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Île de La Réunion

LA BIOMASSE DANS LA CONVERSION DE L’ÎLE AU 100 % RENOUVELABLE

En 2024, La Réunion devient le premier territoire français à produire la totalité de son électricité via les énergies renouvelables ! Aux côtés de l’hydraulique et du solaire, l’utilisation de la biomasse reflète parfaitement la conversion opérée sur l’île et les enjeux énergétiques à venir.

DU FIOUL À L’HUILE DE COLZA

L’un des exemples les plus parlants de cette conversion est la centrale EDF PEI de Port-Est. Après plus de deux ans d’intense préparation technique, les 12 moteurs de la centrale, qui étaient alimentés au fioul, fonctionnent désormais avec un combustible 100 % renouvelable : la biomasse liquide élaborée à partir d’huile de colza. Il s’agit d’une première mondiale sur une centrale électrique d’une telle puissance, qui est de 212 mégawatts.

L’ambition principale de la filiale d’EDF étant la décarbonation au sein de tous ses sites, La Réunion avait été choisie pour débuter cette transformation après que la planification énergétique a été engagée il y a une dizaine d’années. En 2022, un essai grandeur nature opéré en Guadeloupe a confirmé avec succès que les centrales d’EDF PEI peuvent fonctionner à 100 % de charge avec de la biomasse liquide et fournir l’ensemble des services système nécessaires à la sécurité des réseaux. En couvrant en moyenne 40 % des besoins en production d’électricité de l’île, la centrale EDF PEI de Port-Est joue un véritable rôle de centrale test et ses retours d’expériences sont primordiaux pour les futures centrales bioénergie, comme celle du Larivot en Guyane, actuellement en construction et dont l’ouverture est prévue d’ici 2026. Ailleurs en outre-mer, les futures usines de biomasse liquide EDF PEI de Bellefontaine en Martinique et de Jarry en Guadeloupe devraient être quant à elles mises en service d’ici 2028.

TÉMOIGNAGE

Alexandre Sengelin

ALEXANDRE SENGELIN, DIRECTEUR DE LA CENTRALE BIOÉNERGIE DE PORT-EST

« Chaque année, près de 200 000 tonnes d’huile sont acheminées par bateau depuis l’usine Saipol de Sète, spécialisée notamment dans la transformation de graines de colza d’import. En parallèle, EDF PEI accompagne le développement de filières locales de biomasse avec, par exemple, une utilisation possible d’huiles usagées. Le fonctionnement à la biomasse liquide permettra d’éviter d’émettre chaque année 500000 tonnes de CO2 et améliorera significativement la qualité de l’air du fait de l’absence d’émissions de soufre et d’une nette réduction des rejets de poussière ».

DE L’ÉNERGIE RENOUVELABLE À L’AUTONOMIE ÉNERGÉTIQUE ?

Présent depuis une trentaine d’année, Albioma, expert en biomasse, s’est installé à La Réunion pour restructurer les usines de canne qui fermaient les unes après les autres et valoriser un résidu de canne à sucre, la bagasse, en électricité lors des campagnes sucrières qui ont lieu de juillet à novembre. L’usine de Bois-Rouge, alimentée par le charbon il y a encore deux ans en dehors des campagnes sucrières, fournit désormais de l’électricité grâce aux bois locaux et à des granulés importés d’Australie et du Canada. Les émissions de gaz à effet de serre ont pu, à la suite de cette conversion être réduites de 84 %, transport maritime de la biomasse compris.

Adossée à la sucrerie de Bois-Rouge qui lui fournit, durant les campagnes sucrières, la bagasse nécessaire à son activité, la centrale de Bois-Rouge transforme la bagasse et les broyats verts en vapeur haute pression et en électricité.
© Albioma / Drone Vidéo Production
Installation de production d’électricité élaborée à partir de la bagasse, résidu du broyage de la canne à sucre.
© Albioma

Mais les importations étant encore trop importantes, l’idée est de rendre les centrales les plus indépendantes possibles et de créer un cercle vertueux local. Pionnière dans l’importance donnée à la biomasse, La Réunion doit faire face à des enjeux d’ordre logistique. Elle doit utiliser davantage les ressources locales pour éviter au maximum les importations lointaines et coûteuses et ainsi engager une indépendance énergétique. Outre la recherche de matières premières locales pouvant être valorisées, de nombreuses études vont dans ce sens pour parvenir à cette indépendance, à l’instar du projet « Piton des Neiges » permettant de créer de l’énergie grâce à la chaleur des sources chaudes du cirque de Salazie.

TÉMOIGNAGE

Pascal Langeron

PASCAL LANGERON, DIRECTEUR GÉNÉRAL ADJOINT D’ALBIOMA

« Nous travaillons avec l’ONF pour développer la filière bois d’énergie locale. On sait que 100 000 tonnes de bois pouvant être transformées en biomasse sont mobilisables sur l’île, sous forme de palettes, déchets verts, espèces invasives, bois de mauvaise qualité nuisant aux espèces endémiques... Notre but est de privilégier au maximum ce qui est disponible, ce qui générera de nouveaux emplois et contribuera à réduire la part des importations de biomasse. »

Rédaction : Pierre-Yves Fouché
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