Journal des expositions - Numéro 13

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LE JOURNAL DES EXPOSITIONS AV R I L 2 0 0 8 M u s é e d a u p h i n o i s • G r e n o b l e N u m é r o 1 3 L’actualité

Premiers bergers

des Alpes De la préhistoire à l’Antiquité

La nouvelle exposition du Musée dauphinois se lance sur les traces des communautés qui se sont succédé dans les Alpes en décrivant, à la lumière des informations révélées par l’archéologie, de quelle façon les pratiques pastorales ont pu s’installer et se transmettre. Un voyage dans le temps, sur la piste des bergers et de leurs troupeaux, qui dévoile une facette du rapport de l’homme à la montagne.

L’aventure commence au MoyenOrient, quelque 10 000 ans avant notre ère, lorsque des communautés déjà sédentarisées se mettent à pratiquer la culture des céréales et à domestiquer, à partir d’espèces sauvages, tous les animaux qui peuplent nos fermes : chèvres, moutons, bœufs, porcs.

Modifiant son rapport à l’animal – de chasseur, l’homme devient éleveur – ainsi qu’à son environnement, l’humanité d’alors va peu à peu renouveler son système de pensées et son mode de vie. Dès ses premiers pas dans l’exposition le visiteur transporté sur les monts Zagros est placé au cœur de ces peuplades engagées dans ce que l’on nomme « la révolution néolithique ». Quelle nécessité aurait contraint ces nomades collecteurs, vivant de la chasse, de la pêche et de la cueillette, à décider de vivre autrement ? Les scientifiques sont aujourd’hui formels : rien, ni les conditions climatiques, ni la nature, ne justifiait un tel bouleversement des mentalités. Et pourtant, au-delà d’une révolution économique exprimée par la production de nourriture,

Édito C’est grâce à l’animal que l’homme a pu s’établir en montagne. Tant qu’il vit de chasse, de pêche et de cueillette, il ne fait qu’y circuler mais dès qu’il trouve là de quoi nourrir son cheptel, ses incursions vont devenir régulières. Et quand il parvient à cultiver des céréales, toutes les conditions sont réunies pour qu’il s’y fixe. De là date, il y a quelque sept mille ans, la sédentarisation des premières communautés alpines. Sans la viande, le lait, la peau, le fumier, la chaleur et la force motrice des animaux, rien de tel n’eut été possible en altitude. Encore fallait-il, bien sûr, que ces communautés pionnières aient disposé de savoir-faire adéquats et d’herbivores domestiqués. Cela devint possible, on le sait, lors d’un événement majeur de l’histoire de l’humanité : la néolithisation. Suite en page 2


À partir de là, l’humanité va pouvoir produire toute la nourriture qu’il lui faut et faire autant d’enfants qu’il en viendra. La croissance démographique ne va plus cesser d’augmenter mais pour maîtriser leur descendance, les hommes vont soumettre leurs femmes. De nouveaux territoires sont conquis, des villes se multiplient mais aussi des conflits, des tyrannies, des guerres... La planète Terre toute entière va s’en trouver transformée.

EN COUVERTURE : • BÉLIER DE LA RACE RUSTIQUE DE SOAY ÉVOQUANT L'APPARENCE DES MOUTONS PRIMITIFS DE L'ÂGE DU FER.

le Néolithique est aussi une révolution mentale pendant laquelle l’homme impose sa domination à la nature sauvage.

• GRAVURE RUPESTRE

Premiers exports Paroles de parois

REPRÉSENTANT UN HOMME ET SES CHIENS, PREMIERS ANIMAUX DOMESTIQUÉS, VAL CAMONICA ENTRE 5 000 ET 4 000 ANS AVANT J.-C.

CI-DESSUS • DRAILLE EN CHARTREUSE • LA PLUS ANCIENNE SCÈNE DE TRAITE CONNUE. DÈS LES ORIGINES, LES ANIMAUX DOMESTIQUES ONT ÉTÉ EXPLOITÉS POUR LEUR LAIT. GRAVURE

expriment une relation de l’homme à l’animal qui ne peut être réduite à la seule exploitation économique.

Les gravures et sculptures ornant les façades des habitats et des sanctuaires livrent des informations étonnantes, souvent déroutantes, sur cette relation de l’homme à l’animal. Ainsi au MoyenOrient au début de la domestication, paradoxalement la nature sauvage prédomine et panthères, scorpions, serpents, aurochs sont fréquemment représentés. Plus tard, félins et bovins côtoient des représentations humaines le plus souvent féminines ; généralement interprété comme la symbolisation de la fécondité et de la perpétuation de la vie, ce rapprochement est plus vraisemblablement l’allégorie de « la nature sauvage domptée au profit des communautés humaines ». Et quelle que soit l’interprétation que l’on en donne, ces représentations

Ces premiers éleveurs du MoyenOrient vont pourtant, accompagnés de leurs animaux domestiqués, chargés de plantes et de céramiques, diffuser leur savoirfaire et leurs techniques vers l’Occident. Une carte animée des cheminements de ces bergers et de leur bétail, placée à la fin du premier espace de l’exposition, retrace la longue route empruntée pour rejoindre l’Occident. De l’Asie Mineure à la Grèce puis de la Grèce à l’Italie (vers 6 500 ans avant notre ère), ces groupes longent les côtes méditerranéennes où les communautés mésolithiques se convertissent progressivement à l’agriculture et à l’élevage à leur contact. Quatre millénaires séparent ainsi les premiers bergers orientaux des premiers bergers alpins…

RUPESTRE DE WÂDI TIKSATIN, MESSAK, LIBYE, ENTRE 5 000 ET 3 000 ANS AVANT J.-C.

Une publication

Premiers bergers des Alpes, de la préhistoire à l’Antiquité Ouvrage collectif coordonné par Jean-Pascal Jospin et Tassadite Favrie Editions Infolio. 160 pages. Ouvrage illustré en couleurs. 29 euros.

Incendies volontaires Montagnes érigées, sonnailles, bêlements et exhortations de bergers campent le décor du second espace de l’exposition, que l’on atteint après avoir gravi plusieurs marches d’escalier, un peu comme si l’on montait vers quelque col alpin... Nous voici transportés à

Et dans les Alpes ? Quand cela est-il arrivé ? C’est à cette question, très précisément, que répond la nouvelle exposition du Musée dauphinois. Jean-Pascal Jospin et Tassadite Favrie ont mobilisé pour cela les résultats des découvertes les plus récentes. Une vingtaine d’archéologues-préhistoriens, d’archéozoologues, de paléoclimatologues et de pastoralistes, suisses, italiens et français ont en effet été sollicités pour nourrir le programme scientifique de cette exposition-bilan et de la publication qui la prolonge. Que l’on se rassure : comme de coutume au Musée dauphinois, tout est là présenté dans un langage aussi clair et accessible que possible. Un langage mais aussi des pièces archéologiques encore jamais vues, des maquettes époustouflantes de réalisme et des paysages d’alpages propres à inspirer de profondes réflexions sur les rapports que nous entretenons aujourd’hui avec l’environnement montagnard. Se prenant à regretter la sagesse et le pacifisme des peuplades paléolithiques, l’auteur de ces lignes se demande si le Néolithique finira un jour ; mais cela n’engage que lui. Jean-Claude Duclos Conservateur en chef, directeur du Musée dauphinois

L’exposition est présentée jusqu’au 30 juin 2009


Maquette Lythos,Villard-de-Lans

Reconstitution hypothétique de la bergerie néolithique de La Grande Rivoire, vers 4000 ans avant notre ère En fin de journée, le troupeau revient des aires de pâture sous la conduite d’un berger et de son chien. Un autre homme apporte des branches de feuillus pour nourrir les mères allaitantes, restées dans la bergerie avec les cabris qui sont encore trop faibles pour suivre le troupeau. Les bêtes sont traites avant d’être parquées pour la nuit dans l’enclos. Leur lait, une fois caillé, servira à la confection de fromages moulés dans des faisselles en céramique.

l’époque du Néolithique alpin pastoral, au moment où la pratique de l’élevage se généralise. Les premiers bergers des Alpes ne sont pas tous sédentarisés. Ils circulent avec leurs troupeaux à la manière de pasteurs nomades, évoluant selon la saison à différentes altitudes et sur un vaste territoire. Les grottes sont souvent utilisées comme bergeries temporaires et forment les relais d’un véritable réseau pastoral. Incendies volontaires pour « ouvrir le milieu » au bétail, déjections animales et présence humaine dans les espaces montagnards rendent perceptible l’emprise de l’homme sur le milieu naturel dès cette époque. Plusieurs films en images de synthèse recréent entre autres des forêts d’essences végétales disparues telle, dans les Hautes-Alpes, celle du pin cembro au profit du mélèze.

Contrôle et sélection C’est au début de l’âge des Métaux – vers 3000 ans avant J.-C. – que se sédentarisent les populations, en plaine comme en altitude. En montagne sont construits des enclos de grande taille pour troupeaux de plus en plus importants et des cabanes pastorales. Ces postes en altitude, dont on aperçoit les vestiges dans le Vercors, en Chartreuse

et dans les Alpes du Sud, étaient édifiés pour assurer la protection des bergers et des animaux contre les grands prédateurs – l’ours et le loup notamment – mais aussi probablement pour collecter le lait afin de fabriquer du fromage. Et bien sûr les hauts-pâturages environnants pourvoyaient à l’alimentation du bétail durant toute la saison estivale. C’est aussi à cette période qu’apparaissent les moutons à laine, conséquence d’une longue sélection humaine. Dès le début de la domestication en effet, la morphologie des animaux s’est transformée, notamment par la réduction de la taille de leur squelette due à leur maintien en captivité. Très tôt au Néolithique également, les périodes de reproduction sont contrôlées. Les animaux domestiqués sont utilisés, dès l’origine, pour répondre à tous les besoins humains : le travail, l’alimentation, le transport, l’artisanat.

Secrets d’alpages Dès 500 ans avant J.-C. et jusqu’à la période gauloise, les étables jouxtant les maisons d’habitation témoignent qu’en plaine et dans les fonds de vallées se crée très tôt une proximité entre l’homme et l’animal. C’est notamment ce que révèlent les

images d’un village du Haut-Valais en Suisse présentées dans l’exposition. Les troupeaux étaient-ils périodiquement conduits en alpage ? Les recherches archéologiques n’ont pas livré tous leurs secrets... de même que l’on ne connaît toujours pas la provenance du bétail qui devait occuper les cabanes d’altitude, ni même le mode de déplacement des hommes et de leurs animaux. Les nombreux témoignages, objets et représentations, de la période romaine attestent d’une nouveauté qui exprime le développement des activités agropastorales : les étables font alors partie d’habitats isolés ou de grands domaines. Plus que jamais, la société romaine confie un rôle au berger – de nombreuses représentations en témoignent – celui de garantir la prospérité de la communauté.

CI-DESSUS À GAUCHE • OSCILLUM DE LA VILLA DE LA BUISSE, ISÈRE. CE MÉDAILLON DÉCORATIF EST ORNÉ DE LA FIGURE DE PAN VIEUX, DIVINITÉ AGRESTE PORTEUSE D'UNE SYMBOLIQUE PASTORALE.

Votre avis nous intéresse ! Amateurs du patrimoine, parents, enfants, étudiants, enseignants, chercheurs, responsables de groupes ou simples curieux, de nouveaux services vont être développés pour vous sur le site internet du musée ! Une enquête « Le musée dauphinois : quel musée virtuel ? » devrait permettre d’appréhender vos attentes. Rendez-vous sur www.musee-dauphinois.fr un questionnaire est à votre disposition dans la rubrique “enquête”.


à découvrir

Sur la trace des premiers paysans de La Grande Rivoire L’abri sous roche de la Grande Rivoire se repère facilement depuis la route qui conduit de Sassenage au plateau du Vercors. À l’entrée des basses gorges du Furon, ce surplomb naturel se dresse au pied d’une falaise. Les archéologues fouillent ici à 600 mètres d’altitude, à la recherche d’indices sur l’occupation humaine de nos montagnes alpines, depuis l’époque du Mésolithique jusqu’aux premiers siècles de notre ère. Ils vous proposent de les retrouver dès ce printemps et pendant tout l’été, pour des visites exceptionnelles programmées dans le cadre de l’exposition Premiers bergers des Alpes. Responsable du chantier de fouilles, Pierre-Yves Nicod nous livre dès aujourd’hui les premières clés de compréhension du site.

« C’est un véritable mille-feuilles sédimentaire ! S’empilent ici sur plus de six mètres d’épaisseur de nombreuses couches limoneuses, souvent peu épaisses et de couleurs très contrastées. Leur analyse fournit toute une série d’indices sur les différentes

Un chantier archéologique j majeur en Isère Découvert en 1986 par les chercheurs du Centre de recherches préhistoriques du Vercors, alors présidé par le Dr Malenfant, le site archéologique avait quelque peu été endommagé par l’exploitation en carrière des dépôts de la pente. Ce qui a conduit à réaliser une fouille de sauvetage entre 1986 et 1995 : cinq campagnes ont ainsi été menées par l’archéologue Régis Picavet. Elles ont permis de stabiliser les sédiments et de mettre en évidence le potentiel archéologique du gisement. Le ministère de la Culture et le Conseil général de l’Isère ont alors décidé de mettre sur pied un projet d’une grande ampleur pour fouiller l’intégralité du gisement dans les dix à quinze années à venir.

occupations humaines du site depuis l’époque des derniers chasseurs du Mésolithique vers 8000 ans avant J.-C. jusqu’à l’époque gallo-romaine ». Pierre-Yves Nicod fouille ici depuis huit ans et l’on risque bien de voir sa longue silhouette arpenter le site au cours des dix prochaines années ! Il faut dire que l’abri sous roche de La Grande Rivoire révèle de précieuses informations sur l’économie pastorale des sociétés alpines. 8000 ans d’histoire humaine sont ici condensés. La lecture des découvertes permet en effet de suivre à la trace les dernières sociétés de chasseurs-cueilleurs entre 8000 et 6000 ans avant J.-C. ; puis l’apparition des premières sociétés d’agriculteurséleveurs ; enfin le développement des sociétés agro-pastorales entre 5000 et 2500 ans avant J.-C. « Ce que nous cherchons, c’est à comprendre comment les chasseurs sont devenus des paysans, comment s’est opérée cette transition ». Est-ce la conséquence de l’arrivée de nouvelles populations, qui auraient progressé depuis le Midi de la France où elles sont connues depuis des siècles ? Ces colons auraient alors refoulé les chasseurs dans les zones les plus élevées. Ou bien est-ce les chasseurs autochtones qui progressivement ont changé leur mode de vie au contact de ces communautés paysannes migrantes depuis le sud de la France ? « C’est en tous cas l’un des grands tournants de l’histoire de l’humanité ». Les recherches effectuées ces dernières années (analyse du fumier fossile et des cendres de bois) ont permis de bien identifier la fonction de bergerie de l’abri au Néolithique. La plus grande partie du site devait être utilisée pour le parcage des

Visites accompagnées sur le site

La Grande Rivoire à Sassenage Mercredis 23 avril, 21 mai, 25 juin, 23 juillet*, 20 août*, 10* et 17* septembre 2008 de 14h30 à 16h par Régis Picavet ou Pierre-Yves Nicod, préhistoriens responsables des fouilles Visites gratuites. Nombre de places limité à 20 personnes.

Renseignements au 04 57 58 89 26 * dates pendant lesquelles l’équipe sera en cours de fouilles.

troupeaux. Seules quelques personnes accompagnaient les bêtes dans la bergerie, le reste de la communauté vivant probablement dans des habitats peu éloignés. Le mobilier archéologique retrouvé est très diversifié : récipients en céramique, outils en silex et en os, lames de haches et d’intéressantes poteries, sans doute des faisselles, permettant d’envisager une fabrication sur place de fromage. Si un premier pas a été réalisé dans la compréhension de la fonction de l’abri, il reste à préciser la chronologie et le rythme des occupations et à appréhender plus finement l’évolution des modalités et des techniques pastorales entre 5000 et 2500 ans avant notre ère. De belles leçons de choses en perspective…


notamment, si l’animal appartient à une espèce sauvage ou domestiquée. Car à partir du moment où les animaux sont domestiqués, leur squelette se transforme du fait de leur captivité et aussi par le truchement de la sélection humaine. Le premier critère de reconnaissance est la diminution de leur taille ainsi qu’une réduction générale de tous les caractères sauvages : cornes, dents, ... On sait également déterminer, pour certaines espèces, l’âge auquel l’animal est passé de vie à trépas en examinant les dents et les os : la dentition de l’adulte diffère de celle du jeune animal et les os ne sont pas entièrement soudés à l’âge tendre…

L’interview

Histoires d’os Premiers bergers des Alpes est le fruit de nombreuses collaborations scientifiques. Tassadite Favrie, qui a assisté Jean-Pascal Jospin dans la conception de l’exposition, nous livre les principes et les méthodes d’investigation de sa spécialité, l’archéozoologie.

Qu’est-ce que l’archéozoologie ? « Une discipline de l’archéologie qui permet d’étudier le rapport que les populations humaines ont entretenu avec le monde animal. On examine ce rapport sous toutes ses facettes : les animaux en tant que nourriture, sacrifices, forces de travail ou même supports symboliques. Notre travail consiste à « faire parler » les vestiges animaux retrouvés sur les sites archéologiques, les os et les dents principalement, en les observant, en les décrivant, en notant toutes les traces et les particularités afin d’en tirer des hypothèses et idéalement des conclusions… Comment procédez-vous ? D’abord par l’identification. De quel os s’agit-il : phalange, crâne, humérus, cubitus ? S’il s’agit des os du bras ou de la cuisse, qui correspondent aux parties les plus charnues, on peut se demander si l’animal a été tué pour être mangé. Il faut ensuite déterminer

à quel animal il appartient. Un os de baleine nous renseigne sur le milieu : c’était un environnement froid de bord de mer. Un renne, un mammouth, un cheval indiquent un milieu steppique, ouvert et froid. Des restes de sangliers, de cerfs ou de chevreuils : un milieu boisé, plutôt doux et humide. L’examen des traces extrinsèques, laissées sur la surface de l’os, permet d’interpréter notamment toutes les découpes et de déduire si l’animal est tué pour sa chair ou pour sa fourrure car les traces de découpe sur les os sont localisées à des endroits différents. L’étude est relayée ensuite par la taphonomie, « la loi de l’enfouissement », qui permet de reconstituer par différentes observations l’histoire de la vie de l’os à compter de la mort de l’animal. L’os a-t-il été exposé aux intempéries, est-il rongé par les chiens ou usé par le transport de l’eau ? Autant d’indices sur son devenir jusqu’à nos jours. Que lisez-vous ? Que décryptez-vous ? L’état de santé de l’animal, les déformations osseuses et articulaires. Un animal qui aura porté de très lourdes charges, un bœuf qui tire l’araire toute sa vie subit des déformations osseuses qui sont reconnaissables. Il est aussi parfois possible de déterminer par les différences de taille du squelette

Comment analyser ces données ? Par traitement statistique, pour comprendre par exemple pourquoi des agneaux ont été mangés. Tuer un animal dans son jeune âge est le plus souvent un luxe dont on doit comprendre le sens : sa dégustation peut correspondre à un moment festif ou de commémoration. À l’inverse, des moutons tués à l’âge mûr devaient forcément servir à quelque chose – on nourrit rarement un animal pour rien – donc on fait l’hypothèse qu’ils ont été gardés longtemps parce qu’ils produisaient de la laine. Lorsqu’on retrouve un très vieux chien, on suspecte qu’il était devenu un animal de compagnie ; un vieux coq, parce qu’il donnait l’heure. Le lien avec l’archéologie est capital : est-on dans un sanctuaire, dans un fossé de gravas, un campement de chasseurscueilleurs ou les fossés du Louvre au XVIe siècle ? Car dans tous ces contextes, l’os va parler. Comment êtes-vous venue à l’archéozoologie ? Depuis longtemps passionnée par les questions liées à l’environnement, les animaux me semblaient un bon moyen pour croiser les données environnementales avec les problématiques d’ordre plus social. Après trois années d’études en archéologie, je me suis spécialisée dans les os, alors que d’autres se sont consacrés à l’étude de la céramique ou des silex, vestiges qui sont aussi très nombreux dans les sites archéologiques. Ce travail relève de l’enquête scientifique dont les nombreux indices m’entraînent souvent à interroger les cultures anciennes. Lorsqu’on commence à trouver du sens à un tas d’os, on est mûr pour avancer de vraies propositions… Et c’est très intéressant ».


En bref Un double anniversaire Le 3 février 1968, alors que les Xe Jeux olympiques d’hiver vont être déclarés ouverts, les équipes du Musée dauphinois s’installent dans les bâtiments restaurés de l’ancien couvent de Sainte-Marie d’en-Haut. Il y a en effet 40 ans, le Musée dauphinois était inauguré à SainteMarie d’en-Haut par André Malraux, ministre des affaires culturelles et par Hubert Dubedout, maire de Grenoble. Élue en 1965, la municipalité met alors en place une nouvelle politique culturelle, basée sur la lecture pour tous, le spectacle vivant, l’art contemporain et le patrimoine. À chacun de ces axes correspondent des équipements culturels : des bibliothèques, une nouvelle maison de la culture, un musée de peintures et de sculptures et un musée dauphinois dont l’adjoint à la culture, Bernard Gilman dit alors : « Il ne s’agit pas que d’un musée d’art et de traditions populaires mais d’un lieu où nous essaierons de situer dans leur contexte historique les problèmes actuels de la région ».Telle est la décision qui permit de sauver de la ruine l’un des ensembles patrimoniaux les plus prestigieux de Grenoble et telle est la voie que chacun des dirigeants du Musée dauphinois a suivie depuis une quarantaine d’années, sous la tutelle de la Ville de Grenoble, puis celle du Département de l’Isère, depuis 1992.

Coudre son histoire à un bouton Le bouton, Plus Petit Objet Culturel Commun, continue à délivrer les souvenirs des Grenoblois. Depuis un an des bibliothécaires et des lectrices, accompagnées par Michel Jeannès, artiste du collectif La Mercerie font circuler les fiches « Coudre son histoire à un bouton ». Souvenirs sensibles et personnels, leurs témoignages révélent des liens d’amitié, d’affection, d’amour. À l’image des tambours à dentelles qui se transmettaient aux filles dans les communautés alpines d’autrefois, le bouton serait-il aussi un « présent d’amour » à son insu ? Une rencontre réunissant les lecteurs de la Bibliothèque Teisseire-Malherbe et Michel Jeannès s’est tenue le samedi 8 mars 2008 à l’occasion de la Journée de la Femme. À découvrir jusqu’au 28 avril, Résidence Saint-Bruno à Grenoble, une exposition restituant plus d’une quarantaine d’histoires…

Très belle et intéressante expo sur la liberté mais pour quelles raisons avoir escamoté la période 1952-1962, toutes les luttes contre la guerre d’Algérie et notamment les manifestations des rappelés en gare de Grenoble et les innombrables manifestations, contre cette guerre coloniale ? ■ C. P. Evoquer, au cours des deux derniers millénaires, les grands moments de l’histoire locale où l’on s’est battu pour la liberté ne permettait pas de consacrer beaucoup de place à chacun. D’autant que la guerre d’Algérie a déjà donné lieu à de larges développements dans des expositions récentes du Musée dauphinois (Pour que la vie continue – D’Isère et du Maghreb, en 1999 puis Français d’Isère et d’Algérie, en 2003). Pourtant, l’exposition Rester libres ! évoque cette période à travers l’action des associations qui défendent les conditions de vie des travailleurs algériens et luttent précisément pour qu’ils ne soient plus considérés comme des colonisés mais comme des citoyens à part entière. J’ai été vraiment séduit par la qualité des sujets abordés et des scénographies de vos programmes d’exposition. Je me faisais, au titre « Musée dauphinois », une idée un peu traditionnelle de votre musée alors qu’elle est vraiment contemporaine et

Le Musée dauphinois vient de recueillir : Les négatifs des reportages réalisés par René Villiot, alors correspondant du Dauphiné Libéré pour le sud Isère. L’ensemble constitue un témoignage unique de la vie sociale, politique, sportive, industrielle de ce territoire entre 1951 et 1986 ; 650 plaques de verre stéréoscopiques offertes par Jacques Flandrin ! Réalisées par son oncle Maurice Dodero (18981959) dans les années 1920-1930, les photographies révèlent la sensibilité de l’auteur pour les Alpes. Ingénieur et enseignant, Maurice Dodero était aussi un grand alpiniste. Ce fonds photographique vient compléter d’autres dons de la famille Flandrin ; une “beurée” – chariot utilisé pour remonter la terre dans les champs cultivés en pente – datant de la première moitié du XXe siècle vient d’être offerte par la famille Truc-Vallet de Laval, hameau de La Boutière, dans le massif de Belledonne.

...Et des collections qui voyagent

Pour en savoir plus : http://www.musee-dauphinois.fr

Le courrier L’exposition sur Eugénie Goldstern est captivante de bout en bout, elle montre bien quelques aspects essentiels de l’anthropologie. Elle mériterait d’être montrée dans bien des villes et des lieux ! Et par dessus tout, il me semble qu’elle symbolise bien ce qu’a été le cours effroyable de ce siècle. De la lumière aux ténèbres. Mais la lumière reste… ■ J. P. J. Préparant cette exposition, nous avons constaté en effet que le parcours d’Eugénie Goldstern coïncidait avec l’une des phases décisives de la construction de l’Europe, celle où, dans l’horreur à laquelle elle va succomber parmi six millions de Juifs, une unité culturelle poursuit pourtant sa gestation. Eugénie Goldstern en observe l’existence dans les Alpes, avant que les États-nations ne ferment leurs frontières, à l’issue des deux guerres mondiales, puis les rouvrent, tandis qu’une conscience européenne se réveille à nouveau. L’histoire et les recherches d’Eugénie Goldstern permettent de rassembler les morceaux d’une Europe mise à mal par le fascisme et le nazisme et de mieux en percevoir, dans le pire et le meilleur, la cohérence culturelle. L’itinérance de l’exposition, quant à elle, se prépare. Après Chambér y et Gr enoble, Marseille et Turin pourraient bien l’accueillir à leur tour.

Trois donations…

À l’inventaire des collections du Musée dauphinois, le casque de Vézeronce (VI e s. ap. J.-C.) a quitté le Musée de l’ancien Evêché où il est habituellement présenté, pour trouver place dans l’exposition Rome et les Barbares au Palazzo Grassi de Venise, jusqu’au 28 juillet prochain.

des visiteurs

vivante. Je pense envoyer des étudiants de l’école d’architecture de Lyon où j’enseigne, pour s’en imprégner et je prendrai si vous le permettez, contact avec vos services pour qu’ils puissent en faire des petites études. Merci beaucoup pour la générosité de votre travail. ■ A. F., enseignant à l’Ecole d’Architecture de Lyon Voilà une observation très gratifiante pour l’équipe du musée d’autant qu’il est bien de sa volonté d’user d’un langage contemporain et toujours réactualisé pour mettre la connaissance du passé au service de la compréhension du présent. Le concours d’étudiants-stagiaires est toujours très apprécié au Musée dauphinois et ceux de l’Ecole d’architecture seront les bienvenus mais le nombre de places est restreint et les demandes de stages nombreuses. Exposition remarquable sous tous ses angles et approches. Bravo d’avoir mis à la disposition du public cette remarquable étude. Cependant une erreur s’est glissée dans la traduction de la fiche signalétique de déportation d’Eugénie Goldstern. Quand cette fiche mentionne la religion (mos…), cela signifie « religion de Moïse » et non mosaïque (confusion avec mosaïsel qui n’a pas d’équivalent en français sauf à traduire par « religion de

Moïse »). Cette remarque pour la compréhension du public n’enlève rien à la qualité de l’exposition. Encore Bravo. ■ A.S. Grand merci pour cette observation. Cependant, la traductrice de l’œuvre d’Eugénie Goldstern, Mireille Gansel avait pris la précaution de demander l’avis d’un spécialiste, le professeur Jean Halpérin, par ailleurs Président du colloque permanent des intellectuels juifs de langue française. Ce dernier a bien confirmé que le mot manuscrit mos., figurant à la rubrique Glaubensbekenntnis (confession), pouvait être traduit par mosaïque qui, comme vous le dites, signifie bien « de la religion de Moïse ». Il est intéressant de remarquer qu’au-dessus, à la même rubrique, mais s’agissant cette fois d’Eugénie Goldstern, figure la mention Jüdin (femme juive). Ainsi et à la même rubrique, passe-t-on de la confession mosaïque, pour les parents, à la race juive, pour leur fille. Cette dernière réflexion nous est venue lors de la visite récente de l’historien Georges Bensoussan, spécialiste de la Shoah et de l’histoire du monde juif. Bravo pour la mise en scène à deux voix lors de la visite précédant l’inauguration de l’exposition sur Eugénie Goldstern. ■ A.D.

Qu’Eugénie Goldstern vienne dans l’exposition commenter elle-même ses recherches n’était pas une initiative bien difficile à avoir. Encore fallait-il le talent, la sensibilité et la disponibilité d’une actrice, Nicole Vautier-Brisa, pour qu’Eugénie Goldstern vienne, le temps d’une visite, faire vivre les objets qu’elle a collectés. Jean-Vincent Brisa qui l’a dirigée, a ressenti le besoin d’une autre contribution, celle d’un récitant, Michel Ferber, qui ponctue le parcours d’utiles informations sur le cours de la vie d’Eugénie Goldstern, de Bessans à Zurich et de Vienne à Sobibor. Nous sommes très reconnaissants à tous trois de la nouvelle dimension qu’ils instaurent ainsi dans l’exposition et signalons à ceux qui voudraient assister à leur intervention la date du 20 mai à 20h30. Les maquettes d’Eugénie Goldstern étaient très impressionnantes, faites au moindre détail. ■ A. C. Trois maquettes sont présentées dans l’exposition. La première, une maison du Tyrol, appartient aux collections du Musée d’ethnographie autrichienne de Vienne qui fut également le prêteur de tous les objets collectés par Eugénie Goldstern. La deuxième, une maison de l’Engadine, nous a été prêtée par le grand musée de plein-air de Ballenberg, situé à l’est de la Suisse, à 100 km de Berne. La troisiè-

me, une maison des HautesAlpes, vient enfin des collections du Musée dauphinois. Toutes trois illustrent la grande attention que porte Eugénie Goldstern à la maison alpine et à ce qu’elle révèle de la vie et de l’identité de ceux qu’elle abrite. Cette vaste question est d’ailleurs en train de nourrir le programme d’une exposition à venir. Expo Eugénie Goldstern passionnante. Un petit manque des panneaux : pourquoi si longtemps avant de découvrir cette œuvre et cette aventure qui apprend autant sur l’ethnologie que sur l’histoire du siècle ? ■ C.D. L’appartenance juive d’Eugénie Goldstern et l’antisémistisme dont elle fut la victime, dès 1924, lorsque les portes du Musée d’ethnographie de Vienne se ferment à elle, jusqu’à son arrestation et sa mort à Sobibor en juin 1942, suffisent à expliquer pourquoi la connaissance de son œuvre fut si longtemps ignorée. Une partie de l’exposition est consacrée à ces faits et à la Shoah dont on n’épuisera sans doute jamais la connaissance tant demeurent incommensurables les conséquences de l’extermination de six millions de personnes.


Coup de projecteur

anciens objets cultuels ?

Jouets primitifs :

Eugénie Goldstern et les animauxjouets des Alpes ou comment d’une exposition à l’autre, les questionnements rebondissent et s’enchaînent…

Dans l’étude du village savoyard de Bessans, publiée à Vienne en 1922, Eugénie Goldstern observe que le sel est parfois conservé dans des boîtes en forme d’oiseau, d’oie ou de canard. Elle constate aussi que ces récipients, de moins en moins utilisés, sont « donnés aux enfants comme jouets ». Ces boîtes à sel restent pourtant en usage dans les Alpes et d’autres, ajoute-t-elle, sont repérées en Europe et jusqu’en Russie. Elle rappelle aussi, outre l’importance du sel (notamment dans les sociétés pastorales), sa symbolique (sagesse, persévérance, intégrité morale…) et ses usages religieux (baptêmes, distribution de sel béni aux animaux…). « Ainsi – dit-elle – pouvons-nous peut-être discerner dans les récipients à sel savoyards à forme d’oiseau, aujourd’hui en voie de disparition, le dernier vestige des récipients à sel jadis à vocation cultuelle ». Cette observation et d’autres lui permettent de dire, à propos du jouet primitif : « On est probablement en droit de voir en lui tel ou tel vestige d’anciens objets cultuels ». Cette hypothèse lui est suggérée par les ressemblances qu’elle observe entre la forme des jouets collectés et le dessin de gravures rupestres et d’amulettes, en forme de cornes notamment, relevé dans l’Europe entière : « La question se pose légitimement de savoir s’il pourrait aussi exister des liens de contenu entre des reproductions de cornes préhistoriques ou protohistoriques, servant à des fins cultuelles et celles qui, aujourd’hui, sont utilisées dans les Alpes comme animaux-jouets ». Mais se gardant bien d’aller plus loin, Eugénie Goldstern termine son étude en disant : « Peut-être l’avenir se réservera-t-il d’éclairer ce problème fort captivant ».

Si le mystère n’est pas levé, les observations d’Eugénie Goldstern nous ont alertés, fait voir et peut-être comprendre autrement un certain nombre d’objets et de faits. Ainsi de ce tronçon de branchage, découvert dans le site néolithique des Baigneurs, en bordure du Lac de Paladru (Isère), identifié de façon peu convaincante dans nos inventaires en tant que « batteur à lait », mais en tout point comparable à l’un des animauxjouets collectés en Slovénie par Eugénie Goldstern. Le constatant, quelle identification donner maintenant à cet objet préhistorique ? Celle d’un jouet ou d’un objet cultuel ? Par ailleurs, dans un ouvrage récent sur la préhistoire italienne, apparaît la photographie d’un objet étonnamment semblable, conservé jusqu’alors dans une tourbière des Alpes du Trentino, daté du Néolithique tardif et identifié aussi comme batteur ou fouet (frullino). Que penser de ces objets préhistoriques que les travaux d’Eugénie Goldstern nous font sortir tout à coup du champ de la culture matérielle pour entrer dans celui du jeu ou des croyances ? Ajoutons qu’Eugénie Goldstern n’a pas collecté que des animaux-jouets en bois mais en découvre aussi de nombreux en os et notamment en astragale de mouton, de porc ou de bovin. Cet os du tarse, qui permet l’articulation du tibia, du péroné et des os de la cheville, est plus communément connu sous le nom d’osselet. Réunis, note-t-elle, ces osselets représentent pour l’enfant les animaux du troupeau. On sait aussi l’existence du jeu d’osselets et la signification qu’il prend, bien au-delà d’un simple amusement d’enfant, lorsqu’il s’agit de divination. On sait aussi, grâce à des préhistoriens comme André Leroi-Gourhan, quelle place occupait le culte des ossements dans les religions de la préhistoire. Or l’un de nos partenaires préhistoriens, Alain Beeching, révèle dans la

publication qui prolonge Premiers bergers des Alpes une surprenante découverte faite il y a une vingtaine d’années dans la Drôme. À côté d’une tombe et au fond d’une sorte de silo de près de deux mètres de profondeur, Beeching déterre, dit-il : « … un lot de 103 talus (ou astragales), dont l’un de cervidé, un autre d’aurochs et tous les autres de bœufs domestiques, dont un minimum de 54 individus sont attestés. Une vingtaine de ces os ont été travaillés par rainurage, percement, etc. La fonction magique, ludique ou autre de ces pièces est en débat, mais il est difficile de ne pas y voir l’expression d’un statut particulier de cet animal dans le rituel funéraire et plus globalement dans la société chasséenne ; ce qui serait un simple prolongement d’observations déjà faites ailleurs. » Peut-on imaginer que la centaine d’astragales enterrée près d’une sépulture ait pu représenter le troupeau du défunt ou marquer son activité de berger ? Combien faudra-t-il rassembler de découvertes et d’indices aussi apparemment concordants pour approuver l’hypothèse d’Eugénie Goldstern ? Nul ne le sait, mais reconnaissons que de jouets en objets cultuels et du XXe siècle à la préhistoire, Eugénie Goldstern aura sacrément stimulé nos neurones ! Quoi qu’il en soit, le rapprochement des données de l’ethnographie et de la préhistoire et ce qu’il nous suggère ici des formes de la symbolisation, de la transmission de l’adulte à l’enfant ou du jeu en tant qu’apprentissage, n’a pas fini de nous réserver des surprises sur la connaissance du fonctionnement humain. ■


La prochaine exposition

Être ouvrier en Isère Dans le prolongement de l’exposition L’Isère au travail présentée cet hiver au musée de la Viscose, le Musée dauphinois prépare, pour l’automne 2008, une nouvelle exposition sur la condition ouvrière, second volet de la préfiguration d’un musée dédié à cette mémoire.

En 1860, près de 40 000 Isérois – hommes, femmes et enfants – travaillent à l’usine, à l’atelier, à la

mine, au chantier ou à domicile. Ils sont trois fois plus vers 1930 dans des établissements employant jusqu’à 1500 salariés. À l’heure où la désindustrialisation, de la mondialisation et de la disparition, sous sa forme traditionnelle, du monde ouvrier, il était primordial d’aller à la rencontre de ceux qui ont fait l’histoire industrielle de notre territoire, en leur consacrant une institution culturelle digne de ce nom. La mémoire ouvrière aura un lieu de

référence en Isère sur le site de l’actuel musée de la Viscose, agrandi et renouvelé pour l’occasion. Grâce aux nombreux objets prêtés par les acteurs de cette histoire, l’exposition du Musée dauphinois montrera comment, à partir du XVIIIe siècle, époque à laquelle le travail devient le fondement de l’ordre social, et surtout à partir de la fin du XIXe siècle qui marque les débuts de la grande industrie, un nouveau groupe social se constitue et prend peu à peu conscience d’appartenir à une classe à part. De la même manière, comment sous l’appellation de monde ouvrier, se cachent des environnements de travail, des réalités sociales et professionnelles extrêmement diversifiées et contrastées selon les époques, les filières techniques, et selon que l’on est ouvrier qualifié ou manœuvre, homme, femme, enfant ou immigré. L’exposition donnera la parole aux ouvriers et ouvrières qui raconteront à travers leurs parcours de vie, les valeurs partagées et ce sentiment de fierté qui les anime, grâce à leur savoir-faire irremplaçable. Au-delà, le public sera amené à s’interroger sur les grandes évolutions du monde ouvrier depuis la fin des Trente glorieuses. Un ouvrage de 150 pages dans la collection Patrimoine en Isère rassemblera une vingtaine de contributions apportant des éclairages diversifiés et souvent inédits sur les différents thèmes qui auront été abordés dans l’exposition. ■

Quelques rendez-vous... LES 16, 17, 23, 24 AVRIL - 14H30

VENDREDI 2 MAI - 20H

La petite fabrique de jouets des enfants de la montagne

Paroles d’étoiles, mémoires d’enfants cachés (1939-1945)

Ateliers pour enfants animés par l’association Le Fil d’Ariane

À l’occasion du Jour de la Shoah (Yom A Shoah), lectures d’Agnès Buisson et Jacqueline Malevergne de l’association Paroles en Dauphiné.

Renseignements et inscription obligatoire au 04 57 58 89 26 Durée : 1h45 – Tarif : 3,80 €

Entrée libre dans la limite des places disponibles. Renseignements et inscriptions au 04 57 58 89 26

MERCREDIS 16 ET 23 AVRIL - 15H30

Contes autour de l’exposition Ge n s d e l ’ a l p e Par les conteurs amateurs de l’association Paroles en Dauphiné Entrée libre dans la limite des places disponibles.

DIMANCHES 11 MAI ET 15 JUIN - 16 H 30

Les quatre saisons de DD Chorégraphie de et avec Eric Alfiéri Entrée libre

Être ouvrier en Isère (XVIIIe-XXIe siècles) À partir d’octobre 2008

Eugénie Goldstern Être ethnologue et juive dans l’Europe alpine des deux guerres Jusqu’au 30 juin 2008

Rester libres ! Les expressions de la liberté des Allobroges à nos jours Jusqu’au 29 septembre 2008

LE JOURNAL DES EXPOSITIONS Numéro 13 • Avril 2008 Directeur de la publication Jean-Claude Duclos Coordination Agnès Perrière Rédaction Jean-Claude Duclos,Agnès Perrière, Marianne Taillibert et Sylvie Vincent Conception graphique Hervé Frumy Réalisation graphique Francis Richard Crédit photographique Denis Vinçon, Musée dauphinois, Léonard Villon, Coll. Archives communales de Bourgoin-Jallieu, Alexandre Morin, Jean-Loïc Le Quellec, Arjecahn. Imprimerie des Deux-Ponts, Bresson / Tirage 10000 ex. Dépôt légal : 2e trimestre 2008 • ISSN en cours.

Musée dauphinois Ouvert tous les jours sauf le mardi de 10 h à 18 h, du 1er octobre au 31 mai et de 10 h à 19 h, du 1er juin au 30 septembre 30 rue Maurice Gignoux 38031 Grenoble cedex 1 Téléphone 04 57 58 89 01

w w w. m u s e e - d a u p h i n o i s . f r L’entrée dans les musées départementaux est gratuite

SAMEDI 31 MAI ET DIMANCHE 1ER JUIN - 19 H

Rendez-vous aux jardins Spectacle chorégraphique de la Compagnie Le Cil du loup Renseignements et inscription obligatoire au 04 57 58 89 26 Entrée libre dans la limite des places disponibles

commentées par les concepteurs de l’exposition seront aussi proposées dans l’après-midi. Le dimanche, sera projeté à plusieurs reprises le film « Résister, militer » réalisé par Michel Szempruch. Rens. : 04 57 58 89 01 VENDREDI 6 ET SAMEDI 7 JUIN EN NOCTURNE DANS LES JARDINS DU MUSÉE, À PARTIR DE 21H30

SAMEDI 7 ET DIMANCHE 8 JUIN

Les Reflets d’Hélène

Rencontre autour de l’exposition R est er l ibr es !

Patrick Seyer, lecture Hélène de Troie

Le samedi, un moment d’échanges avec les membres d’associations de défense des Droits de l’Homme en Isère, ultime événement organisé autour de l’exposition. À partir de 14 h30, le public est convié à découvrir la création d’un slameur qui intervient, en musique, sur la thématique des libertés. Des visites

Renseignements et inscription au 04 57 58 89 26 SAMEDI 14 JUIN

Des pas de quartiers Rencontre dans les jardins de l’ancien couvent de Sainte-Marie-d’en-haut autour des pratiques artistiques amateurs. Evénement organisé par les MJC de Grenoble. Entrée libre


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