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978-2-35567-106-7
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Musée dauphinois
L’art inuit fascine et intrigue. Depuis les miniatures en ivoire jusqu’aux sculptures en stéatite ou à partir de matériaux hybrides, chaque œuvre porte un imaginaire où s’entremêlent surnaturel, culture et changement social d’un peuple. Ces vastes terres sont occupées par des autochtones qui veulent prendre en main leur destinée tout en perpétuant leur mode de vie. Les spécialistes des questions nordiques livrent ici leur regard sur ces communautés qui ont basculé dans la modernité en une soixante d’années à peine. Le chant de gorge katajjaq, issu de la tradition orale inuit, mixé aujourd’hui au rap et au hip-hop symbolise leur parfaite adaptation au changement et leur résistance aux convoitises du monde occidental.
Nunavik En terre inuit
Le Musée dauphinois explore les patrimoines les plus proches comme, de temps à autre, les cultures venues d’ailleurs. Il nous conduit cette fois dans le Grand Nord à la rencontre d’un peuple inuit de l’Arctique québécois. La collaboration avec le prestigieux Musée de la Civilisation de Québec, l’Institut Avataq – organisme culturel des Inuit du Nunavik – et le Musée des Confluences de Lyon a permis de rassembler des documents et des œuvres rarement, sinon jamais, présentés en France. Cet ensemble tente de documenter la vision du monde d’un peuple autochtone de l’Arctique et consigne la mémoire de communautés radicalement transformées au cours du siècle dernier.
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Nunavik En terre inuit
Ouvrage dirigĂŠ par Chantal Spillemaecker
Avec le partenariat de
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Femme Inuk, 1971. Sculpture en stéatite par Annie Niviaxi
sommaire 6
Préface
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Jean-Pierre Barbier Président du Département de l’Isère
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Avant-propos
Chantal Spillemaecker Conservateur en chef au Musée dauphinois
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Jean Guibal Directeur du Musée dauphinois
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Avant-propos Stéphan La Roche Directeur général des musées de la Civilisation à Québec
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Le Grand Nord et le mythe romantique Marion Radwan Étudiante en master 2 histoire de l’art, université Grenoble-Alpes
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« Mes ancêtres sont arrivés il y a 1000 ans » Lisa Koperqualuk Anthropologue et membre cofondateur de Saturviit, Association des femmes inuit du Nunavik, directrice de la communication de la Fédération des Coopératives du Nouveau-Québec
Avant-propos Jeannie Nungak Présidente de l’Institut culturel Avataq
Des Inuit dans les Alpes ?
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Le Nunavik. Revendications d’un peuple autochtone Caroline Hervé Professeure associée, UER sciences du développement humain et social, université du Québec en AbitibiTémiscamingue. Chercheure associée au Centre interuniversitaire d’études et de recherches autochtones, université Laval
Transformation, 1965. Ours portant les vêtements d’un Inuk tenant les ailes d’un homme-oiseau. Estampe sur papier de riz par Leah Qumaluk
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Histoire de la collection inuit au Québec Marie-Paule Robitaille Conservatrice honoraire des collections des Premiers Peuples au musée de la Civilisation à Québec
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Avataq, un outil d’affirmation culturelle Louis Gagnon Conservateur et directeur du département de muséologie, Aumaggiivik, Institut culturel Avataq
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Pêcheur au harpon, 1964 Estampe sur papier de riz par Ajagutaina
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Inuktitut. La langue des Nunavimmiut Marc-Antoine Mahieu Maître de conférences d’inuktitut (langue et linguistique inuit) Inalco & Lacito, université Sorbonne Paris-Cité
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Maisons et maisonnées inuit : un modèle culturel résilient Béatrice Collignon Professeur, département de géographie, Université de Bordeaux-Montaigne
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Chamanisme et néochristianisme. La spiritualité inuit Frédéric Benjamin Laugrand Professeur au département d'anthropologie de l’université Laval à Québec
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La sculpture comme lieu de résistance Florence Duchemin-Pelletier Pensionnaire du programme “Art et mondialisation”, département des études et de la recherche, Institut national d’histoire de l’art (INHA), Paris
118
Les jeunes au Nunavik. Une population oubliée ? Véronique Antomarchi Professeure agrégée, université Paris V-Descartes
126 Gouvernance inuit : les projets
politiques au défi du développement Cécile Pelaudeix Professeur, Aarhus University, Danemark
Annexes
142 Chronologie 144 Bibliographie 146 Contributions 147 Crédits photographiques
106 La pensée et le ressenti des Nunavimmiut dans les arts graphiques
Aurélie Maire Chargée de cours au département d’anthropologie, université Laval, Québec. Centre interuniversitaire d’études et de recherches autochtones (CIERA)
Homme inuk, 1971 Sculpture en stéatite par Annie Niviaxi
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Préface
D Anna Annahatak pratique la pêche blanche au lac Tasialujuak, au nord de la communauté de Kangiqsujuaq, 2010. Attraper des ombles est une activité familiale qui permet aux Inuit contemporains de renouer avec leurs traditions.
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ans le superbe écrin de Sainte-Marie-d’en-Haut, ancien monastère de la Visitation rénové à l’occasion des Jeux olympiques d’hiver de Grenoble en 1968, le Musée dauphinois sait explorer et mettre en valeur les patrimoines les plus proches comme, de temps à autre, les cultures venues d’ailleurs, pour les restituer à un large public. Avec cette nouvelle exposition et la publication qui l’accompagne, il nous emmène dans le Grand Nord qui a fasciné notre enfance et nos rêves d’aventure, à la rencontre d’un peuple inuit de l’Arctique québécois. Une nouvelle façon de comprendre que le patrimoine et la culture n’ont pas de frontières et qu’ils doivent permettre de rapprocher les hommes. Alors que nous sommes investis dans la recomposition de nos unités territoriales, du plus petit village à la nouvelle région Auvergne Rhône-Alpes, il est intéressant d’appréhender les relations entre le Nunavik, pays aussi grand que la France (et peuplé seulement de 12 000 habitants !), le gouvernement du Québec et celui du Canada. Sans nul doute, l’Isère, terre de contrastes entre montagnes peu habitées et métropoles très denses (même si la banquise ne s’est pas encore installée entre elles…) peut tirer profit de la riche histoire de ce peuple, dont la détermination et le courage ont permis d’exister face aux convoitises des pays occidentaux. S’intéresser à la sauvegarde et au développement de cultures qui pourraient nous paraître exotiques ou lointaines, c’est aussi s’interroger sur nos propres pratiques et mieux comprendre notre société. Parce que la culture est l’un des outils du rayonnement de notre département, parce qu’elle revitalise nos territoires et crée des emplois, notre collectivité tient à apporter son soutien à cette manifestation. Comme elle met tout en œuvre pour attribuer les moyens indispensables aux musées départementaux, aux festivals de musique de renom international qui ont lieu chaque été ou encore à la sauvegarde et à la mise en valeur de son patrimoine.
Jean-Pierre Barbier Président du Département Député de l’Isère
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Avant-propos
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i le Musée dauphinois est bien connu pour l’intérêt qu’il porte aux communautés d’origine étrangère installées sur son territoire de référence – une douzaine d’expositions en vingt ans, des Italiens aux Maghrébins, des Arméniens aux Tsiganes, etc. – l’on se souvient moins de ses propositions de découverte des cultures lointaines, que l’on pourrait dire « exotiques ». Il a pourtant présenté, sous des aspects divers, les cultures tibétaines, égyptiennes, marocaines, roumaines, hongroises, etc., et même l’art inuit, en 1976, comme nous le rappelle Chantal Spillemaecker dans les pages qui suivent : nous l’avions tous oublié !
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La présente (re)découverte des Inuit est issue d’un vieux compagnonnage que le Musée dauphinois entretient avec le musée de la Civilisation de Québec. Cette jeune institution – elle est née en 1988 – a été repérée dès son ouverture pour la qualité de son regard sur l’humanité, les collections n’étant qu’un moyen de l’approcher au plus près, et pour sa permanente mise en perspective de l’histoire avec le temps présent. Le Musée dauphinois ne pouvait que reconnaître une étroite parenté avec son propre projet culturel ; toutes proportions gardées, tant l’institution installée sur les rives du Saint-Laurent est à une autre échelle, par la surface offerte au public comme par les moyens techniques
et financiers, que celle qui domine l’Isère à Grenoble. Les relations étroites nouées alors ne se sont jamais distendues, avec le point d’orgue que constitua l’exposition commune (avec cet autre partenaire qu’est le musée d’Ethnographie de Neuchâtel) La Différence, en 1996, un exercice muséographique pour le moins original et abondamment commenté. C’est donc le directeur général du Musée de la Civilisation, Michel Côté (il vient de céder la place à Stéphan La Roche, que nous remercions d’avoir poursuivi l’engagement de son prédécesseur), qui nous a proposé de compléter notre collaboration par une présentation de ce peuple si mal connu en Europe et si souvent fantasmé que sont les Inuit, et bien sûr les Inuit du Québec. Il s’agissait d’aborder les communautés présentes dans cette province du Canada par l’évocation de l’une de ces « Premières Nations » que la colonisation européenne a longtemps combattues, avant de tenter de les assimiler par des moyens plus ou moins agressifs. Ce fut l’une des grandes priorités de Michel Côté que de réhabiliter ces cultures autochtones, et son passage de dix ans à Lyon, pour concevoir et mettre en route le chantier du musée des Confluences en porte aussi la trace, notamment par cette permanente confrontation des collections scientifiques et naturalistes de l’ancien muséum d’Histoire naturelle avec nombre
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d’œuvres d’art issues de ces sociétés représentées symboliquement par deux communautés situées aux antipodes, les Inuit du Canada et les Aborigènes d’Australie. Selon ce qui est devenu un principe fondamental au Musée dauphinois, l’ensemble des documents présentés ici sous la conduite de Chantal Spillemaecker ne prend sens que par l’attention portée aux hommes et aux femmes qui les ont conçus, créés, utilisés, avant de les abandonner, de les confier ou les vendre à des collectionneurs ou à des musées. Outre les objets et documents de type ethnographique, nombre de véritables œuvres d’art sont présentes dans l’exposition et si leurs qualités plastiques sont indéniables, elles sont avant tout des témoignages de modes de penser et d’appréhender le monde propres à ce peuple. De façon plus précise encore, le présent ouvrage fait appel à des spécialistes qui éclairent les comportements, les modes de vie et les valeurs d’individus confrontés, de très longue date, à des conditions de vie extrêmes : on est donc loin de la lecture purement artistique qui
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domine aujourd’hui, en France tout particulièrement dès lors que l’on aborde des cultures improprement dites « primitives ». Enfin, comme à chaque rencontre que propose le musée avec ces cultures, revient la lancinante question de leur survie. Aucune protection (et surtout pas celle que propose l’Unesco avec le « patrimoine immatériel » ou avec les chartes prônant le respect de la diversité) ne saura préserver ce peuple des effets de la mondialisation culturelle : sous quel prétexte pourrait-on les isoler, les priver de ces rencontres ? Ce sont les Inuit euxmêmes, et eux seuls, qui pourront décider d’entretenir leur langue, de maintenir certaines pratiques culturelles – sans les figer sous forme de spectacle, ce qui doit être possible sur des territoires qui semblent préservés de la surfréquentation touristique ! C’est le vœu que l’on forme en entreprenant ce voyage à leur rencontre dans l’univers arctique.
Kangirsuk, 2010. Winnie Grey au volant avec son fils dans l’amautik (manteau traditionnel avec capuchon pour porter l’enfant).
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Jean Guibal Directeur du Musée dauphinois
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Avant-propos
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voquer la culture des Nunavimmiut (Inuit du Nunavik) amène souvent à notre esprit des images de paysages d’hiver, des individus se déplaçant en traîneau à chiens ou en motoneige, sur des plaines blanches ou des plans d’eau gelés. Les médias montrent encore trop souvent des images stéréotypées des peuples du Nord du Québec. Les Nunavimmiut ont développé une façon d’habiter le territoire et un mode de vie en communauté qui leur sont propres, ainsi qu’une culture aux racines millénaires. Leur imaginaire collectif donne lieu encore aujourd’hui à la production d’un patrimoine artistique d’une grande qualité, apprécié dans le monde entier. Un imaginaire parfois énigmatique, onirique ou tiré d’enjeux du quotidien et des légendes racontées par les anciens.
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En tant que musée d’État, la mission du musée de la Civilisation repose, notamment, sur la conservation des collections ethnographiques nationales portant sur les Premières Nations et les Inuit vivant sur le sol québécois. Que ce soit par le biais d’expositions permanentes ou temporaires, de publications, d’activités éducatives et culturelles ou de projets de recherches, le musée a toujours eu le souci de combattre les préjugés, de participer à la compréhension des enjeux des communautés et de favoriser un dialogue entre autochtones et allochtones. Parmi ces actions, mentionnons la publication Voyage au cœur des collections des Premiers Peuples (2015), les expositions C’est notre histoire. Premières Nations et Inuit du XXIe siècle (depuis 2013), Gravures inuit (2011-2012), Nous les Premières Nations (1998-2012), ou encore notre participation au projet de recherche universitaire Habiter le Nord québécois. Le musée de la Civilisation s’est toujours préoccupé des enjeux sociaux, des problématiques de logement et d’occupation du territoire, de la transformation du mode de vie et de la sédentarisation de certaines communautés, et des défis que peuvent présenter les changements climatiques pour les communautés autochtones vivant sur le territoire québécois. En tant qu’institution centrée sur l’humain, nous portons aussi une attention particulière au patrimoine immatériel des communautés, qui se définit notamment par les traditions orales, les chants, les univers sonores et les danses. Nous nous sommes d’ailleurs dotés de politiques institutionnelles favorisant une étroite collaboration avec les Premières Nations et les Inuit lors de la construction de projets touchant leur culture. Ces façons de faire se concrétisent d’ailleurs dans nos partenariats avec l’Institut culturel Avataq, en leur donnant notamment accès aux collections sous notre responsabilité pour la réalisation de leurs projets de mise en valeur du patrimoine au Nunavik ou ailleurs.
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Favoriser une meilleure connaissance des réalités, des enjeux et de l’histoire de la culture inuit au Québec et à l’étranger est pour nous une action fondamentale. Nous sommes très fiers de collaborer avec l’Institut culturel Avataq et le Musée dauphinois au projet d’exposition Nunavik - En terre Inuit et à la publication qui l’accompagne, en vue d’une meilleure connaissance des communautés du Nunavik et du rayonnement de leur culture. Le Musée dauphinois partage avec nous ce même souci de traiter avec sensibilité la réalité et l’actualité socioculturelles des Inuit, tout en tenant compte de leurs racines et de leur histoire. Par le prêt d’une centaine d’objets ethnographiques, de sculptures et de gravures réalisés par de grands artistes des villages nordiques, nous souhaitons faire rayonner le talent et l’ingéniosité des Nunavimmiut. La présentation de tels témoins culturels en sol européen est pour nous une occasion d’atteindre nos objectifs de valorisation et de diff usion du patrimoine autochtone du Québec. Nous espérons que le public appréciera cette immersion dans l’univers des peuples du Nord québécois et admirera toute la richesse de leur patrimoine culturel. Par cette collaboration fructueuse et amicale nous espérons nourrir et développer l’engouement en Europe pour le patrimoine des diverses communautés du Québec.
Village inuit, 1971. Sculpture en argilite et serpentine par Charlie Sappa.
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Stéphan La Roche Directeur général Musée de la Civilisation
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Avant-propos
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ous, les Inuit, habitons depuis bien longtemps sur notre terre, celle que l’on appelle aujourd’hui Nunavik, « la grande terre ». Nous y avons mené un mode de vie unique, inspiré par les paysages, les animaux, les plantes et même les rochers de notre environnement, et qui nous a poussés à fabriquer des outils et des équipements adaptés à toutes les situations de notre quotidien. Nous, les Inuit, sommes aujourd’hui surtout réputés pour nos talents, qu’il s’agisse de sculpter la stéatite, de chasser, de coudre les peaux ou encore de conter de fabuleuses histoires et de produire des chants de gorge. Mais les Nunavimmiut d’aujourd’hui mettent aussi toute leur fierté à réaliser, grâce aux outils modernes, bien d’autres choses dans divers modes d’expression, art et artisanat, musique, danse, théâtre, cirque, littérature, comme le montrent d’étonnantes images. Jusqu’à l’intrusion du monde moderne dans notre vie, notre identité culturelle n’avait jamais autant été bouleversée. Nous sommes désormais confrontés à la mondialisation, avec ses influences et ses besoins, à l’image d’Internet et du développement des activités économiques, notamment les projets miniers. Dans un tel contexte, nous réalisons qu’il nous faut davantage encore préserver et garder vivante notre langue maternelle, l’inuktitut. Face aux défis culturels actuels, nous devons faire preuve d’innovation pour assurer la transmission de nos traditions et de nos savoirs. Au cours de la première Conférence des aînés du Nunavik a ainsi été créé l’Institut culturel Avataq, dans le but d’avoir une base solide pour faire vivre la culture des Inuit d’aujourd’hui.
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Depuis sa fondation en 1980, l’Institut culturel Avataq s’est imposé comme le leader culturel des Inuit du Nunavik et comme un important centre de ressources sur la culture inuit, au Canada mais aussi bien au-delà. Notre but est d’assurer l’épanouissement de la culture et du langage inuit, aujourd’hui et demain, afin que nos descendants tirent profit du riche héritage que nos ancêtres, dans leur sagesse, nous ont transmis.
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Au cours des années, l’Institut culturel Avataq a créé huit départements et programmes (archéologie, généalogie, bibliothèque et centre d’archives, comités culturels locaux, muséologie, langue inuktitut, communication et publications, secrétariat des arts du Nunavik), afin de répondre à ses différents mandats et dans le but de soutenir, et de mieux faire connaître, la culture des Inuit du Nunavik. Notre collaboration à l’exposition Nunavik. En terre inuit est une autre façon de partager notre culture plus largement et à un niveau international. Nous souhaitons que cet évènement apporte un éclairage sur notre terre et notre culture, et contribue à une meilleure compréhension de notre mode de vie et de nos aspirations pour les générations suivantes.
Pasha Simigak fait la cueillette de ronce petit-mûrier près de son village. Kangirsuk, 2011. Les baies sont les seuls fruits que l’on peut trouver dans la toundra. Depuis toujours les autochtones ont appris à tirer parti de la variété des végétaux, accessibles peu de temps dans l’année.
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Jeannie Nungak Présidente de l’Institut culturel Avataq
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Ceux du Sud Ne savent pas Ce qui se passe Dans les contrées du Nord À la fin des arbres. Extrait de La vie dans le Nord, Beatrice Deer, compositeur-interprète du Nunavik.
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Des Inuit dans les Alpes ? Délaissant quelque temps l’horizon Bien avant que la question de Chantal Spillemaecker la diversité humaine ne fasse alpin, le Musée dauphinois aborde Conservateur en chef au Musée daphinois partie de nos réflexions, Jeanles étendues glacées du Grand Pierre Laurent, conservateur Nord à la rencontre d’une autre en chef du Musée dauphinois, humanité, le peuple inuit de l’Arcprésentait en 1976 une exposition consacrée au tique. Cette civilisation serait-elle comparable à peuple arctique canadien. Intitulée Art esquicelle que des hommes et des femmes développèrent mau contemporain, elle prenait place à Sainteil y a quelque trois mille ans sur les hauteurs des Marie-d’en-Haut à l’occasion de l’ouverture montagnes alpines ?
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uand Eugénie Goldstern, ethnologue de l’arc alpin, vient en 1913 étudier la communauté de Bessans en HauteMaurienne (Savoie), elle parle bien d’« Esquimaux de l’Europe » à propos des habitants 1 ! Et ces fameux « gens de là-haut » qui ont vécu, sur un relief parfois abrupt et jusqu’au début du XXe siècle, « sept mois d’ hiver, cinq mois d’enfer », faisant montre d’ingéniosité et de solidarité, peuvent assurément être rapprochés des peuples de l’Arctique dont la fascinante adaptation au milieu hostile et aux bouleversements de leur mode de vie leur a, eux aussi, permis de survivre, d’espérer et même de prospérer. 1 Goldstern Eugénie, Eugénie Goldstern. La Mémoire et l’Oubli. L’odyssée de l’« étrangère » à Bessans, 2007, Montmélian, La Fontaine de Siloé.
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Paysage glacé dans les environs de Kangiqsujuaq, 2014.
Famille, 1978. Sculpture en stéatite par Echalook Lucassie
d’une chaire de francophonie à l’université de Grenoble. Entre ethnologie et art contemporain, sculptures, dessins et estampes réalisés par des artistes « esquimaux » du Canada se confrontaient à trente-et-une lithographies originales de Matisse inspirées par des masques inuit2 .
Aujourd’hui, le musée s’ouvre une nouvelle fois aux cultures du monde pour emmener un public, que nous souhaitons enthousiaste, vers un ailleurs boréal – tant fantasmé en Occident –, à la rencontre d’une société largement méconnue sous nos latitudes et encore trop empreinte de clichés réducteurs ou d’archaïsmes. La
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2 En 1949, Henri Matisse illustra l’ouvrage de sa fille et de son gendre (le collectionneur d’art Georges Duthuit) Une fête en Cimmérie. Les dessins furent inspirés par les masques esquimaux de la collection que Georges Duthuit acquit à New York en même temps qu’André Breton, Max Ernst et Claude Levi-Strauss, tous passionnés par l’art des Inuit.
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Le Nunavik, à la pointe septentrionale du Québec.
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proximité avec le musée de la Civilisation de Québec – avec lequel le Musée dauphinois a produit l’exposition La Différence en 1996 – nous a permis, pour mener à bien ce projet, d’obtenir des éléments d’une collection exceptionnelle ainsi que d’autres provenant de l’Institut culturel Avataq. Le musée des Confluences de Lyon a mis aussi à notre disposition des documents précieux provenant de ce territoire septentrional. « Découvrir la société inuit, c’est faire un voyage dans l’espace et l’ imaginaire… » dit Michel Côté, ancien directeur général du musée de la Civilisation, à propos de ce peuple autrefois nomade et aujourd’hui sédentarisé au Nunavik, région arctique du Québec. Le musée de la Civilisation conserve une collection inuit considérée comme l’une des plus importantes au Canada. Composée de milliers d’objets ethnographiques, de sculptures et d’œuvres graphiques, elle a été rassemblée par les conservateurs depuis un demi-siècle dans une démarche scientifique, afin de mieux comprendre les premiers peuples d’Amérique du Nord. L’Institut Avataq (du nom symbolique du flotteur relié au harpon utilisé autrefois par les chasseurs pour ne pas perdre leur proie) assure, quant à lui, par ses collections archéologiques et ethnographiques puis ses manifestations culturelles, la sauvegarde et l’épanouissement de la culture des autochtones. Les collections rassemblées pour cette exposition, en grande partie pour la première fois en France, documentent ainsi la vision du monde d’un peuple arctique et consignent la mémoire de communautés qui ont été radicalement transformées au cours du siècle dernier.
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Aivirtuuq, 2008. Charlie, Joanasie et Aquujaq jouent aux cartes dans un camp à Aivirtuuq, au sud de la communauté de Kangiqsujuaq.
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Inuit du Nunavik Le terme « Esquimaux » ou « Eskimo », emprunté aux Amérindiens, ne signifie pas « ceux qui mangent cru » comme on l’a sans cesse répété mais, selon les linguistes, « ceux qui ne parlent pas la même langue ». Il fut longtemps utilisé, de façon peu respectueuse, par les Occidentaux. Mais le peuple qui vit sur les côtes arctiques depuis l’extrémité orientale de la Sibérie jusqu’au Groenland a choisi – lors de la création du Conseil Circumpolaire Inuit en 1977 – de le remplacer par l’ethnonyme invariable Inuit (pluriel d’Inuk), qui signifie « êtres humains » dans leur langue, l’inuktitut. En accord avec les Nunavimmiut, habitants du Nunavik, nous respectons cet usage dans la publication. Il ne s’agit donc pas d’une faute d’orthographe s’il n’y a pas de « s » à Inuit ! Ce terme tend à rapprocher tous les groupes inuit qui reconnaissent posséder une histoire, une culture et une représentation du monde communes.
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Cette exposition étant réalisée en collaboration avec le musée de la Civilisation de Québec, nous n’avons retenu comme « terre inuit » que le Nunavik. Autrefois appelé Nouveau-Québec, Nunavik (« la grande terre habitée ») est le nom attribué à un territoire québécois aussi vaste que la France. Situé au nord du 55e parallèle entre la baie d’Hudson, le détroit d’Hudson et la baie d’Ungava, il est composé de lacs sculptés par les glaciers, de banquise, de toundra et de la chaîne montagneuse de Torngat (où se rencontrent des esprits effrayants…). La localité la plus septentrionale est Ivujivik, où se trouve l’une des plus hautes marées du monde. En été, le soleil brille à minuit. À l’automne, la toundra se pavoise de couleurs flamboyantes avant l’arrivée d’un hiver rigoureux (moyenne de – 24 °C) dans la grande nuit polaire. Après des décennies de colonisation par les Européens et les Canadiens, comme une réappropriation symbolique des terres, tous
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les sites retrouvent leur appellation vernaculaire. certaines populations et différentes ethnies, Comptant un peu plus de 12 000 habitants, les même si ce terme a reçu au fil du temps une Nunavimmiut vivent dans quatorze villages connotation péjorative, voire raciste postcoinstallés sur le littoral. Seules quatre commu- loniale. Alors que les Anglo-Saxons parleront nautés comptent plus de 1 000 personnes, dont d’« aborigènes » pour dénommer les populations Kuujuuaq, la capitale régionale avec 2 375 habi- d’Australie et de Nouvelle-Zélande particulièretants. Aucune route n’existe en provenance du ment. Malgré les différences culturelles d’usage Sud. On accède au Nunavik uniquement par et les préjugés, tous ces termes sont synonymes bateau, quelques mois seulement quand la mer et recouvrent la même réalité. n’est pas gelée, ou par les airs grâce aux vols First Air ou Air inuit. Dans les villages, la motoneige Des espaces très convoités a pris la succession du traîneau à chiens et sur « Deux ou trois marchands […] équipèrent l’eau, le bateau à moteur celle du kayak. quelques vaisseaux et établirent une colonie dans le Canada, pays couvert de neiges et de glaces huit Autochtones mois de l’année, habité par des barbares, des ours La Déclaration des Nations Unies adoptée en et des castors », écrivait Voltaire en 1753 dans 2007 par le Conseil des Droits de l’homme son Essai sur les mœurs et l’esprit des nations ! Les ne définit pas précisément ce qu’est un peuple premiers Européens en contact avec les Inuit ont autochtone (du grec aûtos, « même », et khthôn, été les Vikings (peuples norrois du Groenland) « terre »). Mais des éléments fondamentaux vers l’an mille. Ce n’est cependant qu’à partir du caractérisent néanmoins cette notion qui sont : XVIe siècle que l’existence des Inuit fut portée la continuité historique des premiers habi- à l’attention des Occidentaux lorsque arrivèrent tants d’un territoire avant sa conquête ou sa les baleiniers, puis plus tard les navigateurs à colonisation et la détermination à sauvegar- la recherche d’une route entre l’Atlantique et der des caractéristiques culturelles face à une le Pacifique par le nord de l’Amérique, ou les société dominante. Elle spécifie aussi que ces explorateurs à la conquête du Pôle. Puis ce fut peuples ne peuvent être expulsés et qu’ils ont au tour des missionnaires d’atteindre ces terres, droit aux ressources naturelles situées sur leurs pour évangéliser les « égarés ». Les marchands terres. Dans la continuité des travaux de Louis- de fourrures, dont la fameuse Compagnie de la Edmond Hamelin de l’université Laval, qui fut Baie d’Hudson et surtout, au Nunavik, la société le pionnier de la recherche nordique et le père du française Revillon Frères, sont aussi des acteurs concept d’autochtonie (après celui de nordicité), importants de l’histoire des peuples nordiques. c’est le substantif « autochtone » qui est large- Par cette intrusion occidentale, le mode de vie, ment utilisé au Québec pour désigner les Inuit l’organisation sociale et l’économie des popuet les Amérindiens. lations de l’Arctique de l’Est canadien subiront En Europe, on parlera plus généralement, en ce dorénavant des transformations irréversibles. Il qui concerne le continent africain ou d’autres est à souligner que la « découverte » d’une grande régions du monde, d’« indigènes » pour qualifier partie de l’Amérique du Nord par les différentes
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Publicité parue dans L'Illustration, 10 octobre 1925.
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expéditions est liée à l’essor de la traite la multiplication des des fourrures et la missions religieuses concurrence entre la et à l’implantation compagnie britandes postes de traite nique et Revillon de fourrures. Depuis Frères. le XVIIIe siècle, la France importait des fourrures d’Amérique du Revillon Frères (1899-1936) Nord. Chapellerie, mégisserie, chamoiserie et et le film Nanouk l’esquimau tannerie dépendaient de la faune arctique, dont Après l’ouverture de succursales à Londres et à les castors, les renards, les ours et les loups. Ce New York, le fourreur parisien Victor Revillon commerce va permettre les premiers échanges – « gentleman trappeur au Nouveau Monde » – avec les populations autochtones : vaisselle, fer, développe en 1901 une chaîne de comptoirs textile, nourriture et surtout munitions, tabac dans tout le Nord canadien sur le modèle de et alcool contre les peaux et l’artisanat en stéa- la Compagnie de la Baie d’Hudson, pour achetite ou en ivoire. La pratique du piégeage impo- ter les fourrures directement aux Inuit. Des sée aux Inuit par les compagnies de fourrures bateaux à voiles assurent les communications va bouleverser les techniques traditionnelles de entre les comptoirs de traite, créant les premiers chasse et surtout les relations, fondamentales ports et les premiers villages sur le littoral de la pour la culture et la spiritualité inuit, entre baie d’Hudson et de la baie d’Ungava. Les bâtiles humains et les animaux. De chasseurs, ments Revillon Frères s’installent près des igloos ils deviennent trappeurs. Le fait de privilé- et les familles du personnel cohabitent avec les gier certaines espèces (dont les renards) est en Inuit et les missionnaires. Mais à cause de la rupture totale avec une conception de la chasse Première Guerre mondiale et de la chute du prix qui, elle seule, permettait à chaque famille de des fourrures en 1920, la société doit fusionner se nourrir et se vêtir. La Compagnie de la Baie avec la Compagnie de la Baie d’Hudson et cesse d’Hudson, qui exploitait tout le territoire du toute activité en 1936. La fin brutale de cette Nunavik, ouvre un premier comptoir dès 1830 économie engendre pour les Nunavimmiut des mais c’est le début du XXe siècle qui marque épisodes tragiques de famine.
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En 1921, Revillon Frères commande auprès du de « l’Esquimau » et le regard occidental sur le célèbre cinéaste américain Robert J. Flaherty Grand Nord. De « sauvage », l’Inuk devient un un film nommé Nanook of the North pour faire primitif « honorable », sachant protéger et nourdécouvrir au grand public la vie d’une famille rir sa famille. Paul-Émile Victor dans les années inuit. Le tournage a lieu à Inujjuaq, sur le litto- 1940 renouvellera cette approche. ral de la baie d’Hudson, où la société possède un comptoir. Flaherty séjourne un an auprès Graver des histoires. d’une famille et veut témoigner par ces prises L’art inuit moderne de vue de ceux « qui possèdent moins de ressources Aux côtés d’objets remarquables témoignant de la que n’ importe quel homme dans le monde et dont culture matérielle de ce peuple autrefois nomade, la vie est une lutte constante contre la famine et plus de soixante-dix œuvres créées par trentele climat le plus rigoureux du monde ». Pendant cinq artistes sont exposées au Musée dauphile tournage, les Inuit reçoivent des fourreurs nois. Sculptures, estampes et tapisseries en peau français une subvention conséquente qui les mettent à l’honneur le travail de plusieurs artistes libère de leurs obligations de déplacements du Nunavik reconnus au niveau international, saisonniers pour se nourrir et se vêtir. Ils sont dont Annie Pootoogook, Lucy Tasseor, Tivi Etok, persuadés que cette pratique va se renouveler… Davidialuk Aluasaq Amittuq et d’autres plus Le 11 juin 1922, le film recueille à New York contemporains comme Mark Tertiluk, Mattiusi un immense succès et il est considéré main- Iyaituk ou encore Alec Lawson-Tuckatuc. La tenant comme le premier film documentaire. collection reflète ainsi une multiplicité de voix et Les glaces qui sont servies lors de la projection permet d’appréhender, entre héritage culturel et prennent le nom d’« esquimaux » ! Ce film va nouveaux imaginaires, l’évolution de la société fixer, tant en Amérique qu’en Europe, l’image inuit des années 1960 à aujourd’hui.
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Jeune fille esquimaude et Mère et son enfant. Robert Flaherty (1889-1951), passant beaucoup de temps avec les Inuit lors de son tournage et soucieux de montrer des hommes et des femmes « authentiques », prit de nombreuses photographies en 1922.
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Le cratère des Pingualuit près des communautés de Kangiqsujuaq et Salluit. Résultant de l’impact d’une météorite, parfaitement circulaire, contenant une eau très pure restée sous la glace durant des milliers d’années, il est l’attraction touristique du parc national des Pingualuit créé en 2004.
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L’art nordique fascine et intrigue toujours. Des galeries d’art inuit se sont installées tant en Amérique du Nord qu’en Europe tandis que de grands musées ont constitué des collections de référence. Florence Duchemin-Pelletier et Aurélie Maire montrent par leur analyse l’originalité d’œuvres réalisées par des artistes de renom, mais aussi le sens des représentations qui témoignent du changement social. Depuis les petits kayaks en ivoire servant de monnaie d’échange avec les baleiniers jusqu’aux sculptures en stéatite plus volumineuses ou aux dernières créations à partir de matériaux hybrides, chaque œuvre parle et tente de réconcilier le passé et le présent d’une culture ancestrale. L’exposition raconte les premières coopératives de sculpteurs et la reconnaissance d’une production qui doit assurer aux communautés des ressources financières, jusqu’à l’émergence de créations plus personnelles d’artistes
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qui revendiquent une identité entre deux mondes en s’interrogeant sur le devenir de leur société. La pierre ou l’estampe, toujours, nous emportent vers un imaginaire où s’entremêlent le surnaturel, l’histoire et la culture d’un peuple. Frédéric Benjamin Laugrand, quant à lui, synthétise parfaitement la complexité du paysage religieux, entre christianisme et chamanisme, qui caractérise le Nunavik contemporain. Il démontre également que la chasse de subsistance demeure au cœur de la société inuit, même si ces pratiques peuvent choquer et engendrer une incompréhension de la part du monde occidental. Les œuvres font aussi découvrir la singularité de la langue inuit dont les caractères s’inscrivent sur la pierre ou le papier. Marc-Antoine Mahieu, linguiste d’inuktitut, en explique l’origine liée à l’évangélisation, et les usages d’aujourd’hui face à l’hégémonie de l’anglais.
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Enjeux contemporains en Arctique, de la Sibérie au Groenland, en Il aurait été malvenu de figer l’histoire des montrant tous les défis et les dangers qui se Nunavimmiut dans un passé stéréotypé. Si les présentent à eux : bouleversements climatiques, iglous se multiplient dans le décor des stations exploitation par d’autres États des richesses huppées des Alpes, ils ne font plus partie inté- naturelles, ouverture de nouvelles routes marigrante de l’imagerie du Grand Nord. Aussi times bientôt libérées des glaces… Comme les avons-nous invité les chercheurs spécialistes habitants le proclament aujourd’hui haut et des questions nordiques pour qu’ils nous livrent fort, ces vastes terres ne sont pas vides mais bien un regard sans nostalgie sur des communautés occupées par des hommes et des femmes qui qui ont basculé dans la modernité en quelque veulent perpétuer leur mode de vie, attendent soixante ans, sur des espaces en mutation accé- le respect de la part des divers gouvernements lérée. Parmi eux, Béatrice Collignon, auteure dans le cadre des projets de développement d’un ouvrage de référence sur les Inuit, décrit et, surtout, veulent débattre de leur avenir. Le précisément la maisonnée inuit et la symbo- leader inuit Tumassi Qumaq affirmait : « Je veux lique de l’espace domestique confrontées aux que les Inuit soient libres de nouveau. » nouveaux habitats en bois, tandis que Véronique En 2015, prenant dorénavant en mains leur Antomarchi évoque le difficile statut des jeunes, propre destinée, les Nunavimmiut rédigent la à cheval entre deux rives et qui risquent de « Déclaration des Inuit du Nunavik. Fiers, unis et déterminés… ». Si le fameux chant de gorge « couler à pic sous la glace vive »3 . katajjaq, issu de la tradition orale inuit, se superPour appréhender les revendications des peuples pose aujourd’hui, entre hip-hop et électro, aux inuit autour du cercle arctique, Caroline Hervé performances musicales contemporaines des apporte ici un éclairage pertinent sur l’histoire DJ du Nunavik, ce n’est pas pour rappeler un récente du processus d’autonomie gouverne- passé « folklorisant » mais bien pour se tourner mentale du Nunavik. Cécile Pelaudeix dresse vers l’avenir et inventer sans cesse de nouveaux un portrait des nouvelles institutions politiques modes d’expression pour défendre ceux que l’on a cherché à acculturer. 3 Odile Tremblay dans La Presse, Montréal, 11 février 2016.
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Le Grand Nord et le mythe romantique
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Les Européens approchèrent les côtes arctiques dès la fin du XVIe siècle mais il fallut attendre la deuxième moitié du XVIIIe siècle pour qu’émerge une véritable fascination pour cette terra incognita. Le désir de découvrir un passage du NordOuest vers l’Orient entraîna de nombreux explorateurs à la conquête de ces étendues glacées. Mais les premiers voyages et leurs découvertes n’affaiblirent en rien la séduction exercée par ces contrées sur le public. Répondant à cette demande, des ouvrages racontant ces histoires — ou évoquant simplement le milieu arctique – furent édités, souvent illustrés de gravures et d’esquisses.
Les teintes chaudes, terreuses, du premier plan emmènent le regard vers l’élément principal de la composition, cette montagne chaotique de lames de glace aux couleurs claires, lumineuses et froides, qui crève violemment l’étendue plate (et se répète de loin en loin). Un paysage hors du temps, pétrifié, qui déroule à l’infini son uniformité, mais aussi un univers éphémère et mouvant. La force de cette œuvre réside dans le contraste entre l’immensité glacée à l’arrière-plan et la puissance des détails au premier plan, la texture des blocs de banquise fracassés et de la neige qui les recouvre par endroits. Le peintre exalte ainsi une nature aussi sublime que menaçante, aussi hostile que fascinante.
À
Dans ce foisonnement de formes où il s’égare d’abord, l’œil finit par distinguer une poupe de bateau, à demi engloutie, et quelques bribes de mâts, disséminées dans l’enchevêtrement des blocs. C’est alors que se dévoile le tragique de la scène. Un navire a fait naufrage dans ce désert glacial, entraînant la mort de son équipage. L’épave serait-elle alors le vrai motif de cette œuvre ?
cette époque, l’art connaissait une évolution. Délaissant l’académisme et le classicisme allégorique, le védutisme 1 et la reproduction topographique de la nature, des artistes travaillaient à renouveler la représentation du paysage. Or l’Arctique répondait à cette volonté d’innovation. Pour un œil habitué à des paysages accessibles, humanisés et aux formes souvent attendues, cette nature inviolée, ces vastes terres sauvages aux contours fluctuants représentaient un véritable défi pictural. Qui plus est, ces œuvres comblaient la curiosité d’un public avide de récits d’exploration. Une importante production vit alors le jour, mais la postérité a surtout retenu l’œuvre emblématique d’un artiste, Caspar David Friedrich (1774–1840) : La mer de glace ou Le Naufrage. Réalisé entre 1823 et 1824, ce tableau représente un paysage de glaces fracturées et escarpées, pointant vers le ciel, tandis que le lointain se perd dans un horizon balayé par les vents. 1 Genre pictural venu d’Italie ayant pour thème la représentation de paysages urbain.
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Or il n’en est rien. En ce temps de bouleversements dans l’esthétique artistique, cette épave est prétexte à une représentation de la nature. Le souci du détail apporté autant aux blocs brisés qu’à la coque du navire (ce qui efface toute hiérarchie entre eux), conforte cette idée. Tout comme la taille monumentale de l’amas de glace, qui s’impose et domine la scène au centre de la toile, la frêle carcasse étant reléguée sur le côté. Le peintre (à l’instar du mouvement romantique en général) signifie par ce biais que, loin de servir de simple cadre à une scène historique, héroïque ou mythologique, la nature est un sujet estimable en soi. Pourtant, si le paysage est ici le sujet principal, il
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dissimule un message, un thème sous-jacent, celui de la solitude et de la finitude humaine. Car Friedrich pousse le spectateur à la méditation en jouant sur divers éléments de la composition. À commencer par les couleurs. Ici, la dominante chromatique est le bleu, or, selon la théorie des couleurs de Goethe (17491832)2 , le bleu renvoie au dépouillement, à l’ombre, à la faiblesse ou encore à l’éloignement. Par ailleurs, la fragilité du navire, brisé comme fétu de paille, rappelle que l’homme, malgré sa science et ses techniques, ne peut résister à 2 Le Traité des couleurs, Johann Wolfgang von Goethe, traduction française d’Henriette Bideau, Paris, éditions Triades, 1986.
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la puissance de la nature. Enfin, la lumière tombant du zénith de la toile sur l’amoncellement central évoque le rai de lumière divin de la tradition iconographique religieuse. Des éléments qui dévoilent la morale de cette composition. Le peintre pointe ici la vanité de l’homme qui croit pouvoir dominer la nature et le monde. Ce paysage austère et tragique renvoie donc à la navigatio vitae, cette métaphore stoïcienne de la vie considérée comme un voyage en mer sur une barque malmenée par les éléments, qui finit par se briser sur des écueils, engloutissant ses passagers dans l’abîme. Et l’Arctique, dont on a longtemps cru qu’il dissimulait l’Eden au cœur
Caspar David Friedrich, La mer de glace, huile sur toile, 1823–1824 Coll. Kunsthalle, Hambourg 25
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Banquise du pôle arctique. Illustration extraite de La terre et les mers, 1864, par Louis Figuier. Gravure de Jules Huyot d’après un dessin de Louis Lebreton.
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de ses glaces, n’est-il pas un cadre parfait ?... Cette mise en perspective de l’être humain face à un environnement qui le dépasse et l’écrase est un thème romantique par excellence, traité par d’autres artistes dans des paysages de montagne ruiniformes, notamment, ou sur des océans déchaînés. Le contexte de la création de cette œuvre relève d’un autre aspect de la production romantique : le travail du paysage par l’imagination et non plus systématiquement d’après nature. Il est évident que le peintre ne s’est jamais rendu dans le Grand Nord, pas plus qu’il n’a assisté à un tel naufrage. Il s’inspire de la débâcle sur l’Elbe, qui charrie des blocs de glace à la fin de l’hiver, ainsi que de récits narrant la disparition de bâtiments avec leurs équipages au cours de la conquête de ces contrées nordiques.
En rupture avec l’académisme, le courant romantique s’articule autour de plusieurs critères : importance de la couleur et de la touche, et surtout intérêt pour le drame, la passion, la mort, l’imaginaire, les sentiments, l’expressivité, l’âme, le mysticisme, l’individualisme, la fragilité humaine... Un courant mouvant qui cherche à franchir les limites de l’art connu, à toujours s’aventurer plus loin en territoire inconnu, sauvage et mouvementé. À l’image du Grand Nord, qui met l’homme à l’épreuve, lieu par excellence de l’exploration, avec ses doutes et ses peurs, mais aussi les espoirs d’une humanité avide de découvertes et de connaissances, en quête de nouveaux héros pour nourrir son imaginaire. ■
Marion Radwan Étudiante en master 2 histoire de l’art, université Grenoble-Alpes
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À la recherche du passage du Nord-Ouest, abandon par le capitaine Parry et son équipage du navire prisonnier des glaces en 1824. Illustration extraite de La terre et les mers, 1864, par Louis Figuier. Gravure de Minne d’après un dessin de Valentin Foulquier.
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Le 7 avril 2012, les membres du Regroupement citoyen le Moulin à paroles organisaient à Montréal l’évènement “NOUS ?”. Douze heures durant, quelque soixante-dix personnalités des milieux artistiques, universitaires, syndicaux et scientifiques de tout le Québec s’exprimaient devant un large public pour déclencher la réflexion autour de l’identité québécoise et la notion de démocratie.
Lisa Koperqualuk, Nunavimmiuk, anthropologue et directrice de la communication de la Fédération des coopératives du Nouveau-Québec, s’exprime au nom de sa nation.
Lucassie Kanarjuak de la communauté d’Ivujivik, 2015.
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Nous ? Mes ancêtres
sont arrivés il y a mille ans. Ils avaient choisi le froid, les grandes étendues arctiques, la toundra à perte de vue, et ils se sont établis sur le territoire que nous appelons aujourd’hui le Nunavik. Au Nunavik, nous avons côtoyé les Dorsétiens, les Vikings, les Cris, les Naskapis et les Innus. Nous avons aidé les explorateurs et les baleiniers à survivre en hiver. Nous avons accepté les missionnaires et participé au commerce des fourrures avec la Compagnie de la Baie d’Hudson et Revillon Frères.
Au moment où la Terre de Rupert a été vendue au Canada, en 1868 (voir chronologie, p. 142), mon arrière-grand-père Alassuaq naissait. Sans le savoir, son territoire est tombé sous la juridiction du Canada lorsque la province de Québec s’est étendue vers le Nord en 1912. En 1914, mon grand-père Koperkaluk est né. Comme tous les Inuit de l’époque, il est devenu officiellement citoyen canadien en 1924. Par la suite, pendant près de trente ans, le statut des Inuit a fait l’objet de débats entre les gouvernements. En 1932 par exemple, le Québec stipule que les Inuit doivent être considérés comme des Indiens et à ce titre devraient se trouver sous la responsabilité financière du ministère fédéral des Affaires indiennes. Durant ces années, nous connaissons la sédentarisation, la famine, la conversion au christianisme, la déportation vers le haut Arctique, les maladies, comme la tuberculose, l’assimilation, la vie en pensionnat dans les écoles fédérales et l’abattage de nos chiens de traîneau. Nous sommes identifiés à l’aide d’un jeton
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que nous portons au cou. Était-ce la fin de notre histoire ? Nous avons créé des coopératives, négocié des ententes lors de la Convention de la Baie James et, en 1983, le gouvernement de René Lévesque reconnaissait les onze nations autochtones du Québec. Une nouvelle ère de relations commence alors. Au cours de leur histoire, les Inuit ont embrassé ouvertement les autres cultures et ont participé à leurs projets. Et maintenant, c’est le Plan Nord. Espérons que les expériences vécues nous aideront à changer le cours de l’histoire. C’est à nous, peuples autochtones et non autochtones du Nord, de faire partie intégrante de ce Plan et de s’assurer du respect de notre milieu de vie et de nos cultures.
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Nous, les Inuit, parlons encore tous les jours notre langue, l’inuktitut, et notre mode de vie s’appuie encore sur nos valeurs fondamentales. La chasse pour se nourrir demeure au centre de notre identité. N’en déplaise à certains ou certaines. Nos chiens de traîneau sont revenus, la chasse à la baleine boréale a recommencé en 2008 après cent ans d’arrêt. Le phoque demeure l’animal de prédilection, les festins communautaires se poursuivent et nous partageons une spiritualité dans laquelle les esprits existent vraiment. À l’instar des Québécois, notre culture est bien vivante et bien distincte. Comme vous, nous aimons rire, jouer et danser. Nous voulons faire partie du pays d’aujourd’hui et de demain.
Texte reproduit avec l’autorisation de Lisa Koperqualuk et du Regroupement citoyen le Moulin à paroles.
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Lizzie Sivuaraapik de la communauté de Puvirnituk, 2015. Jaaka Kumakuluk de la communauté de Salluit, 2015.
Norman Snowball de la communauté de Kangiqsualujjuaq, 2015. Livi Arnaituk de la communauté de Kangiqsujuaq, 2015.
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Contributions et remerciements L’exposition Nunavik. En terre inuit, présentée au Musée dauphinois du 24 mars 2016 au 2 janvier 2017 ainsi que l’ouvrage qui l’accompagne ont été réalisés en partenariat avec les Musées de la Civilisation de Québec et l’Institut culturel Avataq sous la direction de Chantal Spillemaecker, conservateur en chef au Musée dauphinois. Avec la collaboration de stagiaires : Léonor Boni, étudiante en MBA2, direction de projets culturels à l’E.A.C. de Lyon et Marion Radwan, étudiante en master 2 professionnel histoire de l’art, université Grenoble-Alpes.
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Réalisation technique : Armand Grillo, Jean-Louis Faure, Véronique Barale, Pierre-Alain Briol, Marius Delaney, Frédéric Gamblin, Dorian Jodin, Benoît Montessuit, Daniel Pelloux, Sébastien Tardy Transports : Félix Isolda, Antoine Musy Collections, documentation : Fabienne Pluchard, Éloïse Antzamidakis, Elvire Bassé, Aurélie Berre, Pascal Chatelas, Antoine Musy Photographie, vidéo, numérisation : Denis Vinçon, Jean-Max Denis Communication et médiation : Agnès Jonquères, Patricia Kyriakidès Service éducatif : Sabine Lantz Gestion administrative et financière : Agnès Martin, Nora Grama, Frédéric Gélabert, Claudine Croisat Accueil du public : Fahima Bouchankouk, Rachid Dabaji, Eric van Bochove Scénographie de l’exposition : Valérie Dimirdjian et Isabelle Chameroy de l’agence Buildings and love Conception graphique : Eric Leprince et Camille Flammier de l’agence Super Regular Impressions : Chevillotte Visuel et communication graphique : Atelier Hervé Frumy Relecture de l’ouvrage : Dominique Vulliamy Traductions en inuktitut : Minnie Napartuk à Avataq et Marc-Antoine Mahieu à l’INALCO Transport des collections : Sociétés Affiliated et Artrans L’équipe du musée s’est entourée d’un conseil scientifique constitué de : Véronique Antomarchi, enseignante à l’IUT Paris-Descartes, chercheure associée au CERLOM (INALCO) et affiliée au CANTHEL , université ParisDescartes ; Béatrice Collignon, professeur, département de géographie, université Bordeaux-Montaigne ; Michel Côté,
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ancien directeur général des Musées de la Civilisation de Québec ; Florence Duchemin-Pelletier, pensionnaire du programme « Art et mondialisation » au département des études et de la recherche, Institut national d’histoire de l’art (INHA , Paris) ; Louis Gagnon, conservateur et directeur du département de muséologie d’Avataq ; Jean Guibal, conservateur en chef et directeur du Musée dauphinois ; Vincent Giguère, conservateur au Musée de la Civilisation de Québec ; Caroline Hervé, professeure associée, UER sciences du développement humain et social, université du Québec en AbitibiTémiscamingue, chercheure associée au Centre interuniversitaire d’études et de recherches autochtones, université Laval ; Marie-Paule Imberti, chargée des collections des Amériques et du Cercle Polaire au Musée des Confluences ; Lisa Koperqualuk, anthropologue et directrice de la communication de la Fédération des coopératives du Nouveau Québec ; Frédéric Benjamin Laugrand, professeur au département d’anthropologie de l’université Laval, Québec, Canada ; Jean Lilensten, directeur de recherche au CNRS à l’Institut de Planétologie et d’Astrophysique de Grenoble ; MarcAntoine Mahieu, maître de conférences d’inuktitut à l’INALCO et Lacito, université Sorbonne Paris-Cité ; Aurélie Maire, chargée de cours, département d’anthropologie, université Laval, Québec, Canada ; Jean Mouette, technicien et cinéaste à l’Institut d’astrophysique de Paris ; Cécile Pelaudeix, professeur à Aarhus university, Danemark ; Franck Philippeaux, conservateur au Musée dauphinois ; Dominique Raynaud, directeur de recherche émérite au CNRS, glaciologue et paléoclimatologue à l’université Grenoble-Alpes ; MariePaule Robitaille, conservatrice honoraire des collections des Premiers Peuples au Musée de la Civilisation de Québec ; Jean Tanguay, chargé de recherche au Musée de la Civilisation ; Katy Tari, directrice des collections aux Musées de la Civilisation de Québec.
L’exposition a bénéficié des contributions de : Hélène Bernier, directrice des expositions et de l’international aux Musées de la Civilisation de Québec ; Marie-Françoise Bois-Delatte, conservateur en chef et Sandrine Lombard, conservateur à la Bibliothèque municipale de Grenoble ; Frédéric Bove, délégué général du Centre Jacques Cartier, Lyon ; Annick DorionCoupal aux Musées de la Civilisation de Québec ; Lyse et Raymond Brousseau, Galerie d’art inuit Brousseau et Brousseau à Québec ; Denise Campillo, Montréal ; Philippe Candegabe, assistant de conservation au Museum de Grenoble ; Sylvie Côté-Chew et Leona Kober à Avataq ; Joëlle Chiche, responsable de l’unité scientifique au Museum de Grenoble ; Pascale Cosse, attachée culturelle à la Délégation générale du Québec à Paris ; Pierre Dutrievoz ; Martine Gascon, conservatrice adjointe à Avataq ; Nelly Galbois, régisseur des collections au Musée des Confluences ; Olivier Garcin, chargé de la photothèque au Musée des Confluences ; PhilippeAntoine Hamel, conservateur et coordonnateur aux prêts au Musée de la Civilisation de Québec ; Bruno Jacomy, conservateur en chef au Musée des Confluences ; Jean Mouette, technicien et cinéaste à l’Institut d’Astrophysique de Paris ; Fabrice Nesta, ESAD ; Anne-Marie Pellarin ; Sébastien Ricard, Montréal ; Maryse Saraux, Galerie Art Inuit Paris.
Le Musée dauphinois est un service du Département de l’Isère. Que tous ceux qui ont apporté dans cette aventure en France et au Québec, leurs contributions, leur regard, leurs savoirs ou leurs collections trouvent ici l’expression de notre profonde gratitude.
Des musées et des particuliers ont généreusement prêté leurs collections : Musées de la Civilisation de Québec : Stephan La Roche, directeur général ; Institut Culturel Avataq, Montréal : Robert Fréchette, directeur ; Musée des Confluences, Lyon : Hélène LaffontCouturier, directrice ; Museum de Grenoble : Catherine Gauthier, conservateur en chef ; Robert Fréchette, photographe ; Dan Ramaën, photographe ; Collection Tairraz : Caroline TairrazPesenti et Valérie Tairraz-Soissons ;
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978-2-35567-106-7
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Musée dauphinois
L’art inuit fascine et intrigue. Depuis les miniatures en ivoire jusqu’aux sculptures en stéatite ou à partir de matériaux hybrides, chaque œuvre porte un imaginaire où s’entremêlent surnaturel, culture et changement social d’un peuple. Ces vastes terres sont occupées par des autochtones qui veulent prendre en main leur destinée tout en perpétuant leur mode de vie. Les spécialistes des questions nordiques livrent ici leur regard sur ces communautés qui ont basculé dans la modernité en une soixante d’années à peine. Le chant de gorge katajjaq, issu de la tradition orale inuit, mixé aujourd’hui au rap et au hip-hop symbolise leur parfaite adaptation au changement et leur résistance aux convoitises du monde occidental.
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Le Musée dauphinois explore les patrimoines les plus proches comme, de temps à autre, les cultures venues d’ailleurs. Il nous conduit cette fois dans le Grand Nord à la rencontre d’un peuple inuit de l’Arctique québécois. La collaboration avec le prestigieux Musée de la Civilisation de Québec, l’Institut Avataq – organisme culturel des Inuit du Nunavik – et le Musée des Confluences de Lyon a permis de rassembler des documents et des œuvres rarement, sinon jamais, présentés en France. Cet ensemble tente de documenter la vision du monde d’un peuple autochtone de l’Arctique et consigne la mémoire de communautés radicalement transformées au cours du siècle dernier.
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