Terra Incognita - Florence Magnin

Page 1

Florence

M

agnin


Florence

Magnin Née en 1950, Florence Magnin est une artiste autodidacte. Sa verve miniaturiste et ses univers merveilleux en font une figure de proue dans le milieu fantastique. Le grand public l’a découverte dans un premier temps avec son travail sur la saga d’Ambre (Roger Zelazny) chez Denoël. Depuis plusieurs années, elle travaille passionnément dans le milieu de la bande dessinée, avec trois séries à son actif, dont une qu’elle scénarise.

... Univers Fantastiques ... « Mon intérêt initial pour le fantastique remonte véritablement à l’enfance. Comme beaucoup d’illustrateurs, je pense avoir été marquée par les livres d’illustrations reçus lorsque j’ai eu six ou sept ans. Ce n’est pas une coïncidence si les illustrations en question étaient porteuses d’une imagerie fantastique. Ce qui est amusant, c’est qu’avec le décalage du temps nos souvenirs se mélangent, se modifient, si bien qu’une espèce d’alchimie de références muries se réalise au fil des années. Certains livres m’ont particulièrement touchée, comme les ouvrages d’Adrienne Ségur, une illustratrice connue à l’époque - ou encore les livres de contes, ces recueils façon Grimm que je recevais comme cadeaux de Noël à mes huit ans. Les textes ne me passionnaient pas, seuls les visuels me touchaient réellement. Plus petite encore, je me souviens de la “Bibliothèque rose”, de la “Bibliothèque verte” et des “Petits Livres d’or”... Cette collection remonte à 1954-55 et les images m’angoissaient particulièrement. Comme ces illustrations de Boucle d’Or : j’ai le souvenir d’ours terrifiants avec des yeux comme des têtes d’épingle - la Maison des Trois Ours avait de longs corridors, les perspectives étaient faussées ! C’était très curieux ; même la maison, qui ressemblait pourtant à une sorte de chalet suisse, censé être “mignon”, ne l’était pas du tout ! C’est ce qui m’intéresse dans le fantastique, lorsqu’il est ambigu, tellement sur le fil du rasoir qu’on ne peut pas parler de recette, se dire : “Ah oui, la source de notre peur c’est cette tête de mort dans le fond”...»

C

Juste avant l’aube (1992) Aquarelle, 22x32 cm

e qui m’intéresse dans le fantastique, c’est lorsqu’il est ambigu, sur le fil du rasoir...

Le Rendez-vous (1992) Acrylique sur papier, 54x34 cm


Dragon Radieux (1987) Acrylique sur papier - 24x32 cm

Florence Magnin - 105


Entretien avec Florence Magnin Peux-tu nous en dire plus sur la manière dont te viennent tes idées ? Ce sont des visions, des flashes - ça peut partir de quelque chose de réaliste, par exemple le papillon que j’ai représenté dans une miniature était réel au départ. Mais c'est surtout par le biais des taches, même des taches que je n’ai pas faites, des taches sur le mur par exemple. Que penses-tu de la « rupture» entre illustrateurs et peintres ? Il me semble que c’est une différence de démarche et qu’être peintre, c’est aller plus loin vers une connaissance de soi, c’est vraiment une quête intérieure. Je crois qu’il faut une certaine maturité. Lorsque tu es illustrateur, tu es assujetti à un texte, et c’est ce qui m’a un peu gênée à la longue... Peux-tu nous évoquer les étapes de travail pour lesquelles tu as davantage d’affection ? C’est très variable. Si c’est par rapport à un texte, il te branche ou pas - et encore, ce n’est pas toujours vrai. Il y a des textes pour lesquels je ne me sentais pas forcément d’affinités, et puis le dessin s’est mis en place. Parfois, il y a des textes que j’aimais tellement que ça me bloquait, parce que je n’arrivait pas à montrer à quel point c’était beau. Et du coup ça ne donnait pas quelque chose de très bon. Le processus de création a ses hauts et ses bas. Il y a des périodes d’enthousiasme, par exemple le premier jet. Alors que parfois tu es complètement à sec. Il faut rendre un truc dans la semaine et puis rien ne vient, pas d’idée, c’est l’horreur. Et puis d’autres fois, ça va partir d’un seul coup, c’est l’euphorie. Lorsque l’esquisse vient d’un seul coup, c’est magique. Il y a une vie que tu ne récupéreras jamais, c’est vivant. à partir de là, il faut retravailler. à ce moment-là ça devient une souffrance parce que tu vas perdre la vie, l’élan. Quelque chose t’échappe et c’est douloureux. Si l’esquisse est bonne, le reste va suivre, généralement. On part donc d’abord de l’esquisse, on reprend le crayonné en le précisant, ensuite on met la couleur et on s’occupe de la finition. C’est toujours le même cheLes Ratés (1993) minement. Pour la couleur, les premières touches sur la toile, c’est un régal. Il y a un flou qui magnifie l’image. Encre et acrylique, 20x28,5 cm Après la bagarre commence pendant plusieurs jours. J’ai eu des périodes comme ça, d’impuissance, où le matin je repartais à l’assaut en me dopant mentalement. C’est une lutte contre soimême, tu es face à tes manques, tes lacunes. Sans être psychologue, pour beaucoup de dessinateurs, tu regardes les dessins, tu connais la personne. Le caractère apparaît, tu te livres beau« Une fois que le dessin est bien bâti, mettre en couleur c’est un peu la récompense coup dans un dessin. Moi qui fais du fantastique, je sais que ça - et ce que je cherche, dans la couleur elle-même, ce n’est pas tellement de savoir se décrypte très facilement. Quelquefois il y a des symboles d’où vient la lumière. Dans mes dessins, je crois qu’il s’agit plus d’une espèce de évidents. Et ça doit être plus visible encore dans le travail des lumière intérieure - c’est plus l’idée d’essayer de trouver des résonances des teintes surréalistes. Ce qui est marrant, c’est qu’au moment où tu trales unes par rapport aux autres. Quelquefois, lorsque la toile est très mure, même vailles, tu pars sur quelque chose qui te semble parfaitement sur un format relativement grand, tu vas ajouter une petite touche, peut-être juste « raisonnable ». Tu colles bien au texte, et tu t’aperçois à la fin une zone d’un centimètre carré, c’est incroyable, parce que tout d’un coup, tout va qu’il y a un symbole flagrant, tout à fait évident, que ce soit entrer en résonance de façon simultanée. Au niveau matériel, c’est ça que je cheraffectif, sexuel, ou autre... Et pourtant tu ne l’as pas cogité ! che, essayer de résonner juste... » Des fois les choses que tu élagues aussi, que tu choisis d’enlever, peuvent être révélatrices.

... Couleurs et Lumieres ...

Est-ce que tu souhaites te diriger vers d’autres genres ? La science-fiction, le réalisme ?... Purement réaliste, non, parce que je ne pense pas que ça me correspondrait. Je pense que ça tomberait à plat même si j’en avais envie, mon graphisme ne suivrait pas. Par contre, dans le fantastique, le choix est vraiment large. La science-fiction pure et dure, je ne sais pas si je pourrais, mais des choses un peu déjantées, du type « Caro et Jeunet », qui mélangent des choses à la fois futuristes et rétros, un peu glauques, ça me plairait. Je ne prétends pas avoir visité l’ensemble du paysage médiéval-fantastique, loin de là, mais ça fait un petit bout de temps que j’en fais, et j’aimerais aujourd’hui l’utiliser de façon plus personnelle, en le détournant. As-tu songé à l’érotisme, peu présent dans tes illustrations ? Ça ne s’est jamais fait, mais c’est un territoire à explorer. C’est très difficile, peut-être plus encore pour une illustratrice : si c’est juste une scène en passant, dans une BD, c’est facile à faire (il y a par exemple un passage assez libertin dans Mary la Noire). Mais si tu fais un bouquin entier, c’est très difficile, c’est une question de pudeur : ça veut dire que tu vas te livrer, quelque part. Même si tu peux toujours te mettre à l’abri en disant : « oui, ça c’est le fantasme de tout le monde, c’est général »... C’est un exercice de style difficile aussi, si tu veux éviter de tomber dans la vulgarité. En même temps tu ne peux pas tricher, si tu fais de l’érotisme, tu dois y aller. Donc ça me paraît un des thèmes les plus difficiles à traiter, peut-être un des plus intéressants aussi. Pour l’instant, ce n’est pas mon souci prioritaire - l’érotisme pourrait avoir sa place dans de futures BD...


Alice et les Jumeaux (2000) Acrylique sur toile, 30x24 cm

A

lice au Pays des Merveilles fait partie des histoires que j’aimerais illustrer, étant moimême fascinée par le domaine du rêve et par tout ce qui s’y rattache : le psychisme, le subconscient ... Cette illustration en couleur est un travail de commande. J’ai tenté de synthétiser les dominantes de l’histoire d’Alice, avec une profusion de personnages qui se télescopent un petit peu dans l’espace et le temps.

Florence Magnin - 107

Alice et le bombyx (2000) Crayon, 42x29 cm

Quant au crayonné, eh bien, il y a des scènes qui font davantage travailler l’imaginaire et pour moi c’était l’épisode de la chenille, peut-être à cause du narguilé, avec son côté défoncé. On est toujours sur le fil du rasoir avec Lewis Carroll, c’est très ambigu. C’est enfantin, mais assez noir, à la limite du malsain, finalement.


Travailles-tu d’après documentation ? Je pense que ça m’apporterait quelque chose, travailler à partir de photos. J’essaie d’en faire davantage. Plutôt des photos de décors en ce moment. Pour les personnages, c’est plus facile d’en trouver, dans des magazines par exemple. Pendant un moment, j’avais cette idée de développer quelque chose sur le cirque. Je suis donc descendue de ma tour d’ivoire avec mon appareil photo. C’est vrai que d’un autre côté, comme je fais dans l’onirique... ...Pas facile de trouver des photos de dragons ou d’elfes... Même Mary la Noire, c’est également plutôt onirique - bien que ça reste un peu flou, on ne peut pas dire que ce soit un récit historique. Pour cette BD, il m’a fallu de la documentation sur les bateaux. Pour L’Autre Monde, j’ai pris de la doc sur un vieux tacot, et pour des intérieurs, comme la cuisine d’Abler par exemple. J’aime bien allier les deux. On observe des petites touches asiatiques dans certaines de tes dernières illustrations ? Il est possible que ce soit un fantastique dont je puisse tirer quelque chose : il y a une finesse de ligne, un aspect un peu sinueux, en même temps un aspect un peu cruel, morbide...

L’Elfe des eaux (1993) Crayon, 8,5x12,5 cm

Comment en es-tu venue à ton activité principale actuelle, la bande dessinée ? J’ai rencontré Christian Godard et Rivera, au cours d’une petite exposition dont Rivera était l’invité d’honneur. J’avais deux trois dessins exposés, il les a vus, et il a demandé à me rencontrer. à l’époque il avait une petite maison d’édition, le Vaisseau d’Argent, et il cherchait de nouveaux illustrateurs. Donc je suis allée les voir à tout hasard, pas sûre d’être à la hauteur ni même de vouloir en faire. Et là-dessus ils m’ont envoyé deux synopsis et se sont montrés très encourageants. Donc je suis repartie ébranlée, en me disant : « peut-être que je suis « La bande dessinée, c’est proche de l’illustration, mais ça se gère capable de faire de la BD ». Et sur ces deux synopsis, il y avait celui de comme un film : l’illustration est plus proche de la peinture, la bande Rodolphe, que je ne connaissais pas. Apparemment, mon dossier lui a dessinée, du cinéma - tu es censée bouger, varier tes angles de vue, et plu, et on a commencé à travailler ensemble. On a fait quatre plangrosse difficulté, garder un personnage, qui reste reconnaissable mais ches d’essai, et on a signé le contrat. qui change de physionomie pour exprimer différentes émotions... Autant dans l’illustration, j’ai ramé - j’ai eu quatre ans de galère C’était une difficulté énorme pour moi qui suis illustratrice. » absolue avant d’avoir ne serait-ce qu’une carte postale à illustrer, autant dans la BD, tout m’est arrivé sur un plateau. J’avais le scénariste, j’avais l’éditeur... Sans avoir rien eu à faire. Au début, à la limite, c’est moi qui freinais. Un album de BD, ce n’est pas rien, et là j’avais signé pour deux albums. Je n’avais jamais travaillé avec quelqu’un, le travail avec un scénariste c’était nouveau pour moi. Les BD que je connaissais avaient un trait noir, et j’avais dit dès le départ au Vaisseau d’Argent que ce serait très difficile pour moi s’il fallait encrer, parce que ce n’est pas mon truc. En illustration, tu vas trouver un ou deux personnages qui sont bien, mais tu ne les fais pas vivre. C’est vrai qu’en plus, si tu as une difficulté d’ordre morphologique sur un personnage, tu peux toujours tricher un peu, mettre un bout de tissu pour cacher quelque chose… Mais si tu fais de la BD, tu ne vas pas tricher à chaque case.

... Bande Dessinée et cinéma ...

Est-ce que tu penses t’orienter vers d’autres domaines, comme le cinéma ou le jeu vidéo ? J’aurais bien poussé le modelage plus loin. La pierre, non, mais la terre, sa sensualité, il me semble que je pourrais continuer. J’aurais bien aimé faire du cinéma, la BD c’est un peu une façon d’aller dans cette direction. Je suis aussi fascinée par les images de synthèse, c’est magique ce support-là. Ça peut être d’une poésie à vous couper le souffle. Créer des costumes de théâtre, des décors, des trucs de fête foraine, tout ça… Tout ce qui permet de développer un univers en fin de compte.

Le Rouet (1989) Encrage, 13,5x20 cm

M

es images préférées viennent pour beaucoup du hasard, de l’expression du subconscient.


Le Pays Roux (1990) Aquarelle, Pastel, Acrylique - 30x38 cm

Florence Magnin - 109


Le Dragon endormi (1990) Encre et plume, 21x13,5 cm

... ALCHIMIE et EXPERIENCES ... Parmi mes expériences, il y a ces miniatures à l’huile ou à l’aquarelle, où je détournais complétement l’usage de l’aquarelle. D’habitude, je fais des choses assez précises, j’aime bien les détails... Et là, tout bonnement, je suis partie sur une tâche, au lieu de partir sur un crayonné. Ma démarche, pour ces taches, est de partir de l’abstrait pour aller vers quelque chose de plus réaliste. Peutêtre qu'à la longue, petit à petit, j’arriverai à des tâches à peine plus élaborées.

Étude (1985) Huile, 4x4 cm

Quand tu prends une tache et que tu la précises, tu te fais plaisir, tu vas loin dans ta démarche personnelle, mais en même temps, c’est peut-être préciser trop lourdement à la personne qui va regarder : « voilà ce que je vois ». La démarche de peintre, c’est aussi laisser plus de marge à l’autre. Il peut y avoir un jeu, une interaction peut-être plus intéressante avec la personne qui va regarder. Le Papillon (1985) Huile, 4x7,5 cm

Étude 2 (1985) Huile, 5x4 cm


OphĂŠlia (2000) Acrylique sur toile, 21x30 cm

Florence Magnin - 111


Etude pour La promenade

C

ette peinture provient d’un gribouillis que j’avais fait sur une feuille… Il me semble que ce n’était même pas une tache de couleur, mais un crayonné. En le regardant, on pouvait distinguer un personnage monté sur un animal qui avait l’air de voler, de surgir d’un sous-bois. En gros, c’est ce que ça m’évoquait. Au départ c’était minuscule, trois ou quatre centimètres. J’ai repris l’image en plus grand, la silhouette de l’arbre, le personnage... Il n’y a pas de processus logique, ce n’était pas un dessin de commande. C’est donc très difficile d’expliquer sa construction : il s’agit de hasard, de jeu avec la texture… C’est vrai qu’il y a des impératifs qui peuvent te guider, puisqu’on doit obéir à certaines lois comme des lois de proportions, de composition... Mais plus tu avances, plus ta marge de liberté se réduit. Le dessin finit par se structurer de lui-même. Cette image, je l’aime bien parce que c’était la première fois que je travaillais sur toile. J’ai pris d’autant plus de plaisir à la faire que ce n’était pas une commande et j’ai pris tout mon temps pour la réaliser. En avançant, je me suis rendu compte que le dessin pouvait fonctionner également à l’envers, ce qui m’a beaucoup amusée. Il y a toujours une petite histoire pour chacune de mes images. On pourrait imaginer une planète avec un environnement qui est à la fois air et eau. Il ne s’agit pas d’un univers de violence. Le personnage est une femme habillée de manière médiévale, sa silhouette est très hiératique, c’est une infante. Mais il y a quelque chose d’inquiétant malgré tout avec cet espèce d’insecte, qui n’a rien d’avenant et la machine qui est aussi insectoïde. Le personnage est humain et très fragile, on ne sait pas s’il guide les insectes où s’il est utilisé par eux. Il y a aussi cet oiseau dans sa main pour souligner le mélange des éléments.


La Promenade (1987) Acrylique sur toile - 24x36 cm

Florence Magnin - 113



Qu’importe le flacon une nouvelle de Laurent Kloetzer d’après un tableau original de Florence Magnin

-

E

Ouvrez les royaumes, crevez les plafonds, il y a des chances pour qu’on nous expédie au ciel (fin de siècle, noir désir)

l l e n e r ép o n d p a s, so i t el l e est p a s l à , so i t el l e est m o r t e.

Je relâche la sonnette et regarde la porte de l’appartement de bas en haut, comme si j’espérais y lire les réponses à mes questions. Le blindage anti-cambrioleurs reste silencieux. Alex, curieusement tendu, sifflote un tr uc que je ne reconnais pas. Il hausse les épaules : - On regarde à l’intérieur ? Utilise ta clef magique. Je glisse ma carte magnétique passe-partout dans la fente de la ser r ure et tapote sur le boîtier. Quelques secondes passent puis la machine me joue sa petite musique aigrelette et la porte s’ouvre. - Bonjour Cécile. Nous sommes le 3 mai 2012, il est 10h22. Tu as sept messages à consulter dans ta boîte aux lettres. Le ser vice domotique nous accueille avec une petite voix féminine très douce, très gentille. Je mets un peu de temps avant de comprendre que c’est probablement sa voix à elle, Cécile Greene. Sa voix pour la saluer tous les soirs quand elle revient du boulot. Je fais mes premiers pas chez elle avec un sentiment de tristesse diffus. Un deux pièces techno, en désordre. Le verre et le plastique font une façade propre pour les meubles, un peu de poussière s’est déposé sur le sommet de la télé à écran plat, sur les plats abandonnés sur la table basse. Aucune odeur de pourriture. Repensant à Nestor Bur ma, je suis heureux de ne pas tomber sur un cadavre. - Ça fait un bail qu’elle n’est pas venue, dit Alex. - Deux semaines qu’elle ne s’est pas pointée au bureau. Je reste sur le pas de la porte pour m’imprégner de l’ambiance, lui farfouille dans chaque recoin. Il se glisse dans la chambre aussi grande qu’un placard. - Elle est pas là. J’imagine l’arrivée de Cécile, chez elle, les épaules fatiguées par les néons, l’Omni et l’ascenseur. Elle repousse la porte derrière elle, laisse tomber son sac à main, découragée par le bordel ambiant et la poussière. À travers les vitres, on entend les g rondements de la Ville, ils résonnent dans sa tête. Comme dans la mienne, chaque soir. Alors je refer me la porte derrière moi, me laisse tomber sur le canapé dépliable bleu foncé. La Ville se dévoile à nous à travers les vitres, sous un de ces ciels gris dont elle a le secret, mélange de pollution et de vague à l’âme.

Florence Magnin - 115


Un papier qui traîne sur la table attire mon attention. Je le prends. On dirait une page de magazine à la texture glacée. Voilà maintenant deux mois qu’ils n’ont plus livré de vivres. Au-delà de l’enceinte, on entend le tumulte qui agite la ville, mouvements de foule, choc des armes, Jon sait qu’il se passe quelque chose, une guer re ou une révolution. Peut-être que leurs gardiens sont morts, peut-être qu’on les a oubliés. Les murailles de basalte sont si hautes… Qui, à part leurs geôliers, se souvient encore qu’à l’intérieur de ces murs se trouve l’ancien quartier Yezdite ? A la der nière assemblée, Gabo le mendiant avait dit que ceux de la ville ne se souviendraient d’eux que quand ils auraient tous crevé et qu’on sentira le fumet des cadavres depuis l’extérieur. Sans raison, affaibli par la faim, Jon rit tout seul en marchant des les rues désertes de sa prison. Il se sent si léger, il pour rait s’envoler… La petite Dver n, voilà comment ils ont appelé le vieux quartier Yezdite, ce quartier enfermé, cette prison où se mélangent les fous, les assassins et les républicains. Gabo disait que le nom était juste. Cet endroit n’est-il pas une reproduction en miniature de la ville ? Un ciel noir a recouvert Dver n et sa petite Dver n. La pluie commence à tomber. Alex s’impatiente : - Bon, alors, on fait quoi ? Elle n’est pas là, elle n’est pas chez ses parents, on ne lui connaît pas d’amis. Elle se sera fait agresser par des Sauvages, ou bien violer, ou bien tuer, c’est triste mais c’est comme ça. Y a plus qu’à prévenir les Vigiles… Je repose mon papier et lui désigne le sac à main abandonné à ses pieds. - Elle est repassée ici. Ener vé, il fouille le sac, en ressort la clef magnétique. - Elle est repassée ici et elle est ressortie en claquant la porte. Bravo Sherlock. Bon, maintenant on fout le camp, cet endroit me donne le cafard. - Pourquoi ? - Parce que cette fille pue le malheur. Elle vit ici, elle a l’air malade, il n’y a pas une seule adresse personnelle dans son carnet. Elle sort en boîte avec les gens du bureau, elle mange des nouilles chinoises à réchauffer au micro-ondes et elle a un goût de chiottes pour la déco. C’est un petit papillon triste, elle se sera fait éclater contre un mur par un méchant, et personne à part les gentils enquêteurs et ses parents ne s’en est rendu compte. Sachant que les gentils enquêteurs, c’est nous, ça ne l’avance pas des masses ! Il tourne en rond dans le petit salon comme une bestiole en cage. - Il y a des jours où je le supporte et des jours où ça ne va pas. Ce clapier me donne envie de tout exploser à la batte. Alors soit on sort d’ici, soit je casse tout ! - Tu ne le feras pas. Il prend un air boudeur et se laisse tomber sur une chaise de toile bon marché. - Non. La pluie ruisselle sur son visage, il tire la langue pour attraper les gouttes, dansant comme un fou dans les rues de sa ville, de sa prison. Il ne les entend pas quand ils courent sur lui, les mômes. Ils ne sont que deux, mais il n’est pas bien gros et ils le plaquent dans la boue, entre deux amas d’ordure. Stupéfait, il se laisse immobiliser. Que vont-ils faire ? Le ramener au caïd, leur maître, pour qu’il en fasse son esclave ? Lui voler ses haillons ? Il essaie de se débattre, mais à treize ans, il ne pèse pas lourd...


Le plus jeune des deux ânonne : - Des billes rouges pour le caïd. Ils n’ont pas plus de dix ans. Jon essaie de se débattre mais ils lui appuient un objet pointu dans les côtes. L’autre môme lui lèche le bras. Il s’affole… Qu’est-ce qu’ils veulent ? Dans certaines maisons, les familles désespérées mangent leurs morts… Le caïd maintient un semblant d’ordre, mais... L’un des mômes, crasseux, le regard vide, s’assied sur sa poitrine, lui griffe le cou. Il tient un couteau, l’approche des yeux de Jon, du coin des yeux de Jon… - Des billes rouges pour le caïd. Jon hurle, se tord dans une convulsion. L’autre couteau, celui du môme qui lui tenait les jambes, se prend dans son pantalon et lui entaille la hanche. Il se relève, dégage les deux gosses, les éloigne à coups de pied, s’enfuit en pleurant dans la pluie, et le sang dégouline le long de sa jambe. J’arrête de lire. Je n’ai jamais vu Alex aussi triste, j’ai l’impression qu’il pourrait pleurer. Je ne sais pas trop quoi faire… Le prendre dans mes bras est exclu, il me casserait la gueule. Moi aussi je ressens cette atmosphère de poisse qui colle au regard clair et fragile de Cécile. Je saisis une photo où on la voit souriante, auprès de sa mère (un jardin, l’été, quelques éclats de lumière dans les feuilles). Longue silhouette, moulée par un pantalon violet et un T-shirt blanc trop étroit comme en portaient les gamines de mon temps. Le visage délicat encadré de cheveux roux. - Regarde, je dis, elle est jolie. Alex dégage violemment la photo que je lui tends. - C’est ça le pire ! Ça le fait enrager. Pour ne pas rester sans bouger, je me lève et parcours les clichés posés sur les meubles. Elle a accumulé les bibelots de peu de valeur, un éventail, un escargot de verre, un coupe-papier kitch rapporté de vacances. Les photos la montrent avec son chef de ser vice lors d’une réception de l’an dernier (j’y étais, c’était le grand show de remotivation concocté par les ressources humaines. Pathétique), elle sourit et tient un verre à la main, le flash lui a mis des lumières dans les yeux. J’aimerais passer à l’action, ne serait-ce que pour réconforter Alex. Elle a peut-être été enlevée, cette petite ? Dans ce cas, on aura sans doute une poursuite, une ar restation, encore un moment flippant pendant lequel mon Alex pour rait danser avec la mort. Je commence à ranger la table en désordre, mettre la vaisselle dans l’évier et jeter tout ce qui est périmé. Alex fait la gueule et ne bouge pas. Je vois qu’il a ramassé la photo de Cécile et qu’il l’a remise à sa place. - Tu es flic ou femme de ménage ? - Ni l’un, ni l’autre. - Alors on se tire. Il se lève. Attrape un petit carton d’emballage que je m’apprêtais à jeter avec le reste. - Attends, attends, c’est quoi ce truc ? Dans le carton, des papiers froissés. Il étale sur la table vide un grand dessin, une page arrachée d’un livre, le même papier glacé et épais que tout à l’heure. L’image dans des tons bleus, est une reproduction de peinture. Un alchimiste penché sur une fiole, il porte un masque, celui des médecins de la peste. Je dis alchi-

Florence Magnin - 117


miste, parce que le décor est un vrai laboratoire. Cornues, bestioles empaillées… Apparemment la page que je lisais a été arrachée du même livre que cette illustration. - Quel expéditeur pour ce paquet ?, demande Alex. - Aucun. Arrivé par la poste au nom de mademoiselle Cécile Greene. - Rien d’autre, à l’intérieur ? - Des boulettes de polystyrène. Ca contenait un truc fragile. - Mouais. Je m’assieds sur le canapé-lit pour continuer ma lecture. - Fouille l’appartement, Alex, on va trouver quelque chose... Reste pas sans bouger. Moi, j’ai envie de lire ce truc (j’agite la feuille). Je pourrais me foutre de sa gueule, dire qu’il faut bien que quelqu’un se charge des besognes intellectuelles. Une vengeance légitime pour tant d’autres occasions. Je suis sûr qu’il le prendrait mal. Il se lève de mauvaise grâce, furète d’une manière un peu plus méthodique que tout à l’heure. J’entends s’ouvrir et se fer mer la porte du frigo, je le vois humer d’un air pénétré les flacons de médicaments de la salle de bain et regarder les messages enregistrés sur le visio. Il fait toujours la gueule mais n’a pas l’air d’humeur violente. Jon se jette à l’intérieur de la maison et pèse contre la porte. Ils l’ont poursuivi, ils ont rameuté leur bande. Ils n’oseront pas entrer ici, pas dans la maison de la dame Frann, ils ont trop peur de la veuve. Sa protectrice. La cuisine est sombre, aucun feu ne brûle dans l’âtre. Der rière les petites vitres en cul de bouteille dansent des silhouettes démentes, ils hurlent sous la pluie comme des chiens. Il aurait voulu que Frann soit là pour l’accueillir, que sa veste d’homme et ses grandes bottes impressionnent la meute, dehors, que son regard brillant chasse ces fous, que sa voix claque pour les disperser. Mais Frann n’est pas là, elle est dans son atelier, comme toujours. Jon titube dans la cuisine, grimpe les marches de l’escalier. Il n’a pas le droit, il le sait, c’est une part du contrat qui le lie à la veuve. Elle le protège, il tient la maison, s’occupe du feu et de la nour riture et il n’a pas le droit d’entrer dans l’atelier. Dehors, une voix hurle : - Des billes rouges pour mon maître ! Des yeux pour le caïd ! Il veut voir tes rêves ! La peur le jette en avant, il continue à monter. - Bon, j’ai regardé les trucs habituels. Je pose mon papier. - Oui ? - Il n’y a que des plats pour une personne dans le congélateur. Elle collectionne les flacons de parfum et prend des antidépresseurs. Tous les messages visio viennent de sa mère, sauf deux. Le premier pour lui gueuler dessus et lui dire d’aller bosser, le second pour lui dire qu’elle est virée. Si elle est virée, pourquoi on la cherche ? Je soupire : - Parce qu’elle était l’assistante de quelques pontes de la production. Elle aurait pu connaître quelques secrets… Je suis censé vérifier qu’elle n’a pas disparu en les distribuant autour d’elle.


Alex ricane. - Moi qui imaginais qu’ils t’avaient envoyé ici dans un but humanitaire… Je suis rassuré. Dernier détail. D’après le ser vice domotique, elle est rentrée ici il y a quinze jours après être sortie du bureau. Et elle n’est pas ressortie. Comme les vitres ne s’ouvrent pas et qu’on est au vingtième, on peut exclure qu’elle soit partie en hélicoptère. Bref, elle est là, avec nous. Il fait un petit signe de la main et sourit d’un air bête : - Youyou, Cécile ! Montre-toi ! Le jeu est fini ! Nous ne pouvons nous empêcher de regarder tout autour de nous, de chercher son regard dans les photos, de tenter de combler l’absence. Je pense à une histoire de Dylan Dog où un homme compte tellement peu pour son entourage qu’il en devient invisible. Alex s’impatiente. - On a regardé partout, on ne peut plus rien faire… On s’en va ! L’appartement est si vide qu’il en devient immense. Une lumière filtre sous la porte du grenier, un flamboiement ir régulier. Jon pousse sans bruit le battant. Le foyer jette autour de lui les lueurs d’un petit soleil, les ombres dansent sur les étagères, dans les bocaux et les maquettes, tout ici est vivant. Jon retient son souffle, craignant de perturber un équilibre fragile. Vêtue de son masque de médecin pour ne pas mêler son souffle aux fluides subtils, Frann ajuste la flamme de l’athanor sous la fiole en forme d’œuf. Et dans la vasque de ver re tremble une lumière d’or, quelques rayons de soleil d’été, la lumière au-dessus de la mer. Jon se saoule de la lumière d’or, le grenier disparaît, le vent sec chasse les cris, la pluie et les nuages, apporte une odeur de pin, fait bruisser les feuilles d’ar gent des oliviers. Il sourit, heureux, oublie la douleur, sent son cor ps lui échapper. Il s’envole vers une ville de bois précieux, taillée comme de la dentelle, vers des montagnes où nichent des châteaux fantômes, vers les cieux parcourus d’étranges machines volantes de toile et de cuivre. Les couleurs éclatent dans la brume dorée, l’esprit de Jon vacille. Derrière le foyer se tient quelqu’un d’autre, une grande silhouette masquée baignée d’ombres. On entend un cri bref, cristallin. Jon vacille, tombe lourdement sur le plancher, s’évanouit. Alex marche de long en large. Il semble réf léchir, apparemment moins oppressé que tout à l’heure. Puis il s’arrête face à moi, les mains dans le dos. Je soutiens son regard un bon moment. - Regarde ça. Vu le ton, c’est un ordre. Il me tend une belle chemise cartonnée. Je vois dans ses yeux que je ne dois pas demander d’où il la sort, alors je l’ouvre. Elle contient une demi-douzaine de peintures grandes comme des cartes à jouer. Des miniatures, dans un style médiéval, très précises, très colorées. Les premières sont maladroites, les suivantes plus assurées. - C’est elle qui les a faites, affir me Alex en me désignant un attirail de peintre dans un tiroir, posé on ne sait pourquoi au milieu d’un paquet de factures. Des châteaux recouverts de neige dans lesquels poussent des arbres, des vitraux, une procession féerique, une foule bariolée. Les images four millent de détails, où est-elle allée chercher ces idées-là ? Il y a là-dedans une richesse qui me tourne la tête. Je dis :

Florence Magnin - 115


- Elle les a bien montrées à quelqu’un, tu ne dessines pas des trucs comme ça juste pour toi ! Elle montre les miniatures à quelqu’un. Quelqu’un lui envoie un paquet, qui contenait des pages arrachées d’un grand livre et autre chose… Alex sourit. Je me figure Cécile, fermant vivement la porte, son petit paquet à la main. Son cadeau, reçu par la poste. Larguant son sac dans un coin, comme si elle n’en avait plus besoin. Ne prenant pas le temps de ranger. Ouvrant le paquet avec le coupe-papier kitch… - Alex. Trouve-moi dans le décor un tr uc petit, fragile, qui rend une femme heureuse. Il se gratte la tête. Sug gère, sceptique : - L’escargot en verre ? Non. Autre chose. Je fais le tour du salon, une fois, deux fois. Et rentre dans la salle de bain. Il est là. Posé au-dessus du lavabo. Un flacon de parfum en for me d’œuf aux motifs végétaux emmêlés, dans un style un peu art nouveau. Une pièce magnifique, surclassant toutes les autres. Un flacon sans nom, jamais vu dans aucune publicité, avec des entrelacs de verre bleus et violets, des courbes et des élans, et un petit bouchon très gracieux. Je le prends en main, je l’ouvre, juste un instant, juste le temps de m’enivrer, la tête me tourne, tourne, tourne, je le refer me. Je me sens triste, un peu nostalgique. - J’ai trouvé Cécile, Alex. Il rapplique, prend le flacon, l’ouvre… …dans une brume dorée un chemin ser pente entre des arbres miniatures, si fins, si délicats. Au-delà, la ter re de quatre royaumes, printemps, été, automne et hiver, l’île des morts et le voilier d’une femme pirate, des princes et princesses sur la ter rasse de châteaux fantomatiques. Licor nes, dragons, fées, fleurs, brocarts, miroirs, rideaux, théâtres… …et le referme, parce qu’Alex n’est pas du genre à se laisser entraîner dans des terres pareilles. Mais je sais qu’il a senti le vacillement, l’attirance, le plongeon. - Je l’ai vue, il dit. Elle fait de la peinture sur la côte, près de l’auberge de l’ancre de miséricorde. Tout ira bien, tant qu’elle ne traîne pas du côté du Bainbow’ s Church. Ça m’avait l’air carrément mal famé comme coin… Il secoue la tête, comme pour s’ébrouer. - Waow. Philosophal, ce parfum. Vague mélancolie. Je ter mine ma lecture. Il est assis contre Frann, ser ré dans ses bras, accroché à sa grande robe bleue. Elle a retiré ses gants, lui caresse les cheveux, sa main est douce, il n’a plus froid, il n’a plus mal. Il n’y a presque plus de lumière dans le grenier, l’athanor est masqué, la grande silhouette à la voix cristalline a disparu. Il murmure : - Je suis désolé. J’avais peur, j’ai fait fuir ton ami. Elle ne répond rien, lui caresse le visage, il s’abandonne au contact de ses doigts. Le masque de médecin est posé sur la table voisine. La pluie ruisselle sur le toit et les mômes du


caïd crient encore, tout en bas. Il lève les yeux vers Frann, ne voit pas de reproche sur son visage très pâle. - J’ai compris, maintenant. Tu prépares une liqueur d’or pour guérir les âmes, pour nous guérir tous. Elle sourit et lui embrasse le front. Elle parle très doucement. - L’ange reviendra. Quand tu seras endormi, l’ange reviendra et je terminerai... Mais pour l’instant, tu restes ici, avec moi. Rassuré, il se plonge plus profondément dans les plis de la grande robe bleue, se laisse glisser dans une nuit piquetée d’étoiles. Alex me regarde en se caressant le menton. - Tu as bien joué. J’avoue, je suis bluffé. Pour une fois, c’est toi qui a résolu cette affaire. Chapeau. Bravissimo. - Fous-toi de ma gueule. - On envoie le flacon aux ressources humaines ? Ca va les faire rigoler. Je le couche dans la boîte aux boules de polystyrène, avec le texte et le dessin. - Non, on l’envoie à sa mère, avec ses peintures. - Il te faudrait les grands titres dans les journaux. « Il retrouve une dispar ue dans 25m². » - Il me semble que tu ne l’avais pas trouvée, toi. Il ricane : - Je t’ai laissé ta chance. Nous sortons de l’appartement. La voix de Cécile nous dit : - Au revoir. Aujourd’hui, tout va bien se passer.

Laurent Kloetzer

www.noosfere.com/heberg/kloetzer

Né 83 ans après Tolkien, Laurent Kloetzer aimerait devenir un écrivain méconnu puisqu’il paraît qu’il faut passer par là avant d’atteindre la célébrité. D’ici là, il essaie d’écrire les livres qu’il aimerait lire, mais qu’il ne trouve pas en librairie. Il a déjà publié deux romans (Mémoire Vagabonde et La voie du Cygne) se déroulant dans un univers de xviiie siècle imaginaire, tous deux centrés autour du quartier de la petite Dvern. Réminiscences 2012, publié aux éditions Nestiveqnen, est son premier recueil de nouvelles, autour des aventures de Monsieur K.

Florence Magnin - 121



Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.