S'engager : Vers une architecture éthique et durable

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Nicolas VERNET

S’ en gag e r Vers

une architecture éthique et durable

Rapport d’études encadré par Anne Monique Bardagot École nationale supérieure d’architecture de Grenoble | 2010


Sommaire

Revenir à l’origine Chronologie

S’approprier les outils de l’architecture Découvrir, Observer, s’ouvrir Analyser Situer Expérimenter Projeter

Vers une architecture durable Devenir un architecte engagé Dialogue et co-conception Ethique

Envisager le futur Bibliographie | Conférences Curriculum vitae


08 10 16 20 22 26

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Revenir à l’origine


D

urant cette belle période d’insouciance qu’est l’enfance, il y a toujours une personne qui en vient à interroger sur des peurs d’adulte et à poser la question fatidique :

« Qu’aimerais tu faire comme métier quand tu seras plus grand? »

Aussi loin que je me souvienne, ma réponse est toujours restée la même. Catégorique, je répondais :

« Je veux être Architecte. »

De cette enfance, je me rends compte avec le recul que de nombreux éléments font écho à la façon dont je me vois exercer ce métier d’architecte. Habitant dans une petite maison perdue au milieu de la forêt provençale, j’ai pris goût à être entouré par la nature, et à la préserver. Enfant unique, je suis rapidement allé vers l’autre, afin de connaitre et de partager ; passionné, j’ai rapidement pratiqué des activités variées, notamment le dessin que je n’ai jamais abandonné ; curieux, j’ai été comblé et émerveillé par les nombreux voyages entrepris avec mes parents, le plus souvent avec sac à dos et guide du Routard à la main. En fin de collège, la vocation ne s’est pas émoussée. Lorsqu’on nous demande d’effectuer un stage en entreprise, je cherche alors une agence d’architecture pour me confronter enfin aux réalités professionnelles afin de comprendre mon attirance vers ce métier particulier. Un architecte indépendant accepte de m’accueillir, et cette première approche concrète finit de me convaincre. En Lycée la question de l’orientation se pose plus sérieusement, et un doute survient alors : la continuité d’un BAC Scientifique serait-elle, comme on aime le penser, le cursus ingénieur? Des notes en baisse par désintérêt de l’abstraction mathématique me conduisent à réfléchir de nouveau sérieusement sur mon avenir. Un besoin de réflexion mais aussi de concret, de créativité, et de pluridisciplinarité me ramène tout droit... à l’origine : l’Architecture. C’est alors une évidence, un choix clairement exprimé et assumé. Commence une course de fond de plusieurs mois. Premièrement, pour le plaisir mais aussi en vue des concours d’entrée, je reprends des cours de dessin d’observation. Deuxièmement, étant conscient d’avoir un dossier scolaire moyen, j’envoie des dossiers d’inscription dans 14 écoles, passe 3 concours, pour finalement accéder à l’école qui avait ma préférence, celle de Grenoble.


1ère année

2ème année

Le geste architectural comme outil de la conception

Grands ateliers de l’isle d’abeau

Studio Liveneau

Chronologie

Conférence de Jacques Ferrier

Premier projet de conception

Semaine introductive | Patrice Doat

Concours d’entrée de l’ENSAG

Voyages


3ème année

Studio David

Conférence de Françoise-Hélène Jourda

Stage en agence | Détry & Lévy

Plage de Paladru

Diplome de licence Année d’échange |McGill university | Montréal

Studio Blachot - Adeline

Master 2

Stage ouvrier | Bati-nature

Conférence de Anna Heringer

Lecture de Construire autrement, de Patrick Bouchain

Voyage à Barcelone

Voyage en Suisse

Workshop Architectonik

Halle de marché

Conférence de Gilles Clément


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S’approprier les outils de l’architecture


A

u cours de ces trois années passées à l’ENSAG, chaque enseignement, lecture et nouvelle découverte m’a permis de construire une culture architecturale personnelle. Aujourd’hui, je peux clairement définir les étapes de cette évolution au cours de la licence. La première année a permis de fixer des bases communes, notamment concernant les outils de conception et l’histoire de l’architecture. Au cours de la deuxième année, les premiers choix de studio ont marqué une prise de conscience importante, à savoir l’appropriation nécessaire de ma formation au sein de l’école. C’est aussi au cours de cette année que ma compréhension du projet s’est accrue, dans un souci de cohérence globale, de prise en compte du contexte et des différentes échelles. La troisième année m’a permis à la fois de me construire une méthode de travail personnelle et de me confronter à des sites réels dans toute leur complexité. Ce fut aussi et surtout l’année de tous les questionnements sur mon futur à plus ou moins long terme. Quel architecte voudrais je devenir? Quel Master serait le plus approprié pour y parvenir? A la manière de la pédagogie acquise au cours de ma deuxième année en studio Liveneau (analyser/ déconstruire, expérimenter/éprouver et concevoir/représenter), cette première phase du rapport d’études s’articule autour de cinq thèmes me permettant d’évaluer le parcours effectué au cours de ces trois années de licence.

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Affiche du film My Architect de Nathaniel Kahn

Découvrir

observer s’ouvrir


Curiosité et voyages

L

a curiosité est à mon sens l’une des principales qualités qu’un architecte se doit d’avoir. Pour apporter la réponse la plus juste possible à chaque nouvelle situation qui se présente à lui, il se doit d’observer, de comprendre et d’innover grâce à sa propre culture et à ses connaissances. Dans ce sens, la richesse de cette profession est directement liée à cette capacité de découvrir sans cesse de nouvelles choses, et de s’ouvrir au monde qui l’entoure. L’ouverture d’esprit conduit à la tolérance, au respect, à la curiosité et pousse, je pense, à concevoir avec humanisme et modernité. Les nombreux voyages que j’ai pu effectuer, depuis mon enfance accompagné de ma famille jusqu’à aujourd’hui de manière autonome, sont en partie à l’origine de cette curiosité qui m’anime au quotidien. Ils sont à chaque fois une source d’ouverture d’esprit et de découvertes culturelles. J’ai toujours été fasciné par les différents édifices, historiques ou contemporains, que j’ai pu visiter ou photographier sans pour autant comprendre la raison de cet attrait. A présent mes études m’aident à apprécier davantage mes voyages tout en élargissant mes connaissances.

Avec le studio Liveneau, en fin de seconde année, nous avons effectué un voyage de quelques jours en Suisse. En parcourant des villes comme Lausanne, Lucerne, Berne ou Zurich, nous avons pu observer différents projets dont nous avions parlé en cours. Ces références prennent alors toute leur dimension lorsque l’on peut en constater les qualités architecturales in situ, et surtout en discuter par la suite entre étudiants et avec les professeurs ou intervenants. Parmis d’autres choses, j’ai été marqué par le centre de la culture et des congrès de Lucerne conçu par Jean Nouvel pour son travail sur l’acoustique, les cadrages sur l’extérieur, la lumière et la volumétrie, ainsi que par les qualités d’usage et les typologies de logements du quartier Siedlung Halen près de Berne, conçu par l’agence Atelier 5.

C

Année d’échange à Montréal

’est ce goût du voyage qui m’a conduit à vouloir passer une année d’étude au Canada l’an prochain. J’ai programmé cette année d’échange dans mon parcours étudiant dès que j’ai eu connaissance des possibilités de départ à l’étranger au cours de l’enseignement supérieur, avant même d’y être inscrit. Sélectionné pour partir étudier à l’université de McGill à Montréal pour l’année scolaire 2010-2011, je vais donc y passer ma première année de master. Le choix de partir la première année de Master me permet de finir de manière cohérente et complète le cycle licence à Grenoble, notamment concernant l’enseignement de projet. Pour profiter pleinement d’une année d’enseignement à l’étranger, il me paraît important, à l’image de ce rapport d’études de fin de licence, d’avoir pris du recul sur mon projet personnel et professionnel. En un mot, il est essentiel à mon avis d’avoir la maturité nécessaire. Le Canada, en particulier Montréal au Québec, s’est révélé être une destination évidente. Ayant apprécié un voyage aux États Unis plus jeune, cela fait déjà quelques années que je souhaite aller au Québec. Entre influences européennes et américaines, Montréal est une grande métropole multiculturelle, favorisant l’ouverture d’esprit et la curiosité intellectuelle, ce qui en fait le lieu idéal pour étudier. Passer un an à l’étranger est pour moi indissociable de l’apprentissage de la langue. J’ai un niveau correct en anglais, mais j’aimerais le parler couramment afin de pouvoir travailler dans d’autres pays à l’avenir.

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Photos de voyages


D’où mon choix d’un pays anglophone. Passionné par mes études, je tiens aussi à garder au cours de cette année une bonne dynamique de travail. Grâce à une culture francophone commune, partir au Québec est pour moi la meilleure manière d’acquérir une expérience internationale et de poursuivre mon apprentissage de manière studieuse, sans être freiné par un temps d’adaptation à la langue ou à une culture trop éloignée de la nôtre. De plus, j’ai pu au cours de mes recherches constater que le Canada dispense un enseignement de qualité, qui me permettra aussi d’appréhender une méthodologie de travail différente. La pratique architecturale du Canada m’intéresse aussi sur un point précis : l’habitat coopératif. Lors de mon stage en agence à Lyon, j’ai pu travailler sur le projet du Village Vertical à Villeurbanne (1ère coopérative d’habitants en France). S’il en est à ses débuts en France, ce type d’habitat est largement démocratisé dans d’autres pays comme la Suisse, l’Allemagne, la Norvège, ou le Canada. Au Canada, environ 2 100 coopératives d’habitation logent un quart de million de personnes. J’ai dans l’idée d’observer cette pratique particulière au cours de l’année prochaine en allant par exemple à la rencontre d’organismes comme la Fédération de l’Habitation Coopérative du Canada. C’est sans aucune hésitation, malgré les difficultés annoncées, que mon choix d’école s’est arrêté sur l’université de McGill. Université internationale par excellence, située au cœur de la ville, elle est considérée comme l’une des meilleures universités canadiennes. C’est aussi la seule université qui dispense ses cours en anglais à laquelle nous avons accès à Montréal. L’école d’architecture de McGill propose un large choix de cours et les étudiants sont libres de composer leur programme tout au long de l’année. Cela me permettra de choisir un enseignement cohérent avec mon projet professionnel, en particulier des cours sur les qualités environnementales et sur différents aspects techniques. Après avoir discuté avec plusieurs étudiants québécois en échange à Grenoble, ainsi qu’avec des étudiants déjà partis comme Anaïs Rollet qui a effectué le parcours que je projette de faire à mon tour (année à McGill en Master 1 puis Master 2 en « Cultures constructives et éco-habitat »), je suis maintenant convaincu que ma place l’année prochaine est à Montréal.

Références

A

u cours de nos études, en particulier de l’enseignement de projet, la recherche de références est une préoccupation constante. Une référence peut être architecturale, mais pas seulement. L’architecture est une profession pluridisciplinaire et, de la même manière, son enseignement nous amène à nous intéresser à tout autre domaine qui peut alimenter notre réflexion au quotidien. Par exemple, on peut observer une œuvre artistique afin d’en tirer des règles de composition, d’esthétique, ou de manipulation des couleurs et des matériaux ; s’intéresser à la sociologie permet de comprendre certaines problématiques sociales ou logiques d’usage ; la philosophie peut être liée à l’idéologie d’un mouvement ou d’un architecte en particulier. Les références permettent d’observer ce qui a déjà été fait afin d’en tirer enseignement et de faire évoluer nos propres recherches et questionnements. Chaque nouvelle lecture, visite ou exposition est une occasion d’alimenter sa culture personnelle.

Autodidaxie

U

ne partie de la formation d’architecte s’effectue de manière personnelle et autonome, guidée par notre curiosité et notre ouverture d’esprit. S’ouvrir, c’est ne pas se contenter de l’enseignement qui nous est apporté, aussi riche soit-il. C’est aussi aller voir ce qui se fait ailleurs, s’y intéresser. Par

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Diverses pratiques artistiques personnelles


la suite, cette attitude d’auto-apprentissage doit perdurer lorsque l’étudiant devient architecte. De cette manière, il sera constamment en recherche de nouvelles idées ou compétences de façon à faire évoluer son travail, sans jamais se lasser. L’école nous pousse progressivement dans ce sens. Le simple fait de choisir son studio à partir de la deuxième année est une étape d’appropriation de notre enseignement. Dans mon parcours, le studio Liveneau en deuxième année par exemple m’a permis d’explorer la dimension conceptuelle du projet tout en gardant une certaine liberté formelle. En troisième année c’est la pédagogie singulière du studio David qui m’a marqué, privilégiant le dialogue et différentes approches de compréhension du projet. Dans le cadre du cours Fondements théoriques de l’architecture, il nous a été demandé d’explorer une réflexion personnelle au moyen d’un rapport de presse, nous laissant libre concernant le choix du sujet en rapport plus ou moins direct avec l’architecture. En lien avec mes interrogation actuelles, j’ai décidé de porter ma réflexion sur le rôle éthique de l’architecte, sur la notion d’engagement et la manière dont elle est appliquée à la pratique architecturale contemporaine. Les stages, bien qu’ils soient imposés, sont issus d’une recherche personnelle et peuvent nous permettre d’explorer des pratiques spécifiques qui ne sont pas forcément enseignées à l’école, mais qui nous intéressent tout de même. Ils ont été d’une grande importance pour mon parcours dans le sens où j’ai réussi à trouver des stages qui ont répondu à certaines interrogations et qui ont ainsi fait évoluer ma réflexion concernant ma pratique professionnelle future. Lorsque j’ai voulu approfondir la notion de développement durable en architecture, le stage dans l’agence Détry & Lévy m’a permis à la fois d’observer un architecte spécialisé dans l’architecture écologique, mais aussi de découvrir le domaine du patrimoine et l’habitat coopératif. L’entreprise Bati-nature qui m’a accueilli pour effectuer mon stage ouvrier était entre autres spécialisée dans l’ossature bois et l’isolation paille, dans une démarche écologique et éthique. Les rencontres ont aussi joué un rôle important. Je pense notamment à certains intervenants qui m’ont particulièrement marqué et qui ont accompagné mes idées au fil du temps. Plusieurs conférences comme celle de Patrick Bouchain, de Jacques Ferrier, de Gilles Clément, de Françoise-Hélène Jourda ou encore d’Anna Heringer. En première année, plusieurs intervenants de qualité ont rythmé l’enseignement de Patrice Doat. Plus récemment en studio Blachot-Adeline, l’architecte Christian Charignon, fondateur de l’agence lyonnaise Tekhne spécialisée depuis des années dans la qualité environnementale, est venu discuter avec nous de son travail.

Pratique artistique

L

a pratique artistique est à la fois un moyen d’expression et de découverte. C’est aussi le premier outil de compréhension dont dispose l’architecte. Les cours de dessin dispensés par Marie-Astrid Creps, Anne Chatelut et Agnieszka Karolak m’ont permis tout au long de la licence d’améliorer mes compétences créatives. J’ai toujours aimé pratiquer le dessin. J’ai suivi plusieurs années de cours étant plus jeune ainsi que l’année qui a précédé mon admission à l’école en vue du concours d’entrée. Aujourd’hui, c’est avec plaisir que j’utilise ces compétences artistiques qui restent pour moi un outil indispensable à mes études. Dans une moindre mesure, je m’intéresse à la photographie. Initié par mon père lors de mes voyages avec un appareil argentique à l’époque, j’ai par la suite fait un peu de développement noir et blanc.

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L’homme de Vitruve, LÊonard de Vinci

Analyser


L

orsque l’on poursuit l’exercice de l’observation, l’analyse permet d’assimiler un fonctionnement, un outil, un détail constructif, une manière de faire... Appliquée à l’architecture, l’analyse d’une référence par exemple, permet d’en déchiffrer les règles de conception, son fonctionnement et la relation avec son contexte (géographique, historique, culturel...).

Diversité des outils

T

out outil peut servir à décomposer une œuvre pour en saisir sa composition. Le dessin descriptif enseigné par Marie-Astrid Creps en est un par expemple. La géométrie descriptive permet une meilleure compréhension des espaces et leur représentation en trois dimensions grâce à différents procédés graphiques. En première année, Patrice Doat nous a amené à comprendre des logiques constructives simples avec les exercices de masse et ossature. Il était important pour ces premiers exercices de conception de comprendre le fonctionnement de ces logiques constructives afin de pouvoir les utiliser correctement. Il était donc nécessaire de passer par une étape d’analyse des détails constructifs : l’assemblage des éléments d’ossature en bois pour l’ossature par exemple, ou encore le calepinage des briques pour la masse. Par la suite, certains cours sont venus approfondir ces notions d’analyse et de compréhension constructive : Nicolas Tixier nous a enseigné certaine bases de structure et Olivier Baverel quelques notions de résistance des matériaux. En seconde année, un TD de détails constructifs nous a été proposé afin d’approfondir par groupe le projet de halle de marché du deuxième semestre. Ce fut l’occasion d’explorer un peu plus la représentation du projet et de ses détails à des échelles plus grandes, mais aussi d’expliciter des choix constructifs et les étapes de construction que ces choix ont entrainé. Pour le premier projet de l’année, nous avons aussi exploré différents principes lumineux que nous avons pu expérimenter aux Grands Ateliers de l’Isle d’Abeau. En introduction au second exercice de deuxième année, un court dossier réalisé en groupe nous a permis d’analyser un édifice en particulier. Notre choix s’est porté sur la maison meuble en bambou de Shigeru Ban, située près de la Grande muraille de Chine. La décomposition relativement simple du bâtiment nous a conduit à le comparer ensuite avec d’autres projets de l’architecte, puis à rechercher ses influences historiques et culturelles. En troisième année, en studio David, nous avons basé nos projets sur des analyses communes du cours Lesdiguières dans un premier temps afin d’en extraire individuellement une attitude urbaine. Le travail d’analyse s’est poursuivi autour de différentes références et discussions lorsque nous nous sommes confrontés aux typologies de logement, aux usages et aux aménagements extérieurs. Parallèlement, un TD dirigé par Nicolas Tixier nous a permis d’appréhender les bases de la conception bioclimatique et de la thermique du bâtiment. A travers ces différentes approches, j’ai pu constater l’importance de ce travail d’analyse, servant simplement d’outil de compréhension dans certains cas, notamment concernant les principe constructifs et les intentions, mais aussi et surtout de matière première à la pratique du projet. Il permet de mieux cerner le lieu et le contexte dans son ensemble, d’en appréhender les problématiques et les atouts afin de répondre au mieux à la situation.

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18 Gaia : lumière et divers croquis


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Analyse éalisé en studio David, 3ème année


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Situer


S

ituer, c’est déterminer la place d’un ensemble dans l’espace et dans le temps. Cela induit une notion importante de l’enseignement de l’architecture : le contexte. Bien que l’analyse reste subjective car elle diffère en fonction de la sensibilité et de l’expérience de chacun, elle est indéniablement liée à un contexte précis et unique, qui lui au contraire est parfaitement objectif. De cette analyse peuvent alors émerger de nombreux choix architecturaux. Le contexte devient alors une des principales sources d’inspiration du projet. Cette notion englobe et met en relation un grand nombre d’observations. Il est donc nécessaire de cultiver une grande curiosité ainsi qu’une large gamme de compétences.

L

Prise en compte du contexte

e contexte peut représenter l’environnement physique du site, qu’il soit naturel ou bâti. Mon premier projet situé était l’aménagement d’une plage du lac de Paladru en fin de deuxième année. La visite du lieu m’a permis d’appréhender le lieu, l’espace mais aussi le paysage environnant afin d’envisager certains cadrages particuliers par exemple. L’exploration des environs et des bâtiments déjà présents m’a permis de concevoir par la suite un projet en accord avec le site. Le second projet de troisième année, situé en centre ville de Grenoble dans un contexte urbain plutôt dense m’a amené à penser la conception en terme d’échelle et de hauteurs construites. Il convient de distinguer la réflexion sur l’aspect esthétique du bâtiment et sur les fonctionnalités liées au programme et aux besoins. Une analyse sociologique du contexte peut conduire à des choix architecturaux décisifs. Au cours du premier semestre de cette année, nous avons été amenés, avec l’aide de Cécile Leonardi, à comprendre les besoins en terme d’usage de sites choisis sur l’axe Lesdiguières afin de déterminer notre propre programme. Si l’analyse du contexte d’un site de projet est une activité subjective et souvent incomplète, le fait de contextualiser le projet dans son environnement, qu’il soit construit, naturel, socio-économique, technique, me semble être la bonne manière de donner une réponse adaptée et réfléchie. Elle pourra néanmoins être controversée et discutée car elle reste la réponse d’un individu influencé par son expérience et ses sensibilités. A mon sens, cela doit devenir un atout et permettre d’ouvrir le dialogue avec les différents acteurs du projet afin d’apporter la meilleure solution possible et d’aller à l’encontre de la standardisation. Dans cette même idée, certains architectes s’engagent dans la voie du partage d’opinions en développant leurs projets avec les futurs usagers ou les habitants du quartier dans lequel ils interviennent par le biais de la démocratie participative. J’ai pu observer cette pratique sur deux projets au cours de cette dernière année : le projet d’habitat coopératif que j’ai suivi au cours de mon stage en agence ainsi que le petit immeuble d’habitation de l’agence Tekhne que nous avons visité dans le cadre du studio Blachot-Adeline. Les futurs habitants ont été consultés préalablement dans les deux cas afin de convenir des besoins et des désirs de chacun, le travail de l’architecte consistant à intégrer ces nouvelles demandes dans un projet collectif cohérent. Je me souviens d’un documentaire présenté en première année qui traitait d’un nouvel aménagement urbain entrepris par la ville de Berlin où des réunions étaient organisées en amont de la phase de conception entre les pouvoirs publiques, le maître d’oeuvre et les habitants du quartier. Ces initiatives, bien qu’elles augmentent la complexité du projet, sont un parfait exemple de la prise en compte d’un contexte mêlant le facteur humain et la qualité d’usage.

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GAIA : Exercice structure

ExpĂŠrimenter


A

fin de ne pas s’enfermer dans une démarche trop théorique qui aurait tendance à s’éloigner de la réalité, il est important d’intégrer une dimension pratique à la conception architecturale. L’expérimentation peut être envisagée sous différentes formes et dans des buts tout aussi variés. Utilisée en lien avec la création architecturale, elle devient un atout précieux permettant de s’essayer à plusieurs solutions et d’en tirer enseignement.

Entre théorie et pratique

A

u fil des années, la maquette est devenue un outil de conception essentielle pour le projet. Dans un premier temps, elle permet d’accompagner efficacement la recherche spatiale et volumétrique. Tout comme le dessin, elle peut être envisagée à différentes échelles. C’est en studio de deuxième année que j’ai vraiment pris l’habitude d’utiliser des maquettes analytiques et conceptuelles pour mes projets. Elles m’ont permis notamment de tester des principes lumineux, d’adapter des positionnement s architecturaux à leur contexte mais aussi d’apprendre à radicaliser certains projets afin de définir plus clairement mes choix et la cohérence de mes propos. C’est aussi au cours de cette année que j’ai pu accéder aux Grands Ateliers de l’Isle d’Abeau. Répartis en plusieurs groupes, nous avons réalisé de petits projets à échelle réelle qui ont servi à la fois d’introduction et de phase d’expérimentation aux projets réalisés pendant l’année. Pour le premier projet d’atelier lumineux, nous avons réalisé des modules nous permettant d’appréhender la relation entre l’espace et les principes lumineux préalablement étudiés en cours. Pour le projet de halle de marché, nous avons travaillé sur des questions structurelles. Nous avons mis en place dans un premier temps des murs en s’intéressant à leur forme et au calepinage des briques, puis des couvrements en bois nous permettant d’aborder les problématiques de structure et leurs propriétés constructives. Le dernier exercice que nous avons développé nous a permis de comprendre la notion de «geste architectural» en le considérant comme un outil à la fois conceptuel et opératoire pour penser et mettre en œuvre un projet d’architecture. Autour de huit gestes de conception (plier, emprunter, déliter, imbriquer, envelopper, déployer, enserrer et disposer), nous avons conçu plusieurs petites unités habitables afin d’étudier comment chacun de ces gestes structure la mise en forme physique d’un projet architectural en générant des qualités sensibles spécifiques. La phase d’avant projet nous a permis à la fois de travailler par groupe à la conception de chacun de ces petits exercices. A ce moment, une attention particulière était portée au système constructif afin que la production sur place soit la plus cohérente et la plus efficace possible avec le projet et les matériaux mis à disposition. Les stages sont aussi une façon d’expérimenter l’architecture au cours de nos études dans le sens où ils permettent une mise en situation professionnelle. C’est une occasion de comprendre, par l’observation et la pratique, le métier d’architecte, mais aussi les autres disciplines avec lesquelles nous serons susceptibles de collaborer à l’avenir. Lors de mon stage en agence par exemple, un bureau d’études thermique était associé à la conception des projets concernant leurs performances énergétiques. Dans le cas du stage ouvrier, j’ai été confronté aux réflexions constructives logistiques qui accompagnent la construction au cours du chantier, ainsi qu’aux relations de travail qui s’installent entre les différents entrepreneurs.

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GAIA : Exercice geste architectural

Maquettes


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GAIA : Exercice structure


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Projeter


L

e projet est sans doute l’enseignement le plus important des études en architecture. Et pour cause : il nous suit tout au long de notre formation. Passée l’étape de l’apprentissage de la représentation en première année, il se complexifie, prend une place toujours plus importante jusqu’à la réalisation du projet de fin d’études permettant l’obtention du diplôme d’Etat d’architecte. Pour élaborer chaque projet il est nécessaire de mettre à profit l’ensemble des compétences et de l’expérience acquises afin d’apporter une réponse architecturale fondée et cohérente. En ce sens, l’architecte est homme de synthèse. Le but de notre formation est donc de nous amener progressivement vers une autonomie dans la pratique du projet en nous permettant notamment de développer et de nous approprier différents outils méthodologiques.

Evolution

L

e tronc commun de la première année nous a permis d’acquérir les connaissances nécessaires en terme de représentation et de discours, autrement dit les bases de la compréhension de l’architecture. En parallèle, nous avons commencé avec Patrice Doat nos premiers projets de conception (Masse, Ossature, Masse-ossature). Relativement simples et sans programme clairement défini, ils nous ont permis de concevoir assez librement dans un premier temps, tout en commençant à aborder la question du système constructif. Au cours du second semestre, les projets proposés par Jean Pierre Durand se sont davantage inscrits dans une logique d’enseignement de studio avec des programmes précis tout en exigeant une qualité de représentation à la main (4 espaces, Maison de la vigne et du vin...). La seconde année marque une rupture dans notre enseignement commun par le choix de studio. J’ai pour ma part choisi le studio de Philippe Liveneau. Il m’a permis d’acquérir une bonne méthodologie de travail tout en gardant une certaine de liberté de conception. C’est aussi grâce à ce studio que j’ai pu vivre l’expérience des Grands Ateliers. Ce fut pour moi une année importante en terme de compréhension de la discipline de projet, notamment au cours du second semestre. Je considère avoir franchi une étape importante lors du projet de halle de marché, tant au niveau du travail de synthèse que de la réponse architecturale. De même, lors du projet d’aménagement de la plage de Paladru, j’ai pu affirmer un choix architectural singulier tout en restant en parfaite cohérence à la fois avec le programme mais aussi avec le contexte de ce premier projet situé.

Méthodologie

J

’ai choisi de commencer ma troisième année au sein du studio de Stéphanie David qui proposait alors une pédagogie alternative au fonctionnement des studios dont nous avions l’habitude jusqu’alors. Une large place était consacrée au dialogue entre les élèves et au partage de découvertes, de références et d’idées. Le projet se complexifie encore, et nous invite à élargir notre analyse à l’échelle de la ville, mais aussi à pousser notre représentation dans le détail. Une importante phase d’analyse urbaine réalisée par groupe a précédé ce projet. A partir de ces observations, nous avons composé un programme individuel en tentant de répondre à la fois aux besoins liés au contexte analysé, mais aussi aux idées que nous tenions à explorer et développer. Tout au long du semestre, nous avons expérimenté différents moyens de représentation en cherchant à comprendre bon nombre d’étapes du projet (analyse, hypothèse programmatique, stratégie urbaine, recherche de forme architecturale, aménagements extérieurs, typologie de logement, matériaux utilisés, usages...). Cet exercice symbolise dans mon parcours l’acquisition d’une certaine autonomie et d’une méthodologie de conception, me permettant de prendre en compte dans mes intentions les diverses échelles du projet.

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28 Masse-ossature, 1ère annÊe


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Atelier lumineux, 2ème année


B

A

A'

B'

30

Halle de marché, 2ème année

Equipements commerçants Espace de marché Equipements public Espace publique


0.00

- 3.00

- 6.20

- 7.50

31

Plage de Paladru, 2ème annÊe


Projet réalisé en studio David, 3ème année ViVre mixité

ensemble

sociale et Générationelle

espaces (terrasse

hautes

éco-responsables performances énerGétiques

panneaux solaires, récuperation de l’eau de pluie utilisations des ressources naturelles et locales

1. Valoriser les transports en communs inexploités (train) et à venir (tramway)

loGements

communes destinées aux Visiteurs

habitats

présents mais

collectifs

aménaGée et VéGétalisée, espace de Jeux, séchoirs)

chambres

réhabilitaion a

plus lonG terme, réhabilitation de la

place

Z.a. des essarts

publique

espace VéGétalisé et aménaGé lieu de rencontre eVÈnementiels

ponctuels en plein air

espace de l’automobile

nouVelle

Voie Verte

le lonG de la Voie de chemin de fer

public

en créant des détournements et en réduisant la vitesse

espace

2. Réduire l’impact

associatif

espace à disposition de la Vie associatiVe Grenobloise conférences, exposition, éVenements culturels création de la premiÈre amap d’echirolles

relie Grenoble echirolles et pont de claix faVorise les mobilités douces

Vie

économique

forte affluence due à la proximité d’un centre commercial en lien aVec les commerces de proximité du quartier

3. Replacer

la circulation naturelle

automobile

au centre du quartier sur l’axe nord-sud

parKinG relais location de Véhicules électriques orGanisation d’un serVice de coVoituraGe

Grenoble d’Echirolles

en lien avec le centre de et sur l’axe est-ouest avec le centre

N

train

aGence taG création d’un arret de la futur liGne e lien aVec l’aGlomération Grenobloise

4. Entre

piéton & cycliste

les flux de circulation établits

se crée l’espace public et le bâti

nouVel espace espace métroVélo serVice de consiGne et de location de Vélo espace de réparation et de maintenance

32

multimodal

tramway

pÔle

train aGence sncf création d’une halte de


Béton

ciré

Plancher

extérieur bois

Herbe

Erable

du Japon

Stipa (graminé)

Terre

loGGia chambre 1

séJour

chambre 2

cuisine

espace

colléctif

33


34

Vers une architecture durable


L

es enjeux de notre société sont nombreux et complexes, et le défi du développement durable devient primordial. La gestion des ressources énergétiques, la croissance démographique, les inégalités sociales toujours plus grandes et la qualité de notre environnement sont autant de sujets qui nécessitent réflexion afin de trouver une solution globale. Si le concept de développement durable paraît faire consensus, chacun doit s’impliquer dans une stratégie nouvelle qui soit la plus juste possible, et entreprendre des actions actions concrètes afin de gagner en cohérence. La responsabilité de l’architecte est grande. Le secteur du bâtiment fait partie des secteurs économiques les plus consommateurs d’énergie (plus de 40% des consommations nationales). Il implique bon nombre d’acteurs dans sa phase de réalisation (du politique à l’ouvrier, de l’urbaniste à l’économiste ou encore à l’ingénieur) mais aussi et surtout l’ensemble de la population dans sa phase d’utilisation. L’architecte a le devoir de répondre de la meilleure manière aux différents projets qu’il entreprend. Il doit aussi devenir le médiateur d’une réflexion collective allant au delà de la simple réponse architecturale. C’est en cela que l’architecture est pour moi, une discipline humaniste. On ne construit bien que si on le fait avec les autres, et pour les autres, dans un désir de mieux vivre collectif.

Une démarche personnelle

L

es questionnements à propos du développement durable m’accompagnent déjà depuis quelques années. En classe de première S en lycée, mon projet de TPE concernait les bio-carburants. Ces trois années passées à l’ENSAG ont été ponctuées par des découvertes et des rencontres qui m’ont conforté dans mes idées. Les conférences notamment, comme celle de Jacques Ferrier en mars 2008 qui m’a fait prendre conscience de la nécessité de densification avec des projets emblématiques de tours écologiques, ou la leçon inaugurale de Françoise-Hélène Jourda en octobre 2009, engagée depuis ses débuts en faveur de la cause environnementale, ou encore celle de Gilles Clément en février 2009, paysagiste militant bravant les interdictions avec son jardin d’orties à Melles. Pendant l’été 2009, j’ai effectué mon stage de première pratique dans une agence d’architecture spécialisée dans la construction et la réhabilitation environnementale, ainsi que la rénovation patrimoniale (Détry & Lévy Architectes, à Lyon), à laquelle est rattaché un ingénieur en thermique du bâtiment (ACR). Très instructif, ce stage m’a aussi vite fait prendre conscience des limites de la construction environnementale, notamment au niveau économique, et donc par extension, au niveau social. Le coût non négligeable des hautes performances énergétiques appliquées à l’habitat individuel (construction neuve ou réhabilitation) se voit alors réservé à quelques privilégiés convaincus. Mis à part quelques projets d’habitats collectifs, dont une réhabilitation d’un vieil immeuble lyonnais, qu’en est-il de la question sociale et du vivre ensemble nécessaire à un développement durable cohérent? Des débuts de réponse me sont apparus lorsque j’ai commencé à travailler sur un projet d’habitat coopératif en plein Villeurbanne : le “Village Vertical“. Défini comme un “espace de propriété collective à but non lucratif géré démocratiquement “, la construction écologique y côtoie une conception participative avec les futurs habitants, mais aussi des contraintes économiques nécessaires à son accessibilité pour le plus grand monde, donc par extension à la diversité. Cette voie du logement, issue de l’économie sociale et solidaire, ouvre de belles perspectives en matière d’alternatives sociales et environnementales. Je pense aussi que le but profond de l’architecture durable se trouve dans ce type de solution visant à replacer l’homme au centre du débat et de l’action. Concernant mon stage ouvrier, j’ai mis un certain temps à déterminer quel métier serait le plus intéressant à découvrir. Je n’avais pas de réelle préférence mise à part une attirance pour le matériau bois. J’ai

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Stage ouvrier

Stage en agence


donc repoussé cette décision à plus tard afin de trouver un stage qui réponde à mes attentes. Après avoir effectué mon stage en agence chez les architectes Détry & Lévy, spécialisés dans le patrimoine et l’architecture environnementale à Lyon, et désireux de continuer à explorer cette voie à l’occasion du stage ouvrier, je récupéère chez eux l’adresse de l’entreprise Bati-Nature. J’ai été au départ attiré par la solution originale et alternative proposée par l’entreprise, à savoir la construction en ossature bois et isolation paille. Après m’être un peu plus renseigné, les services biens plus complets que Bati-nature a développé (charpente, aide à l’autoconstruction, isolation écologique) et la mise en avant de valeurs éthiques au sein de l’entreprise ont fini par me convaincre définitivement. Je suis donc allé suivre une matinée de formation à l’ASDER, à Chambéry, afin de rencontrer mon maître de stage. Quelques semaines plus tard, j’étais sur un de leurs chantiers à Lyon. J’ai travaillé pendant deux semaine au sein d’une petite équipe sur la rénovation d’une maison individuelle à laquelle nous somme venus ajouter une extension. La démarche écologique de l’entreprise l’a poussé à développer un ingénieux système de conception utilisant des modules préfabriqués en ossature bois, réalisés préalablement en atelier, puis levés sur le chantier. Nous avons progressivement mis en place l’étanchéité à l’air pour répondre aux exigences thermiques, puis nous avons installé une isolation en fibre de bois sous la toiture existante et du chanvre pour les dalles. Au moment de mon départ, l’équipe allait entreprendre l’isolation extérieure de l’existant et le soufflage de la ouate de cellulose dans les murs de l’extension.

Les exemples

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ette année, la grande majorité de mes lectures se sont orientées sur le thème du développement durable. J’ai pu découvrir de nombreuses solutions mises en place par des personnes investies dans leurs domaines respectifs, mais reliées par cette envie commune d’agir de façon responsable afin de réconcilier l’homme avec son environnement, qu’il soit urbain, humain ou naturel. Dans l’ouvrage La désobéissance de l’architecte, Renzo Piano nous livre au travers l’exploration de ses différents projets, une vision enthousiaste et réaliste qui poursuit une véritable réflexion sociale sur les villes et les banlieues, enrichie d’une pensée éthique et esthétique. Il défend une architecture durable par l’utilisation modérée et justifiée de la technologie. Il souligne aussi le devoir de respect de la diversité par la prise en compte du contexte environnemental, culturel, historique ou humain. Anna Heringer s’est elle engagée très tôt. Son sujet de diplôme d’architecte fut la conception puis la réalisation d’une école “fait main” dans la province du Rudrapur. Entièrement réalisée en terre et en bambou, la qualité de ce premier édifice a été reconnu par le prix Aga Kahn en 2007. Elle a par la suite conçu d’autres bâtiments dans le pays commandités en grande partie par des ONG, contribuant ainsi au développement économique local. Pour elle, la “soutenabilité est synonyme de beauté“, et la meilleure stratégie de développement passe par les potentiels locaux existants. Le paysagiste Gilles Clément quant à lui, développe entre autres choses dans l’ouvrage Une écologie humaniste son concept de Jardin Planétaire destiné à envisager de façon conjointe la diversité des êtres sur la planète et le rôle gestionnaire de l’homme face à cette diversité. En 2007, il ira même jusqu’à annuler l’ensemble de ses contrats avec l’Etat, signant ainsi un engagement politique radical guidé par une volonté humaniste et écologique. Il s’explique : “Je refuse de cautionner un projet qui va dans le sens d’une destruction de la planète et n’est pas conforme à ce que j’estime humainement acceptable”. A l’image de l’usine LU réhabilitée en Lieu Unique à Nantes, la démarche de Patrick Bouchain vise, elle, à ”faire le moins possible pour donner le plus possible” en transformant des friches industrielles en lieux de vie et de culture grâce des interventions minimales. Il explique aussi qu’une collaboration collective est nécessaire car pour lui, l’architecture est l’expression du lien social. Ces lectures m’ont permis de comprendre que le terme de développement durable, au-delà des préoccupations écologiques, réunit toutes sortes d’acteurs et de nombreuses initiatives dans des domaines variés (social, humanitaire, politique...). Pour moi, ces initiatives sont tout autant de pistes à explorer, voire à combiner à l’avenir.

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Le Lieu Unique, Nantes, Patrick Bouchain

Devenir un architecte engagĂŠ


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engager. Ce n’est pas par hasard si j’ai choisi le même titre pour ce rapport d‘études que celui de la leçon inaugurale de Françoise-Hélène Jourda en octobre 2009. La notion d’engagement dans la pratique de l’architecture s’est posée à moi tout au long de cette troisième année. Alimenté par différentes lectures, en particulier deux livres qui ont été les déclencheurs de cette réflexion (“Construire autrement” de Patrick Bouchain et “La désobéissance de l’architecte” de Renzo Piano) mais aussi par mes deux stages, par certains intervenants et conférenciers venus partager leur expérience à l’école (Françoise-Hélène Jourda, Jacques Ferrier, Anna Heringer, Christian Charignon ...), ainsi que bien d’autres rencontres et discussions, j’en suis venu à m’intéresser aux acteurs et aux manières d’envisager l’acte de construction de façon alternative, réfléchie et éthique. Similaire à certains questionnements du développement durable, l’engagement en architecture est une démarche personnelle et humaniste qui vise à s’investir activement dans la réalisation d’un environnement bâti dans le respect de chacun, du concepteur à l’utilisateur, en passant par l’ensemble des acteurs de la construction. J’ai été dans un premier temps intéressé par les problématiques environnementales et par les solutions durables qui peuvent être apportées dans le domaine architectural. Plus tard, au cours de mon stage en agence notamment, j’ai été confronté à certaines limites liées à cette démarche. J’ai alors approfondi le sujet en allant explorer non pas du coté des solutions techniques, mais du coté des acteurs et de leurs idées. Au second semestre, j’ai pris le parti de considérer le dossier de presse effectué à l’occasion du cours de Fondements théoriques de l’architecture comme une introspection tentant de répondre à une réflexion prospective concernant la pratique de l’architecture en tant que futur professionnel. L’enseignement de l’architecture au sein de l’école nous montre au travers différentes époques de quelle manière les styles, puis les mouvements construisent une pensée architecturale plus globale. Cette évolution est marquée par les idées de certains précurseurs, véritables penseurs de l’architecture de leur époque, qui ont construit à travers l’histoire l’architecture telle que nous la percevons aujourd’hui. A ce niveau de compréhension de la discipline se pose à mon sens la question de l’engagement personnel qui pousse ces différentes réflexions à répondre aux problématiques de leur temps, parfois même à se positionner en contradiction totale avec la production et la pensée contemporaine. Si actuellement les nouvelles convictions pour notre futur commun à propos de l’architecture sont associées à une prise de conscience d’ordre environnemental, le constat des limites liées à la nouvelle architecture ”écologique” impliquent une prise de conscience d’une problématique plus globale, notamment sur des questions sociales et économiques. L’architecture prend ici tout son sens en acceptant ses responsabilités concernant à la fois l’environnement et l’évolution des besoins et des attentes des hommes ainsi que l’amélioration de leur qualité de vie. Sur des enjeux aussi important, le regard critique devient primordial, et l’engagement personnel nécessaire.

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Lunchtime atop a Skyscraper, 1932, Charles Clyde Ebbets

Dialogue et co-conception


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ors de nos études, nous sommes régulièrement confrontés au travail en groupe. Loin d’avoir ma préférence au départ, je pense aujourd’hui qu’il est indispensable, non seulement au cours de nos études, mais surtout pour devenir un bon architecte. Si on dit souvent que l’architecte est homme de synthèse, il doit aussi être homme de dialogue, à la fois médiateur et oreille attentive. Au sein de l’école, cette envie de travailler avec les autres étudiants s’est traduit entre autres par mon investissement bénévole dans les associations. Mon intégration à l’équipe de l’Astragale m’a permis de participer à la vie collective étudiante et à son organisation au quotidien au cours des deux premières années. En troisième année, j’ai quitté cette association pour devenir trésorier du BDA. Notre rôle consistait à organiser et fédérer les différentes associations de l’école autour de projets communs. Grâce à ce travail d’équipe, nous avons notamment mis en place la journée d’intégration chère aux étudiants de l’ENSAG afin d’accueillir la nouvelle promotion d’étudiants de l’année qui s’achève, mais aussi soutenu plusieurs évènements festifs et culturels qui ont rythmé la vie étudiante de notre école. L’architecte n’est pas le seul acteur de la construction et de moins en moins de la conception. Christian Charignon, architecte urbaniste et gérant de l’agence TEKHNE à Lyon, est venu dans le studio Blachot en second semestre de L3 en tant qu’intervenant. Il a souligné l’importance, notamment dans la phase de conception, la concertation ; il la met en place avec l’ensemble des personnes avec qui il va concevoir : à chaque nouveau projet, tous les architectes de l’agence, mais aussi les ingénieurs et autres professionnels du bâtiment, apportent leurs idées, les confrontent, afin d’apporter une réponse qui soit la plus complète possible. Ici l’architecte devient un co-concepteur. De la même manière, j’ai pu constater l’importance de ce type de dialogue au cours de mon stage ouvrier. L’entreprise Bati-Nature qui m’a accueilli, spécialisée dans la construction écologique en ossature bois, a développé au cours de ces dernières années son propre système de production. Proposant notamment différents types d’aide aux autoconstructeurs, ils ont élaboré une méthode de préfabrication en atelier leur permettant de s’adapter à tous types de commandes, principalement de maisons individuelles. Au cours de la phase de conception, l’architecte s’est occupé de la volumétrie générale et de l’organisation spatiale du projet, laissant une large part de la conception et des détails techniques au bureau d’études de Bati-Nature. J’ai eu la chance d’assister en fin de stage à un entretien entre mon maître de stage s’occupant du bureau d’étude et un architecte avec qui il était en collaboration sur un futur projet. Ce fut la aussi un bel exemple de conception partagée visant à concilier qualités spatiales et techniques. Dans l’ouvrage “Construire autrement“, Patrick Bouchain défend les démarches participatives mettant en avant le rôle de chacun, du commanditaire au concepteur, mais aussi à l’ensemble des professionnels qui participent à la réalisation et aux futurs utilisateurs. A la fin de ce livre, il invite même quelques amis avec lesquels il a travaillé et qui l’ont influencé à nourrir cette réflexion partagée de leurs points de vue d’artiste pour Daniel Buren, de philosophe pour Michel Onfray, de paysagiste pour Gilles Clément ou encore d’architecte pour Lucien Kroll.

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école

“fait

main” dans la province du

Ethique

Rudrapur, Anna Heringer


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out comme le développement durable dans sa définition complète - pas seulement environnemental, comme le fait remarquer Alain Farel dans l’ouvrage collectif “Bâtir éthique et responsable”, mais aussi économiquement efficace, socialement équitable, écologiquement soutenable et respectueux des cultures - une pensée éthique met en avant une démarche égalitaire, altruiste et honnête sans autre but que de contribuer à l’intérêt et au bonheur de l’autre. A mon sens, l’engagement de l’architecte réside en sa capacité à raisonner au delà de la concrétisation du projet, au delà même des valeurs sociales, économiques et écologiques, dans un but d‘exemplarité d’un point de vue humain. A l’image de Patrick Bouchain qui va rechercher les failles du code civil et autres règlements afin d’en faire profiter le logement social, une remise en question constante des règles établies et de nos propres limites se révèle indispensable à une pratique active et juste de l’architecture. Jacques Benoit, pionnier de la démocratie en entreprise, amorce dans l’ouvrage sus-cité les règles d’un comportement éthique applicable aux différents acteurs de la construction : Il est non discriminatoire, et considère l’intérêt de tous sans distinction ou préférence. Il est altruiste, motivé par le souci ne ne pas nuire à l’autre, mais au contraire de lui apporter un soutien et l’amélioration de ses conditions de vie. Il est loyal, et n’abuse pas de la naïveté et de la confiance de clients ou de partenaires à des fins malhonnêtes ou pour en tirer un quelconque profit. Il est gratuit, dans le sens où il s’effectue par plaisir d’agir de façon responsable envers les hommes et l’environnement, sans forcément attendre de retour sur investissement. Lors de mon stage ouvrier, j’ai pu observer dans le milieu professionnel cette volonté éthique mise en avant par l’entreprise qui m’a accueilli. J’ai pu constater qu’elle induit inévitablement un comportement plus global de l’entreprise et de ses salariés: responsabilité environnementale, mais aussi équité, entraide et partage, souci de qualité et d’amélioration constante, passion et implication des salariés... Je pense que l’architecture prends sens lorsqu’elle est liée à des préoccupation humanistes, dans un désir de mieux vivre collectif et dans une démarche altruiste. Cette démarche est à mon sens indissociable d’un choix personnel, d’un engagement qui nous est propre, et qui peut répondre à une infinité de problématiques. Le but étant de concrétiser un changement de notre environnement direct, de notre société, voire de l’ensemble de l’humanité, à l’échelle qu’il nous est possible d’influencer, et en accord avec des valeurs qui nous sont propres, mais qui doivent être comme l’architecture, résolument tournées vers autrui.

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PrĂŠsentation du projet Armadillo Box pour le concours Solar DĂŠcathlon

Envisager le futur


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u travers les thèmes développés dans ce rapport d’études, j’ai voulu expliquer les différentes étapes de ma réflexion et de mon parcours étudiant au sein de l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble. Dans un premier temps, la description des enseignements et du travail accumulé au cours de ces trois années de licence m’a permis de présenter une partie de ma production et d’exposer ce que m’a apporté l’ensemble de ce parcours. Dans un deuxième temps, j’ai essayé d’expliquer de manière synthétique les pensées et les prises de conscience qui ont accompagné ma formation et qui m’ont questionné à propos de mon avenir. Avec le recul, je constate qu’en trois ans je suis passé par différentes phases : l’apprentissage progressif, qui continu et continuera, puis la compréhension des enjeux de l’architecture au sens large, qui grandit à chaque nouvelle découverte, alimentant ainsi ma réflexion au quotidien, pour arriver enfin à un désir d’engagement et d’éthique personnelle en lien avec la pratique architecturale. L’achèvement de la licence marque, pour l’ensemble des étudiants en architecture, l’affirmation de choix directement liés à une volonté concernant notre pratique professionnelle future. Dans cette perspective, le choix de la thématique de master se doit de correspondre de manière juste et réfléchie aux désirs d’apprentissage de chacun. Dans cette optique, je pense que le master Cultures constructives et éco-habitat est le plus à même de répondre à mes attentes. Dans le domaine de l’architecture, je suis persuadé que la conception éco-responsable est une réponse indispensable aux différentes évolutions qui bouleversent notre monde actuel. L’ensemble des acteurs de l’environnement bâti dont l’architecte fait partie, se doit de prendre conscience des enjeux spatiaux liés au développement durable et d’aller dans le sens de l’innovation. Je pense que l’enseignement délivré à l’occasion de ce master est la meilleure opportunité pour moi de m’engager clairement dans une démarche tournée vers l’avenir. Je tiens ainsi à développer de solides connaissances techniques, considérant l’intelligence constructive comme un outil efficace que l’architecte se doit de maîtriser afin d’apporter une réponse globale aux problématiques sociales, économiques, et environnementales. C’est aussi pour moi le choix le plus pertinent pour développer l’éthique qu’il m’importe de soutenir tout au long de mon parcours professionnel. Enfin, j’ai pu discuter avec plusieurs étudiants de ce master et constater tout l’intérêt du projet Armadillo Box qui va être présenté au concours Solar Décathlon cet été à Madrid. Les solutions apportées concernant l’éco-habitat m’ont réellement donné envie de participer à ce type de projet collectif et innovant à l’avenir.

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Bibliographie

Architectes Patrick BOUCHAIN, Construire autrement, L’impensé, Actes Sud, 2006 LE CORBUSIER, Vers une architecture, Flammarion, 2008 Kenneth FRAMPTON, The poetics of space in the late modern dwelling, EPFL, 1996 Renzo PIANO, La désobéissance de l’architecte, Arléa, 2007 TYIN et Anna HERINGER, Construire ailleurs, Archibooks, 2010

Architecture durable Stéphane BEDEL et Thierry SALOMON, La maison des négawatts, Terre Vivante, 2001 Sylvie BRUNEL, A qui profite le développement durable ?, Larousse, 2008 Coordonné par Alain FAREL, Bâtir étique et responsable, Editions du Moniteur, 2007 Françoise-Hélène JOURDA, Petit manuel de la conception durable, Archibooks + Sautereau, 2009 Pierre LEVY, La rénovation écologique, Terre Vivante, 2010 Richard ROGERS, Des villes durables pour une petite planète, Le Moniteur, 2008 David WRIGHT, Manuel d’architecture naturelle, Parenthèses, 2004 Post-oil city, World architecture workshop, Champ libre, 2008

A propos d’architecture Florent CHAMPY, Sociologie de l’architecture, La Découverte, 2001 Jean-Pierre DURAND, La Représentation du projet, Editions de la Vilette, 2003 Lorraine FARRELY, Les fondamentaux de l’architecture, Pyramyd, 2009 Florence LIPSKY et Pascal ROLLET, Les 101 mots de l’architecture à l’usage de tous, Archibooks + Sautereau, 2009 Bruno ZEVI, Apprendre à voir l’architecture, Editions de minuit, 1959


Urbanisme Yves LION, Aucun territoire n’est désespéré, Parenthèses, 2008

Paysagisme Gilles CLEMENT et Louisa JONES, Une écologie humaniste, Aubanel, 2006

Sociologie Georges PERREC, Épuisement d’un lieu Parisien, Christian Bourgois, 2007 Georges PERREC, Espèces d’espaces, Editions Galilée, 2006

Philosophie Jean-Paul SARTRE, L’existentialisme est un humanisme, Gallimard, 1996

Architecture à vivre AD Archistorm Architecture d’aujourd’hui AMC Ecologik

“Construire autrement” Patrick BOUCHAIN, 11.2007 “Innovations Durables” Jacques FERRIER, 03.2008 “Les jardins de la résistance” Gilles CLEMENT, 02.2009 “S’engager” Françoise-Hélène JOURDA, 10.2009 “Construction en terrre : beauté durable, savoir-faire et éthique des architectes” Martin RAUCH et Anna HERINGER, 02.2010

Conférences

Revues régulièrement consultées


Curriculum Vitae

Diplômes Juin 2010

DIPLOME D’ETUDES EN ARCHITECTURE (Grade de licence) Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble

Juin 2007

BACCALAUREAT - Série S - Mention AB - Lycée St Exupéry - Lyon

Formation 2007-2010

Licence - Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble

Stages 2010

Bati-nature - Ossature bois, isolation paille, charpente - Lyon Durée: 2 semaines Poste : ouvrier sur chantier, observation en bureau d’étude

2009

DETRY & LEVY - Architecture, Patrimoine et Ecologie - Lyon Durée: 2 mois Poste : conception de maquettes, dessin de plans, simulations et montages 3D sur ordinateur, relevés de cotes sur le terrain

2004 Atelier Jérôme PAYEN Architecte DPLG - Caluire Durée: 1 semaine Poste : conception d’une maquette, tâches administratives

Compétences Logiciels utilisés:

AutoCAD, Sketchup, Artlantis, Adobe Illustrator, Photoshop, Indesign et Première Pro

Langues étrangères :

Anglais - Lu, écrit, parlé - Bon niveau Espagnol - Lu - Niveau scolaire

Vie Associative étudiante 2009-2010

Bureau Des Associations (BDA) - Trésorier Gestion des différentes associations de l’ENSAG et de la vie étudiante, Organisation d’évènementiels

2008-2009

ASTRAGALE – Bénévole Cafétéria associative de l’ENSAG


Nicolas VERNET Né le 9 Mars1989 à Pertuis (84) 24 rue Pierre Bourgeois 69300 Caluire FRANCE P : (+33) 06.32.93.66.97 T : (+33) 04.78.23.25.84 M : nico.vernet@wanadoo.fr

Expérience professionnelle Animateur Centre de Loisirs Caluire juniors (CLSH) - Caluire

2009

Animateur Centre de Loisirs et de Vacances Caluire juniors (CLSH) - Caluire Temps Jeunes (CVL) - St Nizier le Désert

2008

Animateur Centre de Loisirs et de Vacances Caluire jeunes et juniors (CLSH) - Caluire Temps Jeunes (CVL) - Llafranc, Espagne

2007

Animateur Centre de Loisirs Caluire jeunes et junior (CLSH) - Caluire

2006

Autres diplômes BAFA (Brevet d’Aptitude aux Fonctions d’Animateur) AFPS (Brevet de Secourisme - Fédération Nationale de Protection Civile)

2007 2004

Autres activités Workshop ARCHITECTONIK Workshop national des étudiants en Architecture - Marseille

Avril 2009

Centres d’intérêts Dessin, arts graphiques, photographie Voyages Musique (guitariste), Concerts Sports divers (Judo pratiqué pendant 11 ans, ceinture noire, compétition et arbitrage)


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