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EN PRATIQUE SOMMAIRE

N째50 - OCTOBRE 2011

Dossier

Les partenaires du CFO Le CFO interagit au quotidien avec de nombreux acteurs. Exploration de ce maillage relationnel et conseils pour le rendre plus efficient.


FISCALITÉ: OPTIMISATION DES COÛTS DOSSIER TEXTE : FLORENCE THIBAUT

Les partenaires

du CFO 20

Au centre d’une série de relations, le directeur financier travaille au quotidien avec son patron et ses collègues CIO, trésorier ou encore CTO, mais traite aussi avec des partenaires externes comme des consultants, des crisis managers ou encore des conseillers fiscaux. Exploration de ce maillage relationnel et conseils pour le rendre le plus efficient possible.

C

hargé de défendre l’intérêt économique de son

De par l’évolution de ses tâches, l’ampleur de ses différentes

entreprise et de limiter les risques, le CFO joue

responsabilités et l’augmentation de la technicité de son

parfois un rôle d’équilibriste et se doit d’être vi-

métier, le CFO serait parfois en phase de devenir un CEO bis.

sionnaire. On lui confie également davantage la

« Le principal défi auquel il fait face consiste à mettre à jour

tâche de prédire les performances. Sa fonction, comme son ca-

ses compétences et ses connaissances en permanence, précise

lendrier, sont en pleine évolution. Métier généraliste, la fonction

encore Bruno Colmant. Pour travailler efficacement avec un

de CFO doit s’appuyer sur des spécialistes hautement qualifiés

Crisis Manager, qui intervient de manière ponctuelle dans son

pour parvenir à mener à bien ses différentes tâches.

entreprise, il lui faut s’adapter à sa culture d’entreprise et à ses

« Le métier de CFO est devenu polyvalent et polymorphe, ob-

manières de travailler. »

serve Bruno Colmant, Conseiller académique d’Ageas et associé auprès du Cabinet de consultants stratégiques Roland

UN DUO STRATÉGIQUE

Berger. Il doit à la fois s’intéresser à la gestion opérationnelle

Pierre Lambert, CFO de Zetes, travaille avec son patron,

de son entreprise et à la fiscalité, mais aussi à la gestion de la

Alain Wirtz, co-fondateur de la société, depuis onze ans. Ils

trésorerie et à l’épanouissement de son équipe, ce qui fait progresser sa fonction. La crise financière et la volatilité des marchés ont également eu un impact important sur son métier et ont modifié ses relations avec les autres. » Il y a d’ailleurs une pénurie importante de CFO expérimentés en Belgique, car beaucoup de qualités sont requises pour remplir à bien ses missions, ajoute-t-il. « Un bon CFO doit allier capacités de communication et compétences techniques. » FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°50 - OCTOBRE 2011

« Le métier de CFO est devenu polyvalent et polymorphe. »


illustrent bien l’importance d’une communication permanente entre les deux fonctions. « Nous sommes en contact tous les jours, de manière formelle et informelle, explique le premier. Je ne pourrais pas travailler avec un CEO à 3.000 kilomètres! Je pense qu’une grande complicité est importante pour le bien-être de l’entreprise. Ces deux fonctions sont très complémentaires et nécessitent des regards différents. Mon rôle est de soutenir le business, tout en apportant un cadre financier et une analyse des risques. » « Ce qui me séduit dans ma relation avec Alain Wirtz, c’est sa conviction et sa capacité à ouvrir des portes et à saisir des opportunités », ajoute Pierre Lambert. « C’est une relation basée sur la confiance, le respect et l’empathie, même si chacun conserve son libre arbitre. Il ne s’agit pas de confondre les rôles, ni de dire oui à tout », complète Alain Wirtz. Parmi les missions du CFO dans un groupe international comme Zetes, on retrouve des missions aussi variées que la consolidation des données financières émanant des différentes filiales, la mise en place d’une politique financière commune, la diffusion de l’information, la réalisation de tableaux de pilotage, la gestion de la relation avec les actionnaires… Ces tâches impliquant à nouveau une grande transparence pour permettre au groupe de prendre les bonnes décisions au bon moment. En 2005, le spécialiste des solutions d’indentification automatiques a été coté en Bourse, impliquant un reporting et des contrôles internes très spécifiques. Lors d’un projet d’acquisition, c’est également au CFO de réaliser le volet financier de l’accord et d’analyser la situation financière de la société à intégrer. « Le recrutement est également une partie importante de mon travail, j’accorde une grande importance à la constitution de mes équipes, y compris dans les filiales », ajoute encore Pierre Lambert.

CONFIANCE ET DIALOGUE « Le CFO joue un rôle très stratégique chez Zetes, notamment en matière d’acquisitions, c’est la raison pour laquelle j’ai souhaité que Pierre Lambert siège au conseil de direction, indique Alain Wirtz. C’est un rôle qui nécessite une forte implication dans l’entreprise et une bonne connaissance des projets en cours. Un bon CFO se doit d’être immergé dans le quotidien de l’entreprise. La taille des projets que nous menons est de plus en plus importante, cela impacte le volet financier. » « Parmi mes interlocuteurs fréquents, on peut citer les actionnaires, les directeurs de filiales et les banquiers, lorsque le développement de l’entreprise le nécessite, reprend Pierre

Bruno Colmant: « Un bon CFO doit allier capacités de communication et compétences techniques. Le principal défi auquel il fait face consiste à mettre à jour ses compétences et ses connaissances en permanence. »

Lambert. Ces interlocuteurs on besoin d’avoir des données financières accessibles, de qualité et d’une grande précision. Dans notre entreprise, la finance n’est pas cantonnée aux chiffres, certains reflexes financiers sont adoptés par nos dirigeants opérationnels, ce qui est très satisfaisant. Le plus difficile est d’à la fois soutenir le business, tout en analysant les risques et en incitant à la prudence. C’est aussi le plus intéressant, les journées ne se ressemblent jamais. Ma

« Un bon CFO se doit d’être immergé dans le quotidien de l’entreprise. » FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°50 - OCTOBRE 2011


FISCALITÉ DOSSIER : OPTIMISATION DES COÛTS

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Pierre Lambert: « Le recrutement est également une partie importante de mon travail, j’accorde une grande importance à la constitution de mes équipes, y compris dans les filiales. »

David De Backer: « Si le CFO a souvent conscience de l’importance de la fiscalité, il ne se rend pas toujours compte de l’importance de sa relation avec le conseiller. En matière de fiscalité, le plus important est d’anticiper les changements. »

fonction, comme celle du CEO, nécessite une grande réacti-

La clé de la collaboration de ce binôme est bien une communi-

vité. » Leur conseil pour optimiser la relation entre ces deux

cation régulière entre ces deux partenaires. Pour une gestion

maillons de l’entreprise tient en deux mots-clés: confiance

pro-active et stratégique de la fiscalité, il est plus que néces-

et dialogue.

saire que le conseiller fiscal connaisse bien l’entreprise et ses projets. « Les modes de collaboration entre ces deux fonctions

COLLABORATION FISCALE

varient selon les secteurs et les types d’entreprise. Les types de

Parmi les tâches allouées au CFO, on retrouve aussi la gestion

relations sont souvent régies par les règles internes à l’entreprise,

fiscale de l’entreprise, tâche qui requiert souvent le recours

le CFO n’ayant pas toujours de marge de manœuvre à ce niveau-

à un conseiller fiscal externe. Dans certaines grandes struc-

là. Dans tous les cas de figure, la communication est essentielle.

tures, c’est le directeur fiscal qui collabore de près avec lui.

Si le CFO a souvent conscience de l’importance de la fiscalité, il

« La fiscalité n’est qu’une des nombreuses responsabilités du

ne se rend pas toujours compte de l’importance de sa relation

CFO, observe David De Backer conseiller fiscal chez Spice

avec le conseiller. En matière de fiscalité, le plus important est

Advice. Le conseiller fiscal l’assiste dans l’accomplissement des

d’anticiper. Une fois qu’une loi est parue, qu’un investissement

obligations fiscales et l’informe des changements légaux et des

est réalisé, il peut être trop tard pour une optimisation fiscale.

évolutions jurisprudentielles, il le décharge du rôle de veille de

Communiquer régulièrement, par exemple, de manière trimes-

l’actualité fiscale. »

trielle permet de planifier les évolutions en amont. » Se limiter au rendez-vous annuel de la déclaration fiscale ne permet pas une gestion fiscale optimale. « Se voir une fois par an en septembre ne suffit pas. La déclaration fiscale ne

« La fiscalité est accessoire pour le CFO, ce n’est qu’une de ses nombreuses responsabilités. » FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°50 - OCTOBRE 2011

présente qu’un aspect de la gestion fiscale. Certains éléments importants comme les projets futurs, la TVA, les taxes locales ou les charges sociales ne sont pas forcément abordés à cette occasion. Bien sûr, on paie son conseiller fiscal au tarif horaire, donc certaines sociétés limitent les échanges. Une interaction régulière permet au conseiller d’être proactif et ouvre la porte


« Le rôle du CFO évolue vers davantage de prévision, il n’a plus le droit à l’incertitude ou, du moins, doit tout faire pour la réduire. » de l’Association des trésoriers d’entreprise à Luxembourg (ATEL). La fonction requiert de nouvelles aptitudes, à l’image de celle du trésorier. L’importance grandissante des relations bancaires et les nouvelles régulations qui se multiplient ont rapproché naturellement ces deux fonctions, même si le CFO conserve un profil généraliste. » Le métier de trésorerie devient de plus en plus complexe. Il lui faut associer compétences techniques, informatiques, législatives, maîtriser les risques, analyser la conformité des procédures mais aussi, depuis peu, être un bon communicateur. Si son collègue CFO s’intéresse aux nouveautés en matière de régulation, il ne peut les maîtriser toutes et ne peut consa-

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François Masquelier: « Très peu de CFO proviennent du monde de la trésorerie. Dans le futur, cela va certainement changer. Le rôle du trésorier continuera, à mon sens, de prendre de l’importance. »

à une gestion stratégique de la fiscalité. Sur le plan fiscal, il est essentiel de planifier, pour ce faire, le CFO doit impliquer son conseiller fiscal très tôt dans les projets de l‘entreprise.», poursuit David De Backer. En matière fiscale, de nouvelles lois ou des modifications apparaissent chaque année, il s’agit de s’y préparer. « La fiscalité est un environnement en perpétuelle évolution : modifications légales, changement dans les pratiques administratives, évolution de la jurisprudence, etc. Il revient au conseiller fiscal de les annoncer à son client et de l’aider à en évaluer l’impact pour l’entreprise. Dans un monde devenu « risk averse », le rôle du CFO évolue vers davantage de prévision, il n’a plus le droit à l’incertitude ou, du moins, doit tout faire pour la réduire. On lui demande un reporting de plus en plus précis, collaborer étroitement avec son conseiller fiscal est essentiel pour la gestion des risques fiscaux. »

DES RELATIONS ÉTROITES Plus que jamais, le CFO se repose aussi sur le trésorier, qui voit sa fonction devenir plus visible dans l’entreprise. Crise financière, problèmes de liquidité et volatilité des marchés en ont fait un interlocuteur incontournable du CFO. « Le rôle du CFO s’est fortement transformé ces dernières années suite aux changements de l’environnement dans lequel il opère, indique François Masquelier, Président FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°50 - OCTOBRE 2011


DOSSIER

« C’est, en tout cas, une période excitante qui s‘ouvre pour le trésorier. » crer qu’une petite partie de son temps à ces questions. C’est la raison pour laquelle il doit s’entourer de spécialistes comme le trésorier qui lui facilitent le travail et font de la veille juridique. « Le trésorier est un technicien, un artisan très spécialisé, pointe-t-il. Il doit aujourd’hui avoir des compétences très pointues, tout en améliorer ses soft skills. Il n’est plus dans une tour d’ivoire, il a davantage de contacts avec les autres fonctions au sein de l’entreprise. Il doit également se montrer convainquant, notamment dans ses relations avec les banques. Très peu de CFO proviennent du monde de la trésorerie. Dans le futur, cela va certainement changer. Le rôle du trésorier continuera, à mon sens, de prendre de l’importance. L’accès au crédit va devenir de plus en plus difficile et peu de banques vont survivre, ce qui aura un impact sur son métier. Le CFO aura, de son côté, davantage d’arbitrages à réaliser, il devra aussi supporter la pression

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des actionnaires et anticiper les performances. C’est pourquoi, il doit être épaulé d’un trésorier très bien formé. Une bonne communication entre ces deux personnes est déterminante pour la sûreté de l’entreprise. Tous deux doivent être proactifs,

Alain Wirtz: « La relation CEO-CFO doit être basée sur la confiance, le respect et l’empathie, même si chacun conserve son libre arbitre. Il ne s’agit pas de confondre les rôles, ni de dire oui à tout. »

« JE JOUE PARFOIS AUSSI LE RÔLE DE POIL À GRATTER » Conseiller en gestion chez AG Consulting, Alain Groignet

des choix importants. La finance reste un moyen, pas une

exerce le rôle de CFO pour les petites structures ou celles

finalité, mon travail sort donc souvent du cadre des données

qui n’ont pas les moyens de créer cette fonction.

financières. Avoir un regard neuf sur les choses se révèle sou-

« J’interviens dans tous les domaines financiers: lors de la

vent très positif pour aller au delà des habitudes et question-

réalisation de dossiers de financement, dans le suivi des

ner les procédures. »

relations avec les banques, dans la trésorerie, la réalisation

Pour bien encadrer ses clients, le conseiller doit se tenir au

de tableaux de bord, des stratégies d’investissement… Ma

courant de l’évolution stratégique de l’entreprise, suivre

mission peut être ponctuelle mais est de plus en plus récur-

les projets en cours et la gestion financière. Il se doit d’être

rente et dépend des besoins de l’entreprise. La gestion de la

réactif et flexible. « On ne peut plus gérer une PME comme

trésorerie était et devient un élément de plus en plus impor-

il y a 20 ans, l’à peu près n’existe plus, une entreprise doit

tant de la gestion de l’entreprise car encore plus aujourd’hui

pouvoir anticiper et prévoir ses résultats, quelle que soit sa

qu’hier des PME tombent en faillite non pas à cause d’un

taille ou son volume d’activité. D’une manière générale, les

problème aigu de rentabilité mais à cause de problèmes

petites structures font souvent face aux mêmes types de pro-

importants de trésorerie. Pour le résumer, mon rôle est de

blème. La pression financière est devenue plus lourde avec la

m’assurer que le patron de l’entreprise soit toujours au cou-

crise, cela requière certains aménagements. Ma relation avec

rant de sa situation et puisse prendre les bonnes décisions

les entreprises au sien desquelles je suis actif s’inscrit dans la

au bon moment. C’est rassurant pour lui de ne pas être seul

durée. » Transparence, implication et communication sont

face aux choix stratégiques à prendre »

trois facteurs de succès pour le CFO, comme pour le conseil-

Alain Groignet s’appuie sur le travail du comptable, mais

ler en gestion, qui doivent veiller à la bonne circulation de

son interlocuteur principal est le chef d’entreprise. « Je

l’information tout en maintenant la bonne santé financière

joue parfois aussi le rôle de poil à gratter et le met devant

de leur entreprise.

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agiles et s’adapter rapidement à l’actualité changeante des marchés. C’est, en tout cas, une période excitante qui s‘ouvre pour le trésorier. »

UNE VUE SUR L’IT Le CFO doit également comprendre et intégrer le potentiel et les contraintes du département informatique, devenu avec les années un interlocuteur de taille. « L’IT est devenue le lieu privilégié pour la standardisation et la gestion des données de l’entreprise, explique Denis Dubru, Vice Président Worldwide Finance Operations chez GlaxoSmithKline Biological. Traduire les données business en données chiffrées est une des missions du CIO, véritable partenaire du CFO. Un dialogue efficace entre ces fonctions est vital pour le bon fonctionnement d’une entreprise. » Le champ financier comme la sphère informatique ont tout à gagner à collaborer. L’IT et sa rigueur méthodologique peuvent ainsi influencer la gestion des processus financiers. « En matière de gestion de projets et d’analyse des processus, nous nous inspirons souvent de ce que fait l’informatique, qui a une réelle valeur ajoutée dans ce domaine. Avoir un informaticien à sa table lors de discussions relatives à la qualité des processus financiers est un atout indéniable. De par sa volonté constante de standardisation et de simplification, l’IT permet un éclairage différent », continue-t-il. Pour résumer les relations entre CFO et CIO, on peut souligner que le second apporte ses compétences en matière de projet, tandis que le CFO amène sa compréhension du business et des logiques économiques. « Le CFO permet au CIO de sortir de sa technique et le CIO lui apporte une méthodologie d’intégration et de standardisation. Nous avons récemment entrepris un grand projet de standardisation des procédures, qui a impliqué une proche collaboration entre finance et IT par rapport au business», raconte Denis Dubru, dont l’entreprise a d’adopté un ERP signé SAP afin d’établir une plateforme commune à tous les départements. Suivant cette logique de simplification, tous les employés ont à présent accès aux mêmes données partagées, facilitant ainsi le reporting. « Le défi est de réussir à parler le même langage. Plus une entreprise grandit, plus elle a besoin d’un système IT performant pour traiter ses données. Notre société n’aurait pas pu connaître une telle croissance ces 10 dernières années sans une IT performante et un bon tandem CFO/CIO. »

Denis Dubru: « En matière de gestion de projets et d’analyse des processus, nous nous inspirons souvent de ce que fait l’informatique. Avoir un informaticien à sa table lors de discussions relatives à la qualité des processus financiers est un atout indéniable. »

« Le CFO permet au CIO de sortir de sa technique et le CIO lui fait voir autre chose que la rentabilité. »

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DOSSIER FISCALITÉ TEXTE : CHRISTOPHE LO GIUDICE

Faites de votre comité de direction une top team 26

Votre comité de direction est-il une pseudo team ou une top team? Provocatrice, la question servait d’accroche à l’Inspiration Breakfast organisé par Mercuri Urval en mai dernier. Ce petit-déjeuner a livré des pistes utiles pour le directeur financier soucieux de mieux interagir avec ses collègues dans des équipes par nature soumises à des pressions de plus en plus fortes et qui omettent trop souvent de se remettre en question.

A

ujourd’hui, les équipes de direction sont sou-

de mettre le doigt sur les causes: on est dans l’émotionnel, le re-

mises à une somme de pressions incroyable.

lationnel. On est souvent, aussi, le nez dans le guidon, trop dans

« Ces pressions émanent de différentes sources,

l’opérationnel, et pas assez dans le stratégique… » D’où l’intérêt

explique Pascale Schütz, Partner Executive

de cet Inspiration Breakfast pour prendre du recul et identifier les

Practices chez Mercuri Urval. Elles peuvent venir de l’actionnaire

ingrédients qui font d’un comité de direction une « top team »…

– avec un accent sur le plus long terme s’il est familial, ou sur des résultats plus immédiats dans le cas de venture capitalists –, d’un

DYNAMIQUE DE PROGRÈS

siège qui décide de l’implémentation de certains outils ou projets

Quels sont les aspects à pointer pour bien fonctionner en

dans ses filiales, de la concurrence qui lance une campagne pou-

comité de direction? La question a fait l’objet d’un tour de

vant mettre en péril le business plan, de la législation qui évolue

table, avec la valeur ajoutée de disposer d’un riche panel de

sans cesse, de l’organisation elle-même – avec, par exemple, des

profils et compétences. La composition de l’équipe a d’emblée

talents clés qui la quittent ou un mouvement social, etc. »

été pointée comme un facteur essentiel: la taille idéale est

Il est clair, par ailleurs, que l’évolution des marchés – qui ne cesse

estimée à 6 membres et jusque 9. Dépasser les 10 membres

de s’accélérer – est elle-même génératrice de changements per-

comporte le risque de perdre en interactivité. Les participants

manents. « Qui peut encore rédiger aujourd’hui un business plan

insistent sur la diversité, en particulier en termes d’âges et

à cinq ou dix ans qui soit vraiment réaliste? Même à trois ans, cela

d’anciennetés dans l’organisation, ainsi que sur la complé-

devient illusoire. L’horizon d’un à deux ans semble déjà tellement

mentarité des compétences et des expériences.

incertain… » Les comités de direction sont également confron-

Olivier Duterme, Business Developer, Rawbank: « Attention aux

tés à des équipes de plus en plus mixtes, avec des seniors et

comités de direction pléthoriques: trop souvent, être nommé au

des juniors. Ils vivent un « gap » de génération délicat à gérer.

CoDir devient une forme de reconnaissance… sans qu’on s’inter-

Enfin, la difficulté de s’auto-évaluer reste marquante: « Quand

roge suffisamment sur ce que va réellement apporter la personne.

une équipe de direction ne fonctionne pas bien, il n’est pas simple

Il ne faut pas confondre gratification et compétence… »

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Baudouin Serckx, Consultant, BS Company: « Une solution peut être d’instaurer un comité restreint et un autre élargi. Quoi qu’il en soit, je prône pour une diversité des âges et des personnalités. Si tout le monde est toujours de l’avis du dirigeant, c’est très bien pour la cohérence à court terme, mais c’est beaucoup moins bon à moyen ou long terme. Il est intéressant que les membres de l’équipe aient des opinions différentes, voire contradictoires, car cela apporte une dynamique de progrès. » Gauthier Saelens, Directeur général, Grand Hôpital de Charleroi: « Je suis partagé sur l’opportunité d’un comité de direction élargi, car on se retrouve alors confronté à des dynamiques et des rythmes différents. Nous avons justement décidé de ne plus avoir de comité élargi, et de nous organiser sur base d’une équipe de direction de neuf membres représentants les différents métiers et structures de l’organisation. » Chris Vanroelen, Business Director, Mercuri Urval: « Il y a clairement un équilibre à trouver entre la représentation des spécialistes du business et celle de profils permettant d’amener à la prise de décisions. » Cet enjeu se retrouve aussi dans un deuxième aspect clé souligné par les participants: la nécessité de disposer de principes de fonctionnement de base, et de s’y tenir rigoureusement. Il faut ainsi que la vision et la mission de l’entreprise soient claires, mais aussi que la mission et le rôle du comité de direction soient clairs pour ses membres, que les responsabilités soient délimitées, que les sujets qui vont être traités – et ceux qui ne le seront pas – soient identifiés, etc.

Pascale Schütz: « Quand une équipe de direction ne fonctionne pas bien, il n’est pas simple de mettre le doigt sur les causes: on est dans l’émotionnel, le relationnel. On est souvent, aussi, le nez dans le guidon, trop dans l’opérationnel, et pas assez dans le stratégique… »

Michel-Armand Dear, DRH, Atradius: « Avoir une structure, une véritable guidance m’apparaît essentiel… » Béatrice Maerevoet, Interim Finance Business Manager: « Il est intéressant d’alterner les rythmes, par exemple en organisant une fois sur deux un comité plus opérationnel, et l’autre fois un comité plus stratégique. Sans quoi, l’opérationnel reprend souvent le dessus. » Autres ingrédients identifiés comme clés: une bonne interaction entre les membres – ce qui implique une qualité de communication, un partage clair des activités, un sens de la responsabilité commune… – et une relation établie avec le reste de l’organisation – le comité de direction ne peut vivre dans sa tour d’ivoire, mais doit communiquer, dialoguer avec l’interne, prendre soin de l’interne…

S’INTÉRESSER AUX INTERACTIONS « Pour améliorer le fonctionnement d’un comité de direction, nous suggérons de comparer les opinions des membres de l’équipe sur leur méthode de travail en tant qu’équipe, indique Pascale Schütz. Le livre The Wisdom of Teams, rédigé en 1993 par Jon Katzenbach et Douglas Smith, traduit les enseignements tirés de l’observation du fonctionnement d’une cinquantaine de comités de direction aux Etats-Unis. Ils en ont extrait huit points d’attention qui permettent de baliser la démarche. » Les huit dimensions en question sont, à gros traits, les suivantes: 1. La mission: pour chaque membre de l’équipe, la mission doit être claire.

Gauthier Saelens: « Dans une équipe de direction, tout le monde doit s’intéresser à tous les sujets. On est d’abord membre du comité de direction, avant d’être spécialiste de sa matière. »

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FISCALITÉ DOSSIER : OPTIMISATION DES COÛTS

10 CONSEILS POUR LE DÉVELOPPEMENT DE VOTRE COMITÉ DE DIRECTION 1. Osez remettre en question la composition de l’équipe 2. Osez mettre en question les fonctionnements 3. Utilisez les forces de chacun 4. Favorisez une meilleure compréhension mutuelle 5. Stimulez une meilleure évaluation des compétences 6. Déduisez une meilleure répartition des responsabilités 7. Accélérez les évolutions individuelles 8. Passez des intentions à l’action 9. Augmentez l’ouverture au changement 10. Trouvez l’équilibre entre les différentes activités de directeur

6. Les compétences: « Il faut s’assurer que toutes les compétences requises sont bien couvertes, traduit Chris Vanroelen. Il s’agit des compétences business, tant stratégiques que plus opérationnelles, mais aussi les compétences plus soft: communication, créativité, etc. »

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7. La capacité à résoudre des problèmes 8. Le sens du résultat. Une fois cette base clarifiée, il s’agit de s’intéresser aux interactions au sein de l’équipe, là encore en s’intéressant aux perceptions/

Béatrice Maerevoet: « Il est intéressant d’alterner les rythmes, par exemple en organisant une fois sur deux un comité plus opérationnel, et l’autre fois un comité plus stratégique. Sans quoi, l’opérationnel reprend souvent le dessus. »

opinions des membres du comité de direction, poursuit Pascale Schütz. Ici, ce sont neuf ingrédients qu’il faudra passer au crible: 1. Les valeurs managériales 2. Les complémentarités: sont-elles présentes? L’équipe estelle équilibrée? 3. La communication

2. La délimitation des sujets à traiter: l’équipe doit être claire sur les sujets qu’elle traite et sur ceux qu’elle ne traite pas,

4. Le respect mutuel: par exemple, éviter de lire ses mails ou de consulter en permanence son Smartphone en pleine réunion

pour ne pas devenir un espace ‘fourre-tout’ et/ou trop

5. La pertinence des sujets traités

opérationnel.

6. La discipline: être à l’heure, par exemple, et respecter les timings

3. Les objectifs: les objectifs de performance doivent être bien définis 4. La méthode de travail: il convient de se mettre d’accord sur l’approche, la façon de gérer le social, l’économique, l’administratif, etc. Les membres sont-ils bien en phase? 5. L’efficacité: la ‘production’, au sens de contribution, doit être bien répartie entre les membres.

7. La recherche de consensus, tout en acceptant les points de vue divergents et en mettant en place une saine gestion des conflits. Après quoi, la collégialité doit être respectée. Une solidarité entre les membres. 8. La participation: tenir les engagements respectifs, notamment. 9. La coresponsabilité. Quelques réactions chez les participants: Gauthier Saelens: « Dans une équipe de direction, tout le monde doit s’intéresser à tous les sujets. On est d’abord membre

« En auto-évaluation, le dirigeant est souvent le plus optimiste, le CFO se montrant généralement plus critique. » FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°50 - OCTOBRE 2011

du comité de direction, avant d’être spécialiste de sa matière. » Béatrice Maerevoet: « A mes yeux, il ne convient toutefois pas forcément que chaque membre soit sur pied d’égalité. Au contraire, il faut qu’à un moment, après que tout le monde ait été entendu, l’un des membres effectue des arbitrages, tranche et décide car le compromis n’est pas une stratégie. » Patrice Briol, DRH: « Le passage au vote, je le vois comme une forme de sondage d’opinions, mais pas un processus de déci-


sion acceptable au niveau d’un comité de direction. Si les avis divergent, la qualité du leader se verra à sa capacité à les faire s’exprimer d’abord, arbitrer ensuite, et enfin à son habilité à veiller à ce que cette décision soit assumée par le groupe dans son ensemble. »

SE BENCHMARKER Autre axe essentiel à explorer, indique encore Pascale Schütz: la relation avec le reste de l’entreprise, « en comparant les opinions des membres de l’équipe sur leur manière d’interagir, en tant qu’équipe, avec le reste de l’organisation ». Ici encore, huit points clés permettent de baliser la réflexion: 1. Le dialogue 2. La communication 3. L’implémentation 4. La capacité de réaction 5. La correction: pouvoir amener des ajustements avec une certaine flexibilité 6. La reconnaissance 7. Les sanctions éventuelles, en posant au préalable des limites claires 8. L’orientation « people »: faire preuve d’empathie avec les gens. Sur base de ces diagnostics, il est alors possible de benchmar-

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ker l’équipe par rapport à cinq types d’équipes, classées en fonction de leur efficacité et de leur degré de performance. 1. La « taskforce »: l’équipe est peu efficace et peu performante; chaque membre a ses objectifs individuels, et ne voit pas les objectifs communs; 2. La « pseudo-team »: il s’agit d’un stade difficile par lequel passe généralement la taskforce et au cours duquel l’efficacité augmente quelque peu, mais avec un impact très réservé en matière de performance. L’équipe découvre/

Chris Vanroelen: « Dans un comité de direction, il y a clairement un équilibre à trouver entre la représentation des spécialistes du business et celle de profils permettant d’amener à la prise de décisions. »

se fixe des intérêts communs, mais les membres restent dans une optique très individualiste. 3. La « potential team »: efficacité et performance s’accroissent. Il y a conscientisation et adhésion à des objectifs communs, mais en cas de problème, d’erreur, de difficulté, la tendance à revenir à l’individualisme reste forte. La solidarité n’est pas encore là. 4. La « real team »: efficacité et performance montent d’un cran supplémentaire. Le sens de solidarité est installé. On

« La composition de l’équipe est un facteur essentiel: la taille idéale est estimée à 6 membres et jusque 9. »

se serre les coudes et on trouve des solutions ensemble. 5. La « top team »: ce stade est atteint quand il y a une réelle empathie entre les membres, quand chacun contribue à

conclut-elle. L’échelle de mesure va de 1 à 6, avec une ligne de

la croissance et au développement des autres. Un esprit

partage à 4. En dessous de 4, il y a donc des problèmes qu’il faut

d’entraide est installé.

adresser. Mais les écarts sont également révélateurs de tensions

Afin d’illustrer la façon dont on peut travailler la performance

ou, à tout le moins, de déficits d’alignement. A partir de cette

du comité de direction au départ de ces trois axes – les bases,

analyse, il devient possible de travailler sur des points spécifiques,

les relations et les interactions –, un cas d’entreprise a été pré-

à partir de plans d’actions très concrets. »

senté. Ce comité de direction de trois personnes s’est autoévalué sur l’ensemble des critères. Mise en graphes, l’analyse permet de visualiser les points de convergence et, surtout, les écarts. Constantes: « Le dirigeant est souvent le plus optimiste, le directeur financier se montrant généralement le plus critique, FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°50 - OCTOBRE 2011


DOSSIER FISCALITÉ TEXTE : MARC PETRE1

Le suivi du client, c’est l’affaire de tous! La gestion du poste clients représente un enjeu majeur pour les entreprises. Et, suite à la crise, un Credit Management de qualité est plus que jamais indispensable. Credit Managers et assureurs crédit sont donc plus que jamais des partenaires clés pour le CFO, mais la préoccupation doit cascader dans toute l’entreprise.

30

P

lus de 80% des transactions inter-entreprises se

Le nombre de factures jamais payées a de nouveau augmenté

font à crédit. Il s’agit du plus important moyen de

en Europe, à 312 milliards d’euros durant l’année 2010 et

financement à court terme, mais aussi du plus

1.300 milliards sur cinq ans. En Belgique, les factures jamais

répandu car peu coûteux. Les entreprises sont

acquittées ont entraîné une perte sèche de 9,15 milliards

ainsi les premières pourvoyeuses de crédit en Belgique, avant les

dans le chef des entreprises. L’European Payment Index 2011

banques. Le crédit commercial est devenu un outil stratégique

montre qu’en Europe, le nombre de factures jamais payées a

et concurrentiel: le montant du crédit accordé par une entre-

de nouveau augmenté pour passer de 2,6 % en 2009 à 2,7 %

prise à ses clients figure au bilan comme un élément de l’actif

en 2010, selon Intrum Justitia. Ceci équivaut à une somme

circulant (au poste créances commerciales). Il devient donc par

record de 312 milliards d’euros à passer en perte.

là-même un élément du fonds de roulement net. Le poste clients peut représenter jusqu’à 40% des actifs d’une

AVANT ET APRÈS VENTE

entreprise, et un dépôt de bilan sur quatre est lié au défaut

En 2010, ce ne sont pas moins de 600 entreprises qui, chaque

de paiement. Contrairement à la plupart des autres actifs

jour, ont dû faire aveu de faillite. 52% des entreprises indiquent

de l’entreprise (immobilisés, stocks et trésorerie) le poste

ressentir fortement le manque de liquidités: les entrepreneurs

créances commerciales fait rarement l’objet d’une couverture

sont coincés entre les paiements tardifs de leurs clients et

d’assurance… Or, les risques sont très présents. Le Credit Ma-

l’insistance de leurs fournisseurs, eux-mêmes pressés d’être

nagement est dès lors essentiel pour la survie de l’entreprise.

payés. Cette situation est encore compliquée par les difficultés d’obtention de crédit auprès des banques. Obtenir le paiement

PROBLÈME RÉCURRENT

de son travail ou de son service en temps voulu n’a jamais été

Les délais de paiement traduisent une sortie de crise très pro-

aussi important pour la santé financière de nos entreprises.

gressive. Les retards de règlement en Europe sont revenus à

La septième édition de l’European Payment Index souligne à

leur niveau de 2008. Mais ils restent encore loin de ce qu’ils

quel point, chez nous, il reste difficile d’obtenir un paiement

étaient en 2007 avant la crise. Les trésoreries demeurent fra-

en temps voulu : à peine la moitié de toutes les factures du

giles. Les problèmes se situent surtout dans le sud de l’Europe.

pays sont payées au terme convenu. Les entreprises belges

En Belgique, le comportement de paiement des entreprises se

expliquent ces retards de paiement par plusieurs facteurs:

détériore. Selon une étude récente du Bureau Graydon, à la fin

82% par les difficultés financières du débiteur, 64% par la

du second trimestre 2011, à peine 61,4% des factures entre

volonté même du débiteur, 45% par un litige commercial. Il

sociétés ont été payées dans les temps. Près d’une facture sur

est frappant de constater que 69% des personnes interro-

sept n’avait pas encore été payée 90 jours après son échéance.

gées reconnaissent que les retards de paiement trouvent leur

FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°50 - OCTOBRE 2011


cause dans l’inefficacité administrative ou tout simplement dans une forme d’insouciance face à cette situation. Les sociétés mettent en place des mesures avant et après la vente pour se protéger. Afin de protéger leur trésorerie et de dégager suffisamment de liquidités pour poursuivre leurs activités, les entreprises adoptent le plus souvent les mesures suivantes: elles retardent le paiement de leur propres fournisseurs, offrent des rabais pour paiement rapide ou exigent un paiement à la livraison. Avant de recourir à ces méthodes extrêmes, les entreprises organisent leur politique de crédit de plus en plus efficacement, par exemple en établissant par écrit des conditions de crédit. De nombreuses entreprises gèrent leurs activités de credit management en interne. Cependant, de plus en plus d’entre elles externalisent le recouvrement des impayés ou font appel aux services de l’assurance-crédit. Les mesures de l’efficacité du credit management les plus populaires sont les suivantes: la gestion du DSO (days sales outstanding), le ratio créances douteuses sur chiffre d’affaires (bad debt/sales), le taux de recouvrement (cash collection) et le taux de créances amor-

Marc Petre: « La crise économique a provoqué une prise de conscience des entreprises: elles sont davantage préoccupées par la nécessité de protéger leur trésorerie. »

ties (bad debt write off). L’assurance-crédit sert d’amortisseur et permet d’éviter le risque que la défaillance d’un client soit fatale. Elle permet une économie sur l’annulation de créances douteuses, sur les salaires distribués au personnel affecté à la gestion des crédits, sur les coûts de recherche d’informa-

pour la technique du hérisson: contraction de tous les coûts

tion et sur les cas de fraude évités. Les entreprises assurées

qui pouvaient être coupés, coûts salariaux par le levier de

bénéficient également de crédits bancaires plus avantageux.

l’intérim, coûts de fonctionnement par le levier de l’externa-

Aujourd’hui, cependant, le taux de pénétration de l’assu-

lisation, et naturellement arrêt des investissements… et elles

rance-crédit, même dans le segment des grandes entreprises,

se sont repliées sur elles-mêmes.

n’est que de 30 à 35% selon les pays. Ce pourcentage est pro-

Cette technique de survie a du bon: les défaillances ont com-

portionnellement plus faible pour les petites entreprises.

mencé à refluer. Dès 2010, on enregistre un léger repli de -5%

LEÇONS DE LA CRISE

des défaillances d’entreprises dans le monde… après +28% en 2009! Cette tendance devrait se confirmer en 2011, mais là

La crise économique a provoqué une prise de conscience des

encore sans miracle: le repli ne serait que de 7%, plus franc

entreprises: elles sont davantage préoccupées par la nécessité

dans les zones Amérique et Asie, plus timide dans les zones

de protéger leur trésorerie. L’année 2011 restera une année de

Europe et Méditerranée.

transition pour l’économie mondiale, un bon cycliste parlerait

Quelles sont les leçons tirées de la crise pour le Credit Manage-

d’une année de « faux plat », un gourmet d’année de digestion.

ment? On en dénombre plusieurs: un meilleur suivi des clients

Après un début de reprise plutôt satisfaisant en 2010 (4% de

dès le jour où la vente est conclue, la nécessité d’améliorer la

croissance du PIB mondial), l’économie mondiale est entrée

coopération entre le commercial et les finances pour prévenir

dans une phase de ralentissement qui était attendue, mais la

et éviter les créances douteuses, l’intérêt de mettre en place un

multiplication des signes de modération, des chocs exogènes

« credit check » plus sévère pour tous les clients et les prospects,

et des turbulences financières ont ravivé les craintes sur l’am-

l’exigence de paiements comptant pour les nouveaux clients, un

pleur et la durée possibles de la baisse de régime. Les ressorts

suivi plus régulier par téléphone et par e mail, le développement

mécaniques de reprise (restockage, reprise des échanges mon-

et la professionnalisation d’un credit management interne (pro-

diaux…) s’épuisent rapidement. Surtout, les plans de relance

cédures et processus) et, enfin, la conscientisation de l’entre-

massifs injectés par le biais fiscal ou plus directement par des

prise. Le suivi du client, c’est l’affaire de tous!

investissements publics arrivent à leur fin. Désormais il s’agit de digérer les dettes publiques colossales. La hausse du prix des matières premières complique la donne.

1

La santé financière des entreprises devrait leur permettre de

ber of the Board of Management, chez Euler Hermes Credit

passer la dernière étape de cette longue crise, dont les entre-

Insurance Belgium. Il intervient dans le Certificat en Credit

prises – PME comme grands conglomérats – sont bel et bien

Management d'ICHEC-Entreprises. Pour en savoir plus: www.

en train de digérer les conséquences. Les entreprises ont opté

ichec-entreprises.be - 02/739.37.41-49

Marc Petre est Risk, Information and Claims Director, Mem-

FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°50 - OCTOBRE 2011

31


DOSSIER FISCALITÉ TEXTE : LAURENT CORTVRINDT

A la fois proche des et de la stratégie 32

A l’occasion de son Université d’été, l’Association française nationale des dirigeants financiers et de contrôle de gestion s’est penchée sur l’évolution du métier de CFO, éclairant sa relation avec différentes parties prenantes dans l’entreprise. Offrant davantage d’appui aux opérationnels, véritable hommeorchestre, agile et avec plus de valeur ajoutée, le directeur financier des années 2011-2020 sera de plus en plus impliqué dans la stratégie de l’entreprise.

L

a DFCG est implantée dans toutes les régions de

directeur financier s’est, dans un premier temps, concentré sur les

France et regroupe 3.200 membres de tous les

basiques de la fonction: gestion attentive de la trésorerie, souvent

secteurs économiques du pays. Toutes les tailles

accompagnée d’un gel des investissements et des embauches.

d’entreprise y sont représentées, de la PME aux

Dans ce cadre, il a été amené à mettre en place ou à consolider

groupes internationaux, à l’image du tissu économique français.

des indicateurs de performance sur les domaines clefs de l’entre-

Au cours des années 2000, le directeur financier a dû s’adapter

prise, à mener des études de rentabilité plus approfondies qu’à

à de nouveaux modes d’organisation qui se sont déployés à

l’habitude, voire à suggérer des désinvestissements ou des reposi-

grande vitesse: diffusion d’informations financières en temps

tionnements de l’entreprise sur ses marchés.

réel partagées par tous, déploiement d’ERP, externalisation de fonctions entières vers des centres de services partagés… Paral-

INDICATEURS NON FINANCIERS

lèlement, et dans la même période, il a dû gérer le passage tant

La mise en place des centres de services partagés et l’exter-

redouté à l’an 2000, mettre en place Sarbanes Oxley, les IFRS,

nalisation de pans entiers des métiers comptables ont mo-

sans compter l’accélération de toutes les autres réglementa-

difié l’équilibre de la direction financière. Avec une équipe

tions qui nécessitent des adaptations permanentes.

resserrée et des outils modernisés, le directeur financier est

Le directeur financier a le plus souvent fait face avec brio à ces

davantage perçu dans son rôle d’aide aux opérationnels et

différents défis et démontré une réelle capacité dans la gestion

plus disponible pour mettre en place des outils de suivi des

du changement et de management des équipes. Avec la crise, le

business. Son expérience dans la gestion de projets lui a également appris à mieux déléguer et à mieux gérer les équipes délocalisées. Même si son expertise technique subsiste, il est davantage reconnu pour son rôle dans le contrôle financier,

« Le directeur financier doit faire preuve de toujours plus d’agilité. Il est devenu un homme-orchestre. » FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°50 - OCTOBRE 2011

l’analyse de la rentabilité des projets d’investissements ou d’optimisation, la mise en place de tableaux de bord. La grande évolution réside néanmoins dans le fait que le directeur financier doit intégrer des indicateurs financiers mais désormais, de plus en plus systématiquement, également des indicateurs non financiers (effectifs, développement durable…),


opérationnels tout en assurant la cohérence de l’ensemble. Pour y parvenir, le

investisseurs, etc. C’est pourquoi, sous la pression de l’environ-

directeur financier s’appuie de plus en plus sur des tableaux de

nement économique, la plupart des entreprises ont renforcé

bord issus d’un ERP qui couvrent l’ensemble des métiers de l’en-

ces dernières années leur dispositif de contrôle interne. Le di-

treprise: production, vente, stocks, effectifs, investissement, etc.

recteur financier se doit particulièrement d’être promoteur et

IMPLIQUÉ DANS LA STRATÉGIE

Par ailleurs, le directeur financier doit faire preuve de toujours

Aujourd’hui, la direction financière est en première ligne pour

plus d’agilité. Il est devenu un homme-orchestre. Non seulement

mener des projets transversaux impliquant d’autres services

son périmètre d’intervention s’est progressivement étendu, avec

de l’entreprise. Cela peut concerner, par exemple, des projets

des fonctions toujours plus spécialisées – comptabilité & conso-

d’optimisation de la supply chain, de sous-traitance de la chaîne

lidation, fiscalité, financement & trésorerie, contrôle financier,

logistique… Devant de plus en plus anticiper les évolutions et

contrôle interne & risques – mais il doit aussi se montrer capable

accentuer leur compréhension du business de l’entreprise, les di-

de communiquer avec des interlocuteurs variés, issus de pays et/

recteurs financiers travaillent désormais en étroite collaboration

ou de cultures différentes, présentant tous des problématiques

avec les opérationnels et ont mis en place de véritables « parte-

qui leur sont propres. L’entreprise est plus ouverte, le directeur

nariat business » avec les principales directions. Cette connais-

financier, loin de perdre du pouvoir en déléguant et/ou en exter-

sance plus fine des métiers permet au directeur financier d’être

nalisant certaines fonctions techniques, est porteur d’une fantas-

un acteur plus proche des opérationnels, apportant davantage

tique valeur ajoutée. Il doit être également capable d’anticiper les

de valeur ajoutée, et d’être un partenaire reconnu de la direction

évolutions telles la RSE, la responsabilité sociétale des entreprises.

acteur de la démarche d’identification des risques.

générale et un acteur incontournable des comités de direction.

Le directeur financier intervient également dans un environ-

Le directeur financier reste certes le garant d’une certaine exper-

nement concurrentiel renforcé notamment à l’international.

tise et du respect des réglementations mais sa vision lui permet

Au-delà des compétences linguistiques (anglais voire d’autres

en outre de porter une analyse objective, voire dépassionnée,

langues), il doit être apte à représenter efficacement l’entre-

sur la performance de l’entreprise. En conséquence, il influe de

prise dans des projets d’implantation ou de rachats à l’inter-

manière déterminante dans la définition des axes stratégiques

national, de négociation de contrats complexes, en un mot

de l’entreprise, puis lors de la préparation et du suivi des plans

savoir communiquer dans son domaine d’expertise tant en

et budgets. Sa vision large de l’entreprise et de ses marchés en

interne qu’en externe. Il porte aussi les projets d’optimisation

fait un partenaire incontournable, sollicité lors des deals, qu’ils

du groupe, et à ce titre doit savoir conduire des missions de

soient conclus au niveau national ou international.

changement en accord avec les autres services de l’entreprise. A ce sujet, sa diplomatie, son sens de l’écoute mais égale-

VALEUR AJOUTÉE

ment sa détermination sont essentiels. Enfin, le directeur

Au delà de la filière Finance, le directeur financier doit s’assu-

financier apporte sa vision dans l’optimisation des résultats

rer qu’un langage commun est diffusé à travers le groupe. Pour

de l’entreprise. Son aptitude dans l’analyse et l’interprétation

y parvenir, il doit ainsi jouer le rôle de traducteur afin que les

des résultats devient prépondérante par rapport à une exper-

différents interlocuteurs de l’entreprise aient une bonne com-

tise de l’environnement réglementaire et fiscal, qu’il confie en

préhension du message. Et la tâche n’est pas aisée! En outre,

fonction des besoins à des spécialistes internes ou externes.

le directeur financier doit pouvoir s’adresser à un opérationnel

Cette tendance va encore s’accentuer. Agilité, anticipation,

français, à un financier chinois mais aussi aux différentes par-

orchestration: le directeur financier des années 2011-2020

ties prenantes internes ou externes à l’entreprise – direction,

dispose de tous les atouts pour accentuer sa fonction de pilier

représentants du personnel, actionnaires, clients, fournisseurs,

incontournable de l’entreprise. FINANCE MANAGEMENT - CFO MAGAZINE - N°50 - OCTOBRE 2011

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