Mauvaise Graine n°28 Attention : au delà de cette limite vous pénétrez en Zone B…
Édito J’ai parfois l’impression qu’on se fout de nous, c’est une idée qui ne m’est pas propre, mais qui hante la plupart d’entre nous, tous les paranoïaques et d’autres aussi. Récemment, le PACS était en lecture à l’Assemblée Nationale, défendu par les députés de la majorité, qui lors de la lecture étaient peu nombreux dans l’hémicycle, et injoignables au téléphone. Dégonflés ! Dégonflés ? Comment ne pas comprendre effectivement des députés (qui pour la plupart avaient tous une bonne raison d’être absents) soucieux de conserver leurs acquis et évitant ainsi consciencieusement de se compromettre dans un débat ouvrant des droits aux “ invertis ”, entre autres, et lésant soi-disant les autres, les “ normaux ”. Comment ne pas comprendre encore que ces mêmes députés voient leur “ trouillomètre ” baisser à moins l’infini face à leurs électeurs provinciaux et bien pensants, plus obnubilés par le chômage, l’insécurité, la perspective d’un avenir européen dont les instigateurs sont eux-mêmes frileux de le voir se réaliser, ou bien encore leurs lycéens en colère (grave question que celle de l’enseignement secondaire...) et tout ce qui fait ombre à la société actuelle. Alors pourquoi donc se soucier de ceux qui ont choisi, ou non d’ailleurs, de ne pas suivre le modèle familial ordinaire, vulgaire et commun. Mariés deux enfants, vous connaissez l’esprit ; surtout lorsque l’on sait qu’un tiers des couples hypocritement unis devant le maire, le curé et leurs saints divorcent avant la fin des dix premières années de leur mariage, et qu’un divorce à l’amiable coûte en moyenne à chacune des parties la modique somme de 10000 francs. Alors, où tous ces hypocrites intégristes pro-famille – feue institution sacrée ! – vont chercher toutes leurs raisons pour s’opposer à un contrat d’union qui permettrait à deux individus, de même sexe ou non, de s’unir fiscalement et juridiquement, sans d’ailleurs que cela empêche ceux et celles qui veulent aller faire les pitres dans une église en costume trois pièces et meringue, camescope et appareil photo au poing, de signer un autre genre de contrat et de se jurer amour et fidélité devant Dieu et tout le peuple ? Ce débat est de toute façon une histoire de point de vue personnel et non pas politique, la démission de la gauche à
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la lecture du texte en est aussi la preuve ; à l’instar de l’avortement ou de l’abolition de la peine de mort il y a quelques années, un contrat d’union entre concubins est une affaire particulière qui ne devrait pas connaître un tel tollé politique ô combien hypocrite. Il est aussi fort probable que cette version du contrat, qui a subi bien des remaniements et baptêmes – CUC, CUCS, PIC, PACS – ne soit pas aussi avantageuse pour les intéressés euxmêmes, mais c’est un pas en avant vers une société de respect et de reconnaissance de droits. Utopique je suis, utopique je resterai. Mais j’espère un jour pouvoir moi aussi avoir le droit de dire vivre en concubinage avec celui que j’aime, pouvoir partager plus encore et être assuré que ce partage ne sera pas entravé par un tiers qui aurait la mauvaise idée de me dépouiller s’il arrivait quelque chose à l’homme de ma vie. Le voilà d’ailleurs qui arrive à pas feutrés dans ce nouveau numéro de Mauvaise Graine. Un numéro qui ne ressemble pas aux autres, un peu plus fourni en textes, dont tous ne seront pas traduits en anglais, faute de place. Je voulais enfin m’excuser auprès de Frédéric Maire pour avoir malencontreusement déformé son annonce parue dans le n° 26 : les recueils qu’il compte publier durant l’année 1998/1999 seront édités à compte d’éditeur et non d’auteur comme je l’avais écrit, l’erreur est réparée, prenez-en bonne note. Bonne lecture à tous et à la prochaine fois ! Walter PS. À noter qu’une manifestation réunissant syndicats et associations en tout genre et à revendications bien hétérogènes était organisée à Caen samedi 17 octobre, avec occupation (éphémère) du hall de l’Hôtel de Ville où Monsieur Jean-Marie Girault (ex sénateur-) maire de Caen avait reçu la semaine précédente les anti-PACS. Que dire de ces 150 personnes, dont un bon tiers d’homosexuels, qui ont défilé dans les rues calmes d’une ville bourgeoise et catholique, conservatrice ? Rien qui ne vaille.
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Portrait À l’ombre houleuse d’un dolmen en pays bigouden, un petit garçon de 13 ans connaissait des émois qu’il cachera pendant quelques vingt ans encore, et même plus. À quelques semaines près, un autre petit garçon venait au monde tandis que le premier faisait sa rentrée dans un collège jésuite pour la deuxième année consécutive – une autre séquelle pour le futur instituteur repenti. Les cris, les pleurs, les joies, les rires, les coups de gueule, les bris du cœur, vingt-cinq ans ont passé, le breton par adoption tombe amoureux d’un viking descendu d’on ne sait où, il le veut, il l’aura après moult obstacles franchis avec plus ou moins de peine. Il aura fallu un travail, un effort commun pour en arriver où nous voilà : Mauvaise Graine publie enfin le fruit de plus d’un an de composition écrite entre naufrage, doute, tristesse extrême, confiance incertaine, et l’inverse, mais toujours plongé jusqu’au cou dans une solitude pesante et une sorte de mélancolie maladive qui ne vient que de peu de chose. Il n’y a pas de limite à l’amour, pas de limite à la jouissance non plus ; d’aucuns me reprocheront d’avoir encore une fois mis notre nombril en avant, d’avoir choisi la facilité, je les conchie ! Bruno est mien et il fallait que je signe ce portrait pour un nouveau sceau entre lui et moi. Bruno n’a pas connu autre chose que les remises en question ; il aime, a aimé, un peu, beaucoup, mais toujours passionnément pour que cet amour ne dure que peu de temps. Ou bien ne soit que pâle lueur au fin fond d’un gouffre de conformisme illusoire. Marié, trois enfants, il n’en garde qu’une douceur pour les chairs de sa chair et ne se soucie pas d’autre chose. Il aurait alors pu devenir petit fonctionnaire informaticien, respectant rigoureusement ses horaires de bureau sans trop penser qu’il pouvait exister quelque chose d’autre, mais voilà ! l’appel des corps étrangers perdus dans les brumes de la Prairie1, l’envie d’en savoir plus sur lui-même et sur ses “ nouveaux ” semblables l’a poussé à s’extirper de son trou aseptisé et à se plonger
dans le lugubre stupre des nuits sans lendemains. Bruno n’est plus seul ; l’honneur est sauf ; et lui aussi par la même occasion ! Sa vie ne tenait plus qu’à un fil, le sourire blond d’un mauvais caractère lui a rendu l’espoir d’enfin pouvoir faire quelque chose de bien de sa vie. Mais les résidus aigres d’une existence, aussi courte fut-elle, passée à draguer les secrets de la mort dans l’âme et du jeu facile l’ont aussi orienté vers une prose qui fouille intensément les arcanes intestines des histoires et des gens égarés entre une vie que l’on voudrait malsaine et la réalité, le quotidien... Pour mieux parler de ses inhibitions passées et de ses fantasmes, pour mieux dire son “ bretonisme ” entaché de “ normandisme ”, il va faire appel à un savoirfaire cartésien pour écrire sans trop s’apercevoir qu’il a de l’or au bout de la plume – même si cette plume est, au fil des progrès techniques, devenue un micro-ordinateur… – que ses textes sont originaux : des variations sur le même thème, décliné à l’infini, comme de sages vocables latins ou allemands, appris en classe. Car Bruno reste quelque part cet enfant, cet adolescent qui n’a pas grandi, qui n’a pas connu sa crise. Car enfin quel adulte pourrait observer si bien les choses et les êtres, avec un tel discernement, un tel détachement et sans a priori, les comprendre, même si parfois la logique fait défaut et qu’il faut y aller progressivement, lentement et explicitement pour qu’il comprenne bien tout, car s’adresser à lui comme à un enfant est sans doute le meilleur moyen de se faire entendre. Peut-on croire qu’avec l’érosion du temps, Bruno deviendra un homme ; c’est à ne pas trop espérer ; à son contact, on redécouvre un peu la joie de l’insouciance et de la nonchalance, et l’on se dit que c’est bien dans l’instant que se trouve le bonheur, tels que les personnages de ses textes l’ont compris depuis fort longtemps, et qu’il n’en est surtout rien d’autre de l’amour.
1 Le Cours Köenig, à Caen, vaste promenade où se croisent toutes sortes d’oiseaux, les rares, les nocturnes, etc...
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Walter
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Épilogue Un bruit, peut-être, d’un appartement voisin. Un craquement d’escalier qui transpire sous la porte. L’odeur de la peau de Noël. La chaleur qu’il dégage, la transpiration de son dos. Le bleu trempé du drap. Sûrement pas le chant d’une improbable bête à plumes. Ni un quelconque début de commencement de lueur ; trop tôt. En tout cas il s’éveille. Il ne le sait pas encore, mais son corps a déjà entamé les procédures de désarrimage. Il s’est retourné, s’est frotté le nez, a reniflé. Il réalise la présence de Noël, alors il ouvre les yeux, allonge doucement les jambes pour s’étirer silencieusement, et reste un moment immobile. Il s’habitue à l’obscurité, observe la pièce. C’est dans ce genre de pénombre étrangère que se prennent les petites décisions de la vie. S’évaluent les nuits, se pèsent et se soupèsent ; quelque chose sur le visage de Noël le chiffonne, dans son souvenir. Mais son corps est beau, et il a encore sur l’aine la cambrure de ses reins. Il repousse le drap et se lève en souplesse. Ramasse ses vêtements jetés à terre, et s’habille en regardant la nuque de Noël. Le radio-réveil marque 5h10 : c’est l’heure de choisir. Il s’éloigne pour enfiler ses chaussures, trouve un stylo. Que faire de Noël... Il a du mal à savoir ce qu’il veut. Alors il jette sur le papier un “ Je te laisse dormir. Salut. ” et un numéro de téléphone, puis se dirige vers la porte. Il existe une heure de tous les possibles. Bien après celle des amants, pas encore celle des boulangères, à peine celle des chefs de gares et des éboueurs. Elle a encore la couleur de la nuit mais se laisse pénétrer petit à petit par cette race de besogneux à qui on a pu faire croire un temps que le monde leur appartenait. Ça doit quand même être un peu vrai puisqu’il ressent à chaque fois ce même sentiment euphorique. Il est le maître du monde pendant quelques secondes. Rien que pour ça, il a bien fait de prendre la tangente. Il repousse l’idée de penser à la nuit passée, savoure le goût du froid qui pince son cou. Les rues sont bordées de volets clos. Derrière, des couples sont défaits, le sommeil les a ravis l’un à l’autre. Ailleurs, d’autres corps s’étendent, solitaires, et certains en crèvent. Marcher au milieu de toutes ces histoires qui ignorent sa présence nourrit sa jouissance du moment. Il est un noble héraut revenu de campagne sans lien ni blessure, il n’a pas donné plus qu’il n’a reçu, et regagne ses terres au moment qu’il a choisi. Évidemment, le risque existe. Noël pourrait ne pas le rappeler. Lui ne rappellera pas Noël, c’est sûr, ni Noël ni personne d’ailleurs. Ne jamais se montrer à découvert, règle d’or. Évidemment, si Noël raisonne comme lui, le combat s’achève faute de combattants. Le risque existe. Quoique... En fait, il pourrait quand même rappeler Noël, dans trois ou quatre jours, juste pour le fun, parce qu’il faut bien avouer que question cul ils se sont bien entendus. L’ennui dans tout ça, c’est qu’il y a eu un peu plus que du cul. Les doigts de Noël qui effleuraient ses reins, sa langue dans sa nuque, tout ça c’était pas que du savoir-faire. Et lui aussi s’est laissé allé à caresser ses cheveux, à lui embrasser l’oreille. Embêtant, tout ça... Il s’est un peu compromis. Très embêtant. Bon. Si Noël rappelle, il fera durer. Donnera du mou. Pas possible de recommencer avant au moins une semaine.
Epilogue Maybe a noise from a neighbour’s flat. A crack in the staircase that sweats under the door. The smell of Noël’s skin. The heat he lets out, the sweat of his back. The blue drenched bed sheet. Certainly not the song of an uncanny feathery beast. Nor some start of beginning of gleam ; too early. Anyway, he awakes. He doesn’t know it yet, but his body has already started on the shifting procedures. He turned over, rubbed his nose, sniffed. He noticed Noël’s presence, so he opens his eyes, lays slowly his legs to stretch himself out noiselessly, and stays still for a moment. He gets used to the darkness, observes the bedroom. It’s in that kind of foreign half-light that the little decisions of the life are thought. The nights get evaluated, weighed, pros and cons ; something on Noël’s face bothers him, in his memory. But his body is nice, and he’s still got his back curve on his groin. He pulls off the sheets and gets up smoothly. Picks up his clothes thrown on the floor, and dresses up watching Noël’s neck. The radio-clock says 5.10 am : it’s time to choose. He goes further to put his shoes on, finds a pen. What to do about Noël... He can’t think of what he wants. So he throws down on the sheet of paper “ I leave you in peace. Bye. ” and a phone number, then goes to the door. There’s a time when everything is possible. Long after the lovers’, not yet the bakers’, hardly the railway station masters’ and dustmen’s. It’s still got the colour of the night but let itself penetrate bit by bit by this race of workers to whom one made believe once that the world was theirs. It must be a little true as long as he feels this same euphoric feeling each time. He’s the master of the world for a few seconds. Just for that, he did well to wriggle out of it. He puts aside the idea to think of the night before, savours the taste of the cold that pinches under his neck. The streets are lined with closed shutters. Behind them, couples are undone, sleep ravished them from one the other. Somewhere else, other bodies lay down, lonely, and some of them die from it. Walking amongst all these stories that ignore his presence feeds his joy of the moment. He’s a noble herald coming back from the battle field with no bounds nor wounds, he didn’t give more than he received, and he gets back to his lands at the time he chose. Of course, the risk does exist. Noël could not phone him back. He won’t call Noël back, that’s for sure, neither Noël nor anyone else anyway. Never shows yourself uncovered, golden rule. Of course, if Noël thinks like him, the fight takes end because of a lack of fighters. The risk exists, yet... In fact, he could call Noël back, in three or four days time, just for fun, because he has to admit it, fuckwise they got on well with each other. The trouble with all this, is that there’s been a little bit more than fuck. Noël’s fingers that caressed his back, his tongue in his neck, all this was not only know-how. And he let himself go rubbing his hair, kissing his ear. Annoying... He compromised himself a little. Very annoying. Well. If Noël calls, he’ll make it last. Will slacken. Impossible to do it again before a week at least.
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Sidbé L’aire de repos de Saint-Philémon n’avait pas encore fini sa nuit. Vers cinq heures du matin, le dernier cruiser, lassé, avait fini par s’éclipser. Trois poids lourds et une auto s’y étaient finalement endormis, trop tardivement pour être déjà réveillés par l’aube naissante. De l’une des cabines un rideau se souleva. La portière droite s’ouvrit et une paire de baskets et un blouson sautèrent sur le macadam. Sidbé remonta ses jeans sur ses hanches. Il referma silencieusement la portière, enfila son blouson, et alluma une cigarette en s’éloignant vers le bloc des toilettes. “ ... Résistez. Résistez à les toucher. Résistez même à les regarder. Ne vous donnez pas car vous ne pouvez offrir ce qui ne vous appartient pas... ” De la main droite, Éric Anselme tenta de zapper vers une station musicale mais il semblait que toutes les radios s’étaient accordées pour rediffuser en boucle le message d’intronisation du nouveau pape. – Tsss..., marmonna Éric, pas l’air commode en plus, le nouveau. Comme quoi, si on sait ce qu’on perd... Il finit par couper le son de l’autoradio et s’en trouva bien. Éric aimait conduire tôt. Il aimait se lever tôt, et démarrer sa journée avant que le soleil ne soit levé. Les matinaux possèdent un monde que personne ne leur réclame. Un monde silencieux et individualiste, dans lequel chacun a encore un large espace vital que nul ne viendra piétiner avant plusieurs heures. Tout compte fait le café du motel n’avait pas du café que la couleur et la chaleur. Sa vessie lui en reconnut une autre traditionnelle vertu et le lui fit savoir. Éric ayant négligemment délaissé l’aire précédente, il fut soulagé en lisant le panneau indiquant la proximité de Saint-Philémon. La Rover s’engagea sur la bretelle d’accès et vint s’immobiliser devant l’unique édifice du lieu. Sans prendre la peine d’éteindre ses feux ou de couper le contact, Éric ouvrit la portière et se dirigea d’un pas rapide vers les sanitaires. Il fut surpris de ne pas s’y trouver seul, mais, sans se perdre en conjectures, il s’attacha à se délivrer au plus vite de sa liquide surcharge, tandis que son cohabitant en urinoirs reculait d’un pas pour se reboutonner. Tout au bonheur de sa libération, Éric mit quelques secondes avant d’identifier la sonorité du moteur qui montait en régime. Les mains mouillées et le pantalon souillé, il se précipita d’une ridicule indécence hors des toilettes, juste à temps pour voir disparaître la Rover dans un clairobscur brumeux qui annonçait une journée très ensoleillée. Assis sur son sac à dos, Franck regardait le profil de Marie, debout devant lui, la main gauche sur la hanche, la droite occupée à faire la navette entre la mèche rousse qui revenait inlassablement se coller à son front, et la direction du bitume dès qu’une auto devenait visible. Elle étendait à peine le bras, demandant sans conviction excessive qu’on s’arrêtât devant ses sandalettes poussiéreuses. Traverser le Massif Central ne semblait pas devoir rester la meilleure idée qu’ils aient eue depuis leur départ. Depuis le matin, les seuls automobilistes les ayant pris en charge étaient des gens du voisinage qui n’effectuaient que de courts trajets. À cette heure de la journée, les autos se raréfiaient. La chaleur accablante des plateaux d’Auvergne incitait à la sieste plutôt qu’à la conduite. La Rover déboucha du virage et ne parut pas accélérer en entrant dans la ligne droite. Marie leva les yeux et se récita mentalement la prière du stoppeur. Banco ! L’auto s’arrêta à leur hauteur et le conducteur, dont Marie décréta péremptoirement qu’il n’avait ni le look ni l’âge qui allaient avec le véhicule, abaissa la vitre. – Bonjour. Nous allons vers Limoges. – Ok vous pouvez monter. – Génial. Franck, tu viens ? Franck ouvrit la porte arrière pour glisser son sac mais Marie lui demanda de monter à l’avant. Elle préférait cette répartition des places qui lui épargnait les regards en biais des conducteurs et lui permettait de s’abstenir du pénible entretien de conversations sans intérêt. Pourtant, cette fois, le conducteur ne donnait pas l’impression de vouloir philosopher à n’en plus finir sur les avantages et les inconvénients du climat local. – Vous allez jusqu’où exactement ? demanda Sidbé.
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Sidbé – On va jusqu’à l’entrée de Limoges. C’est votre route ? – Pourquoi pas ? Par Limoges ça ira très bien. Est-ce que vous savez conduire ? Le visage de Franck s’éclaira : – Euh... oui ? – Ça ne vous dérangerait pas de prendre le volant ? Je roule depuis six heures ce matin, je suis naze. En plus je n’ai quasiment pas dormi la nuit dernière alors... – Pas de problème, au contraire, ça me fait plaisir. Franck se garda bien de proposer à Marie de prendre la place du conducteur. Conduire lui faisait plaisir, surtout une belle voiture comme celle-là. Il contourna l’auto et croisa en souriant un Sidbé visiblement soulagé de pouvoir se reposer un peu. Franck conduisait à présent depuis deux bonnes heures. Si le temps était toujours aussi lourd, le fait de conduire le lui avait fait oublier. En s’installant à ses côtés, Sidbé s’était lové sur le siège en lui tournant le dos. Marie et Franck s’étaient regardés en souriant, mais s’étaient abstenus de tout commentaire sur la nouvelle tournure que prenait leur périple. D’abord pour laisser Sidbé se reposer, et puis aussi parce qu’il faisait trop chaud pour parler. Il n’avait pas fallu plus de cinq minutes à Sidbé pour qu’il s’endorme. Ses muscles s’étaient relâchés et sa tête reposait en arrière entre l’appui-tête et la vitre. Marie s’était sentie tentée de caresser les cheveux courts de Sidbé, mais avait rapidement chassé cette idée saugrenue de son esprit. Elle essaya de se concentrer sur le paysage qui défilait sous ses yeux, et, le silence aidant, finit par s’assoupir elle aussi. À un moment de leur voyage, Franck avait dû stopper, le temps d’un feu rouge. Dans son rétroviseur il avait vu Marie se laisser glisser sur la banquette arrière en repliant ses jambes sous ses fesses. Sidbé sembla s’éveiller, se redressa et regarda autour de lui. Les yeux à peine ouverts, il sourit à Franck, se retourna, vit Marie étendue et en profita pour abaisser le dossier de son siège. Il replia lui aussi ses jambes et se rendormit tourné vers son voisin, la main gauche sous sa joue, l’autre sur l’épaule. Un sentiment de bien-être envahit Franck. La quiétude qui régnait dans l’habitacle, la présence de Marie endormie qui s’en remettait à lui, et la proximité même de leur nouveau compagnon de voyage l’apaisaient. Un mouvement de Sidbé avait relevé le bas de son T-shirt sur son côté droit, et Franck avait été ému par la vue d’une hanche à la peau qu’il imaginait douce, et par le gonflement régulier du coton sous la respiration de son ventre. Franck roulait à présent à vitesse modérée, comme s’il voulait retarder la conclusion de leur voyage. Il entrouvrit sa vitre de sorte qu’un mince filet d’air vint lui lécher le visage. Sidbé avait dû sentir la légère brise pénétrer l’habitacle : comme s’il frissonnait, ses bras se resserrèrent imperceptiblement sur sa poitrine. Craignant de rompre le doux fil du voyage, Franck referma immédiatement la vitre. Quand Sidbé commença à s’affaisser, Franck ne fit rien pour l’en empêcher. Il retint son souffle en voyant ses jambes se nouer contre la portière, son buste tendre vers l’horizontale, jusqu’à ce que sa tête repose enfin sur sa propre cuisse. Franck n’osait plus faire le moindre mouvement. Sa respiration même lui semblait hors de propos. Il économisait son souffle jusqu’à conduire en apnée lorsqu’un virage se présentait. Rassuré par le souffle chaud et régulier de Sidbé qui pénétrait la toile de son jean, Franck finit par se détendre. Sa main droite en lévitation au dessus du levier de vitesses s’autorisa quelque temps une pose sur l’épaule de Sidbé, puis, au retour d’un nouvel embrayage, s’arrêta lui caresser les cheveux. Longtemps, la chaleur du garçon sous sa paume lui sembla naturelle. Sa main avait visité sa tempe, son front, son cou, et s’aventurait désormais timidement sous le T-shirt, sur son flanc. Il ressentit d’abord un léger picotement, puis un agacement. Son bras lui parut soudainement douloureux. Ses yeux s’écarquillèrent d’effroi devant les cloques écarlates qui recouvraient l’intérieur de sa main, des extrémités de ses doigts jusqu’à son poignet, et qui semblaient devoir s’étendre bientôt vers son coude. Il hurla un cri muet en battant l’air de sa main. Le brusque tangage de la Rover ne laissa que peu de temps à Marie pour se réveiller. À peine le temps de relever la tête, juste le temps nécessaire pour suffoquer sans comprendre cette âcre émanation qui lui irritait la gorge, le temps pour
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Sidbé apercevoir un panneau publicitaire vantant la fraîcheur d’un soda, le talus, le ciel uniformément bleu, quelques sapins, le ciel encore, une prairie, le ciel toujours, et toujours bleu, et puis plus rien. Sale journée pour Éric ; d’abord le vol de sa voiture. Puis ce routier bizarre sur l’aire de parking. Éric l’avait probablement dérangé dans un sommeil apparemment tourmenté, mais il avait tout de même accepté de lui prêter sa carte de téléphone pour appeler la police de l’autoroute. À son retour il avait vu le routier ouvrir brutalement sa portière, sauter à terre et se déhancher en direction des toilettes en gesticulant comme un diable rouge, en se frottant la bouche avec les avant-bras et se serrant les cuisses l’une contre l’autre comme si une colonie de fourmis avait pris d’assaut son entrejambe. Le pauvre type s’était finalement avachi quelques mètres plus loin dans un râle inaudible, et Éric revoyait encore avec horreur une lèpre acide lui dévorer les chairs. Il sentait encore et n’oublierait pas cette vapeur odorante qui s’était aussitôt dégagée du corps en proie à une fulgurante désincarnation. Quelques minutes avaient suffi pour qu’il ne reste de cet homme que quelques pièces de monnaie et une boucle de ceinture. Les policiers qui s’étaient succédés devant lui depuis des heures avaient enfin semblé se décourager devant son incapacité à expliquer quoi que ce soit. Cela n’avait été hélas qu’un répit. Sa Rover avait finalement été retrouvée, à l’état d’épave, et il était à présent sommé d’expliquer pourquoi l’homme qu’il avait décrit comme étant son voleur se révélait en fait avoir été une jeune femme, et de surcroît une femme possédant cette rare caractéristique de conduire les automobiles depuis la banquette arrière. Après s’être confortablement installé dans son fauteuil, le policier le toisait calmement en allumant une cigarette. Baissant la tête de découragement, Éric Anselme se sentit soudainement tout petit, perdu. De la pièce contiguë lui parvint un ronronnement vaguement connu qu’il ne pouvait pourtant pas identifier... “ ... Résistez à les toucher. Résistez même à les regarder. Ne vous donnez pas car vous ne pouvez offrir ce qui ne vous appartient pas. D’autres sidas viendront, plus châtiants et plus châtrants. En de pas même synoptiques illusions, les zodiaques nous volent en ce moment vos allégeances. Craignez le retour de vos consciences : quand les péchés seront restaurés, vous aurez dilapidé nos commisérations... ” Éric suivit des yeux les contours brunâtres de la tache d’urine qui ornait le haut de son pantalon beige. Il finit par en sourire, se détendit, et ne s’intéressa plus désormais qu’à cette tache, se perdant en de savantes conjectures sur son expansion, au fur et à mesure que de longues vagues chaudes inondaient son pubis, son bas-ventre et ses cuisses.
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Sidbé Saint Philémon rest area was not awake yet. Around five o’clock in the morning, the last cruiser, bored, had decided to slip out. Three trucks and a car had finally fell asleep, too late to be already awake as the dawn arose. From one of the cockpit, a curtain was lifted up. The right door opened and a pair of tennis shoes and a coat jumped on the macadam. Sidbé pulled up his jeans on his hips, put on his coat, and lighted up a cigarette going forth towards the toilets. “ ... Resist. Resist in touching them. Resist in watching them even. Do not give yourself for you cannot give what does not belong to you…” With his right hand, Eric Anselme tried to remote to a music program but it seemed that all the radio stations had agreed to repeat the enthronement of the new Pope. – Gee..., Eric whispered, the new one looks awkward. Which shows that if only we knew what we lose... At last, he turned the radio off and felt better. Eric enjoyed driving early in the morning. He liked getting up early and beginning the day before the sun rise. The early risers own a world that no one asks them back. A silent and individualist world, in which each one still has a wide vital space that none will trod before several hours. Finally, the coffee of the motel didn’t have only the colour and the heat of coffee. His bladder made him feel there was another traditional virtue. Eric, having carelessly left the previous area over, he felt relieved reading the panel indicating him the closeness of Saint Philémon. The Rover pulled out on the access road and stopped in front of the only building of the place. Not even caring about turning the car lights or engines off, Eric opened the door and went forth to the toilets. He was astonished not to find himself alone in, but, not losing time, he mattered in delivered himself from his liquid overweigh quickly, while his loo mate did a step back to button up his pants. Fully busy by his freedom, it took a few seconds to Eric to recognise the noise of the engine revving harder and harder. His hands wet and his trousers stained, he rushed out of the toilets in a ridiculous indecency, just in time to see the Rover disappear in a foggy twilight that announced a very sunny day. Sat on his rug sack, Franck was looking at Marie’s profile, she was standing in front of him, her left hand on her hip, her right hand busy coming and going from the red forelock that endlessly came sticking to her forehead, and the road way each time a car was visible. She hardly stretched her arm, asking without any excessive conviction that one stopped at her dusty sandals. Crossing through the Massif Central seemed not to be kept as the best idea they had since they started. Since the morning, the only drivers that had given them a lift where from the neighbourhood and only did short shots. At this time of the day, cars got fewer and fewer. The exhausting heat of the plateaux of Auvergne drove more to go to sleep than driving. The Rover came out of the turn and didn’t seem to accelerate entering the straight road. Marie upped her eyes and told inside herself the hitch-hiker prayer. Bingo ! The car stopped by an the driver - of whom Marie thought peremptorily that he had neither the outlook nor the age that suited to the car - opened the window. – Hi. We’re going to Limoges. – Ok you can jump in. – Great, come on Franck ! Franck opened up the back door to put his back on the back seat, but Marie, asked him to go at the front. She preferred this sharing of the seats that saved her from the glances of the divers and the boring discussions entertainment. Yet, this time, the driver didn’t look like wanting to philosophise about the good and evil of the local weather. – Where are you exactly going to ? Sidbé asked. – We’re going at the door of Limoges. Is this on your way ? – Why not ? Through Limoges that should be ok. Can you drive ? Franck’s face lightened up : – Err... yes ? – Would you mind driving now, then ? I’ve been driving since six o’clock this morning, I’m wrecked. I hardly slept last night, so...
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Sidbé – No problem, I’m pleased, on the contrary. Franck avoided asking Marie if she wanted to take the driver seat. Driving pleased him, especially such a nice car. He turned around the car and walked past smiling Sidbé apparently relieved to have a little rest. Franck had then been driving for two long hours. If the heat was still so oppressive, driving had made him forget about it. Seating by him, Sidbé had nested on the seat turning his back on him. Marie and Franck had looked at each other smiling, but had not made any comment on the way their journey was getting. First, to let Sidbé have a rest, then because it was too hot to chat away. It didn’t take Sidbé more than five minutes to fall asleep. His muscles had softened and his head laid back between the head-rest and the window. Marie felt like rubbing Sidbé’s short hair, but had quickly thrown this ludicrous idea away. She tried to concentrate on the landscape running before her eyes, and, helped by silence, she eventually fell asleep too. While driving, Franck had had to stop because of the lights. In the rear-view mirror, he had seen Marie let herself slipped along the seat, folding her legs under her butts. Sidbé seemed to awake, propped up and looked around him. His eyes hardly opened up, he smiled to Franck, turned over to the rear, saw Marie lying and put his seat down. He folded his legs too and fell asleep again turned towards Franck, his left hand under his cheek, the other one on his shoulder. A feeling of ease invaded Franck. The quietness that reigned in the vehicle, the presence of Marie, sleeping that counted on him, and the proximity of their new road companion made him peaceful. One Sidbé’s move had pull up the bottom of his tee-shirt on the right side, and Franck had been moved at the sight of a hip on the skin he imagined soft, and at the regular pumping of the cotton under the belly breathing. Now, Franck drove slowly, as if he wanted to delay the conclusion of their trip. He opened the window so that a thin draft came licking his face. Sidbé must have felt the light wind entered the car : as he shivered, his arms tightened imperceptibly on his chest. Fearing that he would cut the sweet way of the journey off, Franck suddenly shut up the window. When Sidbé started to stumble down, Franck did nothing to restrain him. He held his breath seeing his legs stretching against the door, his chest leaning horizontally, until his head eventually rested against his thigh. Franck dared not moving at all. Even his breath seemed too much. He economised his breath to drive without an aqualung until a turn on the road appeared. Reassured by Sidbé’s warm and regular breath that penetrated the cloth of his jeans, Franck eventually unstressed. His right hand levitating above the gear stick allowed herself a short break on Sidbé’s shoulder, the, back from another clutch letting in, stopped to caress his hair. For a long time, the heat of the boy under his palm seemed natural to him. His hand had visited his temple, his forehead, and then ventured under the tee shirt timidly, on his side. He first felt a slight scratching, then an irritation. His arm seemed very painful suddenly. He stared wide-eyed of horror before the scarlet lumps that covered the palm of his hand, from the finger tips to the wrist, and that seemed to reach his elbow soon. He screamed noiselessly, thrashing the air with his hand. The sudden twisting of the Rover let only little time to Marie to wake up. Hardly time to up her head, just enough time to suffocate not understanding where this acre emanation that irritated her throat came from, time to see an advert praising the freshness of a soda, the edge of the road, the constant blue sky, some pine trees, again the sky, a field, always the sky, still blue, and nothing more. Bad day for Eric ; first, his car had been stolen. Then this weird truck driver on the rest area. Eric had probably disturbed him in his tormented sleep, but who had conceded letting him his phone card to call the highway police. Coming back, he had seen the truck driver brutally opening the door, jumping on the floor and rushing to the toilets, thrashing like a very devil, rubbing his mouth with his forearms and squeezing his thighs one against the other as if a ant colony had assaulted his crotch. The poor guy had finally fell off a few metres further growling, and Eric could remember an acid plague wolfing his body. He still smelled and would never forget this stinky vapour that had straight away emanated from the body, prey to a flashing disincarnation. In few minutes it only remained of him some coins and a belt buckle.
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The police men that had passed before him for hours seemed to be discouraged at last, in front of his inability to explain whatever it was. This had only been a rest. His Rover had eventually been found, in a state of a wreck, and he was then enjoin to explain why the man he had described as being the robber of his car was in fact a woman who had the rare gift to drive cars from the back seat. After he settled comfortably in his armchair, the police man watched him calmly, lighting up a cigarette. Bowing his head in discouragement, Eric Anselme suddenly felt small, and lost. From the narrow room where he was, a vaguely known purring he couldn’t identified reached him... “... Resist in touching them. Resist even in watching them. Do not give yourself for you cannot give what does not belong to you. Other aids shall come, more chastening and castrating. In not even synoptic illusions, the zodiacs steal us your allegiances , right now. Fear the return of your consciences : when the sins are restored, you shall have dilapidated all our commiseration…” Eric followed with his eyes the brownish outline of the urine stain that was on top of his beige trousers. He eventually smiled of it, relaxed, and then only concentrated on this stain, losing himself in savant conjectures concerning its expansion, as warm waves flew over his pubes, belly and thighs.
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Sans titre ni tambour ni trompette La mère Chevassu aurait bien joué sa coiffe sur ce coup-là. Et elle aurait gagné. Comme elle devisait avec sa voisine sur les mérites comparés de la tisane de sauge les nuits de pleine lune et du bain de pieds salé quant au traitement de l’insomnie, elle aperçut le fils Malo qui descendait la rue du Frout, l’air des mauvais jours, l’air d’avoir pleuré trop longtemps pour pouvoir le cacher. À bientôt quinze ans, le petit Fabien, comme elle l’appelait toujours bien qu’elle dût depuis longtemps lever son menton gazonné pour lui parler, était pourtant un garçon jovial et bien portant. Le genre de garçon qu’elle montrait en exemple à son bon à rien de petit-fils à la toison cacatoès et aux pantalons survivant d’épingles à nourrice. Enfin... qu’elle lui eût encore montré en exemple si elle ne s’était pas entendue rabrouer il y a plus d’un an d’une incantation qu’elle n’avait toujours pas élucidée mais dont le ton ne laissait aucun doute quant à l'esprit du message : “ Va Mickey ta mère, vieille cheuva ! ”. Toujours est-il qu’elle aurait bien aimé planter là Raymonde et tâcher de tirer cette affaire au clair, mais l’autre bigleuse n’avait pas vu passer le gamin et ne lui lâchait plus la grappe, absorbée par l’incidence de la subtile précision qui venait tout juste d’enrichir le débat en cours, à savoir que le sel utilisé se devait d’être de Guérande. Une dizaine de minutes suffirent à la conforter dans son intuition qu’un de ces malheurs qui faisaient la vie de tout quartier bien ordonné avait dû arriver : Bertille Malo sortait en trombe de sa maison, les joues en feu, sans veste ni sac à main. D’emblée la Chevassu prit sur elle de ne point héler Bertille, pressentant que le moment était mal choisi. Elle la suivit des yeux, et fut surprise de la voir s’engouffrer chez le droguiste du coin de la rue avant de reprendre l’ascension du Frout, un aérosol à la main. Quand elle passa le coin de la rue
Maupais, se soustrayant de la sorte à la vue de la Chevassu, celle-ci nota qu’elle n’aurait pas galopé plus vite si elle avait oublié son dîner sur le feu. Ce n’est que le jeudi suivant que l’Indépendant de l’Arvor confirma enfin ce qui se murmurait. Bertille Malo était arrivée telle une furie devant les murs de granit rose du lycée Saint-Patern, bousculant les gamins attardés et s’était campée devant l’inscription géante étalée sur la pierre :
Fabien Malo = PD Sans corriger du graffiti initial ni la teneur ni l’orthographe, elle avait, sur l’enceinte séculaire, poursuivi à la peinture orange :
Et il vous emmerde ! La Chevassu ne se priva pas d’apporter à la version succincte rapportée par l’hebdomadaire les détails dont elle avait été le témoin privilégié. L’épisode lui permit d’ailleurs de renouer le dialogue avec son Thomas de petit-fils, qui par extraordinaire ne dédaigna pas donner son avis sur un événement local. La grand-mère et l’adolescent retrouvèrent à cette occasion la connivence oubliée des années révolues depuis belle lurette où elle le conseillait dans le potager maternel sur le choix des fraises à dévorer d’abord. Quant à Raymonde, qui ne s’était pas gênée pour faire remarquer à Bertille que quoi qu’on ait à dire, rien n’oblige à utiliser des mots grossiers, elle soutenait à présent que de régulières fellations permettaient de lutter contre l’affaissement des gencives, alors que le bon sens commun ne leur prêtait de vertus que dans le traitement des verrues. L’entêtement de Raymonde étant ce qu’il était, les soirées d’été qui s’allongeaient au bas de la rue du Frout promettaient d’être animées.
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Homogénéité C’est mon histoire et je tombe du trente-cinquième étage. Jusque là tout va très mal : à chaque niveau les mêmes zombies, les mêmes naufrages. Des centaines de corps avec des têtes de mort. Je me délite. Lâcher encore un peu plus de lest, devenir homogène et puis plus rien. Je tends à la perfection, je me ressemble : j’ai le corps le cœur le cortex en sang. J’ai la tête en condensation. En raréfaction. Ils m’arrachent des morceaux de ma vie, me sapent mon assise, me ruinent les organes, me fouissent et me contiennent, me fouillent, me souillent, me trépanent et me séparent. Mes amants se repaissent et se barrent et s’emparent des couleurs de mes veines. Exsangue, ex lucide, énucléé, parfait. Le troisième jour s’il existe je serai pillard bâtard et carnivore. Je serai barbare et mauvais sort. J’aurai l’œil sec, l’haleine salée, le cuir des Huns, le cœur Tartare. Je serai vampire ou bien je serai mort.
Homogeneity It’s my story and I fall from the thirty-fifth floor. Since then everything’s going wrong : at each level the same zombies, the same wrecks. Hundreds of bodies with dead heads. I disintegrate. Dumping a little bit more ballast, homogenising, and then nothing more. I aim at perfection, I look like myself : my body, my heart, my cortex are bleeding. My head condenses. Rarefies. They claw bits of my life out, break my basis, ruin my organs, dig and hold me, search, and mess, and trephine, and tear me apart. My lovers feed on and leave and steal the colours of my veins. Bloodless, ex lucid, enucleate, perfect. The third day, if it does exist, I’ll be a carnivore, looting bastard. I’ll be a barbarian and bad spell. My eye will be dry, my breath salted, I’ll have the Huns’ skin, the Tartars’ heart. I’ll be a vampire, or I’ll be dead.
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000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000a506c007b400b40080001230000000000000000000000000000000 000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000 43e16381e661feb505aece3f773bb31f00a22635e0ac3549cda6228f19ef31b22971128b988742f30254e718ae5563dcf71d807d6b728ad4776057e9005d 45bcc00b4aa79bf118c150b79de39b9bd4b7b748348c95cac62bb99ec73a7ee0ba2b1647501ae3fe300f42e0c013b599218bd9fc2b6171336466cc9c0c5c 000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000 Me lace qui s’écoute 000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000 Accoudé sur un dimanche 83800393939003a3a3a003b3b3b003c3c3c003d3d3d003e3e3e003f3f3f0040404000414141004242420043434300444444004545450046464600474747 me lie d’ennui
Anneaux sabbatiques
me sauve qui doute et m’arrache qui rit. Sans gêne j’oublierai mes frères orgiaques les fils inachevés et les pères de claques. N’est-ce qu’un mirage un random arpège un rêve de bout ou nous embue hâtai-je ? You are so sweet honey you are so câlin you are so smooth chéri you are sopalin. Matelot emmène-moi sur les flots prends-moi sur ton gros bateau fais-moi du roulis chéri fais-moi la mousson. Enroule-moi mon amour dans tes bras vigoureux enfile-moi tous les jours des anneaux sabbatiques. Sache enfin petit mousse que je t’ai dans la pulpe be sure : I’ll take care of us cause you are my little grapefruit. Le ridicule d'une déclaration d'amour gravée dans une écorce ou gueulée à la craie j'en serais bien capable. J'écrirais B aime W.
Accoudé sur un dimanche
Je laisse tomber la pluie Sur le cheval zébulon Tout seul, tout con, Et tout humide.
Les yeux ouverts ne voient rien Ne percent pas la moiteur épaisse Qui s’affale sur la ville Engourdit le cœur et Le laisse vide. L’année dernière ils pointaient Écartaient puissamment Indécisions, reculades Désormais si loin je reste La bouche aride. Je me glisse sous leur surplomb De toutes les couleurs imaginées Je voudrais tant retrouver L’empire baroque érigé Des seins d’Ingrid.
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XIII Treize ans première boum. Mon petit garçon chéri jette un coup d’œil au-delà de ses mondes fantastiques. Son cheval blanc caparaçonné de ses propres couleurs s’avance prudemment sous la herse. L’ange blond tient fermement les rênes le regard en alerte mais néanmoins s’engage sans pâlir dans le monde. Les hurlements des loups les chants obscènes scandés la nuit par des troupes incertaines sont encore dans sa mémoire. Et la certitude de sa naissance aussi j’espère la conscience d’être pourtant toujours prince d’amour. Derrière lui s’éloignent les créneaux familiers des remparts en Lego. Mes treize ans à moi ne durèrent que trois semaines. Ils me brûlèrent entre les doigts. À un jet de pierre des monolithes la côte morbihannaise dessinait la plus belle des terres d’aventure. La marée montante qui recouvrait l’isthme de la petite presqu’île la presque petite île accélérait le battement de mon cœur juste ce qu’il fallait pour donner au jeu un plausible enjeu. La lande proche me laissa m'enliser pénétrer son labyrinthe. Son Minotaure n’avait rien de monstrueux. Sa flatterie me mit pourtant mal à l’aise offrant pour la première fois mon érection à un regard étranger. Tétanisé je le laissai me mettre nu m’asseoir et me caresser. Sans parvenir à m’apaiser ses gestes doux me maintenaient dans cet état incontrôlable d’exhibition de mon intimité. Il lécha suça avala mon sexe quand c’était moi qui étouffais.
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À la fin du paragraphe fin d’enfance. Mes treize ans à moi étaient aussi des années fleurs aux cheveux longs sales et salés qui fumaient des guitares sur des plages en feu. Pourtant le long des couloirs pharaoniques creusés dans l’ère glaciaire d’un pénitencier jésuite les masculines cohortes se croisaient silencieusement escortées de sombres oiseaux de proie. Leurs examens de ma conscience m’ont fait pâlir jusqu’à ce jour où je résolus de bannir Dieu et ses zodiaques. Plus tard j’assouvis ma vengeance avec délectation profanant leur nef de la myrrhe traquée bénissant à ma façon les pierres sur lesquelles ils avaient bâti leurs églises. Les partis pris de mes treize ans se portent bien finalement. Et pour la première fois j’étais amoureux mais sans le savoir. Il m'encombrait les yeux et le ventre et la tête alouette... Je l'accompagnais dans les salles de hand me frottais à lui sous les toiles de tente je manœuvrais déjà tout petit je devais être un peu glu un peu vorace. Un peu naïf aussi puisqu'aucun mot ne m'apparut pouvoir coller sur moi, la glu sur lui, l'aimé. Étrouble enfin cette idée trange... Alors que mes treize ans entamaient à peine leur marche révolutionnaire quelque part dans une autre ville tu n’étais encore qu’un battement de jambe un plan sur la comète un gros neutron. Dire que mon amour n’avait pas encore vu le jour et je ne le savais pas.
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X111 Thirteen first party. My little sweet boy glances over his fantasy worlds. His white horse all clad in his own colours goes forth carefully under the portcullis. The blonde angel holds the reins nimbly but nevertheless enters the world bravely. The wolves baying the obscene songs scanned at night by uncanny platoons are still in his memory. And the certainty of being born too I hope the consciousness to still be loving prince yet. Behind him, the familiar crenels of the ramparts built of Lego fade away. My thirteen’s only lasted three weeks. They burnt out between my fingers. At a stone throw of the monoliths the Morbihan coast was the most beautiful land for adventure. The rising sea that covered the isthmus of the little peninsula the nearly islandette accelerated the beating of my heart just what was needed to give the game a plausible stake. The near land let me struggle, enter its labyrinth. Its Minotaur was no ugly one. His flattery uneased me yet giving for the first time my erection to a stranger’s eyes. Tetanized I let him undress sit, and caress me. Not succeeding in calming me his soft gesture kept me in this uncontrollable state of exhibition of my intimacy. He licked sucked swallowed my sex when I was the one to smother.
At the end of the paragraph end of childhood. My thirteen’s were flowered years too with long, dirty salted hair who smoked guitars on beaches set on fire. Yet, along Pharaonic corridors dig into the Ice Age of a Jesuit penitentiary the male cohorts walked past each other silently escorted by dark birds of prey. Their examinations of my conscience made me turn pale until that day I decided to banish God and all his zodiacs. Later, I appease my vengeance delightfully profaning their side aisle of the hunted myrrh blessing the stones on which they had built their churches my way. The prejudice of my thirteen’s are wealthy indeed. And for the first time I was in love not knowing it. He crowded over my eyes and my belly and my head alouette... I joined him in the handball gyms rubbed myself against him under the tents I operated I must have already been a bit of a sticky kid a bit of a wolf. A little naive too since no word seemed to be appropriated to me, sticky to him, beloved. Étrouble at last this idée trange... When my thirteen’s had hardly taken on their revolutionary march somewhere in another town you were just a small leg whipping a castle in the air a big neutron When I think my love was not born yet and I didn’t know it.
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Les promesses Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. Des fois, Bruno, t’es trop con. Fous-moi la pax et tous tes mots d’amour avec. Avant l’explosion, sautons. La gorge se serre, il faut faire vite. Courir sur le papier y déverser la rage pendant qu’elle reste sèche. Relire cette histoire comme une trêve un rêve, une construction aberrante et irréelle juste imaginée pour s’amuser. La vie c’est pas ça. La vraie vie n’a qu’une petite vertu. Elle a un visage d’ange et des lèvres charnues elle a le cheveu doux et le dessin blond de l’oreille tout en contours à dessiner avec mes doigts écorchés sur des tessons de bouteilles. Je pisse le sang de l’intérieur m’écoule à flots couverts en pleine conscience. Il est temps de grandir. Me remplir la bouche et les mains de grands inconnus à la chair tendre. Il n’y a que la chair qui puisse être tendre ; et encore, pas toujours ; la tendreté est un mot de boucher. La tendresse une idée végétarienne qui prête à confusion.
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Épitaphe Qui, le premier, s’est ennuyé ? Qui a cassé notre jouet ? Qui s’est levé, s’est étiré, a cambré le dos, fait craquer ses doigts, et s’est éloigné en se grattant le crâne ? À peine un peu plus loin, le temps de se dégourdir les jambes, qui a ressenti sur sa poitrine nue ce premier souffle de vent et s’est soudain intéressé au temps qu’il faisait, à l’heure, au jour, l’année, et combien de temps, et dans quel sens la Terre tourne, et quelle est la direction de la mer, et depuis quand on n’avait pas mangé, quel est le sexe d’un ange, quand passe le prochain bus, où sont les autres, combien sont-ils, et de quoi parle-t-on dans tous ces téléphones ? Qui se lèvera le premier, fatigué de ne plus l’être, qui décidera que la journée commence, qui fera chauffer le lait ? À partir de quand voit-on des rides sur le lait qui bout, y a-t-il un jour où les croissants font forcément davantage de miettes, ou bien sont-elles plus dures, ou notre peau devientelle plus sensible, y a-t-il un jour où on décide de ne plus prendre de petit déjeuner au lit ? À partir de quel âge pue-t-on de la gueule au réveil ? Quand perd-on sa peau de bébé, et si on arrête de fumer, garde-t-on une voix enrouée, et l’andropause c’est comment ? Est-ce que ça peut arriver de trouver pénible ou chiant ou lubrique ou pitoyable ce qu’hier encore on voyait flatteur, excitant, attendrissant ? Est-ce qu’une muqueuse peut s’émousser, perdre de sa sensibilité, et l’œil, est-ce que c’est une muqueuse, et muqueuse ça vient de quel mot latin, est-ce que ça a un rapport avec moqueuse ? Y a-t-il toujours un soir où on ressent le besoin de prendre son temps, de rentrer tard, de se faire attendre, de guetter une réaction, et d’envoyer chier la terre entière ? Est-ce que c’est ça, gagner ? Estce qu’il arrive à tous les coups le jour où on a besoin de marquer son territoire, de dire qu’on n’appartient qu’à soi, et de le répéter jusqu’à finir par le croire ? Est-ce que donner, c’est donner ? Et reprendre, c’est voler ? Et mon cul, c’est du poulet ? Combien ça coûte une opération pour effacer un tatouage ?
Epitaph Who was the first to be bored ? Who broke our toy ? Who got up, stretched, curved their back, made their fingers crack, and left scratching their head ? Hardly further, time to warm up their legs, who felt this first wind blow on their bare chest, and then, suddenly got interested in the weather, the time, the day, the year, and how much time, and which way the Earth goes round, and what direction the sea goes in, and since when they had not been eating, what the sex of an angel is, when the next bus goes, where the other are, how many they are, and what they are talking about in all these phones ? Who will get up first, tired not be bored anymore, who will decide the day begins, who will make the milk warm up ? From when does one see the lines on the boiling milk, is there a day when croissants make more crumbs, or are they harder, or is their skin softer, is there a day one decides not to have breakfast in bed anymore ? At what age does one have bad breath when rising ? When does one lose their baby skin, and if one stops smoking, does one keep a hoarse voice, and male menopause, what is it like ? Can one find something annoying, boring, or lustful, or pitiless, when one used to find it flattering, exciting, moving ? Does a mucous membrane can dull, lose its fine edge, and is the eye a mucous membrane, and what Latin word does mucous come from, does it have a link with mocker ? Is there always an evening when one feels like taking their time, coming back late, keeping waiting, watching for a reaction, and says fuck off to the world ? Does it mean winning ? Is there absolutely a day when one needs to mark their territory, to say one belongs to theirselves and to repeat it to believe it ? Is a gift a gift ? Is taking a gift back stealing ? And is my ass chicken bits ? How much does an op to erase a tattoo cost ?
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Notes Avec
une
couverture
Ho ! Alors, je ne suis pas chien,
Providence, RI 02940, États-
aussi “ troisième millénaire ”, la
ni requin, encore moins vipère
Unis. À noter également que ce
revue
4
(?), mais ç’aurait quand même
zine
pouvait
été sympa de citer mon nom.
supplément nommé Bard et
qu’attraper l’œil. Passant en
Néanmoins, ce numéro est une
qu’il vaut tout autant le détour.
détail plus de 70 fanzines et
fois de plus réussi et c’est avec
offrant 200 adresses utiles pour
grand plaisir que nous l’avons
review, plus journal que revue
les
découvert avec les textes de
telle
“ fanzinistes ”, c’est un dossier
Jozef
Michel
généralement dans nos petits
complet en ce qui concerne... le
Prades
Libellé :
esprits de petits français de
fanzinat ! Nous les aimons bien
Michel Prades, 7 rue Jules
petits poètes littérateurs, qui
les petits gars (pas de filles à ma
Dumien, 75020 Paris, France.
reprend les mêmes thèmes que
RéZine,
(automne
numéro
1998)
ne
“ fanzineurs ”
et
les
Rostocki
et
lui-même.
connaissance !) de RéZine, et
ensuite
Chiron
qu’on
l’entend
Que dire des différentes
entrain et brio ; trois frères qui
Frédéric Maire m’a envoyées
différent. (Ils viennent tout droit
se valent et lui permettent de se
après les avoir lui-même reçues
du Kansas !) Ce journal donc se
hisser
de
amie
lit néanmoins bien facilement et
enviable. De belle facture et très
commune Teresinka Pereira ?
avec une bonne dose de plaisir
lisible, en plus d’être abordable
Qu’elles
en
financièrement, Rézine convainc
underground et que c’est avec
Michael Hathaway Ed., 702 N.
les lecteurs et autres genres.
grand plaisir que je les ai lues
Prairie, St John, KS 67576-
Vous rappeler que cette revue
pour vous…
1516.
échelon
bien
publications
paraît quatre fois l’an ne serait
la
américaines
underground cependant, m’a-t-il semblé, et d’un point de vue
un
panache,
feuillet
que
à
avec
Vient
un
la revue précédente en moins
Xavier Lardy anime sa revue associative
publie
part
de
sont
définitivement
Chiron
Review :
Enfin des poèmes à ne
pas de trop : les 20 mars, 21
Artzine 24.7 qui offre un aperçu
plus savoir qu’en dire ni qu’en
juin,
22
panoramique de ce qui se fait en
faire
décembre de chaque année. Pour
poésie et en littérature, en tout
Sonnenfeld (qui, lui, vient du
plus
renseignements,
artistique pour être plus vaste
New-Jersey) et semble avoir des
s’adresser à RéZine : Xavier
encore, dans ce pays compliqué
goûts littéraires fort éclectiques,
Lardy, 30 rue des Souterrains,
et ambigu que sont les Etats-
sans trop se prendre la tête. Des
79370 Fressines, France.
Unis. Photos, dessins, pubs,
textes publiés généralement sur
poèmes,
critiques,
une feuille A4, pliée en quatre,
billets d’humeur,
mais c’est fort intéressant. Mark
de
septembre
et
Quelle ne fut pas ma
chroniques,
commencer
prime.
par
23
À
notre
proses,
publiés
par
surprise, aussi agréable soit-elle,
tout y est et c’est le plus souvent
Sonnenfeld,
de trouver dans le numéro 82,
réussi. Nous les avons contactés,
45, 08 Old Millstone Drive East
d’octobre 1998, de la revue
nous
Windsor, NJ 08520, États-Unis.
Libellé, la traduction française
suite... Artzine 24.7, Re-Presst
d’un texte du coréen Rhee Han
publishing Co., P.O. Box 41234,
18
Mauvaise Graine n°28
aurons
peut-être
une
Marymark
Mark
Press
Walter
Surf Pandore Session Session Start <HotBoy> Salut. Tu es français ? <HotBoy> Hé ho ! ! ! <HotBoy> Tu pourrais répondre qd on te parle ? <HotBoy> R U french or not ? <HotBoy> Tu as peur, petit Viking ? <HotBoy> Bon, tant pis. Salut ! Oui il est français, oui il répond quand on lui parle, non il n’a pas peur mais il n’est pas habitué au net, désolé. <HotBoy> Ok ok faut pas s’énerver :-)) <HotBoy> Tu t’appelles comment ? Il me dit son prénom, se dit encore navré de m’avoir fait attendre l’ami, en plus il est sur différentes conversations et pour un novice, c’est un peu compliqué. Et moi, que cache mon nickname ? <HotBoy> C un joli prénom. Mon nom à moi c Thomas. Tu discutes avec la terre entière, alors ? Non, juste lui et moi pour le moment, les autres ont tous déconnecté. <HotBoy> Tu es où exactement, dans quelle région ? <HotBoy> (Je suis peut-être trop curieux.) Ici. Non. <HotBoy> Sans blague ? <HotBoy> C marrant. Non, il ne trouve pas ça vraiment drôle en fait, il se fait un peu chier dans cette ville. Il revient des îles et trouve que là-bas c’est beaucoup mieux. <HotBoy> Sympa... et tu fais quoi sur le net, tu dragues comme un malade ? <HotBoy> Tous les mêmes (je plaisante)...... Il n’a pas besoin de draguer comme un malade sur le net, sa ville a ses propres ressources, il... dialogue. Nuance. <HotBoy> C comme moi. Au fait, je suis d’où, moi ? Je lui réponds que je suis dans la ville d’à côté. <HotBoy> Je viens souvent ici d’ailleurs. Ah ouais ! Est-ce que j’y ai défilé, en juin, à la Gay Pride ? <HotBoy> Oui j’y étais et ct plutôt sympa, un peu frileux au départ mais globalement une bonne expérience. <HotBoy> Tu es quel genre de garçon ? Tu as quel âge et tu fais quoi ? (Arrête-moi si je deviens trop curieux !) On n’est jamais trop curieux, on pose toujours les mauvaises questions. Il ne fait pas grand-chose à l’heure actuelle, il vadrouille et tente de s’occuper au mieux. Il parle vaguement littérature. Il me dit qu’on reviendra à la Gay Pride plus tard. Je ne sais pas si je dois continuer. Il me rappelle : Hou hou ! <HotBoy> Oui bah voilà, j’arrive. (Sourire) J’ai ouvert la boîte, je continue. <HotBoy> Tu es du genre plutôt solitaire ou du genre duo, ou quoi d’autre ? J’aimerais bien qu’il me réponde qu’il est avec quelqu’un à qui il tient. Il est du genre qu’il est... Il n’est plus un amoureux transi ni un baiseur à couilles rabattues, encore que... Il rôde et flâne sur la ville, me cite deux bars, et autres... “ Encore que, encore que... ” Tout ça commence à sentir le roussi. Je lui réponds que je connais un de ces bars, pas l’autre. <HotBoy> Il faut dire que je suis pas un pilier de bar de clubs gays. <HotBoy> Mais bon, chacun son truc. Lui non plus mais l’oxygène est parfois nécessaire. Et là mon amour, t’as besoin d’oxygène on dirait. <HotBoy> Au fait quel âge as-tu ? (Moi 26.) Il dit son âge. <HotBoy> Je ne suis pas un maniaque de l’âge, mais bon,
j’évite les trop grands écarts, c tout. Il comprend, ceci étant dit, il y a des écarts qui font la différence... - Dieu sait ce que cette phrase peut bien vouloir dire ! - mais il se souvient d’un certain mec rencontré dans les îles lorsqu’il vivait là-bas, âgé de 40 ans... <HotBoy> Oui c vrai, ça ne veut pas dire grand-chose. Gna gna gna ! <HotBoy> Ah bah le pauvre, il pète les plombs ! Trêve de plaisanterie : je viens quand ici ? <HotBoy> Dans la semaine, normalement. <HotBoy> Tu es seul ? <HotBoy> Ça sent l’aventure... <HotBoy> (sourire) Sourire mon cul ! Je ris jaune, oui ! À peu près... Il a des amis. <HotBoy> Comme moi. Je dois venir mardi ou jeudi. (Une seconde je cherche.) Je cherche à savoir si je veux vraiment connaître toutes les saloperies encore cachées dans cette boîte. Et une voiture. Ben voyons. <HotBoy> Qu’est-ce qui est le plus utile dans la vie, les amis ou une voiture... Jeudi serait cool. Ça pour être cool, ce serait cool, c’est justement le jour où normalement nous ne devions pas être ensemble. Ça ne sera pas trop long pour toi d’attendre jusqu’à jeudi mon amour ? <HotBoy> Jeudi cok. <HotBoy> Je disais jeudi c ok. <HotBoy> Et non pas jeudi cock. <HotBoy> T’es toujours là ? <HotBoy> YOUHOU ! <HotBoy> Et un petit Viking perdu dans la nature...... <HotBoy> Et merde ! pppppppp Il est désolé, problème de clavier. <HotBoy> Pardon ? Oui, problème de clavier, il n’arrivait pas à voir ce qu’il tapait. <HotBoy> J’ai cru que tu avais changé d’avis. J’aurais bien voulu le croire, même ! Non. <HotBoy> Jeudi on se rencontre alors ? Ben ouais, pourquoi pas ? En effet, pourquoi pas ? Carpe diem... Sordide. L’idée me traverse l’esprit de confirmer le rendez-vous et de m’y rendre... <HotBoy> Bon alors je réfléchis... Tu es libre quand ? Toute la journée à partir de midi, heure à laquelle il a pris la sale habitude de se lever. <HotBoy> Bon ok, j’arrête. J’arrête quoi ? <HotBoy> Je voulais te faire une petite plaisanterie mais ça ne m’amuse plus. Désolé. Fuck off then. <HotBoy> On s’en va ? Il me répond qu’il est déjà parti. Ça je l’avais compris. <HotBoy> Pour ne pas mourir idiot, tape la phrase suivante “ /whois hotboy ” et tu observeras une étrange similitude entre ton adresse et la mienne. Silence. <HotBoy> Je suis à 2 mètres de toi. Rien de sérieux dans le jeu du web, que je ne prenne pas ses désirs - délires - pour des réalités. Il est à présent en communication avec “ Ricky ”, si ça ne me fait rien, mon chéri. Fais pas la gueule. Session Close
Mauvaise Graine n°28
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Surf Pandora Session Session Start <HotBoy> Hi. R U French ? <HotBoy> Hey ! ! ! <HotBoy> U could answer when UR talked to ? <HotBoy> R U French or not ? * <HotBoy> R U scared, little Viking ? <HotBoy> Never mind. Bye ! Yes, he’s French ; yes, he answers when he’s talked to ; no, he’s not scared but he’s not used to the net, sorry. <HotBoy> Ok, ok, keep cool :-)) <HotBoy> What’s your name ? He says his name to me, that he’s still sorry for keeping waiting my friend, and on top of that he’s on different chats, and for a new comer, it’s a bit complicated. And me, what does my nickname * hide ? <HotBoy> It’s a nice name. My name’s Thomas. You’re chatting with the whole world, then ? No, just he and I for the time being, the other ones have all disconnected themselves. <HotBoy> Where R U ? In what part of the country ? <HotBoy> (Maybe I’m too curious.) Here. No. <HotBoy> No joking ! <HotBoy> That’s funny. No, he doesn’t think it’s really funny actually, he’s a bit bored out of his mind in this town. He comes back from the Isles, and reckons that over there, it’s much better. <HotBoy> Nice... and what R U doing on the net ; R U flirting like a mad man ? <HotBoy> All the same (I’m joking)...... He doesn’t need to flirt like a mad man on the net, his town is full of ressources, he... chats. That does the difference. <HotBoy> Just like me. By the way, where am I from, myself ? I answer him that I live in the town nearby. <HotBoy> I often come, by the way. Do I ? Was I at the Gay Pride in June ? <HotBoy> Yes, I was, and that was rather nice, a bit cold as it started, but roughly a good experience. <HotBoy> What kind of boy and how old R U ? What do you do for a living ? (Stop me there if I get too curious) One never gets too curious, it’s just the wrong questions that are always asked. He doesn’t do much these times, he wanders around and tries to busy himself as well as he can. He vaguely talks about literature. He says we’ll talk back of the Gay Pride later. I don’t know if I shall carry on or what. He calls me back. Oi ! <HotBoy> Yeah, I’m coming. (Smile) I opened a box. I carry on. <HotBoy> You’re keener on lonelyness, or duo, or what else ? I’d like him answering he’s with someone who he would stand for. He’s the kind he is... He’s neither a real lover nor a real fucker, yet... He wanders and hangs about the town, talks about two bars, and something else... ‘Yet... yet...’ All this starts to smell burning. I answer that I know one of these bars, not the other one. <HotBoy> One must say I’m not a gay club & bars goer. <HotBoy> Well. Every man to his own taste. He neither is, but oxygene’s sometimes necessary. And now, my love, it seems like you need some. <HotBoy> By the way, how old R U ? (I 26.) He says his age. <HotBoy> I’m not a maniac of the age, but I avoid too wide differences, that’s all.
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He understands, yet, some differences do the difference... - only God knows what this sentence can mean ! - but he recalls of some guy aged 40, he had met when he was living in the Isles... <HotBoy> Yes, it’s true, it doesn’t mean much. Na na na ! <HotBoy> Oh well, poor guy, he’s blowing a fuse ! End of joke : when do I come around ? <HotBoy> This week, perhaps. <HotBoy> R U alone ? <HotBoy> It smells like an affair... <HotBoy> (smile) Smile my ass ! I laugh on the other side of my face ! Maybe, he’s got friends. <HotBoy> Like me. I should come over around Tuesday or Thursday. (Just a minute, I check.) Just checking if I really shall know all the bollocks still hidden in this box. And a car. There we go. <HotBoy> What’s more useful in life : the friends or a car ? Thursday would be cool. To be cool, it would be, it’s just when we shouldn’t be together. Won’t it be too long for you to wait until Thursday, my love ? <HotBoy> Thursday isc ok. <HotBoy> I was saying Thursday is ok. <HotBoy> And not Thursday is cock. <HotBoy> R U still there ? <HotBoy> OI ! <HotBoy> A little Viking lost in the wild...... <HotBoy> Fuck it ! pppppppp He’s sorry, keyboard trouble. <HotBoy> Sorry ? Yes, keyboard trouble, he couldn’t see what he was typing anymore. <HotBoy> I thought you’d change your mind. I even wouldn’t have minded to believe it ! No. <HotBoy> Let’s meet Thursday, then ! Well, yeah, why not ? Indeed, why not ? Carpe diem... Pathetic. The idea of confirming the rendezvous, and get there crosses through my mind... <HotBoy> So, I think of it... When R U free ? All day, from noun, the time which he bloody got used to wake up. <HotBoy> Ok, I quit. I quit what ? <HotBoy> I wanted to have fun but it doesn’t sound funny anymore to me. Sorry. Fuck off then. * <HotBoy> Shall we go ? He answers he’s already gone. I had gathered that. <HotBoy> Not to die stupid, enter the following phrase ‘/whois hotboy’, and you’ll notice a strange similarity between your address and mine. Silence. <HotBoy> I’m only 2 meters away from you. Nothing serious in the net game, that I shan’t wish his thinkings - frenzies - into believing things. He’s now chatting with ‘Ricky’, if I don’t mind, darling. Don’t be in a huff. Session Close * in English in the French version Translated from French by Walter Ruhlmann
Mauvaise Graine n°28
Le mois prochain dans MG…
Erich von Neff : le retour…
Soyez à l’écoute !
Lundi 16 novembre 1998 Marie-Andrée Balbastre présidente de l’association Terpsichore,
recevra Mauvaise Graine sur Radio Vexin Val de Seine Les Mureaux 96.2 FM
Mauvaise Graine est heureuse de vous annoncer que son site web, quelque peu délaissé depuis l’été, a retrouvé de belles couleurs en automne, lors de la parution du n°27 consacré à Bruno Tomera : http://www.mygale.org/~mgraine
MAUVAISE GRAINE - REVUE MENSUELLE ET BILINGUE DE LITTÉRATURE TENDANCE UNDERGROUNDN°28 - NOVEMBRE 1998 - ISSN : 1365 5418 - DÉPÔT LÉGAL : À PARUTION - IMPRIMERIE SPÉCIALEDIRECTEUR DE LA PUBLICATION : WALTER RUHLMANN ASSISTÉ DE MMRGANE & BRUNOABONNEMENT POUR UN AN (12 © MAUVAISE GRAINE & LES AUTEURS, NOVEMBRE NUMÉROS)-FRANCE : 150 FF - ÉTRANGER : 1998 200 FFADRESSE FRANCE INDIVIDUELLEMENT, LE NUMÉROFRANCE : 15 FF - ÉTRANGER : 200 FF-
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