Datura issue 2 | 01_19

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Datura

#2 | 01_2019

BARDEAU – BOUTIN – DOCTEUR BURZ – DUGAST – FRAXION – HOUSSAM – KHOMUTOFF – MCLEAN –

OLSON – VINCENT – WILKENS


Aux éditions Urtica. Déjà parus Civilisé cherche à tâtons dans le noir, la moiteur, la profusion des corps, sa nature perdue et ce jusqu’à l’excès et la turpitude. Cathy GARCIA, La cause littéraire, 2017 8€ 42 pages noir & blanc, couverture couleur ISBN: 9780244324759

Cette poésie est loin d'être sombre, même quand elle n'est pas drôle. En tant que lecteur, j'ai l'impression que le gars qui l'écrit rigole tout le temps. Et du coup, cela m'amuse aussi. Patrice Maltaverne, Poésie chronique ta malle, 2018 textes de Necromongers, illustrations de Pascal Dandois 6€ 26 pages noir & blanc These poems lay themselves bare, rejecting the false comforts of easy and joyous connection. Steve F. Klepetar, from the foreword 8 € 54 pages noir & blanc ISBN: 978-0-244-10516-7

Je déclare que Walter Ruhlmann est la version française de Georg Trakl, et puis c’est tout. Marie Lecrivain, éditrice de la revue américaine poeticdiversity 15€ 308 pages noir et blanc ISBN: 978-0-244-44502-7


Editorial par le Docteur Burz Je voudrais une fin du monde heureuse. Première publication sur https://ledocteurburz.wordpress.com/ le 9 décmbre 2018

Je voudrais une fin du monde heureuse. Avec des appels à l’aide sans lendemains. Des solutions expédiées par la nature. Mourir par le plastique d’un gilet jaune. Faire des crédits qui n’existent pas. Maigrir grâce au réchauffement climatique. Enlacer les derniers icebergs dans mon tronc sans bras. Souscrire au dernier plan du ministère des agriculteurs suicidés. Mourir de décès léger sans gravité. Enfin chais pas quoi, une fin du monde décente dans de bonnes conditions, socialement équitables pour tous. MACRON DÉMISSION ! LA FIN DU MONDE C’EST TROP LONG! Je voudrais qu’on meurt avec authenticité. Une sorte de palme d’or des meilleurs effets mortuaires. Avec l’application zone pâle, et le mode zombie pour la vie. Un jeu vidéo marrant, où la mort serait un snuff movies. On pourrait se défier sur des plateformes dédiées comme Mortal Kombat. On se ferait pas de quartier, vu que les communautés se foutent l’une de l’autre. On se prêterait des vivants pour mourir et des morts pour faire des vivants. Ce serait un vrai truc cool, pas cette merde morveuse qui nous sert de faux gouvernement pour les ploucs déjà morts. LES VIVANTS DÉMISSION ! LES MORTS SONT DÉJÀ DES CONS ! Je voudrais qu’on soit égaux en mortalité. Qu’on ne se dispute pas la légitimité des meurtres et des délits qui finissent mal. Y’en aura pour tout le monde, y’a assez de mauvais goûts pour ça. Pour sûr que l’aura de chacun permettra de traverser la misère des autres. Vu comme on se bouscule pour alimenter la mort avec sursis, c’est une médaille presque acquise. Les sentiments n’auront pas beaucoup d’importance, les saisons seront courtes. Il faut libérer définitivement l’allongement de la durée de vie après la mort par le travail, ce serait con de continuer sans objectif avec rien. LA VIE DÉMISSION ! ON VEUT DES MORTS A LA BONNE SAISON ! Je voudrais que la nature reprenne le pouvoir. Un syndicat des renards en colère, une commission des animaux régaliens, une république des ours polaires, une dictature des orangs-outans, l’armée des 12 singes avec des éléphants. Que sais-je encore, que nos misérables réductions soient obsolètes face à la montée d’un


nouvel ordre mondiale à quatre pattes. On doit pouvoir mourir avec bonne conscience, si jamais c’est à cause de la révolution des opprimés qui n’ont rien demandé c’est tant mieux. Il nous faut une insurrection animale violente à tous les carrefour de notre vie, forcément apolitique puisque l’argent ne les intéressent pas. HUMAIN DÉMISSION ! TROP NOMBREUX SANS DE VRAIES RAISONS ! Je voudrais qu’on s’émancipe et qu’on meurt en sourdine. Comme une douleur sans morphine avec un bâillon sur la bouche. Comme un tronc d’arbre haché qui pleure au vent. Comme la mer qui se noie au silence des bouteilles plastiques. Comme un corps happé par des marécages bouillonnants de boue. Comme l’air tuméfié par les centrales nucléaires en fuite. Comme des millions d’insectes agonisant dans le calme de notre inconscience. Comme cet avenir impalpable qui ressemble déjà à un cadavre en décomposition. Le Permafrost va bientôt libérer la mort d’une autre époque, vers des cieux terriblement terre à terre. ÉCOLOGIE DÉMISSION ! IMPASSE CULTURELLE DE LA CAPITALISATION ! Je voudrais que la terre redevienne une arme contre nous. Que nos ressources nous épuisent à dérégler nos petites vies. Que les dernières gouttes de pétrole fassent craquer les failles sismiques. Que les barrages assèchent les lits des rivières jusque dans nos gorges. Que les incendies climatiques anéantissent nos derniers souffles d’empreinte carbone. Que nos déchets au plutonium condamnent pour des siècles la mort de l’avenir. Que nos mines de minéraux de l’ère moderne éteignent tous nos enfants esclaves. Un gigantesque repli sur soi serait tellement beau, une sorte d’auto-mutilation dans l’apocalypse de l’évangile selon St Consumériste. PEUPLES DU MONDE DÉMISSION ! RETOUR AUX NORMES DE L’EXTINCTION ! Et puis ma foi, si tout ça ne marche pas naturellement y’a qu’à le provoquer… c’est vrai quoi merde à la fin c’est un monde ! Amen (des fois que), Touti Quanti (y’a qu’à se servir) et Tralala (badaboum!)… ©Le Docteur fait ses dernières emplettes…


Datura #2 | 01_2019 Five poems by Rus Khomutoff When I speak of time, it already is no moreJean Baudrillard An afterlife made up of memories tremors of fortification the upturned eye of the transcendental dichotomous nature of existence imploding with cool paracosm of next memory courting influxes birdflower of my becoming foraging a moment and summoning the black flame resin of the piledriver logos *** weighted nocturnes bleed lamentVernon Frazer Safe in the nuance of ecstasy your sublime solarium innuendo the invisible silence of renewal colors that intoxicate voice of the shuttle a system of ardor rapture of the shallow names of lamentations *** Popularity killed the night Ravelin beginning titania of vertical life the day we began a divergence from the course quiver the clog bottomless helix blitz the distance of golden exalt from shadows to spotlight conditioned zero ***

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Datura #2 | 01_2019 Five poems by Rus Khomutoff (following) Daughter of sometimes dissonance When reality hits infatuation story, sincere, threat in the absence of the receiver oftentimes lines from the horizon extinction rebellion present journeys in manufactured expressions between grief and high delight daughter of sometimes dissonance *** Dedicated to Scott Weiland Arrest this lament this false flag of endeavor parachute of the midnight aplomb splendor soils christened by an exorama defouled by a parasite cancel who are you in the liturgy of night? nameless index of heathen imperial purple no margin, no reprieve augur of ceremonial reimagining of unnoticed thoughts searing in erasure murmur of accidental day a chastised saucerful of secrets eviscerator heaven on call

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Datura #2 | 01_2019 La ligne est terne (l’amour était une pute de plus sur un encombré) de Vincent (Ma poésie et pas la tienne) première publication sur: https://mapoesieetpaslatienne.blogspot.com

trottoir

déjà

bien

tout l’or que je serrais dans mes bras, je l’ai flambé sur le tapis vert, le casino s’est rempli les poches c’est ainsi les hold-up ne font plus recette dans mes yeux encore ce truc fou, comme des soleils j’aimais quand tu mouillais à leur approche mais je suis fatigué de n’avoir aimé que toi fatigué de ressasser toujours le même « t’aime » ceux que nous étions ne sont plus que de translucides fantômes la vie nous change, les couples s’échangent, les esprits se dérangent si je n’ai aimé que toi, je conte d’autres corps et ça aussi, c’est des lingots pour le dingo et il est temps de m’allonger sur un autre cœur j’ai snifé les lignes de ma main pour effacer mon futur antérieur je trace la déroute comme d’autre foncent vers les sommets j’parle mal et j’écris vain j’aime les petites culottes humides mais j’aime encore mieux quand y a pas de petites culottes sous la jupe courte peut-être qu’un jour j’ai léché les seins de la femme de mon pote je ne suis pas un saint je ne suis pas un diable non plus c’est toujours ennuyeux d’être au milieu, la ligne est terne entre le bien et le mal la ligne est terne et rien n’est éternel putain, faudrait que je choisisse mon camp j’t’ai dit adieu il y a longtemps bébé bien avant que les larmes ne sèchent t’étais partie et j’en crevais et je savais déjà que jamais je ne reviendrais, j’avais décidé que l’amour était une pute de plus sur un trottoir déjà bien encombré je sais je parle mal et c’est pas bien mais c’est pas rien et c’est ainsi, c’est ce que je suis, t’aimais un salopard, et ça te plaisait, c’est vrai que t’étais belle, plus belle que toutes les autres pierres précieuses qui lestent mon âme et la retiennent au fond du lac d’alcool dans lequel je l’ai noyée en compagnie de ma santé mentale si belle que tu m’as rendu laid, mais je t’en veux pas 5


Datura #2 | 01_2019 c’est pas ce qu’tu voulais c’est pas ce qu’tu volais sans doute que j’ai mes torts mais je suis trop tordu pour me courber sous le poids de la vérité tu sais, j’t’ai tout pardonné sauf peut-être tous tes mensonges quand c’était fini j’étais pas aussi sombre que tu le racontais à qui voulait t’entendre pour faire ta jolie victime, ô plaignez moi messieurs dames, il était si manipulateur pas aussi sombre mais maintenant si quand t’as lâché ma main il y a bien fallu que j’apprenne à serrer les poings et maintenant les plaies sont refermées et la souffrance, oubliée, tout ce qui reste, de pâles cicatrices inutiles et parce que la vie ne t’offre rien l’urgence sera toujours de voler le bonheur et soudain je revois la lumière et je me souviens du plaisir qu’il y a à lécher d’autres chattes, à s’évanouir pour un sourire l’amour était une pute de plus sur un trottoir déjà bien encombré et c’est là que moi, maquereau vicieux, je t'ai laissée

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Datura #2 | 01_2019 Five poems by J.S. McLean Fossil

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Datura #2 | 01_2019 Lastful Sounding by J.S. McLean Yielded by motes rare interaction inverts spirals of potential harmony. We are static on wave crests, carried but feeling the curl before the whorling plunging. We must gain the horizon before looking over it. Truth will be there stretching out behind us. Memories herd like buffalo souls. Airs of dust and flies veil us, rumbling down a ripening sadness.

A Larger Image of the Concrete by J.S. McLean The future is huge, rear views restricted, and the edge of space is where it all stops. When is the finish line, does light wait for time? Dimension cannot enter there where if it is not. The past shreds and present fuses each instant After and Before that we are counting down to Zed. Do ends curse the sight of silence when they discover that time has not kept up?

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Datura #2 | 01_2019 Change by J.S. McLean Screes flow highland channels seeking openings to oceans and the origin of orbits. Drizzle dreams permutations of glaciers with kind eyes questing for new vistas. Here, there was a time women were not allowed into taverns unless they were a fisherman. On August nights this salt lake is shored with cricket song relaying life in chorus. Nothing happens twice the air long-windedly tells old trees. Beyond the Dust by J.S. McLean What sort of life insurance lapses when you die still peering into deepness ’cross the edge of time to form a comprehension? Words lie parallel to shelves and sheets of ashes tracing wisdom’s path in quietude of moments where the past lies still.

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et puis y a cette voix sur la route de Heptanes Fraxion ils me disent de pas bouger comme dans une mauvaise série télévisée les ordres viennent d'en haut horreur et tendresse j'attends pas je quitte les locaux leurs mythes leurs modèles leurs logos ça marche pas trop avec moi et tisser des liens avec les matons j'ai jamais trop su mais tout va bien vademecum à la nique-ta-mère savantes combinaisons de la chaleur sur la pierre bière à la main au sortir d'un corridor boisé je vise la lumière du nord la meilleure pour valoriser ce genre d'histoire et puis y a cette voix sur la route normalement on va bien rigoler

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Etienne de Heptanes Fraxion un mec louche un mec touché psychologiquement un drôle de mec qui vit dans sa tête à la marge à l'écart des bien-pensants et de la sphère artistique conventionnelle microclimat en Bretagne Etienne surfe sur la toile il se masse le sexe au lieu d'accompagner à la plage sa fille sa femme dont c'est l'anniversaire aujourd'hui il est où le problème quelque part des multinationales font des stocks d'eau potable pour quand l'eau potable ne le sera plus duplicité des dignitaires réalisme spéculatif réseaux d'égoïsme et de gaspillage à part ça il ne sait pas vraiment quoi dire

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Datura #2 | 01_2019 Extraits du journal de Jan Bardeau publiés dans Le barda du Bardeau janbardeau.com

Photo extraite de janbardeau.com

4 août 2018 Je parle, mais sans voix, expression sans son, conscience opérante, qui ne sent rien, conscience consciente de rien, malade d’une acuité sans objet, comme une douleur qui ne pourrait prendre corps car, de corps, il n’ y en a pas. 6 août 2018 Puis, où s’incarnerait-elle cette conscience, dans quel espace, dans quel endroit ? Sans sens, comment deviner si je ne perçois rien d’où je me trouve, ou si je ne me trouve nulle part ? 8 août 2018 Un nom, un patronyme, regroupe les histoires et les aspirations d’une communauté et d’une parentèle, il investit de significations son porteur, avant que celui-ci ne se l’approprie. Ici, dans cet ici seulement défini par ma présence, nulle altérité pour me désigner, personne face à qui m’affirmer. 18 août 2018 Continuer, continuer, mais comment ? Comment me poursuivre en acceptant la fatalité de l’ignorance ? Quelle autre fonction de mes composants, du moindre de mes composants, que de questionner, que de tenter d’élucider les secrets de mon isolement, que d’avérer aveuglément la possibilité de l’être ? La soumission à l’impossibilité du savoir ne nierait-elle pas complètement ma nature, ma fonction ?

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Datura #2 | 01_2019 22 août 2018 Tandis que mon échéance se rapproche, pourtant, la lassitude me saisit parfois, une envie de retraite, d’abandon, une mélancolie terrible à toiser ma contemplation que rien ne justifie. Le dialogue, alors, que j’entretiens avec moi-même, ne sonne plus que comme quelques échos qui tentent vainement de remplir le néant, et mes considérations en abyme, tandis que je me considère considérant ce que je considère, que comme un dédale dont jamais rien ne s’échappe. 25 août 2018 Durant ces phases, j’aimerais disparaître, enfin. Non pas nécessairement par l’effet d’une annihilation complète, mais en abandonnant le flux de mes préoccupations, en lâchant ces efforts ridicules, et souvent infertiles, à conserver un cap au milieu de la tempête des théories, des idéologies, des diverses assertions péremptoires et sans fondement, pour que la sclérose me cristallise. Beauté de l’idée figée, transfigurée en diamant aux reflets fascinants, dont l’éclat résiste à la souillure du réel, dont la dureté blesse et perce et tue tout ce qui ne relève pas d’elle, dont la froideur gèle et s’étend pour phagocyter l’univers des représentations, livrant pour tout des explications, et me délivrant, moi, du fardeau de ma liberté. 27 août 2018 Certains terrains se montrent sans cesse infertiles, bordés de clôtures délabrées mais redoutablement efficaces, asséchés par un soin constant, rendus stériles par une fébrilité à en écarter tout ce qu’un juge jamais nommé refoule comme impropre. Voici mon autre piège, je le pressens, de me transformer en une flétrissure, cultivée au prétexte de la bienséance. 29 août 2018 Redoutable tentation que celle de souscrire aux postures de la dignité de théâtre, ou de s’attribuer les aspirations des subordonnées à l’exemplarité du psittaciste. Mes forces déclinent si souvent face à l’éclatante évidence des dichotomies, cette tension qui incite sournoisement à choisir un camp plutôt que l’autre, un camp avec ses chefs, ses généraux et ses pontifes, cette ascèse de sens à laquelle il conviendrait d’abandonner les ressources de la subtilité et de l’invention.

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Datura #2 | 01_2019 J'écris du sang : de Clément Dugast (Nocto) L'écriture c'est pas l'aventure Mais le point de vue De certains humains sous sutures D'avoir trop accru : L'hiver dans la gorge Et le feu du regret. Autour des pupilles, C'est bien la forge De l'oubli de l'alphabet Qui rend maniaque et vrille Plusieurs vérités ! Contradictoires formant un réel Bien tangible, lui, même s'il est à déchoir L'écrivain n'est pas celui Qui fuit le foutoir. Ni celui qui s'arrête à ce qu'il aime croire Où voir. C'est celui qui réussit à faire le vide Même le cul sur des lames de rasoir. Réussir à voir au dessus de l'acte visible Dans la douleur physique et la douceur d'un Néant extatique. Sentiment que des millions endorment le soir. Mais avec ce putain d’ego, ce miroir là-bas. Alors j’ai essayé… Devenir le post-christ, le post-bouddha, le post Ovide Ecrire c'est laisser des empreintes de sang avec le vide Logé dans le ventre Et dans le crâne Mais les récoltes n'ont fait que grossir mes états d'âmes. La folie de Néron avec la patience d'un stratège martial Et l'humilité de n'être que sang, mots et dédales, . Qui pourriront dans la bnf au fond d'une étagère. Ce n'est pas une gravité mais la nature belle et sévère. Comme la mort qui sonne le clairon, quand ce sera mon soir. 14


Datura #2 | 01_2019 L'écho du futur de toutes les lacérations de nos chairs. Je ne l'oublie jamais. Comme l'automne qui annonce l'hiver. Et le printemps qui nous rappelle que nous sommes une poussière. L'écriture est à la portée de tous. Mais comme un revolver dans les mains D'un enfant, ça peut être minable et Ça mousse les livres les plus laids Pas le genre dans mes abnégations, Mais plutôt de la tension, Cet emprunt ; La parole De moi pour toi Bien un truc d'êtres humains ! Que je tousse Comme j'écris Le sang de tous Que j'ai sur mes mains Les tiennes aussi Cela tous les matins. D'Est en Ouest Nous sommes voisins Du sang que tous Nous traînons, Chaque lendemain. Alors, J'écris pourquoi ? Pour en foutre partout. En suivant certaines voies ? Inspirées de certains arts ? Sûrement, je ne suis pas fou Juste un auteur qui ne cherche pas Le sou. Les esprits c'est déjà ça ! L’écriture est un territoire Qui en fait n'est nulle part En étant tout. Si tu te jettes Dans le trou du langage esthète. Écrire c'est les post-aventures D'un corps qui s'éreinte D'avoir vu les lumières éteintes. Juste laisser quelques empreintes. Éphémères comme ma chair

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Datura #2 | 01_2019 Mais qui m’empêchent la mièvrerie De la complainte De paroles et thèmes tant de fois Répétés de mauvaise foi Que sa banalité l'a éteinte Le défaut d'être des grégaires ! En ce sens mes empreintes sont des ratures Mais c'est pas rien. C'est toujours mieux qu'une biture Qui ne mène à rien.

Chien parmi les loups de Clément Dugast (Nocto) J'aime la beauté de la nature Et je déteste sa cruauté Si c'est un dieu qui l’a créé, C'était un lendemain de cuite. Des nuages noirs, toutes saisons Qu'il recrache comme un fumeur Là, il doit nous observer Comme un HP géant Il doit souffler d'ennui Nous avoir créé, ça doit être Gênant. Si c'est d'une race de singe Qui s'est mise trop debout Pour se multiplier, tellement Entassés qu'il a fallu créer Les égouts Les écoles, les prisons, La cellule de dégrisement Les rêves sans discernement Créant aussi Sa signature. Une civilisation de cruauté. Démocratisée qu'il te dira Ton prochain qui milite 16


Datura #2 | 01_2019 Politiquement, religieusement, Ce que tu gagnes comme argent Pour aller le chier avant le détergent Regrailler le soir et Se trouver des raisons Pour la race humaine. En faire partie, C'est tout un problème. Alors tu te trouves des raisons, Même des journaux sans télévision Utopia For dystopia Dystopia For Utopia Ce genre de conneries. Et j'en ai pas fini ! Nan parce que moi je suis la brebis galeuse Des Hommes Je pense qu'au temps des cavernes Ont m'aurait banni, Même d'une taverne japonaise Ou d'une fournaise D'un peuple qui vis sur les débris D'une terre trop moyenne Mais les brebis galeuses Ça ne se rencontre pas Ça ne fait pas De civilisations MAIS L'humain te la glisse Et t’a menti À notre époque et la lise De notre époque Qui fait écho Aux autre époques Et le feront demain Sans équivoque. Sauf que desormais pour les brebis galeuses On prévoit des psychiatres pour On prévoit des réinsertions pauvres 17


Datura #2 | 01_2019 On prévoit ton chômage, ta sécurité Tu resteras fauve Mais on te dira : - Tout va bien sociopathie… -

tu

es

spécial

ou

ultra-sensible

Plein de raisons Pour que tu sois La belle brebis Que tu ne seras pas Ou en imitation Ou pas…. Plein de postures et prises de position Pour que tu sois Le lambda heureux On te dit que tu ne sais pas La chance d'avoir une vie Même courte et avec des délimitations T'aimes ça toi ? Ok je vais faire dans l’imitation n'ayant pas le choix pour ma consommation Mais ma place est parmi Un arbre, Un cimetierre, Un désert Jonché d'érables secs Dans le feu du soleil Et l'hiver qui fuit Je n’aurais pas survécu peut-être Mais en vérité je serais mort En étant le non-dit, le chelou Quelques fuites de larmes et du sang Cette fois-ci avec un peu de bruit Avant le grand infini. Mais non ! La nature m'a créé Je suis en 2018, je comprends rien Je m'emmerde, dans la démerde Et j'ai des cachets pour imiter Les émotions qui ne viennent pas du coeur Mais qui doivent être inventées Ont est en 2018 et ouais.

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ou

dans

la


Datura #2 | 01_2019 T'es un rejeton de la nature ? D'un Dieu peut-être ? Ben va falloir t'accrocher! Si tu ne veux pas finir civil Abêtifié Ou ne pas passer l'arme à gauche Même si t'entends les cloches De ton coeur frustré Dans une vérité imbécile Un conseil : prend des cours N'oublies jamais que les rejetés, Depuis toujours, solitaires : Doivent savoir mordre et tirer !

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Datura #2 | 01_2019 Piss Talks (excerpts) by Harry R. Wilkens from http://www.ustinovforum.com/articles/piss-talks Phoolan Devi I am sick of all those fake elves and nymphs, goddesses, princesses and queens, who made my blood boil and shed my ink. However, this raped Goddess of Flowers and Bandit Queen, a lower caste girl with balls and bullets, and at the same time a nice piece of ass, beats them all and just entered my wet dreams. My little gas-chamber Oh dear sweet little Jesus, just give me a sweet little gaschamber to put in it, just for fun, all those Swiss officials and other well-to-do people who handed weird people over to those who ran those real big gas-chambers Getting along Any concentration camp boss was just getting along and so were the guardians and the inmates. Everybody just wanted to get along. Even Hitler had to get along with his industrialists, with Stalin and with Eva Braun. These had to get along, too, sometimes to a bitter end, often they weren’t just dying in their bed. Now we are trying hard to get along, too. The Pole “Who gives you the right to make our life so miserable?” asked the Polish rail-layer, standing upright amongst the cowardly ducked inmates of this Eastern German camp in 1964. He was carried away in a bus nicknamed “Stuyvesant Express”. Now it’s my turn to stand upright and raise my voice, regardless of the consequences. State Poet How do they manage to become State Poet? Do they write politically correct stuff only? Good thoughts to be read publicly on the Fourth of July? Are they friends with the Governor, or help sustain him in his campaign? Or otherwise lick asses of Very Important People? Could a State Poet end up on death row?

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Datura #2 | 01_2019 Les biques (extrait) de Patrick Boutin éditions Urtica, 2019 « Aujourd’hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. » J’ai aussitôt songé à Albert Camus le jour où j’ai appris le décès de ma mère. Presque comme Meursault, le directeur de l’hôpital où elle séjournait m’avait téléphoné : non, ce n’était pas un télégramme que j’avais reçu de l’asile ! Pourtant, ma mère décrépissait depuis de longs mois dans une chambre sordide d’un vieux dispensaire de banlieue, livrée à mille hallucinations délirantes. Dans les moments les plus aigus de ses crises de schizophrénie, elle ne me reconnaissait pas : je n’étais plus à ses yeux qu’un étranger ! Cela me fait encore sourire après tant d’années... Sa mort est bien lointaine pourtant. J’ai repensé à elle il y a quelques jours, Monsieur le curé, après avoir découvert au fond d’un tiroir une revue à laquelle j’avais collaboré jadis — j’étais en effet écrivain à mes heures perdues ; retraité de l’administration publique depuis quinze ans. Je suis retombé ainsi sur une nouvelle qui y fut publiée, dans laquelle j’avais tenté de transposer de façon narquoise certaines de ses manies envahissantes, ses troubles obsessionnels compulsifs. Prenez la peine de la lire et ensuite — je vous le promets — je vous raconterai le récit épouvantable de mon existence. Cela me poursuit depuis tellement d’années, comme Hercule pourchassant en vain la biche de Cérynie… J’ai besoin de me confesser. Mais tout d’abord, voici ma nouvelle.

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Datura #2 | 01_2019 PARODIANT SES ANCÊTRES – 33e jour extrait de Notre République de Léonel Houssam éditions Burn-Out L'Indien joue avec les cotillons. Dans son il tortille un peu son cul massif, parodiant Bertrand lui serre la main, l'invite à entrer dans la maison bourgeoise. D'une main ferme, il attrape Magnum qu'il tend au Peau-Rouge ivre et souriant:

bluejean Lois, ses ancêtres. le corridor de la crosse d'un

« Arrête un peu la picole gros naze. Si tu veux faire honneur à tes racines, vise entre les deux yeux, pas dans les pattes » La pluie a cessé. Le crépuscule illumine la rue de sa lumière rouge orangée. La couche nuageuse effilochée s'étire au-dessus des quartiers ennemis, bien au-delà du Mont Avril. L'Indien foule de nouveau le goudron trempé avec ses baskets Nike rose fluo usées salies. Bertrand s'engage dans le petit jardin de la maison. Il soulève l'énorme planche de bois gisant au centre de l'ancien potager. Le visage dégueulasse de Martin apparaît, surgissant de l'obscurité épaisse du tunnel. Après avoir balancé l'énorme sac à dos qui lui sciait les épaules, il se hisse dans le carré de poireaux morts avant de se tenir presque au garde à vous. « Fais pas chier. On n'est pas à l'armée. Alors t'as quoi làdedans ? - Sept cartouches de clopes, deux kilos de sucre, deux de farine, trois litres de lait et d'huile, six d'eau minérale, quatre boîtes d'aspirine, deux briquets, un paquet de café soluble, des aiguilles et une paire de ciseaux, une canette de coca, trois bouteilles de whisky. - D'où vient cette viande ? Putain qu'elle est bonne et juteuse ! »

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A PARAÎTRE Cette histoire de biches (« biques » en patois nordiste) dévoile les obsessions culinaires autant que calendaires du personnage, un ogre tapi au cœur d’une forêt semblable à celles des contes de l’enfance. Pierre Laurendeau (extrait de la préface) février 2019

Walter Ruhlmann is a poet who writes with wit and intelligence. His poetry is vivid and accessible full of sharp bright images that invite you into his world and then takes you down roads that trick, amuse and surprise. Jim BENNETT, poet, editor of The Poetry Kit 10€ – 66 pages – black& white ISBN: 978-0-244-14450-0 February 2019

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ANY POISONOUS PLANT OF THE GENUS DATURA. A PRINT AND ONLINE JOURNAL OF DEVIANT AND DEFIANT WORK. LE DATURA EST UNE PLANTE QUI RENFERME UN HALLUCINOGÈNE PUISSANT ET TRÈS TOXIQUE. UNE REVUE LITTÉRAIRE DÉVIANTE ET PROVOCATRICE IMPRIMÉE ET EN LIGNE. DATURA – A PRINT AND ONLINE JOURNAL OF DEVIANT AND DEFIANT WORK PUBLISHED RANDOMLY. ISSUE 2 – JANUARY 2019 – ISSN : 2646-2257 – LEGAL SUBMISSION (TO BNF) : ON PUBLICATION – SPECIAL PRINTING – MASTHEAD : WALTER RUHLMANN 22 PASSAGE DES AMELLOUS – 11370 LEUCATE – FRANCE © DATURA & CONTRIBUTORS, JANUARY 2019 ALL RIGHTS RESERVED CONTACT : https://daturaliteraryjournal.blogspot.com/ – mgversion2datura@gmail.com DATURA – REVUE DE LITTÉRATURE DEVIANTE ET PROVOCATRICE EN LIGNE ET IMPRIMEE A PARUTION ALEATOIRE – N°2 – JANVIER 2019 – ISSN : 2646-2257 – DÉPÔT LÉGAL : À PARUTION – IMPRIMERIE SPÉCIALE DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : WALTER RUHLMANN 22 PASSAGE DES AMELLOUS – 11370 LEUCATE – FRANCE © DATURA & LES AUTEURS, JANVIER 2019 ADRESSES : https://revuelitterairedatura.blogspot.com/ – mgversion2datura@gmail.com France : €2 – Europe : €4 – World : €8 (shipping included)


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