera, en 2023, le programme de common law à la Faculté de droit de l’Université de Montréal. Rayene Bouzitoun a œuvré au sein de nombreux projets, notamment au Conseil jeunesse du premier ministre du Canada, au programme Born on Time, à la North African Policy Initiative, au Forum Jeunesse de Saint-Michel et, plus récemment, à la Clinique juridique de Saint-Michel. Nouvelle complète en ligne n Rayene Bouzitoun, récipiendaire d’une prestigieuse bourse Rhodes

William Gabriel Rioux

Subvention de recherche de 12 000 $ du FRQ

William Gabriel Rioux obtient une subvention de recherche de 12 000 $ octroyée par les Fonds de recherche du Québec (FRQ) dans le cadre de son programme REGARDS-Objectifs de développement durable (ODD). Ce programme vise notamment à lutter contre la désinformation, à mieux faire connaître les objectifs de développement durable et à mobiliser le public quant à l’importance d’atteindre ces objectifs au Québec. William Gabriel Rioux et son équipe veulent mettre en lumière le rôle des entreprises dans la lutte contre le réchauffement climatique et illustrer l’importance de leur fournir le cadre nécessaire pour que leur participation reflète leurs ambitions. Cette vulgarisation scientifique est soutenue par plusieurs collaborateurs, dont le Collège Jean-de-Brébeuf, le Département de sciences biologiques de l’Université de Montréal ainsi que HEC Montréal.

Nouvelle complète en ligne n William Gabriel Rioux obtient une subvention de recherche de 12 000 $

Mariana Cueto Mendoza

Bourse de mérite de 100 000 $

Mariana Cueto Mendoza figure parmi les 36 lauréates et lauréats de la Fondation Boursiers Loran. La bourse de mérite de 1er cycle d’une valeur de 100 000 $ souligne ainsi son leadership et son engagement communautaire. Mariana Cueto Mendoza a choisi la Faculté de droit de l’Université de Montréal pour la qualité du programme. Selon elle, « l’apprentissage ne s’arrête pas dans la salle de cours, puisque plusieurs occasions d’enrichissement sont offertes, comme en recherche. Je suis certaine que l’Université de Montréal fera de moi une excellente juriste ».

9 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Vie facultaire Nos étudiantes

et étudiants

Concours Davies 2023

Véronique Oligny, Sarah Harroch, Élie Khoury, Lezhi Wang et Tahmina Hussainyar formaient l’équipe de la Faculté de droit lors de la dernière édition du concours de plaidoirie Davies qui portait sur le thème des valeurs mobilières. L’équipe fut supervisée par le chargé de cours Me Michael Garellek ainsi que par Meir Edery.

Nouvelle complète en ligne

n Excellente participation au concours de plaidoirie Davies

Concours Charles-Rousseau 2023

L’équipe composée de Laure Moneger, Pierre Polo-Bergeron, Vincent Frenette et Léna Barriere a fièrement représenté la Faculté de droit de l’Université de Montréal lors de la dernière édition du concours de plaidoirie CharlesRousseau, le prestigieux concours de procès simulé en droit international public général en langue française.

L’équipe de plaideuses et plaideurs a été soigneusement préparée par Miriam Cohen ainsi que par l’étudiante Solenn Maizeray. Le professeur émérite de la Faculté de droit Daniel Turp a été l’initiateur de ce concours.

Nouvelle complète en ligne n La Faculté de droit au concours de procès simulé en droit international Charles-Rousseau

Coupe Gale Moot 2023

Alexandra Roy-Côté, Sara Sellah, Léa Cerdan-Amiard, Marie Laverdure et Vicky Valiquette formaient l’équipe de la Faculté de droit de l’Université de Montréal pour la Coupe Gale Moot. L’équipe, qui a remporté le prix de la meilleure équipe francophone non qualifiée pour le tour final, était supervisée par la chargée de cours

Maude Pagé-Arpin assistée de Me Martin Latour.

Nouvelle complète en ligne

n Excellente performance de l’équipe de la Faculté de droit à la Coupe Gale Moot 2023

Association des étudiant(e)s noir(e)s en droit du Canada – AENDC Concours de négociation en droit civil 2024 Moustapha Kone et Julian Menga ont remporté la première place – prix de la meilleure équipe de négociation lors de la deuxième édition du Concours de négociation en droit civil organisé par l’AENDC et axé sur un domaine de droit dans lequel se posent des questions d’équité, de diversité et d’inclusion. Présenté cette année à l’Université d’Ottawa, 8 équipes provenant de quatre facultés de droit civil ont travaillé sur un problème sur le thème de la protection de la vie privée et de la propriété intellectuelle préparé par le bureau Blakes, Cassels & Graydon.

10 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Concours de plaidoirie

Pierre-Basile-Mignault 2023

Mariane Gagné et Guillaume Trifiro ont remporté la coupe SOQUIJ pour le 2e meilleur mémoire au concours de plaidoirie Pierre-Basile-Mignault, tenu à la Faculté. Guillaume Trifiro a de plus remporté la coupe Lavery pour le 3e meilleur plaideur.

Nouvelle complète en ligne

n La Faculté de droit hôte de la 45e édition du concours de plaidoirie Pierre-Basile-Mignault

Association des étudiantes et étudiants en droit à l’Université de Montréal Un 1er prix pour la promotion du respect et de l’inclusion 2022

L’Association des étudiantes et étudiants en droit à l’Université de Montréal (AED Montréal) s’est vu remettre le 1er prix pour la promotion du respect et de l’inclusion dans le cadre des activités d’accueil 2022. Les organisatrices et organisateurs ont relevé avec brio le défi d’offrir aux nouveaux étudiants et étudiantes en droit une rentrée des plus accueillantes et inclusives.

Nouvelle complète en ligne

n L’AED remporte le premier prix au concours 2022 des activités d’accueil

Concours Laskin 2023

Composée de Mikaël Morin, Antoine Lefebvre, Erica Picillo et Lara Bourgeois, l’équipe de la Faculté a remporté le prix de la 3e meilleure équipe au pays. Soulignons que Mikaël Morin et Erica Picillo ont accédé à la ronde finale du concours et gagné le prix de la 2e meilleure paire de plaideurs. Mikaël Morin a également gagné le prix du 2e meilleur plaideur au pays. Finalement, soulignons la performance d’Antoine Lefebvre, qui a terminé 6e meilleur plaideur au pays. L’équipe était préparée par Ingride Roy. Nouvelle complète en ligne

n L’équipe de la Faculté de droit a livré une excellente performance lors du concours de plaidoirie Laskin 2023

L’Association des étudiant·e·s noir·e·s en droit de l’Université de Montréal Conférence nationale de la BLSA 2023

L’Association des étudiant·e s noir·e s en droit de l’Université de Montréal a reçu le prix du petit chapitre de l’année afin de souligner sa contribution et son dévouement exceptionnels à la mission de BLSA Canada, qui est de favoriser l’équité, la diversité et l’inclusion au sein des universités, mais plus généralement dans les professions juridiques.

Nouvelle complète en ligne n L’Association des étudiant·e s noir·e s en droit de l’Université de Montréal récompensée lors de la conférence nationale de la BLSA

11 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Vie facultaire Nos étudiantes et étudiants

Bourses de 2e et 3e cycles d’Hydro-Québec

Hydro-Québec a remis 12 bourses d’excellence à des étudiantes et étudiants des 2e et 3e cycles de l’Université de Montréal. Danoé Tanguay et Kenza Sassi de la Faculté de droit se sont vu remettre une bourse. La recherche de Danoé Tanguay s’intitule Le droit des brevets dans un contexte de crise climatique : une relecture engagée de l’Accord sur les ADPIC. Kenza Sassi travaille sur la preuve technologique et l’intégration des normes techniques.

Nouvelle complète en ligne

n Hydro-Québec décerne 12 bourses d’excellence

Aurore Clément Troussel

Fonds Guy Rocher

L’étudiante-chercheuse Aurore Clément Troussel, dirigée par Karim Benyekhlef, a remporté la bourse doctorale du Fonds Guy Rocher pour sa recherche portant sur la régulation par les plateformes numériques. Pour les 60 ans du Centre de recherche en droit public, la Faculté de droit de l’Université de Montréal a créé le Fonds Guy Rocher en hommage à cette figure publique marquante du Québec.

Nouvelle complète en ligne n Résultats du concours de bourses du Fonds Guy Rocher

Cassandre Legault Bourse d’excellence académique Éloïse Gratton

Cassandre Legault, membre de l’équipe de ski alpin des Carabins et étudiante de 3e année au baccalauréat, est la titulaire de la bourse d’excellence académique Éloïse Gratton. Merci à Me Gratton, diplômée de notre faculté et associée et chef nationale, Respect de la vie privée et protection des renseignements personnels chez BLG, d’encourager les étudiants et étudiantesathlètes de la Faculté de droit.

Nouvelle complète en ligne n Cassandre Legault reçoit la bourse d’excellence académique Éloïse Gratton

Soutenances de thèses 2023

Mars

Frédérick Doucet

Mai

Guy Azebové Tetang

Juin

Fannie Duverger

Hannes Westermann

Marc-André Boucher

Juillet

Josette St-Amour

Septembre

Jie Zhu

Menelika Bekolo (L.L. B. 2023)

Concours de négociation en droit civil 2023

Menelika Bekolo, alors étudiante en 3e année au baccalauréat, a remporté le 3e prix de la meilleure négociatrice, ex æquo avec Franck Tétouom Ngouajio Lékage de l’Université de Sherbrooke. Cette première édition du Concours de négociation en droit civil a été organisé par l’Association des étudiant·e·s noir·e·s en droit du Canada et présenté à la Faculté de droit sur le thème de l’équité, la diversité et l’inclusion dans le cadre du droit du travail. Menelika Bekolo est la lauréate en 2022 du concours de procès simulé, pour ses représentations et sa plaidoirie devant les juges de la Cour supérieure dans le cadre du cours Techniques de procès en droit civil. Nouvelles complètes en ligne n La Faculté de droit hôte d’un concours de négociation en droit civil n Menelika Bekolo remporte le 3e prix de la meilleure négociatrice au Concours de négociation en droit civil

Octobre

Nadia Omari

Laurence Largente

Décembre

Martin Côté

Lise Brun

Nina Engels

12 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Faits saillants

INFN

Entente de collaboration

La Faculté de droit et l’Institut national des formations notariales (INFN) ont conclu une entente de collaboration visant à favoriser les échanges au niveau du corps professoral ainsi que la mobilité étudiante. La convention permettra notamment aux étudiantes et étudiants de l’INFN de suivre des cours d’études supérieures à l’Université de Montréal et à celles et ceux de l’UdeM d’étudier le droit civil et l’exercice de la profession notariale en France.

Nouvelle murale

Célébrer l’implication étudiante

La Faculté de droit est heureuse de dévoiler sa nouvelle murale portant sur l’implication étudiante. La Faculté tient à souligner le travail exceptionnel et essentiel à la vie étudiante de ses associations ainsi que de tous les comités. Située au 2e étage juste à côté de l’entrée du Café Acquis de droit, cette nouvelle œuvre peut être appréciée par l’ensemble de la communauté facultaire et universitaire. Nouvelle complète en ligne n Nouvelle murale célébrant l’implication étudiante

Richard Wagner, juge en chef de la Cour suprême du Canada

Rencontre avec la communauté étudiante

La Faculté de droit était heureuse de recevoir le juge en chef de la Cour suprême du Canada, le très honorable Richard Wagner, en novembre 2023

Le très honorable juge Wagner a participé à une discussion, avec la doyenne France Houle, sur la santé mentale et le bien-être dans le milieu juridique ainsi que sur l’accès a la justice. Les étudiantes et étudiants ont également été en mesure de lui poser des questions.

Observatoire du droit québécois des valeurs mobilières Subvention de 500 000 $ L’Observatoire du droit québécois des valeurs mobilières reçoit une subvention de 500 000 $ de l’Autorité des marchés financiers. Cette somme permettra de soutenir le groupe de chercheurs et chercheuses de l’Observatoire, formé d’étudiantes et étudiants aux études supérieures ainsi que d’une équipe professorale. Cette contribution permettra aussi la tenue de séminaires, de tables de discussion et de colloques offrant l’occasion aux intervenants et intervenantes du secteur financier d’échanger et de réfléchir sur l’évolution de l’encadrement réglementaire en valeurs mobilières.

Nouvelle complète en ligne n L’Autorité des marchés financiers octroie une subvention de 500 000 $ sur 5 ans à l’Observatoire du droit québécois des valeurs mobilières

13

In Memoriam

(1942-2023)

Pierre Ciotola

LL. L. 1966

(1931-2023)

Jacques-Yvan Morin

Professeur

Notaire de formation, Pierre Ciotola a consacré près de 40 ans de sa vie à l’enseignement du droit civil économique. Durant sa carrière à l’Université de Montréal, il a entre autres dirigé le programme de notariat et il fut le premier titulaire de la Chaire du notariat de la Faculté. Ce grand juriste a beaucoup contribué à l’avancement du notariat et son enseignement a été une source d’inspiration pour plusieurs cohortes.

Les collègues de Pierre Ciotola lui ont offert un grand hommage afin de souligner son apport exceptionnel à la recherche et l’enseignement par la publication des Mélanges Pierre Ciotola, publiés aux Éditions Thémis en 2012

Le professeur émérite Jean Hétu lui a consacré l’article « Vivat Ciotola ! » dans l’édition 2013 de la revue Droit Montréal

Lisez l’article ici : bit.ly/dm_Ciotola

Le parcours de Jacques-Yvan Morin aura été exemplaire, tant dans sa vie d’enseignant que dans celle de chercheur. Comme enseignant, il a toujours manifesté une réelle volonté de transmettre le savoir à ceux et celles qu’il dénommait affectueusement ses élèves, de leur communiquer sa passion pour le droit et d’être animé, à leur égard, d’un véritable sens du devoir. Ses dons de pédagogue ont pu être appréciés et salués par de multiples générations d’élèves. Comme chercheur, il a fait preuve de rigueur et a toujours su mesurer le poids et la justesse, des mots dans une langue française qu’il maîtrisait comme nul autre. Pour ses collègues, le Pr Morin était un modèle, un pédagogue admiré, un chercheur réputé et un universitaire loyal et dévoué à la vie de sa Faculté de droit.

(1929-2023)

Marc Lalonde

LL. L. 1954

Durant ses études à la Faculté, il fut président de l’Association des étudiants en droit ainsi que délégué des étudiants de l’Université au World University Service Seminar en Inde avant de devenir professeur adjoint de 1958 à 1961.

De 1968 à 1984, il a été secrétaire principal auprès du premier ministre Trudeau, ministre de la Santé et du Bien-être social, ministre des Relations fédérales-provinciales, ministre de la Justice, ministre de l’Énergie, des Mines et des Ressources et ministre des Finances. M. Lalonde n’a cessé de s’investir dans les activités de plusieurs organismes canadiens et internationaux.

La Faculté de droit salue ce grand diplômé qui a eu une forte influence, au Québec, au Canada et à l’international, tout au long de sa carrière.

(1945-2023) Huguette St-Louis

LL. L. 1968

Admise à la Faculté de droit en septembre 1965, l’honorable Huguette St-Louis obtient une licence en droit au mois de mai 1968. En 1988, lors de la création de la Cour du Québec, elle est la première juge de nomination provinciale à occuper un poste administratif dans une cour de justice québécoise quand elle est nommée juge en chef adjointe, Chambre civile. Elle occupe ce poste de 1988 jusqu’au 28 août 1996 alors qu’elle devient la première femme juge en chef de la Cour du Québec et présidente du Conseil de la magistrature (1996 -2003).

14 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Dakar, Sénégal (21 mai au 8 juin)

Les écoles d’été 2023

Dans le cadre de cette école d’été à la Faculté des sciences juridiques et politiques de l’Université Cheikh Anta Diop, neuf participantes ont pu se familiariser avec divers aspects du droit sénégalais et africain et visiter des lieux historiques et culturels. Elles étaient accompagnées du Pr Harith Al-Dabbagh ainsi que de l’adjointe de la doyenne, Aminata Bal, qui a retrouvé son alma mater

Rio, Brésil (16 au 21 juillet)

Aix-en-Provence, France (5 au 17 mai)

Une cohorte de 24 étudiantes et étudiants s’est envolée vers Aix-en-Provence en compagnie du Pr Jérémie Torres-Ceyte. Elle a été accueillie à la Faculté de droit et de science politique d’Aix-Marseille Université afin de suivre une formation sur le thème Droit et pratique de l’entreprise durable – Approche européenne, durant laquelle il a été question de responsabilité sociétale des entreprises, de négociation et de médiation, et de mécanismes de règlement des litiges.

18 étudiantes et étudiants se trouvaient au Brésil en compagnie de la Pre Ysolde Gendreau. Dans le cadre de cette formation sur le thème du droit des technologies, organisée par l’Institute for Technology and Society (ITS) de Rio, le groupe a assisté à des conférences, participé à des ateliers et fait des visites professionnelles, touristiques et culturelles. Réunissant des dizaines de spécialistes dans le domaine, les participantes et participants ont pu développer plusieurs contacts internationaux.

Alberta, Canada (15 juin au 2 juillet)

Sur le thème Droit autochtone et ses applications, cette école d’été a réuni 15 étudiantes et étudiants. Suivant 12 heures de cours à Montréal, le groupe, accompagné par le professeur et vice-doyen aux affaires internationales Michel Morin, s’est déplacé auprès de la Première Nation Chiniki près de Calgary. Il y a étudié l’application des normes locales, les impacts du droit canadien et les enjeux qui transcendent les limites géographiques de la nation Chiniki.

Ontario, Canada (2 au 9 juin)

Cinq doctorantes et doctorants ont pris part à l’école d’été ATLAS Agora à la Osgoode Law School de l’Université York. Lors des conférences et ateliers, les échanges leur ont permis de recevoir des commentaires constructifs pour la rédaction de leur thèse.

Guanacaste et San Pedro, Costa Rica (17 au 30 mai)

Un groupe de 17 personnes s’intéressant au droit de l’environnement a voyagé au Costa Rica en compagnie de la Pre Konstantia Koutouki. Il a assisté à des cours sur deux campus de la Universidad de Costa Rica (UCR) et a réalisé des visites de terrain, en visitant notamment la Fondation OneSea, la zone de conservation Arenal Tempisque et la Cour interaméricaine des droits de l’homme. Français, anglais et espagnol étaient au rendez-vous.

15 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
Catherine Recher Conseillère aux affaires internationales

Coopération internationale

Récit d’un avocat déployé au cœur de l’Afrique centrale

Troquer la toge pour un casque bleu

Théâtre de bouleversements majeurs, la République centrafricaine se relève d’un conflit dévastateur qui a éclaté en 2013, opposant divers groupes armés à travers des lignes de division religieuse, notamment des milices musulmanes et chrétiennes.

Louis-Philippe Caron (LL. B. 2018 JD Common Law 2018)

Officier des droits de l’homme MINUSCA

Ces soubresauts ont laissé en héritage des divisions profondes et un vaste éventail d’insuffisances, les plus saillantes étant des infrastructures largement déficientes, voire inexistantes. Tiraillée de toutes parts par le jeu des grandes puissances, la République centrafricaine fait face à de nombreux défis pour sa stabilisation, tous complexes et délicats.

Malgré ses richesses et son potentiel incontestable, le territoire centrafricain est hostile pour ceux et celles qui s’y aventurent. Chaque déplacement sur le terrain est une expédition, chaque tentative de communication peut rapidement devenir un casse-tête. Le pays ne compte que 650 km de routes bitumées pour une superficie équivalente à plus d’un tiers du Québec.

D’ordinaire, nos convois circulent hors du confort relatif des routes de la capitale accompagnés d’escortes militaires qui, bien que parfois encombrantes, ne relèvent pas du luxe. La sécurité dans ces zones où l’on progresse à pas de tortue est précaire et pour cause : l’instabilité chronique et l’existence de groupes armés hostiles à la présence des Nations Unies sur le territoire.

Dans ce contexte, la MINUSCA joue un rôle essentiel en fournissant un soutien crucial à l’État pour la réconciliation, la sécurité et le développement durable du pays, ainsi que dans la lutte contre l’impu nité et la protection des droits de l’homme.

La Centrafrique est depuis des décennies au cœur d’interférences de multiples intervenants, cicatrisée par les divisions ethniques, religieuses et politiques, qui se manifestent encore à ce jour. Depuis 2014, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) œuvre pour le maintien de la paix et la réconciliation dans le pays.

En tant qu’officier des droits de l’homme au sein de la MINUSCA, ma mission principale consiste à assurer la protection individuelle et à mener des enquêtes sur les violations des droits de l’homme. Quotidiennement, je coordonne la prise en charge des personnes confrontées à des menaces imminentes pour leur intégrité physique et je participe activement à des missions d’enquête partout sur le territoire. Mon rôle est à la fois simple dans son essence et significatif dans son exécution : protéger celles et ceux qui se tiennent sur la ligne de front de la vulnérabilité. Cela signifie non seulement répondre aux cris de détresse, mais aussi plonger dans les abysses des crimes de guerre et crimes contre l’humanité, là où l’horreur heurte la dignité humaine.

Ces enquêtes cruciales sont aussi endiguées par autant d’embûches, parfois surmontables, mais incontournables à coup sûr. L’accès aux zones touchées, la collecte d’informations fiables, la garantie de la sécurité des victimes et témoins, tout cela nécessite une expertise pointue, une coordination sans faille et une sensibilité inébranlable.

Les violations des droits de l’homme ne sont pas de simples statistiques, ce sont des mémoires – des échos de terreur, des murmures de douleur. Toutefois, on peut trouver des récits de résilience. En plongeant profondément, en écoutant attentivement, on peut découvrir un fil d’espoir, même au cœur des histoires les plus sombres. Chaque victime, chaque témoin, chaque enfant, partage avec nous une expérience unique, rappelant ainsi l’importance cruciale de notre présence. Ces visages sont ce que je retiens le plus au-delà de mes responsabilités officielles.

En fin de compte, joue-t-on un rôle fondamental dans la stabilisation de la République centrafricaine ? Je vous répondrais « Oui », ce serait de la prétention; je vous répondrais « Non », ce serait de la bêtise. Même si nos défis restent nombreux, les progrès réalisés et les vies sauvées attestent de l’importance de notre mission. n

16 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Conseillère à la prospection et à l’attraction, Direction des services d’immigration – Afrique, Délégation générale du Québec à Dakar

Accrocher provisoirement sa toge Vivre la doctrine Gérin-Lajoie au quotidien

Depuis une cinquantaine d’années, le Québec met en application la doctrine Gérin-Lajoie dans ses relations internationales. Véritable fondement de la politique étrangère québécoise, cette doctrine énonce que la province peut exercer l’ensemble des pouvoirs exclusifs qui lui sont conférés par la Constitution à l’international.

Pionnier de la paradiplomatie, le Québec possède aujourd’hui un impressionnant réseau de 37 représentations à l’étranger. En Afrique, la province dispose de la Délégation générale à Dakar ainsi que de bureaux à Abidjan et à Rabat.

Ce vaste réseau diplomatique collabore à la mise en œuvre de la Politique internationale du Québec1. Cette politique, comme le précise la Loi sur le ministère des Relations internationales, favorise « le rayonnement du Québec et son développement, notamment sur les plans commercial, culturel, économique, politique et social 2 ». Pénurie de main-d’œuvre oblige, l’attraction de talents joue aujourd’hui un rôle important dans l’action des représentations du Québec à l’étranger, et la mobilité internationale fait partie intégrante des objectifs à atteindre de la Politique. L’importance du recrutement de la main-d’œuvre et des talents est d’ailleurs réitérée dans la Vision internationale du Québec 3 qui complète et actualise la Politique.

Il va sans dire que l’Afrique, compte tenu du nombre de ses locuteurs francophones et de son profil démographique, est un territoire de choix pour répondre aux besoins de main-d’œuvre de notre province. Après tout, c’est sur le continent africain que se joue l’avenir de la langue de Molière, selon l’Observatoire de la langue française 4

Au Canada, qui dit immigration dit compétence partagée. C’est dire que les pouvoirs de la paradiplomatie migratoire du Québec pour attirer les candidatures vers la province s’arrêtent où commence l’exercice des pouvoirs du gouvernement fédéral, notamment en matière d’admission sur le territoire. Au-delà des enjeux intraétatiques, la mobilité internationale comporte des défis et des opportunités en matière de gouvernance pour les états d’origine et de destination. Entrent alors en

Il va sans dire que l’Afrique, compte tenu du nombre de ses locuteurs francophones et de son profil démographique, est un territoire de choix pour répondre aux besoins de main-d’œuvre de notre province.

jeu les considérations de recrutement international éthique et de respect des droits des travailleuses et travailleurs migrants.

Dans ce contexte, il y a de ça un an maintenant, moi qui exerçais comme avocate en droit du travail et en droit administratif dans la fonction publique québécoise, j’ai choisi de faire le saut et de participer, sur le terrain, aux efforts de recrutement à l’étranger du gouvernement du Québec. Mon rôle à titre de conseillère à l’attraction et à la prospection s’articule autour de l’établissement et du maintien du dialogue avec les autorités locales, ainsi qu’autour de la diffusion de l’information et de la vulgarisation des processus d’immigration auprès des candidats et candidates. S’ajoute à cela la mission de prospecter différents pays d’Afrique subsharienne pour repérer les bassins potentiels. Au final, d’aucuns pourraient croire que j’ai abandonné le droit pour explorer de nouveaux horizons en Afrique, ce qui n’est pas faux, mais en réalité, celui-ci me guide et m’accompagne dans mon travail quotidien. n

1 Ministère des Relations internationales et de la Francophonie, La Politique internationale du Québec – Le Québec dans le monde s’investir, agir, prospérer Québec, 2017.

2 RLRQ, M-25.1.1, art. 11.1, al. 1. https://www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/lc/M-25.1.1?cible=

3 Ministère des Relations internationales et de la Francophonie, Le Québec : fier et en affaires partout dans le monde! vision internationale du Québec, Québec, 2019.

4 Observatoire de la langue française, La langue française dans le monde – 2022 Organisation internationale de la Francophonie, en ligne https://www.francophonie.org/sites/default/ files/2023-03/Rapport-La-langue-francaise-dans-le-monde_VF-2022.pdf

17 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Coopération internationale

Journaliste

Membre de la délégation de l’UdeM à Libreville

Chercheur doctoral de l’équipe interdisciplinaire de la professeure Violaine Lemay

L’UdeM promeut l’égale dignité en potentialité savante des savoirs de tous les continents à Libreville Interdisciplinarité

et interculturalité

Les membres de la délégation de l’Université de Montréal ont travaillé à la conception et à l’adoption d’une déclaration lors d’un congrès du Conseil africain et malgache pour l’enseignement supérieur (CAMES) qui s’est tenu à la mi-décembre 2022 dans

la capitale gabonaise.

La Déclaration de Libreville sur l’égale dignité en potentialité savante des savoirs de tous les continents et de tous les peuples porte la marque de l’engagement de Violaine Lemay, professeure titulaire à la Faculté de droit de l’Université de Montréal et chercheuse au Centre de recherche en droit public Le texte est ambitieux et fonde une politique inclusive de la coopération des savoirs de continents différents. Il s’appuie sur quatre recommandations : la mise en œuvre urgente, dans les établissements d’enseignement et de recherche, de formations et de projets de recherche interdisciplinaires financés et orientés vers la résolution des problèmes et des défis des sociétés; l’intégration des communautés dites « non savantes » à la production des savoirs, la mise en place d’espaces de partage des travaux scientifiques au bénéfice des communautés étudiante, enseignante et de recherche, et ouverts au grand public; et la création de centres de recherche sur l’interdisciplinarité et l’interculturalité arrimés à un réseau de chercheuses et chercheurs nationaux et internationaux et aux établissements d’enseignement et de recherche au niveau national. La dernière recommandation a été immédiatement suivie d’effet à travers l’établissement du Centre de recherche sur l’interdisciplinarité et l’interculturalité

L’engagement des délégations présentes s’est concrétisé à travers l’adoption de la Déclaration de Libreville.

(CRII) de l’Université Omar Bongo, dont Violaine Lemay est cofondatrice. De manière générale, il aurait fallu rallonger les journées de quelques heures pour parvenir à cocher toutes les cases de l’agenda surchargé des membres de la délégation de l’UdeM à Libreville. En plus de la P re Violaine Lemay, qui a été l’une des chevilles ouvrières de ce premier Congrès du program me thématique de recherche « Langues, sociétés, cultures et civilisations » du CAMES, le vice-recteur Jean-François Gaudreault-DesBiens a lui aussi participé à la réussite de cette rencontre. Le P r Gaudreault-DesBiens a animé avec expertise plusieurs plénières tandis que sa collègue a multiplié les consultations, les discussions, les rapprochements et les compromis afin de faire adopter une déclaration finale qui encourage l’interculturalité et l’interdisciplinarité comme rapports au savoir nécessaires dans le monde actuel. L’enjeu était de parvenir à faire accepter aux participantes et participants venus d’Afrique, d’Amérique et d’Europe qu’il est urgent de refonder les manières de penser et de comprendre le monde, à distance des ethnocentrismes.

Le congrès s’est tenu entre le 11 et le 17 décembre 2022 sous le thème « Les sciences humaines et sociales face au devenir de l’Afrique – Épistémologie(s), savoir(s) et pratiques ». La délégation de l’UdeM à Libreville s’est aussi distinguée par des conférences scientifiques de haute volée. Outre donc la Pre Lemay et le Pr Gaudreault-DesBiens qui, en plus de leurs obligations institutionnelles, ont animé des communications de haut niveau, plusieurs chercheurs doctoraux de l’UdeM ont dirigé des ateliers thématiques lors de cette rencontre scientifique d’envergure. Ce sont William Bayiha, Claire-Joane Chrysostome, Dieket Kessé, Ollo Anderson Sib et Ledy Rivas Zannou. n

18 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
PHOTO WILLIAM BAYIHA

Thuy Nam Tran Tran

Chargée de cours, notaire et responsable de programme – Maîtrise en droit notarial

Programme de maîtrise en droit notarial (LL. M.)

Pour plus d’informations, contactez-nous !

Thuy Nam Tran Tran, responsable du programme et coordonnatrice des stages 514 343-6111, poste 51471 thuy.nam.tran.tran@ umontreal.ca

Du côté du notariat

Notariat et nouvelles technologies

Dans tous les coins du globe, le monde se questionne sur l’impact de l’intelligence artificielle (IA) sur nos vies, nos emplois, nos processus. Par ailleurs, les spécialistes nous parlent également des avancées en calcul quantique, de l’avènement des ordinateurs quantiques qui vont révolutionner notre vision du monde par leur capacité exponentielle.

Allier ces deux sciences bousculerait notamment les méthodes de la cryptographie actuelle, laquelle affecte également la chaîne de blocs, le tout touchant la sécurité des données. Or, lorsqu’on parle de sécurité, on pense au notariat, puisque depuis des temps immémoriaux, l’officier public qui le pratique a été reconnu par l’État (des pharaons d’Égypte aux monarchies européennes du XVIIIe siècle, aux pays de droit civil de nos jours) comme le seul juriste (de pratique privée) à pouvoir conférer l’authenticité à un acte. Ainsi, un acte authentique a la plus haute reconnaissance dans la hiérarchie de la preuve : la ou le notaire est donc le garant de la sécurité juridique des transactions.

Or, même si l’ IA vise à simuler l’intelligence humaine et que l’informatique quantique peut gérer des données et des modèles bien plus complexes, il reste qu’un être humain doué d’intelligence émotionnelle entre autres capable de saisir les subtilités de l’âme de son interlocuteur et d’éveiller son empathie ou son désir de s’améliorer ou de ne pas récidiver demeure la clé de voûte d’un système de justice adapté aux hommes et femmes qui composent la société pour laquelle cette justice est administrée.

Loin de craindre une lutte fratricide machine/humain, de meilleures technologies, de meilleurs outils permettant au juriste d’accomplir plus rapidement certaines tâches afin de se consacrer à son devoir de conseil envers un autre humain sont les bienvenus. Pour illustrer ce point, prenons pour exemple la toute nouvelle loi adoptée le 24 octobre 2023 intitulée Loi visant à moderniser la profession notariale et à favoriser l’accès à la justice; elle consacre notamment la réception des actes notariés technologiques en privilégiant la signature en présentiel. La clientèle bénéficie ainsi du meilleur des deux mondes : une rencontre chargée de sens et une écoute proactive du ou de la notaire qui exerce son devoir de conseil à plein tout en signant un acte technologique dont la conservation

est pérenne dans un greffe central numérique et dont les copies seront émises à une vitesse lumière (comparé aux copies papier qui souffrent en ce moment d’un certain délai compte tenu de la pénurie de main-d’œuvre, entre autres). Le ou la notaire ne s’occupe pas de la sécurité informatique (inviolabilité du greffe central), mais demeure responsable de la sécurité juridique… comme depuis toujours.

La signature d’un acte notarié technologique a été propulsée sur le devant de la scène durant la pandémie en 2020; cependant, c’était un projet à l’étude à la Chambre des notaires du Québec depuis des dizaines d’années. Rappelons que la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l’information, adoptée en 2001, avait ouvert la possibilité juridique… mais on a dû attendre les avancées technologiques pour concrétiser le plein potentiel de l’acte notarié sur support technologique.

Depuis toujours, l’évolution du notariat suit de près celle des technologies anciennes ou nouvelles qui révolutionnent le « document » ou encore l’information consignée : de la pierre au papyrus, de l’argile au parchemin, de l’imprimante à la machine à écrire, de l’ordinateur aux logiciels de gestion d’études, aux plateformes informatiques Assistant TELUS, Registre foncier, Registre des droits personnels et réels mobiliers, ou encore au Registre des testaments et des mandats, au Registre des dons d’organes, aux infonuagiques, à la signature numérique, etc. En bref, les technologies se succèdent, mais la ou le notaire demeure l’immuable gardien de la sécurité juridique des transactions dont le rôle-conseil est toujours très estimé des Québécoises et Québécois, d’année en année (sondage Léger Marketing). L’adoption éclair de la Loi visant à moderniser la profession notariale et à favoriser l’accès à la justice consacre également l’estime du législateur québécois envers cette profession, qui a de très belles années devant elle à servir la population avec des outils plus performants (par exemple le caractère exécutoire). n

19 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Coup d’œil sur la Clinique juridique

La Clinique juridique reçoit un don important de la Fondation Rossy

Grâce à son don important, la Fondation Rossy bonifie les activités du service-conseil de la Clinique juridique en offrant la chance à plus d’étudiantes et étudiants d’y participer et en permettant aux justiciables d’avoir accès à des services mieux adaptés à leurs besoins.

Aspinall Directrice de la Clinique juridique, des activités pratiques et du développement professionnel

Clinique juridique de la Faculté de droit

Pour plus d’information, contactez-nous : 514 343-7851

clinique-juridique@ umontreal.ca

Initialement composé de 6 étudiantes et étudiants en troisième année de droit, le service-conseil de la Clinique juridique en accueille dorénavant 16 pour l’année universitaire 2023-2024. Depuis leur arrivée au début du mois de septembre, ces recrues fournissent gratuitement des avis juridiques écrits quant aux problématiques vécues par la clientèle, dans différents domaines du droit. À l’issue de l’année, c’est environ 80 dossiers qui auront été traités – soit trois fois plus que l’an dernier –, ce qui permettra à des dizaines de personnes d’avoir accès à des conseils juridiques alors qu’elles ne sont pas admissibles aux services de l’aide juridique ou ne peuvent s’offrir ceux d’un cabinet privé. Il s’agit donc d’un pas de géant vers un accès égalitaire à la justice, comme le souligne la doyenne de la Faculté de droit de l’UdeM, France Houle :

« Je tiens à remercier chaleureusement la Fondation Rossy pour sa générosité. Grâce à son don, nous pouvons outiller un plus grand nombre de personnes pour qu’elles trouvent, avec notre aide, des solutions à leurs difficultés d’ordre juridique. Du même souffle, ce don permettra à l’équipe de la Clinique juridique d’enseigner à nos étudiantes et étudiants à accompagner des individus vulnérables avec empathie et compétence. Ces actions menées en faveur de l’accès au droit et à la justice ne pourraient être aussi efficaces sans le soutien de la Fondation. »

En plus de proposer les services d’un avocat-superviseur à temps plein, cet appui philanthropique permet aussi l’embauche d’une adjointe juridique et d’une coordonnatrice de projets, des piliers essentiels au bon déroulement des activités.

Josée Aspinall, directrice de la Clinique juridique de l’UdeM; Karl Beauchamp, conjoint de Stephanie Rossy Beauchamp; Stephanie Rossy Beauchamp, de la Fondation Rossy; France Houle, doyenne de la Faculté de droit; et Daniel Jutras, recteur de l’Université de Montréal

20 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Une offre de service élargie depuis la loi 29

Bien qu’elle existe depuis plus de 50 ans, ce n’est qu’en 2022 que la Clinique juridique a été légalement autorisée à mettre sur pied un service-conseil. Avant l’entrée en vigueur de la Loi visant à améliorer l’accessibilité et l’efficacité de la justice, RLRQ 2020, c. 29, la Clinique avait pour unique mission de transmettre de l’information juridique, un peu comme le fait un site Internet. Cette avancée législative permet désormais à la Clinique juridique d’opérer ses activités comme un petit cabinet sur le campus. Sous l’étroite supervision de deux avocats, les étudiantes et étudiants peuvent dorénavant prodiguer des conseils et formuler des recommandations personnalisées aux clientes et clients, en plus de leur offrir un accompagnement pour certaines étapes extrajudiciaires postérieures à l’avis (par exemple, la rédaction d’une lettre de mise en demeure, l’accompagnement à la Division des petites créances, etc.). Cela exclut toutefois la rédaction contractuelle ou la représentation devant un tribunal.

Pour la Fondation Rossy, faire partie de la solution pour un meilleur accès à la justice est d’une grande valeur. « On croit fermement qu’une éducation de qualité supérieure est la clé d’un avenir plus juste et équitable. Accorder des ressources à des gens présentant des besoins juridiques, mais n’ayant pas la capacité d’en payer le prix, c’est leur offrir la chance d’être pleinement avisés de leurs droits et obligations et d’être en mesure de prendre des décisions éclairées. Une aide qui leur sera assurément salvatrice », précise Karl Beauchamp (LL. B. 1991), conjoint de Stephanie Rossy Beauchamp, de la Fondation Rossy.

Consolidation du service-conseil et déploiement de l’unité mobile Subvention de plus de 150 000 $ du ministre de la Justice du Québec

Le 1er septembre 2023, lors d’une conférence de presse qui se tenait devant les bureaux de la Clinique juridique, le ministre de la Justice et procureur général du Québec, M. Simon Jolin-Barrette, a annoncé l’octroi d’un financement de plus de 150 000 $ au service-conseil de la Clinique juridique de l’Université de Montréal

Ce financement marque une étape importante dans le développement du service-conseil de la Clinique juridique et, plus globalement, dans l’accessibilité à la justice au Québec. En effet, l’aide financière allouée par le ministre de la Justice permet d’affermir les activités du service-conseil sur le campus, mais aussi de les déployer au-delà de la région métropolitaine.

De gauche à droite : Philippe-André Tessier, président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse; Philippe Clément, stagiaire au service-conseil, 20222023; Daniel Jutras, recteur de l’Université de Montréal; Manon Savard, juge en chef du Québec; Josée Aspinall, directrice de la Clinique juridique de l’UdeM; France Houle, doyenne de la Faculté de droit; Simon Jolin-Barrette, ministre de la Justice et procureur général du Québec; Hélène Potvin, présidente de la Chambre des notaires du Québec; David Ettedgui, bâtonnier de Montréal

En effet, une dizaine d’étudiantes et étudiants, accompagnés de deux avocats-superviseurs, étaient à Rouyn-Noranda du 3 au 9 mars 2024. En plus de leur faire découvrir la pratique du droit en région, ce déplacement avait pour objectif d’offrir des avis juridiques écrits à des clientes et clients dont les dossiers ont été présélectionnés, en plus de tenir des foires d’information juridique au centre commercial et à la bibliothèque municipale. « Dès le départ, l’Abitibi-Témiscamingue nous semblait être un bon choix pour lancer ce projet-pilote », précise Josée Aspinall, directrice de la Clinique juridique. D’abord, la pénurie de main-d’œuvre frappe durement cette région et les avocates et avocats ne font pas exception à la règle. Malgré la présence de bureaux de pratique privée et de l’aide juridique, il n’est pas rare que le choix du justiciable soit limité, soit par les coûts associés aux services, soit par l’existence de conflits d’intérêts qui empêchent les bureaux d’agir dans certains dossiers. À cela s’ajoute aussi le fait que le Centre de justice de proximité ne dessert pas encore cette région. « Notre projet a connu une réception très chaleureuse, tant de la bâtonnière de l’Abitibi-Témiscamingue que des organismes communautaires de la région. Je suis ravie de cette collaboration fort prometteuse! », conclut Josée Aspinall.

La subvention permettra aussi à l’équipe de la Clinique juridique de déployer son unité mobile dans d’autres régions du Québec au cours de l’été 2024

Lors de la conférence de presse, le ministre Jolin-Barrette a rappelé que « l’accès à la justice [était] essentiel pour maintenir la confiance de la population envers le système de justice au Québec ». n

« La Clinique juridique nous permet de mettre en pratique les connaissances théoriques apprises en classe tout en développant nos réflexes juridiques, ce qui nous outille pour la profession d’avocat. L’apprentissage encadré qu’elle propose construit notre confiance en nos habiletés; un superviseur est toujours là pour nous guider au besoin. La Clinique juridique contribue à l’accès à la justice, puisque, contrairement aux cas pratiques en classe, les dossiers qu’on a sont de vrais dossiers. En les prenant en charge, on a le sentiment d’avoir une réelle influence dans la vie des gens. Ma participation m’a permis d’avoir un véritable avant-goût de la pratique du droit. » — Vincent Leduc, stagiaire au service-conseil, 2022-2023

Droit Montréal N

Billet de la rédactrice en chef

Aminata Bal

Adjointe de la doyenne

La marche inexorable de l’intelligence artificielle De nouvelles perspectives à explorer

L’intelligence artificielle (IA) se profile comme un catalyseur sans limites d’une transformation profonde dans notre société et, par ricochet, dans la profession juridique. Elle ne cesse de redéfinir les frontières du possible et agit comme une force gravitationnelle à haut impact, pour ainsi dire, dans nos vies.

En effet, au fur et à mesure que les avancées technologiques s’accélèrent, l’ingérence de l’IA dans notre quotidien s’accentue. Inévitablement, au détour de chaque avancée, au bout de chaque progrès, les acteurs du droit se heurtent à des défis grandissants. Le respect des principes de transparence, d’équité, de sécurité, de fiabilité et de conformité aux lois en vigueur devient incontournable.

Concrètement, comment les professionnelles et professionnels du droit traitent-ils ces innovations qui se sont engouffrées progressivement dans leur pratique? Quel rôle jouent-ils dans cette ère de révolution? Finalement, quel sera le rôle des avocats, avocates et notaires qui doivent s’assurer que l’IA respecte nos valeurs fondamentales tout en maximisant son potentiel? Dans ce numéro spécial, nous allons plonger au cœur de cette mutation technologique avec notre équipe de collaboratrices et collaborateurs. Cette exploration nous amène un regard fascinant sur les perspectives de l’IA qui défient les limites de la cognition humaine, suscitant ainsi l’impératif de cadres juridiques robustes.

De l’arrivée des véhicules autonomes qui permettraient une conduite automatisée aux violations de la vie privée et des données personnelles, en passant par les atteintes à la propriété intellectuelle et les risques de désinformation jusqu’à l’intervention du législateur avec la loi 25 et le projet de loi C-27, pour ne citer que ces exemples, le sentiment d’urgence a pris de l’ampleur.

En réalité, cette capacité de surmonter des obstacles, cette ferme volonté d’instaurer des changements et d’insuffler une dose d’innovation est fortement ancrée dans notre famille juridique, pour ne pas dire profondément imbriquée dans notre ADN. Incontestablement, à travers l’histoire, de grandes femmes et de grands hommes ont brisé des barrières avec détermination, dans un esprit de dépassement, en jouant un rôle influent et majeur dans l’avancement de la société québécoise et même à l’international. Ce sentiment de fierté qui nous anime sera illustré par une rubrique récurrente qui va mettre de l’avant leur empreinte indélébile.

En somme, engagement, persévérance et dévouement égrènent constamment le fil de nos actions. Alors, aussi complexes ces transformations technologiques soient-elles, nous répondrons encore une fois d’une seule voix : l’Humain avant tout, la conscience partout !

Bonne lecture !

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La gouvernance de l’intelligence artificielle Entre possibilités, risques et urgence

Le Canada a joué un rôle majeur dans le développement de l’intelligence artificielle (IA). Deux des trois lauréats du prix Turing 2018 – considéré comme le prix Nobel de l’informatique – pour leurs travaux ayant révolutionné le domaine sont des Canadiens.

Benjamin Prud’homme LL. B. 2011

Vice-président Politiques publiques, société et affaires mondiales

Mila

Ces lauréats incluent Yoshua Bengio, professeur à l’UdeM ainsi que fondateur et directeur scientifique de Mila, un institut qui réunit à Montréal la plus grande communauté de chercheurs et chercheuses universitaires en apprentissage profond au monde. Le Canada a par ailleurs été le premier pays à se doter d’une stratégie nationale d’IA; le Québec a lui aussi largement soutenu ce domaine. Résultat, l’écosystème d’IA du pays se classe au cinquième rang mondial (index Tortoise) et Montréal se démarque particulièrement en raison d’une réputation alimentée par ses talents en recherche et son leadership éthique, notamment grâce à la Déclaration de Montréal pour un développement responsable de l’intelligence artificielle, dont les travaux ont été lancés à l’UdeM en 2017. Cette trajectoire explique l’ancrage profond de cette technologie chez nous et le rôle significatif que plusieurs de nos chercheuses et chercheurs occupent actuellement dans les discussions mondiales sur son encadrement.

L’IA est appelée à transformer nos sociétés en profondeur et plusieurs percées majeures se sont récemment révélées au public, alors que ces systèmes génèrent désormais des images et des textes d’une qualité impressionnante. Plus spécifiquement, comment ignorer l’avènement des grands modèles de langage – tels que ChatGPT – qui, bien qu’ils ne soient pas fiables, montrent des capacités de maîtrise du langage qui ont surpris de nombreux spécialistes et enflammé la conversation internationale ? Ceci s’explique du fait que l’IA est une technologie à double usage, c’est-à-dire qu’elle peut être utilisée à des fins tant positives que négatives. L’équation est donc simple : plus les capacités de ces systèmes augmentent, plus les potentialités et les risques s’accroissent. Ainsi, lorsque des percées ont lieu, on imagine une pléthore de possibilités pour faire face à des enjeux comme la crise climatique, la santé ou l’administration de la justice. Mais, du même souffle, on imagine l’émergence ou l’amplification des risques que cette technologie peut entraîner.

L’année 2023 aura donc été celle où chercheuses et chercheurs, dirigeantes et dirigeants ainsi que citoyennes et citoyens ont ressenti l’urgence de répondre à la question suivante : comment encadrer l’IA ? Pour ce faire, il faut comprendre la technologie et accélérer les efforts pour la démocratiser. Il faut également en saisir les risques, incluant : n L’amplification des inégalités existantes. Ce risque se déploie à même notre société où des groupes minorisés – par exemple les femmes, les Premiers Peuples et les personnes racisées – sont sous-représentés au sein des écosystèmes d’IA et victimes de discrimination algorithmique amplifiant les inégalités existantes. L’IA contribue également aux disparités mondiales alors que les écarts se creusent entre pays détenteurs de la technologie et pays qui en sont exclus, sans compter les conditions d’exploitation des travailleuses et travailleurs du Sud global, qui reçoivent des sommes dérisoires pour accomplir des tâches pourtant névralgiques du développement de l’IA.

n La désinformation et la déstabilisation des systèmes démocratiques.

L’avènement des modèles d’IA générative simplifie la création et la diffusion de fausses informations à grande échelle. Et puisque l’entraînement de tels modèles requiert une infrastructure de pointe et d’énormes investissements financiers, seule une poignée d’entreprises en ont le contrôle, menant à une concentration extrême du pouvoir. Dans les années à venir, l’IA pourrait ainsi contribuer à déstabiliser les systèmes démocratiques, affectant notamment la qualité de l’information et l’intégrité des processus électoraux.

n Le bouleversement du marché de l’emploi. L’IA permet d’automatiser des tâches et les avancées récentes contribuent à ce phénomène. Cela mènera à des transformations majeures du marché de l’emploi et, à plus long terme, à des questionnements sur le sens que les personnes humaines souhaitent donner au travail. Les études montrent par ailleurs que les travailleuses et travailleurs déjà vulnérables seront les premiers à subir ces transformations.

n Les risques majeurs émergents.

Une large part de la conversation mondiale a été consacrée à l’émergence de risques dits majeurs ou catastrophiques, notamment liés à la sécurité nationale (armes biochimiques/biologiques) ou à la perte de contrôle de l’IA. Ces questions font l’objet de vifs débats entre spécialistes et ont occupé un rôle central au Sommet sur la sécurité de l’intelligence artificielle qui s’est déroulé au Royaume-Uni. Elles continueront vraisemblablement d’occuper les communautés scientifique et politique, qui doivent évaluer la probabilité que ces risques se matérialisent et définir les stratégies requises pour les mitiger.

Grand dossier 24 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
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« L’IA est appelée à transformer nos sociétés en profondeur et plusieurs percées majeures se sont récemment révélées au public, alors que ces systèmes génèrent désormais des images et des textes d’une qualité impressionnante. »

Dans ce contexte, il est inquiétant de constater que bien qu’il existe des lois pouvant s’appliquer à des systèmes d’IA – chartes des droits de la personne, sécurité des produits, etc. –, aucune législation n’encadre spécifiquement l’IA au Québec et au Canada. C’est dire qu’il reste un travail colossal à faire à cet égard. Le gouvernement canadien a déposé un projet de loi en ce sens (Loi sur l’intelligence artificielle et les données), lequel est actuellement étudié par un comité parlementaire. D’autres juridictions ont elles aussi démontré leur volonté de réglementer le domaine, incluant l’Union européenne avec son AI Act et les États-Unis avec l’adoption d’un décret présidentiel en octobre 2023.

Le défi qui nous guette est de taille, alors qu’on nous appelle à encadrer rapidement une technologie qui bouleverse déjà nos institutions et dont la trajectoire s’accélère. Il nous faut développer des outils réglementaires suffisamment agiles pour faire face aux défis actuels et futurs que pose l’IA. Si nous relevons ce défi, nous pourrons bénéficier de son potentiel révolutionnaire dans tous les domaines de l’activité humaine. À l’inverse, si nous échouons à cette tâche, nous risquons de voir s’ébranler des piliers de nos sociétés. Au cours des prochaines années, les juristes auront un rôle important à jouer dans cette conversation, puisqu’une large part de notre capacité à relever ce défi dépend de la mise en place de mécanismes de gouvernance robustes et innovateurs. Chacune à leur façon, les voix contenues dans le présent numéro donnent donc le ton à une réflexion qui sera au cœur des débats politiques, économiques et sociaux qui nous attendent. n

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L’humain et l’ IA

L’évolution rapide de l’intelligence artificielle (IA) bouleversera-t-elle notre conception de l’intelligence ou nous conduira-t-elle à être tout simplement plus artificiels ? La question est lancée…

Professeur titulaire Directeur

Projet IMAJ... etc

Entre 2012 et 2023, les capacités de calcul de l’IA ont augmenté de 300 000 fois. Cette évolution est exponentielle. Et entre le moment où cet article est écrit et celui où vous le lirez, cette capacité aura encore décuplé.

Ce qui est nouveau

Ces progrès sont extraordinaires… ou terrifiants…, c’est selon ! Sous des formes plus primitives, on connaît l’IA depuis les années 1940. Pour le profane, cependant, ChatGPT n’a pas seulement fourni l’exemple de ce que peut produire l’IA générative, elle a surtout mis cette technologie au service de tout un chacun et placé la question de l’IA à l’ordre du jour collectif, alors que, bien avant l’arrivée de ChatGPT, elle était posée par les spécialistes du domaine. Outil de synthèse de l’information, d’aide à la décision, l’IA générative peut également agréger des contenus en tirant parti de ceux qui existent déjà, produire des œuvres graphiques et musicales; elle peut entretenir la conversation !

Ce qui n’est pas nouveau

Le génie est-il sorti de la bouteille ? Oui ! Et il n’y rentrera plus. On ne peut pas remettre le dentifrice dans le tube !

Comme c’est le cas de toute autre technologie cependant, ce n’est pas elle « en soi » qui pose problème, mais l’usage qu’on en fera. Il ne s’agit donc pas tellement d’un problème technologique, mais plutôt humain, et plus encore d’une question sociale, puisque nous sommes liés les uns aux autres et que notre destinée commune est de vivre dans les interstices de ces nouvelles technologies.

L’IA est-elle en mesure de surpasser l’humain dans un certain nombre de tâches de nature cognitive (comprendre) ou intellectuelle (analyser) ? C’est déjà fait ! Est-elle susceptible de se déployer de manière autonome, à l’extérieur de notre contrôle ? Cela dépend de nous. Est-elle susceptible d’être utilisée de manière malveillante ? Cela dépend

de nous. Peut-elle faire l’objet d’un contrôle normatif ? Cela dépend encore de nous, et c’est la fonction première du droit de réguler ses rapports et ses comportements.

Le développement d’une normativité de contrôle exige cependant une véritable volonté, et ne peut être le fait d’une seule juridiction. Cette normativité doit-elle être de nature technique, juridique, éthique ? Ces trois inspirations sont évidemment essentielles. On parlera alors d’internormativité. Doit-elle être impérative ou au contraire faire appel à la bonne volonté des développeurs, des chevaliers de l’industrie et des usagers ? Sur beaucoup d’aspects, on doit envisager la première de ces options et éviter le laisser-aller auquel on a assisté dans le domaine de l’Internet. Doit-on compter sur la capacité des producteurs de ces technologies de contrôler leur propre développement ? Il ne faudrait peut-être pas rêver. Les développeurs de ces systèmes algorithmiques ne sont souvent pas eux-mêmes en mesure d’établir comment fonctionne l’animal et quelles conclusions sont susceptibles de venir de leur fonctionnement. En contrepartie, il faut compter sur le fait que la science et la technologie ont souvent conçu les moyens de régler les problèmes qu’elles créent et qu’un contrôle interne de la technologie par la technologie (forme de contre-pouvoir régulateur) doit être envisagé. L’entraînement et les données qui alimentent l’IA constituent une des clefs de ce contrôle.

Ces normes doivent-elles être mondialisées ? Des standards internationaux doivent absolument être établis, en regard tant des conditions de production de l’IA que de ses usages. Seulement voilà…, si l’Europe et le Canada tentent actuellement de définir les termes de cette normativité de contrôle (on ne parle pas uniquement ici d’incitation), plusieurs pays comme la Chine ou le Japon n’entendent pas limiter le développement d’un secteur dont leur industrie peut tirer avantage, surtout si les autres juridictions cherchent à la contrôler sur leur territoire. Le contrôle juridique de ces technologies devient dès lors presque impossible.

Un problème collectif ?

Quels sont les risques de ces vagabondages ? Sur le plan quotidien, on peut craindre la désinformation entretenue par l’exploitation d’informations non

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« Des standards internationaux doivent absolument être établis, en regard tant des conditions de production de l’IA que de ses usages. »

fondées, mais mutuellement confirmées, l’usage frauduleux des fonctionnalités offertes par l’IA, l’entretien de biais systémiques alimentés par la redondance des données dont on la nourrit, l’abus du droit de propriété intellectuelle, la substitution des compétences professionnelles par des diagnostics et des systèmes-conseils anonymes, la construction de vérités parallèles, sinon de contre-vérités reliées aux effets d’hallucination, sinon de fabulation de certaines formes d’IA, notamment de l’IA de type connexionniste, etc.

Si la VÉRITÉ (dans sa définition absolue) remplace LA vérité (celle que nous essayons de construire ensemble), à quoi bon la chercher ailleurs ? C’est la règle de l’évidence acquise qui l’emporte alors, plutôt que la recherche et la construction constamment négociée du sens du monde dans lequel nous vivons. L’opacité des sources l’emporte sur la délibération, contrairement aux exigences du travail scientifique ou journalistique, dont la validité des conclusions repose au contraire sur la transparence des sources, c’est-à-dire sur la reconnaissance des moyens qui contribuent à la construction d’un savoir ou d’une information dont la validité peut être contestée et dont on connaît également les limites.

Au contraire, si la certitude existe, si tout est joué d’avance, pourquoi s’engager ? Cette démission est cependant à l’origine du totalitarisme. L’idée d’une autorité unique, porteuse de tous les savoirs, met tout simplement fin à toute possibilité de discussion, comme à toute forme de contestation, de créativité, d’invention, de remise en question. →

Sur le plan collectif, c’est le principe démocratique que l’IA est susceptible de menacer. L’idée déjà établie par Montesquieu qu’une des conditions de tout gouvernement modéré réside dans ce que « par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir » est frontalement remise en cause dans un monde où la certitude se trouve concentrée à un seul endroit. Si la vérité dont nous vivons est révélée par une entité omnisciente, que reste-t-il du débat? Une forme d’unanimisme n’est-elle pas susceptible de naître d’une source proposant la synthèse de tous les avoirs humains ? Qui gouverne ? Cette question posée au tout début des années 1960 par Robert Dahl ne se posera-t-elle pas directement par l’avènement d’un nouveau régime de vérité, d’une nouvelle révélation ? Indirectement, l’IA pose le problème des conditions de production du savoir et, par conséquent, du pouvoir. Si sa destinée est de remplacer le travail humain (et particulièrement le travail de la pensée), n’est-ce pas l’expression d’une forme de démission ?

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« En contrepartie, il faut compter sur le fait que la science et la technologie ont souvent conçu les moyens de régler les problèmes qu’elles créent et qu’un contrôle interne de la technologie par la technologie (forme de contre-pouvoir régulateur) doit être envisagé. »

Tout sera dit ! L’autorité de l’IA dans nos vies quotidiennes s’alimentera dès lors de la démission et de la paresse intellectuelle de chacun. Il s’agit d’une tendance dont l’usage que nous faisons d’Internet offre déjà l’exemple constant.

Ce qui doit durer

Sur l’échelle de notre propre humanité se pose aussi la question de nos rapports entre nous. Or, ces rapports sont également au fondement du principe démocratique. Tocqueville met bien en évidence l’idée que la démocratie n’est pas seulement un régime politique ou une mécanique institutionnalisée régie par un système électif. Elle est le produit d’une culture civique particulière, fondée sur la reconnaissance mutuelle des citoyens comme des êtres égaux et, pour tout dire, sur une certaine confiance mutuelle. Toute véritable délibération exige le rejet des arguments d’autorité. On entend ainsi éviter que les hésitations associées au questionnement des uns soient constamment en butte à la certitude intolérante des autres. En imposant une sorte de vérité absolue, l’IA détruit l’espace de cette discussion.

Cette délibération n’est par ailleurs envisageable qu’au prix de l’authenticité des points de vue et des prises de position. Or, un des grands défis posés par certaines formes d’IA est la difficulté de mesurer l’authenticité des entités avec lesquelles nous discutons. L’IA étant un interlocuteur capable de converser, sinon de répondre à certaines de nos questions, que reste-t-il de nos rapports entre nous ?

Comment savoir si l’entité avec laquelle nous échangeons sur Internet existe vraiment ? « Je discute avec qui au juste, là ? », un humain ou un système d’agrégation des connaissances ? Se trouve ainsi trahie une certaine éthique de la discussion, en même temps que se pose la question des expressions réelles ou fictives de la solidarité humaine, de l’empathie, de la compréhension mutuelle. De telles expressions sont-elles authentiques ou reproduites ?

Il est inévitable que cette incertitude en vienne, à terme, à miner la confiance que nous entretenons dans la réalité de nos relations, sinon de nos sentiments. C’est trop souvent le cas lorsque nos relations transitent par Internet.

Ainsi, à la longue, et de façon paradoxale, l’IA pourrait conduire au développement d’une forme de méfiance systématique à l’égard de tout positionnement, même authentique. Se méfier de tout confine cependant tôt ou tard au complotisme. Cette méfiance est en opposition directe avec la confiance mutuelle essentielle à toute délibération, car la confiance est consubstantielle à la culture démocratique. À une trop grande confiance que nous plaçons dans les vertus de l’IA pourrait ainsi succéder une méfiance systématique qui nous ramènerait à une logique d’opposition. Or, celle-ci ferait le lit d’une méfiance de tous contre tous, sur la base de laquelle est évidemment susceptible de s’appuyer (encore là) une forme ou une autre de totalitarisme, qui imposerait « par en haut » son autorité à une collectivité détruite par cette méfiance.

Entre la démission et la définance ???

Ces enjeux doivent faire l’objet de choix collectifs. Mais cette dimension collective doit être reconnue. Or, les modes de communication par lesquels transitent nos relations nous confinent parfois à un certain isolement. Peut-être les possibilités et les risques que présente l’intelligence artificielle sont-ils l’occasion d’une discussion plus profonde sur la société dans laquelle nous vivons. Cela suppose cependant chez les citoyens et citoyennes le développement d’un nouveau sens critique. Sur le plan individuel se pose surtout l’enjeu du jugement et de la responsabilité. Réhabiliter l’individu et le travail en commun comme les sièges de la pensée. Replacer la créativité humaine au centre de notre destinée et refuser de placer notre avenir commun à la merci d’une simple extension de ce que nous avons déjà créé. Concevoir de façon toujours renouvelée l’idée de notre vie ensemble. En reprendre le contrôle. n

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Santé Pour que l’IA soit bénéfique

Pas une semaine ne passe sans qu’un article de journal ou de revue ne discute des changements positifs que l’intelligence artificielle (IA) pourrait entraîner dans un secteur de la santé confronté, partout en Occident, à des défis majeurs.

Catherine Régis Professeure titulaire

Titulaire d’une Chaire de recherche du Canada en droit et politiques de la santé et d’une Chaire Canada - CIFAR en IA et droits de la personne

Membre académique associée

Mila (Institut québécois d’intelligence artificielle)

Co-présidente Groupe de travail sur l’IA responsable du Partenariat mondial sur l’ IA (2021 -2023)

Et cela se perçoit avec des défis aussi importants que ceux du vieillissement de la population et de la hausse des coûts ou de la pénurie de main-d’œuvre.

Il est clair que l’ IA pourrait avoir des effets marqués dans le domaine de la santé, certains étant déjà bien visibles. Elle peut servir à accélérer les processus de découverte et d’essai de médicaments, à amenuiser le poids et les coûts associés aux tâches administratives n’ayant que peu, voire aucune valeur ajoutée sur le plan humain, à mieux cerner les risques qu’une personne subisse un arrêt cardiaque ou se suicide, à gérer les listes d’attente et les affectations du personnel, à améliorer les diagnostics ou à prédire l’éclatement d’une crise de santé publique par la simple analyse du contenu des médias sociaux. Mais on n’intégrera pas l’ IA dans le système de la santé comme on achète un certificat de dépôt, avec la promesse d’un rendement garanti !

« [...] on n’intégrera pas l’IA dans le système de la santé comme on achète un certificat de dépôt [...] »

Si les deux facteurs en question ne sont pas pris en compte, si l’intégration de l’IA est essentiellement considérée comme un enjeu technique plutôt qu’un défi à la fois technique et socio-organisationnel, le fossé entre l’optimisme du discours des partisans de l’IA et la réalité de son déploiement dans le monde réel s’élargira (et la confiance en l’IA s’érodera). L’action des régulateurs sera nécessaire pour assurer le développement d’une IA fortement centrée sur l’humain et stimuler la réalisation des transformations requises pour déployer cette technologie avec succès. Cette action devra notamment viser à garantir que les systèmes d’IA lancés sur le marché se conforment aux normes appropriées en matière de protection de la vie privée, de sécurité, d’efficacité et ainsi de suite. Il faudra responsabiliser les organisations et les personnes qui développent, déploient et utilisent l’ IA en les forçant, notamment, à rendre des comptes. Et il faudra rendre obligatoire la diffusion de l’information dont les patients, les gestionnaires et les travailleurs ont besoin pour cerner le potentiel et les limites des outils mis entre leurs mains. Il semble évident que l’ IA fera partie intégrante de la médecine de demain et qu’elle a le potentiel de contribuer à l’amélioration du fonction nement des systèmes de santé, mais la route pour y parvenir sera longue, évolutive et parsemée d’embûches. Notre capacité à anticiper l’avenir avec lucidité et la manière dont nous y ferons face détermineront fortement l’ampleur des bénéfices que nous pourrons tirer de l’IA. n

Pour tirer avantage de l’IA en santé (ou dans d’autres secteurs), il faudra d’abord veiller à ce que son développement soit centré sur l’humain, c’est-à-dire s’assurer qu’il se réalise en fonction des véritables attentes et besoins de l’ensemble des acteurs du système (des patients aux professionnels, en passant par les gestionnaires). Il faudra ensuite apporter l’ensemble des changements sans lesquels ceux-ci seront incapables de tirer profit de l’IA dans le contexte qui est le leur – qu’on parle de changements aux processus de travail, aux responsabilités des professionnels ou à leur formation.

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L’IA, pour le notariat Un atout si on l’utilise intelligemment

Utilisant des outils d’automatisation et des modèles d’actes depuis bon nombre d’années déjà, afin de les aider dans leurs nombreux rôles, les notaires n’ont pas adopté jusqu’à présent les dernières avancées en matière d’intelligence artificielle (IA), qu’elle soit générative ou prédictive.

Nicolas Handfield LL. B. 2009

Notaire, adm. a., médiateur accrédité

Droit des affaires 2013, MBA, HEC Montréal 2015

Notaire et directeur, Responsabilité sociale et innovation

Chambre des notaires du Québec

Or, historiquement, la profession notariale tend à ajouter les technologies dans sa pratique, et ce, pour renforcer la sécurité juridique des parties impliquées dans les transactions. Ce n’est donc qu’une question de temps avant que le notariat saisisse la balle au bond et embrasse pleinement les possibilités offertes par l’ IA . Parmi celles-ci, citons notamment la réduction des efforts consacrés à certaines tâches de nature plus redondante ou administrative, au profit des aspects plus complexes et stimulants de leur travail.

Nuancer l’automatisation

L’ IA deviendra un outil supplémentaire pour le ou la notaire afin d’évaluer et de mitiger le risque d’erreurs, pour autant qu’il ou elle continue d’exercer sagement son jugement professionnel. En effet, les transactions juridiques impliquent des détails complexes et des nuances qui doivent prendre en compte les situations et besoins de la clientèle qui se renouvellent plus rapidement.

profondeur des enjeux amenés par les relations humaines et leurs implications légales, d’où la pertinence du rôle des notaires et de leur jugement.

Maintenir la confiance et offrir un conseil efficace À titre d’officier public, le ou la notaire se doit de maintenir une relation de confiance avec sa clientèle et face aux tiers. Par ses habiletés humaines et sa sensibilité, il ou elle reste donc indispensable pour valider certaines informations et fournir un devoir de conseil. En outre, l’ IA ne peut vérifier l’exactitude des faits déclarés par les parties ni le consentement de celles-ci, alors que ces gestes sont fondamentaux dans l’action notariale.

D’un autre côté, le client peut s’attendre à ce que le ou la notaire utilise les technologies appropriées afin de bien le servir. Ne pas adopter les technologies développées de façon éthique ou les utiliser incorrectement pourrait affecter sa confiance. En conséquence, de la formation continue dans ce domaine doit être offerte et suivie.

Garantir la confidentialité et l’intégrité

« Par ses habiletés humaines et sa sensibilité, il ou elle reste donc indispensable [...] »

Aussi, la programmation peut entrainer des biais ou des hallucinations dans les réponses fournies. Par les données utilisées dans ses modèles langagiers ou prédictifs, ils sont amenés à reproduire le passé, négligeant les évolutions sociales et les débats actuels. Les humains derrière le code ont également des biais inconscients.

L’ IA est utile pour gérer des tâches répétitives, analyser des documents et produire des projets d’actes juridiques ou d’ententes, entre autres, mais elle ne peut comprendre complètement la

Les notaires, professionnels du droit préventif, doivent anticiper les besoins de leur clientèle et cela implique une supervision et une protection constante des données et des droits du client, dont le secret professionnel. Ils doivent exercer un contrôle et agir avec une diligence concernant les entrées et les risques liés à l’utilisation d’outils basés sur l’ IA , tout en supervisant leur personnel dans l’utilisation de ces outils.

En fin de compte, l’ IA présente des aspects favorables à garder en tête et a le potentiel de devenir une véritable alliée du notariat. Mais elle ne saurait remplacer la relation humaine et la confiance qui sont au cœur de la profession notariale. n

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Les grands modèles de langage (LLM) et leur place dans le droit du travail

Intégration inévitable

Les grands modèles de langage (LLM) redéfinissent l’interaction entre l’intelligence artificielle (IA) et le monde professionnel.

Xavier

Beauchamp-Tremblay

LL. B. 2005

Leader régional transformation du domaine juridique KPMG

Éric Lallier

LL. B. 2011

Associé Norton Rose Fulbright

Capables d’analyser et de générer du langage avec une précision remarquable, ces outils s’insèrent dans nos activités quotidiennes, posant des questions cruciales sur leur intégration dans le monde du travail et entraînant des enjeux juridiques réels.

Cadre réglementaire actuel et évolution

Un cadre législatif complet consacré à l’IA, notamment dans le monde du travail, reste à établir. Malgré tout, la situation actuelle n’est pas pour autant un « Far West » sur le plan juridique.

À titre d’exemple, la Loi 25 au Québec contient déjà des dispositions directement liées à la prise de décision automatisée. La première mouture du projet de loi C27 au fédéral nous a donné une bonne idée de la direction que prendront les régulateurs et permet déjà d’orienter les employeurs. La jurisprudence, par exemple l’arrêt CCH en matière de droit d’auteur, offre aussi certains repères, notamment quant aux questions de propriété intellectuelle.

Bien que ces cadres requièrent une adaptation continue, ils fournissent une base permettant de développer les encadrements nécessaires et n’empêchent pas les entreprises d’intégrer l’IA dans leur fonctionnement. Dans l’immédiat, on doit retenir qu’en droit de l’emploi et du travail, l’accent doit être mis sur la protection des données, la prévention de la discrimination et le respect des obligations, tant de l’employeur que de son personnel.

Les LLM au service de l’entreprise

Ramener le débat sur l’IA et les LLM à une simple question binaire (leur usage est-il possible ou éthique ?) est réducteur. Les risques liés à l’IA dépendent de la forme de son utilisation et des paramètres mis en place.

Par exemple, les décisions affectant des individus basées sur des données biométriques comportent des risques bien supérieurs à ceux liés à l’extraction de données non sensibles de formulaires pour alimenter des systèmes de gestion. Chose certaine, les LLM peuvent considérablement améliorer les processus internes, notamment dans la gestion des ressources humaines. Le recours à l’IA doit donc être guidé par des cadres de gouvernance solides, mais suffisamment flexibles.

Impact des LLM sur les membres du personnel

L’ IA n’affecte pas que les entreprises, ell est aussi à même de transformer l’action individuelle des membres du personnel. C’est pourquoi l’arrivée d’un tel outil exige une évolution des compétences et l’établissement de directives claires. Une simple politique ne sera généralement pas suffisante. Dans bien des cas, il faudra combiner l’encadrement normatif (la mise en place de balises institutionnelles) et la maîtrise des solutions technologiques (la formation, le mentorat et l’accompagnement).

Répercussions sur le droit du travail

La présence croissante des LLM dans les milieux de travail modifiera aussi de façon inéluctable le panorama judiciaire. En effet, l’ IA offre, tant aux employeurs qu’aux membres du personnel, de nouveaux moyens de comprendre et de faire valoir leurs droits. À court terme, la disponibilité de tels outils nécessitera une adaptation du droit du travail (et des tribunaux, de façon plus large), ne serait-ce que dans l’éventualité où l’ IA générative augmenterait le volume de documents (procédures et plaidoiries dont la rédaction est maintenant simplifiée), ce qui exigerait d’investir plus de temps pour évaluer leur validité. Il s’agira d’un défi d’ampleur pour les tribunaux, plus particulièrement les instances administratives spécialisées, comme c’est le cas en droit de l’emploi et du travail.

L’intégration des LLM dans les milieux de travail constitue un enjeu majeur, mais aussi une formidable opportunité. Nous encourageons les acteurs du monde du travail à adopter une approche pragmatique s’appuyant sur les cadres réglementaires existants, tout en restant attentifs à leur nécessaire évolution. Il s’agit selon nous d’un chantier immédiat et qui ne relève plus de l’avenir. n

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La régulation de l’intelligence artificielle De l’innovation technique à l’innovation juridique

L’intelligence artificielle est la saveur numérique du moment qui mobilise la doctrine et ne laisse indifférent aucun domaine d’activités.

Vincent Gautrais

Professeur titulaire Titulaire

Chaire L. R. Wilson sur le droit des technologies de l’information et du commerce électronique

Ledy Rivas Zannou LL. D. 2024 Coordonnateur scientifique

Chaire L. R. Wilson sur le droit des technologies de l’information et du commerce électronique

L’

intelligence artificielle est évoquée tant par ses potentialités que par les menaces ou risques qu’elle présente pour la « société libre et démocratique » que nous souhaitons léguer à la postérité. Si elle ne révolutionne pas les enjeux juridiques des technologies, elle nous oblige toutefois à nous questionner sur le cadre légal que le Canada et le Québec entendent apporter pour construire le « déjà demain ». Bien que nous n’adhérions pas forcément au sentiment d’urgence que l’on ressent parfois, il est vrai, en effet, qu’une certaine opacité accrue de ces technologies exige d’accompagner leur utilisation. Aussi, la technicité, l’évolutivité, la mainmise économique et la pression internationale sont autant de raisons qui nous demandent de réfléchir au cadre réglementaire qu’un tel objet exige. Face à l’innovation technique, il importe de proposer une innovation juridique. Avec bien entendu des lois qui, classiquement, vont déterminer un cadre principiel opérant, d’une part, une balance entre protection des individus et innovation et, d’autre part, la place des institutions publiques qui n’ont d’autre choix que de s’impliquer dans l’application de ces règles ou de ces lois.

quant aux manières de procéder. À cet égard, dans le cadre de différents projets de recherche, la Chaire L.R. Wilson dans laquelle nous œuvrons cherche à proposer des outils documentaires capables de soutenir des cadres permettant d’envisager ces situations. Des cadres en cours de construction qui ne peuvent avoir un effet utile que s’ils prennent en compte la participation ainsi que les commentaires des différents acteurs impliqués; qu’ils soient universitaires, industriels ou gouvernementaux. Une participation que l’on souhaite véritable, plurielle, pluridisciplinaire, représentative, légitime. Cette innovation juridique nous semble donc pouvoir se matérialiser à chaque étage de ce « mille-feuille normatif » en prenant appui sur une technique ou une démarche.

De notre point de vue, cette innovation juridique procède d’une technique réglementaire capable d’opérer et de garantir une telle implication : il s’agit des bacs à sable réglementaires. En substance, ils sont considérés comme « un nouvel arsenal réglementaire » (Brummer et Yadav, 2017, p. 291), c’est-à-dire un projet expérimental où on teste un cadre réglementaire, généralement dans un domaine d’application particulier, pour une période bien déterminée. C’est donc un espace où on invite un certain nombre d’acteurs à participer

« De façon généralisée, les cadres légaux qui apparaissent à travers le monde pour contrôler l’intelligence artificielle utilisent ce système de double délégation de la loi vers les standards et des standards vers les documentations internes. »

Des lois qui vont également référer à diverses strates de la juridicité, tels d’abord les codes de conduite, lignes directrices et autres standards qui ne manquent pas de fleurir çà et là, mais aussi des modèles pour que les entreprises mettent en application les manières de faire. De façon généralisée, les cadres légaux qui apparaissent à travers le monde pour contrôler l’intelligence artificielle utilisent ce système de double délégation de la loi vers les standards et des standards vers les documentations internes. Soit.

Si l’idée n’est pas mauvaise et permet d’offrir une certaine souplesse, l’industrie est assez désemparée

à l’élaboration des règles. D’ailleurs, ces cadres pullulent dans le domaine des technologies financières, qui constitue un terrain propice. La démarche est donc en vogue et il est loisible de constater que le monde des technologies ainsi que celui du droit y souscrivent volontiers. En droit, cette démarche en rappelle une autre : celle des lois expérimentales qui furent mises en place dans les années 80 et dont le procédé est envisagé comme un moyen de se prémunir contre les carences des formes traditionnelles de réglementation.

La fonction des bacs à sable réglementaires est donc de proposer un équilibre entre des intérêts catégoriels distincts, tout en servant de guide aux acteurs impliqués. Bien sûr, leur opérationnalisation demeure délicate et il importe

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de rester vigilant quant aux effets pervers d’un tel procédé. Par exemple, cette solution bien intéressante alimente une tendance malheureuse selon laquelle des États tendent à se désengager de leur rôle traditionnel de faire des règles. Plusieurs défis restent donc encore à relever en ce qui a trait aux modalités processuelles de construction des bacs à sable réglementaires ainsi qu’à la garantie de l’équilibre sus-évoqué. Cette mise en garde nous semble importante, puisque le procédé des bacs à sable réglementaires porte davantage sur le droit « mou » que sur le droit « dur » et, ce faisant, suppose une certaine informalité. Il importe donc de compenser cette informalité par des garanties structurantes nécessaires pour combler la fragilité inhérente à tout processus communautaire.

En conclusion, la régulation juridique de l’intelligence artificielle implique donc également une dose d’innovation de la part du droit qui doit non pas s’émanciper des procédés classiques ou traditionnels de réglementation, mais conjuguer aussi avec des techniques réglementaires « nouvelles ». Comme juristes, comme enseignants ou professionnels du droit, nous n’avons d’autres choix que de s’intéresser aux normes informelles et aux procédés alternatifs comme ceux décrits précédemment. « Bac à sable », « RegTechs », « SupTech » sont autant de néologismes que le conservatisme inhérent au droit regarde d’un œil chagrin; ils constituent pourtant des objets d’analyse non seulement dignes d’intérêt, mais qui ne peuvent être développés en marge du droit. n

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Développé par le Laboratoire de cyberjustice de l’Université de Montréal, l’objectif du JusticeBot est de simplifier et d’enrichir l’accès à l’information juridique pour un public varié, allant des citoyennes et citoyens non initiés aux spécialistes.

Le JusticeBot

Faire dialoguer le droit et l’intelligence artificielle

L’évolution rapide de l’intelligence artificielle (IA) a ouvert de nouvelles perspectives dans le domaine du droit en permettant le développement de solutions innovantes pour répondre aux besoins croissants de la société en matière d’assistance juridique et d’accès à l’information.

Karim Benyekhlef

Professeur titulaire

Directeur Laboratoire de cyberjustice

Sébastien Meeùs

Doctorant en droit, en cotutelle Université de Montréal et Université libre de Bruxelles

Nicolas Vermeys

Professeur titulaire

Directeur adjoint Laboratoire de cyberjustice

Dans ce contexte, le JusticeBot émerge comme un exemple concret d’innovation sociale, fusionnant les capacités de l’intelligence artificielle avec les exigences du domaine juridique. Sous la forme d’une plateforme en ligne1, le JusticeBot combine les caractéristiques des agents conversationnels et des arbres de décision, tout en gardant la profondeur du raisonnement universitaire dont il est originaire. Dans un domaine juridique spécifique, l’utilisateur est invité à décrire sa situation par le biais d’un texte, puis à répondre à une série de questions visant à préciser les contours de sa problématique afin d’obtenir des informations juridiques ciblées. Ces questions peuvent inclure du contexte, tels des définitions ou des exemples, ainsi que des références à des décisions de justice pour guider l’outil dans ses réponses. L’atout majeur de cette méthodologie réside dans son émanation du milieu universitaire, ce qui lui confère une qualité d’analyse sans égale au regard de l’imprécision des réponses d’une intelligence artificielle générative, spécialement dans le domaine du droit2. Le JusticeBot ne fait cependant pas l’impasse sur les développements récents de l’IA, plus précisément dans sa forme de grand modèle de langage, sans toutefois lui déléguer la part réflexive de son raisonnement. Au contraire, l’outil l’apprivoise et le harnache afin d’augmenter ses

usages potentiels. À terme, il sera possible de faire converser plusieurs individus en conflit directement sur la plateforme en ligne qui proposera des suggestions afin d’améliorer la communication entre parties, puis la résolution du litige, à la manière d’un médiateur !

Des cas d’usage sans limites

Le JusticeBot s’adresse ainsi à une pluralité d’usagers : les utilisateurs désireux de chercher de l’information juridique adaptée à leur problématique, mais également les spécialistes de ces domaines juridiques dans la création de ces environnements de pensées. Grâce à sa polyvalence, tant sur le plan du processus de développement que de l’interaction avec le système, le JusticeBot devient accessible à un large éventail d’utilisateurs, y compris ceux qui n’ont pas de connaissances approfondies en technologie, pour s’insérer au cœur des débats entourant les conflits de basse intensité.

« À terme, il sera possible de faire converser plusieurs individus en conflit directement sur la plateforme en ligne [...] »

Cet outil technojuridique se propose ainsi comme un nouvel acteur de l’ordre extrajudiciaire, suivant la mouvance de l’ordre social dans lequel il s’incorpore, à la recherche de simplicité et de rapidité, sans perdre en précision juridique, dans la résolution de conflits3. Il peut également appuyer les politiques publiques en tant que vecteur de sensibilisation des citoyens et citoyennes à leurs droits et obligations. La première version accessible au public du JusticeBot, portant sur les litiges entre bailleurs et locataires, a par ailleurs été développée en collaboration avec le Tribunal administratif du logement. Dans la même optique, de nouvelles versions de l’outil sont en cours d’élaboration à la faveur de partenariats similaires avec les autorités administratives compétentes d’autres domaines juridiques.

Alors que l’interaction entre l’intelligence artificielle et le droit continue d’évoluer, l’approche poursuivie par le JusticeBot démontre le potentiel de transformation positive que peut apporter cette convergence, bénéficiant tant aux individus qu’à la société dans son ensemble. n

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https://justicebot.ca 2 Jonathan H. Choi et Daniel Schwarcz, AI assistance in legal analysis: An empirical study 16 août 2023, https://dx.doi.org/10.2139/ssrn.4539836 3 Guy Rocher, Traité de sociologie du droit et des ordres juridiques Éditions Thémis, Montréal, 2022, p. 331-332.
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Responsabilité civile relative aux systèmes d’IA

Un premier ouvrage québécois

Tant au Canada qu’à l’étranger, les législateurs semblent

être engagés dans une course contre la montre pour adopter un cadre législatif susceptible de baliser le développement de « systèmes d’intelligence artificielle ».

Mariève Lacroix

LL. B. 2001 et LL. M. 2005

Professeure

Faculté de droit Université d’Ottawa

Nicolas Vermeys

Professeur titulaire

Directeur du CRDP –Centre de recherche en droit public

l s’agit de « systèmes technologiques qui, de manière autonome ou partiellement autonome, traitent des données liées à l’activité humaine par l’utilisation d’algorithmes génétiques, de réseaux neuronaux, d’apprentissage automatique ou d’autres techniques pour générer du contenu, faire des prédictions ou des recommandations ou prendre des décisions1». S’il importe de se prononcer sur la nécessité et la pertinence d’adopter un tel cadre, force est d’admettre que cette législation arrivera trop tard pour un individu qui subit un préjudice découlant du mauvais (voire du bon) fonctionnement d’un système d’intelligence artificielle (IA) à l’heure actuelle.

Par voie de conséquence, lorsque l’on évalue les incidences juridiques de l’IA, il importe non pas uniquement de discuter du contenu d’un futur document législatif, mais également d’établir comment les tribunaux doivent aborder la question dans l’intervalle. Le droit tout comme la société ne peuvent attendre l’intervention du législateur.

offre en effet un traitement de la responsabilité civile eu égard au développement tentaculaire de l’IA . Se dégagent en filigrane des réflexions sur la qualification juridique de celle-ci, mais également sur l’identification des agents qui se logent derrière ses manifestations.

Pour ce faire, une programmation du sujet visant une définition de l’IA et une dénonciation des dangers inhérents aux discours anthropoformes sur l’IA sont présentées. S’ensuit une exploration du système (d’exploitation) de la responsabilité civile et de sa constance qui réside dans le préjudice. Sur cette base sont exécutés des réglages de la responsabilité civile.

Responsabilité. IA : du droit québécois de la responsabilité civile à l’égard de l’intelligence artificielle paru aux éditions Yvon Blais

C’est ce constat qui a poussé l’autrice et l’auteur du présent texte à rédiger l’ouvrage Responsabilité. IA : du droit québécois de la responsabilité civile à l’égard de l’intelligence artificielle. Ce livre, paru récemment aux Éditions Yvon Blais, esquisse le cadre juridique applicable aux systèmes d’IA , à leurs développeurs et à leurs utilisateurs. L’ouvrage

Premier du genre en droit québécois, cet ouvrage permet à la fois de proposer un cadre juridique contemporain et immédiat aux questions relatives à la responsabilité civile associée aux systèmes d’IA et de contribuer aux débats sur l’opportunité d’adopter de nouvelles dispositions législatives propres à ses diverses formes et à ses manifestations. n I

Le premier réglage porte sur la responsabilité civile de l’IA pour son fait personnel, comme sujet de droit. Il s’agit de sonder l’application de l’article 1457 du Code civil du Québec à l’IA et de discuter des concepts de « conscience », d’« intelligence » et d’« autonomie ». Le second réglage porte sur la responsabilité civile pour l’IA, comme objet de droit, en raison de son fait dommageable autonome et de son défaut de sécurité. La responsabilité pour le fait autonome d’un bien est prévue à l’article 1465 C.c.Q. et entraîne la responsabilité de la personne assurant la garde du bien. Les systèmes d’IA forcent toutefois à revisiter la notion de gardien : s’agit-il de l’usager du bien, du programmeur de l’algorithme, de son entraîneur ? La complexité de cet exercice d’identification milite-t-elle plutôt en faveur d’une approche misant sur le défaut de sécurité des systèmes d’IA, sur la base des articles 1468 et 1469 C.c.Q. ?

Nous concluons avec des propositions qui complètent l’analyse et ouvrent sur des trajectoires spéculatives du déploiement de l’IA , notamment eu égard à la création d’un nouveau régime étatique d’indemnisation.

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1 Projet de loi C-27, partie 3, art. 2.
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Intelligence artificielle et droit d’auteur Entre défis et potentialités

Les enjeux soulevés par l’intelligence artificielle (IA) sont multiples et couvrent divers secteurs, particulièrement depuis l’avènement de systèmes d’IA générative, tels que ChatGPT, Midjourney ou DALL-E.

Caroline Jonnaert

LL. B 2005, LL. M. 2008 et LL. D. 2023

Avocate, agente de marques et associée ROBIC

Par exemple, dans le milieu juridique, des enjeux tels que la prise de décisions automatisée, la discrimination ou la mauvaise gestion de renseignements personnels à l’aide des systèmes d’IA sont régulièrement abordés. Le domaine du droit d’auteur n’est toutefois pas en reste, puisque l’acte créatif, que l’on pensait jusqu’alors le propre de l’homme, est désormais concurrencé par la « machine ».

L’IA s’immisce de plus en plus dans le processus de création de contenus, certains y voyant un outil de recherche utile, voire une source d’inspiration intéressante. En effet, l’IA (générative) permet désormais de créer du contenu varié, tels que articles, des compositions musicales, des livres, des scénarios, des textes publicitaires, des peintures, des dessins ou encore des graphiques. Dès lors se pose la question suivante : ces productions sontelles protégeables par le droit d’auteur canadien ? En principe, le droit d’auteur (canadien) n’est déclenché que par une entreprise créatrice humaine, excluant ainsi la protection des productions « artificielles », créées de manière « autonome » par des machines. Mais à partir de quel seuil est-il possible de considérer qu’il y a une intervention humaine suffisante pour donner prise au droit d’auteur, particulièrement dans le contexte de l’IA ? Cette question complexe est le sujet de nombreux débats devant des juridictions du monde entier. Pour sa part, le Canada a récemment lancé une consultation publique afin de recueillir les

points de vue des différentes parties prenantes au sujet du développement et de l’utilisation de systèmes d’IA générative et de leurs incidences en matière de droit d’auteur canadien.

La consultation publique canadienne est large et couvre plusieurs enjeux soulevés par l’IA en droit d’auteur. En outre, l’initiative vise à recueillir des commentaires au sujet : i) de la protection des créations algorithmiques; ii) de la violation potentielle de droits d’auteur, notamment lorsque la production « artificielle » reprend un style artistique préexistant. La consultation aborde également la délicate question de l’entraînement des systèmes d’IA, lorsque celui-ci implique la reproduction et l’analyse de contenus protégés par le droit d’auteur (par exemple, des textes littéraires, des photographies, des scénarios, des compositions musicales, voire des prestations artistiques). Louable, l’initiative met en lumière la réelle difficulté de préserver l’équilibre délicat que tente de sous-tendre le droit d’auteur canadien entre les droits, d’une part, des créateurs et créatrices et, d’autre part, des utilisateurs et utilisatrices, particulièrement dans un contexte où le Canada souhaite se positionner comme chef de file mondial en IA.

En bref, le droit d’auteur constitue l’un des domaines juridiques où l’enjeu de l'expansion et de l’utilisation de l’IA s’accroît et se complexifie. Au vu de ces développements, il est vraisemblable que les questions liées à l’intelligence artificielle dans le domaine de la création devront être clarifiées par le législateur ou les tribunaux canadiens à plus ou moins long terme. n

« L’IA s’immisce de plus en plus dans le processus de création de contenus, certains y voyant un outil de recherche utile, voire une source d’inspiration intéressante. »
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L’intelligence artificielle et la prof de droit d’auteur

L’intelligence artificielle (IA) bouscule-t-elle la vie d’une prof de droit d’auteur? Je suis tentée de répondre : pas vraiment. Or, le climat autour de cette révolution technologique pourrait faire croire que nous sommes devant un tout nouveau phénomène.

Pourtant, en ce qui concerne le droit d’auteur, les défis que pose cette technologie ne sont pas aussi étrangers à notre mode de fonctionnement habituel que l’on pourrait croire.

Les questionnements au sujet du droit d’auteur et de l’IA se posent surtout à deux étapes cruciales de la création : en amont, au moment où on « nourrit » l’algorithme, et en aval, lorsqu’on est en mesure d’identifier l’œuvre qui a été produite grâce à la combinaison de l’algorithme avec ce qui l’a nourri. C’est cette dernière situation qui retient particulièrement l’attention du public.

Une image au cœur d’un litige Prenons l’exemple de l’image ci-contre qui a beaucoup fait parler d’elle. L’auteur de l’algorithme qui l’a produite a tenté à deux reprises de la faire enregistrer au Copyright Office des États-Unis et s’est chaque fois buté à un refus. Il est allé devant les tribunaux pour faire annuler ces décisions et, encore une fois, il a échoué. Quelle est la raison de cette résistance ? L’image n’a pas été créée par une personne humaine. Certes, son « auteur » a préparé ce qu’il lui fallait pour que

l’appareil la produise, mais il ne contrôlait pas personnellement l’agencement de ses formes et de ses couleurs comme un peintre détermine l’emplacement des éléments de son œuvre, son tracé, ses couleurs, sa texture, etc.

La Constitution américaine accorde au Congrès le pouvoir de légiférer pour la protection des « auteurs et inventeurs » pour leurs œuvres et « découvertes ». L’opinion dominante actuelle veut que cette clause implique l’existence d’une personne physique pour reconnaître la protection. Nous n’avons pas au Canada de clause constitutionnelle semblable, mais ce serait assez surprenant que nos tribunaux n’emboîtent pas le pas à cette interprétation qui se répand aussi ailleurs.

Derrière une telle interprétation se cachent plusieurs enjeux. L’absence de protection signifie que n’importe qui peut utiliser ces « œuvres » sans demander d’autorisation ni payer quoi que ce soit. On dit alors que l’« œuvre » en question est libre de droits. Est-ce bien ce que l’on veut ? Serait-il opportun d’intervenir pour déclarer que le droit d’auteur s’applique ou faudrait-il envisager un autre type de protection ? Quelle serait-elle ? Qui serait alors protégé : des personnes physiques ou l’algorithme ? Quelle solution est la plus jouable ? la plus souhaitable ? À qui revient-il de décider ?

Chaque fois qu’une nouvelle technologie est apparue, les mêmes questions se sont posées. Il faut continuer à réfléchir en prenant acte des diverses opinions et des courants de pensée. La prudence est de mise, car, contrairement à l’apparition de la photographie, de la radio ou du cinéma, celle de l’IA a des dimensions sociales qui semblent aujourd’hui très lourdes de conséquences. La nécessité de cohérence avec d’autres domaines juridiques prend aussi une plus grande ampleur. n

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Ysolde Gendreau Professeure titulaire
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A Recent Entrance to Paradise (2018), une œuvre que Stephen Thaler a tenté à deux reprises, sans succès, de faire enregistrer au Copyright Office des États-Unis.

Consommation de produits et services financiers Bénéfices

et algorithmique pose pour la protection des consommateurs québécois.

et

risques de l’ IA

La transformation numérique s’accélère dans l’industrie des services financiers et entraîne dans son sillage des changements majeurs dans les processus de nombreuses entreprises par l’adoption des innovations technologiques, comme l’analytique avancée et l’intelligence artificielle (IA).

Selon la plus récente étude canadienne DAIS-TMU1, réalisée avec la collaboration du Conseil de l’innovation du Québec, le domaine des finances et assurances est le troisième secteur industriel au sein duquel l’adoption de l’ IA est la plus rapide au Canada. Cette technologie disruptive transforme et accroît la gamme de produits et de services financiers offerts, mais bouleverse également les interactions entre les intervenants du secteur financier et les consommateurs.

Kim Lachapelle LL. B. 1991

MBA, ASC Vice-présidente stratégie, risques et performance

Autorité des marchés financiers

Les consommateurs, qui se considèrent plus que jamais comme étant autonomes dans la gestion de leurs finances personnelles, bénéficient d’une offre élargie et personnalisée rendue possible par l’accumulation de données sur leur profil et leurs habitudes de consommation. Dans ce contexte, l’ IA renforce ces changements profonds dans les comportements et révolutionne le domaine de l’investissement grâce à ses capacités avancées en analyse de données et en prise de décision. Selon les dernières données fournies, il appert également que la majorité des consommateurs québécois se disent confiants à l’égard des technologies basées sur l’ IA en tant qu’outil d’aide à l’investissement dans le but, par exemple, d’optimiser les performances ou encore de réduire des biais émotionnels2 .

Cette profonde transformation, bien qu’elle procure des bénéfices tangibles, fait toutefois émerger des enjeux importants. De manière générale, l’ IA semble encore mal comprise. Les principales préoccupations touchent notamment le manque de transparence, mais aussi le volet de la sécurité des données ou encore des biais algorithmiques, qui peuvent accroître la vulnérabilité de nombreux consommateurs. L’Autorité des marchés financiers (« l’Autorité ») se penche déjà depuis quelques années sur ces défis afin de nourrir une importante réflexion sur les risques que ce nouvel environnement numérique

L’Autorité a publié en 2021 un rapport intitulé L’intelligence artificielle en finance : recommandations pour une utilisation responsable 3 , avec la contribution de l’Algora Lab de l’Université de Montréal ainsi que d’autres partenaires, afin d’analyser les risques et les défis éthiques liés à l’utilisation de l’ IA en finance. Dix recommandations clés ont été émises afin de proposer des pistes de solution à ces enjeux émergents, avec l’objectif de mettre en œuvre, avec toutes les parties prenantes, des normes favorisant à la fois l’innovation et la protection des consommateurs.

Ces recommandations ont ouvert la voie à une deuxième publication. En effet, l’Autorité des marchés financiers a publié en février 2024 un document de réflexion et de discussion intitulé Meilleures pratiques pour l’utilisation responsable de l’ IA dans le secteur financier4, afin d’engager un dialogue ouvert sur les opportunités et impacts associés à l’utilisation de l’ IA par l’industrie. Dans ce document, l’Autorité présente 30 meilleures pratiques pour l’utilisation responsable de l’ IA , cohérentes avec les recommandations du rapport précédent et qui touchent la protection des consommateurs, la transparence envers les consommateurs et le public, la pertinence des systèmes d’IA, l’encadrement de la conception et de l’utilisation de l’IA et la gestion des risques liés à l’IA. Alors que le développement et l’implantation de systèmes d’ IA s’accélèrent, l’intérêt de l’Autorité s’inscrit dans un contexte plus global d’initiatives engagées en vue de leur encadrement dans l’industrie financière, et ce, aux niveaux national et international.

Cet enjeu a été rappelé par l’Autorité dans un rapport de réflexion intitulé Perspectives sur les risques et bénéfices des services financiers numériques pour les consommateurs 5, réalisé en collaboration avec Maya Cachecho, professeure à la Faculté de droit de l’UdeM et Sandrine PromTep, professeure au Département de marketing, École des sciences de la gestion, UQÀM. Ce rapport traite de la transformation technologique qui apporte des avantages aux consommateurs, mais qui les expose également à de nouveaux risques. Parmi les risques traités figure l’utilisation de l’ IA , et notamment les enjeux entourant la propriété des données dans les services financiers numériques.

En effet, le rapport expose le fait que la réalité numérique est marquée par la production et l’accumulation massives de données, ainsi que par l’utilisation des technologies de l’ IA qui traitent ces données de manière automatisée. À ce sujet, la question de la responsabilité des fournisseurs

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Maya Cachecho Professeure adjointe
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« Cette profonde transformation, bien qu’elle procure des bénéfices tangibles, fait toutefois émerger des enjeux importants. De manière générale, l’IA semble encore mal comprise. »

de services financiers numériques devient d’une importance cruciale. Jusqu’à présent, les gouvernements et les autorités de réglementation se sont principalement concentrés sur la responsabilité des entreprises quant à la collecte et à l’utilisation de ces données. Toutefois, de nombreux acteurs se demandent qui en est réellement le propriétaire ultime. En effet, le changement de paradigme concernant la portabilité des données soulève de nouvelles questions sur l’identité des propriétaires ultimes des données collectées. Plus spécifiquement : à qui appartiennent les données générées par les objets connectés utilisés par un consommateur ? D’autres questions surgissent sur la véritable valeur créée à partir des données collectées. Quels acteurs doivent être considérés comme cocréateurs de la chaîne de valeur associée à ces données ? Comment devraient-ils être rémunérés pour leurs services ?

1 Adoption de l’IA : sortie de l’étude canadienne DAIS-TMU | CIQ (conseilinnovation.quebec).

2 58,2 % des Québécois font déjà confiance à l’IA pour investir (hellosafe.ca).

Le consommateur devrait-il avoir le contrôle total sur ses données ? Peut-il réellement exercer ce contrôle ?

D’un autre côté, l’arrivée récente de Chat GPT pousse la réflexion encore plus loin et en amène plusieurs à réclamer un encadrement juridique adéquat en matière financière. À ce sujet se pose aussi la question du risque, notamment dans le cadre de décisions prises par les consommateurs financiers sur la base des systèmes automatisés. En effet, l’agrégation de données provenant de sources diverses, dont l’origine n’est pas toujours fiable, peut être utilisée pour construire des profils de risque et des analyses financières prédictives non adaptés aux besoins des consommateurs. Ce type d’agrégation peut conduire à un risque bien réel, voire à des formes de conseils financiers hors de la portée des régulateurs.

L’évolution de l’intelligence artificielle vers des systèmes encore plus avancés suscite, à moyen et long terme, des questions fondamentales quant à son encadrement6. Cela met en évidence la nécessité d’une surveillance continue de ce phénomène en constante évolution. n

3 AMF, L’intelligence artificielle en finance recommandations pour une utilisation responsable 22 novembre 2021, https://www.quebec.ca/nouvelles/actualites/details/ lautorite-devoile-un-rapport-important-sur-lutilisation-responsable-de-lintelligence-artificielle-en-finance-36369 4 AMF Document de réflexion et de discussion Meilleures pratiques pour l’utilisation responsable de l’IA dans le secteur financier 5 février 2024 lautorite.qc.ca/fileadmin/lautorite/grand_public/publications/professionnels/tous-les-pros/IA_DocumentReflexion_MeilleuresPratiques2024.pdf

5 AMF, Document de réflexion – Perspectives sur les risques et bénéfices des services financiers numériques pour les consommateurs 22 novembre 2022 : https://lautorite.qc.ca/fileadmin/ lautorite/grand_public/publications/professionnels/doc-reflexion-consos-tech_fr.pdf

6 Commission du droit de l’Ontario, LCO Issue Paper – Regulating IA: Critical Issues and Choices, Toronto, LCO/CDO, avril 2021.

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Entre risques et potentialités

Les systèmes d’IA et le travail professionnel

Les systèmes d’intelligence artificielle (IA) font régulièrement la une ces jours-ci et les grands titres mentionnent souvent les nombreux risques qu’ils engendrent.

Les risques soulevés sont d’une envergure hautement variable. Certains semblent catastrophiques, d’un ordre entièrement différent de ceux qui ont accompagné les multiples autres progrès technologiques marquants du XX e siècle. D’autres semblent plus anodins, du même ordre que les risques « normaux » qui accompagnent toute avancée technologique. Dans tous les cas, l’éventail des risques est très large, car ceux-ci surgissent dans presque tous les secteurs de la société.

Le travail professionnel est un secteur posant un intérêt névralgique. Dans les années à venir, les professionnels et professionnelles vont de plus en plus incorporer les systèmes d’ IA dans l’accomplissement de leurs tâches quotidiennes. Cela soulève toutes sortes de questions, en matière tant de formation des professionnels et professionnelles en devenir que de réglementation pour ceux et celles qui sont en exercice. À cet égard, deux exemples sont révélateurs. D’abord, certaines études suggèrent que Chat GPT est capable de réussir les examens obligatoires pour l’admission aux ordres professionnels de certaines juridictions. Il y a aussi le cas d’un avocat américain qui a rédigé un acte de procédure avec Chat GPT pour ensuite apprendre, après avoir déposé l’acte au tribunal, que ledit robot avait inventé la jurisprudence qui y figurait.

Il y a donc matière à s’interroger sur la formation des professionnelles et professionnels en lien avec les systèmes d’ IA , pour qu’ils puissent non seulement éviter d’être dépassés, mais aussi incorporer ces outils à leur pratique de manière

responsable et améliorer la qualité de leurs services.

Dans cette perspective, il y a lieu de songer à trois risques fondamentaux liés à l’incorporation de systèmes d’ IA aux pratiques professionnelles. Premièrement, il y a le risque de sous-utilisation de systèmes performants. Les professionnels et professionnelles qui ne comprennent pas les capacités d’un système et leur façon d’améliorer leur travail risquent de ne pas l’utiliser à son plein potentiel. Cette sous-utilisation peut réduire l’efficacité et la qualité du travail professionnel. Deuxièmement, il y a le risque contraire : la surutilisation de systèmes inadéquats ou inefficaces. Enfin, le troisième risque consiste à mal utiliser un système qui, quoique performant pour un type de tâche, ne l’est pas pour un autre. Les deux derniers risques sont similaires en ce qu’ils surviennent lorsque les professionnels et professionnelles ne comprennent pas les limites ou les lacunes d’un système et s’en servent de manière inappropriée. Cela peut conduire à de graves erreurs susceptibles de miner la sécurité de la clientèle et du public ainsi que la confiance du public envers le travail professionnel (déjà mis à mal dans certains cas).

Ainsi, dans les années à venir, les professionnels et professionnelles devront développer leur compréhension des capacités spécifiques de chaque système d’IA qui leur est proposé ou vendu. Ils devront procéder à une évaluation minutieuse de la pertinence de chaque système en lien avec leurs tâches quotidiennes. Cela sera important non seulement dans une perspective négative – éviter des problèmes – mais aussi dans une perspective positive : saisir les opportunités qu’offriront les systèmes d’IA pour développer des services novateurs et de meilleure qualité.

Pour ce faire, les professionnelles et professionnels ne pourront pas jouer à l’autruche :

« Il y a aussi le cas d’un avocat américain qui a rédigé un acte de procédure avec ChatGPT pour ensuite apprendre, après avoir déposé l’acte au tribunal, que ledit robot avait inventé la jurisprudence qui y figurait. »
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ils devront apprendre comment les systèmes d’ IA fonctionnent. L’objectif ici n’est évidemment pas de développer des compétences en programmation informatique (quoique cela risque de devenir de plus en plus fréquent et prisé comme compétence). Il s’agit plutôt de mettre les systèmes d’ IA « à leur place » en les situant par rapport aux autres outils avec lesquels les professionnelles et professionnels sont déjà familiers. Cela implique, entre autres, de résister à la tentation de percevoir ces systèmes comme étant des boîtes noires capables d’accomplir « par magie » des tâches jusqu’à présent réservées aux êtres humains ou comme possédant des formes d’intelligence analogues à l’intelligence humaine.

Il est plus utile de les percevoir comme des ensembles de techniques informatiques qui manipulent l’information de diverses manières. Pour utiliser efficacement ces systèmes, les professionnels et professionnelles devront comprendre les rudiments fondamentaux de ces techniques.

Historiquement, les professionnelles et professionnels ont souvent été les gardiens d’informations peu accessibles au grand public. Leur rôle était de trier, d’organiser et d’évaluer les informations accessibles et de les déployer au service de leur clientèle. Les systèmes d’ IA remettent ce rôle en question, car ils peuvent accomplir certaines de ces tâches informationnelles à une vitesse et avec une exhaustivité bien supérieures, rendant ainsi l’information utile et pertinente beaucoup plus accessible sans que le public ait à passer par les « gardiens » traditionnels que sont les professionnels et professionnelles.

L’avenir appartiendra donc à ceux et celles qui saisissent le fonctionnement des systèmes d’ IA . Celles et ceux qui pourront bonifier le potentiel transformateur de ces systèmes, situer la valeur ajoutée distinctive qu’ils peuvent apporter à leur clientèle et se concentrer sur la « touche humaine » qui demeure hors de portée de ces systèmes, tout en évitant les trois risques susmentionnés. n

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Vue aérienne de Apple Park, siège social de la compagnie Apple Inc., dans Silicon Valley

Plateformes numériques

Zone de turbulences

Les grands événements des dernières années – montée des populismes, bouleversements socioéconomiques liés à la pandémie – ont révélé les faces cachées des activités des géants du numérique.

Professeur titulaire Vice-doyen administration, développement et qualité des programmes

Alors qu’Apple, Alphabet (Google), Amazon et Meta (Facebook, Instagram et Threads) avaient bénéficié de la bienveillance des autorités publiques depuis les années 1990, le vent a désormais tourné. Ainsi que le constatait un comité de la Chambre des représentants américaine en 2020, « les jeunes pousses sauvages qui jadis remettaient le statu quo en question sont devenues des monopoles comme nous n’en avons plus vu depuis l’ère des magnats du pétrole et du chemin de fer ».

Aux États-Unis, étant donné l’incapacité du Congrès à agir, c’est un droit de la concurrence (antitrust) revigoré qui sert de vecteur. C’est ainsi que les grands procès s’accumulent depuis 2020, alors que de nouvelles hypothèses ébranlent les idées reçues. La mainmise d’Alphabet sur les moteurs de recherche découle-t-elle seulement de la supériorité de Google ou s’appuie-t-elle sur des pratiques visant à empêcher des concurrents d’accéder au marché ? Le contrôle serré d’Apple sur son écosystème de produits est-il justifié par des raisons de performance technique ou a-t-il pour effet de permettre à Apple de confisquer les profits des tiers ? Est-ce qu’Amazon est non seulement la « boutique à tout vendre » mais aussi une machine à exploiter les vendeurs et les clients qui l’utilisent ? Les acquisitions d’Instagram et de WhatsApp visaient-elles à améliorer la gamme de produits de Meta ou plutôt à s’approprier des entreprises qui auraient pu finir par mettre Meta en touche ? Des réponses sont attendues en 2024, mais malgré l’élan retrouvé des autorités de concurrence, il faut compter avec le conservatisme des tribunaux américains en la matière.

L’Union européenne (UE), de son côté, a toujours appliqué le droit de la concurrence aux géants du numérique de manière plus soutenue. C’est l’expérience que la Commission européenne a ainsi accumulée, avec son lot d’embûches et de retards, qui a poussé l’UE à adopter le Règlement 2022/1925 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique (« DMA » pour Direct Memory Access). Court-circuitant le droit de la concurrence, le DMA impose directement une série d’obligations aux contrôleurs d’accès sur certains services de plateforme essentiels, soit Alphabet, Amazon, Apple, Meta, Microsoft et ByteDance, selon les déterminations de la Commission. Ces obligations visent à améliorer la position des entreprises tierces qui essaient de faire concurrence à ces services de plateforme ou bien les utilisent pour mener leurs affaires. Toutes ces obligations doivent encore être mises en pratique et 2024 sera une année charnière à cet égard.

Au Canada, le gouvernement fédéral a pu mesurer l’ampleur de la tâche lorsqu’il a tenté de contraindre Meta et Google (Alphabet) d’effectuer des transferts financiers au profit des médias canadiens à travers la Loi sur les nouvelles en ligne (C-18). Alors que Meta a opposé un refus pur et simple et retiré le contenu des médias canadiens de ses plateformes, Google s’est montré disposé à discuter : toutefois, le gouvernement fédéral n’a pas eu d’autre choix que de mettre de l’eau dans son vin et de se rendre aux exigences de Google quant à l’application de la Loi, afin d’éviter un échec total.

À terme, il paraît donc difficile d’envisager que les grandes plateformes numériques changent leurs pratiques sans qu’elles soient parties prenantes de l’exercice. Qui plus est, alors que les premiers cadres législatifs entourant l’intelligence artificielle émergent dans l’ UE et ailleurs, la collaboration de ces grandes plateformes, qui sont au cœur des avancées en IA, n’en sera que plus nécessaire que plus nécessaire à leur propre régulation.. Cela rejoint une question fondamentale en matière de gouvernance économique, qui ne manquera pas d’occuper les chercheurs et chercheuses de la Faculté de droit dans les prochaines années. n

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Intelligence artificielle et droit des contrats Perspectives de renouveau de la réflexion juridique?

L’expression « intelligence artificielle » (IA) et tout le champ lexical qui gravite dans son orbite progressent parés des atours de la nouveauté.

Si le caractère novateur des technologies qui supportent les innovations que recouvre ce vocable d’ IA paraît incontestable, leur appréhension dans le monde juridique reste pour l’heure très largement inféodée à une approche empreinte de classicisme, de sorte que l’avènement d’un droit de l’ IA ne se matérialise pas véritablement. En revanche, ces technologies n’en demeurent pas moins porteuses d’interrogations qui semblent a priori bousculer le discours juridique.

En matière contractuelle, les premiers remous se sont peut-être fait sentir avec l’irruption dans le champ du droit des soi-disant contrats intelligents. Or, au-delà de la nouveauté, on perçoit facilement que le potentiel perturbateur pour l’ordre juridique de ces techniques est relativement faible. En effet, il s’agit en réalité de simples opérations de mise en œuvre automatisées d’obligations résultant de contrats par ailleurs très classiques. Ainsi, les contrats intelligents, s’ils offrent peut-être certains gains d’efficacité de nature économique, ne semblent pas de nature à nourrir la réflexion juridique.

La question serait plus sensible à l’égard de technologies qui permettent de conclure des contrats sans interventions humaines dans le processus de formation. À ce propos, la difficulté ne vient pas véritablement de l’hypothèse fantaisiste d’un contrat conclu entre machines, puisque le but ultime de ces technologies est toujours de faire en sorte que des personnes soient débitrices et créancières d’un contrat. Le problème viendrait en revanche d’un processus de formation qui exclut l’expression directe de la volonté des personnes qui se trouvent ainsi engagées et qui peut-être ignorent l’existence même du contrat. On objectera sûrement ici la présence ancienne dans notre droit des mécanismes de représentations dans la formation des contrats, notamment dans les opérations mettant en cause des personnes morales. Pourtant, il semble délicat de nier que la figure du contrat formé de manière autonome par des systèmes informatiques appelle une réflexion sur l’appréhension par le droit de la volonté contractuelle des parties. Or, la question, pour être importante, là encore n’est pas totalement nouvelle et rejoint assez largement le questionnement contemporain sur la place de cette volonté dans la formation des contrats.

Les problématiques qui naissent des contrats intelligents et des contrats formés automatiquement ne sont assurément pas les seules qui se poseront avec le développement de l’intelligence artificielle. Il reste rassurant de constater que, en matière contractuelle au moins, les innovations technologiques fleurissent sur un terreau déjà riche de réflexions propres à faciliter une appréhension sereine des enjeux qu’elles peuvent éventuellement soulever. n

« [...] ces technologies n’en demeurent pas moins porteuses d’interrogations qui semblent a priori bousculer le discours juridique. »
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IA et modélisation prédictive en finance
Une aide à la prise de décision de plus en plus importante

S’il y a un mot à retenir quand on parle d’intelligence artificielle, ci-après IA, c’est rapidité. Cette nouvelle (mais pas si nouvelle) technologie connait une évolution excessivement rapide.

LL. B. 1996

Directrice principale Affaires juridiques

Dérivés et Marchés

Financiers

Caisse de dépôt et placement du Québec

On anticipe que les revenus associés à l’IA augmenteront en moyenne de 19,6 % chaque année et qu’ils s’élèveront à 500 milliards de dollars US en 20231

Or, de toutes les applications potentielles de l’IA en finance, telles que la cybersécurité, la reconnaissance vocale et d’images, le traitement de documents, les conversations, la détection d’anomalie et la modélisation prédictive, de loin la plus attrayante. Il s’agit d’utiliser plusieurs types de données pour prédire des résultats futurs avec une très grande précision. La prise de décision devient alors plus efficace et basée sur les données.

Toutes ces applications sont bénéfiques et souhaitables, mais là où le bât blesse, c’est le poids que l’on donnera à ses résultats et la responsabilité face aux décisions prises en se basant sur l’IA

Ma collégienne me racontait une anecdote sur une amie qui avait utilisé ChatGPT (une IA générative très populaire actuellement) pour sa présentation sur un livre qu’elle n’avait pas lu et l’assurance avec laquelle elle s’était fiée à l’IA qui avait, en fait, résumé un livre différent de celui qui était demandé ! L’histoire m’a bien fait rire, mais elle met en lumière le point que je veux soulever ici : les réponses de l’IA seront prises

Ce que permet les applications courantes de l’IA en finance n Réduire le risque d’erreurs n Détecter les fraudes n Prédire les besoins futurs de la clientèle n Anticiper les mouvements de marché

Possibilités futures n Prendre des décisions d’investissement n Développer des produits n Résoudre des problèmes complexes, comme augmenter la productivité et la rentabilité en fonction des contraintes exprimées

comme paroles d’évangile alors que, dans le meilleur des cas, du moins pour l’instant, les modèles prédictifs les plus performants avoisinent un taux d’exactitude de 60 %. Qui sera responsable de l’écart ?

Aussi, ces modèles supposent une analyse d’une quantité phénoménale de données : de marché, de portefeuille et de données confidentielles. Or, bien que la protection des données existe pour la divulgation et l’utilisation, les langages de protection actuels sont-ils assez clairs pour protéger l’usage dans un algorithme supporté par l’IA ? Est-on informé des données utilisées et nous concernant ? Peut-on refuser ? Comment s’assurer que ce droit de refus puisse être pleinement exercé si on ignore qui utilise quelle donnée ? Comme l’IA est apprenante, comment contrôler ce à quoi elle accède ? Comment s’y prendra-t-on si dans 5, 10 ou 20 ans on veut empêcher l’utilisation de ces données ? Je crois que l’IA va mener à une redéfinition de ce qu’est une information confidentielle et repousser les frontières de l’utilisation des données, qu’elle soit ou non confidentielle.

Le point éthique qui m’interpelle à ce stade-ci concerne l’autonomie et l’intégrité qu’auront les décideurs pour se fier ou non aux conclusions de l’IA S’ils s’en détachent et commettent une erreur, que se passe-t-il ? S’ils s’y collent religieusement et que l’IA se trompe, jusqu’où ira leur responsabilité ? Les codes d’éthique organisationnels devront tenir compte de cette nouvelle réalité. Quant aux exigences à l’embauche et à l’évaluation de la performance, elles seront à redéfinir dans les organisations à la lumière de cette nouvelle réalité technologique.

Les quatre grandes puissances qui dominent ce secteur – l’Union européenne, les États-Unis, la Chine et la Grande-Bretagne – sont en processus d’établissement de leurs règles respectives. Que ce soit sous l’angle de la gestion des risques, de la discrimination algorithmique, de l’utilisation de mauvaises données ou des règles de gouvernances de l’IA, l’objectif demeure le même : la protection du consommateur.

Par ailleurs, pour s’assurer du respect de ces encadrements, il faudra que les instances de surveillance mettent elles-mêmes l’IA à profit. C’est un débat en soi qui pourrait être abordé dans un autre article. n

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1 Holistic AI, The state of global AI regulation in 2023, [livre numérique], holisticai.com, 2023, p. 2. https://uploads-ssl.webflow.com/6305e5d52c28356b4fe71bac/64356aa81ecc5f03d47d9310_Holistic-AI-E-Book-AI-Regulation-in-2023-Compressed.pdf
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L’IA, instrument subversif de transformation du système de justice pénale

Entre promesse d’une justice vertueuse et adhésion du public

Les instruments d’intelligence artificielle (IA) semblent aujourd’hui parfaitement magnifier la maxime de Thomas Hobbes selon laquelle il n’y a « pas de liberté véritable sans sécurité ».

Chargé de cours

Ces dernières années, le système de justice pénale est manifestement prêt à payer le prix de cette sécurité en optant pour une stratégie bien définie : s’appuyer sur l’IA afin d’éradiquer le risque sous toutes ses formes. Qu’elle soit liée à l’anticipation des comportements criminels ou encore au renforcement de la prédictibilité des décisions de justice, cette nouvelle obsession contribue à redéfinir les contours de notre droit criminel. La prévention du risque est donc devenue une sorte de talisman qui a permis progressivement à l’IA de se voir ouvrir toutes les portes de notre système de justice pénale. Que ce soit sur le plan procédural, en matière de jugement ou en ce qui concerne les instruments d’enquête et de lutte contre la criminalité, rien n’échappe aux ambitions tentaculaires de l’ensemble des acteurs qui souhaitent faire de la justice pénale le terrain de jeu favori de ces instruments censés constituer un tremplin vers le futur.

« C’est un peu comme si l’usage par le système de justice pénale des instruments d’IA était devenu pour lui un gage de survie, une promesse pour un système normatif plus vertueux. »

C’est un peu comme si l’usage par le système de justice pénale des instruments d’IA était devenu pour lui un gage de survie, une promesse pour un système normatif plus vertueux. Les outils d’IA constituent donc le bras armé d’un réel changement, mais aussi la vitrine du virage postmoderne pris par le système de justice pénale ces dernières années. À certains égards, il s’agit d’une nouvelle forme d’incarnation du système de justice pénale, et ce, dans toutes ses strates d’activités.

De Montréal à Vancouver, en passant par Toronto ou Edmonton, les outils policiers d’ IA peuvent non seulement prédire la survenance du crime, mais aussi faire office d’instruments d’anticipation des préjudices potentiels que pourraient subir certaines victimes. On pensera notamment au ciblage des zones géographiques criminogènes ou encore au repérage de potentielles victimes pouvant faire l’objet de trafics ou d’abus sur Internet. Sur le plan judiciaire, les données ont également considérablement changé. De nombreux travaux sont en cours en matière de justice prédictive, notamment en ce qui concerne la prise de décision dans un procès pénal, la détermination de la peine ou encore les processus de libération conditionnelle. Cependant, l’ensemble de ces outils défraient la chronique en ce qu’ils matérialisent l’avènement d’une nouvelle ère. Ils constituent les instruments subversifs d’un changement aussi bien juridique que sociétal. Si la question de leur utilisation et de leur compatibilité avec la charte des droits et libertés se pose déjà au regard des concepts de vie privée ou de procès équitable, c’est surtout l’adhésion éventuelle du public à une telle métamorphose qui suscite des questionnements. En effet, sur l’échiquier de cette nouvelle politique pénale, où peut-on placer les justiciables ? Cette forme de justice par procuration statistique interpelle de nombreux citoyens et citoyennes, surtout depuis le scandale Clearview qui a soulevé un tollé au sein du public. C’est donc une véritable reconfiguration du contrat social qui se déploie sous nos yeux, car avec l’ IA comme fer de lance, le système de justice pénale ne sera plus jamais le même.

La peur du vide liée à une dénaturation de l’esprit de la Charte et le manque de transparence de certains outils favorisant les phénomènes de biais ou de distorsions nous interpellent, voire nous inquiètent. Ainsi, au-delà de toutes considérations technologiques, c’est bien de confiance et de repères éthico-juridiques dont le public a besoin. Une forme de thérapie normative indispensable pour favoriser l’adhésion du public à cette justice de demain. Il s’agit là d’une démarche incrémentale qui renforcerait la confiance de la population et rappellerait que la norme doit être le fruit d’une véritable délibération collective. En ce sens, il sera intéressant de voir si le projet de loi C-27 relatif à la Loi sur l’intelligence artificielle et les données (LIAD) saura nous livrer de précieux enseignements. n

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Mieux utiliser l’intelligence artificielle Faire face aux défis énergétiques de demain

En raison de la lutte contre les changements climatiques, le secteur de l’énergie connaît une transition majeure qui se manifeste notamment par l’évolution des habitudes de consommation et l’accès à une panoplie de nouvelles technologies.

Vice-président Affaires corporatives, juridiques et réglementaires

Chef de la gouvernance Hydro-Québec

Or, l’innovation est l’une des quatre valeurs fondamentales d’Hydro-Québec et y avoir recours est un réflexe bien établi dans l’entreprise. Des défis colossaux sollicitent plus que jamais notre inventivité et notre capacité à imaginer demain pour proposer des solutions technologiques et énergétiques porteuses. Ces défis, nous saurons les relever.

Afin d’être en mesure de continuer à bien accomplir notre mission au cours des prochaines décennies, nous nous devons d’adopter une approche proactive pour faire évoluer notre réseau de manière à répondre aux besoins découlant de la transition énergétique. C’est en innovant et en repensant la conception et l’exploitation de notre réseau que nous parviendrons à répondre à la demande croissante pour notre énergie propre ainsi qu’aux nouvelles attentes de notre clientèle.

L’innovation stimule d’ambitieux projets aux quatre coins de l’entreprise, dont deux sont particulièrement d’actualité et utilisent différents aspects de l’intelligence artificielle (IA). D’abord, le défi quotidien d’Hydro-Québec est d’équilibrer la production et la demande d’électricité. Prévoir la demande est donc essentiel à nos activités, mais n’est certainement pas simple. Nous utilisons donc les avancées technologiques en IA et en traitement de données massives pour améliorer la prévision de la demande et, ainsi, mieux faire face aux changements de comportement du réseau et aux impacts de la transition énergétique.

Depuis 2019, nous travail lons au développement de différents modèles d’ IA pour soutenir les équipes respon sables de la prévision de la demande, autant sur le territoire québécois que dans les réseaux voisins. Une fois déployés, ces modèles permettront des prévisions plus précises, engendrant des gains en ce qui a trait à la fiabilité du réseau et une augmentation des bénéfices en raison de l’optimisation de nos transactions énergétiques.

Ensuite, nos équipes ont développé un outil de diagnostic thermographique en temps réel pour les travaux souterrains touchant le réseau de distribution. Le traitement des images thermographiques permet de caractériser ou de catégoriser automatiquement les échauffements selon le composant. Cet outil aide les équipes sur le terrain à mener des inspections thermiques sûres et efficaces des lignes souterraines. Nous faisons donc des gains non seulement au chapitre de l’efficacité des travaux, mais aussi et de manière prioritaire en matière de sécurité du personnel.

Si Hydro-Québec réalise une panoplie de projets innovants au sein d’Hydro-Québec, sa filiale Hilo, elle, se démarque dans l’utilisation des outils intelligents afin d’améliorer l’efficacité énergétique. Agissant comme la première centrale virtuelle du Québec en orchestrant les demandes d’énergie de la clientèle afin de fournir l’électricité nécessaire pour répondre aux besoins du réseau, elle est fondée sur une innovation importante qui permettra d’accélérer la transition énergétique du Québec. L’innovation est dans notre ADN depuis plus de 75 ans et nous continuerons de tabler là-dessus pour relever les défis qui nous attendent à l’avenir. n

« Des défis colossaux sollicitent plus que jamais notre inventivité [...] »
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Survol de l’évolution de la gouvernance des organisations Face à l’IA, quelle solution ?

La gouvernance des organisations est un concept qui a pris de l’importance au cours des dernières décennies.

Gilles de Saint-Exupéry

LL. M. 2012

Avocat superviseur de la Clinique juridique en démarrage d’entreprise de l’UdeM

Avocat Lexstart

Véronique Guèvremont

Professeure

Faculté de droit de l’Université Laval

Codirectrice scientifique

Innovation et implications sociétales d’ IVADO

Apparue dans les années 70, principalement pour les sociétés cotées en bourse, puis mise au goût du jour après des affaires comme Enron (2001) ou Nortel (2003), la gouvernance a pour objectif initial « de veiller à ce que les membres de la direction gèrent les finances de l’entreprise de manière efficace et qu’ils agissent toujours dans l’intérêt primordial des parties prenantes »1 .

Aujourd’hui, ce concept englobe des enjeux beaucoup plus larges que la bonne gestion financière et assure l’adoption par une organisation d’une conduite responsable, équitable et transparente dans toutes les sphères de ses activités.

Aussi, la gouvernance s’étend plus largement aux sociétés à capital fermé, quoiqu’avec quelques ratés, comme on l’a vu dans l’actualité récente aux ÉtatsUnis avec la chute d’une entreprise de cryptomonnaie comme FTX et ses 9 G$ d’investissements perdus.

Sur le plan législatif, l’encadrement de la gouvernance se limitait à quelques textes de loi applicables aux sociétés cotées, que l’on pense à Sarban Oxley ou encore à CSOX au Canada. Puis, des normes et certifications privées applicables à toute organisation sont apparues (ISO 37000, B Corp), tout comme la montée en importance des facteurs ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance). Certaines législations spécifiques, comme dans le domaine financier (FATCA aux États-Unis) ou de la vie privée (RGPD en Europe, Loi 25 au Québec), déploient le concept de gouvernance à toutes les organisations. Enfin, des initiatives internationales visent également à promouvoir une conduite responsable des sociétés. Tel est le cas, par exemple, des Principes directeurs pour les entreprises multinationales adoptés sous

l’égide de l’OCDE et qui visent à encourager une bonne gouvernance dans divers domaines, notamment en matière d’environnement, de fiscalité et de technologie. L’arrivée de l’intelligence artificielle (IA) soulève à cet égard des préoccupations nouvelles sur le plan de la gouvernance des organisations. L’usage massif des données et des algorithmes génère diverses inquiétudes relatives notamment à la transparence, à la sécurité et à l’utilisation appropriée de ces données, incitant à une minimisation des risques. La gestion d’une masse grandissante d’information par l’IA nécessite une compréhension de cette technologie pour garantir la confiance, ainsi qu’une utilisation éthique et responsable.

Dans ce contexte, il est indispensable pour toutes les organisations de prendre ces enjeux avec sérieux, d’intégrer dans leur planification stratégique ces changements législatifs et technologiques majeurs et de miser sur la sensibilisation et la formation de leurs ressources humaines. Les chercheurs et chercheuses en IA ont aussi un rôle à jouer.

Le Consortium de recherche, de formation et de mobilisation des connaissances en intelligence artificielle IVADO entend contribuer activement à la réflexion dans ce domaine, en particulier grâce à la subvention de 124,5 M$ du Fonds d’excellence en recherche Apogée Canada obtenue pour développer une IA robuste, raisonnan,te et responsable (IAR3). Piloté par l’Université de Montréal en partenariat avec quatre autres écoles et universités (Polytechnique Montréal, HEC Montréal, l’Université Laval et l’Université McGill), IVADO mènera au cours des sept prochaines années plusieurs programmes de recherche intersectoriels et interdisciplinaires, notamment structurés autour de dix regroupements thématiques, dont l’un portera spécifiquement sur la « Mise en œuvre et gouvernance responsable de l’IA ». Nul doute que le projet IAR3 laissera sa marque sur l’évolution de la gouvernance des organisations à l’ère de l’IA

D’ailleurs, la Clinique juridique de l’Université de Montréal – division démarrage d’entreprises, en collaboration avec IVADO et la Chaire L.R. Wilson dirigée par le Pr Vincent Gautrais, a mis sur pied une clinique juridique en gestion des données numériques afin d’accompagner les organisations dans les défis juridiques qu’ils affrontent dans ce domaine. n

1 https://www.bdc.ca/fr/articles-outils/boite-outils-entrepreneur/gabarits-documents-guides-affaires/glossaire/gouvernance-d-entreprise

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Le collectif

L’angle mort de la protection des données

Comment les prouesses de l’IA révèlent les lacunes de notre cadre juridique. L’apparition de nouveaux outils d’intelligence artificielle, comme ChatGPT, constitue l’un des faits saillants de la dernière année.

Àune époque où une innovation technologique n’attend pas l’autre, ces applications accessibles au public impressionnent par leur grande facilité d’utilisation et par la qualité du contenu qu’elles produisent.

Ces systèmes font partie d’une branche de l’intelligence artificielle (IA) dite « générative » en raison de leur capacité à générer du contenu (texte, image, musique, etc.) de façon autonome à partir de l’analyse d’un ensemble de données d’entraînement. Par exemple, Chat GPT utilise un modèle de langage, entraîné sur une vaste quantité de textes, pour prédire chaque mot le plus susceptible d’apparaître en réponse à une question donnée, à l’image de la fonction de suggestion de texte sur les téléphones intelligents.

L’ IA générative présente un énorme potentiel pour l’innovation sociale à travers diverses applications qui peuvent améliorer la qualité de vie des individus et des communautés. En éducation, l’ IA générative peut permettre de développer des ressources éducatives mieux adaptées à la réalité d’élèves qui souffrent de troubles d’apprentissage. Cette technologie peut également aider à surmonter les barrières linguistiques lorsqu’elle est intégrée aux outils de traduction automatisée.

Cependant, l’ IA générative présente également des défis et des risques pour la cohésion sociale. Plusieurs prédisent que l’automatisation de nombreuses tâches par l’ IA générative va causer d’importantes pertes d’emplois dans plusieurs secteurs d’activités. Cette technologie peut également faciliter l’hypertrucage (deepfake), accentuant ainsi la désinformation en ligne et les divisions au sein de la société.

Le droit au respect de la vie privée est généralement perçu comme un rempart face aux effets néfastes des nouvelles technologies. Étant donné que les algorithmes d’apprentissage automatique qui sous-tendent l’ IA générative carburent aux données, il semble logique de considérer qu’une meilleure protection des données permettrait de prévenir les dérives technologiques. Le Québec a d’ailleurs récemment modernisé sa législation en la matière avec l’adoption de la Loi 25, qui accroît la responsabilité des organisations dans la gestion de nos renseignements personnels et qui confère de nouveaux droits aux individus, notamment lorsque ceux-ci font l’objet de décisions prises par des systèmes d’ IA .

Or, ce cadre juridique est insuffisant pour résoudre les enjeux sociétaux soulevés par les technologies dites « disruptives », puisqu’il ne s’attarde qu’aux données qui permettent d’identifier un individu. Ainsi, le développement d’algorithmes au moyen de données anonymisées et l’utilisation de l’ IA pour marginaliser ou discriminer des groupes entiers de la société (et non des particuliers) sont autant de réalités qui échappent à la réglementation actuelle. Le droit en tant qu’institution garante du bien commun ne peut passer outre à la dimension collective d’une technologie transformatrice comme l’ IA générative.

Une piste de solution se trouve peut-être du côté du parlement fédéral, qui étudie présentement le projet de loi C-27 et sa proposition de Loi sur l’intelligence artificielle et les données (LIAD). Inspirée par l’approche européenne, la LIAD vise à encadrer le développement et l’utilisation de systèmes d’ IA selon leur niveau de risque, et ce, indépendamment du traitement de données personnelles. Si C-27 est adopté, le Canada deviendra l’une des premières juridictions à travers le monde à se doter d’un cadre juridique spécifique à l’intelligence artificielle. Un dossier à suivre ! n

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Loi 25

L’intelligence artificielle sous la loupe

Le 21 septembre 2021, la Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels (la « Loi 25 ») est sanctionnée à Québec.

Antoine Aylwin LL. B. 2002

Avocat associé Cochef groupe Vie privée et cybersécurité Fasken

Soleica Monnier

LL. B. 2017, LL. M. 2022

Avocate groupe Vie privée et cybersécurité Fasken

Elle modifie principalement la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé (la « Loi sur le privé ») et la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (la « Loi sur l’accès ») afin de mettre à jour le régime de protection des renseignements personnels québécois. Son entrée en vigueur s’échelonne sur trois ans, tous les 22 septembre de 2022 à 2024. La plupart des dispositions modifiées par la Loi 25 sont entrées en vigueur le 22 septembre dernier.

La réforme vise d’abord à promouvoir la responsabilité, la transparence et la confidentialité, et à redonner aux individus un contrôle sur leurs données. En effet, la Loi sur l’accès et la Loi sur le privé, remontant respectivement à 1982 et 1994, ont été adoptées à une époque où le papier et les technologies analogiques dominaient largement. Or, avec l’avènement du numérique et d’Internet, une mise à niveau paraissait nécessaire. Ainsi, la Loi 25 a introduit plusieurs obligations pour mieux régir les technologies contemporaines, comme les formes émergentes d’intelligence artificielle (« IA »).

données sous-jacente à leur fonctionnement, la présence de renseignements personnels doit donc être étudiée. Tel est le cas, même si le projet d’innovation dans lequel l’ IA s’insère est à visée scientifique, philanthropique ou purement sociale. Par exemple, dès le début du projet, il importe de réaliser une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée (EFVP) et de la mettre à jour, en temps opportun, afin de s’assurer de l’acceptabilité et de la conformité juridique du projet.

De même, les renseignements personnels qui pourraient servir au fonctionnement de l’ IA devraient être obtenus par fins licites, avec le consentement des personnes concernées ou en application d’une exception spécifiquement prévue. Les renseignements personnels traités ou générés par l’ IA devraient pouvoir faire l’objet des droits prévus par la loi, notamment celui d’être informé si une décision fondée exclusivement sur un traitement automatisé est rendue, au plus tard au moment de celle-ci.

Quelques définitions issues de la loi

EFVP : Processus de gestion des risques qui aide les institutions à s’assurer qu’elles respectent les exigences de la loi et à déterminer l’incidence éventuelle de leurs programmes et de leurs activités sur la vie privée d’individus. Renseignement personnel : Il s’agit de tout renseignement qui concerne une personne physique et permet, directement ou indirectement, de l’identifier.

La complexité inhérente à certains systèmes d’IA ne crée pas d’exception à l’application de ces lois. Dès la constitution de la base de

Les décideurs ont déjà commencé à se pencher sur la question de l’ IA au Québec. Une récente décision de la Commission d’accès à l’information, Enquête concernant le Centre de services scolaire du Val-des-Cerfs (1020040-S), mentionne que les données générées par l’IA constituent une nouvelle collecte de renseignements personnels et sont soumises à des obligations additionnelles à ce titre.

Pour conclure, notons que, depuis le 22 septembre dernier, les organisations ont tout intérêt à se soucier de la Loi sur le privé et de la Loi sur l’accès, les sanctions associées à leur non-respect étant plutôt dissuasives et pouvant atteindre 25 M$ ou 4 % du chiffre d’affai res mondial pour les entreprises. Il risque donc d’être très onéreux d’entraîner un algorithme d’ IA avec des renseignements personnels sans avoir pris connaissance des nouveaux changements législatifs applicables. n

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IA

et information juridique Quelques leçons apprises sur le terrain

Au service de la Société québécoise d’information juridique (SOQUIJ) depuis plus de 25 ans, j’ai été un témoin privilégié des expérimentations de notre organisation dans le domaine de l’intelligence artificielle. Réflexions et leçons tirées.

Présidente-directrice générale SOQUIJ

Analyser, organiser et enrichir le droit, comme le font les équipes éditoriales de SOQUIJ, est un travail très encadré et exigeant d’un point de vue cognitif. Très tôt, notre organisation a donc cherché des façons d’outiller nos équipes pour leur permettre de se concentrer sur les tâches à haute valeur ajoutée.

S’assurer de la maturité de la technologie Dès le milieu des années 2000, SOQUIJ a fait des démarches pour automatiser une partie de sa produc tion de résumés de décisions. Malheureusement, la solution technologique retenue n’a pas passé le test de la réalité : les efforts déployés par les rédacteurs juridiques pour adopter le logiciel et l’adapter à leurs méthodes de travail excédaient le gain obtenu, tant la qualité des résumés automatiques n’était pas optimale. Le même constat a été fait, en 2016, quand SOQUIJ a tenté d’automatiser la classification des jugements par domaines et sous-domaines de droit. Deux ans plus tard, un test d’équivalence entre texte juridique et langage naturel s’est aussi soldé par des résultats décevants.

Pourtant, SOQUIJ persiste à vouloir intégrer une aide intelligente à la rédaction de résumés et à la classification des jugements au bénéfice de ses équipes. Nous savons que le besoin est là, même si la technologie n’y répond pas encore.

Résister à l’approche orientée sur la solution

À la fin des années 2010, le ministère de la Justice du Québec a mandaté SOQUIJ pour la création d’une plateforme numérique améliorant l’accessibi lité de

l’information juridique au profit des justiciables. L’ IA a été considérée comme l’un des éléments dominants de la solution, en se fondant sur une analyse sommaire des besoins et des enjeux autour de cette technologie.

À postériori, cette approche techno-enthousiaste constitue un beau défi pour nos équipes qui travaillent encore à positionner, par essai-erreur, l’IA dans le projet. Néanmoins, nous en apprenons ainsi chaque jour sur cette solution technologique et nous restons persuadés de lui trouver une application.

Nous retenons ici combien une fine compréhension de nos besoins est primordiale pour une implantation adéquate de la technologie, et parfois, cela passe par quelques tests techniques. Par exemple, nous savons à présent que le résumé de décision n’est pas un exercice adapté pour les fonctions abstractives de l’IA générative. L’exigence de fidélité du résumé à sa décision ne laisse aucune place aux hallucinations. À contrario, notre service de traduction, qui exploite jusqu’ici très bien les fonctions extractives de l’IA générative, gagnerait sans doute à ce que la machine soit plus « créative ».

Ne pas sous-estimer l’intervention humaine

En 2021, SOQUIJ a conclu une entente avec l’Univer sité Laval pour financer une partie de travaux de recherche visant à rendre les plumitifs plus intelligibles grâce à l’ IA . Ici, comme avec le mandat du ministère de la Justice, les principaux bénéficiaires d’une telle innovation ne seraient pas les membres de notre personnel, mais nos utilisateurs et utilisatrices. Toutefois, le rapport du projet a finalement constaté que la technologie n’est pas encore assez autonome pour alléger significativement le travail des humains qui la supervisent. Cette conclusion est cohérente avec nos expériences précédentes : les efforts humains excèdent encore beaucoup trop le gain que l’on peut espérer obtenir de la machine.

Ainsi, dans le domaine de l’édition juridique, l’ IA n’a pas fait la démonstration de sa valeur ajoutée, pour l’instant et peut-être pour un moment car ce domaine semble représenter tout un défi pour la technologie ! C’est d’ailleurs pour cela que nous n’envisageons pas de remplacer, mais bien d’augmenter la performance de nos ressources humaines grâce à l’ IA , et que nous restons en quête de ce gain qui justifiera nos efforts. n

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L’application de l’ IA dans le domaine du transport

Depuis de nombreuses années déjà – et ce, avant la popularité de ChatGPT –, plusieurs spécialistes voyaient dans l’intelligence artificielle (IA) le potentiel de révolutionner le domaine du transport terrestre, aérien et maritime.

Imran Ahmad LL. B. 2005

Avocat associé

Norton Rose Fulbright

Nous explorons dans cet article trois domaines prometteurs où on expérimente déjà avec l’ IA

Conduite assistée et véhicules autonomes

Ça existe déjà. Depuis des années, les constructeurs automobiles investissent dans le développement de prototypes (automobiles et camions) qui sont actuellement en mode évaluation dans certaines villes nord-américaines. Ils ont forgé un partenariat avec les gouvernements locaux pour tester ces véhicules de façon sécuritaire.

Ces véhicules dépendent principalement des algorithmes prédictifs basés sur des données provenant d’une multitude de capteurs se trouvant à l’intérieur et à l’extérieur du véhicule. L’ IA facilite l’analyse en absorbant de grandes quantités de données et peut prédire la route et la vitesse les meilleures afin d’optimiser le voyage proposé. L’ IA peut aussi personnaliser l’expérience pour celui ou celle qui conduit. On peut également réduire les accidents de la route de même que les coûts d’assurance.

Même si les véhicules entièrement autonomes pour la conduite par le Canadien moyen ne sont pas pour demain, la conduite assistée est déjà une réalité. De plus, des camions entièrement autonomes, par exemple, sont utilisés dans des projets miniers à travers le monde.

Gestion de trafic

Surtout dans les grands centres métropolitains, la gestion du trafic routier peut être un cauchemar. On commence déjà à utiliser des capteurs sur des autoroutes pour capter et mesurer le trafic à tout

moment de la journée. La quantité de données est immense. Cette information, une fois analysée par l’ IA , peut être utilisée pour rediriger le trafic afin d’optimiser le réseau routier dans son ensemble, mais peut également être étudiée pour informer les investissements nécessaires dans l’infrastructure routière. Sur une période plus longue, on peut prendre en considération d’autres modes de transport (p. ex. : autobus, métro, REM, etc.) pour voir comment maximiser le réseau de transport pour toute la population.

Gestion des ports maritimes

Pour le Québec et le Canada, nous sommes avant tout une économie axée sur le commerce international. Nos ports maritimes jouent un rôle névralgique. L’ IA peut analyser les données fournies pour réduire les erreurs humaines et accélérer le processus douanier, etc. On l’utilise déjà pour détecter des activités criminelles (p. ex. : la traite des personnes). Un exemple concret est celui du port de Los Angeles, où les grues et camions autonomes se fient à l’ IA pour leur fonctionnement afin d’accélérer les activités routinières. Similairement, les caméras de sécurité utilisent l’ IA pour détecter des comportements anormaux sur le territoire portuaire.

Quant aux compagnies maritimes, elles utilisent l’ IA pour déterminer la meilleure route à prendre selon les conditions climatiques et géopolitiques, et ce, en temps réel. Ceci a pour avantage de réduire les délais de transport, les émissions de gaz et les coûts d’expédition.

Conclusion

L’application de l’IA au domaine du transport n’est plus théorique ou pour un avenir lointain. À l’échelle mondiale, plusieurs gouvernements et entreprises l’utilisent déjà et l’expérimentent sur de nouvelles applications. Les avantages sont indéniables : une expérience personnalisée, une gestion « intelligente » du trafic, une connectivité accrue, la réduction des émissions de gaz, moins d’accidents et une efficacité opérationnelle supérieure. Pour ces raisons, parmi d’autres, les investissements en IA ne cessent pas, car les avantages potentiels sont significatifs. n

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Propriété intellectuelle Ce texte a été rédigé par un humain

Trois cents ans d’évolution caractérisent le droit d’auteur

tel que nous le connaissons aujourd’hui, du Statute of Anne de Grande-Bretagne au Digital Millennium Copyright Act des États-Unis, notamment, en passant par la mise en œuvre de la Convention de Berne

LL. B. 2011

Avocat en droit des arts et des communications

Lussier & Khouzam

Lentement mais sûrement, le droit d’auteur a investi les champs de la création, à commencer par la presse écrite, les beaux-arts et la musique, pour imposer ensuite son joug à la photographie, à la production audiovisuelle et à la programmation informatique. Une évolution non sans heurts qui témoigne de l’avancement des technologies et, incidemment, des moyens de création. Voilà qu’une nouvelle venue entre en scène, tel un chien dans le jeu de quilles déjà chancelant des créateurs, lesquels appellent de nouveau en renfort le droit d’auteur : l’intelligence artificielle ou, plus communément, l’ IA

Qualifiées comme des habiletés propres au genre humain, l’art et la création ne semblent dorénavant plus nous être exclusifs. Ironiquement, l’ IA , le produit même de notre création, tend à devenir elle-même créatrice. Autrement dit, nous en sommes à créer des machines qui elles-mêmes créent des œuvres, lesquelles ne sont plus de banals produits, mais bien des exploits artistiques qui fascinent et intriguent, voire dérangent. Nous sommes en effet témoins d’une sophistication grandissante de l’ IA , qui ne relève plus d’une tendance anecdotique, mais bien d’un réel bouleversement des pratiques, notamment dans l’industrie créative.

Bien que nous ne sommes pas rendus au point d’être écartés par une horde de robots créateurs intelligents et surpuissants, plusieurs s’inquiètent de la place accordée à l’ IA dans la création et appellent à son encadrement. L’attention se porte inévitablement sur le droit d’auteur, où d’aucuns voient une panacée potentielle aux dérives de l’ IA . Or, il n’est en rien simple pour nous, juristes,

d’interpréter et d’appliquer les principes de ce droit à ce nouveau vecteur de création qu’est l’ IA Beaucoup d’encre a coulé ces dernières années sur le sujet, qu’il s’agisse de la problématique de la titularité du droit d’auteur d’une œuvre lorsqu’elle est créée par les algorithmes de l’ IA ou bien de la protection conférée aux œuvres générées par cette technologie, si nous pouvons effectivement les considérer comme des œuvres au sens de la Loi sur le droit d’auteur. Et nous ne pouvons certainement pas passer sous silence la question brûlante des violations potentielles du droit d’auteur sur les œuvres colligées en bases de données ou jeux de données (data sets) reproduits en amont du processus d’apprentissage automatique des modèles algorithmiques de l’ IA (machine learning). Notons à ce titre la récente poursuite lancée par un regroupement d’artistes contre les générateurs d’images Stability AI et Midjourney. La plainte allègue la violation des droits d’auteur de millions d’artistes dont les œuvres ont été massivement reproduites sans autorisation afin d’alimenter les modèles algorithmiques de l’ IA et de créer des œuvres « dérivées » des œuvres originales. Sans prétendre à un quelconque pouvoir de prédiction, il n’est pas risqué d’affirmer que nous ne sommes qu’au début du branle-bas suscité par les avancées de l’ IA dans l’art et la création. Reste à savoir maintenant quelles en seront les formes et l’ampleur. La Loi sur le droit d’auteur, dans sa version actuelle, dispose déjà de certains moyens pour baliser cette technologie au bénéfice des auteurs et autrices et de leurs œuvres. Ne perdons toutefois pas de vue le droit consacré des utilisateurs de faire usage de ces œuvres afin d’innover et de créer de nouvelles œuvres, l’ IA représente d’extraordinaires opportunités. Enfin, nous, juristes, devrons trouver le juste équilibre entre ces intérêts; une tâche plutôt ardue, néanmoins fort intéressante dans ce milieu en constante mutation. n

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IA , entreprises en

Droit

des affaires

démarrage

et propriété intellectuelle

L’intelligence artificielle (IA) ne se limite pas à un outil qui nous permet d’économiser du temps dans nos tâches quotidiennes notamment par le biais d’assistants virtuels, d’agents conversationnels ou de moteurs de recherche.

La promesse que représente cette nouvelle technologie de bénéficier à l’innovation dans notre société d’un point de vue collectif ne semble plus faire de doute.

Les innovations sociales engendrées par l’émergence de l’ IA sont souvent articulées selon une philosophie de contribution à la société et donc mal adaptées au cadre de création d’actifs de propriété intellectuelle (PI). Bien que l’ IA soit un vecteur d’innovation, un problème survient lors du financement de ces technologies, surtout lorsque cela concerne des entreprises en démarrage.

Par ce fait, une cristallisation de ces innovations sociales par la création d’actifs de PI pourrait intervenir pour aider à remédier à ce problème et ainsi encourager le déploiement des innovations sociales1 .

Promettant une solution innovante permettant d’améliorer notre société, 62 % des entrepreneurs québécois éprouvent des difficultés à lever les fonds nécessaires2

par conséquent, les banques démontrent du scepticisme et de l’inquiétude quant à leur financement. C’est également la raison pour laquelle ces dernières offrent des taux d’intérêt excessivement élevés lorsqu’un prêt est octroyé aux startups

Conséquemment, la valorisation de la PI s’accroit en importance lorsque les innovations sont réalisées par des entreprises en démarrage. La création de valeur et la valorisation de la PI deviennent une priorité, car cela permet à ces entreprises d’établir leur crédibilité afin d’attirer des clients et des investisseurs. En vue d’accroitre leur financement sans recourir aux prêts bancaires, celles-ci peuvent utiliser la PI à titre de sûreté. Cela se produit par le biais d’un prêt d’actifs intangibles qui servira à leur financement.

Une monétisation de ces innovations est la clé qui permettra aux entreprises en démarrage de surmonter le défi du financement. Si celles-ci désirent se frayer une place dans le marché et procurer un retour à leurs investisseurs, la valorisation de la PI est indéniablement la meilleure solution. En ayant une stratégie de PI recherchée qui met l’innovation sociale au premier plan, les entreprises en démarrage peuvent plus facilement offrir des solutions créatives qui bénéficieront à tous. n

« Bien que l’IA soit un vecteur d’innovation, un problème survient lors du financement de ces technologies, surtout lorsque cela concerne des entreprises en démarrage. »

Amplifié par la complexité d’obtenir des prêts bancaires, ce problème de financement est de grande ampleur chez les jeunes entreprises. Étant en phase de démarrage celles-ci ne peuvent donc garantir un succès dans le marché concurrentiel;

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1 Nous articulons nos propos en ciblant les innovations sociales qui se prêtent à une protection par actifs de PI. Il y a plusieurs innovations qui sont difficilement protégeables; notre intention n’est pas de forcer une protection là où il ne peut y en avoir, mais plutôt d’explorer une protection par PI lorsqu’approprié. 2 Gilles de Saint-Exupéry, « Plongez dans la vague des startups! », dans C.P. du N., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2018.
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Alexandra Vas Étudiante en 3 e année au baccalauréat

IA et mobilité des données Responsabilisation et protection

Nos sociétés ont besoin de données en tout genre.

Elles créeront, grâce à ces données, des statistiques sur un produit (analyse descriptive) pour être en mesure de relier des évènements passés et futurs (analyse prédictive) ou encore pour être capables de développer des modèles afin d’optimiser des résultats obtenus grâce à l’analyse prédictive (analyse prescriptive). Ces données sont le moteur de nos activités, et ce, quel que soit le secteur considéré, peu importe que l’on soit au Québec ou dans une autre province, un autre pays. L’intelligence qui nous entoure, qu’elle soit ou non artificielle, n’échappe pas à cette réalité.

Les données utilisées dans le cadre des systèmes d’intelligence artificielle (IA) peuvent avoir été collectées par l’organisme public ou par l’entreprise qui développe ou utilise un tel système. Elles peuvent avoir été recueillies auprès d’organisations d’ici ou d’ailleurs et être combinées, agrégées à celles que l’on détient. Par exemple, un organisme public ou une entreprise pourrait recueillir des photographies auprès d’organisations tierces pour développer son système de reconnaissance faciale ou des données comportementales pour rendre les annonces publicitaires plus pertinentes pour les consommateurs ou encore pour anticiper des comportements et, ainsi, prévenir la fraude. Ces données peuvent ainsi inclure

des images, des caractéristiques ou des attributs qui concernent une personne physique et permettent, directement ou indirectement, de l’identifier (renseignement personnel).

Les données utilisées dans un système d’ IA peuvent donc provenir de différentes sources. La mobilité des données est dès lors susceptible de soulever un certain nombre de questions quant aux finalités énoncées lors de leur collecte, à l’information transmise aux personnes concernées et à leur consentement ou encore à la qualité et à l’exactitude des renseignements utilisés pour en générer d’autres, notamment si ceux-ci sont personnels et qu’ils n’ont pas été dépersonnalisés ou anonymisés. Cette mobilité implique également de devoir réaliser une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée (ou analyse d’impact relative à la protection des données en Europe) avant de communiquer des données à un tiers pour entraîner un système d’ IA ou encore avant de développer celui-ci. Elle implique aussi de devoir réaliser une analyse du niveau d’adéquation du pays destinataire des données si celles qui sont communiquées n’ont pas été anonymisées et, le cas échéant, de conclure une entente entre les partenaires.

Il est de la responsabilité de l’organisme public ou de l’entreprise qui développe un système d’ IA ou qui utilise des données provenant de tiers de prendre en considération ces exigences que l’on retrouve dans différents instruments juridiques en lien avec la protection des renseignements personnels ou visant à encadrer la conception, le développement et le déploiement responsables des systèmes d’ IA

« Ces données peuvent ainsi inclure des images, des caractéristiques ou des attributs qui concernent une personne physique et permettent, directement ou indirectement, de l’identifier. »

Plusieurs de ces instruments – notamment ceux visant à encadrer le recours à l’intelligence artificielle – sont en discussion, en négociation auprès de différentes instances ici et ailleurs. À suivre, donc, notamment en ce qui a trait à la responsabilité des parties prenantes, laquelle aura un impact sur la confiance à l’égard des systèmes qui sont ou seront déployés dans les différentes sphères de nos sociétés. n

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L’ IA générative : nouvelle béquille intellectuelle ?
L’importance de faire confiance au processus

Dernièrement, nous avons pu constater que l’IA n’était plus seulement quelque chose dont on discutait de manière hypothétique, comme ce fut le cas il y a une cinquantaine d’années quand certains prétendaient que le tournant du siècle verrait la venue des voitures volantes.

Louis-Philippe Provencher Étudiant en 3 e année au baccalauréat

IA est beaucoup plus proche de nous qu’elle ne l’a jamais été, et ses impacts dans nos vies quotidiennes peuvent déjà être constatés. Plus tôt en 2023, une étude menée par le distributeur de musique anglais Ditto Music s’est avérée fort révélatrice quant à l’utilisation de ce type de technologie dans l’industrie de la musique. Cette étude a démontré que 60 % des 1 200 artistes sondés utilisaient déjà l’ IA pour créer de la musique, que 47 % envisageaient de le faire dans l’avenir pour la composition de leurs textes et que seulement 28 % pensaient ne jamais y avoir recours.

Malgré les bénéfices potentiels de cette technologie, ma principale crainte à la vue de telles statistiques est que l’œuvre créée émane davantage de l’ IA que du véritable processus créatif de l’artiste. C’est une conclusion que je peux tirer à la suite d’une brève carrière en tant que musicien professionnel et aussi grâce à la nouvelle perspective dont je bénéficie à titre d’étudiant en droit.

Or, être un artiste ne consiste pas simplement à créer un produit, mais à communiquer une émotion, à véhiculer une idée. C’est précisément cette expérience qui peut selon moi difficilement se produire lorsqu’une forme d’ IA essaie de recréer l’expérience et le vécu d’un auteur, d’un musicien ou d’un réalisateur de film, par exemple. Les compétences d’un artiste sont en effet bien particulières. La maîtrise par celui-ci de son propre « langage » s’acquiert par un long processus d’essai-erreur, de remises en question et de constants ajustements qui permettent à l’artiste de façonner son identité. Tout au long de ce développement, l’absorption de nouvelles informations constitue un élément fondamental. De l’autre côté de l’œuvre, l’appréciation par le consommateur pourra aussi différer en fonction de son expérience et de son vécu. Celui-ci pourra résonner non seulement avec l’œuvre, mais également avec le processus qui l’a vu naître.

« [...] 60 % des 1 200 artistes sondés utilisaient déjà l’IA pour créer de la musique [...] »

Titulaire d’un baccalauréat en musique, je constate avec stupéfaction que l’ IA est rendue à un point où elle peut générer des pièces musicales d’une grande qualité et où l’auditeur peut difficilement percevoir qu’une composition est le fruit de la technologie. Face à une telle situation, il est compréhensible que certains musiciens et musiciennes remettent en question une carrière incertaine en tant qu’artiste.

En matière d’éducation, des enjeux similaires peuvent être soulevés. Je crois qu’une démarche semblable est nécessaire pour le développement d’une certaine autonomie intellectuelle chez les étudiants et étudiantes. À la manière du cheminement d’un artiste, le développement de l’esprit critique étudiant est rarement un processus linéaire. Aussi ardu que ce parcours puisse parfois sembler, je crois que le développement de la pensée critique se fait nécessairement en assimilant de l’information nouvelle, en entrant en contact avec différentes manières de penser, en étant exposé à certaines œuvres ou réalités.

En musique comme sur les bancs d’école, le fait de laisser tout ce processus entre les mains de l’intelligence artificielle reviendrait selon moi à oublier que le cheminement est aussi important que l’objectif que l’on souhaite atteindre. n

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L’
L’e-File estonien Un guide pour l’innovation du système judiciaire au

réduit considérablement les délais de traitement des litiges, améliore l’efficacité du système de justice et, finalement, minimise les coûts administratifs.

Canada

L’Estonie s’est rapidement érigée en leader mondial dans le domaine de l’intelligence artificielle (IA), tirant profit de son expertise en matière d’innovation technologique.

Marie-Jeanne Tétreault , Finissante au Juris Doctor Stagiaire dans le Programme d’excellence en droit du ministère de la Justice du Canada

Le pays a offert au secteur juridique mondial une démonstration éloquente de la manière dont les processus judiciaires peuvent être révolutionnés. Récemment hôte du Sommet mondial du Partenariat pour un gouvernement ouvert (PGO) les 6 et 7 septembre derniers, l’Estonie a stimulé la réflexion de pays tels que le Canada quant à une refonte de leur système de justice. Le 8e Sommet mondial du PGO a rassemblé des leaders de plus de 70 pays pour discuter des changements législatifs à l’ère du numérique.

L’e-File : une innovation sociale et juridique de l’Estonie Alimentée par l’IA, l’e-File est une plateforme électronique sécurisée permettant aux acteurs du système de justice de l’Estonie, comme les juges et les avocats, de déposer, consulter et gérer les documents de manière numérique. Pour l’utiliser, il leur suffit de créer un compte utilisateur pour chaque partie impliquée dans une affaire. Ensuite, ils peuvent déposer des requêtes, des mémoires et d’autres documents directement dans le système. À cet effet, la signature électronique à clé est employée pour authentifier les documents, garantissant ainsi l’intégrité et la sécurité des données des Estoniens. Offrant un suivi en temps réel des procédures, l’e-File permet aux parties de recevoir des notifications automatiques concernant les développements de leur dossier. De plus, l’e-File

Les défis du Canada dans l’implémentation de l’IA au cœur de son système de justice À l’aube de l’implémentation de l’IA dans le système de justice, le Canada doit s’attendre à quelques obstacles bien connus de l’univers technologique. Tout d’abord, l’IA nécessite la collecte et le traitement de grandes quantités de données confidentielles et sensibles du public. Ensuite, elle peut introduire des inexactitudes en raison d’une collecte lacunaire. Elle peut aussi miner la confiance du public en ce qu’il s’agit d’une automatisation et non pas d’un service rendu par des êtres humains. Bref, il sera impératif de former les avocats et les juges à l’utilisation de l’IA, notamment dans le contexte de l’éthique professionnelle.

Les solutions inspirées de l’innovation estonienne

« Le 8e Sommet mondial du PGO a rassemblé des leaders mondiaux de plus de 70 pays pour discuter des changements législatifs à l’ère du numérique. »

Par chance, le Canada peut s’inspirer du modèle estonien pour surmonter les défis qu’occasionne l’implémentation de l’IA au sein de son système judiciaire. Axée sur la transparence, l’Estonie a mis en place des protocoles de sécurité rigoureux et une infrastructure solide de protection des données, assurant ainsi la sécurité des informations confidentielles des Estoniens. De plus, le pays scandinave a investi dans l’éducation et la sensibilisation du public quant à l’utilisation de l’IA dans le cadre de l’e-File, renforçant ainsi la confiance envers cette plateforme. Elle a par ailleurs adopté une approche proactive en formant les professionnels et professionnelles du droit sur l’utilisation de l’IA afin de garantir une intégration harmonieuse. En résumé, l’Estonie s’est imposée comme une référence en matière de cybergouvernance, l’e-File étant seulement l’un des nombreux programmes réussis, aux côtés de la cybertaxe et de la cyberésidence, entre autres. Face à un modèle aussi exemplaire, le Canada peut puiser de précieuses leçons de la plateforme estonienne pour le développement d’un système de justice ouvert axé sur l’IA et l’innovation sociale. n

56 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
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IA et santé mentale Innovation sociale et enjeux éthiques à l’ère de la thérapie numérique

L’IA est à l’avant-garde de nombreux développements technologiques de nos jours, notamment en raison des avancées significatives des modèles linguistiques de grande envergure.

Jasmine Lu

Étudiante en 3 e année au baccalauréat

Dans le domaine de la santé mentale, l’ IA permet l’exploration de nouvelles avenues d’innovation sociale tout en soulevant d’importants défis éthiques et juridiques.

Les difficultés d’accès aux soins de santé mentale imposent des défis importants dans le parcours de soins d’un individu. L’ IA se manifeste alors comme une solution novatrice pour pallier ces obstacles, offrant ainsi des produits et des services simples et accessibles aux patients et aux professionnels de la santé.

De nombreuses applications basées sur l’ IA , comme les agents conversationnels (chatbots) thérapeutiques, peuvent désormais fournir un soutien psychologique de base, en particulier grâce à la thérapie cognitivo-comportementale1. Un autre moyen d’employer l’ IA dans les traitements de santé mentale repose sur la thérapie en réalité virtuelle (RV), qui utilise une technologie immersive pour reproduire des situations réalistes et donner aux patients la possibilité d’affronter leurs angoisses dans un environnement sûr et maîtrisé2 .

De plus, l’utilisation de l’IA en programmation neurolinguistique permet l’analyse et l’interprétation du langage humain pour aider les professionnels et professionnelles de la santé dans l’identification de certains symptômes3. Comme l’IA peut examiner un large éventail de données, il est aussi possible d’établir des diagnostics et des facteurs de risque

plus personnalisés pouvant prendre en considération de multiples éléments tels que la génétique, la biologie et l’environnement4

Défis du recours à l’IA

Cependant, l’adoption de l’IA en santé mentale n’est pas sans obstacle, puisqu’il est important de trouver un équilibre entre l’innovation technologique et l’éthique médicale. Certaines difficultés ont d’ailleurs déjà été soulevées, notamment en matière de responsabilité de l’IA et de biais renforcés par les données de l’IA .

L’un des défis les plus importants concerne la protection et l’usage des données personnelles des patients, les informations sur la santé étant de nature extrêmement sensible. L’utilisation de l’ IA nécessite donc non seulement un encadrement moral interne par les différents acteurs de l’industrie, mais aussi un cadre réglementaire adapté aux changements rapides de cette technologie.

Au Québec et dans le monde, il existe déjà de nombreuses législations en matière de protection des renseignements personnels comportant des exigences concernant le consentement, la nécessité, la transparence et la communication des renseignements5. Alors que les technologies d’ IA continuent de s’immiscer dans la vie quotidienne, certains projets réglementaires, tels que la Loi sur l’intelligence artificielle au Canada et la législation sur l’intelligence artificielle de l’Union européenne, permettront d’établir un cadre réglementaire approprié pour naviguer dans les questions juridiques et éthiques de l’ IA en santé mentale.

L’intelligence artificielle offre ainsi des perspectives révolutionnaires pour la santé mentale, mais son potentiel s’actualisera seulement avec une navigation prudente entre les défis juridiques et moraux pour encourager l’innovation technologique et le progrès social tout en protégeant les droits des individus. n

1 Agence QMI, « Santé mentale : l’intelligence artificielle pour pallier les demandes en thérapie? », en ligne : https://www.tvanouvelles.ca/2023/05/03/ sante-mentale-lintelligence-artificielle-pour-pallier-les-demandes-en-therapie-1 2 TELUS, « Améliorer les soins en santé mentale grâce à la réalité virtuelle », La Presse 2023, en ligne https://www.lapresse.ca/xtra/2023-02-27/telus/ameliorer-les-soins-en-sante-mentale-grace-a-la-realite-virtuelle.php

3 T. Zhang et al., « Natural language processing applied to mental illness detection: A narrative review », npj Digit. Med. 5, 46 (2022), en ligne : https://doi.org/10.1038/s41746-022-00589-7

4 A. Abd-Alrazq et al., « The performance of artificial intelligence-driven technologies in diagnosing mental disorders: An umbrella review », npj Digit. Med. 5, 87 (2022), en ligne : https://doi. org/10.1038/s41746-022-00631-8

5 Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, RLRQ, c. P-39.1

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Nouvel outil nécessaire à l’office d’une autorité de régulation de l’intelligence artificielle ?

Le risque renforcé S

Le projet fédéral C-27 d’une Loi sur l’intelligence artificielle et les données (Art. 5 et 31) ainsi que les recommandations issues de récentes réflexions et consultations publiques au Québec sur l’encadrement de l’IA prévoient la création d’une autorité gouvernementale de régulation des systèmes d’intelligence artificielle (SIA).

Doctorant en Innovation, science, technologie et droit

i ces initiatives mettent particulièrement l’accent sur les données en imposant aux responsables des SIA d’éviter toute possession/utilisation illégale des renseignements personnels, il demeure que la principale mission d’une telle autorité consistera en une lutte contre le déploiement de SIA à incidence élevée ou empreints de biais algorithmiques. D’où la nécessité de rompre, à travers l’adoption de l’approche dite du risque renforcé, avec la polarisation exacerbée des travaux en droit sur la légalité de la circulation des données et la protection des renseignements personnels (PRP). Ceci, pour appréhender suffisamment la science algorithmique et mobiliser en conséquence les ressources nécessaires à la bonne formulation du problème que posent les pratiques algorithmiques qui sous-tendent les SIA

En encourageant un dépassement de la question des données, l’approche ne vise ni à négliger la possibilité d’évaluer les SIA à travers l’évaluation de la qualité des données utilisées en amont, ni à sacrifier la légalité du consentement pour la collecte des renseignements personnels exploités. En fait, il existe des dérogations légales à l’obtention d’un consentement, notamment exprès. De plus, les acteurs souhaitent une plus grande circulation des données qui stimulera les innovations technologiques. Mieux, en attendant une efficace fiducie des données, l’exigence d’une anonymisation robuste permet de dépersonnaliser les renseignements pour leur réutilisation et de les retirer ainsi de la propriété de leurs titulaires.

Ainsi, pour réussir cette lutte contre des SIA biaisés et à risque, il conviendrait, pour l’autorité de régulation, de considérer leur adoption comme une innovation entre incertitude et ignorance, le paradigme du risque renforcé. L’incertitude renvoie

aux processus d’adoption-diffusion des SIA , où d’exactes informations scientifiques sont accessibles sur diverses technologies. Mais l’application et les risques potentiels ne sont pas connus avec précision. Il s’agit alors de faire un rapprochement entre l’objectif d’une utilisation responsable des SIA et les techniques algorithmiques connues, comme celles relatives aux bases de données d’apprentissage de qualité ou à l’utilisation d’algorithmes d’apprentissage automatique néanmoins explicables, mais non intégrées aux travaux en droit. Quant à l’ignorance, elle est d’autant plus marquée par la quasi-absence (stratégique ?) d’informations exactes sur des technologies émergentes, qu’elle renforce l’occurrence des risques. Inspirés des travaux sur les régularités du changement technologique admettant pour toute innovation une trajectoire normale de recherchedéveloppement pour sa graduelle adoption-diffusion, nous appréhendons l’adoption des SIA comme une exception à cette trajectoire régulière. Ce qui expliquerait une ignorance sur la recherchedéveloppement des algorithmes dans des secteurs sensibles. L’ignorance porterait notamment sur les nouvelles techniques utilisées par les systèmes d’IA génératives et celles d’exploration-extraction des données non structurées, sur le « désormais peu de codage » en raison des solutions automatisées préintégrées.

L’intérêt de l’approche réside dans la nécessité de concevoir un dispositif de régulation des SIA à l’aune des éléments d’incertitude et d’ignorance sur les pratiques algorithmiques et de leurs répercussions sur les droits de la personne. En servant d’outil à l’autorité de régulation, l’approche ferait fonction de solution aux imperfections inhérentes au système de corégulation auquel semblent adhérer les instruments juridiques. Ce système se fondant sur une régulation par des principes à laquelle il emprunte les paradoxes intrinsèques, l’autorité se servirait de ce paradigme de l’innovation entre incertitude et ignorance pour remédier à de telles imperfections. Ces paradoxes révèlent, lors du contrôle de conformité juridique des SIA à incidence élevée, la difficulté de surmonter certains défis relatifs : 1) à l’obtention d’une confiance mutuelle entre acteurs; 2) à l’atteinte des objectifs de certains principes du fait de la divergence d’approches dans leur mise en œuvre; 3) à l’obtention d’informations sur les projets de recherche-développement des organismes ou à l’évaluation de leurs dispositifs organisationnels internes sur le déploiement des SIA n

58 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
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Développement professionnel

connais qui compte

Cette expression bien connue, comporte sans doute une part de vérité.

Votre réseau vous aidera à vous prémunir contre ce mal qui guette tout professionnel, juristes y compris : l’isolement.

Présidente Recrutement juridique Haney

On a comme réflexe premier, lors d’une embauche ou de l’octroi d’un mandat, de regarder dans son entourage, dans son réseau de contacts. Il s’avère ainsi primordial de développer et de maintenir un réseau, et ce, autant dans le milieu juridique que dans la communauté d’affaires en général, pour qu’on puisse penser à vous, le moment opportun, en cas de besoin.

Pour ce faire, il faut poser des gestes proactifs, car votre réseau ne se bâtira pas tout seul ! Il faut débuter tôt, certes, mais il faut aussi mettre des efforts tout au cours de sa carrière. Je vous rassure si vous avez pris du retard ou sentez avoir carrément fait un faux départ : il n’est jamais trop tard pour commencer. Voici quelques conseils.

Nous tissons des liens avec nos collègues à la Faculté de droit et à l’École du Barreau; maintenez-les et entretenez-les sur une base régulière. Par exemple, impliquez-vous dans l’association des diplômés de votre université. Vous reprendrez contact avec vos anciens et anciennes collègues et vous forgerez de nouvelles amitiés.

Les formations professionnelles offrent de belles occasions, à titre de formateur ou de participant, d’échanger et de faire des rencontres constructives. Les articles, chroniques et présences sur les médias sociaux et professionnels vous offrent des occasions de vous rendre visible et de mettre de l’avant vos talents et

Il s’avère également très important de tisser des liens avec divers membres de votre organisation; on oublie parfois « l’intraréseautage ». S’impliquer et se faire connaître chez votre employeur actuel (cabinet, entreprise ou autre) vous permettra d’apparaître sur le radar des décideurs qui auront le pouvoir d’octroyer des bonis, promotions ou autres reconnaissances. Réseauter à l’interne vous permettra également d’approfondir votre connaissance et votre compréhension de l’ensemble des activités de votre organisation, d’établir des contacts pertinents et de développer des liens avec des collègues d’autres services avec qui vous aurez peut-être éventuellement à travailler ou qui pourraient vous aider dans le futur.

Les contacts à l’extérieur du milieu juridique s’avèrent tout aussi importants. Les dossiers en droit comportent des facettes non juridiques. Vous aurez très certainement besoin de l’expertise de pointe de professionnels et professionnelles œuvrant dans divers secteurs tels que la finance, la comptabilité, l’actuariat, l’ingénierie, etc. Combien il est efficace et sécurisant de savoir sur qui compter en cas de besoin ! N’oublions pas que ces contacts pourront également avoir recours à vos services !

Les articles, chroniques et présences sur les médias sociaux et professionnels vous offrent des occasions de vous rendre visible et de mettre de l’avant vos talents et expertises.

En conclusion, tout au cours de votre carrière, il faut établir des contacts véritables ainsi que prendre le temps de les soigner. Mieux vaut limiter le nombre d’activités, concentrer ses efforts et tisser des liens de confiance solides. Une meilleure connaissance de votre contact permet d’établir avec cette personne une relation professionnelle plus profonde et de meilleure qualité. n

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La gestion du temps est un sujet souvent abordé, mais rarement compris en profondeur. Bien plus qu’un simple outil d’organisation de ses journées, il s’agit de la clé d’une vie professionnelle et personnelle réussie.

Étudiante au LL. M.

Fondatrice

Jessica Céré Coaching

Une compétence fondamentale pour un juriste est, bien entendu, la capacité à bien gérer son temps. Un bureau n’embaucherait pas un individu incapable de respecter les échéances et d’arriver à l’heure au travail. Au-delà de cette vision quelque peu simpliste de la gestion du temps, où trouve-t-on la clé du bonheur?

En tant que coach, j’ai remarqué que de nombreuses personnes possèdent les connaissances et les compétences nécessaires pour atteindre leurs objectifs. Cependant, elles vivent avec le stress de manquer de temps. Il est vrai que le temps est une ressource limitée. Il y a 24 heures dans une journée, sans possibilité ajouter des heures supplémentaires. Toutefois, je crois que c’est suffisant pour accomplir ce qui a de l’importance. De là mon premier conseil : prenez le temps de découvrir ce qui est important pour vous. Qui êtes-vous réellement et quelles sont vos aspirations ? Comment souhaitez-vous mener votre vie et comment aimeriez-vous que l’on se souvienne de vous ?

objectifs trimestriels, puis en objectifs mensuels et en tâches hebdomadaires. De cette façon, vous vous assurez que ce qui figure dans votre emploi du temps est en adéquation avec vos objectifs annuels.

Lorsque l’on consacre son temps aux choses qui sont importantes pour nous, nous évitons de succomber aux pressions extérieures. Nous nous concentrons sur ce qui est directement aligné avec nos objectifs de vie. Nous améliorons notre relation avec le temps.

Ainsi, il est vrai que le temps est une ressource limitée. Cependant, il y a suffisamment de temps pour faire ce qui est important pour vous. La gestion du temps est bien plus qu’une simple mécanique de calendrier. C’est un moyen de libérer votre potentiel, d’atteindre un équilibre et le bonheur. Vous méritez de vivre une vie professionnelle et personnelle épanouissante et la gestion du temps est l’un des outils qui vous y conduiront. n

« Lorsque l’on consacre son temps aux choses qui sont importantes pour nous, nous évitons de succomber aux pressions extérieures. »
professionnel 60 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
Développement
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Nouveau programme dès l’automne 2025

Diplôme d’études supérieures spécialisé – DESS

Droit de l’immigration

Le seul programme de spécialisation en droit de l’immigration au Québec. admission.umontreal.ca

de la Faculté

Centre de recherche en droit public Un nouveau CRDP

Le 23 mai dernier, le CRDP adoptait ses nouveaux statuts, lesquels n’avaient fait l’objet que de modifications cosmétiques depuis 1990. Il s’agit d’un moment important dans la vie du Centre, puisque ces statuts en changent la constitution, le fonctionnement, voire la mission.

crdp.umontreal.ca

Plusieurs titres me sont passés par l’esprit lorsque j’ai pris place devant mon écran pour rédiger la présente chronique visant à souligner les changements entraînés par l’adoption des nouveaux statuts du CRDP. Je comptais initialement l’amorcer avec « Le CRDP est mort, vive le CRDP ! », pour paraphraser cette ancienne acclamation monarchique, afin de désigner la nouvelle incarnation du Centre, mais celle-ci marque une rupture plutôt qu’une transition. Le slogan

« CRDP 2.0 » m’a également été suggéré, mais j’argumenterais que le Centre n’en est pas à sa première réinvention.

« CRDP 3.0 » ou « CRDP 4.0 » serait probablement plus juste, mais sérier ainsi la riche histoire de notre Centre m’apparaît insensé.

Quoi qu’il en soit, il demeure que le Centre de recherche en droit public de l’Université de Montréal n’est plus; certains diront qu’il n’a jamais été. En effet, bien que juridiquement le CRDP était – selon ses anciens statuts – un « organisme de recherche de l’Université de Montréal », les amitiés et partenariats développés entre chercheurs et chercheuses de l’Université de Montréal et leurs collègues (principalement des universités McGill et Laval) ont mis en lumière le caractère fictif de cette affirmation. Que l’on pense par exemple aux travaux menés conjointement par Pierre Noreau et Rod MacDonald ou à la fondation du Laboratoire de cyberjustice par Karim Benyekhlef et Fabien Gélinas, les exemples voulant que le CRDP n’était pas uniquement le Centre « de l’Université de Montréal » pullulent. Cette expansion des

« Il consacre une ouverture et une coopération entre universités; collaboration plutôt que concurrence. »

travaux du CRDP à l’extérieur des murs de notre faculté aura d’ailleurs donné naissance en 2004 au Regroupement droit et changements (rebaptisé « Regroupement droit, changements et gouvernance » quelques années plus tard). Depuis l’adoption de nos nouveaux statuts le 23 mai dernier, toutefois, cette fiction d’un Centre limité au 8e étage du pavillon Maximilien-Caron n’est plus. En effet, si le CRDP a toujours « son siège à la Faculté de droit de l’Université de Montréal et en relève aux fins de la gestion courante » (article 2 des nouveaux Statuts du CRDP), il n’est plus le Centre d’une seule université. Il est finalement devenu ce qu’il a toujours aspiré à être : le Centre de recherche en droit public du Québec.

Que signifient ces changements pour la communauté juridique en général et la Faculté de droit de l’Université de Montréal en particulier ? Nos nouveaux statuts favorisent la collaboration interdisciplinaire et interinstitutionnelle qui s’avérait la marque de commerce du CRDP. Ainsi, rien ne change vraiment dans les faits. Symboliquement, toutefois, le geste revêt une importance indéniable. Il consacre une ouverture et une coopération entre universités; collaboration plutôt que concurrence. Cette collaboration se remarque déjà dans la richesse des projets menés et des activités organisées par le Centre et ses chercheurs et chercheuses. Pour les découvrir, je vous invite d’ailleurs à consulter notre site Web et à vous inscrire à nos listes de diffusion. n

recherches
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Centres de
Nicolas Vermeys Professeur titulaire Directeur Centre de recherche en droit public – CRDP

CDACI

Le Centre de droit des affaires et du commerce international

Voué à la formation et à la recherche sur les aspects juridiques des enjeux économiques, environnementaux et sociétaux de l’heure et fondé il y a plus de 25 ans, le CDACI a pour mission de développer des connaissances en droit des affaires et du commerce international et de contribuer à leur diffusion.

Regroupant une quinzaine de chercheurs et chercheuses, le Centre mène des activités d’enseignement, de formation de la relève et de recherches innovantes de la plus haute qualité pour enrichir la réflexion des parties prenantes, telles que les milieux universitaire et des affaires, la société civile et les acteurs gouvernementaux.

diverses communautés normatives allant de l’État à la société civile.

L’ensemble de ces activités de recherche a donné lieu à la publication d’ouvrages importants pour la communauté juridique.

Quelques publications à souligner

n Droit des valeurs mobilières (Éd. Thémis, 2023) du Pr Stéphane Rousseau

Quatre axes de la recherche et de la diffusion des connaissances

1) Conformité

2) Droit et gestion

3) Gouvernance et droit des marchés financiers

4) Relations économiques internationales et droit

Les projets menés sous ces quatre axes mobilisent des réseaux de chercheuses et chercheurs québécois, canadiens et internationaux, ainsi que des étudiantes et étudiants aux cycles supérieurs. cdaci.ca

Sur le plan de l’enseignement, les membres du CDACI enseignent à tous les cycles d’études. Ils jouent un rôle clé pour soutenir quatre programmes de deuxième cycle de la Faculté, soit la maîtrise en droit des affaires, la maîtrise en droit des affaires dans un contexte de mondialisation, la maîtrise en droit – fiscalité et la maîtrise en droit des affaires comparé offerte avec la Faculté de droit Julie-Victoire Daubié de l’Université Lumière Lyon 2.

Au-delà des quatre principaux axes, les chercheurs et chercheuses du CDACI collaborent à des projets abordant des thématiques transversales. Parmi celles-ci, la responsabilité sociale des entreprises (RSE) se démarque comme un thème unificateur qui interpelle les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance. L’équipe de recherche aborde ce paradigme avec des travaux portant sur des thématiques telles que les droits des travailleurs dans les chaînes d’approvisionnement, la finance durable, l’intégrité et la lutte à la corruption, la justice fiscale et l’écofiscalité, la protection des investisseurs vulnérables, les codes de conduite, le droit des investissements et les devoirs des administrateurs. Ancrés dans une analyse juridique rigoureuse, les travaux sont menés en ayant recours aux théories économiques et sociologiques, de même qu’au pluralisme qui insiste sur la diversité des normes influant sur la conduite des acteurs économiques et sociaux. Ainsi, ils s’intéressent aux normes de responsabilisation nationales et internationales, formelles et informelles, qui sont issues de

n Aspects juridiques de la fiscalité canadienne des particuliers (5e éd., Thomson Reuters, 2023) de la Pre Annik Provencher (en collaboration)

n Analyse économique du droit (3e éd., Éd. Dalloz, 2021) des Prs Ejan Mackaay, Pierre Larouche et Stéphane Rousseau (en collaboration)

n Extractive industries and Human Rights in an Era of Global Justice: New Ways of Resolving and Preventing Conflicts (LexisNexis, 2019) codirigé par le Pr Amissi Manirabona

n Soft law et droit du commerce international (LexisNexis, 2018) codirigé par le Pr Hervé Agbodjan Prince

En somme, après 25 ans d’existence, le CDACI est devenu un centre de recherche de premier rang par la qualité de sa production scientifique et des programmes d’études qu’il soutient. Impliqués activement dans la formation étudiante et les activités de transfert de connaissances, tant au Québec que sur la scène internationale, les professeures et professeurs rattachés au Centre contribuent à positionner la Faculté de droit parmi les meilleures au monde pour les établissements francophones. n

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Stéphane Rousseau Professeur titulaire Directeur par interim CDACI

Centres de recherches de la Faculté

Karim Benyekhlef

Professeur titulaire

Directeur Laboratoire de cyberjsutice

Nicolas Vermeys

Professeur titulaire

Directeur adjoint Laboratoire de cyberjsutice cyberjustice.ca

Laboratoire de cyberjustice

Les retombées internationales d’un laboratoire montréalais

S’il s’avère exagéré de reprendre le passage biblique voulant que nul ne soit prophète en son pays – les travaux de nos chercheurs et chercheuses ayant inspiré l’appareil judiciaire d’un océan à l’autre, comme l’énonce la devise canadienne –, il demeure que l’influence du Laboratoire de cyberjustice est perçue de façon beaucoup plus importante à l’extérieur de nos frontières.

Que ce soit par le biais du projet AJC (Autonomisation des acteurs judiciaires par la cyberjustice et l’intelligence artificielle) dirigé par le Pr Karim Benyekhlef, dont les travaux menés sur cinq continents visent à mettre l’intelligence artificielle au service des acteurs judiciaires pour renforcer la prévention et la résolution des conflits, ou encore de notre contribution soutenue à la rédaction des politiques du National Center for State Courts (États-Unis), dont la mission est de promouvoir l’État de droit et d’améliorer l’administration de la justice au sein des tribunaux américains et du monde entier, le Laboratoire et ses chercheurs et chercheuses ont laissé leur marque indélébile sur les systèmes de justice à travers le monde. Même du simple point de vue lexical, l’entrée du terme « cyberjustice » – néologisme créé par les fondateurs du Laboratoire – dans le lexique approuvé par la Commission d’enrichissement de la langue française, tout comme son utilisation par le Conseil de l’Europe, témoignent de notre influence sur la scène internationale. Plus récemment, cette influence s’est cristallisée sous la forme de deux importants événements internationaux : le 23e Forum international de règlement des litiges en ligne (ODR) 2023 et la Conférence Cyberjustice Europe.

L’ODR Forum 2023

Les 11 et 12 octobre 2023, le Laboratoire de cyberjustice a accueilli le 23e Forum ODR Organisé en collaboration avec le National Center for Technology and Dispute Resolution (NCTDR), l’événement a rassemblé plus d’une centaine d’innovateurs, acteurs de changement et leaders issus des quatre coins du globe afin de concevoir l’avenir du règlement en ligne des différends. Inauguré en 2002, le Forum est une activité incontournable pour la communauté ODR et sa venue à l’Université de Montréal – lieu de développement de la première plateforme de règlement en ligne des différends (le

Cybertribunal) – pour une deuxième fois en 10 ans démontre l’importance du rôle joué par le Laboratoire de cyberjustice et ses chercheurs et chercheuses en la matière.

La Conférence Cyberjustice Europe

C’est le 24 novembre 2023, au Conseil de l’Europe, à Strasbourg, que s’est déroulée la seconde Conférence Cyberjustice Europe (la première, organisée par les même acteurs, a eu lieu au même endroit en 2016). Cet événement a donc rassemblé des intervenants et intervenantes de plusieurs pays afin de discuter des incidences de la technologie sur les politiques publiques et la justice. Les membres de cette riche communauté internationale, réunis par le Laboratoire de cyberjustice et ses partenaires (le Conseil de l’Europe, l’Institut des études et de la recherche sur le droit et la justice [IERDJ] et l’Université de Strasbourg), y ont abordé diverses thématiques, de la régulation de l’intelligence artificielle à l’évolution de la cybercriminalité, en passant par la nécessité d’adopter des politiques publiques pour soutenir le développement de services en ligne. Ce ne sont que quelques exemples des thèmes abordés lors de cette conférence internationale.

Certains des échanges intervenus lors de ces deux événements sont accessibles en ligne sur les chaînes YouTube du Laboratoire de cyberjustice et de l’IERDJ

Avec la fin prochaine du financement accordé au projet AJC et l’accélération frénétique des développements technologiques des dernières années, l’équipe du Laboratoire œuvre déjà à l’élaboration d’un nouvel agenda de recherche toujours basé sur l’accès à la justice par le biais de la technologie, mais dépassant aujourd’hui le secteur judiciaire pour s’intéresser plus largement aux services publics. Le passé étant garant de l’avenir, nous avons bon espoir que ces travaux auront des incidences bien au-delà des frontières canadiennes. n

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IMAJ... etc

Innovations et mutations des activités de justice

Une nouvelle équipe de recherche est née au CRDP sous le nom d’Innovations et mutation des activités de justice : éléments d’une théorie du changement (IMAJ… etc.). Le projet réunit une équipe de chercheuses et chercheurs issus de plusieurs disciplines et dont les activités se sont progressivement développées au cours des années.

En étudiant les transformations du monde judiciaire, l’équipe vise la définition d’une nouvelle théorie du changement, applicable à l’analyse de secteurs fortement institutionnalisés comme la justice.

L’idée d’une justice en difficulté revient périodiquement dans les médias. S’y rencontre toute une série de problèmes entremêlés associée aux coûts de la justice, à la cristallisation des règles de pratique, à la rigidité de la fonction adjudicative, au mode de rémunération des praticiens, à l’insuffisance des ressources matérielles des tribunaux et à la difficulté du système de justice de passer à l’ère numérique. De nouveaux phénomènes apparaissent : la désaffection des tribunaux, le monopole des entreprises et des institutions publiques sur les tribunaux civils, la multiplication des citoyens non représentés, la propension des internautes à se faire justice eux-mêmes ou à dénoncer publiquement certaines décisions judiciaires, l’abandon des poursuites dans le cadre de dossiers fortement médiatisés, etc.

S’il est tentant d’associer ces difficultés au conservatisme du milieu judiciaire, les innovations observées depuis le début des années 1970 révèlent que le système de justice peut connaître des mutations diverses. Ces mutations ne doivent cependant pas occulter les tendances du système à l’enfermement ou à l’entretien d’une dépendance au « sentier parcouru ». La justice reproduit ainsi les caractéristiques d’autres champs sociaux fortement institutionnalisés, comme c’est le cas en éducation et en santé. Pour cette raison, le monde judiciaire constitue, pour la recherche, un objet particulièrement adapté à l’étude des mutations de l’action publique au sein de champs d’action caractérisés par leur « ossification ». La justice représente ainsi un objet de recherche particulièrement porteur, du point de vue des études sur le changement.

Le projet favorise le développement de travaux interdisciplinaires dans le domaine de la justice, un milieu caractérisé par la spécificité de ses catégories d’action et de ses modes de pensée. L’équipe défend la nécessité de la recherche empirique dans un milieu rébarbatif à toute évaluation externe et surtout orienté par la production doctrinale. Les chercheurs et chercheuses d’ IMAJ… etc. se proposent au contraire de documenter l’analyse des pratiques judiciaires par l’observation de ses mouvements internes et par l’étude de la réponse que le monde judiciaire offre aux nouvelles demandes sociales. Plusieurs des projets prévus à la programmation ouvrent la porte à une recherche de nature intersectorielle. L’équipe contribue directement à la mobilisation des sciences sociales dans les études juridiques.

Plus spécifiquement, le projet porte sur les mutations des référents qui traversent la justice (justice plus distributive, plus procédurale, plus interactionnelle?) et l’ajustement des normes procédurales. Il se penche, de manière plus importante encore, sur la mutation des pratiques de justice. On renvoie ici au niveau où l’action des acteurs et les initiatives institutionnelles présentent les formes les plus concrètes : nouveaux modèles de pratique, participation directe des justiciables à la résolution de leurs différends, déjudiciarisation des infractions mineures, réforme des juridictions civiles, etc. Le projet se poursuivra jusqu’en 2027 n

65 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Études supérieures

4 sujets de recherche à souligner

Aurore Troussel

De la régulation des plateformes à la régulation par les plateformes Analyse empirique des outils et des politiques réglementaires des plateformes.

Cette recherche vise à éclairer le pouvoir normatif des plateformes et à documenter l’émergence d’une nouvelle forme de régulation privée. Quelles sont les caractéristiques des outils et des politiques réglementaires des plateformes ?

La régulation des plateformes est devenue un enjeu majeur des politiques publiques du XXIe siècle, mais l’opacité et le pouvoir des plateformes les rendent difficiles à réguler. Cette recherche vise à analyser le pouvoir normatif des plateformes pour comprendre comment celles-ci sont devenues des régulateurs privés. A cet égard, la création d’une typologie des outils de régulation utilisés par les plateformes (p. ex., système de recommandation, sanctions, politiques d’utilisation, etc.) sera particulièrement utile. Enfin, cette recherche comprend une étude de cas sur la politique de modération de contenu de X afin d’étudier le fonctionnement d’une plateforme.

Catherine Samaha

Vers une modernisation numérique du règlement à l’amiable de l’action collective Essai sur le recours aux plateformes numériques pour un meilleur accès à la justice au Québec et en France

L’action collective québécoise et son homologue française, l’action de groupe, sont deux véhicules procéduraux initialement conçus pour améliorer l’accès à la justice tout en réduisant les délais et l’encombrement des tribunaux induits par les actions intentées individuellement. Cependant, la réalité d’aujourd’hui montre que ces deux véhicules procéduraux entravent eux-mêmes l’accès à la justice, par l’encombrement des tribunaux et les délais associés à l’action collective québécoise d’une part, et par l’ineffectivité de l’action de groupe française d’autre part. Ceci est d’autant plus surprenant que la majorité des affaires sont réglées à l’amiable. Notre projet de recherche vise à déterminer si l’intégration des plateformes numériques dans les mécanismes de règlement à l’amiable de l’action collective et de l’action de groupe pourrait éradiquer les entraves liées à ces derniers et ainsi améliorer l’accès à la justice au Québec et en France.

Eve Gaumond

Opérationnaliser le droit fondamental à l’éducation supérieure pour guider le développement et l’implantation responsable de l’IA en milieu universitaire L’implantation responsable de l’IA dans les universités nécessitera de faire l’arbitrage entre des valeurs et des intérêts parfois opposés. Par exemple, l’utilisation de l’IA pour analyser de vastes quantités de données relatives aux comportements et aux émotions des étudiants, pourrait avoir des impacts positifs en termes de qualité de la formation, or elle pose des enjeux en termes de liberté, de discrimination et de vie privée. Nos recherches visent à adapter la Human-Rights-Based Approach to Higher Education de Jane Kotzman pour aider les acteurs impliqués dans l’implantation de l’IA dans les institutions d’éducation supérieure à naviguer à travers ces dilemmes. Reconnaissant l’importance de l’interdisciplinarité dans ce domaine, nous adopterons une méthode de recherche empiriques qui permet la véritable intégration d’une pluralité de voix.

Henry Laville

Les fonctions des normes techniques dans les législations relatives à la protection des données personnelles et de l’intelligence artificielle En partant du produit de l’activité des acteurs de la normalisation, les normes techniques, mon projet de recherche étudie les apports et les implications de l’utilisation de ces instruments de régulation économique par les législateurs canadien et européen dans les lois relatives à la protection des données personnelles et de l’intelligence artificielle (IA). Mon étude constitue un exemple concret pour analyser comment les pouvoirs publics s’emparent du processus et des fruits de l’innovation sociale pour résoudre le défi contemporain de la régulation des nouvelles technologies. Au fond, mes conclusions reconsidèrent surtout les limites actuelles de l’architecture de cette régulation : 1) Quid de la compatibilité des conceptions différentes de l’innovation partagée entre les acteurs de la normalisation et le législateur ? 2) Quid de l’alignement des objectifs des normes techniques et de la loi ?

3) Quid de la légitimité démocratique du processus de renvoi à la normalisation dans la loi ?

66 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Communauté étudiante

Comité femmes et droit

Tisser des liens, briser des barrières

Au Québec, face à une augmentation alarmante des féminicides et des cas récurrents de violence conjugale, il est évident que la mission du féminisme intersectionnel reste plus cruciale que jamais pour promouvoir les intérêts de toutes les femmes au sein de notre société.

Rappelons que selon les données du Conseil du statut de la femme du Québec, « [l]e nombre total de femmes et de filles tuées par des hommes au Québec pour les années 2020 et 2021 (40) est presque le double du nombre total des années 2018 et 2019 (23) ». Il est de notre devoir de placer le féminisme intersectionnel au cœur de notre travail. Ce dernier joue un rôle crucial dans la lutte contre le patriarcat et notre comité cherche à éduquer dans le but de démanteler les structures patriarcales oppressives et de combattre les inégalités systémiques.

Précisément, nous cherchons à lutter contre les inégalités auxquelles sont confrontées les femmes de toutes origines, classes sociales et orientations sexuelles, tout en tenant compte des disparités socioéconomiques, afin d’atteindre l’épanouissement des femmes autour du monde.

Déconstruction du mythe omniprésent sur le mouvement féministe

MYTHE : Le féminisme est un mouvement antihommes.

Comité femmes et droit 2023-2024

Présidence : Victoria Hum

Trésorerie : Florence Richard

Secrétariat général :

Camila Quiroga Sanchez

V.-P. événements :

Leelou Rouxel

V.-P. communications :

Il est important de recentrer le débat et d’éviter de perpétuer de telles idées mal fondées qui découlent d’un manque d’éducation sur le sujet. Le féminisme a pour mission centrale d’améliorer la condition féminine et de l’élever au même niveau que celle des hommes en société. En réalité, le féminisme ne cherche pas et n’a jamais revendiqué la supériorité d’un genre sur l’autre. Au sein de notre comité, nous croyons sincèrement que l’amélioration de la condition féminine nécessite inextricablement la solidarité entre les sexes.

Kiana Salehian-Zanjani

V.-P. aux affaires externes :

Marie-Laurence Desmarais

V.-P. première: Elie Legault

Le mouvement féministe reconnaît que les inégalités basées sur le genre nuisent à l’essor sociétal et préjudicient aux hommes en perpétuant des stéréotypes restrictifs et néfastes. Cette lutte prend comme cible les inégalités systémiques et les stéréotypes de genre qui limitent aussi bien les hommes

que les femmes, bien que différemment, dans le but de créer une société plus juste et équilibrée.

Le débat qui a resurgi récemment dans l’imaginaire collectif sur le droit et l’accès à l’avortement a malheureusement consolidé notre crainte autour du manque d’éducation sur la cause féminine et sur nos droits durement acquis par la génération féministe précédente à la sueur de son front. Il est absolument nécessaire d’inclure les hommes dans la conversation, mais il faut aussi tenir compte du fait encore bien trop présent aujourd’hui que la voix des femmes est trop souvent étouffée et n’est pas assez entendue au sujet des causes qui touchent profondément la condition féminine.

Mission du Comité

Le Comité femmes et droit a pour mission, au sein de la communauté universitaire, de promouvoir le féminisme intersectionnel en encourageant des discussions sur les divers enjeux touchant la condition féminine, et ce, à travers un travail de vulgarisation et de réflexion. Il est donc important pour nous d’organiser des événements qui reflètent nos valeurs. C’est pour cela qu’aux côtés d’autres organisations étudiantes, notre comité contribue à assurer un environnement inclusif et à permettre aux étudiantes et étudiants en droit d’avoir accès aux mêmes possibilités.

Nos évènements et projets

Cette année, nous avons plusieurs événements excitants prévus pour consolider la présence de notre comité au sein de la Faculté de droit. À cet effet, nous avons tenu la deuxième édition de notre panel intitulé « Parcours inspirants », une soirée qui invite les étudiantes et étudiants à échanger avec des femmes ayant des cheminements remarquables. Nous planifions plusieurs autres projets au courant de l’année, comme notre conférence sur l’indépendance financière des jeunes professionnelles de demain, notre atelier d’autodéfense ou encore nos nombreux événements de réseautage.

Sur ce, nous espérons vous voir prochainement à nos événements. n

67 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
«

Comité droit autochtone

Enjeux autochtones : pour leur reconnaissance au sein de la Faculté de

Le Comité droit autochtone de la Faculté a pour but de sensibiliser la population étudiante aux divers enjeux touchant les communautés autochtones du Québec et du Canada, et ce, tant sur le plan juridique que culturel.

Le Comité droit autochtone est composé de six membres dont deux étudiantes issues des Premiers

Peuples. Pour l’année universitaire 2023-2024, les membres du Comité sont : Chloé Jean, présidente; Sarah-Maude Duval, v.-p. sensibilisation; Abigaël Martel, v.-p. communications; Daniela Lucha, v.-p. évènements; Vikneshvaren Armoogum v.-p. finances et Bréanne Dondo, v.-p. première.

Promouvoir la diversité au sein de la Faculté

Au sein de la Faculté de droit, il demeure primordial d’assurer l’existence de comités comme celui-ci afin de promouvoir la diversité et l’inclusion des étudiantes et étudiants issus de ces communautés. C’est d’ailleurs en collaboration avec la Faculté de droit que le Comité droit autochtone organisera une tournée dans les écoles secondaires des communautés autochtones de Manawan et de Kanehsatake, respectivement issues des Premières Nations Atikamekw et Mohawk, ainsi qu’au cégep Kiuna, près de la communauté d’Odanak, afin de discuter avec les étudiantes et étudiants autochtones et allochtones de la possibilité d’entamer leur carrière en droit. En effet, ce projet aura pour but de leur présenter le Comité, le programme du baccalauréat en droit à l’Université de Montréal et les mesures mises à leur disposition en vue de leur inscription. L’objectif de ce projet est de permettre à davantage d’étudiantes et d’étudiants autochtones d’avoir accès à ce domaine d’étude.

[...] il demeure primordial d’assurer l’existence de comités comme celui-ci afin de promouvoir la diversité et l’inclusion des étudiantes et étudiants issus de ces communautés. »

droit

Sensibiliser la communauté étudiante de la Faculté aux enjeux autochtones

C’est avec le précieux soutien de partenaires que le Comité met en place des évènements diversifiés et enrichissants pour toute la population étudiante. Durant l’année universitaire 2022-2023, le Comité droit autochtone a organisé de nombreuses activités, comme l’évènement Safe space, dont l’objectif était de démystifier certaines questions autour des enjeux autochtones. Les étudiantes et étudiants étaient conviés à une discussion avec les membres du Comité, mais également avec les professeures et professeurs invités, notamment Karine Millaire, Yvette Mollen et Michel Morin. Cette formule s’est avérée très intéressante, et toutes et tous sont sortis grandis de cet évènement, qui a permis non seulement de discuter de la réalité autochtone sur le plan judiciaire, mais également d’aborder d’autres aspects reliés à la culture et à l’éducation dans ces communautés.

Pour l’année 2023-2024, le Comité est heureux de présenter une panoplie d’évènements, dont plusieurs en collaboration avec d’autres comités de la Faculté de droit, toujours dans l’optique de comprendre et de mieux cibler les réalités des peuples autochtones auprès du droit canadien. Par exemple, pour une deuxième année consécutive, conjointement avec le Comité Droit pénal, notre Comité a organisé le 19 mars, une conférence sur la surreprésentation des peuples autochtones en milieu carcéral. À cette occasion, la conférencière sera nulle autre que M me Cyndy Wylde, professeure à l’Université d’Ottawa et experte dans divers domaines du droit autochtone. Mme Wylde a notamment étudié la surreprésentation des femmes dans le milieu carcéral, sujet dont elle a traité dans le rapport de la Commission Viens. Le Comité vous invite à le suivre sur ses plateformes de réseaux sociaux afin d’obtenir plus d’information sur ses prochai nes activités. Tshinashkumitin, migwetc, wliwni, merci ! n

Communauté étudiante 68 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Comité droit et technologie

Pour une utilisation écoresponsable de l’intelligence artificielle

Alors que les sociétés réglementent de plus en plus différents secteurs pour réduire leurs impacts environnementaux, l’entrée en force de l’intelligence artificielle dans nos vies ouvre une voie novatrice dans la lutte aux changements climatiques.

L’

Aïcha Ede

apprentissage automatique (AA), ou machine learning, est une branche de l’intelligence artificielle (IA) qui acquiert une connaissance à partir d’une quantité impressionnante d’informations, qu’elle peut par la suite appliquer dans des contextes spécifiques. Des plateformes telles que ChatGPT et l’assistant Copilote de Microsoft utilisent par exemple l’AA pour opérer. Son potentiel se manifeste dans plusieurs secteurs, notamment celui de l’environnement, qui cherche sans relâche des solutions pour atténuer les effets des changements climatiques et pour s’y adapter. Dans un contexte où il y a urgence d’agir, le potentiel de l’AA offre des pistes de solution, notamment dans des secteurs essentiels tels que l’agriculture, vitale pour assurer la sécurité alimentaire des populations.

Vice-présidente Recherche et développement

En 2021, près de 2,3 milliards d’humains étaient modérément ou sévèrement affectés par l’insécurité alimentaire. Les récents phénomènes météorologiques extrêmes, comme les sècheresses et les pluies diluviennes, font état de la gravité de la situation et de leurs effets présents et futurs sur la production et l’accès à la nourriture. Une vingtaine d’experts en AA ont publié, en 2022, un article explorant les différents secteurs pouvant bénéficier de l’AA pour s’attaquer aux changements climatiques. Dans le domaine de l’innovation agricole, ce sont des avancées comme les prévisions climatiques et l’agriculture de précision qui fournissent un espoir pour remédier aux pratiques nocives pour les terres. Grâce à l’IA, les agriculteurs peuvent analyser la qualité de leur sol, procéder à une meilleure sélection des semences, détecter et éliminer les maladies. En fournissant aux modèles d’AA des milliers de données captées par drone ou satellite, on les entraîne à reconnaître, par exemple, un plant affecté par la maladie. Dans les années à venir, le développement de modèles de prévisions climatiques (à distinguer des prévisions météorologiques) aidé par l’AA viendra réduire l’imprévisibilité du climat

et permettra éventuellement de mieux se préparer et de choisir les semences appropriées en vue des conditions météorologiques de plus en plus extrêmes.

Au mois de juillet dernier, Google annonçait vouloir construire un centre d’entreposage de données en Uruguay, alors que le pays affrontait sa pire sècheresse en 74 ans. Selon certaines données, c’est l’équivalent de la consommation d’eau de 55 000 personnes qui serait dépensé par le centre Google quotidiennement. Cette situation nous rappelle que le stockage et l’entraînement des modèles d’IA ne viennent pas sans un coût énergétique. Il est important de comprendre que cette technologie a un impact environnemental. Il est estimé qu’entre 2 et 6 % des émissions de GES sont engendrées par les centres de données et les appareils utilisés pour la formation et le déploiement des modèles d’AA . En plus de sa consommation énergétique, l’IA entraîne une utilisation importante d’eau, notamment pour ses systèmes de refroidissement. GPT-3 aurait ainsi nécessité 700 000 litres d’eau pour être entraîné. Des pistes de solution existent déjà (par exemple le choix de matériaux), et devront être envisagées sérieusement afin de bien gérer nos ressources face à cette réalité. Il nous incombe d’assurer que l’AA travaille en faveur de l’innovation sociale et non à son détriment. Il n’existe présentement aucune loi ou cadre réglementaire pour l’IA au Canada. Le projet de loi intitulé Loi sur l’intelligence artificielle et les données (LIAD) n’est que le début d’un long travail juridique et politique qui s’impose et qui doit être entamé le plus tôt possible. Considérant la vitesse à laquelle l’IA se développe et l’urgence climatique, il est primordial d’établir des cadres sérieux pour réglementer l’utilisation de l’IA et s’assurer qu’elle soit écoresponsable. Il serait regrettable qu’une utilisation irresponsable et non encadrée de l’intelligence artificielle entraîne plus d’effets néfastes que positifs sur l’environnement, compromettant ainsi l’efficacité de centaines de projets innovants. n

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DOSSIER SPÉCIAL

30e numéro

Droit Montréal

La Faculté de droit de l’UdeM

Incubateur de changement social

La Faculté de droit a été créée en 1878, alors que fut inaugurée une « Succursale de l’Université Laval à Montréal », qui deviendra en 1920 l’Université de Montréal. L’inauguration solennelle de la Faculté de droit eut lieu le 1er octobre 1878 avec l’inscription d’une quarantaine d’étudiants.

DJean Hétu

Ad. E., professeur émérite

ès l’année suivante, la Faculté octroyait ses premiers diplômes à sept étudiants, dont Pierre-Eugène Lafontaine, qui sera doyen de la Faculté en 1918 et juge en chef de la Cour d’appel du Québec en 1922. Une tradition d’excellence va vite s’établir tant par les professeures et professeurs que par les diplômées et diplômés, qui vont avoir une influence considérable non seulement dans le milieu juridique, mais dans la société en général, tant au Québec qu’à l’étranger. Même si la Faculté fut créée à l’intention des Canadiens francophones et catholiques, elle n’a jamais refusé les étudiants provenant d’autres groupes sociaux. Dès les premières années, elle accepta la présence d’étudiants anglophones. Les membres de la communauté juive, discriminés notamment par d’autres facultés, ont également été admis à la Faculté. Ainsi, nous retrouvons dès 1895 Samuel W. Jacobs, premier diplômé de cette communauté. Seul juif à siéger pendant des années au Parlement d’Ottawa, il sera un leader dans la défense des droits sociaux de la communauté juive. En 1928, Juliette Gauthier est la première femme licenciée en droit. Lors de la collation des grades de mai 1931, Louis-Philippe Lainesse, un handicapé visuel, est non seulement licencié avec grande distinction mais il termine premier de sa promotion. En mai 1933, Norman Harry Saylor, originaire de Kahnawake, devient le premier diplômé autochtone. Juanita Westmoreland-Traoré (LL. L. 1966) sera la première femme de couleur à obtenir un diplôme en droit de la Faculté dans les années soixante.

Dans les paragraphes qui vont suivre, nous allons faire état de diverses réalisations de quelques diplômés qui ont eu un impact dans la société, en étant toutefois conscient que beaucoup d’autres auraient pu retenir notre attention.

Des juristes de renom

Environ 18 000 étudiants ont obtenu un baccalauréat ou une licence en droit depuis 1879. Ils font partie d’une grande famille de juristes qui ont joué un rôle important non seulement dans le milieu juridique mais également dans la vie quotidienne des Québécois. Ces juristes sont trop nombreux pour que nous puissions vraiment mentionner leurs noms mais ils sont habituellement bien connus. Par exemple, presque tous les juges en chef de la Cour d’appel depuis Pierre-Eugène Lafontaine (LL. L. 1879) jusqu’à Manon Savard (LL. L. 1985) en 2020 ont étudié à la Faculté de droit. En 1920, Édouard Montpetit (LL. L. 1904) va fonder l’École des sciences sociales, économiques et politiques. Hector Perrier (LL. L. 1919) a fait

adopter une loi pour rendre l’instruction obligatoire dans la province. Gérald Fauteux (LL. L. 1925) est le fondateur et doyen de la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa. Soulignons également le nom de Herbert Marx (LL. L. 1967), ministre de la Justice du Québec en 1985, qui doit être considéré comme le véritable responsable de l’adoption du nouveau Code civil du Québec dont l’impact sur la société n’a pas à être démontré. Il a également créé la Cour du Québec, en plus d’entreprendre la réforme des cours municipales. Il n’est pas sans intérêt de souligner que Pierre Patenaude (LL. L. 1968) fut le doyen fondateur de l’École de droit de l’Université de Moncton (1978-1980), la première au monde à enseigner la common law en français pour l’obtention d’un baccalauréat en droit. Soulignons enfin que Réjane Laberge Colas (LL. L. 1951) est non seulement la première femme au Canada nommée en 1969 juge d’une cour supérieure, mais elle est aussi la présidente fondatrice de la Fédération des femmes du Québec.

Des politiciens qui ont transformé la société Sur la scène politique, nous retrouvons deux gouverneurs généraux (Georges P. Vanier et Jules Léger), un premier ministre du Canada (Pierre Elliott Trudeau), 10 premiers ministres du Québec (Sir Lomer Gouin, Maurice L. Duplessis, Paul Sauvé, Daniel Johnson, Jean-Jacques Bertrand, Jean-Guy Cardinal, Robert Bourassa, Pierre-Marc Johnson, Daniel Johnson fils et Bernard Landry) et trois maires de Montréal (Louis-Arsène Lavallée, Jean Drapeau et Jean Doré). Ces personnages politiques, dont plusieurs encore présents dans l’actualité, ont façonné le Québec d’aujourd’hui. Leurs noms se retrouvent d’ailleurs inscrits notamment dans des édifices publics, des stations de métro à Montréal, des boulevards, des parcs. Qu’il me suffise d’ajouter que Georges P. Vanier (LL. B. 1911) a été un membre fondateur en 1920 du Royal 22e Régiment composé de Canadiens français et le premier gouverneur général francophone en 1959; que Lomer Gouin (LL. B. 1885) fut le fondateur en 1907 de l’École des hautes études commerciales de Montréal, en plus de créer en 1911 le Prix d’Europe pour permettre aux musiciens de parfaire leurs études dans le Vieux Continent; que Robert Bourassa (LL. L. 1956) est considéré comme le « père de la Baie-James »; que Jean Drapeau (LL. B. 1941) a organisé l’Expo universelle de 1967 qui a ouvert le Québec sur le monde, en plus de faire construire la Place des Arts et le métro de Montréal. Que dire maintenant de Pierre Elliott Trudeau (LL. L. 1943), qui changea à tout jamais la société canadienne en faisant adopter en 1982 la Charte canadienne des droits et libertés.

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d’histoire
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Trois autres hommes politiques retiennent notre attention parce qu’ils sont les artisans de la Révolution tranquille qui sortit le Québec de la « grande noirceur » à partir des années 1960. Il s’agit de Paul Gérin-Lajoie (LL. B. 1942), premier ministre de l’Éducation en 1964; de Pierre Laporte (LL. B. 1945) ministre assassiné en 1970 par le Front de libération du Québec, et surtout de Paul-Émile Lapalme (LL. B. 1928), considéré par plusieurs comme le « père de la Révolution tranquille ». Ce dernier, premier ministre des Affaires culturelles du Québec en 1961, a rédigé en 1960 le programme politique du Parti libéral qui servit de base aux grandes réformes des institutions québécoises.

Sur la scène internationale

Sur la scène internationale, plusieurs diplômés de la Faculté ont joué un rôle important. Trois noms nous viennent rapidement à l’esprit. Raoul Dandurand (LL. B. 1883) fut en 1925-1926 le président de l’Assemblée générale de la Société des Nations, en plus d’être un des rédacteurs du Protocole de Genève, premier texte international à interdire l’utilisation des armes chimiques et biologiques. Louise Arbour (LL. L. 1970) fut notamment procureure du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda, avant d’être nommée haut-commissaire aux droits de l’homme; elle fut aussi en 2017-2018 la représentante spéciale du secrétaire général des Nations Unies pour les migrations. Philippe Kirsch (LL. L. 1969, LL. M. 1972) fut le premier président de la nouvelle Cour pénale internationale, premier tribunal permanent chargé de la répression des crimes de guerre. Ajoutons le nom de Mélanie Joly (LL. B. 2001), actuellement la ministre des Affaires étrangères du Canada.

Le milieu des affaires

L’étude du droit s’avère un atout pour une personne qui veut faire carrière dans le monde des affaires. Des diplômés se sont illustrés dans ce domaine ou continuent à favoriser le développement économique du Québec. Plusieurs noms peuvent être cités, mais l’espace nous manque pour le faire. Limitons-nous à mentionner Bernard Couvrette (LL. B. 1929) fondateur de la chaîne d’épiceries Provigo; Calin Rovinescu (LL. L. 1978), président d’Air Canada;

Pierre Karl Péladeau (LL. B 1987), président et chef de la direction de Quebecor; Sean Finn (LL. L. 1981), premier vice-président et chef des affaires juridiques du CN. François-Philippe Champagne (LL. B. 1992) est le ministre fédéral de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie et, à ce titre, est une figure importante du développement économique du Québec. Ajoutons que c’est Claude Beauchamp (LL. L. 1964) qui a fondé le journal Les Affaires

Dans les milieux culturel et sportif

Plusieurs diplômés sont devenus, après leurs études en droit, des écrivains, des journalistes, des comédiens, des cinéastes, des animateurs de télévision, des pianistes, des sportifs. Ils nous divertissent et enrichissent la vie culturelle des Québécois. Mentionnons ici quelques noms selon l’année de leur diplomation : Abraham Moses Klein (LL. L. 1933), grand poète du Canada anglais; Alban Flamand (LL. B. 1935), premier animateur d’une émission à caractère juridique à la télévision; Pierre Vadeboncoeur (LL. B. 1941), essayiste et un des penseurs québécois les plus importants; Pierre Perrault (LL. B. 1952), cinéaste; Anne Claire Poirier (LL. B. 1957), première femme à réaliser des longs métrages; François Cousineau (LL. L. 1965), pianiste et compositeur; Charles Tisseyre (LL. L. 1973), animateur de l’émission Découverte à Radio-Canada; Claude Meunier (LL. L. 1973), comédien et auteur de La Petite Vie; Emmanuel Bilodeau (LL. B. 1986), comédien; Kim Thuy (LL. L. 1993), écrivaine; Sébastien Benoît (LL. B. 1993), animateur à la télévision; Julien Brisebois (LL. B. 1999), directeur général du Lightning de Tampa Bay; Anne Montmigny (LL. B. 1999), médaillée aux Jeux olympiques de Sydney en 2000; Émilie Castonguay (LL. B. 2013), assistante du directeur général des Canucks de Vancouver.

On a souvent dit que le droit mène à tout ! Nos diplômées et diplômés ont souvent compris que la formation juridique pouvait les conduire dans d’autres sphères de la société, et ce, afin de favoriser le bien-être des citoyens et d’être des vecteurs de changement social. Notre texte n’a fait cependant qu’un bref survol de la contribution de nos diplômés à l’avancement de la société. n

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L’honorable juge Alice Desjardins (LL. L. 1957)

Briser les plafonds de verre

L’honorable juge Alice Desjardins a brisé de nombreux plafonds de verre au cours de sa remarquable carrière. Elle a marqué l’histoire en devenant la première femme à occuper un poste de professeure à temps plein dans une faculté de droit au Canada ainsi que la première femme nommée juge à la Cour d’appel fédérale1

Alice Desjardins naît le 11 août 1934 à Montréal. Les aspirations de la juge à une carrière juridique sont inébranlables et renforcées par un soutien familial indéfectible. Elle obtient d’abord un diplôme en arts, avec grande distinction, du collège Basile-Moreau, affilié à l’Université de Montréal, avant de demander l’admission à la Faculté de droit de l’Université de Montréal, en 1954

les examens pour son admission au Barreau du Québec, en 1958. Déterminée à poursuivre la réflexion juridique, elle obtient une bourse Mackenzie King pour des études à l’étranger en droit comparé, à la prestigieuse London School of Economics (LSE). Elle y consacre deux ans à affiner ses connaissances en droit constitutionnel, en mettant l’accent sur le droit constitutionnel indien et australien.

Ce texte présente un court résumé d’un chapitre biographique sur la vie de la juge Desjardins, à paraître sous la direction d’Anna Lund et de Virginia Torrie. Le chapitre a été rédigé avec la généreuse collaboration de la juge, qui m’a accordé plusieurs entretiens et fait parvenir de nombreux documents.

Je tiens à la remercier pour sa générosité, mais aussi pour nous avoir ouvert les portes, à nous toutes, professeures des facultés de droit canadiennes.

À cette époque, le nombre de femmes à la Faculté est encore marginal. Cela s’explique par le fait que les femmes n’ont obtenu le droit de vote au Québec qu’en 19402 et l’accès au Barreau du Québec en 1941 seulement. Les barreaux des autres provinces ont, à ce moment, déjà accueilli leurs premières femmes, certains aussitôt qu’en 1897. Ainsi, entre la première femme admise à la Faculté en 1928, Mme Juliette Gauthier, et l’admission de la juge Desjardins en 1954, moins de cinquante femmes ont fréquenté les bancs de la Faculté.

La juge obtient son diplôme en 1957, cum laude, aux côtés de huit autres femmes et de 137 hommes. Elle est dès lors convaincue qu’une carrière classique dans un cabinet d’avocats n’est pas ce qu’elle souhaite. Sa fascination pour le droit réside dans la réflexion et la curiosité intellectuelle plutôt que dans son application utilitaire. Ainsi, à la fin de son diplôme de droit, elle se rend d’abord en Afrique avant de rédiger

Au retour de son séjour londonien, une offre d’emploi relayée par le doyen de la Faculté de droit de l’époque, M. Maximilien Caron, l’attend. La juge Desjardins devient alors, le 1er mai 1961, la première femme à occuper un poste de professeure à temps plein dans une faculté de droit au Canada3. Elle occupe le poste de professeure adjointe de 1961 à 1968, puis de professeure agrégée de 1968 à 1972. Malgré son amour de l’enseignement, sa grande curiosité intellectuelle l’amène à demander un congé de la Faculté pour entamer une maîtrise en droit à l’Université Harvard, en tant que boursière de la Fondation Ford. Elle y arrive en 1966, seulement treize ans après que les femmes aient eu accès à la Harvard Law School4 pour la première fois.

Son diplôme de maîtrise en poche, elle revient à la Faculté avant d’être intéressée par un nouveau défi. Elle demande alors de s’absenter de la Faculté pour occuper le poste de conseillère en droit constitutionnel au Conseil privé à Ottawa. Elle y reste pendant cinq ans avant d’être nommée

1 À moins d’indication contraire, les informations de ce chapitre proviennent d’entretiens avec la juge Alice Desjardins. La référence au livre de Jean Hétu a également été très utile : Hétu, Jean (dir.), Les diplômés de la Faculté de droit de l’Université de Montréal depuis 125 ans, Montréal, Éditions Thémis, 2003, 359 p.

2 Loi accordant aux femmes le droit de vote et d’éligibilité L.Q. 1940, chap. 7.

3 Résolution du Conseil de la Faculté de droit de l’Université de Montréal, no 571.

4 Site Web de la bibliothèque de la Faculté de droit de Harvard, en ligne : https://asklib.law.harvard.edu/faq/115324

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directrice de la section de consultation et de droit administratif au ministère de la Justice du Canada. Elle est alors aux premières loges des discussions juridiques sur le rapatriement de la Constitution et l’élaboration de la Charte canadienne des droits et libertés. En 1974, elle est nommée conseillère de la Reine, un statut honorifique accordé aux avocats et avocates ayant une pratique exemplaire. Elle occupe son poste dans la fonction publique canadienne jusqu’à sa nomination à la Cour supérieure du Québec en 1981

Après six ans à la Cour supérieure, elle devient, en 1987, la première femme nommée à la Cour fédérale, division d’appel (maintenant la Cour d’appel fédérale). Il faudra presque 12 ans avant qu’une autre juge, la juge Karen Sharlow, rejoigne la juge Desjardins à la Cour d’appel fédérale, en 1999. La juge Desjardins demeure en poste jusqu’à sa retraite obligatoire, en 2009. Toujours au service du droit, elle continue de s’intéresser aux questions juridiques puisque, dès 2013, elle participe en tant qu’intervenante dans le débat devant la Cour suprême dans l’affaire du Renvoi relatif à la Loi sur la Cour suprême, art. 5 et 65

La bibliothèque de la Faculté de droit expose la toge de la juge Alice Desjardins La Faculté de droit invite la communauté étudiante ainsi que le corps professoral à visiter la bibliothèque de droit afin de voir la toge de la juge Alice Desjardins, première femme nommée juge de la Cour d’appel fédérale et membre de droit de la Cour fédérale du Canada de 1987 à 2009, qui est exposée.

Après l’attribution de deux doctorats honorifiques, le premier de l’Université d’Ottawa et le second de l’Université de Montréal, ses importantes réalisations sont trop marquantes

pour échapper à l’attention, malgré sa grande discrétion. La juge Alice Desjardins a également été célébrée par le Harvard Law Bulletin en 2003 dans le cadre du 50e anniversaire de l’admission des femmes à la Harvard Law School comme l’une des cinquante diplômées s’étant distinguées au cours de ces cinquante années6 n

5 L.R.C. 1985, ch. S-26; Renvoi relatif à la Loi sur la Cour suprême, art. 5 et 6, 2014 CSC 21. 6 Harvard Law Bulletin, été 2003, p. 32.
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Le parcours de Harry Pierre-Étienne (LL. B. 1983) Quand tout est possible !

Il n’est pas donné à tous de témoigner du courage de leur père. Dans le cas de Me Harry Pierre-Étienne, son parcours depuis la dictature d’Haïti jusqu’à la Cour suprême du Canada est un voyage inspirant qui mérite d’être raconté.

Jonathan Pierre-Étienne

LL. B. 2012

Associé

Grondin Savarese

Pour moi, c’est une source d’inspiration et une fierté de marcher dans ses souliers ou plutôt, dirais-je, d’avoir échangé mes épaulettes de football pour porter sa toge.

Né à Port-au-Prince le 26 janvier 1955, Harry a grandi à l’ombre de François Duvalier. Bien qu’il ait passé ses premières années en Haïti, il se souvient principalement des paysages idylliques et d’une adolescence naïve, souvent étouffée par le silence oppressant de la dictature. À l’âge de 17 ans, alors que sa vision se détériorait rapidement en raison d’un glaucome agressif, Harry a fait le saut à Montréal, espérant une vie meilleure.

L’éducation et la lutte pour l’accessibilité : un parcours de détermination

Durant ses cours, il utilisait un minienregistreur pour retenir les propos du professeur.

Il a rapidement constaté sur le campus un grave problème d’accessibilité, tant du matériel pédagogique que des installations physiques. Sa détermination à améliorer la situation des étudiantes et étudiants handicapés l’a conduit à obtenir une subvention en 1982 dans le cadre d’un travail d’été. Grâce à cette initiative, il a sensibilisé la direction de l’Université et les professeurs et professeures aux défis quotidiens des personnes handicapées en écrivant de nombreux articles pour les journaux du campus. À la suite de ces efforts, l’Université l’a embauché comme conseiller technique, poste qu’il a occupé jusqu’en 1986

Jonathan Pierre-Étienne poursuit l’héritage de son père, non seulement en droit mais aussi en engagement communautaire. Il a été président du Jeune Barreau de Montréal en 2019-2020 et secrétaire du Barreau de Montréal; il est présentement vice-président de l’Association du Barreau canadien, division du Québec, et président des assemblées du conseil d’administration de l’Institut québécois de réforme du droit et de la justice.

Peu de temps après son arrivée à Montréal, la perte totale de la vue a confronté Harry à une réalité nouvelle et à des défis majeurs d’accessibilité. C’est à l’Institut Louis-Braille qu’il a été initié au monde du braille, développant ainsi des compétences essentielles pour sa mobilité. Son sens de l’humour distinct et sa capacité d’adaptation rapide l’ont aidé à se distinguer. C’est ainsi qu’un passant, le voyant marcher avec facilité, lui demanda : « Es-tu aveugle pour le vrai ou pour le fun ? » Harry, avec son autodérision caractéristique, lui répondit : « Pour le fun, évidemment. » Son parcours universitaire n’a pas été de tout repos. Il a été admis dans deux établissements, optant finalement pour un baccalauréat en droit à l’Université de Montréal en 1979. Ce choix n’était pas sans obstacles : la quantité de travail et le manque de livres sonores l’ont parfois submergé.

Harry a également fondé l’Association des étudiants handicapés de l’Université de Montréal et contribué à sensibiliser l’établissement aux besoins de ces étudiants et étudiantes. Le bilan de ses efforts s’est avéré positif, des améliorations notables sur le campus reflétant plusieurs de ses recommandations.

En parallèle à ces accomplissements, sa vie personnelle s’est également épanouie lorsqu’il a rencontré une étudiante en sociologie de l’Université de Montréal qui est devenue sa compagne de vie, Chantale Boily, ma mère.

Une carrière au service de la justice Après, il y a eu l’École du Barreau (mais surtout ma naissance pour égayer ses nuits d’étude) suivie de la quête d’un stage qui s’est révélée un autre combat (plus grand que me mettre une couche). Malgré quelques refus, Harry a persévéré, demandant à être évalué sur ses compétences

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plutôt que sur son handicap. Sa détermination a payé, le menant à une carrière de plus de 30 ans au DPCP qui, à l’époque, portait le nom de Bureau du substitut du procureur général.

L’un des moments marquants de sa carrière a été sa plaidoirie devant la Cour suprême du Canada, une occasion rare et un témoignage de son expertise en droit. Je me sens privilégié d’avoir pu me rendre à Ottawa pour vivre ce moment, alors que j’étais étudiant en première année de droit à la Faculté. C’est également une fierté pour mon père que son fils ait aussi plaidé dans un dossier d’importance devant cette même institution.

Un héritage d’impact

En plus de ses accomplissements professionnels, Harry s’est engagé dans sa communauté. Que ce soit comme membre fondateur du Congrès des avocats et juristes noirs du Québec, en siégeant à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse ou en recevant des distinctions telles que le prix Sylvio Cator et le titre de citoyen d’honneur de la ville de Montréal, son impact est indéniable.

Aujourd’hui, Harry jette un regard serein sur ses 30 ans et plus de carrière au DPCP, mais garde des aspirations pour l’avenir, espérant une meilleure intégration des technologies pour les personnes handicapées visuelles. Il continuera à les utiliser dans le cadre de sa deuxième carrière à titre d’avocat de la défense qui l’amène déjà à parcourir la province. Bref, c’est une courte retraite pour Harry qui carbure aux défis!

Hommage au père, grand sportif et mentor

Tout au long de son parcours, Harry Pierre-Étienne a incarné une force de caractère inébranlable. Sa persévérance face à l’adversité, que ce soit en surmontant la cécité ou en luttant pour les droits et l’égalité, en fait un modèle pour tous, y compris pour moi, son fils.

« Tout au long de son parcours, [mon père] a incarné une force de caractère inébranlable. Sa persévérance face à l’adversité, que ce soit en surmontant la cécité ou en luttant pour les droits et l’égalité, en fait un modèle pour tous, y compris pour moi [...] »

Sa contribution ne se limite pas seulement à sa carrière professionnelle. En tant que père, il a instillé des valeurs de travail acharné, de détermination et d’empathie. J’ai vu, de première main, comment sa présence rayonnante et son esprit combatif ont influencé et inspiré ceux et celles qui l’entouraient. Il est un exemple de comment, avec résilience et détermination, on peut surmonter n’importe quel défi.

Parlant de défi, Harry détient une ceinture noire au judo, un sport qu’il a pratiqué à haut niveau avec l’équipe nationale canadienne de judo pendant plus de 20 ans. Aujourd’hui, il est toujours en quête de limites à dépasser et vous pouvez le croiser (mais jamais le rattraper) sur son tandem en montant la voie Camillien-Houde. C’est cette même passion du sport et du dépassement de soi qui m’a permis d’obtenir une bourse d’études complète dans la NCAA div. 1A, à l’Université Rutgers, dans le New Jersey.

Harry Pierre-Étienne n’est pas seulement un avocat, un militant ou un défenseur des droits. Il est un pionnier, un leader et un pilier de sa communauté. Pour moi, il restera toujours ce père aimant, ce mentor précieux, et ce symbole d’espérance et de résilience.

La trajectoire de mon père est une leçon pour nous tous. Elle nous rappelle que malgré les obstacles, avec passion et détermination, nous pouvons réaliser nos rêves et laisser un impact durable. C’est cette détermination qui m’a amené à persévérer au football et, du point de vue de l’impact social, à m’impliquer dans la communauté juridique.

J’espère que son histoire incitera d’autres personnes à croire en elles-mêmes et à relever leurs défis, à poursuivre leurs passions et à faire une différence dans leur communauté. Pour tous ceux et celles qui connaissent et aiment Harry Pierre-Étienne, il est la preuve vivante que tout est possible. n

75 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
Le fils et le père Pierre-Étienne, Jonathan et Harry, en 1990

André d’Orsonnens (LL. B. 1983), à l’origine d’une bouillante communauté d’innovation

Un avocat à la défense du français

Plaideur coloré et habile communicateur, André a quitté un grand cabinet d’avocats afin de se consacrer à Druide informatique, la société spécialisée en intelligence artificielle linguistique qu’il a cofondée. Il orchestre depuis 1996 la commercialisation d’Antidote, le célèbre logiciel d’aide à la rédaction plébiscité par la presse de toute la francophonie.

André d’Orsonnens

LL. B. 1983

Président du conseil et chef de la direction Druide informatique

Il n’y a pas que la revue Droit Montréal qui fête un 30e anniversaire. Il en va de même pour Druide informatique, la société fondée en 1993 par l’avocat André d’Orsonnens et les informaticiens Éric Brunelle et Bertrand Pelletier dans le but de mettre la puissance de l’ordinateur au service de la langue française. Autre anniversaire dans la vie d’André, voilà maintenant 40 ans qu’il a obtenu son baccalauréat de notre faculté.

« Je garde un excellent souvenir de mon passage à la Faculté, se remémore-t-il. J’y ai appris à poser les bonnes questions afin de bien cerner les multiples facettes d’un enjeu. Je m’y suis également fait des amis pour la vie. Je pense notamment à Paul-André Mathieu et à Pierre Trahan. Sans leur soutien pendant les premières années de Druide, sa trajectoire n’aurait pas été la même. »

En 1995, André d’Orsonnens s’apprête à quitter Heenan Blaikie pour préparer la commercialisation d’Antidote. Me Paul-André Mathieu sait que le budget très serré de Druide laisse peu de place à l’embauche d’un salarié additionnel. Il invite donc son ami à joindre son étude — dans un immeuble qu’il venait tout juste d’acheter et où Druide serait locataire. Cette invitation idéale allait permettre à André, pendant quelques années, de consacrer 80 % de son temps à Druide tout en rendant des services juridiques à quelques autres clients lui procurant 80 % de ses revenus.

Me Pierre Trahan, pour sa part, avait fondé sa première entreprise en 1984 : Cedarome Canada. Onze ans plus tard, cette société productrice d’huiles essentielles connaissait déjà beaucoup de succès, permettant ainsi à son fondateur de

devenir un actionnaire influent de Druide. « J’ai été séduit par l’impact qu’Antidote allait avoir sur des compagnies comme la mienne. Je me souviens de m’être dit que lorsque mes employés s’expriment dans un français écrit de piètre qualité, cela rejaillit négativement sur l’image de ma société. Cela peut même en affecter la crédibilité ! Une solution comme Antidote était appelée à devenir incontournable. »

Un véritable Office de la langue française

Les correcteurs grammaticaux et les dictionnaires numériques existaient déjà. Mais personne n’avait pensé à rassembler ces ressources en un seul véritable logiciel d’aide à la rédaction du français.

« Dès sa première édition, Antidote réunissait un correcteur grammatical, un dictionnaire de définitions, un dictionnaire de conjugaison et une grammaire. Le tout en une interface unifiée de consultation et de présentation. Nous avons positionné Antidote comme étant à la langue française ce que les suites de type Office sont à la bureautique, explique André d’Orsonnens. Le marché a répondu avec enthousiasme à cette innovation. Et depuis, Druide n’a jamais cessé d’investir en recherche et développement, augmentant sans relâche la richesse de sa suite logicielle qui compte désormais une dizaine de dictionnaires et autant de guides linguistiques. Individuellement, chacun de ces ouvrages rivalise avec les meilleurs de sa catégorie. Ensemble, ils n’ont pas d’égal. »

Ce dont il est le plus fier

À cette question, le président du conseil et chef de la direction de Druide parle spontanément de

PHOTO © GALA DU PRIX DES LIBRAIRES DU QUÉBEC 2022, BÉLISLE DOSSIER SPÉCIAL 30e numéro Droit Montréal 76 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

la contribution de son entreprise à la collectivité. Il précise que parmi les millions d’utilisateurs et utilisatrices d’Antidote, bon nombre de ceux et celles qui éprouvent des troubles d’apprentissage écrivent désormais avec plaisir et assurance.

Il mentionne aussi un programme de don mis en œuvre par Druide au Canada, puis en Belgique et maintenant en France, qui consiste à remettre gratuitement une licence à une école pour 10 exemplaires vendus au détail.

Il s’attarde enfin au don d’un million de dollars à l’Université de Montréal — effectué à l’occasion des 20 ans d’Antidote — pour créer le Fonds Druide pour la recherche en analyse de texte.

En fait, depuis maintenant plusieurs années, l’engagement d’André envers la langue française et l’éducation dicte entièrement son action bénévole. Il est administrateur de la Fondation pour l’alphabétisation et gouverneur de la Fondation Paul Gérin-Lajoie, au profit de laquelle il organise un tournoi de golf annuel depuis 2009. Il préside aussi le comité de direction de la Chaire de recherche sur les apprentissages fondamentaux en littératie, créée en 2022 grâce à un don d’un million de dollars de Druide informatique à la Fondation de l’UQÀM pour contrer les difficultés

« [...] parmi les millions d’utilisateurs et utilisatrices d’Antidote, bon nombre de ceux et celles qui éprouvent des troubles d’apprentissage écrivent désormais avec plaisir et assurance. »

d’apprentissage de la lecture et de l’écriture. Enfin, il préside le conseil d’administration de l’École des entrepreneurs du Québec.

André d’Orsonnens a reçu, au nom de Druide, l’OCTAS de la Réussite commerciale pour le logiciel Antidote. L’Office québécois de la langue française lui a remis un Mérite pour souligner la contribution de Druide au rayonnement international du français. Sur une base plus personnelle, on lui a décerné le Mérite du Barreau de Montréal, Il a aussi été finaliste au Grand Prix de l’entrepreneur d’Ernst & Young en plus d’être élu PDG de l’année par ses pairs de l’Association québécoise des technologies. En 2016, il a reçu le Prix MÉRITIC – Honoris Causa devenant ainsi membre du Cercle des Grands Bâtisseurs québécois des TI. Plus récemment, l’Association des diplômés en droit de l’Université de Montréal lui a remis un de ses prix Distinction qui visent à honorer des diplômées et diplômés exceptionnels ayant contribué au rayonnement de la Faculté. n

77 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
PHOTO PIERRE TISON — TISON.CA

30e numéro

Droit Montréal

L’ascension de Julien BriseBois (LL. B. 1999) vers les hautes sphères du sport

Marquer des points

Le diplômé Julien BriseBois est bien connu à titre de directeur général du club de hockey Lightning de Tampa Bay. Mais Julien a d’abord eu le coup de foudre pour le baseball et le droit des affaires avant d’amorcer sa carrière dans le hockey professionnel. Rencontre avec un passionné qui n’est pas près d’accrocher ses patins...

Quelle place occupait le sport dans votre vie avant d’entamer vos études universitaires ?

J’ai toujours été un passionné de sport. Enfant, j’étais principalement un amateur de baseball. D’ailleurs, lors de mes trois dernières années au secondaire, j’ai fait partie du programme sport-études baseball à l’école Édouard-Montpetit à Montréal. J’ai pratiqué le hockey, le football, le basketball, le tennis, le ski et le squash. Encore aujourd’hui, je m’entraîne régulièrement et j’ai développé un grand intérêt pour le pickleball depuis la pandémie. Pourquoi aviez-vous choisi d’étudier le droit ? À l’adolescence, mon plan A était de jouer au baseball professionnel. Mon plan B était de devenir avocat. La profession d’avocat me semblait stimulante intellectuellement et j’étais attiré par le fait qu’elle était exercée par plusieurs personnes d’influence dans la société. Pourriez-vous nous en dire plus sur votre parcours chez Heenan Blaikie ? Recommanderiez-vous à un étudiant ou une étudiante qui souhaite se faire une place dans le milieu du sport professionnel de commencer sa carrière dans un cabinet spécialisé en droit des affaires ?

J’ai travaillé chez Heenan Blaikie seulement pendant un peu plus de deux ans, mais ce fut la période la plus formatrice et la plus enrichissante de ma carrière. En partie parce que je commençais, donc j’avais tout à apprendre. Aussi, parce que c’était un environnement hyperstimulant. J’étais entouré d’avocats chevronnés et nous travaillions sur des dossiers très intéressants pour des clients très accomplis. Les associés m’ont délégué beaucoup de responsabilités très rapidement, ce qui m’a permis d’apprendre rapidement et de me

faire valoir. Quant à savoir si un étudiant ou une étudiante désirant œuvrer dans le milieu du sport professionnel devrait commencer sa carrière en droit des affaires, ma suggestion serait plutôt de s’appliquer à devenir d’abord un excellent avocat ou une excellente avocate. C’est l’excellence de notre travail qui va ouvrir le plus de portes. La meilleure façon d’atteindre cet objectif est de travailler aux côtés d’avocates et avocats d’excellence et d’apprendre auprès d’eux. Comment avez-vous vécu votre transition entre la pratique privée à un poste aux affaires juridiques au sein des Canadiens de Montréal ?

J’étais très enthousiaste à l’idée de travailler pour une équipe de la Ligue nationale de hockey et de faire partie d’un groupe qui pouvait compétitionner pour remporter la coupe Stanley. J’étais également excité de me joindre à l’organisation des Canadiens, une des plus prestigieuses institutions du Québec. J’avais hâte de travailler au quotidien avec André Savard et Pierre Boivin qui étaient à l’époque respectivement directeur général et président de l’équipe. Je savais que j’allais apprendre beaucoup à leurs côtés et il était important pour moi de justifier la confiance qu’ils m’avaient démontrée en m’embauchant. J’étais également soulagé de ne plus avoir à remplir de feuilles de temps ! Et ensuite, votre ascension au sommet de la hiérarchie dans la Ligue nationale de hockey ? J’ai été chanceux d’avoir des patrons qui m’ont fait confiance et qui n’ont pas eu peur de me déléguer de plus en plus de responsabilités. Après avoir travaillé comme adjoint à André Savard, j’ai épaulé Bob Gainey lorsqu’il est devenu directeur général des Canadiens. Au fil du temps, Bob m’a donné des responsabilités qui m’ont permis de croître en

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SPÉCIAL
Avec la collaboration du Comité droit et sports de la Faculté de droit
DOSSIER

tant qu’administrateur dans le monde du hockey professionnel. Puis, j’ai travaillé avec le directeur général Steve Yzerman à Tampa Bay, avant de me voir confier la fonction de directeur général lorsque Steve a délaissé son poste en 2018. Quelle est la place que le droit a occupée dans chacune de vos fonctions et comment vous ont-elles aidé dans votre cheminement ?

Lors de mes débuts au sein de l’organisation des Canadiens en 2001, 20 % de mon temps était alloué aux affaires de l’organisation en tant que conseiller juridique et 80 % aux opérations de hockey.

À l’été 2006, j’ai délaissé les responsabilités de la première fonction pour me consacrer entièrement aux opérations de hockey. Je n’ai pas pratiqué le droit depuis. Toutefois, la rigueur sur le plan de la communication et du raisonnement acquise lorsque j’ai travaillé comme jeune avocat me sert encore dans mes activités professionnelles aujourd’hui. Comment exercez-vous votre leadership dans un milieu aussi compétitif ? Quelle est la recette de votre succès ?

Je crois qu’un leader doit pouvoir clairement communiquer la mission du groupe, élaborer la stratégie à suivre pour remplir ladite mission, s’entourer des bonnes personnes pour exécuter la stratégie et procurer à ces personnes les ressources et le support nécessaires pour qu’elles puissent connaître du succès. J’ai été chanceux, tout au long de ma carrière, d’être entouré de collègues très performants. J’ai à la fois appris auprès d’eux et bénéficié de la qualité de leur travail. Comment on se sent d’avoir son nom inscrit deux fois sur la coupe Stanley et deux fois sur la coupe Calder ?

C’est un grand sentiment d’accomplissement chaque fois. Ce qui ajoute à l’intensité de l’émotion

qui accompagne un championnat au hockey professionnel, c’est qu’il s’agit d’un exploit collectif et que le sentiment d’accomplissement est partagé avec tous les autres membres de l’organisation, avec nos proches et les partisans. Le sentiment de pur bonheur qui accompagne un championnat de la coupe Stanley est partagé avec toute une collectivité. C’est incomparable. Est-ce important pour vous de redonner à l’équipe de hockey féminin des Carabins ?

C’est important pour moi de redonner à l’Université de Montréal. En tant que diplômé ou diplômée, on a une responsabilité de faire rayonner l’université qui nous a donné les moyens de nos ambitions. Ici, au Québec, c’est une des plus grandes institutions du savoir au monde et la plus grande en français à l’extérieur de la France. Je suis content de pouvoir aider. Ce que j’espère vraiment, c’est inspirer d’autres diplômés et diplômées à faire des dons pour qu’on puisse bâtir sur cet important actif de la société québécoise qu’est l’Université de Montréal. Je suis très fier d’être associé à un programme réputé comme celui des Carabins. La progression et les succès qu’a connus son équipe de hockey féminin depuis ses débuts sont assez phénoménaux. Le hockey universitaire canadien représente l’excellence au sein de la pyramide du hockey féminin et les Carabins en sont une référence au pays.

Quels conseils donneriez-vous aux étudiants et étudiantes qui souhaitent laisser leur marque dans le milieu sportif ? Comment se distinguer ? Lorsqu’une organisation sportive affiche un poste à combler, il y a généralement des centaines de candidatures. Chaque candidate ou candidat est passionné, intelligent et travaillant. La clé est justement de trouver une façon de se distinguer, de contribuer différemment à l’organisation par rapport aux autres candidats et candidates. Lorsque j’ai été sélectionné pour faire un stage chez Heenan Blaikie, ce qui m’a différencié des autres, c’était que j’avais rédigé un article sur la relation contractuelle entre un athlète professionnel et son agent en vertu du droit québécois. L’article avait été publié dans la Revue juridique Thémis et c’est sur cette base que le cabinet avait vu en moi quelqu’un qui pouvait aider à démarrer une pratique en droit sportif. Lorsque les Canadiens m’ont embauché, initialement, c’était basé sur le fait que j’avais développé une expertise en matière de dossiers d’arbitrage salarial pour les équipes de la Ligue nationale alors que je pratiquais chez Heenan Blaikie. La publication des résultats d’une recherche sur un sujet relié au sport, par exemple sur des statistiques avancées, ou la publication d’un article touchant au droit sportif sont des façons de se distinguer et de développer un début d’expertise. n

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Éditions

Thémis

Les Éditions Thémis : editionsthemis.com

Jean-Claude Gémar

La quête de l’expression optimale du droit : le langage du droit à l’épreuve du texte, Essai de jurilinguistique 2023, 438 p.

978-2-89400-474-6

Hervé Agbodjan Prince, Stéphane Rousseau

Rétrospective sur 25 ans de recherche en droit des affaires et du commerce international au CDACI

2023, 646 p.

978-2-89400-471-5

Hugues Parent

Traité de droit criminel, Tome II, La culpabilité, 5e éd. 2023, 908 p.

978-2-89400-483-8

Pascale Lecocq

25e Conférence Albert-Mayrand : Le droit des biens au 21e siècle : vers une approche plus solidaire ?

2023, 35 p.

978-2-89400-493-7

Luc B. Tremblay

L’interprétation en droit : une question d’opinion ?

2023, 157 p.

978-2-89400-494-4

Jean Pineau†, Serge Gaudet, Danielle Burman, Catherine Valcke Théorie des obligations, 5e éd., Livre I – Les sources des obligations

2023, 687 p.

978-2-89400-445-6

Nathalie Vézina

24e Conférence Albert-Mayrand : La responsabilité contractuelle et les silences du législateur

2023, 52 p.

978-2-89400-490-0

Marel Katsivela

Responsabilité délictuelle et responsabilité extracontractuelle au Canada, 2e éd.

2023, 656 p.

978-2-89400-491-3

Jean Pineau†, Serge Gaudet, Danielle Burman, Catherine Valcke Théorie des obligations, 5e éd., Livre II – Les effets des obligations

2023, 610 p.

978-2-89400-476-0

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Livres

Ysolde Gendreau

Ysolde Gendreau, Research Handbook on Intellectual Property and Moral Rights, Éditions Edward Elgar, 2023, 582 p.

Ce livre ambitieux examine les droits moraux depuis leur création au XIXe siècle et considère les rôles qu’ils jouent au XXIe siècle dans un droit d’auteur fortement imprégné de son environnement technologique et politique. Rassemblant de riches perspectives sur le droit de la propriété intellectuelle dans le monde, cet ouvrage propose de nouveaux regards sur les questions traditionnelles du droit moral et analyse les défis plus récents en matière de droit d’auteur, de droit des brevets et de droit des marques.

La Pre Gendreau a remporté le prix « Intellectual Property Law Book of the Year » à l’occasion de la 6e édition du concours organisé par le blogue IPKat, pour cet ouvrage. Le blogue IPKat est régulièrement désigné comme étant un des meilleurs, voire le meilleur blogue en propriété intellectuelle.

Stéphane Rousseau

Stéphane Rousseau, Droit des valeurs mobilières – Théorie et pratique, Les Éditions

Thémis, 2023, 902 p. Divisé en douze chapitres, l’ouvrage propose une étude approfondie du droit des valeurs mobilières. Le traitement de l’ensemble des régimes se fait dans une perspective tant théorique que pratique. La perspective théorique puise dans le positivisme juridique tout en faisant appel au droit comparé. Elle intègre également les enseignements de la science économique, incluant l’économie financière, pour étayer la compréhension des marchés des capitaux et des choix réglementaires. Au-delà de la perspective théorique, l’ouvrage comporte une perspective pratique du fait qu’il étudie l’application des règles en tâchant d’expliquer leurs conséquences concrètes pour l’ensemble des acteurs.

Revues et collectifs

Han-Ru Zhou

n Han-Ru Zhou, « L’État de droit, une perspective de droit comparé – Canada », Unité Bibliothèque de droit comparé, Service de recherche du Parlement européen, mai 2023

Ce document s’intègre dans une série d’études qui, dans une perspective de droit comparé, visent à faire une présentation du concept d’État de droit dans différents États et organisations internationales. Après une explication du droit positif et de la jurisprudence, le contenu, les limites et la possible évolution de ce concept sont examinés.

Pierre Trudel

n Pierre Trudel, « Freedom of Speech and the Regulation of Fake News in Canada – Compliance with the Truth is not a Condition of Protection », dans Oreste Pollicino (dir.), Freedom of Speech and the Regulation of Fake News, Cambridge (R.-U.), Intersentia, 2023

Au Canada, la protection de la liberté d’expression empêche que des lois puissent freiner la propagation d’affirmations qui ne seraient pas jugées conformes à la « vérité ». Ces censures, s’il y a lieu, doivent être pleinement justifiées et, par-dessus tout, ne concerner que des affirmations volontairement trompeuses et consciemment mensongères.

Publications professorales 81 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Revues et collectifs

Miriam Cohen

n Miriam Cohen, « Documentary Evidence », Max Planck Encyclopedia of International Procedural Law, Oxford Public International Law, 2023

Cet article examine la notion de preuve documentaire telle qu’elle est employée dans divers tribunaux et cours à travers le monde, afin de proposer, dans une perspective comparative, une approche critique des façons de recueillir ces preuves documentaires, de les admettre et de les évaluer sur le plan des lois internationales.

n Miriam Cohen, « Droits fondamentaux et justice internationale : le rétablissement de la démocratie face à la guerre russo-ukrainienne », Droit, justice et démocratie, sous la direction de l’honorable J. Michel Doyon, Colloque du lieutenant-gouverneur du Québec, Éditions Yvon Blais, 2023

Cette publication a pour but de rassembler les textes présentés par les conférencières et conférenciers experts : juristes, politicologues, chroniqueurs et commentateurs sociaux et politiques, venus traiter de sujets non seulement d’actualité, mais également d’une grande importance pour la sauvegarde de l’État de droit.

n Silviana Cocan et Miriam Cohen, « La dualité de la responsabilité internationale de l’État et la responsabilité pénale individuelle dans le cadre de la guerre russo-ukrainienne : une analyse à la lumière de la poursuite de l’acte d’agression et des crimes de guerre », Revue québécoise de droit international, hors-série octobre 2023

Depuis le déclenchement du conflit armé sur le territoire ukrainien le 24 février 2022, les violations graves du droit international humanitaire et les violations flagrantes du droit international des droits de la personne ont abouti rapidement à la saisine de plusieurs juridictions internationales comme la Cour internationale de justice, la Cour pénale internationale ou encore la Cour européenne des droits de l’homme.

n Catherine Régis, Pierre Larouche, Stéphanie Bernadette Cadeddu, Gaëlle Foucault, Miriam Cohen et Jean-Louis Denis, « National Compliance with World Health Organization Norms During the Pandemic: A Comparative Empirical Study », Revue belge de droit international, Éditions Bruylant, Bruxelles, 2021

La pandémie de COVID-19 a placé sous le feu des projecteurs les interactions complexes entre l’Organisation mondiale de la Santé et ses États membres, suscitant des critiques de la part de commentateurs provenant de tous les horizons. Cet article cherche à dépasser les prises de position et les discours publics pour s’intéresser au comportement réel des États membres lors de la première vague de la pandémie.

Amissi Manirabona

n Amissi M. Manirabona et Flavie Masson, « La face cachée des plaidoyers de culpabilité négociés par des entreprises : l’exemple de l’affaire R c. SNC-Lavalin », 2022, Revue générale de droit, 52

Dans le présent article, nous nous penchons sur les difficultés découlant des plaidoyers de culpabilité négociés par les entreprises et enregistrés devant les juridictions criminelles canadiennes. Nous partons de la décision relative au plaidoyer de culpabilité survenu en décembre 2019 entre le ministère public canadien (la Couronne) et la société d’ingénierie montréalaise SNC-Lavalin Construction inc., une filiale du groupe d’entreprises Groupe SNC-Lavalin inc.

Stéphane Beaulac

n Stéphane Beaulac, « L’“égalité des armes” – une expression bénie ?

– en droit processuel au Québec : le rôle du droit international », 2022, Revue générale de droit, 52, 269-313

Si l’« égalité des armes » en est à ses balbutiements en droit processuel au Québec, son potentiel de croissance semble considérable. Après avoir défini sa nature et vu ses ancrages juridiques — l’article 23 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec et les principes directeurs du Code de procédure civile — et à la suite d’un bref examen des quelques affaires y ayant eu recours en jurisprudence, la discussion se concentre sur la filiation de droit international du principe. n Stéphane Beaulac, « Québec et Canada – Pluralité, diversité et appréhensions propres des droits humains », dans L. Burgorgue-Larsen (dir.), Plurality and Diversity in Law: The Human Rights Paradigm, Cambridge, R.-U., Intersentia, 2022

Les notions de diversité et de pluralisme sont, dans de nombreux et très divers contextes, au premier rang des débats contemporains sur les droits humains. Cet ouvrage apporte une compréhension approfondie de ces deux concepts, au moyen de l’analyse des systèmes législatifs de 23 pays d’Afrique, d’Asie et d’Europe ainsi que des systèmes européen et interaméricain des droits de la personne.

Publications professorales 82 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Harith

Al-Dabbagh

n Harith Al-Dabbagh, « Le droit comparé, outil de dialogue entre monde musulman et monde occidental », dans F. Ferrand et O. Moréteau (dir.), L’institut de droit comparé Édouard Lambert dans le siècle, Actes du colloque du centenaire de l’Institut de droit comparé de Lyon, 2022, 103-144

L’idée de dialogue n’est point étrangère au droit comparé. En étudiant et en confrontant les différentes traditions juridiques du monde, le comparatiste établit un dialogue entre elles. Il va sans dire que ce dialogue est facilité lorsqu’il existe une communauté linguistique ou culturelle entre les droits étudiés. Mais quid du cas de la comparaison impliquant des cultures juridiques aussi éloignées que celles relevant du monde musulman et du monde occidental? Tirant parti des fonctions cognitive et normative souvent attribuées à la discipline, l’auteur envisage la contribution du droit comparé au dialogue entre les cultures juridiques musulmanes et occidentales.

Jean Leclair

n Jean Leclair, « Tis a Rock — a Crag — a Cape? A Cape? Say Rather a Peninsula!, The Supreme Court of Canada’s Revisitation of the National Concern Doctrine », 2022, The Supreme Court Law Review, vol. 108

Après un survol du contexte juridique ayant précédé les renvois relatifs à la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, cet article examine comment la majorité, dans le rendu de ce jugement, a remodelé la doctrine de l’intérêt national de façon à permettre aux deux niveaux de gouvernement de légiférer sur un même sujet, soit la taxe carbone. n Publication de la 6 e Conférence annuelle ChevretteMarx sous la direction de Han-Ru Zhou et Jean Leclair. L’honorable Russell Brown, avec un commentaire de Dwight Newman, K.C., Vers une théorie canadienne de la séparation des pouvoirs, Les Éditions Thémis, 2023, 50 p.

Dans nos sociétés toujours plus complexes, il ne reste guère d’aspects de la vie qui ne soient pas réglementés. Mais plus les pouvoirs de l’État s’accroissent, plus les gens se méfient de la façon dont ils sont exercés. P. J. O’Rourke a un jour fait cette déclaration célèbre : « Donner de l’argent et du pouvoir aux gouvernements, c’est comme donner du whisky et les clés de l’auto à un adolescent. »

Michel Morin

n Michel Morin, « Reinforcing the French Legacy while Borrowing from the Common Law: The Civil Code of Quebec (1991) », dans The Making of the Civil Codes: A Twenty-first Century Perspective, 2022

Après avoir retracé l’histoire de la coexistence des règles de droit civil et de common law dans le droit privé du Québec, ce chapitre passe en revue les différentes étapes qui ont mené à l’adoption d’un nouveau Code civil en 1991, y compris l’élaboration de lois protectrices distinctes et l’élimination de propositions qui ont suscité une forte opposition.

n Michel Morin, « An Introduction to the Legal System of Quebec, Written for a Diplomat », Revue québécoise de droit international, 101, 2021

Cet article présente le système juridique québécois, à la suite d’une demande d’un diplomate récemment nommé à Montréal.

n Michel Morin, « Une province peut-elle modifier la partie V de la Loi constitutionnelle de 1867 portant sur les constitutions provinciales? Une analyse historique », dans G.-A. Berthold et B. Lefebvre (dir.), Mélanges en l’honneur du professeur Pierre-Claude Lafond, Montréal, Yvon Blais, 2022, 767-801

Cet article analyse la récente modification unilatérale de la partie V de la Loi constitutionnelle de 1867 par le législateur québécois. Dans un premier temps, une analyse des dispositions se rapportant aux constitutions provinciales et à celle du Canada est effectuée. Dans un second temps, l’examen du pouvoir des législatures de modifier leur propre constitution dans l’Empire britannique et au Canada ne permet pas davantage d’inférer cette possibilité. n

Voyez toutes les publications professorales en archives sur le site Internet de la Faculté.

droit.umontreal.ca

83 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Fonds du 50e anniversaire de la Clinique juridique

Mission accomplie !

Afin de clore les festivités entourant le 50e anniversaire de la Clinique juridique, une campagne de masse a été lancée auprès des diplômés et diplômées de la Faculté de droit pour permettre la création d’un fonds de bourses récompensant des étudiantes et étudiants de 2e et 3e années du baccalauréat en droit inscrits aux activités de la Clinique juridique et engagés dans un projet social ou communautaire en lien avec l’accès à la justice. C’est grâce à la générosité de nos diplômées et diplômés que la campagne a atteint son objectif d’amasser 50 000 $.

Le Fonds de bourses du 50e anniversaire de la Clinique juridique permettra la remise de deux bourses de 2 500 $ annuellement. Les premiers bénéficiaires de ces bourses seront connus dès l’hiver 2024

La Clinique juridique est un lieu d’apprentissage précurseur, dynamique et engagé dans sa communauté. Sous la supervision d’une équipe d’avocates, avocats et notaires chevronnés, les étudiantes et étudiants de la Clinique juridique offrent un service gratuit d’informations et de conseils juridiques à la population, incluant les membres de la communauté universitaire.

Les activités de la Clinique ont une double mission, soit de développer les aptitudes pratiques des étudiantes et étudiants, tout en les familiarisant avec la profession juridique, et aussi de faciliter l’accès à la justice. Elles répondent du même coup à une préoccupation réelle et primordiale d’offrir au public une meilleure compréhension de ses droits et obligations et, ainsi, un accès amélioré à la justice.

Fondation Rossy Don important à la Clinique juridique

Lieu d’apprentissage novateur et engagé dans la communauté, la Clinique juridique de l’Université de Montréal est bénéfique pour le public ainsi que pour la population étudiante. Elle confère des crédits par l’acquisition d’habiletés liées au savoir-faire et au savoir-être, ainsi que par la prise en considération du contexte social de la cliente ou du client dans la pratique du droit. Grâce à son don important, la Fondation Rossy permet entre autres à la Clinique juridique de l’UdeM d’élargir son équipe, initialement composée de 6 étudiantes et étudiants en 3e année de baccalauréat, par l’arrivée de 10 personnes.

Voyez toutes les retombées de cette contribution dans la chronique « Coup d’œil sur la Clinique juridique » en page 20.

« En participant aux activités de la Clinique juridique, j’ai pu acquérir et développer plusieurs compétences essentielles à ma future carrière en droit. Parmi celles-ci, je crois que les plus importantes sont l’écoute active, le travail d’équipe, la gestion du temps et la communication juridique. Ces aptitudes ont été grandement perfectionnées en traitant des dossiers réels. J’ai appris à évaluer les faits, à cerner les problématiques juridiques et à élaborer des stratégies solides pour étayer mes arguments. Mon aisance dans la communication s’est aussi nettement améliorée grâce aux interactions fréquentes avec les clients et les avocats. Je me sens à présent beaucoup plus confiante pour exposer de manière convaincante mes arguments, que ce soit à l’oral ou à l’écrit. » – Marie Duchaine-Brunet, stagiaire au service-conseil, 2022-2023

84 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
Dons et philanthropie
Chantale Mercier Directrice adjointe des affaires facultaires Réseau des diplômés et des donateurs

Notre grande pionnière, Huguette St-Louis (LL. L. 1968)

Concrétisation d’un projet philanthropique inspirant

Intéressée par la sociologie du droit et l’organisation judiciaire, Huguette St-Louis a fait preuve d’une grande générosité envers la communauté étudiante, poursuivant une maîtrise ou un doctorat à la Faculté de droit, en créant un fonds de dotation personnalisé qui rendra pérenne la remise des bourses Huguette St-Louis. Ces bourses sont destinées à une étudiante ou un étudiant de 2e ou 3e cycle démontrant l’excellence de son dossier et un intérêt particulier pour la sociologie du droit ou l’organisation judiciaire. Les premières bourses seront remises en décembre 2024.

Elle-même admise à la Faculté de droit de l’UdeM en septembre 1965, Huguette St-Louis obtient sa licence en droit en mai 1968. Elle pratique le droit surtout en matière civile, administrative et matrimoniale jusqu’à sa nomination comme juge à la Cour provinciale du Québec en 1984. Lors de la création de la Cour du Québec en 1988, elle est nommée juge en chef adjointe à la Chambre civile, devenant ainsi la première juge de nomination provinciale à occuper un poste administratif dans une cour de justice québécoise. En 1996, elle est nommée juge en chef de la Cour du Québec et présidente du Conseil de la magistrature. Elle est ainsi la première femme juge à occuper ces fonctions de direction tant à la Cour du Québec qu’au Conseil de la magistrature du Québec.

S’étant toujours intéressée à l’accès à la justice même après sa retraite de la Cour du Québec, elle a fait partie des membres qui ont fondé l’Observatoire du droit à la justice et l’Institut québécois de réforme du droit et de la justice, dont elle était la vice-présidente.

Huguette St-Louis est décédée en novembre 2023 (voir la mention en page 14).

Bibliothèque des livres rares et collections spéciales (BLRCS) de l’UdeM

Un pan de notre patrimoine juridique en cadeau

M. Carl Spadoni, ancien directeur des archives et des collections de recherche de l’Université McMaster, a fait don d’une partie des archives de l’ancien juge James Reid. L’honorable James Reid, ancien juge en chef, laisse une trace indélébile dans les annales juridiques de la province de Québec. Selon certains, il aurait été l’un des juges les plus respectés du public à cette époque : « Nul juge n’a possédé la confiance publique et le respect de ses concitoyens à un plus haut degré durant toute sa carrière judiciaire. Sa vie entière fut un exemple que les membres de la profession légale devraient se faire un devoir d’imiter, mais qu’aucun ne peut espérer dépasser. » – The Montreal Herald, 20 janvier 1848 (source : caij.qc.ca). Par ce geste de générosité, M. Spadoni désire honorer la mémoire de Mme Geneviève Bazin, qui fut la première cheffe du Service des livres rares et collections spéciales (ancêtre de la BLRCS)

LIVRES CAIJ • MÉDAILLON ARCHIVES DE LA VILLE DE MONTRÉAL

Nos diplômées et diplômés

Les honneurs

Daniel Granger (LL. L. 1973)

Insigne de chevalier de l’Ordre national du Québec

Nouvelle en ligne n Ordre national du Québec : des membres de l’UdeM figurent parmi les nouvelles nominations

Louise Arbour (LL. L. 1970)

Insigne de commandeur de l’Ordre de Montréal

Nouvelle en ligne n Quatre membres de l’UdeM font leur entrée à l’Ordre de Montréal

Didier Lluelles (LL. L. 1972)

Lauréat 2022 de la médaille

Paul-André-Crépeau

Nouvelle en ligne n Didier Lluelles lauréat 2022 de la médaille

Paul-André-Crépeau

Aminata Bal (LL. M. 2005)

Prix Diversité lors de la cérémonie des Prix du recteur

Nouvelle en ligne n Le personnel de l’UdeM célébré + Prix du recteur 2023

Ekaterina Tsimberis (LL. B. 1998) Juge de la Cour fédérale

Ekaterina Tsimberis, diplômée de la Faculté de droit en 1998, a été nommée juge à la Cour fédérale par le ministre de la justice David Lametti. La juge Tsimberis remplace le juge Roger R. Lafrenière, qui avait choisi de devenir juge surnuméraire à compter du 4 juin 2021. La juge Tsimberis parle couramment l’anglais, le français et le grec. Entre 1999 et 2022, elle a été avocate, associée et directrice chez Smart & Biggar S.E.N.C.R.L. où elle a exercé brillamment dans le domaine du droit de la propriété intellectuelle. Elle a reçu de nombreux éloges pour son travail dans le domaine de la propriété intellectuelle et des litiges connexes et a été reconnue par plusieurs répertoires évalués par les pairs comme une avocate de premier plan au Canada dans ces domaines.

Laurence Prud’homme (LL. B. 2018) et Émile Aquin (LL. B. 2020)

Auxiliaires juridiques à la Cour suprême du Canada

Félicitations à Laurence Prud’homme et à Émile Aquin qui ont été retenus à titre d’auxiliaires juridiques à la Cour suprême du Canada pour l’année 2024-2025. Ces stages d’un an leur offriront, entre autres, l’occasion d’effectuer des recherches sur des points de droit ou encore de rédiger des mémoires à l’intention des juges en plus d’assister ceux-ci à la Cour.

Laurence Prud’homme se joindra au cabinet de l’honorable juge Suzanne Côté. Émile Aquin exercera dans le cabinet de l’honorable juge Russell Brown.

Dominique Lebrun (LL. M. 2021) Mémoire qui change les pratiques de la DPJ

Dominique Lebrun a rédigé son mémoire de maîtrise ayant pour sujet le formulaire discriminatoire d’adoption de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ). Derrière les questions morales et éthiques, Me Lebrun fait la démonstration dans son mémoire que cette pratique de la DPJ contrevient à la Charte des droits et libertés de la personne et à la Constitution canadienne. Après avoir pris connaissance du mémoire, la DPJ souhaiterait réviser le formulaire en question. Me Lebrun a travaillé sous la supervision d’Alain Roy, professeur titulaire et spécialiste du droit de la famille.

Valentine Fau (LL. D. 2022) Prix de la meilleure thèse de l’APDQ Valentine Fau, diplômée de la Faculté en 2022, a remporté le prix d’excellence pour sa thèse de doctorat Les droits de l’enfant sous l’angle du régime de régulation post-moderne de l’Association des professeures et professeurs de droit du Québec (APDQ) Remis chaque année et décerné par un jury composé d’un membre de chacune des six universités participantes de l’APDQ, ce prix est accompagné d’une bourse de 2 500 $. Rédigée sous la supervision de Pierre Noreau, la thèse de Valentine Fau comprend deux volets centraux : l’un relatif au sujet d’étude, le droit des enfants, analysé depuis un cadre théorique nouveau, constitutif du second volet; l’autre revêtant une dimension théorique tout aussi fondamentale à l’apport scientifique de cette thèse. La mise en commun de ces deux volets, c’est-à-dire l’analyse des droits de l’enfant à travers un cadre théorique spécifiquement constitué, permet d’envisager de nouvelles perspectives pour ce champ juridique.

86 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Pierre Karl Péladeau (LL. B. 1987)

Ordre du mérite de l’UdeM

Pierre Karl Péladeau a reçu lors de la soirée Étincelles l’Ordre du mérite de l’UdeM qui souligne ses réalisations, son engagement exceptionnel et sa brillante carrière.

Pierre Karl Péladeau est un bâtisseur, un philanthrope et un ardent défenseur de l’éducation, de la culture québécoise et de la langue française. Cette distinction est la plus haute remise par l’Université de Montréal.

Emmanuelle Atongfor (LL. B. 2023) Prix de la Société royale du Canada

Emmanuelle Atongfor (LL. B. 2023) reçoit le prix Rosalie-Silberman-Abella de la Société royale du Canada. Cette distinction reconnaît les personnes les plus susceptibles d’exercer une influence positive en ce qui a trait à l’équité et à la justice sociale, que ce soit au pays ou à l’étranger. Cofondatrice de l’Organisation des étudiant(e)s noir(e)s en droit de l’Université de Montréal, Emmanuelle Atongfor s’est engagée dans plusieurs projets durant ses études. Elle est convaincue que le droit est au centre de la justice sociale et de l’équité, et considère que les personnes qui étudient ou ont obtenu leur diplôme dans ce domaine se doivent d’être des vecteurs de changement au sein de leur communauté.

Avocats émérites

2022

Brigitte B. Garceau (LL. B. 1991)

Reine Lafond (LL. B. 1992)

André Ryan (LL. B. 1993)

Marie-Ève Sylvestre (LL. B. 1999)

2023

Caroline Biron (LL. B. 1990)

Karine Chênevert (LL. B. 2004)

André Comeau (LL. L. 1971)

Patrick Gingras (LL. M. 2001)

France Houle (LL. D. 2000)

Pierre Meunier (LL. L. 1966)

Sarah Plamondon (LL. B. 1993)

Mario Welsh (LL. B. 1983)

Félicitations pour ces nominations

1963

Jacques Girard (LL. L.)

Membre, Conseil de l’Ordre national du Québec, Montréal, Laval, Laurentides, Lanaudière et Montérégie

1971

Louise Provost (LL. L.)

Membre, Comité de la rémunération des juges, Gouvernement du Québec

1973

Jacques Reeves (LL. L.)

Membre indépendant, Conseil d’administration, Musée de la civilisation

1978

Lise Bertrand (LL. L.)

Présidente, Société généalogique canadienne-française

Calin Rovinescu (LL. B.)

Membre, Conseil d’administration, Plusgrade

1980

Mario Laframboise (D.D.N.)

2022

Marianne Brouillet (LL. B. 2014)

2023

Marie Flambard (LL. B. 2011)

Nareg Froudjian (LL. B. 2016)

Sébastien Girard (LL. B. 2019)

Alexandra Haiduc (J.D. 2019)

Jerry Zi Yi Huang (D.E.S.S. 2021)

Maria Christina Sorbo-Mayrand (LL. M. 2021)

Joey Suri (LL. B. 2015)

Député de Blainville, Coalition Avenir Québec

1981

Yves de Montigny (LL. M.)

Juge en chef, Cour d’appel fédérale

Daniel Y. Lord (LL. L.)

Président, Conseil de discipline et désigné président en chef, Bureau des présidents des conseils de discipline

1982

Michel Canuel (LL. B.)

Michel Morin (LL. B.)

Vice-doyen aux affaires internationales, Faculté de droit de l’Université de Montréal

Martine

L. Tremblay (LL. B.)

Membre, Conseil de la magistrature

1984

Marie-Josée

Corriveau (LL. B.)

Sous-ministre associée, Ministère de la Justice du Québec, Gouvernement du Québec

Hélène Lauzon (LL. B.)

Membre indépendante, Conseil d’administration, Société du Plan Nord

Michel P. Synnott (LL. B.)

Président de conseil de discipline, Bureau des présidents des conseils de discipline, Gouvernement du Québec

1985

Nancy J. Trudel (LL. B.)

Directrice générale du bureau montréalais, Gowling

1986

Carole Fortin (LL. B.)

Régisseuse, Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec, Gouvernement du Québec

1987

Carole Arav (LL. B.)

Sous-ministre du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Ministère de l’Éducation, Gouvernement du Québec

Gilles Bergeron (LL. B.)

François Bibeau (D.D.N.)

Membre, Office de la protection du consommateur, Gouvernement du Québec

Élyse Lemay (LL. B.)

Membre, Conseil d’administration, Fondation Dr Clown Anik Trudel (LL. B.) Présidente, Conseil d’administration, Chambre de commerce du Montréal métropolitain

1988

Martine Brodeur (LL. B.)

Régisseuse, Régie du bâtiment du Québec, Gouvernement du Québec

Ginette Dépelteau (LL. B.)

Membre et présidente, Comité de retraite du régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels, Gouvernement du Québec

Marc Novello (LL. B.)

Président, Conseil d’administration, Fondation Sport-Études

1989

Marco LaBrie (LL. B.)

Juge en chef adjoint de la Chambre criminelle et pénale, Cour du Québec

1990

Sonia LeBel (LL. B.)

Députée de Champlain, Coalition avenir Québec

Nominations Jeune Barreau de Montréal →

Fady Toban (LL. B. 2016)

Membre, Tribunal administratif du travail, Gouvernement du Québec

Régisseur et v.-p., Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec, Gouvernement du Québec

Ministre responsable de l’Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor, Gouvernement du Québec

87 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

David Sultan (LL. B.) Président, Commission québécoise des libérations conditionnelles, Ministère de la Sécurité publique, Gouvernement du Québec

Marylin Thomas (LL. B.)

Membre, Conseil d’administration, Conseil des arts de Montréal

1991

Sonia Boisclair (LL. B.)

Membre, Conseil de la justice administrative

Johanne Gagnon (LL. B.)

Membre, Tribunal des droits de la personne, Cour du Québec

Brigitte Garceau (LL. B.)

Députée de Robert-Baldwin, Parti libéral du Québec

Christian Leblanc (LL. B.)

Membre indépendant, Conseil d’administration, Société des alcools du Québec

Benoit Sabourin (LL. B.)

Juge en chef associé, Cour du Québec

1992

Annie Bourgault (LL. B.)

Coroner à temps partiel, Gouvernement du Québec

André Albert Morin (D.E.S.S.)

Député de l’Acadie, Parti libéral du Québec

Catherine Pilon (LL. B.)

Membre, Tribunal des droits de la personne, Cour du Québec

1993

Isabelle Labranche (LL. B.)

Juge, Cour du Québec, Chambre civile, Saint-Hyacinthe

1994

Sophie Lussier (LL. B.)

Première v.-p. et cheffe des services d’entreprise, performance organisationnelle et secrétariat, CDPQ Infra, Caisse de dépôt et placement du Québec

1995

Julie Cuddihy (LL. B.)

Vice-présidente séniore aux affaires juridiques et capital humain, Intelcom

Enrico Forlini (LL. B.)

Juge, Cour supérieure du Québec

Jean-François

Fortin (LL. B.)

Sous-ministre délégué de la Justice, Ministère de la Justice du Canada, Gouvernement du Canada

Vincent Frenette (LL. B.)

Directeur, Borden Ladner Gervais

Marc Gosselin (LL. B.)

Juge, Cour du Québec

Christian Jarry (LL. B.)

Juge, Cour du Québec, Chambre criminelle et pénale, Saint-Hyacinthe

Annick Laberge (D.E.S.S.)

Sous-ministre, Ministère du Tourisme, Ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Gouvernement du Québec

Michelle Setlakwe (LL. B.)

Députée de MontRoyal–Outremont, Parti libéral du Québec

1996

Virginie Brisebois (LL. M.)

Membre, Tribunal administratif du travail, Gouvernement du Québec

Jean-François

Denis (LL. B.)

Chef, direction client, Lavery

Alexandre Henri (LL. B.)

Juge, Cour du Québec Chambre civile, Saint-Jérôme

Martine Lachance (LL. M.)

Coroner à temps partiel, Gouvernement du Québec

Jonathan Meunier (LL. B.)

Juge, cour municipale, Ville de Laval

Christiane Pelchat (LL. B.)

Membre indépendante et présidente, Conseil d’administration, Société québécoise de récupération et de recyclage

1997

François Brais (LL. B.)

Associé directeur de la région du Québec, Fasken

1998

Mylany David (LL. B.)

Présidente du conseil d’administration, Fondation de l’Institut national de la recherche scientifique

Christina Vigna (LL. M.)

Membre, Conseil d’administration, Office franco-québécois pour la jeunesse

1999

Caroline Dulong (LL. B.)

Juge, Cour municipale, Ville de Laval

Éric Jacob (LL. B.)

Directeur général du contrôle des marchés, Autorité des marchés financiers

Marie-Claude

Nichols (Cert.) Députée de Vaudreuil, Indépendante

Yan Paquette (LL. B.)

Sous-ministre associé, Ministère de la Justice, Gouvernement du Québec

Sébastien

Pierre-Roy (LL. B.)

Juge, Cour supérieure du Québec

2000

France-Élaine

Duranceau (LL. M.)

Ministre responsable de l’Habitation

Députée de Bertrand, Coalition Avenir Québec

Walid Hijazi (LL. B.) Coroner à temps partiel, Gouvernement du Québec

Martin Raymond (LL. B.)

Président du conseil d’administration, De Grandpré Chait

Michel Simard (LL. B.) Régisseur, Régie de l’énergie, Gouvernement du Québec

Marc Tanguay (LL. B.)

Député de Lafontaine, Chef de l’opposition officielle, Parti libéral du Québec

Hugo Tremblay (LL. B.)

Vice-doyen aux affaires internes et Secrétaire de Faculté, Faculté de droit de l’Université de Montréal

2001

Maxime Gilbert (LL. B.)

Membre avocat, Tribunal administratif du Québec

Martin Imbleau (LL. M.)

Président-directeur général, Train à grande fréquence (TGF)

Chantal Labelle (LL. B.)

Vice-présidente des affaires juridiques, Devimco Immobilier

2002

Marie-Ève

Bélanger (LL. B.)

Juge, Cour supérieure du Québec

Simon Lavoie (LL. B.)

Juge de paix magistrat, Cour du Québec

Jonathan Martin (LL. B.)

Juge, Cour du Banc du Roi de l’Alberta

Louis Sévéno (LL. B.)

Président, Division du Québec, Association du Barreau canadien (ABC-Québec)

2003

Élisabeth Ferland (LL. B.)

Directrice adjointe du service des affaires juridiques, Laval

2004

Marie-Claude Boutin (LL. B.)

Coroner à temps partiel, Gouvernement du Québec

Alexandre Cloutier (LL. M.)

Président, Université du Québec

Mélanie Roy (LL. M.)

Juge en chef adjointe, Chambre de la jeunesse, Cour du Québec

2005

Rosalie Helen Kott (D.E.S.S.)

Juge, Chambre de la jeunesse à Montréal, Cour du Québec

2007

Jocelyne Jarry (LL. M.)

Membre, Conseil de la magistrature

Maryse Paquette (LL. B.)

Juge, Cour municipale, Ville de Saint-Jérôme

2008

Alex Goupil (D.E.S.S.)

Membre, Commission de protection du territoire agricole du Québec, Gouvernement du Québec

2009

Selena Lu (LL. B.) Récipiendaire de la médaille d’honneur de l’Assemblée nationale du Québec

Jean-Philippe

Marcoux (LL. B.)

Juge, Cour du Québec, Chambre criminelle et pénale, Longueuil

2010

Alain R. Roy (LL. M.)

Membre et président, Bureau d’audiences publiques sur l’environnement

2011

Pauline Halpern (LL. B.)

Directrice générale, Société des auteurs de radio, télévision et cinéma

Antoine Leduc (LL. D.)

Premier vice-président, Affaires juridiques et secrétaire général, Renaud-Bray

2012

Julien Provost (J.D.)

Membre, Commission des transports du Québec, Gouvernement du Québec

2016

Pierre Luc Déziel (LL. D.)

Membre, Conseil d’administration, Fonds de recherche du Québec – Nature et technologies

Alex Vandal-Milette (LL. B.)

Président du conseil d’administration, Cégep de Sorel-Tracy

2017

Karine Mac Allister (LL. D.)

Directrice générale, CAIJ

2021

Hélène Vallières (J.D.)

Membre avocate, Tribunal administratif du Québec

2023

Raphael Amabili-Rivet (LL. M.)

Membre et viceprésident, Office de la protection du consommateur

Nos diplômées et diplômés Félicitations pour ces nominations 88 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

Christian Khoury (LL. B. 2009)

Naviguer dans les mondes juridiques avec intégrité et engagement

Christian Khoury, diplômé de la Faculté de droit de l’Université de Montréal, incarne l’intégrité, l’expertise juridique polyglotte et un engagement sans faille dans des environnements juridiques complexes à l’échelle internationale.

Réseau des diplômés et des donateurs de l’Université de Montréal

Article rédigé par Andréa Khoury

Dès ses débuts, il a su se démarquer en conjuguant sa maîtrise du droit civil et de la common law, alliée à son expertise en langues, lui conférant un avantage distinctif. Il explique que cette combinaison lui a ouvert des portes et l’a aidé à naviguer à travers les défis internationaux :

« La polyvalence dans ma formation, m’ayant permis de comprendre et d’opérer efficacement dans les systèmes juridiques de droit civil et de common law, s’est avérée cruciale pour ma carrière internationale. »

Après l’obtention de son diplôme, Christian Khoury a rapidement gravi les échelons dans le monde juridique. Ses premières expériences professionnelles l’ont conduit à Paris, où son excellence linguistique et son modèle juridique ancré dans le système anglo-saxon lui ont valu un poste de stagiaire dans un cabinet réputé. Il a profité de cette opportunité pour perfectionner ses compétences linguistiques en anglais, en arabe et en espagnol, tout en préparant son admission au Barreau de New York. Dans les faits, sa capacité à naviguer entre les systèmes juridiques a été une constante dans sa carrière, lui permettant d’exceller dans des secteurs aussi variés que l’agroalimentaire, la mode, l’aviation et l’aide humanitaire.

Trajectoires inspirantes

Christian Khoury partage son expérience :

« Dès le début de ma carrière, j’ai compris que ma maîtrise du droit civil et de la common law était un atout majeur. Cet atout m’a permis de m’adapter rapidement aux besoins de clients opérant dans différents secteurs, du droit de la mode à l’aide humanitaire. »

En effet, son parcours international l’a conduit à des missions au sein de l’ONU, où sa compréhension des sanctions économiques a été cruciale pour faciliter des transactions financières difficiles dans des environnements politiquement sensibles. Il souligne l’importance de cette compétence polyvalente dans le contexte mondial :

« Le droit des sanctions économiques est complexe, mais il a joué un rôle clé dans la facilitation de transferts de fonds internationaux en toute conformité avec la réglementation. »

Christian Khoury s’est également engagé à maintenir un niveau d’excellence rigoureux tout en embrassant la diversité culturelle, une qualité précieuse pour réussir dans des environnements internationaux :

« La réussite dans le domaine juridique, surtout à l’échelle internationale, requiert un ensemble de compétences et de valeurs précieuses. Il est impératif d’être polyculturel, capable de s’adapter avec aisance à des cultures diverses, tout en préservant sa propre identité. »

D’ailleurs dans son rôle actuel, Christian Khoury a démontré l’importance d’être polyculturel et d’anticiper les défis logistiques dans des environnements internationaux. Il a souligné l’essence de la spécialisation dans des domaines du droit exportables, offrant ainsi un conseil inestimable à la communauté étudiante en droit et aux jeunes diplômés et diplômées aspirant à une carrière internationale enrichissante :

« La clé réside dans la préparation, la persévérance et la confiance en votre capacité à relever les défis de manière proactive. »

En résumé, Christian Khoury, en tant que fervent défenseur de l’intégrité et du professionnalisme juridiques, est un exemple inspirant de l’adaptabilité et de l’excellence polyglotte dans les défis internationaux du droit. Son parcours dynamique démontre que la détermination inébranlable et la vision transcendant les frontières peuvent ouvrir des portes inestimables dans le monde complexe du droit international. Ses compétences polyvalentes et son engagement à briser les frontières du droit en font un modèle pour les communautés étudiante et professionnelle aspirant à une carrière juridique internationale réussie. n

89 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024
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C. KHOURY THOMAS VAILLANT

Au-delà du droit

Écouter sa voix intérieure

Quel chemin prendre ?

J’ai souvent entendu au détour de conversations : « Tu verras Sophie, le droit mène à tout ! »

« Ton entregent fera de toi une développeuse d’affaires hors pair ! » Tout ceci s’est avéré.

Par Sophie Hébert, LL. B. 2008, directrice des relations de travail à l’ADISQ

Mais pas exactement dans le contexte que j’avais initialement figuré lorsque j’étudiais au baccalauréat. Car soyons honnêtes : peu d’étudiantes ou étudiants sont réellement en mesure de prédire, dans leur jeune parcours universitaire, de quoi sera composée leur destinée dans ce vaste monde du droit.

Ce vaste monde qu’on s’imagine très certainement grand, mais dont on ignore totalement les délimitations, mais surtout, les opportunités. Ce vaste monde dont je ne soupçonnais pas les potentielles synergies avec ma passion première : la musique. Celle que je chantais depuis plusieurs années, qui m’accompagnait lors de mes nuits blanches et noires à étudier, qui composait la trame sonore de ma vie, de Montmagny à Montréal.

C’est à la vue d’un poste de conseillère en relations de travail à l’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo, mieux connue sous le nom d’ADISQ, que j’ai compris ce vers quoi je voulais me diriger : une combinaison entre le droit du travail et de l’emploi (mon sujet de prédilection tant en théorie à l’université qu’en pratique) et la musique et le spectacle. Car, le saviez-vous, le Québec s’est doté, en 1987, d’un régime de négociation collective pour les artistes, majoritairement travailleuses et travailleurs autonomes, et, par conséquent, ne se définissant pas comme salariées ou salariés au sens du Code du travail?

J’y aurai travaillé pendant cinq belles années, pour ensuite combler un besoin de réintégrer le monde du droit du travail et de l’emploi « traditionnel », loin des projecteurs. J’ai intégré de magnifiques équipes d’un contentieux et de deux cabinets, mais plus je progressais dans mon parcours de quête identitaire professionnelle, plus mon subconscient m’encourageait à retourner vers un milieu davantage à l’image de mes valeurs et de mes passions : le milieu associatif, valorisant notre culture. J’ai donc réintégré les rangs de l’ADISQ en avril 2021, cette fois à titre de directrice des relations de travail.

Mon quotidien est ponctué de projets des plus variés, passant de la négociation d’ententes collectives à la gestion de projets structurants pour l’industrie de la musique et du spectacle (notamment en lien avec le harcèlement au travail, la transition numérique de la gestion des ententes collectives), à la participation au sein de plusieurs comités de travail (en matière d’équité-diversité-inclusion, d’écoute et d’accueil de la relève entrepreneuriale, de gouvernance et de ressources humaines), aux comités de direction et aux rencontres du conseil d’administration. Bref, mon emploi du temps n’a rien de linéaire et de redondant; les dossiers sur lesquels je travaille sont variés, concrets, et ont des impacts sur l’ensemble d’une industrie. Et pour finir, une petite anecdote : quand j’ai remis les pieds à l’ADISQ en avril 2021, c’était une sorte de retour au bercail – les ententes collectives que j’avais annotées quelques années auparavant étaient d’ailleurs demeurées dans le tiroir de mon ancien, redevenu actuel, bureau, comme un rappel d’un passé bienveillant, que je retrouvais avec bonheur. Car chères et chers collègues, il ne faut pas lésiner sur son bonheur. J’ai écouté ma petite voix intérieure qui me ramenait vers mes passions premières, au grand dam de ma mère qui ne comprenait pas pourquoi je quittais la « stabilité » de la pratique traditionnelle pour l’« insécurité » d’une pratique en culture. J’aurai su lui rappeler qu’il n’y a rien de plus instable et insécurisant qu’une personne qui fait des choix, contre sa nature propre, sur la base de concepts socialement acceptés, mis sur un piédestal.

« Tu vois maman, le droit m’a menée où je devais me rendre. »

« Je suis une excellente communicatrice, et je suis devenue une négociatrice et médiatrice respectée. »

« Mon entregent aura fait de moi une collègue et gestionnaire appréciée. »

Chères et chers collègues, ayez confiance en vos choix, écoutez-vous, respectez-vous, peu importe le chemin qui vous y mènera. Le bonheur est à votre porte – il ne tient qu’à vous de la lui ouvrir. n

90 Droit Montréal No 30 n Printemps 2024

30 fois merci

à toutes les personnes, collaboratrices et collaborateurs, qui ont permis, au fil des saisons, la création et la publication des 30 numéros passionnants et enrichissants du Droit Montréal

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