Croisements 20 light

Page 1

Croisements

n°20 sept. / oct. nov. / déc. 2014

www.operanationaldurhin.eu


2014 2015

Ouverture de la billetterie

Strasbourg 8 septembre Mulhouse 2 septembre

Colmar 16 septembre

Billetterie en ligne www.operanationaldurhin.eu


édito

Cette nouvelle saison 2014-2015 s’ouvre avec un événement incontournable, preuve de la vivacité de l’opéra : la création mondiale de Quai Ouest, d’après la pièce éponyme de Bernard-Marie Koltès, composée par le jeune et talentueux Régis Campo. Une œuvre brute, parfois brutale, qui bouscule les convenances et projette le spectateur au cœur d’un huisclos vertigineux. Une expérience hors du commun à ne pas manquer, mise en scène par Kristian Frédric. Marcus Bosch dirigera l’Orchestre symphonique de Mulhouse. En contrepoint, un peu de gaieté et de légèreté avec deux pépites du répertoire lyrique, deux nouvelles productions aussi. Vincent Boussard proposera un hymne à notre belle région, l’Alsace, au sein de laquelle il fait si bon vivre : découvrez ou re-découvrez sa lecture de L’Amico Fritz de Pietro Mascagni, d’après le roman d’Erckmann et Chatrian. A la tête de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg, Paolo Carignani et dans le rôle-titre, Teodor Ilincai. Pour les fêtes de fin d’année, Waut Koeken et Claude Schnitzler nous projettent au royaume des plaisirs les plus fous : célébrons ensemble La Vie parisienne de Jacques Offenbach ! De plaisir – ou plutôt de désir -, il sera également question côté danse avec Nó. La célèbre chorégraphe brésilienne Deborah Colker en décline et explore les différentes facettes. Les plus jeunes ne sont pas en reste : la nouvelle promotion de l’Opéra Studio leur prépare la création française de La Belle au bois dormant, fable musciale d’Ottorino Respighi, mise en scène par Valentina Carrasco, que nous accueillons pour la première fois à l’OnR. C’est un marathon de vingt-sept représentations qui attend nos jeunes chanteurs, de l’Alsace à Paris ! Nous aurons également le plaisir de les entendre, ainsi que nos artistes des Chœurs et les enfants de la Maîtrise de l’OnR, lors des traditionnels concerts et concerts apéritifs. Les amateurs de récitals se laisseront quant à eux volontiers enivrer par la douceur et la sensibilité de la soprano Sophie Karthäuser, puis de la mezzo-soprano Anne Sofie von Otter. Enfin, curieux et amateurs d’expériences d’exception, laissezvous séduire par les dîners sur scène ou la nouvelle formule des dîners avant spectacle, deux occasions uniques de découvrir l’envers du décor et d’approcher au plus près les artistes. Je vous souhaite une très belle rentrée, riche et éclectique, entre moments de grâce et sensations fortes ! Marc Clémeur Directeur général

Contacts

Opéra national du Rhin 19 place Broglie • BP 80320 67008 Strasbourg cedex 8 +33 (0)3 88 75 48 00 opera@onr.fr

Billetterie Strasbourg 0 825 84 14 84 (0,15 € / min) Mulhouse +33 (0)3 89 36 28 28 Colmar  +33 (0)3 89 20 29 02

www.operanationaldurhin.eu

Directeur de la publication Marc Clémeur Responsable de la rédaction Mélanie Aron Conception graphique et secrétariat de rédaction Flora Klein - OnR Impression Gyss Imprimeur Obernai Journal imprimé à 25 000 exemplaires ISSN : 2103-981X Licences 2-1055775 et 3-1055776 photos : couverture Nis&For & p.3 Hervé Petit


DU 7 FÉV. 2014 AU 4 JANV. 2015 WWW.MUSEE-WURTH.FR TÉL. 03 88 64 74 84

The Last Judgement (détail), 1995 –1999, Céramique, béton, laiton, acier, bois de jarrah, bois d’ekki et chêne / 28 stations, Collection Würth, Inv. 5417-5441

ŒUVRES MAJEURES DE LA COLLECTION WÜRTH

Toutes les activités du Musée Würth France Erstein sont des projets de Würth France S.A.


06

32 29

Sommaire

récitals 28 29

quai ouest 06 10 12

30

Koltès, le desperado joyeux Un espace vivant Une poétique de l'évidence brute

33

Retour en images et en émotions En novembre, l'OnR vous fait tourner la tête

34

les nouveautés 2014-2015

Champagne et cancan Lettre ouverte à Paris

36

des enfants de chœurs

37

les nouveaux danseurs

la belle au bois dormant

38

Voyage dans la mine du ciel

40

la presse en parle

43

calendrier

32

Une fenêtre ouverte sur l'Alsace ... ou la douceur de vivre en Alsace

la vie parisienne 18 20

22

24

Les nœuds de l'amour

profession cintrier

(R)éveille-moi !

opéra studio

de gauche à droite : photos nis&for, Ewa-Marie Rundquist, nis&for

26

concerts & concerts apéritifs dîners sur scène

L'amico fritz 14 16

Sophie Karthäuser Anne Sofie von Otter

Promotion 2014-2015

Avec le soutien du ministère de la Culture et de la Communication Direction régionale des affaires culturelles d’Alsace, de la Ville et Communauté urbaine de Strasbourg, des Villes de Mulhouse et Colmar, du Conseil régional d’Alsace , du Conseil général du Bas-Rhin et du Conseil général du Haut-Rhin.

L’Opéra national du Rhin tient à remercier l’ensemble de ses partenaires, entreprises et particuliers, pour leur confiance et leur soutien.

mécènes

Banque CIC Est Cercle Richard Wagner Philéa Réseau GDS

Sponsors

Caisse d'Épargne d'Alsace Crédit Agricole Alsace Vosges Dagré Communication

Partenaires

Advisa Café de l’Opéra Cave de Turckheim Champagne Nicolas Feuillatte Chez Yvonne CRT Alsace CTS Effervescence Exterion Media Fnac Kieffer traiteur L'Altra Le Pont des Vosges Librairie Kléber Musée Würth France Erstein Parcus Wattwiller

Partenaires médias

Culturbox Dernières Nouvelles d’Alsace France 3 Alsace France Bleu Alsace France Musique L’Alsace Lagardère Métropoles Le Figaro Libération Mezzo Qobuz.com Radio Accent 4 Radio FIP Strasbourg RTL 2 Szenik.eu

Les membres de Fidelio

Association pour le développement de l’OnR

Croisements • 5


création mondiale

quai ouest Un Quai, au milieu de nulle part, hors du temps, au bout du monde peut-être. L’arrivée d’un couple à bord d’une Jaguar vient perturber le silence d’un hangar désaffecté, théâtre des errances d’êtres en perdition. Lui, c’est Koch. À bout, ruiné, il cherche ici la mort. Elle, c’est Monique, sa secrétaire, sa maîtresse sûrement. Leur venue fait office de détonateur auprès des personnages et précipite les destins. Il y a là Rodolfe, ancien soldat qui boite à cause de la kalachnikov qu’il dissimule dans son pantalon, et Cécile, sa femme : usée, ancienne prostituée sûrement, elle fume et crache, visiblement malade. Charles, leur fils, est un petit magouilleur sans grande carrure, qui vendra sa petite sœur Claire à Fak, personnage brutal et sans scrupule. Celui-ci ôtera tout espoir de salut à la jeune fille en lui prenant sa virginité. Enfin, un dernier personnage, omniprésent, énigmatique et silencieux, noir comme l’ébène, évolue dans cet enfer comme une ombre. On l’appelle Abad. On ne sait ni d’où il vient ni son âge. C’est le seul qui n’a pas peur des chiens errants qui peuplent le hangar. Il est le passeur, le révélateur des âmes1.

« Il y avait, sur les bords de l’Hudson River à l’ouest de Manhattan, un grand hangar, qui appartenait aux anciens docks. Peu d’endroits vous donnent, comme ce hangar disparu, le sentiment de pouvoir abriter n’importe quoi – je veux dire par là : n’importe quel événement impensable ailleurs 2.» Au commencement chez Koltès, il y a un lieu, un espace « qui interdit l’indifférence, ou le détour, ou la fuite ». Éloigné de la ville, qu’on distingue au lointain, ce bout de quai et son entrepôt sont séparés du monde par le fleuve, infranchissable. Hors du temps, hors du champ de la vie normale, étrange et fascinant, le lieu écrase de sa présence immuable des personnages qui se déchirent, s’abiment, et passent. Le véritable sujet de l’œuvre, c’est lui. Il pose une lumière crue sur les failles, les doutes, la violence de ses personnages, dont il devient la métaphore. « Imaginez qu’un matin, dans ce hangar, vous assistiez à deux événement simultanés ; d’une part le jour qui se lève, d’une manière si étrange, si antinaturelle, se glissant dans chaque trou de la tôle […] comme un rapport amoureux entre la lumière et un objet qui résiste, et vous dites : je veux raconter cela. Et puis, en même temps, vous écoutez le dialogue entre un homme d’âge mur, inquiet, nerveux, venu là pour chercher de la came ou autre chose avec un grand type qui s’amuse à le terroriser […] et vous dites : c’est cette rencontre-là que je veux raconter. Et puis, très vite, vous comprenez que les deux événements sont indissociables, qu’ils sont un seul événement selon deux points de vue ; alors vient le moment où il faut choisir […] quelle est l’histoire qu’on va mettre sur le plateau et quelle autre deviendra le décor. Et ce n’est pas obligatoirement l’aube qui deviendra le décor.3 » 1. Quai Ouest, introduction 2-3. Un Hangar à l’ouest

Du théâtre à l’opéra > Aux commandes de cette délicate mission : Kristian Frédric et Florence Doublet, épaulés par le compositeur lui-même. > Objectif : retenir l’essence du texte sans le dénaturer, afin de l’adapter au temps de l’opéra. > Résultat : un texte épuré, intense et fidèle, dont chaque mot appartient à Koltès. « Dans Quai Ouest, le théâtre est une manière d’aller vers l’ailleurs. Quand un petit voyou parle chez Koltès, il ne parle pas comme un voyou réaliste : il a une poésie, un style irréel qui procède néanmoins d’une grande authenticité 4. »

Quai ouest au tempo de Campo La musique de Régis Campo, ludique, énergique, colorée, est remplie dʼhumour, et brille par des tempi enlevés et une belle inventivité mélodique. Loin des sentiers battus par les grands noms de la musique actuelle, le compositeur revendique ses maîtres : Stravinsky, mais aussi Rameau et Mahler, ou Messiaen. Il fuit le sentimentalisme et le pathos. En cela, il se retrouve chez Koltès : « Comme lui, je m’intéresse avant tout à l’aspect rythmique de la langue. Koltès réclame de l’action pure, des dialogues parfois rapides. Les échanges entre les personnages sont avant tout des scènes de trafic ou d’échanges, comme on peut en trouver dans le quartier de Belsunce à Marseille ou celui de Barbès à Paris, et l’ironie est une donnée fondamentale de son théâtre. » « Si on réfléchit par exemple aux scènes de violence dans les films de Lynch, Scorsese ou Kubrick, l’action se suffit à elle-même sans que le metteur en scène ait besoin d’ajouter des mouvements de caméra flamboyants ou une musique pléonastique. C’est ce qui m’a donné envie d’une action sèche et lapidaire 5. » Son catalogue, riche de plus de cent œuvres de concert, dʼopéra, de film, aborde diverses formations instrumentales et vocales. Ses pièces sont créées en Europe et à travers une trentaine de pays dans le monde entier par les plus grands interprètes. Quai ouest fait suite à un premier ouvrage lyrique, Les Quatre Jumelles, d’après une pièce de Copi. 4-5. Entretien avec Régis Campo, à paraître dans le programme du spectacle.

photo hervé petit

Un hangar, à l’ouest


opéra strasbourg

sa 27, ma 30 septembre 20 h je 2 octobre 20 h

la filature mulhouse

ve 10 octobre 20 h

opéra

Rencontre avec Régis Campo, Marcus Bosch et Kristian Frédric animée par Marc Clémeur ve 26 septembre 18 h 30 • entrée libre

koltès le desperado joyeux

Opéra en trente séquences de Régis Campo Livret de Kristian Frédric et Florence Doublet dʼaprès la pièce de Bernard-Marie Koltès

Voyage Révélation En 1968, à Strasbourg. Il découvre Maria Casares dans Medea de Sénèque. La passion du théâtre est en lui. Il écrira.

« Une part de ma vie, c’est le voyage. L’autre, c’est l’écriture. J’écris très lentement. » 1 New York, l’Afrique, le Guatemala… Koltès voyage, s’immerge dans d’autres mondes pour mieux comprendre le sien.

Direction musicale

Marcus Bosch

Mise en scène

Kristian Frédric Décors

Bruno de Lavenère costumes

Gabriele Heimann lumières

Nicolas Descoteaux

Rencontre

Solitude

maurice koch

Paul Gay

monique pons

Celle de Chéreau. C’est un choc. Il a révélé Koltès, dans son théâtre des Amandiers à Nanterre. « Avant ma rencontre avec lui, je croyais que le théâtre ne pouvait pas raconter le monde actuel. Je me trompais. » 2

C’est peut-être ce qui le rapproche le plus de Chéreau. « Il a été une météorite qui a traversé notre ciel avec violence, dans une grande solitude de pensée et avec une incroyable force, à laquelle il était parfois difficile d’avoir accès 3. »

Lumière

PHOTO elsa ruiz

« Il ne supportait pas qu’on qualifie ses pièces de sombres ou désespérées, ou sordides […] elles ne connaissent pas le désespoir ordinaire, mais autre chose de plus dur, de plus calmement cruel pour nous, pour moi », écrit Chéreau. « C’était un desperado joyeux, voilà. Moi, je ne suis pas un desperado, et j’étais souvent moins joyeux que lui, qui savait si bien rire 4. »

1-5. Bernard-Marie Koltès, Une Part de ma vie, Les éditions de Minuit 2-3-4. Patrice Chéreau, Un Ami. Le Monde, 19 avril 1989

Mireille Delunsch cécile

Marie-Ange Todorovitch claire

Hendrickje Van Kerckhove rodolfe

Christophe Fel charles

Julien Behr fak

Fabrice di Falco abad

Augustin Dikongue Chœurs de l’OnR

Métaphore « C’était seulement si ce que je racontais avait l’apparence d’une hypothèse réaliste que la métaphore prenait son sens et ne devenait pas une simple fantaisie 5 ». Aussi concrets qu’ils soient, les lieux koltésiens sont hautement métaphoriques : ils racontent un rapport au monde.

Orchestre symphonique de Mulhouse Coproduction avec le Staatstheater Nürnberg Commande de l'Opéra national du Rhin et du Staatstheater Nürnberg Avec le soutien du Fonds de Création Lyrique Aide à l'écriture d'oeuvre musicales nouvelles originales

Croisements • 7


« Chez Bernard-Marie Koltès, aux murs sont accrochés des portraits de Jack London, Bob Marley, Bruce Lee, Bob de Niro, Burning Spear. Il écoute du reggae. Le téléphone sonne. Il répond en espagnol. Sur la table de travail se trouve une petite photo couleur encadrée : un hangar bâti sur pilotis, dans l’ancien port de New York… »  Comment porter sa condamnation, entretien avec Hervé Guibert. Introduction. Le Monde, 1983

« En ce moment, j’écris une pièce dont le point de départ est aussi un lieu. À l’ouest de New York, à Manhattan, dans un coin du West End, là où se trouve l’ancien port, il y a des docks ; il y a en particulier un dock désaffecté, un grand hangar vide, dans lequel j’ai passé quelques nuits, caché. C’est un endroit extrêmement bizarre – un abri pour les clodos, les pédés, les trafics et les règlements de comptes, un endroit pourtant où les flics ne vont jamais pour des raisons obscures. Dès que l’on y pénètre, on se rend compte que l’on se trouve dans un coin privilégié du monde, comme un carré mystérieusement laissé à l’abandon au milieu d’un jardin, où les plantes se seraient développées différemment ; un lieu où l’ordre normal n’existe pas, mais où un autre ordre, très curieux, s’est créé. Ce hangar va bientôt être détruit ; le maire de New York, pour sa réélection, a promis de nettoyer tout ce quartier, probablement parce que, de temps en temps, un cadavre y est jeté à l’eau. J’ai eu envie de parler de ce petit endroit du monde, exceptionnel et, pourtant, qui ne nous est pas étranger ; j’aimerais rendre compte de cette impression étrange que l’on ressent en traversant ce lieu immense, apparemment désert, avec, au long de la nuit, le changement de la lumière à travers les trous du toit, des bruits de pas et de voix qui résonnent, des frôlements, quelqu’un à côté de vous, une main qui tout à coup vous agrippe. »

photos ONR

Bernard-Marie Koltès, Une Part de ma vie, Les éditions de Minuit, 1999/2000


(Extraits)

Pour mettre en scène Quai Ouest Bernard-Marie Koltès

Il faudrait, a priori, considérer que tout langage est ironique, et tout déplacement grave ; cela éviterait de prendre au sérieux des choses qui ne le sont pas, de rendre tristes des scènes qui devraient être drôles, et d’éliminer tout le tragique de cette histoire.

Charles n’est pas un faible, ni un mou, ni un indécis. Il est tout juste « empêché » ; je veux dire par là que le léger décalage entre lui et la vie est la vraie cause de l’inachèvement de ses projets.

Il ne faut pas prendre Cécile pour une imbécile ; tout le monde, autour d’elle, s’en charge. Prendre Cécile pour une imbécile, ce serait la prendre pour une mère, pour une aristocrate en exil, ou pour une Indienne qui possède je ne sais quels pouvoirs magiques ; alors qu’elle n’est, elle le dit ellemême, qu’une mouche enfermée dans un placard, et qui crèvera à coup sûr avant qu’on ouvre la porte.

Claire court à la poursuite de Monique ; à la fin, elle la rejoint.

Monique, c’est une de ces interminables Je vois mal comment on pourrait éviter de rendre Rodolfe monstrueux ; c’est un monstre parce qu’il est heureux, ce qui n’est jamais bien joli à voir.

morts de théâtre, où le héros blessé accumule les raisons de sa mort pour ne pas dire qu’il meurt, tout court, sans raison.

Abad : Je ne l’ai pas rendu muet parce que c’était plus facile, bien qu’effectivement cela le fût, mais parce que c’était incontournable. Abad n’est pas un personnage en négatif au milieu de la pièce ; c’est la pièce qui est le négatif d’Abad.  Le pire qui peut arriver à Koch, c’est qu’on le fasse douloureux et profond, alors qu’il est capricieux et secret. Il serait bien d’arriver à en déduire, en ce qui concerne Fak, qu’il est asiatique, d’apparence plutôt frêle, et d’une force redoutable […] il pourrait, s’il le voulait, vous étaler tout ce petit monde d’un coup de savate.

Le pire enfin qui puisse arriver à la pièce, c’est qu’on la fasse sentimentale et pas drôle. On n’a pas le droit d’interpréter aucune des scènes de cette pièce comme une scène d’amour […] Ce sont des scènes de commerce, d’échange et de trafic, et il faut les jouer comme telles. Il n’y a pas de tendresse dans le commerce, et il ne faut pas en rajouter là où il n’y en a pas.

Quai Ouest • Croisements • 9


rencontre

un espace vivant Hervé Petit : Votre collaboration avec notre maison n'est pas récente. Vous avez déjà œuvré pour de nombreuses productions depuis une dizaine d’années. Quelles sont-elles ? Bruno de Lavenère : C’est la maison dans laquelle j’ai le plus travaillé jusque-là. Cette confiance que me font la direction et les équipes m’honore. J’ai tout d’abord travaillé comme assistant de Rudy Sabounghi pour Le Mandarin merveilleux puis la soirée Stravinsky avec Le Rossignol et Œdipus Rex mis en scène par Lucinda Childs. Plus tard, Bertrand d’At, puis Ivan Cavallari m’ont confié des scénographies de ballets : Songs from before de Lucinda Childs, Le Baiser de la fée de Michel Kelemenis, Chout de Virginia Heinen, et plus récemment Don Quichotte de Rui Lopes Graça. Je travaille aussi à l’OnR depuis quelques années pour l’opéra. Farnace en 2012 mis en scène par Lucinda Childs, dont le rôle-titre était tenu par Max Emanuel Cencic. J’ai d’ailleurs créé pour ce dernier la scénographie et les costumes de Siroe qu’il vient de mettre en scène au festival d’Athènes. La saison passée, j’ai eu la chance de retravailler avec Lucinda pour Doctor Atomic. H. P. : Votre travail a été à cette occasion salué pour cette production par le Syndicat national de la critique par l'attribution du Prix de la création des meilleurs éléments scéniques. B. d. L. : C’est mon travail et celui d’Étienne Guiol, un talentueux vidéaste, qui a été récompensé. Mais c’est aussi le travail de toute une équipe. Il y avait une osmose rare entre l’équipe de création et le plateau sur cette production. Je me réjouis que le résultat ait attiré l’attention des professionnels.

Bruno de Lavenère est partie prenante de la création. Pour Quai ouest, il a fait plus que scénographier, apportant au compositeur Régis Campo son éclairage et ses projections du décor de l'opéra, ce lieu devenu personnage à lui seul.

10 • Croisements • Quai Ouest

H. P. : Comment procédez-vous avec les metteurs en scène ? B. d. L. : C’est très variable en fonction des personnalités de chacun mais le dialogue autour de l’œuvre, de la musique et de la dramaturgie est toujours le point de départ. Je cherche à comprendre et à intégrer les besoins et les non-dits de mes collaborateurs afin de les transposer dans un dispositif singulier qui leur servira d’outil, de support. L’aspect formel n’est jamais préétabli, il est le résultat de cette rencontre. Cela amène à des rebondissements qui maintiennent la tension dans la création et qui vous amènent où vous ne pensiez pas vous diriger. La création naît de l’enrichissement mutuel, mais aussi du contrepoint. Je modélise toujours mes scénographies avec des logiciels qui permettent une prévisualisation très sensible et précise. Cette technique permet de concrétiser très en amont chaque choix artistique et d’anticiper au mieux sa mise en place technique afin de ne gérer que l’essentiel, au moment des répétitions.


H. P. : Voilà que cette saison, nous avons rendez-vous deux fois avec votre travail. Pour Quai Ouest et La Vie parisienne. Ces deux ouvrages n'ont rien à voir l'un avec l'autre. Comment les aborde-t-on ? B. d. L. : Effectivement, ces deux projets sont totalement différents mais ils ont en commun la théâtralité de leur livret. Dans des registres bien différents, tous deux sont des manifestes de théâtre par leur rythme, leur jeu et leur écriture. étrangement, je constate que j’ai créé un espace faussement unique pour La Vie parisienne alors que Quai Ouest est un véritable labyrinthe. Les personnalités des metteurs en scène sont aussi très différentes mais les deux sont de véritables hommes de théâtre. Kristian Frédric est un grand connaisseur du théâtre de Koltès. Waut Koeken est lui un spécialiste d’Offenbach. Un point commun est la difficulté de travailler sur ces deux pièces. La pièce d’Offenbach doit être brillante, fine et pétillante. Celle de Koltès doit fusionner avec la langue subtile de son auteur sous peine de hors sujet.

haut : maquettes de décors de bruno de lavenère • droite : photo Alain Kaiser

H. P. : Pour Quai Ouest, il s’agit d’une création. Le travail a-t-il été du coup plus facile que pour un grand classique ? B. d. L. : C’est une autre différence radicale, La Vie parisienne est un grand classique aux multiples références alors que Quai Ouest est une création. Lorsque j’ai travaillé sur le projet Quai Ouest, la composition musicale n’existait pas encore. Je ne pouvais donc pas m’immerger dans l’œuvre de ce point de vue. Le suspens restera complet jusqu’à la première répétition avec orchestre. En fait, chose rare, c’est le compositeur, Régis Campo, qui avait une copie de mon storyboard alors qu’il composait il y a un an. L’espace de Quai Ouest est un volume simple et épuré qui devient un véritable labyrinthe. C’est une sorte de boite crânienne. Il est vivant. Il engloutit les personnages. Il les digère, les recrache. Il est pourtant tout ce qu’il y a de plus concret et réaliste, un hangar situé sur le quai de l’Hudson River à New York.

1

2

H. P. : En construction dans les ateliers, j’ai pu voir des éléments du décor dont un graff… Il évoquait ceux que l’on voyait dans les années 70-80, au moment de la naissance de cet art. B. d. L. : En effet, j’ai vraiment souhaité que certains graffitis soient conforme à l’époque à laquelle se déroule la pièce. D’autres sont de facture plus récente mais tous sont usés et patinés. En fait, ils devraient être à peine visibles. Heureusement, dans l’équipe des peintres des ateliers de décors, nous avons un maître en la matière, en la personne de Georges-Eric Majord, dont c'est l'une des spécialités. Il a pu travailler dans cet esprit. Vous parlez des années 1980, effectivement, lorsque Kristian Frédric m’a proposé de travailler sur ce projet avec lui, je suis allé chercher dans ma bibliothèque un livre dans lequel Harry Shunk avait fait toute une série de photos d’un de ces hangars des bords de L’Hudson avant qu’il ne soit démoli. Le fameux Pier 18 [Jetée numéro 18] était alors investi par une grande communauté d’artistes parmi lesquels Daniel Buren ou Richard Serra, qui y ont notamment réalisé des installations à l’époque. J’aime croire que Bernard-Marie Koltès aurait arpenté ces lieux.

3

H. P. : Comment situez-vous cette expérience dans votre cursus ? B. d. L. : C’est une expérience très excitante. Un projet qui demande une très importante concertation entre tous les membres de l’équipe artistique et comme il s’agit d’une création, le compositeur, bien vivant, en fait partie. Le suspens reste complet jusqu’au jour de la première. 4 1-4. Graff, structure métallique et matiérage du mur pour le décor de Quai ouest. Quai Ouest • Croisements • 11


quai ouest

une

poétique

de l'évidence brute Bernard-Marie Koltès se sentait proche de Tchekhov : il écrivait, disait-il, des comédies, mais elles étaient de son vivant et sont encore aujourd’hui montées comme des tragédies. Kafka aussi, dont le nom propre est souvent associé à une rationalité devenue paroxysme de l’angoisse, faisait rire ses amis quand il leur lisait ses textes. Quant à Beckett, son écriture jubilatoire ne lui évite pas d’être fréquemment relégué dans un triste et sentimental existentialisme de l’absurde. La propension à interpréter de nombreuses propositions littéraires et artistiques contemporaines, les siennes au premier chef, comme si elles relevaient nécessairement de telles thématiques, irritait Koltès. Contre les clichés et l’oubli de la facture, de la construction, de la poétique même des œuvres, il invitait les metteurs en scène à faire de ses pièces « des choses drôles ». De fait, dès que l’on renonce à rabattre la texture des œuvres, la posture effective des personnages et la dynamique spécifique des dialogues sur d’hypothétiques motivations existentielles, sur une sorte de sordide désespérance, on discerne dans la manière de Koltès une dimension que l’on peut apparenter à une certaine forme de comique. Non pas bien sûr le comique de situations patiemment construites, reposant sur des mœurs sociales identifiées et sur des usages conventionnels du langage, comme dans le théâtre de boulevard ; mais un comique d’événements, fait d’irruptions et de disparitions soudaines, d’accidents impossibles à relier à une logique d’ensemble parce que surgissant brusquement d’un arrière-fond insoupçonné. « Du mécanique plaqué sur du vivant », comme disait Bergson ? Quelque chose du côté de Buster Keaton, de son visage grave traversant impassible des séries désopilantes de catastrophes imprévues ? La comédie humaine racontée par Koltès ressemble à la pluie d’atomes qu’évoquaient les philosophes matérialistes de l’Antiquité : un univers fait d’une multitude de substances élémentaires en mouvement, chacune suivant la trajectoire de sa propre chute, indépendamment de toutes les autres. Ce serait l’image même de la monotonie stérile, si parfois, par hasard, sans logique ni plan préétabli, certains de ces atomes ne venaient se rencontrer, se heurter. Les mondes naissent de ces chocs fortuits : des figures se forment, des relations se tissent, une complexité s’instaure. Mais la consistance alors obtenue n’abolit jamais complètement les aléas de son initiale impulsion. La tragédie a besoin de continuités, elle évoque des destins, elle restaure des généalogies et recoud des hérédités, pour que les déchirements actuels soient accouplés selon des liens de nécessité aux origines dont ultimement ils proviennent. Quand Bernard-Marie Koltès refuse que ses propres œuvres soient apparentées au tragique, il rappelle à la fois la discontinuité formelle de leur organisation et l’universelle contingence dont est fait désormais, à ses yeux, le monde qu’elles racontent. Une succession de séquences préférée à une composition par actes, cela permet de jouer sur des contrastes, des ruptures, des arrivées impromptues, des collisions de corps et de mots, des alternances spasmodiques de lueurs et d’opacités, de paroles explicites et d’énigmes insondables. Le ressort comique se trouve là, dans l’intensité de ces cristallisations de sens ou de non-sens qui se succèdent sans s’enchaîner, qui produisent leur effet immédiat et ne se dissolvent pas dans un ordre linéaire où résiderait le secret de leur signification ou de leur valeur. La poétique de Koltès est une poétique du choc et de l’immédiateté. La raison n’en est pas seulement esthétique. Il veut montrer comment bougent et parlent des personnages vivant aujourd’hui, dans les sociétés occidentales contemporaines.

12 • Croisements • Quai Ouest

« La poétique de Koltès est une poétique du choc et de l’immédiateté. Il veut montrer comment bougent et parlent des personnages vivant aujourd’hui, dans les sociétés occidentales contemporaines. »


photos onr

« Aujourd’hui tout s’achète, tout se vend, même l’amour, même la vie, même la mort. La teneur de vérité de l’existence, le sens non illusoire des relations humaines, c’est la transaction : tractation, marchandage, deal. Tout le reste est embellissement, plus ou moins naïf, plus ou moins mensonger. »

Or celles-ci, selon lui, sont désormais rythmées, dans leur quotidienneté la plus ordinaire, par des scansions irréductibles aux formes « classiques » ou tragiques. Il revient aux arts d’exprimer de telles pulsations, plutôt que de reconduire des temporalités héritées d’autres époques. Ces pulsations, telles que Bernard-Marie Koltès les entend et les restitue, sont celles de la marchandise. Quai Ouest confirme cette intuition générale, perceptible dans d’autres pièces : les rapports entre humains sont désormais entrés dans un temps où ils sont, à leur tour, racontables selon le modèle des échanges commerciaux. Aujourd’hui tout s’achète, tout se vend, même l’amour, même la vie, même la mort. La teneur de vérité de l’existence, le sens non illusoire des relations humaines, c’est la transaction : tractation, marchandage, deal. Tout le reste est embellissement, plus ou moins naïf, plus ou moins mensonger. Ce qu’il faut raconter, ce qu’il faut lancer à la figure des contemporains, c’est une pluie d’atomes isolés qui ne se rencontrent plus pour l’essentiel que dans des dispositifs où la valeur d’échange de toutes choses, y compris les plus intimes, a pris le pas sur toute autre finalité. Sans doute est-ce ce parti pris qui donne à l’écriture de Koltès son caractère de crudité, voire de brutalité. Les phrases paraissent aspirées dans un désir de concision autosuffisante, les tensions sont posées sans perspective de résolution, chaque personnage semble confiné dans son mouvement propre, réduit à la fonction qu’il occupe dans l’opération marchande dans laquelle il se trouve engagé, en-deçà de toute subjectivité réflexive et relationnelle. Ce sont souvent des êtres sans passé, sans avenir, reniant leur descendance, récusant toute extériorité. Dans Quai Ouest, les quelques exceptions qui se détachent de ce fond d’indifférence sont d’autant plus saisissantes. Par exemple Cécile évoquant un âge, un pays et une langue « d’avant », puis traversant in extremis, au moment de mourir, la sédimentation d’idiomes différents qui résume sa vie d’Indienne. Ou le « Je veux rester dans le souvenir de quelqu’un » que Charles adresse au père qui le renie. Ou encore la déclaration d’amour que Claire lance à son frère, comme si elle venait de saisir au vol le témoin d’humanité lâché par Cécile agonisante. Mais le plus souvent, le monde raconté est comme privé de médiation. Les choses se font et se disent sans autre raison que d’être faites et dites, dans leur évidence brute. Celle-ci est indifféremment pure et abjecte, superbe et immonde, sublime et insoutenable. Montrer cela ne fait pas de Koltès un auteur tragique, ni un peintre des marginalités. Un cynique lucide, plutôt ? Chez lui, le réalisme documentaire contribue à la construction d’un modèle d’intelligibilité qui relate crûment ce que le monde est devenu partout, dans un hangar désaffecté au bord de l’Hudson comme en tout autre lieu : un entrelacs de purs rapports de forces. Il y a là bien sûr de l’horreur, de la violence sans nom, de l’injustice extrême. Et il y a aussi d’autres choses : du quiproquo, des déplacements ironiques, des candeurs risibles, des sentiments. C’est pourquoi peut-être Koltès souhaitait qu’on monte ses pièces autrement qu’en rêvant de continuités et d’héritages. Qu’on n’oublie pas les pulsations, les scansions et les rythmes. Quai ouest, écrit pour le théâtre, peut devenir un opéra, parce que dès sa version initiale l’œuvre possède une musicalité intrinsèque. évidemment pas une musicalité du développement, du lyrisme soutenu, de l’action maîtrisée. Mais une musicalité de l’intensité et de l’interruption, de la brusque adresse et de la réponse sèche, de l’intermittence et du silence. Une musique qui parle simultanément de violence brute et de vitalité.

daniel payot

>

>>

Daniel Payot enseigne la philosophie de l'Art à l'Université de Strasbourg


l'amico fritz

L’Ami Fritz, c’est un peu Cendrillon au pays des cigognes et de Hansi : à la France, quand bien même une majorité d’ouvrages paraissent un rentier d’âge mûr se prend d’amour pour la fille de son métayer en allemand. Ce qui peut sembler surprenant aujourd’hui ne doit et, après quelques épisodes rocambolesques, finit par l’épouser. Si le pas nous faire oublier qu’avant 1870, l’Alsace est une région contexte de cette histoire d’amour universelle put paraître exotique aux frontalière culturellement très perméable qui n’est jamais française spectateurs romains qui la découvrirent lors de la première de l’opéra que depuis un bon siècle. Lorsqu’en 1797, Daniel Ehrenfried de Mascagni en 1891, ils lui réservèrent le meilleur accueil. Voici Fritz Stöber fonde la Litterarische Gesellschaft alsatischer Freunde, revenu sur ses terres. il s’agit d’en faire un outil de Deutschfranzosentum, en d’autres Le livret est en effet directement inspiré du roman d’émile Erckmann termes d’une affirmation d’attachement à la France par le biais et Alexandre Chatrian et de la pièce qui en a été tirée. Paru en 1864 de la langue allemande dont la culture alsacienne reste encore chez Hetzel (l’éditeur de Jules Verne), ce roman populaire fleure le tributaire. Il n’y a pas de contradiction. L’engouement pour la régionalisme alors très à la mode, comme en témoigne la Mireille culture populaire, en Allemagne –  on pense au fameux Knaben (1859) de Frédéric Mistral, qui reçut rien moins que le prix Nobel Wunderhorn publié à partir de 1805 – puis en France avec le en 1904, et fut d’ailleurs elle aussi adaptée pour l’opéra par Charles travail de philologues comme le Breton Hersart de la Villemarqué, Gounod en 1864. à la différence du poème de Mistral, initialement puis de folkloristes tels Sébilot ou van Genepp qui en font un écrit en provençal dans le cadre du mouvement du Félibrige qui nouveau champ des sciences sociales au début du XXe siècle, ambitionnait de promouvoir la renaissance intellectuelle de la langue stimule les auteurs alsaciens. Œuvre collective, Alsatia (1850d’oc, L’Ami Fritz est publié en français. Et pour cause, on attribue à 1885) compile des chansons populaires, des contes et légendes. la littérature populaire des vertus pédagogiques. Diffuser les légendes Dans cette veine, le fils aîné de Stöber, Auguste, publie en 1852 et les traditions populaires, c’est faire Die Sagen des Elsasses, résultat de la géographie et des citoyens. En d’un fastidieux travail de collecte Avant Hansi, ils diffusent déjà une revanche, lorsque la pièce est jouée des traditions orales alsaciennes, certaine image de l’Alsace, faite de ruines tandis qu’Adolphe, le cadet, compose à la Comédie Française, à partir de romantiques et de paysans costumés dans des poèmes dont le fameux Hans 1876, L’Ami Fritz a pris d’autres couleurs : la France pleure l’Alsaceim Schnokeloch qui reste, avec des intérieurs typiquement rhénans (...) Lorraine perdue six ans plus tôt. L’Ami Fritz, le parangon du folklore où l’Alsacien est représenté privilégiant C’est presque un acte de résistance. alsacien, tout en se singularisant les valeurs laborieuses, religieuses, L’opéra de Mascagni exhale la par l’utilisation du dialecte, plutôt familiales et morales. Gemütlichkeit alsacienne : Fritz le que du Hochdeutsch. La littérature rentier bonhomme et Suzel la fille du dialectale, adoubée dès 1816 par régisseur sʼapprivoisent, puis s’aiment dans un village qui respire le Goethe qui fait l’éloge de la pièce Der Pfingstmontag de Georgesbonheur de vivre ; Katel la servante s’affaire aux fourneaux quand elle Daniel Arnold, pose en effet des problèmes de compréhension, ne fait pas le marché, les notables passent leur temps à la brasserie et tant aux francophones qu’aux germanophones, mais divise aussi vivent en bonne intelligence avec les communautés juive et tzigane ; sur le choix du dialecte dont on sait qu’il connait de multiples déclinaisons du sud au nord de l’Alsace. Loin d’être considérée enfin le récit est parsemé d’idiomatismes censés conférer à l’ensemble comme une difficulté, la question dialectale stimule au contraire une indéniable couleur locale. Il correspond certes à une réalité de le développement d’une philologie alsacienne qui trouve des l’Alsace rurale, plutôt opulente comme en témoignent les voyageurs, applications dans le théâtre populaire prenant progressivement sa républicaine et protestante, et surtout encore très « allemande » malgré place entre les théâtres francophone et germanophone. La création les opérations de francisation. Une Alsace multicommunautaire officielle du théâtre alsacien, en 1898, sera d’ailleurs un événement également : le rabbin David y joue un rôle important, à l’image de la largement relayé, tant en France qu’en Allemagne, non sans profonde implantation des communautés juives dans les campagnes, susciter de polémique. qui connaissent un essor sans précédent entre 1840 et 1860, comptant Au verbe se conjugue l’image. Ces ouvrages sont souvent illustrés plus d’une centaine de communautés jouissant théoriquement des à grand recours de lithographies, art « narcissique » (B. Vogler) mêmes droits que les catholiques et les protestants. Le roman révèle dans lequel excellent bon nombre d’Alsaciens dont le plus connu, toutefois leur situation contrastée. Tolérés, ils sont malgré tout mis à Gustave Doré, ne saurait résumer l’ampleur de la production. Avant l’écart, dans des conditions de vie encore précaires, voire sordides, Hansi, ils diffusent déjà une certaine image de l’Alsace, faite de et victimes au mieux de condescendance, au pire d’un antisémitisme ruines romantiques et de paysans costumés dans des intérieurs latent. typiquement rhénans, au-delà même de la ligne bleue des Vosges L’Alsace de l’Ami Fritz répond plus encore à l’image qu’ont voulu puisque l’éditeur Hetzel diffuse largement l’œuvre d’Erckmannen diffuser un certain nombre d’auteurs, depuis la fin du XVIIIe siècle. La production littéraire alsacienne, dont L’Ami Fritz demeure, Chatrian dans l’hexagone, en reprenant notamment certaines aujourd’hui, l’un des derniers titres connus, se caractérise en effet par planches dans le Magasin d’éducation et de récréation (1864) son abondance, mais aussi la récurrence de l’expression de la fidélité où l’Alsacien est représenté privilégiant les valeurs laborieuses, 14 • Croisements • L'Amico Fritz

maquettes de décors : dessins préparatoires de vincent lemaire

l'ami fritz

une fenêtre ouverte sur une certaine Alsace


religieuses, familiales et morales. Une Alsace de carte postale en somme, mais pas seulement. L’Ami Fritz serait-il un roman trop simple pour être naïf  ? Les lectures de l’œuvre d’Erckmann-Chatrian divergent. Pour les uns, roman populaire et républicain sans idéologie ni édification autre que le bon sens paysan ; pour les autres, roman de propagande des mythes révolutionnaires et républicains dans un Second empire finissant. Il est clair en revanche que l’écriture même des auteurs, que plusieurs critiques littéraires de l’époque plaçaient pourtant au-dessus de celle de Zola, souvent jugée avec condescendance, opéra un glissement de lectorat, des adultes vers un plus jeune âge, et notamment dans le cadre scolaire qui s’appropria finalement Erckmann et Chatrian pour leurs vertus pédagogiques, avant de progressivement l’oublier...

éric Hassler

Éric Hassler est agrégé et docteur en Histoire. Membre de l'Institut d'Histoire moderne et contemporaine (ENS-CNRS-Paris I), il enseigne actuellement au Gymnase Jean-Sturm et à l'Université de Strasbourg. Il est l'auteur d'un livre sur la Cour de Vienne (1680-1740) paru aux presses universitaires de Strasbourg en 2013.

>>

>


nouvelle production

l'amico fritz ... ou la douceur de vivre en Alsace

Comédie lyrique de Pietro Mascagni, L’ Amico Fritz est une ode à l’amour et à la douceur de vivre en Alsace. Vincent Boussard revient à l’OnR mettre en scène cette nouvelle production. Vincent Lemaire signe les décors et Christian Lacroix, les costumes.

16 • Croisements • L'Amico Fritz

Fritz Kobus, bon vivant qui se vante auprès de ses amis de ne vouloir jamais se marier, tombe sous le charme de Suzel et finit par l’épouser ! Voici résumé en quelques mots le sujet du second opéra du célèbre mais controversé Pietro Mascagni. Un des rares compositeurs devenu illustre du jour au lendemain grâce à un seul ouvrage, Cavalleria Rusticana, (Premier prix du concours Sonzogno, créé à Rome, puis donné dans le monde entier), qui consacra à la fois le compositeur et le genre – le vérisme. Refusant de se cantonner à un seul genre, Mascagni se tourne alors vers la comédie et le conte. Il écrit d’un seul jet L’Amico Fritz, une « comédie lyrique » pleine de fraîcheur et de spontanéité, d’après le roman d’Erckmann-Chatrian, L’Ami Fritz. Connus sous le nom de plume d’Erckmann-Chatrian, ces deux romanciers français, émile Erckmann et Alexandre Chatrian, ont été associés pendant plus de quarante ans. L’un écrivait (émile Erckmann), l’autre corrigeait et suggérait (Alexandre Chatrian). Bien que Lorrains tous les deux, leur œuvre est fortement imprégnée des idées et de l’univers de l’Alsace et reflète cette province attachante dont ils se sentaient si proches.


opéra strasbourg

ve 24, ma 28 octobre 20 h di 26 octobre 15 h me 5, ve 7 novembre 20 h

la filature mulhouse

ve 21 novembre 20 h di 23 novembre 15 h

librairie kléber

Rencontre avec Paolo Carignani, Vincent Boussard et Christian Lacroix je 23 octobre 18 h 30 • entrée libre

Leur conception novatrice du conte et du roman qu’ils veulent « nationaux et populaires » fait de leur œuvre (une centaine de contes et de romans) l’un des succès les plus retentissants de l’histoire de la littérature française. « Je transcris ma musique comme je la ressens. Ma musique s’adresse aux cœurs bons et je ressens un tel bonheur intérieur en l’écrivant ! » (Pietro Mascagni) Très éloigné des drames humains souvent dépeints dans le vérisme, L’Amico Fritz chante au contraire l’amour naissant et la douceur de vivre en Alsace. Cette nouvelle œuvre de Mascagni, si différente de celle qui le fit connaître, eut un franc succès à Rome, et davantage encore à Londres, Vienne, Paris puis à Hambourg sous la direction de Gustav Mahler. Dans cet opéra, l’aspect purement vocal revêt toute son importance et Mascagni y déploie un lyrisme plein de charme. « Il est déplorable, reconnut-il plus tard, que j’aie commencé par Cavalleria. J’ai été couronné avant d’être roi. »

« Quel trouble étrange s’empare brusquement de moi ! Quel est ce nouveau sentiment dont je sens mon cœur tout agité ? C’est l’amour que j’ai raillé qui se venge et m’envahit… »

maquette de décors : dessin préparatoire de vincent lemaire

Fritz, Acte II Fritz Kobus fête son anniversaire dans lʼintimité de sa confortable salle à manger. Parmi les trois amis quʼil a invités à déjeuner figure le rabbin David Sichel, marieur invétéré. La jolie Suzel, fille dʼun fermier de Fritz, lui présente un bouquet de violettes avec ses vœux dʼanniversaire. Fritz, visiblement touché de cette attention, invite la jeune fille à partager leur repas. David, charmé par la gentillesse de celle-ci, décide de lui trouver un mari et croit même pouvoir annoncer que ce sera Fritz. Celui-ci éclate de rire et parie une vigne quʼil mourra vieux garçon. Dans la cour de la ferme des Mésanges, les villageois, célèbrent le printemps. Suzel offre à Fritz un panier de

cerises bien mûres. David, après s’être entretenu avec elle, est fixé : Suzel aime Fritz. Pour exciter la jalousie de son ami, David lui dit quʼil aura bientôt trouvé un mari pour Suzel. Fritz resté seul éprouve un trouble nouveau quʼil craint dʼanalyser. Serait-il à son tour pincé, pris au piège ? Il repart pour la ville avec ses amis, laissant la pauvre Suzel en larmes. L’annonce des noces de la fille du fermier plonge Fritz dans une profonde mélancolie. Il ne peut plus se passer de Suzel ! Elle le supplie de ne pas permettre un mariage qui la livrerait à un inconnu quʼelle ne peut pas aimer. Plutôt mourir. Incapable de lutter davantage contre lui-même, Fritz lui déclare son amour et la prend dans ses bras : « Je tʼaime ! » Le malin David a gagné son pari ; mais la vigne qui en était lʼenjeu, il la donne à Suzel en guise de dot.

Vincent Boussard revient à l’OnR Après des débuts en 1999 au Studio-Théâtre de la Comédie-Française, Vincent Boussard se consacre aujourd’hui principalement à lʼopéra. Il a collaboré avec des maisons telles que le Staatsoper de Berlin, le Bayerische Staatsoper, le Festival Haendel à Halle, l’Opéra de Graz, le Festival d’Innsbruck, la Brooklyn Academy of Music à New York, le Royal Swedish Opera à Stockholm, le Théâtre Royal de la Monnaie, le Grand Théâtre de Luxembourg, l’Opéra de Marseille et le Festival dʼAix-en-Provence. Habitué de notre maison, puisqu’il a déjà présenté à l’OnR Frühlings Erwachen en 2008, Louise en 2009, Hamlet en 2011 et Les Pêcheurs de perles en 2013, il revient mettre en scène cette nouvelle production de L’Amico Fritz dans des décors de Vincent Lemaire. Christian Lacroix, après Les Pêcheurs de perles en 2013, signera les costumes de cette nouvelle production. Un beau spectacle en perspective qui mettra à l’honneur les traditions et les saveurs de l’Alsace et la douceur d’y vivre.

Commedia lirica en trois actes de Pietro Mascagni Livret de P. Suardon (Nicola Daspuro) d'après le roman d'Erckmann-Chatrian

Direction musicale

Paolo Carignani (sauf 21/11) Fabrizio Maria Carminati (21/11)

Mise en scène

Vincent Boussard Décors

Vincent Lemaire costumes

Christian Lacroix lumières

Guido Levi vidéo

Isabel Robson

fritz kobus

Teodor Ilincai suzel

Brigitta Kele beppe

Anna Radziejewska david

Elia Fabbian hanezÒ

Sévag Tachdjian federico

Mark Van Arsdale caterina

Tatiana Anlauf Chœurs de l’OnR Orchestre philharmonique de Strasbourg Copyright et édition Casa Musicale Sonzogno di Piero Ostali, Milano

Croisements • 17


Champagne & cancan

écrite en 1867 à l’occasion de l’exposition universelle, La Vie parisienne reste l’œuvre phare d’un compositeur, d’une ville, d’un genre… c’est sans doute l’ouvrage d’Offenbach qui a totalisé le plus de représentations.

18 • Croisements • La Vie parisienne

la vie parisienne Jeux de masques Des amants fébriles et une maîtresse commune qui les laisse tomber pour un autre, un Brésilien fanfaron et des touristes excités par l’idée de profiter de Paris, voilà le fond de cette envolée de bonne humeur… la vie parisienne rêvée par tous. Une vingtaine de personnages improbables se rencontrent sur scène, dont aucun n’a de rôle mineur ou majeur. Tout le monde joue le jeu des apparences avec une seule idée en tête : faire la fête ! Mais il règne dans cette œuvre un univers qui rend hommage à la fois à la mélancolie et à la poésie. La direction musicale est confiée à Claude Schnitzler qui suit l’histoire de l’OnR au fil des saisons. Habitué d’Offenbach – on se souvient de sa Belle Hélène en 2006 –, il nous propose une Vie parisienne tout en raffinement. Comment définissez-vous la partition de La Vie parisienne ? Claude Schnitzler : La partition de La Vie parisienne est avant tout un ouvrage d’atmosphère dans lequel plusieurs intrigues se croisent autour du couple des deux Suédois en goguette à Paris. C’est pour Offenbach le prétexte à nous présenter une foule de personnages pittoresques confrontés à des situations comiques. Sans ambiguïté, la pièce est un hymne vibrant à Paris, à sa vie trépidante et à ses mœurs dissolues. Offenbach compose sa Vie parisienne à l’origine pour une distribution de comédiens-chanteurs et seul le rôle de Gabrielle exige une soliste virtuose. La relative simplicité de l’écriture vocale, adaptée aux moyens forcément limités des solistes, n’affecte en rien la prodigieuse inventivité du compositeur. Cet opéra-comique est réellement un hymne à la joie de vivre. Comment abordez-vous cet ouvrage ? C. S. : Avec avec un certain recul : le genre comique est très exigeant et la musique dite « légère » demande un soin tout particulier à ses interprètes et tout d’abord au chef d’orchestre. Celui-ci doit se garder des effets faciles, de tout ce qui pourrait alourdir la partition, sous peine de tomber dans la vulgarité. Il faut faire ressortir le raffinement de l'écriture offenbachienne et se souvenir que Rossini avait été un modèle pour Offenbach. Ce n’est qu’ainsi qu’on arrive à rendre justice à cette partition géniale !

maquette du décor de Bruno de lavenère

Pour les fêtes de fin d’année, une nouvelle production de La Vie parisienne mise en scène par Waut Koeken nous conduit vers la légèreté absolue. à ses côtés, Claude Schnitzler, qui a dirigé chez nous une inoubliable Belle Hélène, conduira l’Orchestre symphonique de Mulhouse. La promesse d’un vaudeville déchaîné, véritable triomphe de la fête et des plaisirs amoureux. à consommer sans modération !


nouvelle production

opéra strasbourg

sa 13, lu 15, ma 23, sa 27, ma 30 décembre 20 h di 21 décembre 15 h ve 26 décembre 17 h

théâtre colmar

di 11 janvier 15 h

la sinne mulhouse

sa 17 janvier 20 h di 18 janvier 15 h

librairie kléber

Rencontre avec Claude Schnitzler et Waut Koeken ve 12 décembre 18 h 30 • entrée libre

L’ art de l’invraisemblance La mise en scène de cette nouvelle production de La Vie parisienne est confiée à Waut Koeken. C’est la sixième saison que nous avons le plaisir d’accueillir cet artiste talentueux. Aux côtés du décorateur Bruno de Lavenère, il s’attèle à une œuvre emblématique. Quoi de plus excitant pour un fan d’Offenbach !

Opéra bouffe en quatre actes de Jacques Offenbach Livret de Henry Meilhac et Ludovic Halévy

Direction musicale

waut koeken : photo Stéphanie Linsingh

Waut Koeken : La Vie parisienne est toujours d’actualité. C’est une « exposition universelle des bêtises humaines » ! Pour moi, Jacques Offenbach est un des plus intelligents spécialistes des passions humaines. Ce qu’Offenbach veut dire, il nous le chante, il le fait galoper infernalement dans l’orchestre. Il n’est jamais juste un clown – c’est un poète ; derrière toute la folie, les absurdités hilarantes, la gaieté frénétique et la satire mordante de ses œuvres, il arrive à nous faire sentir une mélancolie douceamère, l’ambivalence de la fête, le factice des plaisirs, la profondeur des désirs et des rêves – c’est tellement riche ! Pour sa mise en scène, Waut Koeken imagine un Paris mythique mais fantasmatique avec des touristes qui débarquent dans la capitale comme des papillons attirés par une lanterne magique. Avec Bruno de Lavenère, ils imaginent une gare à Paris, à l’âge d’or des chemins de fer, lanterne magique, bonbonnière… une sorte de cage dorée, un mélange de la Gare d’Orsay et de la gare du Nord ; allusion au restaurant « Le Train Bleu » de la gare de Lyon. La scénographie fait état d’un élément de la gare répété cinq fois. Une structure métallique agrémentée de fioritures qui supporte des verrières comme il est de mise à cette époque de la grande industrialisation. La verrière opaque permet des rétroprojections d’images tout au long du spectacle. Le public doit se sentir dans l’ambiance de Paris et cependant, il ne s’agit pas de tomber dans le cliché de Paris. L’horloge, mouvante, est l’élément central du décor. « Nous verrons, au cours de La Vie parisienne, très peu de Paris : après l’arrivée dans la gare – une sorte de vaste salle d’attente avant de pouvoir entrer enfin véritablement dans la ville –, toutes les scènes se déroulent à l’intérieur, dans des salons et des restaurants ; la ville, réelle et mythique, est uniquement « palpable » derrière les vitreries ; nous sommes à Paris, mais Paris, semble-t-il, est ailleurs. La ville est là, omniprésente et séduisante – mais c’est un Paris fantasmé. Il y a dans cet ouvrage quelque chose qui me fait penser à l’absurdisme délicieux d’Apollinaire : “la scène se passe à Paris, puisque la Seine passe à Paris” ! »

Claude Schnitzler Mise en scène

Waut Koeken Décors

Bruno de Lavenère costumes

Carmen Van Nyvelseel lumières

Nathalie Perrier vidéo

étienne Guiol chorégraphie

Philippe Giraudeau

Waut Koeken, c’est un grand plaisir de vous revoir ici. Plaisir partagé ? W. K. : Plus qu’un plaisir ! C’est un véritable bonheur et un honneur pour moi de pouvoir revenir à l’OnR, après toutes les belles aventures vécues ensemble. Non seulement, c’est une des plus belles maisons d’opéra d’Europe pour sa qualité artistique – pour moi, c’est aussi comme une « maison » au sens littéral : j’adore l’ambiance amicale et familiale dans laquelle on peut y travailler ! Arriver à la gare de Strasbourg, c’est presque rentrer chez moi – ce qui est un rare et précieux bonheur pour les vagabonds que nous sommes, travailleurs itinérants dans le monde de l’opéra ! à l’Opéra du Rhin, je me sens entouré par des amis, tout en sachant que je suis aussi entouré par les meilleures équipes qu’on puisse souhaiter. Le bonheur est donc double – et même multiple sur le plan professionnel, car l’Opéra national du Rhin, c’est aussi des excellents chœurs, plein de bons comédiens, des ateliers formidables, des équipes techniques superbes et superbement motivées et... les meilleurs régisseurs de plateau !

bobinet

Thomas Morris raoul de gardefeu

Guillaume Andrieux métella

Delphine Haidan gabrielle

Mélanie Boisvert le baron de gondremarck

Christian Tréguier

la baronne de gondremarck

Agnieszka Slawinska le brésilien

Mark Van Arsdale frick, prosper

Guy de Mey urbain

Jean-Gabriel Saint-Martin pauline

Anaïs Mahikian alphonse, joseph

Benjamin Prins

Chœurs de l’OnR Orchestre symphonique de Mulhouse édition critique par Jean-Christophe Keck © Boosey & Hawkes/Bote & Bock Berlin

Croisements • 19


Retrouvez les artistes de l'Opéra Studio

RETROUVEZ L’ACTUALITÉ DE L’OPÉRA NATIONAL DU RHIN SUR WWW.SZENIK.EU ROCK-POP-ELECTRO

JAZZ

THÉÂTRE/THEATER

Pulcinella

DANSE/TANZ

Rigoletto - © Patrick Berger - artcomart

CLASSIQUE/KLASSIK

Stravinsky

LE MAGAZI NE EN LI G N E D U SPECTA CLE VI VANT DAN S LE R H I N SU PÉR I EU R

Opéra Studio de l'OnR : Gaëlle Alix soprano Peter Kirk ténor Nathanaël Tavernier basse

Un média unique dans le Rhin supérieur

Projet cofinancé par le Fonds européen de développement régional - FEDER.

Comédiens du TNS Orchestre philharmonique de Strasbourg L’APPLICATION SZENIK EST DISPONIBLE GRATUITEMENT POUR SMARTPHONES ET IPAD

szenik.eu

layout / lepool

Une sélection de spectacles sur 3 pays et dans 2 langues, des contenus textes, vidéo et son : szenik met le web 2.0 au service de la création dans la région

Dépasser les frontières : projet après projet.

Direction musicale Marko Letonja Mise en scène Julie Brochen Collaboration artistique Michele Monetta Scénographie, costumes, masques Lorenzo Albani Lumières Olivier Oudiou

Théâtre national de Strasbourg Salle Koltès 11 > 18 octobre

BarBara Bui BarBara Bui lamBertolamBerto losani losani plein sudplein sud ventcouvert ventcouvert armani armani just cavalli just cavalli see By chloe see By chloe lil pour l’autre lil pour l’autre princess goes hollywood princess goes hollywood ceinturesceintures lacameleon lacameleon

Photo VENTCOUVERT®

Photo VENTCOUVERT®

jeans denim studio jeans denim studio

place du temple neuf strasBourg place du temple neuf strasBourg www.altramode-mp.com 03 88 75 03 12 88 11 I75 12 11 I www.altramode-mp.com

BarBour BarBour mackage mackage pôles

pôles


Lettre ouverte à

Paris

à l’heure où tous les chats sont gris...

On m’a toujours parlé de toi, partout, tout le monde. Pour être honnête, je ne me souviens pas avoir jamais vécu sans qu’on t’évoque. Je dois t’avouer que je ne t’ai pas toujours aimée, non, il m’est arrivé de t’ignorer, de ne plus penser à toi, voire même de t’exécrer. Mais je dois reconnaître que tu m’as toujours fait rêver.

La Vie parisienne présente une joyeuse foule au sein de laquelle une galerie de personnages fantasques évolue. Devant cette absence de personnage principal – ou secondaire – nettement caractérisé, à bien y réfléchir, le rôle-titre de cet opérabouffe ne serait-il pas Paris ?

Dans sa mise en scène, Waut Koeken choisit une représentation suggérée de la capitale française. Gageons que l’imaginaire collectif se chargera du reste… Plongée au cœur du fantasme.

J’ai commencé par écouter des bavardages sur tes si romantiques bords de Seine à minuit. Je me souviens encore des paroles de certains de mes proches, qui soufflaient, « tu verras, quand on aura ravi ton cœur, tu te rendras dans la ville de l’amour et tu flâneras sur les marches du Sacré Cœur, sur le Pont des Arts et dans le Parc du Luxembourg ». Comme un baptême qui scelle la passion, Paris me semblait alors être un passage obligé. Et puis j’ai grandi, j’ai entendu parler de toi sur les bancs de l’école, où l’on me racontait la trépidante vie d’artistes bohémiens, leurs virées nocturnes, leurs succès soudains, et je rêvais de mener de telles aventures, un jour, plus tard. Je me suis inventé une vie auprès d’eux, m’éveillant au petit matin sous une mansarde du quartier latin, retrouvant mes camarades dans des cafés pour goûter à la délirante fée verte et enfin, m’étourdissant de jazz, de danse et de grandes discussions dans le coin d’un cabaret, au choix : le Chat Noir, le Moulin Rouge ou le Bœuf sur le toit. Je rêvais ma vie en rose, entre tes murs tout me semblait possible. à la fin de la journée, fermant les yeux à l’orée de la nuit, je pouvais entendre le ronronnement de ton métro, le tintement des cloches de Notre-Dame, le sifflement des trains au départ de la Gare d’Orsay, l’étourdissant mouvement des voyageurs pressés : ta symphonie, reconnaissable entre toutes. Je descendais du train, moi aussi, portant une valise à la main. J’avais le sentiment qu’ici, dans ce hall de gare, nous étions tous Parisiens. Me mêlant à la foule, j’observais avec attention chaque individu et remarquais la silhouette élancée d’une Parisienne émancipée : cheveux courts, talons hauts, petite robe noire, fume-cigarette entre les doigts. Coco Chanel et l’élégance étaient passées par là. Enfin, j’étais là, dans ton dédale de rues pavées, mais le vertige me prenait : par quoi commencer ? Vers quel endroit diriger mes pas en premier ? Quel musée, quel jardin, quel quartier choisir parmi cette profusion de lieux mythiques ? Avant même de décider, l’illusion s’était dissipée et mes songes, surpris par l’éveil, s’étaient enfuis. Paris, il me semble que tu es partout et en chacun de nous. Que je sois à Londres, New York ou Tokyo, je t’aperçois toujours dans le cœur d’un passant. Il y a toujours quelqu’un pour te décrire passionnément. Je me souviens d’untel, organisant un week-end dans la capitale de l’amour pour sa chère et tendre ; d’unetelle, projetant de « monter » dans la capitale des arts pour devenir comédienne, danseuse étoile ou chanteuse. J’ai entrevu mille desseins et toujours une seule fin. Comme une formule magique, ton nom assurait tout succès. Paris, je te connais depuis toujours, je t’ai vue des milliers de fois, dans des films, sur des cartes postales et des photos en noir et blanc. Je t’ai croisée dans des chansons, dans des livres d’Histoire, dans des romans aux fins chagrines. C’est chez toi que Rodolphe a perdu Mimi, que Gainsbourg a trouvé Birkin, que Colin a veillé sur Chloé et qu’Abélard a écrit des lettres passionnées à Héloïse. C’est chez toi qu’ont crié des centaines de révoltés, qu’on s’est battu pour le progrès, qu’on a gagné la liberté. Il faut croire qu’à présent, dans tes rues, le temps est arrêté : d’innombrables histoires tissent ton onirique réalité. Mais Paris, si aujourd’hui je t’écris, c’est que je te cherche encore. J’ai parcouru la terre entière pour te trouver, j’ai sillonné tes quais et tes boulevards sans jamais rencontrer celle dont on m’avait parlé. J’ai bien vu tes parcs, tes immeubles Haussmanniens, tes cinémas d’antan, mais mon cœur a été comme en toute autre place au monde. M’a-t-on menti, n’es-tu qu’une folie, que l’ombre d’un royaume que pourtant tout le monde explore ? Je ne te vois que paupières closes, au bord du sommeil, au précipice des rêves, à l’heure où tous les chats sont gris. Un cœur de touriste La Vie parisienne • Croisements • 21


re-création

Nó les nœuds de l’amour

Danse, théâtre, vidéo, cirque, Deborah Colker est une chorégraphe aux multiples facettes à la reconquête du mouvement à l’état pur. Avec Nó, la Brésilienne survoltée nous plonge dans l’univers féroce, sensuel et physique du désir.

Louise Devaine : Nó, nœud en français, est un choix de titre mystérieux et évocateur à la fois. Quel sens y avez-vous caché ? Deborah Colker : Les nœuds explorés dans ce spectacle sont ceux du désir. Cette force organisée et chaotique qui nous aliène et nous libère dans le même mouvement. Cet obscur objet qui nous enserre et nous fascine jusqu’à la folie. Ce spectacle joue sur plusieurs métaphores du désir. La délicatesse et la violence, le bruit et le silence, la lumière et la nuit. L’érotisme habite nos vies mais nous créons des barricades, des tabous pour nous en protéger.

L. D. : Il semble que la philosophie joue un rôle central dans votre travail… D. C. : Depuis la création de Nó, la condition et l’âme humaines sont devenues le sujet principal de mes spectacles. Je m’intéresse avant tout aux gens, leurs secrets, leurs limites et aussi leurs forces. L’Art et la danse sont selon moi des façons de mieux comprendre l’individu. Toutes mes expériences sont sources d’inspiration mais la matière première de mon travail est l’expérimentation. Pour moi la danse trouve son origine dans le corps, le genou, l’épaule, la main. À partir de là, la philosophie 22 • Croisements • Nó

photo Cia de Dança Deborah Colker • fond nis&for

L. D. : Les nœuds sont aussi présents physiquement sur scène. Dans la première partie de Nó, la scène est littéralement recouverte de cordes emmêlées. Savez-vous qu’il s’agit de l’objet le plus tabou sur scène, que les professionnels s’interdisent d’en prononcer le nom ? D. C. : Pour moi, les cordes sont l’objet du désir, elles procèdent exactement du même mécanisme, elles servent à attacher et relâcher, emprisonner et délivrer. Sur scène, elles prennent aussi une très belle signification, elles deviennent le prolongement du corps, génèrent mouvements, forces et émotions. Elles sont partie intégrante de la danse, des solos, duos, trios, quartets et quintets des danseurs. En même temps, elles plantent le décor. Elles apparaissent au début comme un grand arbre de vie qui se métamorphose au cours de la première partie en une forêt de cordes. Au second acte, elles font place à une boîte transparente comme une vitrine de magasin. La transparence est aussi une texture du désir très pertinente : on le voit sans pouvoir le toucher, on le veut sans jamais l’obtenir.


la filature mulhouse

je 6, ve 7, sa 8 novembre 20 h Répétition publique ve 31 octobre 18 h 30 • entrée libre

studios du ccn

L'université de la danse je 16 octobre 19 h • entrée libre

opéra strasbourg

je 20, ve 21, sa 22, lu 24 novembre 20 h di 23 novembre 15 h

théâtre colmar

sa 29 novembre 20 h di 30 novembre 15 h

us, le portique

Danse à l'université me 12 novembre 18 h 30 • entrée libre

Coulisses studio je 23 octobre 18 h • entrée libre

est utile pour mettre en valeur et recentrer le travail effectué. Quoiqu’il arrive, la danse reste le résultat de mouvements provenant d’un corps qui pense, ressent et crée de la beauté.

Le désir n’est pas un choix, c’est une condition humaine. Il faut que chacun le comprenne, l’écoute et en prenne conscience. L. D. : Quand vous avez commencé le travail de création autour de Nó, vous avez trouvé important de faire suivre des cours de philosophie aux danseurs de votre compagnie. Pourquoi cette pièce est-elle si intrinsèquement liée à la philosophie ? Quels auteurs vous ont particulièrement influencée ? D. C. : Le désir n’est pas un choix, c’est une condition humaine. Il faut que chacun le comprenne, l’écoute et en prenne conscience. La philosophie m’aide à considérer le désir sans la barrière du jugement ou de la morale. Je pourrais citer beaucoup d’auteurs, parmi eux : Freud, Kant, Foucault, Nietzsche, Benjamin, Dostoïevski, le Marquis de Sade… L. D. : Vos chorégraphies semblent travaillées par une contradiction remarquable : votre attention hors du commun à la pensée, à l’âme, la méditation donne naissance à une danse aux antipodes de tout intellectualisme. Extrêmement physiques, souvent acrobatiques, vos créations empruntent parfois au cirque. Quelle relation entretenez-vous avec cette discipline ? D. C. : J’ai travaillé avec beaucoup de troupes de cirque dont le Cirque du Soleil que j’ai dirigé. J’ai toujours apprécié le travail de qualité avant toute considération de genre, de discipline ou de technique. En danse, je suis très éclectique, j’admire autant le moderne que le classique ou le contemporain. La technique acrobatique du cirque et l’approche du mouvement au théâtre me passionnent également. La danse et le cirque ont en commun leur instrument de travail : le corps et le défi de l’utiliser avec intelligence, maîtrise et sensibilité. Bien sûr, j’ai aussi conscience que les athlètes évoluent dans un univers différent de celui des danseurs. L. D. : Vous avez rencontré les danseurs du Ballet de l’OnR récemment, quels éléments pensez-vous qu’ils

pourront apporter à votre pièce ? Pensezvous qu’ils sauront en relever le défi athlétique ? D. C. : Pour moi, ce sera une expérience passionnante de re-créer Nó avec une autre compagnie. Je suis convaincue que chaque personnalité apporte un regard nouveau sur une œuvre et permet de l’emmener plus loin. Ma méthode de travail est vraiment lente et laborieuse, le mouvement est au cœur de mon approche et j’aime aborder l’inscription des corps dans l’espace de façon non traditionnelle. Je pense que ce processus de création sera très enrichissant pour chacun d’entre nous. L. D. : Quelle histoire racontez-vous dans Nó ? D. C. : Le premier acte aborde la dimension organique, animale du désir et explore la relation entre l’homme et la nature. Par exemple, le cheval est pour moi une figure qui cristallise toutes nos représentations inconscientes de la beauté et de la sensualité. Le second acte est plus urbain. Les danseurs évoluent dans une ambiance évoquant le Quartier rouge d’Amsterdam. Leurs mouvements sont travaillés par la dualité intérieur / extérieur.

chorégraphie

Deborah Colker Musique

Berna Ceppas décors

Gringo Cardia costumes

Alexandre Herchcovitch lumières

Jorginho de Carvalho assistante à la chorégraphie

Jacqueline Motta Ballet de l’OnR

Créé par la Companhia de Dança Deborah Colker Directeur exécutif João Elias

Spectacle présenté avec une musique enregistrée

L. D. : Comment décririez-vous la musique de Berna Ceppas ? Comment avez-vous travaillé avec ce compositeur ? D. C. : Nous avons composé la bande-son de Nó ensemble au rythme du processus de création chorégraphique. Souvent la musique précédait le mouvement, souvent elle arrivait après. Parfois, nous avancions ensemble pas à pas. Nous avons pensé la musique comme une expression profonde du désir et de sa signification. Il y a eu énormément de réflexions, discussions, modifications et corrections pendant la création. La musique est essentielle car elle participe à la dynamique du mouvement. Elle contribue beaucoup à l’ambiance d’un spectacle. Mon père était musicien. J’ai aussi étudié et pratiqué la musique toute ma vie. La musique m’aide à penser. Le classique, la pop, le contemporain, ça n’existe pas, il n’y a que la bonne musique qui compte. Croisements • 23


création française

la belle au bois dormant (R)éveille-moi ! Bref rappel des faits Pour les fêtes de fin d’année, l’OnR met à l’honneur un petit bijou lyrique : La Belle au bois dormant, fable musicale du compositeur italien Ottorino Respighi. Une nouvelle production – création française – qui nous promet un voyage poétique et féérique au pays des contes de Charles Perrault.

Notre récit commence par la formule consacrée « il était une fois ». Au fil de l’histoire se déroule une galerie de personnages attachants : la jolie princesse qui vient tout juste de naître, ses parents le roi et la reine, une foule d’animaux dotés de parole, les gentilles fées marraines, dont la fée bleue, qui lui assurent protection à l’occasion de son baptême et, forcément, celle par qui le malheur survient, la cruelle fée noire. Verte de jalousie de ne pas avoir été conviée à la célébration, cette dernière promet à la petite un avenir funeste : elle vivra jusqu’à ses vingt printemps, mais se piquera alors avec un fuseau qui la plongera dans un sommeil éternel. On le sait, les contes se finissent souvent bien. C’est ainsi que la fée bleue annonce qu’un baiser d’Amour délivrera la belle de son sommeil. Ce qui fort heureusement se produira, à peine quelque deux cents ans plus tard, grâce à la douce rencontre entre la princesse et le prince Avril. Voilà notre histoire qui s’achève dans la joie d’un bel événement : un grand et somptueux mariage ! Si le livret reste fidèle à la version originale de Charles Perrault, il en occulte la fin, ce qui ne devrait pas chagriner nos jeunes spectateurs. Une grand-mère – aux origines ogresse – qui veut manger ses deux petits-enfants et sa belle-fille : une cruelle péripétie dont on se passe volontiers !


cmd* strasbourg

théâtre colmar

sa 3 janvier 20 h di 4 janvier 15 h me 7 janvier 20 h ve 9 janvier 20 h

ve 19 décembre 20 h

la sinne mulhouse

sa 31 janvier 20 h di 1er février 15 h

* Cité de la musique et de la danse

Couleurs sonores et visuelles

La Belle et ses secrets

La partition se caractérise volontiers par sa spontanéité et sa sensibilité. Respighi se place plus du côté de la magie que du rire ou du comique. Avec cet opéra, créé à l’origine pour des marionnettes (et non pour des artistes de chair et de sang) et qui remporta un vif succès du vivant du compositeur, le public voyage au gré de moments impressionnistes et colorés, tantôt aquatiques ou aériens, toujours propres à susciter la rêverie. C’est sur ce constat que l’équipe artistique a choisi d’orienter son travail. Valentina Carrasco, issue du célèbre collectif théâtral catalan La Fura Dels Baus – formation qui marque les esprits depuis 1979 par ses réalisations monumentales, dans des lieux et sous des formes atypiques – et qui fera ses premiers pas à l’OnR comme pour le jeune public, entend mettre la couleur au cœur de cette nouvelle production. à bien y regarder, l’histoire qui nous est contée est un peu celle du cycle de la vie, avec en son cœur le printemps, récurrent dans l’opéra, saison du renouveau, de tous les possibles, de l’amour, donc de la couleur. En regard, l’hiver glacial, sombre et figé, associé au sommeil dans lequel se trouvent plongées la belle et sa cour. Ainsi, sur scène, se déroulera un jeu de toiles colorées, aux mouvements fluides et poétiques, qui viendront illustrer les différents paysages musicaux. La légèreté et la transparence se retrouveront également du côté des costumes imaginés par Nidia Tusal : des animaux à l’allure irrésistible et, pour les humains, une subtilité qui viendra appuyer le message délivré par la mise en scène. Mais sur ce point, laissons le mystère planer, la découverte n’en sera que plus belle !

Pour les enfants qui souhaitent découvrir en avant-première et en exclusivité les coulisses de la création de ce conte de fées, rendez-vous au Théâtre municipal de Colmar le mercredi 10 décembre à 14 h. Le temps d’une répétition « scène piano » de La Belle au bois dormant, les jeunes curieux assistent au travail du metteur en scène, du chef d’orchestre, des chanteurs bien sûr, mais aussi de tous les techniciens. Ensemble, ils contribuent à la magie du spectacle ! Une manière originale d’aborder l’opéra, côté coulisses, et de percer certains de ses mystères... théâtre colmar me 10 décembre 14 h

théâtre louis-jouvet

paris

sa 17 janvier 15 h & 20 h ma 20 janvier 19 h me 21 janvier 20 h je 22 janvier 20 h

Conte musical en trois actes d'Ottorino Respighi d'après le conte de Charles Perrault

Direction musicale

Vincent Monteil

Mise en scène

Valentina Carrasco Décors et vidéo

Carles Berga costumes

Nidia Tusal lumières

Peter Van Praet traduction et adaptation du livret

Vincent Monteil

la princesse, le rossignol

Gaëlle Alix / Kristina Bitenc la fée bleue

Rocío Pérez / Kristina Bitenc le prince

Sunggoo Lee Réservé aux 6-12 ans Tarif : 5,50 € Réservation obligatoire : 03 88 75 48 54 / 79 ou jeunes@onr.fr

Comme c’est désormais de tradition, les rôles-titres seront interprétés par la promotion 2014-2015 de l’Opéra Studio de l’OnR, devenu un centre de création d’opéras pour enfants. Avec 27 représentations en deux mois à peine, le défi à relever est de taille ! Les jeunes chanteurs, rejoints pour l’occasion par deux de leurs anciennes camarades, seront accompagnés par l’Orchestre philharmonique de Strasbourg et le Balcon pour les représentations à Paris, dirigés par Vincent Monteil.

à découvrir absolument ! illustrations anne-sophie tschiegg

athénée

la grenouille, le bouffon

Peter Kirk

l'ambassadeur

Nathanaël Tavernier le bûcheron

Jaroslaw Kitala

le coucou, la reine, le chat

Lamia Beuque le roi

David Oller la fée verte, la vieille édentée, la duchesse

Marie Cubaynes

mister dollar

Francisco Gil

Orchestre philharmonique de Strasbourg Le Balcon (Paris) éditions Ricordi 1958

Poétique, épuré et résolument dans l’air du temps, poursuivez l’aventure en lecture avec La Belle au bois dormant, le livre illustré inspiré du livret de l’opéra.

Production de l'Opéra Studio de l'OnR

Texte : Lise Dahan - Illustrations : Anne-Sophie Tschiegg - 5 € Plus d'infos : www.operanationaldurhin.eu Croisements • 25


opéra studio Lamia BEUQUE

David Oller Votre plus beau souvenir à l’OnR ? Le travail avec tous mes collègues au studio. Un trac mémorable ? En général, je nʼai pas de problème de trac. La plus belle rencontre ? Le stage avec Anne Le Guernec pour Il Campanello, une très belle production.

promotion

Votre plus beau souvenir à l’OnR ? Il me reste encore un an, je vous le dirai lʼan prochain ! Un trac mémorable ? Pour le concert Mozart devant les scolaires, horrible ! La plus belle rencontre ? Deux en fait, mais concernant un même projet, Il Campanello : Umberto Finazzi côté musique et Anne le Guernec côté mise en scène.

Baryton

2014-2015 Certains restent, d’autres arrivent. Cette saison, 4 nouveaux jeunes artistes rejoignent notre Studio. Au programme, la création française de l’opéra pour enfants La Belle au bois dormant de Respighi et Il Matrimonio segreto de Cimarosa. Nous aurons également le plaisir de les retrouver lors de nos traditionnels concerts apéritifs, avec une programmation très éclectique. Nous n’avons plus qu’à leur souhaiter une très belle saison ! Les entendre entre septembre et décembre : > Opéra La Belle au bois dormant > Concerts apértifs Cher Richard ! Gretry forever

L'Opéra Studio de l'OnR est dirigé par Vincent Monteil. 26 • Croisements • Opéra Studio

Mezzo-soprano

Ténor

Pianiste chef de chant

Alice Meregaglia

Sunggoo LEE

Votre plus beau souvenir à l’OnR ? Je suis arrivée à Strasbourg (cité de terre, dʼeau et dʼair) et jʼai pris le tram jusquʼà la Place Broglie : quand je suis descendue, jʼai souri et jʼai pensé « je suis heureuse » ! Un trac mémorable ? Sans doute mon concours dʼentrée comme pianiste chef de chant à lʼOpéra : une très longue journée de satisfaction terminée par une petite fête avec la partie française de ma famille. La plus belle rencontre ? Je peux considérer lʼéquipe de lʼOnR comme une grande famille : je me sens soutenue par mon chef Vincent Monteil quand je travaille, quand je joue pour les chanteurs, quand je fais mes cours de direction, de répertoire et de langue, et même quand je retire mes billets pour les concerts à la caisse de lʼOpéra !

Votre plus beau souvenir à l’OnR ? Aladin et la lampe merveilleuse, mon premier opéra à l’Opéra Studio. Jʼétais très agité, mais jʼai travaillé pour être très concentré. Je pense que nous avons fait un très bon travail. Un trac mémorable ? Lors de la prégénérale du Pauvre Matelot. Je me suis trompé musicalement à quatre reprises en public et une fois rentré à la maison je nʼai pas pu dormir. Après cette expérience, je me prépare pour les répétitions avec orchestre encore plus sérieusement. La plus belle rencontre ? Pour moi, toutes les rencontres ont été intéressantes et constructives. Je suis très reconnaissant à Vincent Monteil le directeur de l’Opéra Studio. L’OnR m’a donné tellement dʼoccasions de rencontrer des grands artistes. Et ce n’est pas fini !


Gaëlle ALIX Votre plus beau souvenir à l’OnR ? Peut-être les Dîners sur scène, on nʼa pas souvent lʼoccasion de voir la scène de lʼOpéra ouverte, et surtout de chanter aussi près du public. Une belle expérience ! Un trac mémorable ? Le trac est présent à chaque première bien sûr. Mais j’ai ressenti une appréhension particulièrement forte quand nous sommes allés chanter pour les enfants à lʼhôpital. Finalement nous leur avons réservé nos plus beaux sourires, et cette expérience mʼa rappelé pourquoi nous faisons ce métier. La plus belle rencontre ? La metteur en scène Anne le Guernec qui nous a appris énormément en peu de temps : une belle personnalité humaine et artistique.

RocÍo PéREZ

Jaroslaw KITALA Quel personnage rêvez-vous d’interpréter ? J’aime les sombres personnages, les anti-héros comme Achilla (Giulio Cesare) ou Argante dans Rinaldo de Haendel. Qu’attendez-vous de l’Opéra Studio ? Jʼattends dʼy recevoir un bon entraînement et dʼobtenir de lʼexpérience au sein dʼun opéra occidental. Jʼespère y vivre une aventure professionnelle et internationale inspirante. Pourquoi avoir choisi d’être chanteur ? à lʼorigine pour moi, ça a surtout été un heureux hasard, que jʼai décidé de poursuivre pour en faire ma vie. Jʼaime la belle musique, le travail sur scène et les horaires assez flexibles... :-)

Quel personnage rêvez-vous d’interpréter ? Jʼai toujours rêvé de pouvoir chanter le rôle de Lakmé, dès la première écoute de lʼopéra de Delibes, jʼai été séduite par sa musique. Qu’attendez-vous de l’Opéra Studio ? Jʼespère mʼaméliorer en tant que chanteuse et comédienne, mʼimprégner de tout ce que peuvent mʼapprendre les professionnels de lʼOpéra Studio, et profiter de cette expérience humaine. Pourquoi avoir choisi d’être chanteuse ? écouter de la musique rend heureux nʼimporte qui, mais lʼexpérience est encore plus belle lorsque lʼon participe à la création de cette musique, cʼest lʼune des raisons pour lesquelles jʼai décidé dʼêtre chanteuse.

Soprano

Baryton basse Soprano

Basse

Pianiste chef de chant

Ténor

Amandine DUCHÊNES

Peter KIRK

Nathanaël TAVERNIER

Votre plus beau souvenir à l’OnR ? Cʼest toujours émouvant de voir la première représentation dʼune production à laquelle on a participé ! Un trac mémorable ? Un petit peu dʼappréhension pour mon premier concert à lʼOpéra Studio, Sacré Wolfgang ! La plus belle rencontre ? Beaucoup de belles rencontres ! D'abord, avec tous les chanteurs de lʼOpéra Studio ! Jʼai particulièrement apprécié le travail dʼEmmanuel Olivier, chef de chant, qui est venu préparer les chanteurs pour la production Le Pauvre Matelot et La Colombe.

Quel personnage rêvez-vous d’interpréter ? Tom Rakewell dans The Rake’s Progress de Stravinsky. Qu’attendez-vous de l’Opéra Studio ? Améliorer mes capacités de chant, développer mes compétences linguistiques afin de pouvoir chanter dans différentes langues, travailler avec et mʼinspirer des excellents artistes engagés par lʼOnR, me construire un répertoire, gagner en notoriété pour chanter un jour de grands rôles dans les opéras du monde entier. Pourquoi avoir choisi d’être chanteur ? Pour moi, chanter est le meilleur moyen de communiquer ce que je ressens et pense de la vie. J’aime par-dessus tout l’art dramatique, et le chant me paraît être le moyen le plus approprié pour le pratiquer.

Quel personnage rêvez-vous d’interpréter ? Wotan et Philippe II pour la complexité de ces personnages, lʼintérêt dramatique et la dimension physique nécessaire pour les mettre en lumière. Qu’attendez-vous de l’Opéra Studio ? Deux points essentiels pour engendrer de la confiance : lʼexpérience scénique et une formation dʼexcellence dans un environnement sain. Ces critères sont le terreau fertile pour une carrière durable. Pourquoi avoir choisi d’être chanteur ? Avant tout pour la catharsis. Ensuite, parce que ce métier est complet. Nous avons une hygiène de vie dʼathlète de haut-niveau. Nous poursuivons notre développement intellectuel par lʼapprofondissement et la découverte de répertoires et de rôles à interpréter. Et cela demande une faculté de remise en question pour être performant malgré les aléas de la vie...

photos frédéric godard

photos dr


récital

Sophie Karthäuser parler de choses intimes

Sophie Karthäuser soprano

Eugene Asti

opéra strasbourg

ma 4 novembre 20 h

piano

>> au programme FRANZ SCHUBERT (1797-1828) Lieder sur des poèmes de Goethe

FRANCIS POULENC (1899-1963)

ROBERT SCHUMANN (1810-1856)

ÉRIK SATIE (1866-1925) Trois Mélodies de 1916

Liederkreis Op. 39

RAYMOND MICHA (1910-2006) CÉSAR FRANCK (1822-1890) Le Mariage des Roses

La Courte Paille

EMMANUEL CHABRIER (1841-1894) Chanson pour Jeanne

La soprano belge s’est imposée sur les scènes internationales comme une excellente mozartienne. C’est d’ailleurs dans ce domaine qu’elle s’est fait connaître du public de l’Opéra national du Rhin où elle fut Ilia dans Idomeneo en 2007 et Susanna des Nozze di Figaro en 2008. Actuellement, elle chante Asteria dans Tamerlano de Haendel à Versailles, Cologne et prochainement avec Christophe Rousset et ses Talens lyriques à Bruxelles et Amsterdam. Mais elle est aussi une remarquable récitaliste et l’on se souvient ici d’un récital Hugo Wolf en duo avec Stephan Loges en 2009. Mais il n’y a pas que Mozart dans la vie de Sophie Karthäuser. La mélodie française notamment, qui est un de ses domaines de prédilection. Pour preuve, ses enregistrements de mélodies avec Cédric Tiberghien et tout récemment Poulenc à qui elle rend hommage avec Eugene Asti. Elle vient de publier, avec lui, un album intitulé Les Anges musiciens chez Harmonia Mundi, consacré à Poulenc. Le récital occupe une part importante dans sa carrière : « J’aime travailler avec un pianiste comme Eugene (Asti) ; quelqu’un a dit, très justement, qu’il chantait avec ses doigts ! Le récital m’apporte ce que je ne trouve pas à l’opéra, la possibilité d’aller chercher le public sans être gênée par l’obstacle de la fosse, de lui dire des choses intimes. C’est ce qui se passe avec Poulenc, ou avec les Ariettes oubliées de Debussy, qui me procurent un plaisir infini, mais aussi avec les lieder 1 .  » 1. Opéra Magazine, avril 2014, entretien avec Michel Parouty.

photo Molina Visuals • Harmonia Mundi

Chanteuse qui sait se faire espiègle et légère quand il le faut, elle peut aussi se montrer mélancolique, voluptueuse et même sensuelle selon les mélodies qu’elle interprète.


Anne Sofie von Otter douce France On connaît son amour pour la langue française, qu’elle sert avec une diction, une sensibilité et une intelligence du texte que bien des artistes français lui envient. Son dernier enregistrement, « Douce France », reprend deux siècles de chanson française, des mélodies de Fauré, Debussy, des chansons de Barbara, Piaf, Ferré, Trenet… La grande cantatrice suédoise Anne Sofie von Otter se produit sur les scènes internationales, dans les opéras de Mozart et Richard Strauss. Remarquable interprète du rôle d’Octavian du Rosenkavalier, souveraine dans les domaines baroque, classique et romantique, la musique française lui doit beaucoup : Gluck ou Berlioz, Lully (Médée dans Thésée), Debussy (Mélisande), Bizet (Carmen), mais aussi Offenbach avec La Belle Hélène ou La Grande Duchesse de Gérolstein. En récital, elle interprète à la perfection les mélodies de Fauré ou Chausson. Cette saison elle sera à Chicago pour Clairon (Capriccio), très attendue au Covent Garden de Londres pour Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny et à Baden-Baden pour Le Nozze di Figaro. C’est la première fois qu’elle chante à l’Opéra national du Rhin. Originalité dans le cadre de nos récitals : elle sera accompagnée par l’excellent pianiste et complice de toujours Bengt Forsberg, auquel se joignent l’altiste Antoine Tamestit et l’accordéoniste Bengan Janson. Elle dit elle-même qu’elle « adore chanter en français, j’aime les nasales, la couleur des mots… C’est très sensuel, léger, subtil et cela laisse beaucoup de place à l’imagination ». Anne Sofie von Otter multiplie les expériences au-delà des frontières du classique. Cette fois, aux mélodies de Hahn, Poulenc ou Berlioz, viennent s’adjoindre les « tubes » de la chanson française, tels que les Feuilles mortes de Prévert et Kosma, À saint Germain des prés et Elle tourne la terre de Léo Ferré, Douce France de Charles Trenet, Le Joli temps et Göttingen de Barbara ou Le Facteur de Moustaki. Avec son timbre de velours, elle nous fait voyager avec naturel entre ces styles musicaux qui ne forment qu’une seule et même famille pour elle : un univers de chaleur, de plaisir et de mélancolie.

photo Ewa-Marie Rundquist

>> au programme

Anne-Sofie von Otter Antoine Tamestit mezzo-soprano

alto

Bengt Forsberg

Bengan Janson

piano

accordéon

opéra strasbourg

sa 20 décembre 20 h

Mélodies de Reynaldo Hahn, Gabriel Fauré, Charles Martin Loeffler, Francis Poulenc, Hector Berlioz, Camille Saint-Saëns, Joseph Kosma, Norbert Glanzberg, Leo Ferré, Charles Trenet, Barbara, Francis Lemarque et Georges Moustaki Récital • Croisements • 29


concert Les concerts apéritifs font partie des traditions de la maison. Des choix éclectiques à l'image des interprètes qui montent sur scène et viennent ensuite prendre un verre avec les spectateurs, un gage de convivialité.

C’est un plaidoyer pour la Paix, mais aussi une prise de conscience des ravages de la guerre, ainsi qu’un devoir de mémoire du premier conflit mondial. Luciano Bibiloni et la Maîtrise de l’OnR présentent cet oratorio-opéra d’Isabelle Aboulker, le 11 novembre prochain, date anniversaire de l’Armistice. Par la mise en situation et l’expérience d’un homme ordinaire au moment de sa mort, lors de l’un des derniers combats sur le front le 11 novembre 1918, le spectacle évoque la guerre dans ce qu'elle a de plus tristement universel : ce sont les voix des dix millions de morts et des millions de participants de toutes les nations qui s’élèvent. Chantés en français, en allemand et en anglais, les extraits de lettres et poèmes signés Céline, Cendras, Apollinaire, Barbusse, Bataille, Cocteau, ou encore Romain Rolland et Stefan Zweig, font vivre la mémoire de ce « soldat inconnu ». La Maîtrise de l'OnR - Petits Chanteurs de Strasbourg et la Maîtrise de l’Opéra de Fribourg incarnent ici le peuple, les voix de la multitude des soldats partageant une expérience commune, et plus généralement l’humanité. Un échange musical et humain des maîtrises d’opéra des deux côtés du Rhin, accompagnées par l’Orchestre de l’Opéra de Fribourg et soutenus par deux solistes et un récitant.

Opéra STRASBOURG

Mardi 11 novembre, 18 h Tarif unique 11 € / Jeunes 5 €

En partenariat avec la Cave de Turckheim.

1918, L’Homme qui titubait dans la guerre

concert maîtrise

 Concert de Noël Noël dans le monde, Noël chez nous Les Petits Chanteurs de Strasbourg - Maîtrise de l’OnR sont riches de quatre chœurs qui mènent des projets parfois divers selon leur voix. Pour fêter Noël, ils se retrouvent tous sur la scène de l’Opéra de Strasbourg afin de nous faire voyager dans le temps, du Moyen-âge à aujourd’hui, explorant des siècles de diversité musicale, et font jongler les langues, l’allemand, le français, le catalan, l’anglais et le latin sur tous les tons de l’enchantement exercé par l’esprit de cette fête planétaire. opéra strasbourg Grande salle

sa 20 décembre 11 h


concerts apéritifs

Cher Richard !

Grétry forever

Richard Strauss fut parmi les compositeurs les plus fameux de son époque de par ses opéras comme Salomé, Elektra ou Le Chevalier à la Rose et ses poèmes symphoniques comme Till Eulenspiegel’s lustige Streiche, Mort et Transfiguration ou Ainsi parlait Zarathustra, mais toute sa carrière fut marquée par la composition de Lieder. Cette forme intime l’accompagna toute sa vie et illustre les différentes facettes de son style musical, de sa personnalité et même de sa vie personnelle. Son épouse, la grande soprano Pauline de Ahna qui – selon la coutume de l’époque – dût abandonner sa carrière de chanteuse d’opéra une fois mariée, pouvait cependant continuer de donner des récitals, essentiellement avec son mari au piano ou à la baguette. évidemment, nombreux sont les airs qu’elle a inspirés ou qui furent composés pour elle. Les énormes prouesses vocales que nécessitent ces mélodies, notamment les plus tardives, sont liées aux qualités remarquables de sa voix. Pour fêter les 150 ans de Richard Strauss, nous vous invitons à écouter un kaléidoscope de Lieder : ballades, chansons satiriques, contemplatives et surtout des aveux d’amour comme son cadeau de noces, Cäcilie, sur un poème de Heinrich Hart.

Pour célébrer à sa manière la présidence belge du comité des ministres de l’Union Européenne, l’Opéra Studio met à l’honneur André Ernest Modeste Grétry. Le compositeur, liégeois de naissance en 1741, sera enterré au Père-Lachaise à son décès en 1813. C’est dire la notoriété qu’avait à cette époque l’ami, entre autres, de Voltaire. Sa connaissance du chant et de la musique italienne, son inventivité mélodique le conduit à écrire plus d’une cinquantaine d’ouvrages lyriques. C’est dans ce précieux patrimoine que Vincent Monteil aura pioché de quoi mettre en valeur les talents de nos jeunes chanteur(se)s. Ainsi il nous sera donné d’entendre des extraits de Zémire et Azor, Richard Cœur-de-Lion et LʼAmant jaloux, ses plus emblématiques opus.

Rocío Pérez soprano Sunggoo Lee ténor David Oller baryton Cordelia Huberti piano théâtre colmar

photos nis&for

ma 7 octobre 12 h 30

opéra strasbourg Salle Bastide

sa 18 octobre 11 h

Gaëlle Alix soprano Lamia Beuque mezzo-soprano Peter Kirk ténor Nathanaël Tavernier basse Amandine Duchênes piano Anne Le Guernec mise en espace théâtre colmar

me 5 novembre 12 h 30

opéra strasbourg Salle Bastide

sa 8 novembre 11 h dans le cadre de la présidence belge du comité des ministres du conseil de l'europe


dîners sur scène Retour en images et en émotions Le temps de trois soirées à l’occasion de la 5e édition des Dîners sur scène, les chanteurs de l’Opéra Studio et les danseurs du Ballet ont fait rêver les convives. Retour sur des moments d'exception.

« Qui nʼa pas rêvé d’être plus proche des artistes ? Les Dîners lyriques nous ont permis de réaliser ce souhait. Quelle satisfaction de supprimer la barrière de la scène et de se retrouver au cœur du spectacle, au milieu des interprètes, chanteurs, danseurs, choristes… et même du personnel technique ! Une belle soirée et un grand moment de bonheur. » Alain Vautravers - Trésorier de Fidelio

« Le Dîner sur scène 2014 a été, comme toujours, un pur moment de plaisir musical partagé. Lʼenthousiasme des jeunes chanteurs de lʼOpéra Studio colmarien, la joie de retrouver les plus grands airs du répertoire lyrique et la participation des danseurs du Ballet du Rhin (une première très appréciée !) ont contribué à faire de cette soirée festive en soutien à notre Opéra un moment dʼémotion inoubliable ! » Marianna Chelkova

« Magnifique moment de découverte des jeunes artistes qui s’expriment en contact direct avec les participants : ils acceptent de ne pas avoir un public « devant » mais de jouer « dans » le public. Ils créent et habitent un moment rêveur et en même temps très physique car on entend dans la proximité le travail intense que leur performance demande. Il est très important qu’avec ce concept Fidelio puisse parvenir à recueillir des fonds pour l’Opéra de façon agréable et solide en même temps et j’admire l’initiative de Marc Clémeur ainsi que l’énorme travail fourni par le staff de l’Opéra ! Une vraie valeur ajoutée est aussi l’impact que ces dîners ont sur des personnes qui ne vont pas habituellement à l’Opéra : j’ai entendu des commentaires de surprise et de curiosité tout à fait intéressants… Belle initiative, sereine et amusante, qui me fait penser à des soirées de Milano per la Scala ! » Giusi Pajardi - Chef du secrétariat de la Banque du Développement du Conseil de l’Europe

page de gauche : photos frédéric godard • page de droite : photos nis&for

Vice-présidente de l'OnR - Adjointe au Maire de Colmar


En novembre l’OnR vous fait tourner la tête ! Événement unique en France, la 6e édition des Dîners sur scène réunit pour la première fois tous les artistes de l’OnR : l’Opéra Studio, le Ballet et les Chœurs. Plus qu’un dîner, plus qu’un spectacle, une soirée inoubliable à partager en couple, en famille ou entre amis dans un cadre insolite : la scène de l’Opéra.

strasbourg opéra

je 13, ve 14, sa 15 nov 19 h 15

Avec les artistes de l’OnR L’Opéra Studio DIRECTEUR MUSICAL Vincent Monteil

Les Chœurs CHEF DES CHŒURS Sandrine Abello

Le Ballet DIRECTEUR ARTISTIQUE Ivan Cavallari

Quand plaisir rime avec soutenir Les Dîners sur scène, ce sont des artistes au plus près du public, des airs célèbres que chacun affectionne, un repas gastronomique servi dans une ambiance conviviale et un cadre enchanteur… mais ce sont aussi des centaines de personnes rassemblées autour d’une même passion, qui offrent un soutien indispensable à l’Opéra national du Rhin. Car si participer à cette soirée est l’assurance de partager un excellent moment, c’est aussi apporter son soutien à Fidelio, association pour le développement de l’OnR : les bénéfices de la soirée sont en effet entièrement consacrés au programme d’action culturelle de l’OnR. Considéré comme un don, votre règlement vous ouvre droit à une réduction d’impôt sur le revenu de 66 %.

Entreprises à l’approche des fêtes de Noël, offrez une soirée conviviale et originale à vos clients et partenaires tout en bénéficiant d’une réduction d’impôt de 60 % sur les sociétés au titre du mécénat.

Renseignements / réservations : + 33 (0)3 88 75 48 40 / 95 - fidelio@onr.fr Bulletin de réservation téléchargeable depuis notre site Internet www.operanationaldurhin.eu

Tarifs > Particulier : 180 € / 61 € après déduction fiscale > Jeune - 30 ans : 100 € / 34 € après déduction fiscale > Entreprise (table 12 personnes) : 2 400 € / 960 € après déduction fiscale > Entreprise (place à l’unité) : 200 € / 80 € après déduction fiscale

XXX • Croisements • 33


nouveau  !

Dîners avant spectacle Alliez les douceurs de la musique aux plaisirs du palais Offrez une soirée inoubliable à vos collaborateurs, clients, amis, en accompagnant le spectacle d’un dîner.

Dîner  Velours Une réception incluant un apéritif au champagne et un dîner haut de gamme 3 services avant le spectacle dans l’un de nos salons privés.

210 € HT par personne (minimum 10 personnes)

Dîner des muses Une réception de prestige incluant un apéritif au champagne et un dîner gastronomique 3 services avant le spectacle dans l’un de nos salons privés.

250 € HT par personne (minimum 10 personnes)

Renseignements, réservations : +33(0)3 88 75 48 40 / entreprises@onr.fr

photo nis&for

∙ Un accueil personnalisé pour vous et vos invités ∙ Des places de spectacle en 1ère catégorie ∙ Le programme du spectacle et le ticket de parking ∙ Une visite de la scène et des coulisses en exclusivité ∙ Un cocktail à l’entracte avec champagne


nouveau !

l’OnR à la Librairie Kléber La Librairie Kléber et l’OnR : une amitié fidèle

L’ Amico Fritz

Depuis plus de dix ans la Librairie Kléber et l’OnR sont partenaires et tissent un lien d’amitié réciproque. C’est autour de leur passion pour la culture et pour l’art lyrique en particulier que se passent leurs échanges. Cette saison la Librairie accueillera l’Opéra chez elle, dans sa mythique salle Blanche, où se dérouleront toutes les conférences/rencontres/présentations d’ouvrages en amont des spectacles.

LIBRAIRIE KLéBER Salle Blanche je 23 octobre 18 h 30

> RDV dès octobre pour rencontrer metteurs en scène, chefs d’orchestres, solistes, et tout savoir sur les spectacles de la saison 14-15.

Rencontre avec Paolo Carignani, Vincent Boussard et Christian Lacroix

La Vie parisienne Rencontre avec Claude Schnitzler et Waut Koeken LIBRAIRIE KLéBER Salle Blanche ve 12 décembre 18 h 30 > Pour connaître les dates des prochaines rencontres : www.operanationaldurhin.eu

photo jean-luc tanghe

Bertrand d'At nous a quittés Il allait à la rencontre du public pour braver les clichés sur la danse sans pour cela trahir son esprit. Transmettre ! Transmettre la mémoire de ceux qui l’avaient formé… on pense bien sûr particulièrement à Maurice Béjart qu’on a croisé dans cette maison et qui était son grand mentor ; on pense à Lucinda Childs qui est devenue depuis une habituée de l’OnR. Il allait au charbon chaque fois qu’il le fallait, chaque fois qu’on le sollicitait, pour partager sa passion et la transmettre aux plus (ou moins) jeunes. On pense par exemple aux aprèsmidi scolaires Raconte-moi la danse qu’il avait initiées à l’OnR. On se permettait de lui dire parfois « Bertrand, ton discours est un peu compliqué pour les enfants ». Il l’entendait, il rectifiait le tir, cet homme érudit qui avait de l’intérêt pour bien plus que la danse, à l’écoute de ce monde et de ses évolutions. N’est-ce pas lui qui avait entre autres fait rentrer dans ce sérail de danse classique des danseurs de hip hop qui étaient eux aussi venus partager leur culture avec nos danseurs ? N’est-ce pas lui qui avait convié, entre autres, le Nederlands Dans Theater à nous faire fondre en émotion et en larmes par son esprit révolutionnaire ? Et puis il y a le chorégraphe. Et l’emploi du présent nous donnera encore à revivre par ses chorégraphies l’esprit de Bertrand d’At. Parmi celles-ci, son Roméo et Juliette qui a tant tourné. Il y a Le Lac des cygnes, dans lequel il est permis à un garçon d’en aimer un autre. On pense à Mark Pace qu’il devait épouser trois jours après ce 2 juillet dernier où il a tiré sa révérence avec la grâce due à sa passion, celle d’un homme épris du beau. « Je vous aime », disait-il à « ses » danseurs. Croisements • 35


Pas de répit pour la Maîtrise : cette saison ne manque pas de beaux projets ! Avant de nous les présenter, Luciano Bibiloni dresse le bilan de sa première saison à la tête de ses petites têtes blondes.

Virginie Marco : Vous venez de passer votre première saison à la tête des Petits Chanteurs de Strasbourg - Maîtrise de l’OnR. Quel est votre bilan ? Luciano Bibiloni : Je suis ravi de la saison que nous avons passée ensemble. Ces petits chanteurs sont d’un positif incroyable et d’un enthousiasme à toute épreuve. Vous le savez, à chaque fin de saison les maîtrisiens passent des auditions pour continuer l’aventure. C’est l’occasion pour faire ensemble un bilan et nous sommes tous d’accord pour dire que ce fût une saison extraordinaire, avec beaucoup de variété de projets dans un rythme soutenu mais entraînant. Le public, à chaque fois qu’on le rencontre, recharge nos batteries avec son accueil chaleureux et nous fait des retours extrêmement flatteurs ; il est comme un miroir qui nous permet de mieux nous connaître et de mieux saisir la valeur de l’investissement semaine après semaine.

deux pays partageront un temps de résidence qui dépasse la seule préparation du spectacle. Ce sera l’occasion de réfléchir à l’Europe et de la vivre, en la partageant. Au mois de décembre 2014, nous rencontrerons notre public à la Cathédrale de Strasbourg pour un Messie de Händel, qui sera inoubliable tellement il y a de l’enthousiasme déjà chez les maîtrisiens. Nous aurons un orchestre d’instruments anciens formé par les meilleurs musiciens spécialistes du genre ; des chœurs amis de haut niveau seront de la partie pour articuler la pièce et générer des masses sonores à la dimension du lieu de concert. Mais nous fêterons aussi Noël à l’Opéra, avec un apéritif concert le 20 décembre, avec des chants du monde entier, et mis en scène. On ne chômera pas non plus en 2015 car nous avons également prévu des créations, de la musique pour voix égales avec orchestre de Messiaen et un Requiem de Berlin de Kurt Weill, par le chœur d’hommes de la Maîtrise qui se développe de manière exponentielle. La prochaine saison sera aussi un tremplin vers l’avenir, avec des activités périscolaires animées par l’équipe pédagogique de la Maîtrise dans différentes écoles à proximité de l’Opéra.

de chœurs

V. M. : Comment vous sentez-vous en Alsace ? L. B. : Chanceux ! à l’Opéra mais aussi dans la rue, dans mon quartier d’adoption à Strasbourg et partout où l’on va en Alsace avec la Maîtrise, le contact est très ouvert et avenant. On m’avait dit que les Alsaciens pouvaient être plus réservés, mais il n’en est rien ! Et ce qui me plaît, en Alsace en général et à Strasbourg en particulier, c’est cette sensibilité musicale très poussée. On sent un amour pour la musique qui est partagé aussi bien sur la scène que côté public. V. M. : Quels seront les temps forts de la saison 2014-2015 ? L. B. : Dès le mois de novembre, la Maîtrise sera sur la scène de l’Opéra à Strasbourg avec l’oratorio mis en scène 1918, l’homme qui titubait dans la guerre d’Isabelle Aboulker. Ce spectacle sera coproduit avec une maîtrise d’outre-rhin, celle de l’Opéra de Fribourg-en-Brisgau. S’inscrivant dans le cadre des commémorations de la Grande Guerre, les maîtrisiens des 36 • Croisements • La Maîtrise

V. M. : Pensez-vous que la Maîtrise suscite des vocations auprès de nos jeunes chanteurs ? Lesquelles ? L. B. : Que nos petits chanteurs deviennent un jour des musiciens professionnels ou pas, le développement de la motivation, de l’engagement, de l’investissement, est quelque chose de précieux et qui change leur vie. On le voit bien chez les « anciens » petits chanteurs, leur passage dans le chœur leur a permis d’être plus enthousiastes dans tout ce qu’ils entreprennent. Enfin, tout cela arrive grâce au plaisir que la musique octroie, le plaisir de la partager dans un groupe curieux et motivé, une espèce de cercle vertueux où la discipline de travail devient le plaisir du travail bien fait, le dépassement de soi aidés par l’adrénaline des concerts, les expériences du chant soliste et l’échange avec le public.

photo nis&for

des enfants


> Née en 1992 à Paris, elle étudie la danse au CNR de Boulogne-Billancourt avec pour professeur principal Dominique Franchetti. Elle est admise au CNSMD de Lyon en 2009 puis intègre le Jeune Ballet. Elle y interprète Next de Julien Lestel ainsi que Flora de Georgio Mancini. Parallèlement, Susie collabore régulièrement avec Claudette Scouarnec. Elle danse dans Les Variations Goldberg de Heinz Spoerli avec le Ballet de l’OnR en 2012, Dans les pas de Noureev au Ballet du Capitole en 2013 avec Kader Belarbi, puis Die Schöpfung de Uwe Sholz avec le Ballet de l’OnR en 2014. Elle intègre la compagnie en septembre 2014.

> anna ishii Née à Hiroshima, au Japon, elle commence la danse à 6 ans. Elle remporte son premier concours à 11 ans (médaille d’or du Youth America Grand Prix), en 2008, elle est demi-finaliste pour le Prix de Lausanne. La même année, elle gagne une bourse pour la New Zealand School of Dance où elle se forme de 2009 à 2010. En 2010, elle intègre le West Australian Ballet en tant qu’étudiante et y interprète l’Oiseau bleu dans La Belle au bois dormant par Marcia Haydee. Elle est alors engagée par la compagnie et danse dans Le Lac des cygnes, Cendrillon de Jayne Smeulders et la Sérénade de George Balanchine. Elle rejoint le Ballet de lʼOnR en janvier 2014.

> Marwik Schmitt Né en 1992 à Francfort sur le Main, il débute sa formation (techniques classique, contemporaine et improvisation) avec Pascale Michelet, Martin Schmitt et Alain Astié. Curieux et ouvert sur les différents styles, il participe à une création au théâtre Tumen Ekh à Ulan-Bator avant de rejoindre le Conservatoire National Supérieur de Danse de Lyon. Il intègre le jeune ballet en 2013 et y danse des pièces de Julien Ficely et Giorgio Mancini pour qui il travaillera lors dʼune production au Luxembourg en juin 2014. Il rejoint Ballet de lʼOnR en septembre 2014.

> Dane Holland Dane commence la danse à 7 ans à Oamaru en Nouvelle-Zélande. Pendant ses 3 années de formation à la New Zealand School of Dance, il danse dans Le Jardin aux lilas d’Antony Tudor, Company B de Paul Taylor et Un Ballo de Jiří Kylián. Il travaille aussi avec le West Australian Ballet et participe aux Pinocchio et Casse-Noisette d’Ivan Cavallari. Avec le WAB, il interprète aussi le rôle de Lenski dans Eugène Oneguine de John Cranko.

>>

Marwick Schmitt : photo Costin Radu • calendrier : photos nis&for

>>

4 nouveaux danseurs dans la compagnie

> Susie Buisson

dansez 2015 ! Vivez votre année au rythme des danseurs du Ballet du Rhin et soutenez-les en vous procurant sans tarder leur calendrier 2015 ! En vente dans les billetteries de l’Opéra à Strasbourg, du Théâtre municipal de Colmar et de La Filature à Mulhouse – 12 €


c i n t r i e r

Une profession mystérieuse, peu connue du grand public. Une profession pourtant au cœur de la création du spectacle : de la construction des décors aux représentations sur scène, il est là, force de calculs et de propositions : le cintrier.

voyage dans la mine du ciel

M.A. : Quelles sont les qualités du cintrier ? M.T. : La rigueur, le sens de l’anticipation, l’organisation et le goût du travail en équipe.

Son rôle : se soucier de tout ce qui relève de l’accroche ou du levage. Pour cela, il travaille en relation avec le bureau d’études, à partir des plans, pendant la construction des décors, afin de préparer au mieux leur implantation, tout en choisissant les technologies les mieux adaptées. Avec la serrurerie, il décide de quel procédé utiliser, de quel type d’accroche fabriquer, en fonction des charges à soulever. Le cintrier travaille pour différents services : machinerie, sono, lumières, accessoires. Il veille au respect des normes de sécurité, aux « règles de l’art ». Cela veut dire qu’il compose, s’adapte, contrôle, évalue, et son meilleur allié pour cela se nomme le bon sens. L’Opéra national du Rhin emploie une équipe de huit cintriers.

Le cintrier est le premier arrivé et le dernier parti. On lui demande de savoir travailler en hauteur… Non seulement il aime cette hauteur, mais en plus elle lui permet d’être au niveau du décor, d’évaluer et d’anticiper davantage, autant en montage qu’en spectacle, les problèmes, les risques potentiels. Il voit tout ce qu’on ne voit pas de la scène. Et cela lui permet d’intervenir très vite. Car la vitesse est nécessaire. Pour passer d’un effet à un autre, d’un changement à un autre, c’est un véritable sport. Il tire sur ses bras, sur ses épaules, sur ses jambes. Ce travail est d’autant plus harassant qu’à l’Opéra à Strasbourg les conditions sont difficiles. Le théâtre possède en effet un équipement datant des années 1940, rien n’y est automatique, tous les changements, déplacements sont manuels. Charger une perche demande du souffle et de la force ! Mais aussi du rythme et de la mémoire. Martin, comme toute l’équipe, vit son métier avec passion et fierté. à 10 mètres du sol pendant des journées entières, il se sent parfois déconnecté du monde réel, en hiver, surtout, lorsqu’il ne voit pas le jour. Et dans les cintres l’éclairage reste discret, pour ne pas déranger les réglages lumières. Comme un chat sur son arbre, le cintrier est perché pendant des heures, cloitré dans la pénombre. Parfois les répétitions sont longues et son activité réduite : alors il attend, discrètement, mais prêt à intervenir, si le metteur en scène le décide. Là-haut on découvre un monde à part, qui pourrait se suffire à luimême. Et cette intimité, cette autarcie, créent un esprit d’équipe. Comme sur un bateau. Ceux qui travaillent là-haut se comprennent sans se parler. Leurs gestes sont si précis, si parfaits, si uniques, qu’ils les répètent, se les transmettent, sans besoin de les expliquer. Cette complicité permet aussi de supporter la pression : du non droit à l’erreur, de la nécessité de réactivité absolue. Et de la carence en vitamine D !

Après avoir travaillé pendant plusieurs saisons comme intermittent du spectacle à l’Opéra, Martin Towler est engagé comme machiniste permanent. En préparant un appareil à vol sur Falstaff en 2004, il a une véritable révélation. Et lorsqu’un peu plus tard on lui demande de « monter aux cintres », il a le sentiment que sa carrière se dessine. Depuis, il navigue en hauteur et lorsqu’il raconte son métier, il est intarissable. Mélanie Aron: Comment devient-on cintrier ? Martin Towler : Il n’existe pas de formation spécifique. Le cintrier est d’abord un machiniste, à qui un jour, on demande de monter. Suivent 10 jours de formation spécifique à l’autorisation de conduite des appareils de levage. Le cintrier est un être à part. Il est au cœur de l’espace scénique. On devient cintrier par volonté d’être « làhaut ». C’est une spécialité qui requiert une bonne connaissance de la législation, des normes, des règles de l’art et du « bon sens ». Plus qu’un métier, il s’agit d’une passion. Pour rien au monde je ne voudrais être ailleurs. Et quand je ne suis pas ici, je suis sur un bateau en Bretagne. Car du théâtre au bateau, il n’y a qu’un pas. 38 • Croisements • Profession Cintrier

photo jean-luc tanghe

profession


Quelques définitions > Cintre : il correspond au dessus d’un théâtre équipé à l’Italienne. Il est à la fois l’endroit situé sous la voûte du bâtiment et le point de convergence de tous les fils servant à la manœuvre des décors équipés en hauteur. à Strasbourg, il peut supporter 17 tonnes d’éléments de décors ou de lumières. Il est composé de 85 porteuses d’une capacité moyenne d’environ 200 kg charge répartie. > Charger : se dit d’un élément de décor que l’on descend des cintres vers le plateau, donc de haut en bas. Le contraire de charger est appuyer. > Fil : c’est le mot qui, au théâtre, remplace corde ; si par inadvertance on dit corde au lieu de fil, on dit le mot fatal et on est mis à l’amende. Le fil, traditionnellement de chanvre, est aujourd’hui remplacé par le câble métallique.

Le gril technique sous la charpente du théâtre.

> Gril : plancher à claire-voie qui s’étend au-dessus de la scène, sur toute sa surface. Il sert pour l’équipement des décors et pour l’éclairage. > Porteuse : tube métallique suspendu au gril, dont on règle la hauteur depuis les cintres, et qui est destiné à porter des éléments de décor ou du matériel d’éclairage.

rigoletto : photo alain kaiser, onr, 2013-2014 • cintres : photos onr

Un exemple spécifique : le vol Impressionnant, poétique ou audacieux, le vol donne l’illusion qu’un personnage ou un objet vole dans l’espace scénique. Il est mis en place grâce à un système composé de fils et de poulies, à partir des cintres. Si son effet est vertigineux, sa mise en place et sa réalisation nécessitent une étude d’évaluation des risques très précise. Au-delà de ses aspects techniques, le vol est particulièrement affectionné par le cintrier. En effet, il en assure la conception, la réalisation et la mise en œuvre. Et cette mise en œuvre possède une dimension humaine de premier ordre. « L’une des meilleures parties de notre boulot,  une relation humaine fine s’établit entre le chanteur et nous, car la confiance est nécessaire, sans quoi la réussite de l’effet est impossible » dit Martin, avec plein de lumières dans les yeux.

Une chanteuse suspendue dans les airs sur une balancelle (vol dans la production de Rigoletto, 2013-2014)

Martin manipule le fil qui entraîne le contrepoids de la porteuse.

Vue de la scène depuis les cintres. Un pont triangulaire accroché au gril permet de supporter une charge plus importante qu'une porteuse.


la presse en parle La Colombe Le Pauvre Matelot La promotion 2014 de l’Opéra Studio fait preuve d’enthousiasme, de discipline et d’un louable effort de diction. François Lafon

Magnifique travail scénique de Stéphane Vérité. D’un point de vue esthétique, la réussite est parfaite. Claude Schnitzler dirigeant l’OPS se montre très précis dans les dosages de timbres. Jacques Bonnaure

La maestria dans l’usage de la vidéo est indéniable, et avec son complice Romain Sosso, le metteur en scène domine cet outil. Laurent Bury

La découverte de la soirée fut la soprano slovène Kristina Bitenc, l’épouse dans Le Pauvre Matelot, une chanteuse dont on entendra sûrement parler. Georg Rudiger

C’est l’opposition de deux univers parfaitement dissemblables qui contribue le plus puissamment à l’attrait exercé par ce spectacle où à la légèreté de la comédie succède à l’implacable déroulement de la tragédie.

Die Schöpfung

Christian Fruchart

Une mise en scène sobre et retenue, dans une pénombre étouffante, fait de cet opéra de chambre une petite merveille d’efficacité dramatique. Jacques Weil

Encore ! En sortant de l’Opéra de Strasbourg, on avait envie de prolonger les vivats et de revoir le Ballet de l’Opéra national du Rhin triompher dans cette reprise de La Création. PHILIPPE NOISETTE

Cette double production, présentée en Alsace et à Paris, aurait toute sa place aussi de l’autre côté du Rhin et pourrait y déployer ses charmes rafraîchissants du théâtre musical. Frieder Reininghaus

L’héritage de l’admirable chorégraphe est toujours bien vivant, et on se plaît à imaginer que pour La Création, les danseurs du Ballet du Rhin sont les acrobates de Dieu. On ne peut que saluer bien bas la phénoménale performance des 34 interprètes du Ballet de l’Opéra national du Rhin. GILLES HAUBENSACK

Disons-le tout de suite, le spectacle qui réunissait danseurs, chanteurs et musiciens fut impressionnant. Et l’esprit de l’œuvre de Haydn était tout à fait rendu. Il y a même une perle : la jeune Marine Garcia qui brille aussi bien par sa technique que par sa présence sur scène. EMMANUeLE RÜEGGER

40 • Croisements • La presse en parle

de haut en bas : photo alain kaiser • photo jean-luc tanghe • photo alain kaiser

VENERANDA PALADINO


Doctor Atomic

Le 23 juin 2014, le Syndicat national de la critique a attribué à Bruno de Lavenère et à Étienne Guiol le Prix de la création des meilleurs éléments scéniques pour la création française de Doctor Atomic à l’OnR.

Pour assurer la réussite de l’entreprise, l’OnR n’a pas lésiné sur les moyens. Gage d’authenticité, c’est Lucinda Childs, la chorégraphe de la création, qui a été chargée de la mise en scène. Une prestation dominée et aboutie. Michel Thomé

Dans cette excellente distribution, Dietrich Henschel incarne un Oppenheimer à la responsabilité si lourde qu’il doute de lui-même, tandis que Robert Bork affiche une voix de stentor. Marc Munch

Le débat est partout dans ce livret servi par un chant clair et lisible qui ne renie pas l’émotion (distribution très homogène), mais qui prend tout son poids dans l’accompagnement impliqué d’un orchestre articulé avec une précision acide par Patrick Davin. Michel Hambersin

Finale d’une beauté saisissante : déluge de feu, cris vindicatifs, voix d’outre-tombe et anéantissement total : l’OnR a réussi son pari d’offrir à l’opéra d’Adams un atout de maître, son savoirfaire. Franck Mallet

L’atout maître est la direction d’orchestre : Patrick Davin tend le fil du Doctor Atomic avec une énergie brute qui ne relâche jamais la tension.

Mais quelles images ! Une pluie de symboles chimiques, de figures géométriques, de visages et d’archives en noir et blanc animant, par la grâce de la vidéo d’Étienne Guiol, le noyau de l’atome et le ciel orageux, derrière le décor industriel de Bruno de Lavenère. Benoit Fauchet

Last but not least : les Chœurs préparés avec précision par Sandrine Abello sont d’une rigueur parfaite. Alexander Dick

Relier la démiurgie faustienne au Projet Manhattan, tel est le parti pris de l’illustratif et virtuose défilé d’images qui scande la mise en scène. Marie-Aude Roux

Christian Merlin

Triomphe pour l’OSM et surtout son directeur musical et artistique Patrick Davin qui, par sa lecture rigoureuse transforme la matière symphonique en pure énergie dramatique.

L’OnR réussit une nouvelle fois à réunir un plateau vocal d’une belle homogénéité, dont se détache la vibrante interprétation de Dietrich Henschel dans le rôle de R. Oppenheimer. Florent Coudeyrat

Mehdi Mahdavi

Grâce à d’extraordinaires décors et vidéos, la production strasbourgeoise surclasse la création de 2005 dans un premier acte de toute beauté. Laurent Vilarem

Une ingénieuse scénographie de Bruno de Lavenère, la production saisit tel un thriller.

Lucinda Childs signe une mise en scène fidèle de la musique et réussit à mettre en évidence les moments-clés de chaque scène. Musicalement également la production vaut le voyage avec un OSM sous la direction musicale souveraine de Patrick Davin. Georg Rudiger

Incarnation grandiose de Dietrich Henschel dans le rôle d’Oppenheimer. Dagmar Guilcher

Bruno Serrou

Une histoire explosive, mise en scène avec justesse et délicatesse par Lucinda Childs.

photos alain kaiser

Anne Suply

C’est la maîtrise confondante de Lucinda Childs qui est à l’œuvre et c’est peu dire que l’essentiel de l’exceptionnelle réussite de cette production repose sur son travail, ainsi que sur celui d’une équipe particulièrement brillante. Décors, costumes et surtout l’emploi inventif des moyens vidéo sont exemplaires. Laurent Barthel

L’efficacité du décor unique, et la pertinence de la partie vidéo essentielle dans cette production aboutissent à un résultat aussi fluide que convaincant. Alain Cochard

C’est une terrible beauté que nous propose la mise en scène de Lucinda Childs avec l’excellente distribution réunie par l’OnR, cela vibre. Dietrich Henschel a parfaitement fait sien le rôle d’Oppenheimer. Le résultat est à la hauteur des espérances, et l’on peut dire que l’Opéra du Rhin a réussi cette création française. Laurent Bury

La presse en parle • Croisements • 41


Qui vous prépare de grands moments

Arts de la table Luminaires Tissus Papiers peints Petits mobiliers Textiles Objets décoratifs Idées cadéaux!

gourmands ?

(Iittala)

Kieffer, cultivez l’art du savoir recevoir !

Événements professionnels et particuliers, réceptions et lieux raffinés, coffrets repas …

5 quai des Pêcheurs, 67000 Strasbourg · Mardi – samedi 10h – 18h30 · Tél. 03 88 22 08 03 Visitez notre boutique en ligne www.lamaisonscandinave.fr

10 rue du Col-Vert Z.A. Vogelau 67300 Schiltigheim Tél. 03 88 83 45 45 Fax 03 88 83 49 48 info@kieffer-traiteur.com

www.kieffer-traiteur.com

NO

Annie Voegel

LE PONT DES VOSGES R E S TA U R A N T

Cuisine chaude jusqu’à 24 h Fermé le dimanche 15, quai Koch - 67000 Strasbourg Tél. 03 88 36 47 75 - Fax : 03 88 25 16 85 E-mail : pontdesvosges@orange.fr

U

A VE

U

NOUVEAU BOUCHON EXCLUSIF pour une ouverture en un seul geste


Calendrier septembre ve 26  Rencontre Quai Ouest sa 27  Quai Ouest ma 30  Quai Ouest

Strasbourg Opéra Strasbourg Opéra Strasbourg Opéra

18 h 30 20 h 20 h

octobre je 02  Quai Ouest Strasbourg Opéra Colmar Théâtre ma 07  Cher Richard ! ve 10  Quai Ouest Mulhouse Filature Ccn je 16  Université de la danse Nó Mulhouse Strasbourg Opéra sa 18  Cher Richard ! je 23  Rencontre L'Amico Fritz Strasbourg Kléber ve 24  L'Amico Fritz Strasbourg Opéra di 26  L'Amico Fritz Strasbourg Opéra ma 28  L'Amico Fritz Strasbourg Opéra Mulhouse Filature ve 31  Répétition publique Nó

20 h 12 h 30 20 h 19 h 11 h 18 h 30 20 h 15 h 20 h 18 h 30

novembre ma 04  Récital Sophie Karthäuser Strasbourg Opéra Colmar Théâtre me 05  Grétry forever me 05  L'Amico Fritz Strasbourg Opéra Filature je 06  Nó Mulhouse ve 07  L'Amico Fritz Strasbourg Opéra Filature ve 07  Nó Mulhouse Strasbourg Opéra sa 08  Grétry forever Filature sa 08  Nó Mulhouse Strasbourg Opéra ma 11  1918, l'Homme qui titubait dans la guerre Strasbourg US me 12  Danse à l'université Nó Strasbourg Opéra je 13  Dîner sur scène Strasbourg Opéra ve 14  Dîner sur scène Strasbourg Opéra sa 15  Dîner sur scène Strasbourg Opéra je 20  Nó Strasbourg Opéra ve 21  Nó ve 21  L'Amico Fritz Mulhouse Filature Strasbourg Opéra sa 22  Nó di 23  L'Amico Fritz Mulhouse Filature Strasbourg Opéra di 23  Nó Strasbourg Opéra lu 24  Nó Colmar Théâtre sa 29  Nó Colmar Théâtre di 30  Nó

20 h 12 h 30 20 h 20 h 20 h 20 h 11 h 20 h 18 h 18 h 30 19 h 15 19 h 15 19 h 15 20 h 20 h 20 h 20 h 15 h 15 h 20 h 20 h 15 h

décembre ve 12  Rencontre Vie parisienne Strasbourg Kléber sa 13  La Vie parisienne Strasbourg Opéra lu 15  La Vie parisienne Strasbourg Opéra Mulhouse Ccn me 17  Coulisses studio La Strada Ccn je 18  Université de la danse La Strada Mulhouse Colmar Théâtre ve 19  La Belle au bois dormant Strasbourg Opéra sa 20  Concert de Noël Strasbourg Opéra sa 20  Récital Anne Sofie von Otter di 21  La Vie parisienne Strasbourg Opéra ma 23  La Vie parisienne Strasbourg Opéra ve 26  La Vie parisienne Strasbourg Opéra sa 27  La Vie parisienne Strasbourg Opéra ma 30  La Vie parisienne Strasbourg Opéra CCN : Centre chorégraphique national, 38 Passage du Théâtre, Mulhouse Kléber : Librairie Kléber, Salle Blanche, 1 rue des Francs-Bourgeois, Strasbourg US : Université de Strasbourg, Le Portique, 14 rue René Descartes, Strasbourg

18 h 30 20 h 20 h 18 h 19 h 20 h 11 h 20 h 15 h 20 h 17 h 20 h 20 h

Opéra Danse Récitals Jeune public Concerts & concerts apéritifs  événementiel     

Informations communiquées sous réserve de modifications

Calendrier • Croisements • 43


Le Bord de mer à Palavas, 1854, Musée Fabre Montpellier, © Musée Fabre – Montpellier Agglomération

FONDATION BEYELER 7. 9. 2014 – 18. 1. 2015 RIEHEN / BÂLE


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.